UNIVERSITE DE PARIS 1
PANTHEON SORBONNE
U.E.R. D'HISTOIRE. CENTRE DE RECHERCHES AFRICAINES.
LE COMMERCE DES SUCRES EN FRANCE. 1763-1793
POSITIONS ET CONTRADICTIONS.
Thèse de Doctorat de 3è Cycle
Présenté par KOUAME Aka
Sous la Direction de Mr le Professeur Jean DEVISSE
•
PARIS, JUIN
1983.
...,------- --
REMERCIEMENTS
Un travail de thèse se si tue presque toujou~s au ca.:rrefour
d'amitiés et d'influences diverses. celui-ci n'échappe pas à la règle. Aussi,
loi. de sacrifier an rite~ c'est de tout coeur que nous formulons ces remer-
ciements à tous ceux qui, de près ou de loin, nous ont aidé et conseillé
dans cette entreprise.
Nous exprimons en premier lieu notre profonde grati tude au Pro-
fesseur Jean DEVISSE. Ses encouragements et surtout sa disponibilité ont
grandement facilité nos recherches en vue de l'élaboration de ce travail. Nous
av.ons, de pjis, trouvé dans ses critiques et dans Bes conseils, matière à
réflexion, remises en cause constantes et approfondissements.
. .".
Nous avons aussi de vives obligations envers nos amis du Centre
de Recherches africaines de l'Uni versi té--de Paris l Panthéon-So~bonne.Ce2:
tains nous ont soutenu de leur expérience. D'autres nous ont à1.d~ de bonne
. grâce à ré80udre des problèmes - au premier rang desquelsj. Joseph ~Jb ;'
quJ. a .roumi les rames de papiers et Doodoo L..UIZA EDINDALI, qui a assuré la
dac~graph1e et la. mise en forme du traVa1l."',~':~-;
Tous le8 étudiants cODIlaissent l ' amabili té et la ,stimulante e~ficaoit~....~:.,
Danièle lŒESEGHELID et de Liliane DABO NI AN au séorétariat
et à.. la biblioth~ .
que du Centre. Nous tenons à leur manifester ici toutes nos amitiés.'
Comment oublier aussi l'aide amicale de Kouassi KOUAME Germain,
Cissé ALLASSANE et CISSE Idrlss, nos amis de la Ci té internationale uni ver-
sitaire de Paris t Ils ont très aimablement accepté de relire certains chapi-
tres de cette thèse avant leur mise en forme d~finitive. Qu'ils en soient vi-
PI.
i
vement remerciés.
_.,
.
Nous avons enfin de très vives obligations envers nos parents',pt)ur
les' sacrifices consentis. Nous sommes reconnaissant envers nos frères pour
- _ . - - - - - "
leur soutien financier durant cette année uni versi taire.
Paris, le 2 Mai 1983.
/'
3
,
CONVENTIONS PRELD!INAIRES
~
J
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-
f
1
1. mUTES MONETAIRES ET DE MESURES.
1
i!
1. t.
liVre tournois. Unité de compte régI er.:en ta.i re u ti::"i sée da~1S
t
tout le Roy:aume (1) depuis 1667 lUSOU'
v
_
à la R~volut':'on. Elle
l
vaut 2C sous et le sol, 12 deniers. A 13 fin d'.l règne de
r-
Louis XV et sous le règne de Louis XVI, '.ln Louis d'or v2lait
l
1
24 l.t. et un écu cu Louis d'argent 3 l.t. (Cf. ~2rcel YARIC~,
t
;1i
unité de compte
livre
e=?loy~e aux !les jUSqU'2 l'i~troèucticn du
1
fr~~c, en 1826. C'est 12 liv7e coloni~le. Elle v~lait,d'après
t
1
Christian Scm:A.ICE2CU:tG (2),13 sous 4 dezü.trtt en ::Jcnnaie de
1
compte métropolitaine (l.t.).
li,;;:~!I,,,..•.
Afin d'éviter toute confusicn, nous utilisons l'abréviation
lt pour l'u~~té de compte ~étro?olitaine, tandis que nous
écrivons entièrement l~vre pour· l'unité de compte ooloniale
ou livre coloniale.
1. 'B.
livre-poids. Unit~ de poids employée tant aux t1es qu'en
1~
mé-:,.:
1•....
tropo1e, jusqu'à. l'int:::-oduction du système métriq-lle, en CCllll1..S-2-S-.-----r
Les poids et mesures varient selon les lieux (3). Mais les
1•.
colonies françaises ont employé ré~lementairement les poids
~.
et mesures de Paris, dès 1660.
1
M
La l.b., mesure de Paris, valait 0,4895 kilogrammes, ou si on
J
préfère, 0,489 kilogrsmmes. Le quintal (ou cent pesant), mesu-
:1\\;;;);,
re de Paris, valai t 100 lb soi t 46,9506 kg.
'
1
1
!
1
La valeur n'est cependê.nt pas pê.rtout la même. La livre du Hainault valait
12 sous 6 demes ; oelle de ?l2.I1ère et de ::"'Artois 25 seus. Cf'. Larcel K&.~ICr~
Dictionnaire des insti tutions de la Fré'.nce 2.UX XVII8 et l'fnE Si ècles, P .33E.
S~:~~ŒüURG (C.), La crise du s:stè~e e~c12vafiste 1s35-1e47, p.9.
Elle valait 0,4941 kg à :2crde2.ux, C,4Ce4 kc 3. r·:2.rseille ,~-t, 2e~è;le-t-il,
°, 4A92
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à ~antes
Cf
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a.
poiè.s et Jlesures du ce::J~erce co::'oni.el 2.UX XVII~ ê::t TTIIE; 2i~':1::-,II, L-: ??"T>
1:°224, Tome LXI, 3è Trimestre 1974, ,?34~-3rS5, cf. _~.3~C, 3(":.
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4
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1
i
1
La velte
mesure de capacit~. El~e vaut 7,4505 litres è>, P sri set,
!
semble-t-il, 7, 61 -~s aux îles
Le pot
---::1
mesure dé capacîtg-~1 pet, mesure de Faris, valait
1
1,8626 litres (2).
t
La pinte
Elle valait à Paris et aux îles 0,9313 ~itres (3).
~.
1
Le gallon
C'est la seule exception à l'emploi des Tesures pErisien-
!t
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nes. Le gallon est une ~esure de capacité ar.glaise. I l
~f:
aurait servi da.!1S l'eJQortation de !!lélssse et de rhUl:! de
1
1
Saint-Domingue aux colonies britanniques d'~ùérique du
1
Nord. Un gallon de vin anglais éçuivaut à 3,7354 litres.
t
f
1
1
2. DEFDrrTION DES TEm:ES EMPLOYES.
l
\\,:::;i
Carré(ca-~eau,
."~:7;:~t
ou pièce)
unité de mesure des superficies de terre cul t i -
t
Pl~::~:~:::~e~·~4:~i::_::m~~~:~oupe, 1.
tmain
2927 h:,:;: .~
Jardin
Atelier
•.
ensemble de tous les esclaves attachés à une habi tation":~/
l
L'atelier es t di visé selon la force des esclaves t en gX~d.<).:;·
i
i
et en peU t. Le gXand atelier est formé par les esclaves
'.>.f":
Î
qui sont assez forts pour supporter tous les travaux (les ,}.: :~~>,
J
gXOs travaux en particulier) ; l-e' peti t atelier est for-
)~ ;,.;~
i
~
1
mé par les esclaves faibles.,~.
l
!:;;:}i
Habitation
Ensemble d'hommes, de bêtes et de bâtiments fixés sur une
f
propriété (4).
k
~.•
f.
~abitant
Le gr~~d propriétaire terrien. Fl~s particulièrement les su-
criers qui disposent d'~n vaste iornaine. Ils ont le nom de
grands blanc~._Ç~~~_t ce grand blanc ou ::'abi ta."1t que nous
appelons dans ce travail, colon.
(1) Ec CtTSKER (John J.), 0:'. cit., p.361.
1 velte v2.1ai.t 7,5226IitrE-s à :3orde2.u:c, 6 li.tre~ ~ :'~2:te~ ?t 7,54 lit:,:,,'?;:
Narseille.
(2) Il valait 2 litres 2. ;'2ntes, 2,2642 litres J. :2ordcux
Cf. Mc CUS1~ (John J.), ibiderrc, p.361.
(3) Elle valait 1 litre 2 Xentes.
.~·,.· .....i
l
__(,-4P.4-Ll>:tITInNE LACOU'I'ITRE (H.), -Précis sur la ca;n-:ie et S'Jr .... e.::
~xtr:,iT'è:
·:t
. ,., ...{
le sel essentiel, p.326.
~'ADXT;7.
5
Cabrouet
charette.
.
. ~
Asiento
· la chose assise, co~venue. C'est un contrat de droit public
entre le Roi d-'~spa.gr.e et u::. contractant (un particulier
ou'une compagnie), pour :8, livraison d'un no~ère prÉcis de
de Noirs aux colonies espagnoles. Car le co~~erce ~es
Noirs n'était ras libre; i l tt,ü: un é!lor:.o~ole d'Etat, con-
trôlé, en principe, par la Casa de contracion, fonctionnant
à Séville.
L'asiento comporte les obligations, acconpagr~ées le plus
souvent d'un monopole, et le ter.œe fixé (1).
Interlope
commerce illégal fait avec les étrangers. Contrebande.
3. ABREVIATIONS.
'AN
·
•
Archives Nationales de Fr~~ce, FUe des Francs-bo~geois.
RFHOM
·• Revue française d'Histoire d"Outre Mer.
BSHM
• -
· '"' Bulletin de la Société d'Histoire de la Martinique.
BSHG
:
~lletin de la Société d'Histoire de la Guadeloupe.
'- ~"
.,; ..
(1) n:s5CRMr.PS (R.), Histoire de la traite des noirs de l'Antiouité ~, n.os
p. 50.
_ _._~_b,
i
--~ 1
(\\
6
INTRODUCTION
L'histoire de l'économie sucrière remonte à quelques milliers
d'années avant l'ère chrétienne. La canne à sucre serait cultivée en Chine
dès la plus haute Antiquité et les Chinois connaissaient alors l'art d'en
extraire le sucre (1). Cette canne. riche en sucre (canne noble) serait
elle-même originaire des environs de la ~ouvelle G~inée. Elle serait in-
troduite sur le continent asiatique: cate septe~trionale du Eengale ~t
sud de la Chine, aux environs du cinquième siècle avant Jésus-Christ (2).
Sans vouloir retracer ici, dar:s le détail, butes les ~tapes de
sa diffusion dans le monde, il nous paratt nécessaire de souligner le raIe
des Arabes dans son expansion de l'Extr~me.orient en Occident.
Ils l'introduisent d'abord en Syrie et en Palestine, puis, au gré de l'i5-
làmisation,. en Egypte, au Maroc, en Espagne et au Portugal. Ils sont alors
' ' \\
'l
Zfll:ayés par les Européens qui.Ia__: diffusent à travers J 'At~antique.
aux Açores,
pratique de
est fabriqué, un avantage considérab.le sur la production médi terranéenne.
~~aise BSSOMBA montre que le mouvement ~n'faveur de l'Atlantique au XVê
siècle, marque une rupture avec l'époque médi terranéenne (3). En 1520,. la
seule !le portugaise de SaS Tomé compte plus de 60 manufactures de sucre,
employant~JOO esclaves et sa production évaluée à 150 000 arobes (4),
soit 4 000 000 lb.
~ais c'ést surtout après la découverte du Nouveau ~onde que la
" ....
"
DUTP.Cl7E LACOUTURE (M.), Précis sur la car~e à suc~e et sur les moyens d'er:
extraire le sel essentiel, p.2 A!'TADXI 77.
BERTI~ (J.), H~rJL~INQUER (J.J.), KEUL (~.), R~7DLES (W.C.L.), At~~s des cul-
tures vivrières, Paris, r:Outon, 1971, carte: canne ~ su~re.
ESSOKBA (B.), Sucre méditerrenéen, s~c~e 2.tla:,ti rJ.u€
et ::'e ::JE'"l'C:-.-& d'...: nc:r-c'
européen au XVè et XVIè si~cles, Th~se de 3è Cycle d'~i2tcire, P~:r-i~ l, 1921,
XII, 636 p.
DUTROrE LACOUTURE (M.), op. cit."
p.15.
1 arobe = 32 lb.
7
production sucrière prend définitive~e~t uncaractère industriel et comoer-
1
cial, lourd de conséquences historiques pour l'Afrique. Anglais, Français,
f
...'-----
, ,!
et n9llandais, tentés par l'appât du gain, ffiais aussi par réaction contre
-
.'"~
-
~
'i
le partage du monde par le pape Alexandre VI :3orgia entre le Portugal et
l'Espagne, entrent en ligne pour s'eoparer des zones négligées. Dans le
1
nouveau Monde, l'incapacité à~ ~e trouve l'Es?a~e de ~e~tre en v~leur tou~
1
tes ses terres (1) ou de les protéger Qilitairement . de. p~êterit1ônB ~~
t
gères, facilite leur implantation.
r
C'est Richelieu qui favorise les premiers essais français dans les
Indes Occidentales. L'histoire des origines des colonies françaises des
Iles du Vent remonte communément à l'année 1625 ou 1626 (2), date o~ le
normand Pierre BELAIN D'ESNAMIroC, aidé d'une poignée de compagnons, fonde
une colonie sur une portion du territoire de Saint-christophe.
La colonisation de la cSte de Sâint-Domingue est un cas particulier ; elle
a été le fait de bandes d'aventuriers dès 1630. La table chronologique des
conqu3tes françaises s'établit comme suit (3)
..~~..~ _.-
1625.:.5aint-Christophe
- - ' , - .:":)~~'~7"
1630 : Présence de bandes d'aventuriers français à la Tortue (mi."
.
_.
..~
de Saint-ilomingue). Elle est prise, le 31 Août 1640, par surprise, par l'of;"
..
. ~ -~~,~,~~",!!li;:~_i!l~..- - f
ficier de méÏrine le VASSEUR, à la demande des aventuriers français. Il a été<,(.E··'
';":'.""
chargé de cette opération par le gouverneur de Saint-Christophe, Robert de
.. .t.'
POINCY (4).
28 Juin 1635 : Guadeloupé, par Charles de l'OLIVE.
Septembre 1635 : Martinique, par d'ESNAMEUC.
1643 : Sainte-Lucie, tle alors abandonnée par les Anglais.
--'f-6-48-~ Sain t-f!artir..
1650
Grenade.
1651
Sainte-Croix.
"'.
(1) A la fin du siècle, les Ba.."1a.'TIas et les "Peti tes A,,-tille,," ::::::r.t vides. Dans la
granàe tle d'Eispaniola, la fubre Saic.t ::Jor.ü!:.gue, lé, ville de Sahto Dominf"C'
dans le sud, est le seul secteur actif, le reste de l'rIe est à peu près dé:
laissé. Cf. DE"lEZE (E.) Antilles, :-;U':2...'''le:::, 12 :::er des Caraibes de 1492 à 1729
Pp. 82-E3.
(2) La date de 1625 est donn~e par Lucier. P~TRAUD, l'esc12vage aux Antilles fran
çaises avant 1789, d'après les doc~~ents insditz des ar~nives coloniales, p.1(
Celle de 1626, par Charles FROSTI~, Les révoltes blanches à 32ir.t Domingue au:
XVIlè et XVIllè siècles.
(3) PEYTRAUD (L.), op. cit., pp.10-1'1 •
...._.---'4) .FIlOSTIN(C.. )~.-Op. ci t., p.83.
8
1652
Les Saintes (dépendances de ~~ Guadeloupe).
1653
Marie-Galante (dépendance è'" le:. E2.rtidque) •
..~
La canne à sucre est introdui te très tôt à Hisparli.ola pa.r les
Espagnols. Les dates avancées par les auteurs ne concordent pas toujours.
Trois sont proposée~: 1493 (1), 1494 (2) et 1502 (3). Cela à peu d'impor-
tance. En 1519, 28 sùcréries y fonctionnent déjà (4). La culture de la
canne à sucre prend un essor rapide grâce aux différents colonisateurs.
Elle est introduite au Brésil en 1530 (5). En 1540, arrivent les premiers
esclaves noirs (6). Elle est cultivée en Guyane en 16CC (7), en Guadeloupe
et en Martinique en 1635 (8).
Cependant, jusqu'au milieu du IVIIè siècle, le Erésil demeure le plus gros
producteur de sucre. Les terres vierges produisent tous les 6 mois sans
j
irrigation ni engrais. La superficie du territoire pe~et d'accueillir un
i~~
nombre accru d~·. nolD. qEn 1600, ses 130 plantations-usines e~ploient à elles
l
iq..
seules 70 %des esclaves et exportent 16 000 tonnes de sucre (9).
,',',!
~:
&
Dans les .r1es, la production ne se déve10p_p_e_'.Tr~ment qu' après
.,~:.:::.~ J.
1654,' avec l'arrivée des Hollandais chassés du Brésil. On ne doit sans doute}1';~ ~
:::~.~:::::rf~:::i:::a::C:::~q::'(:~~;n:~:sl;;:sa:~:r:t:i:~~~;:a::.
1 ::., ~~élt 1
rapides progrès effectués après 1654. Ainsi, da.."lS les îles françaises, quand. ,'",'
!
•• c:"
•
1
r
i;
(1) REYNIER (M.), Contribution à l'étude dE la guestion des sucres, p.13.
(2) RlOOTARD (M.), La canne à sucre, sa culture, son import~nce économioue, p.S.
;y·l
(3) DUTRONE LAOOUTURE (r-: •.) , op. cit., p.16.
~.
(4) Idem, ib1dem-~ p.17.
(5) ~;rER (l,:.), ODe c~t., ~.13. CEA.R!~ (:?), Le sucre, ~4J9.
(6) DESC::.A1'.PS (~.), Histoire de l~ traite è.es Y:Ji.rs de "Ar:tiG'li-ts ;c. "os }:r,.:rs,
p.55.
(7) RIGCTARD (E.), op. cit .. p.e.
(e) REY1~ER (y..), op. cit., p.13.
(9) DESCEAMPS (~.), op. cit., p.~5.
(10)SCHNAKID~URG (C.) note que les fermes et le terrage du sucre ~taient conr.us
et utilisés dans les i~es françaises aV2nt l'arrivée des réfUGiés du ErÉsil.
Cf. "Notes sur l'origine de l'industrie 5'-lcrière en GU2delcupe au X'l1Iè sièé:l
(164C-1670), RFECM, TODe LV, 3è Trimestre 196e, l-p.267-314, p.2eS.
,.
i~:
1
9
la Compagnie des Indes Occidentales de Colbert prend possession en 1664 de
1
la Martinique et de la Guadeloupe, l'industrie sucrière est déjà dé:ir.iti-
1
<:'--'-
ve.ent lancée. La révolution sucrière dans ce~ îles se situe entre 1660 et
'.'>".[.
.;.:~:.: f
-1'6ro( 1), tan.dis que le décollage, à Saint-Domin~;ue, survient après 1695 (2).
\\
~.
Au X'VII~ siècle, la production èt la commercialisatio:,. du sucre
des tles sont entre les mains des Holl~~dais : leur expérience, leur îor-
tune et l'importance de leur marine le leur permettait. En cela, l'économie
sucrière française à cette époque, ?articulière~ent de 1654 à 1670, r~ppelle
le cas portugais à Madère, étudié par Blaise BSSCY~A. A la dif:2re~ce ?r2~
~ue, dans ce cas particulier, c'est le ~uverneme~t por~~gEis l~i-=€~e qui
fai t appel aux capitalistes étrangers à défaut d'u."1e bourgeoisie
d' affai-
re natioBale. Aux !les d'Aoérique, les ~ol:~ndais se soht impos~s, ;t~~t
les plus forts. Ainsi, dès que les métropoles coloniales ont pu, elles se
sont empressées de les éliminer de leurs possessions respeetives. C'est
à cette lutte que s'est consacré
avec succès Colbert. Ce faisant, durant
la période qui nous occupe, c'est-à-dire entre 1763 et 1793, le commerce
colonial eet détenu exclusivement par des homm~s d'affaires français.
Le
problème; qui: se pose alors esi; la protection du marché 'Colonial con-
tre les prétentio~s des nations concurrentes, d'empêcher tout commerce di-
rect entre les colonies et l'étranger. Le désir des Nations commerçantes
d'arracher aux concurrents des aires de ventŒet d'achats profitables rend
cette protection absolument nécessaire.
En revanche, l'économie sucrière dans le Nouveau ~onde s'est
développée dans les m~mes conditions qu'à Madère: elle s'est développée
dans un cadre d'explOitation colonial recourant massive~ent à l'utilisa-
tion de la main-d-l-oeuvre servile noire. En cela, Madère méri te bien le
qualificatif de première étape laboratoire utilisé par 5laise ESSO}:3A (3).
La révolution sucrière dans les Indes Occidentales er.traîne
l'éliminàtion de ~adère, des Ca~arjes e±~uCap-Vert sur le ~arché
(1) SCEITAmT3JURG (C.), Lé' cdse è....1. s"s-:è::Je esc>32.~-ist~ 1?35-1~L7, :-:.4~.
(2) Cf. infra, 1'.36.
(3) ESSCK3A CE.), o~. cit., p.VI.
1
i
1
10
\\
international de sucres. Ce sont les Anglais d'2bord qui supp12ntent les
Portugiis après le déclin du Brésil. Entre 17C2-1~et 1756-1763, l'An-
gl~terre détien~ la suprématie en ce domaine.
De
1763 à 1793, elle est
supplantée par la France sur les marchés européens. L'intérêt è'une telle
évolution est qu'elle survient au moment où tout le ~onde, en EUrope, con-
nart le sucre et·en consomme plus ou ~oins et où lê c~~e à sucre est la
seule à fournir industriellement du sucre. Ayec l'augmentation de la con-
sommation sucrière en Europe! La consow~ation par tête passe d'environ
8 lb au cours des années 1760 à 11 lb dans la décer~ie 1770 et 12 au cours
de la décennie suivante)(1), un intense et fructueux trafic commercial se
développe entre les color~es sucrières et la métropole.
Avec la production se pose le problème de la commercialisation.
_'·'}.'Europe du Nord reste le traditionnel marché d'appel. La Hollande et les
Hanséatas sont les principaux acheteurs. Ces sucres sont, ensuite, redis-
buée en Allemagne, en Pologne et dans les pays bal tiques. Mais il faut
conquérir d'autres marChés, c'est-à-dire faire en sorte que les pays qui
.. ~ ,
s "adressent aux revendeurs du Nord pour leur approvisionnement. en sucres, . ......---~~- ,-.:.
viennent se ravitailler directement dans les ports français. Il faut pour
,::;~}~~
."T
..
..,
" .
cela que les sucres Erançais soient competitifs.
}~)l~,i,';,
Cela signifie l'abaissement des prix. Mais tout dépend du niveau des prix ,:':' ':,\\<~"-jr-...
·.\\:~~r
aux colonies. Plus ils sont élevés, plus ils sont incompatibles avec la
~ :t'~.~?~
conqu~te de marchés extérieurs. Il faut donc baisser d'abord les prix aux
,
.
colonies. La condition indispensable d'abaissement des prix, est l'augmen-
tation de!la production. Dans une économie manufacturière, on ne peut au-
gmenter la production sans augmenter inexorablement la durée de la journée
de travail. A cet égard, la politique commerciale adoptée passe nécessai-
, - - - - - - - - - - - .
re~ent pa= la dégradation de la condition de l'esclave noir, instrument de
cette production.
(1) S~~;~~URG (C.), Les sucreries de l~ Guade~oupe der.s 12 seconde ~oitié dû
X'VIIH siècle (1760-1790), contributior: 2. l'étuè.e de le crise de l'écono::J.΀
coloniale à la fin de l'Ancien Rte:œe, Thèse de dcctorat è~-Eciences écono~i
CJ.u~, Paris II, i973, p.2Ci.
e lb = 3,912 kg
111b = 5,379 kg
12 lb = 5,862 kg
Il s'êgit de consc:nm2ti0:1 p2.r 2-D.
11
Mais il faut pouvoir aussi contraindre leE colons à livrer leurs
sucres à. bas prix. cela exige l'appui du pouvoir ;-~ : l'exclusif et la
volonté des contractants d'opérer par le troc sont les armes de cette su-
. ,....
- " - -
- -.
--. ...
- -
.
-
bordination. cet interventionnisme gouvernemental modifie profondément
les rapports de force entre colons et négociants. Malheureusement, les
historiens n'en tiennent pas assez compte. Ainsi, l'endettement chronique
du colon est analysé comme une preuve de son imprévoyance, comme si, dans
la seconde moitié du XVIllè siècle, les légendaires fortunes faciles et
colossales étaient encore réalisables. Ernest LABROUSSE s'est laissé em-
porter par la même conviction qui accrédite cette fable
ft Le progrès de la revente du sucre n'est pour nous qu'un indice
accessoire : il signifie que le magnat de Saint-Do~ingue acc~u
le une fortune de légende et achète des troupeaux de nègres"(1)
A en croire l'auteur, le commerce sucrier profite davantage sinon exclusi-
vement au colon. Ce qu'on ne met jamais assez en évidence, c'est que tous
les colons n'ont pas accédé au plaisir de l'opulence, que la légend.e des'
fortunes faciles et col~ssales, même à Saint-DOmingue, est démentie par
quelques voy~rs,~~q~è les bénéfices nets des habitations s'amenuisent
J.o.
du fait du crédit et ciù versement d'intér@ts (2). D'où le titre de ce_o,
-
..-
travail : LE COMMERCE Dm SUCRES EN FRANCE DE 1763 à 1793. POSITIONS ET
Cm~TRADICTIONS •
A qu~ profite réellement ce co~~erce ? Telle est la principale
question à laquelle nous voudrions répondre dans ce travail. Y:ais cette
histoire ne saurait être retracée indépendamment des contradictions diver-
ses qui rendent caduques les législations mises en place. En effet, les
négociants vont-ils sacrifier leurs intérêts personnels à l'intérêt général
en ravitaillant indistinctement toutes les colonies avec la ~êm€ ardeur?
Ils soutiennent eux-mêmes que les colonies doivent être riches. Théorique-
ment, l'~xclusif le leur impose. Vont-ils exiger à tout moment des sucres
(1) LA3RCUSSE (E.), La crise de l'économie française à la fin de l'Ancien Régi~e
et au début de la Révolution, cf. Introductior., p.XXX'nI.
(2) 1)'CIDT.A~;O, un ami cher à Stanislas F{)jrcRZ, bon et honnête aux dires de S. ~Fc>-'
ache, quitte Saint Domingue sans fortune après avoir pay~ ses 20C COC livres
de dettes., Cf. BEGOUEN DD!EA'!JX (~,:.), r:émorial d'une famille du ::é'.vre. 3t<>.-
nislas FOICHE ••• , p.33.
12
l1ia
bruts comme l'impose l'Une des dispositions de l'exclusif et, pour respecter
1
1
la division internationale du travail qu'ils cnt ~c~~e de tous leurs voeux?
:::::.:1
Les cesures_4!~couragement à l'exportation vont-Elles fonctionner dans
.. ','
!
r:
,
l'es;rit de la loi?
x
x
x
~ujet appelle quelques explications. En pre~ier lieu, l'emrloi
du pluriel en ce qui concerne le mot sucre. Ce n'est pas habituel car le
mot renvoie généralement à un type de sucre, le sucre bl~~c, en poudre ou
en carreaux. Dans ce travail, le pluriel s'impose - à cause de la variété de
sucres en circulation dans le commerce> depuis la fin du XTIlè siècle. On
peut en distinguer sept principalement: sucres bruts ou moscouades, sucres
terrés ou cassonnades, sucre t~te, sucre blanc ,. sucre en pain et -:vergeeip.
.....
.
.
Les quatre ~~emières sortes viennent des colonies. C'est une des
spécialités du commerce sucrier colonial français. Les colonies anglaises
par exemple, ne produisent, semble-t-il, que du sucre brut.
Les trois dernières sortes circulent uniquement en Europe. C'est la gamme
des sucres raffinés. Le sucre blanc colonial fait réellement partie de cette
~ca~égorie. L'appellation sucre blanc relève des nombreuses subtilités de
l'époque :. elle permet sans doute de distinguer le sucre raffiné colonial
du sucre en pain métropolitain.
Le sucre brut est ainsi nomnS parce que, quand il est extrait, il
passe d~~s le commerce s~~s préparation. Il contient à la fois de la mélasse
et toutes les matières terreuses et féculentes : environ 5 ~ 6 lb par quin-
tal. Le sucre terré est ainsi nommé paree qu' il--e-st iiépouillé de la mélasse
par l'opération du terrage, qui est une sorte de filtrage d~s une terre ~r-
èi.la~ù.:5e 1J12~C~~:. A la. ~i.f'ffre:-J.c~ d~~ sucz'e brut, le sucre terrÉ porte seu2.e::e!1t
des matières terreuses et féculentes.
13
On appelle sucre tê-te, la p6.rtîe du p2.in de sucre renfersée d2.Ils la
tête de·la forme, c'est-à-dire, le caté percé par o~ :iltre la mél2.sse. En
. ~
somme, c'est la partie inférieure serv~~t d'égoût ~ la Q[~~sse. La qu~~tité
-:-
__
. '~f
" ' " . '
--._-----_.~.
.
- ------------
de sucre qui la compose est plus ou moins considérable selon l? ~erfection
~
~!
du sucre (1).
Le· sucre raffiné est obtenu à partir de sucre terré et de sucre tru.t, fondus
une seconde fois et clarifiés. Le tableau qui suit retrace les diff2rentes
opérations de fabrication.
(1) "T'néories sur la fabrication du sucre, for.dées su:, de nouvelles ooser'le.tio::.s
relatives à la manipulation de cet art par un habi ta..'1t de la. ':;uadelou"Çe 173e'·
AN Col F3 163.
f
r
•
-.:\\,
,~,
sucre
à
la Cabrlcatlon
•
sucre
la canne à sucre r~
broyage des -oannes au
le jus séjourne dans
le sucre obtenu: oon- 1
brut
col tée
_oulin pour obtenir le
les formes eituées
tient la _'lass. st
jue de oanne (ou jus
dans la purserie
dee matiàres terreu- 1
de betterie)
sss et f~culentes.
(pas de produits né- 1
oessairse à la tabri~
cation donc p" de
1
d'pense. euppl'-entai-
res)l. produit est
1
snoore grossi sr •
• oins cher
1
1
•
•
sucre
le sucre brut plus
On uni t la' bast du pain
On lai ••e 1.. paln.
On le. p~rte à l'étuve
le .U01.. conUent
.,
terré
de la terre argileu-
sur laquell. on éte~4
de suore plusieurs
afin d'enlever par la
seul. .ent les .aU',:" 1
se blanche
la terre argileuse
joure dans las 101'111"
chaleur l'eau
res te~u.e. et If-
blanche délay~e dans
oulente.. Les plus
[Il'eau à consistanoe 6e
belles sortes .0Dt
[bouillie. L'eau en s'in
conso_~es en naturs.
filtrant dans la te~e
Les autres sont; puri-,
entratne le sirop. Pour
fUes avant d'~ntrer
bien lavel' le pain de
eD oonse-aUon.
suore. on reoommenoe 2
LA sucre est seai-fini. ,
ou , fois.
dono c04te plus cher que
le sucre brut.
1
1
1
1
1
1
sucre
sucre bft ou terré;
1/ Pr~paration de la dis 1e cuisson ou couver-
2à couverture (on ré-
Si l'opération est
1
raff1n~
chaux-v ve sang de
solution. On rait dis-
ture. La dissolution
pàte , ou 4 fois). On
bien conduite. la dis
ou
boeuf 0
des oeufs
soudre le sucre brut ou e;r-versée dans une
fait refroidir la dis-
solution est dépouil-I
clar1fi~
terr~ dans une proposi- chaudiàre et chauffée.
solution à un certain
lée de toute matière
tion d'eau ~éterminée. On élàve la te.pératu-
degré en y ajoutant de
solide. Le sucre est
On y ajoute la cheaux-
re jusqu'à-ébullition
l'eau. Puis, on y m31e
clair et transparent.
vive. La propo~tion
La lymphe animale en
une nouvelle quantit~
est fonction de l'~tat
se coagulant. saisit
de sang ou d'oeufs
l'achat·des bosuts ou
du sucre et du préjug~
toutes les Matlàres f~
moins considérable que
des ouefs et la qua-
du raffineur en.faveur
culentss et terreuses
la première.On chauffe
lité du produit obte-
ou non de la chaux. On
et les saisit à la sur à nouveau à la m3me tem
nu rendenttle sucr,
m3le à oetts dissolution face du fluide sous
pÎrature. La lymphe sai
raffiné ou clarifi !
une certaine quantité de forme d'une é~e
une certaine quantité de forme d ,.Jn, éCUllle ~
saisit ce qufi~ échappé 1 plus cher que les
sang de boeuf ou des
paisse. r-drs4u' elles
la première foie les é-
pdcédents.
oeufs.
sont bien rassembléee. cumes rassemblées sont
on enlàve avec l'écu-
enlev~es avec l'~cumoire
moire. Hais toutes ces
matières ne sont pas
enlevées du premier
~
coup.
15
La forme ode pain de sucre du XVIllè siècle, en Europe, s'inspire
de la première présentation du sucre candi importé de 1'1 ~~. Elle a été
d'abord imiJ;ée_par .les Véni:tient. (1). La distinctiongL'Q.s pai.=-:. et peti t
pain est liée au poids. Le petit pain pèse 12 lb et en dessous (5,e6é kg)
le gros pain pèse plus de 12 lb (2).
On retrouve dans le commerce diverses espèces de sucre raffiné, par exe~pl6
le sucre royah et le demi-royal. Le sucre royal est obtenu, semble-t-il, à
partir du sucre raffiné, c'est
le produit d'un second raffinage.
C'est donc le sucre le plus blanc qui soit: il est particulière~ent tr~~s
parent et parfumé, grâce à différentes essences (3). le sucre raffin~ est
exporté sous forme de pain de sucre li '~ù l' appella tion de sucre raffiné
en pair. ou sucre en pain.
Le sucre prend le nom de sucre candi lorsq~'il est cristallisé
en gros cristaux durs et transparents,très solu~les da:.s l'eau (4). Le sucre
vergeois est du sucre en poudre issu du raffinage, en quelque sorte, du
résidu de sucre.
Sucres bruts et terrés et sucre en pain se subdivisent à leur
tour en différentes qualités!)u sortes. D'OÙ, par exemple, l'emploi du plu-
riel pour sucres br~ts et sucres terrés.
Trois sortes de sucres bruts sont généralement connues dans le commerce. La
différence s'établit en fonction de la proportion plus ou moins abondante
de mélasse que contient le sucre. Elles sont corînues sim.plement~ sous les .
noms de première, seconde et troisième' sortes de sucre brut.
Le sucre terré se décompose aussi, en général, en trois sortes,
cette fois en fonction de la proportion plus ou moins grande de maotière
féculente et terreuse. Au cours de ce travail, nous garderons :'usage du
pluriel pour bien marquer ces distincticns.
(1) DUTRCNE LACOUTCRE (r-:.) , Prscis sur la ca:lne ... , p.264. A!i A.DXl 77.
(2) "Lettre des représentants du conmerce du Favre, 20 Yai 17EI)". A': F12109A.
(3) GAUDlo(G.),"Evolution de l'éconor.1ie sucrière e::.j·:arti:üque d:.;. ;CITlè f.U XX~
siècle", in Aa:'}:A, r:01, Avril 19-71, pp.5ê-77, cf. 1'.61.
(4) DUTBONE LACCUTURE (M.), Mémoire sur la nature et les propriétés du sucre.
AN ADXI 77.
16
Quant au sucre en pain, il est composé de deux espèces de sucre
raffiné: le sucre fin et le sucre mé1is. Le sucre fin est l~ preDière qua-
~
.
lité du sucre raffiné en pain. En effet, c'est le pain de sucre entièreDent
pris. Le sucre -'Dlé"Ü.s-'est obtenu à-partir du sirop issu du ra.ffi:l26e. Pour
obte;lir le sucre, ce sirop :,.~~: conservé dans la chaudière, es t bouilli jus-
qunl. ce que l'on s'aperçoive qu'il peut prenc:re cor.sist81ce. Cr" ='e met
alors dans des formes et, lorsqu'il est entière~ent pris, on le ~et dans
des moulins pour le réduire en poudre. On l'enferme ensuite dans des sacs
et il passe ainsi dans le commerce. Il est, à peu de chose près, de la
bla~cheur du sucre commun (1). A cause de cette différence de qualit~, le
sucre fin est coté plus cher que le sucre ~élis.
x
x
x
Le commerce du sucre c'est aussi
~e:t4Ji
des sirops. Aux îles ,
ils sont obtenus par V opération du. terrage, en métropole, du raffinage~--'---'
DUTRONE LACOUTURE signale que la canne sucrée donne ordinaireoent moi tié
de son poids en suc'~2). On distingue trois espèces de sirop<, colonial.
Lâ première, connue sous le nom de gros sirop, est le produit de la premiè-
re filtration. La seconde est le sirop fin. C'est le sirop qui reste dans
les pots apri. que le sucre terré a
été suffisamment égoutté pour être
'mis à l'étuve. La troisième sorte est connue sous le nom de sirop des si-
rops. Lorsque les sirops sont cuits, il s'opère une coagulation semblable
à celle du sucre. On d,4bQu: oh.~on perce les formes, on les assied sur des
pots dans lesquels le sirop--s-efiltre. C'est le sirop de la troisième espèce.
Il est infiniment moins sucré que les deux précédents : il est acide et
n'est propre qu'à être distillé.
Les états du commerc:e n.e_préc; sent pas toujours le type de_siro;:
i~porté, la désignation sirop mélasse ét81t, à nstre avis, très vague. A
~oins qu'il ne s'agisse àu sirop de la pre~ière filtraiion. A côt~ des
(1) "Foire de 3eaucaire, observatio!":s sur :Les é?iceries et drogueries" 177:::.
Al: F12 1229.
(2) DUTR01'"E LACOUTURE (r,:.), Fr~cis sur la C2.r.!'_€ à sucre ••• , p.15.
sirops se'trouve le tafia. C'est la liqueur issue de la distil~2ti~r. du sirop.
QUQnd cette liqueur est d'une honne qualité, elle s'éppelle r~~~D~~s le Cas
contraire, c'est le tafia.
x
x
x
•
Les limi tes ahrono~.og1Q..\\1.a, de ce trav2.i.l ::sri tent 2,usc.i è 'être
e~lic.uées. ~ous avons be~~~oup hésité sur ces li7.ites, Cêr il est tent2~t
èe'voul~ir é~~dier tout le XVlllè siècle, ou nêse de partir des déèuts t€
la colonisation, au milieu du XVllè siècle. A la réflexion, le choix de l~
longue durée n'est pas nécessaire parce que les fondements de la ;olitique
commerciale des Etats n'a pas connu de mutation durant toute la période.
De plus, les limites chronologiques de ce travail nous semblent assez signi-
ficatives sur le plan commercial.
1763. C'est la fin de la Guerre de Sept Ans. La France recouvre
la Guadeloupe, prise par les Angl ais en 1759,. et la Martinique, occupée en
1762. Elle perd en revanche une partie de ses colonies: Saint-Vincent, Ta-
baga, la Grenade et les Grenadiaas. 1763 marque aussi le début de la posi-
tion très
fortement dominante de la France sur le marché europ~en de réex-
~portation de sucres. Dès lors, le commerce colonial devient l'un des moteurs
de la croissance de son économie; l'exclusif prend, par là mê~e, toute sa
significa tion.
La date terminale de 1793 correspond au début èe la lons~e guerre
franco-britarJÙque donc, à une crise prolongée èu corr~erce colc~~~l fr~~ais.
c'est aussi pour montrer que le commerce colonial n'~ pas ~té interrompu par
les troubles révolutionnaires.
x
x
x
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
'1
18
Au moment où des efforts se font çà et là pour Écrire ou p2ur
réécrire l'histoire de l'Afrique, cette étude qui se si~~e hors i.~~~
habi tuel de ..l'Africaniste e.t surtout effectuéepar un Africain, pese::,
question de son o~~ortunité.
En d'autres termes, il nous faut expli~uer le choix du sujet.
La raison est sim~le. Elle tient au fait que l'approche de l'histoire afri-
caine peut se faire ~ar le biais de recherches sur des sujets ap~are~~ent
extérieurs à l'Afrique, mais dont les rapports avec elle sont prouvés.
L'économie sucrière aux XVIlè et XVIllè siècles a mis étroiteme~t en con-
tact l'Europe, l'Afrique et l'~érique. Les ét2blisse~ents euroréens des
c~tes occidentales d'Afrique ont été les arillexes des col~nies è'.~érique
destinées à leur procurer de la main-d'oeuvre.
L'i~stabilité politique résul~ant de l'ampleur de la traite négrière a été
à l'origine de plusieurs mouvements de population. Dès lors, chercher à
comprendre les enjeux commerciaux et politiques autour du sucre en Europe,
c'est trouver les causes de ltam~leur de la traite des Noirs, des guerres
entre peuples, en somme, les causes d~ l'évolution de l'histoire africaine
dès la fin du XVIlè siècle.
n convient de ~résenter so:::unairement les grandes séries de sour-
ces utilisées.
D'abord les travaux. Disons d'emblée qu'il existe une abondante littérature
sur la question du sucre.~~uns littérature qui couvre très inégalement
toutes les époques. Les travaux les plus abondants et les plus systématiques
sur la commercialisation du sucre concernent surtout l'époque contemporaine
XIXè et XXè siècles. En ce qui concerne la période antérieure, c'est à tra-
vers plusieurs études spécifiques qu'on peut arriver à saisir le réalité
c::lJ!Cerciale.
Pour le cas spécifique de la France, ces 9~~des r.er=ette:::.t d'~v::ir une ièse
suffis~e~t claire de la r.roduction aux îles et de la vente.
En effet, des études spécifiques rer.seib~e~t s~r l'or~gine ~e
:':':-.dustrie sucrière aux !les, S'lI' l'a.dJ::.inistrati0:::' des ::?'.:Jit2.ti::l'ls et le
~r2.v2.il è.es esclaves. On ne peut mieux dire sur ces sujets qui l: 'si t ét~
19
déjà dit par Gabriel DEEIEN. Les mécanismes monétaires et financiers, qui
règlent 'le commerce entre la France et ses colonies sont lar€e~ent ~~s
grâce notamment àJa. thèse~À-'Al2.in Eunur( 1). Sur l' exclusif et le, co:n:nerce
•
col~ni~l, que peut-on apporter de plus qui ne l'dtt déjà été par Je2~ ~AR~DE
(2) ? E. BCIZARD et H. TlRDIEU ont laissé un oUvTag€
sur l'his~oire èe la
législ~tion des sucres de 1664 à 1E91. Paul EUTEL (3) et Françoise T?-ESEE(4),
à partir de l'expérience de Bordeaux, donnent 'xn excellent aperçu de la
br~~che européenne du commerce colonial.
~ais, quelque détaillés que soient ces travaux, ils restent avant
tout axés sur des thèmes particuliers. Les sucres y apparaissent comme un
produit ~uelconque du commerce, guère comme objet d'un enjeu co~~ercial et
politique. L'exclusif et ·le système monétaire et fi~~cier ne sont pas analyL
sés comme éléments d'une stzatégie visant à faire main basse sur la produc-
tion sucrière coloniale. Il y a donc place à la nouveauté. ~ais l'étude de-
meure, sur certains points, une synthèse.
Les documents d'archives nous ont apporté souvent des nouveautés.~ __
En raison de l'importance'.du commerce des sucres au XVIllè siècle, les do-
cuments, nombreux, sont d'origine dive~se. Il y a les archives conservées
à Paris, rue des Francs-Bourgeois, émanant des ports de commerce et des co-
lonies. Mais il y a aussi le's documents conservés dans les archives départe-
mentales. Ces stocks de documents représentent une masse inépuisable de ren-
seignements. Mais l'originalité de l'historien consiste à savoir choisir,
en fonction des questions qu'il se pose, le groupe de documents susceptibles
de répondre. Notre objectif étant d'analyser les positions et les contra-
dictions au sujet du commerce des sucres, les archives conservées à Paris
demeurent une documentation adéquate. ~aris ~t~~t, en effet, l'aboutisse~er.t
c'<e tous les rapports, des ~éti tio:ls et des ccrres:::::ndé'l"!cSf' {:::?::.;;nt è.~2 C::2,--
tres ~e co~erce, des receveurs particulier et des ad=inistrateurs colonialx.
(1) 3:7PFCr(A.) , r·:o:-.r.e.ie et crédit en écononie cc10,-.1a::e. Cor:tributicn à l ':-.is-
toire écono~iQue de la Guadeloupe, 1635-191~, ~~sse-~erre, Soci4té d'Histoir~
èe l~ G~~delouTIe, 1979, 388 p.
(2) TARRADE (J.), Le commerce colonial de la France à la fi~ de l'Ancien Régime.
Evolution du système de~l'èxclusif de 1763 ? 1729. T.~èse pour le doctor~~ è~
Lettres, 1969, 4 tomes, 1294 p.
(3) BUTEL (P.), Les négociar.ts bordelais. l'Burone et les îles au XVIIIè siècle,
Paris, AUBIER, 427 p. cf. pp.71 etss.
(4) TRESEE (F.), 11égociants bordelais et colons de Saint Doming'J.e "Liaisons d 'ha-
bitations. La maison Henry Romberg, Bapst et Cie, Paris SFhCM, 1972, 252 p.
cT. pp. 74-18.
20
La série p12 commerce et industrie est une des sources fondamentales
de ce travail. On y trouve des renseignements sur les manufactures de sucres
.
en France, sur les statistiques de commerce : importations et eX?ort2:~~ de
i
sucres et balance commer~, tant avec les colonies qu 1 avec les ~pui SE2Lces
étrangères. On a ainsi une liste complète des marchés d'ap?el.
~alheureusement, le relevé statistique est incomplet. Les r~nseignements ne
couvrent pas toute la période choisie. Les états du commerce conservés d~,s
cette série ont pour amnéè de départ 1775. TOute la période antérieure manque.
De m~me que les importations et exportations des années 17e1, 1783 à 1786 et
~ême 17e9. Après 17ê9, les renseignements sont épars et incomplets.
,On ne peut donc faire que des totaux ~artiels. Les docurr.ents concern~~t les
pri~es et restitution à l'exportation, le COffiffierce étranger aux colonies, la
caisse d~ commerce et son utilisation, le désavantage de la France sar le
marché d~ sucre en pain et les 'délibérations des députés du commerce y sont
conservés.
Nous avons consulté aussi avec intérêt, la série ADXI, car on y
trouve des renseignements sur les sucres. TOus les arrêts du Conseil réglemen-
tant ce commerce aux ~,VIlè ,et XVIllè siècles s f y trouvent. Elle contient
des documents sur le canmerce étranger aux nes.
Les Archives coloniales constituent une mine inépuisable de rensei-
gnements. Mais les travaux existant sur la Martinique, la Guadeloupe et Saint-
Domingue laissaIit peu d~ place à la nouveauté, no.us n'avons pas cru utile de
#no~ attarder sur les dossiers. Nous avons seulement consulté, en ce qui concer-
ne la Martinique, la série Col CS'4, relative à la correspondance générale ;;lU
départ.
En
14
revanche, nous avons consulté entièrement la série col C
; les fonds de
la colonie de Guyane, la série Col c10~e -~~ncern~'t Sainte-Lucie et la série
Co~ C1CE regrou?ant les fonds de l'!le d~ Tabago.
,
Leur plàce particulière d~,s le comnerce colonial f:::-a:;,çais nous :r a pous~-:;.
}~ais 2ussi lé'. chasse au è.ocu.z:lent. C'est, par €xe:1ple,
è.2.I:S
les fonds è.e Sainte-
Lucie '=l~e nO<lS avc!".s découvert l' stat des i:nport2.tiom: et ::es r";ex:::'ort2tion~
--
21
12
sucrières de 17e2 à 1785, qui comble une lacune de la série F
•
.'2
.
La séri~ Col F" 11 est aussi une mine d'informations sur le com:ne~ce c~,l::;:-,..i8.l.
...' - -
Tous les cartons n'ont pas été dépouillés. Kous nous intéressions êVa~t
tout aux releves-"sta.tlstiques.-Nous·"Y·àïions-"trouvé les importatic::s S'.lC~i9res
de 1774 et de 1785, les importations et réexportations de 17e6 ~ 1789.
La série F3 , collection Moreau de Saint Merr, est aussi une sou~ce fond2nen-
tale. Les sous-séries F3161 à 163,relatives aux cultures, m~~ufactures colo-
niales, leurs machines et leurs produits, ont été systématiquement consultées.
On y voit apparaître les conflits d'intér~ts entre colons et négociants au
XVIlè siècle, mais aussi des renseignements sur le commerce.
La série F4, notamment la sous série F 12, qui est la collection
des ::J.émoires. P;tan.~ et pro.1 e ts sur la Guadeloupe de 1777 à l'an 3 de la Répu-
blique, a été aussi systématiquement consultée. C'est dans ce dossier que
nous avons découvert l'état du cabotage avec la Martinique, du commerce avec
la métropole et les colonies étrangères en 1789, 1790 et 1792•
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Carte n° 1. -
la répartition des Antilles et Guyanes tJtWlCl : M. IEVfU • .4.Att.,
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~ C-'''';;'~dlI4'2. 1]8'.)
(Situation après la guerre d'Amérique. 1783).
1r. 2..22 • .l.23
(\\)
(\\)
r
23
CHAPITRE l
PRODUCTION ET CONSOMMATION DE SUCRES DANS LE MONDE DANS LA
SECONDE MOITIE DU XVIIlè SIECLE.
Depuis le milieu du XVIIè siècle, le sucre, denrée r~re et de
luxe, est devenu en Europe du Nord('), un produit de première nécessité.
Lorsque la production augmente et qu'il devient relativement bon marché,
il gagne dans chaque pays européen, les couches profondes de la société.
Le sucre devient à ce moment, l'un des facteurs du développement des é-
changes inter-européens. Mais la canne à sucre, qui a été, pendant au
moins trois m~lle ans, seule à fournir industriellem~nt le sucre au mon-
de, est une ~lante tropicale
le climat européen ne se prête pas à sa
culture, '-En France, les tentatives de Catherine de Médicis de faire pous-
•
ser la canne à sucre aux environs de Hyères, dans les :Bouches-du-Rhône,::btit!-'
,été sans succès(2).
C'est donc dans le cadre de .1 'exploitation coloniale que s'est déroulée la
production. Chaque pays colonisateur s'étant empressé de développer la
culture dans ses possessions du Nouveau-Monde.
L'économie sucrière repose par conséquent sûr une division internationale
du travail
les colonies ou la périphérie s'occupent des taches de pro-
duction, les métropoles ou le centre se résezvant les taches de transport,
de transformation et de commercialisation en Europe et hors d'Europe.
Nous sommes donc en présence d'un système ~'échange hautement spécialisé
avec, d'un côté les zones de production et, de l'autre, les zones de con-
sommation.
;
Il Les zones de production
Aux XVIè et XVIIe siècles, la canne à sucre, cultivée par les
Espagnols et les Portugais dans 1urs possessions insulaires avoisinant les
cates occidentales d'Afrique (3), se diffuse rapidement dans toute l'Amé-
rique tropicale. Elle est introduite à Porto-Rico en 1516, au Mexique en
(1) C'est que l'usage du sucre y est plus ~~ciennement connu. Lorsque Venise
était la capitale européenne du raffinage avant le Xvè siècle, son prin-
cipal débouché était l'Europe septentrionale. Aux XVè et XVIè siècles,
elle demeure le principal marché d'appel du sucre maderois. Anvers se spé-
cialise dans le raffinage du sucre.
(2) DESCHAMPS (H.), Histoire de la traite des Noirs de l'antiouité à nos
jours, p.30
(3) Madère; fles Canaries et Cap Vert
cf. CHARMY (F.), Le sucre, p.9
24
1520, au Brésil en 1530, au Pérou en 1535, à Cuba en 1547, à la Martinique
et à la Guadeloupe en 1635, en Argentine en 1670, en Louisiane en 1751.
Hors du. Nouveau-Monde.• elle .est intl:'Odui te par les Hollandais à Java en
1640. Les Français l'introduisent à l'Ile de France, actuellement.l1e
Maurice, en 1747. Elle est introduite à Hawaï en 1778 (1).
Le sucre
est produit également au Levant et en Extr~me-orient,
en Chine, aux Indes et à Formose. Cependant, dans la seconde moitié du
XVIllè siècle, le sucre consommé en Europe vient du Nouveau-Monde, en
1'occurrence du Brésil et des Iles et colonies européennes des Indes Oc-
cidentales. Dans cette zone, les colonies productrices sont : les fIes
danoises de Sainte-Croix, Saint-Thomas- et Sain'taJean, les Indes Occiden-
tales hollandaises : Guyan. , Saint·Eustache, Curaçao et Saint-Martin, Cu-
ba, colonie espagnole, les "British West Indies" : Barbade, Jamaïque,
Antiua, Saint.christophe, Nevis, Montserrat et Tabago (2) et les fIes
françaises de l'Amérique: Martinique, Guadeloupe et dépendances et Saint-
Dc.rningue.
Le but de ce travail n'est pas de faire une étude exhaustive
de la production sucrière mondiale. Cela néces~ite des recherches plus
longues en différents p~s que nous ne pouvons faire à présent. Il ne
se veut pas non plus une étude descriptive des modes de production. Nous
voulons simplement faire une étude comparative. En cela, l'étude consiste
à faire l'état de la production de chaque colonie, le but étant de mesu-
,
rer l'importance de chacune des puissances aoloniales sur le plan de la
production sucrière européenne.Car, c'est évidemment du niveau de pro-
duction des autres puissances
entre 1763 et 1793 que dépendra l'expan-
sion du commerce sucrier français. En effet,-t+absence de concurrence
sérieuse sur le marché européen à permis à la France de développer ses
.réexportations sucrières en Europe et principalement en Europe du Nord.
(1) REYNIER (M.), Contribution à l'étude de la Question des sucres, p.13.
(2) Cette tle,prise à la France en 1763, lui est restituée au traité de
Versailles en 1783.
25
-La qual! té du~sol-arenôü---p-o-sSiblè l'extension de la cul tu:-e de
la canne à sucre en plusieurs régions du Brésil. Cependant, l'Extrême
Nord-Est a été par excellence, au Brésil, la région du sucre.
Les 100 à 120.000 caisses de sucre qu'importait Lisbonne avant
1670 étaient presque toutes du sucre du Nord-Est. L'essor sucrier du
Nord-Est s'explique par un ensemble de circonstances favorables. La terre
de cette région, le Massapé, est une terre extr3mement fertile, et, en
particulier, excellente pour la canne ~_sucre ; la culture de la canne
dépendant étroitement des rivières, des ruisseaux et des pluies (1), a
bénéficié de la présence de l'eau en diverses régions.
Sa proximité de l'Europe et la facilité de contact avec l'Afrique, four-
nisseuSed'esclaves, dont l'expérience agricole et les habitudes de vie
sédentaires, s'ajoutent à la qualité de l'élément colonisateur européen(2)
en particulier hollandais, de 1630 à 1654.
Malheureusement, 1'1ge d'or de la production su~ri~re brésili-
enne et portugaise se limite au XVllè siècle. Après la reconqu~te du Nord-
Est par les Portugais, les Hollandais se réfugient dans les !les françaises
et anglaises, où ils contribuent, gr1ce à leurs capitaux et à leur expé-
rience, au développement de la culture sucrière.
(
,.
La mise
en culture
des deux principales !les anglaises, la
Barbade et la Jamarque,déplace alors du Portugal à l'Angleterre, le centre
du commerce européen de sucre.
Dans la deuxième moitié du XVllè siècle déjà, le sucre des fIes
concurrence le sucre brésilien sur le marché européen, aggravant ainsi la
grande dépression de la fin du siècle (1670-1695). Au début du XVlIIè si-
ècle, gr1ce à la participation de Marseille au commerce colonial, le suc~ë
des fIes françaises supplante celui du Brésil sur les marchés italiens (3).
(1) Les moulins à vent n'auraient pas pu remplacer complètement l'eau des ri-
vières et des ruisseaux pour les travaux de la culture et du broyage des
cannes.
(2) Cette étude emprunte largement à Gilberto Freyre, Terres au sucre, pp.36-
37, 50 et 51.
{3) L'Italie seule, achète alors aux Marseillais jusqu'à 200.000 quintaux par
an, et m@me davantage ~ de sucres terrés- aux colonies et raIfinésà. Mar-
seille.
26
D'après Paul Masson, les Portugais ont dn arracher en partie leurs planta-
tions (1). Dans la seconde moi tié du XVIlIè siècle, le Portugal ne peut
concurrencer la France. La__ producJ~!QllJ:oloniale
est moins importante ; elle
sert avant tout, dans ces cas, à satisfaire les besoins intérieurs.
Les exportations annuelles du ~résil vers le Portugal, de 1741 à
~, sont les suivantes (2)
en tonnes
lb
1741-1745 (~)
~4 000
69 529 652
1766-1770 ( 3)
20 000
40 899 795
1771-1775 (.)
22 000
44 989 775
-1777 (5)
25 000 000
1790 (6)
35 000
71 574 642
2°) Les fIes danoises
-------
Les renseignements sur la production B~crière des fIes danoises des
Indes occidentales sont peu abondants. Les quelques ~ares qui existent ne
permettent pas d'en avoir une idée précise. Le témoignage du chirurgien al-
lemand, PAÙL ERDrJŒ ISERT sur Sainte~roix est très général (7).
D'après l'auteur, le sucre serait la principale production de ltrle, dont
•
la qualité surpasserait celui des rIes françai,es. Sainte-Croix exporterait
annuellement vers la métropole 48 000 000 de lb de sucre, sans compter la
quantité considérable qui s'en exporte en fraude vers les ports étrangers.
Nous avons ensuite deux chiffres concernant la production sucrière
des trois rIes danoises réunies: 17 à 18 000 000 de lb vers
(1) MASSON (P.), Marseille et la colonisation française. Essai d'Histoire co-
loniale, p.162.
(2) Les chiffres sont donnés en tonnes. Nous les convertissons en lb.
(3) GUNDER Frank (A.), L'accumulation mondiale 1500-1800, p.212.
(4) SCHNAKENBOURG (C.), Les sucreries de la Guadeloupe dans la seconde moitié
du XVlIIè siècle, 1760-1790, p.
12
(5) Mémoire sur les sucres (Anonyme, 1777, A.N.F.
1639 1
(6) REYlTER (M.), Contribution ,à l'étude de la question des sucres, p.14.
(7) ERDMAN Isert (P.), ttDe Christianstadt dans 1 'rIe de Sainte Croix en Améri-
tt
que , 12 Mars 1787, extrait de son ouvrage,Voya5E! de Guinée et dans les
~j~,i:l~
nu.. Cararbes en Amérique. Paris ,-179~. Mais 1 '-extrai t que nous signalons
27
1775 (1) et 28 000 tonnes, soit 57 259 713 lb, en 1790 (2).
6es rénseignements sont à prendre avec beaucoup de réserves, d'où l'emploi
du conditionnel. En effet, 1l!B rle2:l_~~cj.~Q!_s~$son_tava.nt tout des centres
actifs de commerce interlope. Le port de Saint-Thomas est m~me érigé en port
.franc, c'est-à-dire ouvert aux marchandises étrangères, sans le paie-
ment de droit de douane. Il est donc vraisemblable qu'une partie de ces
sucres soit du sucre français apporté en interlope de la Guadeloupe et de
la Martinique.
En plus
de ces réserves, il semble évident que le Danemark ne
peut à la fois satisfaire sa consommation intérieure et vendre à l'exté-
rieur avec sa seule production coloniale.
L'Espagne possède le plus vaste empire colonial des Indes Occi-
dentales. Cuba s'étend sur une superficie de'114 000 km2, Porto-Rico de
9 000 km2, et la partie orientale de S~nt-Domingue, 48 000 km2 (3). Mais
une seule compte vraiment sur le plan de la productior. sucrière, c'est Cuba.
Saint-Domingue produit pour sa consommation,un peu de café, de
cacao et de sucre. L'île exporte seulement du tabac. Porto-Rico suit le
mAme sort que Saint-Domingue: au XVIIlè siècle, elle produit principale-
,
ment du café et du tabac. Seule Cuba, favorisée par les activités portu-
,
aires de la Havane, a pu maintenir la production du sucre (4).
Au début du XVIlIè siècle, le sucre n'est pas encore un facteur
décisif de la vie économique. La production sucri~rE!cubaine se développe
dans la'seconde moitié du siècle. Les envois d'esclave$ par l'asie~to (dé-
tenu par les Anglais) de 1713 à 1750, le pacte de famille, signé entre
l'Espagne et la France en 1761, qui permet aux négriers français d'y por-
ter des Noirs, et la contrebande américaine, anglaise, danoise et probabl ement~-
est publié par Isabelle et Jean-Louis VISSIERE dans: La traite des Noirs
au siècle des Lumières (témoignage des négriers), pp.117-132, p.26.
(1) SCHNAKINBOURG (C.), on. cit., p.92.
(2) REYNIER (M.), op.cit., p.14.
(3) DEVEZE (M.), L'Europe et le Monde à la fin du XVIIlè siècle, p.406 •
.:
(4) DEVEZE (M.), Antilles, Guyane, la mer des Caratbes de 1492 à 1789, p.95.
28
hollandaise, ont joué un raIe décisif dans cet essor sucrier. En 1759, on y
__compte 8.9 sucreries; 11 y ena 93 en-17~ 98- en 1761. -Il-en existe une
centaine en 1762, au moment de sa prise par les Anglais. En 1764, Cuba
compte 106 sucreries (1). La progression est cependant peu significative,
car 13 sucreries seulement sont construites au cours de ces quatre années.
L'occupation anglaise aurait-elle freiné l'essor? Nous n'en savons rien.
Selon A. de HUMBOLDT (2), Cuba exporte,entre 1760 et 1763, 12 000
caisses de sucre par an vers l'Espagne. La caisse représentant 184 kg.,
cette exportation peut ~tre évaluée à environ 4 515000 l~, mesure de ?aris
50 000 caisses entre 1770 et 1778, soit environ 18 814 000 lb. et 80 000
caisses par an entre 1786 et 1796, soit 30 102 000 lb.
La progression des exportations est très perceptible entre 1770 et 1778
et à partir de 1786.
Mais la prépondérance cubaine commence en 1792, après la chute
de Saint-Domingue, partie française. Elle est favorisée par l'afflux des
capitaux étrangers: des Etats-Unis, de Cadix, de Séville et de Saint-Do-
mingue.
Mais aussi par l'arrivée des Noirs de traite espagnole et étrangère: amé-
ricaine, dont Cuba const! tue le principal débouché extérieur, anglaise et
danoise. Le nombre de sucreries passe de 237 en 1792 à 416 en 1806 (3) :
il a presque doublé en 14 ans. Cuba fabrique du sucre brut.
,
f
La Hollande reçoit du sucre des Indes Orientales, de Java en par-
ticulier, mais l'essentiel de ses importations provient de ses possessions
des Indes Occidentales : de l a Guyane. hOllandaise (Surir...a.m, Essequibo,
- - - - - - - - - - - - -
(1) BLANC Patrice (Mme.), Le sucre et la traite des Noirs à Cuba ,jusqu'en 1860
Mémoire de Mattrise d'Histoire, Paris l, 1970, pp.18-20 et 25.
(2) DEVEZE (M.), L'Europe et le monde à la fin du XYIllè, p.4C7.
(3) BLANC Patrice (Mme.), ~. cit., p.43.
29
Damerary et Berbia) et des rles (Saint-Eustache, Curaçao et la partie hol-
landa1se de Saint-Martin).
Mais la pièce mattresse du système colonial hollandais dans les
Indes Occidentales est Sur;nam. Car, disposant d'importants crédits et de
la continuité de leur compagnie, les colons ont pu engager d'importants
défrichements sur les rivières et dans la plaine catière. La canne à sucre
a été la première culture de la colonie, mais, après 1765, sa production
a connu une légère baisse à cause de la poussée des autres cultures; café
cacao et coton.
rane
la colonie d'E.eéquibo par contre, le sucre est resté la
production essentielle, malgré la culture du café et de l'indigo (1).
Une statistique dressée par Johannes Petrus VAN DE VOORT permet de se ren-
dre compte des exportations de chacune de ces colonies vers la ~étropole
entre 175' et 1790.
Tableau n01 : Les importations sucrières coloniales 1753-1799 (2) :
( en pond)
,
1
l
,
,
l
,
,
,
Saint-
J
l
,
Es.''lu1 bo
f
,
1
1
Années:Surinam
J
Deme~ary
.
:
Berbia
, Eustache
1
Curaçao
,
,
TOTAL
, en pond(3~
1
,
t
: .
,
1
1
,
f
,
,
,
1
1753 :12 224 000:
358 000 1
1
:
-
, 12 582 000
1175 117 129 600: env.2 000 000 1 env. 350 ooot 4 802 400 1 env. 400 0001 24 622 000
1776 :14 041 600: env.2 CCO COO f env. 350 000: 8 763 ~Oo J env. 400 000: 25 554 800
1771 114 149 600: env.2 000 000 1 env. 350 000: 4 140 000 , env. 400 0001 21 639 600
1 658 400 :
380 0001 5 204 000 ,
1778. 116 951 200 1
488 000: 24 681 600
1779 : 14 881 600:
4 119 400 : env. 350 000114 368 000 1 env. 400 0001 34 719 000
1780 '12 638 4001
C 4 000 000 1
350 000130 433 60~_env. 400 OOCi, 47 822 000
1786 :13 400 0001
4 151 200 !
350 0001
,
,, 17 901 200
1789 '12 490 4CO I
2 962 800 1
350 '0001
:
15 803 200
1
,
1790 !16 884 OOO! env.2 500 000 1
350 0001
J
19 734 000
!
(1) DEVEZE (M.) op. cit., PP.306-307.
(2) Source: Johannes Petrus VAN DE VOORT, De Westindische plantages van 1720
tot 1795. Financiën en Handel. Proefserhift ter Verkrygin van de Graac van
doctor in de letteren aan de Katholike Universiteit te Nüjmegen, Bijlage XVI.
(3) Le pond, mesure de poids hollandais équivaut à 0,4941 kg à Amsterdam et à
Rotterdam. Cf. John J. Mc CUSKER, "les équivalentes métriques des poids et
mesure du commerce colonial aux XVIIè et XVIIIè siècles", RFHOM, Tome LXI,
1974, n0224, PP.349-365, p.358.
30
La question est de savoir si ces sucres viennent des seules colonies
hollandaises. Cela paraft peu probable, car les colonies hollandaises, Saint-
Eustache et Curaçao, en particulier, sont d'importants centres de contrebande
avec les possessions des autres puissances.
Les sucres des fles françaises y sont transportés en fraud; et en franchise j
,Ü,;:-. .tn· sortent pour la Hollande. Ces deux colonies, de climat sec et à
peine cultivées, ne peuvent produire certainement tant de sucre. Mais ce
qu'il est important de savoir, c'est que, malgré l'apport de sucre colonial,
la Hollande est l'un des principaux marchés d'appel de sucres bruts et terrés
français. Cela signifie qu'elle ne constitue aucune menace pour la France en
Europe du Nord ..doM -a:. Jo m&Ufli •
Dans la deuxième moitié du XVIIIè siècle, l'Angleterre possède trois
groupes d'rles dans les Indes Occidentales: .les deux principales, la Bar-
bade (430 km2) et la JamaI'que (10 962 km2), les "leéwards" ou îles sous le
vent: Antigua (442 km2), Saint l<:!.tts, Nevis (130 km2), Montserrat (98 ~2)(1)
et Saint9Christophe (220 km2) et les îles cédées par la France au traité de
Paris en 1763, à savoir: la Grenade (310 km2), Tabago (~OO km2) et la
Dominique.
~ais l'île de Tabago a été rendue à la France au traité de Paris en 1783, à
la fin de la guerre d'indépendance américaine.
t
L'~ge d'or de la production sucrière coloniale anglaise se situe
entre la guerre de succession d'Autriche(1702-171}}-et la guerre de Sept
ans (1756-1763). A partir de 1763 commence leur déclin relatif, à cause du
recul des deux principales fIes.
(1) Les chiffres de superficie sont donnés par: DEVEZE (M.), op. cit., p.253,
par NARDIN Jean-Claude, La mise en valeur de l'fIe de Tabago 1763-1783,
p.226, notamment pour ce qui concerne Montserrat 83 km2, Saint Christophe,
200 km2 et les deux dernières colonies. Les chiffres varient d'un auteur
à l'autre.
31
5 ·-1. La BARBADE.
La Barbade est la première colonie anglaise à avoir connu la ré-
volution sucrière. Elle a été une sorte de rejeton de Pernambouc (Nord-Est
brésilien). En effet, ce sont certainement les avantages d'un gain facile
évident dar..s le Nord-Est qui poussèrent le marin anglais John POWELL, qui
l'aborde en 1625, revenant de Pernambouc, à en prendre possession au nom
de l'Angleterre. Jusqu'en 1640, où elle a commencé à produire exclusivement
la
du sucre, la Barbade vivait sous le régime de polyculture et de la petite
propriété.
Le premier planteur de canne de l'ne, le colonnel HOLDIP, et les
o
autres pionniers de la monoculture se sont inspirés de l'expérience des
~onoculteurs brésiliens. Ils se rendent parfois au· Brésil pour mieux s'in-
former des procédés agricoles et industriels de la fabrication du sucre.
Enfin, elle a joui des avantages de l'emploi des capitaux hollan-
dais après la reconquête de Pernambouc en 16i4. Le déclin de la Barbade pro-
vient de l'usure des terrains, due à la surexploitation, la colonisation
anglaise ayant donné à la monocul ture de la canne à sucre une importance
plus grande encore que dans le Nord-Est brésilien. C'est ainsi que la terre
destinée à la production de denrées alimentaires était grevée de lourds
implHs (1).
A cette première cause s'ajoutent bien;d'autres encore: l'absence
1
de terres vierges, l'absentéisme des principaux colons, le laisser-aller
des intendants (2) et les ouragans qui y représentent de véritables calamités
(3). L'historien anglais Bryand EDWARD rappelle qu'eILJ161, la récolte de
la colonie n'a pas fourni plus de 25· 000 boucauds de sucre en moyenne. Le
boucaud de sucre contenant 1 344 à 1 568 lb, cela représente 33 600 000 lb
à 39 200 000 lb. Selon le m~me auteur, les exportations sucrières de 1784
à 1786 n'ont pas excédé 9554 livres sterlia«,
soit 229 296 It.(4). Les
. . : . . . - - - - - - -
(1) FREYRE
Gilberto, Terres du sucre, pp.24-26.
(2) DEVEZE (M.), Antilles. Guyane, la mer des Caraïbes de 1492 à 1789, p.251.
(3) BRYAND Edward, Histoire civile et commerciale des colonies anglaises dans
les Indes Occidentales, depuis leur découverte par Christonhe Colomb jU8~
Qu'à nos jours, p.125.
(4) BRYAND Edward, op. cit., p. 1~.
1
f
;
:~."..'I\\....
r")
32
exportations sont évaluées à 112 500 cwt (1) de sucre par an de 1771 à 1775,
soit énviron 11 503 000 lb.
5-2.
La JAMAIQUE.
La JamaIque, conquise par les Anglais en 1665, n'a atteint le ni-
veau de production de la Barbade que dans la première décennie du XVIllè
siècle. Sa superficie a permis une croissance plus rapide du nombre de su-
creries. Mais, afin de maintenir les prix des sucres, les planteurs anglais
de la Jamarque ont choisi de restreindre la production. Ainsi, à la diffé-
o
rence de la Barbade, beaucoup de terres sont laissées vierges : en 1752,
les 2/5 de la colonie sont inoccupées. Et mAme dans la partie occupée, 1/3
seulement des terres est cultivé. soit un peu plus de 2 000 km2.
De plus, les colons, ne voulant pa8 faire tout reposer sur le sucre, se
sont orientés vers d'autres cultures: cultures vivrières, coton, gingem-
bre et un peu de café. Les vastes espaces vides sont utilisés comme pacage
pour le bétail.
Néanmoins, après la guerre de Sept Ans, s~s 650 sucreries produi- .
sent 60 %du sucre anglais (2). Aussi, lorsqu'à partir de ~763, la concur-
rence française devient de plus en plus vigoureuse, emp3chant les prix de
monter, et que l'Angleterre, tournée vers l'Amérique du No~d, celle-ci
perdue vers l'Inde, investit de moins en moins dans les rIes sucrières, le
déclin ne se fait pas attendre. Entre 1775 et 1781 par exemple, 23 % des
plantations sont vendues pour dettes, 12 % passent entre les mains de l'ad-
ministrateur judiciaire et 7 %sont abandonnées (3).
5-3. Les LEEWARDS.
La situation est différente dans les autres rIes plus petites.
Dans les Leewards, tout repose sur la production sucrière. Depuis les deu-
t
-_._--{
xième et troisième quarts du XVIIlè sicèle; elles livrent des quantités
(1) Le cwt équivaut à 112 pounds, ou environ 50 kg. (50, 8023 kg exactement).
(2) DEVEZE (M.), Antilles, Guyanne, la mer des CaraIbes da 1492 à1789, pp.254-
255.
(3) André Gunder Frank, L'accumulation mondiale 1500-1800, p.270.
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1.
33
croissantt~de sucre à la métropole. En effet, si les 250 000 cwt (env.
25 562 000 lb) de fourniture sucrière annuelle ne sont pas dépassées jusqu'en
1720, à partir de 1725, leurs exportations dépassent 330 000 cwt (env.
33 742 000 lb.) Cette progression continue avant et après la guerre de Sept
ans. Ainsi, de 1766 à 1770, leurs exportations annuelles atteignent
505 000 cwt (env. 51 638 000 lb), soit le doublement des exportations en un
demi •.siècle( 1).
5-4 Les ILES CEDEES.
Dans les tles cédées en 1763, la législation fiscale encourageant
la monoculture sucrière, les autres denrées, l'indigo et le café par exemple,
lourdement tax~s à l'entrée de la Grande Bretagne, a permis de se mettre
rapidement à la culture de la canne à sucre. Leur exportation sur le marché
britannique passe de 94 775 cwt (env. 9 690 000 lb) l'an en 1762-1765 à
284 000 cwt (env. 29 039 000 lb) en moyenne en 1771-1775, soit le triplement
des exportations en l'espace de 13 ans.
Cependant, petites tles pour l'ensemble, leur production ne peut
ni compenser le déficit causé par le décrin des grandes tles, ni m~me riva-
liser avec celle des tles françaises, d'autant que les colons y ont opté
pour la polyculture. En effet, à.Tab&g9 par exemple, la canne à sucre n'oc-
cupe que le tiers des terres cultivées (2):
.
superfici e cul ti vée ) ;
superficie en cannes
~acres l'
1771
7 174
2 347
1772
8 704
2 814
1773
12 451
4 397
Les autres productions sont le coton dont les rares qualités ex-
pliquent le prodigieux essor par rapport à celui de la canne à sucre et de
l'indigo, troisième culture de la colonie. Dans les autres fIes relevant de
la Grenade, le café et le cacao, établis bien avant l'occupation anglaise
- _ : . - - - - - - - - - {
demeurent les principales productions.
(2) NARDIN Jean-Claude, op. cit., p.230.
(1) LEON Pierre, Histoire économiaue et sociale du Monde, T.II, p.66.
;
~1.
. 'l
34
6°) Les tles et colonies françai!!!_2!_!~~!~ique~La E:~~E~~!~é d!-!!_pro2~
tion"" sucrière ":!f2se sur S!!~~:~~!!!~!.""
Les efforts de la monarchie françaiee,au XVIIè siècle, pour contr3-
1er une partie des terres découvertes se sont soldés, en dépit des difficultés
du début, par un bilan positif. Dans la seconde moitié du XVIIlè Siècle, elle
possède dans les Indes Occidentales une dizaine
de colonies d'tnégale impor-
tance. Celles-ci sont réparties, en gros, dans trois zones géographiques dis-
tinctes : tles du Vent, du c3té des "Grandes Antilles", et sur le continent
sud-américain.
o
Les tles du Vent sont composées essentiellement de cinq colonies :
La Martinique, s'étendant sur une superfioie de 1080 km2 environ; la Guade-
loupe (1) et sa série de petites rIes, Marie Galante, 150 km2 et les huit
rlots des Saintes, qui forment ses dépendances administratives, s'étend sur
une surface de 1780 km2. En direction du Nord-nord Ouest (NNW), se trouvent
Saint-Barthélémy et Saint~lartin. Le premier est cédé en 1784 à Gustave III,
roi de Suède, par Louis XVI, en échange des privilèges commerciaux français
à Gothenberg (2). Il convient de signaler cependant, qu'avant sa cession à la
~·Suède, Saint-Barthélémy ne semble pas avoir été une colonie agricole 0).
Saint-Martin est partagé avec les Hollandais : la partie française s' éten-
dant au Nord et à l'Ouest, occupe les deux tiers de l'tle.
,
,
f
Au Sud de la Martinique se trouve Sainte-Lucie, avec une superficie
de 605 km2. Elle a, semble-t-il, une position plus stratégique qu'agricole.
Sa mise en valeur ne progresse que très lentement.
Plus au sud encore se trouve Tabago, Gédé
à l'Angleterre en 1763 et restitué
(1) Cette appellation désigne la Guadeloupe proprement dite, au sud et la Gran-
de-terre au nord. Les deux sont séparées par la rivière Salée.
(2) EKMAN (Ernst), "Sweden, the slave trade and sI avery, 1784-1847", RFHOM,
Tome LXIII, nos 226-227, 1975, ~p.221-231, et p.222.
(3) "Before the Swedes arrived, i t had long been settled by Frenchmen origina-
ting in villages on the coast near the border between Normandy and Brit-
tany. They had established a Norman fishing and farming economy differing
mainly from the European model in the existence of a high proportion of
domestic black slaves, their being no plantations" EI<MAN (E.), 0"0. ci t.,
p.223.
35
à la France en 1783 au traité de
'Versailles, le 3 septembre.
Saint~ominguefait partie des _nGra-ml~8Antill es" • C'est la plus
grande et la plus florissante des fIes sucrières françaises des Indes Ccci-
dentales. Elle s'étend sur une superficie de 30 OCO km2, à l'ouest de la
partie espagnole.
Enfin, sur le continent sud-américain, entre "la rivière d'Arway
et la rivière Marwini (Maro~i)", à l'€st
de la Guyane hollandaise, se trou-
ve la colonie française de Cayenne et Guyane, connue aussi sous le nom de
Cayenne tout court. C'est la plus p~vre des colonies sucrières françaises.
A la différence des tles anglaises, l'essor_' sucrier des colonies françaises
se situe dans la seconde moitié du Siècle, principalement entre 1763 et la
guerre franco-britannique en 1793. La mise en valeur est cependant inégale.
~
Saint-Domingue, mieux ravitaillée' est mieux cultivée. Elle constitue à cet.
égard, le pivot de l'industrie sucrière française.
6-1. Saint-DOMINGUE, le PIVOT DE l'INDUSTRIE SUCRIERE FP.ANCAISE.
La prospérité de
Saint-Domingue a bénéficié de, plusieUrs conditions
--===~- ravorables. Grâce à sa taille, 27 fois la superficie de la Martinique, plus
de 16 fois celle de l'Archipel guadeloupéen (1), le double de la superficie
de la Jama!que, la plus grande des fIes sucrières anglaises, la partie fran-
•
çaise de Saint-Domingue dispose d'une surface cultivable plus étendue. Les
1
plaines cetières, terrains privilégiés de la canne, occupent une surface de
4 800 km2, ce qui représente 17 %de la superficie totale (2).
C'est peu pour la colonie, mais cette superficie est plus étendue que la
Martinique et l'archipel guadeloupée~ pris ensemble. Ce sont la vaste plaine
fertile du Cap dans la partie nord, les trois plaines de l'ouest: la plaine
de l'Artibonite, du Cul-de-Sac et de Léogane, et la belle plaine des Cayes
ou plaine du Fond de l'tle-à-Vache dans le sud (3).
(1) C~tte appellation désigne la Guadeloupe proprement dit, Grande-Terre, Ma-
rie Galante, la Désirable et les Saintes.
(2) FROSTIN (C.), Les révoltes blanches à Saint-Domingue aux XVII et XVIIlè
siècles. Hatti avant 1789, p.38.
(3) MOREAU DE SAINT-MERY, Description topographioue, physioue, civile, noliti-
oue et historique de la partie française de l'Isle de Saint-Domingue, ~.
117T 716, 1164.
;,J
~!,jl'l
~
36
~~n81~ 1•• habltat!ons 8Uor1~re8 softt-ellesdes propriétés considérables
pour l'étendue du terrain et, naturellement, pour le mobilier. En 1788, l'é-
-----"tendue des tn'res~d~eul-ture -e8t~ -de- 5702tû -carreaux-{-1-) ,dont 79 200 -sont
consacrés à la culture de la canne, soit 13,89 %. Cette année-là, la surface
cultivée en cannes à la Guadeloupe n'est que de 23 685 carreaux, le tiers
de celle de Saint-Domingue.
De plus, colonie plus tardivement mise en valeur, Saint ~omingue
possède encore des terres fertiles. La première sucrerie a été établie en
1680 par ~ESLANDES, lieutenant du Roi à Léogane, au canton des Sources. Mais,
c'est surtout grlce aux "habitants"
de Saint-Eustache, chassés en 1695
par les Anglais et installés
partie autour du Cap et
partie à Léogane
apportant leur expérience de sucriers, leurs capitaux et leur esprit d'en-
treprise, que l'industrie sucrière a décollé
à Saint-Domingue (2). Toutefois,
c'est surtout à partir du milieu du XV1IIè siècle, en particulier, que
s'affirme l'essor sucrier de la colonie, devenantl~remière de toute's les
nes.
Sa proximité des marchés espagnols accessibles et la contrebande
anglaise -et hollandaise lui ont permis de profiter plus que 1 es au~res t1es
~
-~'-~'#'r'rançaises de l'évolution favorable du démarrage des "Antilles" (3). A cela
s'ajoutent les encouragements du commerce et de la traite française.
Saint-nomingue sera, nous le verrons, le débouché principal du commerce
.
colonial français, ce qui lui assure un renouvellement cons~ant de la main-
f
d'oeuvre (,4) noire sans laquelle, la culture de la canne aurai tété compro-
mise.
(1) En Martinique, un carreau mesure 1, 2927 ha. ; en Guadeloupe, il vaut 6,9496.
A Saint-Domingue, ce sont les planteurs au premier rang desquels figurent
les sucriers.
(2) DEBI~~ (G.), Une plantation de Saint Domingue, la sucrerie Galbaud du Fort,
1690-1602, p.28.
(3) DEVEZE (M.), Antilles. Guyanes. la mer des Caratbes de 1492 à 1789, p.256.
(4) Population servile de Saint-Domingue de 16e1 à 1789
16e1
2 102
1720
47 428
239 698
1687
Hi~
3 358
1730
79 545
261 365
1700
9 oe2
1739
109 780
1780
252 357
1713
24 146
1751
148 530
1786
340 OCO
1715
30 651
1754
172 548
1788
405 564
1717
37 474
1764
206 000
1789
465 429
Source
FROSTIN ~harles, on.cit., p.28.
1
i~·:.
.
'1
~:'l~! ....·..
i..
37
Les deux périodes de croissance fulgurante de la popul ation noire
de l'Ile sont la fin du XVIIè siècle et les trente premières années du XVIIlè
_,_ _$j.~Cl~_L_l6-6(L~~1-O,o~e.:L1.7QO-à1720. On a.tteint -d&&---taux de croissance de
332, 06 %et 423, 22 %; en 1720-1730, 130, 08 %. C'est que la colonie, étant
en pleine mise en valeur, a besoin d'une main-d'oeuvre plus nombreuse.
La seconde période se situe après la guerre d'indépendance américaine: 1780-
1786, 34, 73 % et 36, 89 % en 1786-1789. Cette nouvelle évolution s'explique
par le dédain de la traite française à l'égard des rIes du Vent après la lé-
gallsallon de
la traite de contrebande en 1784.
Entre ces deux périodes, la croissance est plus modérée. Est-ce
o
alors parce qu'il s'agit d'un renouvellement et non d'un peuplement systéma-
tique ? Il importe de souligner aussi les répercussions des deux guerres :
la guerre de Sept ans (1756-1763) et la guerre d'indépendance américaine
(1778-1783), sur le déroulement normal de la traite. Les taux de croissance
de cette période sont, respectivement t 19, 39 % en 1754-1764, 16, 36 % en
1764-1771, 9, 04 % en 1771-1775 ; en 1775-1780, la population servile accuse
m~me une légère baisse :- "
45 %. Cela .'explique'aussi par le fait qu'une
.,
partie des Noirs déclarés pour Saint-Domingue, est vendue aux Espagnols
de la partie ~Bt et de Porto-Rico (1). Cet accroissement de la populetion noire
____-A8.B,~aduit par un accroissement concomittant ~u nombre de sucreries.
1
Ivolutiorr du nombre de sucreries à Saint-Domingue 1713-1790 (2)
Années
Nombre de sucreries
r
1713
138
(
1730
339
1:'" ,;{'.,
1739
450
; ~ ~ ~ ':-: :
'·1'," ,
1751
539
1754
599
1767
544
1775
639
i7eO
672
1790
793
On constate en effet que, de ~713 à 1730, le nombre de sucreries
double à Saint-Domingue, que 9 ans plus tard, 111 nouvelles sucreries sont
construites. De 1739 à 1751, ce sont 89 nouvelles sucreries qui sont établies
durant les trois années suivantes, il y en a 6e d'érigées. La période 1754-1767
constitue une exception avec une légère baisse du nombre de sucreries. En effet,
(1) Voir _Fra, p. 246.
(2) PROSTIN (C.), op.cit., pp.32-33:
38
dans cet
intervalle de 13 années, 55 sucreries cessent leur activité. L'ac-
.
croissement est continu de 1767 à la Révolution: 95 sucreries sont construites
_______ de 1767 àt71ST30--de--1-775 à-1780 et 121-de--1780~-1790~
L'impressionnant accroissement du nom~re de sucreries jusque dans
les années 30, peut s'expliquer par la prédominance des sucreries en brut.
Ces sortes d'habitations nécessitent des moyens financiers moins importants
en 1715, toutes les sucreries de Saint-Domingue roulent en brut, c'est-à-
dire fabriquent des sucres bruts; en 1730, 321 sur les 339 fabriquent du
sucre brut, 18 seulement roulent en blanc, c'est-à-dire fabriquent du sucre
raffiné ou sucre blanc et du sucre terré.
o
En 1732 , Saint-Domingue ne compte que 3 ou 4 habitations faisant du sucre
raffiné et 12 ou 15 faisant du sucre terré (1). C'est la chute du prix du
sucre brut qui a entrainé leur multiplication. En 1732 déjà, lorsque le
quintal de sucre brut est vendu 10 à 9 livres au Cap et 7 livres à Léogane,
une trentaine d'habitants ont pris le parti de terrer leur sucre (2). Cette
multiplication des sucreries roulant en blanc ne va pas sans incidence sur
la croissance du nombre des sucreries, l'instàllation de l'équipement (3)
pour le terrage et le raffinage exige des moyens financiers supérieurs.
D'après les observations effectuées en 1784 sur l'habitation Cha-
mitte au quartier Morin dans la dépendance du Cap, au nord de Saint-Domingue,
le coat d'exploitation d'une habitation établie en sucrerie en blanc absorbe
le tiers de son ~evenu : elle coûte 500 000 livr~s par 100 000 lb de sucre
f
fabriqué chaque année. En conséquence, une habithtion, qui fabrique 200 000 lb
de sucre blanc revient à 1 000 000 de livres et celle de 400 000 lb à
l~;;:A
2 000 000 (4). C'est pendant la guerre de succession d'Autriche (1741-1748)
!
~-----
que le nombre de ces sortes d'établissements s'est particulièrement multiplié,
"Lettre des administrateurs touchant le sucre raffiné et terré, Le Cap, 6
juillet 1732 ", AN. Col F3 162.
Ibidem, AN Col F3162.
L'éouipement : une chaudière de 52 pouces, une de 48 pouces, une de 44 pouces
une de 40 pouces, deux de 36 pouces, 6 écumoires de cuivre, 6 cuillères de
cuivre, une chaudière de Guildive de cuivre de 5 barriques avec son chapiteau
et son serpentin. CF,"Etat des ustensiles pour l'établissement d'une sucrerie
et d'un moulin", AN F3162.
Le terrage et le raffinage aux !les méritent une étude particulière. Nous ne
pouvons donc traiter le sujet ici.
"Observations sur le sucre faites au quartier Horin sur l'habitation Chaville
en 1784", AN F3162; Coll. Moreau de Saint Mery.
t
~:~_:"Ii.••,"."0
3§
conséquence du goQt extr~mement capricieux des négociants. En effet, au
cour~ de la guerre, les négociants n'ont cherché que du sucre blanc, car
tenant beaucoup moins de place que le sucre brut, les navires peuvent em-
- _..
~
porter le produit de la vente de leurs cargaisons.
L'achat du sucre brut exige, en raison du poids et du volume de la marchan-
dise, un second voyage qui, du fait de l'au~entation des taux d'assurance
en période de guerre, est coQteux pour le négociant. Ne recevant d'autre
sucre en paiement que le sucre blanc, l'habitant qui ne peut se passer de
comestibles et autres marchàndises nécessaires à ses besoins journaliers,
s'est mis en état de terrer et de raffiner.
o
Ainsi, en 1751 et 1752, sur les 539 sucreries en activité à
Saint-Domingue, 223 roulent en blanc, ce qui représente un peu moins de la
moitié; ce seront 255 sur 599, 260 sur 639 en 1775, 318 sur 672 en 1780
et 431 sur 793 en 1790. A la fin de l'Ancien Régime, plus de la moitié
des sucreries roulent donc en blanc. Les planteurs modestes, aux moyens
limités, s'orientent vers les cultures demandant moins de frais d'équipe-
ment comme le café, l'indigo et le coton (1).
A la multiplication du nombre de sucreries correspond naturel-
iement l'accroissement de la production. Mais ces derniers chiffres sont
--==difficiles à apprécier, car ils ne semblent représenter que les seules
exportations vers la métropole. En voici quelques exemples.
Noêl DEER (2) évalue la production sucrière sain1adomingoise à 708 429
tonnes l'an, soit 14 487 300 lb. En 1787, elle ~st évaluée à 163 685 OOOlb(3)
Mais l'expansion de la culture sucrière est inégale, elle n'a affecté que
les quartiers les plus prometteurs,créant ainsi de fortes d~sparités ré-
gionales, comme en témoigne le tableau de répartition des sucreries.
(1) En effet, sur 570 210 carreaux de terre en culture, 337.200, 59, 13 %
sont établis en cafeteries, 123 880 en indigoteries, 21, 73 % de la
surface cultivée, 28 200 en cotonneries, 4, 95 % de l~ surface cultivée,
1 380 en cacaoteries, 0, 24 % et 350 en guiltiverie, 0, 06 %. La cann~,
nous l'avons vu, occupe 79 200 carr-eaux de terre, soit 13,89 %, AN AnXI77
(2) DEER Noel, The 2istory of Sugar. Volume II, p.424.
(3) Citoyen Avalle, Tableau comparatif des productions des colonies françaises
aux Antilles, Tableau n02, avec celles des colonies anglaises, espagnoles
et hollandaises de l'année 1787-1788.
40
Tableau n02.- Sucreries en brut et sucreries en blanc de la partie française
de Saint-Domingue 1713-1790 (1)
,
,
,
,
1
,
PUTIE
, PARTIE
PARTIE
TOTAL
Années
,
,
1
,
,
,
1
,
NORD
, OUEST
SUD
~t
Blanc
Efisemblè
,
!
1
1
,
,
,
,
,
,
1713
1
, 77 Brut
, 55 Brut
6 Brut
138
1
,
, 138
,
,
,
1
, 187 Brut
, 90 Brut
44 Brut
,
,
192 ,
97
50
321
, 18
, 339
1730
1
, 5 Blanc
, 7 Blanc
6 Blanc
,
,
,
,
,
,
,
,
,
1739
194 Brut
1
, 90 Brut
71 Bnt
,
1
,
263 ,
108
79
355
1
,
95
, 450
, 69 Blanc
, 16 Blanc
e :Bla.n(.l
,
,
,
,
,
,
,
,
,
1749
, 187 Brut
1
,
,
,
,
280 ,
,
,
, 93 Blanc
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
17;1
, 124 Brut
, 123 Brut
69 Brut
,
,
,
306 ,
158
75
316
, 223
,
539
, 182 Blanc
, '5 Blanc
6 Blanc
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
1754
, 122 Brut
, 139 Brut
83 Brut
,
,
,
325 ,
172
102
344
, 255
,
59~
, 203 Blanc
, '3 Blanc
19 Blanc
,
,
,
,
,
,
,
,
,
1767
, 80 Brut
, "9 Brut
84
,
263 ,
197
B~t
84
21 9(?1
241 (?)I
544
, 1.83 Blanc
, 58 Blanc
3lanc
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
1775
, 76 Brut
, 190 Brut
113 Brut
,
,
285 ,
230
124
379
, 260
1
639
, 209 Blanc
, 40 Blanc
11 Blanc·
,
,
,
,
,
,
,
1
1780
, 97 Brut
1 131 Brut
126 Brut
306 ,
218
148
354
1 318
1
672
1 209 Blanc
,
,
87 Blanc
22 Blanc
,
, .
,
,
,
1
'790 4=,30 .Brut
, 217 Brut
115 Brut
,
,
288 ,
349
156
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431
,
793
J 258 Blanc
132 Blanc
41 Blanc
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!
•
t'
1) YLême source que le tableau p. 37.
'.
1
1
41
Tableau n·3 -'Population noire.
sucreries et quantité de sucre exporté
de chaque canton de la colonie en 1788.
f:
~~~~~l~~:~~ Nom;,,:~:~:;neiPalee
- :
population
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Le Terrier Rouge, le" ,,"" 13 476
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Trou, les Fonds Blancs !
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Les Ecrevisses, le Moka!
les Cotelettes,
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,
34
,
- Sainte-Suzanne, le Ro-
15 566
2
,,
coux, le Bois de Lance
1
Le CAP
,
et Limonade.
,,
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•
- La Grande Rivière et le; 16 554
35
1
quartier Morin
.
,
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!
,
1
1
- Morne-Rouge, Petite Âns
~
12 432
1
64 272
9 .' 27 1 43 864 552 1 ï.
Plaine du Nord et Lacull
1
f
- Le Cap et dépendances •• : 11 613 .
1
- Le Doudon et la Marme- 1 15 376
1
lade
!
- Plaisance et Borgne
, 13 018
22
3
~!1
,
!
- Le Po Margot et le Lim-l
j
1
13 978
, '
be,
,
, 1
,
,
1
,
1
1
- Le Port de Paix, Saint-·
! 1
Lt Pot de
Louis, Jean Rabèl, le
1 26 068
6
2
473 000
Paix
Gros Morne et le Port- !
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43
a) Le ;,;ORD
- - - - - , - La p-ârtie du Nord'è'8tlâ plus développée de toütes. Cette avance
procède de deux raisons, l'une géographique et l'autre d'ordre extérieur
liée au commerce. D'accès plus facile, la partie du Nord a été l'une des
premières établies. Les navires arrivant de France y ont apporté plus d'
Européens et toutes les terres, ~laines et montagnes ont été concédées et
cultivées presqu'à l'instant (1). S'y ajoutent des avantages naturels plus
importants. Cette partie renferme en effet, beaucoup plus de rivières, de
ruisseaux, de ravins. :'est aussi la région la plus pluvieuse de la colonie,
dispensant ainsi l'habitant de l'arrosage. Elle laisse l'eau aux moulins,
permettant donc une grande économie en animaux (2), fort chers et difficiles
à remplacer (3).
i
1
1
De plus, la canne à sucre se cultive avec d'autant plus d'avan-
~
1'(;;';'"
~~~î~"
tages que ~es pluies sont fréquentes. Nous verrons dans les développements
t
1
ultérieurs que, gr~ce à sa position géographique, sur la route des navires,
1
cette partie est constamment abordée par les 'navires de doiture et le débou-
ché privilégié de la traite française.
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e-------....,L~é.N6rdcompte 21 paz:oisses dont 17 d", plaine et seulement 4 d~
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'mo'me (Vallière, le Dondon, la Mannelade et le Borgne). La plus vaste et
j
r,
~
la plus fertile est la plaine du Cap. En 1788, on y compte 157 355 esclaves
soi t 39, 28 % de la population servile, 299 sucréries en majorité roulant
,
en blanc, 272 cofitre 27, les habitants étant le~ plus riches. Elle a exporté
vers la métropole 52 970 110 lb de sucre blanc, ce qui représente 75, 42 %
de la quantité de sucre de cette nature exportée par la colonie.
(1) DUTRONE LACOUTURE, Précis sur la canne et sur les moyens d'en extraire le
sel essentiel, suivi de plusieurs mémoires sur le sucre, sur le vin de can-
ne, sur l'indigo, sur les habitations et sur l'état actuel de Saint Domin-
gue, Paris, 1790, p.343, AN ADXI 77.
(2) En.1788, 55 440 mulets, 15 840 boeufs, 7 920 vaches sont employés sur les
sucreries de Saint-Domingue. Cf. "Résumé du dénombrement de la population
noire; le nombre des mulets, b~tes à corne ••• pendant l'exercice de l'an-
née 1788". AN ADXI 77. Il faut, d'après le sieur VERRET, 72 mulets pour le
~-service, cf. "Convention du Siéur Verret pour les moulins à sucre",
AN Col F3162, Collection Moreau de Saint rery.
(3) MOREAU DE SAINT MERY, op. cit., p.119 (Tome I).
44
~our sa part, Moreau DE SAINT MERY Y recensait vers 1789, 288 sucreries,
dont 30 seulement sont en brut
• Des disparités se rencontrent à l'inté-
rieur de -chaque rég1on·~-n
La dépendance du Cap avec sa vaste et fertile plaine est la plus
prospère: elle compte en 1788, la plus forte colonie d'esclaves, 98 537,
soit 24, 60 %de la population servile, 171 sucreries dont 156 roulant en
blanc et 15 en brut, 21, 51 %. Elle a exporté à elle seule 43 864 552 lb
de sucre blanc, soit 62, 46 %du sucre blanc exportés.
Le Fort.Dauphin et le Port-de-Paix occupent relativement la m~me place
quant au nombre de population servile, 30 567 et 26 068, mais, concernant
le nombre de sucreries et les exportations sucrières, le Fort-Dauphin oc-
cupe le deuxième place
il renferme 120 sucreries, dont 110 roulent en
blanc et 10 en brut; il exporte 8 609 258 lb de sucre blanc. C'est la
deuxième région sucrière de l'rIe. Le Male occupe la dernière place.
Pour mesurer l'importance des paroisses quant à la production
sucrière,on voudra bien se reporter au tableau des
pages 41 et 42.
b) L'OuEST
La partie de l'Ouest est la seconde région agricole de la colonie.
,
Elle ne joui t cependant pas des mêmes avantages- péè.ologiques et climatiques
,
que le Nord. Moreau de SAINT MERY (1) nous apprenà que son sol, plus sec et
plus léger que celui du Nord, a besoin d'~tre arrosé pour éviter la stéréli-
té, le~ pluies y étant moins abondantes.
D'après DUTRONE LACOUTURE (2), les plaines du Mont Rouis, des Gonaives, et
de l'Artibonite dans le quartier de Saint-Marc, sont stériles dans une très
grande partie de leur étendue, par le défaut d-eau de pluie et d'arrosage.
Il estime que le dépouillement des montagnes pour la culture du café expli-
que la diminution de la pluie dans cette partie de la colonie. Au point que
plusieurs habi tants "des bas de la plaine de l' Arti beni te" ont été forcés
d'abandonner la culture de la canne. Ici, la dépendance du Port-au Prince
apparatt comme la plus. prospèreavec ses 65 303 esclaves en 1788, et ses
(1) Moreau de SAINT MERY, op. cit., p.717.
(2) DUTRONE LA COUTURE, 0"0. cit.!. PP.345-346.
45
'90 sucreries dont 79 en blanc et 111 en brut. L'on remarque que, contraire-
ment au ~ord où prédominent les sucreries en blanc, à l'Ouest et au Sud,
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:ï;•.
-'·.c.
r ','édom1n€m:tqlea
sucre-d-e-s-en-brut, signe de la relative pauvreté des habi-
r
tants de ces régions par rapport à ceux du Nord.
Ces sucreries sont concentrées dans la plaine du Cul-de-Sac,.
des Vases (1)
et de l'Arcahaies. C'est la troisième région exportatrice de sucre blanc,
7 792 219 lb, 11, 10 % environ. Léogane occupe la seconde place pour le
nombre de sucreries: 66 dont 27 en blanc et 39 en brut. DESL~iDES y établit
la première sucrerie en 1680, au canton Les Sources. Mais, pour le volume
des exportations de sucre blanc, il est ?récédé par Saint-Marc.
c) Le SUD
Moins encouragée que les précédentes, cette partie de la colonie
a connu une mise en valeur tardive. Mais, très montueuse, le sol est consi-
déré comme moins productif, les plaines étant moins profondes et plus argi-
leuses.
Dédaigné par les négociants français à cause de la pénurie de numéraire, le
Sud n'est n1 aussi peuplé, ni aussi bien établi que le Nord et m~me l'Ou-
u •• J4QRiHs:lJ BE SAiNT MERY y recensait vers 1789 1t un peu plus de 10 000
»lanc~)6 500 affranchis et 114 000 esclaves ••• On y trouve, ajoutait-il,
19~ sucreries ••• mais la culture y est moins perfectionnée, parce que les
forces cultivatrices y manauent et que les denrées n'y obtiennent pas un
-
,
prix avantageux (2)~.
f
Mais dans cet ensemble, il convient de faire une place à part à
la riche plaine des Cayes ou plaine du Fond de l'Ile-à-Vache. Elle est fa-
vorisée d'après DUTRONE LA COUTURE par plusieurs rivières qui la mettent
à l'abri de la pénurie d'eau. En 1788~ 110 des 153 sucreries recensées s'y
trouvent, en majcrité des sucreries en brut, 86 contre 24, ainsi que
27 937 esclaves sur les 89 BOO que compte cette partie de la colonie, soit
31, l' %. En 1789, elle compte à elle seule près d'une centaine de sucreries
(1) DrTROr.:E LACCt'TURE note que la plaine des Vases est entièrement cultivée en
cannes, op. cit., p.346.
(2) HOREAU DE SAI::TMERY, on. cit., Tome III, p.1165.
46
sur lesquelles travaillent plus de 20 000 esclaves(1).
----e-e--t1:e-···brève-étude~fai_t_appara!trel'inégali
té de la mise en
valeur entre les grandes régions et une certaine disparité à l'intérieur
même de chaque grande région.
Le tableau des pages 4~ et 42 montre que Saint-Domingue exporte plus de sucres
bru~que de sucre blanc. C'est l'Ouest et le Sud qui donnent la majorité
des sucres bruts. Le Nord expédie le plus gros des sucres terrés et blanci,
ayant fait plus d'effort d'équipement en sucreries en blanc. Sur le mar-
ché, les sucres bruts de Port-au-Prince et du Cap sont considérés comme
les meilleurs.~s sucx~s de Léogane, au contraire, ne sont pas, d'apr~s
les raffineries, aussi beaux que ceux du Cap; par contre, ceux de Saint-
Louis, dans le Sud, sont inférieurs à ceux de Léogane (2) •
.
L'expansion sucrière de Sain~Domingue s'est faite dans la se-
conde moitié du XVIrlè siècle, au détriment de la Martinique et de la
Guadeloupe.
éu!. bA !!AaNATTON-MARTINIQUAISE.
Au début du XVIllè siècle, la Martinique est la plus prospère
des colonies françaises.~e. plantations ét~t be~ucoup moins développées
en Guadeloupe, et surtout dans les autres rIes Au Vent.
A Saint.Domingue, la colonisation est à ses débuts. L'intervention des ar-
mateurs et négoeiants marseillais a contribué fortement à faire entrer
cette colonie dans la voie de la prospérité. Dans la première partie du
siècle, elle est, avec Saint·Domingue, l'un des p51es de développement
de l'industrie sucrière française. Mais, en Martinique, les maux de la
guerre de Sept ans et l'occupation anglaise n'ont pas été facilement guéris
(1) FOUBERT (B.), "Colons et esclaves du Sud de Saint-Domingue au déb~t de la
Révolution", Revue frar.çaise d'Histoire d 'Outre-r-:er, T.LXI,
1974, n0223, pç.199-217, p.200.
(2) "Pour donner une idée intelligible du bon état de la fabrique des sucres
dans les raffineries de Bordeaux", ~7:n, 1N F121501, n0253.
f
~
....:,.,
1
47
"l?rès 1763. Elle est sortie profondément affaiblie de la guerre en raison
d'une pénurie aiguë de main-d'oeuvre et des dévastations anglaises.
Le problème de main-d'oeuvre s'explique en grande partie par le
refus des Anglais de vendre à crédit. C'est que, pour les nouveaux occu-
pants, l'occasion n'est guère propice à ce genre de facilité de paiement.
L'fle est occupée tardivement, en 1762, année où commencent les pourpar-
lers de paix. Ils savent cette ocoupation temporaire. Signalons que la
Guadeloupe, qui a profite de cette occupation, est prise au tout début de
la guerre, en 1759. L'état des cultures dressé par le gouverneur FE1~ON,
en 1763, à la restitution, est déconcertant. Plus du tiers de la colonie
serait en friche, et les terres, m~me cultivées, ne le seraient pas dans
toute
leur valeur.
"Le quartier du Lamentin, qui serait un des plus riches, s'il
y avoit des forces, avoit autrefois beaucoup plus de sucreries qu'il n'en
a aujourd'hui. Le quartier du Gros Morne est pour ainsy dire réduit à
rien. Le Fort Royal et les environs ont été .totalement dévastés pu- les
Anglais, Ùs ont dégradé les b~timens, enlevé les Nègres et les bestiaux.
La Trinité et la Basse_Pointe sont en bon état. La Cazij pilote et le C~tbet
se sont ressentis cOmme les environs du Fort-Royal, des malheurs de la
(
--
guerre. La RiYière Salée a de très bonnes terres qui sont presque abandon-
nées par le défaut de force. Entre le Bourg et la Rivière Salée et l'Anse
du Séron, i l y a 5 à 6 habitations où il n'y a ~as 30 Nègres, où il faudra
100. Les terres de la?ivière Salée sont à peu)rès de la même nature et
j
aussi bonnes· que les meilleurs du fonds du Lamentin. il n'y faut que des bras
pour les faire valoir.
Dans le quartier du Marin, il y a par le m~me inconvénient, beaucoup de su-
creries médiocres et serait fort opulentes. Le commissaire du Marin a .trois
sucreries, i l a été obligé d'en abandonner une par le défaut d~ force. A
Sainte_Anne, il' y a peu de chose et aux Anses d'Arlet on ne cultive que le
café"(2).
(1) Duc de Fénelon et de la Rivière, Martinique, le 4 Août 1763, A1~ ColC~A65
folio 27.
(2) Le Duc de Fénelon au duc (de Choiseul), Saint Pierre, 1er Décembre 1763,
AX Col C6A65 folio 215.
:ill~j:hi'l~
rJ~.~.::. '~1
l
48
La Martinique ruinée n'a pu retrouver sa prospérité de la première
moitié ùu siècle car, après la guerre, l'attention des négociants se concen-
tre presr'l' exch~siyementsur Saint...Dominsue.La disette de l;ègres devient un
problème aigu, eu égard aux différentes réclamations des administrateurs
entre 1767 et 1776, la population servile (1) de l'île est quasiment sta-
tionéaire, la croissance n'a été que de 1, 01 %. La croissance la plus si-
gnificative a lieu après 1784, 6, 13 % en 1784-1789. Cela résulte de l'ad-
mission des étrangers après 1784, cette île ne jouant pratiquement plus
aucun r~le dans la traite française. La croissance n'est cependant pas spec-
taculaire, ce qui ne va pas sans incidence sur le développement des cultures.
En 1766, l'état des cultures, dressé par l'intendant PEYNIER, rappelle ce-
lui du gouverneur FE1~LON, trois ans auparavant :
"Dans tous les lieux q'le j'ay parcourus j'ay observé non seulement
qu'une grande partie des terres étoit encore en bois debout mais encore que
beaucoup dé celles qui avoient été anciennement cultivées étoient redeve-
nues en friche. Elles m'ont paru toutes manquer de Nègres dont le nombre
en général ne va pas à la moitié de ce qu'il en faudroit pour les exploiter.
Cette disette de Noirs est un mal qui par l'accroissement qu'il acquiert
chaqpe jour ;PŒlrra Ciuasrà. la fin la ruine de la Martinique si l'on ne
prend des moyens de la mieux pourvoir à l'avenir, d'une manière ou d'une
autre. El n'y a pas en cette iale une seule habitation qui ait la quantité
d'esclaves qui luy seroit nécessaire. Les habitants les plus aisés en man-
,
quent, à la vérité moins ~le les autres, mais i1s ne laissent pas que de
s~ ressentir de leur rareté"(2).
En 1787, les 324 sucreries emploient 16 642 esclaves, soit en
moyenne 51 par habitation, c'est peu (3).
(1) La population servile de la Martinique évolue comme suit de 1767 à 1789
1767
70 553
1784
78 598
1770
71 142
17f;8
83 416
1776
71 268
1789
83 414
(2) PEYNIER au duc, 6 juillet 1766, AN ColC BA68, r.. 046 folio 160
(3 ) Observation des commissaires du commerce de la Kartinique sur le procès-
verbal de l'Assemblée Coloniale de cette îsle du 14 janvier 1788,
M: p12 549-550.
49
Cette pénurie de main-d'oeuvre fait monter le coût de production
du fait des paiements au comptant. Les étrangers paient au comptant en nu-
méraire et è ;mancient_inv.ersement..-.à __.Atr.e-régl..és-au comp"tan t, soi t en mar-
chandises dont l'achat leur est permis, soit en numéraire. Les négriers
français qui devraient accorder des facilités de paiement à leurs cJmpatri-
otes ne sont pas en reste. Seuls les habitants les plus aisés peuvent
"prendre sur les produits nets de leur culture des fonds pour acheter des
nègres et payer comptant".
Quant aux petits exploitants aux moyens modestes, ils délaissent
la production sucrière pour se tourner vers la culture caféière, dont ils
espèrent s'enrichir, parce que provoquant moins de frais d'équipement et ne
demandant qu'une main-d'oeuvre assez faible : "de l'ordre d'une vingtaine
d'esclaves" ; ils s'installent sur les pentes où le terrain est libre et
beaucoup moins cher qu'en plaine. C'est la raison pour laquelle le caféier
gagne partout du terrain après la guerre de Sept ans (1).
D'où aussi la réduction du nombre de sucreries (2).
Années
Nombre de sucreries
1701
181
1742
546
'755
350
1777
450
1785
316
1787
324
1789
300
,
,.
Entre 1777 et 1785,·134 sucrerief" cessent de fonctionner. Entre
1785 et 1787, en raison sans doute de l'évolution du nombre d'esclaves, 8
nouvelles sucreries sont construites et 698 carrés(902, 30 ha) de terre
;.
(1) Pour tout ce qui précède, voir DEVEZE M., Antilles, Guyanes, la mer des
Cararbes de 149; à 1789, p.268.
(2) DEVEZE (M.), on.cit., p.256 et 272 pour 1701-1742 et 1789. Pour 11~5, voir
observations des commissaires du commerce de la Martinique ••• ANF
549-550.
Pour 1755, voir SCHNAK~:EOURG (C.), Les sucreries de la Guadeloupe dans la
seconde moitié du XVlllè siècle, 1,60-1790, contribution à l'étude de la
crise de l'économie ccloniale à la fin de l'nncien Régime, Thèse de Doc-
torat d'Etat es Sciences économiques, Université de ~icardie, ~~iens, déc.
1;72, p.2(~-
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.......
..
50
supplémentaire, plantés en cannes: en 1785, la canne occupe 12 801 carrés
de terre (16 547, 85 ha), en 1787, on passe à 13 499 carrés (17 450, 16 ha)(1).
A ces causes exogènes s'ajoutent un certain nombre de fléaux qui
ont provoqué des dégâts importants: dans la nuit du 13 au 14 Août 1766, un
terrible cyclone provoque des dégâts importants dans la colonie ; des su-
creries sont abattues et les cannes à sucre, qui
étaient en tuyau, ren-
versées. Un grand nombre d'hommes, de femmes et d'enfants, tant ~oirs que
Blancs écrasés sous les ~ines des bâtiments (2). Depuis 1763, la Martini-
que doit faire face à une invasion de fourmis qui dévorent la canne.
Ces ravages ont atteint un point tel que, d'après les intendants
MAURIS et PEYNIER (3) en 1767, dans la paroisse du François, l'une des plus
touchées, 25 sucreries ont cessé absolument de travailler. Ailleurs. "les
plantations exposées à ce fléau ne produisent pas à leurs cultivateurs de
quoi fournir à les indemniser des frais d' exploi tation". Ces fléaux accé-
lèrent la crise martiniquaise au début de la décennie 1770 (.4).
Tableau n04.- Production de sucre de la Martinique 1671-1789 (5)
1
, , 1
J
,
,
1
,
en tonnes
en lb
Annee
1
,
r
r
•
1
1
r
r
r,
1
1671 r
3 800
,
7 770 961
1
r
,
r, 1715 r,
5 000
,
10 224 948
,
,
1
, 1730
,
r
9 600 ~ 14 000)
19 631 901
,
,
1
~28 629 856~
, 1750 ,
•••••
20 000)
.......... 4C 899 795
1
1
,
r, 1754 1
14 000
,
28 629 856
,
, 1767 1
13 000
r
,
,
~ 6 650~
1
26 584 867
~13 599 182)
,
1777
14 500
29 652 351)
, ,
r
,
,
1778
1 1 300
,
23 108 384
1
r
,
,
1785
10 020
"
20 490 797
1
r
1>
,
,
1787 1
S 264
16 899 795
-16 884 000+
1
r
1
,
,
1789
18 500
1
37 832 310
!
!
!
12
Observations ••• , A~ F 549-550.
l..'?ttre de M. d'Ennery et Peynier à N. le Duc de Choiseul, Martinique, 18
août 1766, AN dol C8A66 folio 54 •
•
(3) Lettre de Saint Maurin et Peynier au duc de Choiseul, Martinique 15 novem-
bre 1767.
(4) SCHNAKE~E00RG, oP,cit., P. 221.
(5) Source; SCH::AKE~rBCURG (C.), Statistiques pour l'histoire de l'économie de
plantation en Guadeloupe et en Martinique, 1635-1835, Bulletin de la Soci-
été d'Histoire de la Guadeloune, n031, 1977, 121 p., p.97.
Pour les chiffres entre parenthèses, voir DEVEZE (M.), Antilles ••• , P.272
i
+ Chiffre fourr':---P"il' les commissaires du commerce, ANF12549-550.
~".,.',,"''::',
51
La diversité des chiffres en pIésence ne facilite pas le travail
de l'historien. La valeur des chiffres pr@te à discussion dans l~ mesure
où les auteurs ne: prennent pas la peine de préciser s'il s'agit d'évalua-
tion en sucre brut ou si c'est la somme des différentes sortes de sucres
fabri~ués dans la c~lcnie.
Nous ne savons pas non plus,comme nous l'avons déjà mentionné, si ces chif-
fres prennent en compte les sucres consommés à l'intérieur de la colonie
et ceux vendus frauduleusement aux étrangers. Par exemple, la production de
1787 est évaluée à 166 840 quintaux, soit 16 840 000 lb par les commissaires
du commerce de la colonie. Or, une autre évaluation, faite par le citoyen
AVALLE concernant la production 1787-1788, est nettement supérieure à ce
chiffre fourni: elle donne, en sucre brut et terré 26 307 OCO lb, soit
en sucre brut uniquement 37 742 000 lb. Mais à ce chiffre, on doit ajouter
les 5 000 000 lb de sucre consommés dans la colonie, 3 000 000 lb de sucre
brut et blanc vendus en interlope. Ce qui montre que, ce qu'on appelle pro-
duction est souvent le volume de sucres exportés vers la métropole.
A cela s'ajoutent les imprécisions introduites par le mode de cal-
cul adopté par les auteurs. En effet, en présentant des chiffres arrondis,
ils donnent des renseignements incomplets : une partie de la production
étant ainsi ~soustraite. Ces' di,Ü,·.tres expriment donc des ordres de grandeur
et non des valeurs absolues. Afin d'obtenir un résultat plus cohérent, nous
utiliserons les chiffres de SCHNAKENBOURG, ceux~ci étant les plus nombreux.
,
,
f
Si, dans la première moïtié du XV1IIè siècle, on assiste à une
croissance continue de la production: 1671-1715, 31,56 %, 92 % en 1715-1730,
le record pendant toute la période, 45, 63 ~~ en 1730-1754, dans la seconde
moitié du siècle, au contraire, à l'exception de 1789, c'est la régre~sion
continue de la production: de 1767 à 1767, elle enregistre une chute de
36, 43 %.
6-3. L' ARCHIPEL GUADELOUFEEl~ : La CRISE OUVERTE.
La àeuxième moitié du XVIfIè siècle, considérée par les auteurs
comme la période du plus gr~~d développement de l'économie coloniale, consti-
tue pour l'é~onomie sucrière guaàeloupéenne une phase de crise ouverte. Une
, i
î.~::
52
crise aCJa préparée par les erreurs du passé, notamment la subordination
à la ·Fartir.ique depuis 1668, qui confère à Saint-Pierre le monopole du
trafic commercial des !les du Vent.
Tout remonte au temps de HOUEL. LJadministration de ce seigneur
propriétaire
plonge la colonie dans le désordre, à cause des querelles
intestines entre habitants. La commodité du port de Fort-Royal en Marti-
nique aidant, les flibustiers s'y installent. Attirés surtout par l'espoir
d'obtenir à vil prix le butin de ces intrépides corsaires, les négociants
se tournent à leur tour vers la Martinique. Certains cultivateurs suivent
le mouvement, à l'idée d'y vivre tranquillement sous leur protection.
L'accroissement rapide de la Martinique fixa sur elle le choix du gouver-
nement général de la Compagnie des Indes (1).
La Guadeloupe obtiendra une éphémère autonomie à l'issue de l'or-
donnance royale du 20 septembre 1763. Les commissionnaires de Saint-Pierre
ne tarderont pas à obtenir le rétablissement du gouverneur général, qui
leur permet d'a~tirer vers eux la richesse d~s autres colonies. Le 20 sep-
tembre 1768, la tutelle est rétablie. Ce ne sera qu'en 1775 (2) que, cédant
à d'incessantes représentations guadeloupéennes, le ministère de Sartine,
après un exam~n des faits, déli.~!r~ définitivement la Guadeloupe de ses
liens, en lui rendant son indépendance. Le cabotage ne sera pas pour au-
tant interrompu entre les deux colonies, ce qui est la preuve de la persis-
tance de la tutelle économique, malgré l'indépendance politique.
r
1
La Guadeloupe est particulièrement défavorisée en ce qui concerne
l'arrivée des captifs dans la première moitié du siècle. La traite française
s~ désintéresse de la colonie dont les besoins ne peuvent se satisfaire des
Nègres de rebut, introduits en interlope par la traite anglaise et hollan-
daise. D'où le développement bien moindre de l'industrie sucrière pendant
cette période. La période anglaise allant de 1759 à 1763, lui donnera un
vigoureux essor. Eh effet, les Anglais, qui croyaient à une occupation dé-
finitive de la colonie, y introduisent 25 OCO esclaves nouveaux et érigent
en
de nouvelles sucreries: en 1758, 269 sucreries sont activité dans la colonie
(1) O~U~O LARA, La GuadelouDe dans l'histoire, p.41.
(2) 24 Octobre 1775.
1
53
!l
1
,~'
en 1759, le nombre tombe ~ 185, 84 sucreries ont cessé de fonctionner dont
73 brûlées au cours de la guerre, ainsi d'ailleurs qu'un grand nombre d'ha-
bi tations à café et cot .• La ville de Basse-Terre et presque tous les
bourgs seront réduits en cendres pendant les troiB mois de résistance (1).
Le relèvement est rapide: en 1761, l'archipel compte 339 sucre-
ries (2), dont 318 en Guadeloupe. En 1762, le nombre monte à 420 et à 446
en 1763, au moment àe la restitution de la colonie à la France (3).
En somme, entre 1759 et 1763, 261 sucreries ont été érigées dans l'arc~i
pel. La production qui était de 15 60C tonnes (31 901 840 lb) en 1754 ~cn
te à 24 400 tonnes (49 897 750 lb) en 1762 (4). Cela représente un accrois-
sement èe 51, 41 0(, dans cette intervalle de e ans. Ils ont créé, par la
montée des affaires, l'importance du port de Pointe-à-Pitre.
La colonie retrouvera sa situation d'autrefois après la
restitu-
tion à la suite du traité du 10 Février 1763. Les négociants affic~ent
leur indifférence habituelle à l'égard de la colonie: les besoins annuels
de main-d'oeuvre évalués .à plus de 2000 esclâves (5) ne sont pas satisfaits
par la traite nationale. Une sucrerie moyenne emploie 112 esclaves dont
e5 adul tes en éte:t de travailler, une sucrerie Nmédiane'! en emploie 86,
dont 63 en état de C tfâvâiller (6). II~'raut en assurer le renouvellement
constant. L'industrie sucrière occupant un grand nombre d'esclaves: en
1764, sur les 42 000 esclaves recensés, 30 000, 71, 43 % sont des escla-
ves sucriers, ce renouvellement est plus que né~essaire pour en assurer
,
la prospérité.
1
(l)Lettre d'un habitant de la Guadeloupe à un habitant àe la Martinique àans
Lettres sur la prise de la Martin!que en 1762, Paris, in 4°, p.12.
L'attaque anglaise dirigée par le chef d'escadre MOORE et BARIKG~~ON, com-
mence en janvier 1759. La force française était composée de 18 à 190C nom-
mes et dont 101 hommes de troupe. Par manque de vivre, munition, officiers
généraux et d'ingénieurs (le seul, BURY, est tué au début du cC::1bat).
NADEA~ ne tint q~e trois mois.
(2) Ces 339 sucreries se répartissent comme suit : 128 en Guadeloupe, 190 à
Grande-Terre et 21 à r-:arie-Galante.
(3) et (6) Les chiffres sont fournis par Ch. SCHNAKE1J130URG, Les sucreries de
la Guadeloupe ••• , Tat:-€-ffii-no 1-, p.243, pp.8ê-89.
(4) SCH~;AKE!~pœRG (C.), Statistiques ••• , p.97.
(5) Délibératio~ de l'Asse~bl;e coloniale, 27 Février 17E9, Ar colF412 pièce 9
(6) SCh~AK~:~UURG (C.), Les sucreries de la Guadeloupe ••• , P. 69
54
Le défaut èe nègres et l'augmentation du coût de production: au
co~~encemer-t du X'nIè siècle, une habitation sucrière coûtait '50 à 400 000
livres; à la fin de l' An.·iei'\\ Régime-, el1ec-oûte600CCO à 12 000 000 livres
(1), détournent certains habitants vers la culture caféière après la guerre
de Sept ans. En 1753, le caféier occupait 783 hectares de te~e ; en 1777,
il couvre 15 fois plus d'espace, 11 750 hectares.
Co~~e la Martinique, la Guadeloupe a souffert aussi des ~léaux
naturels. Au printemps 1766, une dure sécheresse frappe la colonie, cau-
sant la perte d'une grande partie de la récolte. Le cyclone du 6 septembre
de cette année, aggravé par le débordement consécutif des rivières provo-
que des dég~ts. A la fin du mois de septembre, un autre cyclone s'abat sur
la colonie. Le cyclone de la nuit du 25 au 26 juillet 1769, suivi de pluies
torrentielles,arrache les cannes, compromettant la récolte de l'année
suivante. En avril 1770, des pluies prodigieuses font des dégâts. Deux
années de sécheresse suivront: en 1771 et 1772.
Cette sécheresse réduit la Grande-Terre, principal centre de l'industrie
sucrière de la colonie,à un état déplorable~ en faisant périr les bestiaux
- - - - ~
de même qu'une partie des Noirs.
En Août 1ilf,
bieis cyclone'Sst-abattent sur la colonie en une
semaine. Un autre, celui du 5 septembre 1774 est suivi d'une grave épizoo~.
La sécheresse revient en 1776-1777 (2).
,
Donc, à la crise d'approvisionn~ment/etde débouchés, s'ajoute
la pression du milieu naturel. Christian SCm~AIŒ~BOURG montre que les
':;i:)
"tre,te d2rnières années de l'Ancien Régime marquent pour la Guadeloupe
sucrière, une phase de repli, de' contr~otion et, après le traité de Ver-
sailles, de crise ouverte"('). En 1789, l' Asse'!lblée coloniale révèle que
la Grande-Terre, manque plus du tiers de la main-d'oeuvre qu'elle est à
mê~e de faire travailler avantageusement (4). Or, logiquement, l'évolution
de la production découle de celle de la superficie cultivée, et, c'est du
(1) SATI~EAU (r.), Histoire de la Guad~loupe sous l'Ancien R~gime, 1635~1789,
p.314.
(2) SCm:AKEIŒOUR:; (C.), Les sucreries de la Guadeloupe ••• , pp.216-219.
(3) Idem, pp.27-2E.
(4) Délibération de l'Asse :-,bl ~e coloniale, 27 Février 1789, ANcolF4.12 pièce9.
55
•
nombre de carrés de cannes que dépend la richesse du colon. La crise de
l'économie sucrière guadeloupéenne est due à une baisse du profit.
Tableau n05 - L'industrie sucrière guadeloupéenne.
1
1
1
1
1
1
1
superficie de cannes.
1
1
,
1
, Années
l~ombre de sucreries
1
1
Production
1
( en carrés)
.
1
1
,
•
1
•
1
1
1
1
,
,
1
1763
446
1
,
1
1
1
1
1765
4C1
1
1
f,
1
1
1
1
1767
341
1
1
46 012 269 lb 1
1
1
,
1
,
1
1
1772
376
f
26 704
27 257, 318ha
35 991 820
f
f
f
1
f
1773
374
1
23 567
22 379, 223ha 1
1
,
1
f
1
1
1775
437
f
f, 39 OOC OOOenv.
f
1
i
, 1777
388
1
26 088
24 773, 164ha 1
-
,
1
f
1
f
1781
f
26 472
25 137, 811
f
f
,
,
1
1
,
f
1782
399
1
26 478
25 143, 50S
1
,
,
1
1
1
1783
400
1
, 27 639
26 245, 994
1
1
,
f
,
J
1
1784
400
1
26 750
25 401, 8
, 37 423 312
1
f
1 }~I
1
1785
391
1
27 010
25 648, 696
1
1
,
1
1
1
1
1788
362
1
, 23 685
22 491, 276
f
1
!
1
1
1
,
,
!
1789
1
1
,
1
1
r
1
J
1790
367
1
22 620 .
21 479, 952
1
r
,
,
1
1
,
,
..
1791
f
30 000 OOOenv.!
!
!
!
Par sa superfi~j ft J a canne è Sl1cre.,.~ast cependant de loin la première
cul ture de la colonie. En 1785, le café et le coton occupent respectivement
1.
7023 carrés (6669, 09 ha) et 5932 carrés (5633, 03 ha) de terre. Les sucreries
.
1
;
se répartissent comme suit .
,.
!
Tableau nO 6 - Géographie sucrière de l'Archipel guadeloupéen en 1785 (1) •
';;~;1
f
1
1 Régions et quartiers
Nombre de
superficie de canne
1
1
1
1
sucreri es
r1
l - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - . . . i . l
1
1
lRégion de BASSE-TERRE
1
l
'
1
l
1
1
Basse-Terre vil e............
10
.•••••••
560
1
--.-. ---t
Saint François, Easse"';Terre..
10
•••••••
390
1
:
Le Parc......................
1
,. . . . . . .
70
1
1
Bailli!......................
11
•••••••
650
1
l
,
t
Côte-du-Vent
1
!
:
J
Vieux-Fort •••.••....•. .~.-. .
0
•• •• • ••
0
,
:
Trois Rivière................
9
•••••••
500
1
1
Capes terre. •• • • • • • • • • • •• ••• • •
21
•••• •••
3CO
f
\\
Goy?_ve. • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • •
9
• • • • • • •
460
~
1
Fe t i t 30 urg. • • • • • • • • • • • • • • • • •
1 6
• • • • • • •
190
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r
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:
?Tord de la GUélcie10u;::e
1
1
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Q~ ~~Je.l\\l",pe.. 1 ?' 2.41-·
56
r
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::ombre de
,
G~r!)E-TERRE Es t
sucreries
superficie de canne ,1,
Sa inte-Anne
..
29
2 990
,
,
Saint François Grande-Terre •••••••••
17
2080
·.....
,r
Le }1oul e
..
44
3 100
,1
,
GRAl:m:-TERRE Ouest
,,1
Les Alymes
..
16
·.....
840
,
,
Gosier •••••••••••••••••••••••••••••
4
190
,
~orne-à-l'eau•••••••••••••••••••••••
12
·.......
650
1
1
,
GRA~!)E-TERRE ~ord
~
1
,
Anne Bertrand •••••••••••••••••••••••
28
.. .....
2 140
,
,
1
Fort Loui s
..
29
·........
2 190
,
Peti t Canal
..
48
·.......
3 630
f
J
,
1
,
,
,
t
Gorand Bouy
..
11
640
1
1
Capesterre ••••••••••••••••••••••••••
4
220
,
,
Vieux- Fort
.
o
o
1
,
,11
,
Archipel des Saintes ••••••••••••••••
.. .......
1
La Désirade ••••••••••••••••••.••••••
l
o
·.....
1
1
o
,
Iles de la Petite Terre •••••••••••••
·.....
,
,. ,.;~I
·1·.·····
j •••.
:
!
......
t
La région de la Gra~~e-Terre occape la première place avec ses
227_sucreries. De toutes les dépendances administratives, Marie Galante
est la seule vraiment mise en valeur.
~i
t
,
6-4. LES PETITS PRODUCTEURS.
?
Sainte-Lucie, Cayenne Guyane et, à péirtir de ne3, Tabago, font
,
figure de petits producteurs à cSté des trois/pre~ières colonies.
Nous sommes très mal renseigné sur la production sucrière de Saint~ .
Lucie. Il semble que les ministres de la marine aient cherché en vain à sti-
muler l'entreprise des négociants dans cette fIe. Eloignée de la Martinique
de 7 à 8 li€ues,
elle subit comme la Guadeloupe de sa tutelle économique.
En 1775, elle compte au total 35 sucreries.
L'économie sucrière .SUY2T,aise, dé'.:1s la. seconde moitié du XVIIIè siè-
cle,e.' l'une des plus arriérées du I,:ouveau...,"'!onde. Car, bien que présentant
des potentialités agricoles ~vide~tes, la colonie n'a pu être correctement
iIj.j~:,,-..
l~A
.....
57
~ise en valeur. Les trois essais de mise en valeur dès 1762, se sont tou-
jours soldés par un échec retentissant.
La première tentative est l'Oe'L..,le de-eHOISEUL. En 1762, i l eut l'idée de
faire une importante colonie en Guyane. C'est à cette fin que le lieute-
nant oolonel
de dragon de BEHAGUE; p-ccoT.pagné d'un botaniste et d'ur.
ingénieur géographe, envoyé en ~ission d'é~Jde, y déolrque le 17 juillet
1762. De ~ehague et le géographe sont chargés d'étudier la topographie du
pays, la possibilité d'organiser la défense du nouvel établisse~ent et de
choisir le point le plus propice pour les diverses cultures dont la car~e
à sucre.
c'est sur les indications de De EEEAGUE et du gouverneur de la
colonie, d'ORVILLIERS, qu'a été organiséel'expédition désastreuse de Kourou·
Sur les 2 068 Alsaciens recrutés par l'intendant d'Alsace et embarqués à
Marseille du 30 Mars au 2 Ha~ 1764, 173 seulement, les survivants du désas-
tre, ont pu revenir(1) à Marseille, pour ~tre rapatriés dans leur pays.
L'entreprise tourne en pure perte. C'est le premier désastre, baptisé dé-
____s~~tre de Kourou, qui a donné sa triste rènommée à la Guyane. La France a
échoué dans sa tentative de colonisation. C'est pour assurer la subsistan-
ce de ceux qui y sont restés que le pouvoir royal accorde, par lettre pa-
tente du 1er Mai 1768, la 'o&.Ibéftê de c6mmerèë~---âvec
toutes les Natiohs,pour
une durée de 12 ans.
En 1768, un nouveau projet de coloni~ation est lancé. Une nouvelle
,
compagnie est constituée pour fonder un grand/étàblissement sur les rives
de l'Approuague. Les auteurs de cette nouvêlle tentative sont, le ministre
de la Marine lui-m~me, le duc de Praslin, premier commis de la Marine et
-du Bucq.C'est à nouveau l'échec: le gouvernem~nt y perd ses avances et la
Coopagnie, 800 000 It.
Le troisième projet est l'oeuvre du baron de BESSNER, mêlé au-
paravant au projet de Kourou. Il veut défricher la Guyane avec 20 000 Nè-
gres marrons de Surinam; mais surtout, comme l'ont fait avec succès les
Jésuites au Faraguay, avec 100 CCO Indier.s qu'il ferait venir des régions
voisines du Brésil. C'est à cette fi~ cu'est créée en 1776 la Compagnie
de Guyane. Le fe~ier génér~l FA~LZ~, le chancelier du duc d'Orléans,
(1) Ils sont arrivés le 2;:' Cct;;::':",'? 17S5, Un?~rl et derr.i. aprÈs l'expédition.
±nd
~
58
LZ·:CIG::~ è.e l3ELLE ISLE e-: le ;·:3.~~eil:i.2.is ?ierre DA'IID, sont mêlés à ce
projet. !':ALOt"E'I', alors c:Jmmissaire géné~al des colonies, est envoyé en
:1ission spéciale e.n Gllyane~ pour étudie:r:_..~urp.19:ce .le bien fondé du pro-
jet, mais aussi pour aider aux premiers ~tablissements de la Compagnie
sur les bords de l'Oyapcck. Sur ses conseils, la Compagnie est réorgani-
sée e!l 1776. Hais les intrigues de 3ESSn:R, au sujet des fonds (1) pous-
sent ~ALotET à se désintéresser du projet. SUr ces entrefaites éclate le
Guerre d'Amérique. Le projet tourne court. C'est, Sans doute, ce qui
a poussé le pouvoir royal à proroger,par l'Arrêt du 15 Mai 1784, la li-
berté du commerce jusqu'en 1792.
L'état de l'économie sucrière guyanaise s'explique aussi par
le fait que la culture de la canne à sucre n'a jamais é~2 systématique-
ment encouragée. Les instructions de 1762 ne lui accordent pas la prio-
rité dans le projet de colonisation. Le second projet n'en fait pas men-
tion. Dans le troisième, c'est sur la culture des épices que l'on fonde
les plus belles espérances. Le ministre de la Marine, de BOYNES a fait
t~ansporté quelques plants de l'!le de France à la Guyane. L'expérience
--coronlale de Pierre DAVID à l'!le-de-France n'est sans doute pas étran-
gère à ces choix. Sartine lui-même approuve ce nouveau projet: la Guyane
devai t devenir la seule grapde cslonie tran~sg_jà.épices.; les plants
qui existent à l'!le-de-France, à Bourbon et aux Seychelles, devaient
être rachetés et arrachés(2).
La production sucrière des autres c~lonJes : Guadeloupe et Nar-
tinique, mais surtout de Saint-Domingue, ne suffisait-elle pas à entre-
tenir le commerce colonial et inter-européen de la métropole ? La colonie
est pratiquement délaissée par la traite française; la main d'oeuvre
manque totalement. C'est déjà suffisant pour compromettre l'éconorr.ie sucrière.
(1) Un fonds de 2 OCO 000 est souscrit. Les actionnaires choisissent pour les -
représenter trois fermiers généraux et le marseillais DAVID. r-:ais EESSj:2ii,
évincé -de la combinaison, présente un ~ouveau pl~ beaucoup plus séduisaDt.
Il doit donner aux souscripteurs 40 000 It de rente pour 12 OOClt une
fois payées. Ce projet est accueilli avec enthousiasme
il est nommé
gouverneur de la Guyane.
(2) Cette étude sur la Guyane s 1 in~pi~e largement de l'ouvrage de Faul r<ASSC!::
Z'!arseille et la colonisation frmçaise. 2ssai d 'Histoire coloniale, Pp.
175-100.
59
A la fin du XVllè siècle, le sucre occupe une vi~gtaine d'habita-
tions. Au cours du XYlIIè siècle, le nombre tombe à 4 ou 5 (1). En 1777, par
.~- exemple,$ur les 5 695 esclaves valides, 962 seulement sont employés aux tra-
vaux sucriers, soit 16, 89 % de la ::i':'ln-d'oeuvre noire. Un rapport de cette
date indique que la majeure partie des ateliers les plus considérables ne
fabrique que du tafia et du sucre 0:ui =~f:isent à peine pour la conso~~a
tion intérieure (2). La Guyane n'a donc joué aucun rôle dans l'économie su-
crière fr~~çaise.
c) Tabao:ro.
_ _ _ _ iili._
Si nous avons des renseignements . iatéressants sur les
èxporta-
tians sucrières de Tabago vers la France après sa restitution en 1783, en
ce qui concerne l'i~portance de la production en revanche, c'est prstique-
ffient l'ignorance totale. Les fonds de la colonie conservés aux Archives
~ationales de France, rue des Francs Bourgeois, sont presque muets sur 1:
sujet. Il s'agit de deux cartons classés sous les cotes colC10E6 et C10E8.
Le premier renfe~e dfS informations diverses concernant les années 1785
à 1789~ Le second regroupe des renseignements relatifs aux années 1783,
17c5 à 1788.
La seule information (iu b~2Ceel!t1i;' 1 e eu--jet- de la production est
contenue dans ce carton. C'est une liste des propriétaires d~ canne en
1765. La liste est établie par paroisse ou quartier et pour chaque propri-
étaire, la superficie de terre consacrée à la canna à sucre ou, à la fois
f
à la canne à sucre et au coton.
Cette liste est la suivante:
- -(1) DEVEZE (;-·1.), Antilles, Guyanes et la mer des Cararbes de 1492 à 1789,
p.312.
(2) Récapitulation du recensement général de la colonie de Cayenne pour l'an~
née 1777", M: colC 1445 Polio 273.
.'1:::\\:1
~~
1
Tableau n07 - Propriétaires de co..'1r:e ê. sucre en 1735.
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1
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1
superficie en acres
, i:
: quartiers
'Proprietaires.
1 e'. canne'...c-anne. et coton'canne et pa~êa 1~.
.:---------------t----------------------f---------t---------------t----------------I
i Saint- André
1 Rob te Young
: : O C
1
250
1
1
I,
ou 1 Maxwell et Balfour
1
1
650
1
1
Rockly 5a"
1
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1
1
J
1 Wilson et Douglas:
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1
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1
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1
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1
1
l
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,
1
l
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Young et Stewart
1
000
1
1
1
1
Saint-Faul
,
1
1
1
1
:
ou : S~r Mt Stewart
:
450 I
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1 ~ueen Bay
1 J
CamEbell
:
200
1
1
:
:
1 Creane
J.Masson
:
-----t-------400
1
:
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1
1 Gt et P
Franklyn
1
100
1
1
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MesS Or;
1 500 I l ! 1
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, !\\esbi tt
:
- - + - - 5 0 0 :
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i héri ti ers de
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400
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, D a n a l s o n
1
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1
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,
,
1 Fort-Patr±-ce
: Lericolet et Jackson:
350.
1
1
1
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ou", AIr.
Willock
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300
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"
"
Sarldy Point
,
, H. de Gi bb
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3 0 0 '
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l
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1
1 !-:atheus
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,
500
l
,
l
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"
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l
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Lei th et I r o i n e '
,
8 0 0 '
1
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,
:
1 Caldwell Craig
,
,
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1
1 W. Roanne
1
200
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:
,
, J. !lobley
,
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3 2 9 '
,
:
1
I l !
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1
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1
1
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1
,
,
" ' ,
,
~ ,
, Ser1lcold et Jackson'
5 0 0 ' l
,
,
1 Courlande
1 T. Collaw
1
300'
:
:
,
o u ,
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,
,
'Fort-David
' J . Al Campbell
' 3 0 0 '
,
1 :;;.;;
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1
"
l
,
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,
, T. Fairhlme
1
300'
,
,
,
l
"
,
1
:
1 H. de J. Gibbon:
1
725
i
:
1
1
Eaxwell et Balfon
,
100
1
1
1
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l
1
P'n. et T. Wilson
'
l
1,
2 0 0 1
,
1
,
1
1 Corquill M. r Vicar 1
:
eoo (+ 1lfriche)
:
l
,
Caldwell Craig
' 2 0 0
1
1
1
l
,
1
l
,
1
l
,
Drury Othey
l
,
5 0 0 '
1
1
1
"
1
1
l
,
John Hamilton
' 3 0 0
1
1
1
1
1
1
l
,
,
_ _- 1 - . . , 'W.
et G. Forbes
,
400
l
,
,
,
1
1
1
l
,
:
, W. Bartl e t t et G.
1 :
1
:
i
!
Forbes!
1CO!
!
!
L'analyse du tableau(i) mon~r~ sur le nombre de propriétés re-
censées, la canne à sUCre occupe la plus granàe partie des terres cultivées.
(1) AI·: C 10 E 2
i
61
l
t
1
effe-:, elle occupe seule 6665 acres, avec le coton 6 414 acres et,
1
.!.•.H.
..~ les friches, plus de 200 2cre~. Cette con.tatation montre-t-elle
;~I!
.,.
c;ue
" ,
22 culture de la canne à sucre a ~rob"'''"ssé à. 'l'a.b.a.g.o...'?- Il est diffi-
i
cile d'y répondre, n'ayant certaine~eht ~as la liste complète des pro-
r
r;r1.e"tes. ?':ais, il est évident que si l'.)[). ùevrait se limiter aux seules
in:c~ations contenues dans ce tablea~, on ne peut que constater 1'6'10-
l·.ltion de la p2rt des terres réservées à la cul ture de la canne. Car.;
èurant l'occupation anglaise, seul le tiers ces terres cultivées était
occupé par la canne à sucre. Jean-Claude j;ARDn; fai t cette constatation
sur trois an.•'1ées : 1771, 1772 et 1773 (1).
Le~ ~ifférentes paroisses n'accordent pas la même import~'1ce.
à la culture de la canne à sucre: la paroisse de Courlande, avec ses
2 50C acres consacrés à la canne, apparaît CQ~~e la première région su-
crière. Elle est suivie par les paroisses de Saint-Paul, avec 1 600 acres
et de ~arbados avec 1 315 acres. Au Fort-Patrice, la canne à sucre oc-
cupe seulement 850 acres; c'est moins encore à Saint-André: 400 acres.
I l s'agi t de terres consacrées exclusivement à la culture de l a canne.
Les propriétaires sont tous anglais, les noms l'indiquent ai-
sément. Certains d'entre eux sont recara {a li.... àe'lJe }!lareissesdifféren-
tes : Maxwell et Balfour sont à la fois à Saint-André et à Courlande ou
Fort-David. J. Campbell est propriétaire à Saint-Paul et à Fort-David.
Caldwell et Craig sont à ror~Fatrice et à Fort~David. Mais Young et
,
Stewart,à Saint~Paul, apparaissent, par la sup~rficie consacrée à la can-
ne à sucre, 1 000 acres, comme les plus gros sucriers de l'!le.
Les négociants français ont bien essayé d'entrer en relation
avec la colonie après sa restitution. ~ais, comme le montre le nom des
propriétaires, la colonisation française n'2 pas eu le temps de s'y dé-
velopper aïant la Révolution. Ces relations directes se sont donc faites
~
._~,~~~... gr~lde ardeur, malgré les incitations du ~aréchal de CASTRIES, ministre
de la Marine. On peut donc dire que T2baeo n'~ joué aucun rôle dans l'éco-
no:::ie sucrière française.
(1) ::AR1)I!: (J.C.), La r:lise en V2.l.eUr (:2 l'î2.e Ge ':'~bp.P.'o 1763-1783, p.230
cf. ~l1fra P.33
62
La conclusio~ est facile ~ tirer. Je 1763 jusqu'à la Guerre avec
~~Angltterre en 1793, la France est le flus gros ;roducteur de sucres aux
Inè.es Occidentales : de 1766 à 1770 ,4C, 4~ ;; du ""sucre colûYÜaleiltre- en
~rope ;roviennent ùes colonies fr2.nçaises (î), 3E, 34;~ des "3ritish
'..lest Indies", 10, 36 ~i du Erésil, 2 :' cies colonief: espagnoles et le reste
partagé entre les colonies hollandaises et da~oises.
En 1775, la France fourni t 43, 31 ~~ du sucre colonial européen
des Indes Occidentales. L'Angleterre fourni t 32, 40 ~~, le ?résil 8, 29 5~,
le Danemark 3,39 %, la Hollande 5, oe;: et l'EsPligne 7, 53 ~~(2).
En 1777, les colonies françaises en fourniront 50 %, les anglaises 25 ~.~,
les hollandaises 10, 94 %, le Brésil 7, 81 ~~, les espagnoles et les danoi-
ses 6, 25 ~~(3). En 1790, les parts sont respectivement de : 31,05 % et
26, 14 % pour la France et l'Angleterre, 14,44 % pour le Brésil, 4, 90 %
pour les colonies espagnoles, 9, 15 % pour les rIes danoises, C, 98 %
d'origine indéter:ninée et 16, 34 % de l'Extrême Orient (Chine, Inde et
Formose). Il s'agit cette fois de sucre importé dans le monde, ce qui
rehausse encore la primauté française.
Mais cette supériorité repose essentiellement sur Saint-Domingue.
Quatre types de sucres proviennent deg ddldfilés Ibtnçcuse's': le sucre brut,
le sucre terré, le sucre tête et le sucre raffin~ ou sucre blanc. Plus
grend producteur, la France est aussi le principal exportateur Q€
sucre
car l 'Angl eterre, le concurrent immédia.t, consomme à l t int!§rieur l'essen-
,
tiel de son sucre colonial: 79,3 ~~ en 1775, ~'o ;; à la veille de la
(1) Les exportations annuelles sont évaluées à 193 CCo tonnes dont 72 CCO prO-
viennent des colonies français~s, 74 000 tonnes des colonies anglaises,
20 000 tonnes du Brés~l, le reste est partagé entre les colonies hollan-
daises et danoises. Cf. GUi~:DER FRAi:K(A.), l' 2.C curnu l a ti on r.Jondiale 15CC-
1800, p. 21 2 •
_________i~) Sur les 265 500 tonnes de sucre fourni par les Indes Occidentales, 115 000
tonnes proviennent des colonies françaises ; les colonies anglaises en ont
fourni 26 OOC tonne, le ~résil 22 OCO tonnes, les rIes danoises 9 OCC, les
colonies hollandaises 13 500 tonnes et les espagnoles 2C OCO to~~es. Cf.
SCffilAKE;;!CURG (C.), Les sucreries de la ~uadeloupe••• , p.93.
(3) Colonies franqaises, 160 COO 000 lb ; ar.F,±-a-ise, EO COO 000 lb ; hollo.r.dai-
ses: 35 OCC OOC lb ; Brésil : 25 OCO CCC lb, espagnoles et danoises:
20 000 000 lb.
63
révolution américaine. t-:ontrer quels ont ,~té les r.lé..rchés d'appel de ces
!
-'-------
sucr~s,tel est l'ob~~t d~s développements qui vont suivre.
i;~;:il.····
l:r.r:: •
!~f'
11/ Les zones de consommation
Les balances du commerce (1) constituées en France en 1713, à
l'imitation de l'Angleterre, constituent pour le chercheur, un précieux
instrument. Zlles renseignent sur l'origine ~es marchandises reçues et la
destination de celles sortant de la France pour l'étranger ainsi que sur
les quantités. Elles sont élaborées à partir des copies plus ou ~oins ex-
actes des déclarations que les commerçants sont obligés de faire aux rece-
veurs des fermes, des marchandises qu'ils reço~vent de l'étranger et de
celles qu'ils y envoient. Les balances de la· période révolutionnaire (2),
- - - -
les plus co~plètes d'ailleurs, classent les débouchés du commerce français
en trois cat~gories distinctès
les marchés étrangers ;
le commerce privilégié, en so~~e, le commerce colonial qui
comprend : . ' : ,.~..'. tes pêch~ p~che du hareng et de la morue ~
les éta-
blissements de Terre-Keu.e, le commerce du Sénégal et de Guinéœ, le commerce
de l'Inde regroupant celui de l'île de France et de Bourbon, des états de
l'Inde et de la Chine
les pays et provinces françaises assimilés à l'étranger.
(1) Ces balances sont cons'2vées aux Archives !;ationales, rue des Francs 30ur-
geois, dans la série F
commerce et industr~2. Ce sont, pour les années
_______1775 à 1780, 17?2 et 1727, l-=:s sous sÉrie~ F
242 à 250. 012retrouve néan-
mOlns des renselgr:.ements c')ncern2.nt l'aJmee 1727 d2.ns le F
251, qui regrou-
pe les balances dE 1767-1769 et an V ~ 1825. Four les nremiers mois de 1792,
on doit consulter la sous série F 12 252 et pour î788, F'2 1835, on verra aussi
le F12 1834 A pour 1767.
(2) Ce sont les balances classées d2.ns les sous séries F12 1670 à 1678 et com-
prenant les années 1729 à 1793.
;1~·H·l
;~~~
64
1
1
Ce '!1arci:é comprend : les provinces di tes de l'étranger effectif, c'est-à-dire
les p~~tes le
plus récemment r8unies à la France: Alsace-Lorraine, trois
~
Evêchés, Franr:he-Comté, et qui ont conservé lib:·} COH!!!lunication avec l'étran-
ger et, par conséquent, séparées douani~remEnt dE 13. France (1"), et les
ports et :;;ays fra:lçais a.ssir.!ilés à l' étra.."'1[;er c('.~r:1e la ?:2.ute-Ville de Dun-
kerque ou "Dunkerque étranger", déclaré port fra:lc par la è.·:lïoérE.tion du
mois de ~overnbre 1562 et qui, de ce f~t, co~merce librement avec l'étra:lger,
notam~ent l'Angleterre, ~2 port de Eayonne et de Saint-Je~n de Luz déclaré
franc par l'arrêt du conseil d'état du Roi
du 14~"ai 1724 (2), l'île Dieu,
E·elle île et île N04'IDontier, toutes si tuées au large de la Bretagne.
Mais, en fait
de balance commerciale, seuls les marchés étrangers
sont comptabilisés. Les sucres sortis pour le commerce privilégié, genera-
lement du sucre en pain et quelques rares fois terré, sont en réalité, des-
tinés à la consommation de l'éq~ipage~u'au commerce. La distinction du
commerce avec les pays et provinces assimilés à l'étranger du commerce des
cinq grosses fermes, permet surtout d'apprécier le montant des droits per-
çus à l'entrée et~. la sortie de ces provinèes. Ces précisions données, nous
réduisons les zones de consommation aux seuls marchés étrangers.
Mais, loin de traiter complètemertt lé probleme du é~~merce, cette
é~Jde vise avant tout, a~rès la présentation
des zones de production , à
situer les marchés d'appel afin de montrer le caractère international du
commerce sucrier.
,
Nous classerons, pour la commodité, ces marché~ en 2 zones géogrâphiques
distinctes:
en Europe et hors d'Europe.
Le débouché européen des sucres français est, du nord au sud, re-
présènté par les pays contenus da..~s le tableau suivant:
Ce sont les 14 provinces qui commercen t li br(':teft't--les UI:.es avec les autres:
l'île de Fr2.I1ce, la ::o~andie, :2 ?ic2.rdie, =? ::;h?~,paé'Tle, la =ourgo~~e,
le 'Bourbonnais, le i~ivern2.is, 1<2 ~er'.lY, l 'C'r::'~?r.2.is, la Toü.rE.ir.e, le Foi-
tou, l'Aunis, l'Ar.Jou et :e ~"2.ir:I',.
A~' F12 261 2.
\\
,
g~Kj
~---'"'-- -
:
1
65
Tableau noe - Les marchés sucriers français au XVIIIè siècle.
PAYS
Ports ou villes d'entrep5t
,
(ou de déchargement)
~
Danemark
E1seneur
Suède
Stockholm
Les marc:J.és La Prusse (depuis 1782)
Stettin, Koenigsberg, Hériklé
Bal tiques
1
Russie et Courlande
Saint-Pétersbourg
!
1
t
Les quatre villes
Hambourg (surtout), Br3me,
hanséatiques (ou Nord)
Lubeck, Dantzig
Hollande
Amsterdam et Rotterdam
f.
Allemagne et
~"
Pologne
~l
.,..
'n::' •
ANGLETERRE
Angleterre
• . ·.f _:
Ecosse
-
Irlande
1
~---
-
Etats de
en----ti-lemagne et
-"
l'Empereur
en Flandre
Ostende, Bruges
Royaume de
Savoie
Sardaigne
Sardaigne
Suisse et
Genève, Bale(1), Yverdon, Nyon,
Genève
Vevey, Lelocle, Lausanne, Morges
,
~
f
Italie
Venise
Italie
G3nes
Naples
Espagne
Cadix, Saint-Sébastien
Etats ecclésiastiques
Portugal
Lisbonne
(1) Bâle est considérée comme la ville entrepôt de la Suisse. Les villes citées
sont celles qui figurent sur les acqui ts-à-cau tRm;-
~v~~~ ,. ,. "..
.....V._~.~c~,,~'c,''-''<'"''~,.'"'"·.,_·
•. _.'"M.''''_'_,."'
~._,~"·'~"~·fff"v"'>''''''''''''''~''r-.''A'' ~"
,,~.,
MARCHES
D'APPEL
DES
SUCRES
FRANÇAIS AU
1"" SIEClE
'"
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- .
- -
~ ...... ·1....
...
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iii
oct A N
'. 'A r LAN T 1 QUE
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l
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M I D I T E R R A N
E
'"
1
__.m_ -J
CARTE N'.
67
t
1
1
~
A ~a fi~ de l'Ancien Régime, la France vend des sucres à l'Europe
entière. L'~~v~rture des différents marchés européens aux sucres français
s'est fait~ progressive~ent. Les marchés traditionnej~nt les anciens parte-
naires co~~erciaux : les peys b~ltiques moins 12 Frusse. C'est à parti~ de
1782 que ce débo'.lché appar.:lit sur les 'Stats de 13 balance du com;:;erce. I l
s'agit donc d'un l':.ouveau ::l"'.rché~ °les c.uatre villes hanséatiques(1). :1ais c'est
",:rtout vers :!a;~toure que la Fre.nce exporte le. plus grande qua.'1ti té de sucres,
~e sucre en pain en particulier: de 1789 à..:1792, les re.ffineurs oordelais
font au tote.l 15 expéditions de sucre en pain vers les villes hansée.tiques
13 sont destinées ? ;-::a11bourg, 1 2. Brêrr.e et 2 à D2.ntzig(2), la :~ollande, la
Flandre autrichienne(3), la Savoie(4), la Suisse et Gnève, l'Italie(5), l'Espa-
gne et m~me l'Angleterre, ennemi numéro un de la France. Elle interrompt ses
inportations lors de la Guerre d'Indépendance américaine, à cause sans doute
des hostilités avec la France. Elle ne les reprend qu'une fois la paix rétablie.
A c8té de ces marchés traditionnels, se trouvent les nouveaux dé-
bouchés, conquis au cours du siècle. Nous avons déjà cité le cas de la Prusse,
qui importait directement des sucres de Fran~e, à partir de 1782. Ce commerce
direct se développetrès rapidement car, à la fin de l'Ancien Régime, la Prus-
se apparaît comme le principal l~portateur de sucres français dans la Balti-
que. ~ela siè~fie que cette puissance s'adre.s, désormais direç~ft~~pj à la
France pour son approvisionnement, contrairement à ce qui se passait avant
1782. BIle était alors ravitaillée, soit par la Hollande, soit par Hambourg,
qui font la revente da.'1s la Baltique.
Nous pouvons citer le cas de l'Allemagne et de Lé Pologne, à partir de 1778
.-
et des Etats ecclésiastiques, à partir de 1782.
(1) Les rspports avec ces villes remontent au règr.e de Louis XI. Louis XIV con-
clut ave~ elles plusieurs traités de marine et de commerce, notanoent en
1665 et 1713, dit trait~ d'Ctreck. Le 28 Septerr.bre 1716, la France conclut
un trai té de commerce avec "les villes ~anséatiques et autres neutre 1 du
:;ord", cf. "DocUinents S'..IT les villes hanséatiques: 1716-1E:12", A?; F 2566-595
------1(""'2+)-A"'N -'}"-+2-1932•
(3) Jusqu'en 1722, les balances du commerce ne mentionnent Que la Flp~dre. A p2r-
tir de l~, les enregistrements ~e font 30US le naD de Etats de l'em~ereur en
Allel:lagne et en Fla.'1dre. Il es: ~.robable qu'f.·:; è..é;èit c:.e ce ~~2_r.~·er::e~t, les
exportations aie:1t continu~ 3. se faire en directi'~e la ~'lanè.r€ ur:iquement.
(4) C'est le même problème qu'avec la Flandre. A ::?~tir ~e 1722, les er!registre-
ments se font sous le l'om de Sard3.i~e, 12 S2voie !-,Jit ~"'..rtie d.es ete.ts du
roi de Sardaigne.
(5) En ce qui concerne l'Italie propre:'1ent di+:e, 3.~r'?" -'-~uerre d'P.m~rique, en
1787 notamment, l'enregistrement €2t
fait S(jl1S lE: :10ir] è.:, n?:ilanes ':'ascane ct
Lucques".
68
Q.'J.ant 2.U Portugal, ses achats sont si illsif-;nifLmts Qu'il ne :nérite
pas d·'Êtrf~sé parmi les débouchés sûrs. Cl; pays :l'est enregistré que deux
fois dans les bal~~ces de l'Ancien Régime : e~ 1722 ~ 1786.
Q.uant à l' i::lportance des :narchés les uns par rapport aux autres,
l'analyse sera faite dans le dernier chapitre concernant les exportations.
Signalons toutefois que les pays de l'Europe du l';ord : :lollande, les vi).les
hanséatiques, les pays baltiques, constituent le principal débouché du com-
merce sucrier français. A preuve, en 1775, sur les 121 730 948 lb de sucres
exportés, 94 993 348 lb sont absorbés p2.r ces pays, cela représente 76,03 ;'<.
En 1776, ils en absorbent êO,30 ;. .. (99 711 326 Ib),63,~~1% e~ 1775 ("14 825 813
sur 23 197 363 lb), 49,71 ~.~ en 176C (12 108 573 lb sur 24 356 194), 75,60 ;.;
en 1762 (42 209 237 lb sur 55 631 139 lb), 64,09 ~ en 1787 (71 932 500 lb
sur 112 222016 lb), 67,21 ;; en 1788 (66 267 482 sur 127 248 425 lb).
Cette évolution est difficile ~ suivre en ce qui concerne la pé-
riode révolutionnaire, à cause des d~sordres intervenus dans l'établisse-
:TIent de 12 balance ciüèom~erce.Aucune coordination n'a dû avoir lieu penda.~t
cette période, si ~ien que les re:lseignements sont, bien que classés par
direction et par bureau, dans un désordre épouvantable. En plus de cela,
nous n'avons pu retrouver l'ensemble des infonmsii hm !'!.ft':' nette at=lTaient
permis d'avoir une idÉe précise sur le vol~~e des exportations sucrières
en direction de ces marchés.
,
En 1777 et 1780, leur part diminue co~sidérablement dans les ex-
portations sucrières françaises. La chute de 1777 peut s'expliquer par la
baisse dFs importations dee deux principaux marchés de l'époque: la Hol-
lande et les villes hanséatiques, malgré l'augmentation des exportations
sucrières françaises. Cette baisse ayant ~té faite au profit particulière-
ment de la Savoie, de la Suisse et de Genève (1). Celle de 1760 est due
en particulier, à la chute des importations hollandaises. C'est que la Hol-
_ _ _-----I.].J:;ia.....n....d.....
e..--ayant refusé d'assister l'Angleterre dans sa lutte, a été impliquée
dans la guerre. Le gouvernement de Georges III livre alors son comPlerce à
la rapacité de ses corsaires, le large de la 3retap;ne et la Hanche ~tant,
en temps de guerre, l'aire favorite des corsaires anglais.
Les sirops rr.élasses et le tafi;:; em~runtent les :nê:nes aires de
69
commerce. Les villes hu.'atiques en sont les plUE §:'r2.nàflSi::1}'ortatrices.
En :::Urope du Sud,-l 'Italie-et,d2.r.s une ':":oir.. _e rrres'Ure,l;apleset
l'Espagne, sont les princi:;::aux débc'lC~és.
Hors d'Euro;:e
-------------
.
Hors d'Europe, la ?rance dispcse de trois autres zones de consorn-
.
'
:na ,,~on.
Il s'agit de la Barbarie, du Levant et des Etats-Unis de l'Amérique •
Géographiquement, elle regroupe les trois échelles de ~~nis, Tri-
poli et Alger et les trois comptoirs de la Compagnie royale d'Afrique, à
savoir: la Calle, ]one et le Collo. Ce march€
n'apparaîtra sur les états
de la balance du commerce ou'à partir de 17E2.
Ce n'est pas -tm gros marché.
Il regroupe l:!s ports de l'empire Ottom&:ii, !t savon' les 4c!tê1:1 ë-s-
de Raguse, la I·:orée, Athènes, Salonique, Cons tan tinople, Smyrne, l'île
de Candie, de Chypre, Alexandrette, Alep, Scyde, Acre et Tripoli de Syrie
plus les trois villes d'Egypte : Alexanèrie, Rosette et le Caire.
l'
C'est le plus important marché sucrier français hors d'Europe.
Jusqu'en 1780, tous les sucres sortis des ports de France pour les marchés
hors d'Europe sont destinés au Levant.
2°-3. LES ETATS-UNIS DE. L' Ai:ERIQ.UE.
Les-rela-tions commerciales entre la France et l es Etats-UniE
interviennent ap~ès la signature des deux traités de 177E. Le 17 Décembre
1777, le roi de France an:1cnce 2.UX représentants des Etéi. "ts-Unis qu'il recon.'·
naît leur indépendance; le S j2.Dvier 1771:::, la négociati~'er,ga5e,
, .
.
8...··-r~ t::~':' C 2.1 :'.. t2 !
.:'~•• Î 2 1-, 22 •
~._-
1
70
about~ssant, 1" 6 Février, à la siV12.ture de deux trait€:s.
~
Le prer.lier eEt un traité d'a::litié et de co:werce, le second e~..t un traité
d'alliance da."1s lequel :1 est stipul{ qu'au cas C~l l'Ant;"leterre déclarera.it
la guerre à la ?rance ou occasicnner2it une guerre en cherc~ant à entraver
son commerce, Fra.:n.çais et Arr.~ricains fEront CBuse COilië'Ur.e contre elle (1).
Vais, si 'h:~s à faible distance des zo;-:es de productio:'1. : Saint-DordnfUe
est à 20COkT:s de FhiladElphie et à 6CCOk~s de ~or~eaux (2), ces liens èe
contrebande les unissaient tien avant ces tr~ités aux colonies françaises
productrices de sucres.
Dans ces conè.itions, le CO~I:lerce sucrier entre la France et ce nouveau par-
tenaire avaient peu de chance de se d~velopper. Les deux seules indications
d'exportations sucrières vers les Etats-Unis de l'Amérique sous l'P~cien
Régime sont celles de 17E2 et 17E8.
D'une façon ~én~rale, le continent européen constitue la princi-
pale zone de consoa~ation des sucres coloniaux français. La zone privilé-
giée étant toutefois cons1ituée par les pays d'Europe du ~ord. Les ports
français habilités à. fE±-rece commerce : commerce colonial pour acheminer
les sucres vers la métropole et commerce de réexportation, ont été désignés
par lettres-patentes.
..------~=-- ,~~', -=~-"
111/ Les candidats au commerce
,
f
L'une des constitutions favorites de l'Ancien Régime en matière
d€
commerce colonial a été les grandes compagnies de commerce douées d'im-
portants privilèges, primes et encouragements de toutes sortes, ~~s qui .
ne les emp~chèrent pas de languir plus ou moins longtemps et de è.ispara!tre.
Elles étaient nécessaires dans les premiers temps du commerce coloniAl
E}ui d:épassai-t--al-orsles forces des particuliers.
La liste en est longue ; nous n' en ci terons que Quelques unes, qui :L:1té-
ressent notre sujet. En 1633 est cr8ée la Compagnie de Ca~ Vert pour la
la) 1· ~ -\\. ". (;'3
\\1) P. le.",. ~~ tCP'M~~ ~ )OLi.~ J.J,. J1t"\\.4, ~ TIf 1 1'- 5~
71
traite ~égrière ; en 1635, la Compagnie des îles de l'j~~rique, chargée
par Richelieu de <c~ colonisatior.. EL!. e a re:::pli SOl, rôl e en y développant
la cul tc:.re cie lac2.nr.e et la fabrica tio:, du sucre. ~~1;C.1. ·~la Compa.-
;91ie è.e la terre fer::-.e de l'.Amérique devient }::, 8o":1:;"'.f-;li'2 d's LIées Ccci-
der:tales. Elle peut possÉder une cirlqu?ntai,.e ce n3.vircs e:1 ~eSllre d'effec-
t~er le voyage des Iles. C'est pour Colbert une ~uiss~~te ~~e pour ravir
aux ~cllanèais le co~nerce des Ile3. 2r-.1673 et 16[1 est créée la Compa-
gr.ie du Sénégal, en Janvier 1625, la Compaenie de Guinée, le 27 Septembre
1720, la Compagnie des Indes institu.éep2r La\\ol. :·S2.!"'J..:r.oins, l'on co:nprenc.it
que ce système ne pourrait qu'entraver le dévelcppement des colonies, faire
renchérir les produits cclonia~~et di~inuer les exportations vers l'Europe.
COL2ERT lui-même, tout en lançant la Compagnie des Indes Occidentales en
1664, encourageait les initiatives privées. Il y avait donc un balancemçnt
entre le privilège com~let donné ~ des Co~pagnies et la liberté co~~erciale
seoordée
à des armateurs nationaux au XVIIè et dans la première moitié
du XVIII è sH:cle. Dens la seconde moi ti é du siècle, les ports habili tés
à pratiquer le commerce colonial et celui de la réexportation des sucres
bruts, terrés et raffinés sont définitivement' fixés.
Le commerce colonial se compose de deux branches : le co~~erce
en droiture avec les îles et le commerce circuit~ux, plus connu sous le
f
nom de commerce triangulaire. Les premiers textes officiels réglementant
ce commerce apparaissent dans le premier quart du XVIIIè siècle avec LAW.
Ce sont d'abord des lettres-patentes de Janvier 1716 (1) qui ouvrent le
commerce de Guinée détenue alors par ~a Co~pa~ie de Guinée,à cinq ports
du royaume: Rouen, la Rochelle, Bordeaux, rantes et Saint·r·:alo. Elles
sont complétées par une autre de portée plus l:~itée, les lettres-patentes
de Janvier î719 (2), élareissant, ce privilège 2.UX néGociants du Le:'§;"'.ledoc
avec pour toute- obligation,l'EiI'lr.err:ent de leurs na'lires oaI:s le port è-e
Cette. l'lais une liberté éphémère, C2r ,2",.r.S ~2 tentZ'tive dr: :::o",oI'ole
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e ,,,.res-pa en es nu ~,ûl pour 1.& ~l er (' c.u COr:;:.:e:::·cP ~T.ê ~es C')str:cs ci 'i.fri-
que données à Paris au ~oü de Jay,vi er 171~", A:- AJ ;n c;.
(2) "Lettres-patentes du :toi peur [..:erJEttre ê'.ux rj~-f)ci:-::-;t..' '.:'J L;:;r;';"'.lê':OC --:le ':."ire
le commerce de Guinée, donnÉes :~ L.ris
·u r")i,,
(:~ ,!~:-.vil::è:' Î71~"
~D XI 9.
0
. . .
•
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t~~'i
72
sur le CCL':lerCe >o:c:i~'i8ur et cclélnia1, LA':l insti tue le 27 Septe'1lbre 1720 une
?re::1.:.ere GT?::.d2 -o\\" ..l1_e;g;,ie de commerce pour l'Occident, qui le rend '1laitre
de la trai te .ne'!2'ière. Les particuliers :. al'lciens trai tant ....,.-:-f-ina:n·ciers-,-·
fer.T!iers du te~ps de Louis XIV, rentiers et commerçants, 30nt invités à
~,articiper a.ux spéculations de ce commerce à titre d'actionnaires de la
Compagnie. Il faudra attendre l'arr~t du 31 Juillet 1767 pour que la trai-
te soit à nouveau ouverte à tous les négociants du Royaume, moyennant un
.
droit àe 10 It par tête de Noir, dont le paiement est d'ailleurs compensé
par des primes.
En ce qui concerne le commerce en droi ture, ce sont les "lettres-
patentes" d'Avril 1717, portant règlement pour le commerce des colonies
françaises (1), enregistrées au Parlement la 12 Mai suivant, qui constituent
le premier texte officiel. Elles ouvrent le privilège de la liberté commer-
ciale à treize ports: Calais, Dieppe, le Havre, Rouen, Htnfleur, Saint.
~~alo, l'!orlaix, :Brest, Hantes, la Rochelle, :Bordeaux, Bayonne et Catte. Afin
de prévenir la fraude, les négociants qui arm~t des vaisseaux pour les
,~ .
tles, sont contraints de faIre leur soumission au greffe de l'amirauté du
~.....
~
...
~""7----'''-.-:-~;:7:-·::''. .' ..;-:.,:;r,;.~ ..~,. '.
port d'armement par laquelle ils s'obligent, sous peine de 10 000 1 t-li"amen";';""-
àe, de f?..ire revenir leurs vaisseaux directement dan.s le PD~t de leur dé":
~art (2). Cette dernière obligation n'est pas d'()crdre~'~!!'l!l!!'l'!'m:~'mllm~mrr----""'1
--.
mais, plu têt fir..ancière ; c'est, qu t en effet, 1 tEtéa:t' ..~él.:7:_.1e biais des
fE,r:Jiers généraux du commerce, prélève des dro'i ts sur les denrées coloniales.
Elle permet de ocntrâler les arriv~es, donc les rentrées-des taxes. nous
,
étudierons cette question dans le chapitre suivant.
Mais une telle reglementation, sévère, restrictive et contraire à
l'int~rêt m~me du commerce, s'avère d'une application difficile et peu effi-
t·
Céce. Les privilèges qu'elle accorde,exemption de droits de sortie et d'en-
-:rée sur les cenrées et :r!archa.'1dises du. Royaume et de l'étranger (3), décla-
rées pour les rIes et colonies françaises d'Amérique et privilège d'entrep~t.
(1)'~ettres-patentes du Roi portant règlement pour le commerce de~2coloniis
françaises, données à Paris au mois d'Avril 1717", Art.I AX F
1639 (A).
(2) Idem, Article II.
(3) Idem, Articles III et x.
-.
73
-. :··;·····1.··
• • • •
~:,
sus ci tent jalousie et convoi tise chez les négociants des ports écartés, ces
::/f
privi1ègee étant perçuî comme l'occasion de faire de bonnes affaires. Ils
u.~ multiplient les "représentaions"- afin de bénéficier, comme 1eursçg11ègues
_-
-
..
.
~ . - - - - .
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-- des ports sus-cités, des avantages et exemptions accordés.
1
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--E""..... '••.•.
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"::";'î'..•..
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C'est, par exemple, le cas de Cherbourg, qui abo'":"':'it à sori inté-
' f
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gration au commerce colonial par l'arr~t du 18 Juin 1756 et des Sables
(
' ; {
d'Olonne résolu par l'arrêt-4u--17 Décembre 1764 (n.Signa1ons aussi que
i
------.---1'
Marseille, exclu d~ commerce colonial par l'arrêt du 1e Décembre 1716, con-
. f
f
firmé par les lettree-patentes d'Avril 1717, suite à une forte pression des
autres places du commerce qui auraient voulu le voir se cantonner dans le
.t
---~
.*
négoce méditerranéen (2), arrive, par àe vigoureuses protestations, à obte-
":;:':1
~ . nir l'annulation de. cette mesure discriminatoire par les lettres-patentes
de 1719.
Seul Dunkerque n'a pu réussir à obtenir la suspension de son exclusion des
treize ports privilégiés pour le commerce des Iles. Ce port, ouvert au com-
merce colonial par le règlement provisionnel de Juillet 1704, en a été exclu·
en 1717 à. cause du privilège de fra:rrch1-seaccordé par la délib4ration du
~~~'DloiEl;dêNOvêRiD're1662 (3). La franchise' permetta.n·t-;U··\\port:bêrt~i:iciaire:74éj-.,.)~
co:runercer librement avec l'étranger, dans le cas d€Dwùcerque_,notfl!]unent.avec
l'Angleterre, la justification de cette exclusion ee.t..,at#~~Iii·.IiI
.. ···IIi·"""'oWil-'l""'
""~
que les négociants n'en profi tent pour envoyer aux rles :d~ë"'"·;"a.rchandiJ;es pro-
hibées, au détriment de celles du Royaume et des autreSp()rts~ Cette pruden-
ce est toutefois excessive, d'autant plus qu'il ~st stipulé à-l'artic1e XII
des lettres patentes è'Avril 1717, que les négoeiante français ne peuvent
charger pour les Iles aucune marchandise étrangère dont l'entrée et la con-
:~
.
sommation sont défendues en France m~me, celles permises étant connues(4)
------erquè les magasins: servant à l' entrep5t des marchandises et denrEfes destinées
t:
(1) "Arrlt du Conseil d'Etat du Roi qui permet aux négocians'et habitar.s de la
ville de Cherbourg de faire directement par le port de la dite ville, le
'-cOmmerce des Isles et colonies françaises de l'Amérique, du 18 Juin 1756" et
"l'arr~t du Conseil d 'Etat du Roi qui admet le port des Sables ct 'Olonne au
nombre de ceux p~r lesquels il est permis de faire directement le commerce
des isles et colonies françaises de l'Amérique du 17 Décembre 1764" A:: ADXI9.
(2) DEWo:IcNY-(t.), Cargaisons indiennes, Solies et Cié' 17[1-i7Q3,n f.?~.·n
----
(3) An F1241(3) (Conseil du commerce, séance du Jeudi 20 Ja.r,vier n121.
(4) Boeuf salé étranger. soieries et autres ::1archa!idises è'L"i,,'r:rr: et'.:or:trat
vénaisin et toiles de Suisse : Lettres-p2.tent.es, i.rtic::'es XI, ;:III et Xrl•
.
....
.. c_.·_...·
·
...
---~
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-_~..,.
74
pour les îles, choisis ;a.r les négocier.ts à le'.l:rs :r2.is, ;,;ê!:-t lèr-n';:s ,3. trois
cléfs d4.fférentes è~çot l'u::.e est remise au CC:1Fnis c'.u fe:r;::ier ,-:es Ci:-lC: €,rosses
fermes, l'autre au commis du fermier du Domaine d'Cccide:1t, ,-t 1& tr.Qisièoe,.
entre les mains du préposé des négociants (1).
-GEtS è.enrées et marchandises sont c.u départ è.éclarÉes 2U buree.u èu
lieu d'achat, s'il n'yen a pas, au plus proc~e oure2u : qua::.tités, ~ualités,
poids :t mesures, visi tées·et plombées par les commis des fe:ues qui déli-
délivreront un acquit à caution (2). Elles sont en outre visitées et pesées
par les commis des fermes pour en vérifier les quantités, Qualités, poids
et mesures et ne peuvent être chargées dans le vaisseau qu'en présence deo
ces commis.(3).
L'intransigeance du gouvernement peut s'expliquer par la pression
des autres places du commerce. L'adjudicataire des fermes unies et le Conseil
du commerce, appelés à statuer sur une requ~te des négociants de cette ville
demandant_à 3tre maintenus dans leur commerce avee les tles, conformément au
.~glementprov1sionnel de JuilTet1704, se prononcent en 1718 pour la confir-
mationde~iarra.richise. Elle :e sera par l'arr~t du 22 Janvier 1718. Hais,
dans l'application, on se montra très laxiste, en accordant des permissions
gr~e auxquelles, les ports exclus du commerce colonial ~iie lé Champ libre.
DŒnkerque
et d'autres ports et villes d~ l'arrière pays ont pu ainsi, sans
que le règlement de 1717 soit abrogé, participer à ce trafic.
•
f
C'est le libéralisme commercial de la~ourgeoisie constituante Qui
aboutira à l'ouverture du commerce avec les colonies à tous les ports du Roy-
aume, par la loi du 22 Juin 1791. Elle fait cependant obligation aux négociants
--'qUT arment pour les colonies françaisEt de faire directer.:ent le retour dans
t
un port français, sans toucher à l'étranger. CelA.montre que, malgré l'es-
pri t du "laisser faire et du laisser passer", qui a::.ime l'Assemblée Co::.sti-
tuante, l'heure étai t encore à la prudence et 2.U nationali sü:e co:r:;le:rc2.::;,l ;
.(1) Article XXX, p.15.
(2) Article '\\1, p.6.
.. (3) Article VIII, p.7.
~.~.'
.-: ....•. '
. "
.
75
il Y Ellait de l'int;r~t des ports ~e C8~~erce.
La Convention ~r{~~;e eJ ~enforce ce nation21is~e com~erci2l ,)ar l'acte de
navigation du 21 Septembre 1793 : les b2-tirnents r.§puUs fr3·~"ais~.. qoiv~nt.
être construits en F~ance, appartenir à ies Fra,-çais, être CC0.~andés par
des Français (1). r·:ais, comme les autres régle:rlenta tions, celle-ci n'es t
sévère que dans la forme, il en va autrement pour l'application. En effet,
sur les 39 navires sortis du port de Eordeaux en
1793 pour les îles, 24
sont ~~éricains et seulement 15 français; sur les 21 expédiés de ~antes,
6 sont également américains (2).
o
,
f
(1) :BRAUDEL (F.), LAEROUSSE (E.), ::istoire écor.omiaue et socL2-l.e.-è.ela France,
Tome IV, l'avènement de l'ère incustrielle, pp:14-15<
(2) "~avigations avec les isles françaises cie l'Arnéric.ue, ::'.=: côte ci 'Africue et
les Indes Orientales, pendant les 1C 'Jrp:niers 'lois 20 jours c:c l'a"nse 1793
au 2è à commencer du 1er Janvier jusq~''')u 2C '"ov(',;;ore suiv2.n~ - entr,?e et
sortie des b~timents", A~ F12 1679.
76
Tableau n 0 9
7illes et ports intéressés par le COi"~.erce colo:Ü2.1 è-ar.s la
àeuxiè:::e ~citié àu X7IIIè siècle (1).
~,,-,,",-
':'~i",
~. ,
:. ~ "
..!
1773 177511177'6 1717 1778
1779
1700
17fr7
1788
1791- 1792
1793
,
I~;S
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+
- + - + - + - + - + - + -.' +
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ANDRE
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QUENTIN
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MAI.O
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UErT
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.~:!1;!·~1
de la I~a.n~
+
-
,
18 <3tdé l'Océ-
+
-
-
, l
1 Eéài tter.
+
- + -
,
~tte
.
e signe + indique les sorties de navires et le signe ~ les entrées.
-f
(1) Sources Pour 17(~-: JI TARRADE, le commerce colonial de la France à la fin de
!
l'Ancien Régime ••• , Tomes III, pp.230 et 232. C'est le seul emprunt fait à
~
Tarrade. Pour
les autres années, nous avons retrouvé les ren,~ignements dans
les archives de la rue des Francs-Bburgeois. 1775 à 1780
: F
242-248
1787-88
F~~1835.
Tableaux n021-38 et 40.
1791
F121670
1792
F
1672
12
1793
F
1679.
77
. ,
rendu
Uce pr~cisio~ s'impose ~our faciliter la lecture du t~,clE2.l..: CC'.'":\\-
~lexe pâ= la longueur dt~~iste des villes pr~tiquant le co~~erce coloni~l.
Cette complexi t~ provient de ce que les re:1seigneJ'Tlents viar..ner:t ci
è:e-U){usour-
ces diff.§rentes : la liste cont~lJue Cé'_.ns les états de 12. '!:;,:ü2:-:ce è,-~ CO'~~:8rce
est plus longue que celle propos~e par les stats de la n2.vigaticn. C'e.st
eue les oremiers 'Jrenne,1t en comnte toutes les villes 0'" le~; ::1é:.l'ch2:-.dises
...
. . . . . . . .
...
ont été déclarées pour les rIes, les seconds ne recensent Que les forts
d'ar3e8ent et de désarmement. Les deux listes sont donc com~lé~elJt2ires.
Ainsi, les marchandises déclarées à Amiens, c~1ef lieu de la géné-
ralité du ~~me nom, sont embarquées soit à Calais, soit à Saint-V~lérJ, les
o
ë.eux ports de la g~néralité. Celles déclarées 't ~:ontpellier, chef lieu de la
g~n~ralité du Languedoc, sont embarquées à Cette.
Il importe aussi de préciser que la Flandre est une gén~ralité, le port
d'armement est Dunkerque. Lyon expédie ses marchandises de Marseille. Enfin,
Rouen, chef lieu de la généralité, regroupe les ports de Rouen, Le navre,
Dieppe, Fécamp et Honfleur. Un certain nombre de navires venant des colonies
et d~clarés pour le bureau du ?:~iont leur' désannement à Honfleur.
.....
_. i
..,
En 1767, 11 sur les 73 bâtiments enregistrés dans les ports du bureau àu
Havre, ont fait leur désarmement à Honfleur; en 1773, le nombre est de 4
sur 90 (1).
La multiplication des ports d'armement pour le commerce àes îles
s'inscrit dans l'essor g~g~ral du commerce fran~ais ; elle marque surtout
r
·11
1
selon les termes de Paul BUTEL, "l'américanisat'ion des échanges" (2).
::miHIvt
Le commerce circuiteux par contre, se limite presqu'exclusivement
aux ports désignés en 1716, bien que, en 1767, il soit devenu libre à tous
les négociants du Royaume d'armer Ilour la côte d~ h~rique. En 1773, e2.r-t
ports seulement ont ar.m~ pour la traite. Ce sont: le Elavre, 5cnfleur,
Saint-J'lalo, Nantes, la Rochelle, =ordeaux et ?·:~rseille. En 17EE, il n ':r a
(1) "Etat
des bâtiments français qui sont 1='(',tI'd's
~onfleur, venant des color~es ]endant les six
derniers mois de 1767."
"Etat des bltiments qui sont entr~s da~~ les
ver.2nt d.es colonies franç2.ises de l 'kr.E5riGèle
A:~ Col F2B3.
(2) LEm·; (Fierre), Histoire écorcc",iGue et srci:-l'"
,
,
_': ~ -=:"'0 ~4. b-: e , -=-.1:1,
--.:------
- - - _ ...._... __ .
78
en ~_ Q".le ;-;euf,c'eet--\\-dire, ""Tl )i.\\.1S 'ies sert ports citcis, Port-Lo,<is et
Rochefort (1) ; en 1791, le <'I~mbre se r~dui t ?, qUE tre ports : :Eorè.e2J.X,
_Xan1es, Lorient et le Iiavre--(.2;-;en 1792, ce sont ~:-decrux; la ::tochE::1E~,
?:antes, SéÛnt-'1 ...1o o Marseille et àivers ;orts de l'Cc';2_n et de 1:,. r:anche,
dont ni le nom, ni le nombre ne sont précisés, qui arment pour le com-
merce du Sénégal et de Guinée(3). L'état des pai~ents des primes de
1792 ne fai t état que de six ports: Bordeaux, le Havre, Honfleur, l?antes,
Rochefort et Saint-Servan (4) ; en 1793, il ne sera plus question que de
trois ports: Bordeaux, Nantes et un port non désig:J.é de la Nanche (5).
Evidemoent,avec la Révolution commence le déclin de la traite
o
française. Jean METTAS indique qu'il commence en 1792 et que les derniers
négriers partent a".l début de 1793 (6). Cela provient du fait que, depuis
1791, de graves convulsions agitent Saint-Domingue et que les abolitionnis-
tes s'activent de plus en plus. Avec la Guerre en 1793, c'est la fin de la
traite régulière.
Mais ce qu'il est importar~-:r.etenir, c'est le nombre rédui t
ï i i I
..• i i
, l
·. ·
.
de ports n!iriers par rapport à ceux ir:téressés par le commerce en droi ture.
"1'
~'engouement pour ce dernier s'explique par le fait qn'il est )l~~s..a.v.a.n__t_a_-
~t
geux que le commerce r:~grier. En effet, non seulement l'armement né€,'Tier
i
!
exige des investissements financiers très importar.ts (7), mais ces capi-
r
taux sont i!TIll1obilisés aux colonies de par la. lenteur des paiements, toute
~chose qui s'oppose aux calculs à courte vue des.négociants. Le coût de l'ex-
,
.
pédi tian r:§grière, "le miss-hors" ~ eemble avoir "été un 41ément important
de sélection. Seules certaines grandes fortunes,
tels les Louis DRCUIN,
ARNOUS, père et fils, BOUTEILLER Georges Richard, TESSIER et GALIPAUD,
- - -
CERFC~; et eOURTOIS de i\\'antes.; faisant .deux à hui t expéditions .
Voir J. Tarrade, op. cit., p. 23C et 231.
:-louvement de la navigation de 1791, Sortie A~: ?12 1670.
A,· ." '12 1672 .,....
1
•.
t
r~ece
"e
b .
"Fayement prime de 160 par t~te de n~gre (a~r~s la Loi du 16 AoOt 1792)"
AN F12 1653.
(5) "~:avig?.tion avec les isles françaises de l'Amérique, la côte ct' Afrioue et
les Indes Orientales pendant les 10 premiers mois
20 jours cte l'3n~~e 1793
au 2è à commencer du 1er Janvier jusqu'a.u 2C ::ove:.lJre suivant" A::?
i679.
( 6) I>:ETTAS (J.) "Pour une histoire de la trai te àes ::oirs fr,?I:çaise : -":Jurces
et ~roblèmes", RPHOr, Tome LXII(r975), n0226-227, ;,p.19-46, p.3C.
~.~765,unmérr,t~ire dela R.och~lle fixe les .dé:ler;se~ Je ",;üse-:l0rs i':;.r. né-
i~~;4':
-~------::grl.er ravitaille et armé pour le transport ae 3('( ?"'i"!'PS éi 242 sec ::.t, c:-tif-
.
fre r':Jnd, Y.:;. r'~AnTI::, ~is-:c;ire ~e l'eRc1:=lvil5't àM"" le-s co\\oC'de.':l ~1\\~\\.S'5i-~,tlt,
, 79
par an (1) pour les rIes, ont des ~oyens suffisants pour s'ado~ner à l'~r
mement négrier. Le fait que les ;='us i:nportants ports ntfgiers tel:: :·3.nt(~s,
la Rochelle, le Havre et :Dorde, ~iguren t par.ï1i les plus icportants e;1 ce
:!i
..qui concerne le cO:'lIne-rce-en--à'Eei-ture, 11' est p2.s fei t pour n<JuËsur::rS'nê:'-o
lJous verrons plus loin qu'en effet,les ?!'::lateurs font :'es ex;';diti:)Y;~ r>~-
,!rières afir.. de satisfaire les besoins en ElP-Ïn-d' oeuvre de :eurs corrssc:::'",-
àants établis dans les rIes. Kais l'appel du commerce, que ce soi: ?n droi-
ture ou circuiteux, s'exerce de façon inégale sur les ports, chacun répo~-
dant en fonction de ses aptitudes.
o
20
~~_~!iE~E~~~~_~~~_E~E!~
)
Le nombre de navires sortis et entrés dens chacun des ports est
l'unique indicateur permettant de Qesurer l'importance du port dans le trafic
colonial. Les états de la' navigation sont à cet égard la sou'rce unique.
Ceux conservés aux Archi ves ~~ationales 2. Paris sont inco;:-:'lets car, ainsi
que l'indique Jean TARRADE, jusqu'en 17 e4, le;:; balances du commerce ne pre-
naient pas en compte les états de la navigation.
Ainsi, pour une étude systématique sur la navigation colo~i9J9, le.
seules informntions réunies à Paris ne suffisent pas. Il faut se référer aux
Archives des Amirautés des anciens ports coloniaux. ~ais telle n'est pas
,
notre intention. Nous vouions seulement dégager;la hiérarchie des ports
,.
~ dans le commerce colonial.
A cet égard, quelques exemples suffi3ent car cette hiérarchie ne semble pas
avoir évolué dans la seconde moitié du XVlllè siècle •.
Ncus empr~ntons à Jean TARRAnE les renseienements concernant l'année
1773. Pour les quatre autres années, nous avons pu retrouver les rer..seignements
directement dans les Archives à Faris ; Archives Nationales, rue des Frar..cs
12
:Bourgeois, F12'ê35 pOllr 1736, ,p12 l671 pour 1791, F
16'(2 !'Otn:zo n'J2, ?12 1::79
pour 1793.
(1) :IALGCUET (:~. Du), Ha-"1tes, ses reïat~ons cO:':7ierc i ;-:.les ::>vec 'es île:' é;'?.<y'i-
'1ue au XYlllè siècle. Ses ar.npteurs, 1~.123, .es ~c::bl~':r, =~~re E:7. :~i.l'C
font des ex:;:;éditions annuelles de 6, 7 et C ::avi:::-es. C')r~~c;_;-, et >ûr-:c;is
avec 3 navires en 1775.
Tabl e au nO 10 - :::.L~a..:.:'~.a;:;..:v~i..;;;;;r_2...;;;tl:;.;·o~n..:........o"C;..;.'()..;;;.c;,;;.::-_'~-'ê";...;;?,;.,.'..,;;!_1..;..2..;..s_f;;.;.;:';;.;.;':-;..;.'r;;.>_Ç..;;.2.=l..;..S_e~..;..)_d;..;,'..;;.;j.~=m_~_l·l;;;..· ~...1...;..;,'e.....,'--1....
7....
7......
3-_1_7-..;;<~:'? ,
1791 ~, 1793 :
Ports d'ar-
1788
1791
1792
1793 (5)
,
mement
T
N
T
N
!
N
'
r~
!
,
,
1
.
1 200
,
Bayonne
9
15 !
2 402
16 !
2 145
1
350
Bordeaux
207
52 '101
253
75 439
146
169
50 937
15
5 071
La Rochelle
7
1 600
6
3 681
2 678
7
!
Rochefort
1
150
Nantes
102
100
'1 419
36 038
121
84
29 456
15 ! 5 744
!
Redon
1
300
,,
St Malo
13
2 110
7
1 780
4
538
!
St Sevran
2
300
,
Cherbourg
8
867
2
160
!!
Granville
2
520, ,
!
Honfleur
3
770
6
1 110 :
!
!
Dieppe
2
515 .
!,
!
F~camp
1
45
,
,
Le Havre
67
12 360
107
24 548
113
54
11024;
41612
St Valéry/
.. 1
150
Somine
-1:
~
!
4130·1
Dunkerque
11
1 431
'30
7 261 r
2.9 t
17
!'iarse111e
82
18 294 ! 141
36 19$--{--:
126
29 251 !241 5 327 ~
La Cio.tat
,
1
120 !
!
,
Lorient
1
, 1
d
!
Po~ts de
! .
l'Oc~an
, ~~~~
~~ f-....
;
l---tl
Di vers Port de la Manche
Méditerranée
~3~1
,
1
200 1
!
1~1 150 :1:.
TO.TAL
510
122 277
677 1190 753
410 .'J
r 1
1130 689 i 60 117 254
!
f
•
::'f'~
1
(1) Les 2 navires sont partis de Brest.
(2) et (4) Non déterminé.
(3) Le navire est parti de Cette.
(5) En ce qui concerne Bordeaux et Nantes, nous n'avons considéré que les navi-
res battant pavillon français •.'
- - - - - - - _ . -'-
21
Tableau n011 - Les entr8es d2.:1[, ~ ef ~,' 'l ~-t s Ge ?r2Dce 1773-1 ]i.'E- 179 1 - 1703.
*
(Commerce en droi t'c.r,,).
4.~
i,,
~1
...
_ _ _ _ '.
_ _ 0
•• -
•
:lrt de
1773
1788
1791
1792
1793
..
,..,
sarmement
N
!
T
li
T
N . ! T
~
T
J.
.1.
ronne
5
750
16
2 415
16
2 450
2
225
rdeaux
221
51 809
242
71 492
217
201
65 407
31
e E27
Rochelle
18
4 530
10
6 912
-
11
6 126
tltes
112
32 524
131
46 563
130
120
41 572
28
10 408
Malo
13
2 520
9
3 164
4
500
!
Servan
2
280
!
Havre
86
15 923
197
15 607
a::::
85
1E 756
3
580
1
-~
1
Llen
1
124
1 •
,
nfleU'r
4
740
a
2 790
!
1
.1
1
,
n.ke~ue
!
11
2 090
26
6 115
34
59, !
13 919
1
rseille
!
83
18 901
133
33 640
119 !
30 657
22
4 905
1
1
,
rient
!
17
12 300
2
564
1
,
l'Ocf§àn
!
1
600
,
,
Mer.che
8
1 235 !
2
320
1
!
1
,
Y.edi ter.
1
200
.;~
,
! .
1
~.
!
!
1
. ~"
1
,
!
1
1 .
,
rotal
553 ; 12 97<::7
; 686
199 122
v..2J
639
192 257
92 1 26 689
!
!
!
•(
Tableau, P.o 12 - Les sorties T.>our la trai te sur la côte occidentale de l'AfriCIue
(Sénégal et Guinée).
)rts d'
1773
1728
1791
;'1792
1793
,.
,.
L'mement
~.T
..
T
.
..
~
T
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T
:~ f
T
T
,
u.!TES
29
4 150
32
11 113
37
25
e 132
2
764
~ EA'lRE
16
2 459
19
4 300
23
15
1 901
Ji;FLEUR
, 1
90
10
2 794
t !"~ALO
----:-T!
630
2
1 364
3CO
!. ROCHELLE
4
600
6
5 065
431
)RDEAUX
5
813
12
4 557
16
9
3 106
3
1 329 !
\\.RSElLLE
2
345
1
200
!
)RI~TT
1
1
lcéêJl
3
1 425
_!
- 5
!
!
:anche
!
70 ,
IUl
60
900
93
33 C95
77
57
14 070
6
2 223
82
Au total, en ce qui concerne le commerce en ciroi ture, quatre ports
se détachent de l'ensemble de. ports intéressés par le commerce colonial. Il
s'agit, par o;:odre d'importance de : :Borde&U%, Nantes, !'iarseille et le Eavre.
La supériorité de ces \\uatre ports est écrasante.
'l'ableau n·1 ~ - Hiérarchie des uuatre princi-:laux ports dans le CO!!!l!lerce colonial,
1773
1788
1791
1792
1793
.s .orUe.
navire... Tonna.ge
Navire.
Tozmage
Navires
Tonnage
Navires
Tonnage
Navirea
Tonnage
25
)rdeaux
40,59 "
42,61 "
37,37 "
39,55:
'5,61 "
35,06 "
38,91 "
25
" 29,39 %
33,29
mte.
20
25,69
14,17
18,89
29,51
17,63
22,65
L1'8e~- f~,o8
40
30,87
14,96
20,83
18,98
26,14
22,35
6,66
3,55
• Ba'ft'e
13,14·
10,11
15,8)
12,87
27,56
11,20
8,43
89,81 "
93 37 "
88,77 "
90,29 "
92,68 "
~" 92,34 " 96,66 " 97,1 %
•• Cl1:rH'
11
T
N
T
N
T
N
T
N
T ~ e
lrdeaux
39,96
39,92
35,28
35,90
45,21
31,45
34,42
33,69
33,01
m'te.
20,'25
25,06
19,10
23,38
27,08
18,78
18,55
30,43
39
Lneille
15,00
14,56
23,91
18,38
19,39
16,89
,
18,62
15,99
1 Havre
15,~5
12,27
28,72
12,86
~~42
13,30
12,18
..
l'
90,76 "
91,81
86,6
8',03
92,71
82,15
181,14
88,°3
- - - ' - - -
" 90,45 " .-1t
%
t
(
1
Mais, pami eux, la primauté de :Bordeaux est incontestée. Son trafic
colonial a mIme subi une croissance entre 1773 et 1786, croissance liée à cel-
.
,
le d,,-:· cOlllllleree colonial d'une façon générale. En effet, n
cro!t de 30 %
~
f
de 1764 à 1766, de 50 %de 1770 à 1772, de 1775 à 17777 de 43 rc et 45 5; eu
17~9(1). Four les sorties en nombre de navire~, la croissance est de 22,22 ~
en 17Eê, par rapport à 1773 et en tonnage de 44,79 ~~.
Christian Sc:n~AlCm>"R:URG,analysantles exportations guadeloupéennes vers la mé-
tropole,insiste sur le fait que le commerce de Fr~ce en Guadeloupe est essen-
tiellement bordelais (2). De mime, dès le milieu du XVIllè siècle, Bordeaux
acquiert un net avantage dans 1. . expéditions françaises à Saint-Domingue, qui
(1) CllOUZET (F.), :Bordeaux &tl XVIIIè siècle, Livre II, p.197.
(2) SCHNJ.lŒNDOURG (C.), Les sucreries de la Guadeloupe ••.• , 1'.97. A la fin de
l'Ancien Régime, sur 100 navires quittant la Guadeloupe pour la France, 45
vont à :Bordeaux, 20 à Rouen-le-Havre, 15 à Nantes et 15 à Y..a.rseille.
- - - , - - " - - - ' "
__-_
...
..
....
83
s'accrort encore après la guerre de Se~t 2ns (1). Fr~~çois CROUZET n'indique-
t-il pa~ qu'en 1729, Bordeaux assure 4C c du tr~fic frar.çais avec S2jnt.Do-
~
mingue et 33 ;i de ceux qui en arrivaient ?(2).
En ce qui concerne les entrées, la croissa:1ce est moir"s r?.:llGe
9,
50 ~.~ de 1773 à 172e, pour le nombre de :12.vires et 37, 99 ~': pour le tonn2ge.
D'ailleurs, ~algré l'augmentation du trafic bordelais, sa prim~uté cannait
une légère bGisse vers la fin de l'Anci~n Régime, à cause de la ~ultiplica
tion du nombre des petits )orts accaparant une part du trafic et èe la wontée
des autres grands ports
en 1773, 40,59 7, des navires expédi és aux rles
sont partis de Bordeaux
en 1782, ce ne ser8. plus que 37,37 ;'.
Fourles~ntrées, on passe de 39.96 ~~ à 35,26 :;. ;·:arseille passe de 16,08 ~:
en 1773 à 20.83 % en 1788, pour les sorties et de 15 ;' à 19.39 ~: pour les
entrées
le Havre passe respecti-,rement de 13,14 :: à 15,60 ;' et de 15,55 0/
à 28,72 %.
Seul Nantes a regressé d~~s les deux cas.
Il importe cependé.:mt de signaler que. ce liger recul des deux grands
ports coloniaux, Bordeaux et Nantes en 17Se peut avoir Jté volontairment
occasionné ~ar les armateurs eux-mêmes, à cause cie l'ouragan qui a ravagé
'Saint-Domingue, la plus riche des colonies, le 16 Août 1ïc8. Cn peut se
demander. en effet, si ces armateurs n'ont pas rédui t les amements en pré-
vision des difficultés d'approvisionnement.
Les trois autres ports viennent loin Q€rrière
Eordeaux, aussi bien
pour le nombre de navires que pour le tonnage, tant pour les sorties que pour
les entrées de navires. Parmi les petits de moindre importance, Dunkerque
accroit Sa participation mieux que la Rochelle ou Saint~alo qui, au lieu
de progresser, au contraire, régressent. Les graves événements révolution-
naires tant en métropole qu'aux colonies. vont porter des coups décisifs au
commerce colonial.
Les rapports entre métpopole et colonies étant, à la veille de 17f:9 tels qu'
il Y a interaction entre les événements qui se d~roulent des àeux côtés.
(1) 3UTEL Faul, Les négoci2nts bordelais, p].32-33.
En 1774. sur les 353 navires partis de S2.int Jo::ünE-~e ~~our 12 ,... ~'tr')~'(-,::'c;,
220 vont à Eordeaux (;:;2,32")
: LEe!: Herre, :-:ê.rc:-,,,:,r..ds et S~/C'l::':tellrs:;_;
I;hinois dans le monde antil~ais du ZT:::lIè si~c:e, les Je,11,o i:t ::'e~ :~=.·l, :'.,_
(2) GROUZET (F~), on. cit., p.223.
84
Les r-ositions prises p2.::- les 2.sse:nblées r·;v()lu-:-,ic:::~é~ires sur le pro'olè"ie
de l'esclavage vont entr",îner de sra.ves c')r.'-.,,:>ic::s -;:;::8 :'p~ îles. :J.~j,\\,
depuis le d€but
de 1190, "le tra.fic avec 32.int-Dt:;;:i::-.i"J.e n'offre plèls que
è.es--~h~~~es d~~'teuses, et les ?2rt2-'1ts ne revier.ne:1t ::'28"(1). L'inn.:.:::'rec-
tion Doire dans la plaine du ~ord de Saint-D~si::cue
d~::2 l~ {luit du 22
Aoat 1791, faisant d'innombrables victimes et rsduise.rt en cendres les
riches habitations sucrières du Cap, les soulèvements dans le Sud, à la
fin de Juillet, début Ao~t, aboutissant à l'incendie des plai:1es et ~ la
dévastation des habitations, l'incendie du Port-au-Prince le 21 Novembre
de la rn~me année, l'insurrection des esclavec dans le quartier de Sain~
Yarc entre le 4 et 8 Avril 1792, etc., joints au déclenchement des hos-
tilité-s--avee-l-'Aùtriche , surtout la Prusse, en Avril 1792, paralysant
le commerce avec les pays de l'Europe du Nord, sont autant d '~léments qui
préparent à l'effondrement du commerce maritime (2).
Au mois d'Aoat 1792 déjà, les marins anglais, profitant du dé-
sordre né de la Révolution, multiplient leurs croisières le long des cô-
tes françaises(3). Le coup de grâce est donné ouand, le 1er Février 1793,
- - - - - _ . -
la France déclare la guerre à l'Angleterre, acta suivi le 7 Ears par l'en-
t::-ée en guerre ~e l'Espagne et du Portugal.
Pref, en 1793, la France doit faire face à une coalition qu~si
générale de l'Europe, à l'exception du Danemark et d( ?:aGbourg, qui res-
tent neutres (4). L'Angleterre met un embargo suv les navires français le
;: "Février 1793, dont le butes t d'empêcher la s~tie jes marchar.dises è-e
?rance et de supprimer son trafic colonial. Le ê Juin 1793, elle' d~crète
le blocus des ports français. Cela se réslli~e à un droit de visite et de
confiscation, appIIqtié à tout b2timent qui transporter~it des denrées à
•
destination de la France, ou qui tenterait de p~'1étrer ~~ns un port fr~~-
çais en état de blocus (5).
D'o'] la chute du trafic colonial en 1793 : - 91,14:' par rapr;ort ?i 1F3.
En 1791, seuls l,antes et le RaVIe augmenterrt-i-eur -trafic : 21 C
pour le
(1) :BEGOUE!~ D~EACX (r-:.L !,iémorial d'une f2..r:lille du navre, St<1.nisl~ ?c2cho:-, {l>:--
gcciant de Saint-Domingue, 1737-1206, p.157.
(2) En Mai 1792, on note déjà 5 faillites à La Rochelle. '::HA:r2C:~r:E:' ::icole, :0:::-
merce et course sous la Révolution et le consul a t .?:. 1 a RacLell""
;-.27.
(3) GERMINY (ftl. de), Les brigandages P.laritimes de l'AnC"leterre, ';'o'-7',e ::::II, :'.2;.
(4) THESEE (F.), lrégociants bordelais ét colons de Sa.ins DO::Ji:1é','Ue, ;.1";'2.
~C2J J,~AmlTll_G.A!E.T..l.J.},..Histoire du commerce, Tome IV, ~.31S.
85
premier, 5,61 5~ pour le second, en ce oui CJllCerr:.e :es sorties pP..!' r2p~ort
à 17ft. ~antes reçoit à peu près le même r.omc~e der.~vi~es qutL~ 17tc. Le
Havre en -reçoit moins
la moitié. Bordeaux a réduit ses &~e:n9r.:.ts de 42,29 ,.,1
et reçoi t 10,33 CS noins de navi res qu'en 17 u:.
Zn 1792, les a~ateurs bordelais sembler.t avoir repris confiance er:. expédi2nt
23 navires de plus que l'arJlée précédente, ce 0.1.Ü si,::::.ifie u~ r(ôlève,T:er.t è.u
trafic de 15, 75 3~. Cette ann{e, Farseille occupe la. deuxiè:'iE place, :~~ntes
et le Eavre régressent de 29,75 ;' et 52,21 ~:l re2pecti vement.
En 1793, c'est l'effondrement gér.';ral : le trafic bordelais cl-1ute de 91,12 :',
celui de Ka.ntes de 22,35 ?', celui du Eavre de 92,59 :' et celui de j':2r:oeille
de 80,95 c~. Les retours sont aussi catastr~:pf1iques. Eorcieaux conserve toujours
sa preI:ll-€-re
place, mais en 1793, il est à ég;üi té avec :~antes pour le nombre
de navires t t est dépassé pour le ton112.ge.
En ce qui concerne l'arme~ent de traite~ :\\antesoccu~e la première
.place, suivi du Havre, de Bordeaux, d~ la Rochelle. ;ronfleur et Saint l'!alo
sont classés généralement en cinquième position. La part de ~ante~ dans l'ar-
!Ilement négrier établie par Jean l·:ETTAS (1) est la s1.:.i v2ifté :
-.,';..'..
1713-1722
65 c~
,- des négriers arment à ran tes
l
1726-1736
70 cl
1=
..J.
1737-1744
53 %
i
1748-1756
54 ~/
,i';J
l
1763-177E
41 ~I
/'~
1783-1791
34 c'
.è
,
t
Parmi les grands noms de négriers, on peut citer le$ MICHEL, né-
griers depuis cinq générations, les ESPIVANT de VILLEEOISNET, Guillaume GROU,
mort en 1772, et renplac8 par LE~UX-des-RlIELLIERES, parents par alliance,
SIVO~ et ROGNES, qui arment au total 14 ,négriers après 1783 (2).
Le sucre intéressant, nous l'avons vu, le commerce extériellr de 12.
Prance, il est ~tile de montrer les ports intéressés pér la réexportation.
( 1) METTAS (J.), Four une histoire de la traite des Foirs f r '
ança~ se ••• ,
::JFHr~
.11"
_1
nO 226-227, pp.19-46, p.30.
(2) !·:EYER (J.), "Le com:nerce négrier natais (1774-1792)", in
mies, Sociétés, Civilisations, 1960, pp.120-129, p.124.
86
~-~.~~-~-----.-Une· loia en: France, les sucres passent à l'étranger sous forme
brute ou ra!llné~. Par brut, il faut entendre tout le sucre qui passe direc-
tement à l~é_t~r, sans aucune transformation en France. Il s'agi t dans
ce cas des sucres brut, terré t3te et blanc en somme, le sucre raffiné aux
colonies.Le sucre raffiné employé ci-dessus désigne ici le sucre en pain
fabriqué en ménopole, à partir du sucre brut et tarré. Il importe alors
de préciser que nous utiliserons le terme de réexportation pour désigner
l'opération consistant à vendre à l'étranger les sucres sans transformation
dans les raffineries métropolitaines. Nous réservons le terme d'exportation
.
.
à la vènte-à 1-' étranger du sucre raffiné en France m3Dle.
La réexportation est assurée depuis la promulgation des lettres-
patentead'Avril 171.7,. par tous les ports autorisés à pratiquer le commerce
en droiture· avec les colonies. Ports de provinces réputées étrangères:(1)
donc soumis aux droits de sortie, et d'entrée dans leurs ~lations entre
...~ .
,
elles" ainsi que dans. leurs relation avec l'étranger effec.:tif, ils sont
exc~ptio~eil~iDent-di~pensés
1iIi.'.:
du paiement de ces droits pour la réexportation '.'
.~"
dea- sucres~ afin'""de ne pas grever le p~x du sucre français à l'étranger. n
~.....i.
s'agit, comme nous le verrons, d'une mesure ae conqu3te d. marché.
t
.
;'
~
'-',
En effet, une surcharge de droits qui alourd.iIIai t le prix de ven-
.. te, n'aurait pas permis aux sucres français de supplanter le sucre anglais
sur lesmarctiés européens. On peut m3me dire qu'en ce qui concerne les
quatre ports bretons en relation avec les tles : Saint-Malo, Morlaix, Brest
e~ Nantes, la réexportation est une nécessité dans la mesure où i~ne peuvent
introduire de sucres dans les autres PX?vinces du Royaume, pour y 3tre con-
sommés,sans payer un.droit de consommation de 2 lt 10 sous le cent pesant (2)
(1) Ce sont les provinces étrangères au trafic de 1664, par lequel COLBERT uni-
fia les droits d'entrée et de sortie des cinq ·trosses fermes. Ces provinces
sont: l'Artois, la Flandre, la Bretagne, la Guyenne, Le Saintonge, le
Languedoc, la Province, le Dauphiné, le Lyonnais.
(2) Le cent pesant désigne 100 lb ou un quintal.
87
~,le sucre brut et 8 pour le cent pesant de sucre terré (1).
Mais, en ce qui concerne le sucre raffiné en pain, seuls Bor-
deaux, la Rochelle, Rouen, Dieppe et Cette (2), sont les ports privilégiés
l..en faire le commerce à l'étranger. Jusqu'à l'arr3t du 25 Mai 1786, qui
étend le privilège à tous les ports du Ro~aume, privilège obtenu au prix
de nombreuses représen.~~tiC?~s_,__ ce sont les cinq ports qui ont bénéficié
res encouragements à l'exportation, dits primes à l'exportation du sucre
raffiné en pain (3).
1
Mais certaines contradictions internes ont emp3ché,certains de
ces ports de jouer pleinement leur raIe. D'abord lR raffinerie de Dieppe
cesse Bes activités pour des raisons et à une date qu'il DOa8 est impos-
sible de préciser actuellement. Le commerce de sucre raffiné de Rouen a
été longtemps paralysé p~r un droit de 50 sous (2Het 10 sous) perçu sur
les sucres entrant dans la ville et sa banlieue. Ce droit,en renchérissant
le prix du sucre en pain fabriqué à Rouen, a eu pour effet de faire perdre
aux raffineries locales leurs débouchés extérieurs. Notons que la concur-
~.
..
,
rence que tout le monde redoute imposait aux raffineurs dl:! vendre ~eur
sucre en pain le moins cher possible. Nous verrons que cette hantise pousse
les raffineurs- à demander cOI;lstamment le relèvement du taux de la. prime à
l'exportation.
Ce fameux droit a été établi en 1637 au pro fi t du corps municipal
de la ville, pour le remboursement d'un emprunt de 100 000 l t, dont l'Etat
eut besoin pour la subsistance "des gens de guerre". Il passa par la suite
entre les mains de la Compagnie des -Indes Occidentale!3 puis ,danlL.Jlelles
de la ferme générale.
De 1730 à 1767, la Chambre de commerce de la ville essaya vaine-
ment d'obtenir sa suppression à cause de l'opposition des ratt1n~r8des
- \\
autres places· de commerce, notamment ceux d'Angers, d'Orléans, de Saumur et
12
(1) Lettres-patentes d'Avril 1717, Article XIX,- lN F
163~ 1.
(2) Le port de-Cette a ob1:enu'l-eprivilège sept mois ,apres'1.i promulgatlclnfcles--
lettres-patentes d'~yril.1717. L'a.:r3t l'associant aux portf:l priv11égié'2est
un arr3t du 15 Janv1e'r"''''' 18, Cf. Memoire anonyme (N° 10495), 1777, L,'q F
1502
(3) Nous parlerons de ces encouragements dans le chapitre V relatif aux importa-
tions et aux e~ortation8.
88
de Nantes et des femiers généraux du commerce.
Les raf'!i~~~J'rétextantque la décadence du commerce rouennais
de- sucre raffiné CL})a1n provient de la mu1 tip1ication des raffineries
"----
.
--------~.
dans le Royaume, le.lermiers généraux reposent leur opposition sur deux
argumenttl~~rc-;s:~,-c~p~ierprétexte est que, si tué à proximi té de Paris,
.Rouen bénéficie d'un avantage que le droit de 50 sous ne peut éteindre et
•
que 8& suppression rendrait la ville absolument ma!tresse du commerce de
sucre raffiné, au ;détriment des autres point.
de raffinage.
La seconder&1son est celle de l'avantage financier. Ils estiment que ce
droit a produit, tant au Havre (1) qu'à Rouen pendant la première année du
bail de David (1774), la somme de 40 909 1 t 9 sous 7 deniers et, pendant la
seconde amiée, c'est-à-dire 1775, 35 772 1t 18 sous 8 deniers. C'est à notre
avis lto:bJ(t'tp~Dcipa1 de leur opposi tion.
-En effet, en tant que percepteurs des impSts indirects pour le Roi,
dont une paZtie, la plus important certainement, leur revenait, ils ne peu-
.' vent logiquement· se dessaisir d'un droit qui satisfait 1eursilltér3ts person- .
.
-
.,
-
. .
;'''
-
..
. ne1s. Toutes'cles'villes opposées à la suppression de ce droi 1; sont des villes
•
:"1
exclues du privilège:-de 1.l exportation du sucre raffiné. Il s'agi. t donc d 'QJle
coali tion de- raffineurs mécontents et jaloux d'une situation qu'ils jugent
arbitraire et inacceptable •
. .
Notons que, pour Orléans, fournisseur de la région parisienne en
#
sucre raffiné .. l'occasion n'était que trop belle pour éliminer un concurrent
,-
t-
sur ce marché (2). C'est une preuve éVidente de l'absence de solidarité de
.~
i~j~f~~E
;~It!.~I'
corps dans le rang des raffineurs. La solidarit~ ne se manifeste que cir~ons
"
tancie11ement! , lorsqu'Il s'agit de défendre des intér3ts vraiment communs.
(1) C'es~ qu'entre-temps, le Havre avant-port de Rouen et reconnu comme tel par
un àrr3t de 1717, qui pern'letta1t aux armateurs-rouennnais d 'y transborder
leurs marchandises et m3me de les réexporter sans payer de droits addition-
nels, le droit de 50 sols a été insttitué dans ce port en 1736.
(2) En 1758, les raffineurs d'Orléans adressent unmémoire à Doula de Quincy,
intendant du commerce, lui indiquant que l'établissement co~encé d'une raf-
fine~~e de sucre à Bercy ruinera infailliblement celles d'Orléans,
AB F
39 (Mémoire n02185).
·.,.·d
'.." t
•
89
A la fin de l'année 1779, Rouen et le Havre tentent conjointement
d'obten!r la suppression de ce droit; ce fut peine perdue; le 28 Mai 1786(1),
...'------
les représentant du commerce du Havre nl.tèrent .leur demande. Le 28 Juin, le
-RO.:LTèur anilonce enf'in. sa.-Itrésolution d' éteincl1:eet de supprimer ce droit
onéreux~;~.arr.t sera re~du deux jours plus tard, c'est-à-dire, le 30 juin
1786 (2). C1est-qu&toutes les barrières se sont levées depuis la générali-
sation de la restitution d'une partie des droits perçus sur les sucres bruts
ayant servi à la fabrication du sucre raffiné lors de l'exportation à l'étran-
ger à tous les ports du Royaume.
Cette décision est sanctionnée par 1 'ah~t du 25 Mai 1786.
CQmme_pour le .commerce en droiture avec les fIes, la réexportation.
et ~'exportation des sucr~à l'étranger sont exercées d'une façon inégale par
les ports. Une statistique de la réexportation et de l'exportation sucrière
en 1788 montre que les quatre principaux ports coloniaux C~) dominent encore
nettement ce commerce.
i:d
. .,
-.~
,~,
f
~b1eau n-14 - Exportation et réexportation sucrière en 1788.fen lb) •
.
' ..
. , ..... -.
-
0 -
Ports
,'. 'Âcn:bnt
sucre terré
'l'O tal.- PJ:léral
(
) ",'-
;en~b • ,>~
et t'te
sucre raffiné
par-1'Ort
_. ..
:Bayo~e
184 731
162 885
-
347 "61'6
:Bordeaux
19 560 966
44 538 890
862 432
64 962 288
La Rochelle
1 363 783
751 025
1 051 874
3 166 682
llaJ1tes
18 128 885
8 771 275
-
2'6 900 160
st Malo
-
825 539'
-
825 539
st- Servan
115 100
-
-
115 100
Rouen
-
108 431
-
108 431
Le Havre
.
4 346 154 ~- 5 670 854
1,582
10 018'590
Honfleur
612 512"
-
-
612 512
Dunkerque
,
542 470
1 7~9 073
3 010
2 344 553
Marseille
-
18 056 791
-
18 056 791
Cette
-
59 741
30 416
90 157
Total par
44 854 601
80 444 510
1 949 314
127 548 419
nature 'de
---
sucre
)''M~moire
1
des représentants du commerce du HaY2e sur le commerce du sucre raffinÉ en
France, en Angleterre et en Hollande", AN F
1639 A.
2) nArr~t du conseil d'Etat du Roi portant suppression du droit local de cinquante
sous par quintal, qui se perçai t sur les sucres dans la ville de Rouen"
AN AD XI 48
l) Il s'agit de :Bordeaux~" Nantes, Marseille et le Havre.
.
;
.
~~._---~-.~~/;~.:-!;-;";--::,,:.~.:_-,'.7':"~. ,-~,.~~ -
"~-'- -
~._-_.
:.- ~
90
Premier port colonial français, Bordeaux est aussi le premier port
de réexportaion de sucres à l'étranger. ~ 1788, il ~re 50,93 % de la
réexportation sucriltre f~9aise : 43,61 % du fl.ucre brut, 55,37 % des sucres
..... - - ---
...
_
-_..
....
,----
~
.
,
terré, tate et blanc et 44,24 " du sucre raffiné en pain, sortis pour
l'étranger, sont partis de Bordeaux.
Au niveau du Suc;e en pain, il est dépassé seulemnt par la Rochelle, qui
en a assuré 53,96 %des exportations. Mais, d'un point de vue local, sucre
brut, sucres terré, ta te et blanc et sucre raffiné en pain représentent res-
pectivement 30,11 %, 68,56" et 1,33 % des ventes sucrières bordelaises à
l'étranger.
L'â.Îre commerciale pri. vilégiée de Bordeaux est l'Europe du Nord
la Hollande, les villes haséatiques. Mais son rayonnement atteint aussi
l'Italie·~'--.";
.. D'après Paul BUTEL "en 1776-80, le Nord donne à
Bordeaux .encore plus d'importance dans l'ensemble du commerce français(1)" :
sa part représente alors 78" des ventes françaises sur les marchés(2).
Nantes occupe le deuxième place, loin i l est vrai, de~ière Bor-
~.'
deaux. En. 1788, sa: p'art dans la réexportation sucrière française est de
.• '
~',
.
.. -
.
. ' .
-
._.,
~.
21,09 %. TI s'agit esse1\\tiellement de sucre brut: 67,39 % de ses rééXporta-
tions et de sucre terré,.. tate et blanc, 32,61 %.. En sucre brut, Nantes est
le deuxième port exportat~ après Bordeaux : 40,42 % et en sucre terré,
",,": '-
t3te et blanc, le troisième après Bordeaux et Marseille, soit 10,90 % des
ventes françaises à l'étranger. Le sucre raffiné à Orlé~s est tiré de
~
Nantes. TI y est acheminé par la Loire. Plusieurs raffineurs orléanais ont
leur flotte à Nantes et-font leurs achats eux-m3mes aux rIes (3). Ces
;'i;";"\\
sucres sont reexportés en Angleterre, ,en Hollande et autres p~s du Nord(4)
f
. - - - - .
et en Espagne.
t
Marseille est le troisième port de réexportation de sucre français
en 1788 : 14,16 %. Il n'a exporté essentiellement que des sucres terré,t3te
(1) BUTEL (P.), Les négociants bordelais, l'Europe et les rIes au XVIIIè siècle,
p.47-.
(2) Pour les détails, voir Paul Butel, op. cit., pp.47-57.
(3) LEFEBVRE (L.), Etudes orléanaises, Tome I, Contribution à l'étude des struc-
tures sociales à la fin du XVIllè Siècle, p.113.
(4) DU HALGOUE'l' (H.), Nantes, ses relations commerciales avec les rIes d'Améri-
que au XVIllè siècle. Ses armateurs, p.252.
_::;:~;.:.;.1
.......,. >\\
l
91
et blano. M&is il exporte aussi du sucre raffiné en pain. Sen aire de commerce
est le Levant, la Barbarie, l'Italie et l'Espagne. Mais ~~oemme"1'Oe avec
-les__ 'Jui~'s-dlr-Nem,..parl·i..~remisedes
étrangers. Toutefois, sa position à
l'extr3me sud de la France le rend moins apte à progresser sur ces marchés
comme Bordeaux :~n1_7(i4, il n'a exporté que 83045 lb de sucre en Hollande,
421819 lb en 1770, 11025 en 1771,285 000 lb en 1774 et 130 761 en 1777(1).
Tandis qu'en 1779, ses exportations vers la Turquie et la Barbarie montent
à 4 000 000 de lb~ dont 3 SOO 000 lb de sucre terré et 500 000 lb de sucre
raffiné (2).
Quatrième port colonial français, le Havre est aussi le quatrième'
port français· exportateur de sucres, très loin cependant derrière Bordeaux,
Nantes et Marseille. Il a assuré en 1788, 7,85 % des exportations. Ici com-
me ailleurs, les sucres brut, terré, t3te et blanc l'emportent largement
daaales ventes : 4~,38 %et 56,60 %. Le sucre raffiné ne représente que
0,02 %des ventes. Le développement du commerce sucrier du groupe Rouen-Le
Havre se situe dans la décennie 1750-1760, en relation avec celui de son
trafic colonial :. en 1750, il exporte 8 517 OQb lb de sucre; en 1766'uses
".
. .. ..
~~
exportations atteignent 10' 000 000 lb ; elles dépassent .12 336 000 11). en
1771.
A partir de cette qate, se~exportations accusent une légère baisse, la moy-
. ,
enne des dix dernières années étant de 9 477 000 lb. C'est surtout vers la
Hollande et les villes hanséatiques que se dirige l'essentiel de ses expor-
~ tations. Mais, à partir de 1766, des envois se font, vers la Suède, vers la
Suisse et Genève depuis 1768, vers la Russie à partir de 1771, vers l'Italie
et Venise à parti~ de 1771 et les années suivantes (3).
(1) RAMBERT (G.), Histoire du commerce de Marseille, Tome VII, de 1660 à 1789,
pp. 726-727.
(2)"Idée du commerce de la navigation et des fabriques de Marse12le" 1779. Ins-
pection des manufactures de la généralité de Prov_eIlce" ANF
1834 A.
--
(3) DARDEL (P.), Navires et marchandises dans les ports de Rouen et du Havre
au XVIllè siècle, pp.216-217.
Moyenne des exportations de 1767 à 1776 (en Million de lb): Idem, p.217.
'Pays du Nord
5 147 M.lb
Suède
220
Hollande
3 100
Allemagne
190
Russie
366
Suisse
149
Italie et Venise
284
Danemark
21
Espagne
0, 21
92
D'une façon générale, cette étude révèle que la France est le
plus gros exportateur de sucres dans les Indes Occidentales, la principale
..~
zone de productio:l sucrière dans la deuxillme moitié du XVIllè si~le.
Cette primaU·t~-repose·sur-uneseule colonie: Saini;::Do'mingue, les autres
colonies étant plus ou moins délaissées par les négociants, dont la partie
sud de la Grande ne.
Du point de vue du commerce, quatre ports se démarquent de l'en-
semble, tant en ce qui concerne le commerce'colonial que pour le commerce
d'exportation et de réexportation des sucres. Il s'agit, par ordre de mé-
rite de·J.,!ordeaux, Nantes, Marseille et le Havre. L'aire commerciale du
sucre français zoecouvre l'Europe entière : du Nord au Sud et de l'Ouest à
l'Est. A l'extérieur, le Levant fait figure de débouché principal.
L'expansion de ce commerce ~'été rendu possible grâce à une ré-
gelemntation monopoliste: l'exclusif, qui contraint les colons à ne vendre
-
leurs sucres qu'aux négociants de la mère-patrie. Mais faut-il conclure
comme Ernest LAlUiOUSSE (1) que le progrès de ~a revente du sucre·-n'est,
pour la Fftnce, qU.'un indice accessoire '1 Que la France ne retire aucun
~
pro fi t de ce progrès ? Le GaQnoPole commercial ne répond-il pas à des be-
!
soins financiers de l'E.tat ?
x
x
x
(1) LABROUSSE (E.), La crise de l'économie francaise à la fin de l'Ancien Ré-
gime et au début de la Révolution, cf. Introduction, nOXXXVII.
93
CHAPITRE II : L'EXCLUSIF, UN INSTRm:ENT DE suroRDn:ATIO~ ECO~~OY.IQ.UE DES
COLONIES AUX INTERETS DE LA Y.ETIlOPOLE •
-. ,",-.. ..,;."- . -
Depuis t750,li~!djéa-ph7aiocrüi$luesdu"laisser fê.i~e, lç:isser
passer" et de l'agriculture comme force des Etats for:t une percée si.;::ifi-
cative' dans le milieu politique (1). Mais d~~s la pratique, ce sont les
vieilles conceptions mercantilistes du ~rofit qui guident la ccnèuite des
affaires. A.la médiocre sécurité de la rente ~oncière, hommes politi~ues
et hommes d'affaires préfèrent le co~~erce extérieur co~~e la filière la
plus.s~re de l'en~hissement bourgeois. De ce point de vue, les colonies
ont une plàce très importante.
Elles sont .fondées pour fournir à la métropole des matières pre-
mières qu'elle ne peut produire sur son sol, en particulier: le sucre,
très rémunérateur et très convoité. Elles doivent servir aussi de débou-
ché~ aux excédents de la production agricole ~t manufacturière métropoli-
taine.Mais .. âliXVI'nè:siècÙe, la gu.erre économique est permanente e t - ----'
~.
acharnée. Chaque Nation commerçante recherche à'l'êxtérieur de sa ~phère
d'in.fluence habituelle,d••~;at~~ de ventes fructueuses, mais aussi d'achat
fructueux de matière première.~
Dans ces conditions, l'exclusif peut-il ~tre une barrière efficace face aux
prétentions des puissances concurrentes? Mais ce n'est pas tout: il con-
~ vient aussi de se demander poùxquoi la prohibition de la libre concurrence
aux colonies se révèle d'une telle absolue nécessité.
Il L'Exclusif, ses principes, son fondement, son ap~lication.
L'exclusif est le cadre juridique des relations commerciales entre
la France et ses rIes d'Amérique. l'~ais J.1 definit aussi l'attitude de 12_
(1) L'arrivée de TURGCT au pouvoir semble à cet effet revêtir u!':e siD'lific2.ti~r.
de haute ?ort~e. Cf. Pierre LEC~, Ec~nc~ies et soci!:tts ~r~i~~u2t~iel~E~,
1650-1700 , Torne II, p.242.
France vis à vis des autres Puissances étrangères. Ce systè~e est définitive-
ment codifié par les lettres-patentes d'Cctcbre 1727.
L'exclusif repose sur quatre principes d'une grande simplicité, mais
qui se révèlent, en réalité, du plus absolu des protectio~Jllsmes.
Les quatre principes sont les suivants :
"1/ Réserve exclusive, au profit de la métro:pole du.droi.t d'e.ppro-
visio~~ement des colonies ;
2/ intera~c~ion aux colonies de ver.dre leurs rrcduits à d'eutres
pq.. qu'à la métropole ;
'3/ défense à1élever les produits récoltés à l'état de produits ma-
nufacturés
4/ réserve aux marins français du transport de tous les objets ex-
portés des colonies à la métropole, ou dans les autres colonies, ou de la
métmpolelux colonies" (1) •
. ~'!
"
- -, .
. L'exclusif. au XVIllè ~iècle a déjà fait l'objet de nombreuses étu-:
, .
.
~.
des approfondies qui . laissent désormais peu de place à l 'originali té. En
eff'et, que peut-on apporter de neuf en ce domaine qui ne soi t apporté par
.
.
.
Jean TARRADE (2) ? Récemment, Christian SC1!N.AJŒN]()URG (3) a fait, à pnp~
~ de cette question, une étude de synthèse suffisament complète. Ces deux'
références nous dispensent donc de reprendre ici le problème en détail. ~ous
insisterons simplement sur l'enjeu commerci·al dont cette législation est le
s~bole.
Il convient de signaler d'abord que, sur le plan commercial, le
(1) SCEKAXENBCURG (C.), La crise du systè::le escI?v2fiste 1835-1247, ::J?65-66.
(2) TA~~E (J.), Le co~~erce colonial de la Fr~ce ~ la fir- de l'Ar.cien Régi::le.
Evolution du système de l'exclusif de 1763 à 1729. Thsse ::,cur le è.cctor2.t 2S-
lettres, 1969,4 tomes, 1294 p •• Cf. '.:'0:':18 1, p~.1C9 2. 1!?ê.
(3) SCE}TAKEt~URG (C.), 1980, op. cit., p~.64-75.
95
système, établit en faveur des négociants français deux ty~es de ~onopole
un mo~opole commercial qui leur réserve le marché et la p:~duction sucri2re
des colonies et un "monopole manufacti!rier "(.1), qll'on peL~t ap::?eler aussi,
"
------..... -,,---,-_.- .-,------
-
division internationale du travail.
La question est de savoir à quelles motivatious réelles ré~onde~t ces deux
types de monopolë.
,--~----'-
Plus qu'ane simple protection du marché colonial co~tre les er-
rements des Nations concurrentes, l'exclusif semble avoir 4té dicté par
des objectifs financiers. En effet, l'or. sait qu'au X~rrIè et au XlIIIè siè
cIe, la crise financière, ··gravé et permanente, a été une 'des don.."1ées fonda-
mentales de l'histoi~~ politique de la France et de l'Angleterre. Les péric-
des de guerre sont pires car elles entrainent,~ar le biais des dépenses mili-
taires et dip1omatique~une inflation monétaire et un endette~ent de l'Etat
en 1715, à la fin de la Guerre d'Espagne (1702-17 1 4}, la dette d~ l'Etat
français dépasse
"'500 000 000 l.t. (2). Cr, la Buerre est une donnée per-
manente au XVIllè siècle. La préoccupation des ministres et des financiers
est de liquider ces dettes. D'où, la hantise des hommes d'affaires et à leur
,
•.
•
lI,-.
_
'
suite, des hOllJÙles d'é.tàt., pour le commerce atlantique •
. En cela, l'!xc1usi! s'inscrit dans la pure tradition mercantiliste.
Par conséquent, dans 1 'agricu.l ture comme dans l a manufacture, le profit
réalisé dépend des débouchés extérieurs, en ce sens que le marché national
s'avère étrei t quant à la demande.
les impulsions données au commerce par les hommes d'état sont
dues au fait ~ue financiers et économ~stes ne conçoivent les rapports entre
la vie économique et sociale et le!" finance. dl l ':sta. t c;....:' er. te~es de co~
séq'..lences de l'une sur l'autre. Ains:'; le :;9r:4.fice C','è.l:;; r:éE'oci?r:t ou d'u'ne
compagnie de négociants est-il sllP?osé profiter à toute la natio~. De plus,
il convient de signaler que COL~ERT,prévoy~~t l'i~térêt à lièÉrer le com~er
ce extérieur français de la tutelle hoi.lan-:'aiso, entrep-:I'it d~~ 1663 de
d~velop:per 1 a production. Cette po~i ti~-c.e eut ;:rmr effet >. crs? tic:'", de
4CC D2,nufactures en France (3), dont il :2.ut .§co'J.1er 1-3. :;;roè.è~cti::;,:,:.
(1) Cette expression est de C. scmUJŒr~CDRG,
~D. cit., ;.67.
(2) VILAR (P.), Or et monnaie dans l'histoire, ~.299.
(,) BEAUD (M.), Histoire du capitalisme 1500-1980, p.50.
96
On conçoit par là tout l'intér3t qu'il y avait à s'assurer exclusivement
le bén~fice du marché colonial.
Mals-enmlll'1e:ctemps, cette protection du marché colonial s'inscrit
dans une politique d4fenaive lace aux prétentions des Puissances concur~en-
~ ~
'.
tes. En effet, depuis-le XVIlèsiècle, la politique commerciale des Nations
est pratiquement identique. Chacune s'efforce, dans la mesure de ses possi-
bilités, d'arracher aux autres des aires de ventes rentables. Protéger le
marché colonial, c'est procurer à la production agricole et manufacturière
un débouché sûr et constamment ouvert du fait de l'exclusif.
Ce COI:lIllerce est d'autant plus obligatoire que les colons ne peuvent pas
transformer eux-c@mefLlesmatières premières produites sur les :l2.bi taticr.s.
8i cette division internationale du travail é1i~ine toute concur-
rence aux colonies, il faut admettre aussi qu'elle renforce 'davantage encore
la dépendance économique des colons. ~ais en 1727, cette "p4cialisation de
l'économie coloniale s'avère d'une absolue né<?essité pour la jeune èt~--fragi
le industrie. de' raff~de sucres installée en métropole.
--------------
TI s'agit d'emp3cherlèdéveloppèment, dans les colonies, des raffineries
susceptibles de co.n~encer celles de la métropole, non seulenent sur le
marché métropo1itB.:in, mai'à sur les marchés étrangers.
~r·~~).·plusde cela, c'est la mission des colonies qui est
~ ainsi définie: celle de produire uniquement des sucres bruts, ou à la ri-
gueur semi-élaborés qui, vendus à la métropole, viendront renforcer son
surplus d'exportation à l'étranger de manière à accroître ses profits. En
cela, les colonies n'ont aUOUHe-m-ission commerciale ; leur mission est uni-
quement agricole.
Après avoir dé~ini les principes et les fondements de l'exclusif,
il nous àpparait utile d'analyser la question des rival j tés...
Cette analyse est m~me nécessaire car, si tLéoriquemer.t, l'exclusif s'ap~li-
r f ~: i t l:.~, c' € S t
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... ;~ : f
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97
l'Angleterre qui est la cible principale. Les alliances politiques atténuent
la rigueur de l'exclusif vis~-vis des autres nations.
Il est à noter, en effet,que d'une manière générale, la France entretient
-
. --.
-_._-.-_.
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..
~
de bons rapports avec les Puissances du continent. Depuis le traité de
Nimègue, le 10 Jo~t 1678, qui aboutit à la liberté de commerce entre la
France et la Hollande, la p~litique coloniale et extérieure fra~çaise est
conciliante à l'égard de cette Puissance. Elle est favorable au Danemark,
à qui, en 1731, les colons français achètent directenent les vi~~des salées
;.
et à qui, en 1733, elle vend l'rIe de Sainte:-Croix (1). Elle est favoraèle
~ tous les pays du Nord.
L'objectif recherchép~ la Frence est de se concilier les èonne~
grâces de ces Puissances en vue.de ~ai~tenir Londres dans l'iscle~ent. Cette
politique se concrétise lors des conflits avec l'Angleterre car, dans l'en-
semble,Gtti'· Puissances forment alors' le cercle des Neutres.
:.'"
Toutefois, du point de vue commercial, seuls les Espagnols bénéficient d'un
régime d'exception aux$les françaises. Ils peuvent y commercer plus ou
moins librement. Cette faveur s'explique par le fait que l'importation dé"s
- _ . _ - - - - -
denrées colonial.!!8 é.trangères est prohi bée en Espagne, mai s surtout parce
1.
que les Espagnols 1ntroduisënt ain~i des quantités considérables de pias~res
dans les colonies, monnaie prisée par le commerce français (2).
C'est-exclusivement envers l'Angleterre que l'hostilité de la
France est'la plus permanente et la plus acharnée. Cette hostilité est dic-
,
tée, nous semble-t-11, par le contexte politico-économique.
'". ,.\\
La France est, au XVIllè siècle, l'une des grandes Puissances du continent~~,
Elle est, de ce point de vUe, la rivale la plus dangereuse de l'Angleterre
qui craint surtout une possible-rupture de l'équilibre européen, fixé en
171},au profit de la France. L'affaièlissement de la France s'inscrit donc
dans sa stratégie globale, en l'occurrence en poursuivant la lutte dans les
colonies françaises. Les diverses guerres maritimes et color~ales, depuis
(1"
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~onde de 1715 à 1789), p.97.
(2) DOus é~~dierons la question d~~s le c~~pitrE III,
242-247.
"'.
98
,
!
la fin du XVIlè siècle (1) s'inscriveD~ dans ce plan d'e~se~ble et justifient
l'hostilité française.
Mais I-f..!ngleterre g3ne aussi sur le plan éconor..ique. Son inè.ustrie
a subi d'importantes mutations depuis le milieu du XVIllè sièele grâce aux
innovations techniques. Ces innovations ont amélicrti des secteurs e::..tiers de
la production. Dans le textile en particulier, grâce à la Jenr.y de HARGREAVES
en 1765, au Water frame d'ARKWRIGET en 176e et 2.'J. ::lile Jen..Y'J.Y de CRm!FTC~ en
1779, la quanti.té de fil produit par un ouvrier est multipliée pê..r 1C. Cr,
près de la moitié de cette production est redistribuÉe dans le ~0nde. Pour
vendre, elle est contrainte de chercher des débouchés nouveaux hors de sa
propre aire d'influence.
•
Il faut noter aussi que pour les autorités françaises, c'est grâce
aux subsides tirées de son commerce que l'Angleterre finance ses guerres.
Lui interdire l'accès des rIes françaises, c'est tarir la source. de ses
subsides. Par conséquent, c'est amener la sûreté et la paix en Europe.
Cette tendance e~tplus affirmée lors de la première coalition contre la
Révolution de 179~ àtOO2 (2).
A ususe de cette rigidité, l'exclusif favorise l'interlope.
La recherche constante de débouchés est incompatible avec l'esprit
(1) 1688-1697
Guerre de la Ligue d'Augsbourg 11778-1723
Guerre è.'!nds;end2n~
17C2-1713
TIuerre de succession d'Espagne 1
2msricaine
1741-1748
Guerre de succession d'Autrichei1793-12C2
Première coalition
1756-1763
Guerre de Sept A::..s
1
contre la ~évolution
(2) La'loi dù· 10 Brûmaire an V est ltexpression'm~me de cette tendance. P~;F121639:
Bertrand Barère de VIEUZAC expose les priBElipales idées-dans-son ouvrage :
La liberté des mers (Ventase an VI -1798). Jugements sur la politiaue anglais'
choisis et publiés avec une introduction et des notes par Jean ::ARCHAND,Paris
Fernand Sabot, 1942, 199P. On lira avec intérê-t cet ouvr8ge.
(3) Cette question a été étudiée par Je~~ TAELBADE et Christi~n S~~~AKE:~~URG,
déjà cités. On voudra bien se reférer à leurs ouV"rsges peur les è.·itcils.Br. ~t~
G.ui concerne C. ScmTAKE!~URG, on consul-tera avec intlrêt sa thèse ès-SClienc€'
économiques intitulée: Les sucreries de la Guadeloupe dans la seconde moitie
du XVIllè siècle (1760-1790). Contributiçn à l'étude de la crise de l'écono-
mie coloniale à la fin de l'Ancien Régime, Paris II, 1973, 310 p., dact.
Cf. pp.115-116.
Cette étude n' est;,'souvent qu'un résumé rapide de ces tra"laUX.
99
mIme de l'exclusif. Ne pouvant officiellement commercer avec les colonies
françaises, Hollandais, Danois, et Anglais vont opérer par le ~~s de
. l'interpole depuia....les porbLfrancS-o.u.'ll.erts à cet effet dans -certaines
de leurs possessions.
Les Hollandais opèrent depuis Curaçao et Saint-Eustache. Le
port franc de cette dernière colonie est le principal centre de l'inter-
•
pole hollandais. C'est là qu'aboutit la majeure partie des exportations
illicites des colonies françaises, les tles du Vent en particulier.
Les Danois organisent leur interpole à Saint-Thomas. Mlis, en
plus de la question de débouchés, l'interpole semble ~tre pour les pays
d'Europe du Nord, grands marchés des sucres français, un moyen d'atténuer
leur trop grande dépendance vis-à-vis de la France pour leur approvisioD-
nement en sucres.
L'interpole anglais est également actif dans les possessio~s
françaises. La Dominique devenue anglaise en 1763 compte trois ports - _..-
d'entrepôt: Baie du Prince Ripert, face à la Guadeloupe ; Roseau, au
centre de l'11e et Grande Baie, face à la Martinique. L'ouverture de ces
trois ports francs inquiète les négociants français. as Rochelais, en
particulier, voient dans cet acte un nouveau plan anglais pour s'emparer
du commerce français en Allemagne. C'est ce qui appara1t dans ce mémoire
daté d'AoQt 1766 :
l'
"Les négocians anglois viennent d'avoir cet avantage. Ayant
représenté que le ~aut prix des sucres bruts les emp@choit de fabriquer
le sucre en pain et d'en fournir les marchés de l'Allemagne. ~ gouver-
nement leur a dabord accordé une diminution de la~itié des droits impo-
sés sur le sucre venant de l'Etranger. Mais, cette ressource, qui auroit
suffi pour rétablir l'égalité dans cette branche de commerce, n'a pas
rempli les vastes vUes des négocians du gouvernement
anglais. Cen'estoit
point assAs d'entrer en concurrence avec les négocians françois pour
l'approvisionnement de l'Allemagne, ils
ont VQulu noua en exclure
iCO
entièrement, et pour cela, ils ont sollicité et obtenu que la Dominique
seroit -désormais un port franc. Toutes les dispositions du règ~~t
fait pour .Ce-tmmob-j.et- de cel
u·pr-O.jet-.formé- d'attirer dans- -cet t e-is1e
toutes les productions des n8tres. Ce port sera ouvert à tous les vais-
seaux qui y viendront directement de nos colonies, mais quand elles y.
seront introduites, on ne nous laisse pas m3me la ressource d'y aller
acheter de la œcoDde main les productions de nos colonies" (1).
L'inquiétude des négociants français est d'autant plus justi-
fiée que l'11e, visible de la Guadeloupe par temps c1air,est une t~ntation
pour les habitants qui ne savent pas où vendre leur production(2).
Christian SCHNAKENBOURG nous apprend que Montserrat et Antigue attirent
une bonne partie des denrées produites le long de la eSte sous le Vent:
café et coton essentiellement, l'industrie sucrière n'y étant pas déve-
loppée (3).
Pour la Barbade et la Grenade, ~s Anglais reçoivent des sucres terrés de
la Martinique et de la Guadeloupe ; ces de~x îles étant les seules, sem-
b1e-t-i1, "desque11es ••• on peut importer des sucres terrés".
Ailleurs, ils ne peuvent recevoir que des sucres bruts (4). Les négociants
anglais sont attirés aux t1es françaises par le prix relativement bas des
sucres et des sirops, par rapport à celui pratiqué par les colons anglais.
Dans ces conditions, l'interlope apparaît comme un moyen d'échapper aux
pratiques spéculatives des colons.
f
Ils transportent ces sucres dans leurs colonies d'où, chargés
dans des futailles anglaises, ils entrent en Angleterre comme sucres de
production anglaise (5). Toutefo~_de l'avis des raffineurs de Rotter-
dam, mcun sucre autre que ceux apportés en droiture des colonies anglaises
(1) "Mémoire de la Chambre de commerce de la Rochelle. Aotlt 1766".ANColF2B3.
L'article 9 du Bill créant ces ports st ipule "Elu' aucun---y-aisseau venant
d'Europe ne sera reçu à la Dominique à moins qu'il ne so~t parti de la
Grande Bretagne ou de l'Irlande".
(2) SCHNAKE;!BOURG (C.), Les sucreries de la Guadeloupe ••• , p.175.
(3) SCHNAKENBOURG (C.), op.cit., p.116.
(4) Pour tout ce qui précède, cf. '~éponses aux questions posées" ANF 121639 A.
12
(5) "Mémoire des raffineurs .. de Rotterdam". AN F
549-550.
101
ne peut. Itre raffiné en Angleterre, planteurs et négociants ayant réussi
....'-----
à maintenir- intacte cette prohibition. "Cette prohibition s'exerce si
rigoureusementqu. ~ n'est pai--permii5-a-ë ra-ffiner en Angleterre deS sucres
bruts provenant des prises faites pendant la guerre, et conduites comme
telles dans le Royaume. Non, il faut ou les rendre tels qu'ils sont, ou
les faire passer à l'étranger"(1).
Contrebande aux colonies et risques de concurrence sur les
marchés européens, ce sont les deux principales raisons de l'hostilité
•
des négociants à l'égard de l'admission mAme contr8lée des étrangers dans
les colonies françaises (2l.-IOur eux, cette admission permet aux Anglais
d'approcher impunément toutes les eStes des 1les françaises d'autant que
la loi du
30 A04t 1784 en particulier, a ouvert les entrepSts dans les
principaux ports des colonies. Il s'agirait donc d'un appel au partage
du riche commerce des colonies, ce qui fournirait à l'Angleterre les
moyens de miner le commerce de la France et d'expulser ses négociants de
tous les marchés d'Europe (3).
Les Anglais auraient, d'après les raffineurs de Rotterdam, œpuis
l'admission des étrangers dans les colonies française, enlevé aux Hollan-
dais le monopole commercial, le commerce sucrier s'entend, en Fland~e, en
Alsace, en Làrraine et les trois Ev&chés, en Suisse et dans les pays
voisins du Rhin (4). Mais, est-il exact que les Anglais tirent tant de
sucres des 1les françaises ?
1
Il est malaisé de répondre àcette question, d'autant qu'il est
impossible d'estimer la quantité de sucres tirés frauduleusement, la
fraude étant par nature incontr8lable. Il semble cependant qu'il n'y ait
pas lieu d'exagérer l'importance des achats frauduleux de sucres français
par les Anglais. Les dangers tant à l'entrée qu'à la sortie des 1les an-
glaises où ils sont prohibés limiteraient cOftsidérablemen-t---ees-aehats.
12
(1) Mémoire des raffineurs de Rotterdam. ANF
549-550.
(2) Les premiers entrep8ts sont établis par l'arr~t du conseil du 29 Juillet
1767, au port ou carénage de Sainte Lucie pour lesnes du ~ent, et au Môle
Saint Nicolaspour Saint Domingue. L'arrêt du 30 AoQt 1784 maintient le
carénage de Sainte Lucie pour cette 1le et urée un entrepôt à Saint Pier-
re pour]a Martinique, Ul à Pointe-à-Pitre pour la Guadeloupe. A Saint
Domingue, il supprime l'entrepôt du Môle Saint Nicolas, mais en ouvre
trois nouveaux, l'un au Cap français, l'autre à Port-au-Prince et l'autre
enfin aux Cayes Saint. Loui.e dans.]apt..rtie du Sud.
0) LI1J; tr t d~s r_e!,rése:;t3.rtts du commerce du H3.vre \\::.w
1
Mai 1786. ANF'121639A.
L\\
"~\\Aja.'I"... "", .....~I ·.lALb~ hL~~.'\\i""t'{ . ~.N
~.u
l:'L.~ _ Ç'Ç'o
102
Le coton et l'indigo qui y sont admis auraient constitué l'alimel,t privi-
.
~--
légié de cette contrebande (1).
L'argument selon lequel la production sucrière des colonies
anglaises suffit à peine à la consommation intérieur de la mère-patrie
est contredit par l'avis d'un auteur anonyme, qui répondait en
1786 à
• un certain nombre de questions posées par l'administration française du
commerce. Elles fournissent à leur Étropole non seulement assez de sucre
pour sa consommation, mais encore assez "pour qu'elle puisse exporter
.
.
année commune de 20 à 30 000 barriques de sucre raffiné de 7 à 8 qu~aux
chaque"(2).
A une époque où la surrenchère 'est tôujours
de règle, il ~mporte de
prendre les informations des négociants avec beaucoup de circonspection.
Ces initiatives sont le fait d'un certain état d'esprit, de l'état d'es-
prit de l'époque, foncièrement hostile à toute concurrence, si négligea-
ble soit-elle.
Il est à noter que ce commerce interlope s'effectue avec la
compli~ité des habitants, des administrateurs des colonies françaises.
N'est-ce pas pour eux l'unique moyen d'échapper aux pratiques spéculati-
ves du négoce métropolitain? En effet, il est démontré que les marchan-
dises fournies par l'interpole sont beaucoup moins chers que celles ve-
nant de laaétropoleO). A cela s'ajoute le fait. que la métropole n'est
~pas toujours en mesure de leur fournir les approvisionne~mentsnéoes-
saires ou mIme d'enlever toutes les denrées produites sur les habitations.
L'ouverture partielle des colonies au commerce étranger s'avérait alors
comme ùn palliatif nécessaire.
12
(1) Réponses aux questions posées. ANF
1639A.
(2) Ibidem.
(3) Cf. ,""ra, p. 118-119.
103
L'exclu.sif n"a-pairêtéappliqué dans toute sa rigueur dans la
seconde~itié du XVlllè siècle. Sur ordre du pouvoir royal, des adoucis-
sements ont été apporté, qui permettent aux étrangers de commercer en
toute légalité dans des ports ouverts àœt effet. L'incapacité du com-
merce français de fournir aux colons tous les approvisionnements né~es
saires à;leur activitê,et d6 procurer un débouché suffisant pour écouler
toutes leurs productions, principalement, les sucres bruts, les sirops
.
.
et tafia, est à l'origine de ces dérogations. La question des entrep8ts
ayant été déjà traitée par Jean_~~RRADE, ildest plus utile de reprendre
l'étude dans le détail. Qu'il nous suffise de rappeler simplement, à
titre indicatif, la chronomogie des différentesœrogations.
- Le mémoire du Roi du 18 Avril 1763, pour servir d'instruction
générale aux gouverneurs et intendants des colonies, autorise ~es colons
à échanger les sirops et le tafia, &ors proh~bés en France, contre quel-
ques unes des approvisionnements que. commerce français est incapable
d'apporter. Les marchandises autorisées sont: "bois, animaux vivants,
cuirs etplleteries, résines et goudrons". Ellesmnt apportées par les
étrangers.
Deux ports d'entrep&ts sont ouverts, dans lesquels ces produits peuvent
atre échangés librement. Ce sont le Carénage à ~ainte-Lucie, ~ur l'ensem-
~ble des 1les du Vent et le MSle Saint-Nicolas ~ans le Nord de Saint-Do-
mingue, pour cette colonie.
Cette dérogation fonctionn~~qu'en 1765. Un arr3t contradic-
toire du 25 Janvier 1765Et fin à ce régime mixte à cause du non-respect
de l'esprit des instructions de 1763 (1).
- Un nouvel Arrlt du 29 Juillet 1767 ~abJjt à no~~_lerégime
mixte. Il fonctionne jusqu'en 1778, quand la France s'engage dans la guerre
d'indépendance américaine.
(1) Les gouverneurs profitent de œt avantage pour ouvrir les colonies au~com
merce étranger.
104
- Au retour de la~ix, en 17i3, le pouvoir royal autorise l'in-
~
troduction d'esclaves de traite étrangère dans les !les du Vent, abandon-
nées par la traite fran-çatse;--C-ett-epel"lDisS10n est renouvelée en 1786.
- L'Arr8t du 30 Aod~ 1784, ~ui constitue le dernier~te de
l'Ancien Régime, ouvre sept ports d'entrep8t aux 1les, à l'intention des
étrangers. Trois sont ouverts à Saint-Domingue : le Cap français pour la
partie Nord, Port-au-Prince pour la partie Ouest et les Cayes Saint-Louis
pour le Sud.
Dans les 1les du Vent, un p~rt d'entepSt est ouvert dans chaque principale
1le : Pointe-à-Pitre, pour la q~adeloupe, transféré à Basse-Terre en 1787
Sai~t-Pierre pour. Martinique, le Carénage pour Sainte-Lucie et Scarabo-
rough pour l'tle de Tabago.
Quant à la Guyane, elle bénéficie d'un statut par~iculier depuis 1768. En
effet, ravitaillée sporadiquement et sans grande ardeur par les négociants
français, le pouvoir royal s'est résolu à accorder aux colons la liberté
de ~ommercer avec toutes les nations du mond~, afin d'assurer leur appro-
visionnement. Cette liberté commerciale est définie par les lettres-pa-
tentes du 1e Mai 1768, pour une durée de 12 ans. Elle est prorogée jus-
qu'en 1792 par un arr3t du Conseil du 15 Mai 1734, aprè l'échec de la
troisième tentative de colonisation (1).
L'Arr8t du 30 Aodt 1784~récise toutes les marchandises qu'il
.
~est permis d'importer de~!tranger. La liste ne· diffère de celle de 1763
,
et de 1767 qu'en ce qu'elle est ~us élargie. Ces.rchandises sont (2) :
Anes
Bois ft'ébénisterie
Avoine
Bois de teinturerie
Boeuf vivant
"Brai" (sic)
Bois carré
Cacao
Bois rond et de nature
Café
(1) Cf S'Ira p. 58.
(2) "Etat des.rchandises qu'il sera permis d'importer de l'étranger dans les
deux 1les de la Martinique et de la Guadeloupe par des bAtiments français
et étrangers". Tableau n01. ANF12 2618.
105
Chevaux
Légumes verts et sec
Cochenilles
mals en grains
Cuir-· vert e"t-"npo-thr"'-~
-merrain
Drogue et drogurie
morue
Ecailles dt tortue'
mouton
"Essuites" (sic)
mulets
Farine de blé, de mals et autres
porc
farineux
poissons salés de toute sorte
Fourage vert et sec
pommes de terre
Fruits de tout-genre
peaux et pelleteries non appr3tées
feuillards
riz
grains potagers
sel
haricot
sucre brut et terré
indigo
tabac en feuille
laine
volaille
Théoriquement, ces dérogations profitent à toutes les nations
concurrentes. Mais, en réalité, •
France semble plus favorable aux 13
colonies anglaises d'Amérique du Nord, ou ETATS-Unis depuis 1776.
Les Nouveaux Angleterriens (1) commerçaient avec les colcnies
~ sucrières françaises bien avant les dérogatio~ successives de la deuxiè-
me moitié du XVlllè siècle. Ces échanges semnt développés dès le premier
tiers du siècle. "Les bateaux bostoniens (qui) apportaient du blé, du
poisson, des bois de charpente, des chandelles, du savon, des animaux de
travail et remportaient les sous-produits alcooliques des sucreries, c'est-
à-dire les sirops, mélasses,1afias, qui étaient interdits en France, afin
de protéger les eaux-de-vie métropolitaines"(2). Ce commerce était alors
doublement illégal, car il allait à la fois à l'eRcontre deP~~l*sif
(1) Colons anglais d'Amérique du Nord (Nouvelle-Angleterre).
(2) DEVEZE (M.), Antilles, Guyanes, la mer des Cara!bes de 1492 à 1789, p.258
106
anglais et l'exclusit français. Mais il irritait surtout les colons an-
glais des 1les, qui auraient voulu contr8ler le commerce pour conservet~
leur suprématie économique et polit-iq-ue,m ais aussi pour éviter que le
prix du sucre et des mélasses ne s'eftondre.
Cependant, ni leur protestation, ni la loi sur les mélasses en
1733 (Molasses Actes) n'ont réussi à interrompre ce commerce. La contre-
bande nord-américaine est surtout nécessaire en temps de guerre, quand
le ravitaillement venant de la métropole est interrompu. La proximité de
la Nouv~lle-Angleterre des 1les est un atout majeur et explique ces re-
lations privilégiées: Saint-Domingue est située seulement à~OO km de Phi-
ladelphie, alors qu'elle est séparée de Bordeaux de 6 000 km.(1). De ce
point de vue, l'expérience du système mixte ne fait que légaliser un com-
merce déjà existant. Toutefois, ce qu'il est Dportant de souligner, c'est
l'arrière-plan politique de l'opération.
En effet, on ne doit pas perdre de vue que~animosité récipro-
que entre la France et l'Angleterre trouve souvent aux colonies son ter-
rain d'accomplissement. En accordant la liberté de eommerce aux oolonies
anglaises d'Amérique du Nord, la France adopte désormais une attitude
offensive ·~.-à-vis de l'Angleterre. La liberté commerciale de 1763~ de
1767, dont ces colonies sont les grands bénéficiaires, constitue une
violation manifeste de l'exclusif anglais. Elle est donc de nature à irri-
~ter les colons des 1les, très influents au Par~ement •
Le "Sugar Act" (Loi sur le sucre), voté par le Parlement, le 5 Avril 1764,
s'il constitue une mesure fiscale visant à renforcer les caisses du Royau-
me (2), n'est pasllDins l'oeuvre du "West~an interest". En effet:; bien
àvant que le projet ne soit voté, des protestations ont été élevées par
les colonies (3). "Le Sugar Act" rappelle une loi pr~cédente : le "Molasses
(1) LEON (P.), Histoire économique et sociale du Monde, Tome III, p.54~
@) Le gouvernement royal espère tirer un maximum de 80 000 livres par an,
au minimum 50 000 livres. Les mélasses étrangères doivent acquitter un
droit de 3 pences par galon. En outre, les textiles, le café, l'indigo
non britanniques sont œrappés de droits~us forts. Les vins français et
le rhum étranger ne peuvent plus 3tr3 importés.
9) KASPI (A.), L'indépendance américaine 1763-1789. p.36.
107
Act" (loi sur les mélasses) de 1733, voté à l'initiative des colons.
Sans do~eonvient-i:l-d'indiquer -qlle- cette liberté cOmmerciale
~ est indispensable aux Américains, dans la mesure où
-leur balance commerciale avec l'Angleterre est déficitaire. N'est-ce pas
pour eux un moyen de s'affranchir partiellement de la pression du négoce
métropolitain? Notons qu'en plus des sirops et du tafia, il était permis
aux étrangers d'acheter des marchandises venant de France •
•
Mais l'intérlt politique des dérogations de 1763 et de 1767
est qu'elles surviennent à un mCNiellt où les rapports Entre les 13 colonies
et leur métropole sont en voie de dégradation, suite au droit de timbre
de 3 pene es voté par le Parlement en Mars 1765 à l'insu des colons.
En effet, comment ne pas~nser que la France, qui a toujours considéré
comme prochaine la ruine de l'Angleterre sous la charge de ses emprunts
accumulé, n'ait pas songe a s'attirer les bonnes grâces des colons [-.n-
glais en colère? Son entrée en guerre à leur ceté en Juin 1778, trois
ans après l'ouverture des hostilités, sonne l'heure de la revanche sur
"un ennemi avide , ambitieux, injuste et œ mauvaise foi n( 1?
Elle fait
suite à la reconnaissance de l'indépendance des Etats-Unis, le 17 Décem-
bre 1777 et à la signature des deux traités du 6 Février 1778 : un traité
d'amitié et de commerce et un traité d'alliance au cas où l'Angleterre
déclarerait la guerre à la France.
f
Compte tenu des privilèges commerciaux mutuels entre lesœux
partenaires, l'Arrlt du 30 Aoftt 1784 ~ut 3tre interprété comme un acte
de bonne volonté au profit des Américai~ls sont autorisésà exporter
leurs produits dans les colonies françaises, exceptés le blé et la fa-
rine. Ils peuvent tout y acheter, sauf les sucres et le café. Ce quimns-
titue de sérieuses restrictions.
Les grands projets élaborés pendant la guerre laissaient pourtant --&-s-p.-é-rer
que les colonies françaises deviendraient un trésor commun. Dès lors, la
question qui se pose est de savoir si les dérogations commerciales de
1763, 1767 et 1784 cconstituent véritablement un démantèlemen-t de l'exclusif.
(1) KASPI (A.), op. cit., p.119.
108
3-2 ) L'EXCLUSIF RESISTE AUXŒROGATIONS COMMERCIALES ACCORDEES AUX ETRANGERS
------------------------~---~--------------------------------------~--.~
Les plaintes réitérées des négociants français contre l'ouver-
ture des ports d' enttep~aùx coloniè-s au pro l'If des étrangers font croire
à un démantèlement de l'exclusif dans laœconde moitié du XVIlIè siècle.
A~analyse, on se rend vite compte que ce régime a conservé toute son im-
portance en dépit des diverses dérogations.
En effet, n'est-ce pas entre 1763 et 1789 qu'il atteint sa plus grande
importance économique et politique? Même sous la Révolution, ni l'Assem-
blée Constituante en 1791, ni la Convention en 1793 ne songent à l'abroger
officiellement, tant sont encore~issants les intér3ts coloniaux.
En~it, l'extreme timidité de ces tentatives enlève toute pos-
sibilité àœ commerce Œranger de se développer véritablement. La liberté
accoTdée est étroitement contr8lée. L'idée de ports d'entrepSt est déjà
en soi une grande restriction des libertés, du fait des formalités à accom-
plir. Les marchandises autorisé. sont celles que le commerce national
n'est pas en mesure de procurer avec avantage. C'est ainsi que l'avoine,
les bisc.its, la bière en barrique, la farine de froment, de seigle. et de
mals qu'il peut fournir, sont prohibés en 1784 (1).
Les Etats du centre des Etats-Unis, notamment la Pennsylvanie et le Mary-
land, se sont vus ainsi privés d'un grand débouché pour cette denrée (2).
Après l'Arrêt du 30~Qt 1784, les exportations bordelaises de farine aux
1les continuent de progresser: en 1786 et en 17,87, ces exporta~ions
~ sont de 197 314 et 223 516 barils contre 100 8Q3 barils en 1771, note
Paul BUTEL (3).
Les marchandises coloniales, do-nt--l~achat est autorisé aux
étrangers
les sirops et le tafia, nous le verrons plus loin, ne font
pas l'objet d'un commerce important par les négociants français. En
revanche, les sucres, le café et le coton, principaux produits d'exportat~n
2
(1) AN F
2618, tableau n02.
(2) KASPI (A.), op. dt., p.168.
(3) BUTEL (P.), Les négociants bordelais, l'Europe et les 1les au XVlllè siè-
,ili, p.95.
109
des colonies française, sont strictement protégés. L'achat est Œpressé-
ment défendu aux étrangers, sou8~ine de confiscation de leurs navires(1).
__~4 q;et égard,le.e artic~e.s.5,-_~e-8t-8 du projet de réglement de 1784
sont, de mute évidence, d'une extr3~e rigueur (2).
Ainsi, lorsqu'il arrive de temps en~mps aux étrangers d'acheter des
sucres, la quantité est très négligeable. Les exemples que nous avons
trouvés sontœanmoins peu significatifs: la colonie où se déroule ce
commerce, Sainte-Lucie, n'e~t pas une très grande productrice de sucres.
Mais c'est important, car l'acheteur, les Etats-Unis, est un partenaire
privilégié de la France
151 quintaux en 1784, 3 111 ~intaux en 1787 et
2 323 quintaux en 1788. Notons qu'en 1787, Sainte-Lucie exporte 470
quintaux de sucres bruts vers les colonies espagnoles et danoises. En
1788, sur les 2 323 quintaux de sucres exportés vers les Etats-Unis,
559 sont des sucres bruts (3).
Vers 1790, la Guadeloupe exporte vers les Etats-Unis 2 734
quintaux de sucre brut et 41 vers les colonies étrangères (4).
Christian SCHNAKENBOURGmte qu'aucune des expériences nfa
apporté effectivement une solution réelle aux~oblèmes d'approvisionne-
ment et de débouchés ~es 'colons (5). Le ~mmerce étranger est non seule-
ment entravé par les multiples formalités à accomplir, mais aussi par
les droits à payer. Il y a les droits perçus sur les marchandises étran-
~gères et diverses dépenses aux colonies. Les montants des droits fixés
,
en 1784 sont les suivants :
(1) "Mémoire du Roi pour servir d'instruction aux gouverneurs et lieutenants
généraux et intendants des islesw Vent~ 5 AoQt 1763". Art. IV. ANCoIC8A6i
(2) Voir l'Arr@t en Annexes.
(3) AN Col C10C8.
(4) "Etat~néral du commerce de Basse-Terre pendant les 6 premiers mois de
1790" et "Etat général du commerce de Pointe-à-Pitre Grande-Terre pen-
dant les 6 premiers mois de l'année 1790". AN Col F412 folio 44 et 49.
(~) SCHNAKENBOURG (C.), La crise d~ système esclavagiste 1835-1847, pp.73-75.
110
Montants des droits perçus sur les marchandises étrangères exportées dans
les colonies françaises (1) :
Marchandises
Montant du droit
Animaux vivants
10 % de la valeur
Avoine
2 livres par hectolitre
biscuits
3 livres par 50 kg
bière en barriques
25 sous par litre
bière importée en bouteille
6 livres par douzaine de bouteille de
1 litre, en plus du droit sur Jes
liqueur
bo&uf salé
9 livres par baril de 100 kg (poids net
de viande)
farine de froment
6 livres par baril de 90 kg
farine de œigle
3 rtvres 50 sous par baril de 90 kg
farine de ma'Is
2 livres par baril de 32 gallons
autres farines
3 livres 50 sous par baril
Légume sec
3 livres 50 sous par hectolitre
ma'Is en grain
2 "livres par hectolitre
morue et autres poissons salés
10 livres les ~O kg
riz
3 livres 10 sous les 50 kg
sel
2~1ivres 50 sous les 100 kg
volaille
2 livres la douzaine
Les dépenses diverses aux colonies comprennent
les fi:"ais de
commerce, les frais d'a.irauté et les frais divers.
Dépenses aux colonies (2)
~ Droit ••••••••
1 % de la valeut desœrchandises
additionnel
1 % idem
du vendeur
5 % sur la valeur de l'importation
commission
de l'acheteur
5 % sur la valeur de l'exportation
12
(1) AN F
2618. Tableau n02.
(2) Aperçu du commerce des Américains avec la colonie de Sainte Lucie 00bjets
permis par arr~t du 30 AoQt 1784). AN Col c10c8.
Entrepet de Tabagoscaraborough, courant de l'année 1787. ANColC10EB.
111
Ancrage •••
,
l '
•
7
1 .
A
Pilotage
eva ues a 1 2
~vres par b~timent à Sainte-
Frais de port interprète
~~_~~e~ 1132 livres par bttimènt à voile carré
--~e t &ID irau té
frais d'amirauté
99 livres par bateau et geolettes
à Scaraborough (port entrepat de
Tabago)
Chargement
déchargement
Tout cela est évalué à 165 livres par
Frais divers
acconnage
bltiment à Tabago.
avictuaillement
réparation
maladie
Dans l'état actuel de nos recherehes, il nous est impossible de
fournir des totaux de recettes. Cela a peu d'importance. Pour l'heure, ce
qu'il est important de retenir, c'est que ces droits sont perçus au profit
des colonies et servent
à financer les travaux locaux.
Cela, en vertu
de l'Arr3t du 5 AoQt 1732, qui a dissocié le Domaine d'Occident dans les
1les de celui établi en métropole.
Dans l'ensemble, cette étude permet de voir que le commerce
étranger autorisé ne constitue pas une libération du régime commercial
des colonies. Au contraire, les formalités à accomplir, les droits à payer
et la limitation des marchandises admises tant à l'importation qu'à l'ex-
portation à des articles bien précis, sont autant d'entraves qui ôtent aux
étrangers toute possibilité de concurrencer les ,négociants français.
,
Cette intransigeance des autorités française s~inscrit dan~ la lOGique
commerciale de l'époque, selon laquelle la libre concurrence ne peut
constituer une source de profit durable. En effet, le profit étant en-
gendré par la spéculation, ne peut se réaliser, dans cette logique, que
dans le cadre du régime exclusif.
112
II/ L'Exlusif, un instrument au service des négociants pour réaliser des
La position fortement dominante de la France sur le marché euro-
péen de réexportation des sucres,dans la seconde moitié du XVIIIè siècle,
résulte du prix relativement bas de ses sucres à l'étranger. La politique
d'incitation à l'exportation, en vigueur, qui décharge les étrangers des
droits perçus sur les sucres à leur entrée en France, justifie en partie
ce succès commercial (1).
Mais il Y a une autre raison. Sans doute, la plus fondamentale :
c'est le prix relativement bas des sucres aux colonies. Cette raison est
d'autant plus fondamentale que le prix en Europe dépend, dans une large
mesure, surtout en temps de paix, des prix coloniaux. Comparativement à
se qui se passe du c8té anglais, cette situation f!cheuse pour le colon
est une victoire des négociants français. El+e suscite deux questions àux-
quelles nous devons répondre maintenant
pourquoi l'exclusif est-il ap-
pliqué au détriment des colons français? Comment les négociants parvien-
nent-ils à sous-payer les sucres colons ?
1°) ~:!~=!~~!f_!~~_~!~~~Eé_!~_~~~E~E~!!_~~_EE~f~~_~!~_~~~~=!~~~~
•
.
r
1
Si, en Angleterre, "le grand nombre de marchands antillais qui
tiraient profit du commerce avec les Antilles ne manqua pas de contribuer
à la puissance des planteurs" (2), il en va autrement du c8té français.
Fondées dans le seul tntér3t d'augmenter la puissance de l'.Etat, les colo-
nies n'ont pas été toujours associées aux affaires du commerce. Pis, il
n'est pas exagéré de reconnaître que le sort des colonies s'est noué en
métropole, à l'insu des intéressés eux-mêmes, c'est-à-dire des colons.
(1 ) Cf. u,fra, p. 362
(2) WILLIAMS (E.), Capitalisme et esclavage, p.123.
113
Tout s'est décidé dans le cadre du "mariage de l'absolutisme et
du mercantilisme"(1), de l'alliance du Roi avec la bourgeoisie commer-
çante. Car, surwus les sujets concernant le commerce, ce sont les repré-
.
.~---_.
-.,-".
- - -
"---'~
.-.'--~_.__•
-
"_o.
sentants des négociants qui ont été appelés en consultation.
Or, la consultation des compétences en matière de commerce a été une pra-
tique courante sous l'Ancien Régime.
En 1664, COLBERT, désirant voir les négociants des principales
places du commerce s'exprimer, crée les chambres de commerce. Ils sont
invités à choisir deux de leurs pairspour les y représenter. En plus de
.
,
d '
~ tre "
.
d
1
cela, tro1S de ces representants
eva1ent mandes a la sU1te
e
a Cour,
pour donner leur avis sur les mesures à prendr-een faveur du commerce.
Ces chambres, établies réellement et régulièrement par l'Arr~t du Conseil
d'Etat du Roi du 30 Aont 1701 (2), joueront ce rale d'assemblée consul-
tative. Elles sont composées de représentants instruits du commerce en
généra~eni ê~rtout, de chacune des villes de commerce; elles relèvent,
excepté4la Chamore de Marseille, du contrSle général des finances, admi-
nistration chargée du commerce •
. Mais le conseil du commerce a été l'assemblé~ consultative par
excellence. Celui fondé par Louis XIV a fonctionné pendant les premières
années du ministère de Colbert. Il est réapparu en 1700, grace à DAGU~S
SEAU, chargé par PONTCHARTRAIN de la direction des affaires commerciales.
,
Un nouveau est institué en 1730. Il est uni au conseil des finances }lar
l'
l'An~~t du 5 Juin 1787.
Le conseil du commerce comprend : le contrôleur général, le
secrétaire d'état ~ la Marine, deux conseillers d'état, 12 députés des
villes de commerce élus par le corps des villes, lesmambres de commerce
(1) BEAUD (M.), Histoire du capitalisme 1500-1980, p.49.
(2) Les chambres de commerco sont établies à Lyon en 1701, à Rouen en 1703,
à Montpellier en 1704, à Bordeaux en 1705, à la Rochelle en 1710, à
Lille en 1714. Marseille et Dunkerque ayant déjà les leurs.
114
et les négociants (1). L'absence des colons dans toutes ces instances
consultatives est évidente. Il est alors logique qu'ils n'aient pas·
·été- consultés lors de la codificatien des principes de l'exclusif en
Octobre 1727.
La représentation coloniale en métropole est postérieure à
toutes les mesures importantes touchant au commerce.
La première représentation coloniale en métropole date de 1763. Le pre-
mier député ~olonia~ est le créole martiniquais dean DUBUC, nommé par
la Martinique et la Guadeloupe. Hostile comme tous les colons à l'exclu-
sif, il s'allie avec les philosophes, les physiocrates et les savants.
C'est certainement pour l'amadouer que CHOISEUL le nomme premier commis
au bureau des colonies.
C'est grlce à lui qu'est autorisé, en 1767, le commerce direct de la
Guadeloupe et de la Martinique avec l'étranger par le Carénage à Sante-
Lucie.
Touter01s,il est certain.
. que l'activité des milieux colo-
niaux en métropole ne remettait pas enœuse le rale prépondérant des
négociants. AFeuve, l'exclusif n'a jamais ~é officiellement abrogé.
La liberté commerciale accordée aux étrangers aux tles était elle-mAme
étroitement contr8lée pour éviter les dépordements. Il faut ajouter
que, compte tenu de l'hostilité des colons à l'exclusif, cette remise
en cause aurait signifié son abrogation.
f
Les chambres, installées aux colonies, étaient dotées de
tous les pouvoirs, sauf delui de s'exprimer sur l~-questions relevant
du grand commerce. L'échec de la tentative de création des chambres
constituées pour moitié de représentants des planteurs, et pour l'autre
des négociants en Martinique et à Saint-Domingue en 1759, en est la
preuve la plus concrète : un échec qui co~sacre la victoire des négociants
sur les planteurs.
(1) La répartition est la suivante: 2 de Paris, 1 de Rouen, Bordeaux, Lyon
Marseille, la Rochelle, N~ntes, Saint-Malo, Lille, Bayonne, Dunkerque
plus, au besoin, 2 représentants de la ferme générale.
115
La composition de ces chambres, 8 memmres dont 4 colons et
4 négociants. ne pouvait de toute évidence laisser prévoi~
.une en-
_.-----t.nte p&l""fa1t-e. Des--discusaions--au· sujTt-d-e-s- i"nt-6r!ts -respectifs ne
tardent~s à éclater. Elles opposent les deux parties composantes des
chambres. Sous la pression des négociants, le Roi. prenant prétexte
de ces débats qualifiés d'inutiles. réduit leur composition aux seuls
colons, en les dépouillant de toute compétence en matière de commerce.
La raison invoquée : "les chambres de commerce établies en France étaient
suffisantes pour défendre par elles-m3mes et par leurs députés au Bureau
du commerce les intér3t du commerce de la métropole en général, et celui
de la colonie de Saint-Domingue ( des colonies~_ILgénéral) en particu-
lier. pour pouvoir déterminer en connaissance de cause le parti le plus
avantageux respectif des colons et des négociants" (1).
En 1763 donc, ces chambres prennent uniquement le titre de
chambres d'agriculture. Elles sont composées chacune de "Sept colons
créoles ou ayant habitation, à l'exclusion de toute personne choisie
en d'autres états".
Leurs compétenceaportent uniquement sur les questions concernant
la
population. les défrichements. l'ag~'iculture, le cabotage entre les
1les, le commerce intérieur, l'assiette et la perception de l'impSt, les
travaux publics, la santé publique, la défense et la s~reté coloniale(2).
En 1787, elles sont remplacées par les assemblées coloniales qui hé-
ritent des mImes compétences.
,
f
Tous ces renseignements permettent de penser que les mesures
arr3tées en faveur du commerce sont loin de pr3ndre vra±ment en compte
les intér@ts commerciaux des colons. Ce sont des mesures favorisant au
contraire les intér@ts des négociants et de l'Etat, en somme, de la mé-
tropole. Conséquemment, c'est du côté de cette alliance entre l e - p o u v o i r t
lf'
royal et les négociants qu'il faut rechercher les raisons du bas p~r~i~xr---------~
1
}
(1) Préambule d'un seconà arr@t du Conseil d'Etat en date du 20 Mars 17ô3.
AN Col F3162.
(2) THAMAR (M.), "L'assemblée coloniale de la Martinique", in ~, n01.
1955, pp.1-27, cf. p.3.
116
des s~cres dans les colonies françaises et non, comme il appara!t souvent,
du ceté du droit d'exportation : très bas du cate français, 1 % contre
4;5 %du-c-eyeanglais,'-eta..-la ferfilite-ciu'-aoi, notamment à Saint-
Domingue, qui épargnerait au colon le recours à l'engrais (1).
L'exclusif, symbole de cette alliance, favorise les pratiques
spéculatives des négociants aux colonies.
Si le planteur anglais profite de l'exclusif pour faire sur-
payer son sucre au raffineur (l) il en va autrement pour le colon fran-
çais. Du c&té français, en effet, tout fonctionne 1e toute évidence
comme si, par le biais de l'exclusif, la métropole contraignait les
colonies à lui vendre leurs denrées moins cher qu'elles ne pourraien~
le faire à d'autres pays et permettait aux négociants nationaux de faire
payer aux colonies, les marchandises plus qu'elles ne valent.
C'est le processus de la spéculation. La différence de prix
entre le sucre colonial français et le sucre colonial anglais provient
de ce que le négociant français peut se livrer plus librement et plus
facilement à la spéculation. L'exclusif étant devenu entre leurs mains
une arme redoutable contre les colons.
"
Le très bas prix du sucre colonial ~ançais par-rapport à celui
des "British West Indies" est constaté dis la fin du XVIIè siècle.
1:
-.;.-----------------------------------===----'(-
DEVEZE (M.), L'Europe et le monde à la fin du XVIIIè siècle, p.410.
Eric WILLIAMS révèle que, pour scutenir le prix du sucre qui était tom-
bé partout du fait de l'extension des cultures dans les colonies fran-
çaises et espagnoles, le
planteur~ anglais choisit de restreindre la
production afin de~uer sur l'offre et la demande.
Cf. Capitalisme et esclavage, pp.104-105.
117
Christian SCHNAKENBOURG observe que cette différence subsiste jusqu'à
.
la Révo1ution,~ notant toutefois qu'.lle tend'à s'atténuer dans la
seoonde-moitié-du XVIIlè siècle. Dans la-décennie 1770, cette diffé-
rence est de 10 à 15 %. En Guadeloupe par exemple, les Hollandais en
1775, et les Nouveaux-Angleterriens, en 1776, paient le sucre brut
environ 25 % plus cher que les négociants français (1).
Paul BUTEL, à travers l'exemple du commerce bordelais aux
11es, retrace les grandes tendanc~du mouvement des prix des sucres
.
bruts. Deux cycles de baisse dans la première moitié du XVlllè siècle
le premier de 1730-32 à 1736-38, le deuxième de 11Lt:8-50 jusqu'à la
guerre de Sept Ans. Dans la seconde moitié du siècle, il note que, de
1165 à 1772, un net~faissement des prix accompagne la croissance des
importations. Les prix les plus élevés, les meilleurs du siècle, écrit-
il, ne sont constatés seu~ement qu'en 1776-1777(2). Il faut ajouter
qu'aux nouvelles de guerre, les prix baissent aux 11es. Robert LACOMBE
note. en effet. que les colons réduisent c?uramment leurs prix de
40 à 50 %, surtout lorsque le négociant pouvait payer encespèces (3).
~
La crainte d'une crise de mévente, due aux difficulté de navigation
entre la métropole et les colonies, explique cette situation.
En Europe.par oantre.les guerres font monter les prix. Le négociant
peut augmenter ~es profits.du fait de cette distorsioh bruta1emènt créee
-entre
,
par la guerre les cours coloniaux et europeen~ (4) •
. ,
f
Le prix des .sous-produits sucriers conna1t le m@me mouvement.
Dans la première moitié du XVlllè siècle. les mélasses françaises et
espagnoles reviennent entre 25 et 40 % moins cher aux Nouveaux-Ang1e-
terriens,que celles des "British West Indies" (5). Michel DEVEZE note
(1) SCHNAKENBOURG (C.), La crise du système esclavagiste 1835-1847, p.72.
notes 36 et 39.
(2) BUTEL (p.), Les négociants bordelais, L'Europe et les 11es au XVlllè
siècle, p.107.
(3) LACOMBE (R.), Histoire monétaire de Saint-Domingue et de la République
d'HaIt! jusqu'en 1874, p.17.
(4) BUTEL (P.), op. cit., p.108.
(5)'SCHNAKENBOURG (C.), La crise du système esclavagiste
1835-1847, p.47,
note 37.
118
par .. exemple que
.. les mélasses françaises de la Martinique , va-
laient à peine la moitié des 'mélasses britanniques: 4 pence le gallon
---aa:all·lieu de, 9 o1l10:---pence (1 ) .. Et pour tan t',u-les approTiosionnements ve-
nant de la métropole sont beaucoup plus chers que ceux fournis par
l'interpole; une différence de prix qui, dans un système de troc, per-
met aux négociants nationaux de recevoir plus de sucres en paiement des
denrées d'Europe et des esclaves.
A Saint-Domingue, le baril de farine de France conte en
moyenne 70 livres, ~ndis que celle de la Nouvelle-Angleterre vaut 45
livres seulement le baril (2). C'est la raison pour laquelle l'Arr3t
du 30 Aont 1784 prohibe l'importation du blé et des farine américains
aux tles. Car, du fait de cette différence des prix, les négociants
français auraient pu difficilement entrer en concurrence avec les
Américains. La morue américaine conte, à la veille de la Révolution,
environ 20 à 30 % moins cher, selon les années et les colonies, que
celle provenant de la p@che française (3). Les intendants PEYNIER et
d'ENNERY notent que lamrue française vendu par un nommé FORCADE à
que
la Martinique, conte 45 livres le quintal alors celle d'Angleterre,
m3me chargée d'un droit de 8 livres,ne ~onte que 36 livres' (4). En
---~-'7-.,"~._". - ---
l~ vres
1784, la morue américaine coOte 20 à 28
au plus le quintal, "alors
que les armateurs français n'ont jamais pu la livrer à moins de 40·
"f-
et souvent, ils l'ont fait payer à 50 "(5).
r
f
Il en est ainsi des captifs de la traite française. En
1772, les Noirs livrés en interlope à Saint-Domingue par les Anglais
seraient d'un tiers moins chers que ceux de la traite française-{6).
Vers 1770, alors que le prix moyen des esclaves vendus par les né-
griers
français oscille autour de 1 800 livres par t3te, œux produits
(1) DEVEZE (M.), Antilles, Guyanes, la mer des CaraIbes de 1492· à 1789,PI~~~~
(2) En 1763, le Mercier de la Rivière, intendant de la Martinique, note
qu'alors que le prix ordinaire de la farine de froment est de 50 à 60
livres le baril, les négociants français le vendent à 75 livres, que le
baril de boeuf qui est de 60 livres est vendu à 90 livres.
~~ Colc8A65 folio 303.
(3) SCHNAKENBOURG (C.), op. cit., p.72, note 35.
(4) AN COl C8A68 folio 61.
(5) Copie de la lettre de M. LAFORTE au Maréchal de Castries, 23/J~illet
1784. AN F122618.
(6T-EROSTIN (Charles), Histoire :de l'au.tonomisme col-on,-Tome l, p.350, cité
par Christian SCHNAKENBOURG, op. cit., p.72, note 36.
119
..
en interlope depuis la Jamaique coQtent en moyenne 300 livres de moins
(1). En Guadeloupe; en 1775, les esclaves de la traite française sont
-'-"-1'1118 chers d 'un-quart-'qu..- c-eux que les hab-i1;ants-peuvent acheter aux
négriers étrangers (2).
L'hostilité des colons à l'exclusif provient de cette pra-
tique spéculative du négoce métropcili tai~n',- qui cons1ste à faire payer
ses marchandises et, au contraire, à sous-payer les sucres aux colons.
Le colon qui arrive de France pour s'enrichir afin de regagner la mé-
tropole où il jouira du fruit de son travail, est très vite désillu-
sionné. Il comprend, en effet, que son re1e de coopérateur_..de la puis-
sance de l'Etat l'expose en réalité à l'égoIsme des négociants, sous
l'oeil bienveillant du pouvoir royal.
Cette belle réflexion des administrateurs de Saint-Domingue
en 1752 traduit Dien l'indignation des colons:
"Les colonies sont sans doute faites pour contribuer à la
prospérité du commerce ; mais le commerce n'est pas moins lié à con-
courir aux progrès de leur
étab1issemens. Nous ne pensons pas que
_ _-",J..
8.a,~.aujets du Roi qui les habitent doivent
être regardés comme ses .;
tributaires; et s'ils sont destinés à lui procurer des accroissemen.~
il n'est pas juste qu'ils ne participent pas aux avantages qui résa1-
tant de leur travail et de leur industrie"(3).
,
1
C'est le mAme constat que fait l'intendant le MERCIER de la
RIVIERE m Martinique en 1763 :
"L'esprit et l'intér8t du. commerçant ne seront jamais l'es-
prit et l'intér3t du commerce"(4).
(1) PEYTRAUD (L.), l'esclavage aux Antilles françaises avant 1789 ••• , p.354
(2) HILL lARD d'Auberteui1, cité par Ch. SCmfAKEliBeUHG, op. cit., p.72, note
35.
(3) "Lettre des administrateurs au ministre sur l'usa§e de terrer les su-
cres" Port-au-Prince, le 2 novembre 1752. AN Co1F 16~.
120
On comprend dès lors la raison pour laquelle les colons ré-
clament en permanence unelibéralisation du régime commercial. On com-
. prend--au&8i-pourqu-oi~l~"exclus±f -n'a jamais été '&orogé; Car,-11 est
certain que, si le commerce des tles avait été libre, une bonne par-
tie des sucres aurait été détournée des ports français comme cela se
passait avant Colbert. Les négociants en ont fait la triste expérien-
ce à Saint-Domingue en 1773. Au mois d'Avril 1773, 279 navires sont
~ignalés dans tous les ports de la colonie, dont 226 navires français
et 53 navires anglais (1). La présenc~ des navires anglais est justi-
fiée par la permission d'une année accordée par le gouvernement de
Sain t-Domingue aux étrangers pour ravi tailler la colonie t---Jlp_J."ès les
deux ouragans successifs du 3 AoQt et du 4 Septembre 1772 qui ont
détruit tovs les vivres des parties nord et~d de l'11e. Les armateurs
nantais qui, au moment du départ des navires avaient prévu des retours
excellents par le frIt : 17 deniers pour le sucre et les autres den-
rées, sont surpris d'apprendre qu'il est tombé à 11 deniers.
Mais la plus grande surprise est causée par la hausse du
prix des sucres. En effet, "1es habitants devenus plus spéculateurs
qu'autrefois, ont senti qu'ils pouvoient profiter de la circonstance
---~=
pour hausser le prix des denrées, et l'ont très sagem.ent fait"(2) • .
Le r81e des Anglais dans cette aventure commerciale parait
•
certain. Bénéficiant de la complicité des cOfons, ils ont eu accès
aux sucres qu'ils ont acheté à des prix plus attractifs que ceux pra-
tiqués par le commerce légal. L'interpole, permettant aux colons d'é-
chapper partiellement aux pratiques spéculatives du négoce métropoIi-
tain.
(1) Les navires anglais sont signalés dans trois ports: 26 au Cap, 14 au
Port-au-Prince et 13 aux Cayes.
(2) Mémoire enœponse à celui du commerce de France, p.5.
AN ColF2B3.
121
On peut retenir des développements précédents trois idées
essentielles : premièrement, l'exclusif fait des colonies la chasse-
gardée des négociants métropolitains ; deuxièmement, il définit la
- - _.... -
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tâche dévolue aux colonies, qui est celle de la production de matière
première, les sucres brutal le transport, la transformation et la com-
mercialisation étant maervés aux négociants ou, plus exactement, à la
métropole ; troisièmement, il contraint les colons à vendre leurs su-
cres à très bas prix aux négociants nationaux, n'ayant pas la possibi-
lité de les faire valoir ailleurs.
L'hostilité des négociants au commerce étranger dans les
possessions françaises traduit une inquiétude réelle : celle -de--voir
un jour leurs intér3ts voler en éclats sous la pression de la concur-
rence étrangère. Les colons qui veulent vendre leurs sucres et acheter
les marchandises dont ils ont besoin à leur juste valeur, ont réclamé
en vain la libéralisation du régime commercial des colonies.
Comment expliquer la réticence du gouvernement royal à
abroger officiellement l'exclusif? L'Etat est partie prenante dans
l'affaire. En effet, une partie des bénéfices du commerce est captée
par l'~tateous forme d'imp8ts. L'exclusif n'est-il donc pas un moyen
commode d'accro!tre ses recettes fiscales?
,
1
111/ L'Exclusif comme facteur important du prélèvement fiscal.
Dans un article paru dans Annales ~nomies, Sociétés et Ci-
vilisations en 1978, Alain GUERY écrit :
"La politique budgétaire sous l'Ancien Régime est limitéeà la
recherche de l'argent nécessaire pour couvrir les dépenses engagées"(1).
Il explique ensuite que, responsables de l'administration royale des
(1) GUERY (A.), "Les finances de la monarchie
française sous l'Ancien Ré-
gime", in Annales Economies, Sociétés Civilisations, n03, 1978, pp.
205-429.
122
finances, publiscistes et iconomistes de l'~poque ne conçoivent le
rapport entre laüe iconomique et sociale et les finances de l'Etat
-----Ciu'en termes de conséQ.uen.ces de l'une sur l'autre, mais jamais en
terme de fonctions.
Pour eux comme pour ms négociants d'ailleurs, la prospériti du royau-
me permet d'alimenter le trésor royal au moyen du prilèvement fiscal.
Et, quoique les physiocrates aient tenté depuis 1750 d'imposer une
nouvelle conception qui met l'accent sur la rente foncière comme la
seule susceptible de fournir un revenu net, le commerce extirieur a
toujours gardé sa réputation de créateur de richesse, selon la pure
tradition mercantiliste (1).
Le perpétuel pressant besoin d'argent de l'Etat et l'atta-
chement des négociants aux mesures et aux écrits de Colbert ont donc
fait bon ménage : la monarchie favorise les entreprises des négociants
et manufacturiers et perçoit en contrepartie des droits pour alimenter
le trisor royal. Deux sortes d'impSt découlent donc de l'activité com-
lDerciale.~L'un de la prospériti du Royaume: la capitation ou l'imp8t
de classe, l'autre de la prospiriti commerciale: les taxes somptuai-
res sur les denrées coloniales entrant en France.
colonial.
f
,
-----~_.-
Le trafic des îles n'a pas manqui d'attirer de nombreux né-
gociants. Les études commencées par Paul BU7EL pour Bordeaux (2) et---
par Jean MEYER pour Nantes (3) montrent qu'on peut pousser plus loin
l'enqu3te pour savoir l'apport financier des nigociants au fisc. Ces
deux exemples sont significatifs, car Bordeaux et Nantes sont les
(1) "C'est la prospirité du royaume qui permet au fisc d'alimenter le tré-
sor royal ; ~est la prospiriti commerciale qui fait circuler les espè-
ces pricieuses, mesures et condition de toute puissance" Cf. DEYON, le
mercantilisme, p.52.
--
(2) BUTEL (P.), op. cit., pp.285-293.
(3) MEYER (J.), L'armement nantais dans la deuxième moitié du XVlllè siècle
p.186.
123
deux ports"f~ançais dont l'activité avac les 1les a été la plus intense.
·--Ma4s--pourlt-re:-e:omplet· il importe d'aller--au-dalà: des seuls
négociants les pl:..s directement impliqués dans le trafic colonial :
armateurs, commissionnaires et raffineurs. On doit en effet s'intéres-
ser aussi à tous ceux qui tirent un queconque bénéfice du commerce
colonial (1), donc aux négociants, manufacturiers et agriculteurs, dont
les produits s~écoulent aux 1les ou dont les activités sont liées à
l'industrie du raffinage en France.
A Orléans, par exemple, Georges LEFEBVRE montre que "ce~~e
industrie s'était subordonnée une partie de l'artisanat qui travaillait
maintenant pour elle beaucoup plus que pour la clientèle particulière"
(2) : les 25 chaudronniers en 1776, les 10 potiers et 30 cordiers en
1787, les papeteries de Meung et celle de Saint-Nicolas-Saint-Mesmin.
fabriquant surtout du pap~r à sucre, gris et bleu, n'avaient sans doute
pas de meilleurs clients que les raffineurs.(2)
En 1791, quand éclatent les révoltes noires à Saint-Domingue,
ce sont 85 "commercans et fabricans d'Amiens" qui manifestent leur
-----~==:=-..
..
solidarité aux colonsreunis à l'h8tel de Massiac et qui présentent une
adresse à l'Assemblée Nationale et au Roi (J).
,
.0;
,.
(1) Négociants de France intéressés au commerce de la Guadeloupe en 1794
Granier
Raphael de Marseille
Foderet, de Cailles, Barthélémy, Toussaint, Berret et ses fils, Jean
_
Borel, Joseph Rigody, Pierre François, Marie Fabre, tous de Marseille
Louis Arcis de Lyon ; L. Collin de Grenoble ; Guillaume Coppinger, père
et fils, Paul Vignes, J.J. Boyer et frères, Mialhe, Pierre Lacombe,tous
de Bordeaux; Louvet et Compagnie, l'Arr.ois et Viellot, du Loire(sic).
Cf. Les négociants de France intéressés au commerce de la Guadeloupe au
corps législatif, 16 p., Paris, in 4°, p.1 : il s'agit des négociants
de leurs capitaines et de leurs chargés de procuration.
(2) LEFEBVRE (G.), Etudes Orléanaises, tome !, p .. 112.
(3) Lettres des commerçans et fabricans d'Amiens à MM les colons français
réunis à l'hStel de Massiac, Amiens le 10 Décembre 1791, Paris, in 8°
- - -14 p., pp.4-5.
Les signataires sont :
Degrand; Lefebvre-Bouchon; Morgan père et fils; Maret ; Etienne-Joly
de Saint-Riquust fils ; François Somont ; Lecaron ; Gensse Daminy ;
Brandicourt ; Clément l'a1né et Cie; Bussilot, Bouchon fils; Gilbert
Poullain ; Aclocque-Roussel l Godart frè~es ; B. Baptiste Durieux le
Jeune ; Morgan; Lamy Tranel ; François Debray ; Nicolas Daveluy ; N.J.
~==+P~oujol ; Dargent, Sallier l'a1né ; B. Bouchon; Morand Boucher ; f~
Boucher; Jubainville; J.B. Damiens; Somont fils; Mouillard; de
Valfreme ; Ch. Florimond ~ Leroux; Cordier et Dufraix ; L.F. Le
124
M3me les études concernant Nantes sont incomplètes, car elles
ne prepnent .a compte que les négociants. Il faudra y inclure les manu-
facturiers de toiles liés aux expéditions négrières, au coton des 1les
et à la gomme arab-ique--~--matTerè--de-première-nécëssité
-~-la- teinture.
Il faudra aussi suivre la participation de ces négociants à tous les
impôts institués par l'Ancien Régime; le dix~ème établi en 1710, pour
la durée de la guerre. Il dispara1t en 1717, réappara1t en 1733, dis-
paralt en 1737, réap~ra1t en 1741, avant de dispara!tre _8omplètement
en 1749.
Le
dixième étant un imp8t de crise, son rétablissement cor-
respond aux moments de crises financières de la monarchie. Le premier---
vingtième, impSt permanent de 5 % de tous les revenus connus d'après
une déclaration contr8lable des contribuables, institué par MACHAULT
en Mai 1749, le second institué pendant la crise de la guerre de Sept
Ans~ le ~osième en 1760 par le physiocrate BERTIN (1).
Les études de Paul BUTEL pour Bor~eaux révèlent que c'est
dans la comptabilité et les archives notariales que.peuvent se faire
Lenormant ; Daire l'a1né ; Langevin Dargent ; Fouache ; Biberel-Laurent;
Veuve Robert-Jourdain et fils; Naudé-Tattegrain ; Jérôme l'a1né ; Tondu
père; Delarache l'a1né fils; Delamorlière ; Tondu fils et Delarue ;
L'Obligeois ; Guérard l'alné ; Duquevre-Séguin ; Loyemant l'a1né ; F.
Laurent ; Dufour-Martin ; Duwavrent ; Biaft ; Guidée ; Hy-Laurent ;
Lamarc-Salmon ;, Bazile Guénar~ ; J .B. Laurent père et fils ; Henry Du-
four père ; Louis SellLer ; Graudin, Aug? Dufour, La dame et Bazançon
père et fils ; Aug. Desjardins ; Lefebvre-du-Four ; Félix Dumont ; Dol-
lin; J. Joiron-Laurent ; Bulan; Dufour-du-Mont ; Louis Leroy; Pellé ;
J.B. Porion; J. Lucas; Le Gendre; Dupontrué ; Dessommes Boitel ; Lan-
gevin frères ; P. Demailly
Bea~coussin; Jourdain Daléloge ; F. Poi-
teaux fils ; P. Gensêe.
(1) PRECLIN (E.), TAPE (V.), Le XVlllè siècle. Première Partie, La France
et le monde de 1715 à1789 , pp.15-17, p.285.
Précisons que le vingtième s'applique à quatre types de revenus :
les revenus fonciers (terres et maisons), les revenus mobiliers, les
revenus industriels et com~erciaux, les revenus des charges et offices.
125
cette longue quête d'informations. L'int~r3t de ces documents est
double: d'une part, ils permettent de déceler les niv.aux de fortu-
ne et, d'autre part, 1esmTeaux de capitation. Imp8t de classe, c'est
dumveau de richesse que correspond naturellement le niveau de capita-
tion.
Ne pouvant pas nous livrer à une étude plus complète de la
question, nous nous contenterons de rappeler les conclusions des deux
études déjà signal les.
Paul BUTEL a montré que c'est le groupe des armateurs com-
missionnaires et des raffineurs qui est le plus taxé des négociants
bordelais. En 1777, les 19 raffineurs sur les 25 capités à 50 1t et
plus, appartiennent au niveau moyen des négociants.
Mais, pour Itre précis, on ne doit pas mettre sur le même plan, le raf-
fineur n:!:exerçant que cette seule activité et celui qui la pratique en
mIme temps que l'armement ou la commission. Sur les 25 raffineurs, 6
au moins se rattachent directement ou par liaison familiale au groupe
des armateurs. C'est le cas de Vouve Pier~e Nairac et fils, de Jean
Jacob Rabaud et de François Lafargue (1). Leurs cotes de capitation
dei" ••t It.8--dans-cecas, ajoutées à celles payées en tant 'qu'arma-
teurs. Ainsi, la capitation réelle de la firme Nairac approche en
1777 les 700 1t, si l'on inclut le raffinage i Baour fils a une
charge fiscale de plus de 386 1t, dont 58 1t;~n tant que raffineur.
,.
Les Sagerau acquittent 348 1t de capitation réelle : ils sont raffi-
neurs et armateurs. Ils paient 270 It en tant qu'armateurs (2).
Au total, 8 négociants sont cap~tés à 400 1t et plus, repré-
sentant à eux seuls 9,7 % du total de la capitation des armateurs com-
missionnairss(3). Un fort contingent de marchands des catégories
(1) BUTEL (P.), op. cit., p.286.
(2) BUTEL (P.), ibidem, p.290.
(3) Paul Nairac
600lt
Pierre-Boyer Metzler
437 1t
_ Ba~ton Oncle
5891 t
et Zimmermann
Jean Delap
5021t
Thomas Clock
432 It
Jean-Philippe We1tner 4881t
Jacob Sandelando
410 It
François Bonnafé 4391t
Cf. BUTEL (P.), op. cit., p.287.
126
moyennes, 44 % du total de5 négociants, paient à eux seuls 48 % de la
capitation du négoce.
Le .• capitaines de navire paient-moins de capitation : en 1772, ils'
paient 1922 lt. Seuls 16 sont capités à 20 lt. Michel CARDIN est, seul
capité à 30 lt. En 1777, en tant qu'armateur, il n'est capité qu'à 90lt.
CertaiRa Juifs portugais jouant un grand rel& qans l'armement et le
commerce colonial, fournissent une part de la capitation : 7 230 lt
en 1772, 9 240 lt en 1773 (1).
André DELCOURT (2) signale que le juif armateur bordelais Abraham
GRADIS, a financé pendant la guerre de Sept Ans, plusieurs expéditions
maritimes organisées pour secourir certaines des colonies françaises.
Il ajoute mIme que "le gouvernement royal était devenu le créancier
de l'armateur bordelais. Choiseul le nomme comme l'ordonnateur de l '
l'1le de Gorée. Il devait 1 transporter la nouvelle garnison française
et fournir les premiers vivres, les équipements, ustensils et maté-
riaux nécessaires à leur réinstallation" (3).
A Orléans, les raffineurs figurent certainement parmi les
sujets du Roi les plus capités, ,car on relève parmi eux nombre de
négociants les plus en vue de la place
• Le Curé Pataud,
_
....~
= ~ = o _ = = ~ '
cité par Georges LEFEBVRE,raconte que les gains momentanés issus des
sucres déterminent d'opulents orléanais
à sacrifier leurs capitaux
à tout risquer pour devenir'raffineurs (4).
r
f
Qu'en est-il de Nantes? Ici,"les armateurs contribuemt
à l'imp8t pour environ 50 % de son produit total"(5). Jean MEYER,
dont l'ouvrage n'est pas une étude exhaustive sur la capitation des
négociants, œontre que les 14 grandes familles du négoce nantais
paient à elles seules en 1788-1789, 10 000 lt de capitation. La Veuve
Grou paie à elle seule 1 040 lt de capitation en 1788 et les Chaurand
(1) Lire pour les détails: Paul BUTEL, PP.285-293.
(2) DELCOURT (A.), La France et les établissements français au Sénégal en-
-.-tx.e1713 et 1763, p.89.
(3) La flotille armée à Bordeaux par Gradis pour aller réoccuper l'11e de
Gorée est mise à la voile le 10 Aont 1763. André DELCOURT, op.cit.,p.89
(4) LEFEBVRE (G.), op. cit., p.113.
(5) PLUCHON (P.), La route des esclaves. Négriers et bois d'ébène au XVlllè
siècle, p.293.
lJ;!
.. .1.
~,~~
!
\\
127
la mère plus les deux fils, 710 It (1).
_ _-,c~e.§..iR;(or..lJ1atiQn8 .colUltit.ue.utun premier- démenti à l' a:Hir-
mation d'Ernest LABROUSSE, selon laquelle le progrès de la revente du
sucre n'est pour la France qu'un indice accessoire (2). Elles permet-
tent de nuancer cette autre affirmation selon laquelle "l'énorme pro-
gression des baux est une preuve frappante des progrès de la popula-
tion, de l'aisance publique, et par conséquent de la consommation, au
cours du XVlllè siècle"(3). Ce sont les riches négociants qui four-
nissent une bonne part des charge~ fiscales. La progression des baux
provient donc de la progression des niveaux de richesse dans le milieu
des affaires. Celle-ci est, en effet, fonction de l'ancienneté.
Cinq types de droits sont perçus sur les sucres coloniaux
à leur entrée en Franèe
les 3 % ou droit du domaine d'Occident, les
droits établis sur chaque type de sucres, les sous pour livre, le
,
1/2 % ou caisse de commerce et les droits particuliers perçus dans
certaines villes du Royaume.
Tous ces droits relèvent du.
Domaine d'Occid~nt, institué le 1e Jan-
,
vier 1681 par Colber~ et compris depuis 1732'dans le bail de la ferme
générale. Il s'agissait d'accro1tre les ressources en exigeant
(1) MEYER (J.), op. cit., pp.184-185. Les 14 grands négociants sont:
Bouteiller, DROUIN, GROU, Bertrand de Coeur, Chaurand, Dembroucq, Por-
tier de Lantimo, Fortin, Clauchy, Mant&udouin, Hervé de la Bauche, Fou-
cault, Espivent de la Villeboisnet et Richard. Cf. p.186.
(2) LABROUSSE (C.E.), La crise de l'économie française à la fin de l'Ancien
Régime et au début de la Révolution, p.XXXVII.
(3) MARION (M.), Dictionnaire des institutions de la France au XXVllè et
XVlllè siècle, p.234.
128
davantage des fermiers ~énéraux (1). Le trésor royal aux abois, avait
besoin de revenus nouveaux, l'arsenal financier traditionnel, sommai-
re et .3.rri é ré, n..!-arr-iva.nt-.plus ..à-l-~al-iem.nter(2).
C'est ainsi que Colbert, dans une pensée de justice et d'éga-
lité, institue un impSt indirect sur les sucres, auquel nobles et clergé
ne peuvent échapper ; le sucre étant alors une denrée de luxe que seuls
les riches pouvaient consommer ~égu1ièrement.
Le droit de 3 % dérive du priYi1ège exclusif accordé à la
Compagnie
des Indes Occidentale en 1664 (3). Il est institué en 1671
;:1
·il
(1 ) Les baux passés de 1726 à 1789 sont les suivants :
1726 le bail Car1ier
80 000 000 1t
1732 le bail Desboves
84 000 000
1738 bail Forceville
83 000 000
1744 bail ~hibaut la ~ue
91 153 000 (en guerre)92 000 000
(en paix, y compris le tabac)
1750 bail Guard:J:n_, puis après sa
101 149 500
mort, Bocqui11on
1756 bail Henriet
110 000 000
1762 bail Prévost
118 OUO 000 (en guerre) 124 000 000
, .
.
(en paiK)
1768 bail A1aterre
132 OpO 000
1774 bail Laurent.David
152 eoo 000
122 000 000 (prix rigoureux)
1780
126 000 000 (prix espéré)
1786 bail Mager
144 000 000 (prix rigoureux)
150 000 000 (prix espéré)
Cf. MARION (M.), op. cit., p.234.
On y trouvait guère qu'un seul imp8t direct, la taille qui, en principe
représentait le rachat du service militaire. Il n'est pas payé par les
nobles qui se battaient en personne ni par le clergé.
Elle prend possession des Iles du Vent le 19 Février 1665. Le clergé,
la nob1èsse et le Tiers-Etat pf8tent le mIme jour serment de fidélité
au Roi et à la Compagnie. On s'occupe sans délai de réglér les droits
seigneuriaux qui seraient payés à l'avenir au Roi et à la Co~pagnie par
le Réglement du 17 Mars 1665.
~_L'article 20 des lettres patentes de 1664, Sa Majesté concède à
la Compagnie en toute seigneurie, propriété et justice, non seulement
les terres qu'elle pourra conquérir et habiter mais encore les "isles
d'Amérique appellées Antilles (is1es du Vent) habitées par les Françai~'
"Dé11~ération des députés du commerce, séan~e du 24 Janvier 1779".
AN F
113(3). Les droits perçus dans les !les du Vent sont 6 livres
par t3te de nègre, 3 livres pa~ barrique de sucre brut et 4 livres par
b,··piCl\\l8-4e sucre blanc. Pareille perception n'a pu avoir lieu dans •••
129
pour régir les particuliers fr.aaçais admis à faire le commerce dans les
Iles du Vent. Il est perçu sur la valeur des denrées coloniales, le
sucre en~ parti~uli~:r'__~ l~ur e!1_~~~!~~~f3._1e Royaume.
Mais le premier texte portant la marque de ce droit est le
réglement du 19
Octobre 1666. C'est aussi la première législation
permettant aux particuliers français et étrangers,notamment les négo-
ciants des pays alliés à la France, de participer au commerce des
Iles du Vent.
Pour dédommager la Compagnie,des taxes d'entrée et de sortie ont été
instituées : 5 % au total pour les particuliers français, soit 2 1/2 %
à l'entrée et 2 1/2 % à la sortie, et 10 % pour les étrangers: 5 %
d'entrée sur leurs marchandises et 5 % du produit en denrées coloniales
à la sortie des colonies (1).
••• la colonie de Saht-Domingue ; les guerres continuelles soutenues par
~
ses premiers conquérants, les flibustiers et les boucaniers,leur indi-
scipline et leur insabordination n'ont 'pas permis d'y établir des im-
pets, car la Compagnie n'a pl traiter avec aucun particulier pour son
domaine. Mame rattachée au Domaine royal, le Roi l'a conservée dans les
mImes immunités, franchises et privilèges, jusqu'en 1713. En effet, de-
o pu; 5 cette date,,~~leRoi a autorisé qu' il soit imposé un droit d'octroi
pour subve~ir aùx besoins de la colonie.
(t) En effet, tant que la Compagnie a fait seule le commerce des Iles du
Vent, il n'y a existé aucun droit d'entrée ou de sortie. Ces droits
n'ont été institués que lorsque la Compagnie a admis à son commerce
soit les nationaux, soit les étrangers. La preuve de ce droit est con-
signée dans le Règlement fait le 19 Octo~re 1666, entre les habitants
de la Martinique, dtunepartet de la Barré Clbdofé et de Chambré, re-
présentants de la Compagnie des Indes Occidentales de l'autre. Il est
convenu article 3 que les Français pourront commer.cer librement à la
Martinique où ils feront venir les marchandises de leur choix d'Europe
et remporter la valeur en marchandises de la colonie en payant seule-
ment à la Compagnie 2 1/2 % à l'entrée des dites marchandises et 2 1/2%
à la sortie du produit.
Il est dit article 4 qu'il sera permis aux étrangers qui sont en paix
et alliés de la France de faire aussi le mIme commerce et aux mêmes
conditions en payant à la Compagnie 5 % d'entrée de leurs marchandises
et 5 % du produit en denrées coloniales à la sortie de la colonie.
- - - -
,
130
En 1670 (1), le commerce étranger est interdit aux !les et
c'est pour encourager les initiatives privées des nationaux qu'un se-
cond ar ~'3t, cèlui du 4:--- Jui.n -16'71; convertit les droits de 5 % en un
droit unique de 3 % sur la valeur des denrées, payable à l'entrée du
Royaume. En 1674 (2), les tles du ~ent, rachetées aux seigneurs pro-
priétaires et rattachées au domaine royal, le droit de 3 %, droit de
commerce, est institué en ferme de Domaine d'Occident le 1e Janvier
1681 et compris dans le bail des fermes générales constituées à l'ins-
tigation de Colbert, afin~accélérer les mouvements de fonds, et de
diminuer les risques de malversations.
La ferme générale étant,en fait,une grande entreprise capable d'avan-
cer aisément et rapidement au trésor.
A l'issue de l'Arrlt du 14 Mars 1768, qui admet les sirops
et tafia en entrep8t en France pour 3tre réexportés a l'étranger,les
3 % frappent les sous-produits sucriers. Il est perçu à toutes les
entrées du Royaume, qu'elles soient ports jrancs ou ports de provin-
ces réputées étrangères. L'obligation faite aux négociants qui arment
des vaisseaux pour les !les, de faire une soumission au greffe de
l',eirauté du port ~~~mement par laquelle ils s'obligent, sous peine
de 10 000 lt d'amende, de faire revenir leurs vaisseaux directement
dans le port de leur départ. répond, nous l'avons déjà signalé, à
cette préoccupation financière.
Il s'agit de contr8ler les arrivées de naviris et de denrées colonia-
les donc les rentrées des taxes'3).
(1) La lutte de Colbert pour ravir aux étrangersi les Hollandais en parti-
culier, le commerce des tles, commence dès 1664. Mais c'est l'Ordonnan-
ce du 16 Juin 1670 qui consacre officiellement l'interdiction du com~'~
merce étranger aux tles.
(2) HOUEt et son beau-frère BOISSERET étaient les seigneurs-propriétaires
de la Guadeloupe et ses dépendances (Marie Galante, le.s Saintes, la
Désirade), achetées à la Compagnie des Iles de l'Amérique le 4 Septem-
bre 1649 pour le prix de 73 000 livres payables en argent. Le 20 Sep-
tembre 1650, la Martinique à son tour est vendue à DU PAR~UET et le
24 Ma1t551, Saint-Christophe à l'ordre de Malte. Le rachat de ces
tles coQte 500 000 livres à l'Etat, dont 125 000 pour la Guadeloupe
et 120 000 livres pour la Martinique, le reste pour Marie-Galante et la
Grenade.
Cf. ORUNGLARA, La Guadeloupe dans l'histoire, Nlle édition, p.31.
U) Cf. U1,ra, p.72.
Quel est le montant des recettes versées au Trésor Royal ?
Il e~t difficile, voire impossible, à conna!tre, étant donné la nature
des baux. En effet, la ferme générale passe un contrat ou bail de 6 ans
avec le gouvernement,au terme duquel -elle verse au Trésor royal une
somme au titre de l'imp8t en question. Les droits sont affermés globa-
lement, d;uù le nèm de ferme générale : gabelles, aides, domaines,
traites, octrois et, après 1730, les tabacs.
La somme versée au Trésor royal s'effectue au titre de ces différents
droits. D'autre part, entre ce que la ferme perçoit et ce qu'elle ver-
se au Trésor , il Y a une marge importante. François HINCKER, analy-
sant cette situation, fait resso~tir que :
"Ces profits étaient souvent placés en bons d'Etat, si bien
que, par un extraordinaire cercle vicieux, l'Etat s'endettant, faisait
prospérer ceux-ll mAmes qui, s'.ils
avaient versé toutes les sommes
qu'ils percevaient, auraient peut-3tre contribué à restreindre la dette
et, par conséquent, les impositions nécessaires pour l'amortir 1"(1).
Les profits de la ferme sont d'autant plus élévés que le droit
de 3 % du domaine d'Occident n'entre pas dans la restitution d'une par-
. tie <he drojte perçus sur_les sucres bruts, lorsque le sucre en pain
qu'ils ont servi à fabriquer sort· pour l'étranger (2).
1
Nous n'avons pas pu retrouver les rrecettes. Mais nous pou-
f
vons faire des estimationB, connaissant la valeur des sucres et le mon-
tant du droit; il est perçu, nous l'avons dit, sur la valeur des
mar-
chandises.
(1) HINCKER (F.), Les Français devant l'impôt sous l'Ancien Régime, p.33.
(2) Nous étudierons cette question plus loin.
~atleau n015-
Estimation de l'évolution de la perception du droit de 3 % de
Domaine d'Occident sur les sucres 1775-1789 (1).
Années
valërar des sucres
Estimation de la perception
(en It)
(lt)
1775
46 764 493
env.
1 402 934
1776
79 404 530
2 382 135
1777
108 065 977
3 241 979
1778
132 162 812
3 963 884
1779
20 972 799
629 183
1780
19 904 879
597 146
1782
64 956 962
1 948 708
1783
54 483 730
1 634 511
1784
61 325 934
1 839 778
1785
86 078 349
2 582 350
1787
70 605 331
2 118 160
1788
89 574 191
2 687 225
1789
92 710 000
2 781 300
Tableau n016 -
Estimation du montant de la perception du droit de 3 % sur les sirops
et tafia 1775-1789.
Années
sirop (en It)
tafia (en It)
valeur totale
Montant de la
perception
1775
5 330
13 284
i
18 614
".
env.
;58 It
1776
14 187
45 :;i86
59 773
1 793
1777
139 521
4 185
1778
487 019
265 805
752 824
22 484
1779
1 259
3 469
4 728
141
1782
-
..
1787
38 760
1 162
1788
40 931
1 227
1789
(1) Sources
de 1775 à 1780 : objet général du commerce de la France avec
l'étranger, y compris les isles françaises de l'Amé-
rique.
AN F12242 à
1782-1785
voir "Tableau de l'importation des colonies françaises et
de la réexportation à l'étranger pendant les années 1782-1783-
1~-et 1785 des six espèces de denrées qui jouissent de la fa-
veur de l'entrep8t et de l'exemption lors de leur destination
pour l'étranger" AN Col C10C8. Tableau n02.
1787 et 1788 : Tableaux comparatifs des denrées coloniales importées
en F,~nce et réexportées du Royaume à l'étranger en 1787 et 1788
AN F
1835.
1787-1788 et 1789 : voir aussi, Résumés généraux dela1~alance du commer-
c··".-'787 : 70 605 300 et 1788 : 94 574 100.
F
251.
133
Ces estimations ne réflètent pas pour autant l'ampleur réelle
du commerce, tout au moins en ce qui concerne les sucres. Pierre
JLUCHON signaie fort justement qu'lion défalque du prix des sucres
payés aux tles, 10 % pour erreur de pesage et 7 % pour perte au cours
du voyage vera la France. Ces 17 % échapperbnt aux taxes à l'entrée
dans la métropole. Comme cette évaluation est excessive, une partie
des sucres, considérés comme manquants ou avariés, pénétreront fraudu-
leusement sur le territoire national "(1).
Jean TARRADE signale de son eSté que, par un consensus entre
la Ferme générale et les négociants, le prix d'évaluation représente
les 4/5~ du prix réel des denrées, la remise du cinquième devant, dit-
il, compenser le coOt du fret et les fraS divers, supportés par les
négociants.
La fixation de ce prix d'évaluation donne lieu à de diffici-
les confrontations entre les représentants. des négociants
~ les députés
des trois places maritimes du Ponant, Bordeaux, la Rochelle et Nantes,
qui représentent tout le commerce maritime de France) et les représen-
tants deo'? Ferme g9pépsle.
Les premiers réclament à la fin de chaque trimestre à leur chambre de
commerce leurs offres pour l'établissement des prix. Les seconds sont
informés par les directeurs des Fermes des trcis ports cités et par
les petites affiches des mêmes lieux qui pub~ïent les prix courants.
La difficulté de la confrontation réside dans le fait que
les deux camps se rencontrent munis de prix différents. Les offres des
chambres de commerce sont, en général, très inférieurs a~x chiffres
produits par la Ferme générale, m3me réduits du cinquième. Les pre-
miers doivent le plus souvent s'incliner, les représentants de la
Ferme n'ayant aucune peine à démontrer l'irréalisme de leurs chiffres.
(1) iLUCHON (P~_ La route des esclaves, pp.289-290.
C'est que, pressés par le contr8leur général qui accro1t ses exigences
financières, notamment i l'occasion du ren~uvellement du bail, les
fermiers généraux doivent récupérer sur le commerce ce qu'ils ont cédé
de l'autre ceté malgré eux (1).
Ces taxes somptuaires frappent indistinctement les sucres
étrangers , hollandais en particulier du temps de Colbert et
au dé-
but du XVIIIè siècle, et les sucres provenant directement des 1les.
Mais, dans cette étude, seul le tarif des sucres coloniaux nous in-
téresse. L'imposition des sucres étrangers fera l'objet d'une étu~e
séparée, lorsque nous aborderons la question de l'importation, car
cette imposition relève aussi d'une politique de restriction d'impor-
tation.
L'origine de la perception des 3 % du Domaine d'Occident
nous a ~émontré qu'on ne_.R!~t~border l'étude de la question des droits
sur les sucres sans se référer i Colbert. D'ailleurs, comment peut-il
en 3tre autrement ?"C'est en fonction de son administration et de ses
. écrits, que s'expriment les économistes français jusqu'i la fin du
,
règne de Louis XV"(2).
i
f
Tout commence au temps de la Compagnie des Indes Occidentales
et de Colbert. Le tarif de 1664 impose un droit de 4 livres sur chaque
quintal de sucre brut que la Compagnie fera rentrer dans le Royaume.
Un second arrêt du Roi,du 30 Mai 1664, lui concède cependant la moi-
tié, afin de lui donner les moyens d'encourager l'extension de la
(1) Voir pour tout cela, TARRADE (J.), op. cit., tome 1, pp.278-291.
Pour les prix d'évaluation, voir le tableau en annexes.
(2) DEYON (P.t-,--Lemercantilisme, p.50.
135
production sucrière aux tles (1).
Cetted.Joli~ique·ti·-en~ourageDfent·à·la·p-roduction
sucrière a-
pour but d'arr@ter les importations de sucre brésilien par les Fran-
çais. Ce demi-droit de 2 livres ou 40 sous est eh vigueur jus~u'à la
fixation d'un nouveau tari!, le 20 Juin 1698.
Ce tarif modéré représente auss~, dans une certaine mesure, une sorte
d'incitation à la libre activité privée souhaitée par Colbert. Celle-
ci devant supplanter la Compagnie car, "la lamentable administration
de ses commis devenait une g8ne insupportable pour le développement
des Antilles"(2).
Ces activités privées doivent elles-mêmes permettre de ravir aux Hol-
landais le commerce des tles.
Le premier teste qui introduit u~e distinction d'espèce entre
les sucres est le mrif du 24 Mai 1675. Il fixe le tarif sur le sucre
raffiné aux colonies à 40 sous (2lt), tandis que celui frappant les
sucres bruts passe de 2 lt (40 sous) le quintal à 4 lt. Ce nouveau
tarif, qui donne la préférence au sucre raffiné, intervient après la
crise de surproduction de sucres bruts, née de la prolifération anar-
t
-~.-
chique des micro-sucreries et de l'incapacité de la consommation métro-
politaine d'absorber toute la production coloniale.
Par suite du simple j~u de l'offret~t de la demande, ils
tombent à un prix tel que les planteurs coloniaux sont acculés à la
ruine (3). D'od des inquiétudes: inquiétude des négociants français
pour leurs boeufs et viandes salées, disette chez les colons déjà
fort endettés envers la Compagnie. Que faire? Colbert n'est pas
(1) En 1664, l'archipel guadeloupéen compte 112 sucreries dont 43 à Basse-
Terre, 20 à la Cete-au-Vent, 12 à Marie-Galante. Toute la partie sep-
tentrionale de la "Guadeloupe" est pratiquement déserte, elle ne ren-
ferme que 13 sucreries en tout. Cf. SCHNAKENBOURG (C.), Les sucreries
de la Guadeloupe, PP.36-37.
(2) PLISSONNEAU ~~ne (R.), Essai de contingentement au XVllè siècle,p.16
(3) Chute des prix du sucres brut de 12 livres le qui~tal à 6 livres seule-
ment.
.~.'.•..:>\\
136
favorable à l'exportation des sucres bruts hors du Royaume. On ne veut
pas riduire la production pour l'adapter aux besoins des raffineurs
de la métropole, r;i pratil;lu.ex...d.ea_..culture.a--au..tres tlue la canne, car
cela ferait diminuer le commerce.
La solution envisagée est donc l'établissement des raffine-
ries aux 11es, qui ab~orberaient environ les 2/3 de la production, car
il fallait alors 3 lb de sucre brut pour en faire une de raffiné. Mais,
.~ûinés et accablés de dettes, les colons ne peuvent entreprendre cette
"
nouvelle industrie. De plus, ils y sont opposés. N'eut-été la tenacité
de Colbert, les patients efforts des gouverneurs de Baas et du Lion
et l'aide efficace de la Compagnie des Indes Occidentales, la réussite
aurait été compromise.
Le droit modéré de 40 sous fait donc p5rtie des encourage-
ments divers accordés à cette nouve.lle industrie. Mais, il 1 a deux
catégories d'intéressés: les habitants sucriers et les raffineries
métropolitaines, qui transforment les sucres bruts pour les présenter
à la consommation. La contradiction dans l'attitude adoptée vis-à-vis
de ces deux catégories de producteurs ne peut que les opposer néces-
sairement (1)'.
Les raffineurs de la métropole ne t~rdent pas à manifester
leur
opposition"au raffinage aux colonies d,1i fait d'une concurrence
qu'ils considèrent déloyale. En effet, ils se plaignent de ce que le
sucre raffiné colonial, fabriqué avec les plus belles sortes de sucres
bruts et ne payant ni plus de fret, ~ plus de droit que les sucres
bruts, peut 3tre verdu à meilleur marché que celui de la métropole.
La raison invoquée ne constitue vraiment pas une nouveauté.
En fait, les négociants ne font que reprendre en d'autres termes le
(1) Voir pour tout ce qui précède la thèse de René PLISSONNEAU Duquène,
UP essai de contingentement d'importation au XVIIè siècle (épisode de
la lutte entre ~ineries 'coloniales et métropolitaines), pp.22-23.
137
principe de la division du travail défini par l'exclusif. Dans le prin-
cipe, en effet, les colonies ne doivent pas développer des activités
- - - -~-~-~------.-",-~.~~ .. ~~... _-~~ '_~-~---""-'-
susceptibles de concurrencer celles de la métropole. Mais l'inquiétude
de la concurrence coloniale sur le marché métropolitain et européen
n'est pas l'unique ioaisoa de la protestation des raffineurs.
Il faut ajouter à celà la peur de voir les raffineries colo-
niales leur enlever le monopole d'achat à vil prix des sucres bruts.
C'est pour éviter l'effondrement des prix, du fait de la surproduction
•
de sucres bruts que l'intendant PATOULET~ arrivé à la Martinique en
1679, encourage les raffineries coloniales (1). En effet, il lui pa-
rassait certain que le seul moyen de faire valoir le prix des sucres
bruts était de restreindre la vente sous forme brute par le raffinage
qui absorbe une bonne partie de la production.
Les raffineurs font valoir ~ussi 'le fjÛ t que le ra~..(inage aux
11es est préjudiciable au développement de la Marine nationale. La
diminution, tant en volume qu'en valeur, du fret aurait conduit les
armateurs à expédier de moins en moins de navires aux 11es : le fret
était tombé" 6e' on eux, detO,.à 12 deniers à 4, 5 ou 6 deniers. A:insi les na·
vires seraièn~'obligés'depuisdeux ane de revenir a faux fret, c'est-à-
dire à demi-chargés. Ils notent enfin que la concurrence du sucre
raffiné colonial a contraint un certain nombre de raffineurs de la mé-
,
tropole à abandonner leur activité (2).
1
Mais, il n'y a pas que les raffineurs. Les fermiers généraux
du commerce, chargés du prélèvement de cet impSt indirect, se plaignent
de leur cSté de ce que le raffinage colonial a entra1né une diminution
(1) PATOULET arrive à la Martinique en 1679 et reste jusqu'en 1G82. En
1680, il signale l'existence de 2 raffineries. En 1683, on compte 5
raffineries aux 11es, consommant 3 000 000 lb de sucre brut (Cf~ ~~F3
142), cité par René PLISSONNEAU Duquèene, op. cit., p.35 et 36.
(2) Mémoire anonyme et sans date. AN F3162. Collection Moreau de Saint Mery
De 12 raffiner-res-qu'il y avait à Rouen, il n' en restera~ t plus que
8 OU 9 ; le nombre de raffineries en activité à la Rochelle serait pas-
sé de 5 à 3 et celui de Bordeaux de 3 à 2.
138
des droits de fermes. Comme on voit, c'est vers une guerre de tarif en-
~re la mé~ropole et ses colonies qu'on s'achemine progressivement, vers
, -
.
-
un essai de contingentement d'importation du sucre raffiné colonial. Le
gouvernement royal est-il si défavorable à un relèvement de la taxe sur
le sucre raffiné colonial 1 Assurément pas, d'autant qu'il entra1ne im-
médiatement le relèvement du montant du bail.
Donc, Colbert donne gain de cause aux revendications qui fu--
sent de toutes parts: l'arr3t du 18 Avril 1682 mo~fie le tarif de 1675
mais pour une durée de deux ans. De 40 sous, la taxe sur le sucre raf-
finé colonial passe alors à 8 lt. Sur ces 8 lt, 6 vont aux cinq grosses
fermes ou Ferme générale et 2 au Domaine d'Occident, pour financer les
dépenses relatives aux colonies.
De revendications en revendications, les raffineurs vont ac-
cr~~5Efbt{i{arit sur le sucre raffiné colonial et obtenir en 1698 un ta~
rif.Jsur le sucre terré 'et raffiné aux colon.ies. Le PELLETIER de Mort-
fontaine, qui succède à Colbert à la t3te duContr8le général en 1683,
reconduit, par l'Arr3t du 28 Septembre 1684, le droit de 8 lt sur le
sucre raffiné colnripl peul' ua&duréeindéterminée, sous la pression
des raffineurs de la métropole.
Et c'est pour régler définitivement la question que l'Arr3t
,
du 21 Janvier 1684 est promulgué, qui, interdi't "à tous les sujet de sa
Majesté habitant aux 1alesfrançoises de l'Amérique d'établir à l'avenir
de nouvelles raffineries dans les dites isles, attendu qu'à cause des
raffineries existant aux isles, celles de France ne travaillent pas et
que les ouvriers raffineurs désertent le royaume ••• sous peine de
3 000 livres d'amende"(1).
Il s'agit incontestablement d'exclure complètement les raffi-
neurs coloniaux du commerce du sucre raffiné en Europe. Mais cela signifie
(1) Cité par R. PLISSONNEAU DUQUENE, op. cit., p.148.
aussi l'instauration définitive d'une division du travail dans laquelle
l'activité agricole est dévolue aux colonies, le transport, la transfor-
mation et la commercial;'sation revenant de droit aux négociants de la
métropole. L'Arr8t du 26 Septembre 1696 confirme le tarif de 1684.
Mais la guerre de la Ligue d'Augsbourg (1689-1694) va dispen-
ser une fois de plus les colons des règles prescrites par l'Arr3t du
21 Janvier 1684. Cette dispense provient, nous l'avons déjà signalé, du
go~t extr3mementcapricieux des négociant~ : pendant la guerre, ~s ca-
pitaines de navires refusent de recevoir les sucres bruts en paiement
des marchandises. Plusieurs hahitants des lIes du Vent, qui faisaient
jadis des sucres bruts,se sont mis à terrer leurs sucres à cause du
bénéfice qu'il
leur procura
Nouvelles plaintes des raffineurs métropolitains~ à propos
du manque de matière première (sucres bruts), nouveaux exemples d!aban-
don du raffinage en métropole. En fait, les sucres terrés ont eu cours
à la place du sucre raffiné métropolitain, 'ce qui n'était pas fait pour
plaire aux propriétaires de raffineries. L'Arr3t du 20 Juin 1698, qui
taxe lourdement les sucres terrés et raffinés coloniaux, est une nou-
velle victoire des~raffineurs. Il fixe les tarifs selon les espèces de
sucres: les sucres bruts sont taxés à 15 lt le quintal et le sucre
raffiné à 22 lt10 sous le quintal.
,
l'
Ce dernier est assimilé au suicre raffiné à l'étranger. Dans
l'esprit des législateurs, ces tarifs prohibitifs doivent exciter les
habitants à faire des sucres bruts leur principale fabrication, afin
de n'en point laisser manquer les raffineries en activité en métropole (1).
(1) "Mémoire sur les avantages de régir en France les sucres terrés venant
des colonies employés au raffinage comme matière première et sur les
moyens de faire participer la main-d'oeuvre nationale au bénéfice des
entrepost en accoràent sur l'exportation du sucre en pain, le remplace-
ment en nature, de la quantité relative de matière première".
AN F12 1639 A.
--_._-
·140
La motivatlon des raffineurs métropolitanns est d'ordre com-
mercial
ils voyaient alors qu'il était de leur bien-Itre particulier
que de faire hausser démesurément le -droif-d'entrêe--sur--ies sucres terrés.
Car, plus ces sucres seraient c~argés de droit, moins les épiciers en
vendraient en détail, et moins IdS sucres bruts paieraient de droit,
plus ils pourraient, en raison du bas prix de leur sucre raffiné, en
augmenter la consommation dans le Royaume et notamment dans la capi-
tale (1).
•
Cela ne déplait pas au pouvoir .~oya1, qui peut ainsi relever
le bail de la Ferme générale. La France, entra1née dans deux guerres· _.. '
qui se suivent presque immédiatement: guerre de la Ligue d'Augs~ourg
(1689-1697) suivie de la Guerre dè Succession d'Espagne (1702-1714),
qui occasionnent des dépenses militaires et diplomatiques, a nécessai-
rement besoin d'argent. En 1715, les dettes de l'Etat sont évaluées à
3 500 000 000 de livres tournons (2).
Dans ces conditions, un relèvement des taxe,s, qui accroit la somme ver-
sée par la Fer~ générale au titre de l'imp8t,est bien venu.
Cet imp8t a ~' pl açe toute t~é.e__.d.B.llS .1a poli tique de liqui-
dation des dettes mise en place par LAW' (1715 à 1726). MAme lorsque les
négociants obtiennent par le m~me Arr~t, l'autorisation de porter les
sucres te~rés et raffinés en droiture des 11e& à l'étranger, c'est
toujours sous la caution du paiement des dr~~s. Ils doivent ensuite
faire le retour en France, pour y ~aire leur décharge, toute chose qui,
en prolongeant. les voayges, accroit les dépenses des armateurs.
Comment partager les revenus entre la Ferme générale et le
Domaine d'Occident? C'est la discussion entre les deux entreprises.
Le Roi,saisi de cette mésentente, règle le partage par son Arr3t du
(1) "Observation sur le Mémoire de Messieurs Boyelet et Dupont, commissaires
géné~~ux du commerce sur le bas prix des sucres raffinés anglais".
AN F
1639 A.
(2) VILAR, Or et monnaie dans l'histoire, p.299.
141
1er Septembre 1699 : le fermier du Domaine d'Occident doit percevoir
seulement 40 sous sur l'ensemble des droits. La Ferme générale, qui
traite avec le Trésor royal doit conserver 20 sous sur les sucres bruts,
13 sur les sucres terrés et 20 lt 10 sous sur le sucre raffiné.
Les tarifs du 15 Mars 1702, 9 Février 1706 et les lettre pa-
tentes d'Avril 1717, qui constituent le règlement général et définitif
du commerce colonial, gardent les distinctions d'espèces de sucres,
consignées dans le tarif de 1698. Mais le tarif de 1717 modère les droits
•
frappant les sucres bruts et terrés : celui des sucres bruts passe de
4 lt à 2 lt 10 sous. Les sucres terr;s sont désormais imposés à 8 lt le
quintal au lieu de 15. Le droit frappant le sucre raffiné colonial
reste inchangé.
Les sucres de Cayenne sont imposés séparément à 4 lt seule-
ment par quintal quelle qu'en soit la nature. ~ette colonie,étant dans
l'enfance. à cause de l'indifférence des n~goeiants, mérite ce taux
- - préférentiel inc1 tateur.
Le tarif de 1;7'7 a fonçt ionné jJl.eq~'à .la fin de l' Ane ien Régime.
Il faut attendre 1791 pour que soit irlstitué un nouveau tarif douanier.
Il est adopté le 29 Mars 1791 (1). Il s'agit d'un tarif modéré en ce
qui concerne les sucres bruts, les sucres terr6s et le sucre t3te • Les
,
premiers sont taxés à 15 sous le quintal, log seconds (terrés et tAte)
à 25 sous le quintal. Le tarif sur le sucre raffiné subit une légère
hausse, passant de 22 lt 10 sous à 25 livres le quintal. On est encore
loin du libéralisme commere~al.
On peut certainement expliquer la réduction des tarifs sur les
qucres bruts, terrés et tAtes par la suppression des primes d'exportation
au début de la Révol~tion. Le tafia est exempté de tout droit quand il
(1) Loi relative aux droits d'en}~~sur les denrées coloniales, donnée à
Paris, le 29 Mars 1791. ~2618. Articles III et VI.
142
Aour être expor±é:
est entrepose~à l'étranger. Le Jécret du Comité de Salut Public du 11
Septembre 1793 affranchit de tout droit les sucres des colonies dEsti-
nés à la consommation intérieure en conservant seulement les taxes à
l'égard des sucres exportés (1).
Ironie du sort, la distinction des espèces de sucres obtenue
du fait des plaintes réitérées des raffineurs s'est révélée par la suite
contraires à leurs intér~ts. Ils se sont en effet aperçu que "le raffi-
heur ne peut travailler à profit sans m31er plus ou moins de sucre
terré suivaat la qualité d~ sucre raffiné qu'il veut obtenir, et qu'il
n'employe point de sucre brut pour faire du sucre super fin et royal,
parce que cela ne lui
tourneroit pas à compte"(2).
Pour obtenir un quintal de sucre raffiné de qualité ordinaire,
le raffineur d'Orléans emploie 75 lb de sucre brut de la première et
seconde sortes et 75 lb de sucre terré commun de la quatrième sorte (3).
0, classé marchandises de luxe et non matière première, les sucres
terrés devant 3tre réexportés sans transformation, les droits perçus ne
sont pas restitués,m3me si le sucre raffiné en pain issu de la fabrica-
tion, sort pour l'étranger. La conséquence est que le sucre en pain
fabriqué en France ne peut!! paa aappol eer la--c-oneurrence des raffineries
étrangères sur les marchés du Nord.
1
Nous verrons que pour briser ce han~cap, les raffineurs fran-
f
çais exigent en 1785 et 1786 un rel~vement sub$tantiel des primes d'ex-
portation (4).
Au terme de cette étude, nous nous retrouvons. devant la mAme
question du produit versé au trésor royal. Il nous para1t impossible
dans l'état actuel de nos recherches, de tenter une estimation m3me
approximative.
(1) BOIZARD (E.), TARDIEU (H.), Histoire de la législation des sucres 1664-
~, p.7.
(2) "Résultat des informations orise~dans les rafineries d'Orléans sur _
l'examen des montres de sucre anglais tiré de Londres et d'une facture
d'un envoy fait à Ostendeé. AN FÎ2 1639 A.
(3) "Résultat des informations orises dans les raffineries d'Orléans ••• "
AN F121639 A.
.
(4) Voir iI~a, p. 364
~43
2 - 3) 1e~ ~o~s_p~u~ liy~~ addi!i~n~els.
Ce nouveau droit est nerçu depuis 1771. C'est un droit de 8
sous pour livre, imposé sur les droits des fermes. Donc, ~ lieu de
2 lt 10 sous, les sucres bruts sont imposés en principe à 3 lt 10 sous
le quintal et les sucres terrés à 11 lt 4 sous, au lieu de 8 (1).
Marcel MARION souligne que le nombre de sous pour livre additionnels
aux droits des fermes s'est élevé progressivement jusqu'à 10 en 1781
(2) ; il atteint 15 à Marseille.
La caisse du commerce ou le 1/2 % a été instituée par la
Déclaration du Roi du 10 Novembre 1727 (3) pour répondre aux nombreu-
ses plaintes des négociants à propos du commerce étranger (4) dans les
!les. Pratiq~ant une tactique qui leur est ,habituelle, ils travestissent
~urs revendications égolstes en mettant en avant les raisons les plus
désintéressées, afin d'émouvoir l'opinion.
;.------~------ -- .
C'est ainsi qu'ils mettent en avant les droits royaux: le
commerce éttanger, écrivent-ils, en drainant une partie des denrées
hors des ports français, diminue une partie des droits_ royaux et ruine
insensiblement le commerce des négociants nationaux.
Donc, officiellement, du moins à l'origine, l'augmentation
d'un demi-pour cent en sus des droits de Domaine d'Occident sur la valeur
des denrées coloniales entrant en France, est faite pour couvrir les
(1) Mémoire sur les avantages de régir en France les sucres terrés venant
des colonies. fu~ F121639 A.
(2) MARION (M.), Dictionnaire des institutions de la France au XVIlè et
XVIIIè siècle, p.234.
0) "Déclaration du roi du 10 UOYelIlhre 1727 établissant un droit de 1/2 pour
cent sur la valeur des marchandises venant des isles et colonies fran-
çaises de l'Amérique". Al,; F1c..i99A. dossier 3.
(4) Il s'agit du commerce anglais et liollandais.
14~
dépenses de renforcement àe la surveillance dans les 11es, afin d'empê-
~.
cher le commerce étranger de s'y déployer. Quoi de plus normal; ces
-----_.
dépenses nécessaires ne peuvent être plus légitimement supportées que,
par ceux qui en doivent retirer le plus d'utilité, c'est-à-dire par les
négociants.
Pendant les trois premières années, il devrait ajouter à un
autre 1/~!de contribution de la Ferme générale a prélever sur le droit
du Domaine d'Occident (1). La perception prend effet le 1e Janvier 1728
et est prorogée théoriquement tous les trois ans par un Arr3t du Con-
seil (2).
Ce travail est confié à des receveurs particuliers des bureaux de la
Ferme du Domaine d'Occident, répartis dans les ports faisant l~ commer-
ce des 11es. Il est coordonné par le receveur général de la généralité
où se trouvent les ports •
. Les différents bureaux de perception sont les suivants :
T?bleau nO 17 -
:-----~-.• ~..._.. _.-
Répartition géographique des bureaux de perception du droit de demi pour
cent en 1780 (3).
;
Généralités
Bureau de perception
Nom des receveurs
particuliers
Calais
Caffieri
Amiens
Saint Valery
Pinguet
(1) Cette contribution n'entra1ne cependant pas une diminution de leur bail.
(2) Elle a été renouvellée successivement par les arr~tsdu 26 Septembre 1730
26 Janvier 1734 , bDécembre ~736, 8 Décembre 1739,_ 11 Décembre 1742, 30
Novembre 1745, 13 Novembre 1748, 13 Novembr121751 , 15 Octobre 1~4, pour
prendre fin le 1er Janvier 1758, etc.
AN F
799 A. En 1787, un Arr3t
du Conseil proroge la perception de ce droit, jusqu'à ce qu'il en soit
ordonné autrement. Par une fav-eur-spéciale, le '\\oi par arrêt du 13 No-
vembre 1748, exempte du paiement de ce droit les chargements des navires
arrivés depuis le 10 Octobre 1748 et ceux qui arriveront à la fin àe
Mars 1749, à causa des pertes considérables subies sur les retours.
( )
12c -
3
Ports du Royau:ne. AN F
ü1û. Dossier 2 1779-1781.
145
Bordeaux
Le Brun
--- Bordeaux
Bayonne
Moracin
Libourne
.---
Ducheiron
Bretagne
Brest
Dautry
Nantes
Lecomte
Morlaix
Thiraux
Saint Malo
Lelas
Vannes
De la Valette
Lorient
Labastié
Quimper
Huchet
Saint Bieue
CAEN
Caen
Lemoic
Cherbourg
Laforet
Granville
Viqueney
FLANDRE
Dunkerque
De Planay
LANGUEDOC
Cette
Taupin
La Rochelle
Duc
LA ROCHELLE
Rochefort
Huet de la Derotte
POITIERS
Les Sables d'Olonne
Le Page
Marseille
Grenier
PROVENCE
Toulon
Fery
Rouen
Foacier
Le Havre
Chapeaux
Rouen
Dieppe
Devismir
Fecamp
Perrain
Honfleur
L'analyse du tableau montre que ces bureaux de ~Jerception SDnt
ouverts a toutes les entrées du Royaume. Chaque r~ceveur particulier re-
tient 1 % de sa recette en guise d'appointement. Le reste est adressé au
receveur général à Paris (1) ordinairement, dans le courant du premier
trimestre de l'année suivante. Cela nous permet de poser le problème du
montant des recettes.
(t) Les différents receveurs ont été
Cordier
: 1727 à ••• ?
Bouillon
: 1731 à 1763.
Saint-Laurent: 1765 à 1771. De 1771 à
..
1772, c'est sa veuve qui a rendu
compte de la
-
ges .. lon.
Borda
: 1773 i 1776. La f~<ie sa comptabilité se situe en 17y7-177~
Rouillé de l'Estang: 1780 à 1786.
3 - 2) Les recettes.
Bien qu'à la faveur de l'établisse~ent des balances du com-
merce depuis 1713, le XVIIlisiêcle-~eit ~J~tablis6ementde comptabili-
té plus ou moins exactes, bien des lacunes et imperfections subsistent
encore da~s la comptabilité de la caisse du commerce. Les sources con-
12
servées aux Archives Nationales à Paris sous les cotes F
799 B à 826,
se réduisent três souvent à des renseignements épars, qui témoignent
du peu de souci à la clarté.
A cela s'ajoute le fait que les statistiques ne classent pas les rece-
tes par espèces de marchandises coloniales.
Il nous est donc impossible de préciser ne serait-ce qu'approximative-
ment la part des sucres dans ces recettes globales. Voici quelques exem-
ples des recettes tirés de la comptabilité des sieurs Borda (1773-1779)
•
et Rouillé de l'Estang (1780-1787).
T~bleau n° 1e.:: Recettes de la caisse de commerce 1773-1787 (1).
1773
379 611 lt
2 sous 3 deniers
1'774
408 848
18
'10
-----n75
431 117
3
7
1776
410 726
14
7
1777
17 938
17
10
1779
146 237.
'6
6
1780
152 488"
19
11
1781
128 050
7
8
1785
319 342
15
8
1786
553 561
9
2
1787
126 807
12
5"
Les recettes de cette caisse du commerce ont-elles été affec-
tées aux dépenses de fortification ? Assurément pas.
12
(1) Etat du produit du droit de 1/2 %. ~~ F 818.
147
.:V~~;;;nt les àeux
l"eRlièr-es- années, en 1728-Et"te-n-
1729. une partie des recettes est remise au trésorier général de la Ma-
=-ine pour le~ travaux de fortification et de réparation.:Er.:
1723,
109 122 It 10 sous sont remis au trésorier général 1e la Marine. les
fortifications et les réparations sont montées à 45 372 It 10 sous
30 350 It ont été utilisés pour acheter des armes, de la poudre et du
plomb destinésaux !les du Vent, 30 000 It pour les m~mes achats, desti-
nés à Saint-Domingue
3 400 It sont payés aux sieurs Champigny et Blondel
pour le prix des 100 barils de boeuf
salé distribués au nom du Roi
aux pauvres habitants de la Martinique.
En 1729, 106 968 It 8 deniers sont remis, dont 46.642 It 8
deniers sont affectés aux fortifications et reparations, 15 577 It pour
remettre l'artillerie des !les du Vent en état et 1 400 It pour élever
une tour ~~r une butte à l'entrée du port de Louisbourg, sur laquelle
on doit~lir un fanal pour la sQreté des vaisseaux qui vont faire la
pêche et le commerce à l'!le Royale ; 30 700 It sont alloués a la fabri-
cation de poudre et armes destinées aux !les du Vent.
s
=
.... -,--~~'"-";..
Par la suite, les recettes de la caisse vont aller en appoin-
tement, pension, gratifications fixes et encouragements aux manufactures
sous forme de prAt sans intér~t durant le te~ps défini.,Montara·n père
et fils, Cotte, Tolozan, Blondel, tous intendants du commerce doivent
leurs honoraires et le paiement de leurs frais de bureau aux recettes
de la caisses du commerce. L'état général des sommes payées sur les
fonds de la caisse du commerce s'établit comme suit:
des somoes
a ées sur les fonds de la caisse du commerce
Affectations
Montant
1. Appointement des Intendants du commerce
43 500
2. Appointement des personnes attachées à l'aàministra-
tion du commerce
32 400
148
3. Appointe-nent des inspecteurs généraux de r.1anufacture
40 000
4. ~~tement des inspecteurs de manufactures en pro-
vinces
115 950
5. Gratifications accordéesà~plusieurs il' pecteurs-en
sus de leur appointement
5 300
6. Appointement des sous-inspecteurs de manufactures
13 300
7. Gratifications accordées à plusieurs sous-inspecteurs
1 000
8. Sommes versées à deux élèves des manufactures
1 400
9. Appointement des commis à la marque (avance au trésor
royal)
11 660
10. Encouragements temporaires qui se payent sous les 6
mois
8 700
11. Encouragements qui se payent dans l'année lorsqu'on
les demande et que
l'ordre est donné
35 725
Gratification une fois donnée
96 285
Autres
230 075
U~e partie de ces dépenses se résume en avances (prats)
•
accordées aux autres caisses donc remboursables. Nous avons pu déter-
miner en gros 89 769 It d'avance dont :
41 880 It au. trésor royal
21 100 l t J!.l!...Jo.nd du droit de marque ;
2 000 It à la régie des bonnetiers de Paris ;
10 400 It au fond de l'octroi des marchands de Rouen
8 100 It au fond des provinces dont
Bearn
2 000 It
(_P~rQQ..
]rOlilel,i;lp~cloie....._~~ 2. 000 1 t
Etat maconnais
1 150 l t
2 600 It au fond du 2 pour livres perçus à Bordeaux ;
2 180 It au fond ju droit des étoffes étrangères perçu
à Lyon
1 500 It à la chambre de commerce de Lille.
f
Hais ces avances peuvent 3tre faites à des particuliers.
Tableau nO 20 -
Note des différents pr@ts faits: état pendant les 6 premiers mois de 1777(1)
Date du Prêt
Bénéficiaires
Objet du Pr3t
Montant
Intér@t
(en It)
Juin 1767
Entrepreneur de la
Pour construire
100 000
4 % par an
Manufacture royale
des bAtiments à
de Bourget
joindre à la ma-
nufacture (cette
manufacture ap-
partient au Roi)
1767
sieur Berré, bonne-
3 000
intér@t de 4%
tier à Montigny
?
pou~ 6ans
après les 6 ans
sieur Jeanduc
?
9 000 à
rembourser
sans intér3t
à raison
de 1 OOOlt
-_-----=.::...-=---
par an
(1) AN F12 818.
1967
! \\.
Nouveau prêt
de 3 000 It
4 %
..
remboursable
""-----_.
en 6 ans
Cliarpen t ier ,-' bonne-
2 OOO-lt 'à
tier à Montigny
?
rendre pen ...
sans intér8t
dant 4 ans
pendant 6ans
Janv. 1768 '1 M. Holker
?
20 000 It
sans intér8t
pour une du-
pendant 3'ans,
rée de 5 ans
5% après.
Septimbre
Premort (négociant) 1
50 000 It et
et sieur Nardeur,
"achat d'un com-l 3 000 It à
sans intérlt
bonnetier à Monti-
pte de Bled"
1 rembourser enl pendant 6 ans,
gny.
4 ans
4 % après
1769
1
2 Janvier
M. de Montarant,
prix de sa char-
fils
ge de conseillerl
au grand conseil
remboursable par
le Trésor royal 1
1771
Février
Cinq fabricants d'
Aubuisson
1 17 500 l t
?
1
1
•
Mars
Sr. Vergne, fabri-
1
600 1 t p~a~L
cant de tapis
?
!bles en 3 ans,
lmoitié er. 17741
11'autre en
11775
Entrepreneur de la
; 60 000 It
prolongation
Charité sur Loire
1 (pour 1 an)
l!avec 4 %
1774
Charles le Frère
1 500 pour
après les 3
bonnetier à Monti-
3
ans, 5 %'
gny
ans
?
1775
5 Février
Trésor royal
à M. Grand,ban-
quier , remis à
M. Dupont pour
21 816
le compte du
Prof. Czarbousky!
5 négociants de
pour une manufac~
Rouen
ture par l'inter,31 1451t1s.10dl
médiaire de ;1.
. ' - -
Beha, député de 1
commerce de Rou-
en
150
?
! Sr. Waltier de la
avance en atten-
Cinté
dant ses appointe-
4 000
ments (3 ans 1773-1
.~.---
1774-1775)
1T '
.
d
1775-1776
resorl.er
es ~ontsl
et chaussées
en
230 000
1775 par ordre du
322 000
21 Avril et en
1776 par ordre du
27 Février
1777
Abbé Rozier
par décision du
7 000 payables!·
11 Juin 1777
! la moitié dansl
! le courant du 1
! mois de Juil.
1 1778, l'autre
!
en Décembre
5 Mars
Touché et Nicolas,!
procureur de la
4 000 8 000
4 000
Provence
pour 6 ans
Instituée pour la défense des colonies, en somme pour un ob-
jectif précis.et temporaire, la caisse du commerce a été transformée
en un imp8t permanent qui est venu accr,lb:o 1_ e Ieeeeure-ee--~e l'Etat.
Si, dans les deux premières années, une partie des recettes a été con-
sacrée effectivement à la fortification et aux dépenses coloniales,
par la suite, elles ont été totalement détou~nées de l'objectif de dé-
part. Elles ont servi à payer des appointemerits;des pensions~ des
gratifications ou à faire des avances et à encourager des manufactu-
res. L'exemple de la caisse du commerce est à mettre er. rapport avec
l'idée selon laquelle la monarchie française" utilise une partie de
ses ressources accrues à entretenir une cour et une armée, encore ~
ge:r.ent aristocratique, et une administration coateuse de robins et
de demi-oisifs" (1).
(1) DEYON (P.), Le mercantilisme, p.85.
151
4°) Autres droits relevant du Domaine d'Cccident.
Le Domaine d'Occide'nt comprend ,.lUsS~ le droit de 50 sous,
perçu à Rouen et au Havre sur le quintal de sucres de cire (1), les
4 It perçus sur le quintal de aucre raffini ~ Mar~eille, les 15 sous
compris dans les frais de 1 It 5 sous 4 deniers d'entrie à Nantes(2).
Nous savons qu'en 1774, les 50 sous ont produit tant au Havre qu'à
Rouen, 40 909 It 9 sous 7 deniers et en 1775, 35 772 It 18 sous 8 de-
niers.
La perception de ces droits ne s'est toujours pas déroulie
dans des conditions ligales.
5°) Les abus de la Ferme.
--------------------
Placks sous la protection du Roi, des juges, des officiers
et des intendant"s', les Fermiers génaraux disposent de droits étendus:
liberti de perquisition chez les nobles, les ecclésiastiques et les
bourgeois, droit de visites sur les bâtiments de guerre, dans les ba-
c
..-- -~- --'--~,'--' <
gages des soldats, pour réprimer la contrebahde ; autorisation d'em-
prisonner les contrevenants sans demander la permission des juges
possibiliti de verbaliser en quelque lieu qu'ils se ~ouvent (3).
;
C'est la source de leur efficaciti. Malheureusement, ils
conduisent à des abus. Les Fermiers du Domaine d'Occident, responsables
de la perception de tous les droits relatifs aux denrées coloniales,
en usent à leur aise. Comment s'en étonner? "La risistance, les injures,
les voies de fait exercies contre les commis assermentés sont actes
(1) Cf. S',ra p. 87-88
(2) Ils se composent ainsi
15 sous de Domaine d'Occident
2 sou~ de Gabau de Paimboeuf
5 sous 4 deniers à Nantes pour droit de prévôté ou d'octroide la ville
3 sous pour la décharge à Nantes
Cf. H. Du Halgouet, Nantes, ses relations commerciales avec les îl~s
d'Amirique au XVlllè siècle. Ses armateurs, ~.133.
(3) HINCKER (F.), Les Français àevant l'impôt sous l'A~cien Rigime, p.32.
de rebellion et actes royaux"(1).
L'abus se situe au niveau de la perc,-:)t j op.des droits sur
les SUcres aux 11es du Vent, alors que les lois existantes stipulent
clairement que celle-ci doit se faire aux entrées du Royaume. De
plus,
depuis l'Arr~t du 5 Ao~t 1732, qui dissocie le Domaine d'Occi-
dent dans les~tles de celui établi en France, avec décharge des dépen-
ses coloniales assignées sur ce Domaine, les Fermiers n'ont logique-
ment plus rien à prétendre dans les colonies.
Or, en 1756, ils profitent astucieusement de la Guerre de Sept Ans
et de ce que les neutres ont été admis librement aux tles, pour lever
en Martinique et en Guadeloupe l'ensemble des droits d~s en France.
Le droit de 3 % est m8me perçu sur les sirops et tafia exportés à
l'étrangêr, alors que ces deux sous-produits sucriers ne sont pas
encore acceptés dans le commerce français, à cause du vin et des eaux-
de-vie de raisin.
~t-c~__~eur d'@tre taxés de rébelles et de désobéissants
que les administrateurs de ces colo~ies ont laissé faire (2) ? Assu-
rément. Les deux seules fois où ils ont osé réclamer ces droits,
c'était pour qu'ils soient versés dans la 'caisse des colonies, en
déduction de l'i~pat demandé pour le financement des tra.vaux locaux
la Martinique dans son Ordonnance du 29 Juillet 1763 et la Guadeloupe,
du 24 Juillet 1765.
t'
Il importe de souligner aussi que, percevoir ces droits
aux 11es, sans tenir compte des invraisemblances, relève de l'escro-
querie. Car, qu'un naufrage survienne et le colon perd, non seulement
(1) HINCKER (F.), op. cit., p.32.
- - - (2) Trois Ordonnances de ces administrateurs prouvent qu'ils reconnaissent
la légitimité de cette perception : Une des autorités martiniquaises
le 12 Mars 1766, stipule à l'article 3, que "les gros sirops et taffia
paieront seulement le droit de 3 % à leur sortie de la colonie pour
l'étranger, lequel droit sera perçu pour le ~te des Fermiers géné-
raux qui doivent en jouir, et ne fera pas, par conséquent, partie de la
présente composition ll • Une de la Guadeloupe le 28 Hai 1766 comporte les
m~mes dispositions à l'art.15. La Troisième, commune aux deux colonies
datée du 1r Janvier 1772, stipule à l'art.12 que les droits sur les
gros sirops et tafia seront perçus sur le pleù de 3 % de leur valeur à
leur sortie pour l'étranger~
Cf'."Mémoire sur les trois pour cen t du Doma: Te=d-"'Occident prétendu dans
-les colonies par la fp.rme génér"ale en France" 21 Mars 1776(anonyme).
ANF3.162.
153
ses maz'chandises, mais aussi le montant du droit payé. Ce droit est
..~-
de plus; perçu sur la valeur de chargements que le coulage et les ava-
ries pendant la traversée et au d~barquer.ient r'·"+è:eirt-moins considéra-
bles en France qu'au moment du départ (1).
Sur les seuls sirops, la Ferme aurait perçu au total 900 000 livres
de 1764 à 1776 (2).
Un autre droit, le droit de 40 sous, prélevé en 1712 sur
chaque quintal de sucre brut que le sieur Valton se proposait d'expor-
ter à l'!le Saint-Thomas (3) et institutionalisé depuis, a produit à
lui seul, 1 570 169 livres de 1757 à 1762 et 3 066 livres de 1762 à
1774 (4).
(1) Françoise THESEE indique que la diminution normalement admise pour les
sucres est d'environ 2 %. Cf. : Négociants bordelais et colons de Saint
Domingue, p.74.
(2) Mémoire sur tes trois pour cent ••• 21 Mars 1776. AN F3162.
(3) En 1712, l~~ur Valton obtient de l'intendant de la Martinique la per
mission d'exporter à l'!le Saint-Thomas, une certaine quantité de su·cre
brut, ce qu'il exécute. Le Fermer du Domaine d'Occident a cru dans cet-
te circonstance pouvoir réclamer, outre le droit de 3 %, le demi droit
d'entré que les sucres auraient acqui té 9 5 ils avaiefit-ooêt'ê-tntrodui ts en
France. Les motifs, selon le Fermier sont :
1/ L'exportation des sucres bruts à l'étranger est prohibée par la loi.
Donc, ils ne peuvent y être 'transportés au préjudice de ces droits ;
2/ Cette exportation entra!ne deux inconvénients, l'un qu'elle diminue
la masse de Sucres bruts destinés à 3tre exportés en France par le
commerce national, l'autre qu'elle occasionne une plus grande intro-
duction de sucres étrangers en France dans un temps où la production
coloniale ne suffit pas à la consommation intérieure ;
3/ Qu'ayant à percevoir un demi droit de 40 sous sur les sucres des
tles à leur entrée dans le Royaume et rien au contraire à prétendre
sur les SUcres étrangers qui y sont introduits, il est juste qu'il
soit dédommager sur ceux d~s !les exportés à l'étranger.
-
Le Conseil a jugé alors que le Fermier du Domaine a droit à une in1em-
nité. Il condamne donc le sieur Valton à payer 40 sous par quintal de
sucres exportés à l'!le Saint-Thomas.
(4) et note (3),Voir Copie de l('avis des députés du commerce, séance du
5 Février 1779.
AN F12~113 3).
154
Interrogés sur l'opportunité de ce droit lorsquè, aù'début
de la guerre d'Indépendance américaine il s'est avéré nécess~ire de
faire appel aux neutres, les députés du commerce n'ont pas manqué de
marquer leur réprobation quant à la perception de ce droit en la qua~
llfiant d"'indue , illégale et illégitime"(1). Mais cet avis n'a pas
été suivi, puisque, non seulement les Fermiers généraux ont toujours
gardé aux 1les du Vent leurs deux receveurs généraux (2) jusqu'au 1e
Décembre 1790, date à laquelle la perception des droits est confiée
à l'administration des douanes nationales, mai9 le fameuA droit de
40 sous n'a pas été supprimé.
L'ensemble des droits perçus aux îles du Vent est donc, les
3 % de l'estimation sur les sucres et sirops, le ~'pour cent ou caisse
du commerce, les 40 sous par quintal de sucres exportés à l'étranger
et les 10 sous pour livres de tous les droits principaux.
,
Au total, tous les droits perçus en Metropole le sont directement aux
1les du Vent.
De 1778 à 1783, ces droits ont produit
à la Martinique
1 653 556oHuP81i S &e\\ls~daniers en monnaie coloniale, soit 1 102 370
It 19 sous en monnaie métropolitaine. La Guadeloupe a produit 2 043 080
livres 7 sous 9 deniers, soit 1 362 053 lt 11 sous 10 deniers.
Depuis la paix, c'est-à-dire de 1784 à 1789, ,ces droits ont donné à
~a Martinique 330 081 livres 18 sous 9 denie~s, soit 249 739 lt 4 sous
6 deniers.
Au total, les deux colonies ont produit pendant les 6 années
de guerre.,1 464 424 It 11 sous, et pendant les G années de paix,
471788 lt 16 sous 6 deniers (3).
(1) Cet avis a été donné en 1779. AN F12+113~3).
(2) Ces deux receveurs sont installés l'un à la Martinique et l'autre à la
Guadeloupe, eux-mêmes ayant des préposés à Tabago (après 1783) et dans
toutes les dépendances des 1les.
4
(3) AN F 12 folio 70.
La réticence des fermiers à l'égard de la suppression de la
perception de ces droits aux 11es du Vent,conformément aux lois en vi-
gueur, peut s'expliquer par la grande facilité donnée au commerce inter-
pole dans ces colonies.
NQus retiendrons de cette étude deux idées essentielles.
Premièrement, le fonctionnement du système montre que l'exclusif a été
institué au profit des négociants. Institué sous Colbert pour libérer
la France de l'hégémonie commerciale hollandaise qui lui portait ombra-
ge (au XVIIè siècle), au XVIlIè siècle, il est le pilier du commerce
national contre les visées expansionnistes anglaises.
Sans cette législation restrictive et pro~ectionniste, le colon fran-
çais soucieux lui aussi de gains rapides, aurait trouvé auprès des né-
gociants étrangers un appui, essentiel pour valoriser ses denrées. En
cela, l'exclusif
a été un véritable pilier du négoce au détriment des
colons.
La deuxième idée est, qu'assurément, l'exclusif. en accroissant
le commerce national, a per~is au pouvoir royal d'étoffer son armature
financière âa mOjen des diV'ers n'Pets, impSts indirects pour la plupart,
auxquels aucun privilégié ne pouvait échapper, à moins qu'il renonce de
plein gré à la consommation de sucre.
A cet égard, l'exclusif appara1t comme un ch.f-Q 1 oeuvre émanant d'ur.e
entente explicite entre'
pouvoir royal et négociants. Le pouvoit
royal favorise la prospérité des affaires par des mesures protectionnis-
tes et perçoit en retour oous forme d'imp8ts, une partie des bénéfices
réalisés.
Mais, la perception de ces impSts étant laissé à la charge
de la Ferme générale, qui accapare l'essentiel des recettes, le pou-
voir royal n'a pu en profiter comme il le fallait, pour r~30udre ses
problèmes financiers et réduire ses"dettes.
156
Quant aux négociants, assurés du monopole comme~cial aux colonies,
ils utilisent les mécanismes monétaires et financiers qui régissent le com-
merce colonial, pC'lp· 8' imposer comme les véritables martres de la production
et de la commercialisation des sucres.
x
x
x
i
'57
CHAPITRE III
CIRCULATION MONETAIRE DESARSTREUSE, ENDETTEMENT CHRONIQUE
1":::5 COLONS ET-'}{AIN~MrSE-DEsnNEGOCIANTS
SUR LA PRODUCTION
SUCRIERE.
Quiconque conna1t le fonctionnement du commerce colonial fran-
çais sous l'Ancien Régime comprend aisément que l'ensemble des mécanis-
mes mis en place par le pouvoir royal participe d'une m@me idéologie,
celle d'accrô1tre la dépendance des colonies viv-à-vis de la métropole
afin de donner aux négociants de multiples moyens de profits.
L'exclusif, nous l'avons vu, est le premier maillon de cette politique.
Le système monéta~re en est le second.
L'usage de la marchandise-monnaie, dans une économie monétai-
re avancée, a pour effet de rendre le crédit non seulement nécessaire,
mais inévitable. En d'autres termes, le troc et le crédit sont les deux
piliers des échanges entre la France et ses colonies.
Or, l'un emp8che toute accumulation locale de capital, donc tout finan-
cement int~rne de la pr~duction. L'autre entretient la domination des
négociants sur les colons, le crédit prenant ici la forme d'un finance-
ment externe.
Le but de ce chapitre est d'analyser ce processus de dépen-
dance, qui se traduit par le retour presque total vers la France de la
production sucrière.
Il Le Fonctionnement du système monétaire.
La monnai~ Joue ûn r~le important dansÏes échanges commerciaux.
En tant qu'instrument de mesure des prix, elle permet d'évaluer les achats
et les ventes sur le ~aréhé. Comme moyen de paiement, elle élimine le
troc. Or, un système monétaire colonial distinct de celui de la métropole
est mis en place par le pouvoir royal, sans cependant éliminer le troc
entre la métropole et les colonies.
Pourquoi le troc est-il demeuré le mode d'échange privilégié? Quelles
ont été les conséquences de l'inégalité statuaire des deux monnaies de
compte sur les prix et, partant, sur le niveau quantitatif des échanges?
Telles sont les deux questions qui font l'objet de cette pre-
mière partie du travail.
habitants.
De l'avis des spécialistes de l'histoire monétaire des Iles
françaises de l'Amérique (1), l'usage monétaire de la marchandise n'est
pas une invention de la métropole. La marchapdise a été plut8t une mon-
naie de substitution, une monnaie de nécessité inventée par les premiers
habitants pour surmonter le manque de monnaie métallique. Ce procédé
était mAme général au Nouveau-Monde. En Amérique du Nord, les balles
de plomb au Massachusset, le tabac en Virginiè, les peaux de castor au
Canada, et la morue i
Terre-Neuve, ~uraient servi, i l'origine, de
monnaie de substitution (2).
(1) Ils sont certainement nombreux, mais nous citerons particulièrement
dèux : LACOMBE (R.), Histoire monétaire de Saint-Domingue et la répu-
bli ue d'Haïti ·us u'en 1074, Paris, ed. Larose, 1958 , 69 p.
BUFFON
A. , Monnaie et crédit en économie coloniale. Contribution à
l'histoire économique de la Guadeloupe 1635-1919. Basse-Terre, SHG,1979
388 p.
(2) BABELOrJ (J.), Les origines de la monnaie, cité par NOGARO, monnaie et
système monétaire, p.5, note 1, et repris par Alain BUFFON, op.cit.,
p.1), note 1.
159
Jans les Iles françaises, et principalement en Guadeloupe, le
cas de THEZEL ayant reçu en 1639, 2 400 arpents de terre pour une sucre-
rie,contt'e .le paiement
d'ulle livre de coton pour 600 toises, est connu.
Les premiers voyageurs des débuts du rattachement des îles à la Couronne
royale ont laissé des témoignages sur l'usage monétaire de la marchandi-
se. DU TERTRE de 1640 à 1647 ; PELLEQU~T de 1651 à 1653, puis de 1654 à
1655 : il signale que le pétun (tabac) et le sucre sont les monnaies du
pays. LE PERE LABAT, qui arrive aux !les en 1654, mentionne que leurs
pensions sont payées en sucre brut (1).
A.Saint-Domingue, les boucaniers ont utilisé le pétun, l'indi-
go et enfin le sucre à partir de 1670. Cette dernière denrée se substi-
tue complètement au tabac à partir de 1715 (2). Jean de SAINTOYANT éta~
blit, pour sa part, que le tabac a été utilisé jusque vers 1650, le tabac
ou le sucre jusqu'en 16/0, uniquement le sucre depuis cette date (3).
C'était pour interdire œt usage monétaire des marchandises entre habi-
tants que fut créée la livre coloniale.
2°) La livre coloniale, une monnaie de comEte sousestimée.
------------0
---.~------ --------------
La monnaie manquant dans les colonies, tous les habitants, de-
puis le gouverneur jusqu'à l'ouvrier, étaient des marchands de sucre.
Chacun devait échanger celui qu'il r~cevait ~ tous les titres, contre des
v~tements, des vivres, des outils. Il devait servir aussi à payer le
loyer (4). Ce trOc généralisé était incompatible avec une économie moné-
taire avancée. Il apparut donc nécessaire 'au pouvoir royal de faire
utiliser les pièces métalliques à la place des denrées comme cela se pra~
quait en métropole.
(1) Pour tout cela, voir Alain BUFFON, op.cit., p.AS.~1
(2) RICHARD~ La monnaie coloniale, cité par hobert LACOM3E, 00. cit., p.22.
(3) SAINTOYANT (Jean de), La color.isation [ran aise sous l'Ancien
du
xvè siècle à 1739,~e 1, du XVè siècle au traité d'Utrecht
p.233.
(4) SAINTOYANT (Jean de), on.cit., p.15.
~.1
160
Le pre~ier texte faisant état de la création de la livre colo-
niale est l'Arr~t du 2 Novembre 1665. Mais, il n'est pas suivi d'effet.
-~<., ... _ .• "'-'-~'
•
.. •
" -~'- - - ....
. ~ ~
Il faut attendre celui du 24 :1ars 1670 pour que la frappe de cette mon-
naie coloniale devienne effective. Cette mesure,intervenant dans une pé-
riode favorable aux entrées de nétal précieux en France (1), les espèces
frappées spécialement pour les 11es sont en argent. Au total, 50 000 li-
vres en pièces de 15 et 5 sous (2) ,ont été frappées' et expédiées aux
11es.
Prévue pour toutes les 11es, cette quantité était naturellement insuffi-
sante!
Après ces deux pièces, il faut attendre l'Edit de Décembre 1730
de Louis XV pour qu'à nouveau des espèces d'argent soient envoyées aux
1les. Ce sont les 12 et 6 sous, portant la suscription "Isles du Vent",
mais qui ont circulé aussi à Saint-Domingue. Exeeptées ces pièces d'ar-
gent de 1670 et de 1730, toutes les autres monnaies frappées en France
pour les 1les sont des monnaies de billon O'U de cuivre (3).
La rareté de l'argent en France après 1686, explique vraisem-
blablement le choii aa eUivré. tès ~etlxguerres de la fin du XVIIè siècle
1689 à 1697 et 1702 à 1714, annonçaient déjà une mauvaise conjoncture.
Puis, à la fin de la guerre, la France perd l'asiento au profit de l'An-
gleterre. L'Espagne, ma1tresse des mines américaines, contrale désormais
,
les sorties d'argent vers l'étranger.
En effet, Philippe V, soucieux de réussir la réforme monétaire espagnole,
(1) A partir des estimations d'Albert Girard (le commerce français à Sévil-
le et à Cadix au temps des Habsbourg, Paris, 1932), Pierre VILAR deduit
que "la période la plus favorable aux entrées de métal précieux en Fran
ce est antérieure: 1° ~ la réforme monétaire espagnole de 1686 ;
2° à la période des grandes guerres"(ligue d'Augsbourg (1639-97), guerre
de succession d'Espagne (1 02-14). Le maxi~um des entrées se situa~t
lors de la crise espagnole de 1636-1640.
Cf. VILAR (P.), Or et monnaie dans 1 histoire, pp.30", 304.
(2) LACOMBE (R.), op.cit., p.15.
(3) La chronologie des frapp-es est la sui van te : CF. Lacombe , p.15.
Mars 1720 : 12 deniers en cuivre; Juin 1721 : 9 deniers (pièce au 2L),
en cuivre avec âfigie de Louis XV enfant j Juin 1738 : le double sor de
France (24 deniers) circulent pour 2 sous 6 deniers aux 11es sous le
nom de "noir" ou de "r.:arqué" par opposition au "tampé" ou estampé (vers
. t
1740 jusqu'en 1764) i 1765, "marqué" et "tampé", de 3 sous 9 deniers;
Oct ob r e 1766 : pi è c '. _ci. e.1 soL
J
Tl,
161
aàopte des mesures protectionnistes. Pierre VILAR note qu'en 1720, les
échanges franco-espagnols à Cadix, sont à un niveau mir-imum. La conjonc-
ture n'étant pas favorac1e au-' entrées de métal précieux, on frappe na-
turellement de moins en moins, des pièces d'argent, notamment entre 1683
et 1715 (1).
On ne doit pas oublier aussi qu'en raison des mutations fré-
quentes avant la stabilisation monétaire en 1726, l'argent était cher.
Le marc d'argent passe de 20 1 5p à 26 1 10s de 1602 à 1632. Sous LAW,
de Septembre 1719 à Décembre 1720, il Y a 35 fixations pour l'argent.
Le marc d'argent passe de 40 à 120 1 de 1716 à 1720 (2). Dès lors, il
est sans doute apparu au pouvoir royal que l'utilisation du cuivre était
plus rentable.
Cette explication est d'autant plus plausible qu'en métropole, un marc de
cuivre donne 112 pièces de 2 sous, il peut m8me atteindre 116 pièces,
quand la fabrication est bonne (3).
Malgré la monétarisation de l'économie coloniale, la circulation
monétaire est désastreuse. La livre coloniale a surtout un usage interne.
Elle a été créée pour faciliter le petit commerce entre les habitants et
non pour circuler ians le négoce avec la- métropole. Comment pouvait-il
en ~tre autrement: dans le grand commerce, seules les monnaies d'or et
d'argent sont acceptées. Or, en fait de monnaie française, il ne circule
aux 1les que les monnaies de cuivre.
t
La solution aurait été de transférer aux colonies des espèces ayant cours
en métropole: des louis et des écus.00r, la monarchie s'y oppose formel-
lement. La circulaire du 4 Mars 1699 (le premier texte officiel sur la
question) exprime clairement cette opposition.
(1) VILAR (P.), op. cit., pp.304-305.
(2) MArtION (M.), Dictionnaire des institutions de la France aux XVIIè et
XVIIIè siècles, p.384.
(3) MARION (M.), op.cit., p.3ô3.
~-....•....•....';'..:_r~
162
"Sa Majesté étant informé que, depuis quelques temps, ceux qui
négocitnt
dans l'Amérique y envoy~nt des espèces d'or et d'argent au
lieu de marchandises, et connaissant combien les suites de ce commerce
seraient désavantagueses
.::I
Royaume par la sortie d'argent, fai t défense
de transporter des espèces d'or et d'argent dans l'Amérique"(1).
Cette doctrine est réaffirmée dans l'édit royal du 27 Octobre
1727, qui institutionnalise l'exclusif. En effet, n'est-il pas stipulé:
"d'obtenir, par voie d'échange et sans exportation de numéraire, des den-
rées que notre sol (le sol français) ne produit pas "(2) ?
Elle s'inscrit dans l'idéal mercantiliste préconisé par Montchrestien dans
1
son. traité d'économie politique en 1616. C'est en effet, lui qui,
le premier, écrit qu'il faut· emp~cher les marchands étrangers de faire
sortir de l'or et de l'argent du Royaume (3). Colbert s'en est large-
ment inspiré. En 1670, il écrit dans ses mémoires : "il faut augmenter..
l'argent dans le commerce public en l'attirant des pays d'où il vient en
le conservant au-dedans du Royaume, emp~chant qu'il n'en sorte"(4).
Les difficultés monétaires en métropole expliquent cette restric-
tion. Pierre DEYON note en effet qu'au delà de 1630, le manque d'espèces
d'or et d'argent
a entretenn une sorte d'angoisse monétaire partout en
Europe occidentale (S). Pierre VILAR:-'p~;iant spécifiquement de la période
colbertiste (1661 à 1683), fait remarquer que, ~u point de vue monétaire,
l'argent est rare. Il précise aussi que les espèces circulant au ndvea.u
quotidien sont surtout des monnaies de cuivre. On comprend donc que l'ex-
1
portation de monnaie vers les colonies soit ~nante pour la métropole.
'On est donc en présence d'un système condamné à opérer par le
troc. Mais la grande innovation est d'y avoir introduit une unité de compte
(1) LACOMBE (R.), op.cit., pp.15-16.
(2) Documents officiels relatifs àla~loi sur le régime douanier des colonies
de la Martinique, de la Guadeloupe et de la Réunion. 3 Juillet 1861, Paris
Challamel, 1861, p.9. Cité par SCHNAKENlOURG (C.), La crise du système es-
clavagiste 1835-1847, p.66.
(3) Cité par BEAUD (M.), H~iredu capitalisme 1500-1980,p.47.
(4) Cité par DEYON (P.), Le ~ercantilisme, p.26.
(5) Voir pour tout cela Marcel MARION, op.cit., p.338.
163
basée sur la livre. C'est le rapport entre la livre-tournois, monnaie métro-
politaine et la livre coloniale qu'il s'agit maintenant d'analyser.
Ce qui fra1JPe- d'abc ~d, e 'est la -différene-e-devaleur entre les
deux monnaies de compte. A l'origine de cette différence, se trouve le refus
de l'homogénéité monétaire. Ce~tegf cette inégalité statuaire entre les
deux comptes n'est pas une innovation financière. En France même, la livre-
tournois n'a pas une valeur uniforme. Dans certaines provinces réunies tar-
divement au Royaume, elle est plus forte ou plus faible que celle alors en
usage. C'est le cas de la livre de Lorraine,
de Hainaut, de Flandre et
d'Artois.
La livre de Lorraine est divisée, comme celle de France, en 20
sous et,un sou en 12 deniers. Mais, en réalité, elle ne vaut que les 3/4 de
la livre de France, soit 15')sous 6 deniers. La livre de Hainaut vaut 12 sous
6 deniers. Celle de Hainaut et de Flandre est évaluée à 25 sous (1).
Cependant, appliquée aux colonies, cette inégalité prend une signi-
-----fication plus importante dans la mesure où -elle crée un déséquilibre commer-
cial. en faveur de la métropole. Ce refus d 'homogénéi té monétaire est d'abord
manifeste au niveau des monnaies réelles. En France, on utilise le louis,
c
=- .. -~'-..
qui est IDJ-e monnaie d 'or équivalant à 24 1 t, et l'écu, monnaie d'argent
d'une valeur de 3 lt. La monnaie de cuivre se compose de pièces de 1 sol,
1 sol et demi et de 2 sous. Aux colonies, les espèces d'argent de 1670 et. de
1730 sont loin d'atteindre la valeur dé l'écu.: celles de 1670 n'en valent
.,
que le douzième et le quart, celles de 1730, le dizième et le cinquième.
L'écart est très important encore, comparé au Louis. Les pièces de cuivre
circulant aux !les sont encore,de ce point de vue, une monnaie extr~mement
faible et m3me de mauvais aloi. En somme, on doit retenir de cette comparai-
son que les pièces circulant aux îles ont un titre inférieur au titre normal.
(1) Voir pour cela, Marcel MARION, op.cit., p.338.
164
Il e~ est ainsi du rapport entre la livre coloniale et la livre-
tournois. Il y a une surévaluation réglementaire de la livre-tournois par
rapport à la livre coloniale dès 1670 (1). L'écart retenu est évalué à
33 % (2), mais on :t'etrouveausst(i'1elquefois331fj~(3)ou 33 1/2 %(4).
Sous-estimée, une livre coloniale aurait valu en principe 13 s.4d. tournois
sous l'Ancien Régime (5).
Les fournitures métropolitaines étant facturées en livre-tournois
et les denrées des rles.en livre coloniale, le prix est, dès lors, désa-
,
.
vantageux pour le planteur. Toute marchandise de France vaut d'emblée plus
cher aux rIes qu'en métropole. Le père Labat, que cite Gabriel DEBIEN,
note que la,grosse toile de Bretagne, appelée gros vitré, d'un peu plus
d'une aune (1 aune = 1,88 m) de largeur, co~tant 15 à 18 sous l'aune en
France, est communément vendue aux rIes à 30 sous et quelquesfois à 1 écu
(6). Il Y a un gain de 12 à 45 sous (2 It 5s.).
Le marquis de Fénélon, gouverneur de la Martinique et l'intendant,
le~ercier de la Rivi.ère, expliquent très bien ce rapport entre les deux
~aies de compte, en écrivant :
,...
"Lorsque la chose qui a co~té en France 100 argent de France est
vendu ici 200~, argent des i~sles, on appelle '~;l'a-;endre à 100 % de béné-
fice, c'est-à-dire de 100
de France, faire 20~ des isles. Au premier
coup d'oeil, cela paroit très cher. Cependant, ces 200~ des isles ne va-
.ff
lent réellement que 133
6s 6 d argent de Fr~ce. on a donc seulement gagné
sur son capi tal de 100 franc, 33~ 6s 8d" (7).
(1) LACOMBE (R.), Histoire monétaire de Saint-Domingue et de la République d'
Harti jusqu'en 1874, p.17 •
"tes espèces de France devaient circuler en Amérique pour 133 % de :Bun·
valeur; dès la première moitié du XVIIIè siècle, elles vaudnont 150 %
en "argent des isles" ".
(2) DU HALGOUET (H.), "Inventaire d'une habitation de Saint-Domi~e", :in
RFHOM, n0 94-95, pp.215-254.
(3) PLUCHON (P.), La route des esclaves. Négriers et bois d'ébène au ÀV!IIè
siècle, p.289.
(4) CARRIERE (C.), Négociants mars..eillais au XVIIIè siècle. Contributimà
l'histoire des économies maritimes, Tome 1, p.415.
(5) SCIDIAKENBOURG (C.), La crise du système esclavagiste. 1835-1847, p.9.
(6) DEBIEN (G.), Les esclaves aux Antilles françaises, p.237.
(7) AN Col C8A65 folio 31 (17 Août 1763).
165
Ils ajoutent qu'en général, le négociant est satisfait dès qu!il
vend ses marchandises entre 80 et 100 %,de bénéfice. Cela montre que le
..------ planteur achète les marchandises toujours plus cher qu'elles ne valent en
réalité. Notons cependant qùe les "3 5 li 6s·.-Ea·~ ne consti tuent pas le
bénéfice total du négociant. Cette somme représente seulement le gain ré-
alisé sur le change. Cela signifie alGTs qUG les 200 It ne sont pas le prix
de vente exact. Pour le trouver, il faut prendre en compte le fr3t, les
divers frais et la marge bénéficiaire du négociant.
Les sucres étant facturés en livre coloniale, c'est-à-dire en
monnaie sousestimée, il est très évident que le..négociant qui arrive aux
fIes avec se~ marchandises a un pouvoir d'achat plus élevé que le colon.
Ce qui, dans un système de troc, signifie la possibilité de recevoir plus
de denrées en paieBent de ses produits.
Nous avons indiqué que la livre coloniale, la monnaie légale des
fIes, ne circule pas en réalité. Les espèces de cuivre ne sont pas acceptées
par.les négociants. Ne sont valables et m3me·. recherchées que les monnaies
simITaires à celles de France, c'est-à-dire contenant un certain poids de
métal précieux. Dans ces conditi~ns, seules les monnaies étrangères circu-
lant aux fIes ~ les monnaies e,spagpoles d 'or ~~~~.'~gent en particulier,
sont acceptées dans le commerce.
On ne peut étudier le fonctio~~ement du système monétaire aux fIes
Bans insister sur l'importance des monnaies ét~gères. Cette importance
tient au fait que prisées par: les négociants et par les colons, elles jouent
sur les prix des denrées.
166
.~--
Les monnaies d'argent circulant aux rIes sont les piastres es-
pagnoles. Nous avons vu qu'une exceptio:-: ;tacite aux lois prohibitives auto-
risaitle commerce espagnol dans les rIes françaises. On justifie ce traite-
ment
de faveur par le fait que les Espagnols ne disputent pas aux Français
l'achat des denrées coloniales, et qu'ils versent aux rIes beaucoup de nu-
méraire en échange des divers objets manufacturés de France (1). Le commerce
direct des Espagnols avec les possessions françaises est une des voies par
lesquelles les piastres arrivent aux rIes. Saint-Pierre en Martinique (2)
dans les r1es du Vent et Saint-Domingue dans les r1es sous le Vent sont
les deux entrées principales. Mais le commerce direct entre les possessions
françaises et espagnoles n'est pas la seule source des piastres circulant
aux r1es. Elles y arrivent aussi par l'intermédiaire des trafiquants fran~
çais. Les marseillais en particulier, habitués à la pratique "levantin~"
de l'exportation des espèces, en sont les principaux fournisseurs.
Marseille dispose d'un atout certain sur les autres ports pour le
trafiC-despiastres aux r1es. En tant que port franc, ses entrepSts alimen-
tent largement les m~chés espagnols en denrées de toutes sortes. Les
monnaies espagnoles y affluent par ce biais. Mais c'est surtout à Cadix,
port de re1ache indispensable sur 'la route d'Amérique que les Marseillais
s'approvisionnent. Les Roux semblent avoir été les principaux animateurs
de ce trafic. En 1765, la chambre de commerce de Marseille signale qu'en
30 ans de commerce, Georges ROUX a fait passer aux r1es plus de 60 millions
;
de numéraire (3).
On doit signaler aussi que quelquefois, le pouvoir royal 1ui-m~me
prend l'initiative de ces envois pour faire face aux dépenses administratives
dans les r1es. Deux armateurs, David GRADIS, juif portugais de Bordeaux et
----Cf) Cf. -Japra. p. 97.
(2) BUTEL (Paul), Les négociants bordelais et les r1es au XVlllè siècle, p.30,
signale que "à la fin de l'Ancien Régime, la Martinique conservait ce raIe
d'entrepSt de l'Amérique espagnole : en 1787. plus de 86 % des importations
des r1es d'Amérique dans les possessions espagnoles étaient reçues à Saint-
Pierre de la Martinique ••• ".
(3) MàSSON (P.), Marseille et la colonisation française. Essai d'histoire co-
loniale, pp. 163-164.
161
Pascaud de la Rochelle, ont été souvent
chargés par le trésorier général
de la Marine, vers 1110 et 1111, d'envoyer des moëdes et des quadruples
~~ées à Londres et à Cadix
aux autorités de la Martinique et de la
Guadeloupe (1).
La question est de savoir pourquoi les négociants éprouve.nt le
besoin d'envoyer des piastres aux rles. Cette question mérite d'~tre posée
car toute initiative de leur part n'est pas innocente. En effet, bon nombre
de négociants marseillais, forts de leur expérience levantine, ont très
vite compris que sans apport d'argent, on vend mal et on achète cher(2).
Louis DERMIGNY signale que les denrées coloniales coûte 15 %de moins en
les achetant en argent comptant (3). C'est ce que constate CHAMBON quand
il explique que le paiement au comptant écourte le séjour des navires et
permet de faire des bénéfices (4).
Pierre PLUCHON ne montre-t-il pas qu'un négrier aux rIes dépense en moyen-
ne entre 3 000 et 6 000 livres pour les frais journaliers et de transport
et pour les droi ts de douane (5) ? La qu~te du numéraire va elle-m~me
influencer largement le choix des destinations (6).
Çes piastres circulant en Amérique et en Europe dans la seconde
moitié du XVIlIè~ siècle sont représentées par quatre types de pièces (7)
- le type dit "macuquino" frappé au Mexique appeIé piastre faible
ou piastre de poids
- le type dit "perulero~,appelé en France "piastre colonne vieille"
,.
- la piastre "colonnaire" l'écu d'Espagne (le peso gordo) ;
la piastre au buste dite "busto", de titre un peu inférieur à la
précédente.
(1) LACOMBZ-(R.), op.cit., p.16 note 2.
(2) DERMIGNY (L.), Cargaisons indiennes. Solier et Cie 1781-1793, Tome l, p.81.
1J) ~DERMIGNY (L.), op. cit., Tome l, p.81.
(4) CHAMBON (A.), Le commerce de l'Amérique par Marseille, Tome l, p.249, cité
par Charles CARRIERE, Négociants marseillais au XVIIIè siècl~ Tome II,p.
825.
(5) PLUCHON (P.), op.cit., p.363.
(6) Cf. ""ra p. 242-241.
(1) LACOMBE (R.), op. cit., p.19.
~~liit1
l
168
Mais ce sont les deux derniers types qui constituent ce qu'on
appelle la piastr~ forte, "peso gordo" ou gorda d'où l'appelation de gourde
gi~lisée dans les !les à partir de 1750. c'est à MERCIER (1) que nous
devons cependant une distinction suffisammfi.n:tsimple et claire des différen-
tes piastres circulant aux !les et particulièrement à Saint-Domingue en
1789. La classification qu'il donne est la suivante
a) La gourde ou piastre forte et ses sous-multiples.
- la gourde
- la demie-gourde = pièce d'une demie piastre
- le gourdin = pièce d'un quart de piastre
- le"'~ /2, gourdin
- le 1/ 4 gourdin
b) la piastre simple et·aoe eous-multiples.
- la piastre
-'la'r/2 piastre
- le double escalin
.~ l ' escalin : il représente l' anc! enne pièce espagnole de 1 réa1
ayant pesé à l'origine 1/eid de la piastre.
~.
- le 1/2 escalin
Ces pièces d'argent ont valu de plus en plus cher au fil des années.
Les valeurs successives de la piastre forte de 1735 ~ 1773, en livres colonia-
les sont les suivantes (2)
t
1735
1 piastre gourde (cordonnée) vaut 6 livres 14 sous
1740
""
ft"
1111
7 livres
"
1762
""
""
1111
Il
8 livres
1766
""
""
1111
Il
8 livres 3 sous
1773
""
""
""
Il
8 livres 5 sous
____ C~j;te dernière valeur semble avoir été conservée jusqu'à la Révolution. En
effet, MERCIER signale qu'en 1789, la piastre forte circule à Saint-Domingue
pour 8 livres 5 sous.
(1) MERCIER, "La vie au Cap français en 1789", in Revue d'Histoire des colonies
n0 2, 1933, pp.101-130, p.104.
(2) LACOMBE (R.), op.cit., p.17.
169
La piastre simple valait alors 6 livres (1).
1l~~
3 - 2/ 1e,! !!!.0!ln~i~s_d~o!:.
Les monnaies d'or sont représentées par des pièces espagnoles et
portugaises. Les espagnoles sont: le quadruple, qui vaut 16 piastres ou
126 livres en 1789 à Saint-Domingue; le demi-quadruple vaut 4 piastres ou
63 l i vre s (2).
Les pièces portugaises sont : la double portugaise
cordonnée, qui vaut un
peu plus du quadruple: elle a une valeur de 132 livres; la portugaise,
c'est-à-dire la moëde (ou mera dobra), frappée au Brésil, à Bahia ou Rio.
C'est, d'après Robert LACOMBE (3), la pièce d'or portugaise la plus courante.
Elle vaut en"1789, 66 livres à Saint-Domingue. Ses sous-multiples sont:
la demi-portugaise, valant 33 livres, le quart valant 16 livres 10 sols et
le demi-quart valant 8 livres 5 sols.
Les quelques pièces d'or françaises circulant à Saint-Domingue
sont le louis d'or qui
vaut 31 livres, le demi-louis et le quart de louis.
L'or représentérait le quart de la circulation des espèces à Saint-Domingue(4).
- - - _ .
Mais ces monnaies étrangères ne font que passer aux tles ; Louis DERMIGNY
(5) indique que ces pièces sont soit drainées vers les Etats-Unis où le qua-
druple vaut,en 1789,à peu près 16 dollartu 'Sn do11a% ,&lai't~alors 8 livres
et la gourde ou la piastre forte, un peû plus d'un dollar
,~oit captées
par les armateurs du Ponant.
Ces monnaies d'or et d'argent font donc régulièrement défaut. Par conséquent,
•
t
on ne pouvait'pas se passer de l'usage monétaire de la marchandise. Mais
il faut ajouter aussi que la réapparition de la monnaie marchandise dans une
économie monétaire avancée, tient de la volonté des négociants et des colons
d'opérer par troc.
(1) MERCIER, "La vie au Cap français en 1789", op. ci t., p. 104.
(2) MERCIER, Ibidem.
(3) LACOMBE (R.), op. cit., p.3).
(4) Idem, Ibidem, p.21. Il cite un certain Weuves qui l'a écrit en 1780.
(5) DERMIGNY (L.), op. cit., Tome 1, p.81.
170
4°) Les contractants préfèrent opérer par troc.
------------------------------------------
Il est vrai que les yremiers texte~ réglementant le commerce
colonial encouragent les échanges de marchandises. Mais de telles mesures
allant à contre courant du progrès économique n'auraient pu aboutir sans
le consentement des colons. A preuve, la mise en circulation des pièces
métalliques aux rIes n'a pas été acceptée d'emblée par les intéressés.
Colbert se heurte à leur réticence lorsqu'en Novembre 1672 il Y envoie une
circulaire pour les contraindre à utiliser les pièces à la place des den-
rées(1). En définitive, le projet tourna court et les denrées ont continué
à servir de monnaie d'occasion. Aussi, le système de troc, préconosé par
la métropole. ne soulève-t-il aucune objection. Ce n'est que le prolongement
de la pratique quotidienne. Il est même l'idéal dans la mesure où il per-
met au colon d'écouler ses denrées.
Le père LABAT ne leur conseillait-il pas que le secret .pour
s'enrichir est de ne vendre les sucrœ et autres denrées que contre argent
comptant et de ne payer les achats qu'en sucres ou autre chose provenant
du fond de leurs habitations (2).1 E. PETIT, membre du conseil supérieur
de Léogane montre aussi, en 1771, que le COmmerce de la France ave~ ses
colonies ne peut être qu'un commerce dO)~eha11ge, c'est-è:-d1're-'Cie troc. En
effet, il écrit: "La Franoe manqueroit son principal objet dans l'établis,
sement de ses colonies, c'est-à-dire le débouché dé ces marchandises, dont
les retours en denrées de ces pays fournissent à la balance de son com-
i
merce avec l'étranger en Europe, si l'armateur pouvoit n'emporter que de
l'argent, et ne se procurer son chargement qu'avec de l'argent; ou si,
d'un autre c8té, l'habitant pouvoit déboucher ailleurs ses denrées et se
billets
Les termes de cette circulaire sont les sui vantes : "Tous
contrats, COffin-
tes et paiement seront faites entre toutes personnes au prix d'argent en"
livres, sol et deniers ainsi qu'il se pratique en France, sans qu'il puis-
se être-plus usé d'échanges, ni comptes en sucre et en autres denrées à
peine de nullité des actes qui seraient passé".
Extrait cité par Robert LAOOMBE, op. cit~, pp.427-428.
R. Père LABAT, Nouveau voyage ••• , Tome III, pp.462L463, cité par Alain
BUFFON, Monnaie et crédit ou économie coloniale •• A , p.27.
1{1
procurer les marchandises de France, avec de l'argent. Le commerce de la
France avec les colonies doit donc ~tre et ne sauroit ~tre qu'un commerce
d'échar.~~c'est-à-dire un troc de marchandises à importer de France avec
les denrées à exporter de chaque Isle et non un ,?ommec~ce en espèces monnoyees"
(1) •
Cette volonté coloniale de ne pas rompre les habitudes ne fait
que conforter la métropole dans ses choix.
Par trois fois au moins, elle a manifesté sa volonté de faire re-
poser le commerce colonial sur le troc. Nous avons déjà mentionné le conte-
nu de la circulaire du 4 Mars 1699 et l'édit du 27 Octobre 1727. On doit
ajouter les lettres-patentes de Janvier 1716 (2) exemptant de moitié les
droits sur les sucres et autres marchandises provenant de la vente des
lègres aux fIes. De telles mesures ne semblent pas avoir g3né les négo-
ciants ; le 20 Mars 1726, la Chambre de commerce de Bayonne (3) va jus-
qu'à demander au gouvernement d'emp~cher toute introduétion de billet pu
de monnaie dans les colonies ; ces négociants pensent ainsi résoudre le
problème de la che~té des sucres à la Martinique.
L'intér~t d'un tel commerce est que ,avant d'~~re valeur d'échange,
l es marchandises destinées au commerce colOlllà!, C1~eu t dans--le--royaume
des activités prèductrices. Colbert en é~ait conscient qui encourage, dès
1663, la production industrielle et les exportations. En effet, sous son
action, quatre cents manufactures ont été fo~dées en France (4).
Pour la traite négrière· p~ 8zsmple,les armateurs délaissent les
toiles étrangères, les indiennes, pour s'approvisionner dans les provinces.
--
(1) PETIT (E.), Droit public ougouvernement des colonies françaises ••• ! Paris,
A. GIRAUD, 1911, pp.427-428, cité par Alain BUFFON, op. cit., pp.17-18.
(2) Le~tres-patentes du Roi pour la liberté du commerce sur les costes d'Afrique,
données à Paris au mois de Janvier 1716. Art. V, p.4.
~~ ADXI 9.
(3) "Mémoire de la chambre de commerce de Bayonne sur l'état présent du commerce
des villes maritimes du roy~ume avec l'isle de la Martinique, sur les griefs
qui affligent ce commerce et sur les moyens qui paroissent les plus propres
pour y remédier" 20 Mars 1726.
AN Col p2B1.
._ _0-
Jusqu'en 1711, le sucre blanc de la Martinique valait 15 à 16 livres le quin-
tal. Depuis cette date jusqu'à 1725, le prix du quintal aurait monté à 40
à 50 livres.
(4) BEAUD (M.), Histoire du canitalisme 1500- 1900, p.50.
172
La_soierie vient de Lyon, les mouchoirs de Cholet. Pierre H. BOULLE (1)
prouve que l'indiennage nantais doit son développement et sa prospérité
à la tr~des Noirs. Ces manufactures ont été même créées par la parti-
cipation des annateurs négriers afin qu' elles le~1Eettent de réagir
plus r~pidement aux exigences de la clientèle africaine. Et le Havre ne
s'occupera sérieusement de la traite qu'après l'autoriss.tion de la fa-
brication d'indiennes en France. Il révèle en outre, qu'une bonne partie
de la production rouennaise de toiles est expédi~e aux rIes où elles
s'avèrent presque aussi séduisantes que les esclaves.
Paul BUT~ (2' montre de son côté qu'en 1789, les 39 minoteries de
l'Agenais travaillant près. de 400 000 quintaux de blé, exportent 41 %de
leur production aux rIes depuis Bordeaux. La farine de Moissac, puis de
Montauban qui compte en 1789, 30 '~inèter1ee,
trouve aux rIes un débouché
ouvert que même l'ouverture des ports d'entrepôt à l'intention des étran-
gers ne réussira pas à lui ravir.
Les vins de Dordogne, du Lot et du Tarn ont concouru à 1 '~ss.or du commerce
colonial bordelais: de 1165 à 1767, ils représentent 40 %du trafic. Les
spécialités, g~conserves, condiments et charcuteries, exportées aux
îles par Bordeaux, proviennent des fabriques de la ville (;).
Dans un mémoire daté du 25 Mars 1:756, sui te à une ;nciû-~te organi-
sée par le gouvernement auprès.des chambres de commerce en vue d'accorder
la permission aux étrangers de trafiquer aux rIes pour la durée de la
guerre (4), "les maires et êchevins de la vil,le; et communauté de Nantes"
.,
n'ont pas caché leur inquiétude quant aux suites d'une telle permission
pour les productions locales. En l'occurrence pour le vin, l'eau-de-vie, le
feuillard et l'osier, produits sur les terres du Comté nantais et exportés
aux rIes ainsi que pour le surplus. des denrées d'une partie du Poitou, de
la Bretagne, du Marne et de l'Anjou arrivant à Nantes par la Loire pour
(1) Pierre H. BOULLE, "marchandises de traite et développement industriel dans
la France et l'Angleterre du XYIllè siècle", in Revue Française d'Histoire
d'Outre-Mer; Tome LXIII, 1945, nO 226-227, PP.309-330, pp.314 et 318.
(2) BUTEL (Paul), Les négociants bordelais l'Europe et les rIes aU.XVIllè siè-
cle, pp. 95-96.
(3) CHOUZET (F.), Bordeaux au XYIllè siècle, p.225.
(4) Guerre de Sept Ans 1756-176~.
173
pour être exportés aux rIes (1).
~lons aussi que le développement,dans plusieurs villes du
royaume, de l'indus tri e du raffinage. de sucre est J 1. é . à ce commerce d' ~chan
ge (2). Le navire part aux rIes avec une cargaison dont le produit permet
de constituer le chargement de retour. Aussi, Alain BUFFON (3) indique-t-il
que la vente au
comptant ne signifie pas forcément que l'opération commer-
ciale s'est dénouée contre remise d'espèces, mais que le colon a signé
un billet, promettant de livrer des denrées lors de la plus prochaine
expédition. L'usage de la monnaie scripturale, la lettre de change, permet
d'éviter le transport des espèces de la métropole vers les colonies.
Dès lors, toute accumulation de· capital aux rIes s'avère impossible. Le
recours au· négOciant devient du coup non seulement indispensable mais
inévi table.
Mais avant d'aborder ce volet, il nous faut étudier d'abord la
question ~e la fixation des' prix.
11/ Déséquilibre entre les prix et·déséquilibre .du niveau quantitatif des
échanges.
Nous avons déjà indiqué que l'inégalité statutaire entre la livre
coloniale et la livre
tournois est défavorable aux colons. Dans c~tte
étude, nous voulons présenter les problèmes d'évaluation des sucres puis,
en comparant le prix des sucres et celui des esclaves, montrer le déséqui-
libre du ni veau quantitatif des échanges au prof! t du négociant.
(1) "Mémoire des maires et échevins de la ville et communauté de Nantes sur
_ _ _ _ _ _ lJ~_pr~judi_Ce résultant pour ladite ville de la permission qu'on propose
d'accorder aux étrangers de faire le commerce des colonies".25 Mars 1756.
AN F12 2618.
(2) Nous étudierons cette question au chapitre 5.
(3) BUFFON (A.), op.cit., p.23.
174
·~.
Nous avons déjà évoqué les différents éléments d'évaluation du
prix des marchandises d'Europe. Il nous faut ajouter qu'en ce qui concerne
les captifs, les critères de base sont: la nation, c'est-à-dire le lieu
d'origine en Afrique, le sexe, l'âge apparent, l'étai dë sar.té et les diffi-
cultés de la traite ou de la traversée (1). Il reste donc à déterminer
les critères de fixation du prix des denrées coloniales, les sucres en
particulier.
Il conv~ent de signaler d'entrée qu'aucun critère concret ne se
dégage des renseignements dont nous disposons. On peut cependant retenir
que la qualité du produit est une donnée fondamentale. Le sucre terré qui
est un produit semi-éléboré coûte naturellement
plus cher que le sucre
brut, encore au stade de matière première. Le sucre blanc qui est un pro-
duit fini coûte plus cher que les deux précédents.
Il faudra ·aussi tenir compte de l~ raréfaction des denrées sur
le marché~ Mais dans-ce cas, on assiste à une hausse des prix tout comme
•
la raréfaction du côté d~ négociant entrafne une flambée des prix. Toute-
1
fois, tout semble indiquer que le négociant es); à la fois le. ~a.tt.~~ de
l'offre et de la demande et qu'ainsi, il parvient toujours ou presque à
imposer sa volonté.
C'est ce qui s'est passé par exemple à la fin de la guerre d'Espagne, en
{
1714.
;;:i;~
Voulant donner un prix fixe et rémunérateur à leurs sucres, la
i
plupart des colons les vendent à 18 livres au lieu de 4, 5, 6 et 7 livres
le quintal qui sont les prix du marché. Pour se mettre à l'abri de cette
supercherie, les négociants décident de vendre leurs marchandises en sucre
à 10 livres, le double de ce qu'ils vendent aux autres argent comptant ou
(1) Richard (R.), "Les minutes des notaires de Saint-Domingue aux archives du
ministère de la France d'Outre-Mer",in Rew.e'd'Sistoire des colonies, Tome
XXXVIII, 1951, n0135, pp.281-338, p.307.
175
en sucre à prix d'argent. D'autres exigent d'eux des billets en sucre sur
la base des 4, 5 et 6 livres, augmentant encore le prix de leurs marchan-
dises.~x qui ne ~euvent les emporter évitent de les recevoir dans l'im-
médiat; ils Rréfèrent attendre une augmentation Elesprix après l-a fin-de
la guerre.
Pour la sûreté de leurs vaisseaux, certains négociants achètent
les sucres à un certain prix dont ils conviennent avec le colon. Or, nous
avons vu que les denrées coloniales coûtent ordinairement 15 %de moins
en les achetant au comptant, c'est-à-dire acquises contre remise de pias-
1
tres au propriétaire.
1
Le Comte de Blénac, gouverneur de Saint-Domingue et l'intendant
Jean-Jacques MITHON ont été contraints d'intervenir en élaborant un règle-
1
ment qui interdit aux colons d'établir un prix fixe à leurs denrées (1)
afin d'enrayer la spéculation.
Dans le cadre des liaisons d'habitation, le colon est obligé de li-
vrer sans aucunè---diminution, une certaine- quantité de sucres à quelqùe niveau
que puissent monter les prix. Robert Richard nous apprend que c'est en
vertu des conditions faites au vendeur que l'on estime ensuite ce qui est
conservé en magasin ou ce qui doit se venJre ailleurs (2).=-
Sans doute, convient-il d'expliquer comment se déroulent les
échanges. La vente aux tles se fait de préfér~nce par lots, plutSt qu'à
l'uni té. Les capi taines négriers vendent les "bossales" (3) par lots en
assortissant les beaux à des plus défectueux, des hommes à des femmes et
(1) "Règlement fixant le mode de paiement du sucre" 1714. AN CoIG9A10.
(2) RICHARD (R.), "Les minutes des notaires de Saint-Domingue ... ", op.cit.
p.308.
(3) Noms des noirs qui ne sont pas encore esclaves. Pour ~tre esclave, il
faut ~tre vendu et attaché à une habitation.
Àtb----
à des enfants. Il en est ainsi des marchandises d'Europe.
EJ..~~6, un colon qui voulai t avoir des toiles pour ses esclaves
écn t
"Je vous ai fai t passer 9 barriques de sucres..J!.9u~ avoir de la~~if
toile pour mes nègres. Il m'en faut 1 200 aunes, bonne ei bon marché"(1).
Les paiements en sucres s'effectuent sur la même base.
Les états du commerce donnent quelques fois les quantités de
sucres en barriques, tierçons, quarts et baril, les sirops et le tafia
en futailles ou barriques ou en boucauds. Il semble cependant que ces
mesures soient une unité purement comptable pour les fermes. En réalité,
1
la base des facturations est la livre-pesant. C'est la raison pour la-
quelle les denrées sont évaluées en livre-pesant dans les états de la
balance de commerce.
1
[
La contenance des barriques a connu elle-même un accroissement
.,.1.·
continu au cours du Xvrllè siècle à cause des irrégularités dans l'évalua-
;~;~t,t
tion réelle. Paul BUTEL sigr.ale Qu'en 1744, la contenance des barriques de
sucre au départ de~s, est fixée réglementairement à 1 000 lb, poids
maximum. Les droits de sortie étant calculés sur la base de cette conte-
nancè, les planteurs comme les négociants font fabriquer des barriques
d'une plus grande capaci té pour frauder le fi sef.
~ ...~
L'Arr~t de 1744 tombe en désuétude. En 1776, la législation élargit la
contenance légale à 1 500 lb. Mais la taille des barriques continue à
crottre. Le 11 Février 1787, Castries porte La jauge de la barrique de su-
cre à 1 500-1 600 lb en fixant une tare uniforme de 17 %. Comme les autres,
cette dernière mesure ne paratt pas avoir été suivie (2). Il serait donc
imprudent de se fonder sur la seule statistique fournie en barriques pour
obtenir une évaluation précise.
(1) Ci té par Robert LACOMBE, op. ci t., p.22.
- - - - - -
(2) BUTEL (P.), "Métrologie et commerce, l'exemple des négociants de Borde2ux
au Xvrllè siècleé, in Les anciens systèmes de mesures: projet d'enouête
métrolOgique. Table Ronde du 17 Octobre 1981. Caen, CNRS, pp.25-31. Cf.
p.27.
177
En ce qui concerne les sous-multiples, Christian SCHNAKENBOURG
donne les c~versions suivantes: le tierçon représente le tiers du contenu
d'une barrique; le quart, comme son nom l'indique, en représente le quart,
le baril, le dixième (1).
Le prix des sucres est fixé par quintal (100 lb). On en distingue
même deux sortes: les prix administratifs et les prix de marché.
Ce sont les prix retenus par l'administration du domaine pour la
perception des droits de sortie et, d'une façon générale, pour l'établisse-
ment des états annuels du commerce. Ils sont fixés d'après les déclérations
des capitaines de navires comme cela se pratique en métropole pour la per-
ception des droits d'entrée et du Domaine d'Occident.
On comprend.raainsi que, comme en métropole, les tendances d'une
fraude
à la baisse-----ne--sont pas à écarter. Voici quelques exemples de
prix administratifs.
Tableau nO 21 -
Prix des produits sucriers en Guadeloupe (1763~i log) (2).(en Iivre-éoîcn1ale)
Années
sucre blanc
! commun
tête
Brut
Sirop
tafia
(par quintal)
(qal)
(qal)
(ql)
barrique! (barrique)
;
1763
37
-
! 25
s
s
s
1765
45
37.10
30'. :10 , 19.10
40
90
30
.
1766
50
40
20
40
00
1767
50
40
30
20
50
100
1768
50
40
30
20
54
110
1769
50
40
30
20
40
00
1770
50
40
30
20
40
80
s
1772
49.10
40
31
22
45
100
s
1773
,
52
42
32
22.10
54
110
s
_ _ _ _ _1-'-...<71A
•
52
43
32
22.10
54
110
1775
55
45
22
33
50
100
1776
67
55
36
! . 30
50
100
1777
70
50
46
! 36
66
120
(1) SCHNAKENBOURG (C.), Statistiques pour l'histoire •• B.S.H.G.N°31 p.121
(2) SCHNAKENBOURG (C.), Les sucreries de la Guadeloupe dans la seconde moitié
du Xvrllè siècle 1760-1790. Contribution à l'étude de la crise de l'écono-
mie coloniale à la fin de l'Ancien Régime. Tableau n0 13, p.264.
178
1778
60
54
50
30
50
120
s
1779
38
30
25
16.10
39
109
1781
50
40
30
50
100
1782
50
40
30
18
50
100
1783
c;n
.~
40
30
20
50
100
1784
S0
40
30
20
50
100
1785
60
45
35
25
.-60__
1786
60
45
35
25
66
1787
50
42
37
25
64
100
1788
50
40
33
25
60
100
1789
50
40
33
30
60
100
T?bleau nO 22 -
Prix du sirop livré aux Nouveaux-Angleterriens 1764 à 1774. (Pointe-à-Pitre,
Guadeloupe)(en livre par barrique) (1).
1764
33 à 36
1765
36 à 40
1766
42 à 48
1767
50 à 54
1768
50 à 54
1769
50 à 54
1770
56 à 66
1771
56 à 6-6
1772
60~
1773
63 à 66
1774
64 à 66
Tableau nO 23 -
Prix du sucre blanc et Tafia à Ca
sucre blanc
1766
4!J
110 la barrique
1771
30
110
1776
30
110 ;
Tableau n024
Prix des produits sucriers à Sainte-Lucie (1784 à 1788)(3).
sucre terré(qal)
Brut(qal)
Rhum
Tafia
sirop(bque)
(barrique)
(bque)
1784
40
20
100
00
1785
40
20
100
00
1786
40
20
, 100
100
80
1787
40
30
200
00
50 le bcaud( ec
1788
--40
30
200
90
00
bque)
(1) AN Col F3 162. Collection Moreau de Saint Mery.
(2) Tableau de l'e~f~.ortation des denrées de la colonie d-e--Gayenne 1766-1771 et
1776. AN Col C
45 folio 274.
(3) "Exportation des denrées du cru de Sainte-Lucie". AN Col C10C8 •
179
1
1
[
Comme on voit, ces prix réduisent en un chiffre unique un ensemble
!
!
de conditions variées (1), tant sur le plan de la qualité que sur le plan
..
1
" , - - _ . -
spatial. En effet, chaque type de sucre est réduit en une seule qualité,
l
alors que sur le marché, il se subdivise en diverses qualités, du moins,
!
il en est ainsi du sucre blanc ou raffiné colonial et du sucre terré.
Trois sortes de sucre blanc sont con~ues sur le marché : la pre-
mière, la deuxième et la troisième
qualités. Les raffineurs orléanais en
distinguent quatre sortes (2). Mais, ici, le terme de sucre blanc est
très ambigu. En principe, le sucre blanc désigne le sucre raffiné aux co-
lonies. A quoi correspondent donc ces différentes qualités? Désignent-elles
les différ.entes nuances liées à la qualité du raffinage ou, au contraire,
les différents degrés de purification du sucre terré ? Il est difficile
de répondre à cette question.
•
Notons qu'entre l'an V et l'an VII de la République, les députés
du commerce, sollicités par la régie des douanes pour déterminer la nature
des échantillons de sucres ~sis, distin~ent au moins 8 classes de sucre
terré, dont la cinquième etaTt connue dans le commerce sous le nom de
"petit blanc" ou "petit sucre"(3).
Le sucre terré est généralement classé en trois qualités. Or,
les ûtistinctions ne sont pas toujours faites. L'appellation sucre commun,
qui désigne ici le sucre terré, ne rend pas compte des nuances.
;
Sur le plan spatial, les prix peuvent varie"r d'un point à l'autre
de chaque colonie. En 1790, par exemple, le sucre commun est c5té 40 livres
le quintal à Basse-Terre, alors qu'il l'est à 36 livres à Marie-Galante (4)
(1) SCHNAKENlQURG (C.), Les sucreries de la Guadeloupe ••• , p. 265
(2) "Causes deno.treu désavan.tage dans le cO~2rce de nos sucres rafinés ches
l'étranger, moyens de le réparer".
AN F
1639 A.
12
(3) Examen des échantillons de sucre à-u 5 au 8. AN F
1639 At ou "copie du
rapport du bureau consultatif de commerce concernant un examen de sucre".
Paris 28 Frimaire an 6.
AN F12 1966 (0).
"
(4) "Etat général du commerce de la Basse-Terre pendant les 6 premiers mois de
l'année 1790 e~"~tat général du cabotage de la Basse-Terre et Marie~alante
avec la Martinique pendant les 6 premiers mois de l'année 1790. ANF4 12
folio 44 et 45.
180
A Saint-Domingue, les meilleurs sucres de la partie Nord de l'rIe ne peuvent
3tre vendus au même prix que ceux peu perfectionnés de la partie Sud •
...~---
il
1
1
Ces prix sont relevés par les services de l'intendance sur les
1
1
marchés. Ils tiennent compte des distinctions de qualité. A la Guadeloupe,
!
ils sont relevés d'abord tous les trimestres puis tous les mois (1). Pour
la Martinique, nous avons trouvé un seul relevé, celui de Janvier 1768,
1
publié dans le supplément de la Gazette de la colonie du 28 Janvier. Il
i
s'agit du cours à Saint-Pierre (2).
1
En ce qui concerne Saint-Domingue, nous disposons de deux relevés
f~
incomplets. L'un concerne le prix courant des.sucres bruts au Cap depuis
i
le 30 Décembre 1739 jusqu'en 1744 (3). L'autre concerne les prix au Port-
au-Prince au début du mois de Janvier 1787. Ils sont publiés dans les
1
Affiches américains du JeucU;~Janvier 1787 (4~ Dans tous les cas, les
1
renseignements sont peu s~eant6 pour dresser des séries continues.
~
Table2.u nO 25 -
1
t. Evolution des prix de marché à
t1
1
,
1
~
Périodes
Sucre Blanc (le qal)
sucre com-
tête
sucre brut
!
1e qualité
2e qual. ~e "qual. mun(le qal)
(le qal)
!
(le qal)
1~
Janv.-Mars 1767
52 à 54
50 à 51
46 à 48
36 à 42
24 "à 33
Janv.-Avr. 1769
56 à 58
53 à 54
50 à 51
40 à 44
33 à 36
22 à 24
:~
Mi-Juin
1769
55 à 57
50 à 53
44 à 48
38 à 42
33 à 36
23 à 24
1
Juil.-Sept.1769
52 à 53
48 à 50
44 à 46
36 à 40
32 à 36
20 à 24
1
Juil.-Sept.1772
55 à 60
50 à 52
46 à 48
40 à 42
33 à 36
22 à 24
!
Juin - Déc. 1779
44
38
35
30
24
15
1
1
1
(1) SCIrnAKENBOURG (C-~); Les·sucreries de la Guadeloupe, P.265.
!
1
(2) Prix des denrées de la colonies à Saint-Pierre. Supplément à la Gazette de 1
la Martinique du 28 Janvier 1768. AN Col C8A68 folio 227.
Bordereau du prix courant des sucres bruts depuis le 30 Décembre 1739 jus~
qu'en 1744.
AN CoIF3 162.
1
Affiches américaines du Jeudi 4 Janv3er 1787. Prix des marchandises de la
colonie au Port-au-Prince.
AN Col F 163.
181
Mars -1788
(Basse~Terre) 54 à 60
54 à 56
30 à 36
25 à 27
Mars 1788
(Pointe-à-P. )
50 ...~
45
30 à 34
20
Aol1t 1788
(Pointe-à-P. ) 54 à 58
44 à 48
35 à 4C"~ 20 à 22
Nov. 1788
(Pointe-à-P. ) 52 à 56
42 à 46
33 à 37
22- à 27
Nov. 1789
(Basse-Terre) 58 à 60
54 à 56
50 à 52
46 à 48
Tableau n026 -
2. Prix des sucres
quintal)
Baillardel .
72 livres le qal.
1ère quali té
60 à 62
2ème quali té
54 à 58
Beau Commun
45 à 48
Pe ti t commun
38 à 42
tête
32 à 36
Tableau n027 -
3. Prix courant des sucres bruts depuis le 30 Décembre 1739 jusqu'en 1744
(au Cap)
20 Novembre 1748 à
Janvier et Mars 1749.
Ce bordereau des prix est le plus complet donô'ï ngus di sPQsgps_ Ce~,.~
prix sont présentés par les sieurs le Mentomois, Millot, Lory frère, Grangent,
Laralde et Cavions, négociants au Cap, et certifiés devant les notaires du Roi.
Périodes
Prix par quintal
t
30 Décembre 1739
19 l 10 s.
12 Janvier 1740
20 l
90 10, 12 et 15 Mars 1740
20 l
20 et'22 Mars
19 l
28 Mars
20 l 10 s.
4 Avril
20 l
6 Avril
20 l 10 s.
12 Avril
21 l
20 Ao1!t'
24 l
31 Ao~t··
24 l
1er Septembre
25 l
20 Septembre
25 l
Janvier 1741
20 l
Février
20 l
15 Février
19 l
~ - ;
i
..
J - !
i
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5 •
•
f
-.. .
· .
1 E2
E
r
Périodes
Prix au auintal
Périodes
Prix au guintal
t!
Mars 1741
20 l
13 Décembre 1741
21 l
t
19 Avril
20 l
19 à 20 Décembre
21 l
et 22 l
!
Mai
·~O l
Janvier 1742
22 l
i
Juin
20 l et 23 l
29 Janvier
--23=-1
1
4 Juillet
20 l
12 et 18 Février
24 l
17 Juillet
20 l
t
25 Février
24 l
et 25 l
27 Juillet
22 l
15 Mars
25 l
12 Aol1t
22 l et 23 l
t,
19 Mars
24 l
21 Aol1t
21 l et 22 l
5 et 7 Avril
26 l
et 26
l
l
10 s
24 Aol1t
23 l
28 Avril
25 l
v-
31 Aol1t
23 l
21 Mai
26 l
7 Septembre
23 l
I
10 et 12 Juin
24 l
10s. et 25 l f
10 Sep tembre
21 l
25 Juillet
25 l
~O Septembre
22 l
9 Aol1t
25 l
10 s.
1
25 Septembre
21 l et 22 l
t
î
25 Septembre
21 l
1943
25 l
2 Octobre
22 l
10 s.
1744
26 1 lOs. et ~7 l
3 Octobre
21 l et 22 l
f!1
16 Octobre
20 l.et 2 1 1.! 20 No vembre à Déc. 174e
17 l et 18 l
23 Octobre
19 l 10 s.
et Janvier 1749
1
7 Novembre
19 l 10 s.
Mars 1749
23 l
11 Novembre
20 l
14 Novembre
20 l
20 No.vembre
20 l
29 et 30 Novembre
21 l
Tableau n 0 28 -
,
4. Prix des sucres a. Port-au-Prince le 4 Janvier 1787.
Sucre blanc
it
1ère quali té
66 à 70 livres le quintal
2ème qualité
58 à 65
3ème qualité
48 à 55
Brut
32 à 36
Les
prix de marché permettent de suivre avec plus d'efficacité
les fluctuations des cours des sucres aux colonies. ~a comparaison des deux
types de prix, prix administratifs prix de marché met en évidence une légère
sous-évaluation des premiers. Les prix de marché permettent de corriger le
caractère quasi-stationnaire des prix administratifs.
Comment expliquer la chute des cours? La guerre qui entraîne la
rareté des relations avec la métropole et la mévente constitue la raison fon-
damentale : devant le risque de surabondance, les colons préfèr,ELT)t se dé-
barraser de leurs sucres à bas prix. Le tableau relatif aux prix de marché
j'\\
1
183
à la Guadeloupe le montre bien. En 1779, la chute est de 27 % environ sur
toutes les qualités J&..-cre blanc par rapport à 1772, de 28,57 % sur le
sucre commun, de 33,33 % sur le sucre t~te et de 37,5 % sur le ~u_c!~_brut.
Cette dernière qualité de sucre est plus atteinte. Cela s'explique, comme
nous l'avons déjà dit, par le fait qu'en temps de guerre, les capitaines
de navire refusent le sucre brut.
Les légères baisses des cours en période de paix peuvent s'expli-
quer par la plus ou moins grande abondance de sucres sur le marché colonial
l'abondance ayant tendance à faire baisser }es prix. La hausse des prix
s'explique au contraire par la rareté soit à la suite de mauvaises récoltes,
soit à la suite de saturation momentanée de la demande due à l'arrivée de
nombreux navires. Cela survient surtout -au retour de la paix, quand, de tous
les ports de France, on se rue sur les fIes.
Mais nous avons déjà vu que ces prix n'ont de valeur que par rap-
port à ceux fixés par les négociants pour leurs marchandises. Ce qu'il est
donc important de savoir, c'est surtout le niveau quantitatif des échanges.
(!
---==--1
t!
Etant donné le déséquilibre du niveau des prix des produits, ceux
f
I-
fournis par les négociants étant toujours
pius chers, il ne fait aucun
l
doute que tout le commerce se fait à leur avantage. Cela signifie en effet,
que les négociants reçoivent nécessairement plus de sucres en paiement des
marchandises vendues. Le calcul inachevé de
la chambre de commerce de la
Rochelle au sujet de l'équivalenee entre la quantité de sucre brut pour
l'acquisition d'un noir est à cet égard, assez significatif (1).
(1) Cité par Emile GAPJ~-, Le commerce rochelais au XVIIIè siècle d'après les
documents composant les anciennes archives de la chambre de commerce de la
Rochelle, Tome 4, pp.88-89.
184
Tableau nO 29 -
Quantité de sucre brut pour un Noir 1717-1765.
Date
Prix d'un Noir aux
Prix d'un quintal
équivalence quintal
rIes ~en live Colon.)
de sucre brut
de sucre brut / 1 Noir
après
1717
600
8
75 quintaux
1730
1 000
8
125
1735
1 000
11
90
1740
1 200
18
66
1750
1 300
24
54
1765
14 à 1 500
32 à 35
42
Ajoutons à cela qu'en 1787, un esclave adulte vaut 2 500 livres (1)
à Saint-Domingue et le quintal de sucre brut, 32 à 36 livres (2). Ce qui
donne, 69 quintaux de sucre brut pour un Noir. Le sucre blanc de première
qualité étant plus cher, 66 à 70 livres le quintal, il en faut 35 quintaux
pour acquérir un Noir.
Traduits en barriques, les résultats sont les suivants: il faut
9 barriques après 1717, 15 en 1730, 9 en 1735, 6 en 1740, 5 en 1750, 4 en
1765, 6 en 1787 s'il s'agit de sucre brut et 3 s'il s'~t de sucre blanc
(
de première qualité, pour acquérir un Noir.
Tout cela nous conforte dans l'idée du déséquilibre du ni veau quan- 'Il,:••,.
titatif des échanges. Les estimations tournent généralement autour d'une
;
c~gaison de Noirs pour trois cargaisons de sucres. Les exemples sont peu
!
nombreux mais très significatifs sur ce point. Le Maréchal de Castries, mi-
t
,t
nistre de la Marine est en effet bien placé pour le savoir. Il explique
~"
dans une lettre adressée au Contrôleur général Calonne, le 30 Mai 1784,qu'il
faut au moins trois cargaisons de sucres pour absorber les fonds d'une car-
1
gaison de Noirs (~). Pierre PLUCHON se situe dans le même ordre de grandeur
~
lorsqu'il écrit que de négrier "retourne en métropole avec un quart ou un
t!i
(1) DE BI EN (G.), Une plantation de Saint-Domingue, la sucrerie Galbaud du Fort
169Q-H02, p. 87.
Prix des marchandises de la colonie aU Port-au-prince. Aff1ehes américai~
3
nes du Jeudi 4 Janvier 1787.
AN Col F 163.
1
Cité par TARRADE (J.), op. cit., Tome l, pp.121-122.
tiers des sucres et cafés qu'il a acquis pendant la foire aux bois d'ébène.
Deux ou trois navires de droi ture rapporteront le res te" (1).
~ -
L'importance de ce déséquilibre dépend à notre avis decteuxfac-
teurs essentiels; elle dépend d'une part du niveau du prix des sucres par
rapport à celui des marchandises contre lesquelles ils sont éch~.gés
ell~
dépend d'autre part du mode de paiement choisi par le colon.
Lés exemples que nous avons cités plus haut permettent de comprendre
que quand la hausse du,prix du sucre est supérieure à celle enregistrée sur
le prix du Noir, la quantité de sucre nécessaire pour acquérir un Noir di-
minue. Au contraire, lorsque la hausse du prix du Noir est supérieure à
celle enregistrée sur le prix du sucre, il faut plus de sucre pour acquérir
un Noir. Entre 1717 et 1730, la hausse enregistrée sur le prix du Noir est
de 67 %, le prix du quintal de sucre brut reste stationnaire, il faut donc
plus de sucre brut pour acquérir un Noir. Entre 1730 et 1735, c'est le prix
du quintal de sucre brut qui conna!t une hausse, 12,5%, il faut alors moins
de sucre brut pour acquérir un Noir.
Entre 1735 et 1740, le prix du quintal de sucre brut subit une
hausse plus élévée que celui du Noir : 66 % contre 20 %, il faut encore
moins de sucre brut pour acquérir un Noir. C'est la m3me. sibatloil enLie
1740 et 1750 :les taux de croissance sont de 33,33 %pour le quintal de
sucre brut contre 8,33 % pour le Noir, entre 1750 et 1765 avec les rapports
de 45,83 % contre 15,38 %. Entre 1765 et 1787. c'est le renversement de la
/
tendance
le prix du Noir enregistre une hausse de 67 %contre 2,85 % pour
le sucre, prix maximum, naturellement, il faut plus de sucre brut pour
acquérir un Noir.
Mais dans une situation où le débat à propos des prix est toujours
inégal entre acheteurs et vendeurs, c'est au négociant qué profite le rapport
des forces surtout quand la vente se fait à crédit.
(1) PLUCHON (P.), La route àes esclaves, p.281 ou p.287.
,
\\
, "
1 r ' ....
Le colon a, en effet, le choix entre deux modes de paiement : le
paiement au comptant et ~~~t à crédit. Le premier présente l'appréciable
avantage de faire baisser le prix du Noir mais il nécessite de soli~~~yens. i;~,',
Il n'est donc qu'à la portée des colons plus aisés, c'est-à-dire les plus
grands planteurs. Ce sont en effet, les seuls à pouvoir prendre sur les pro-
duits nets de leurs cultures,
des fonds pour acheter des captifs et les
payer comptant. Les autres choisissent l'acquittement à terme (1) selon un
délai allant de 3 à 24 mois ou même 36 mois; c'est l'achat à crédit qui
provoque une hausse de la valeur des captifs dans la proportion correspondant
à l'intérêt-du prêt consenti. Cela signifie plus de sucres à livrer au
terme du délai. Mais pour cela, i l faut que l'agrandissement des plantations
et l'amélioration des rendements' produisent les résultats escomptés. Dans
le cas contraire, c'est l'endettement avec son cortège d'obligations.
Nous retiendrons de cette étude deux idées essentielles; d'abord
que si le troc permet aux colons de disposer perpétuellement d'un débouché
pour leurs sucres, il n'en demeure pas moins que le déséquilibre entre les
prix en faveur des négociants permét à ceux-ci de recevoir toujours plus de
~ ~ ~ - ~
sucres en paiement des marchandises fournies.
Nous retiendrons ensuite que cette économie de troc est l'un des fondements
de la dépendance des colons vis-à-vis des négociants. Celle-c~
rtout
~
rendue possible à cause de l'incapacité des colons à livrer les denrées
dans les délais fixés pour payer les marchandises reçues, c'est-à-dire par
la vente à crédit. La production étant dépendante du travail des esclaves
noirs, cette vente à crédit équivaut à un fitlancement externe.
(1) En 1764, le navire_~négrj.erle Télémaque vend à Saint-Domingue 330 Noirs
pour une valeur de 341 170 livres. Sur cette somme, 122 478 livres seu-
lement soit 35,90 %sont payés au comptant. Le reste, 218 692 livres, soit
64,10 %est à crédit de 1 à 21 mois.
Cf. RINCHON (D.), Pierre-Ignace Lievin Van Alstein. capitaine négrier,
Gan 1733. Nantes 1793, p.113.
187
III/ Crédit de cargaisons ou financement externe de la production et main-
..~.
mise des négociants sur la valeur produite sur les habitations par le
travail des esclaves.
Le crédit commercial est l'une des caractéristiques du commerce
colonial français. Il pallie "le manque de synchronisation dans le troc" (,).
En raison du rôle moteur du trafic négrier dans l'expansion commerciale, les
dettes négrières en constituent une part.i~portante.
~pêchés de descendre sur les côtes africaines pour pratiquer eux-m~mes le
trafic des esclaves (2), les colons qui veulent investir dans l'agrandisse-
ment de leurs propriétés et l'amélioration de leur rendement, sont obligés
de s'assurer les services des négociants. Propriétaires de navires négriers
ou associés à des armateurs de négriers,ceux-ci sont des
intermédiaires
indispensables. Dans la mesure où ils peuvent fournir dans des délais rai-
sonnables la main-d'oeuvre nécessaire aux plantations.
Ainsi, colon et négociant éprouvent le m~me intér~t pour le travail
- - ~ - - -
de l'esclave noir. Mais les objectifs sont différents. Comment fonctionne-t-
il à l'intérieur de l'économie coloniale ? ~elles sont les conséquences du
crédit négrier sur les rapports entre colons et négociants? gr}], • • Qa~
les questions auxquelles nous.voulons répondre dans les développements sui-
vants.
;
'0) Le travail de l'esclave noir comme mobile de la production sucrière et
base de la richesse du colon.
Tous les historiens s'accordent à reconnaître que l'esclave noir
f
a été le nerf de la production sucrière. Mais les raisons généralement
~.
avancées pour justifier le recours à cette main-d'oeuvre sont contestables.
1
~!~'
1
l
Ce terme est utilisé par Alain BUFFON, Monnaie et crédit en économie colo-f
niale ••• , p.23.
f1
C'est très exceptionnellement que les autorités de Saint-Domingue ont per-!
mis à leurs administrés de
~aller eux-m~mes s'approvisionner ei'lNOIrs, . 1
pendant la Guerre d'Indépendance américaine. Le ministre de la Marine con-t
firme cette mesure exceptionnelle le 5 Mars 178', dans le bur dit-il d'em-[
p~cher l'introduction des Nègres étrangères.
Cf. PLUCHON (P.), La route
1
des esclaves. Négriers et bois d'ébène au XVIllè siècle, p.231.
.
- _ . _ - - - - - " , - -
"f
,
1 .. ,..-
En effet, toutes les explications tendent à montrer que l'incapacité de la
1
métropole
1
à fournir une main-d'oeuvre blanche ën nombre suffisant en est la
~
1
cause.
:,1
Les
au teure se foncient· sur le fai t que les travaux de la canne à sucre _._~_..
1
exigent une main-d'oeuvre nombreuse en état de supporter les longues et épui-
santes journées de travail. Ce qui, selon toute vraisemblance, assimile les
angagés à une main-d'oeuvre agricole. Nous ne saurons étudier les raisons
1
i
de
l'utilisation de la main-d'oeuvre noire sans réfuter une telle asser-
1
tion.
f
1
,
.1 -
1/ L'insuffisance de la main-d'oeuvre blanche Comme cause de recours à la
~-- ----
-
. . ----- -------------- --------
1
La question est de savoir si l'engagé volontaire parti de la métro-
1
pole est un travailleur au m3me titre que l'esclave noir. La question peut
_l'.•
3tre posée ainsi: doit-on considérer l'engagement volontaire comme un esc1a-
.
vage blanc? La définition de l'engagé milite contre une telle assimilation.
1
En effet, "un engagé, écrit Gabriel DEÉ~EN, est un émigrant sans ressource
l'.:
et sans crédit qui désire trouver du travail aux colonies-ou s'y établir
comme pl·anteur. Mais comme il ne peut même pas payer les frais de sa traver-
t
---"'I'
sée, il signe avec un
"passeur" ou "engagiste" qui consent à fai,(,I,.l8s..-'llilsllils....
avances du voyage, un contrat par lequel il s'engage à le servir aux colonies
t
pendant trois ans"( 1).:
r
1.1
Ce sont des marins en rupture de bord, des fils de famille ruinée,
des vagabonds, des narfs sa~u1és et embarqués (2). Bref, ceux que Gaston
MARTIN nomme "les désespérés que guettaient les galères ou les grands chemins
!
de-l'aventure avec attaque à main année et la pendaison ou la roue pour
1
tenne"(3). Figurent aussi parmi ces candidats au départ pour les rles, des
!
1
forçats tirés des galères du Roi.
1
f
ttt1
(1} ~EBIEN (G.), Le peuplement des Antilles françaises au XVIIè siècle. Les
t
engagés partis de la Rochelle (1683-1715), Paris, in4°, p.6.
1
(2) DESCHAMPS (H.), Histoire de la traite des noirs de l'Antiquité à nos jou~s 1
p.62.
!
(3) MARTIN (G.), Histoire de l'esclavage dans les colonies françaises, p.101.
~
1 t9
t1
1
1
1
Le
premier élément qui dément l'aasimilation de l'engagement à
l!
l'esclavage est la durée du cor~ 18 mois en 1670 et 3 ans en 1669
f
Elle montre que l'employeur n'a pas affaire à une main-d'oeuvre permanente.
.__ J
.
L'engagé se sépare du propriétaire au terme du contrat. Les forçats devien-
r,
nent, quant à eux, libres aussit5t qu'ils se sentent capables de subsister
[
1
par eux-m3mes. Il en est ainsi du cas des 150 forçats arrivés à Saint-Domin-
!
gue le 14 Juillet 1687 (1). Ainsi, à peine ont-ils été distribués que
quelques-uns d'entre eux manifestent le désir de s'établir à leur compte.
Il est à noter d'ailleurs que tous les engagés ne sont pas destinés
aux travaux agricoles. Gabriel DEBIEN (2') a montré que certains sont des
ouvriers ~ecrutés par les habitants ou des manoeuvres engagés pour des tra-
vauxd'intér3ts publics aux rIes. Il cite aussi le cas d'émigrants qui
signent seulement un contrat à condition. Ce sont ceux qui espèrent trouver
aux colonies, un ami ou un protecteur qui peut rembourser les avances du
capitaine. Un cinquième type de contrats que l'auteur appelle, contrats
passe-partout impose le paiement d'une avance, des châtiments et une pro-
longation de service en cas de rupture du contrat.
L'auteur précise que ces engagés sont'd'anciens marins employés
par les premiers colons "pour défricher leurs concessions, planter leurs
souches d~ tabac. En cas de tentative de désertion ou de paresse, c'était
le fouet et l'obligation d'un service supplémentaire".
Ce sont certainement ceux dont le traitement, voisin de celui de l'esclave
noir, a été dénoncé par les missionnaires et les administrateurs. Mais ce
mauvais traitement doit 3tre mis en rapport avec la mentalité spéculative
des colons pour qui tout est entreprise, rendement, rentabilité et objet de
calcul. Leur condition est rude, il est vrai, mais diffère de celui des
esclaves noirs par la durée.
( 1) AN Col CRA1 folio.2J2. "L'intention de sa Majesté est qu'ils fussent libres
aussytost qu'ils pourroi l subsister par eux-m~mes" écri vai t à leur sujet
le sieur de Cussy, gouverneur de Saint-Domingue.
DEBIEN (G.), Le peuplement des Antilles françaises au XVIlè siècle. Les
engagés partis de la Rochelle (1683-1715), PP.8-10.
190
1t1.f
Quant aux tout premiers engagés des débuts de la colonisation, ils
1.'
devaient const! tuer le premier n~de peuplement blanc. C'est le cas des
1
colons installés à Saint-Chr.istophe à partir de 1625 par CHAM:BEAU, des émi-
:1
.-.·---'1
grants normands débarqués dans la m~me rle par :BELAlN d'Esnambuc (1), des
i
!
premiers engagés pour la Guadeloupe enrolés par l'Olive et Du PLESSIS, et
~
f
pour la Martinique par d'Esnambuc et Rossey (2).
!
L'initiative vient des négociants et des capitaines de navire, et
très tôt les habitants protestent contre ces envois d'engagés dans les rles,
notamment à la Guadeloupe et à la Martinique, colonies plus anciennement
établies où les terres sont presqu'entièrement concédées (3). Le problème
étant qu'à la sortie de leur engagement, ils doivent ~tre installés. Le
lieutenant général :BLENAC qui, avec l'intendant PATOULET, insiste sur la
~.
1-
nécessité d'accrortre le nombre des engagés (4), se rend à l'évidence. Dans
~-
l,
sa lettre du 23 Septembre 1679 au Ministre de la Marine, il écrit: "Je ne
l
crois pas que les habitans d'eux-mêmes fassent venir des engagés, et comme
f
toutes les terres sont concédées ,sy vous n l'apportés quelque tempérament
a ses concessions, comme je vous lay fait,sçavoir Monseigneur, les engagés
seroient inneutiles, puisque lorsqu'ils-sortiroient de leur engagement on
1
nauroi t pas de terre à leur donner" E5).
i
'intend~-t-----t~
Pour forcer les habitants à prendre les engagés, "1
!
Robert obtient l'accord du roi pour imposer aux habitants d'avoir pour com-
mandeur un engagé et de plus, un engagé pour 20 esclaves"(6). En Ao~t 1723,
la chambre de commerce de la Rochelle met en ,évidence l'inutilité des engagés
aux rles.
~)-MARTIN (G.), op.cit., p.6.
(2) CHAULEAU (L.), Histoire antillaise. la Martinique et la Guadeloupe du XVII~
siècle à la fin du XIXè sièclè, p.S5.
En 1671, la Guadeloupe compte 931 propriétés couvrant une superficie de
47 262 carrés de terre, soit 50,7 %de la superficie moyenne en carr~Q~an~
à la Maptinique, elle com~e-617 propriétés qui couvrent une superficie de
20 472 carrés. Elle représente en tout 30,~ %de la superficie. Cf. SCHNA- 1
KEN:OOURG (C.), Le "terrierll de 1671 et le partage de la terre en GuadelouTIE 1
au XVIIè siècle", Rewe française d'Histoire d'Outre-Mer, Tome LXVII, n024~ t
247, 1980, pp.37-53. Cf. pp.42-43.
f
L'intendant Patoulet et le lieutenant général :Blenac, conseillent d' éri-ge-r--t
en fief les terres des habitants qui auront à leur service 60 engagés. Cf.
'
CHAULEAU (L.), op.cit., p.S5.
(5) Comte de :Blenac, 23 Septembre 1679.
AN CoICSA2 folio 192.
(6) CHAULEAU (L.), op.cit., p.,~5.
i
'-~i
1l
191
,
!}:
~'
"Les engagés qu'on transportent (sic) a~x isle depuis plusieurs
1
années y sont inutiles parce que ~abitants y sont suffisamment pourvus
!~
de Blancs. Ce qui emp3che que les capi taines puissent les placer et vendre .........~
de sorte que les engagés étant mis sur le pavé n'ayant aucune retraite, ils
f
deviennent non seulement inutile, mais très nuisible, la cruelle nécessité
où ils se trouvent réduits les obligeant à se mettre forbans, ou voleurs
dans les lieux, pour se dérober à la dernière misère" (1).
C'est ~ue malgré la réticence des colons, le roi continue d'imposer
aux capitaines d'enraler des engagés: un arrAt du conseil d'Etat du 22 Jan-
vier 1671 décide qu'il ne sera accordé de passeport qu'aux navires qui porte-
ront auX fIes des engagés ou des bestiaux. Louis XIV permet de déroger à cet
arr~t la mAme année. L'obligation est rétablie le 19 Février 1698 : les
navires de 60 tonneaux devaient y amener 3 engagés, ceux de 60 à 100 tonneaux,
4 engagés, ceux de plus de 100 tonneaux, 6 engagés.
Ceux qui ne peuvent pas transporter d'engagés sont contraints de payer 60
livres. Si non, ils se trouvent dans l'obligation d'embarquer des recrues
et des ouvriers.
C'est seulement-sous ces pressions que 44 engagés sont introduits
à la Martinique dans le deuxième semestre de 1710 et 78 dans le premier se-
~-----j1
mestre de 1711 (2). C'est qu'à cette époque la monarchie française se trouve
confrontée au problème des vagabonds et des indigents. Tout comme colbert
pensai t "que le développement des manufactures rurales remédierai t au pau-
périsme des campagnes" (3) •
f
Ces engagements pour les fIes devaient sans doute figurer parmi les
meSUreB circonstancielles contre la montée du chamage. Les forçats sont
accueillis avec beaucoup de suspicion: leur moralité douteuse, leur âge
avancé et leur dénuement
inspirent méfiance et étonnement. En 1687, seule
Sain4-Domingue qui a besoin d'une population blanche pour réaliser sa mise en
valeur réclame encore des forçats
Lettre des directeurs et Syndics de la chambre de commerce de la générali-
té de la Rochelle", 20 Ao'l!t 1723. AN Col F2B1.
CHAULEAU (L.), op. cit., pp.85-86.
DEYON (P.), Le mercantilisme, p.29.
i:
• ..-.=.==-=.t,i
"le capi taine Arnaud Richard estoi t arrivé le 14 Juillet avec 150
forçats tirez des galères du Roy. Ils ont esté distribuez sur le champ, et i l
...~-
auroit souhaitté qu'il y en eust en 300. Les hans en sont fort contents, et
eux le ~ont au~sy des haî\\sn(1)~
A la Guadeloupe et à la Martinique et m~me à la Grenade, on est
loin de cet enthousiasme. Ecoutons à ce sujet les commentaires des gouverneurs
"Les peuples sont fort estonnez de ces envoys, les forçats sont acca·
blez d'années et d'incommoditez et absolument inutile ••• On doute que puisque
l'on n'a pû les contenir en France, on ne le puisse dans les isles et qu'il
n'en arrive de fascheuses suites, il faut remarquer sur cela qu'on ne peut
establir personne qu'il n'uyt d'avance des vivres pour dix huit mois, pour
pouvoir attendre la récolte de ce qui aura esté planté, et des serpes, des
houx et des haces pour travailler aux déffrichement, ce que pas un deux n'a"
(2), écrit le lieutenant général Blenac le 31 Mai 1687. Le sieur
Le sieur Gabaret, gouverneur de la Grenade fait la même remarque
"il apprénende -que d. tOU! les forçats qu'on a envoyé à la Grenade il
s'eh fasse peu de bons habitans ; car la plus part sont au~dessus de 50 ans,
il y en a beaucoup de malades ••• il en avoit environ 30 qui n'estoit p~~l~1i~L~----~
placez à cause de leur infirmité"(3).
Pour prévenir d'éventuels désordres en raison de la moralité
de ces forçats,
il demande l'installation d'une police dans chaque quartier de la colonie.
C'est, sous les conseils de Bégon, devenu, à son retour de
la Mar-
tinique, intendant des galères que ces envois de forçats invalides sont orga-
nisés~---Le gouverneur de la Guadeloupe en reçoi t un contingent de 30 personnes
en 1686 ;les envois reprennent en 1697 puis en 1701 et continuent jusqu'en
1722. C'est sous les protestations répétées des administrateurs que prennent
(1) Compte rendu de la lettre du sieur de Cussy, gouverneur de Saint-Domingue
1687.
AN Col C8A1 folio 372.
(2) Le comte de Blenac, le 31 May 1687. AN Col C8 AI folio 257.
(3) Le sieur Gabaret à la Grenade le 15 Mars 1687. AN Col C8AI folio 267.
193
1
t
fin les convois de galériens (1).
Tbus ces cas infirment =~l~tion de cause à effet établie arbi- .J
trairement par les historiens entre une prétendue insuffisance de la main-
d'oeuvre blanche et le recours à la main-d'oeuvre noire.
f
f
r
Tout concourt à montrer que les colons étant suffisamment pourvus de blancs
!f
ne voulaient plus recevoir de nouveaux engagés.
r
1
t
En réalité, dans une société numériquement dominée par les Noirs,
1
1
ces engagés, devaient p1ut~t constituer l'élément de peuplement blanc. Quant
1
à la pénurie, elle se pose par rapport aux exigences du gouvernement royal.
!1
Devant le refus des colons de recevoir de nouveaux engagés, les capitaines
1
!
de navi~es ne veulent plus en transporter aux r1es, parce qu'ils ne leur
rapportent aucun profi t méÛs au contraire leur causent des frais.
Liliane CHAULEAU montre qu'en 1669, il faut 10 livres pour la levée d'un
1
engagé, 30 livres pour l'achat de ses v3tem~nts, 60 livres pour son passage
1
~
et pour les ~ivres (2). Ainsi, les propriétaires de navires mettent tout en
1
f
oeuvre pour ne pas a~te1ndre1es quotas imposés (3) de manière à obtenir
1
l'annulation de cette décision.
"
[
~
Gaston MARTIN indique que pour se décharger de cette clause don-
1
traétue11e, l'usage s'est généralisé de verser à la société concesSiOnn~cai
. .r_e
ll,
son rachat en argent (4). L'appel à la main-d'oeuvre noire obéitp1ut~t à
r
des intér3ts économiques.
ori1l
f
f
(1) CHAULEAU (L.), op. cit., p.86.
1
1
""-(2-'.)-=1d""'e....m_ ,_
l bi dem, p. 85.
(3) Liliane CHAULEAU signale que ,"les propriétaires de navires faisaient dres-
ser par les capitaines des procès-verbaux de désertion pour se dispenser
1
1
de transporter le nombre d'engagés inscrits sur leur passeport. Parfois,
,
pour atteindre le chiffre requi~, ils faisaient passer des contrats à des
~
f
enfants de 12 ans". Cf. op. cit., p.S6.
MARTIN (G.), Hi etoire de 14-&c1avage dans
les colonies françaises, p.101.
1
1
1
1
-------1;->
, -
}
~
t
..~,
194
r
1 - 2/ C'est du nombre d'esclaves au travail que dépend la richesse du colon.
t
_
4
- - - - - - - - - - - - - - - - -
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
,
~
-
1
L'attitude des colons s'explique par cette réflexion de Pierre LEON:l
"bien ~.8 colons n'eprouvent que peu d'attachement pour lèur fIe, qu'ils
--1!
considèrent uniquement comme le cadre d'affaires fructueuses"(1). Tout est
!
donc entreprise, rendement, rentabilité et objet de calcul. Cette urgence
1
!
du profit justifie par conséquent le choix d.u recours à la main-d'oeuvre
r
noire. L'expérience n'est
pas nouvelle ; les Espagnols la pratiquent depuis
t
le début du XVê siècle, la décision ifficielle date de 1511. Ils ··ont établi
!
du reste, que le travail d'un esclave noir représente celui de quatre Indiens
,1..,\\
(2). Donc le rapport nombre d'esclaves égale richesse n'est qu'une déduction
!
logique.
L'idée martresse se résume en ceci ,
'
1
Plus les hlbitants ont des esclaves, plus ils font de sucre, or c'est en fai-
i,.
sant beaucoup de sucre qu'on devient riche (3).
.,
.f
DUTRONE LACOUTURE montre à propos de Saint-Domingue que la culture de la canne :1
a toujours exigé un tr~s grand nombre d'esclaves et des établissements
1..
considérablespOur la récolte et pour la prépar~tion des produits (4). Il n'est J
donc pas étonnant que la classification des habitations sucreries soit fonc-
,
tion <lu nombre de t8tes d'esclaves employés.
.. ~
1
(1) LEON (P.), Marchands et spéculateurs dauphinois dans le monde antillais
du XVIllè siècle. Les Dolle et les Raby, p.23.
1
i
,
SAINTOYANT (J. de), op. cit., p.244.
r
~
"Il est à remarquer que tout le travail se fait en ce pa,fs par des Nègres.
Les plus riches d'entre les habitans sont ceux qui ont
le plus de Nègres,
1
car plus ils en ont et plus ils font du sucre, et ce n'est qu'à faire beau- f
coup den sucre qu'on devient riche en ce pa,fs" ''Mémoire de l'estat présent
t
de l'isle de la Martinique", 21 Avril 1 696, AN Col C8A9 folio 279-200, ci t· ~
par SCHNAKENBOURG (C.), La crise du système esclavagiste. 1835-1847, p.46.
~
Nous citerons queslques extraits de ces déclarations en annexes.
!1
~
(4) Dutrône Lacouture, Précis sur la canne et sur les moyens d'en extraire le
sel essentiel,
p.333.
AN ADXI 77.
,
. ~J
1
t
195
1
A la fin du XVIIè siècle, une sucrerie martiniquaise moyenne emploie 1
120 esclaves (1). Au début de la cr;~~n 1763, due à une pénurie de main-
li-l
d'oeuvre, une sucrerie dite riche est celle qui emploie 45 esclaves et plus
.J
elle est malaisée quand elle emploie entre 25 et 44 esclaves et est absolu-
1
ment en mauvais état quand elle emploie moins de 25 esclaves (2).
l,
Il s'agit sans doute des esclaves de jardin ou de houe (3).
[
Une sucrerie guadeloupéenne moyenne: 181 carrés de terres dont
57,2 en cannes, emploie 112 esclaves dont 85 adultes en état de travailler
(4).
1
.
Les travaux de Gabriel DEBIEN sur Saint-Domingue révèlent l'impor-
1
t1
tance numérique des ateliers, de quelques habitations sucreries connues qui,
~,
aux dires de l'auteur, sont des sucreries moyennes: la sucrerie Cottineau
1
l
compte 133 esclaves en 1753, 150 en 1777, 173 en 1784, 147 en 1789 , la su-
1
crerie Fogche à Jean Rabel dans la plaine du Cap (5), compte 589 esclaves
en 1779, 512 en 1787 et 507 en 1792. Stanislas Foache bénéficie d'une situ-
1
ation exceptionnelle. Il est à la tête du comptoir colonial familial ; son
frère Martin au Havre fait les armements et-p-répare les campagnes négrières.
Il est donc bien placé pour être ravitaillé convenablement.
![-
esclave~~·----~I
La sucrerie Galbaud du Fort à Léogane compte 160 à 180
entre 1760 et 1788 (6); la sucrerie Boutin au Cul-de-Sac, 200 en 1787-1788 ;
1
la sucrerie Bréda en Haut-du-Cap, 120 en 1790 (7) ; la sucrerie Raby aux
1
f!
t
(1) GAUDI (G.) et GLISSANT (E.), "Evolution de l'économie sucrière en Martini-
t
que du XVIIè siècle au XXè siècle", ACOMA, nO 1, 1971, pp. 58-76, p.6.
[1•..•.•
L'information est du P. Cabat, Nouveau voyage aux isles francaises de l'A-
.
mêrigue, qui constitue les mémoires de l'auteur pour les années 1693-1705.
r
(2) Précis du Mémoire envoy~ à Mr'le Duc de Choiseul concernant l'imposition à ~
établir sur la Martinique. AN, COLC8A65 folio 246. Pour les autres habi-
t
tations, la classification est la suivante: 1ère classe, 30 esclaves et
plus, 2è classe, 15 à 29 esclaves, 3e classe, moins de 15 esclaves.
(3) Il s'agit des escla"es du grand .a.telier, c'est-à-dire assez forts pour sup-
porter les gros travaux. Le jardin désigne le terrain planté en cannes.
(4) SCHNAKENBOUliG (C.), Les sucreries de la Guadeloupe, P. 88-89.
,
•
s
(5) Pour. ces deux premi-ères sucreriee voir: DEBIEN (G.), Planta.tions et escla.- 1
ves à Saint-Domingue. Publication Section d'hi!toire, Université de Dakar,
f
n03,'196'2, 184p. '1/La sucrerie Cottineau 1750-1777, pp.9-82. Cf.p.19.
"'l
2/ La sucrerie Foache à Jean Rabel et ses esclaves 1770-160Z, pp.e3-171.
Cf. p.153.
(6) DEBIEN (G.), Une plantation de Saint-Domingue, la sucrerie Galbaud du Fort
1690-1802, p.39 et p.42. Idem, Les esclaves aux Antilles francaises XVIlè-
XVIllè siècles), p.318.
~
1
.-.~
(7t. Idemt--Les esclaves 8U:l:C Antilles ••• 1 P. 320.
\\
196
Vases, 147 en 1785 et 92 en 1787 (1) j la sucrerie Jean Pasquet à Montrouis
compte '12 esclaves en 1788 (2).
.~
D'Où l'importance des esclaves dans la valeur patrimoniale des habitations
sucreries 1 Christian SCHNAKENBOURG note qu'à la veille de la Révolution, les
esclaves représentent '1 %en moyenne de la valeur patrimoniale sur les
habitations sucreries guadeloupéennes (3). En 1788, ils représentent 40,88 %
de la valeur d'inventaire des biens de Jean Pasquet (4).
cela s'explique par le fait que, du point de vue des colons, l'achat
des esclaves correspond en gros à l'investissement capitaliste en installa-
tions et équipements. Les co~ts d'entretien correspondent donc· aux débourSés
. salariaux dans le système industriel. Or, précisément, d'après les témoigna-
ges et les travaux divers dont celui de Gabriel DEBIEN (5), le traitement
des esclaves dans les rles françaises est déplorable : ils sont logés dans de
misérables cases construites avec des matériaux le moins onéreux et sordi~
dement meublées, ils sont misérablement vêtus.
Su~ le plan de la nourriture, pas même le minimum prescrit par le Code noir
(6) n'est atteint.
,
Comme le souligne le gouverneur Fe~elon en 1764, "l'habitant en
général est comme le négociant de France, il ne calculè: que l'intér~t du ,
(1) LEON (P.), op. cit., p.69.
(2) DU HALGOUET (H.), "Inventaire d'une habitation à Saint-Domingue", Revue
française des colonies, n0 45, 1933, pp.215-250, p.227.
La surface plantée de cannes est de 72 carreaux dont 17 en grandes cannes;
24 en premiers rejetons; 19 en seconds rejetons; le surplus en troisièmes
rejetons. Ibidem, p.226.
(3) SCHNAKENBOURG (C.), Sucreries de la Guadeloupe, pp.83-84.
(4) DU HALGOUET (H.), op. cit., pp.232-233.
}
1
Fontrouis
013 6001.
Fonds et
la Hatte Robert
200 000
•••• 1 293 600 l~
bâtiments
.
eafe-t~fie)
50 000
2 392 810L.
la Maison à St Marc
30 000jeSClaveS978 1001.
autres
(345)
Animaux
68 110
r-:eubles
53 000
(5) DEBIEN (G.), Les esclaves aux Antilles françaises(XVIIè-XYlIIè siècles),
pp. 171-248. On trouve dans ces passages, les renseignements sur le loge-
ment, les vêtements et la nourriture. On voudra bien s'y reporter pour les
détails.
(6) L'article 22 du
Code Noir prescrit aux maîtres de distribuer à leurs esclô
ves adultes deux pots et demi (3 500gr) de farine de manioc et deux livres
de boeufs salé ou trois livres de polsson par semaine.
197
moment ; faire beaucoup de revenus, voi là tout ce qu'il recherche" (1).
L'esclave noir, passivement courageu=~~-à la merci de son martre produit
dQncplus qu'il n'en profite (2).
Le caractère exploiteur du régime est par conséquent flagrant. Deux
facteurs déterminent la richesse du propriétaire, le temps et la force des
esclaves car c'est sur le ménagement et sur l'emploi de ces deux facultés
que dépend la production (3).
A défaut d'un calcul précis de rendement, c'est sur le nombre de
journées employées au
travail et sur la force des esclaves au travail que
repose le produit de l'habitation. Les colons font donc des calculs précis en
fonction des journées de travail et qui sont susceptibles de leur indiquer
le secteur à dynamiser en vue de sa rentabilité.
C'est pour répondre à ces exigences que
le jardin est divisé en pièces géo-
métriques bornées et numérotées. Les bornes mesurant exactement la superficie
des pièces, la superficie idéale étant de 4 carreaux soit 4,5 ha.
Le calen-
drier de travail est établi en fonction d~ la superficie que peut fouiller,
sarcler et couper un esclave de force. moyenne.-Il est, comme nous l'avons
signalé, exprimé en journées de travail.
Le premier travail consiste à soustraire des 365 jours de l '
,
les jours d'inactivité pour n'en con~erver que les jours de travail. Ainsi,
une fois déduits les 52 Dimanches, les 16 fêtes de l'année et au moins 17
jours de pluie, Dutrône LAOOUTURE para!t estj,mer l'année à 200 journées de
travail (4). Quant au Citoyen Avalle (5~, il l'évalue à 300 journées, car il
(1) Fénelon au duc, Fort Royal, 11 Avril 1764.
AN Col C8A66 folio 32.
(2) Les frais d'explOitation et de remplacement de l'habitation Ladebate sont
évalués à 70 000 livres.
(3) Dutrane LAOOUTURE, op. cit., pp.334-335.
(4) ~
, Ibidem.
(5) Citoyen Avalle, Etablissement et
mouvement d'une sucrerie en brut de la
dépendance du Nord de Saint-Domingue en 1788, dans Notice sur les colonies
anglaises. géographie. histoire. population. gouvernement. justice. ins-
truction,publigue. cultes. finances. commerce. navigation. agriculture,
industrie. P et T. forces miliiaires. Paris, Berger Levrault et Cie, 1883,
in 8 0 •
198
ne compte que 13 jours de fête au lieu de 16 et, de plus, ne prend pas en
compte les jours de pluies.
.~_
Pour trouver le nombre de journées effectives de travail, il ne
reste plus qu'à multiplier le nombre de jours d'activité de l'année par le
nombre d'esclaves au travail. Ainsi, le produit annuel (1) des 95 esclaves
de jardin de l'habitation Ladebate à Saint-Domingue est-il le fruit de
26 600 journées de travail. Les 125 esclaves d'une sucrerie en brut dans le
Nord de Saint-Domingue (~)donnent en 1788, 33 333 journées de travail. Le
mouvement de cette sucrerie donne une idée du calendrier des travaux. Il
s'agi t des travaux allant de
la culture de la canne à la fabrication du
o
~ere.
,
Tabléaû n030
i
Mouvement d'une sucrerie en brut dans la partie du Nord de Saint-Domingue en
1
,llli.
,.1.....:....
,.
.,
1. Emploi des travailleurs à la culture de la canne (pour les alignements et
r~
petits fossés d'égo~t)
45 jours d'alignement
••••••••••••••••.••••••••••• 285 journées
240 jours de travail
.
~.!
II. Travaux de
la plantation (5pièces, 125 cultivateurs, 21 carreaux)
~.•
2 954 journées ~à raison de 4 journée 1/2 pour 4 carrenux, soit 23 jours
r
. 5. hui taine x 125)
i
!
III. Travaux d'entretien des
ièces de cannes à
la sui te de leur
lantation
(cela se fait dans les 6 premiers mois
ti
-
1. travaux de recoupage : 20 jours après la plantation
î
(1 journée de 100 travailleurs) ••••••••••••••••••••
100
- 2. travaux de retour et de sarclaison (ou second recoupage)
---44~O~~urs après la plantation, faits par le petit atelier
pendant 2 jours •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
250
- ~. travaux de forte sarclaison, 2 mois après la plantation,
occupant une partie du grand et du petit atelier (100
personnes). pendant 2 jours..............................
200
j
~:
,l
t
(1) La production est de 235 666 lb de sucre terré (7 100 formes de sucre ter-
~
ré de 33 lb 1/3) pour l'ancienne fabrication et de 402 500 lb de sucre
'
brut quand elle a commencé à rouler en brut.
AN ADXI77.
1
(2) En 1788, cette sucrerie produit 450 000 lb de sucre brut et 150 000 l de
sirop. Elle: est composée de 105 mulets, 16 boeufs et de 200 esclaves au
total. Elle contient 100 carreaux de terres (il n'e~t· pas précisé s'il
s'agit de lb ou de livre monnaie).
199
- 4. travaux de troisième sarclaison, 3 mois après
la planta-
tion, occupant une partie du grand et du petit atelier
(100 travailleurs) ••••••••••• ,,~......................
200
_-:-_5~ 4~ sarclaison : 2 jours pour les 100 travailleurs........
200
6. travaux de la cinquième sarclaison, 5 mois après la plan-
tation : 2 jours pour les 100 travailleurs...............
200
-1. travaux de la sixième sarclaison, 6 mois après la planta-
tion, occupant 100 travailleurs pendant une journée......
100
250 journées x 5 pièces
6 250
IV. Entretien de 7 pièces pour aypir 5 pièces de grandes cannes
les travaux
.
des deux dernières plantes en fin d'année de 1 250 .journées l'une
2 500
V.
Journées des travaux de cannes en rejeton
1. Labourage des 5 pièces de cannes appès leur prem~ere coupe
et leurs sarclaisons ••••••••••••••••••••• 7 '45 journées
10 345
2. sarclaison des 2e et 3e rejetons de canne 3 000 journées
VI. Journées des travaux des coupes de cannes,-roulaison et fabrication
du sucre.
1. Coupe des pièces de cannes, leurs roulai~-et la fabrica-
tion du sucre ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
10 110
VII.Journées d'enfutaillement des sucres, elur égoût de sirop et leur
charrois de l'habitation à l'embarcadère.
1. transvasement des sucres des canots
dans 300 barriques........
60
2. transvasement des sirops du bassin d'égoût des barriques dans
le grand bassin•••••••••••••••••••••••• , . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
20
3. pesage des sucres, transport des 300 barriques de sucre à l'em-
barcadère......................................................
209
Le
nombre de journées d'emplois sur l'habitation étant de 41 525,
- - - -
i l est parfaitement clair que 10,.14 % du temps de travail sont consacrés aux
travaux sucriers. Les 14 192 journées restantes sont employées aux autres
travaux de l'habitation (1). Mais au total, l'habitation perd 12 475 jouFnées
(1) Il s'agit de 11 400 journées produites par les 38 Noirs non employés à la
culture des cannes dont:
350
employés aux réparations des bâtiments couverts de paille de cannes
320
employés aux réparations et entretiens des chemins publics
50 employés aux charrois des ob~ets nécessaires à l'entretien de la manu-
facture et transport des vivres
5100
pour les travaux de l'intérieur de la manufacture, des barriques et
bailles à sucre, des fourrages nécessaires à la nourriture des bes-
tiaux et autres emplois de la savane
3000
journées pour garder les vi vres
3300
journées de service domestique à la case principale
2012
journées pour le vivrier.
200
de travail. Ces journées de non valeur provie~~ent de l'inactivité des 37
Noirs absents journellement dont 12 mal ~~et 25 négrillons des deux sexes
(11 100 journées) à laquelle s'ajoutent les joumées accordées aux 125 Nègres
de jardin pour travailler à leurs propres places à vivres et les journées
d'interruption de travail en cas d'orage.
Le travail journalier est long et harassant. Justin GIROD de Cha~
tta~s qui a séjourné pendant cinq à six mois sur une habitation près du Cap
français au cours de ses 3 années de vie à Saint-Domingue (1780-1783), expli-
que ainsi le rythme journalier du travail servile :
"le travail des Nègres commence avec le jour. A huit heures ils déjeunent.
-Us se
"
remettent ensui te à l'ouvrage jusqu'à midi. A deux heures ils le re-
prennent jusqu'à la nuit
quelquesfois m~me jusqu'à dix et onze heures du
soir"(1).
Gabriel DEBIEN apporte quelques renseignements complémentaires à
ce schéma général
il précise par .exemple que le lever a lieu à 5 heures'
du matin. Au total, la journée normale de travail· est évaluée à une douzaine
d'heures • elle s'achève ordinairement à 20 heures;- Mais, "un grand effort
était demandé au moment de la coupe des cannes ou quand les pluies ou des
,".
sécheresses prolongées avaient réduit le temps de planter"(2), ou encore
quand les maladies et les morts d'esclaves non remplacés aussitat réduisent
l'atelier, le colon étant contraint de soutenir les travaux avec ceux qui
restent pour faire plus de sucre afin d'acheter de nouveaux bras, ou enfin,
quand le gérant, l'économe et les commendeurqont une réputation de bon
rendement à soutenir (3). La description de Justin GIROD de Ch~trans corres-
pond certainement à un de ces moments d'accumulation des travaux.
A la Martinique, le gouverneur F~nelon, sans donner
la durée du
travail journalier, n'en souligne pas moins l'intensité: "la plupart des
habitans les nourrissent mal, et les font travailler au delà de leurs forces,
pour faire plus de revenus ••• Les Negresses enceintes, on les fait travailler
Girod de Chantrans (J.), Voyage d'un S,uisse dans les différentes colonies
d'l~érigue, présenté par Pierre Pluchon, Lettre IV, St-Domingue, 1782, pp.
124-125.
DEBIEN (G.), Les esclaves aux Antilles françaises ••• , p.140, 149 et 153.
DEBIEN (G.), gp.. cit., p.153.
f.
1
l
201
dans cet état-là, jusqu'au dernier moment, avec rigueur, et souvent on les
maltraite"(1). Accablés et surmenés, le.c<.~aves sont exposés à la mort. Il
n'es,tdo.nc pas .étonnant de constater une très forte mortalité parmi les Noirs
S à 6 %par an, les enfants compris, au cours des années ordinaires, c' est-à-
dire sans épidémies, estime Gabriel DEBIEN (2). Quant à Pierre PLUCHON, il
situe la moyenne annuelle aux alentours de 8 % (3).
Cette forte mortalité n'est pas compensée par les naissances; le
taux est inférieur à 3 %(4). Cela provient de ce qu'indépendamment d'un cer-
tain nombre de considérations comme l'intensité du travail qui en énervant
les esclaves agirait sur le germe(S), ou la disproportion entre le nombre
"
'"\\ieshommes et celui des femmes (6), d'illusoires calculs de rentabilité font
privilégier le souci de travail par rapport à celui de la reproduction. Cette
explication de Justin GIROD de Chan'irr;;ns résume bien la mentali té :
"le propriétaire qui le rejette comme contraire à ses intérêts,
calcule la perte de temps de la mère pendant la grossesse et pendant qu'elle
nourrit, laquelle estimée en argent surpa~se déjà·la valeur de l'enfant, il
calcule encore les risques de l~ perdre, sa nourr~tiire et son entretien jusJ.
qu'à l'~ge où il peut ~tre utile, et croit ensuite trouver du bénéfice à
remplacer les nègres qui" lui manquent par des nègres nouveaux, en Ige de tra-
vailler"(7).
M~me ceux qui optent pour le mariage- des esclaves comme le comte
d'Arbaud de Capesterre en Guadeloupe, sont poussés par le même souci de renta-
bilité. Ils sont persuadés que le libertinage introduit le désordre dans le
travail. Ainsi s'explique le comte d'Arbaud en 1777 :
(1) Fénelon au duc, Fort Royal, le 11 Avril 1764. AN Col C8A66 folio 31.
(2) DEBIEN (G.), op. cit., p.34S.
(3) PLUCHON (P.), Voyage d'un Suisse dans différentes colonies d'Amérigue,p.72.
'4) Idem
Ibidem, p.70, p.n.
(S) Fénelon au duc, Fort Royal, 11 Avril 1764. AN COLC8A66 n065 folio 31.
(6) DEBIEN (G.), Une plantation à Saint-Domingue, la sucrerie Galbaud du Fort
1690-1006, p.92.
(7) GIROD de Ch~~tra~s (J.), op. cit., lettre V. Saint-Domingue 1782, p.133.
202
"Aussi suis-je d'avis de marier les nègres pour éviter les courses
de nuit qu'ils font pour aler (sic) v~~~eurs maîtresses dans les habita-
tions éloignées. Il arrive qu'après avoir couru toute la nuit pour chercher
une chose bien naturelle, ils retournent au point du jour à leur habitation
au moment qu'on appelle les nègres pour aller au travail d'obligation: sou-
vent se sentant incapable de travailler la journée, ils restent maison chés
leurs belle ••• "(1).
Ceux qui optent pour une politique nataliste sont ceux d'entre les
colons qui sont convainCUs que le nègre créole est de meilleure qualité que
le nègre d'Afrique. Le créole étant né dans l'esclavage, est plus adapté aux
o
~tonditiqns climatiques et sociales du milieu, tandis que le nègre d'Afrique
doit vaincre beaucoup d'obstacles avant d'être utile.
Mais ces calculs qui ramènent le mariage et les naissances à un élevage hu-
main n'aboutissent pas forcément. Il faut nécessairement l'adhésion des escla-
ves.
Or, généralement persuadés qu'aucune sorte d'attachement ne peut
nartre de ces mariages, le martre pouvant d'u~ment à l'autre vendre le
père, la mère ou l'enfant, ils ne songent pas toujours à se reproduire. Comme
le résune très bien Justin GIROD de Ch_antrans, ils préfèrent obéir plus
agréablement à leurs penchants plut6t qu'à se marier pour se priver
rement de la seule liberté qui leur reste (2).
Ik>nc, devant la pénurie de main-d'Qeuvre du fait de l'insuffisance
de l'auto-reproduction, qu'ils soient natalistes ou non, les colons ne peu-
vent se passer de renforts venus du dehors afin de conserver l'effectif de
leur main-d'oeuvre à peu près constant. Or, c'est parmi les nouveaux que les
pertes sont les plus considérables: la moitié de ces esclaves meurt avant
la fin de leur acclimatation. Les nouvelles pertes imposent le remplacement
(1) "Observation d'un habitant des u is1.es françaises de l'Amérique, né en Fran-
ce, militaire depuis son enfance et que son service a conduit dans les
dites isles où il a commencé à travailler à l'agriculture avec des nègres
nouveaux".
AN, ColF 412 pièce 1.
(2) Voir GIROD de Cha~7.rans (J.), op. cit., Lettre VI, Saint-Domingue, 1782;
pp. 1'3-137.
203
avec toujours des risques de nouvelles pertes. Les calculs de rentabilité
expliquent le mauvais traitement subi Dar les esclaves. C'est pourquoi tant
...~
que la traite était légale, les colons ont toujours eu besoin de nouveaux
bras au risque d'aggraver les dettes négrières.
Mais comment expliquer que, malgré l'ampleur du crédi t qui mobilise
apparemment une partie du capital commercial, les négociants soient demeurés
continuellement les ardents défenseurs de l'esclavage et de la traite né-
gri~re ?
___?_~t Un ~rétexte pour les négociants d'accaparer la production.
La question de l'esclavage est l'un des rares terrains d'entente
entre colons et négociants. Mais les motifs qui président aux choix sont
différents. L'esclavage met en branle une série à'intér~ts en métropole. La
conati tution de cargaisons de traite a contri ~àla création d' acti vi tés
productrices en France (1). Pour les armateurs, les expéditions négrières
tont partie du domaine privilégié de la navigation mari time nationale. Car ~-i
en EUrope, la marine française était de peu d'importance par rapport aux
autres (anglaises, hollandaise, etc.).
Politiquement, la traite négrière entretient la présence française sur les
c8tes africaines à une époque où les Anglais Jouent au despotisme maritime,
à l'accaparement colonial et commercial.
,~_. M~s pour nous, le point le plus important consiste à mesurer l 'impor-
tance des esclaves dans les tran~actions entre négociants et colons.
Aux tles, l'esclave noir ne joue pas seulement le r~le de marchandise-monnaie,
il est le principe m~me de la richesse. Non point parce que son haut prix par
rapport à celui du sucre déséquilibre comme nous l'avons vu le niveau quan-
ti tatif des échanges, mais bien parce-que sa force de tarvail est la condi tian
m~me de l'extension des cultures et de l'abondance de la production elle-même
condition du bon prix des sucres.
En effet, lorsque les négociants insiBtent sur l'extension des cultures et
."'-----
l'abondance des productions de la terre aux colonies, c'est en considération
de-cette idée bien connue selon laquelle "entre l'abondance et le bon prix,
il y a un rapport B~ intime que l'un ne peut exister sans l'autre"(1). Le
prix Be soutient par l'effet de l'abondance du produit, le bon prix en provo-
que le débi t.
En ce qui concerne le sucre, cette notion d'abondance et de bon
prix est fondamentale. Nous verrons plus loin que cette denrée intéressant
i
avant tout les échanges inter-européens de la France a joué un grand r~le
f
dans la balance commerciale. On sait par exemple que, mercantilistes consommé: t
les néSociants ont été à la fois les ardents défenseurs de l'exclusif et de l, t
J
notion d'une balance commerciale toujours favorable. L'abondance de la pro-
i
duction sucrière coloniale s'inscrit donc dans cette idée profandément ancrée
dans l'esprit des contemporains selon laquelle les colonies doivent fournir
à leur métropole des objets destinés à la vente en Europe afin de lui donner
les moyens de solder avantageusement son commerce extérieur en attirant
l'argent des autres nations.
Elle accroft de ce fait, la capacité de la métropole à constituer
son surplus d' exportation(2), donc ses pro fi ts. La notion de bon prixpai na
cipe du m3me intérêt. Le bon prix aacrott le profit dans la mesure où la
métropole peut exporter de grandes quantités de sucres à des prix plus élevés t~
que ceux pratiqués aux colonies sans craindre une diminution des quantités
,
!~:
exportées du fait de la régularité des importations,et s~s que ces prix de
1
,t
vente apparaissent très excessifs aux yeux des consommateurs européens.
1~
-11- est Clair, comme le montre RalphDAVIS, que la baisse considérablE!
des prix des produits des Amériques en les rendant accessibles à un plus
1
i
grand nombre de consommateurs, en fi t "pratiquement des articles de première
!
1
i
,
(1) "Mémoire sur le commerce en gén éral, et celui de l'Amérique en particulier 1
relativement à la demande de la traite des Nègres, et du privilège exclu-
:
sif de leur importation, faite par la Députation de Bordeaux, le vingt-
:
cinq février dernier"(1790), in Mémoire sur les colonies de l'Amérique Mé-:
ridionale. et sur la quest~on du jour. Par le Comte de BEHAGUE, Paris, 7
Mars 1790, pp.7-8.
AN Fi 1653.
.
(2) Voir 'lfFra p. 31 1
2C5
nécessité plutet que des articles de luxe"(1). C'est dO!1C à son bon prix et
non, comme l'explique Jean de SaintoYél.~"r"qui écri t que "la quali té du raffina-
geenFrance était supérieure à celle de l'étranger"(2), que le sucre français
a supplanté celui d'Angleterre sur les marchés européens.
Mais l'avantage le plus significatif reste la réalité du finance-
ment de la production. Les colons n'étant pas à mesure de l'assurer par eux-
m'mes, les véritables bailleurs de fonds sont les négociants. Cela s'effectue
par le biais des livraisons à crédit d'esclaves. Les dette coloniales sont
énormes: en 1785, les dettes actives de huit armateurs nantais aux colonies
s'élèvent à 8 002 678 lt (3). En 1792, le crédit en biens-fonds monte à
~3--{)(}() O()O de 1 t ; les créances les plus élevées étant celles de Bouteiller
12 000 000 de lt, de Drouin, 7 000 000 de lt, d'Amous, 5 000 000, de Mosseron,
5 500 000, de Çhaurand , 4 500 000, de Montaudouin, 2 000 000 et de Langevin,
2 000 000 (4).
Le$ plus importantes créances marseillaises aux rles à la fin du XVI11è siècle
sont les suivantes (5) :
L. Angleys
250 000 1
J .J. Chauvet
250 000
Clément frères
600 000
Hugues l ' ain~
712 000
D.J. et G. Audi bert 1189 600
D. Audibert
1 281 000
En 1792, 228 habitants de Saint-Domingue doivent 1 2GO 000 livres à
un armateur du Havre (6). c~te colonie doit 7n 1788 au titre de l'importation
des Noirs et des marchandises européennes environ 99 000 000 de livres (7).
Les capitaùx.de~la Maison Nairac de Bordeaux, aux rles sont évalués à
(1) Ralph DAVIS, A commercial revolution, English overseas trade in the Seven-
teenth and Eighteenth centuries, Historical Association, 1967, p.10, cité
par Joseph Luikori, "la traite négrière et les économies atlantiques de
1451 à 1870", in Traite négrière du XVè au XlXi siècle, pp.58-91,p.89Jiote;1
(2) SA1NTOYANT (J. de), op.ctt.,-±omeJ, p.237.
(3) RINCHON (D.), Le trafic négrier note p.235, cité par Alain CARRIERE, Négo-
ciants marseillais, Tome II, p. 983.
(4) CARRIERE (A.), op.cit., Tome II, p.983.
(5) ~
Ibidem, Tome II, p.983.
(6) BREARD (C.), Notes sur Saint-Domingue tirées des papiers d'un armateur du
Havre 1700-1802, p.10.
(7) PLUCHON (P.), La route des esclaves.-. p.290.
2 668 333 le La éJ12 i son Gr-,; s dev:-_i t avoir environ 3 000 000 bloqués aux îles
(1). Or, "la gest~()n de l'habitation ou la consignation de SES produits est
généralement l'étape préalable à tout investissement foncie:- du négociant de
la métropole aux iles"(2). func, la contrepartie de cette opération est l~
retour vers la France de la presque totalité de la valeur produite sur les
habitations par le travail des esclaves.
Cela a paru aux yeux des armateurs comme la solution aux difficultés de re-
couvrement des fonds. Théoriquement, la loi autorise le cré~~cier à saisir
le mobilier, les biens-fonds et les denrées tant en magasins que sur place.
Mais, ces disposi~ions se sont révélées inefficaces à cause d'innombrables
formalités dispendieuses ét surtout par de nombreux procès préliminaires.
Ainsi, pas même un créancier si opinâtre soit-il n'osait engager
la procédure (3). Par conséquent, la dette: négrière ou le financement extérne~
.
de la production permet aux négociants de prendre en main les intérêts des
colons. Ce qui leur assure des récoltes régulières en échange des fournitures
nécessaires à la vie
des plantations. Certains colons absents laissent leurs
pouvoirs à des négocian~~ des ports coloniaux car, possédant des navires né-
griers ou associés ~ des armateurs de négriers, ils sont bien placés pour
fournir à temps la main-d~oeuVTe manquante.
2 - 2/ Dettes de cargaisons et liaison d'habitation: le contrôle de la
---------------------------------------------------------------
f
Dans une économie où l'endettement est structurel et irréversible,
la question de contrats entre négociants et colons mérite une étude particu-
lièrement approfondie.Elle seule-peut permettre d'identifier les véritables
martres de l'économie sucrière. Cette patiente quête de lumière nécessite un
travail lo~~ dans les fonds des notaires des colonies et dans les papiers de
plantation que les contraintes de temps ne nous permettent pas d'entreprendre.
A défaut de cela, nous citerons quelques cas connus, l'important dans ce
- - ~ .
travail étant de comprendre le fonctionnement du système.
(1) BUTEL (~.), "Le trafic colonial de Bordeaux", p.302 sq., cité p2.r Charles
CARRIERE, op. cit., Tom~~II, p.9E3.
(2) GIROD de ChantransJ.), ou.cit., Lettre XXI, S,,-int-Dcmir.R"'.le 17,'-~2, p.185.
LES col~ns ap~araissent aux yeux des ~égociants comme des partenaire~
.,
avec ~ui les aléds l'e~portent sur le bénéfice; toute négligence de leur
part et les avances consenties risquent de l'être à fond pt'~'du. Or, leur sta-
tut de créanciers institutionnels ne semble pas les avoir effrayés. C'est
qu'en effet, en ho~~es d'affaires avisés, les négociants ont ~Q~vcr+'i très
habilement ces avances en arme d'une stratégie nouvelle. Tirant les consé-
quences logiques de leur position vis-à-vis des propriétaires, ils agissent
de deux manières.
Atix uns, ils imposent les contrats de liaison ou liaison d'habitation. Il
s'agit d'une obligation faite au colon endetté de livrer toute sa récolte
à son négociant créancier (1). C'est ce que le Comte de Blénac et Jean Jacques
Mithon nomment "bau (sic) à ferme"(2).
Il semble qu'initialement, le contrat portait sur une certaine quan-
tité de sucre et non sur la tota1ité de la production, que le colon est obligé
de livrer sans diminution ~algré la hausse du prix et dans les échéances dont
il a fait sommation au bailleur. L'accaparement total de la production est
venu sans doute sanctior~er l'accumulation des dettes.
Ce négociant créancier est appelé commissior~aire ; il prépare les
campagnes négrières et vend les denrées en métropole. "@Ieeil':le cas de la
maison Henry Romberg, 3apst et Compagnie à Bordeaux. Elle est en relation
avec 63 habitations à Saint-Domingue: 16 sucreries, 31 indigoteries et coton-
neries et 16 cafeteries. Les 16 sucreries sont ainsi réparties: 9 à Saint-
Marc, 4 au Port-au-Prince, 2 à Léogane et un au Port-au-Pai~(3). Le négociant
bordelais François Eonnafé est le commissionnaire de Jean Lucado~, colon de la
Guadeloupe, établi à la Trinité du Lamentin (4). Les Cabeuil, Destouches,
Beaunay et Laborde à Saint-Domingue traitent avec les frères Foache du Havre
(S). Le trafic des propriétés de M.Lugé à Saint-Domingue se fait avec
la
(1) SCHNAKENEOURG (C.), La crise du système e3clava~i~te 1835-1847, p.126.
- - 0 ) "Réglement fixant le mode de paiement du sucre", 11 Avril 1]14, AN,ColG9AH
(3) THESEE (F.), Négociants bordeLüs et colons de Saint-Dominlrue."Liaisons
d'habitations", la :naison ;-Iem'Y Romber2', :3apst et Cie 17è3-1793, p.46.
r:ais pour les détails, on voudra bien lire tout le chapitre II, PP.38-S0.
(4) BUTEL (P.), Les négociants bordelais, l''E.uroDe et les Ees:::lU XnIIè siècle
p. 240.
maison Veuve Jean-B. Lemasne et Jean Préaud à Nantes (1). ~ais comme le
souligne Françoise~(l,ésée, chaque co!!trat réflète une situation particulière.
Dans certains cas, les colons, particulièr~ment ceux qui résiè'·nt en France,
abandonnent complètement le contrôle de leur exploitation au négociant en se
contentant de percevoir annuellement un bail fixe.
C'est le cas du contrat passé le 1er Juin 1771 entre Messire Gaspard, comte
de la Barre, résidant à Poitiers, et l'armateur Jean Isaac Corregeolles pour
la ferme de l'habitation des Vases à Saint-Pierre de l'Archaye à Saint-Do-
mingue. Le bail coûte au négociant 11 000 It par an et il est réductible à
9 000 It en cas de guerre (2).
Dans d'autres cas, le colon garde un droit de regard sur la tenue
des comptes que doit lui présenter à intervalles régulier un colon gérant.
C'est le cas de la procuration de la famille Behotte donnée à Stanislas
Foache, à la t~te du comptoir colonial du Cap de la maison Foache du Havre,
pour la gestion d'une sucrerie à Maribaroux. C'est que son ami Malouet a
épousé 1"lademoiselle Behotte et que les ;'Ialouet sont rappelés en France (3).
En 1773, Madame Le Febvre qui réside en France avec ses filles retire Co
Croiseuil qui gérait son habitation au quartier Morin, sa procuration pour
la dor~er à Stanislas Foâche.
La beauté et l'importance des :;;roè.uits de cette habitatiq:) §urcl.~se à l'épo-
que toutes les sucreries de la plaine du Cap. Stanislas Foache, intéressé
par le volume de cette production et par le fret qu'elle est à même de fournir
sollicite la gérance. Une enquête officieuse révèle les causes de la mauvaise
•
gestion. Le quartier Morin devient donc un den plus beaux fleurons de la
,
mai san Fo ache du Cap (4).
Mais aux colons dont les finances sont les plus obérées selon les
termes de Pierre PLUCHCN (5), le négociant propose le rachat pur et simple
(1) Du HALGOUET (H.), "Inventaire d'une habi ta tian à Saint-Domingue, Revue
française d'histoire des colonies, n 0 45,
i?33, pp.215-250. Cf. p.232.
(2) 3UTEL (P.), op.cit., p.241.
(3) DEBIEN (G.), "Une sucrerie de Saint-Domir-gue et ses esclaves p , :Eulletin dr-
la Société d'Histoire de la ~artiniaue, ~o8, 1957, pp. 1-5 1 , p.4.
(~) 3EGOUEN DEMEAUX (H.), on. cit., p.4E.
(5) PLUCHON(P.), La route des esclaves .. , p.292.
de leurs biens fonciers.
ftinsi l'armateur bordelais Abraham Gradis se voi t
~
contraint d'acquérir de~ plantations pour apurer ses créances: à la Marti-
nique, il rachète en 1773 l'habitation du parlementaire bordelais, le conseil-
ler Prunes Duvivier pour 611 330 It. A Saint-Domingue, il rachète,en 17ï7,
une propriété dont il a la gestion depuis1767 et, en association avec la ~ai
son Bethmann et fils, une habitation au quartier Morin (1). Les Bouteiller
acquière~t de la même manière des habitations estimées de 5 à 6 millior.s de
livres tournois. Il en est de même des Chaurand de Nantes pour des terres
évaluées à quelque 3 millions de livres tournois (2), et des frères Foache
qui acquièrent au quartier Jean nabel, une magnifique habitation de
550 carreaux (3).
Cette formule est proche de celle des négociants qui, craignant.
les avances aux colonies, ont bien vite compris que la solution consiste plu-'
t5t à se f~re
planteurs directement ou par personnes interposées. De sorte
que ce sont les mêmes maisons qui contrôlent les opérations commerciales au
départ et à l'arrivée en France.
Les acquisitions des fr2res Foache, un peu tardives, il est vrai,
s'inscrivent dans cette optique. A côté de la sucrerie de Jean Rabel, Stanis-
las Foache possède en propre une autre de 400 carreaux au TrQll, pr~,,_du Cap
(4). Jacquen LAFFON de Ladebat de Bordeaux possède une habitation à Saint-
Domingue. Le 25 Février 1777, il charge son fils aîné, Philippe Laffon,de La-
debat d'aller gérer cette habitation paternelle et y établir une maison de
commerce (5):en 1786, cette habitation emploLe 95 Nègres de jardin et produit
environ 402 500 lb de sucre brut (6). Charles FROSTIN signale qu'au cours du
XVIIIè sicèle, la noblesse et la bourgeoisie angevines investissent dans les
habitations sucrières à Saint-Domingue (7).
BUTEL (P.), ou.cit., p.240. Le toal de ses investissements a Saint-Domin-
gue, en 1777, s'élève à plus de 700 OOOlt.
(2 ) PLUCHON (P.), La route des esclaves, p.292.
(3) BEGOUEN DD!EAUX (r-1.), .9p.cit., p.45.
(4) Idem
, Ibidem, p.47.
(5) BUTEL (P.), ou. ci t., p. 236.
( 6) "Tableau de l'emploi de 95 i·:ègres travailleurs, oui composent'l'attelier
de l'habitation Ladebate, et qui multipliés par 2[~ jour:; ce tn.vail don-
nent un produit annuel de 26 éDC journées, et tatle::m de la. :i€c.:otte
eue
donne cet emploi dans l'anciem:e et dans le nouvelle fabricè'tion CO::l::2.rQ es'·
dans Précis sur la canne t~t sur les moyens ci 'en extrai re 1'.' sel ,o~sE'"tiel,
Dutrône LACOUTURE. A1\\J, ADXI 77. Ancier:ne!lE':lt, cette surrer:·' roul?},;; ':'r:
blanc. Il roule désormais er. brut.
(7) FHOSTIN (C.), Angevins de modeste condition
(Correspondance' L?D17 17"2- 1 ;-'.) i:: ~<_":_'('.'_',
-
. ,",
r
~~
,. ....
./'
21C'
C'est pour f;:,ciliter le troc entre les colon~ et les négociants que
s'est établie aux îlet'une classe d'intermédiaires appelés commissionnaires,
véri tables {ondés de pouvoir d'une maison mère insta.llée en mét:··pole. Ce
sont les cor~espondants de ces maisons mét~opolitaines. Leur rôle est d'opé-
rer Doutes les transactions commerciales qu'impl~que l'arrivée d'un négrier
ou la constitution des cargaisons de retour.
C'est ce rôle d'intermédiaires que jouent les commissionnaires de Saint-
Pierre en Martinique pour l'ensemble des îles du Vent.
Les frères Reynaud à Saint Marc (Saint-Domingue) sont les COrTes-
pondêxts de la maison Romberg Bapst et Cie de Bordeaux. Ces correspondants
ont même une part d'intérêt dans la société, composée de parents ou d'anciens
commis du négociant.
Nous possédons grâce à Paul BUTEL, quelques exemples de ces liaisons fami-
• liales entre maisons bordelaises et commissionnaires installés aux fIes.
La maison David Gradis et fils est en relation avec deux maisons
aux fIes, l'une sur la côte sud de Saint-Domingue, la maison Mirande et MendèS
et l'autre à la Martinique, la maison Mendès et Gradis. Gradis et Mendès
sont les cousins de David Gradis ; Mirande est un ancien commis de la maison
mère. François Lavaud trouve en ses fils, Bernard et FrançsJô, de précieux
associés au Cap. Jean-Baptiste Journu passe à Saint-Domingue après la guerre
de Sept Ans pour soutenir l'activité de son père, l'armateur BonRaventure
Journu, et celle de son beau-frère Pierre Boyer-Fonfrgde (1).
C'est aussi le cas de Stanislas Foache qui 4irige au Cap, la vieille maison
de commerce familiale, "Veuve Foache et fils", tandis que son frère, f'lartin,
fait au Havre, les armements, prépare les campagnes négrières et vend les
denrées coloniales (2).
~ès 1764, les négociants cte Saint-Malo, Grand-Clos~1eslé et ses beaux frères,
...
le choisissent pour ~~nsignataire de leurs négriers. Il rempli t le
meme
office pour M. de MEAUX (3).
(1) BUTEL (P.), op.cit., pp.235-236.
(2) DEBIEN (G.), "une sucrerie de Saint-Domingue et ses esclaves ••. , p.3.
(3) BEGOUEN DEMEAUX (M.), on.cit., p.20.
Qu~~t à une n~i30n comme Zolie~ et Compagnie de ~arseille qui n'a
~...
pas de correspondant aux îles, ses opérations sont "confiées à un capitaine
géreur, muni d'instructions détaillées et rémunéré par une commis2~on de six
pour cent sur le produit des ventes". C'est le cas du capitaine Ar.toine ICARn,
parti en 1781 sur le navire la Paix. Il 't'envoie le navire à Marseille 2.Vec 11:1
premier chargement de denrées coloniales, sous le commandement de son second,
Celly, lui-même restant à la Martinique pour surveiller la rentrée des
fonds et préparer la seconde cargaison de la Paix, qui revient à Saint-Pierre
l'année suivante"(1).
Les commissionnaires installés aux rIes perçoivent pour leur fonction une
commission portée au débit du colon: les frères Reynaud perçoivent une com-
mission de 5 %de la valeu~ des ~roduits estimés à Saint-Marc.
En métropole,
toutes les opérations entre le négociant commissionnai
re et le colon sont inscrites sur un compte courant. Ce compte est ouvert
par le négociant au bénéfice d'_l colon. Les produi ts de vente sont inscrits
au crédit et les fournitures faites au colon, au débit. Si le compte est
débiteur, le négociant fournit au colon les avances nécessaires à la poursuite
de son exploitation.
Donc, seul le négociant assure la liquidité du système. Les frais d'expédition
sont à l a charge du colon ; à cela s' ajou tent les frais de V(il.lh Le ·b-énéfice
réel du colon est le résultat de la déduction de tous les frais; la diminu-
tion du poids du sucre à la vente du fait du coulage et des avaries ainsi que
l'écart des cours entre les monnaies sont préjuàiciables au colon (2) •
•
"
(1) Pour tout ce qui précède, voir Louis DERMIGNY, Cargaisons indiennesSolier
et Cie 1781-1793, Tome l, p.76.
(2) Pour les détail, voir T~ESEE (F.), 00. cit., pp.74-78.
frais d'expédition : transpo~t des denrées de l'habitation aux magasins
du cor~esponàant, le conditionnement, le magasinage, le roulage à l'em·
barcadère, le rabattage et les droits de sortie des colonies.
frais de vente : assur~~ces maritimes, courtage, fret et avaries ordinaire
___.f.ra..i.s de décharge, entrée et sorti e des magasins, racommodage des tei-
les, réparation des barriques, fonçage et défonçage des toiles, "vui-
dage" et "pezage", droits de Domaine, aux "gardes" et ;:roits de :loids
magasinage (10 sous/ barrique et par moir),por~ de lettres, com~issio~
de vente,
ducroire (1%), intér~t des divers debours faits par le
commi ssionnaire.
) 1:
?able3.H n031 -
Comnte simulé du coût de 100 barriaues de sucre b~~t char~ées à S2.int-Domir.~~~
nour France oesant net au dit lieu 1CO 000 lb (10 Décembre 174e) (1) •
.'
Valeur des 100 OOOlb de sucre brut à 10
l e ~~ •••••••••••••••••••
la 000
Droit de Domaine
4
le millier (1 OOOlb) •••••••••••••••••
400
Pour 100 barriques et rabattage à 6
la barri que •••••••••••••••
600
+ Coût des 100 barriques de sucre brut à bord du navire
11 000
Compte de la vente simulé des 100 000 lb de sucre brut ci-dessus à N~~tes
100 barriques pesant
100 OOOlb poids ~rut
à déduire pour ~erre et déchet
20 OOOlb
Poids net
80 OOOlb net à 20
le %•.•••••.•
16 OOOlt
++
Frais à déduire
- fret de 80 OCOlb net de sucre à 5 sous par cent pesant (1qal)
4 OOO(et
non 20 000)
- avances ordinaires à 20 sous du millier (1 OOOlb) ••••••••••••••
00
- droit de prévôté à 24 sous le milleir (1 OOOlb) ••••••••••••••••
96
- Domaine d'Occident à 3 1/2 pour cent de la valeur••••••••••••••
560
- droit de la ville à 3 sous 6 deniers du cent (1 qal) •••••••••••
28
d
. t d
.
( 2 ) , 4 0/
-
-
ro~
e conVOl
a , o••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
640
- frais de décharge, rabattage, livraison et magasinage à 30s/bque
150
5 55411(et
(,.,--n-on~--"2Y554)
Primes de 10 000 à 6 % pour ceux qui ont fai t assurer
600
12s pzrticuliers absents dans les ports à leur corres-
920
pondant dans les ports, une commission de 2 % sur le
920
prix de la vente
1
320
6 4701 t( et-
non 22 474) .
Récapi tula tion
Vente
16 000
frais
6 470
bénéfice
9 53Clt et non perte de 6 474.
2
(1) AN Col F :B2.
(2) En 1748, nous sommes en pleine guerre de succession d'Espagne. Il est né-
cessaire de faire convoyer les !1aV~r8S pour prévenir les attaques des pi-
rates ennemis. Ce droit est donc conjoncturel.
Les frais sont ,~nor:nes : 40,43 % de la vente. ?-T2.is quel_e$tJ 2e
.,
véritable bénéfice? Le doc~ment ne spécifiant pas la monnaie dans laquelle
est exprimé
le coût des 100 barriques de sucre brut à bord du navire; il
n'est pas aisé de le préciser objectivement. ~ais si nous considérons que
ce coût est exprimé en livre coloniale, nous devons poser
1600- - 11 000 = 5 000 + 33 % de 11 OGO = 5 430 1 t.
C'est le bénéfice sur la vente.
Le bénéfice net est: 9 530 lt + 5 430 lt, soit 14 960 lt. Mais si nous
admettons que le coût à bord èu navire est exprL~é en livre tournois, le bé-
néfice net est de 14 530 lt.
Cette étude sur les mécanismes monétaires et financiers permet de
comprendre le déroulement quotidien des échanges. Ainsi que nous l'avons déjà
dit au chapitre II, tout le système est orienté vers les intérêts des négo-
ciants. Le troc permet aux colons de disposer d'un débouché assuré pour leurs
sucres, mais la surévaluation de la livre tournois et le haut prix des four-
nitures françaises créent un déséquilibre important dans les niveaux quanti-
tatifs d'échange.
Le négociant reçoit toujours plus de sucres en paiement des mar-
chandises fournies et particulièrement en paiement des captifs. vMeia le~~~
captifs ne sont pas seulement une marchandise-monnaie, ils représentent tout
le noeud du système. Ils constituent la base de la richesse du colon par le
surtravail qu'ils produisent en tant qu'esclaves. Donc, le colon ne peut se
•
passer d'esclaves.
i
Mais ce surtravail qui maintient l'abondance de la production a une consé-
quence
heureuse sur les prix: ils ne peuvent monter du fait de l'abondance
Donc, ce surtravail profite au négociant qui achète moins cher pour vendre
relativement plus cher en Europe. Le colon n'ayant pas les moyens d'investir
en frais de main-d'oeuvre, mieux d'investir dans l'ag=andissement et l'amélio-
ration de ses rendements, le négociant intervient à nouveau en tant que
bailleu..r......de_fonds avec en contrepartie l'accaparement total des récol tes
issues du travail des esclaves livrés à crédit.
Q1X2.nd les crédi ts s' riccu:nulent, il prend possession de l 'habi tation.
Le négociant est donc à la fo:.~> acheteur et producteur. Cela permet de si tuer
les resnonsabilités dans le ~auvais traitement des esclaves.
.
!
L'accusé habituel e~t le colon. Il est vrai que son métier de planteur le
~
met plus directement en contact avec les esclaves et que, par conséquent, c'es~ 1
lui Qui fait exécuter les tâches.
t
.
~
Mais si on admet que du fait du crédit, les négociants sont les véritables
1
1
<
maîtres de l'économie sucrière, le colon ne produisant que pour payer des det-
1
tes, en tant que fermier, on doit aussi admettre qu'i~ sont à la base du
~
mauvais traitement des esclaves.
~
F
î
f
Obligé àe livrer une certaine ~uantité de sucre sans diminution et
f
f
dans les échéances prévues, le colon ne peut logiquement traiter les esclaves
t
t
avec douceur. L'intensité du travail est la condition nécessaire pour pro-
t:
~
duire plus afin de payer ses dettoo et acheter de nouveaux bras pour compenser
les pertes.
J~.
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~
~
La périphérie travaille donc pour enrichir le centre. Mais c'est
li
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surtout Saint-Domingue qui consti tue Te centre de ces affaires.
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gal , de s co.lem.es fr?~.~aJ.sê17.<t~n$.l~.,sec:)r:c€i2iOi-ti 6 :>, Z7Tnè :::iE:cle, ;1'0"-
vientd,e l;tabsênc~·d!WtèPQ~1~q#~:~âi:;:;~avitaiilem.entéquilibré.,
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18. li~.isori avec la :nét~opo!,e q~e. d'~.p~nd le ni ~le8'~l ~u8.:-~tit~~t~: Ges ex::;oj;tG.-
tions dt c~aque colo~ie.
Telles sor~t lè~ interrogatio:.s
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"-t=.
f
Le mouvemen~ des navire~~~st le seilleur baro~ètre pour ~ettre en
évidence l'importance commerciale de ctacur:e des color,ies. Jea'l TA?Lq]..JZ (1)
a déja indiqué qu'on-a !;our cela deux pcssi bili t{E
: 3-:i t se l)12,cer ë:!: ~2
tropole pour étudier le trafic rnaritiDe ?vec chaque colon~e, soi~ St placer
aux colonies pour étudier le trafic avec la ~étrc?~l~.
è.cr.:.c qu'il est ir:'lpr1j.èen:~ de rlissccier 2.~8itY2.ire2e~:t ce ctli, è2ns les fE'...i-ts,
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Tableau nO 32
Hiérarohie des dytinations 1773. 1786-1789. 1791 à. 1793.
17~1
1793
Destination des
1773
1786
1181
1188
1789
navires
N
T'
N
T
N
T
N
T
N
T
N
. N
T
T
N
1 T
1
Saint-Domingue
296
18 994
352
108 813
3El>
115 921
465
138 624
289
85 059
'35
102. 614
296
64 1 16 201
Martinique
106
24 182
124 .
135
29 '77
"1
31 nO
136
32 136
106
2' 85'
515 1
5'
20 1
5 773
1
Guadeloupe
48
9 674
66
lB 088
60
13 561
54
14 861
39 , 10 162 ,
,
1
4'
11 56'
43
585
1
Cayenne et Guy-
13
1 830'
10
1 451
4
814
8 ,
9
1 4'0
8
1013
4
923 1
3 1
465
ane
!
1
Tabago
16 1
2 970 1
-
-
17
4 576
9
2 049
13
3 096
9
3 463
11
-
1
1
~
i
463
115 200
,
1 ~
+47(J;
+6 997=
1
1
4811130 689 190 1 23024
510
122 277
569
.162 311
590
164 081
677
190 753
501
142 626
410
'.
N a
Nombre de navires
T = tonnage
(1) Il's'agit des 47 navires déclarés pour les fles du Vent sane autre préoision.
I\\j
~
-.J
~.L-·~···»-"··.~.·_""•._••".">••,,•••,••.••_o...~"....~,,..~._."~...,,,.....~.~~..~~~.._.~.~..~w,...~~~;:; • •••~~•••"••".~ry••~......_.j..,,~._ ...~.._~ ~:~.o "~",,_.....,,..__..__._..
.:~~~~.
•
Tableau
nO 33 -
Hiérarchie des provenances. 1
•
Provenance 'des 1
1773
1
1788
) 1
1789
179f
1792
1 7 9 3 '
n a v i r e s ,
,
1
N I T
T I N
i
T
N I T
1 N iTI NIT
1 N
T
1
Saint-Domingue 1 }8} ~ On
469
147 188
499 11156 562 1 519
155 490 1 393 1
1121 1138 633 fl54116 0061
, .
f i ,
MArtinique
74 1
16 152 , 118 1 25 282
112,
25 529
102
14 297
28
, 125 1 30 271 1 28
6 558 ,
1
,
,,
'"l
l '
Guadeloupe
1
1
'
"
1
52 1 11! 169
70 1 17 818,
52 1 12 507
65
13 236
41
65 l'
17 223,
9
2 745 1
, ,
"
l
,
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Cayenne-Guya- 1
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1 41 9
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1 851 '1
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1
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1
f
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1 14 1
3 387 1
14 1
3 10 5 1
13
2 95 6 '
13 1
_
17 1
5 281 1 -
1
-
1
Tabago
,
,
1 518 1 124 464
1+ 35:1) + 5 323
,
;=553 1= 129 787
678
194 395
686 ! 199 122
7p9 f 187 830
480
639 1 192 852 1 92 1 26 689
1
•
~
•
"
(1) Il s'agit de 35 navires déclarés provenant des rIes du Vent sans aucune précision.
r0
....
~:n
1Jo
219
La prilJauté de Saint-Domingue est ir.contestable tant au niveau des des-
tinations qu'au niveau des prov~ances. En nombre de navires comme en
tonnages, elle capte et assure régulièrment plus de la m<iitié du trafic
maritime avec la métropole comme en témoigne le tableau ci-dessous.
Tableau nO 34 _ Part de chaque colonie dans le trafic maritime en %.
1/ Les destinations
1
1 Cayenne ot 1
Saint-Domingue 1
Martinique i Guadeloupe
Guyanne
Tabago
f
N
T
1
N
T
N
T
:
N
T
N
T
t'
,
·58,.04
39,41 % 1 33,90 %
~
.~~
64,60 %
'2,55
1,50
t',
,
, 21,79 18,10 1 11,60 11,14
,
1 1 ,76 0,90 1
1
:1.786
61,86
67,04
2,99
2,82
,
1787
64,41
70,65
1 23,22 19,34 ., 10,17
8,26
0,60
0,50
1,52
1,25
,
1788
.68,68
72,67
20,09
17,16
7,98
7,80 i
1
1,33
0,75 f 1,92
1,62
f1789
·66,86
71,99
, 21,16 16,72 f 8,58 8,11 1,60 C,75 1,80 2,43
l
,
,
1791
72,19
, 13,16
10,49
10,98
2,68
~
.
1
1792
60,08
65,08
1 28,07 24,16
8,11
7,78
1,66
0,71
2,08
2,27
"f~;;'
1793
71,11
70,37
1 22,23 15,07
3,33
2,54 ! 3,33
2,01
~f,
1
~
,
,
2/ Les provenances
1
1
..
,
f
,
1773
!69,26 %
73·,98 % f
29,11 % , 25,15 %
,
1 1,63 0,37
,
1
,
1787
69,3"8
75,72
17,46
13,00
10,35
9,17
0,74
0,37
2,07
1,74
~
,
1
1788
72,74
78,63
1 16,33 12,82 , 7,58
6,28 , 1,31
0,71
2,04~ 1 56
,, 1,41
1
1789
73,20
82~78
i 14,39 7,61 ( 9,17 7,05
0,99
1,83
1,57
,
8,54
, 1,04
,
,
1
r
,1 791
81,88
5,83
2,71
1792
r;5,88
71,88
, 19,72 15,70 10,17 8,93 , 1,57 0,74 2,66 2,74
r
f,
,
1793
58,70
62,97
30,43
24,50 , 9,78 10,28
1,09
2,25
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que le trafic coloniel da.ns
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ense:r.bl9, ~uisct;.e, d2.:'!S le :;;ê::-:e
~:::. temps,-.-elre enregistre une croisspnce è.e 57,e 9 r~, pou=, le r:o!:.!bre de navires
-~'",",'.-'- ---- ~
etde;}1?';49 i~ pour le "tonnage. Cette croissa:lceplus re.pide du tonnage par
rallPor~rJ~u nonbre de navires résultè de l'?ccroisse:.lent ?:,-o5'-:,essif, au cours
du ;(Vlllè siècle, cies âimensions et de l.é c::C:Ccci ttS oies :l2.vi::es. A propos du
trafic' bordelais avec les rIes, Frar:çois C:1C'Z=:'=' note en effet que.Le_"tQOOfl~__
.
''''-'..-- ':Z;_~j;-;'~-':;;i,~:r~'
.'&. ~ôYer.~~~ri:e~~ de êOCCtormeaux en 1720, ~~Î E~ 17 25, ~52 e::. 1735, dteint 300 ",;'
tonneaUB à. la fin de l'Ancien rt-ig1me : 26::: e" 17'74, 31F en "17[15,297 en 178e(1).
La régression de 17~9 à 1793 Le si,:,:-r"ifie p.s r:ue Sé'int-Doi'1inl!Ue
reçoit moins de navires que les éutres colo~ies. Slle ::~sulte ~e la régreE-
sion du tra.fic color:ial, due aux 4v6ne:.le:J.t~ :";v~~uti:)rlI'2i=,es. ::é.rc é.e GLR-
•
rI~"Y r:o~e ~ue, dès la fin d,: 17C:9, ées ~:rl.~'C.t2S ficl?.:eYlt C:"'.:.G les :;ort2 <2t \\
~o:.-è. des navires (2). Ce qui entr2.ve ::'e c~;:ve:"o:"',:E::;e~t du tr,?fic ":",:.::.-i tic'e :'"
. __ - Of: _.,;~::' .;~
'.~;..~.?~~.~,::"~
221
Chl.<.tces:tde-:~2~3'6·.;~. Au contrair,::, ur. ::'luf: i"l'd:è. r.O:'1'cre C-2 :-:?Vi::-3S t::: ::::-8V0-
.
-- ~:..~ --~-~.:_~:.;
;lél.:Jce-df... Saint..Domingue, rentre Er. ?r2.nce. L2 n2.USSC par rap:cnrt à l "L_'1:e
......
_.
?récéden~e-~st de 7,12 t". CettE- -?volutior. ccr.traste C'.'f(?C L' te:1::c=:.nce ::2.'::li-
tuelle.~~Qu.elle en est donc la c;;use ? Elle semble provenir ::e l' évol-..l tiGn
des arffires depuis le dSDU t de l ' 2.:1née : 7?C. Zr. effet, li' ?pr~s :·~al,;.ri ce
::9EGCm~~L~':EA'{;X (1), deruis le è.~but àe cet~e a.nnée, le tr2.fic 2.vec Sd..:t-
• -c
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"1l9mirllUe-n'6:ffre :plus ql.<.e :ies d12nces r.:outeUf'Es.
l)'o·'; la c;-;:..;.te ces d~~e::-tz
:;:;:..;L~;~ ,. ."~_.L'
··~~.~r les; navires qui che.rsent pot;.r 12. ..:';trcpole ne revienIlent plus. La pro-
I:>.~~.,.,..~,-;;-~-0'.•'
"",de_connaissance qu'ont les négociants des réseaux commerciaux coloniaux
de s'exposer au ris~ue, Sl.<.rtout lors~ue les sit~e sont si évi-
méfiance que re!'.Îorcent les i:-lsurrecticn.s n:::ires L::.<.n~ le :'or'i,
Su<i:et:-l'Ouest de Saint ?0::.ingue en 17'71 et 1792.
eJ;2;~tac:t6-;:à ses inUrêtspersonnel s, ;re::è t~~:tf ;:-Ses;: r~c;::l:'ti.c"s l'rorre!: <>. les
·Fl'~~È.r~C~~"~~ il"ënrte.it les lieux, le tE'_:~ ,~72 2.c:::::ts, èF:s '.renies et 'd·~t",~(i
_·-envc~s,,(2). ~ 1793," lc!'sque ~_2. ~".l~::~'i-: '3vec ~';".fleterre -~cl2.te, -'le-ttant en ---....e
pér:'l la. navigation coloniale, le trafic ::. 'tee S2.:.:,t--:cr,.,inDlp. subi t un.:'! oh.U!4l....
catEst::-ophlque qui pr~figure
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.L. .... c:.• ..;.\\jc:._ i:>.
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Il cony; ent d0 s::.tT.C!..cer,
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222
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la d.wd.b. coloni.
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1-2/ 1'IaZ"t1D1".-;;'~1Gua4.1OU}l!
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-~;~ÎRBp. 1"9.11 .,t;opole (l;port&ti0p =llpOrtat1on)1764-1{~f'
.~J...~.-'::":__..
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Guadeloupe
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60
1
45,20
96
42,11
1769
186
102
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160
62,5
64
1 45,16 1
96
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117
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76
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1771 ,
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95
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96
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67
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75
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1773
164
95
57,9'
112
59,26 1
69
1 42,07/'
77J.
40.74
1774
222
13.0
58,56
13.7
60,09 , 9 2
1 41,44
91
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1775
19'
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142
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64
1 4'.52
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106
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67
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1777
194
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71
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18,57
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"
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110
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1792 !
~~ 1 49,19
•
l
,
:
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(1) SCBNJ.D:RlDtnlG(C.). ·S'tati.tique. pour l'h1.to1rede l'écollolll1e de planta-
tion en Gu&clelcupe et ell M. rt1 I1' CI"·", pp 114-11 8.--- .
(2) Idelll, Ulm.
. ~
•
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EVOLUTION.
DU
TIAFIC
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DU
IlES
DU
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223
'mléoriquement, les chiffres englobent tous les départs licites
-4~ __ . __
pour les ports européeU. r-~ais, en ce qui concerne la période 1763-1793, à
l'exception des 6 années de guerre, particulièrement en 1781, 1782 et 1783,
le commerce direct se fait avec la métropole. On doit aussi poser le pro-
blème de la fiabilité des chiffres. Leur variation d'une source à l'autre
(1) l'exige. Sur ce point, on doit garder à l'esprit qu'aucun chiffre de
valeur ne doit 3tre pris au pied de la lettre. Mais le problème le plus
important, nous semble-t-il, est celui de l'exactitude du travail statis-
tique au XVIIlè siècle. Cette variation des données est révélatrice d'un
manque de rigueur évident. Il semble en tout cas évident que l'objectif
.à ~~§poque, n'était pas d'avoir des statistiques. Le travail consistait
à enregistrer les. données fournies par les receveurs particuliers. L'inté-
r3t des statistiques publiées par Christian SCHNAKE1~OURG réside donc dans
le fait qu'elles constituent une longue série coloniale grâce à laquelle
on peut reconsti tuer la croissance du trafic maritime. Cette croissance
est représentée par les graphiques ci-contre.
On notera d'abord l'évolution parallèle des entrées et des sorties
et surtout la supériorité des sorties aux entrées. Cela témoigne ~contes
tablement-d'un certain déséquilibre du niveau quantitatif des échanges en-
tre la métropole et ses colonies. Déséquilibre du côté de la métropole,
car l'importance des sorties indique une forte capacité d'exportation des
colonies. Cette situation, à première vue paradoxale, pose la question de
l'origine des navires supplémentaires qui gonflent le nombre des sorties •
•
Des négriers ? Des navires des îles employés ordinairement au cabotage ?
Des navires métropolitains attardés aux îles pour faire le recouvrement?
Il est difficile de trancher,
fa~te de renseignements. Il est vraisembla-
ble quecesoi t les trois à la fois.
(1) Les chiffres fournis par les états de la navigation déjà signalés, sont
tantôt inférieurs à ceux rassemblés par Christian ·SClillAKE!ŒOURG. Comme en
témoip:ne le tableau cl-dèssous :
.
~~état d& lA "a~igation
S=statistigue (SCH~A~~~BOGRG)
E~~TREES
SORTIES
MARTINIQUE
GUADELOUPE
MARTInIQUE
GUAi)ELOUPE
,.
N
S
~;
S
~~
S
S
1773
1.06
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69
74
112
52
77
17S6
124
112
66
71
110
25
1787
137
110
60
118
102
70
1788
136
112
54
65
112
146
52
52
1789.
106
43
51
102
65
73
1791
56
69
43
77
28
94
41
91
170'
11:C;
~q
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121)
hC)
",-
~ ~ r
224
L'évolution peut être divisé$. ~n trois périodes: la première
allant' de 176' à la guerre de Sept ans, caractérisée par une tendance à
.. ' ~
,',
,
. l
. la baisse générale du trafic tant en entrée qu'en sortie; le taux moyen
L: ~el de la baisse des entrées est de - 0,14 %et celui des sorties
de - 2~17 %, pour l'ensemble des Iles du Vent. C'est que, pendant cette
. période, l'attention des armateurs se concentre sur Saint-Domingue. Il
y a cependant une évolution en dent de scie, liée à des causes internes
et externes. Les années de chute correspondent à la mauvaise conjoncture
sucrière aux r1es du Vent due à la pression du milieu naturel (1).
La reprise du trafic maritime de 1768 à 1770 semble liée à des
conditions ,locales. En Guadeloupe notamment, il y a un réel effort de
défrichement et de mise en valeur, et la pointe que représenteht
les
sorties en 1769 correspond pour cette île à une reprise des exportations
vers la métropole. Celle de 1772 à 1775 est liée à des causes extérieures •.
L'économie sucrière de Saint-Domingue subit une série d'agressions du mi-
lieu naturel; la métropole délaisse partiellement l'rIe ravagée pour
transférer sa demande sur les Iles du Vent. Le-Yéritab1e baromètre est
la prolongation de la hausse des sorties jusqu'à 1775.
-1~[
La seconde période correspond aux 6 années de guerre d'Amérique.
--~t
o ; e ,
Malgré l'absence de données, tout porte à croire que les trois premières
années sont marquées par un effondrement du trafic maritime 49S r1es du
Vent. Les deux d~ères années sont marquées par une reprise du trafic,
notamment des entrées. L'équilibre des forces navales de la France et de
l'Angleterre permet d'assurer dans l'ensemble la sécurité des convois et
des colonies (2). Mais la reprise correspond aussi à l'utilisation massi-
- - - - - - -
ve des neutres, notamment les impériaux, que les Anglais respectent plus
que les autres: en 1782, sur les 351 navires partis de Bordeaux pour les
Iles, 148 sont français, 203 battent pavillon impérial (3).
La troisième période vade. 1783 à 1793. L'année 1784 est marquée
par une accélération des départs: la hausse est de 20,58 ~~. C'est qu'au
retour de la paix, de tous les ports, on se rue sur les îles. Cette sa-
turation momentanée explique sans doute la chute des sorties. Les récoltes
( 1) Cf. J1'#ra p. 50 e t 54
(2) CROUZET (F.), Bordeaux au XVIllè siècle, p.301.
(3) CROUZET (F.), op. cit., p0301.
225
ne suffisent pas à répondre à la dema~de. Aucun capitaine de navire ne dé-
sirant revenir en France à "faux frê~}o,- les retours sont retardés ou le
surplus des navires est dirigé sur Saint-Domingue. La fin de cette pério-
de est surtout marquée par les effets de la Révolution.
Le creux de 1789 s'explique en effet par les émeutes qui entravent le dé-
veloppement du trafic colonial. Après 1789, l'évolution du trafic mariti-
me des tles du Vent réflète bien celui· du trafic colonial dans son en-
semble. Mais l'importance commerciale de chacune des lieux colonies mérite
d'~tre dégagée. Le volume du trafic est un repère fondamental.
L'examen du tableau montre un net engouement pour la Martinique.
~----"Miis-la production sucrière martiniquai se n'est guère plus florissante que
celle de la Guadeloupe. Quels sont alors les facteurs bénéfiques ?
Nous en distinguoD8 trois :
- le premier faèteur est le statut de métropole économique des
tlesdu Vent,dévolu à la colonie depuis 1668. La capitale Saint-Pierre
monopolisfl. en quelque sorte .l·~88eDt1éldu t.rafic de ces îles. Par le biais
du oabotage, les commissionnaires de Saint-Pierre enlèvent une partie des
produc~ions des autres colonies: Guadeloupe et Sainte-Lucie (1), qui de-
viennent ainsi des colonies de seconde zone. Les capitaines des navires
trouvent donc à Saint-Pierre suffisamment de marchandises de retour.
- Le second facteur est le développement de la production du,café
et surtout de son orientation vers une production de qualité. Paul BUTEL
indique, en effet que le café martiniquais est resté toujours plus cSté
que celui de Saint-Domingue
la différence de prix étant de 5 à 10 % en 1
faveur du premier (2).
- Le troisième facteur est le fait que la Martinique est demeu-
rée l'un des principaux entrepôts de l'}~érique espagnole. L'introduction
des espèces espagnoles, liée à ce trafic est un facteur indispensable au
fonctionnement de 1 'activilé~mait"seillaise aux îles, l'autre canal d' en-
vois de piastres aux îles.
La Martinique est donc la plaque tournante du commerce français
dans les îles du Vent. La Guadeloupe n'a qu'une valeur agricole. Le r'Jthme
(1) Cf. tIJFr8' p. 270 tableau nO 44 et 271 tableau n° 45
(2) BUTEL (P.), Les négociants 90rdelais, l'Europe et les rIes au XVIllè siècle
p. 30.
226
du trafic est largement inférieur à celui de la Martinique.
1-3. GUYANE et TAUGO.
Les. états de la navigation ne font aucune mention de navires
eX})édiés pour . . en provenance de Sainte-Lucie. La Guya...'"le et Tabago, après
1783, sont les autres parents pauvres de la colonisation française. L'indif-
férence à l'égard de la première s'eX})lique par la pauvreté des colons:
les arrivages de Noirs étant rares et irréguliers, la colonie produit peu.
Ainsi ouverte à toutes les nations en 1768 pour une durée de 12 ans, elle
n'a pu attirer beaucoup de négociants.
Tabago est visiblement mieux desservie que la Guyane. Rendue à
la France au traité de Versaille le 3 septembre 1783, elle ne conserve
qu,lune autonomie judiciaire yis~is de la Martinique. La dematlde de liber-
té du commerce, m~me avec las puissances amies de la France est rejetée
catégoriquement ~ar le gouverneur français. Il tolère seulement l'intro-
duction de nègres sur les vaisseaux étrangers, pour une durée de 3 ans\\
et cela,en vertu de l'arr3t du Conseil du Roi dU-~-Juin 1783, contre le
paiement d'un droit de 150 11vres par tête de nègre venu de l'étranger.
On siattenddonc à ce que les négociants français prennent la relève des
Anglais. Mais c'est un manque de réalisme que d'espérer, puisq~e tous les
habi tants de l 'rIe, à l'exception de Charles Gustàve MEYERS, ancien offi-
cier suédois au service de l'Angleterre, sont britanniques •
•
La conversion de la fidélité au Roi d'Angleterre en une fidélité
envers celui de France n'est pas aisée. De plus, ces colons, déjà endettés
envers les négociants de Bristol et de Londres ne peuvent rompre subitement
les relations avec les crJanciers. En 1785, par exemple, sur les 13 navires
sortis de la colonie pour l'Europe, 6 vont en Angleterre, dont 5 jaugeant
ensemble 1 110 tonneaux à Londres et un de 170 tonneaux à Bristol (1). Le
rythme du traiic de Tabago,avec 'sa nouvelle métropole de 1785 à1789, est
le sui van t ( 2)
(1) "Etat gén~~l de l'île de Tabago pendant l'année mil sept cent quatre
vingt cinq", AN Col C10 ES.
(2) Cf. AN Col C10 E6 ;our les années 17ES ~~ 1789 et M, Col C10 E8 pour les
années 1785-1786 et 1787.
~,
i
227
navires
Tonnage
1785
1 650 tx.
1786
6 0' 1.)
'1787
3 600
!
1788
2 734
!
1789
3 185
!
1
,
~Les exportations s'effectuent particulière~ent avec Dunke~que et
le Havre: en 1785, sur les 7 navires sortis pour la France, 4 (eoo tx.)
vont au Havre, 2.(600. tx) à Dunkerque et 1 .(250 tx) à Bordeaux. En 1786,
les 22 navires se 41r(e-nt. respectivement: 15 (4 116 tx) au Havre, 5
(1 410 tx) à Dunkerque, 1 (155 tx) à Marseille et 1 (350 tx) à Bordeaux.
En 1787, Le Havre en reçoit 10 jaugeant 2 515 tonneaux; les 5 autres{
s~t._(tO_a5~_tonneaux)vontà Dun kerque. L'année suivante, le Havre re90it
5 navires de Tabago, soit
224 tonneaux; les.7 autres, 05 10 tonneaux~
von t à Dunkerque.
En 1789, le Havre en reçoit 7,( 1859 tonneaux) et Dunkerque 6, ~oi t 1 326)
tonneaux•.'
Ce déséquilibre constaté au niveau du commerce en droiture, se retrouve
aussi au niveau de la vente négrière. C'est le second facteur du déséqui-
libre commercial.
20 ) Le ravitaillement inégal des coloni~~~n d~~~u~e.~oire comme fac-
teur de déséquilibre comm!!~ia!.
Le raIe déterminant de ra.vente négrière dans la prépondérance
du commerce sucrier français n'est plus à démontrer. Nous avons, en effe~,
déjà évoqué que le travail servile n'a été qu'un prétexte pour les négo-
ciants de contrel~r étroitement la production sucrière et de s'approprier
la valeur produite sur les habitations. Le tout reposant en fait sur la
dépendance structurelle des co10ns, celle-ci r3sultant ~lle-même,du cré-
dit de cargaison.
Cette étude s'inscrit
d8ns le même champ d'explication. Mais
elle diffère de la p~emiè~e q~~t a~~ obje~tifs. D~~~ l'étu~e actuelle,
il s'agit d'insiBt.~ davantage sur les conséquences commerciales du
dé-
séquilière~géograph~quede la vente négrière au: rles. Elle fait donc
appel à des chiffres. Chiffres si controversés qu'il est difficile d'y
voir clair. En effet, on ne peut se fier aux statistiques des chambres de
228
commerce, car ils '~ent plus d'arguments de polémique que de preuves
<0'---
objectilles.
Comment faire la part entre le nombre de ~oirs à traiter, c'est-
à-dire les prévisions optimistes, et le nombre réel dans un commerce expo-
sé à des aléas de tout genre. En effet, que le commerce de Guinée ne ré-
ponde pas aux prévisions ou que la mortalité soit très élevée pendant la
traite et au cours ~e la traversée, ei tous les espoirs s'effondrent. Les
études actuelles montrent qu'il est rare qu'un négrier arrive aux îles
en n'ayant perdu que quelques captifs seulement au cours de la traversée.
Sur~~~~s.em1>_le du XVIllè siècle, on l'évalue, au taux de 16 ~..~ à 240 672
victimes à bord des négriers français, les pertes se mesurant ~ la durée
du voyage (1).
Les sou.rces coloniales ne sont pas AGIL plus. une référence vala-
ble, car la fonction publique aux tles ne se préoccupe pas toujours d'exac-
titude. Elle préfère céder à la tentation d'un pot de vin et fermer les
yeux sur les fraudes que de se montrer particulière~n~ tenace et de frap-
per de grands coups (2). Le relèvement des gratifications en 1784 et en
1786 C~) est ûtle tentation supplémentaire à la fraude:D4t··plu.~Jeall'fiRRA»i mon-
,tre' qu'après 1781, les renseignements donnés par le bureau de la balance
du commerce sont incomplets, les renseignements n'y parvenant que tardive-
ment.
Nous n'avons cependant aum~ne intention d'inscrire cette étude
dans la querelle de chiffres. Nous 1n.1.terohesu.riou't -.tt"1:e. ·-oon~
quences de la disparité excessive (es ventes négrières aux îles sur le
- - - -
commerce. En effet; le trafic négrier est le grand moteur de l'expansion
commerciale, ravitailler inégalement les colonies, c'est établir une
(1) PLtJCHOll (P.), La rout.!! des esclaves •. Négriers et bois d'ébène au XVIIIè s.
(2) FLUCHON (P.), op. cit., p.288. Il indique qu'à coups de gratifications, on
peut signer de fausses déclarations •••
(3) L'arrêt du 26 Octobre 1784, Art. 2, accorde une gratification de 40 It par
tonneau de jauge plus des primes additio~~elles ~ savoir: 60 l par t~te dE
nègres transportés en Guadeloupe et en ~:artinique et 100 l par t~te de
nègres introduits dans les ports du Sud de Saint Domingue, en Guyane, Taba-
go et Sainte Lucie. L'Arrêt du 10 Septembre 1786, Art. 4 et 6, porte à 1601
la p~me additionnelle de 60 l et celle de 1CO l à 200 1., en plus des 4Cl.
par tonneau de jauge.
(4) TARRADE (J.), op. cit., Tome l, pp.273-275.
229
.
inégalité entre elles au niveau des exportations sucrières vers la métro-
po1_~ ,:.~:_11lé~~_~,~~!~siV:an niveau<'du ~ommer.ce en di--çliture •
U'ne' ·pàr.:tia-.de.cecomme:rce en dérive- directement
•
2-1. LA TRAITE FRANCAISE DEDAIGNE les IL;ES du VENT et la GUY,Mi'E. SAINT-
OOMINGUE MONOPOLISE le TRAFIC.
La dispartité excessive des ventes négrières aux r1es est un fait
irréfutable. Saint-Domingue monopolise quasiment tout le trafic français,
les autres r1es étant pratiquement délaissées.
a) Cayenne - Gu7Ù8.
Cayenne est délaissée. Jean METTAS indique justement que la Com-
pagnie des Indes, puis la Compagnie de Guyane, sont contraintes d'y envoyer
quelques navires et que les négriers· privés ne s'y arrê";ent , "sur la rO~t..
,
des Antilles pour y vendre leurs captifs", qu'en cas d'avaries irrémédia-
bles ouà l"annonce è'une guerre (1) : en 1·777, elle né reçoit que deux
n~griers privés: l'Espérance de la Rochelle et 1 '0 romage du Havre (2).
En 1778, les circonstances de la guerre forcent certains négriers à vendre
leur cargaison à Cayenne: un œgSier du port de Saint-Malo, venant "d'An-
.
.
gole", un autre, arrivé le 19 Décembre 1778, doit repartir pour SainvDom1n-
gue. Le troisième négrier appartiel'lt à la Co.p~e ; il s'agi t du négrier
le Réfléchi:." capitaine DESMARTIS, venant de Juda et arrivé à Cayenne le 2
Décembre 1778 (3). En 1779, Cayenne reçoit deux navires venant de Gorée:
la Tartare et la Toussaint (4).
b) Tabago •._
..~.
Tabago, devenu français en 1783, reçoit annuellement un négrier
i;
!
!,,
(1) l-~ETTAS .(J .) "Pour une histoire de la trai te des Noirs française : sources
et problèmes, in Revue francaJ.seud'histoiT'e d'Outre~er, Tome LXII, 1975,
1
~-
n022G-227, pp.19,46, cf. p.33.
1
(2) "Etat de l':'!!lportation des ~'7ègres et principales marchandises àe consomma~
f
tion introduits à Cayenne et de l'exportatio~ des denrées du cru de la dltt,
1
,
colonie par les batiments français et étrangers ci-après dénommés pendant
l'anriée 1777 dressé sur les regist~es d'arrivée et de départ tenus au bu-
reau du domain"! du roi", AN Col C
..,~ 1'0110 :1.-79.
(3) AN Col c14;o folio 155.
(4) Guyane. MM de FIEDMONS et FREVILLE, le 16 Octobre 1779, AN Col C14 51folio
125'•.
230
du Havre. Mais qui se cache derrière cet armement ? Assurément pas des
-t"--
Français. Les seules indications d'introduction de Noirs dans cette colo-
nie : les états du paiement des primes en 1793 (1), nous confortent dans
cette idée.,'I,8·,: 21 Javier 1790, les citoyens COLLOW CARMICHAEL et Compa-
gnie, qui exp&dient le négrier le Jeune Mercure pour la Guinée et dont la
cargaison de Noirs est destiné à Tabago, sont des armateurs anglais ins-
tallés au Havre. Le 26 Juillet 1792, le négrier les Trois Amis
qui arri-
ve à Tabago venant de Guinée appartient aux m~mes armateur~.
cl Martinique et Guadeloupe
Qlle dire du rythme du trafic négrier' français avec les rles du
Vent : Martinique et Guadeloupe en particulier? Très. peu de choses, par
manque de synthèse globale sur les arrivées de négriers dans ces deux îles.
Une telle synthèse n'est pas impo.sible. Jean METTAS l'a déjà démontré
dans son répertoire des expéditions négrières françaises au XVIIIè st,cle,
malheureusement inachevé (2). L'auteur nous' informe dans son article paru
en 1975 dans la Revue Française d'Histoire d'Outre~er (3), qu'on a pour
cela deux sources fondamentales : les déclarations dé retour des capitaines
dans leur port d'armement et les déclarations d'arriv~e aux rles. Cette
dernière source équivaut aux déclarations de retour des navires.
Cette recherche demande un travail extr~mement lo~g, que les con-
traintes du temps ne nous pennettent pas de faire. On peut cependant dire
ave. axactitude, à la lumière'des études existantes, que ces deux colonies
ne jouent pratiquement aucun rol~ dans le trafic négrier français dans la
•
seconde moitié du XVIIIè siècle. Déjà, dans la première moitié du XVIlIè,
la Martinique était dépassée par Saint-Domingue (4). L'admission de la -,
traite étrangère en 17e4 accrort le dédain des négriers français à cause
de la bais~es prix (5). Finalement, nous n'avons pour ces rIes que des
renseignements sporadiques, pas toujours sur le nombre de navires aéeriers
entréso,:"J
(1) ''Payement de la prime de 160
par tête de l:ègres", AN F12 1653.
(2) Seul le Tome l a été publié, il concerne Nantes. Cf. Paris, Société fran-
çaise d'Histoire d'Outre~er, 1978, 795 p.
(3) METTAS(J.) "Pour une histoire ••• , Revue française d'Histoire d'Outre-Mer,
Tome LXII, 1975, N°226-227, pp.19-46, cf. p.23.
(4) Jean METTAS indique que de 1714 à 1755, la Martinique re~oit en moyenne
chaque année 2000 captifs, moyenne calculée sur 27 années, Cr.METTAS J.,
op. ci t., p. 33.
12
(5) ~, p.34.
AN F
1835. Tableau n043.
231
En 1787, nous avons le nombre de Noirs introduits: 34 en Marti-
nique et 308 en Guadeloupe. !":ais l 'infériori.t~Lpar rapport à Saint'-.
~a1nsu._ "~:=, permet de pr4:Jugèr du nombre- tout à fai t n~gllgeab~. _
de négriers ayant abordé ces tles : peut-être deux ou trois.
En 1788, au~e introduction de Noirs n'est signalée (1). Cette absence de
. _t)__
_.
données~<eirt4lle S7J1Ç)J11D18 d'interruption du trafic négrier en direction de
ces colonies ? C'est difficile à dire. ~Souvenons-nous : les renseignements
parviennent tardivement au bureau de la balance du commerce. Il n'est ce-
pendant pas impossible que cela signifie effectivement un arrêt.
L'~tat des paiements des primes de 160It par ~ête de Nègres
ordonné~ par le Ministre de l'Intérieur à compter du 6 Mars 1793, donne
d'intéressantes informatiops sur les entrées de négriers en Guadeloupe et
en Martinique en 1791'et 1792. Rien n'tndique cependant qu'il s'agit de
l'ensemble des nlJgriers ayant abordé ces tles au cours de ces àeux années.
, _.
....
--'"
_~.~oL_'-".-.L~",~_.~_.,~~s~~~·~~
~_~
.
Tableau n- '6, - Ventes négrières en Guadeloupe et en Martinique en 1791 et 1792
,
,lieu et date
,
lieu et date
. GUADELOUPE
. d'arrivée
, MARTnrrQUE
d'arrivée
!
J
1. Le Bien-Aimé: tonneaux ?
, L'Einilie ; 1050 tx.
armateurs: citoyens LOUVET
PolDt...a-J»1tra
BAOUR et Cie
Saint Pierre
~
~ et Cie (Bordeaux)
(Grande-Terre) ! (Bordeaux)
4 Mai 1792
venant de CIte d'Or.
Côte de Guin.ée
2. Le Victorieux : tonneaux ?!
Le Bailli de Suffren
armateur : ci toyen BAILLET
443tx
Saint Pierre
Basse-Terre
(Honfleur)
. - - -
Cie du Sénégal
4-16-17 Août
venant de la Côte d'Afrique!
Côte de Guinée
1792
3. Le Prince noir: 904 tx.
Le Mirabeau: 481 tx
armateurs: OR»lORD et fils-!
Bernard AI1Œ
Saint Pierre
Basse-Terre
(Honfleu!")
(Nantes)
vtu1ant de ià'Côte de Guinée!
Angole
-
.
4. L'Auguste: tx.?
Le Lily : 298 tx.
arm~teurs: Veuve Jean FERAY
Pointe-à-Pitre
BOlTARD
Fort-Royal
et MASSIEU (Ha-.-re)
! (Grande-Terre)
(i~antes )
19 Décembre
venant de Côte de Guinée
le 2 Août 1791
Côte d' Angole
1792
5. Le Gustave Adolphe:167tx.
Le David : 305 tx.
armateur: La Durantie
Basse-Terre
RICHER frères
St Pierre
(Bordeaux)
(Nantes)
25 Juin 1792
venant de Sénégal
Banny
6. La Constance: 167 tx.
armateur: BRlmN
-
-...-....':"~ ....
. (1L~~b.l~au. comparatif du; mbnt~t en 8}gent des fourni tures fai tes par la métr8-
.
pole à-'Iles colonies de l'Amerique en 17E7 et 1782 et de la valeur des ;;aye-
. ments qu'elle a reç'.ls en denrées des di tes isles à ces deux époques.
,
232
(Nantes)
(Grande-Terre)
. venant d' Angole
7. La Frasguita : 871 tx.
amateursl SIMON et ROCUER
Pointe-à-Pitre
,,~_._.-
(Nantes)
(Grande-Terre)
venant d'Angole
8. La Demoiselle : 356 tx.
amateu.n: SIMON et ROGUER
Pointe-à-Pi tre
(Nantes)
_
_
(Grande-r'érre)
venant de la ê~te d'Or.
3 Septembre 1792
La Guadeloupe reçoit plus de négriers que la Martinique: 8 contre
5 • Bou8 verrons_~dans l'analyse des données relatives au nombre lie Noirs
qu'elle est, clé oe tait, 1\\,~,,\\hA\\\\\\u..
Les ~~-de tr~te figurant dans le tablea~ ne sont pas forcément exacts.
Il s'agit des lieux de destination fisés au moment du départ des navires.
L'imprécision est de r~gle en ce domaine ; les déclarations de retour des
capitaines peuvent démentir les registres d'armement: la saturation d'un
marché ou l'incapacité d'un marché' à répondre aux besoins peut faire chan-
ger de destination. Mais, qu'on ne s 'y trompe pas ; il s'agi. t de vocabulaire
d'époque. Le terme peut dasigner une vaste région ou tout simplemnt, il
,
,
peut s'agir de terme générique "~' comme le nom Congo veut-désigner de multi-
ples peuples.
Les rythmes du~-trafic négrie~ à destination de Saint-Domingue sont relative-
ment -;d-~~,.-;:-_~ moin~ pour, ia' p~riode 119.4~1793.
.._~:~~,
- -
' .
":.~.:'~~----- ".-1'" •
.;. - .
" ~
«.
.
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... ~
.
•.
~ - -. ',,:, -:."":"
- - - -
. - - - - -
Jean FOUCHARD montre, en effet, qu'à partir de 1764, "les journaux
de Saint-Domingue fournissent d'utf1es précisions sur les arrivages de ba-
teaux négriers, e~ ce jusqu'à la fin de la traite régulière dans l'rle, c'est-
à-dire jusqu'en 1793"(1). A partir des journaux de Saint~omingÛ.e, notamment
les Affiches américaines, il procure d'intéressants apports à la connaissance
du rythme annuel des arri vages des négri ers.
(1) FOUCHARD (J.), "La traite des Nègres .'3t le peuplement de Saint Domingue",
in Documents de travail et compte-rendu èe la réunion d'experts organisée
par l'UNESCO à Port-au-Prince,- Haiti, 31 Janvier-4 Février 1978 : 4
-f;rai te
~g;ière du XVè au XIXè siècle. Paris UNESCO, 1979, 341 p. (Histoire géné-
rale de l'Afrique. Etudes et documents 2), pp.278-296. Cf. p.278.
233
Tableau nO 37 - Etat récapitulatif de la trai te négrière à destination de
Saint-Domingue 1764-1793 (1) .'~-
Nombre de négriers
1764
31
1765
15
1766
35
1767
52
1768
39
1769
37
1770
36
1771
30
17;2-:-
39
1773
35
1774
35
1775
44
1776
58
.1777
50
1778
1779
4~gj
1780
1781
4(4
1782
-(5
1783
29
1784
71
1785
50
1786
62
1787
87
1788
36
1789
120
1790
170
1791
58
1792
13
1793
4
(1) FOUCHAIDf1J'-:r;-' op. ci t., pp. 266-296
(2) La guerre d'Amérique perturbe le mouvement des négriers. Les signalements
de bâtiments négriers sont pratiquement inexistants. Trois ar~onces seule-
ment ont été retrouvées : 25 Février 1779 : arrivée du négrier La Négres~
de Nantes.-:Les a.ffiohes du 19 .Tùin-1179s1gnalén't l'arrivée.de 2 négriers·
anglais pris ·dans les rivières de Gambie--e-t"de Sierra -Leon-é : La Providence
et le Harifort. Les affiches du -1'(Août annoncent l ' arri vée du négrier La
Nymphe, venant de la côte d'Afrique.
--
(3) Aucun signalement de navires négriers.
(4) Les hostilités continuent~ Le commerce négrier est assuré par les rares bâ-
timents qui ont pu déjouer le blocus, et par quelques bâteaux neutres, da-
nois par exemple ou espagnols, ayant touché la Havane. Les 4 négriers sont
français : le Duc de Laval de la Rochelle, le Sénac, le Gange de Lorient et
l'acra, arrivé à la consignation de Stanislas FOACRE, HELLOT et CO. Les au-
tres sont étrangers ou de prix (le Diamant de Londres).
(5) Le commerce négrier !reste perturbé : les annonces ne laissent pas derlner
le nombre de négriers français arrivés.
234
Quelle est l'importance de ces arrivages à Saint-Domingue, par
rapport aux rythmes de la traite française? La réponse n'est pas facile à
~._--
fouxnir. D'abord, rien ne dit ~e ces chiffres soient représentatifs de
l'intensité de la traite négrière en direction de Saint-Doming~e. Ensuite,
i l faut connattre le rythme annuel des arrivages aux îles. Cette précision
est difficile--à. -trouver. Le rythme annuel des départs pour la traite est
loin d'3tre une référence suffisante. L'appréciation du terme négrier étant
probléma"ti~e•. Une meilleurs appréciation requiert une longue qu~te pour
déterminer le nombre de navires qui revier~ent directement en France, le
nombre de petits navires servant de corvettes à un plus gr8a~
~anMETTAS note qu'en-àessous de 30 à 50 tonneaux, un nanre
ne se lance ~ratiquement pas dans la traversée (1). Ce n'est pas tout. Il
faut conna!tr& enfin le nombre de navires négriers qui périssent dans la
traversée ou s'échouent.à la cete d'Afrique.
~'on nous comprenne bien: cette connaissance précise n'est pas
impossible, mais cela suppose une recherche patiente dans des documents
trop divers et d& trop multiples recoupements, que nous ne Pou~n.. · :Caire....
---,-----
.
maintenant. Mais la disproportion entre les ventes à SaintrDomingue et les
ventes
avec les autres colonies est si flagrante qu'on ne peut pas ~e'p&l~
penser que la grande fIe monopolise le trafic négrier français. Ce monopole
accentue encore davantage l'8iEpansïon commerciale de Saint-Domingue. En
effet, le négrier n'est pas exclusivement un navire qui va charger des cap-
tifs à la côte d'Afrique pour les débarquer aux îles. Il est polyvalent ;
car, une fois aux tIes, il fonctionne. comme un aavire en droiture: le
. négrier rentre en France,oharp du quart ou du tiers des denrées achetées
avec le produit de la vente de sa cargaison de captifs (2). Euisque ces
(1) METTAS (J.), ''Pour une histoire de la trei te des noirs française ••• ", .2,E..
ill., p.29.
(2) En 1767, sur 21 navires entrés '~~a Rochelle, 6 proviennent du commerce
circui te25 soit le tiers.
AN Col F B
navires
chargement en sucre
brut
terré
les deyx frères
10 357 lb
46 103 lb
le Début
111 664
68 346
La Fauvette
54 200
22 000
la Guirlande
389 130
Le Dogre le chameau
l'Arada
565 331 lb
136 449 lb, .
soit 701 780 lb sur 3 902 691 lb de sucres déchargés à la Rochelle: 17,9E;(.
sui te •••
235
-'
navires augmentent le trafic du retour , ils renforcent la primauté conmer-
ciale de Saint-Domingue. Cet apport supp1émentaire.~e navires explique en
partie le rythme élevé des entrées en France par rapport au rythme des sor-
ties.
2.,.2. LE MONOPOLE DU TRAFIC NEGBIER PAR SAIN'lI-OOMINGUE COMME CAUSE DE SA PRIMAU-
TE COMMERCIALE.
Le monopole du trafic négrier signifie aussi monopole du produit
de ce commerce. L'importance de la traite française à destination de Saint~
Domingue ~ccroft au cours tlu XVIllè siècle ; elle passe de 60 % entre 1714
~t 1721 à 90 %de 1784 à 1790 (1). C'est le signe de l'abandon des autres
f1es et particulièrement des fles du Vent au trafic étranger. La répartition
qui suit, extraite.de la thèse de Jean TARRADE est, à cet égard, très élo-
quente.
.-
. Tableau n·38 • <Uosraphie des ventes négrières françaises 17.63-179' ,(2)
Saint Domingue
Martinique
Guadeloupe
Tabago
Guyane
Total
1763
,
. ,670
1764
'6 681
374
1765
2 100
1 199
t 003
1766
13 860
., 602
455
714
422
1767
15 302
15 293
82
445
100
1768
14 312
8 841
208
350
208
•
1769
7 950
0
5
774
1770
16 193
e 768
21J
672
26
1771
10-018
6 990
118
130
117
1772
8 821
112
221
53
1773
6 270
0
0
0
1774
13 188 --Î629
0
107
83
1775
15 112
7 965
193
176
1776
20 501
10 921
225
767
115
1777
11 387
(66)
(sui te-: )
Lite •••
A Nantes" sur les 27 navires Tenant de Saint Domingue au premier trimestre de
1767, 6, soit le quart, sont des négriers rentrant de la traite.
1. Le maûl de Luxembourg, 250 tx, cap. J. Tauquere1, arrivé le 6 Avril, venant
de Saint Narp,
rentre de Guinée ch<:l.reé de 59 barriques de S'lcre terr~ et, dl?
171 barriques de sucre brut.
2. La 1utesse de Grammt, 200 tx, cap. Pierre MESNARD, arrivé le 19 Janvier ve-
nant du Cap rentre de Guinée. Il tranporte 206 barriques de sucre brut.
3. Le Prince Condé, 180 tx, capt.Louis BOUVET, arrivé le 19 Juin venant du Cap,
rentre de Guinée. Il transporte 170 barriques de sucre blanc.
4. Le Jean-Baptiste, 180 tx., capt. J-B. COSNAY, arrivé le 20 Mai venant de Léo-
gane rentre d'''Angole''. Il transporte 182 barriques de sucre brut.
5. La marquise de Chateau Renaud~ 180 tx, capt. M.le Che DUBOIS, arrivée le 2
Juin venant de Saint Louis rentre d'Ango1e. Il transporte 180 barre de terré.
6. L'Hirondelle, 150 tx, capt. Pierre LE RAY, arrivé le 6 Juin venant de Port-
au'Prince rentre-de GuInée. Il transporte ~ barriques de brut' et 190 de terit
236
.. la1Jat~Doaingue
IMartiniquelGUadelOupel Tabago
GUJanne
1
... '
1
1
1778
1
• 10 336
1
1779
!
1
1780
1
''-0-1
1781
1782
1
1
1783
i &:~!t-'o
5 551
668
659
1
1
1784
1·22._?1~ .-
14 767
579
098
1785
21 652
12 148
414
389
161
1
1786
27 648
17 432
191
0
1787
30 839
22 726
1
(34)
308
(308)
36(-)
1
1788
29 506
12 048
432
(358)
233
1
1789
33 937
1
1790
46 471
0(60)
1791
1
(265)
1
1792
a 000(1)
1
1793
712(1)1
t
1
(1) KETTAS (.1.) op.cit., p.34. PLUCHOR (P.), la rout, des esclaves.... p.Z3l,
1716-1721 Saint-Do.ingue.reçoit 3 000 captifs en moyenne chaque anné&
1766-1771"
14 000
1786-1791
28 000
(2) TARRADE (J.), Le co.merce colonial de la France à la fin de l'Ancien
Régime. Evolution du systè.e de l'exclusif de 1763 à 1789, Tome I, P.
l7:3. Pour1763~1?88,.:!6~CH"mL(J
.. ~", 91.· eit. ~ ..p,.z86.--296.,_lleur -sa,j.:a.,~
DOlllingue sêlÙ....nt· 'c.t~ colonné 1l~2 .IL1?92~t- 119-7;'0 la v-isihiJ.ité-'
économique est moins nette. Les chiffres sont donc imprécis. Les chif-
fres entre parenthèse constituent notre a~~ort personnel. Ce sont des
chiffres trouvés dans les archives.
AN F
1835 pour les chiffres de
1787 et 1788. En 1787, la Martinique reçoit 34 captifs et la Guadeloupe
308, en 1788, aucun captif n'est signalé pour ces deux colonies. En
1787, aucuncaptîf n'est signalé pour la Guyan'4 Pour cette colonie, leE
chiffres ae 1777, 1778 et 1779, voir
AN Col C 145 folio 279 pour 1777,
Col C1450 folio 155 et folio 9 pour 1778, Col C 51 folio 121 pour 1779.
Pour Tabago voir r'21653. l'état de paienment des primes.
237
Nous n'insistons pas sur les lacunes et 12. fiabili té des chiffres •
.(\\..---
Chacun sait qu'ils sont sujets à caution et, parce que les auteurs à qui
nous les empruntons n'ont pas manqué de le rappeler.
Nous n'insisterons pas non plus sur la répartition inégale des captifs en-
tre les colonies.-Lesujet est bien connu.
Nous ne chercherons pas non plus à savoir si la fourni ture française suffi t
à satisfaire les besoins coloniaux. On sait, malgré la polémique qui l'en-
toure,qu'ellea été toujours insuffisante. De plus, cette question n'intéres-
se pas particulièrement notre sujet. Observons simplement que la Guadeloupe
est un peu mieux fournie que la Martinique. Cela signifie-~-il que Saînt-
Dorningue et la ~~~eloupe sont les deux pSles de développement ? C' es t pos-
sible, ce qui confirme la stagnation martiniquaise dans la seconde moitié
du XVIIIè siècle •
. ~'on nous comprenne' bien : un peu mieux fournie ne signifie pas
bien fournie et Christian SCHNAKENBOURG note qu'à la veille de la Révolu-
tion, le commerce étranger fournit chaque année entre 90 et 100 % des es-
claves introduits en Guadeloupe" (1). Cela signifie certainement que la
Guadeloupe a un rele plus agricole que commercial, du moins, l'industrie
sucrière semble bénéficier d'une superficie plus vaste qu'à la Martinique.
Dans cette colonie, il n'existe qu'une unique plaine, celle du Lamentin(2).
La Guadeloupe est très plate. Il y a donc de l'espace et les sucreries
peuvent s'installer loin dans l'intérieur des terres (3).
Ce qu'il est important de savoir, c'est que les négociants atten-
dent de1~& vente négrière des richesses considérables qui, dans un système
de troc, se traduit par des quantités importantes de denrées coloniales.
Nous avons vu, en effet, que le prix élevé des Noirs exige en paiement des
quantités importantes de sucre, ce que nous avons no~~é le déséquilibre quan-
titatif du niveau des échanges. Il va sans dire qu'en monopolisant le produit
de la traite française, Saint-Domingue se pose du coup comme le principal
fournisseur de sucre à la métropol~, ca.r-mil f~u t bien que les captifs soient
payés.
. Naturellement, les colonies délaissées sont condamnées à ne livrer
que des quantités plus limitées de denr4es à la métropole. Le surplus ét~t
(1) SCHN~~URG (C.), La crise du système esclavagiste 1835-1847, p.7e note 2~
voir aussi Les sucreries de la Guadeloupe, pp.109-111.
(2) CHAULEAU (L.), La ~artinique et la Guadeloupe du XVIlè siècle à la fin du
XIXè siècle, p.8.
.
(3) Scmi~~URG (C.), Les sucreries de la Guadeloupe, p.~3.
238
vendus aux 'tran.,~~
En 1181, les '0 839 Noirs vendus à Saint-Domingue,produisent
41 912 000 livres, ce qui représente 44,72 % des fournitu::-es faites par
la métropole. En 1188, la vente de Noirs produit 41 308 000 livres, soit
-
~'-'" '.'.- - .
43,08 %. Il s'agit d'évaluation au prix moyen (1). Dans la réalité, le pro-
du! t est certainement plus important.
En Martinique et en Guadeloupe, la part de la vente négrière
dans les fouxn1tures faites par la métropole en 1787 est respectivement
de
0,28 % et 6,18 %. A Cayenne et Tabago, elle est de 28, 77 % et 34,25 %'
en 1188 (2). "Ma±s- ces forts pourcentages ne signifient nullement. int·enili té
'\\;
~.
de la vente de Noirs comme à Saint-Domingue. Ils n'ont de sens qu~ eompa-
rati vement au montant des marchandises exportées de France et à 1 a valeur
des. fourni tures faites par la France à, ces colonies. Ce sont des parts
relati ves. Seuls les chiffres de Saint-Domingue donnent la mesure de l ' im-
portance des ventes négrières dans le commerce général.
Saint-Domingue,. la plus riche des colonies françaisè--;-Sairit-
Domingue, le pivot de l'industrie sucrière française, Saint-Domingue, cen-
r .
tre principal d'approvisionnement pour le sucre. Oui. Mais cette étude
montre que la prépondérance de Saint-Domingue dans les importations sucri-
ères françaises'provien~de ce que la grande fle plus que les autres colo-
nies est le pivot de la navigation marchande. Elle doit donc son importance
à la négligence des autres colonies par les négociants.
Qu'est ce qui :-a.:t1fie
,~. 'engouement pour cè1;te coîoni~"f"'"
(1) En 1788, ce montant est obtenu au prix uniforme de 1400 livres par t~te.
(2) AN F 12 1835 :'
1787
17e8
'
marchandises d 'Europe ... - 51 ffl~ 000 livres
54 578 000
Saint DoIDi ngue
. en Noirs
••• 41 912 000 livres
41 308 OCO
·..
~
Marchandiil~s d'Europe
1C:
'.1
857 cac li..-:es
15 133 O_Q..Q
Martinique
en'!Joirs
·..
45 000
Marchandi ses d'Europe
5 533 000
5 )08 000
Guadeloupe
en Noirs ·..
403 000
Cayenne et Guyane Marchandises d'Europe
2,.,
·.. 209000
007 000
Noirs
·...
32ê OCC
Marchandises <t'Europe ·...
~85 000
960 000
Tabago
358 Noirs
50C 000
239
3-) Les causes de l'engouement pour S~nt-D~~~e.
Les historiens qui s'intéressent au commerce colonial français sous
l'Ancien Régime juétifient l'engouement des négociants pour Saint-Domingue
par l'opulence de l'rIe.
- .
.. ~-
. - , : -
. Une--'tell.a e~l~eat1on. e~t~lleàatisfaisante.. ? Nous
~ ,- ..'.'- ""i•._.
.
_
_
:
_ . t.. _
.,De- I~f:-pensons pa~~-ear.i-.l.lI01Zà-·sembl~
parfaf"tetleII't 'e:rair qlle -1 'admet-_
-
-
. -
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•
_ . _
. • .,r.".
" . . . .
~--• • -~
_ . "
o
•
. .tre--reviendra.!t à
_. prendre la conséquence pour la cause. En effet,
éeJairé par les développements qui précèdent, nous sommes à même de penser
que cette richesse~-Saint-Dominguen'est que la conséquence logique de
la concentration commerciale après la guerre de Sept ans.
Car une colonie, si fertile soit-elle, ne peut prospérer seule
sans cet apport d'esclaves Noirs, instrument indispensable à la culture
des terres, et sans l'instauration de relations régulières avec la métropole
qui, tout en assurant un ravitaillement à peu près correct en march~dises
indispensables à la vie des colons,n'en constituent pas moins la meil-leure
manière de résoudre le problème de la crise de débouchés pour les sucres
produits sur les habitations. Les développements précédents révèlent, à no-
tre avis, que ~'insolence du succès de Saint-Domingue repose sur ses rela-
tions privilégiées avec les grands ports .~tropolltains.
~'on nous comprenne bien: lés négoCiants, ceux du Ponant en par-
ticulier, sont, à la base de cette explication. Ils justifient leur indif-
férence à l'égard des rles du Vent par ce qu'on y fait de mauvaises affai-
res (1). En effet, malgré~énurie d'espèces aux îles, et, en dépit du
fait que le paiement en denrées du ~ru reste le mode de transaction le plus
pratiqué, la monnaie ne constitue pas moins un élément régulateur du com-
merce. A preuve, les armateurs des ports du Ponant préfèrent vendre leurs
<>- !i-'"
cargaisons au comptant plutôt que de pratiquer la vente à crédit.
Au sortir de la Guerre de Sept ans, en ~artinique en particulier,
peu d'habitants sont capables de prendre sur les produits nets de leurs
cultures des fonds pour acheter des Noirs et payer au comptant. Le~ corres-
pondances des administrateurs, en 1763, insistent sur cette nécessité d'ac-
corder des facilités de paiement aux colons.
(1) L'intendant TA1~R au duc d~ ~1ELON -St Pierre, le 15 juillet 1772, n031,
duplicata AN _C
C~.
240
Le gouverneur FENELON et l'intendant MERCIER de la Ri vière en font l'une des
idées essentielles de leur correspondance du 4 A011t 1763.
...'\\-..
"Il Y a donc ici peu d 'habi tans qui puissent prendre sur les pro-
duits nets de leurscul~es des fonds pour acheter des Nègres et les payer
comptant. C'~st donc moins le prix des Nègres qu'il faut chercher à faire
diminuer ou l'abondance de leurs ventes qu'il faut s'efforcer de procurer
aux acheteurs' "(1).
C'est l'une des raisons qui poussent l'intendant à accepter les proposi-
tions de la maison Towson de Londres pour la fourniture d'un nombre illimi-
té de Noirs. Il s'en explique au Roi, dans sa lettre datée du 9 Ao~t 1763(2).
Le ·23 Déc~~~:t'e 1763~ lê--gouverneur général, FENELON insiste à nouveau sur
la nécessité des facilités de crédit pour le paiement des Nègres (3). Certes,
la Martinique sort affaiblie de la Guerre de Sept ans, mais les observations
des administrateurs cachent d'autres préoccupations. Le gouverneur et l'in-
tendant sont hostiles à toute imposition sur la colonie. Elle ne peut à la
fois " fournir aux déboursés que demande roi t la répartition de son troupeau
de Nègres" et p~er chaque année 1 500 000 livres d'impôt, se plaignent-ils •
.~ .
__
1...-:-'.1 _'~""'.,'"
Mais ce n'est pas tout: LE KERCIER de la Rivière, ami du physio-
crate QUESNAY et rallié à ses idées,· tente d'ouvrir l~s îles au commerce
étranger (4) ; l'acceptation des propositions de la maison Towson en est
une démonstration éclatante. En 1772, le président TASCHER tente de prouver
que les allégations des négociants français ne sont pas fondées. Cette preu-
•
ve, c'est ARNOULT, capitaine du négrier le Cupidon de Nantes qui la lui
fourni ~.
Le négrier arrive-à-Saint Pierre le 19 Mai 1772, chargé de 120
captifs. A la fin de la vente, l'intendant demande au capitaine de lui don-
ner par écrit un compte sommaire de l'histoire et du résultat de son opéra-
tion. C'est que l'opération commerciale est heureuse.
('1) Fénelon et de la Rivière, Martinique 4 Ao~t, .Pl,} Col CeA65 folio 27.
(2) Mercier de la Rivière au Roi, 9 Août 1763, M~ Col CêA65 folio 2.75.
(3) Fénelon au duc, aux Salines, le 23 Décembre 1763, AN Col CEA65 folio 227.
(4) CHAULEAU (L.), La Martinique et la Guadeloupe du XVIlè siècle à la fin du
XIXè siècle, p.165 et 166.
241
Compte de M. ARNOULT. capitaine de navire, le Cupidon de Nantes
(arrivé le 19 Mai 1772), Fait à Saint Pierre le 3 Juillet 1772 (1) •
...,'-,-
"Dès les premiers jours j'fq debitté avantageusement et comptant, la
majeur partie de ma cargaison, le surplus d'une moindre valeur a demandé
plus de tems-:etquelque crédit. Aujourd 'hui deux Juillet, la totali té
-
-
-
~
--
de ma cargaison se trouve vendu et mon navire expédié pour France : j'ay
").
peu d~:rêcOUTreDlent A-·raire~t c~ jéu mtest assuré' par la voye du par
corps, sous la protection de Messieurs les chefs de la colonie, comme
pour de ~i~s
de cargaison•••• J'ay déjà pris les mesures nécessaires
1
i
par mes lettres en France pour hâter le plutôt possible et faire expé-
dier pour cette colonie une nouvelle traitte de noirs beaucoup plus
1
considérable que "CCel1e-ey" •
1
1
L'intendant en est satisfait; il peut maintenant informer le mi-
!
nistre que la crainte des négociants est injustifiée. Mais il s'agit d'un
cas unique. Sa valeur démonstrative. est évidente mais suspecte. Qui sont
les aèheteurs ? On n'en sait rien. Mais la question n'est pas là. Elle
11
consiste à savoir si Saint-Domingue est mieux apte à répondre à ce mode de
paiement que les autres coloni,s.
.---.--------
~
Sans doute convient-il de signaler que cette nécessi té du paiement
1
1
au comptant divise la colonie en deux zones géographiques. D'un côté le
Nord et l'Ouest plus prooetteurs, de l'autre, le Sud relégué au même rang
1
que les rIes du Vent. mTICNE LACOUTURE fourni t à ce sujet des renseigne-
1
ments qui permettent de poser en termes précis les facteurs de cette dispa-
1
rité commercial. Le Nord et l'Ouest, à en croire l'auteur, répondent mieux
1.r
aux exigences des' ..riégociants!lEn effet, écrit-il l' le marchand françois qui
.
.
arri ve
au Cap, à Saint-Marc , .~u _Port-au-Prince avec une cargaison de Nè-
gres, la vend en très peu de teros ; il reçoit comptant un quart, un tiers,
même moitié de la valeur de cette cargaison et le surplus lui est assuré
par des engagements à 6, 12, 18 mois de terme qui, lui sont presque toujours
exactement payés en argent. Ce marchand achète avec le comptant qu'il a
reçu les denrées qui lui présentent l'espoir d'un-meilleur retour; et,
lorsqu'il est obligé d'acheter du sucre, il choisit toujours celui qui est
li
242
de plus belle et de meilleure qualité. Lorsque ce même marchanà se présente
..~._._.
au Cayes, l'acheteur n'a point de comptant à lui donner, il n'offre que
des denrées. Comme il y a peu de café, de coton et d'indigo, parce que les
établissemens de ce genre ,quoique nombreux, sont peu considérables, il ne
trouve guère que du sucre de très mauvaise quAIi té dont la reElise lui pré-
sente toujours une perte assurée" (1).
3-1. LE PAIEMENT EN ARGENT:ET LA OONTREBANDE AVEC LES COLONIES ESPAGNOLES.
Deux éléments d'explication se dégagent de ce témoignage: le
mode de paiement et la qualité du sucre. Le paiement au comptant, de pré-
férence en argent est lié à la spécuh.tion sur les piastres ,dans laquelle
s'illustrent les ~ateurs ponantais (2). Robert LACOM31 (3) fournit
d'intéressants développements sur ce trafic de piastres et son importance
dans le commerce d~ Levant. On voudra se reporter à son article pour les
détails. Signalons simplenent que, d'après l'auteur, "les commerçants
français ....~ent réussir à.H:abl1r'du Ponant au Levant, un circui. t : pa-
cotille-nègres-piastres-roupies-tissus d'indiennes, qui devait être très .-
'-_.~
.. ~~
réLlunérateur, tout au moins en temps de paix".
C'est que, "depuis 1736, les Français avaient obtenu de l'Empe-
reur des Indes, le Grand Mogel de D8lh1,le·privilège d'émettre des roupies
dans une monnaie installée à Pondichery. Cette monnaie frappait environ
25 tonnes d'argent par an. Chaque bateau arrivant à Pondichéry devai t obli-
•
gatoirement avoir un tiers de sà cargaison const! tué en piastres", une
frappe qui laisse de grands bénéfices à la Compagnie des Indes Orienta-
les~ Elle aurait absorbé en 1786 13 millions et demi de livres tournois
de mièces d"argent, soit près-4e--24 000 COO piastres. Ces piastres qui
partent au Levant sont chargées à Marseille.
(1) DUTRCNE LACOUTURE, Précis sur la canne et sur les moyens d'en extraire le .
sel essentiel, p.350.
(2) DERr·iIGRY (L.), Cargaisons indiennes. 30lier et Cio~, Î iê6-ii33, Tome .1., p.
81.
(3) ~ut ce qui suit, nous le devons à cet aute~r.
LACOURBE (R.), Histoire m~nétaire de Saint-Domingue et de la République
d 'Hart! jusqu'en 1874, p. 31-32.
1
. ,1 '\\
l
243
La France se spécialise donc dans les transactions sur le métal
blanc. En 1776, le bénéfice de la revente des piastres en ?rance~-est en
moyenne de 5 sous tournois par pièce, soit 4,75 % (1). Donc, capitaines
négriers et capitaines de navires en droiture ~'arrangent pour garder, en
piastres, une bonne part~e de leur bénéfice commercial: l'exportation
amm.ll.·aftu• ...--v.rII-·lâd~po:l. est évaluée à 200 OCO pièces (2). r-:ais
ce chiffre paraft insuffisant ; il faut y inclure les sorties clandestines.
En 1787, la valeur des paiements des fournitures françaises s'élève
è
146 812 000 livres, dont 7 059 000 en piastres, ~t en 1788, la valeur
des paiements est de 175 989 000 livres, 5 772 000 livres sont en piastres
(3).
Ailleurs,lespai. . .nts s'effectuent en denrées coloniales. ~ais
cela signifie-t-il que aux Iles du Vent par exemple, le paiement ne s'effec-
tue jamais en piastres ? Assu~ent pas, puisque le mémoire anonyme de 1773
imprimé au Port-au-Prince, en réponse au commerce de France, "nous apprend
que "le plus ~d nombre des navires françois qui y abordent, vend ses
marchandises sèches en argent comptant qu'il va porter à Saint-Domingue
pour y acheter les d~nrées de cette colonie ••• "(4). De ce point de vue ---~ .
donc, le dédain des négociants ne se justifie V~. Le fait que ce type de
paiement ne figure ~s dans le tableau des balances du commerce signifie
qu'il n'est pas déclaré,par conséquent, que ces piastres sont exportées
clandestinement en France.
Cette absence de °numéraire,donc du paiement
au comptant:
en
ar-
gent, est l'un des facteurs de la négligence affichée à l'égard du Sud de
Saint-Domingue. Mais le cas de cette partie de la colonie de Saint-Domingue
donne un bel exemple des contr~tions internes du système commercial
français d'Ancien Régime. Les négooiants agissent comme s'il fallait l'a-
bandonner à son sort. Ce qu'ils savent et qu'ils n'appliquent pas d~~s le
Sud, c'est que ce sont de constantes injections de piastres qui peuvent
LACOUR3E (R.), ODe cit., p.31.
L'Abbé Raynal cité par Robert Lacourbe, p.3C.
12
AN F
1835, tableau n0 43.
2
''Mémoire en réponse à celui du comrr.erce de France, 1773", p.15 .A1~ Col F :B3.
244
ranimer le commerce. Introne LACOUTURE a le méri te de le souligr.:er :
"Si le marchand se refuse aux avantages que lui offre le go'..:.'~rnement
en faveur des C~es, pour le déterminer à porter des secours en !;è-
gres ••• on doit Itre bien éloigr.é de croire qu'il lui en portera en
argent. Cependant, nous oson assurer que l'argent seul peut la "faire
sortir de l'état de langueur où elle est depuis si longtemps; l'ar-
gent seul peut faire valoir les avantages dont la nature l'a favori-
sée; et à la faveur de cet argent, elle s'élèvera au-dessous de tou-
.te. lea autres :parlies .de la coloni,es" (1).
Cette analyse confirme notre thèse, à savoir que la richesse n'est pas une
cause, mais la conséquence de la pratique commerciale française. Les co-
lonies les plus fréquen"t€es~sont naturellement celles qui sonnevenues riches,
en l'occurrence ici, la partie du Nord et relativement l'Ouest,
L'indifférence à l'égard du Sud ne fai t donc qu'aggraver singu-
lièrement la pénuxie d'espèces avec pour corollaire, une impossibilité
chronique de paiement en argent comptant. En fait, ici comme ailleurs, aux
Iles du Vent en particulier, nl e commerce de France voudrait ne faire que ..
cueillir, ·'.ans semern(2).
----.-
Un autre élément important, lié au mode de paiement, est la durèe
. du paiement, celle-ci se traduisant plus objectivement en longueur du
voyage. Plus il est long, plus les dépenses sont énormes. Cette longueur
détermine aussi le choix des destinations. Cela n'a aucun rapport avec ~,
•
l'opération de recouvrement des produits qui n'ont pas été livrés et dont
Dutr5ne LACOUTURE nous apprend qu'elle va de 6 à 18 moi s au maximum pour
le }Tord et l'Ouest et probablement pour les Iles du Vent (3) .Ce temps de
re-couvrement serait de 18, i?Oet 2_?' mois pour les ports du Sud de Saint-
Domingue (4).
(1) Dutrône LACOUTURE, p.351.
(2) ''Mémoire en réponse à celui du commerce de France .1773", p.3 A1~ ColF2~3.
(3) Emile GAIDJALT indique que la longueur du voyage pour les îles du Vent et le~
parties Nord de Saint-Domingue est de 8 à 10 mois, très rarement 12 mois •••
cf. Le cc~~ercs ~chelais ~~ X'ITllè si~cle d'~p~BS les d~c~e~t~ cc~~a:é~_t
les anciennes archives de la chambre de commerce de la Rochelle, Tome V,
p. 383.
(4) GAlU!AULT (E.), op. cit., p.383.
1
t
245
1
r
!
1
Le séjour.aux fIes serait très coûteux s'il se prolongeait jusqu'à
t11
,
ces termes. En effet, parmi les droi ts de commerce payés aux rIes, ~l y a
.1
:î
des frais j~~~iers d'une grande variété. Pierre PLUCHON indique qu'ali-
~1
mentation et boisson y occupent la première place. A cela, i l .ajou te des
frais d'un montant plus modeste, à savoir: blanchissage, réparation, loca-
tions diverses (-1) •. Aussi, le séjour doit-il être une affaire, soit de
quelques jours, soit de quelques mois.
Cela suppose donc que le paiement au comptant ou en denrées s'ef-
fectue à des échéances très courtes, c'est-à-dire au ~~part le plus proche
du navire, ce que seuls aes colons aisés peuvent se permettre.
La question est de savoir maintenant si le remboursement des det-
tes de cargaïson, s'effectue aussi promptement que nous le fait croire Dutrô-
ne LACOUTURE. Pas plus certainement qu'aux rles du Vent. Stanislas mACHE,
colon: et négociant au Cap, la plus riche région de'Saint-Domingue,est ca-
-~.-
t~gorique sur ce point : "Il est .1. .-re d' 3tre payé-exactement à. j;Èm1ps
qu'on se croit m3me obligé au remerciement vis-à-vis de ceux qui payent à '---.
leur éché~ce. Un habitant se plaint qu'on lui manque en le faisant assignér
et se croit dès lors permis de mettre en usage toutes les ruses de l~ chi-
cane pour ra tarder 1e pai em'ent ••• " (2) •
Le négociant assigne devant 'le conseilles mauvais payeurs auprès desquels
il a épuisé les moyens amiables: en 1766, pa~ exe~ple, 500 causes sont
soumises au conseil, ~ "il faut deux ans avant d'avoir un arrêt du conseil
•
sur un simple billet"(3) •
Les lois autorisent le créancier à saisir le mobilier, les biens-
fonds et les denrées e~ magasins a±-sur place, mais ces formalités infinies
et très dispendieuses, ainsi que les procès préliminaires à soutenir, avant
d'aboutir à la saisie réelle, font reculer le créancier le plus opinâtre (4).
Mais, si le colon de Saint-Domingue est aussi mauvais payeur que celui des
(1) PLUCHCN (P.), La route des esclaves, p.262. Il évalue les dépenses de seJour
d'un' négrier aux rles en moyenne à : "entre 3000 et 6000 livres tournois pou::.
les frais journaliers, ainsi que pour les frais de transports et les droits
de douane. Plus de 30 000 livres tournois pour les frais et droits du navire
dont près de 9~~ sont absorbés par les diverses commissions prélevées sur
le produit de la vente des déportés", p.263.
(2) BEGOUEN ~EM1l~UX (M.), op. cit., p.31.
(3) BEGOUEN DEMEAUX (M.), op. cit., p.32.
(4) GIHOD DE CRANTiANS (J.), Voy~e d'un Suisse dans différentes colonies d'~~é
rigue, Lettre XXI, Saint Domingue 1782, p.185.
-
'. ~~ ..""..-:'-
246
autres colonies, comment s'explique alors l'engouement des négociants?
Il s'explique par':", raison. majeure
le. cO:1trebande avec les col~)riles
~:-
-:
espagnoles
__ ~~__~-...:.
--.;.-:.
L'tpretéà.u gain dont font preuve les négoèiants les condui t
à des paradoxes. En effet, il est particulièrement contradictoire de voir les
mêmes hommes se faire les défenseurs acharnés de l'exclusif national, au
détriment des colons et se livrer au. commerce avec les Espagnols. Saint-
Domingue a été le théâtre principal des ventes françaises à l'espagnol:
.,....-----------_.
-
vente de captifs et vente de marchandises d'Europe, arrivées par les navi-
res venant directement de la métropole.
C'est qu'en effet, face à la partie française de Saint-Domingue, la partie
espagnole, la partie Est, ainsi que Porto-Ri~o, sont des zones de basse
pression, qui ont besoin de main-d'oeuvre et des produits d'Europe pour
leur mise en valeur. G. tel commerce est tentant, d'autant que par un ac-
cord tacite, les Espagnols sont autorisés à'venir se ravitailler dans les
colonies françaises. Aussi, ceux de la partie Est et de Porto-Rico vien-
nent-ils s'approvisionner en captifs et en denrées d'Europe, en"payant en
piastres. C'est ce qu'~n appelle "la vente d'esclaves à l'espagnol (1)
un captif vaut 1 500 livres à Saint-Domingue en 1785 ; cela représente
175 piastres. L'abbé RAYNAL, que ci te Robert LACOMBE signale en 1785 que
la vente d'esclaves à l'espagnol se solde chaque année par une entrée de'
300 000 piastres. Cetie.traite représenterait la moitié des importations
totales de Saint-Domingue (2).
Ce courant économique, q~6utit au circuit des piastres, ex-
.-
plique, à notre avis, pour une part la prépondérance de Saint-Dornin~~e dans
le commerce colonial français. En effet, le trafic avec cette colonie est
un prét~xte commode pour se livrer avec bonheur au fructueux commerce avec
les possessions espagnoles. Cette révélation autorise à faire de sérieuses
réserves sur la prétendue richesse de Saint-Domingue. Dès lors, l'argument
selon lequel l'abandon déS îles :tu. Vent pa.r la. traite française provient
(1) LAOOJœE (R.), or. cit., p.30.
(2) LACOMn (R.), op. ci t., p. 30.
!
.j
;i -t
1
247
de l'admission des étrangers en 1784, perd de son poids. Le commerce in-
..~---
terlope est aussi actif à Saint-Domingue que dans les autres colonies •
•
~
Stanislas FOICHE, négociant au Cap, n'a c~ssé de dÉnoncer cette
pratique qui viole ouvertement l'exclusif. Les Anglais qui exercent une
certaine fascination sur les colons français semblent, de l'avis des négo-
ciants,les plus actifs (1). Ils ont m3me des complics. parmi les négo-
ciants français de 1 'tle. Il cite le cas d'un ce.rtain LORY, négociant au
Cap. Ce protecteur zélé des Angl~~s est, de plus,intéressé dans un magasin
très considérable près de Massacre, qui traite avec Curaçao et Saint-Eus-
tache. C'est fort de cela qu'il est très méfiant à l'égard des Juifs. Car
avec eux, "il sera bien difflciie d' emp3cher 1 a contrebande m3me si les
affaires redeviennent meilleures-(2), écrit-il en 1764.
L'engouement pour Saint-Domingue n'aurait été constant en partie
sans le commerce fructueux avec les possessions espagnoles. Mais il y a
une autre raison non moins importante,liée également au mode de paiement
les contrats de liaison.
'-2. LES OONTHATS DE LIAISON COMME FACTEUR IMPORTANT DE LA FREQUENCE DU TRAFIC
AVEC SAIN'P-roMINCUE.
"1
Nous -avons déjà montré que la pratique massive du crédit commer-
•
cial a'débouché sur la signature de nombreux contrats de liaison entre colons
et négociants, au cours du XVIIIè siècle, contrats qui réservent au négo~
caint: ~réancLer la totalité des dvnr4es produites sur les habitations des
colons débiteurs. De;'teÎs contrats ~,r~voient la livraison de ces
denrées à des échéances bien déterminées, imposent donc des relations très
régulières entre colons et négociants.
Cette fréquence est rendue nécessaire et irréversible du fait de
l'accumulation des dettes et du déséquilibre du niveau quantitatif des
11) BEGOUEN DEffiilAUX (M,)', op. cit., p.25.
(2) BEGOUEN DmEAU1C .(M~), op. ci t.; pp.25-26 (lettre,.19 Septembre 1764.)
248
des échanges. Les négociants recevant plus de denrées en échange des four-
nitures faites aux colons, ont néoessairement besoin de plus en plus ~~.
navires pour les embarquer. D'où aussi l'intensité du trafic: nous avons
signalé, en effet, qu'avec le produit de la vente de captifs, le tiers ou
le quart des denrées est rapatrif par le négrier, le reste devant partir
sur deux ou trois navires en droiture.
La prépondérance de la vente négrière à Saint-Domingue débouche
donc nécessairement sur l'intensité du trafic en droiture avec la métropo-
le pour le transfert des bénéfices sous forme de denrées. ~ais cela signi-
fie, du fait du crédit, que le nombre de colons correspondants est plus
élevé, le négociant créancie~omm1ssionnairese réservant en effet l'ex-
clusivité des fournitures de nègres et celle des marchandises proven~~t
d'Europe. Dans une telle perspective, la disparité commerciale aux colonies
s'avère irréversible: Saint-Domingue, mieux fréquentée parce qu'immobi-
lisant plus de capitaux métropolitalns, devait conserver nécessairement sa
prépondérance, les colonies moins fréquentées, ~ui de ce fait immobilisent
moins de capitaux métropolitains, étaient cqndamnées à ~tre moins prépondé-
rantes dans le tr81'ia oommercial ~ donc à fournir ·moins de denrées à la mé-
tropole que Saint-Domingue.
En ce quL concerne les sucres, la prépondérance de Saint-Domingue
est renforcée par la qual! té de sa production.
"
,-,. LA QUALITE lES SUCRES.
Le développement de la production sucrière à Saint-Domingue et
son orientation vers une production de qualité constitue un facteur impor-
tant dans la prépondérance commercial'·de
cette île. En effet, la concur-
rence que redoutent tous les négociants leur impose de n'acheter que les
sucres de bonne qualité. Comparativement aux sucres de Saint-Domingue, ceux
c.es îles du Vent sont considérés comme de mauvaise quali té. Cette mauvaise
qualité des sucres est dénoncée dès les débuts de la révolution sucrière
dans ces îles entre 1660 et 1680. Les gouverneurs de Baas, en 1664 (1) et
(1) Mémoire de de BAAS, 26 Décembre 1664, AN Col C8Ar folio 13.
.;,\\1..
1> •
··~49·
.- .
'BLENAJ~ 1.678 en parlent dans leur correspondance administratives avec la
"'~--" :
métropole : mauvaise qual! té des sucres à la Guadeloupe et à la !'lartinique.
Le 25 Janvier 1.678. le conseil supérieur de cette dernière colonie élé'.bore
un règlementcsur la .fabrication des sucres~2). Un colon hollande..is qui fa-
brique de mauvais sucres est m3me arr3té (33 et le mémoire de ?L~:AC du·
15 Avril 1678 insiste sur les mesures à prendre pour rétablir la qualité
des sucres.
Nous sommes à l'époque de la politique réglem~ntaire de Colbert.
Il faut fabriquer en assez grande quanti té, mais produire bien, surtout
quand il s'agit des marchandises d'exportation. En 1733, la raffinerie de
Cette se plaint de la mauvaise quaiité du sucre de :Bordeaux, sucre de
ma~vaise qualité qui, selon elle, g3ne sa production. C'est que cette raf-
finerie prétend recevoir du beau sucre de Saint-Domingue; celles de Bor-
deaux oonvertiss.at les sucres en pains ordinaires et les sucres terrés de
la Martinique en sucre royal après deux opérations de raffinage, et les
sucres bruts en sucre en pain de couleur rougeâtre, connu sous le nom de
.-...'! •
. -
·r"_tr
. _ _
r - -
cinquième .espèce(4)'-
_ • .-;-
:--,_
·r~_.
Les plus beaux sucres bruts coloniaux proviennent donc d2 Saint-
Dominguë. Le quintal de -sucre brut de Léogane produirai t dans les raffine-
ries bordelaises 80 lb de sucre raffiné dont 38,40 ou 45 de la première
qualité, 15 à 20 de la seconde qualité et 15 à 20 de la troisième qualité.
D'après les directeurs et fermiers de Bordeaux, ceux des autres colonies
donnent les m3mes résultats mais les sucres obtenus seraient de qualité
inférieure. Ceux de Montpellier nous apprennent que "les sucres bruts dl':
belle qualité comme ceux du Cap, de Lé&gane etc. donnent un tiers de sucre
en pain, un tiers cassonnade et un tiers sucre vergeois ou mélasse.
(1) MémQire de Blénac à Colbert, 28 Janvier 167e, AN Col CeA2 folio 50.
Mémoire de Blénac, 31 Janvier, A~ CeA2 folio 147
Mémoire de Blénac, 15 Avril, AN CSA2 folio 164~.~~-
(2) "Règlem~nt du Conseil supérieur de la Martinique sur la fabrication des su-
cres", AX Col CA2 folio 112.
(3) Mémoire de !lénac; 31 Janvier 1678, A~ Col C8A2 folie 147.
(4) "POUL' donner une idée intelli.giblG du bon état de la ,fabrique des sucreT2
dans les raffineries de la ville de Bordeaux", 27 ~ars 1733, n0253 ~; F
15C
."\\
il: ..•.
250
Ceux de basse qualité comme ceux de la Martinique et d'autres semblables ne
,"
donnent q1i'ft~Z'Onmoitié de sucre en pain et cassonnade"( 1). Ce faisé.:~-t,
ces sucres de Saint-Domingue ont été, ordinairement,p1us c5tés que ceux
des autres colonies.
•
Cette précision importante n'apparaît pas sur les balances du
commerce élaborées sous 1t'Jacien Régime. Origine et prix ~artie1s des mar-
chandises, les sucres en particulier, n'y apparaissent systématiquement
qu'à l'iâsue des instructions de 1792 (2). Avant cela, on n'a affaire qu'à
des renseignements fragmentaires.
En 17e7, les sucres-bruts de Saint-Domingue sont côtés de 32 à
36 livres le quintal au Port-au-Prince (3H='-rm san't pas encore les meil-
leures qualités. Ils valent cette année-là 30 livres à Sainte-Lucie (4)
et 25 livres en Guadeloupe (5), prix administratif. La différence est donc
de 0,2 %et 0,24 %, en fàveur des sucres bruts de Saint-Domingue. Le sucre
blanc de la Guadeloupe, certaineae.nt la première qualité, est côté à 50
livres le quintal. A Saint-Domingue et part;f.cu1ièrement au Port-au-Prince,
la première qualité de sucre blanc est· cotée de 66 à 70 livres, la seconde
qualité de 58 à 65 livres et la troisième de 48 à 55 livres. La comparai-
son est tout de m3me malaisée, car nous avon affaire visiblement à deux
tYPes de prix: prix administratif pour la Guadeloupe et certainement prix
de marché au Port-au-Prince.
Mais l'imprécisi9n •• remet pas en cause l'idée de la différence
de cotation. En effet, un exemple relatif au prix à la réexportation au
~avre en 1791 découvre cette différence (6) :
"Q.u8..'1ti té exacte de sucre brut qui entre dans la composi tion d'un quintal
de sucre extrait des rapports des directeurs et fermiers dont les départe-
ments comptent des raffineries", AN F12 1502.....
_
12
Circulaire pour établir la balance de commerce 1792-1793.
AN F
1866~
Prix des marchandises de la colonie au Port-au-Frince. Affiches ~~éricaines
du Jeudi 4 Janvier 1787. ~: Col F3 163. Collection ~oreau de St Eery.
Etat sommaire du commerce de Sainte Lucie pendant lesprelilier, second et
troisième quartier de 1787. AN ColC10C8.
Prix des produits sucrièrs en Guadeloupe, SCHNAKm~BOURG (C.), les sucreries
de la Guadeloupe, Tableau n03, p.264.
(6) Réexportaion des marchandisès des isle8, le Havre 1791. MJF121671.
origine des sucres
Janvier
Avril
sucre terré
sucre brut
sucre terré
of':\\-- _.
Saint Domingue
100 lt le quintal
73 l t
118 It·
Guadeloupe
92 1 t
69 l t
110 It
Tabago
69 l t
Martinique
90 lt
•
110 It
La différence est de 5,80 % en faveur des sucres bruts de Saint-
Domingue ,-. en Avril, de 8,70 à 11,11 % en faveur des' sucres terrés en Jan-
vier et de 7,27 %en Avril. La mauvaise qualité des sucres bruts aux rIes
du Vent,donc différence de cctation, comparativement à ceux de Saint-Domin-
gue, explique mieux le refus des capitaines des navires d'en charger, si
ce n'est pour compléter leurs cargaisons •
. -:.-_._--
De ce point de vue, les raisons avancées par Christian SCB:NAKEN-
BOURG (1), coulage du sucre brut pendant la traversée qui empeste le navire
et réduit la valeur. du chargement, insuffisance du bénéfice réalisé sur
la revente en France, se révèlent peu satisfaisantes. L'insuffisance des
bénéfices sur la revente des sucres bruts des rles du Vent n'est pas ex-
clusivement liée à la réduction de la valeur du chargement, celle-ci étant
d'ailleurs générale, mais aussi et surtout à la mauvaise qualité du pro-
duit qui retarde la revente et force les négociants à s'en dëssaisir à deE
prix désavantageux.
Cette qualité des sucres et cette hantise d'une revente avantageu-
r
se des marchandises e;pliquent donc le déséquilibre commercial entre les
trois parties de la colonie ; les négociants vont là où ils sont assurés
de faire de bonnes affaires •
.. 4•. LES ZO~:ES PREFERENTIELLES DU CO}~RCE F'!W'CAIS A SAIy':'''''ijOMINGUE.
L'insuffisance des données ne nous permettra pas de faire une
étude plus cOI!!plète. Toutefois, celles fragmentaires donLnous disposons
permettent, nous osons l'espérer, de poser en termes précis l'importance
(1) SCF.ŒIAKEt~URG (C.), op. cit., 1'.163.
252
respective de chacun des principaux ports de la colonie. Il s'agit des états
d'entrées et de sorties des navires de quatre ports -boloniaux.:1'rap~Ma·~-en..1767. :
La Rochelle (1 )-,Nantes(2) t le Havre et Honneur (3)
•
Tableau no39 - Entrées et sorties des b~timents des norts de France en 1767
et 1768.
S = Sorties
E = Entrées
,
,
Ports I!létro-
CAP
J~.ORT-AU-·
LEOGANE
st }1ARC
CAYES
St LOUIS J. Provenance
poli tains
. PRINCE
!
--,
non précisée
- .
d'armement
S
E
S
E
S
E
S
E
S
E
S
E
S
E
!
La Rochelle
1
1767
2
4
1
1
6
J
1768
! -
2
8
! -
2
- ! -
2
t
!
"Nantes
9
12
11
7
8
5
1
4
4
4
4
1
r
,
ÎLe Havre
- 14
-
1
!Honfleur
! -
3
1
1
-
. Nous disposons de trois états de sorties et d'entrées de navires en
1791 concernant les ports de Bordeaux (4), Nantes (5) et le Havre (6) •
• r
l
L'observation des tableaux laisse penser que chacun des ports
colonia.ux a sa zone de· préférence spécifique. Il s'agi t d'une pis te de .>-
recherche intéressante mais une telle étude demande des données suffisa~
tes que nous n'avons pas maintenant. Il est donc prudent de ne pas tirer
de conclusions définitives.
Remarquons simplement qu'en 1767 et 1768, la Rochelle est plus
en relation avec les ports de l'Ouest de Saint.Domingue. La primauté étant
réservée au Port-au-Princef Saint-Marc et le Cap rivalisent d'importance.
Le Sud semble entièrement ignoré des négociants rochel~s. En valeur ab-
solue, les ports de l ~uest attirent le plus de navires nantais en 176ï.
!'!ais en valeur relative, trois ~ts se déga.gent nette:Jent : Fort-au-
Prince, le Cap et Léogane.
Dans le Sud, le port de Saint-Louis affirme une certaine suprématie sur
les autres.
En ce qui concerne les retours, malgré l'importance des ports de
l'Ouest, le Cap s'affirme en valeur relative comme le premier partenaire
co~~ercial, cette primauté du Cap s'affirme plus amplement avec le ~avre
.
et Honfleur en 1767 et Bordeaux en 179l pour les sorties, tandis que
i-iantes continue d'accorder l~ première place au Port-au-Prince.
L'importance du Port-au-Prince est cependar.t plus liée à son statut de
capitale de la colonie, siège du gouvernement et de l'a~inistration géné-
rale, qu'à une suprématie économique.
Le fait que le Cap occupe la première place dans les retours en
est la preuve éclatante. Le Cap jouit en effet d'un avantage géographique
et économique certain. Il est si tué au-----"eiit des autres ,orts et bénéfi,*=
constalnment des effets bienfaisants 'des alizés sou'fflant d'Est en Cuest.
MOREAU de SAINT }~RY nous apprend que cette orientation des vents oblige
tous les bâtiments arrivant de Fra...'1ce par la côte nord de la colorüe es-
pagnole à ve:lir. passer par le Cap. C'est aussi la première-région sucrière
la plaine du Cap offre les meille~rB sucres de la colonie ayant donc des
débouc~és certain~ 8ême en temps de guarre (1).
(1) ~OREAU de Saint MERY, Descrintion touo~ranhioue. physioue. civile, noliti-
Que et historique de la uartie françë.ise de l'isle de Saint DoninR"lle, ~~lle
édition, p.119.
255
Les raffineurs bordelais l'ont déjà reconnu en 1733 (1). Pour eux, en
effet, "Le Cap Saint Domingue a fourni jusqu'à présent les plus beaux
.(!-.-
sucres bruts de toutes les colonies" ; les sucres de Léogane, :poursui":~ilt.
les auteurs du mémoire, ne sont pas aussi beaux que ceux du Cap, ceux-ci,
en effet, forment au sortir du raffinage à Bordeaux, èu sucre en pain de
la troisième qualité, appelé sucre ordinaire.
~ais il Y a plus encore~ Ce sont les sucres de "l'Isle à Vache",
dans le Sud. 'Il.
sont inférieurs à ceux de Léogar.e' cette ~auvaise qua-
,
,
lité est due à l'abondance de~ déchets.
Bll.
retarde la revente et
force les négociants à les livrer en Fra~ce ~ des ,rix tr~s désavantageux (2)
!!;oreau de Saint Eer'J attribue cet'te e;os'.nee de pertecti'éimement cl•• sucres .~~
le Sud. au manque de "forces cultivatrices"(3). Précisons aussi que c'~st au
Cap que les marchandises sont le plus avantageusement vendus. C'est le
port de la colonie où il arrive le plus de captifs par la traite française
car, estime le mémoire anonyme du Port-au-Prince de 1773, " s'il arrive
un négrier de 4 à SOO nègres,. il est bien rare qu'il en sorte moins de
mille à douze oeD.~(4).
Cela n'est pas fait pour nous surprendre. En effet', si tué à pro-
ximité de la partie ~spagnole, la vente d'esclaves à l'espagnol y est plus
facile et la circulation de numéraire plus rapide, les habitants y étant
aussi beaucoup plus riches. Notons que le manque de numéraire et la mau-
vaise qualité des denrées dans le Sud expliquent l'indifférence des négo-
"
ciants français. L'allusion faite à la contrebande anglaise résultant de la
p~oximité de la Jamaïque nous apparaît une extrapolation abusive.
(1) "P~tlr donner une idée intelliei~e du bon état de la fabrique des sucres
dans les raffiz:1eries de la ville' de Bordeaux", n !'~ars 1733, ~. F12 1501.
(2) GAID\\AULT (E.), Le co~~erce roc~elais au X~nIIè siècle, Tc=e V, P.324.
(3) EOREAU DE SAI?-TT ~:E:l.Y, op. cit., p.1166.
(4) i":émoire 'en répons:: à celui du CO::l!!1erce de ?r2nce 1773, A? G'Tl-P233.
1
256
1
~;
t
1
IXTTRONE LAOOUTURE nous apprend en effet c:ue, ::1clgré l'ouverture de l'entre-
!
p~t des Cayes en Ao~t 1764, le dltaut dt. paiement en a.rgent ccr.:.~tant et
~_}
la mauvaise qualité des sucres, qui n'offrent 1'9.S les m~:nes pro fi ts dans
1
la fraude que ceux de Port-au-Prince ou du Ce.p ,iont que 1•• .'trangers ·ne s 'y ha- l
sardent que sporadiquement (1). Mais les états d'entrées et de sorties des
!
navires, quoiqu'incomplets, montrent que le retard du Sud est en train
t
d'~tre rattrapé à la fin du XVIllè siècle.
1
1
1
La part du port des Cayes a progressé dans les expéditions nan-
t
t
taises vers Saint-Dominsuet ainsi que dans le trafic direct du Port· du
Havre. Les petits ports de la région : Jérémie, Je.cmel et }:ire.goane, re-
1
l
coivent quelques navires directement'aeLàmétropole. Cela signifie sans
t
doute que le Sud ne dépend plus des ports du Cap et de Port-au-Princ8 pour
s'es expéditions.
!ans cette perspective, il aurai tété intéressant de suivre
l'évolution générale du trafic de chacun des ports de la colonie pour mon-
trer les progrès réalisés et les déclins. Mais ainsi que nous l'avons an-
noncé au début de cette étude, l'insuffisance des données à notre disposi-
tion est un handicap sérieux.
Nous retiendrons de cette étude deux idées essentielles. La
première est le rôle prépondérant de Sain~Domingue dans le commerce colonial
-.français. Elle tient sa primauté de la conjugaison de facteurs favo-
rables : une possibilité plus grande de contrebande avec les colonies
f
i
espagnoles et la qualité de sa production sucrière. La seconde est l'ac-
::..,1.....
..•..
',',
"
caparement du trafic des rIes du Vent par la Ma=tinique.
Cette particularité du con~erce français aux:iles èéte~ine le niveau que.n-
.
titatif des ?xportations sucrières des .colonies.
(1) DUTBOfE LACC~~JaE, C~. cit., p.352.
.J1:.:\\
257·
11/ Les importations sucrières françaises, fidèle reflet des particularités
du commerce colonial.
Fivot de l'industrie sucrière et de la navigation coloniale, la
prépondérance de Saint~omingue au ni veau des importations sucrières de la,
métropole porte ombrage aux autres colonies. Le premier objectif de ce
travail est donc de mesurer concrètement à partir des données statisti~ues
existantes le ni veau quanti tatif des exportations sucrières de chacune des
colonies françaises en présence. Mais on aura été incomplet en s'arr~t~~t
è ce seul aspect de la question.
En effet, l'industrie sucrière soulève deux problèmes majeurs.
qui, parce qu'ils se retrouvent au niveau des importations, méritent d'être
pris en considération. Le premier est celui des types de sucres importés.
La France est la seule métropole à importer quatre types de sucres de ces
colonies : sucres bruts, terrés, tête,raffiné ou sucre blanc, une singu-
larité résultant de l'antagonisme des intérêts en présence. Les colons
étant contraints d'adapter leurs productions aux exigences capricieuses
des négociants afin de pouvoir en obtenir le juste prix, du moins un prix
à peu près convenable. Cela n'a pas empêché le gouvernement royal de
considérer le sucre brut comme aeulamatière première et, à cet égard,
principal aliment des raffineries installées en métropole avec un traite-
ment de faveur au ni veau des tarifs douaniers.
,
On s'attend donc à ce ~u'il soit prédominant dans les imForta-
tions. Mais en est-il ain~i ? Cette question permet donc d'analyser la
str~cture des importations sucrières coloniale~çaises. Le second pro-
blè:nes est celui de la com!!lercic'.1isation des sous 't'rodui ts sucriers
si-
,
rops et' tafia, résultant du terrage du sucre aux colonies. Ils consti-
tuent selon les estimations, le dixième de la valeur de la production
des colonies. Cc:r.ment les conmercialiser sans porter rréjudi ce ""'X caux-. __
de-vie de raisins ?
258
Croissance. des importations et hiérarchie des colonies dans les four-
... - --- --------------------------------------------------------
nitures annuelles
_---ra
. de sucres.
a
, .
_
Le sucre intéres~ant le commerce inter-européen de la France par
la réexportation, la prospérité du commerce sucrier français d?~s la secon-
de moitié du XVIII~ siècle s'explique nécessairement par la prospérité
du commerce colonial. La prospéri té des importations sucrières en prove-
nance des colonies réagit en effet, inévitablement sur l'ensemble du com-
merce extérieur. Mais quel est donc le niveau des importations annuelles?
Telle est la première question à laquelle il nous faut répondre.mainte-
nant.
1-1. LA CROISSANCE DES l}œORTATIONS SUCRIERES ~JJCAISES 1763-1793.
- Critique des sources -
Les sources statistiques de cette étude sont constituées par les
états de la balance de commerce centralisés"aux Archives Nationales à
Paris. L'idée d'établir une balance de commerce est empruntée à l'Angle-
terre en 1713. Son objet est prioritairement'de ~ermettre au Ministre de
conn~tre l'état ~récis, ou supposé tel, du commerce extérieur français.
Ces balances ne comportent pas toutes les précisions que l'historien est
en droit d'en attendre. Bien des lacunes et imperfections incitent à la
prudence •
•
Les lacunes sont manifestes, en effet. Fernand ERA~DEL et Ernest
LA3RCUSSE l'ont déjà indiqué : "les archives statistiques centralis4es 2-
Paris n'offrent en fin de compte q~e rarement ces longues séries nationales
Qui constituent la matière premiare la plus sûre d'une reconstitution de
croissa::ce"(1). Point de donr:ées pour la période 1763 à 1774 (2) et pour
1781. Au delà de 17e~, la visibili té éconor:üque devient moins satisfaisan-
te. Elle est brouillée par les bculeverseI:1e:;.ts sociaux de 18. ~€volut1(m~lèS
relevés statistiques de 1790 à 17~3 sont fra~entairest ~21ETé les perfec-
~::.rtcut
(1) 3RAUTIEL (F.), LAERCUSSE (E.), Eistoire -€conc::::i,:,ue
et s8ci2.1e è.e '2. Frê:lCe,
Tome IV, pp.
(2) Pour 1774, on peut obtenir un total partiel ~ partir de donr.ées comparées
avec 1785. Cf. Al~ Col F2E13 •.-
259
Ode 1792 (1). Il est donc impossible d'avoir pour cette période trouble
des chiffres globaux.
La seconde observation concerne l'extrême dispersion des sources.
12
Théoriquement, elles devraient toutes être classées dans la série p
, re-
lativ~ au commerce et à l'industrie. En réalité, elles se trouvent dis-
persées dans diverses séries. Le premier groupe, le plus important assu-
rément, se trouve effectivement dans cette série. Une première liste de
données continues sur six années: de 1775 à1780, est classée sous les
cotes F 12,242 à 248. La cote F12251 ,rassemblant les années '1787, 1788 et
1789, ne comporte malheureusement pas les données quantitatives. Il
s'agit d'un résumé général des valeurs to~ales.
les données quantitatives sont plutôt conservées sous la cote
12
F
18'5 ~àu
tableau num~ro 42. Il s'agit piutôt des années 1787 et
12
12
1788. Lé F
252, qui fait suite au F
251, renfe~e les données relatives
12
au premier semestre de l'année 1792. Les cotes F
166e et 1669 concernent
12
12
l'année 1790, F
1671, l'année 1791, F
1674 et 1675, l'année 1792
~t
12
F
167E, l'année 1793. Les données manquantes se trouvent dans l~.~~nds
@oloniaul-.
Les stetistiques relatives aux années 1782, 1783, 1784 et 17E5 sont dans
les ~Fo~ds .' de Sainte-Lucie sous la cote Col C10C8 (2). ~., ColF2:B13 ren-
fe~e les donr.ées de 17e6 et même de 1725. Les renseignements concernant
l'année 1789 sont conservés
,Sous la cote Col P2:B12 aux tableaux 3, 4 et5.
La liste complète de ces sources ser~ publiée à la fin de ce travail,;
elle comprendra les titres exacts.
Qu'en est-il de la fiabilité des chiffres: Q.uestion fondê_:ner.t2~e
du fait des intérêts en ,présence. JusQu'à 1779, les ba.lances de corr.merce
(1) "Circulaire ë'_UX vingt directeurs de la régie nationale des douafles-tant
sur les principes, l'objet et le but des opérations de la balance du com-
~erce que sur le plan à suivre" AN P12 1e66.
Ces :al~ces so~t classées pa~ :urenux, directic~s et ~n~~es i~t4ressée~,
ce qui pe~et de ~esurer l'~~pleur de ce com~erce. Il y a aussi des indic?-
tions de prix et d'origine des marchandises.
(2) :Bala.'1ce du cOi:Ui1erce.;'fableau de l'importation des colonies françaises et de
la réexportation à l'étranger pendant les années 17e2, 1723, 1724 et 17E5
des espèces de denrées qui jouissent de la faveur de l'entrepôt et de l'ex-
emption des droits lors de leur destination pour l'étranger". Tableau n0 2,
AN Col C10C8.
260
sont établies à partir des états particaliers dressés par les receveurs a~
hoc, suivant les d~clarations des négociants, lesquels doivent être en-
.,...."'i11i61
voyés, à l'origine, à l'administration généra.le des Finances. Le travéül
;:t.~
passe ensuite èntre les maIns des Fermiers Généraux pour fi~alement é-
chouer entre celles des receveurs des douanes, sous l'égide d~ bureau
central de'l'administration du comwerce, relev~~t du Kinistère de l'In-
térieur à partir de 1792.
A tous ces niveaux, des erreurs peuvent êtr~ commises. Chargé
par ~~ECKER de réfléchir sur le travail de la balance de com.'nerce, l' ins-
pecteur géroéral DUPm~T abouti t à la conclusion que les étéi.ts envoyés
par les receveurs particuliers sont imparfaits; il l'écrit da~s une lettre
adressée à ~ECKER le 15 Janvier 1779 (1). Il s'agit d'imperfections
dues à des erreurs méthodiques. Y-ais il faut envisager ~ussi la possibi-
li té de fausses déclarations de la part.'des négociants. En effet, quoi
de plus normal que de sous-évaluer les sucres importés afin de payer le
moins d'impat possible?
~Nous avons aussi affaire à des chiffres constamment arrondis
qui prennent l'allure d'ordre de grandeur plutôt q~e des valeurs absolues.
yême avec les Fermiers Généraux qui ont tout intér~t à ce que les décla-
rations soient confozmes aux quantités de sucres importés, on n'est pas
à l'abri de la fraude. L'inspecteur DUPONT le r~marque à juste titre.
"On a été d'autant plus surpris, écrit-il, de voir ce travail entre
les mains des fermiers généraux qu'ils semblent intéressés à ne
jamais le rendre complet: en effet, c'est par la balance du com-
merce que le ministre peut juger d'un seul coup d'oeil des diver-
ses branches de commerce qui ont fleur~e qu'elles ont produit
à la ferme et sur lesquelle~ par conséquent on peut faire supporter
aux fermeirs des augmenta tians dans leur tra'l2.il" (2).
Comment mesurer cette croissance devant l'absence de longue. série
statistique nationale? Jean TA~~DE en propose une (3). toutes les années
(1) "Eémoire sur la ':::lalance du cOrrL-:1er(:e"(Anon:r.:J.e et sans d2.te) • .A..2?12 1':34A.
12
(2) "~·é!!loire sur la balance du cO!:1merce". A'!.' F
1834 1-
(3) TA~~nE (J.), Le com~erce colonial de l~ France à la fin de l'âr.cie~ Ré~i~e
évolution du système de l'exclusif de 1763 ~ 1i89, Tome 1, Tableau 'TIT,
pp. 257-25e.
261
n'y figurent pas : ce sont les années 1763 et 1764, 1765, 1769 à 1771, 1779,
1700, 1782, ·1791-1793. Jean TARRADE a addi tiormé les quanti tés de sucres
exportés vers la France d'après les Etats gé~éraux de commerce de Saint-~
Domingu~:artinique et Guadeloupe. Ces dor~ées ar~araissent ~ur le ta-
bleau en chiffre ordinaire. r':ais il a aussi recours 2.UX chiffres prove::.2.nt
des états de la balanoe de commerce. Les do~~ées sont obtenues par addi-
tion des différentes qualités de sucres. Les chiffres sont sou~ignés
dans le tableau. Il met le lecteur en garde au sujet des lacunes qui
n'ont pu ~tre comt1ées.
Four les années 1169-1770 et 1776, il manque les chiffres de Saint~Do~in
gue. Pour 1771, 177E et 1787, il manque les états de la Martinique. Pour
1785, il manque à la fois ceux de la Martinique et de la Guadeloupe.
Pour 1789 et 1790, les états coloniaux manquent ou sont incomplets.
I l n'a cependant pas répertorié tous les problèmes. Par exemple,
les états coloniaux sont incomplets ; il manque les états de Cayenne et
Guyane de 1765 à 1783, les états de Cayenne-Guyar.e et Tabago au delà de
1783. On ne peut donc comparer ces données à celles plus complètes des
balances de commerce, sans déboucher sur des erreurs comptables.
Celles-ci s'amplifient d'autant plus que les chiffres fournis
par les états c;oioiciaux pnt toutes les chances d '~tre supéri eurs à ceux
enregistrés en France m~me. De telles erreurs sont courantes, mais pas-
sent inaperçues. Tel est par exemple le cas en 1787, à propos des expor-
tations de Saint~omingue. En effet, entre les états dressés par l'inten-
dant BARBE de ~arlois (1) et les états de la balance en Fr~~ce, on aboutit
à des excédents de 108 899 quintaux sur le sucre brut et de 15 547 quin-
taux sur le sucre blanc (2).Cette différence s'expli~ue par le fait que,
entre l'enregï,strenent aux îles et l'enregistrerr.ent ~ans
France, il s'écoule un interv~lle de six se~aines. DÉlai dC"<1~::" ~ l.orsq.ue
l'on considère que les déclarations des denrÉes coloniales aux bureaux
des fermes n'ont lieu que six sem2ines ?-près l'arrivée des n~vires~s
les ports du Roya~T,e.
(1) Intendant de Saint-Do~in~~e d€
1125 ~ 17E9.
Compar~ison des quantités Qe sucres sortis de
en 1787.
sui vant les
suivant les
états de Marbois
états de la balance
excÉder. t
sucre brut
717 367 qx
608 468 qx
108. e99 q:E
sucre blanc
581 824 qx
566 277 qx
15 547 qx
262
Il existe donc au total un retard de trois mois dans les enre-
gistrements faits en France sur ceux auxquels on s'est livré dans les
colonies. Ces retards ne vont pas sans incidence sur le r~veau de~ impor-
tations annuelles. En effet, si les chargements aux rIes pour la France
sont abondants dans les trois derniers mois de l'~~née, cette import~
tion ne peut ~tre connue et enregistrée en France que dans le premier
trimestre de l'année suivante. Il est donc vraisemblable qu'une partie
àes retours d'une année provienne des cargaisons des derniers mois de
l'année précédente.
TA~~DE exprime ses données en quint~l, alors que celles des
états de la balance de CO!!1!llerce proprement.,,--dite s'expriment toujours en
livre-poids. Tbutes ces observatio~s ~ontrent qu'aucun chiffre de V2-
leur dans cette étude ne doit être pris au pied de la lettre.
Le niveau des importations annuelles nous est proposé par le
tableau suivant.
Tableau nO 41
- Importations en France des sucres coloniaux(1765-1793)(1)
I~portations annuelles
Importations annuelles
Importations annuelles
mées ! sucres de toute quali-
selon les états de la
(en lb) selon les éta.ts cen-
. té (en quintaux de 100
balance de commerce
tralisés aUX Archives Natio-
lb) selon les états
(en quintaux):'
nal e s à Pari s •
coloniaux.
r65
1 324 733
r,67
1 297 166
r6e
1 365 443
'72
1 425 412
'73
1 527 471
'74
1 468 247
14.1 445 595
~7S
1 642 6b'9
274 947
127 494 742
,~t.
1 825 04C
~
1
991 299
199 129 2S0
'''7
1 536 207
2 370 340
236 096 548
'7,~
237 034 032
'79
35 069 O~273-
,E:C
31 763 713
'€2
149 712 222
'S3
459 749
;16 612
; 11 661 244
':4
252 765
1 486 705
148 670 615
, cc:
1
- , /
995 421
199 542 149
'86
763 434
1 742 232
(1 742 23fqx)
'67
1 645 841
164 5ê6 234
'ee
2 065 106
1 8e3 548
186 354 7eC
'89
1 839 812
183 981 21C
'90
1 871 280
91
51 036 336
'92
!
43 165 395
'-93
e 407 641
262 bis
(1) Colonnes 1 et 2 : Cf. TA.RRA.IlE (J.), op. cit., Torne 1, pp.257-25ê.'
Colonnes 3 : ce sont les fruits de nos propres recherches.
1774 : Comparaison des importations de denrées coloniales en 1785 dans
les ports principaUx de Bordeaux, Nantes, le navre, Xarseille,
la Rochelle et Dunkerque, avec les importations des mêmes den-
rées dans les m3mes ports dans les années 1774, 1775 et 1784.
AN Col F2 B 13.
1775 à 1700
objet général du commerce de la France avec 1 'étr2:1~er,
y compris les isles fr~~çaises de l'~~érique • .~; F
242 à 248
1782 à 1785
AlT Col C 10 C8 Tableau n02.
17e6 : Importation faite dans les ports de France par 650 bâti~ents jau-
geant 188 586 tonneaux. ~1 Col F2 B 1'.
1787- 17ee : Tableaux comparatifs des denrées coloniales i~porté€s en
France et réexportées d~2ReyaQ~e à l'étranger en 1787 et
1788. Tableau n02. A..."J F . 1835.
1789
"Tableau des marchandises ir.lportées de chaque colc::üe française
de l'Amérique et celles provenant du co~erce du Sénégal et de
Guinée en 1789 ". Tableau n02-3. AN Col F2 E12.
12
1791
AN F
1671. Les données sont incomplètes. Le~ relevés conCErnent
les villes suivantes; rantes, le Havre,eLorient et Dunkerque.
1792
Commerce de France avec les colonies de l'Améri~ue pendant le pre-
mier semestre de 1792.
AN F12 252, mémoire imprimé p.142.
179~": "Importations pour l'Asie, l'Afrique et l'Amérique pax les princi-
paux ports de Bayonne, Bordea~, la RochelÏe, Nantes, Saint Malo,
Lorient, le Havre, Dunkerque, Marseille et Toulon".
AN F12 1678.
D
-Il•u·
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CD
CD
•
0
0
...
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r
1
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~
~
CD
i1
~
1
263
Aucune des séries n'est suffisante pour mettre en évidence l'évo-
lution des importations de 1763 à 1793. Or, il est hasardeux de remplacer
les éléments manquants d'une par ceux de l'autre, les sources étant diffé-
rentes. Il appara!t prudent de faire un choix. L'~lalyse sera faite à par-
tir des éléments de la colonne numéro 3, car ils proviennent de la même
source, à savoir des états de la balance de co~erce. Ils concordent,èu
reste,avec ceux de la colonne numéro 2. La seule différence est que Jean
T~~E exprime ses chiffres en quintaux et que nous les gardons tels qu'ils
sont exprimés sur les états de la balance. Traduit sous forme de gra9hique,
ces éléments statistiques donne l'allure suivante (voir graphique).
Toutefois, en raison des imperfections constatés dans l 'st~blis
senent des balances, des lacunes et des données quelquesfois inccn;lstes,
ce graphique est loin de donner une vision rigoureuse de l'évolution des
importations. Re~arqucns à titre indicatif que nous avons affaire à des
mouvements inter~~nuels, à ~~e alternance de mouvement de hausse et de
mouvement de baisse.
Sur la période antérieure à 1774, nous ne pouvons pas donner
une vision exacte de l'évolution, les chiffres manquen.t sur notre série.
Mais, pour autant que ceux provenant des états coloniaux permettent de
dire, on a affaire ~ d. brèves chutes' et à'de brèves reprises s'effectu-
~~t d'une ~~~ée
à· l'autre. Ces fluctuations sont liées à des événements
locaux, plus particulièrement à la pression du milieu naturel,presque
dans les mêmes moments.
Saint-Domingue subit cinq ~~~ées consécutives de mauvaise con-
jonc~~re de 1769 à1773 (1). Les intempéries d'une année cowpromettant la
récolte de l'~~ée suivante, on peut penser que les exportations de Saint-
Domingue vers la métropole en subissent les contre coups. Aux îles du
Vent: Guadeloupe et Martinique, la conjoncture sucrière n'est guère meil-
leure du fait également de la pression du ~ilieu naturel (2). Elles ne
(1) Une sécheresse en 1769 est SU1V1e en 1770 de 4 jours de tremblement de ter-
re ravageur, qui détruit 200 sucreries. Les pertes sont plus i~;crtêr.tEs
dans l'Ouest. Une sécheresse se produit en 1771, elle est suivie en 1772 dE
deux terribles cyclones. En 1773; une sécheresse se déclare à Léogane.
(2) Cf. SCflra p. 50 et 54
264
peuvent donc satisfaire pleinement le transfert de la demande ~étropolitai
ne, lorsque la situation à Saint-Domingue l'exige. Les années de hauase
correspondent aux relèvements des exportations de Saint~omingue. Les
chutes, aux années de crise. C'est par exe~ple le cas en 1775.
Après 1775, on assiste à une hausse spectaculaire. Elle est de
56,19 %, suite au retour à des conditions climatiques favorables, èor.c
à l 'a~élioration de la production et à la reprise du co~erce Détropcli-
tai~. Saint-Dcrningue double ses exportations vers la métropole en passant
de 73 286 342 lb à 151 570 950 lb en 1776.
Vais, ainsi que nous l'avons expliqué, le retard de trois rrrois dans les
enreeistre2ents faits en Fra~ce Deut réduire l~~~xportations d'une a~~Ëe
au profit de l'annéé suivar.te. Cette croissance continue en se ralentis-
sant,da."ls les deux dernières années: elle n'est plus que de 18,56 ~; en
1777 et de 0,40 ~ en 1778.
L'année 1778 constitue pratiquement un palier. ~ais l'absence
.
des chiffres de la ~artinique incite à la prudence quant à une apprécia-
tion définitive. Notons cependant que, si en 1777, les exportations de
Saint-Domingue cOIL"'1aissent une hausse de 29,94 % par rapport à l'an.."lée
précédente, en 1778, cette croissance tombe à 13,74 %.
Sans doute, les approches de la guerre maritime avec l'Angleterre expli-
quent ce léger ralentissement des affaires.
Les cinq années qui suivent,correspondant à la période de la
Il
guerre d'Amérique, constituent des années de crise. La guerre est dé-
clarée à la fin de Juin 1778, mais c'est en 1779 que les effets se font
sentir. Cela provient de la mauvaise conjoncture maritime et de la perte
des navires français.M.de GERMIH
indiQue que 12 mois avant la déclê-
ration officielle de la guerre, 162 navires français sont capturés par
les Ar.glais (1). Crise profonde dGDS les premiers moments de la guerre
en 1779, la baisse atteint le
tàWr:
record de é5,21 ;~ p8:' rapport à.
- - - -
l'~Dée précédente. L'an~ée suivante, elle est de 9,43 ;~. Ce ralentisse-
( 1'"
GERMINY (~
M. de).Les brigandages maritimes de l'Angleterre
Tome 2.p .68
265
:!laritime avec les colonies, due à l'e.méliorati:m è.e la sécurité sur les
~ers : en 1780, Bordeaux enregistre 143 départs pour les rles, 2CC en
1781 et 351 en 1782, dont 148 sous pavillon français, le reste étant
sous pavillon impérial (1).
Cette crise révèle l'extr~me sensibilité du comüerce colonial à l~ con-
joncture internationale.
"
La reprise du trafic se traduit par le relèvement des importa-
tions. Mais la chute de 17ê3 (2) rompt cette croissance. Co~~ent expli-
~~er cette chute 1 Il est difficile de répondre à cette ~uestion. On
peut émettre simplement l'hypothèse qu'à cause de la signature de la
~tix, donc au retour à l'exclusif, une partie cres--sucres est passée di-
rectement à l'étranger de façon frauduleuse.
Les deux années suivant la signature de la paix sont marquées
par une reprise fulgurante des importations. La h~.usseest de 73,12 %.
en 1784 et de 72,32 %en 1785. Cela provient de ce qu'au. retour de la
paix, de tous les ports de France, on se rue sur les rIes et que natu-
rellement les achats de denrées sont plus importants. On assiste donc
à une augmentation concomittente des exportations sucrières des trois
colonies (3). Ajoutons aussi que l'rIe de Tabago, rendu à la France, ses
exportations contribuent au relèvement du niveau des iillportations annuel-
les de sucres.
Aux deux ar~ées de hausse succèdent deux années de baisse des
i:nportations. La chute de 1786, 31 ,99 ;~,est liée à celle des exporta-
tions de Saint-Domingue. Cette chute des exportations est sans doute
liée aux effets de la sécheresse qui provoque des incenâies st 2UX t0~
nades des 23 Juillet, 13 Septembre et 25 DéceQbre 1786 Qui -ont provoqué
(1) CROUZET (F.), ~orQea~x au X71I19 sisc:e, p.3C1.
(2) Cette baisse éc;uivaut È'. 3P oe6 97:: l~ de st"icre, soit 26,10 ;'.
"':'.....- ... -+ - .. .: - - '"
~J"-.r"'..J ~
'" __ U..l..U .:. .. .t.::I
st-Domingue
L:rti::.i q'.l e
.
1723
=3 339 400 ~.:.0
13 369 200
10 953 200
17e4
105 65e 100
22 249 300
20 163 100
1785
143 147 813
29 523 10C
27 126 fOC'
266
des inondations dévastatrices (1).
Mais il est vraiseDblable que la majeure partie des isportatio~s
de 1788 proviennent d'E's cargaisor.s parti:::s des rIes per:d2-:1.t les derniers
mois de 1787. D'Otl la chute de 5,53 ~~ enregistrée e::: 17E7, :,_,().~._ 2.ussi 12-
~ausse des importations en 17ee. La crise politique de 1789 est pratique-
~ent sans influence immédiate sur le niveau des importations sucrières(2),
pas plus que la crise financière d'Août 17eS. C'est la preuve qu'à cer-
tains égards, le commerce colonial n'est pas intimement lié à l'économie
::létropoli taine.
L'insuf;is~'"lce des données ne nous permet--pas d'apprécier l'évo-
lution des importai ons en 1791 et 1792. Not~ns cependant qu'il n'est pas
impossible que l'insurrection de Saint-Domingue en 1791 et 1792 et le
déclenchement des hostilités avec l'Autriche et surtout la Prusse en
Avril 1792, qui paralyse les échanges avec les pays du Kord et les villes
de-la Baltique (3), grands consommateurs de sucres français, aient eu des
incidences sur le niveau des importations.
La chute des importations en 1793 s'explique plus· largement par
la conjoncture internationale. L'entrée en guerre de l'Angleterre le 1er
Février, de l'Espagne et du Portugal le 7 Mars, dont les conséquences se
font immédiatement sentir ~r le trafic des ports, réduit considérable-
ment les importations sucrières coloniales.
En sommme, on doit retenir de cette étude que l'évo:ution des
i~portations sucrières coloniales franqaises dépend de deux facteurs
.~
"
1"
t
.,
... ,
t
.
. -~~~-
t ' S . •
]r.lnClpallX ; . a. conJorlc ure sucrlere aux 1.~es e
prU.Clp?le:r:en
a
2,1.::: ,,":,.
TIo~ingue. La pression du sili~u na~~rel, e~ CO~;~o2êttant la Yécclte
i'~:::e 2r~~ée, consti~ùe une crise pour l'~n~ée Suiv2.~nte. Le secon~ f~cteur
la conjoncture atlantique ou la conjo:1.c~re intern&tionale.
Les ~enaces de guerre et les temps de guerre,en rÉduis2nt le tra~ic d~e~s~----
(1) J::::3IE:~ (~), T}::e ple.~t2.ti0n c:.e S?i::-t:-Dc;:;ir:gu.e, p.['3.
(2) Le ~2.iS22 ::'est c:.ue de 2,32 ~:, xB.is, A:';. r?ison du ret2.rè. de 3 ~çis da::.:::; le:
enregistrements en France, il est probable que cette be.is2f' r,' e.i t aucur.e
signification rée~le.
(3) C~AEL~~~~ (B.), Commerce et course sous la Révolution et le Consulét à la
Rochelle, p.27.
,J...1
267
ports, provoquent i~édiatement des crises d'importaion. Les sorties
de guerre se traduisent par une ruée sur les rles et une reprise des
importati ons.
A l'exception des années de crise, comme au début de la guerre
d'Amérique et, plus tard, en 1793, le niveau des importations est régu-
lièrement supérieur à la consommation intérieure française, évaluée en
1777 à 50 000 000 de lb (1). Cela signifie que, régulièrement, la France
dispose d'un surplus important destiné à la réexportation.
Par exemple, au 1er Septembre 1786, J ,828 881 lb de sucre blanc et brut
,
sont en entrepôt à Eordeaux. Il s' a.gi t de sucres restants après la 'vente.
Pendant le ~ême mois, il entre 11 958 205 lb de sucre~lanc et brut
supplémentaires, dent 10 635 486 lb sortent pour l'étranger. Le surplus
de 1 322 719 lb, ajouté à la quantité déjà en entrep5t, porte à 10 151 600lb
la quanti té de sucre blanc et brut, invendus, en entrepôt à Bordeaux, le
1er Octobre 17e6 (2).
•
Mais inégalement àéveloppées et des8~rvies, toutes les colonies
ne r~pondent pas de la même manière à la demande métro~olitaine.
1-2. ROLE PREPONDERANT DE SAIN'Il-IXmINGUE DANS LES IMPORTATIONS SUCRIERES
FRANCAISES.
..
Les états de la b21ance du co~~erce constituent la m2tière.pre-
"1
~ière la plus s~re d'u~e reconstitution de la hiérarchie 4eB différentes
colonies dans les importa.tions suc:'Ï2res 8nnuelles. Y8.is le c2rêctère 12-
CU:rJ.2:'re d.e ces sources i:..;,elre des li~;ii tes. A l. ',,"xceptio:'l de l. 'ét?_t c;u
C:')D..inerCe de 17212, classé sous 12 cote? 12 11:35, aucun des ~t2.ts de cette
s~rie ne précise l'oricine exacte des sucres, ml nains, pour ceux qui - - - -
vie"~,ent des îles françaises dE l'&~srique.
Cette menticn systssaticue
de l'origine ex?cte ~~t rÉcls'!lée pS.r les instructions de 1792.
(1) T'Iémoire des raffineurs, 1777. }J! p12 1639.
(2) Affiches Américaines du Samedi 6 Janvier 1727 (n D 2). AN Col F3 163. Collec-
tion }~oreau de Saint !':ery.
268
Donc nous avons affaire à des renseignements très limit~s dans le temps.
Cela ne porte cependant aucun préjudice à la pertinence de l'analyse.
Les renseignements les plus complets concernent les roL~ées 1765,
1773, 1785 à 1789. Puis nous avons quelques informations incomplètes
pour les années 1767, 1768, 1772, 1791, 1792 et 1793. Ces précisions po- ~
sées, la part de chaque colonie dans les importaions sucrières annuelles
peut s'établir comme suit:
Tableau nO 42
- Part de chaque colonie dans les importati~ns sucrières
françaises (en lb).
l
l
!
!L'"lées
Saîr..t-Domingue
~artinique!
Guadeloupe
1
Ce.yenne
Tà.bagè
- ! Tc tal
216 760 900
;~J
765l1~
- 'cd
!. 84 287 600
---~ 132'4:73.3 ~-----
li
'.
767 2)!
19 200 585
123 41 e !
197 406
352 085
19 873 494
768~' !.
3 368 902
162 398
1C2 244
12 1CO
.,
.
772 2
,
!.
853 ~15
773 3
10 1 822 707
10 155 900
14 256 277
'! ~24 618
1~0 206 802
7e5 4
143 147 81~
30 723 375
25 528 288
1~.2 673
199 542 149
786 4
130 046 200
25 643 5('0
16 205 9CO
2 327 roo
177 213 800
788 ,
143503 917
27 619 ~OO
15 204 317
2 055
2 024 991
188 354 7€C
q~96)
139 602 767
24 009 989
17 660 3E4
2 708 070
183 981 210
791 7)
43 977 417
1 761 471
3 008 433
735
2 280 015
. '1' 0'6 336
792 8)
1 455 174
1 363 669
632 505
793 7)
4 506 405
2 629 072
926 319
345 845
8 407 641
al ~~t-Dom!.~
1
Saint-Do.ningue SI affirme comme le principal fournisseur de sucre
colonial. En effet, régulièrement, plus de la moitié des su~s arrivés en
France en provenance des colonies,
v.1ènt de Saint-Domingue. En 1765, elle
en fourr~it 63,63 ;~ ; en 1773, sa part monte à 78,2C ~;. Pour les années
~,
-----·1
( 1) :' A..1,;.1,ADE (J.), 0"0. ci t., p. 4C •
f
(2) I:::portatio:1s sucrières la Rochelle. Al: Ccl p2B3 , pour 1772, i l s'agit du der·
nier ser.:estre.
(3) La Roc::'elle, Bordeaux, :::mtes, le ::2.vre et Sai:1t Halo. iL' Col p2 p3 •
(4) A~ Col F2 ~13.
(5) F 12 1635.
(6) A!~ Col p2 ]12.
(7) :<ême source que pré(:éde~ent.'
(e) L-nportation, bureuu colonial de r-:arseille • .AlTl121674.
269
sui v2Ltes, ses parts respectives .sont
71,74.% 'en 17[5, -14,64% ::"
1726,
!
76, 1~ ~~en 17ee, 75,68
1
en 17e9, 86,17 c' en 1791 et 53,60 rI
,. en 1793. Il
.{
aurai t été intéressant de montrer la part de chacu::e des ;,arties de la co-
1
lo::ie dar~ oes export~jtOnê,me.is sur ce point, les sources pri::cipales
sont muettes. Mais cet aperçu des in;ortations nantaises pendênt le pre-
mier semestre de 1767 permet d'en avoir une idée à peu près correcte.
Tableau r.O 43
-, ChargeTIent de sucres a:::-rivé à l'antes uenda.""lt le Premier se-
8estre de 1767 (1).
OUEST
S1:'"D
CAP 4 01 e ba.rrique~ 70 quarts
,
Leogane
1 417 barre ·13 quarts St Louis 982 barre
Port-a~-Prince 2 731 barr~ 17~
t,
•
Saint-~arc
1 234 barr~
1
!
• 5 362 barre 31 quarts
! .
!
4 035 500 lb.
5 389 750 lb
982 OOOlb
1 barrique =
000 lb
1 quart
=
250 lb.
En valeur absolue, le Cap s'affirme comme le principal fournisseur.
Le Port-au-Prince occupe la seconde position, viennent ensuite Léogane et
1
Saint-tIare. La partie du Sud arr! Te loin derrière les deux principales parties
~~.
de la colonie. C~la provient, ainsi que nous l'évons déjà vu, du. niveau de la
production .Cl_
la quali té de la production et
de
la fréQuence du trafic
mari time.
cl La Martinicue
--------_-..&--
. ~
La l'iartinique apparaît cor::me le second fournisseur sucrier de la
?::::'2.nce; loin il est vr2.i der::::,i~re Saint-Do:.:ingue : 15,40 e~ 1725,1';,72::
e~ 1~c6, 14,66 en 17~::, 13,05 en 1789, 3,45 en 1791 et 31,27 % en 1793 des
(1) "Ete.t des bâtiI:'e~ts français (1ui sent e~trés è.?ns 19_ rivi~re (,2S :Tantes ;:e::-
è2nt les six pre~iers 20is 1767, ~ui fait con::aître leurs c~arge~ents ?sr
eS::Jèce de iTI8_rcha:1dises". J.::.T Sol ~"33.
270
i~portations sucrières françaises proviennent de cette colonie. Mais elle
doi t cette seconde place grlce aux autres colonies. En effet, du fd t de
son statut de métropole éconoaique, les commissionnaires de Saint-Pierre,
~.pparus vers 1720, enlèvent une partie des :Jrcductions de la. Guadeloupe et
de Sainte-Lucie. C'est ce que Christian SC~:AK~~~OURG ~on~e,
"la voie
indirecte martiniquaise" (1). Les quanti tés de sucres in"trodui tes par Cabo-
tage de Sainte-Lucie à la Kartini~ue ~e 17'9 à 1789 sont les suivantes:
~ab1eau no44
- Quantité de sucres exnortés de Sainte-Lucie à la ~artir.icue
1769-1790 (2).
Sucres terrés
sucres bruts
, 'Total
1769
256 204 quintaux
1770
36e 640
1771
822 900
1772
968 6CO
1785
13 7 00 quintaux
3 930
17 710
1786
11 787
1 594
13 381
1787
5 082
1 311
6 393
1788
6 713
339
7 052
1789 .
2 488
1 892
4300
1790
230
214
444
•,i
Ces quantités sont obtenues à partir des chiffres figurant sur les états du
commerce de la colonie. Pour les quatre premières arillées, les chiffres ont
été rassemblés par l'intendant des îles du Vent. Ils figurent sur des bordereaux
•
provenant
de Sainte-Lucie. ~ ce qui concerne les exportations guadelou-
péenneBpar la voie indirecte martiniquaise,nos informations sont très limi-
tées.
S~~TAK~~CURG (C.), Les sucreries de :a Gu?de1c~ge, r-.1C9
De 1769 3. 1 7 72. Cf. "RelevÉ .:.u ?rcdui t de l ' i sIe de Sainte Luci e per.dant les
a:'.nées 1769-1770,1771 et 1772". A~: Ccl C ~c ce. (no23).
}lour 1790 : cf. "Eta.t sommaire du commerce de Sainte Lucie pend ant les
3
premienomois de l'année 175lC". )li Col C10 CS.
Pour les autres années, Exportation des denrées du C~~
de Sainte Lucie.
A!T 801 C1C'Cf.
,
Tableau nO 45
- Exportation de sucres de la Guadeloune à la Martinioue 1789-17q2
( 1)
~ruts
terrés
blanc
t~te
- tii>tal
1789
6 489
15 172
2 103
4 069
27 833
179C
7 618
11 648
480qx1/2 5 723
25 469 qx1/2
1792
2 578
7 482
10 060
Il s'agit de chiffres partiels qui ne rendent pas entièrement compte
de l'importance de ce co~merce. De Guadeloupe, il faut entendre la Grande-
Terre, c'est-à-dire
le co~~erce de Pointe-à-Pitre, Sainte-Anne, Saint-Fran-
çois et du Moule, et la Basse-Terre : Basse-Terre et Marie-Galante. 0ne
étude plus systématique de ce commerce entre la }!art~mCl.Ue et ces deux co:'
lonies mérite donc d'~tre faite. Elle aura. en tout cas le mérite de mettre
. en évidence l'importance relative de laY:artir~que par rapport à la Guade-
loupe, du point de vue de la production et de la commercialisation sucrière.
Elle occupe la troisième place. Xais il s'agit d'une place acquise
essentiellement gr~ce à ses ventes directes à la métropole. Une partie de
sa production étant drainée vers la Eartinique
en 1773, sur les 1e êCC' oeo
lb de sucres vendus à la France, 1 9C0 000 lb, soit 10,11 ;~ passent par la
voie indirecte martiniquaise. En 1775, 3 800 oce lb des 32 300 eOOlb de su-
cres exportés en France passent par l'intermédiai~e des commissionnaires de
Saint-Pierre, cela représente 11, 76 ;~ des exportations totales.
De 1786 à 1789, sur les exportations an~uelles de 21 500 000 lb de sucres,
2 8CC eco pa.ssent par la !.: artini que , soit 13,C2 ;~ (2). ?(ais~n'est ~?s
la seu:!.e a;'1putation. la c:,ise des déçouc~és,
:::'~s·.:.lt:-::'t-:e l'insuffisance
du tr2.fic 2.vec le. métropole et surt::",.:."': lé'. crLoe dez d'bouchés des sucres a
raclu le commerce interpole tns important.
(1) Etat gér.éral du c2botage er.t:::'e,la Grar.de-Terr4 Guadeloupe et la rartinicue
pendant les 6 derniers mois de 1789. Plè Col F
12 folio 21.
î7ê9 : "Ebt géb';rû du cé:'.'ùotage- de ICi :Basse-~erre Gua.d.-:lcl.:.pê et :':arie Gi<L:r.-
te avec la ~':a.:,tinique pendant les 6 derniers mois de1789.".·
.
A~ Col F4 12 fQlio 24.
1790
Etat gér.~ral du cabotage entre 18 Grande-Terre GU2è.elou-;:e et 12 ;-".rti-
niC],ue pendar.t les 6 premiers mois de 1790". A..': ColP4 12 folio 4e.
1792
Etat gÉnéral du cabotage de la Easse-Terre avec 12. Eartir.ique ;Jenèant
les 6 premiers ~ois de 1792. item, :olio 73.
(2) Scm1AKENEOURG (C.) Les sucreries de la Guadeloupe, p.116.
272
Christian SCP.!TAKEN]OURG indique qu'en 1767, le débouché étranger
absorbe 60 % de
la production sucrière de 1 '!le. 45 % en 1773. 17 ;,: en
1775 et 35 %chaque année.:de 1786 à 1782 (1). Il est donc vraisemblable
que si toute la production était vendue à la métropole en évitant la voie
indirecte rnart~quaise. la Guadeloupe serait le seco~d fo~rr~sse~r de
suc::::es3. la France
A ce;J.se de ces deux f~cteurs, 12. part de cette colo~ e dans les .
fournitures s~crières coloni~les est relativeIT.ent faible
12,79 " en 17 85,
Saint-Do~ing~e, la Y?rtiniQue et la Guadeloupe~ont les trois
.
principaux fou~~sseurs ; les autres: Cayenne. Guyane et, après 1ïê3, ~2.-
baga, tiennent une place très négligeable d~;s les importations.
Kégligée par les négociants, la Guyane est demeurée arriérée du
point de vue de la production et de la co~ercialisation sucrière. "La
majeure partie des sucreries dont les ateliers doivent être regardés co:n-
~e les plus ~onsidérables ne fabriqup.nt que du tafia et du sucre qui suf-
fisent à peine pour la consommation intérieure"(2). En 1766, elle n'~xporte
que 435 quintaux (43500 lb) de sucre bl~~c vers la ffiétropole, 124 quintaux
•
1/2 (12 400 lb1/2) en 1771, 290 quintaux (29000 lb) en 1776 et 539 quin~
·1
taux 1/2 (53 900 lb 1/2) en 1777 (3).
En 1773, seulement 0,25 ;{ des sucres importés en France_,pro-
vierment de cette colonie, 0,07 % en ,1785, 0,C1 ~' en 17ee et 0,C1 ;' en
1791. En 17%, en 1789 et en 1793, la Guyane n'exporte ?ucun sucre v-ers ls.
=étropcle.
(1), S~AKE~:::CLR.G (C.), op.cit., p.11-~.
(2) R{ca,1tu.lation qu recensement général de la colonie de Cayenne pour l'ar:!1Ée
1
1777. A~r Col CJ,+ 45 folia 273.
(3) E~0rtations èe2 denr4es de la colonie 1766-1?71-177~. ~y C~l ~1445 f~lio274.
Pour 1774,. et. ~l Col C14 45 folio2ï9.
Sur les 53? qx 1/2 de sucre, 322 vont à Bordeaux, 193 1/2 ~ Saint Malo et 24
à la Rochelle.
273
'2:/ Taba&:O
_ _- . 5 _
Elle doi t son importa...'"1ce à sa. '-lise en va,leur par les colams anglais.
Après la cession à la France, ses expo~tatior.s sucrières dérasse~t de loi~
celles de la Guyane. En 1785, UDe partie des sucres produits est exportée
vers Londres: 24 696 quintaux (2 469 6cc 10)(1). Sans doute s'egit-il du
paiement d'anciennes créances. Cette arillée-là, 630 b~rriques de sucres sor-
tent pour la France. Le poids exact de ce sucre n'est pas mentior~é s~r
l'é~at du commerce de 1785. Sont-ils arrivés trop tard en France? Sans
doute. D'ailleurs, ainsi que nous l'avons déjà indiqué, les chiffres fig~
rant sur les états coloniaux sont différents de ceux des balances élaborées
en France m~me. Y:ais, m~me au ni veau de la colonie, nous-avons quelQuefois
de~x à trois chiffres différents pour la même année.
En 1786, les états du commerce de la colonie anno~cent 26 935
quintaux (2 693 500 lb) de sucre pour la France (2). En 1787 (3), nous avons
deux chiffres différents
29 777 quintaux (2 977 700 lb) et 24 044 quintaux
(2 404 400 lb). En·1788, nous avons trois chiffres: 2 141 302 lb (4),
2 081 319 lb (5) et 2 352 534 lb (6). En 1789, Tabago exporte 2 506 595 lb
de sucres vers la métropole
Sur les états de la balance de commerce, Tabago fournit en 1786,
1,34 %du sucre colonial français, 1 ,07 ;~ en 1788, 1 ,47 ?~ en 1789, 4,48 ~{
en 1791 et 4,11 % en 1793.
En somme, plus développée et mieux desservie que les autres colo-
r~es, Saint-Domingue s'affirme comme le principal fournisseur de sucres à
la métropole. La France reçoit Quatre types de sucres de ses coloLies. La
questio~ est donc de savoir l'i~port~'"1ce accordée à cha~ue ty~e dp. sucre
(1) Etat général àu commerce de l'iEle de Te.baGo peY'"è.e.r.t l'ennÉe :-::il 2ept cer.ts
quatre vi::5t ci::,-. p~- Col C1C EE.
(2) Et2.t 6én~~?:' du co~::!erce de ~2.tE.3() r-enè.?~t le ~ourê-!:.t dE; l t 2.:l!"!.se
A:: Col C10 EE.
(3) , .. ,.., ~
.:~_.
',,0..:..
C1C E2.
( ~ ,
(...l ,
\\"t)
e~
'
,
"Etat dÉs denrées color.:.iales exportées '::'2ns le ço~rar.t des
/
et 17e~". J..:' Col C10 EG.
(5) Etat gér.éral du COD'TlerCe de Tabago ••• 1728. IL~ Col C1C ES.
Cé) Iè.er::
de.ns le 2è ~t 4è quartiers de l'ann8e 17E8. p:.' Col C 10 Ec.
274
internationale du travail.
------------
------
L'explication de l'exclusif a permis de montrer que la division in-
ternational du travail, "le monopole manufacturier" fai t partie è.es privilèges
accordés aux négociants par le pouvoir royal. Il ressort en effet è.e ce pri-
vilège que les colonies sont exclusivement des zones agricoles. ~e ce point de
vue, la production de sucre brut devait constituer l'activité principale è.es
colons.
Nous avons ensui te montré que, lorsque, sous l"'a-pression des événe-
ments, le raffinage et le terrage ont été tolérés aux'îles, les négociants
ont réclamé et obtenu la fixation des droits prohibitifs sur les sucres terrés
.t le·~ sucre raffiné. Ces tarifs protecteurs devaient permettre à terme de
mettre fin à la déviation ainsi introduite. C'est que pour ces hornmmes d'af~
faires, le raffinage et le terrage aux îles s'opposent à leurs intérêts •
•
Ils estiment, en effet, que les colons blanchissent les meilleurs sucres
bruts et n'offrent au commerce que ceux de o2Uvaise qualité.
C'est en vue de mettre fin à cette pratique déloyale qU'ils préco-
~~sent en 1698 de faire visiter les sucres à leur chargement à la Martinique
et de jeter à la mer ceux de qualité inférieure (1).
Eh 1733, ~es raffineurs bordelais s'inquiètent à tort ou à raison qua, depuis
l~établissement des raffineries au Cap, les sucres èruts Qui en provienner.t
ne sont plus aussi beaux qu'auparavant. Ils préconisent alors la prohibition
pure et simple du transport aux colonies des matériaux nécessaires à l'éta-
blissement des raffineries, en fë.isant valoir que "plus le suc=eest raffinÉ
en France, plus il est commercialisé 'et plus leG colonies en profitent (2).
nans cette perspective, l'importaticn en France des sucres autres que les
sucres br~ts doit être considérée comme un paradoxe. Elle illustre en effet
les positions et les contradictions des négoci~'1ts français. ~ettre en évid~efi~----~
ce la part des autres types de sucres d~s les i~portations ~nuelles, c'est
mor.trer l'ampleur de ces contradictions internes.
(1) "EÉnoire sur le com::erce des isles fr2r.çaises de l ' A;:;Jiric:ue 169E" .. A:..: ColF2::: ~
(2) "Pour donner une idse intelligible du bon ~tat de la fabrioue des sucres da.'1S
les raffineries de la ville de Bordeaux", Bordeaux, 27 Ear~ 1733. A;'~ F12 1501.
276
1727
39,19
60, ê1
17se
46,34
40,80
12,85
0,0 1
1789
51,0 e
35,84
11,65
1,43
1791
73,63
22,44
3.92
o,e 1
17S:3
55,64
T
26,66
17 ,49
0,01
Jusqu'à 1788, aucun ~Jpe de sucre ne semble avoir dominé vraiment
les importations. La dominatior. a été penèant cette ~~riode toute relative.
De 1775 à 1779 particulièrement, les sucres bruts et le sucre blanc sont
les deux produits dominants. Ils imposent èonc le rythme généra~ de la crois--
sance.
Les trois années d'accroissemer.t du r~veau des importations après 1775 résul-
ter.t de la progression de leur part respective. En effet, à la hausse S)EC-
taculaire de 17ï6 : f4,C5 ~: pour les ;::ucres crut3 et 95,48 ;: pour le sucre
blanc, correspond celle des i~portatior.s. L'arillée suivante, la hausse est
plus modérée: 34,81 ~{ pour les sucres bruts et 24,5e r pour le sucre blanc.;
la courbe des importations amcrce donc un léger fléchisse~ent.
En 1778, les importations de sucres bruts accusent une chute de
9,66 ~. La part du sucre blanc continue d'augmenter mais cette hausse sup-
c'p1éI:",entaire, 23, 77 ~{, n'a ttei!'lt pas ur. ni ve2.U s....ffisent pour compenser la
perte occasionnée par la décrue des sucres bruts. Le ~veau des importations
reste donc quasiment statio~~èire.
Au cours de ces trois années, les sucres terres et le sucre t~te
tie~~ent une place secondaire dans les importations. La part du sucre tête
ét~~t plus faible. De plus, cette part décroît régulièrement. En effet,
après une hausse de 11,27 ;:, enregistrée en 1776, le niveau des imporctations
de sucres terrés décroît de 14,55 5: ,J.'année suivante et de 6,33 ;~ en 1718.
De son c$té, la part du sucre tête décroît ct':? 12,22 ;~, de 24,1ê ~: et de
31,16;~ respectivement en 1776,1777 et i77E'. Fais -;Jlace secon0dre ne si-
~ifie pas désintéressement de la part des négoci~~ts, ca~,: nous le verrons,
les sucres terrés jouent un r01e important de::s la ~réexportation.
On peut nê~e se dem~~GEr si les èucres terrés de ~eilleure qualité
ne sont pas compris dans le sucre blanc. La rSGuction des i~portations de
sucres br..lts à partir de 17715, prooable1Jent jU8_u'à la fin de la guerre
d'Amérique, résulte du refus des capitaines de navire d'en charger en
277
grande quantité. Eh effet, en raison de la hausse des prlwes d'assur~~ce(1),
f~
due à la wauvaise conjoncture atlantique et à la ~ultiplication des risques
:;jj!.
'.'
'.'
les sucres brut~J ~lus lourds et occupant plus de place sur les naVlres ap-
.',
1
paraissent comme une marchandise g~nante. Ils achètent plus aisément des
t!
sucres terr4s et du sucre blanc, plus légers, qui peuvent ~t=e ra~atriés e~
~
~
~n seul voyage. C'est ce Qui accé1ère la chute à rresure ~~'on ~ro€Tesse dans
la guerre.
En effet, de 9,66 ;: en 177e, elle atteint les taux records de
29,6C ;~ et de 63,90 5:, respectivement en 1779 et 1780.
La priorité accord4e aux autres ~Jpes de sucres eX?liq~e donc la chute ~o
dérée du ni veau Q.u~titê..tif des irnr.orta tions de sucres terrés,-tle. sucre t~te
et bla."1c en 177ê. Cette baisse n'est plus que de 6,33 ;' pour les sucres
terrés et seulement de 31,16 % pour le sucre t~te (2).
En 1779 et en 1780, la baisse du niveau des importations est générale sur
l'ensemble des sucres, mais elle est plus considérable pour les sucres
brùts. En 17EO, les sucres terrés et le sucre t~te progressent même dans
les importations. La hausse est de 67,98 ;~ poUr les sucres terrés et de
6,20 ~~ pour le 'sucre t~te. Cela se tradui t par le relèvement de leur part
dans les importations. En valeur relative, le Sucre blanc occupe la première
_ .......==-·"1'lace dans les importations, sui vi par les sucres terrés en 17 ec.
Après la guerre, les négociants reviennent à leurs habitudes; ils
redemandent plus de. sucres bruts. Cela se traduit par un nouvel accroisse-
f
~.
ment de sa part dans les importations. En effet, après un léger fléchissement
~
.. t.
en 1786, la hausse est régulière jusqu'à la Révolution. En 1789, la ~oitié
, ,:,1
l •• -:f.
':'[
des sucres arrivés en France en provenance des colonies est fo~ée de sucres
b~~ts. La hausse de 1791 est sans doute accidentelle. 2n effet, la, prévi-
.,
( l ',
(2) Er. effet, de 1775 ~ 17 76, la c~~te est de 12,22
suiva:-,te. soi-t '.lr. d0:J.~::e::-:sn:
: 24,12 :-:.
278
a d~ ~tre à l'origine de l'intér~t accordé aux sucres bruts. TIne f~çon de
constituer des stocks suffisants pour ne plus laisser les raffineurs en
mal'lquer en casde--prolonge!Ilent de la cri se. Kais cela peut prover:ir fl,ussi
du caractère parcelaire des données statistiques après 1789. rous avons en
effet affaire à des totaux partiels, suggestifs certes, mais ins~;fis~"ts
peur do~~er une image fiable de l'évolution co~~erciale.
L'après-guerre est caractérisée-aussi par la chu te du ni veau du
sucre bla.."1.c ,dans les i.2portations. ~~ous n'avor:s pas pour ce phlfnomène une
ex;lication objective. Yous pouvons émettre l'hypothèse d'une réduction
volontaire afin de donner plus de valeur au sucre raffiné en France.
En effet, en 17ê6, tous les ports de commerce du Royaume sont enfin con-
cernés par les primes d'exportation à l'étranger du sucre raffiné. Un con-
tingentement des importations de sucre blanc par les négociants eux-m~mes
a~parart non seulement possible mais ID~me comme la .condition nécessaire
de l'accroissement du débit du sucre raffiné à l'étranger.
1
r
Le renversement de la tendance s'effectue au profit des sucres
terrés. Mais, la prépondérance de ces sucres dans les importations de 17€7
~
tGut comme celle du sucre blanc en 1785, méritent d'~tre nU~"1.cées. Il est,
r
- =
en effet vraisemblable que le terme de sucre blanc en 1785 désigne à la
fois les trois types de sucres: terrés, t~te et blanc, ainsi que celui des
!
sucres terrés en 1787.
!
•
Eref, sucre bl'anc et sucres terrés ont d~ fonctior~er comme termes généri-
1
1
-1
ques désignant les sucres autres que les sucres bruts.
!d.,:":'~
Saint-Dc~in~e fourDit annuellement le plus fort continEent de
s~cres b~~ts, terrés et sucre blenc ••
!1
f
t
.
3ruts
terrés
~
oJ..anc
t~te
1773
oc:: ~o c'
, -
56,21
" ' " ,
- ' ,1
~f,41 c'
53,~1
1725
95,7~: ,-
S5,5 ê'
1'7~~
O?
00
Cl
7 ~
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C
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1
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17f?
S4,24 Cl
73,6e ".
,
91,33 c'
1S,e ~
1~::-C
c'
i '..i",
92,24
73,:2 Cl
C ,03 "
1c ~. ~
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" ,"" ""
1"'C,
1 ~
92,CS " ,
75,84 c'
êC ,77
34,':3
i793
PE, 35 ~'
14,49 ~
1CC
::, EC
,
1
279
En 1789, très exceptionnellement, elle fournit ~oins de sucre
bl~nc. Tabago en ~st, cette année-là, le plus grand fournisseur. Il en
fourr:i t à lui seur 99 '92~~. r':ais, l'emploi de ce terne en ce qui concerne
Tabago est sujet à caution. C'est la première fois que les balances font
état de sucre blanc dans les exportations de cette colonie. I l est vrai-
semblable qu'il s'agisse de sucres terrés et non de sucre blanc. Les ex-
portations de sucres terrés et de suère"tête s'effondrent en 1793.
Hais tou~-ces sucres n'occupent pas la même i!Ilportance dans. les exporta-
tions de la colonie. Un seul type de sucre domine vraiment: il s'agit
des sucres bruts.
Le tableau suivant indique la part qu'occupe chacun desces sucre ~ans les
exportatior.s.
Tableau nO 49
- Part de chaaue tyne de sucre d~~s les exnortations de Sain~
Dorningue.
sucres bruts
sucres terrés
sucre blanc
sucre tête
1773
63,82 01
/~
9,56
13,56
13,04
1785
54,14
46,06
1786
45,71
51,49
2,00
1788
57,32
39,46
0,01
3,21-
1,789
62,12
34,46
0,00
3,00
1791
78,66
19,75
0,01
1 ,5 e.
1793
92,°5
7,21
0,01
0,73
La réputation" de 2eilleure qualité dont jouit le sucre b~lt de
Saint-Domingue, notam~ent celui du Cap et accessoirement celui de Léogane
et de Sa1n't-:·:arc, e:çlique S? 9r4pondEfrar.ce dans les exportations de 12.
colonie. :En effet, offra.-:t de :neilleu:::-s retou:::-s ",1À-X n~~cci2.r:ts ;ârce que
,
~~us côté et le meilleur sucre :::-affin4, il bÉr-ificie davant2îe ès :~ yr~~
f4~ê~ce généra.le.
L~ plaine du Cap est le plus grcs foü~i3seur ie sucre terré e: b12nc de
~a colonie: en 1767, les 3/4 de la ]rod~cticn de ses 260 2~c~e~i~s SJnt
~ucre bl2~C dE l~ colJ~ie,
~I:~'::Ec;~ (D.), Pierre Ign:::.ce Liévis "'fi2,.n .AJ.;s teii:., c al)i t?-ine négrier.
:~antes 1793, :p.279.
(2) Cf. ~ra p. 44
2tJ 1
e~ 1ïf3 et e~ 1790. En 1783,
c'est l~ fin de la ~uerre d'~~érique, il est
!
'Œaise~bla~le qu'une partie de ces sucres soit sortie pour l'étrar-ger. 2n
1
1
1ï9C, le commerce avec Saint-Domins~e devient incertain, on accepte un peu
~.'~lj
1~
----;;l:ls de suc~es br~ts qu'2.-P~ordihaire.
Il s'agit donc de deux années d'ex-
·1
1
i
1
ception. En effet, d'une façon générale, la part des sucree brut. dans .les
~.7:p·:Jrtations martiniquaises se situe entre 2 et 10 ;'.
En Guadeloupe, en d~pit de la prépondérence des sucres terrés
CS~8 les export~tions, les sucres bruts occupent une place plus i~portante
~oté=2e~t ~v~~t la Guerre d'indépend~~ce s~Gric2iLe.
Sax:s doute, un peu r.Jieux fournie er: esclaves Clue 12. !·:artiI"..i9.l1~, la
~uadeloupe s'est orientée plus que celle-ci vers une production de qualité
mÊme si cette qualité n'atteint pas celle obtenue dans la plaine du Cap.
L'occupation anglaise ouvre pour cette coloI"..ie une période de prospérité
dont l'une des manifestations est ~a prépondérance des exportations de su-
cres bruts en 1763 : 91,33 %, record inégalé par la suite. La part relati~e
••nt 41sT4s des suc~s brutS!Œms les exportations guadeloupéennnes durant
les années qui suivent immédiatement la restitution semble provenir des
effets bienfaisants de cette occupation.
Notons aussi que, dans la décennie 1170, l'économie sucrière de
Saint-Domingue, subissant l'effet catastrophique de la pression du milieu
naturel, la Guadeloupe bénéficie d'un transfert de la demande métropolitai-
•
ne : le niveau'relativement élevé de la part des sucres bruts dans les
.,
exportations de 1772 à 1777 peut s'expliquer par ce délaissement partiel
de Saint-Domingue.
L'effondrement de la part des sucres bruts dë:.s les exportatio::s
",prss la ::'uer:::-e résulte de la ::ouvelle ,:>?tion prise par les nszocia::ts, ::0-
t2~~e:.t ~?rès l'ouverture des îles d~ Vent éD C0~~erce étranger en 1784.
~ effet, les!lez d~
Vènt exportant aussi du suc:-e -:~te et bla."lc, il ""2 <:"'ns è.ire q'..l'':'::'::: ::12 re-
1tt
2::;or-tent aussi de grandes C1.uanti tés de sucre tête. En 1726, il occupe 29,C9 c'
~
è-es ex::n'tatior..s :lartiniquaises en France et 37,20 ;' è.es exporta tians guade-
J
loupée:r:mes, 23,29 % et 50,32 ~.~ en 17êS, 41,39 ~~ et 40,ê7~: en 17E9, 19,10 ;~
~
----;t32,22;' en 1791, 41,30--5~-et 37,93;; en 1793.
1
1
i
QQ'en est-il des autres colonies? Leurs exportations semblent ~tre
1
dominées par les sucres bruts. En 1773, sucres bruts et sucres terrés occu-
pent respectivement 73,78 %et 26,22 % des exportations guyal'laises en France.
En î7ee, les parts sont respectivement de 68, S1 ~: et 11,19 ;:[. En 1791, les
1
735 lb de sucres provenant de cette colonie sont essentiellement des sucres
1
bruts. L'appellation de sucre blanc accordée ~ux exportations de 1766, 1771,
!
1776 et 1777 ~érite d'être rÉvisée szrieusement. La pauvreté de la colonie
!
!i
1
recomm~~de cette prudence: l'établissement d'une sucrerie roulant en blanc
1
exige des moyens financiers importants, que n'ont certainement pas dispo-
sés les pauvres colons guyar.ais. La probabilité pour que ce sucre blanc
1
.~.
soit du sucre terré est donc très grande.
. 0 .
:;
!
Tabago exporte aussi bien des sucres
!
br~ts que des sucres terrés
~ais probablement plus de sucres bruts que de sucres terrés. C'est un hé-
.~
ritage de la colonisation anglaise. En 1726, ses 2 327 800 lb de sucres en-
~
_ _ _ _âr...
e...~~i~s.t;:.~;>~, ~rl },rance sor.t oosposées de 94,1 e ;'~ de sucres bruts et seule:nent
i
!
5,22 ;; de sucres terrés. En 17ê8, la c010nie n'exporte que des sucres br~ts
1
en France. Les exportations de l'année suivante constituent une exception:
elles sont coiposées essentiellement de sucre blanc, très certêine~ent des
sucres terré SI : 96,e9 ;{. Le reste étant cor..sti bÉ de sucre tête. En 1791
et en 1793, il exporte exclusiveoent des suores bruts.
En sornn::e, en pe-..:.t dire QUE le sucre br..lt 0CC'J.pè une :p18.ce i:::lror-~---
~~S prédo~inante pour contrebal~~cer ce~le des autres types dé sucres. Cette
si~ation, "-ous verrons, a u~e suite f~cheuse sur la com~er8ialisation du
sucre ré.ffiné, notaImne~t è-ans les ~2_YS du :'ord. L2_ contradiction provient
~>.:s ;-:-,archés, on r.e s'embé'..rrass€
pas en ?rance 3. è.Évelo:;per celles des autres
-~~-;~s de S1.:.cro::s. Cel:::. crée ur~e si. tuation d.e co~curre:!:CE: (l.ans ~aC1.uelle le
283
sucre terré et le sucre blanc conservent une position privilégiée (1). !·:ais
ll!l'2..utre problème se pose. I l résulte du terrage des sucres dans les colonies
---fr-s'agi t de la commerciali.sation des sirops obtenus par cette opération.
III/ Le Commerce des sirops et tafia, une illEsure complémentaire d'encouragement
peur la ~~che à la morue.
Les sous-produits iDportar-ts àu sucre sent les sirops et le tafia.
;·:a:'s, si en A..."lgleterre, la consorn;;:ation du r:-:u=., d.u FllrlC:' et des autDB-&
s)iri t::e;l:~ de :-:.slasse est nOrl seule:::e:::"t é:.utoris~e :::ais .fort r~'lJa.'1d1.;.e ( 2',,'-,
~::: ?re:.ce, elle est r~goureuse~ent interdite.
Ces ~roduits constitu~"lt le dixi9~e de la v~lEur ie la production des colo-
~es françaises (3), il leur faut trouver un moyen de les écouler. Cette
étude a pour objet d'analyser les diffé::-ents coo}:ror:.is permettant ce commerce.
10 l 'Cn premier cOI:roromis : la vente aux étr2-...'1gers.
--------------~-----------------------------
La proscription de la consonma,tion et d.e l'entrepôt des sirops et
tafia erl France résulte de la Déclaration du 24 Janvier 1713. Elle repose
sur deux ar~ents principaux.
Le ,remier fait valoir que toutes les eaux-de-vie autres que celles de vin
sont "i:1salubres et pernicieuses". Le second prétend que l'admission du
tafia en France nuirait au coomerce des 9aux-de-vie de vin cu que ces der-
nières pourraient être altérées par l~ méla.nge du tafia, al tération qui
porterait atteinte au commerce de vin franç8is avec l'étrar-ger (4).
3rillante illustration du protectionnisme français
Er. effet,
TT
•
1 1 '
l/()l,r
\\
.'
.,pré', p. 418.~lo
(2)
('0:'.), ?-istoire économioue et sociale du r-:onde, m.l.ome III
1J
66
...
, .' .
~3) "Lçttre ô:u ::Jinistre à. L. le Contrôl.eur ~0Y'.2r2.:", 2$ Ar:;ût 170". P':- Ccl?3 163.
C,::; llec ti JI: ra ree,u de Se.i r. t Fer'/.
(4) "::Émoire sur les sirops et taffias" (anonyY'1e et sans date). A!~ Col S'3 162.
1
1
284
cette mesure ne vise qu'à protéger les privilèges des régions viticoles de
France. C'est de bonne guerre : les colonies ne doivent-elles pas concourrir
.?=1-e. pros?éri té du Royaume? Cette proscription, qui protège un secteur de
la ;r8Q~ction ~u sol national d'une cor-curre~ce possible, a donc tout so~
se::s è.a.,"s les mentali tés de l'épcc;.ue. :':ais co:::nent2.1Jrs d.édc::u:::e.t;'er les
co12TIS d'une telle injustice?
Yous. n'avons auc'U.."le idée de :nesures il:l:r.édi", tes • Les ?re:lières
i~~ications que nous avor-s datent de 1763. Il s'agit des mémoires du Roi
pour servir d'ir.structions aux Gouve:-neurs, lieu~eYl2nts ~·énér2.ux et inten-
dants des rIes du Vent, è.ès 1ê Avril et 5 Ao1t 1763 (1). Cette ~utcrisa-
tic!"". est ê.ccordÉe 9..~X c~lons dt eX::'0~-te~ ve::;s l t ftre.::ge~ leE Eiro:?s et~--_.
ta:ia par les deux ?orts d'entre~ôt : le Çarré::~~e è.e Ssinte-Lucie pour
les rIes du Vent, et le 1-:ôle Sa.iJ..l1t-;-icJl:.:s :;:our Sdr:t-Dor::ir:SUe.
Elle apparaît cependant comme une ~e~ure cor::pl~entaire d'er-couragement
offerte aux étrangers: ceux-ci doivent fournir aux colons les secours
dont ils ont besoin et que le co~merce je France ne peut fournir et rece-
voir en contrepartie les sirops et tafia prohibés en France (2).
Cette autorisation est confirmée par l'Arr~t du 30 Ao~t 1784:
mIe semble· avoir conati tué une aubaine pour les négociants étrangers et
particulièrement pour les ~ouveaux-Ar.gleterriens. Eric WILLIM~S (3) indi-
que en effet que ces marchands distillent eux-m~mes les mélasses ainsi
reçues pour les revendre à Terre-~euve, aux tribus indiennes et surtout
à la côte des esclaves.
Vendues à vil prix, les mélasses des rIes fr~l1çaises bénéficient
dava..'1tage de la préférence des étra..~gers que celles des colonies anglaises :~-
à~~s la première moitié du X'ITllè si~cle, ~es ~élasses frar-çaises et espa-
€":""cles
reviennen~ d'après FAITLKI3R,
25 2. 4e ~' :1cics c:,er êU:C è-istillateurs
(~) ?:e:mcire d'.l Î'7 A-v-ri:!.. Cf. A2~ ,':je:. C:::A65 f'~lio 99-1C8.
;~s=o:'=e è.:l 5 .~O-L:t • Cf ...~. Cc:' C~.~~5 f::i.:, 34.
285
~c. 2.2 :-ouyelle-Ansleterre que celles
'..test Indies" (1). Ces pro-
~~its devier~ent donc l'une des principales march~~dises èu commerce entre
2. -•.;~Quvel1e-Angleterre et lEis-!les françaises.
~~ous n'avons sur ce coœmerce que des renseibT_e:.:ents fré.6=1en te-Ïres.
~El2. ;ravient sans doute du ,fai t qu'il se fe.i t loin de le, ::étra,ole et du
~ureau de lé. balance de co~erce. n'é.bord des indicé.tions de prix, cO~ue
celle-ci,·relevées à Pointe-à-Pitre en Guadelou,e.
- Prix c:e 1&. ba::-riC'.le de sirCD. livré
Kou ve ~"..lx-An6l e terri ens
de 176~ à 1774 (2).
1764
33 à 36 livres la barrique
177C
5E à 66 livres la barrique
1765
36 à 4C
1771
56 à ,,(:.
o~
1766
42 à 4e
1772
60 à 66
1767
50 à 54
1773
63 à 66
1768
50 à 54
1·774
64 à 66
1ï69
50 à 54
Cette relative stagnation des prix confirme le caractère bon mar-
.
ohé des sirops des fIes françaises. Signalons que, durant les 6 derT~ers
mois de 1789, -Ye""boucalld de rhum est vendu à 200 li lITes et le boucauC: cie
sirop à 150 livres, la barrique de rhum à 11 livres et la barrique de si-
rop à 75 livres à Basse-Terre et 60 livres à Grande-Terre. Elle vaut 64
•
livres durant les premiers mois de 1790 à Grande-Terre •
Les prix sont trè~ élevés en 1792 : la barrique de rh~~ est vendue à 150
livres et celle de sirop à 130 livres. Le boucaud de rhum est monté à 300
(1) FALtKEER,?istoire économiaue èes'Etats-linis dt~éri~ue, PU?, 1952, Tome I,
7.111, cité P&.r SC:-::-_U\\~-::cr:tG, 12. cris:=:::'u s~,2tL::e eSCl2.-Fëi.ste, :-.ote 37,::.';"
(2) l.:" CJ:!. ?3 162 •
~,
j"Q
':)
,..,
-i-" _.....
ç,-.. ... :..,-
r-_
,'-
:)']l".1,.
43~~ bcc.;,es
2t ~ ~U.-:=2
.;'....
.......
31 ='c~c:~uè.s
H' 9 '.:·OUC.
~ 16 :c:ue~.
17 CV'
35C ::T.l'~.
3CS CO'.lc.
3",..·r- ::C'.:':S
5?3 sc;ues.
Cf.
AJT Ccl F412 t,:;,li:; 2C-21
(Î7~S);
286
livres. ~cus sommes à la Grande-Terre, durant les six pre~iers ~ois de
l' 2_nel.:fE. De.ns le m~I!le temps, à Basse-Terre, les bp.rriques G.e rhum et de
..;,;.
. '.'
_
.. J
si:::>I2_s~nt vendueS_retlpeet~~t à __'75 ."'·12l11-vr•• ; les bouce.udsde
r~Q~ et de sirop, à 350 et 250 livres.
}zis ces prix élevés résultent sans doute de la poli tique infla-
tior_~iste menée en métropole à partir de 1790. Il convient d'indiquer que
le rhum, le tafia et le sirop sont vendus au poids et tantSt à la capaci-
té : en boucaud, barrtquè,tierçoD, quarts, caisse, futaille, cave, pot,
bouteilles, pintes~ dames-jeanne. Le problème est de savoir si les mesures
de poids ont ici la m~me équivalence que ces m3mes poids en sucre.
Tableau nO 52
- Exportation de sirop, tafia et rh~ de Sainte-tuc1-e""'tioui":"les
color.ies étràngères et les Etats~nis 1784-1790 ( 1)(en_bou-cau~8
Etats-Unis
! colonies espagnoles lpol. étrangères
Amsterdam
Iles neutres
---:-1lllF:JI1 ..-
t
sirop ~ !. tat1a . rhum-. sirop
1 rhum.
~ sirop
R
T
S
rhum
sirop
.~~:4~~'?~:".:" .,- ,;.,-
{l\\.,
1784 -j-177
585
--
9
e
150 4-5 50
311
115
1786-85
348
4
25
244
1781
36
492
1bau...._"_,
26
131
1788
107
160
11
112
1789
26
16
23
-2"l
1790!
6
15
E
•
ri
La barrique de tafia est vendue à eo li~es, le boucauè de sirop
à 20 liVres, et le boucaud de rhQ~ à 200 livres. Les bal~~ces du commerce
dor~ent des renseignements précis sur les exportations des ports d'entrepôt
'>---j
en 17E6.
1
- S~ int !)or:Ür:p;ue (2)
(1) A~~ C~l C1CC2.
(.2) ~2.l2::ceE :'u c():-\\Serce. AIT?12 1835, lJièces 42, 49 et 50.
.&
288
Guadeloupe: EntrepSt de Pointe-à-Pitre (1786) (1).
Etats-Unis
J)OBBé~,~ons anglaises
poss. hollandaises
•
,
: , ' , - .<;_- ~~~~~~Û~. . ._
afia
6 bo~:ca\\1ds~24 bquéa
2 qüintaU%
hum
3291 bouc. 69 bques
269 boucauds
137 boucauds
100 bouteilles
Sainte-Lucie: EntrepSt du Carenage (~).
Etats-Unis
col. an~a.:i..ses
col. espagnoles
col. holland;
col. suéd.
hum
30 880 pintes
4 160 pintes
1 640 pintes
7 360 pintes
1 000 pintes
irop
129~
40 eoo
2 240
7 300
afia
7bques
45 barils
Tabaso : EntrepSt de Scarborough (1786) (3).
. Etats-Unis
col. anglaises
col. espagnoles
":;"
num
531 000 pintes
102 000 pintes
21 500 pintes
Mais un tel commerce ne tarde pas à constituer un objet d'inquiétude
pour les négociants français. Les privilèges exclusifs l'exigent. Mais Il y
a aussi la contrebande. Pourquoi donc ne pas obtenir l'autorisation de parti-
ciper à ce commerce ?ilLaquestion de l'entrep~t des sirops et tafia en France
va donc 3tre reposée par les négociants nationaux.
2°/ Le second compromis: l'a~ission ~es sirops et tafia en entrep5t en France
------------ -- ----------------------------------------------------------
Les négociants des deux grands ports coloniaux Bordeaux et Nantes,
se font les opposants zélés de la proscription des sirops 'et tafia en France.
Eien évide~e~t, chacun prétend agir dans l'intér~t~national. C'est bien
cOJl.rrroC::s:;::=C' 13::; t -même-Ta::-fai temer.t léei ti.::le car, élprès tout, le :prof! t d'un
nÉgaci2nt n'est-il pas perçu comrr.e le profit de toute la nation? L'un
(1 ) Ar p12 1835 p~ece n052.
.
( 2) 1'.__ p12
\\ '
.. 18:15, pièc e n053.
(3 ) A~T p12 1e35 pièce n054.
289
réagissant sur l'autre. La preuve, c'est par l'argument financier que,les
négociants de Nantes cOIDID.nçe~tleur;.re.Q,u~~e~Ce sont en, effet ces n~sOciants
')!.:.','.:,
qui prése;~tent=les mot1rLie~'piuà''~'f{tl. C'est,-de bonne guerre-'f;'Le:'
..•
pouvoir royal n'a-t~ilpas d'Jncessants besoins d'argent?
Les s~:;'9,ps 'et tafia entrant en France acquitteraient le droi t de
3 %de Domaine d'Occident. C'est tentant. En livrant ces produits,à bas
prix au commerce interlope, ce_~,roit n'est pax acquitté. Les admettre en
France, au contraire, c'est accrottre les revenus du Roi.
Suivent ensuite les arguments commerciaux. Si les sirops ~t tafia ne sont
aàmis qu'à la charge de la réexportation, quel inconvénient en ré sul tera.1t~
il-pour les eaux-de-vie ,de vin? Aucun, uaurcfment , car l'entrep~t ser-a...--
.;)
comme celui des autres denrées qui jouissent de la m~me faveur.
,·-t-":;'::î
....-..,...
En somme, pour les Nantais,' il n'existe vraiment aucun motif .1;.a~.:~~'~> "'1,1ir,·-,'
. t' ~"
... ,-...."",~.-< ••~..'-.~ " ..
....-
sible pour refuser au commerce, soit l'introduction libre, soit au moins
,''1
... -;1
llentrepSt. Un refus systématique aura de~ suites fâcheuses. En effet, en
It~
----re!u~aJl.t,,~y8:tematiquèmentces, proposi tions
.-' "~''::'-~;:~_:'~- :'t~,:.:::.-",·~-~-r-~~,~",!>: ~ :.~.,_.:~.'
,
.,;~:',
..> .,<-,~:--
~-'
..
'~,.' .
'é',.,:,,~~:;.~:~~~!,tt:·~'!'
0 , " "
".-~ -
- ~'Etatprowquerait volontairement dans ses colonies un commerce
'1i
intJrlope proscrit par ses prlnèlpés et~es réglements ;
1
"1
- il assurerait aux Nations rivales du commerce français les béné"';'
fices du bas prix, de la. préparation, du transport,de ces matières et de leur
• vente dans les PaTs du N0fd qui les consomment ;
- il priverait le commerce national de la valeur qui peut compenser
avantageusement les sorties de numéraire pour les achats de bois, de fer,
de chanvres, de goudrons et des autres productions de ces pays ;
cela affaiblirait les droits du domaine d'Occident. ,Les autres
1,
àroits du Roi ne peuvent non plus recevois des accroissements nécessaires.
1
Cet excès de zèle n'est pas innocent. Rantes est un port négier ;
le premier port négrier français. Les armateurs négriers peuvent,comme leurs
coll~5~ês de Nouvelle-Angleterre, employer ces produits dans leurs camp~gnes.
(1) "}~ér.;oire sur les sirops et taffia"(Anonyme, sans date). AN Col p3 162.
.... '
négrières à la cate d'Afrique.
L'entrep5t est accepté en p~~pe par l'Arr8t ~u Conseil de Juin 1767.
~~-"_.'":_""
---':'_~:'p
'1t:.
._.. ,,:.,~.
.::_
.-.
..
.
Mais les Ti~tes OppoB-i-ti4'na'd.e8r~ns-.viticolesen retardent_-.l~~pp11ca-
tion. Les négociants nantaisZ1!, démordent pas. Ceux pratiquant le commerce
du Nord leu~,9ftr~t:~~r4t~tepoursoulever à noveau la question. Cette
nouvelle demande._est adressée à PRASLIN, Ministre de la Marine et des Colo-
nies (1). Le Cont~leur général est saisi à son tour le 24 No,!embre 1 7 6 7 . ' :
i
Cette nouvelle proposition est~oumise aux députés du commerce. Ils se ran-
,.1
_.!
gent derrière les négociants. Leur observation en cinq points est produite
i
le 29 Janvier 1768.
_~~~J
Premier ar::::U!Ile ne produit pas cOlllDuné"ent autant d'eaux-de-vie de. vin··;;·:..... ~
'.
'r_' .-....'.':.....-,. :rt!
::'~ ;:,::::m;;':ro:c::r::t;:n:e~~:::~e~:q::::n:~:~::~~f:i.S·1
emploi. L'argument de la concurrence des sirops et tafia se trouve ainsi
'::~
écarté.
.'--...'""" ..•.. '.-"
.. SecolldargwBent.
Les eaux-de-vie de vin sont de qualité supérieure. Elles sont
em:pl~yées à des usages qui n 'ex{gentque des eaux-de-vie de quali t~ inférieu-·
re. Llimporta.t±on dUs.tatia-nBd.'.àonc superflue l'importatio.n des eaux-de-vie
étrSngères. Les vernis et les peintures qui se sont multipliés lui offrent
, un empi~ii.mmense. Ce n'ë~t pas tout; il Y a un autre intér3t : à cause de
il .,-...
.
..
.
.
son bas prix, le tafia peut servir-- aussi' à la consommation de la classe la
plus indigente de fa 'population sans qu'en raison de leur qualité, les eaux-
de-vie de vin perdent des consommateurs.
Troisième argument.
L'al~ération possible des eaux-de-vie de vin par le mélange de
tafia est impossible, parce qu'elle serait ruineuse pour le négociant infi-
dèle qui 'le tenterait, l'entrepat étant à la charge de l'exportation. Cela
signifie que le négociant a plus intérêt à ~xporter ses produi'ts qu'à les
employer en France m~me.
(1) TARRADE (J.), op. cit., Tome II, PP.576-577.
291·.-
Quatrième argument.
On n 'a jamaispro~,,~~t l~~,~s médiocres du Royaume sous le pré-
~l
texte qu '..:.-lS-altéreraient-les vins ~i-eurs de Bourgogne eu' de -cChampagne.
Cinquième ~rP.'.Jm~"t.. :
,_
La prohibition enlève aux colons le dixième de leur richesse et
une matière d'échange avantageuse pour la. navigation, un emploi et des re-
tours utiles ; aux négociants',_elle enlève le frui t d'une branche de commer-
,1
i
ce intéressante avec les peuples du Nord et de la c5te d'Afrique; à l'in-
1
dustrie nationale, le profit de la main-d~oeuvre qui convertit les sirops
1
~~~o~::::~::::~::t::n:~tP::::t::: ::Xti:::~o::.~;:~e:~:~t:::-:r::l~;:::~:'t .'j
et tafia e:;;::'e:U:~:::::::~ :se::::~:: ~:,:~:e:~:~::ed::t:~:~6"':~
iiie~t~:è:ul~~:!~e~6 deux maximes qui tenninent leursob~:'~~?~:;~lÎ
... l
"Si vous voulez que vos colonies soient riches, encouragez
'e--- --__
1
--~:__
1
leurs productions, donnez à toutes une valeur dans vos échanges";
.-"",i~-,-
Î
...:
"Si vous voulez retenir le droit exclusif de, commerce -avec-elles,· - "
admettez-y toutes leurs valeurs".
1
,
1
.
. 1\\
--
1
il
..
Cet~e 'fois .. la cause est défini ti vement entendue. Mais, avant d' abou-
~!~
1
tir, le projet d'entrepSt subit une transformation qui en limite considéra-
.
1
!
blement la portée. Il devient, en eff~t, tout simplement une mesure complé-
mentaire d'encouragement pour la pêche à la morue destinée au ravitaillement
des fles (1).
L'Arrêt qui la concrétise est rendu à Versailles le 14 Nars 176e, "arrêt du
Conseil d'Etat du Roi qui permet d'entreposer dans les Ports du Royaume, pour
être transportés à l'Etranger, dans l'année de l'entrepôt, en 'exemption de
tous droits, excepté de celui du Domaine d'ûccident, les sirops et tafias
(1) Elle s'ajoute en effet à la prime de 25 sous par quintal établie par l'Arrêt
du 31 Juillet 1767.
•
•
<
-~ • •
,. -
- - ,
, .
• ...
.
.
..
.. -
,. .--.......
292
provenant des retours du transport et vente dans les rsles et colonies !ran~
çoise, des i-:orues sèches de la ptch~~~:tionale" (1).
..:''f''''';''':::c'c
····1
~
Le sort de ce commerce est donc lié au développement des envois de
morues aux rles._Q~f' ces e~vois sont._très faibles. Jean-Baptiste DUBUC,
député de la Martinique, indique en effet que la conliommation de la morue
:.~
,-1
aux rIes du Vent est de 100 000 quintaux; alors que la p3che française
!
n'en peut fournir que 50 à 60 000 quintaux (2). Les retours en sirops et
- - - - - - - .
tafia se trouvent ainsi considérablement réduits. Le rhum dont l'entrée en
France est prohibée par la déclaration du Roi du 27 Février 1713, y est admis
en entrepSt par la déclaration du 10 Mars 1777.
Signalons que le 31 Mars 1778, dans ur. mémoire adressé aux colonies, " .
le Roi prescrit aux administrateurs d'exempter de tous droits, les esclaves
.
,. .
.
- - _.~.
attachés aux guildiveries. Cet encouragement, joint au haut prix auquel sont ",',::._
vendus les rhum, entraine la multiplication des rhumeries aux rIes.
En Guadeloupe, ces ~tablis.sements non seuleme~t augmentent mais se perfec-·
,,:,~ -~-~1::
tionnent-au.. poin.t....~en 1784,. ils emploient la plus grande partie des sirop~," :',~,:"~:_ .1'
-'"
(oz)'
" .
' ',... -.
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-,
" ,
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.
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W.'~·
'~::~~\\~~',;.... ~-;-_~:rc:
_•.,
'" ~
" ,~' ..: :"": 'f
•
o.
,J
~~- <=- ~
Cês précisions apportées ~ "1 es' importations françaises de sirops,
-1
mél~!I~~.,._ de tafia et de rhum sont les suivantes., Signalons que ces pro-: " ,
duits"sont vendus au poids, en livres~poids et en capacité: en veltes" muids,'
.'~ pintef:I,,'enpoi:s et en bouteilles. Cette vente en" mesures de capacité conceme
surtout le tafia et le rhum." Le'~t8.fia~èst vendu tantSt au poids, tantSt en
capacit~. Cette variété des unités de mesure complique la question de l'équi-
valence.
" ,
Notons que, dès 1660, les colonies françaises ont eoployé réglemen-
tairement les poids et mesures de Paris. Aux rIes, la velte vaut 7,61 litres
f
-,
( 1) A~~ ADXI 17.
(2) Copie de 12. lettre de N. de LA?ORTE au l-:a~écb.al d~ CASTRIES; 23 Juillet îïê4
A'!-~ ;;,12 261 S.
(3) Ext~~it èe 1~ délib~ration de l'Assemblée c01or~ale du 27 ?évrier 17e9.
~~ F3 163.
ii,,,
293
et la pinte O,~'1'.~1.tre(1). Pour les autres unités, nous n'avons pu retrou-
ver les équi valences~ Nous .préférons do~o les uni·tés telles qu 'elles apparais~
i
sent sur les ~~nts.
.~
Tableau nO 54
- Im~Q~tâtions de sirops, tafia et rhum 1773-1723 (2)
sirop-mélasse
sirop fin
tafia
rhum.
(en lb)
(en ib)
1773
14bques 8cd••es
50 bques 1/4
6118 bouteilles·
16caves6665btl.
1775
11 847 lb
l 321vel tes
1716
87 352
10 919
15 195 pots
1777
. 1 121 760
10 523
J-m
..'.. ! 1 851 257
146 840
88 602 lb
.~~ ,
1 259
1 156vel tes
t7~ .
29 421
1'@a. !
31 241
,~1~9'~1
547 470
31 889
(12 402 lt)
(20 020 lt)
1
-1791
8 393
'
..
.u_--~l_~;;f~:;f ~=~~Gr~!k..?~~:~:J.~·_·_L.~I~~;~~~';~~';'l.t,~;=:,~~.·-L};-s::!
1793 l"":"'
! .' 59421b 323 pots
1
!
.
l~
!
.-~··-t
'Les balances ne préoisent pas toujours l'origine exacte des pro-'
d.uits .. Cette question mérite cependant d'3tre posée. Une réponse peut 3tre
1
..
donnée à partir de 1 'analyse ~u tableau suivant.
J
(1) Nc CUSSKE-:' 1JJzhnJ-.,h-....!'-Les-·équivalences métriques des. po tels et mesures
du co~~erce colonial aux XV1Iè et XVI!Iè siècles", Revue française d'Histoi-
re d'Outre l':er, To:r.e LXI, 1974, PP.349-365 p. cf. p.361.
(2) rêmes sources Que les tableaux précédents.
Tableau p. 5'\\ ': Oririne des sous-'Ow drii ts sucriers ( Î ) '
.
'
1
S a i n t - D o m i n g u e , -
! ' "
1
Martinique (2)
La Guadeloupe
Ann'es
'
" . H
S
'1'
Jl';:!!M~1 fi
'1'
R
M
S
l m
-
~~:.~~:t. 50 \\"}~.. ~f.~~i~~"-
;"~,.'J,~,,,.;ll::ut.
-
1921 bout.
-
501bout.
16 oaves.
,~,
.
'
1788 1
-
li22 068 lb (122091t) - , ~,,:~ ~f32 lb (264Qlt) -
-
2 ' 9 lb
1789','
5B ooo:il 23 292 lb
(9 01 /il t)
(11 25Qlt) 13 1;3P~b j~ 200 Ib(1901t) (6 25Qlt)
640 'lb
3 ~~3 lbl
1191.
4. 110 l~ '111 ..!b".- 5 45'lb1/4
.
,. .~;.,<? '" ";;, ï,?'LL'!";"
1/4"
....,
'98~b',.. '. "
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12p'
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p.
. . . . . . .
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•
1
;J
-
•
179' '
5 211 l~
-
10v 200p,
-
..
-
9'v. 2m·1
-
4'1, lb
1
1 ~A6'Dt 3».
!
!
1
!
S
• sirop fin
.~
'1'
•
tafia
(1) Sources
iN 001 ,2», (117') ,
R
= rhum
,
AN ',.
, 1218'5 (17 88)
i'
bout. = bouteilles
tN 001 ,2]512 (1789)
bques
barriques
iN , 12 1671 (1791)
lb
livre-poids
AN J12167~(179')
It
• livre tournois
m
• muid
(2) lm 177', il faut ajouter au total des produits provenant de la Martinique et
P
'. pot
de la Guadeloupe 1'528 pouteilles de sirop et 2 496 bouteille. de rhum, l'ori-
v
... veltes
gine exaote nft§tant pas prt§cis(§e dans le dooument.
pt
= pinte
~
, ~;J
t '
#~_l_: _:
-Ill-
,5,
,',
.
"
.
'l'}\\;;'~
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1
'j
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.;
,
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~::~·,~I",të:l~UIl1:'c,:.,
': "" ;, •.1 Hi"j,1i
4'
CayeI1fie
....
-,'.,
1
, Tabago
- . ~_.,' ..,
.. Total
Llad~loupe
uyane
~.
..
~
.',
R
S
T
T
~:;
.
i~,
8
T
R
·'W·
,_'~/-_;:r;'h~ .., ·i·~,''',':'
~...
-.
'Obq\\lêA1/4
-
,61bout.
2bques
-
-
~
";,
! 1~'"'
..~1'"(bout,
, 622 bout.
"
I~~f!ll.~ 16oav••
"
i>
•
1
;f,~il: '
5
-
-
-
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-
201 t~
62 lb
'1 2~1 :J.b
15 364 lb
.
2l,t) (2 520lt~ 24 lb (201t) --
'.1'7~4-701b
'1 ~? ~b
11 402 lb
2B O~:\\O l~ ~Iil,
1V
-
-
'/4
1
39 6'1 p
4 6e21b l "I~;l ~b
5 454 lb 5618.
-t
, 1v. 40084p.
••
118V
1
-
-
-
320 P
59421b
546pt 221v
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-~~'-~'---'~._~'.'~"_~~'~_'!;r'!,j .~I.->_ri."';'~:':'-~ •..:.c ...._:1~: ,J:~:.;:,:~:-.~.::~~";.ni;!,:.f~~:;-.;
296
L'examen du tableau montre que Saint-Domingue est le plus gros
fournisseur des sous-produits sucriers. Cela n'est pas pour nous surpren-
dre car, c'est la col~.~amieax ravitaillée.
La Martinique occupe1~econde place et la Guadeloupe la troisième. En so~~e,
on retrouve le m3me sch&mg. -P.J!..·e.u,n1 v.eau des exportations sucrières. Les
exportations coloniales semblent 3tre dominées par le sirop et la mélasse.
Le tafia et le rh:um importés ne sont pas toujours quantifiés, ce qui rend
difficile leur appréciation. Ils sont en e!fet tantet quantifiés, tantet
connus sous leur valeur respective dans les importations.
Les exportations de la Guyane sont essentiellement composées de
sirop de très faible quantité: en 1766, la colonie n'a exporté que un quin-
tal de sirop, un quintal 1/2 en 1771,2; U . . . . .·';en 1776 (1).
Tabago appara!t comme un exportateur exclusif de tafia. Cette image est dé-
mentie par les archives de la colonie. Dans ces documents en effet, les
exportations sont composées plutet exclusivement de rhum. Les mesures de ..
_capaci ~é sont également différentes. En France, les en~egistrements font état..
-----de--potlt.Le~~.~g1~trements,de la colonie emploient le gallon dans l'expor-' ,
•
:-
,- ·.>·,_I.';~,7~~:"~~' ~,':(~:~" .. ,;.,__ -
.
; . ','.
. _'..,: __
- .
.
...
-,,_
tation du mum.;;,c.test la seule exception à l'emploi des mesures parisienrieas,.-
-Cette mesur~ esthérltée de la colonisation· anglaise ; les poids et mesures
--- ;--,-~<;. ~
::;;;;;$.'~
des col~niesbrftanniques reflètant ceux du commerce anglais, surtout ceux .
de Londres. Un gallon' dans le, English West Indies est évalué à 3,7854 litres
(2).
il
--
Exportation de rhum de Tabago vers la France de 1786 à 1789 (3)
1786
18 700' gallons
1787
19 000
1788
96 400
1789
129 009
Sans doute convient-il de savoir ~ainten2nt les ports intéressés par
ces importations.
(1) A~
14
Col C
45 folio 274.
(2) ~c CDSKER (John J.), op. cit., p.364.
(3) 17~6-1727
Ar '::0'1 ~E8.
17ee-1789
A:; Col C . E6.
l'
:':'<1
' . "
~.,t.:~........."........•
1
Tableau nO ;}O
Ports de d~barguement des sous-produits suoriers.
..
:Bayonne
:Bordeaux
Dunkerque
ILa Roohe11e
ILor~ent'
Le Havre
Années
S
1
T
M
1
S
~
R
S
1
T
1
R
M I S
M
1
S
-
1~7'
-
•
-
4943bt
"OObt
'!'"
-
-
-
-
- r686bout.
1188
12 lb
-
79~3lb
..
600 lb
...
-
-
6391b
-
54981b
1789
60 lb
(16021t) 117 1b187901b
210 lb
(1351 t)
(1750001 t) ~ 88552lb 781lb
"'-,
-
54981b
1791
-
-
911lb
40025p
-
-
- 40 lb 46821b. -
119'
-
20 pt
8oussesJ3 pots
12 fi
J20p
-
-
-
486.11b.
-
'1
li
:1 .r~aoon
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Annt§
1 Le Havre
Nantes
Marseille
SEltnt Malo
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R
1 M .. 1 8
L
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1 ~R
1 s 1
T
1 M
1
s
T.., 1
R
_.
1713
50bques 1/4 262Obout.
-
-
-
-
-
-
-
14lSques'8bout,
- l40bout.
8oa1sses16oaves
1788
-
-
-
1o6451b (29881. t)
-
24581b (123271 t)
-
2102'~ lb
(541 t) 1 -
1789
-
-
3451111 b 113871b (24501 t)
(25201 t) 28961b ((81401 t) 130301b
149 lb
- .
(361 t) 1~
1791
60p 56n
-
,·j"·'5 S61b
-
54531fi-/4
-
-
-
-
8201b
-
128v
-
1921b 526p~
-
-
1
- • -
1793
2m 1
- 1 60 lb
1 93v
•
-
.,',
.,'
st Vallery 1Rooherort 1Granville 1Toulon 1Honfleur 1 i"'
Années
S
S
S
S
S
1713
1788
982 lb
461b
li
13.2 lb
1789
112 lb
716 lb
56 lb
901b
218 lb
1\\)
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1791
~
1793
1
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>_,__-""'__-I"""';""'.,;.,""'''''''''.'''''"''.,,'-"", .. ~.~ _~~"",,,,"w'~""M .•
._.. _..
298
Le caractère sporadique des données ne permet pas de tirer une
conclusion rigoureuse de l'observation du tableau. Tout au plus, devons-
nous nous borner à étab~tr~es constats.
Nantes, le Havre et certainement épisodiquement la Rochelle ,-;
Saint~!a1o et Bordeaux, sont les ports importateurs de mélasse. En 1789,
::antes apparart comme le premier importateur, la Rochelle et Saint-Malo
occupant respectivement la seconde et la troisième place. En 1791 et 1793
en revanche, le Havre semble avoir ravi la première plàce à Nantes.
L'essentiel de cette mélasse vient de Saint-Domingue: en 1891, les 3 5e6 lb
de mélasse arrivéès à Nantes proviennent de cette rIe; 4 170 lb sur les
4 682 enregistrées au Havre proviennent de la m~me colonie ; la Martinique
en âfourni 414 lb et la Guadeloupe seulement 98 lb.
En 1793, Nantes reçoit E2C lb de mélasse : 520 lb viennent de Saint':'Domingue,
30C de la Guadeloupe. _La. disproportion est plus grande au Havre. En effet,
sur les 4 861 lb de mélasse reçues, 4 730 sont de Saint-Domingue et seulement
131 de la Guadeloupe.
Tbus les ports faisant le commerce colonial importent plus ou
moins du sirop des tles. Mais les plus intéressés sont les grands ports
pratiquant le comméf6é tte !'Earope~~Nord où le sirop est consommé. Ces
ports sont : ~antes,. Bordeaux, le Havre et Marseille. Nantes figure aussi
parmi les trois principaux ports importateurs de tafia ; les deux autres
étant Marseille et Dunkerque. Mais ici, Marseille semble occuper la première
#
place.La. Martinique, centre traditionnel de l'activité marseillaise aux rIes
en fournit le plus fort contingent. En 1792, Marseille reçoit 11 veltes
41 muids 1/2 2 pintes de tafia des rIes dont 8 veltes, 30 ~uids 2 pintss
de la !':artinique. -:
Saint-Domingue en fournit 3 veltes 7 muids et la Guadeloupe 4 mUids1/2
(1). En 1793, elle en importe 346 pintes 2 ~uids de la ~artinique et 180
pintes dè Saint Domin~~e.
Dunkerque reçoit l'essentiel de son tafia de Tab~go : 39 625 ,cts contre 4CC
(1) Importation en Fr~~ce des m2rc~~~dises de l'A~érique,d12I'Afrique et de
l'Asie. 3ureau colonial de Earseille. A.."l!1ée 1792. Ali F
1674.
299
Nantes en reçoit davantage de Saint-Domingue: 5 453 lb 1/4 contre 1 velte
de la Guadeloupe en 1791. Mais en 1793, exceptionnellement, la part de la
.~
Guadeloupe est plus impo:~tm:te : 118 veltes contre seuJ.ement 10 de Saint-
Domingue. - ".p. _<.'"
-
Les importations de rhum sont sporadiques. Les ports intéressés;,,:-.;.
sont Bordeaux, Dunkerque, Nantes, le Havre et Saint-r-:alo.
On peut retenir que les ports les plus intéress€s
par l'importa-
tion des sous-produits sucriers sont ceux pratiquant à la fois le commerce
de l'Europe du Nord et la traite négrière. Il est en effet vraisemblable
qu'une partie de ces produits entre
dans la cargaison de traite.
Il n'en demeure pas moins qu'au regard des importations sucrières, les si-
rops, le tafia et le rhum ne constituent qu'un commerce secondéÛre. Tout
tourne donc essentiellement autour du commerce des sucres. Sur ce point, ce
chapitre nous inspire deux idées principales •
. . La. première est la primauté de Saint~omingue dans les fourni tu-
res ar~uelles. Celle-ci n'a rien de bien surprenant. En effet, pivot du
commerce français dans les Indes Occidentales, il va de soi que Saint-Domin-
gue se démarque des:' auires colorues sû'r"~l'e-~'plan de la fourniture sucrière.
Dans un commerce dominé par le troc, cette intensité des échanges avec la
métropole devait se traduire nécessairement par cette primuuté et cela, du
• fait m3me du déséquilibre du niveau quantitatif de ces échanges. Saint-Do-
mingue a aussi un autre atout, celui de fa qualité de sa production sucriè-
re, notamment le sucre brut.
La seconde idée est le ni ve~u des importations par ra.l'port à la
consommation intérieure française. Au regard de l'estiœation de 1777, il
est très évident que la Frar.ce importe plus de sucres qu'il n'en faut réel-
lenent pour sa consorr~ation intérieur. Le seul sucre brut, mais aussi la
seule matière première r2corxue par la loi, suffit à la combler. Le fort
. contingent a~~uel de sucre terré, t~te et blanc, denrées de luxe et lour-
donc apparemment un sUI'F-"u; J'our la réexportation. Le seul problème qui
s'oppose ionc à l'~xpansio~ du Commerce sucrier inter-européen de la France
300
est la conjoncture internationale.
Tant que ses relations avec ses colonies sont régulières, notamment avec
Saint-Domingue, il se p_":,te-bien. A ce titre, la période 1763-1793, à
l'exception des six malheureuses années de la Guerre d.'Amérique qui per-
turbent le commerce colonial~ s~ns d'ailleurs l'interrompre, peut être
considérée comme les plus beaux joursl~ du commerce sucrier français.
1
x
x
1
x
'
•• ':"
;~
~
If
301
CHAPITRE V
LE PLEIN EPANOUISSEMENT DU COMMERCE SUCEIER FRANCAIS EN EUROPE.
L'évolution du commerce des sucres est inséparablz de l'histoire
du commerce européen. Au XVIè siècle, grande puissance commerciale européenne,
le Portugal est le premier grand commerçant d-e sucre. Quand à la fin du XVIè
èébut XVIIè siècle,
la prépondérance commerciale
passe de la pér~nsule ibé-
. rique à l'Europe du Nord, notamment à l'Angleterre et à la Hollande, c'est
ce dernier pays qui supplante le Portugal. La Hollande est à son tour sup-
plantée par l'Angleterre dont le commerce est fortement stimulé par les Actes
de navigation.
Après la paix d'Utrecht, l'accroissement de la production dans les
colonies françaises place la ~~cedans une position favorable pour p~endre
la relève~e qu'elle fait dans la seconde moitié du XVIIIè siècle. La prépon~
dérance française résulte de deux facteurs déterminants. D'une part, alors
1
que les colonies anglaises entrent dans une phase de déclin relatif, celles
de la France avec Saint-Domingue, fournissent à la métropole des quantités
1
considérables de ·8!?8~8Iil. DJ-a.utre part, il est à notqr qu'en France, les su-
1
cres intéressent surtout le commerce inter-européen ; la consommation inté-
rieure étant largement inférieure à celle de l'Angleterre à la m~me époque.
Le commerce des sucres, c'est aussi le raffinage. La métrcpole
transforme les sucres bruts et terrés en sucres raffinés dont une partie est
consommée à l'intérieur du ~oy~ume et l'autre, exportée à l'étranger. Avant
d'annoncer les thèmes autour desquels va s'articuler cette étude, il paratt
utile de définir les termes de consommation intérieure, de réexportation et
d'exportation utilisés dans ce travail.
Le terme de consommation intérieure désigne ici la part des sucres
~etenus en France et destinés à la consommation effective et au raffinage en
302
vue de la vente à l'étranger. ~and les sucres arrivés des colonies passent
directement d'en~repôt à l'étranger, l'opération s'appelle réexportation(1).
#
L'exportation désigne la commercialisation à l'étranger du sucre raffiné
métropolitain. Ces deux dernières définitions peuvent être résumées par le
schéma suivant
importation
Réex"Oorta tion
sucres bruts
sucres bruts
-----!"----"''"''''':'-~:--_r_::=___:=_-"""':"'----"""""':'--:__-:__----~
sucres terrés
J FRANCE
sucres terrés
1
colonies
sucre tgte
J
ENTREPcrT
sucre.t3te
ETRANGER J
i
1
:
l
sucre blanc
"
sucre blanc
1
i
!
1
-------------~
~Exportation
1
!
1
1
1
sucre raffiné
1
t Raffinage;.--.+
en pain
";'1,.
i:::i·
,'.f.
,
'.
._-----
1
,
1
Evaluer la consommation intérieure, montrer l'importance de
l'industrie du raffinage et dégager l'importance de l~ vente sucrière dans
~~
la balance com.••••'ale a .....eo·chacune des puissances, tel est l'objectif de ce
1
~
chapi tre.
1
!
•
Il
!
Une consommation intérieure très réduite.
;>j
'.:::.
1
Depuis le milieu du XVIlè siècle, la consommation sucrière pro-
gresse en Europe à mesure que la production augmente. C'est qu'en raison de
l'abaissement des
prix, le sucre gagne dans chaque pays des couches plus
profondes de consommateurs.
Les pays producteurs ont le choix entre développer la consommation
intérieure cu accroître la réexportation. Dans la seconde moitié du
(1) Les sucres vendus sont
les sucres bruts, les sucres terrés, le sucre
tête et le sucre blanc.
303
XVIllè siècle, l'Angleterre choisit la première voie tandis que la France
privilégie la réexpor~~~i~. L'objectif fondamental de cette partie est de
montrer l'importance de la consommation int"ériêure française par rapport aux
importa ti ons.
Les sucres bruts fixés réglementairement comme la seule matière
première, devaient constituer la base de cette consommation surtout, en tant
qu'unique aliment des raffineries. Le second objet de ce travail sera de
savoir si la législation sucrière ainsi définie a été scrupuleusement respectée.
10 ) Evaluat!on 9.~ill!~~~~~~~_~~r!e,:::e
~~~~~_~
imeor!!tion! sucrièr~~~niales.
La consommation sucrière annuelle de la France est évaluée à
50 000 000 lb (1). Mais, loin dl~tre une valeur absolue, ce chiffre représente,
à n'en point douter, une moyenne théorique en année fictive; il minimise
donc forcément les écarts entre les années. Dès lors, il apparatt nécessaire
de tenter une évalnlÎi oa eor-recte année par année.
On est presqu'immédiatement tenté de procéder par une simple sous-
traction. Serait considérée alors comme de consommation intérieure, la dir-
•
férence entre les importations et, plus globalement, les ventes à l'étranger•
Mais ce résultat ne rendrait pas compte de
la réalité. En effet, en procé-
dant ainsi, on peut minimiser la consommation comme on'peut l'exagerer selon
les cas. On doit tenir compte du fait que la matière première servant à la
fabrication du sucre en pain exporté est incluse dans la quantité de sucres
consommés. Ce sucre en pain est, de plus, d'une autre nature et, de ce fai t,
ne doit pas être confondu à ceux qui passent directement à'entrepôt à l'étran-
ger.
12
(1) Mémoire des raffineurs î777.
AN F
1639A.
304
Cette soustraction n'a de sens qu'en ce qui concerne les sucres
bruts, terrés et le sucr~ J3te. Pour le sucre en pain, la consommation inté-
rieure est la différence entre la production totale et les exportations.
Il faut pour cela conna!tre avec exactitude la quantité de sucre raffiné
produit chaque année en France et la quantité exacte qui passe à l'étranger.
Cette production totale, nous le verrons(1), est impossible à évaluer dans
l'état actuel de nos recherches. Faute de renseignements sur la consomma-
tion annuelle de sucre raffiné, nous nous occuperons essentiellement des
sucres bruts, des sucres terrés, du sucre tête et du sucre blanc.
Signalons cependant que malgré cette précaution, nous aurons
davantage affaire à des chiffres de consommation théorique qu'effective.
Car, tous les sucres retenus dans le royaume ne sont pas directement consom-
mables. Seuls , les meilleures sortes de sucre terré, le sucre t~t~ et le
sucre blanc peuven~ ~tre consommés en nature ; les sucres bruts sont puri-
fiés par le raffinage avant de passer dans la consommation. Le sucre raffiné
est, quantitativement, inférieur au sucre brut car il faut théoriquement
225 lb de brut pour faire 100 lb de raffiné. Une partie des sucres terrés
est raffinée comme matière première (2).
[1
~
~~~-.
Une autre question se pose ; elle est de savoir si le sucre blanc
non réexporté doit être considéré comme sucre consommé en France.
Aucune indication ne nous autorise à lë penser. Main rien n'indique le con-
traire. Tbutefois, en raison du droit excessivement élevé de 22 It 105 fixé
sur le sucre au m~me titre que le sucre raffiné étranger, on peut admettre
qu'il s'agit d'un surplus gardé en entrep8t en vue d'une prochaine réex-
portation. Nous retenons cette conjecture comme hypothèse de travail.
Les sucres terrés et le
sucre tête, en revanche, sont consommés
dans le royaume. Nous l'avons signalé, nous le verrons plus tard, la présen-
ce des sucres terrés est prouvée dans le raffinage.
(1) Cf. ttapra p. 34 5.
(2) Cf. ''f'I'a p. 3'lit •
La période d'analyse est écourtée par l'absence de longue série sta-
., ,:::",~
tistique nationale. En oU';Te, certains relevés ne renferment pas toutes-:préci-
sions nécessai~es permettant d'effectuer le calcul de base. C'est le cas des
statistiques des années 1752 à 1785 contenues dans les fonds de Sainte-Lucie
(1) •
Avant 1775, nos sources so~t muettes sur les importations et réexportations.
Au delà de 1789, les données statistiques sont très fragmentaires et incomplè-
tes. En définitive, on n'est mieux renseigné que sur ddx années: 1775 à 1780
et 1786 à 1789. Ce sont ces années qui serviront de base à cette étude.
Tableau nO 57
Part de la consommation intérieure de sucres bruts. terrés et
t3te dans les importations sucrières coloniales 1775 à 1780 -
1786-1789 (2).
,
,
,
,
,
,
Total de la consommation inté-
, Part de cette consommation 1
.,
'Années
, dans les importations an-
,
(en lb)
1
rieure annuelle
, nuelles (en %)
r
,
,
1
1
,
,
,
.,
,
,
, 1775
32 877 271
1
25,79
,
,
,
,
, 1776
74-296 268
37,31
,
,
1
,
1777
83(n6 740
,
35,48
,
1
,
,
, 1778
118 511 876
,
50,00
,
,
,
,
, 1779
11 159 177
,
31,82
,
,
,
1700
10 195 251
32,10
t
,
,
,
,
,
,
,
,
t,
t
1786
52 155 300
29,93
t
,
,
t
,
•
,
, 1787
53 971 335
1
32,79
,
,
1
, 1788
63 055 669
,
33,48
,
,
,
,
i::;~:
1789
50 318 842
27,35
!
r
!
Comparativement à la conso~~ation anglaise, celle de la France para!t
excessivement faible. En effet, alors qu'en 1775, 79,3 % (3) du sucre colonial
anglais sont consommés à l'intérieur de la Grande-Bretagne, la France ne
1
(1) AN Col C 0C8. Tableau n02.
(2) Même source que les tableaux précédents.
(3) SHERIDAN (R.B.), Sugar,and Slavery. An économie History of the British
West Indies 1623-1775, p.25.
Le taux de 37,4 %qu'il attribue à la consommation française nous para!t
excessif au regard de notre propre résultat.
306
consomme que 25,79 % du sien. La différence est énorme: 53,51 %. La consom-
mation sucrière française (sucres bruts, terrés et t~tes), évolue entre 25 et
36 %d'une façon générale.
Ainsi, la progression au delà de 1775 est-elle très peu importante.
Elle est liée aux volumes des importations comme en 1776, 1777 et 1778 et à la
conjoncture internationale comme en 1778, 1779 et 1780 plut~t qu'à un accrois-
sement de la demande intérieure. Le taux record de 1778 est exceptionnel.
L'ouverture des hostilités avec l'Angleterre et la peur de manquer de sucres
si la guerre se prolongeait et devenait désastreuse expliquent sans doute cette
situation sans précédent.
L'écart entre la France et l'Angleterre s'est considérablement agran-
di à la veille de la Révolution américaine : la Grande-Bretagne absorbe 90 %
(1) de son sucre colonial. Eh France, la consommation Oscille entre 27 et 34 %.
Pierre LEON, à la sui te de Richard :B. SHENDAN, explique l'avance
anglaise par la consommation fort répandue chez les citadins, du café, du thé,
du rhum, du punch et autres spiritueux de mélasse. Ce n'est pas le cas en France.
où le vin et eaux-de-vie de raisin sont un véritable obstacle à la consommation
l i
des sirops Qt du tafia. Le café importé des colonies est stocké pour ~tre
1
r<iexpoI'té (2).
Ainsi, à en croire François CHARNY, en France, jusqu'à la fin du XvrIIè siècle,
le sucre est encore répertorié comme produit rare. Il est considéré plus comme
un médicament que comme un aliment (3). A preuve, vers 1750, alors que l'An-
glais consomme 5 kilogrammes de sucre, le Français se contente seulement
d'une livre (4).
Faut-il en conclure que la faiblesse de la consommation sucrière en
France explique l'importance de la réexportation? Ce qui reviendrait à dire
que la vente à l'étranger constitue un apport additionnel net aux ventes sur
le marché national.
(1) SH~IMI\\I(R.B.), 0'0. cit., p.32.
(2) LEON (P.), Histoire économiaue et sociale du Monde. Torne II, p.66.
(3) ~u~~~7
v l'1.A;1..a. _. _
(~)
.- /
•
• le
~
•
~"c-e
UCA.
-4
,
~7
~,.
•
(4)
SHERI-="'N (R.B) 0?
:-;:-'':', p. 25
307
Une telle conclusion serait inexacte car, en réalité, c'est la fai-
blesse de la consommation intéri~~~e qui résulte de la prépondérance des ventes
à l'étranger. C'est l'une des nombreuses contradictions résultant~de la stra-
tégie commerciale de l'époque. Il semble évident que ce que recherchent les
négociants, avec bien sûr la complicité des pouvoirs publics, ce sont des
marchés à l'exportation des sucres et non le développement du marché intérieure.
En effet, fidèles' à la doctrine mercantiliste, leur préoccupation principale
est la réalisation d'une balance commerciale toujours favorable, c'est-à-dire
une expansion des exportations qui ne soit pas contrebalancée par un apport
équivalent de marchandises étrangères sur le marché national (1).
Pays agricole, la Franc~ ne peut équilibrer sa balance commerciale
avec les autres puissances par ses seuls produits locaux. Il semble en tout
cas évident qu'asseoir son commerce sur des produits de grande valeur qu'elle
peut écouler plus avantageusement relève du simple bon sens. Cela est d'autant
plus vraisemblable que m~me les puissances coloniales du Nord, grandes consom-
matrices de sucres comme la Hollande et le Danemark, ne peuvent être satisfaites
par leur seule production.
Celles qui n'ont pas de colonies sucrières, elles sont nombreuses, sont, de
toute évidence, contraintes de s'adresser aux négociants français o~ aux re-
distributeurs du Nord en :f.aJ.son de IfeXêlusif qui les empêche d'aller se
ravitailler directement dans les zones de production.
Pour cela, les sucres vendus en entrepat aux étrangers ne payent que
le droit du Domaine d'Occident. L'exportation du sucre en pain est encouragée
au moyen de remboursement de droits et de primes (2). Tandis qu'en France même,
le consommateur supporte le poids des impositions.
Les droits intérieurs grèvent de plus les prix nationaux. Hervé du HALGOUET
montre qu'un quintal de sucre de Nantes, vendu à Paris, est chargé de près de
20 lt de droit. Droit des cinq grosses fermes (droits d'entrée), différentes
taxes seigneuriales sur le parcours de la Loire, le transport et les octrois de
Paris (3).
(1) DOBB (M.), Etudes sur
le développement du capitalisme, p.215.
(2) Cf, ~ra p.~6lr~65
(3) DU HALGOUET (H.), Nantes, ses relations commerciales avec les rIes d'AmérieuE
au XVIllè siècle. Ses armateurs., p.133.
308
La capitale est un grand consommateur de denrées coloniales. En
1784, LAVOISIER évalue la cons0~ation annuelle de Paris a 20 millions 3/4
de livres tournois dont 8 millions pour le sucre (1), soit 40 %. Ces sucres
sont taxés à l'entrée de Paris. Le droit est de 3 It 12s 6d par quintal avant
1781 et de 11 It 10s après la déclaration d'Août 1781. A l'issue de cette
déclaration, m~me le café qui n'était pas soumis au droit d'entrée, est taxé
brutalement a 15 It le quintal (2).
On peut dire en résumé que les sucres importés des colonies inté-
ressent avant tout le commerce inter-européen de la France. Ils lui__ servent
à constituer son surplus d'exportation. Le commerce extérieur étant une source
:)
d'accumulation et d~·revenus aussi bien pour les négociants que pour l'Etat.
L'intérêt réside dans le fait que, poù~ les deux catégories d'intéressés, le
profit réalisé l'est aux dépens de l'étranger. Dans ces conditions, la con-
sommation intérieure n'est qu'un calcul accessoire dans l'esprit des représen-
tants du grand commerce voire même du pouvoir royal.
1
Il reste
maintenant à identifier les sucres
entrant dans la con-
~
sommation intérieure.
sucre brut préd2mine.
Si les raffineurs ont lutté énergiquement pour arracher des tarifs
prohibitifs à l'égard des sucres terrés et du sucre blanc, afin d'en empêcher
la consommation, à l'intérieur du royaume, tout au moins pour en diminuer con-
sidérablement la consommation, dans la réalité, l'esprit de la loi n'a pas
été respecté. C'est que, comme nous le verrons dans la suite de ce travail,
ces raffineurs se sont très tôt rend~ compte qu'ils ne peuvent travailler ~
profit sans m~ler sucres bruts et sucres terrés au cours du raffinage (3).
"Résultat pour la France de l'invention du sucre de raisin et de celui des
betteraves",
AN F12 1640, '!'ableau n01, p.2.
12
AN F
659.1. fussier 3, "commerce et industrie de Paris (sucres et café)
1786-1788.
(3) Voir lItFa p. ~ 14.
309
Aussi, une partie des sucres terrés et du sucre tête est-elle retenue
d~~s le royaume chaque année: ~a~!, ainsi que nous le disions pour le sucre
blanc, il est très vraisemblable que tous ces sucres ne sont pas effectivement
consommés à l'intérieur du royaume.
La grande difficulté est qu'il est absolument impossible d'estimer
la part destinée à la consommation nationale et celle qui reste en entrepat
en vue de la réexportation prochaine. Il n'en demeure pas moin~qJe cet emploi
du sucre terré dans le raffinage constitue l'une des contradictions des
raffineurs français.
Il signifie ici comme ailleurs que les revendications réflèten~ surtout les
intérêts du moment. On s'aperçoit de l'erreur quelques années plus tard lors-
que la loi est promulguée et qu'on en subit les conséquences. Alors commencent
d'autres revendications pour obtenir des adoucissements.
Autre contradiction : tout le sucre brut provenant des colonies
n'est pas entièrement consommé au niveau national. Une partie passe à l'étran-
ger où elle alimente les raffineries locales. On voit donc que de contradiction
.,
en contradiction, la France a ouvert aux étrangers la prérogative du choix des
,
denrées coloniales. Le mieux aurait été de raffiner tous les sucres provenant
i
des colonies avant de le~ exporter. tTavantage d'un tel choix c'est qu'il
!,!
aurai t permis de valoriser les exportations.
1
La part de chacun de ces sucres dans la consommation intérieure
•
est la sujjvante :
\\:):1
!
310
Tableau nO 58 -
Part de chaque t,ue èe sucre dans la consommation intérieure.
l
,
,
,
,
,
,
,
,
sucres
bruts
0/
,
sucres terrés
1 sucre
tête
JAnnéesJ
/0
,
,
1
,
,
01
,
,
, t!(1I8.ftt1t é lpar"t dans la lquantité
:
% 1 quantité
10
,
,
,
,
,
,.
,
.
1consommation 1
,
,
!
,
!
,
f
,
f
,
1 1775 :
1 593 771
4,:85
15 921 086
46.73
f
1
1
,
1 1776 : 35 725 338 ,
48.08
, 25 253 894
17,92
1
,
1 1777 : 58054162 ,
69.30
16 227 566
,
11,33
1
,
,
,
,
1 1778 1 92 617 741 ,
78.15
, 19 257 550
5,60
,
,
,
,
1 1779 : 4 238 343 ,
37,98
, 4 585 220
20.93
,
,
,
,
1 1700 :
300 321 ,
3,73
, 7 373 286
23,95
,
,
,
,
1
,
,
f
,
,
,
: 1786 , 25 681 900 ,
49.24
26 473 400
1
,
,
,
,
36 340 020
1 1767 1
, 67; B.
17 631 315
,
,
1
,
1 1788 : 42 432 092 ,
67,29
, 20 623 577
,
,
,
,
42 725 495
e4,91
7 593 357
! 1789 !
!
!
!
Sucres bruts. sucres terrés et sucre t3te n'ont pas le m~me niveau
__quantitatif dans la consoLmation nationale. Le niveau des importations impose
d'abord un pre~ier élément de distinction.
Les sucres bruts sont relativement plus abondants que les terrés et le sucre
tête. Mais on ne doit pas pe~dlé ~é vue 'que réglementairemént. seule la consom-
mation des sucres bruts est encouragée. Leur nature de matière première les
destine d'abord aü ravitaillement des nombreuses raffineries établies dans
différentes provinces françaises. C~:est donc exceptionnellement qu'en 1775 et
•
probablement pendant toute
la . durée de la Guerre d'Amériquè du fait de la
1
chute des importations. ils sont dépassés par les sucres terrés.
.' .1
··:::1
:l:-:::~
o'.··
:
Les sucres bruts dominent surtout par leur volume. Mais, lorsque
l'on compare les quanti tés respecti ves aux importations
'ot
on s' aper-
çoit que, contrairement à ce qui devrait être, le plus fort contingent de sucres
terrés et tête provenant des colonies est destiné à la consommation plutôt
qu'à la réexportation. Les taux de consommation respectifs sont les suivants
(1) Au cours des quatre dernières années de l'Ancien Régime, la distincti~n su-
cre terré et sucre tête n'est ~toujours faite, notamment au niveau de la
réexportation. Il est donc impossible de déterminer les parts respectives.
Les pourcentages concernent donc les deux types de sucre.
311
è -
Tableau nO 59 -
Taux de consommation de chaoue tyne de sucre (%)~
n
A~n4-es
sucres bruts
sucres terrés
sucre t~te
1775
3,30
47,84
99,92
1776
40,22
68,20
98,68
1777
48,48
51,28
92,79
1778
85,62
64,97
94,21
1779
37,66
74,38
100,
1700
9,36
71,20
98,44
1786
40,17
24,00
1787
56,34
17,62
1788
48,61
20,41
1789
45,47
9,22
'"
La part des sucres bruts réservée à la consommation intérieure ne
semble pas avoir subi d'évolution notable au cours de la seconde moitié du
XVIllè siècle. EXception faite des années de crise, les taux n'atteignent pas
les 50 %. M3me la loi du 25 Mai 1786,qui accorde la restitution de tous les
--droits perçus sur les sucres bruts ayant servi à la fabrication du sucre raf-
finé en pain (1), restitution jusque là circonscrite au seul droit d'entrée
dit de consommation et non c1~~ du Do~_~~e d'Occident, ne semble pas avoir
modifié les habitudes acquises.
La part destinée à la'réexportation dépasse celle réservée à la
,
consommation et les plus forts taux en 1778 et en 1787 doivent être considérés
comme accidentels. En 1778, c'est le début de la Guerre d'Amérique, les
négociants constituent des réserves pour prévenir la pénurie. En 1787, beaucoup
de sucres sont en entrepôt à Bordeaux (2).
Seuls les sucres terrés et le sucre tête ont subi une évolution en
deux phases, si~lées de part et d'autre de l'année 1786. Dans la première ph~~
se, la plus grande quantité des importations coloniales reste à l'intérieur
du royaume. Le sucre tête plus que les sucres terrés, est concerné par ce
phénomène. Plus de 90 %des importations sont consommés sur place. Zn 1779,
(1) La restitution s'effectue sur la base de 225 lb de sucre brut pour un quin-
tal de sucre en pain.
(2) Cf. ilfra p.lCt
312
c'est tout le sucre tête importé des colonies qui est ainsi consommé. Cela
signifierait-il que ce type de sucre ;~1 rejeté par les étrangers? Assurément,
bien qu'aucune justification n'apparaît nulle part. La qualité du produit peut
justifier amplement ce rejet, si rejet il y a. Nous savons par définition que
le su~re tête est une forme épurée de sucre terré. Sa contenance saccharifère
est de ce fait, très faible
celui d'une belle qualité ne contiendrait à peine
qu'un "pouce" de sucre. Quand celle-ci est plus élevée, ce serait au plus
huit "pouces" (1). Be ce point de vue, sa vente à l'étranger s'avère pratique-
ment inintéressante à cause de la concurrence qui impose le choix des produits
de meilleure qualité.
De plus, il importe de vendre avantageusement et non à perte, le
commerce le veut ainsi. N'est-il pas alors préférable de le vendre à l'intérieu!
ne serait-ce que pour la consommation de
la classe la plus indigente de la
population ?
L'emploi des sucres terrés dans le raffinage explique sans doute
leur fort taux de consommation à l'intérieur du royaume. Mais, lorsqu'en 1786,
une nouvelle loi de restitution à l'exportation est promulguée,qui encourage
une
fois de. plus la consommation des sucres bruts, le glissement s'effectue
ri
~ .....,,'--~-;.-
.
.
au profit d'une plus forte réexportation. Sans doute parce que leur emploi
dans le raffinage s'avère plus onéreux qu'il ne l'était auparavant, les droits
n'étant toujours pas ~estitués pour ce type de sucre.
•
D'autre part, sur le plan commercial, son usage dans le raffinage
renchérit incontestablement le prix du sucre raffiné en pain exporté à l'étran-
ger, alors que la mesure vis~ justement à son abaissement (2). Le raffinage
des sucres terrés étant de toute évidence contraire à l'esprit de la législa-
tion sucrière, il convient de s'interroger sur les motifs de ce choix.
(1) "Théorie sur
la fabrication du sucre fondée sur
de nouvelles observations
relatives à la manipulation de cet art. Par un habitant de la Guadeloupe.
1788".
AN Col F 3 163.
(2) Cf. '.pra p.3f5.
3 0
~e m~~~ge d~~~~~~_~~!~~~~ans
)
le ~;.!_f..i_~...~;.:.g~e.-.;--.;u~n~.c;..a;;.s~.;;d.;.e
!!~!!..!!sE~:~~~~S~~~!!_il~~ge.
Le choix des matières premières pour le raffinage donne l'occasion
de constater une fois de plus le caractère purement formel des lois établies.
Lois établies bien évidemment à la suite des revendications zélées des intéres-
sés eux-mêmes. Nous avons vu par exemple avec quel zèle raffineurs et arma-
teurs ont réclamé et obtenu le relèvement du tarif sur les sucres terrés, fai-
sant d'eux des dentées de luxe vouées exclusivement à la réexportation (1).
C'est donc à la demande des raffineurs eux-mêmes que le pouvoir royal a pris
"
les mesures exclusives en faveur des sucres bruts.
En effet, indépendamment des restitutions à l'exportation dont nous
parlerons plus tard, la très faible imposition sur le sucre brut: 21t 10s par
quintal plus le droit additionnel de 10s sur la valeur qui la porte en tout à
31t lOs, est une véritable incitation au· choix de cette matière comme unique
aliment des raffineries. Cela est d'autant
'plus évident que le raffinage des
sucres terrés, du fait de la taxe extrêmement élevée qui les frappe: 111t 4s
(2) par quintal tout droit confondu, renchérit inéluctablement le prix du
sucre raffiné en pain.
Pour le sucre raffiné en pain destiné à l'exportation, un tel renchérissement
des prix ~êne considérablement son débit •
•
Le non respect de cette réglementation est la preuve manifeste non
point d'une b~Qn'équence des raffineurs mais plutSt du calcul à courte vue
qui est la caractéristique même des milieux d'affaires de cette époque. Les
revendications visent plutôt le réglement de quelques intérêts immédiats, quite
plus tard à réclamer autre chose quand la mesure prise se révèle absolument
contraire à la bonne marche du commerce
• Le tarif prohibitif fixé
sur les sucres terrés s'inscrit dans cette perspective générale.En les récl~~ani
armateurs et raffineurs entendaient sauvegarder qui leur armement vers les
. îles, qui leur industrie menacée par la concurrence des nouveaux produits
(1) Cf. SUIr:> :" .. ~ 35 ", i 42.
.
(2) '~émoire sur les avantages de ~eglr en France les sucres terrés venant des
colonies employés au raffinage comme matière première ••• ". AN F12 1639A.
314
arrivés sur le marché.
Malheureusement agissant ainsi, les raffineurs en par-
ticulier oeuvraient contre leurs propres intérêts. La vérité étant qu'ils ne
~.
•
...
-
•. 0-
~
tardent pas à découvrir que "le raffineur ne peut travailler à prof! t sans
mêler plus ou moins de sucre terré suivant la qualité du sucre rafiné(sic)
qu'il veut obtenir et qu'il n'employe point de sucre brut pour faire du sucre
super fin et royal parce que cela ne lui tourneroit pas à compte, et qu'au
surplus, le tout dépend du plus ou lloins d 'habili té du raffineur" (1).
La raison de tout cela est que la qualité des sucres bruts n'est pas
toujours excellente. Or, de cette qualité dépend la proposition de matière pre-
mière e~ployée au raffinage et surtout la qualité du produit qui en sort ainsi
que sa qualité.
Les raffineurs orléanais dont la véhémence contre le sucre terré a
le plus largement contribué à sa prohibition, reconnaissent volontiers, un peu
::::~:
tardivement certes, que pour tirer un quintal de sucre raffiné de deux quintaux
de sucre brut, il faut que celui-ci soit beau car s'il est "commun",· c'est-à-
di_re de quali té ordinaire, à peine peu t-on .en tirer avec toutes les récupéra-
tions, 80 à 90 lb de sucre raffiné, et s'i:i. est absolument gras, c'est-à-dire
terreux, il ne peut en produire seulement que 60 à 70 lb (2).
A Montpellier, on assure que les sucres bruts de belle-
qualité comme
ceux du Cap et de Léogane"dcnnent,un tiers de sucre en pain, un tiers de casso-
nade et un tiers de sucre vergeois ou mélasse. Ceux de basse qualité comme ceux
de la Martinique et autres semblables ne donnent qu'environ moitié de sucre
en pain et cassonade" (3).
Sélon la qualité de sucres bruts employés, la proportion
de sucre
raffiné n'est pas identique. A Nantes, lorsque la matière première est de qua-
lité ordinaire, elle donne 2/3 de son poids en sucre raffiné. Quand elle est
de belle qualité, la proportion est de 3/4 (4). A Bordeaux, le quintal de suc~e
brut de Léogane et du Port-au-Prince produirait 80 lb de sucre
(1) "Résultat des informations prises dans les raffineries d'Orléans sur l'exa-
men des montres de sucres anglais tirés de Londres et d'une facture d'un
envoy fait à Ostende".
AN F1:1""b3YA.
(2) Quantité de sucre brut qui entre dans le composition d'un quintal de sucre
extrait des rapports des direcy?urs et fermiers dont les départemenbs Com-
portent des raffineurs.
AlJ F
1502.
(3) Quantité de sucre brut qui entre dans la composition d'un quintal de sucre
raffiné.
(4) Ibidem.
raffiné(1);.-un quintal vaut à Bordeaux 101 Ib(2). Ici, les raffineurs estiment
que "les sucres bruts des autres cc':;"onies donnent les mêmes résultats mais en
qualités inférieures". La proportion de sucre brut entrant dans la composition
du sucre raffiné varie donc énormément
d'un point de raffinage à un autre.
En effet, si à Bordeaux un quintal de sucre brut suffit à 20 lb près
à produire un quintal de sucre raffiné, à la Rochelle et ~ Orléans
par contre,
il en faut deux; à Rouen, il en fa~t trois. Le profit est par conséquent va-
riable.
Le raffinage des sucres terrés résoud donc à la fois deux problèmes
fondamentaux
la proportion de sucres bruts et la qualité du sucre raffiné,
d'autant qu'il n'est guère question d'employer n'importe quelle sorte de sucres
terrés. En effet, dans un mémoire datant probablement de 1786, les commissai-
res généraux du commerce notent que "suivant les informations prises des raf-
fineurs les plus habiles, pour obtenir du sucre rafïn~.(sic) de belle qualité,
ni· supérieure ni inférieure, avec du sucre terré, il faut écarter les têtes et
ne prendre que du commun et de la 4è sorte de blanc"(:3).
Les droits sur les sucres terrés n'étant pas proportionnés à leur qualité, le
choix des belles qualités s'irpose. A ~~~!~s, on assure n'employer que ceux
de la quatrième, de la troisième et de la deuxième sortes (4). Il faut en-
tendre par quatrième sorte de blanc, une belle qualité de sucre terré.
Mais ainsi que nous l'avons indiqué, les sucres terrés sont employés
en association avec les sucres bruts, ce qui réduit la quantité de matière
première entrant dans la fabrication du quintal de sucre raffiné. Une fois
de plus, ce sont les raffineurs orléanais qui offrent les éléments de compa-
raison. Ils observent que pour obtenir le quintal de sucre raffiné, ils
(1) Ibidem.
(2) Mc CUSKER (John J .), "Les équivalences métriques des poids et mesures du
commerce colonial aux XVIIe et XVIIIè siècles", Revue française d'Histoire
d'Outre-Mer, Tome LXI, 1974, pp. ,49-365, p-360.
(3) "Causes de notre désavantage dans le co~~rce de nos sucres rafinés chés
l'étranger, moyens de le réparer" •.. Al'J F
1639 f..
(4) Lettre des entrepre~eurs des manufactures de sucre raffiné d'Orléans aux
commissaires généraux du commerce".
AN F12 1639 A.
11
:..,:\\1
~II::: •.•.
316
emploient communément un quintal de sucre br~t et 83 lb de sucre terré de
la quatrième, troisième et deuxièmL sortes, soit 183 lb (1) de matière pre-
mière au lieu de 200 lb de sucres bruts comme précédemment annoncé.
Dans un autre mémoire, cette proportion est m~me ramenée à 150lb
dont une moitié en sucres bruts de la première et seconde sortes, l'autre
étant du sucre terré commun de la quatrième sorte (2).
Donc, à Orléans comme ailleurs, les proportions administratives ne sont pas
suivies au pied de la lettre, les raffineurs se remettant à leur propre bon
sens.
Ce mélange peut améliorer la qualité du sucre raffiné dans la mesure
où la matière première ainsi constituée est, à notre avis, de meilleure
qualité, comparée aux sucres bruts proprement dits. De plus, n'étant plus
absolument gras~se,'. :la'proportion de sucre raffiné obtenu dépasse logiquement
cetle produite avec des sucres bruts exclusivement.
~ant à l'amélioration du profit, le problème reste posé. Nous
étudierons la question plus tard quand nous aborderons les exportations.
c----===
Il reste maintenant à déterminer la quantité de sucres bruts et
terrés raffinés chaque année. Il s'agit d'une question ardue à défaut de
statistiques précises. L'estimation de 1777 constitue la première référence
que nous ayons pu trouver. Elle indique que sur les 50 000 000 lb de sucre
consommé annuellement en France, 33 000 000 lb sont du sucre terré et
17 000 000 lb du sucre brut. Mais, sur les 33 000 000 lb de sucre ter~é,
seulement 8 000 000 lb seraient destinées au raffinage, les 25 000 000 autres
sont consommées en nature (3). Donc, au total, sur les 50 000 000 lb de su-
cre, seule la moitié est raffinée soit 25 000 000 lb. G
Le second point important c'est que tous les sucres bruts sont raffinés
alors qu'un quart seulement des sucres terrés restant en France vont au
raffinage.
(1) "Lettre des entrepreneurs des ma:1ufactures de sucre raffiné d'Orléans ••• "
AN F12 1639 A.
----
(2) "Résul tat des informations prises dans les raffineries d 'Orl éans sur l'ex-
amen des montres de sucres ~~lais tirés de Londres et d'une facture d'un
envoy fai t à Ostende".
AN F
1639 A.
(3) Mémoire des raffineurs 1777 • .UI ?12 1639 A.
317
1"\\....··--
En somme, selon cette estimation, la France traite chaque année 25 COO 000 lb
de sucres, dont les deux tiers sont ..'.ea,suares bruts, l'autre tiers étant
composé de sucres terrés. Précisons que les sucres terrés seuls ne suffisant
pas à atteindre les 33 000 000 lb (1) indiquées, il est certain qu'on doit
y inclure le sucre tête.
Les choses étant ainsi, la disproportion entre la quantité consom-
mée en nature et celle raffinée s'explique par le niveau quantitativement
élevé du sucre t~te (2), l'essentiel de ce type de sucre étant consommé en
France même. Donc, la quantité des sucres terrés proprement dits, consommés
en nature, est relativement faible par rapport à celle deetinée au raffinage.
Mais cette part destinée à la consommation est impossible à déterminer, du
moins dans l'état actuel de nos informations: Ce handicap gêne considérable-
ment l'estimation des sucres terrés raffinés lorsque nous avons affaire à des
.
chiffres globaux. Ce qui, par ricochet, rend complètement aléatoire tout
calcul tendant à évaluer la quanti~é de matière première raffinée.
,
En dépit de ces difficultés, il est à noter que la capacité de raf~
finage en France n'a pas toujours gardé un ni veau stationnaire. Les quanti tés
dè'sucres bruts et terrés précédemment citées (3) donnent l'image d'une
1
c·
.....==~."'~.-
i,
évolution à la hausse, exception faite bien entendu des années de crise. Seuls
les sucres bruts dépassent le chiffre de 25 000 000 lb. Il est vraisemblable
qu'à l'augmentation de la quantité de sucres bruts dans le raffinage correpond
celle des sucres terrés.
,::.:
En 1786, la quantité de matière première est estimée à 36 000 000 lb, ,::-::
soit une augmentation de 44 %, dont 12 000 000 lb de sucres bruts et 24 000 000
lb de sucres terrés (4). Cette année-là, les sucres terrés ont été plus prisés
que les sucres bruts. Mais il nous est impossible de savoir s'il s'agit d'un
phénomène circonstanciel ou d'une réelle évolution des goûts. No~ons qu'en
1786, les raffineurs, ceux d'O=1éans en particulier, àemandent à coup de
mémoires que les sucres terrés coloniaux employés au raffinage soient régio
(1 ) Cf. ~Q9ra p. 3'~.
(2) Cf. ilpra p. 3î C.
(3) Cf. '.'ra p. 31C) •
12
(4) AN F
,639 A.
comme matière première. Il est donc probable qu'on a plut~t affaire à une
;~ii~
infâ nnation à caractère démonstratif qt: "objectif.
Pour marquer cette idée d'augmentation de la capacité de raffinage en France,
signalons le document de l'an II sur les r~~fineriea d'Orléans (1) : il faut
18 550 000 lb de sucres bruts et 3 385 000 lb de sucres terrés, au total,
21 935 000 lb de sucres chaque année pour l'exploitation des raffineries or-
léanaises. Les sucres bruts constituent les 3/4 de la matière yremière.
On peut donc retenir de cette étude deux idées principales:
la primauté des sucres bruts dans le raffinage malgré l'emploi des sucres
terrés et l'augmentation de la capacité de raffinage. Cela signifie incontes-
tablement que le nombre de raffineries a augmenté et que certains anciens
propriétaires ont pu agrandir leurs établissements.
11/ Uné industrie florissante au XVIllè siècle : le raffinage du sucre.
L'industrie du raffinage est l'une des
branches les plus impor-
tantes de 1 'industrie manufacturi~re françaïse--au XVIIIè siècle. Etablie dans
plusieurs villes du royaume, elle avait la charge de transformer une partie
du sucre brut et terré provenant des colonies,soit pour la consommation na-
tionale, soit pour l'exportation. Bien mené, ce sujet peut à lui seul faire
"
l'objet d'une étude approfondie. Mais
pour l'heure, nous nous bornerons
à indiquer les facteurs d'expansion, la localisation et les produits fabri-
qués.
L'histoire du développement des raffineries de sucre en France se
confond avec celle du commerce colonial. Elle ne prend vraiment son essor
qu'après 1670 grâce_à l'énergique impulsion donnée par Colbert en vue de
(1) "Etat général des raffineries d'Orléans et les objets de premières nécessi-
tés tant pour l'exploitation de la raffinerie que pour la fabrication du
sucre".
AN F12 1502.
3 "0
1 /
<,,- __ détruire
l 'hégémonie commerciale holla...'1dai se qui porte ombrage à la France.
Notons qu'au XVIIè siècle, la Hollande est le principal fournisseur européen
:p~i~*W:
de sucre raffiné ; la matière première ~tant tirée des colonies anglaises
et françaises. Eviter de recourir au sucre raffiné étranger pour la consomma-
tion nationale, tel est l'objectif de CGloe~t.
Aussi se met-il "en devoir de créer en France des raffineries
susceptibles de remplacer tout au moins pour la consommation du royaume, les
raffineries hollandaises et même de leur faire plus tard une concurrence rui-
neuse sur les marchés étrangers" (1). Il s'agi t en fait de créer une bour-
geoisie nationale capable de répondre aux propositions du gouvernement; c'est
la condition même de l'efficacité de la politique mercantiliste (2).
N'oublions pas aussi l'intérêt porté au problème de l'emploi. En
effet, la monarchie française se préoccupe
à·la m~me époque des vagabonds et
des indigents. En ce sens, la multiplication des raffineries et l'augmenta-
tion du volume de la production signifient la possibilité
d'accrottre dans
les raffineries nationales l'emploi de la main-d'oeuvre. '~lus d'emplois,
indique Maurice DOEE, c'était donc plus d'hommes au travail susceptibles de
créer un surplus"(3).
Le raffinage en France entrait à l'origine dans les attributions
de la Compagnie des Indes Occidentales, le rôle de Colbert a été de susciter
et d'encourager les initiatives privées. Deux sortes de mesures sont à l'ori-
•
gine de cette multip~cation du nombre des raffineries: la classification
de ces
manufactures en manufactures royales d'une part,et"leur protection
contre le sucre raffiné étranger dé ~tautre.
(1) PLISSONNEAU DUQUENE (R.), Un essai de contingentement d'importation au
XVIIè siècle
énisode de la lutte entre raffineries coloniales et métro 0-
l i taines , p.20.
(2) DEYON (P.), Le mercantilisme, pd?
(3) DOEE (M.), Etude sur le développ~ment dm capitalisme, p.233.
320
~...1. LA CLASSIFICATION DES RAFFINERIES EN MANUFAC'l'URES ROYALES.
Il existe deux sortes de manufac ""lres : les manufactures du roi, qui
:~i~~
sont des ateliers d'Etat et les manufactures royales dont la caractéristique
générale est de vendre directement au public, de s'administrer librement, mais
d'~tre encouragées par l'Etat.
Le titre de manufacture comporte des avantages importants. r~ ce
biais, elles bénéficient d'une contribution du trésor royal aux frais de pre-
mièr établissement. Ou bien, l'Etat paie au patron une prime calculée sur le
nombre d'ouvriers.
La manufacture ainsi classée bénéficie aussi d'un monopole de fabrication ga-
ranti par l'Etat et d'un monopole de vente dans un secteur plus ou moins étendu,
auquel s'ajoutent des exemptions fiscales et des privilèges de juridiction (1).
C'est le cas de la raffinerie de sucre établie à Marseille en 1671 sur les en-
couragements de Colbert.
Cette raffinerie est établie pour que les Hollandais ne puissent plus
exporter...Ji1Lsucre en Provence et dans les
provinces voisines d'une part, et
pour que les sujets du roi puissent se livrer eux aussi comme les Anglais et les
Hollandais à ce commerce (2).
Le sieur MAURELLET qui la prend en chhrge en 1674"'bénéficie d'un allègement
fiscal. L'arrêt du 15 Septembre 1974 l'autorise à introduire dans le royaume
50 000 lb de sucre par an en payant deulement 4 lt par quintal comme aux autres
entrées du royaume.
En 1691 (3), la compagnie des fermes très méfiante à l'égard de Mar-
seille, car craignant qu'il ne profite des autorisations pour laisser s'intro-
duire les produits étrangers dans le royaume, accepte malgré elle d'augmenter
la quantité somme toute dérisoire de 50 000 lb en la portant à 130 000 lb (4).
En 1700, la permission est portée à 150 000 lb de sucre. C'est que la raffinerie
a été augmentée de plus du double de sa capacité initiale et qu'elle peut
.(1) LACOUR GAYET (J.), HistoiTe du commerce, Tome IV, p.226.
( 2) AN F12 150 1•
(3) Arrêt du 12 Mars 1691.
.
(4) CARRIERE (C.), Négociants marseillais au X~nIIè siècle, contributionàl'étude
des économies
maritimes, p.314.
321
~~sormais en envoyer à l'étranger plus de 130 000 lb. L'obligation du sieur
MAURELLET est de payer 7 It par "cent pesan'"." au sucre raffiné (1). Il s'agit
d'une fiscalité allégée car, les raffineries non privilégiées doivent acquitter
le droit prohibitif de 22 lt 10s, frappant depuis le 5 Avril 1690 les sucres
raffinés étrangers.
Ces privilèges passent aux sieurs Jean-Baptiste Sa~nt Michel, Antoine
David, Antoine Toussaint Cathelin, nouveaux propriétaires de la dite raffinerie.
L'arrêt transférant ce privilège aux nouveaux propriétaires est du 25 Juillet
1713. On peut multiplier les exemples.
C'est donc à cause de ces privilèges particuliers que, jusqu'en 1786,
de nouveaux raffineurs continuent de demander le titre de manufacture royale
pour leur raffinerie. Les sieurs DI:1val , négociants au Havre et propriétaires
.
d'une raffinerie à Honfleur, le 13 Décembre 1777, bien que cette industrie ne
soit plus alors un genre nouveau en Normandie (2) ; le sieur Joseph Lassale en
1785, par l.'entremise de son avocat pour sa raffinerie établie à Bayonne en
178;. Il -4emande d'accorder à cette raffinerie le titre de "manufacture royale
du Levantn pour son courage et l'espèce nouvelle de commerce qu'il a introduite
dans une province où elle était absolument inconnue.
Il explique en effet qu'avant son
'._---====
établissement, Bayonne tirait son sucre de
l'étranger et que,depuis, il exporte du sucre en Espagne (3). C'est aussi le
cas, en 1786, des sieurs Paillard, Lullin CaEn"ton et Compagnie, négociants.à
Marseille. Ils ont acheté dans la ville de la Ciotat l'emplacement devant la
congrégation de l'Oratoire pour l'établissement d'une raffinerie dont ils se
proposent d'exporter les produits en Suisse, en Savoie, en Italie et dans les
Echelles du Levant et de Barbarie. Ils demandent en conséquence qu'elle soit
érigée en manufacture royale. Ce, d'~tant plus que cette raffinerie serait la
seule fonctionnant dans la région.(4).
(1) Sur ces 7 It, 3 vont au fermier des cinq grosses fermes
les 4 autres allant
à celui du Domaine d'Occident.
AN F12 1501.
12
(2) Mémoire nO 10495.
AN F
1502.
(3) nRequête prése~tée au Roi par l'avocat
suppléant de Joseph Lassale. 13 Avril
1785n •
AN F1 1502.
12
(4) Mémoire adressée au Roi le 24 Octobre 1786.
M~ F 1502.
322
~-
Parfois encore, le manufacturier reçoit un titre de noblesse. La
seule obligation est de prendre garde à remp~ i:r.avec exactitude ses obligations.
Une armée de commis-inspecteurs des manufactures assurent le contr5le de la
qualité des
produits. C'est que pour Colbert, il ne s'agit pas seulement de
produire, mais de produire bien, surtout quand il s'agit de marchandises desti-
nées à l'exportation. Un arr~t du 27 Avril 1719 laisse le liberté à chacun de
construire sa raffinerie sans permission.
Tbutefois, ces mesures exceptionnelles restent en vigueur jusqu'aux
lettres-patentes du 5 Mai 1779. Cette loi ordonne en effet que le titre de ma-
nufacture royale ne soit plus accordé qu'à des établissements uniques dans leur
genre; or, en 1779, les raffineries de sucre ne sont plus dans ce cas. Elles
se sont multipliées dans diverses provinces où elles constituent désormais une
activité ordinaire.
Avec cette loi donc, il n'existe plus de raffineries privilégiées au niveau
national jouissant de monopole de fabrication et de vente dans un secteur déter-
miné. Aussi? convient-il de souligner que toutes les demandes de privilège for~__
mulées après-cette date ont été systématiquement rejetées par le pouvoir royal.
1-2. UN PROTECTIONNISME RIGOUREUX OU LÀ GUERRÊ DES TARIFS.
En même temps qu'il encourage la création de raffineries dans le roy-
aume, Colbert prend des mesures tarifaires protectrices. A cause des divers
•
droits imposés sur le sucre colonial destiné à la consommation nationale, les
manufactures produisent peu et surtout produisent cher. Elles réclament donc
protection. Il est en effet très évident que, si le consommateur avait été libre
de choisir, il aurait préféré le sucre raffiné étranger à cause de son bas prix;
l'une des contradictions de cette époque étant de vendre moins cher à l'étranger
qu'on ne peut le faire à l'intérieur à cause des lourds droits intérieurs qui
grèvent les prix nationaux.
323
~-
Il est dès lors important de signaler que le libéralisme commercial
•
était inadapté dans la mesure où il s'oppose.au développement et à l'efficacité
des entreprises. C'est pourquoi les mesures tarifaires de Colbert et de ses
successeurs se révèlent comme nécessairement complémentaires des encouragements.
Elles sont la condition même de l'efficacité des raffineries nationales, du
fait de l'élimination de la concurrence étrangère.
La protection de la jeune et fragile industrie naissante n'est cepen-
dant pas la seule explication de cette guerre des tarifs. Il faut également
tenir compte des jeux concurrents entre l'Etat qui cherche à gagner de l'argent
par les taxes et les négociants. L'imp~t sur les sucres étrangers était alors
une source de revenus au m~me titre que celui fixé sur les sucres coloniaux (1).
E. BOIZARD et H. TARDIEU (2) ne révèlent-ils pas fort à propos que l'imp~t
sur
le sucre est indissociable de la réforme fiscale entreprise par
Colbert ?
Il faut sans doute dire que la réforme fiscale de Colber~ permet de résoudre
le problème, de la protection des raffineries. Et c'est ce résultat qu'il nous
i,
fau t conBi-dérer.
~
Le premier tarif est de 1664, un tarif relativement modéré. Il frappe
i
surtout le sucre raffiné hollandais : fe sucre raffIné en pain ou en poudre
est taxé à 15 l t du "cent pesant". Il s'avère bien vi te insuffisant pour enrayer
la concurrence. Les deux ou trois raffineries de Ro~n qui transforment le
sucre brut colonial en "sucre royal K et en sucre candi, se plaignent du pré-
judice que leur cause l ',unifonni té des taxes frappant les sucres brut et raffiné
étrangers.
Colbert,qui entendait ruiner les raffineries hollandaises, accepte
de relever la taxe sur le sucre raffiné. Il ne souhaite certainement pas mieux
dans la mesure où cela augmente d'aut~~t le prélèvement fiscal. L'arrêt du 15
Septembre 1665 porte le droit à 22 It 10s(3). L'augmentation est de 47 ra.
(1) Cf. ~Ufra P·'27 à 151.
(2) BOIZARD (E.), TARDIEU (H.), Histoire de la législation sucrière 166~-1891,
p.3.
(3) Boizard (E.), TARDIEU (H.), ou. cit., p.4
324
Les arrêts du 25 Avril 1690, 20 Juin 1698 et les lettres-patentes d'Avril 1717
.':'!---~
n'ont fait que confirmer ce tarif prohibitif, tarif maintenu jusqu'à l'arr~t
du 17 t'lars 17 82. C' es t en effe t le demi er arr""'; de l' Anci en Régime qui porte
le tarif à son taux maximum. Il porte le droit principal de 221t 10s à 401t,
auxquels s'ajoutent les 10s par livre additionne1s. Au total, la taxe prélevée
monte au taux exceptionnel de 601t (1).
L'étranger ne peut donc vendre avantageusement son sucre raffiné e~·
France sans se ruiner. En effet, cela nécessite des primes d'encouragement très
élevées pour éliminer l'effet prohibitif de la taxe française. Cela suppose
donc que le gouvernement de la nation concernée dispose de fonds importants.
A moins qu'il n'accepte de grever sa propre consommation en faisant supporter
aux nationaux le poids de la taxe étrangère. Ce qui suppose des raisons parti-
culières. Nous verrons plus loin que, grâce à ses tarifs prOtecteurs, le marché
français s'est révélé pratiquement inaccessible au sucre raffiné étranger,
du moins en ce qui concerne le commerce licite. C'est donc par contrebande que
les étrangers opèrent le plus souvent (2).
On peut donc retenir que c'est par le biais des encouragements et
du protectionnisme que les raffineries de sucre se sont multipliées. Cette mul-
tiplication est le signe même du dynamis~e et de ~_mportance de cette bran-
che des manufactures dans l'économie nationale.
Il
Faire l'état des raffineries de sucre au XVlllè siècle n'est pas aisé
en raison du caractère trop général des informations conservées aux archives
nationales à Paris. D'autre part, ces "informations ne suffisent pas à rendre
compte de toutes les raffineries ayant vu le jour en France. Donc, loin de
faire un inventaire complet, c'est plutôt l'inventaire des raffineries les plus
connues et les plus importantes aussi que nous sommes contraint de faire.
(1) BOIZARD (E.), TARDIEU (:-I.), 1591, p.6.
(2) Cf. ertfra p.
352-354.
325
Ces raffineries se trouvent tant dans les ports des cinq grosses
ferm~s qu'à l'intérieur même du royaume. En 1683, 12 villes françaises sont
concernées par
l'activité du raffinage. Elles ~assemblent au total 29 raffine-
ries travaillant 17 700 000 lb de sucre brut (1). Maurice REYNIER (2) indique
pour sa part que durant le XVIllè siècle, au total 29 villes s'occupent du
raffinage ; le nombre de villes a plus que doublé.
Tableau nO 60
- Etat des raffineries en activité en France en 1683.
Nombre de
Capacité de raffinage(consom~
villes
raffineries
mation en sucre brut) (en lb)
Thmkerque
2
500 000
Dieppe
1
500 000
Rouen
8
4 500 000
Nantes
3
2 000 000
Saumur
1
000 000
Angers
1
,
000 000
Tours
500 000
Orléans
2
000 000
î
La Rochelle.---
4
2 400 000
Bordeaux
3
2 000 000
-i
Toulouse
1
400 000
1
Marseille
2
, 200 000
t
29 raffineries
17 --700 000 1b
Tableau nO 61 - .:L,;;,e.::.s_-::;c.;;;.e;.:n..:t,::r.;;;.e.::.s.....::d.;;;.e.....::r.;;:a;;:;.f.;.f,::i.:.;n;;:;a.ga.;;e;....;d;,;e;....;s;,;u;,;c;.::;r;,;e;....::a;.:ll;....:.X::.;VI;,.:.::I:.;:I;,;;è:.-,:s:;.;:i;,;;è;.,;c:;.;:l:.;e::......;d:.'..:a;:,jpl::..:r:.;è:;.:;:.s
•
Maurice REYNIER.
Amiens
Dax
Angers
Digne
Bayonne
Dunkerque
Rouen
Beaucaire
Ingonville (Havre)
Saint-Omer
Bercy
Lille
Saumur
Bergues
Marseille
Sète
Bezons
Montpellier
Tours
Bordeaux
Nantes
Valenciennes
Boulogne-sur-mer
N!'mes
La Rochelle
Caen
Orléans
(1) PLISSONNEAU DUQUENE (R.), op. cit., p.36. Cf. Ycer (N.p, The Histo~{ of su-
gar, p. 457.
(2) REYNIER (M.), eontribution à l'étude de la auestion des sucres, p.13
326
La première liste est très complète. Son importance provient de
ce qu'elle n'indique pas seulement les centref'.Jerai'finage mais aussi le
no~bre de raffineries ainsi que leur capacité de raffinage. La seconèe
liste ne permet pas de faire un état complet des raffineries. On doit ,de
?lus ,accorder à cette liste une confiance mesurée. La raison est que les
sources dont nous disposons ne permettent pas de confirmer l'existence de
raffineries dans toutes les villes citées, du moins, en ce qui concerne
la seconde moitié du XVIIIè siècle.
En effet, elles sont muettes sur l'existence de raffineries à Saumur, Angers,
Tours, Toulouse, Amiens, Caen, Dax, Digne, Saint-Omer et Nfmes. Cette ab-
sence d'informations signifie-t-elle que ces raffineries ont cessé très
tôt leur activité? Il Y a là une perspective de recherche intéressante
que nous entreprendrons plus tard. .
Dans d'autres cas, il s'agit de tentative plus ou moins prouvée
de construction dont nous ignorons si elles ont abouti. Il s'agit en effet
d'autorisation ou de demande d'autorisatio~ de construire. C'est le cas
de Bercy, de Eezon et de Grenelle. Une autorisation du 21 Avril 1719 permet
au sieur Delbeuf et Compagnie de construire une raffinerie à Bezons dans
la banlieue parisienne (1). La demande de construction de la raffinerie de
:'---~=
Grenelle date du 13 Octobre 1722. L'intéressé est Pierre-Jacques de Laye,
conseiller, sécrétaire de sa Majesté, chevalier de l'Ordre de Saint-Michel.
Il est propriétalre à Saint-Domingue. Il veut construire sa raffinerie au
bord de la Seine, précisément "entre le château de Grenelle et le moulin
de Javel". Il se propose ainsi de ravitailler les épiciers parisiens en
sucre raffiné et de faire baisser le prix devenu alors trop élevé en raison
de la rareté du produit sur le marché (2).
Enfin, à propos de la raffinerie de Bercy, nous savons seulement c.-: i
sa construction a co~~encé en 1758. C'est aux raffineurs d'Orléans menacés
(1)
12
AN F
1501.
(2) Idem.
•
327
par l'ouverture de cette nouvelle raffinerie de perdre une part du marché
ô'C--
de la capitale que nous devons cette indication (1).
En définitive, i l reste 17 villes: 15 figura!,', dans le tableau n o 61 plus
Calais et Arras. La liste est la suivante:
Bordeaux
Lille
Dunkerque
i3ayonne
Marseille
Boulogne-sur-mer
Montpelleir
Beaucaire
Nantes
Bergues
Orléans
Calais
Rouen
Arras
Cette(ou Sète)
Dieppe
Valenciennes
Ingonville
La Rochel:~
2 _ i. EN FLANDRE FRANCAISE.
16 raffineries au moins sont en activité dans cette région à la
fin du XV1IIè siècle. Elles sont réparties comme suit:
,
L'état des raffineries de Dunkerque, dans la seconde moitié du
XV1IIè siècle est l'un des plus difficil~s à établi-;'~"du moins à partir des
1
archives du commerce et de l'industrie existant à Paris. En effet, si en
1683, 2 raffineries sont recensées dans cette ville, par la suite, il est
1
•
impossible d'en connaître le nombre exact tant les renseignements sont
fragmentaires. Tbut semble indiquer cependant qu'une seule raffinerie a
pu y fonctionner normalement. Un arrêt du Conseil d'Etat de 1718 fait état
d'une raffinerie; elle appartient alors au sieur Louis Langheté. Le roi,
en son conseil et sur
l'avis du régent, le duc d'Orléans permet au sieur
Langheté "de continuer le travail de raffinerie à Dunkerque à condition
qu'il n'y emploiera que des sucres bruts provenant des isles et colonies
françaises d'Amérique, lesquels il ne
pourra tirer que des entreposts
(1) "Intendance du·cowùerce, Département de M. Rinla de Qui~cY'2Année 1758,
Généralité d'Orléans, affaire raffinerie de sucresé.
AN F
39.
328
de Rouen, Calais et autres ports du royaume"( 1). Cette raffinerie a-t-elle
co~~nué ses activités? Aucune information ne permet de l'affirmer. De
plus, par la suite, il n'est plus question qU'.d'une autre raffinerie.
En effet, depuis 1754, la seule raffinerie dont il est fait
mention est la raffinerie du sieur Armand Désiré Varlet. Elle a été créée
par Ordre du gouvernement dans la Haute-ville de Dunkerque en 1662. Elle
figure donc parmi les 2 raffineries de 1683. Le sieur Varlet, le nouveau
propriétaire, sollicite et obtient,en vertu de l'arr~t du conseil du
20 Août 1754, de la transférer àans la Basse-Ville où tout s'exécute comme
dans les autres ports du royaume, la Haute-Ville considérée comme de_·.terri-
toire et de droit étranger en matière commerciale. Cette réinstallation lui
revient à 120 000 lt(2).
Le sucre bru~ raffiné par le sieur Varlet vient de Nantes. D'après un état
f,
des manufactures et fabriques établi à la suite de la lettre du Ministre
. ,.;.~I•...
de l'intérieur du 25 Fructidor an 5 (12 Septembre 1797), cette raffinerie
n~;::
......
a fonctionné jusqu'au début de la Révolution, employant plusieurs ouvriers.
Elle cesse ses activités depuis lors à la suite du décès du sieur Varlet(3).
La première raffinerie de la ville est créée par le sieur Campion
à la suite de sa demande du 20 Avril 1740 (4). Aucune autre raffinerie n'a
été créée depuis et l'état des manufactures et fabriques n'en mentionne
qu'une seule dans toute la commune. Notons cependant qu'une raffinerie a
été établie à Do~ai qui disparaft très rapidement (5). La ville de Bergues
ne renferme elle aussi qu'une seule raffinerie.
1
(1) AN F 2150 1•
(2) Pour tout ce qui précède cf. "Mémoire pour le sieur Armand Dénie Varlet,
entrepreneur d'une raffinerie établie dans la Basse-Ville de Dunkerque"
du 15 Mai 1783 (N°3?7). AN F12 1502.
"Etat des fabriques et manufactures existantes dans le département du
Nord 1797-1798" AN F12 1557 •
•
AN F12 1501 •
Etats des manufactures et fabriques •••
329
En 1798, la commune d'Arras renferme deux raffineries depuis 20
ans (1), on peut donc si tuer leur établissement a.utour de 1778. Avant la
Révolution, elles ont été dans la plus grande activité: employant 20
ouvriers, elles produisent "40 à 50 milliers de sucre"(2) raffiné. Cepen-
dant, elles n'ont pu, semble-t-il, étendre leurs débouchés au-delà des
provinces de l'Artois et du Nord à cause des droits exorbitants perçus
sur les sucres aux douanes de Doulens et de Péronne. De plus, elles sont
gênées par le commerce interlope qui se fait du sucre anglais sur la fron~
tière belge.
Nous n'avons aucune indication précise sur les 2 raffineries de Boulogne
La. seule que nous possédons, le rapport du 12 Ventose an 6 (2 Mars 1798)
(3), ne donne seulement que le nombre de raffineries.
A propos des 10 raffineries lilloises, nos renseignements sont
des plus lacunaires. Aucune indication de date de création, de noms des
propriétaires et de la capacité de raffinag: n'apparaît dans le rapport
de 1798 (4). Nous savons simplement que ce nombre de 10 raffineries est
atteint en 1788 et qu'elles ont fonctionné jusqu'en 1793. Malgré ces la-
cunes, il est tout à fait évident que Lille est le plus grand centre de
"
raffinage de sucre de la Flandre française durant la deuxième moitié du
XVIIIè siècle.
(1) Département du Pas-de-Calais, rapportades admi~strateurs de la commune
d'Arras 10 Floréal an 6 (20 Avril 1798).
AN F
1557.
(2) Il faut entendre 40 à 50 000 lb de sucre raffiné.
(3) Etat des manufactures existantes dans le département du Pas-de-Calais,
Rapport concernant
Boulogne "12 Ventose an 6".
AN F121557.
(4) "Etat des manufactures et fabriques dans Lille et ses cantons" Rapport
13 Nivose an 6 (2 Janvier 1798).
330
2-2. EN NO RMAl'IDIE
i;·----
La Normandie compte quatre cp.ntr~~de raffin~ge de sucre
Rouen,
Ronfleur, Ingonville et Dieppe.
Rouen est l'un des premiers centres de raffinage de sucre français.
La première référeng~"d~liJlee{t~eville date de 1613. Celle-ci appartient à un
certain Jérémie Valens. En 1620, lui et ses associés sont autorisés à conti-
nuer leur opération (1). Nous ne savons pas ce qui advint de cette raffinerie.
Sans doute a-t-elle continué ses activités ~ C'est toutefois avec les encou-
ragements de Colbert que se multiplie le nombre de raffineries à Rouen.
Pour amener Guy Terré à construire 2 raffineries en cette ville, il lui avan-
ce u~~
partie du capital. Et dans les années 1670, on y dénombre 12 raffine-
ries:(2) ; ce nombre passe à 8 en.1683.
En somme, au Xvrlè siècle, Rouen est le principal centre de raffina-
ge de sucre. Mais en-raison des 50 sous perçus sur chaque quintal de sucre,
le sucre brut ne peut ~tre raffiné utilement à Rouen ; il reste en ma~a~!n,
faute d'3tre enlevé par les raffineries. Celles-ci perdent de leur dynamisme
c,
-==",-",',"
.C
par le peu de travail qu'elles sont obligées de faire. De ce fait, leur nombre
se réduit considérablement au cours du Xvrllè siècle.
en
, •
( )
En 1772, 5 raffineries seulement sont~activite a Rouen
3. En 1779, la
•
chambre de commerce de Normandie explique qu'à cause du droi t local de 50 sous,
le nombre des raffineries est passé de 20 à 3 (4). Un état des raffin~ri.~s__
établi au mois de Fructidor an 12 (5) en énumère 4 : la première est créée
en 1640 et dirigée à l'époque de la rédaction du rapport par un ce~ain
Huard. Apparemment, c'est la seule des 12 raffineries de 1670 qui ait pu
résister aux épreuves du temps; les trois autres sont de création tardive.
La deuxième est créée en 1782 et dirigée par Sautelet ; la troisième, en 1789,
et dirigée par Liard; la quatrième date de l'an 6. Son propriétaire est le
sieur Delavigne. En 1789, les trois premières raffineries emploient respec-
tivement 15, 18 et 8 ouvriers, et produisent dans le même ordre: 195 600 kg
~11 150 kg et 73 350 kg de sucre raffiné.
(1) DEER (N.), The History of su~ar, volume II,
p.457.
(2) PLISSONNEAU DUQUENE (R.), op. cit., p.21 •
.( 3) AN F12150 1•
12
(4) AN F
111+(3).
(5) "Etat du produi t des raffi:1eries dE' sucre établi c:idans le département de
la Se ~ne ;nfe'r~eu e
Yo's ct
F
t'ct
1')"
.,' .,,1')
...
...
...
r . L ~
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rue l
or an
- .
h.<
."
' 150:2.
331
La raffinerie de Honfleur est établie en 177è"(1) et non en 1777 com-
me l'indique Jacques FIERAIN (2)~ La demande d'autorisation de construction
est contenue dans une requête datée du 13 Décembre 1777 ~d~e~S2e au Conseil
d'Etat du Roi. Les propriétaires, les sieurs Duval et Beaux-frères, sont
négociants au Havre. En 1789, elle emploie 20 ouvriers et produit 1S0 000 kg
de sucre raffiné (3). Les sieurs Duval exportent leur sucre raffiné à
Genève
en 1792,ils en exportent 26 206 lb ; en 1793, les exportations mon-
tent à 30 206 lb de sucre raffiné (4).
Elle est créée autour de 1773 par le sieur Eichoff, négociant au
Havre. Le' produit est exporté vers les pays du Nord. En 1792, ses exporta-
tions s'élèvent à 38 627 lb de sucre raffiné. En 1793, elles tombent à
26 209 lb (S).
d) A DIEPPE: Présence hypothétigue d'une raffinerie au ZVIIIè siècle
~
1
Dieppe figure au nombre des villes où se raffine le sucre brut en
1683. Un petit centre de raffinage somme toute: elle compte une seule raf-
finerie qui consomme alors SOO 000 lb de sucre brut. Elle existe encore en
1733. Mais d'après un mémoire de 1777 (6), sans doute l'avis des fermiers
généraux du commerce sur une requ~te présentée par les sieurs Duval, cette
raffinerie n'existe plus. Ce mémoire n'indique cependant ni la date ni les
raisons de la fermeture de' la raffinerie. ?o1ais pour la chambre de commerce
du Havre, cette fermeture s'expliquerai t par le retrait de la ville du com-
merce colonial (7).
(1) "Etat du produi t des raffineries de sucre établies dans ie département de
la Seine inférieure".
AN F12 1S02.
(2) FIERAIN (J.), Les raffineries de sucre des ports en France (XIXè début r~è
siècles), p.243.
(3) FIERAIN (J.), op. cit., p .243.
12
(4) AN F
1932.
(S) Idem.
~~) Mémoire anonyme (N°10 49S). ~r F'2 1S02 •
(7) "Mémoire des représentants du commerce du :-lavre sur le commerce du suc:::-e raf-
finé en France, en Angleterre et en F.")llande" 17Fî6.-ft~iJ F12 1639 (A).
332
2-3. EN BRE~AGNE
En ce qui concerne la Bretagne, nous n'avons ~e renseignements que
sur les raffineries de Nantes.
Les raffineries de Nantes.
- - - - - - - - - - -
Nantes est l'un des premiers et des plus importants centres de raffi-
nage de France au Xvrllè siècle. D'après un document contemporain cité par
Hervé du HALGOUET, on aurait commencé à établir des raffineries à Nantes en
1673 (1). En 1683, 3 raffineries y fonctionnent déjà, absorbant au total
2000000 lb de sucre brut soit 11,30 % du volume global. Hervé du HALGOUET
y dénombre 5 cette année-là et 12 en 1688.
Cette 2ugmentation du nombre de raffineries résulte de la prospérité du port.
e' est 'au quartier Richebourg que ces raffineries auraient pris naissance.
Le Boeuf y dénombre 22 raffineries en 1766 (2). Mais cette esti-
mation semble exagérée, les autres tournant autour de 12. En effet, ~acques
FIERAIN signale qu'en 1788, Nantes compte 11 raffineries. Elles emploient
80 ouvriers et produisent au total 450 tann~s de sucre raffiné (3). Hervé
l
du HALGOUET en signale 12 à la veille de la Révol'}tion (4). Ce~..~ucre raffiné
est vendu en Bretagne car, en raison des forts droits payés à Ingrandes, le
1
reste du royaume leur est pratiquement fermé : nous avons déjà indiqué que le
1
sucre raffiné sortant de Nantes pour Paris paie 20 It de droit. Cette bar-
1
!
rière n'est seulement levée qu'à la faveur de la Révolution.
"
i;J
En 1790, René RISSEL y crée encore une grande raffinerie avec l'aiàe
:'1i
de fonds considérables avancés par les négociants (5). Mais avec la guerre
i
1
maritime en 1793, le commerce de Nantes est anéanti, les raffineries s'arr3-
tent en m~me temps que toutes les industries de la traite (6).
(1) DU HALGOUET (H.), Nantes, ses relations avec les rIes d'Amériaue au XVIIlè
siècle. Ses armateurs., p.131.
(2) DU HALGOUET (H.), op. cit., p.134.
(3) FIERAIN (J.), op. cit., p.251.
(4) DU HALGOUET (H.), on. cit., p.132.
(5) FIERAINf" (J.), OP. cit., p.251.
(6) Du HALGOUET (H.), op. cit., p.141.
i
1
Les raffineries de cette province sont concentr(.~s à Bordeaux.
- Les raffineries de Bordeaux.
-
-------------
La première autorisation de construction de raffinerie à Boràeaux
a été accordée au Flamand Daniel d'Hyerquens en 1633 par les jurats de la
ville et la seconde en 1645 à Jean Herneren (1). Mais comme partout ailleurs
c'est à la suite de I l .énergique impulsion de Colbert que cette industrie prend
un essor considérable. En 1683, 3 raffineries y fonEtionnent, qui consomment
2 000 000 lb de sucre brut, autant que les raffineries nantais.s, soit égale-
ment 11,30 %du vnlume global de sucre brut raffiné en France. Un demi-siècle
plus tard, c'est-à-dire en 1733, Bordeaux renferme 20 raffineries. Les re-
i
présentants du commerce assurent qu'en 1732, elles ont consommé les 2/3 du
('iÙ;~
sucre brut venant des colonies (2). Le procès-verbal de l'inspecteur des
manufactures du 23 Juillet 1732 (3), faisant le point sur la foire de Bau-
1
caire, cite 11 noms de raffineurs. Ce sont les sieurs:
.J..
,~:..,
Rose
Pierre Laf1 tte
Bal thazard
Lambert frères et Beaubreuil
Jean de Royne
Journu Jeune
1
Lugon
0111 vier père et cl"'f"I~§~-===---< _o.
~
Pl auteurs
David
r
Gros
Le nom des sieurs
Lugon et Ollivier appara!t deux fois dans le rap-
•
port. A chaque mention, la marque de sucre ch~ge. Mais nous considérons qu'il
s'agit des mêmes personnes. Tout laisse appara!tre que Bordeaux, qui s'enri-
chit du commerce des rIes, prend la première place dans le raffinage de sucre.
On doit relever cependant le caractère instable des chiffres pDOposés.
Par exemple, en 1733, 20 raffineries sont signalées alors que 3ONDOIS en dé-
nombre 15 pour l'année 1735 (4). Est-ce à dire que durant les deux années
suivantes, 5 raffineries ont cessé leur activité? Probablement pas. Le
chiffre des représentants du commerce de Bordeaux appara!t dès lors exagéré,
(1) BONDOIS (P.M.), L'industrie sucr1ere française à la fin du XV1Iè siècle, les
projets de l'intendant Pierre Arnoul, p.12.
(2) "Pour donner une idée intelligible du bon état de la f8~ue des sucres
dans les raffineurs de la ville de Bordeaux, 27 Nars 1133". AN F121501.
(3) "Procès-verbal dressé par
le sieur de la Cerrière, inspecteur des manufac-
tures pour parvenir à lé vérification des sucres apportés d~~ différentes
raffineries à la foire de Beaucaire"23 Juillet 1732.
ANF'
1501.
('1.) IDNDOIS (P.M.), op. cit., p.12.
334
à moins qu'ils n'aient voulu signifïer plutôt le nombre de raffineurs.
4.":'0--
En tout cas, de 15 en 1735, le nombre descend à 14 en 1744. Le maximum est
atteint en 1777 avec 26 raffineries (1). Ce chiffre est m2i~tenu jusqu'en
1790 ; Jacques FIERRAIN trouve le !Dêm~ '1.ombre de :-affineries peur cette
année-là. Ces 26 raffineries auraient fondu 10 000 000 lb J~ Gucre br~t et
vendu 7 000 000 lb de sucre raffiné. Ces sucres, poursuit-il, "passaient
pour ~tre les plus beaux du royaume, car ils avaient une consistance et une
dureté qui les rendaient très propres à ~tre transportés". En 1789, elles
emploient 400 ouvriers. En 1791 et en 1793 (2), l'état des primes dues et
l'état des paiements mentionnent au total quinze grands noms. Ce sont:
Paul Nairac et Perrelet
Veuve Lafitte L'atné
Pierre Sorbé et fils
François Couderc et Cie
Jean-Jacques Rabaud et Cie
Bonafour Fabre et Cie
Lassabathié et fils
Durand Crère
Jacques Barette oncle et neveu
P. Dinety et Cie
Veuve Pierre Nairac et fils
Tanays Boulet
Dubreuille Gaubert et Cie
Antoine Défos et Cie
Baour (D.) et Cie
Nous avons dé~Andiqué que plusieurs de ces raffineurs appartien-
nent également au groupe des armateurs (3). Notons qu'il s'agit de véritables
. .
dynasties familiales : Veuve Pierre Nairac est la belle-soeur de Paul Nairac
leurs"2 raffineries se trouvent dans le quartier Sainése eI:olx.~"·Elles-m~mes
ne ±eprésentent qu'un complément de l'armement (4). Cette solidarité familiale
renforce considérablement les fortunes, les mettant ainsi à l'abri du risque
commercial.
2-5. EN GASCOGNE
La seule raffinerie de la province fonctionne à Bayonne.
(1) BUTEL (P.), Les négociants bordelais. l'Europe et les îles au XVlllè siècle,
p.282.
____4(~2) - Etat des primes dues par le gouvernement aux raffineurs de Bordeaux cy-a-
près dénommés pour les sucres raffinés expédiés pour l'étranger jusqu'à
l'époque du 31 Juillet 1791.
- Etat des payements de primes et de remboursements de droits sur les sucres
raffinés exportés à l'étranger 1793.
AN F12 1932.
(3) Cf. ~,'ra P.125.
(4) BUTEL (P.), op. cit., p.290.
335
La raffinerie de Bayonne.
- - - - - - -~--- - - -
Cette raffinerie est créée en 1763. Son propriétaire n'est pas
connu avec .certi tude : le sieur Joseph Lassale qui s'est présenté en 1785 (1)
comme le propriétaire de la raffinerie n'est, semble-t-il, que le gestion-
naire. C'est l'intendant du commerce de Bayonne qui le dit.
En effet, dans un mémoire explicatif adréssé à de Montarra1~.le 24 Février
1785, il écrit: "Monsieur Lassalle n'est pas propriétaire de la raffinerie,
il n'en a que la gestion et l'administration. Ni les batiments ni les fonds
ne lui appartiennent"(2). D'après ce mémoire, le succès de cette raffinerie
a ouvert dans la ville de Bayonne une branche de commerce très considérable
avec les provinces voisines et avec l'Espagne. Elle aurait augmenté la.
population par la multitude d'ouvriers nécessaires et attirerait de nombreux
navires qui débarquent à Bayonne, en plus du sucre, de nombreuses autres
marchandises (~).
'!'~i;m
2-6. EN LANGUEIO C
..
Cette, Montpellier et Beaucaire sont les trois centres de raffinage.
de la province.
La date de création de la raffinerie de Cette n'apparatt pas dans
•
les documents utilisés. Tbut porte cependant à croire que la première raffi-
nerie y est fondée au moins en 1717. Elle obtient les m~mes faveurs que celles
de Bordeaux, la Rochelle, Rouen et Dieppe par l'arr~t du 15 Janvier 1718 (4).
Cette raffinerie appartiendrait en 1733 à la Compagnie de Cette (5). Elle se
plaignait alors de ce que la mauvaise qualité du sucre de BODdeaux ruinait
---t(+) "Requ3te présentée au Roi par l'avocat duppliant" 13 A~il 1785. AN F12 i5C;;:.
(2) L'intendant dU1~ommerce de Bayonne à M. de Montarran" 24 Février 1785 (no
11421).
~~ F'
1502.
(3) Requ3te présentée au Roi ••••• AN p12 1502.
(4) '~émoire pour le sieur Désiré Varlet, entrepreneur d'une raffi~2rie établie
dans la Basse-ville de Dunkerque" 15 ro1ai 1783 (N°377).
AN F
1502.
(5) '''Pour donner une idée intelligible du bon état de la fabrique des sucres
dans 1~es raffineries de la ville de Bordeaux. 27 Y!ars 1733" (N°253).
AN F
1501.
336
le sien plus beau'?arce que la ~atière première provenant de Saint-Domingue.
Le sieur Sabatier y ouvre une nouvelle raffinerie qui trava~·le en concurren-
ce3.vec la première. C'est la discorde entre les deux raffineurs; le premier
~r8]riétaire faisant valoir le droit exclusif de l'époque des manufactures
rOY2.les, 1@ sieur Sabatier transfère sa raffinerie à Montpellier (1) en gar-
d2~t les faveurs dont il jouissait à Cette, à savoir surtout la restitution
d'une partie des droits lors de l'exportation du sucre raffiné en pain à
l'étranger.
Notons en effet que le sucre en pain de Cette est destiné à l'exportation:
il est vendu en Alsace, en Franche-Comté et, en vertu d'un privilège accordé
par l'arr~t du Conseil du 12 Février 1732, à la foire de Beaucaire.
Beaucaire est le troisième centre de raffinage du sucre du Languedoc.
La date d'établissement de la première raffinerie ne nous est pas connue. La
seule référence que nous aY-Ons est qu'elle appartenait en 1732 au sieur Cha-
brieu (2). A-t-elle été fermée par la suite? Nous n'en savons rien. Mais
cela n'est pas impossible. En effet, l'autorisation d'établir un~ raffinerie
à Beaucaire est accordée au sieur Bernavin l'a!né, négci'ciant en CE!tt'é ville,
par un arrêt du 27 Mars 1787 (3). A moins aussi qu'il ne s'agisse de la cons-
truction d'une deuxième raffinerie.
2-7. EN PROVENCE
A la fin de l'Ancien Régime, le raffinage du sucre s'effectue dans
deux villes de la Provence : à Marseille et à la Crotat.
(1) "L'intendant de Montpellier à M. De Montarran, 11 Février 1787 (N°12 053).
AN F121502.
Il.0 'indique cependant ni la date de création ni la date de
______ .~raosport de .cette raffinerie.
(2) '~rocès-verbal dressé par le sieur Pierre de la Garrière, inspecteur des ma-
nufactures pour parvenir à la vérification des sucres app~rtés des ~iff;ren-
tes raffineries à la foire de Beaucaire". 23 Juillet 1732.
AN F1 1501.
12
(3) AN F
1502.
337
a) Les raffineries Je... sucre de Marseille dans la deuxième moi tié du XVIIIè siècl
----------------_._----------------------------------------------------------_.
l'histoire d'un déclin.
~~!~~~
- - - - - - - - - - .- -
L'installation de la première raffinerie marseillaise s'inscrit dans
la lutte engagée par Colbert cont~e le sucre raffiné étranger, hollandais en
particulier. Il s'agit pour Colbert en effet, d'empêcher que les Hollandais
ne puissent plus exporter en Provence et dans les provinces voisines du sucre
raffiné. C'est en 1671, sur ses encouragements qu'est installée une raffinerie
de sucre à Marseille. Est-ce vraiment la première raffinerie ~arseillaisp. ?
Il semblerait qu'on doit être réservé sur ce point. Des cassonades venant de
Lisbonne auraient été traitées sur place avant cette date (1). Il s'agit sans
doute d'essais antérieurs car cette industrie ne date vraiment que de 1671.
Elle est prise en main par le sieur Maurellet en 1674 (2) ou en 1675 (3) sous
les ordres de Colbert "dans la vue d'augmenter et d'étendre le commerce des
isles françois~de l'Amérique dans la mer méditerranée et en Provence, où il
n'étoit point connu avant l'établissement de ladite raffinerie, et dans la
vue aussi de détrnire du c5té de Marseille, le COmmerce et l'u~ge
des sucres
d'Hollande et des cassonna~·du Erésil"(4).
~~s à cause de la franchise du port de Marseille acquise depuis
._iC-="",,=-,"-",-,":::"-.'
l'Edit de 1669, le sucre marseillais est étranger sur le territoire national.
Il faut donc un privilège spécial pour que cette raffinerie bénéficie d'une
fiscalité allégée.
D'où les privilèges sp~ciaux
l'arrêt d~ 15 Septembre 1674 permet au sieur
Maurellet de faire entrer dans le royaume la quantité de 50 000 lb de sucre
raffiné en payant le même droit que celui qui se lève .dans les autres ports
c'est-à-dire 4 lt par quintal. La quantité de sucre autorisée est dérisoire,
d'autant que la raffinerie, augmenté~,produit plus du double de sa capacité
initiale. La compagnie des fermes, méfiante à l'égard de Marseille à cause
(1) CARRlERE (C.), Négociants marseillais au XVIIlè siècle. Tbme I, p.313. Il
cite;en note que d'après BONDOIS cette industrie existait à Marseille dès
1611.
(2) CHAMBDN, Histoire du commerce de l'Amériuue par Marseille,m:.
: .0;:).
"Arrest du conseil d'état du Roi,ftui permet au sieur Ivlaurpllet de faire en-
trer dans le royaume 100 milliers de sucre raffiné par ann.i~~n payant peur
tous droits ~ livres à l'adjudicatai~des cinq grosses fe~es et 4 livres à
l'adjudicataire de la ferme du domaine d'Occident. Du 28 Septembre 1700",
cité par CHAMBON, op. cit., pp.56-59.
(3~ CARRIERE (C.), 0~~. cH., D.314.
de la franchise dl~2ort, accepte alors de porter la quantité à 130 000 lb.
C'est le but de l'arr~t du 12 Mars 1691. En 1700, la permission est portée à
f:H
150 000 lb, mais les droits sont élevés à 7 lt : c'~st l'arrêt du 28 Septem-
bre 1700.
Lorsque Maurellet vend sa raffinerie ~ux sieurs Jean-3aptrste Saint-
Michel, Antoine David, Antoine et Toussaint Cath~lin,un arr~t du 25 Juillet
1713 leur confie les m~mes privilèges.
Tbutes ces tribulations montrent donG que la raffinerie de ~aurellet a été
longtemps l'unique entreprise importante de Marseille mais pas la seule. En
effet, quelques particuliers, tentés par le bénéfice, ont osé établir de
nouvelles raffineries. Mais il est évident que du fait de la paralysante fis-
calité frappant ces entreprises non privilégiées, elles ne peuvent ~ravailler
que pour une clientèle très étroi te ,sans doute
U"niquement 'pour la place de
Marseille. Ainsi, en voulant prot~ger les raffineries françaises contre la
concurrence marseillaise assimilée à l'étranger, le pouvoir royal maintint
les autres établissements locaux dans un étau qui paralyse leur essor. Si
bien que lorstltle le commerce des tles se développe considérablement après
1719 et que la raffinerie privilégiée des sieurs Cathelin ne peut plus employer
tous les sucres bruts qui arrivent à Marseille, les ~égociants se voient con~
traints de les vendre ainsi en Hollande ou en Italie, c~ qui,. nâtU~rellement,
s'oppose aux vues du gouvernement français.
Le nombre de raffineries augmentant, les principaux fabricants se
réunissent et adressent un mémoire au conseil et aux fermiers généraux pour
demander que le privilège des sieurs Cathà.in et Compagnie soit commun à
toutes les raffineries de Marseille. Les fermiers généraux approuvent cette
réclamation; l'approbation est sanctionné~ par une décision du conseil du
1
7 Novembre 1740 levant la fiscalité paralysante jusqu'alors maintenue par les
fermes. C'est donc à partir de 1740 que le raffinage à Marseille prend un
réel essor. En effet, alors que Marseille compte 2 raffineries en 1683, leur
nombr!:Ls'élève à 14 en 1754-1755 (1).
(1) Charles CARRIERE do~~e la date de 1744, Noel DEER cel~e de 1755. Cf.
CARRIERE (C.), op. cit., p.315.
DEER (N.), on.cit., vo~ p.458.
339
Les principaux noms sont (1)
.c.-...
les sieurs Cathelin et Cie
r-Ti chel
Begue
Pons et Cie
Veuve Bon et fils
Reinier
Bressan et fils
Rougier
Comte
Sauget
Ferand
Sabbatier
Fremendi ti
Bonnefoi
Garr~ père et fils
Gauthier
Jouve et Si bon
Il est donc évident que c'est lorsque Marseille n'est plus traité
vraiment comme port franc que les raffineries se développe~t. Mais, ainsi
que le note Charles Carrière (2), cet essor n'est pas de longue durée. Dans
la seconde moitié du Xvrllè Siècle, s'amorce un déclin de l'industrie sucrière
marseillaise. L'inspecteur des manufactures de la généralité de Provence,
Imbert de Saint-Paul en dénombre 12 en 1779 (3). Il n 'yen aurai t plus que
7 en 1786 qui, d' Ao-at 1785 à Ao-at 1786, n'auraient vendu que 3 000 quintaux
de sucre raffiné (4).
Ce déclin peut s'expliquer par la prédominance des sucres bruts et terrés dans
les exportations, le sucre ~ffiné marseillais ne pouvant s'établir avantageu-
sement à l'étranger à cause des .droits d'entrée qui grèvent les prix.
Il convient de noter que Marseille ne figure pas parmi les ports privilégiés
pour l'ezportation du sucre raffiné en pain; les raffin~urs ne bénéfi~i~~t
donc pas de la restitution d'une partie des droits perçus sur les sucres bruts
ayant servi à la fabrication du sucre en pain, quand bienm~me il sort pour
l'étranger.
La généralisation de ce privilège à tous les ports du royaume pa~
l'arr~t du 25 Mai 1786 semble avoir donné un nouveau souffle à cette industrie
car en 1789, on denambre à Marseille 11 raffineries employant 400 ouvriers
et qui fabriquent mensuellement 450 à 460 tonnes de sucre raffiné (5).
(1) CHAMBON, ·op. cit., pp.59-60.
(2) CARRIERE (C.), ou. cit., Tome l, p.316.
(3) "Mémoire de l'inspecteur des manufactures de Provence, !'1. Imbert de Saint-
Paul pour donner une idée de la navigation et des fabriques de r!arseille".
AN
F12 1834 A.
(4) CARRIERE (C.), op. cit.,Tome l, p.316.
(5) FIERAIN (J.), op. cit., pp.274-275.
,
.;•.. :;"Il'
·..li,.·;·
..
!
340
La guerre maritime de 1793, en paralysant le trafic colonial, dorillera un coup
..~_.-
fatal à cette industrie.
:~i~;:
Cette raffinerie est établie par les sieurs Paillard LuI lin ,"Char-
ton et Compagnie, négociants à Marseille. La demande d'autorisation de cons-
truction date du 24 Octobre 1786 (1). Les raffineurs se proposent d'exporter
la production en Suisse, en Savoie, en Italie, dans les échelles du Levant
et de Barbarie. En 1790, le comité d'agriculture et de commerce de la ville
indique que cette raffinerie emploie 30 ouvriers et qu'elle pourrait en oc-
cuper davantage (2). Cette raffinerie est donc un établissement assez impor-
tant.
2-8. DANS LA GENERALITE D'O RLEANS
Le raffinage du sucre s'effectue à Orléans, chef-lieu de la genera-
lité. La situation sur la Loire qui permet de recevoir sans difficulté le
sucre de Nantes est favorable au développement de ce ganre d'activité.
"Le genre de manufacture le plus important et le plus étendu à Or-
..
léans est celui des raffineries de sucre
elles ont, en tout temps, fabriqué
autant que toutes les autres raffineries de France ensemble"(3). Cette obser-
vation de la Chambre de commerce d'Orléans résume bien l'importance de cette
ville dans le raffinage du sucre en France au XVIllè siècle (4).
Orléans figure parmi les premiers c~nbres de raffinage de sucre de canne. La
première raffinerie y est établie vers 1653 par le Hollandais Vandeber~i~.
12
(1) Mémoire adressé au Roi le 24 Octobre 1786.
AN F
1502.
(2) Mémoire du comité d'agriculture et de commerce, La Crotat, 1er Août 1790.
AN F12 632.
Mémoire de la chambre de commerce d'Orléans: "Le commerce et l'industrie
d'Orléans en l'an XIII (1805), in Bulletin mensuel de la chambre de commerce
d'Orléans et du département du Loiret, n01 Janvier 1898, p.10.
Sur les raffineries d'Orléans, voir l'excellente synthèse de Georges LEFEB-
VRE, in Etudes Orléanaise~,Tome l, p.III à 114.
3-1-1
Mais l'influence è~~Colbert dans l'essor de cette industrie à Orléans est
indéniable: en 1683, on y dénombre 2 raffineries; en 1698, il Y en a 3.
La facilité que ces raffineries ont de recevoir par la Loire du port
de Nantes leurs approvisionnements en ~atières premières, et la proximité de
la capitale, principal débouché du sucre raffiné orléanais, ont contribué
puissament à l'essor de cette activité. La prospérité de Saint-Domingue, prin-
cipal fournisseur de matière première de belle qU21ité a également contribué
à cet essor. En 1770, 12 raffineries fonctionnent à Orléans, fournissant
"40 à 50 mille quintaux de sucre raffiné"(1) ; il Y en a 14 en 1775 (.2), 23
en 1785 qui, par l'accroissement dc:nné aux anciens ateliers, peuvent fournir
"110 mille quintaux de sucre raffiné".
Le nombre atteint 25 en 1788 et 27 en 1789 et la chambre de commerce
assure qu'en 1793, 32 raffineries sont en activité à Orléans "où elles pou-
voient fournir 160 à 170 mille quintaux"(3). En 1786, cette production est
évaluée à 12 500 000 lb de sucre raffiné et 5 000 000 lb de sirop mélasse (4).
Mais le document le plus détaillé sur les raffineries d'Orléans,
daté de l'an II, n'en énumère que 24 possédant 255 chaudières et employant
738 ouvriers, quand les arrivages sont suffisants et què toutes les-raffine-
ries sont en pleine activité (5). c'est que,la perte des colonies du fait des
troubles nés de la Révolution et de la guerre maritime en 1793, ces genres
de fabriques sont ébranlés. En l'an II, elles n'emploient que 257 ouvriers
seulement. Ces raffineries sont,de plus,d'importance inégale: 14 d'entre
elles possèdent 10 à 19 chaudières, les autres n'en ayant que 5 à 9. Mais les
chaudières n'ont pas la m~me force d'autant que leur nombre n'est pas en rap-
port exact avec celui des ouvriers ~ployés._A~ total, 3 raffineries seulement
emploient entre 50 et 60 ouvriers; 7, de 40 à 45 ouvriers; 5, de 30 à 36
(1) "Le commerce et l'industrie d'Orléans en l'an XIII", op. cit., p.1O.
(2) LEFEBVRE (G.), Etudes orléanaises, Tome l, p.111.
(3) Cf. Le commerce et l'indust~ie à Orléans en l'an XIII, p.10.
(4) Lett'2 des entrepreneurs des œanufactures de sucre raffiné d'Orléans.
AN F
1639 A.
_
(5) "Etat général des raffineries d'Orléans et des objets de premières nécessités
tant pour 1 'exploi tation de la raffinerie que ~~ur la fabrication du sucre lt •
Enquête de Frimaire et Fructidor an II.
AN F
1502.
i
.... )
;.~il:.:.l-1
1
t
l
342
f
1
ouvriers; 4 de 1 ~~à 20 ouvriers et 5, de 4 à 8 ouvriers. En pleine activité,
elles peuvent traiter annuellement 21 935 000 lb de matière ~~emière dont,
18 550 000 lb de sucre brut, 84,57 % et 3 385 000 lb de sucre terré, 15,43 ~~.
Lee 24 raffineurs de la place, au moment de l'enquête sont
Michel frères
VanderDer~le
frères
Lefort
Vilbouié
Raquinel frères
Rime et Sautelet
Colas Malmusse
Malmusse fils
Seurat Guilleville
Rousseau père
Demadière et Ravot
Delahaye
Seurat Mison et Tassin
Simm et Faure
Jogues Guedreville frères
Cochy Duvert et Fremont
Cri gnon Sinson et fils
Regnier
Desfrancs
Alexandre Geffrier
Crignon Bonvales et CSté
Grivot et Huquier
Colas Brouville
Veuve Allard
Notons que la raffinerie du Hollandais Vanderbergue existe encore
en l'an II. Il s'agit d'une entreprise familiale comme d'ailleurs plusieurs
des raffineries de la pla~-~armi ceux-ci figurent nombre des négociants
les plus en vue ; plusieurs ont leur propre flotte à Nante~ et font leurs
achats eux-mêmes aux rles. Pour que le travail soit constant, ils sont obli-
gés d'entretenir des stocks importants de sucre qui imm~bilisentd~;~fo;ds
considérables (1) : en l'an II, 1 653 70aLb de sucres crms.et 273 741 lb de
sucresterr~sont disponibles à Orléans, 1 225 600 lb de sucres bruts et
100 630 lb de sucres terrés sont en route vers Orléans, 2 013 858 lb de su-
•
cres bruts et 104 274 lb de sucres terrés sont encore en entrepSts dans les
ports.
Le sucre raffiné à Orléans est exclusivement destiné à la consomma~
tion nationale. C'est donc en vain que les raffineurs de cette place ont
réclamé le privilège de l'exportation à l'étranger. Les principaux débouchés
sont Paris, les provinces situées sur la Loire, celles du Midi et de l'Ouest,
mais aussi l'Alsace, la Lorraine et les Trois-Evêchés. C'est la raison pour
laquelle les raffineries d'Orléans fabriquent à elles seules plus de sucre
que toutes les autres villes du royaume ensemble (2)
(1) LEFEBVRE (G.), op. cit., p.113.
1
(2) A~dition au mémoire du 24 Juin 1786.
A.'I F 2 1 639 A.
En somm.~. cette étude pennet de voir que le sucre colonial a contri-
bué puissament au dévelopement industriel dans la France du XVIIIè siècle.
Encouragée par Colbert pour dégager la France de la tutelle nollandaise, l'in-
dustrie du raffinage est au XvrIIè siècle la manufacture la plus étendue dans
di versES villes françaises (1).
A la fin de l'Ancien Régime, plus de 100 raffineries de sucre sont en activité
en France (2). A l'exeeption
d'Orléans, situé à l'intérieur des terres,
c'est surtout dans les trois princi~OUx ports coloniaux: Bordeaux, Nantes et
Marseille que cette industrie a acquis le plus grand développement. Il serait
très intéressant d'étudier aussi les manufactures qui gravitent autour du
raffinage car il est évident que cette industrie, pour fonctionner, a besoin
d'autres manufactures.
Cette étude sera entreprise plus tard. Pour l'heure, il est plus urgent de
mettre en évidence les produits issus du raffinage du sucre brut et terré.
30 ) Les _E.rodui ts du r~nag!.
•
On ne peut parler du raffinage du sucre sans faire état des pro-
duits fabriqués. Cette étude est d'autant p~us nécessaire que le terme sucres
Cr
=_. --:,:;
raffinés racouvre une réalité plus étendue, d'où d'ailleurs son emploi au
pluriel. Les documents de base de cette analyse sont avant tout les rapports
des fonctionaaires du commerce : directeurs et fermiers généraux et les com-
missionnaires généraus du commerce. Leur préoccupation en rédigeant ces
rapports est d'évaluer la production de sucre raffiné à partir de la propor-
tion de sucre brut régl~mentaire. Les renseignements ne sont pas toujours
satisfaisants.
Le rapport de Bordeaux signale deux types de produits: le sucre
raffiné et le sirop (3). Ceux de la Rochelle et de Montpellier sont à cet
(1) N'ayant pas suffisamment d'informations, il nous a paru hasardeux de tenter
une étude sur la main-d'oeuvre. C'est une étude qui mérite d'~tre faite plus
tard.
(2) Au moins 103 raffineries fonctionnent dans les 16 villes identifiées.
(3) On tire d'un quintal de sucre brut 80 lb de sucre rafii~é (38 à 40 ou 45lb
de la première qualité, 15 à 20 lb de la seconde et '5 't "0 lb de la troi-
sième) et 15 à 18 de sirop.
344
égard un peu plus sa\\~~faisants (1). Le premier signale quatre types de pro-
duits: sucre raffiné, sucre vergeois (en poudre), sucre brun e~ sirop. Le
~~
second en signale trois: sucre en pain, casson.'1.ade, sucre vergeois ou mélasse.
Mais c'est certaienement le Havre qui apporte les renseignements les plus
complets. Dans un mémoire adressé aux commissaires généraux du commerce (2),
probablement en 1786, les représentants du commerce de la ville assurent qu'un
quintal de sucre brut produit au raffinage en France:
30 lb
de sucre fin
14 ltb 4/9è de sucre mélis et batarde
soi t au tota1
lb
44
4/9è de sucre raffiné en pain
18 lb
de sucre vergeois
32 lb 5/9è de sirop mélasse
. !.;.:
Il ressort de ces exemples que le sucre raîfiné comprend le sucre
;'!:;~i
en pain, le sucre vergeois et un autre type de sucre raffiné qui n'apparatt
pas ici : le sucre candi. Le sucre en pain est lui-m~me composé de deux types
de sucre raffiné
le sucre ITnet le sucre mélis. C'est le sucre privilégié
. .
dans le commerce avec l'étr~~ger. En effet, selon l'esprit de la loi, le sucre
raffiné en pain est seulSu$ceptible de la restitution de droits
2
lors de
"";;"";;";;;"";;';
l'ex-
portation à l'étranger.
Le sucre vergeois, qui est un sucre en poudre, un résidus du raffinage, n'en
jouit point. Il est seulement franc de droits de s0rtie pour l'étranger. Celui
•
qui est destiné à la consommation nationale et qui circule donc dans le royau-
me est exempt de tous droits, le tout par 1 'arr~t du conseil du 10 Mars 1763(3).
Le rapport de la Rochelle signale que de 2 quintaux de sucre brut on peut
tirer 100 lb de sucre raffiné, 25lb de sucre vergeois, 25lb de sucre brun et
50lb consommées, soit par évaporation soit transformées en sirop.
Le rapport de Montpellièr indique que un quintal de sucre brut donne 1/3 de
sucre en pain, 1/3 de cassonnade et 1/3 de sucre vergeois ou mélasse.
(notes 2)cf., Quantité de sucre brut ~ui entre dans la composition d'un quin-
-----'tt;aa~l·-desucre" AN F121502.
',
"Mémoire des représenta."l.ts du commerce du Havre sur le commerce du sucre r2:ê~..2
finé en France, en Angleterre et en Hollande à l'occasion de la restitutiorc
.
de 26 shellings sterling par q~intal accordée en Angleterre à l'exportation
des sucres raffinés".
AN F
1639 A.
12
-~.~
Mémoire des représentants du commerce du Havre ••• ~~ F
1639 A.
34~
La distinction d$~"produits faite, évaluer quantitativement la pro-
duction du sucre raffiné en pain s'avère nécessaire."Il l'!!dt'd'autar.i plus
:~
qu'une partie de cette production sort pour l'étranger et qu'il est toujours
utile de mesurer les exportations sous forme de pourcentage par rapport à la
production globale. N'est-ce pas la meilleure façon de caractériser c~ ~om-
merce ?
La question est donc de savoir si une telle évaluation est pos~ble.
Nous disposons de deux estimations émanant des raffineurs eux-
m~mes : l'une est de 1777 et l'autre de 1786. La première indique que les
25 000 000 lb de sucres (terré et brut) employés en moyenne annuellement par
les raffineurs produisent 15 000 000 lb de sucre raffiné; cela représente
60 %de la matière première employée. La seconde estimation assure que les
36 000 000 lb de matière première employée produisent 21 000 000 lb de sucre
raffiné ; c'est un peu plus de la moi tié de la matière première employée :
i!;~;
55,55 %. Les 36 000 000 lb de sucres sont composées de 12 000 000 lb de sucre
brut produisant 5 000 000 lb de sucre raffiné et de 24 000 000 lb de sucre
terré produisant 16 000 000 lb de sucre raffiné.
~
1
On doit accorder à ces informations une attention mesurée, à cause
de leur valeur démonstrative évidente: elles servent de preuve~tt l'appui
des demandes d'augmentation du montant de la restitution des droits. Ce n'est
pas tout: il faut ajouter à cela les difficultés d'une évaluation objective
des quantités de sucres destinés au raffinage.
En clair, faire une évaluation à partir des sucres bruts et terrés suscepti-
bles de servir de matière première aux raffineries ne peut ~tre que pure
conjeoture. Il serait aussi illusoire d'évaluer la production de sirop: étant
donné le peu de valeur de ce produit dans le commerce, les raffineurs préfé-
rént l'utiliser dans une seconde opération. C'est ce qu'on appelle les ma-
tières vieilles batardes. Elles sont composées d'écumes et de s~rop fin.
Un m~moire de 178~ (1) indique que, si 2 800 lb de sucre brut produisent
1 000 lb de sugre raffiné, étant donné qu'il reste à l'issue de la première
opération 1 000 la de matières vieilles bâtardes, il ne faudra plus au
(1) "Observation ,~r un mémoire de Londres qui nous a été remis le 23-SeptembrC'
1786".
MT F
1639 A.
346
raffineur, lors d'une proc~?;..r.,e opération, que
1 200 lb de matière peuve.
C'est donc une connaissance précise de la production de chacune des raffineries
en activité qui, seule pe~t
permettre une éval~atio~ globale.
Une étude plus approfondie est par conséquent à f2îre dans ce 6ens~Mnis cette
lacune ne gêne pas la compréhension de l'orientation générale du commerce
sucrier français. La consommation intérieure ét~,t quantitativement rédui:e,
il est évident que le sucre intéresse avant tout le commerce extérieur de 12
France. Vendre plus à l'étranger qu'on ne lui achète, telle est la devise
et la condition même de l'enrichissement.
111/ Acheter moins et vendre plus
le commerce sucrier, un moyen de s'enrichir
au détriment de l'étranger.
Le commerce sucrier est un maillon de la politique mercantiliste
françai~ Après avoir démontré que lL..Système colonial de relation commerciale
entretenu avec les possessions américaines a abouti à la main-mise des négo-
ciants sur la ~duction sucrière, nous arrivons à l'objectif final de cette
politique: les échanges avec l'étranger.
Nous avons déjà indiqué que négociants et hommes politiques entendaient ac-
crottre le taux de profit au détriment de l'étranger. Il faut pour cela une
b~13nee commerciale favorable. Celle-ci ne peut se réaliser que gr~ce à une
•
expansion des exportations qui ne soit pas contrebalancée par un apport équi-
valent de marchandises étrangères. Il faut donc stimuler les exportations
tout en restreignant les importations, surtout celles des produits fabriqués
à l'étranger. C'est en tout cas, la politique suivie en ce qui concerne le
commerce du sucre avec l'étranger.
Elle a produit tout l'effet que l'on attendait. Dans la seconde moitié du
XVIllè siècle, la France est le principal fournisseur en sucres, des autres
puissances européennes. Cela est d'autant plus facilité que l'essentiel d.es
sucres qui arrivent des colonies est réexporté.
)47
-:.:
....
Cette étude tournera autour des trois points suivants: les impor-
tations en provenance de l'étranger, la stimulation des exportations et lp
mécanisme commercial.
1-1. DES IMPORTATIONS LICITES EN ProVENANCE DE L'ETRANGER INSIGNIFIANTES
La France reçoit de l'étranger quatre types de sucres: les sucres
brut, terré, raffiné en pain et candi.
Tableau no62 - Les imuortations sucrières françaises de l'étranger 1775-1793 (1).
,
,
,!
-
,Années
sucre brut
sucre terré
sucre raffiné
sucre candi
ver-
total
geois i !
!
1775
22 615
2 054
24 669
!
1776
49 020
49 020
,-
1777
36 311
36 311
!
1778
119 693
67 050
28 414
1 196
!
216 353
!
1779
355 717
28 389
26 215
,
410 321
1700
226 014
24 240
14 123
2 248
f-_....,..."""2·06-=62? .
1782
007
198 342
202 002
4 156
!
52
405 359
!
1787
55 400
11 500
342 223
357 648
766 711
1788
47 000
558 300
130 700
736 000
!
1790
209 375
U~58gftti
!
1791
225 1/2.
,
1792
14 200
22 097
1 164 766
-
,
;120 10 43
1793
273
140
56 922 3/4
4 144 1/2;
.
64 400 ! ;:);
51onces!
160nces !
1/467onl
Le tableau appelle quelques
remarques. La première concerne les lacunes.
Les informations incomplètes ne permettent pas de suivre l'évolution des im-
portations sur toute la durée de la période 1763-1793. Les années qui
12
12
(1) 1775-1782
AN F
242
i
1788 : AN F
1835
1790 : Direction1~e Lille. Eureau principal de Buisieux, importation de
l'étranger. AN F
16~ 1. Valenci ennes, Année 1790. Di rection de C:.titrl-evil:>.
Bureau de Si~an. AN F 21669.
1791
AN F121671 et 1669.
1792
lN F
251
12
1793
AN F
167G-1677 et 1678.
34E-
constituent les lacunes son .....'-l 1763 à 1774, 1781, 1783 à 1786 et 1789. Après
1789, les renseignements sont épars et très incomplets
en ce qui conr.erne
l'année 1790, les informations son~ relatives à Baisieux, Valencier.nes et
Sedan. Pour 1791, hous avons retrouvé les importations de Baisieux, Rocroy
et Valenciennes. Les chiffres d'im~ortation de 1792 sont incomplètes: ce
sont les importations du premier semestre. Concernant l'année 1793, les in-
formations O~ li~itent a t~i~ directions: Lille pour le Nord, Besançon
pour la Franche-Comté et Metz pour la Lorraine.
Après ces remarques, passons à l'analyse des données.
a) 1.e!. !.u~r~s-!:.af!.i!lés_:_u!!e_iW2.r1a1i2.n.Jll.u!. ~éguliè~eJ!~lgrf la_l2.u~d~ 1~e
!!la.!.s_t~è!. !.a.!.ble._
Au XVIlè siècle, la France était tributaire de l'étranger, de la
Hollande en particulier, po~. son approvisionnement en sucres raffinés. C'est
pour emp~cher que les Hollandais puissent exporter leurs S1lcres raffinés en
France que Colbert, non seulement encourage les créations de raffin~ries, mais
fixe les tarifs prohibitifs sur ces produits. Les 22lt 1(30US définis par
..
l'arr~t du 15 Septembre 1665 sont conîlrmés par tous les arr~ts ultérieurs,
notamment par les lettres-patentes d'Avril 1717. Ce tarif reste en vigueur
jusqu'à l'arr~t du 17 Mars 1782 (1), qui porte l'ensemble des droits à 60lt
le quintal: 40lt par quintal plus 10~ous pour livre de la dite 0-----=
somme.
D'après l'arr~t, ce durcissement survient à la suite des encouragements dont
jouissent les sucres raffinés en différents pays étrangers lors de leur
•
exportation, et des introductions considérables de sucres raffinés étrangers
en France qui portent préjudice aux raffineries nationales.
L'influence des raffineurs semble évidente, habitués comme ils
étaient à la défense de la prospérité de leurs affaires. Leur intention est
d'autant plus justifiée que la guerre d'Amérique a bouleversé l'ordre commer-
cial : les colonies sont ouvertes aux nations neutres , la chute des impor-
tations de matière première gêne, sans doute, considérablement l'activité des
(1) Arrêt du conseil d'Etat du roi qui fixe les droits sur les sucres raffinés
venant de l'étranger. Du 17 Mars 1782.
AN ADXI 48.
raffineries d'autant que 12.~areté des produits a tendance à en augmenter
le prix. L'importation licite de sucre
s'est accrue. Tbut cela donne ~'oc
casion de dramatiser la situation économique pour convaincre les membres du
conseil.
En fait d'encouragements
contre la France, ils n'ont cours qu'en Angleterre:·
14 shilling 6 deniers avant 1784. Il est donc vraisemblable qu'il s'agit
essentiellement d'une mesure anti-anglaise même si dans son application,
elle frappe les autres nations.
En 1791, l'Assemblée Constituante apporte un incontestable altè-
gement au droit d'entré des sucres raffinés: il est ramené à 251t le quin-
tal par le décret du 31 Janvier 1791. Tbutefois, on peut dire que la protec-
tion douanière est toujours en vigueur, tant est puissant le groupe de
pression des intérêts coloniaux et manufacturiers. Et pourtant, les impor-
tations licites de sucres raffinés: en pain et candi, quoique nous le ver-
rons réduites, sont les plus régulières et les
plus anciennes. L'organisa-
ttn incohérente du royaume explique c~ laxisme.
Les trois provinces d'étranger effectif:
Trois Evêchés, Al-
sace, Lorraine, commercent librement avec l'étranger. C'est ainsi que, par
une sorte d'accord tacite entre la France et la Hollande, cette dernière est
le fournisseur principal de ces provinces. La commodité et le bon marché des
transports s'y prêtent; les sucres y arrivent "par canaux et par le Rhin".
Ainsi, alors que le transport coûte 20 à 21 It et plus au raffineur borde-
•
lais, il ne revient que de 6 à 8 l t par quintal de sucre au Hollandais.
Aussi, peut-il fournir ces provinces à meilleur marché que le raffineur
français (1).
Ceux d'Orléans qui travaillent pour la consommation nationale
s ~dignent : "il est surprenant, écrivent-ils, qu'on ne se soi t pas occupé
plutat du fai t que ce soi t les Hollé:dais qui approvisionnent les provinces
f%.'a.1çaiaeo ,cellearéputées étrangères ,1 '.Usac~,Lorraine, les trois Ev~chés
12
(1) Mémoi~e de Bordeaux (sans date). AN F
1639 (A).
et la Franche-Comté, qui en ~Dtroduisent en contrebande dans les 5 grosses
fermes" (1).
!:i;~::;
Sedan constitue une autre porte d'entrée. En effet, ces privilèges
l'autorisent à recevoir des sucres étrangers destinés à la consommation
de la Lorraine, des trois Ev~chés et d'une partie de la Champagne(2). Ces
sucres arrivent surtout d'Angleterre. Débarqué à Ostende, ils transitent
par Louvain, Namur et Bouillon, à travers la Flandre autrichienne par la
Meuse: en 1787, 150 000 lb de sucre blanc anglais entrent en France par
Sedan, 201 369 lb en 1786; .. 206 473 lb de sucre en pain, 350 1b de sucre
car.:'i en 1790.
Il faut ajouter enfin que, si les importations de sucres raffinés étrangers
s'opposent aux intérêts des raffineurs nationaux, il en va,dans une certaine
mesure, autrement pour le pouvoir royal.
On sait en effet que, du fait des droits d'entrée, elles ont des
retombées financières importantes. Il est dès lors exclu de penser que
cette lourde imposition constitue viritablement une prohibition. Il s'agit
plutôt d'une restriction d'importation. Sur ce point, la législation sucrière
française semble avoir parfaitement porté ses fruits.
En effet, les introductions licites de sucres raffinés: en pain
et candi, en France sont quantitativement très faibles. On peut dégager deux
cycles d'évolution de ces importations: jusqu'à la guerre d'Amérique et
•
dans les trois premières années de la guerre, les introductions licites sont
très réduites. De 1782 jusqu'à 1793, les importations se sont considérable-
ment accrues. C'est qu'aux deux fournisseurs traditionnels: la Hollande et
la Flandre autrichienne, s'est ajoutées un concurrent redoutable: l'Angle-
terre, surtout après 1784 (2).
Ce sont les raffineure de Rotterdam qui, les premiers, tirent la sonnette
12
(1) "Résultat des infonnations prises".
AN F
1639 A.
12
(2) AN F
1835 pièce n01.
(3) L'arrêt du 30 Août 1784, admet sous contrôle les étrangers dans· les îles
françaises, les négociants français et hollandais pensent que l'An~leterre
en profite pour tirer frauduleusement du sucre des colonies,ce qui accroît
sa capacité commerciale, notamment son exportation sur le continent. En ou-
tre, en 1784, la prime d'exportation en Angleterre passe de 14 shelling 6
deniers à 26 shelling. Ce qui rend le sucre raffiné anglais plus compétitif
que celui des autres puissances concurrentes. Mais n'oublions p~s ~ussi qu'
en 1786, un trai té de commerce .1rter'Tient entre la France et l' Anr;leterre.
351
d'alarme. Leur posi tion d~fournisseurs privilégiés quasi-ins ti tu tionnels les
rend plus sensibles à la percée du sucre anglais sur le continent. A en
croire Jean-Jacob ELZEVIER, l'un de ces raffineurs, les trois provinces
françaises d'étranger effectif sont approvisionnées depuis 1785 par les
Anglais (1). Recevant très peu de commandes rie la part de ses clients lor-
rans, il entreprend les recherches pour retrouver les causes de cette diminu-
•
tion de la demande. D'abord ce sont des lettres à ces clients, puis il déci-
de d'aller se rendre compte sur place de l'ampleur du commerce anglais.
Il ~art de Rotterdam le 12 Août 1785. Il visite successivement Luxembourg
•
le18 Août, Thionville le 20, Metz le 21, Nancy le 22 et le 23 et Bar-le-àuc
le 24. Il découvre en visitant toutes ces villes que, partout, les magasins
sdnt remplis de sucres d'Angleterre. Ces sucres sont débarqués à Ostende et
transitent par Louvain pour être exportés en Lorraine.
En 1785, le sieur Jean-Jacob EL 2EVIER évalue la quanti té de sucres
venus d'Angleterre par ce port à rlus de 3 000 boucauds (2), soit 4 032 OOO~b
à 4 704 000 lb' de sucre~. Il s'agit incontestablement de fraude dans la me-
sure où les marchandises anglaises-entrant en France sont entreposées par- .
ticu1ièrement dans le port franc de Dunkerque et soumises à la taxe d'entrée.
Donc, dans les provinces française réputées étrangèr~s et parti--~~=.'
cu1ièremen~ en Lorraine, on ne se ravitaille plus qu'en sucre d'Angleterre.
Cela résulte du fait que, de qualité supérieure à celle de Hollande, le
sucre lump anglais, en raison de l'augmentation de la prime de sortie:
26 she11ing le quintal, et des frais de transport relativement bas: 10 1
le quintal de Londres à Louvain, alors qu'ils coûtent aux Hollandais 6 l ,
revient à meilleur marché.
C'est,du reste, ce qui ressort d'une lettre qu'un nommé Martin de Nancy
adresse au sieur ELZEVIER le 6 Juin 1785 :
(1) "Déc] aration de N. Jean-Jacob Elzevier conseiller de la ville de Rotterdam,
député de la part d'icelle à l'Assemblée de leurs nobles et grandes puis-
sances seigneurs Etats de Hollande et de l'Ouest psi se et exerçant la raf-
finerie de sucre dans la di te ville de Rotterdam". Rotterdam le 21 Janvier
1786.
AN F12549-550.
(2) D'après Jean-Claude Nardin, la mise en valeur de l'r1e de Tabau 0 (1763-
1.1.§i~, p.229, note 1, le boucaud de sucre pouvai t contenir de 1 344. à 1 56F
l i vres.
35')
" J' ay bien reç~l'honneur de la votre du' 1 eè du passé pour laquelle
vous ne faites l'offre de 12
Im(sic) (1) de sucre en pain au prix è~ 12 1/2
(sic)(2). Je vous en suis très obligé. Pour le présent il m'est plus avan-
tageux d'en tirer de l'Angleterre, i l y est actuellement à plus de 6 % meilleur
marché que chez vous. Outre l'avan~age du' prix, c'est que la qual~té en est
infiniment supérieure au point qu'à un prix égal i l s 'y trouve ?U l10ins 10 ;~
de différence sur la qualité de mamere que j'aime autant leur ,];);npeur(sic)
(3) que votre mélis 3) que vous m'avez fourni cy devant. Vous !ouvez juger
par la de la qualité de leur mélis et du 1/2 royal"(4) •
•
~ sorte qu'un certain Impens, expéditeur, passe chez tous ceux
qü se ravitaillent en Hollande pour retirer les commissions afin de les confier
aux Anglais. La maison très connue
Pierre Simon et John Hankey
de Londres, s'illustre dans le commerce des sucres avec ces provinces fran~
çaises.
Tbutefois, ces importations, même accrues, restent très "inférieures
à celles pratiquées avec les co1onres. Kl1es ne représentent donc> aucun dan-
ger pour l'équilibre des échanges, du moins, pour contrebalancer les expor-
tations. Mais qu'on ne s'y trompe pas. Ces chiffres sont loin de refléter
(,...........--........===
la réalité. Il faut compter avec les introductions frauduleuses qui échap-
pent totalement aux circuits de contrôle donc à la comptabilisation. La
fraude est surtout accentuée par l'augmentation des tarifs douaniers •
•
1
.,' .1
....~
::-::i
Si pour des intérêts immédiats les négociants sont toujours prompts
~,
,
i
à proposer le renforcement des mesures protectionnistes, en l'occurence l'aug-
mentation des droits d'entrée en vigueur, la ferme générale
(1) Sans doute 12 000 lb.
(2) Sans doute s'agit-il d'un abréviation du florin.
(3) Il faut entendre ici le Lump.
(4) Lettre de Martin au sieur Jean-Jacob Elzevier, Iiancy 6 Juin 1765. ~,:?12
549-550.
sell'.Dla avoir. compris ~i1a ce~'Q-ns lSonstitua pas la solution idéale. Les
députés du commerce aussi. Les débats qui ont suivi la requête des raffi-
neurs d'Orléans en 1777, d' "imposer sur les sucres :1. la sortie des ports
deFrance un droit pareil à celui d'entrée affin que l'étranger fut du moins
au
pair du régnicole"(1), ont'permis à ces derniers de poser en termes
précis le·danger d'une telle mesure.
Pour eux, toute augmentation de droit débouche soit sur la dimi~
tion de la consommation, soit sur le renforcement de la fraude (2). Le
commerce licite ne peut Vrafment se développer en effet, car, les sucres
raffinés étrangers ne peuvent présenter un très grand avantage sur le
prix pour le consommateur français s'i~acquittent les lourdes taxes d'entrée
.C'est donc ce qui se passe à cause du tarif prohibitif qui frappe le sucre
raffiné étranger en FTance.
La contrebande est
la voie de salut aussi bien pour le négociant étran-
ger que pour le consommateur français.
L'organisation incohérent-e-<l.u royaume facili·te la pratique: les
sucres sont transportés dans les provinces qui commercent librement avec
~!!
l'étranger, après quoi, ils se répandent dans les provinces des cinq grosses
fermes. La Flandre, le Hainault, la Franche-Comté, l'Alsàce, la Lorraine et =,," "'"-1
les Trois Evêchés sont donc les portes d'entrée des contreband~§rs~Une partie
dee sucres anglais débarqués à Ostende, alimentent la contrebanàe dans la
Flandre française, le long de la frontière avec la Flandre autrichienne (3).
Il en est ainsi d'une partie des sucres qui arrivent par le port franc de
Dunkerque : "sa si tuation voisine de l'Angleterre est plus favorable
à cette fraude que par toute autre ville frontière de terre et de mer"(4).
C'est ainsi qu'en 1788, 9 606 894 It (~) de marchandises anglaises au~aient
(1) Mémoire des raffineurs 1777. AN p12 1639 A.
(2) Délibération_et avis des députés du commerce 1779. Séance du 29 Janvier
1779.
AN F12+113(3).
(3)
12
"Les administrateurs de la commune d'Arras, 10 Floréal an 6. AN F
1557.
(4) ''Pétition des entrepreneurs de. manufactures de sucri2d'Orléans à l'Assem-
blée Nationale", reçue le 26 Septembre 1791.
AN F
1502.
(S) Et nOn
9 526 896, comme il est écrit dans les archives. Il s'~~ic d'une
simple erreur de calcul.
354
échappé à la perception de<:r'impôt de 8 3/4. En effet, sur les 31 017 132lt
de marchandises importées, 21 410 238 seulement sont déclarées à l~·uane (1).
Les raffineurs orléanais nous apprennent aussi qu'ur: autre réseau
de contrebande s'est développé dans le port de Charente: ici, les sucres
sont déchargés en pleine mer par-dessus bord (2).
Mais, il n'y a pas que les Anglais: les négociants hollandais et ceux de la
Flandre autrichinienne animent eux aussi ces réseaux de contrebande. Celle-ci
sen ble avoir pris un nouvel élan avec les événements cl révolutionnaires : les
•
dœoc mauvaises récoltes aux rIes en 1789 et 1790 et les suites fâcheuses de
la Révolution, en l'occurrence la réforme monétaire et l'inflation, ont fait
flmber les prix en France. Les étrangers ne peuvent, de toute évidence'7 in-
troduire du sucre raffiné
s'ils acquittent le droit de 25 It. Car,
pour couvrir la perte que l'acheteur éprouve sur le change, il faut que
l'étranger lui présente un très grand avantage sur le prix. Il ne peut le
faire qu'en évitant de payer ce droit (3).
c'est sans doute pour avoir très vite compris l'importance de la
contrebande dans l.es provinces marginales
que l'inspecteur géné-
ral du commerce, chargé par Necker d'examiner le travail de la b~a_l_an
__c~e~d_u~==
(,-
commerce, propose "de tacher d'obtenir des renseignements suffisans sur
les provinces d'Alsace et de Lorraine et d'en conférer avec les magistrats"(4) •
•
En ce qui concerne les sucres brut et terré, on ne peut s'attendre
à une introduction très abondante, car la plupart des partenaires de la France
n'ont pas de colonies sucrières. Mêmes ceux qui en disposent, nous l'avons
12
Commerce .9.e_)a France avec l'Angleterre, 1er semestre 1788. ANF
1835.
Cf. "Péti tion des en-trepreneurs de manufacture ••• AN F12 1502.
Idem.
12
Mémoire sur la balance du commerce. AN F
1934 A.
Nous n'avons aucune information sur les différentes sortes de suc~bTUt
et terré étrangers. Aussi avons-nous décidé de garder le singulier en par-
l~,t de ces sucres.
montré dans le chapitre l, ne peuvent à la fois satisfaire leur consommation
..."'!o--.
intérieure et exporter. Pour eux, la production coloniale est un moyen de
s 'affranchir partiellement, de la position très fortement dominante (' :edé-
tient la France sur le marché européen de la réexportation des sucres.
Nous verrons que la Hollande, puissance coloniale, ne peut se passer ~~ 8U~
cres bruts et terrés français. Il aurait été absurde de venir revendre ce
s.cre à la France.
Le tableau est incomplet; toutefois, tout semble indiquer que les
introœuctions étrangères de sucres brut et terré en France débutent avec la
guerre d'Amérique. L'ouverture des colonies françaises aux nations alliées
semble avoir favorisé cette situation.
Mais, plus tard, l'ouverture des entrep~ts en 1784 ne semble pas, quant à
elle, avoir entrairi~ de waites fâcheuses d~~s ce domaine. C'est que la France
reçoit suffisamment de sucres bruts et terrés de ses colonies pour en ré-
clamer de l'étranger. Le droit modéré qui frappe les sucres bruts: 2lt 10s,
est parfaitement supportable par-les raffineurs qui, de plus, sont souvent
partie prenante dans la productipn aux rIes.
Les liaisons d'habitation produisent une imbrication des intér~ts.
Donc, sur ce terrain, l'étranger n'a aucune possibilité réelle di pi.Siil' sur~
le marché français. La fraude serait un non-sens dans la mesure où ces sucres,
qu'ils viennent de l'étranger ou des colo:ues, sont traités pareillement.
Il convient maintenant d'analyser la provenance des sucres.
La provenance des différents types de sucre apparaît dans le ta-
bleau suivant:
·;"1
356
Tableau n063 - Les fournisseurs étrangers de sucres de la France.
A
,
1
iAnnéesl
Hollande
1 (ou
1
1
R
1
C
IT
B I R
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1
1
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1
1
1
1
1
1 1775 1
1
116
1 1776 1
1
1
1
1 1777 1
1
1
!
1778 1
1
: 1779 110 109:11 202
2 135
!
1 1780 1
1
1 1782 1
1
1 1787 : 5 450111 7001
1 1788 147 OOO!
!
1 1790 1
1
1
1
1 1791 1
1
"
1 1792 1
1
1
24 510
1 1793 1
1
~73!
51~
c
- - t
IE~ats-On1s!
.
IAnnéesl
Portugal
Espagne
l lmériquelSarda~gne
,
1
1
T
1
B
1
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B
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R,
1
T
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1. 1775 !
!
t
1
1 1776 1
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1
1 1777 1
!
1
T
terré
1
l,
=
1 1778 167 0501119 6931
1
1
B
brut
1 1779 1 1 640
1
=
112 500:
1
1
1 1780
!
1
,
t 1 )(2)
1
' .
: Poids
1 1782 :47 846!
!
1
1
93 ~20!
brut er non
1 1787
1
6 ,501
119 554-!2261
poids
1
1
net.
1788
1
1
1
!
!
1 1790
1
1
1
1
1
1 1791
1
1
1
1
1
1
1 1792
1
1 000 1801245 6001261
1
,
777'
1 1793
1
1
1
!
(3) Sur ces 100 lb de sucre en pain, 30 sont déclarées venues d'Angleterre et 70
de Dunkerque êtranger. Il est vraisemblable que ces ~o lb ct
.
t d'A
1
e
sucre en pal:' pro'J'
nen
ngleterre i c'est pouIlquoi, nous les avon3- additionnées
~l
.
.leo-
du sucre brut· 60 lb d'A
l
• .1.
en est de ilme
Cf
•
.
• .
ng eterre et 213 de Dunkerque étr~g er'
• D1rectlon de L111e, Bureau principal de DunKerque. AN ~'~1~07.
;'t.
'
1
357
Les deux :ournisseurs traditionnels de sucre raffiné en pain sont
deu.x puissances 2Jn>S : Iam~611ande et la Flandre autrichienne. La Hollande
est le fournisseur principal : en 1775, 75,18 % du sucre en pain étranger
sëmt hollandais, 43~9R ~.~~!1 17 76, 64,59 0:' en 1778 et 46,11 % en i779,contre
26,82 %, 21,77 ~.), 35,4; 5; et 45,75 % pour la Flandre pendant les mêmes
années. Des fournisseurs occasionnels leur disputent de temps à autre la
prééminence. C'est ainsi qu'en 1776, la Russie ravit la seconde place à la
Flandre. L'année suivante, c'est la Flandre qui ravit sa place à la Hollan-
de en fournissant 39,62 ~:: du sucre en pain; la Hollande n'en a fourni alors
que 9,5è ~~. !'~ais c'est surtout la Suisse qui occupe la première place avec
50 ,80 ~<.cette année-là.
A moins qu'une partie de ce sucre ne soit hollandais, la Suisse et Genève
étant l'un des débouchés principaux des raffineurs hollandais.
La primauté de la Hollande devient toute relative ~ mesure qu'on
avance dans le temps. En 1779, elle est fortement concurrencée par l~
Flandre: 46,11 % contre 45,75 %. Mais, c'est surtout à partir de 1700
qu'elle cesse d'être le principal fournisseur. Les difficultés nées de sa
participation à la guerre contre l'Angleterre expliquent ce déclin. Le gou-
vernement an~lais ouvre le commerce hollandais à la rapacité de ses corsaires:
deux mois à peine après l'ouverture officielle des hostilités, Rodney et
le major général Vaughan, se jettent sur l'rIe de Saint-Eustache, le plus
grand entrep~t colonial hollandais des Indes Occidentales ; ses autres colo-
nLes sont pillées. Le 5 Janvier 1781, l'Angleterre a déjà capturé 300 na-
vires hollandais et 3 000 hommes d'équipage (1).
Un concur~ent d'importance apparart sur le marché dèc 1780 t c'est
l'Angleterre. Des exportations sucrières anglaises en France en pleine
guerre d'Amérique, n'est-ce ~as la preuve que les hostilités
?olitico-
militaires n'arrêtent pas les échanges entre les deux puissances?
(1) GERrn!Y (Ilarc de), Les briG;anèaR'es maritimes de l'Andeterr",T8me .]T, sous
le règne de Louis XVI., pp.
132 et 134.
35 ;:
::n 17 00, l' Angl eterre exporte 4 108 lb de sucre en pain en France, 3 063
en 1782 et 173000 lb
176}(L)
1
' . 1 )
LIa croissance est énonne ~ '-c;4 P 06 °0
..,' ~~,
1·
c'est ce qui a motivé le tarif prohibitif de 1782. Mais c'est surtout après
le traité de commerce de 1786 que ses exportations licites de sucre en pain
enFrance deviennent plus importantes: en 1787, 32~ 792 lb, 446 020 selon
une autre source (2), 558 300 lb en 1788 (3) et 206 473 lb en 1790. L'Ang1eter·
re vend plus de sucres à la France que les fournisseurs traditionnels: en
1787, 95,20 %èu sucre en pain étranger entré en France est anglais. L'année
suivante, l'Angleterre est l'unique fournisseur. Ce traité de commerce tant
décrié par les négociants français n'est abrogé que le 1er Février 1793,
en raiso~ de la déclaration de guerre.
La Hollande, la Flandre autrichienne et l'Angleterre depuis 1787,
sont aussi les fournisseurs de sucre candi. En 1778, la Flandre en est 1 'uni-
q~~ fournisseur; en 1700, elle est supplantée par la Hollande; en 1182,
les }m'ts respectives sont : 81,74 % pour la Flandre et 18,26 ~~ pour la Hol-
lande. En 1787, la fourniture anglaise dépasse celle des autres puissances
56,68 % contre 40,99 % pour la Hollande et 2," % pour la Flandre. Par la
s~ite, les renseignements sont incomplets; on ne peut donc les employer
utilement.
En ce qui concerne le sucre brut, il n'y ? vr8i~ent ~~s de four-
nisseurs réguliers. On a surtout affaire à des
ventes
épisodiques.
Seule la Flandre, de 1778 à 1787, semble avoir été très régulière dans ses
exportations vers la France. En 1779, 96,85 %de sucre brut entré en Fr~~ce
de l'étranger, viennent de la Flandre, l'Angleterre n'en a fourni que 3,15%.
En 1700, seule la Flandre exporte du sucre brut en France. En 1782, sa part
est de 99,70 %. L'Angleterre semble n'exporter que le sucre brut tiré frau-
duleusement des colonies étrangères, ces genres ~~ sucre étant prohibés e~
12
(1) Commerce d'Angleterre année 1783.
AN F
1835, pièce n01.
(2) "Tableau général du commerce entre la France et la Grande-Bretagne depuis
l'époque du traité jusqu'au 31 Décembre 1787". AN F12 1835, pièce n01.
12
(3) "Commerce extérieur de la France en 1788". A}! F
1835 pièce n014.
359
Angleterre même. La suprématie de la Flandre résulte de ce qu'après l'entrée
, .. --_.-._-" - - _ . -
en gue~re de la Hollande en 1780, la France s'abrite sous les plis des pa-
villons impériaux pour son commerce colonial. Sa position semble avoir
fléohi au retour de la paix : Ei-j 1787, elle ne fourni t plus que 4,13 ?1. du
sucre importé de l'étranger. La Hollande en fournit alors 79,13 %,'et l'An-
gleterre 16,72 %.
Le Portugal et la Flandre sont, de 1778 à 1782, les fournisseurs
les plus réguliers et les plus importants de sucre terré. L'Angleterre et
l'Dspagne les concurrencent de temps à autre très fortement. En 1779, l'An-
gleterre en a fourni à elle seule 54,97 %. L'Espagne, alliée de la France
depuis le 12 Avril 1779, semble avoir progressé dans ses ventes. En 1782, 1
cette croissance lui donne le premier rang dans la fourniture de sucre
terré.
Les Etats-Unis font leur apparition sur le marché en 1183 avec
5 970 lb (1) de sucre terré. En 1786, ils exportent en France 40 750 lb (2)
de sucres terré et tête. C'est que depuis le traité d'amitié et de Commerce
conclu le 6 Février 177°, i.~ ssntdevenus les alliés de la France. C'est
à leur intention que sont ouverts les ports francs de L6rient, Bayonne et
Saint-Jean de Luz en 1784, en plus de Dunkerque et de Marseille (3).
~ais les importations étrangères sont tout de même irrégulières comme pour
le sucre bru t.
Les sucres anglais entrent en France généralement par le port franc
de Dunkerque et par le bureau de Sedan. Ce sucre, qui passe par Sedan est
.débarqué à Ostende et y arrive par Louvain et Bouillon. En 1792, les ports
d'entrée ont été Bayonne, Bordeaux, le Havre et Dunkerque.
Cette statistique donne des informations au sujet des autres puissances~
(1) Commerce des Etats-Unis de l'Amérique avec la France, année 1783. AN F12
1835 cote B.
(2) Ibidem, année 1786. AN ?12 1835 cote D•
._ - - -
(3) "Arrêt du conseil d'Etat du Roi portant confirmatio~ et éb..blissement des
ports-francs dans le royaume" àu 14 ~~ai 1784. AN F1 2618.
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1
'. n y apprend que cette année-là, le sucrp b~~t d'Esnagne est entré par Nantes,
;:2.rseille et ?ayonne. Ceux de Flandre P;:Œ L,)D,01·:Y pn Lûrraine et par Valen-
ciennes en ?::'andre française.; CEèl:-: J.'Al~ë~?'i~':;e "'t cie :'c.l:->è'Tle par Strasbourg,
:·'etz et Ri:;tae1a; ceux èe Suisse par Strasbourg ",t C:::l.np?.rilLm et le sucre
terré des Eta-;s-Unis, par le port ct'\\.'. lla.vre.
Les statistiques incomplètes de 1793 confirment cette répartition: la
Flandre française et la Lorraine importent majoritairement leur sucre raffiné
àe la Flandre ~utrichienne :oute proche. La Lorraine surtout en reçoit
aussi d'Allemagne, de Pologne et de Hollande. Ce sont surtout les bureaux
de Forbach, Sarreguemines, Sierck et de Sé à Thionville qui importent
cette année-là le sucre alleme~d et polonais.
Le sucre hollandais est enregistré au bureau de Sarrelouis ; celui venant
de la Flandre, aux bureaux de Montmedy, Lon~~~, Sarrelàuis, Sarreguemines
et Sierck. La Franche-Comté importe son sucre de Genève et de Suisse.
D'une façon générale, les importations licites de sucres de l'é-
tranger sont moins importantes que les importations coloniales. En valeur,
el~ës donnent les résultats suivants:
Tableau n 0 64 - Valeur des imp3rt ôtt gps sugrières françaises de l'étranger.
1775-1789.
,
,
1
;années!Hollande!Flandre 'Les 4vines!' Russie!Angleterre!Allamagne!Suisse et;s
d i ;
,
!
,
,
, e t ,
' ar a gne,
!hanséatiques!
,,'Pologne
!,Genève
,
!
!
!
,
! .
!
,
!, 1775
14 863
6 458 ,
,
,
, 15
, 1776
19 404
9 603
110
!
!
, 1777
3 400
14 385 ,
16 to 1
, 1778
18 352 , 11 243
, 1779
12 237 ;228 186
2 135
13 797
1700
2 592 ;120 103
4 108
1782
4 570 ; 400 325
3 063
44
1B4
8 409
1787 ,178 000 ; 12 000
386 666
--'·1788 j 130 700 , 33 200
420 200
! 1789 ,161000 ! 46 000
482 000
Années
!Portugal ! Espagne
,
Totaux
!
1775
20 ~2 ~
1776
44 117
1777
, ~ 4 .~66
1778
79 966
; 10: 561
1779
1 230
. :57 ; 8:.
1780
7 500
! ~ ~ ~ ~C~~;
1782
23 841
25 c 95 !6')5 ~71
1687
3 025 ! 500 .84'3
1788
12 3('('
! 5Cl6 :lU'!
17Ro
, -'r'~
361
..- - - -
La Hollande, la Flandre autrichienne, l'Angleterre, l'Espagne et le Portugal
sont les fournisseurs étrangers les plus importants de la France. Toutefois,
les ventes sucrières représentent une part très négligeable des exportations
de ces pays en direction de la France.
Tableau no65 - Part des ventes sucrières dans les exportations de la Hollan-
de, la Flandre, l'Angleterre, l'Espagne et le Fortugal vers
la France 1775-1788.
,
,
!
!Annees!
HOLLANDE
, FLANDRE
ANGLETERRE
ESPAGÏ'-l'E
!valeur du
,part du;
!commerce
sucre;
C
S
C
S
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01
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%
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1775
19 19'2 004
0,08
! 11 518 182! 0, 06 115 215 271 !
27 671 487!
1776
2' 112 1T~
0,89
' 10 792 315! 0,09;13 281 868, -
35 558 536!
1777
'â 9!.lO 006
0,01
12 152 928! 0, 12; 8 486 655; -
36 105 523!,
1778
~2 066 341
0,08
13 377 947! ~,08; 3794 846;
24 304 61 9,
1779
2~- 207 657
0,05
16 765 552! 1,36; 2 683 698;0,51,28 666 400;
1700 r-24193 918
0,01
19 000 49O! 0,63;
• 443 173;0,93;15 375 522 ;
1787 ! 24 197 175
0,73
36 132 309! 0,03;28 979 100;1,33;28 979 100;0,01
1788 ! 23 320 000
0,56
30 037 700! 0, 11 ; 31 900 30011,32; 31 900 300 i0,04
1
!
PORTUGAL
!Années!
C
!
,
, S
!
(1 t)
01
!
!
/0
,
.' 1775 4 300 902
! 1776
3 976 327
1777
3 211 582
1778
3 082 952
2,59
1779
2 949 852
0,04
1780
7 644 100
0,10
17é7
8 873 450
1788
8 709 100
En résumé, on peut dire que dans la seconde moitié du XVIIIè
siècle, la France n'est pas tributaire de l'8tranger pour son approvisionne-
ment en sucres. Les introductions licites sont en quantité comme en valeur
particulièrement insignifiantes à côté des exportations de la France elle-
même. N'est-ce pas la condl'+l'on me'" e d l ' l'
t'
d'
,m
e
a rea lsa lon
une balance com-
v
merciale constamment favorable? El ~e s 'y'emploie en stimulant les eX"portation~
~~~~ LA STTI1ULATION DES EXPORTATIONS.
La France a eu une poli tique 21.d,:ri ère assez nette. Elle se !'ésume
sur le plan du commerce, en encouragements à l'exportation. Ces encoura-
gements sont de deux sortes
rembourse~cn~ d=3 d~oits en ce qui ooncerne
le sucre en pain et exemption de droits d'entrée en ce qui conoerne les
sucres bruts, les sucres terrés et le sucre blano.
Les sucres bruts coloniaux entrant en Fr8~ce sont soumis à deux
types de droit: le droit du domaine d'Oocident d'un montant de 3 % de la
valeur du produi t et le droit
d'entrée ou de consommation. La resti tu tion '
ne concerne que ce second droit, du moins jusqu'en 1786. Après le 25 Mai
1786, elle englobe l'ensemble des droits. Le sirop et le tafia qui sortent
pour l'étranger sont également exempts du droit d'entrée.
,-Le droit d'entrée ou de consommation, en tant que taxe som'p-
tuai~e sur les sucres
bruts, hausse le prix du sucre en pain. Fixé à ~t
10s par quintal de sucres bruts par les lettres-patentes d'Avril 1717,
il s'enrichit à partir de 1771 des sous pour livre appelés aussi droit
(
" , . ,
., . .-
additionnel. De 8 sous en 1771, il s'élève progres3ivement jusqu'à 10
en 1781, atteignant même 15 à Marseille. En somme, à partir de 1781, la
taxe s6mptuaire sur le sucre brut s'élève à 31t 15s : 21t 10s plus 11t 15s.
Elle serait même à 41t 8s 6d à Bordeaux (1). A ~arseille, elle est plu-
t5t à 41t 7s 16d et non 31t 15s comme dans les autres ports du royaume.
En retenant la norme réglementaire des 2251b de sucres bruts pour un
quintal de sucre en pain, l~s commissaires gén~raux du commerce, en 1786,
aboutissent à des droits de 141 t 12s' 11d' à Bordeaux et de 121 t 7s 6d
ailleurs par quintal de sucre en pain fabriqué.
La restitution à la sortie décharge l'étranger des droits d'entrée;
l'objectif visé, la concurrence l'oblig~, est d'~tablir le sucre en pain à
l'étranger au plus bas prix possible avec pour corollaire, l'augmentation
de l'activité du commerce d'exportation.
(1) "Causes de notre désavantage dans le commerce de nos sucres raffinés chés
l'étranger, moyens de le réparer".
2è mémoire des commissaires généraux
du commerce (1786).
A.;"J
F12 1639 A.
~-
C'est à Colbert Gu'cn doit cette mesure à'incitation à l'ex-
::ortation. Il s' agissai t 2.10:::'8 de concur- "ncer les Hollandais sur les
r~~rchés européens et de stimuler l' acti -Ii t~ du raffinage en F:::'2.I1ce. Elle
débute avec l'arrêt du 29 Se~tembre 1C7r. Le montant de la restitution
est de 61tpar quintal è.e sucre raffin,: exporté. A l '~po'1ue, les su~res
bruts sont taxés à 4lt par quintal. L2 restitution est ~ la charge des
fermiers généraux du commerce. Lorsque le droit d'entrée a été réduit
de moitié: 21t, le ~ontant de l~ restitution passe à 41t à l'issue de
l 'arrêt d~; 22 .Janvier 1671. Puis survient la crise de surproduction et
l'autoris.atior. du raffinage aux îles. Le tarif du
24 ~ai 1675 donne
m~me la p:::,éférence au sucre raffiné colonial (1).
Les raffineurs métropolitains s'agitent, les pressions se mul-
tiplient. C'est pour apaiser ce mécontentement grandissant que le gouver-
nement augmente le montant de la restitution en 1684. L'arrêt du 8 Sep-
tembre 1684 le porte à 9 It ; mesure couronnée par la prohibition du raf-
finage aux rIes 20 jours plus tard (arr~t du 28 Septembre 1684). C'est
une :lla.ni.àxe de donner la 'préférence au sucre raffiné en métropole.
En effet, au moyen de cette restitution, le raffineur est,dans une certai-
'Ut
mesure largement dédommagé. Il peut donc vendre sa marchandise à
meilleur marché hors de France.
En 1698, les sucres bruts sont soumis à un droit très modéré
par rapport à ce qui se perçoit sur les autres types de sucre
les su-
•
cree terrés sont taxés à 151 le quintal et le sucre raffiné à 221t 10s
le quintal. C'est pourquoi l'arrêt du 1er Septembre 1699 ramène la res-
titution à 61t 15s. Les lettres-patentes d'Avril 1717 modèrent encore le
droit des sucres bruts: il tombe à 21t 10s par quintal, la restitution
passe alors à 51t 12s 6d : 31t 15s par le fermier du domaine d'Occident
et 11t 17s 6d par le fermier général àes cŒnq grosses fermes (2).
( 1) Cf. SUlra p. 1 35.
12
(2) Lettres-patentes d'Avril 1717. Art. XXXI.
AN F
1639 A.
364
::otC't'ii-que la restitution s'effectue sur la base réglementaire des 225 lb
de sucres bruts pour un quintal de sucre en p2:~ comme 9 est à 4 et jamais
en proportion de la perception sur les sucres terrés. Les sucres vergeois
et candi ne sont pas aussi compris dans cette restitution (1).
Mais cette restitution est très discriminatoire. Les villes pri-
vilégiées pour l'exportation du sucre e~ pain donc jouissant de cette faveur
sont: Bordeaux, la Rochelle, Rouen et Dieppe. Les deux critères de sélec-
tion semblent avoir été que les raffineries soient situées dans un véritable
port de mer et que le port soit ouvert au Commerce des colonies. D'emblée,
tous les ports non compris dans la liste de 1717 en sont exclus. C'est le
cas pour Marseille qui n'intègre le groupe qu'en 1719, sans toutefois jouir
de ce privilège. Nantes et Orléans n'ont pu jamais en bénéficier. Nantes
cependant jouira de ce privilège en 1786, lorsque ".é'. Tlistitution sera.
éten-
due à tous les ports du royaume. Par contre, Cette y est inclu 7 mois après~r
un arrêt du conseil du 15 Janvier 1718 (2). Be sorte que, lorsque le sieur
Sabatier transfère sa raffinerie à Montpellier, son privilège reste intact.
Telle est do~ situation jusqu'au 25 Mai 1786.
Ltaugmentation en Angleterre de la prime d'exportation (26 shil-
ling le quintal) et la concurre!lce de plus' éh pIUs forte s'Ur les marchés
du Nord rendent le sucre en pain français très peu compétitif. Les exporta-
tions ne peuvent augmenter. En 1785, les raffineurs hollandais agitent
l'épouvantail de la concurrence anglaise. Le gouvernement est sensibilisé.
Il faut rechercher les causes du manque de compéti ti vi té du sucrEI en pain
français sur le marché, celui du Nord en particulier. C'est le début de la
consultation de 1786.
Les raffineurs.réclament, pour pouvoir soutenir la concurrence
anglaise et hollandaise, la restitution totale des droits plus une prime
de 41t par quintal de sucre en pain exporté (3). Les villes ne jouiss~~t
(1) Ils sont seulement francs de droit de sortie pour l'étranger et exempts de
tous droits de circulation dans le royaQ~e par l'Arrêt du 10 Mars 1763.
12
(2) Mémoire de 1777. N°140945. k'J F
1502.
(3) Causes de notre désavantage dans le commerce ie nos sucres raffinés •••
AN ::;,12 1639 A.
pas d~priVilège de la restitution à la sortie, réitèrent leur demande
d'intégration. Le gouvernement s'incline. Un arrr" d.~ 25 Xai 1786 stipule
"que les sucres rafinés (sic) dans les ports du royaume, jouiroient, lors
de leur exportation à l'étr~~ger, a'une prime de quatre livres par quintal,
et que les droits perçus sur les sucres bruts oui auroient servi à leur
formation, seroient remboursés en totalité, à raison de 225 livres de ~u
cre brut pour un quintal de sucre raffiné"(1).
La prime serait de 12 It (2),en 1791 elle est de 18 It le quintal (3) en
raison de l'inflation monétaire.
Avec la restitution de la totalité des droits et la prime de 4 It
par quintal, les commissaires du commerce, espèrent, en 1786, donner à la
France un avantage de 7 sous par quintal de sucre en pain sur l'Angleterre
sur les marchés du Nord (4).
Ainsi, le sucre en pain 4 livres qui vaut en France en 1786 821t
10s vaudra, déduction faite des 121t de prime, 701t 10s pour l'étranger (5).
Mais qu'on n~-trompe pas; la restitution n'est pas automatique et les
difficul tés pour se faire rembourser énormes.
-11- Les difficultés "de remboursement.
La restitution n'est pas automatique, avons-nous dit. Il faut, en
effet, attendre le retour de l 'acquit-à-caution qui certifie que les sucres
sont sortis du royaume sans avoir été débités en route. Il porte le nom du
raffineur, le poids du sucre : poids brut et poids net, et la destination.
Si le transport doit s'effectuer par mer, y figurent aussi, le nom du navire
et le capitaine du navire. Si le transport s'effectue par route, les bureaux
"Certificat de la regle des douanes de ~a république, encouragements accor-
dés au commerce, sucres raffinés".
1
ft"}TF
1932.
Observation sur un mémoire de Londres qui nous a été remis le 23 Septembre
1786. AN F12 1639 A.
"3tat des primes düe par le gouvernement aux raffineurs de Eordeaux cy a-
près dénommés pour les sucres raf1~és expédiés pour l'étranger jU8qu'~ l'
époque du 31 Juillet 1791".
AN F
1932.
._ _
12
Causes de notre désavantage dans le commerce de nos sucres ••• AN F
1639A.
~~~e source que la note 2.
successi"~~-Ciouane ou, en tout cas, le dernier bureau de douane(1), par
lequel les sucres doivent sortir du royaume, est me~+'ionné. Dans ce dernier
bureau, l'acquit-à~~ution est visé par les com~is et par les directeurs des
fermes, là où il y en a, selon l'article V des let~res-patentes d'Avril 1717.
L'acquit-~-caution doit être de retour dans un délai de 4 mois au plus tard,
fixé par les a=rêts du 14 Février 1730 et 2 Févrie= 1734, endossé du cer-
tiîicat des commis du dernier bureau de sortie, "portant qu'ils auront vérifié
et reconnu les plombs des dits balles de sucres sains et entiers et qu'après
la visite et pesée desdits sucres, ils les auront vu sortir pour aller à
leur destination". Ce document doi t être signé.
QQand les sucres sortent par mer, l'acquit-q-cqution est d'abord
visé par le commis préposé pour l'embarquement indiquant que la quantité
déclarée est effectivement embarquée dans le navire. Les receveurs et con-
trôleurs du lieu de débarquement, et le consul de France, s'il y en a en ce
lieu, doivent certifier que le sucre mentionné sur l 'acquit-à-caution y a
été déchargé sans fraude. L'acquit-à-caution revêtu de toutes ces signatures,
est à rapporter au lieu d'embarquement dans un délai de 6 mois, visé par les
visiteurs de mer de Blaye (2).
(1) Les sucres en pain ne peuvent sortir que par les lieux ci-après dénommés à
l'article XVIII des lettres-patentes d'Avril 1717.
- ceux destinés pour les ports d'Espagne, situés sur la mer méditerranée,
par les ports de Cette et d'Agde.
- ceux qui sortent du ro:rp.ume par terre pour l'Espagne, par les bureaux de
Bayonne, du Pas de Beobic, Afcaing et Dainhoa ;
- ceux destinés pour l'Italie par les ports de Cette et Agde;
-ceux destinés pour la Savoie et le Piémont, par les Bureaux du Font de
Beauvoisin et de Cahmparillan ;
- ceux destinés pour Genève et la Suisse, par les Bureaux de Seissel et
Coulonges ;
- ceux destinés pour la Franche-Comté, par le Bureau d'Auxonne;
- ceux destinés pour les trois Evêchés, la Lorraine et l'Alsace, par les
bureaux de Sainte ~enehould et Auxonne ;
- ceux destinés pour le pays-Bas autrichien (Flandre autrichienne), par les
bureaux de Lille et de Maubeuge.
(2) Cette indication figure sur un acqui t à cau tian de :Bordeaux pour des su-
cres déclarés pour Hambourg. Nous ne savons pas si elle est valable pour
les autres ports exportant vers le Nord.
3/~
Of
Toutes ces pr~autions visent à p~évenir la fraude: on veut éviter
que
les raffineurs ne perçoivent ces remboursements pour des sucres débités dans
le royaume.
Le retour de l'acquit-à-caution dans les délais prescrits ne ga-
rantit cependant pas le paiement immédiat des droits et primes. Les mar-
chands ou les raffineurs, en vertu de l'article l de l'arrêt du conseil du
14 Août 1740, ne peuvent "demander la restitution des droits payés jusqu'à
ce que la diligence de l'adjudicataire des fermes, les signatures des certi-
ficats aient été vérifiées et reconnues véritables, laquelle vé~ification
l'adjudicataire sera tenu de faire dans les 4 mois pour tout delai à compter
du jour du rapport de l'acquit-à-caution all bureau du lieu de départ"(1).
Délai de rapport de l 'acquit-à-caution et durée de la vérification retardent
étrangement la restitution: le négociant doit attendre entre 4 et 10 mois
pour percevoir le remboursement des droits et sa prime d'exportation et non
6 mois comme l'observent les représentants du commerce du Havre (2).
Car il faut compter avec les multiples difficultés que l'adjudi-
cataire général '-des fermes ne manque pas d'élever pour le retarder ou l ' élu-
der.
La jalousie ffiesquine née de la contradiction des intér~ts est à la
base de toutes ces difficultés élevées par la ferme. Il est parfaitement
clair que le remboursement des droits diminuant ses bénéfices, elle cherche
toutes les raisons possibles non seulement pour retarder mais aussi et sur-
tout pour restreindre les paiements. TOutes les opérations de vérification,
pour légitimes qu'elles soient,tendent visiblement vers ce but. Dans ces
conditions, le plus léger défaut de formalité décelé est un prétexte suffi-
sant pour refuser le remboursement des droits. Pour masquer ces prétentions,
la ferme considère la restitution à la sortie comme une gratification en
-----T(T)-llLettreâes représentants du comT:lerCe du Havre 20 Vai 1786". Alœ 12 1639.
(2) Idem. Cette allusion à 6 mois n'est cependant pas une erreur. La percep-
tion du droit de Domaine d'Occident variant chaque année suiv?-nt les ~va
luations des denrées coloniales, il fallait déterminer une époaue qui
servirait de règle pour la liquidation de ce droit lors du remboursement
ct 'où les 6 mois.
- - - -
faveur du r.é&:"Ociant et j3JTlais comme une juste rétribution des droits. La
question de ---
la conquête de marché à l'extérieur est sacrifiée au profit des
intérêts de cette entrepri se. Dl moins, on se trouve là--en-présence ct 'un
cercle vicieux créé par le pouvoir royal lui-même. En effet, appelée à sa-
tisf~ire les incessants besoins d'argent du roi, la ferm~ ne f~it que récu-
pérer sur le commerce ce qu'elle a cédé au trésor royal malgré elle.
Mais, en dépit de ces difficultés, le remboursement
des droits
et le paiement des primes a lieu jusqu'en Février 1791. Un état de ces pai-
ments intérieurs à cette date est cependant impossible à établir, faute de
renseignements. Tbut semble indiquer que tant que cette législation a fonc-
tionné à peu près correctement, on s'est moins préoccupé de dresser des
états généraux de paiement. Ces états n'apparaissent qu'après la suspension
implicite décrétée par l'Assemblée Nationale le 25 Février 1791 (1) :
toute dépense de ce genre devrait être autorisée par une loi particulière.
Or, depuis la Révolution, aucun décret particulier n'était venu confirmer
ces encouragements dus aux raffineurs.
Il n'est cependant pas impossible que la détresse financière qui
n'a cessé d'empirer depuis la convocation des états généraux (fin 178~1ai
1789), ait été la cause profonde de cette décisiqp des çonsti~~~s.
Cette interruption des encouragements ne vient pas à propos : elle survient
au moment où les mauvaises récoltes aux îles, dues auxtroubles révolutionnai-
res et la politique inflationniste appliquée, font monter les sucres à des
prix absolument excessifs (2). Rembourseffient des droits et paiement des
primes s'avèrent par conséquent nécessaire ••
Les négociants posent aussi le problème du montant de la restitution.
Un arrêt du 29 Mars 1791, qui devait prendre effet le 1er Avril, l'a ramené
(1) La loi du 25 Février 1791, en fixant la somme à verser au trésor public,
-.pou-r--l-e.s dépenses de cette année, et en mettant au nombre de ces dépenses,
les primes et encouragements du commerce, a ordonné en même temps art. 5
"qu'aucun emploi des fonds publ:'cs, ne pourrait être fait et alloué que
d'après les décrets rendus ou a rendre sur 2::'aque article, en particulier"
l
cf. Mémoire, 30 Janvier 1793 (n o 439). A..~ F
1653. Il semble cependant que
ces primes aient été payées jusqu'en 1789 seulement_.
_
(2) Voir "pra p. 405.
à .Ut 15s'.lors ~ordeaux, les droits sont de 12~+, 16s 9d sur les
','1
" ~ ~
....
225 lb de sucres br-lts (1). C'est insuffisar.t. Cette'E'su::-e ~1isetrès
largement ces raffineurs dont la production de sucre ~r. rain a été depuis
toujours tournée vers l'exportation. InformÉes du futu::- ~ontant des rembour-
sements, ils adressent, le 2 Mars 1791, une pétitior. à l'as~emtlée ~atior.ale
dans laquelle ils réclament la restitution de la totalité des droits ac-
quittés à l'entrée des sucres bruts ayant servi à la fabrication du sucre
exporté et une JlDime d~ ,il t.
L'idée essentielle de cette pétition se rés~~e en ces points. Avant
l'arrêt du 25 Mai 1786, les raffineurs étrangers, favorisés par l'économie
de leur rr.ain-dJoeuvre et les secours éclairés de leurs gouvernements (2),
avaient déjà exclu les Français des marc~és de la Suisse et de la Savoie,
principaux débouchés du sucre raffiné français. Ce que la prime de Mai 1786
est venue réparer : elle a relevé par degré cette branche du commerce. De
plus, même si elle ne donne pas aux Français l'avantage sur les étrangers,
elle leur fournit au moins ,le moyen de supporter leur concurrence.
Ai::si, "retirer aujourd 'tm±-ce léger encouragement, ce seroi t renoncer
volontairement aux heureux effets qu'il a produi ts jusqu'à ce jour, ce seroi t
annoncer la ruine des raffineries du ro:~urne et plonger dans la misère un
î
(
nombre considérable d'ouvriers dont le travail est l'unique ressource'~3).
1
1
1
On retrouve ici la méthode habituelle des négociants qui est de
1
camoufler les intér~ts particuliers derrière l'intérêt général. Sachant
i
qu'avec la diminution des droits de consommation sur les sucres bruts
1
fixés par le nouveau tarif
. ; le remboursement des droi ts sera moindre à
>i
l'avenir que par le passé, cependant que les magasins sont remplis de sucres
ayant acquitté les droits sur le pied de l'ancien tarif, ils demandent que
ce remboursement se fasse ·sur l'ancien pied jusqu'au mois de Juillet prochain"
(1) "Lettre du Ministre de la contribution publique à }flor. Laffon, député à. l'As-
semblée nationale du 16 Août 1792, l'an l de la liberté". AN F12 1932.
(2) Cela s'adresse plutôt aux Anglais.
0) (4) "Péti tion des raffineuil7s de Bordeaux, adressée à l 'Assemblée ~'ationale
2 Mars 1791". AN F 12 652.
370
En clair, ~ordelais réclament l'ancien montant de la restitu-
tion, en partiGUlie-:rpcur-le sucra expédié à l'é.tranger jUSqu'2:' ;1 Jui-l-let
17~1, c'est-à-dire pendant quatre mois après la promulgation de la loi du
29 J.iars 1791.
15 firmes bordelaises sont touchées par cette mesure. Pour le suc~e en pain
exporté à l'étranger jusqu'au 31 Juillet 1791, le gouvernement leur doit:
3î;: ("nlt 16s(1). Une autre source donne 3'22 0921:t., dont :? li 7 2341t de rem-
boursement de droit et 11 ?5~lt r~ 0rime(2). Les intéressés sont:
Tableau n o 66 - Noms des raffineurs et primes dues par le gouvernement Dour le
sucre en pain exporté à l'étranger jusqu'à l'énoque du 31 Juil-
let 1791 (~).
Noms des raffineurs
! Nombre
! Ports des sucres
!Taux de!Total des sommes
! d' acqui t-! exportés à l ' étran-!
la
! dues pn~~ le gouver-
!à-caution!ger jusqu'au 31
!prime
nement (en It)
!
!Juillet 1791(en lb)!
' !
!
'Paul Jean Nairac et P e r r e t ,
, à
,
let
40
'
-294 918
'181 tLe%;
53 096
Pierre Sorbé et fils
eB
!
238 419
!
'
~l2 ???
J.J. Rabaud et Cie
,
14
51 231
!
9 222 136
Lassabathié et fils aîné;
23
156 982
!
,
28 256 15
Burette oncle et neveu
'
15
144 866
. (e-"'!"II'!6,,",eM'~~""11~-'
!
Veuve Pierre Nairac et
!
fils
,
44
202 830
36 509
4
!
Dubreuille Gaubert et Ci~
8
77 031
4 865 11
!
Baour et Cie
38
159 988
28 191 16
!
, Veuve Lafitte l'aîné
1
5 413
966 13s 1d
!
.'! F. Couderc et Cie
23
193 610
34 860 12
!
! Durand frère
22
134 131
24 144 13
! P. Dinety et fils
11
91 145
16 406
2
! Bonafoux Fabre et Cie
11
54 232
9 761 15
Tabays et Boulet
2
12 983
2 536 16
9
Antoine Defos et Cie
1
2 313
416
6
8
820 284 lb
318 843 17
0
Etat des primes dues par le gouverrlement aux raffineurs de Bo~deaux cy a-
près dénommés-pour les sucres rafinés expédiés pour l'étranger jusqu'à
l'époque du 31 Juillet 1791. AN p12 1932 •
"Lettre des raffineurs de Bordeaux au Ministre de l'intérieur 29 SeptemoT("
17 92". ANF 12 1932 •
Même source que note (1).
-
Le total des sommes dues est légèrement superleur à ceLli annoncé. Il s' aF,i t
d'une simple erreur de calcul de la part du commis.
8 des 15 firmes sent les plus touchées. Ce sont, ?ar ordre d'impor-
-.-"
tance, tant par la quanti té de sucre exporté que par les SOD:IJ1ee dues
p. J.
~::::
.. _--_._-,-
Nairac et Perrelet, Pierre Sorbé et fils, veuve Pierre ~:airac et :ils, belle-
so.ur de Paul Nairac, François Couderc et Compagnie, Baour et Compagnie,
Lassabathié et fils aîné, Burette oncle et neveu, Durand frère, p. DLle"~y
et fils. L'appel des raffineurs n'est pas entendu, tout comme d'ailleurs
celui des armateurs négriers. Le.paiement des primes en 1791 est ordonné
pour d'autres marchandises: la morue, le hareng (1). La loi du 27 ~ai 1792
accorde à tous les armateurs qui se livreront à la p~che de la baleine et
du cachalot dans les mers du Nord et du Sud, une prime de 501t par tonneau
de contenance des navires baleiniers (2).
Cette incompréhension à l'égard des raffineurs paralyse les raffi-
neries. Dans une lettre adressée à Blondel, vice-président du comité du
commerce et d'agriculture (3), le 15 Décembre 1791, les raffineurs bordelais
nous apprennent que sur les 25 raffineries existantes, 18 ont déjà cessé
leurs travaux. Ils réclament donc à
nouveau le paiement des primes (4).
Les raisons de ces difficultés faites -aux raffineurs et aux armateurs n~-
griers sont mal éclaircies. Est-ce l'action de la Société des Amis des Noirs?
..
Rien ne nous permet de l'affirmer pour le moment. Même la loi du 16 Août
1792, relative aux primes et encouragements accordés au commerce ~(I.t~~~OJ~'~
__
autorise suffisamment le ministre de l'intérieur à faire jouir les négo-
ciants de la prime relative à l'exportation du sucre en pain, est considérée
trop générale (5). Blenavant, le 4 Avril 1792, le ministra de l'intérieur
•
répondait à ces mêmes raffineurs que les primes sur les exportations faites
avant le 25 Février 1791 n'étaient pas de son ressort (6). Plus tard, le
4 Décembre 1792, il les renvoie à la Convention Nationale et à la èontribu-
tion publique (~Ü doit-donner les ordres au directeur de la douane pour le
paiement de ces primes. On est bientôt en 1793.
(1) ~a loi du 10 Avril 1791 confirme les primes accordées à la pêche de la moruf
(31t par quintal) et à la pêche du hareng(61t par baril de hareng de pêche
f,rançalse exporteen Su~sse,-auPo:rtugal, en Espagne, en Italie, au Levant
et dans les colonies françaises de l'Amérique.
(2) "Etat des primes, gratificati9~s et encouragements acco~dés au cor.:merce de
la République française. AN F
1653.
(3) Séances d~2comité central d'administration du commercp. du Jeudi 3 "-~€
1791. ANF
113(1).
Lettre des raffineurs à Mr Blondel, 15 Décembre 1791.
Mémoire Traite des Noirs 30 Janvier 1793. Ali p12 1653 .
Ministre de l'intérieur aux raffineurs de !1ordeélllx, Paris 1", 4 A'l~:l 1792.
12
AN F
1932.
Un mémoi re du 30 jan-'~1-93 nous apprend o.ue le comi té de commerce
doit faire très incessa.mner:t un rapport à ce sujet à la Convention natioIi2~__
C'est à la suite de ce mémoire qu'est définitivement réglé le problème des
p~imes et encouragements relatifs à la traite des roirs et à l'exportation
du sucre en pain. Le décret de la Convention Nationale sort le 2 Février
1793 (1). QQant au problème de la quotité des droits à rembourser, il a été
réglé par la décision·du V:inistre des contributions publiques du 14 Sep-
tembre 1792. Il ordonne, er: effet, que les droits seront remboursés sur
l'ancien pied, c'est-~-dire, selon les dispositions de l'arrêt du 25 Mai 1786,
pour les sucres, sortis jusqu'au 1er Octobre 1791 (2). TOutes les difficul-'
tés levées, les négociants peuvent enfin recevoir le remboursement
des
droits payés et le paiement des primes d'exportation.
:';'1
a ) Le r~bo~se~n.:Len_179.L..
·:;;:1
2
Les difficultés levées, les raffineurs.munis des certificats des
régisseurs nationaux des douanes, n'ont plus qu'à attendre les décisions du
.-
ministre de l'intérieur autorisant la trésorerie nationale à payer les sommes
1
dues. Le certificat de la régie nationale des douanes constate que les
formalités exigées par l'arrêt du 25 ~ai 1786 ont été remplies. Il nfest de-
livré que sur présentation des acquits-à-caution. Les raffir:eurs bordelais
dont l'activité a abouti à cette solution heureuse peuvent enfin recevoir
le remboursement des droits perçus et le paiement de la prime. Le
•
tableau suivant résume l'état de ces paiements en 1793.
(1) "Décre t de la Convention-nattonale-du deux février 1793". AN F12 1653.
(2) "Certificat de la régie des douanes de la Républiques. Encouragements accor-
dés au commerce sucres rafinés". AN F12 1932.
373
Tableau n067 - Etat des payements de primes et de remboursements de
droits sur les S~6 raffinés exportés à l'étranger'1793J
,
1
1
iDates des
:nom des
1 quantité 1
totaux
ltotaux
1 totaux
Idécisions dUlexpéditeurs 1
des
1
des
Ides rembourse-
l'généraux
lministre
quintaux 1
primes
laeats'des droitsl
1
1
1
1-----...;~-----..;I-----!It------lr--------....t.l-----
1
1793
1
1
1
17 mai
l Ant • Desfos 1
23q~1f~
92.10. 41
297.
..2
389.10. 6
1
idem
lBaour et Ciel
239 .32 1
957. 5. 51 2 164.15. 6
3 122 • • 11
1
Il
IDu"!at Beau- 1
302. 6 !1 208. 4.101 1 437. 2. 7
• 1 2 635. 7. 5
1
Ifreres
1
1
1
1
IJ.J. Rabaud
294 .59 ~1 178. 2. 4: 3 666.10. 1
1 4 784.12. 5
1
"
let Cie
1
1
1
1
l
' .
1
1
IDurand Frère~' 768 .27 13 070. 1. 7
9 716. 7. 4
112 789. 8.11
1
"
1
1
1
•
1
1
1
I J • Burette
1
164
1
656
2 106. 1. 3
1 2 762. 1. 3
Il
1
10ncle et ne-l
1
1
1
1
Iveu
1
1
1
1
1
1
lEichoff
:
262 • 9 11 048. 7. 21 1 238. 7. 4
1 2 286.14. 6
1
"
1
lCouderc et
1
604 .55 12 416. 3T~0! 7 767.10.11
110 173.14. 9
1
1
1
:Cie
1
1
"
1
1
1
1
1
...
IBonafoux Fa-
11 238. 3.101 3"975. 4. 4
5 213. 8. 2
1
l
309 .55
1
1
"
Ibre et Cie
1
1
1
,
1
:J.P. Nairac 11 671 .70 ~6 686.15.11117 804.17.
124.49Q 12 11
1
"
let fils
1
1
1
1
1
1
IPaul Nairac ~î 394 .19 ;5 696.15. 2
:22 373.15
1
Il
116 796.19.10
let Perrelet 1
1
1
1
1
1
:Lassabathié 11 182 .12 14 728. 9. 6 115 180. 9. 2
119 908.18. 8
•
1
let f i l S ;
~
1
1
"
1
1
1 1
ITanaye Bouler
72 .99
298.12
936. 2.11
227.14.11
1
1
1
"
1
Il.Sorbé et
11 -52? .98 16 111.18. 4!19 589.11. 5
125 701. 9. 9
1
1fils
1
1
1
1
- - "
- - - -
1
1
1
1
1
"
~Dinety et Cit 549 .35 12 197. 7.11 5 861.16. 9
8 059. 4. 8
1
1
1
"
!Baour et Ciel
564 .17 1~ 256.13. 71 7 244.19. 9
1 9 501.13. 2
1
1
1
1
1
IBurette et
1
1
459 .54 !1 838. 3. ,1 5 901. 4. 7
7 739. 7. 8
1
1
"
lneveu
1
1
,
1
"
lDin~ty
1. -159.18 1
636.14. 4 i 2 044. 2. 4
2 600.16. 8
1
lJ.J. Rabaud
49 .56
198. 4. 91
636. 8. 6
1
834.13. 3
1
"
let Cie
1
,
1
1
8 028. 9.
! 10.529. 3. 5
iBurette on- 1
1
625 .18 12 500.14. 51 8 028. 9.
110.529. 3. 5
1
lcle et neveu
1
1
1
"
l
1
1
"
lDinety et Cif
78 .74 1
314.19. 21 1 011. 2. 9
326. 2.11
1
1
1
1
1
11
178 531.11.10
•
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• 1
·~._.
Ce document renseigne ~ple~E~t sur la chronologie des décisions
de p-a:ierrH:;nt--~înisès par le ministre, ;::.insi c.ue sur le :1ombre de décisions ren-
dues. Quatre mois semblent avoi~ suffi
a liquider cette question: de Fai
à Août. Mais le plus grand nombre de àécisions ont été rendues en Mai et sur-
tout en Juin.
17 Mai
1793
13
décisions
20 Mai
2
28 Mai
4
11 Juin
5
17 Juin
7
•
24 Juin
8
27 Juin
4
25 Juillet
1
6 Août
2
56 décisions
Au total, 56 décisions sont rendues de Mai ~ Août dont 19 en Mai
et 24 en Juin; les trois dernières sont rendues, une le 25 Juillet e~ les
2 autres le 6 Ac~t. Elles concernent surtout les raffineurs bordelais dont
les noms ont été précédem~ent cités(1). Deux noms étrangers apparaissent dans
le tableau, celui du sieur Eichoff, propriétaire de la raffinerie d'lngon-
ville et les sieurs Duval frères, propriétaires de la raffinerie de Harfleur~(.·
~
Eichoff et Duval frères sont négociants au Havre.
Les primes et remboursements relatifs aux exportations faites
avant le 25 Février 1791 font partie de l'arriéré. 10 des 56 décisions con-
cernent ce C28 : les R dfcisions du 24 Juin, plus les 2 décisions du 6 Août
i
:,;,,:1
soi t 24 35:.1 t 7s 10 ; cela représente 8 5/ des sommes payées. Dinety et Com-
,"r[
pagni~.
Couderc et Compagnie, Etirette et neveu, Paul-Jean Nairac et Per-
1
relet, Lassabathié et fils, Veuve Paul Nairac et fils, Baour et Compagnie
:onafour Fabre et Compagnie, Dubreuille Gaubert et Compagnie et Durand frè-
res, en sont les bénéficiaires. Il s'agit d'exportations faites en 1789 (2), en
1790, en Janvier et Fév~ier 1791. Celles-ci ont lieu jusqu'en 1792.
(1) Dubreuille Gaubert: 400 lb, 'île de France, Dinety et Cie:5 407 lb à :3u~
ges, Durand frères:
Î
112 lb dont 362 à LorÙnt étranger et 756 au 3én4g51.
'-1
(2) A l'exception de Veuve Lafitte. Le gouvernement lui devait pourtant 966lt
13s 7d.
--i
1
376
ô - . - - -
Mais ce tableau permet aussi de réaliser l'objectif de la présente
étude. Il permet de chiffrer la quanti té de sucre exporté p<::.r les bordelais
et les havrais depuis l'arrêt du paiement des primes et remboursements jus-
qu'en 1793. Il conduit aussi à chiffrer les primes et les remboursements.
Un tableau qui synthétise les informations éparses fournies précédemment est
nécessaire. Les exportations bordelaises y sont privilégiées.
Il permettre
de mesurer les progrès accomplis depuis le 31 Juillet 1791.
Tableau nO 68 - Tableau synthétique de l'état des paiements des primes et des
•
remboursements de droit en 1793 (Bordeaux).
Q;uanti té de
Prime de 4%
remboursement
Total (en l (
sucre (lb)
(en l t)
des droi ts
s
d
P.J. Nairac et Perrelet
310 949
!12 437 19
1 ;
38 824 10
5J ;U;2
9
1
Veuve P. Nairac et :ils
250 244
!10 009 15
1·
28 472 19 10
38 482 14 11
Pierre Sorbé et fils
238 979
! 9 559
3
2 ,30 656"15
5
40215187
Lassabathié et fils aîné
179 382
! 5 447
5
6 ~~7 488
1
22 935
6
6
J .J. Rabaud
53 402
! 2 136
1
5
6 68{ 16
4
8 817 19
9
Burette oncle et neveu
144 313
! 5 772 10
4
18 532
5
3
24 304 15
7
F. Couderc et Cie
157 025
! 7 799 19
9
25 045
4
3
32 845
4
Durand frère
128 868
! 5 154 14
4
16 396 10 11
21 551
5
3~
TanflYs et Boulet
12 983
516 19 '2
1 666
1
1
2 185
3
1
Bonafoux Fabre et Cie
57 918
2 316 14
2
7 437 13
7
9 754
7
9
Baour et Cie
166 114
7 644 10
9
20 423 10
9
28 068
1
6
Dubreuille Gaubert et Cie!
18 352
734
1
7
2 355 14
6
3 089 16
1
P. Dinety et fils
! !
105 840
4 233 11
9
12 386
1
3
16 619 13
,
•
Antoine Defos et Cie
2 313
92 10 14
297
2
t
389 11
4
,
,
1 826682
;73 857 17
3
226 664
6
4 1300 522
3
7
!
Ce tableau fait apparartre des différences plus ou moins importantes entre
1•• chiffres connus par les estimations du 31 Juillet 1791 et le total des ex-
portations, des primes et de~ remboursements en 1793.
Au niveau des chiffres d'exportation, on relève que, selon les maisons, les
ex-portations sont supérieures , inférieures ou identiques aux estimations de
1791. Dans le premier cas, se trouvent les maisons Paul-Jean Nairac et Perrele~
...,...,
3 1 ;
avec un excédent de 15 971 lb, veuve Pierre Nal~t fils avec 47 414 lb de
plus qu'au 31 Juillet 1791, Lassabathié etfi·ls aîné avec 22 400 lb de plus,
P. Dinety et fils avec 14 695 l~ de plus, Baour et Cie avec 6 126 lb de plus,
Bonafoux Fabre et Cie avec 3 686 lb de plus , Rabaud et Cie 2vec 2 165 lb a2
plus, Pierre Sorbé et fils avec 500 lb de plus.
Les cas d'augmentation des exportations montrent que la s~spension
momentanée du paiement des primes et des remboursements n'a pas arrêté les
expéditions de sucre vers l'étranger. Ce progrès féj.it apparattre àonc la ca-
.
.
~acité de résistance de ces maistons face aux difficultés financières et a~
.
es
risque-commercial. La rel?tÏ0!': étroite entre le niveau de fortune et la résis-
tance au risque commercial. Les ralaons sociales permettent de penser que ces
maisons concentrent des fortunes importantes, souvent renforcées par la soli-
darité familiale.
Veuve Pierre Nairac et fils, J.J. Rabaud, Paul Nairac et Btour fils appar-
tiennent également au groupe des armateurs bordelais. Chez Paul Rairac et sa
belle-soeur Veuve Pierre Nairac, le raffinage du sucre ne.représente qu'un
complément de l'armement (1). Enfin, en dépit dés diffrmrltBs créées par les
événements révolutionnaires, les encouragements à l'exportation n'ont pas
été officiellement abrogés, de sorte que les expéditions de sucre
se sont
poursuivies au delà du 1er Octobre 1791. C'est la preuve que la bourgeoisie
constituante a, une fois de plus, cédé sous la pression des milieux d'affai-
res(2).
En 1791, Paul-Jean l,airac et Perrelet poursui vent leurs expédi tions
jusqu'au 20 Octobre • .'Ils effectuent deux expéditions à Neufchâtel en Suisse
le 19 Juin 1792, dont ils obtiennent primes et remboursements de droits. Le
31 Janvier 1792, la maison J.J. Rabaud et Cie fait ~ne expédition de 2 165 lb
de sucre en pain à Ostende. Cela rapporte en prime et en remboursement
(1) BUTEL (P.), Les négociants bordelai-s,- l'Burone et les rIes au XVIIIè siècle,
pp.286 et 290.
(2) En 1791, le groupe de pressions des intérêts coloniaux a réussi à mAintenir
l'exclusif, l'esclavage et obtenir des droits nolitiQues aux hommes de cou-
leur libres. Cf. SOBOUL '(A.), Histoire de la R6volution française, de la
Bastille à la Giranèe, Tome I, p.2~5.
1 .:El t 17s ·Cà. C'est aussi le cas de la mai son Yeu '~erre Nairac et fils.
En Î 791, e11e_ poursui t ses expéditions jusqu '~u 23 Décembre. Elle effectue
sept autres en 1792 : le 17 et le 21 Janvier, le 17 et 28 Février, le 14
Mars, le 12 Avril et le 18 Mai. Cela représente 28 865 lb. Les eXTéditions
de la maison Baour et Cie en 1791 s'arrêtent le 23 Novembre pour reprenàre
les 7 Janvier, 10 et 16 Mars 1792.
Ces trois expéditions portent sur un total de 4 840 lb de sucre en pain à des-
·~ination de Morges • 3 640 lb les 7 Janvier et 16 Mars, et de Genève : 1 2001b
le 10 Mars.
Les expéditions de la maison Bonafoux Fabre et Cie se déroulent exclusive~
ment en 1290 et en 1791. Les acquits-à-caution signalent trois expéditions
en 17']) : le 14 Cctobre, le 29 j;ovembre et 6 Décembre. Le sucre est expédié
~ destination de Saint-Sébastien, à Bruges et à ~esançon. En 1791, on note
~ expéditions depuis le 1er
F~vrier jusQu'~~ 16 Août.
La dernière maison, Pier~e Sorbé et fils fait 3 expéditions en 1790, 25 en
1791 du 7 Janvier au 30 Juillet et une expédition le 3 Mai 1792 à Chambéry.
La quantité de sucre exporté est relativement faible
400 lb.
Deux maisons: Tanays Boulet et Antoine Defos et Cie, n'ont pu
faire d'autres expéditions que celles déclarées au 31 Juillet 1791. Les
2 313 lb de sucre déclarés
par Antoine Defos et Cie ont même été expédiés
le 20 Octobre 1790. Ce sucre est déclaré pour Chambéry. Les primes et rem-
boursements exigés font donc partie de l'arriéré. La maison Tanays et Eoulet,
l'année suivante, n'a pu effectuer que deux expéditions seulement. La pre-
•
mière, le 19 Février et la seconde le 15 Avril. Cet arrêt des expéditions
est révélateur des difficultés signalées par les raffineurs eux-mêmes, à
savoir la chute des raffineries face au prix excessif des sucres et à l'in-
terruption du parement des primes. Il est vraisembla.ble qu'elles figurent
au nombre des 18 raffineries qui, en 1791, ont cessé leurs travaux.
Reste le dernier cas, la diminution des quantités connues grâce a
l'évaluation du 31 Juillet. Quatre maisons ~oJ1,{_con.c_ernées par cette si tua tian
3 ~o
l,
~ -
Burette oncle et neveu, F. Couderc et Cie, Durand frère, Dubreuille Gaubert et
Cie. ~ais Dubreuille Ga.ubert et Cie et F. Couderc êt Cie en sont les plus
affectées. La première perd 58 679 lb de sucre par rapport à l'état de 1791
la seconde en perd 36 645. Durand frère n'en perd que 5 269. ~ais c'est
surtout Burette oncle et neveu qui subi t une perte ..,lus modérée
553 lb.
Cette diminution des évaluations surprend d'autant plus que les eÀ~éditions
se sont déroulées,à ce qu'il apparaît, avant et après le 31 Juillet 1791.
Les grandes phases de la chronologie des expéditions sont les
•
sui vantes
Burette oncle et neveu : du 23 Septembre au 7 Décembre 1790
du 23 Février au 9 Juillet 1791
Durand frère: du 28 au 30 Septembre 1789
4 Octobre 1790 : du 28 Janvier au 20 Septembre 1791 et une
expédition le 24 Mai 1792 portant sur une quantité de 1 847 lb
de sucre en pain.
F. Couderc et Cie: du 29 Septembre au 30 Décembre 1790
du 18 Janvier au 23 Septembre 1791
Dubreuille oncle et neveu: le 24 Septembre 1789 ; 7 Février, 22 Septembre, 3
Novembre, 16 Décembre 1790.
La régie des douanes ne fournit aucune explication à ce sujet. Or,
la signification de cette situation paradoxale mérite d'être dégagée.
?aute d'explication, nous ne pouvons qu'émettre deux hypothèses.
•
Premièrement, on peut penser que les chiffres ini tiaux ont été eXE,gérés
par
les négoCiants. Deuxièmement,> on peut penser que la diminution des chiffres
initiaux correspond au rejet par la régie des douanes d'un certain nombre
d'acquits-à-caution pour défaut d'accomplissement des formalités nécessaires.
Celle-ci est la plus acceptable, car, compte tenu des formalités diverses
et rigoureuses imposées par les dispositions des arrêts d'encouragement à
l'exportation, les né,lrociants peuvent faire difficile~ent de faussses ctécla-
rations.To.ute d'émaz-c'hede cette nature peut être immédiatement détectée et
réprimée. t~'est-ce pas pour prévenir ces fraudes que dIverses signatures sont
nécessaires pour valider les acquits-à-caution? Les primes et remboursements
ne sont accordés qu'après leur acceptation par le ferme puis, après 1791,
:" .
par la régie des douanes nationales. S'ils sont refusés, prim'ô-et restitu-
tions ne peuvent ~tre pa~~es et les sucres exportés, enregistrés.
}'lais c'est le montant des primes et remboursements qui fournit la
plus grande surprise. Le niveau de 1791 n'est pas atteint. La différence est
de 17 354.Jl.t19~ 10d (1). Ainsi,à l'exception de la T.ais~m F. Dinéty qui
perçoit2t3U.t11s' de "plus «;:ne lemo-ntant de-
l'évaluation du 31Juillet
1791,toutes les autres voient les primes et remboursements diminuer_
.Le montant et le taux de ces dilT'inutions sont les suiva,n':s
Tableau n069 - Montant et taux des diminutions.
Montant de la perte par rapport
à l'évaluation de 1791
C ; - - "
P.J. Nairac et perrelet
1 834 It
8 s
1 1 d
3,45
Veuve Pierre Nairac et fils
1 973
10
11
5,40
Pierre Sorbé et fils
2 791
1
5
6,31
Lassabathié et fils aîné
5 321
8
6
18,83
J.J. Rabaud et Cie
404
13
3
4,38
Burette oncle et neveu
1 771
1
5
6,79
F. Couderc et Cie
2 015
8
5,78
Durand frères
2 593
8
10,74
Baour et Cie
729
14
6
2,53
Dubreuille Gaubert et Cie
775
14
11
36,48
Bonafoux Fabre et Cie
7
7
3
Tanays et Boulet
' :
351
18
6
13,84
Antoine Defos et Cie
26
15
4
6,25
La décision du ministre des contributions publiques du 14 Septembre
1792, autorisant le remboursement des droits conformément aux dispositions de
(1) Nous n'incluons pas dans ce calcul les primes dues à la maison Veuve Lafitte
l'a!né.
3E1
l'arrêt du 25 Mai 1786 (1) pour tout ce oui pst dû depuis le 1er Ja: ..').;Î.8r
jusqu'au 1er Octobre 1792, on s'attend d01C· davantage à une 5.Uf""Tlent?tioJ'
ou'à une diminution des sommes dues
• Co~me~t l'exnliauer ?
Les décisions de paiement n'en précisent pas les raisons. On peut cependant
penser que l'évaluation de 1791 constitue une simple prévision faite à par-
tir des quantités de sucre exporté et en magasins. La pétition adressée à
:'Assemblée nationalà: par les raffineurs de Bordeaux paur demander le rembour-
sement des droits sur l'ancien pied date du 2 Mars 1791. Elle précède de
27 jours la promulgation du nouveau tarif. On est donc fond~ l ?enser oue
2evant les incertitudes du lendemain, certains raffineurs ont
décidé de
~estreindre les expédition~ prévues.
Cette diminution du montant des droi ts d~s peut trouver aussi
son origine dans les défauts d'accomplissement des formalités nécessaires.
Dans ce cas, il s'agirait d'un si~ple rejet de certains acquits-q-caution
par la douane. Car, même si eale ne l'exprime pas ouvertement, la régie
des douanes a une claire conscience que le négociant est enclin à la fraude.
Dan~ ces conditions, il est exclu de penser que, malgré la décision du 14
Septembre 1792, elle rembourse sans retenue les droits perçus.
En effet, si le remboursement ne pose pas trop de problèmes pour les expor-
tations antérieures au tarif du 29 Mars 1791, pour les exportations posté-
rieures à cette date, il faut une plus grande vigilance d'autant qu'il est
difficile de savoir
si le sucre brut,ayant servi à la fabrication du sucre
en pain exporté, a acquitté l'ancien ou le nouveau droit. La diminution
du montant des encouragements par rapport aux estimations de 1791 nous semble
provenir de ces raisons.
S'y ajoute aussi le fait qu'au delà du 1er Octobre 1191, l'ancien système
de prime et de remboursement deva~-théoriquement tomber en désué~de.
(1) Cela signifie que la base des 21t 10s est retenue et non les 15s définis
par le nouveau tarif du 29 r:ars 1791. Pour le Domaine d'Occident, le prix
d'avaluation retenu est 3ült le quintal (prix d'évaluation de 1790) et nen
451t définis par le tarif de 1791.
,,;1,
Notons enfin que la tableau des paiements des primes et rembcu~'~,
ments de 1793 est très incomplet. Nous avons indiqué que l' ::'.rrêt du :25 ;':?~
1786 a étendu les encouragements à l'exportation à tous les ports du royaume,
0r, nous avons ici aff2ir~ aux raffineurs de deux ports : Bordeaux et le
B2vre. Les sieurs r.~hoff et Duval beaufrères qui ont expédié respectivement
26 2C91b o-t 3C ?C61b de sucre en pain, reçoivent en ~rimes èt remèourser.'lents
:' 2;:ô1t 14s 6d et 2 635lt 7s 5d, soit au total 4 92?lt 18 11,d. Le'lrs expé-
èi tions se sont déroulées exclusivement en 1792. L:
rremière du 9 p1ars au
1er Août, la seconde du 28 Février au 24 Mars. Les autres ports n'y figurent
pas. Cela ne signifie pas qu'ils aient interrompu leurs exportations.
Paillard Lullin Charton et Cie, propriétaires de la raffinerie de
la Ciotat, sont concernés par la question. Ils ont expédié du 31 Mars au 16
Mai 1792 du sucre en pain à l'étranger. Ils réclament donc le paiement des
primes dues (1). La lettre que cette maison a adressée au Ministre de l'in-
térieur, RolËr.è ~ ce sujet est très vague, puisqu'elle ne précise ni la
,
01antit/ de 2ucre exporté, ni le montant de la prime. C'est également le
cas èe la maison Luc Pelin SuIt Schnell à Marseille. Elle r6cl~~e une prime
et un remboursement de droit d'un montant total de 713lt 8s 6d (2) pour
~
8 177 lb de sucre en pain exporté à l'étranger du 22 Octobre 1791 au 28 Mars
1792. Tout cela se déroule en ·9 expéditions: 1 en 1791 et 8 en 1792; 2 à
Fioe,. iiè 22 Octobre 1791 et le 4 Février 1792, 4 à Genève, le 3, le 13 et le
17 Janvier et le 28 Mars; 2 à Nyon, le 18 et le 28 Mars, 1 à Gênes, le 8
Février. (3)
(1) Lettre adressée à Mr Rolland, minisîf:re de l'intér~2ur par Paillard Lullin
Charton et Cie. Marseille le 6 Octobre 1792. AN F
1932.
(2) Cet encouragement à l'exportation se décompose comme suit
Droit de 3 %: 248lt 6s Bd.
Droi t add. de 150/quintal : 1381 t.
Prime de 4lt/quintal : 3271t.
de sucre raffiné.
(3) A~ p12 1932 • Voir le calendrier des expéditions et les quantités de sucre
exporté en annexe.
b) ~e~m~.!i2!!. ~ droi t ~entrée ~t.J!.e~o!iiLs~ 12.s~uge~b~t.et terrés~.
leur ~rtie~our l'éE.~e~
Au niveau de la réexportation des sucres bruts et terrés, l'encou-
ragement prend une forme plus subtile. C'est l'exemption des droits è'pntrée
et de sortie. Cette mesure commerciale est définie dans l'article XV des
lettres-patentes d'Avril 17 17.
Elle.- porte sur les droits d'entrée et
de sortie même de ceux appartenant au fermier du Domaine d'Occident. Ce
droit n'a rien à vorr avec celui appartenant au fermier du Domaine d'Occident.
Ce dernier perçoit en effet une partie du droit d'entrée ou taxe somptuaire
·sur le sucre : cette part est de 33 sous 4 deniers en ce qui concerne les
sucres bruts et de 2 livres
des droits sur· les sucres terrés conformé,;,.
ment à l'article XIX des lettres-patentes d'Avril 1717.
Ainsi, tandis que le poids des fmpos1tions est supporté par les nationaux,
les étrangers enlèvent des ports èe France les sucres bruts et terrés en
jouissant de l'exemption des droits de consommation .Cette attitude contra-
dictoire va considérablement gêner le développemeilt des exportations de sucre
en pain sur les marchés du Nord. En effet, tout l'excédent desSucrei!S1brUts et
terr~.passe à l'étranger où il alimente les raffineries locales de sorte que,
finalement, la réexportation est apparue meilleure que la transformation(!).
Prime, restitution et exemption de droits montrent qu'en matière
de sucre, la France a eu une poli tique commerciale très nette m~me si, da.r.s
son application, l'antagonisme des intérêts en présence en a limité quelque
peu la portée. Cette législation particulière est la. preuve évidente que les
sucres intéressent avant tout le commerce intereuropéen de la Fra~ce.
~·Ious avons déjà montré dans le sens colonies-métropole que les opérations de
vente se font par l'intermédiaire des commis~ionna.ires. La question est de
savoir ce qu'il en est de la branche européenne du commerce colonial.
( 1) Cf. .'tfre. p.
4 '19 -4.20
3e4
1°3.- Le mécanisme commercial.
-----------------------
Le commerce colonial et le commerce de réexportation en Europe
présentent bien des similitudes quant ~ la forme. En effet, ici comme dans
les re~ations avec les colonies, le commissionnaire demeure l'intermédiaire
indispensable des étrangers.
Deux voies de vente possible semblent avoir ca~actérisé ce commerce
une
voie àirecte et une voie indirecte (1).
a) La ~i~directe~
Sans remettre en cause le fonctionneLant général, la différence de
nature entre les sucres bruts, terrés et têtes et le sucre en pain introduit
une légère nuance dans le mécanisme. Il importe donc de les distinguer.
a / Les sucres bruts terrés et tête
de la mutation d'entrep~t àla vente
1
~commission aux étrangers.
Si Françoise THESEE consacre de longs développements au fonction-
J
nement de l'opération commerciale telle qu'elle se déroule dans le sens des
•
colonies vers la métropole, elle est très sommaire sur la phase européenne
de ce commerce (2). Elle a cependant le mérite de signaler qu'en règle géné-
rale, les négociants français ne font pas eux-mêmes le commerce de réexporta-
tion vers l'étranger. Ils vendent leurs sucres à des maisons spécialisées
dans cette branche du commerce. Un mémoire des négociants du Havre,daté du
•
29 Décembre 1791, nous renseigne sur le fonctionnement de cette transaction.
"L'armateur dont les affaires sont enchaînées dans les coloni es
vend sa cargaison, pour ainsi dire, à l'arri~ et songe aussitôt à une
nouvelle éxpédi tion. Ses sucres sont acheté~ par des négocians qui 'lont une
(1) Ces deux expressions sont empruntées à Christian SCH}JAKENBOURG, les sucreri~~
de la Guadeloupe dans la seconde moi tié du XVIIIè siècle 1760-1790~;~ pp.101
et 109.
(2) THESEE (F.), Négociants bordelais et colons de Saint-Domingue, pp.74-76.
correspondance très étendue, tant en France qu'à l~étranger. Ils connaissent
~es_ qualités propres et convenables à_tel1e_partie du royaume, celle qu'il
faut expédier en Hollande, à Hambourg ou autre endroit du Nord. Ce spécula-
teur dispose de cette cargaison suivant ses avis et ses demandes, p8r
conséquent, il en retixera une partie de l'entrep~t pour l'expédier, ~'~utre
il la gardera en magasin toujours en entrepôt, parcequ'il la destine à la
consommation intérieure"(1).
Ce mémoire permet de poser en termes précis les différentes étapes
du mécanisme. On en distingue deux: la première est la transaction se dérou-
lant entre le premier scumissionnaire et l'ach~teur, en l'occurrence, la
maison spécialisée dans la réexportation. La seconde est la réexportation
proprement dite. La première étape qui est la vente en entrep5t est ce que
les négociants nomment la mutation d'entrep5t. A la vérité, aucune loi ne
permet ces mutations d'entrepôt. C'est par une disposition ir~érieure de la
régie de douane que la ferme générale s'est prêtée à accorder ces facilités
au commerce.
Le premier soumissionnaire fait sa déclaration de vente sur le ré-
gistre de douane du port en indiquant le jour de la vente, le nom de l'ache-
teur, la quantité de sucres vendus, le nom,
du navire ayant transporté ces
sucres en France et la date d'arrivée des colonies.L' ...cquéreur fait sa soumis-
sion le
jour même
•
Françoise THESEE indique que Romberg et Bapst vendent leurs denrées à des
maisons bordelaises, pour la plu~art d'origine étrangère. Sn ce qui concerne
les sucres, les plus importantes sont, dans l'ordre: Kunckel et Cie, J.C.
Streckeisen, C.F. Schuler, Bethmann et Cie, Couderc et Cie. Les maisons dont
les noms suivent
sont
mentionnées
pour quelques achats. Il s'agit
des maisons Vernes et Cie, Eaour et Cie, L~bbert frères, Schaleh et Cie, Test-
dorf et Elatter, Wetzel frères et Cie, Wieland Schintz et Cie, Vidal ~enten
et Hesse, ~eyer, Ravel et Testdorf, Clausman, Eeyerman et Cie etc.(2).
(1) "Mémoire des négocians du Havre sur l'entrepôt des sucres tête et terré, a-
dressé à t'Te le :ninistre des contributions publiques". 29 Décembre 1791.
AI-I F12 1966( ).
fussier l nO 179.
(2) THESEE (F.), op. cit., p.r8.
3E6
Cette mutation d'entrep~t a été vivement contestée par les préposés
de la régie des douanes après le décret de l'Ass~ablée nationale du 10 Juillet
- - - - - - -
-.. "--_.- -~._-"'.. -
----_ .._-.- "--
1791.A l'origine du litige se trouvent les articles 29 et 30 du décret. Le
premier stipule qu'à l'avenir, les négociants qui mnt entreposé ces sucres
seront tenus de donner au bureau de la régie, dans les denliers jours de
Février, Juin et Octobre de chaque année, une déclaration des quantités des-
tinées à la consommation nationale et d'en payer les droits.
Le second indique que, si à la vérification de cette déclaration par les pré-
posés de la régie, le résultat présente un déficit, le soumissionnaire sera
condam"é au double droit. Les
préposés de la régie estiment donc qu'aucun
armateur ne peut vendre dans l'entrep~t ses sucres à un spéculateur qui les
garderait en entrep~t en attendant l'occasion d'en disposer. Bien évidemment
une telle modification qui bouleverse les habitudes acquises ne 'la pas sans
susciter grogne et condamnation de la part des intéressés.
Le ministre de l'intérieur est immédiatement saisi de l'affaire. Les
négociants du Havre sont les têtes pensantes de cette ca~pagne. Ils demandent
au ministre de l'intérieur de donner des ordres prompts, vu l'urgence du
commerce, aux préposés, afin que cette facilité de mutation d'entrep~t puisse
se poursuivre. Celui-ci relève l'illégalité d'une telle pratique. Toutefois,
il se déclare incompétent, quant à l'issue à donner à cette demande. Elle
dépend du département de sœn collègue des contributions publiques.
Le mémoire du 29 Décembre 1791 est donc adressé à TAREE, ministre des contri-
butions publiques. Sa réponse est ~assurante. En effet, pour lui, ces muta-
tions d'entrepôt étant très compliquées, elles peuvent avoir lieu sans que
la soumission primitive puisse être remplacée par une autre •. ~l estime que,
de cette manière, le premier soumissionnaire est intéressé à veiller à la
sûreté de l'entrepôr, étant garant du droit (1).
Il nous est cependant impossible de dire si cet avis a suffi à clore le débat,
aucun document ne nous ayant permis de le vérifier.
(1) "Avis transmis aux négociants àu Havre ~ar le ministre des contributions di-.
rectes". Paris le 23 F~vr.ier '792. AN F 219 66(0).
.."\\
.il'i:i
367
Reste donc la vente à l'étranger ou la réexportation. Il ne faut
pas entendre par là que l'acheteur charge ses sucres pour aller les revendre
à l'étranger. La réalité commerciale est tout autre. Le raffineur étranger
qui a besoin de sucres bruts et terrés fait acheter en France, en exemption
du droit de consommation, dans l'entrepôt,par l'une des maisons commission-
naires de la place.
La
commission est évaluée à 2 %(1) de la valeur des
produi ts.
Est-il besoin de souligner que les sucres ainsi acquis deviennent la propriété
du commettant étranger dès l'instant même qu'ils quittent les magasins de
celui qui les expédie? (2):l "Il n'est plus le maître de refuser la marchan-
dise au payement de laquelle il seroit juridiquementQQntraint s'il n'en-
voyai t pas les fonds" ; les risques que court la marchandise en route sont
absolument à son compte (3).
Toutes ces opérations demandent du temps. C'est pour permettre aux
,.;,.\\
~ ~:::~if
négociants français de mener à terme leurs transactions que le législateur a
accordJ un délai d'entrepôt. Les lettres-patentes d'Avril 1717 et le décret
de l'Assemblée nationale du 29 Mars 1791, en ne précisant pas ce délai, s'av.-
~
rent vague. Toutefois, il serait hasardeux de penser qu'ils jouissaient
,
d'un entrepôt illimité. la ferme gÉnérale,puis la régie des douanes savent
bien qu'une telle imprudence aurait donné lieu à la fraude.
Cette précision
qui manquait aux textes précédents est introduite dans le décret du 10 Juillèt
1791. L'article 25 de ce décret stipule en effet, que la durée d'entrepôt
est de 18 mois. Passé ce délai, le soumissionnaire devra payer 6 lt par cha-
•
que quintal èe sucre entreposé.
12
(1) "Némoire des représentants du commerce du Havre" 20 Mai 1786. AN F
1639 A.
12
(2) "Avis du Bureau consultatif du commerce'tparis 2 Fructidor an V. AN F
1639 A.
(3) Pour ce qui précède, cf. : "Rapport présenté au Ministre de l'intérieur par
la 4e Division (Bureau consultatif du commerce; Paris 29 Pluviose an 6.
An F12 1639 A.
3 -~
,
'
a / ~vente du ~e e!L..E.âin.:,.
2
Les informations reiatives aux encouragements à l'exportation du
sucre raffiné en pain ne doivent pas masquer la réalité de ce commerce. En
effet, il serait inéxact de penser que les ventes s'effectuent à l'étranger
une fois les exportations effectuées. Ici comne dans la réexportation, les
achats se font en France même sur ordre du commettant étranger. C'est dire
aussi l'importance du commissionnaire à tous les niveaux du commerce. ~ute
fois, le commerce du sucre en pain a quelques traits particuliers qui le dif-
férencient quelque peu de la réexportation proprement dite.
Le premier résulte de la différence de prix en France et à l'étran-
ger. Nous avons, en effet, déjà indiqué qu'il existe un écart entre le prix
courant en France et le prix pratiqué à l'étranger., Cet écart étant représenté
par les encouragements à l'exportation: primes et remboursements. Car, pour
trouver le prix pratiqué à l'étraneer, il faut déduire ces encouragements
du prix courant en France (1).
En 1786, le sucre 4 livres français, qui vaut en France m3me 82lt
10s, est vendu à l'~tranger 7Glt 10s. L'ensemble des encouragements étant
alors évalué à 12 lt (2). C'est sous ce prix que le commettant étranger passe
sa commande.
Cette particularité du commerè~u sucre en pain requiert une plus grande res-
ponsabilité de la part du commissionnaire. Car, lorsqu'il reçoit l'ordre de
•
oon commettant d'acheter ]ar exemple 100 quintaux de sucre en .~aln à 70lt 10s
le quintal,' il va trouver un raffineur qui lui vend ses 100 quintaux de sucre
au prix courant de P21t 10s. Il lui faut donc en tout 8 250 It alors que
le commettant étran,",'er ne lui indiquera qu ''Lm crédi t de 70501 t.
C'est donc au cornr.issionnaire d'avancer les 1200 lt d'écart, nontant de la
restitution à recevoir 4 à 9 mois après le retour de l'acquit-à-caution.
(1) "Lettre des représentants du commerce du Havre 20 f'lai 1786".
12
AN F
1639
(2) Observations sur un mémoire de Lonères qui nous a été remis le 23 Septembre
1786.
3SG
~u'~n défaut de formalité qui annule la restitution soit constaté et cette
avance tombe à la charge du commissionnaire. Le risque pour ce genre de
transaction est donc évident. C'est ce qui explique la fureur des raffineurs
lors de la suspension des paiements en 1791. Nous disor.s raffineurs car ici,
le raffineur joue en m~me temps le r$le de commissionnaire. C'est le second
trait distinct du commerce du sucre en pain.
Eh effet, le fait que les plaignants soient toujours des raffineurs
mon~re que les étrangers passent directement leurs commanàes chez ·~Ù~.
Cela n'est pas pour nous surprendre, car plusieurs 'raffineurs appar-
tierment également au gro"\\]pe des armateurs commissionnaires. J.l . .Rabaud,
Baour fils, Paul Nairac et sa belle-soeur, Veuve Pierre Uairac, par exemple,
sont dans l'armement (1) et certainement aussi dans la commission. Ils~nt donc
une profonde ~connaissance des réseaux commerciaux européens.
L'exportat±DD et la réex~ortati0n des sucres permettent de poser
un autre problème important : celui du transport.
a / ,1e..J2.!.Oblème du tr~ort de~uc~ p~ l'étranger.
3
Si la navigation coloniale française est très active avec les
colonies, ce qui l~i fait mériter le qualificatif de commerce privilégié, elle
est très passive avec l'Europe, notamment avec l'Europe du Nord. Plus d'un
auteur de monographie a insisté sur le fait que les Français n'ont jamais pu
•
parvenir à faire Ce co~~erce par eux-m~mes. Il s'effectue en grande partie
~ar l'entremise des étrangers. Le sujet n'étant pas nouveau, nous nous borne-
rons à c~ter quelques exemples concrets pour illustrer le propos. Le premier
est un état des sorties de navires des ports de France pour l 'f~tranger en 1790.
(1) BUTEL (P.), Les np.~ociants boràelais, l'Eurone et les rIes au XVlllè sièele,
pp.226 et 290.
39C
Tableau n070 - Les navires français à l'étranR'er en 17<;() (1). Sorties et ~c.
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Espagne
e391594pO,eoI234127,901,
:
Portugal
10 4: 170 1 67, 31 ; :
; 12 11 1, 54 :
Sardaigne
4161262162,981
1
; 127130,531
Et. de l'Ernp.
!83!36,09!
230/86137,391
1
! !
Angleterre
1 OC8: 1251 6,92,
1
!
!
/ 1669'92,3 1
Hollande
461/
41/
8,891
1
!
361 78,31!
V. hanséa tiq.
1751 231 13,141
1
!
Danemark
1421
71
4,93\\
1
Suède
26 1
9134, 62 1
1
Prusse
3 6 1
41 11 ,11:
1
Russie
21!
14!66,671
!
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Portugal
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Sargaigne
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Et. de l tEmpo !
!
! 61
26,52
Angleterre
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! 14
6,77
Hollande
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!
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12,00
T T
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haîl!'!éatiq.!104!59,43
!
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27,43
Danemark
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!
97! 68,31!
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26,76
Suède
!
!
!
! 4!15,38!
! 13
50
Prusse
!
!
!
3! 8,33 !
! 29
00,56
,
,
,
,
Russie
!
1
,
7
33,33
!
!
!
!
•
N = nombre de navires
l
= impérial
Su = suédois
F = français
A = anglais
P = prusse
E = espagnole
H = hollandais
R = russe
Port = Portugal s
Ha = hanséates
S = Sarde
D = danois
Le tableau Jait apparaître deux caractéristiques principales. La
navigation françalse est très 2,cti ve en médi terranée. En effet, en 1790, les
Français assurent 70,20 :< du trafic maritime avec l'Espagne, 67,31 % avec
(1) Résultat de la navigation avec l'Etranger. Sorties 1790. A?J F12 166e.
le ~ortugal, 62, 98 5~ avec la Sardaigne. A l'op:)(~sé, i l montre que les Nordi-
ques ~ardent à peu près tout le trafic septentrional. Anglais, Hollandais, han-
sé2tes et danois étant des rouliers des mers.
Al 'exception de la Suède, de la Russie et de la Prusse, chacune des puissances
du ~ord assure presqu'enti~rement le transport des marchandises tirées de
France pour son marché national. C'est avec les Pays-Bas autrichiens, la Su-
èàe et la Russie que la Navigation française se montre plus active.
La supériorité de leu~s concurrents du Nord ainsi que leur naviga-
tion bon marché (1) sont certainement à la base de cette passivité française.
S'y ajoute aussi le fait que le commerce de redistribution est déten~_~ar les
étrangers immigrés dans les ports français.
Françoise THESEE n'indique-t-elle
pas que les maisons bordelaises spécialisées dans la réexportation des den-
rées coloniales vers l'Europe du l·;ord, sont pour la plupart d'origine étran-
gère (2) ? Les commissionnaires n'ont alors qu'à attendre que les clients du
~ord viennent chercher les produits disponibles. Même les raffineurs et ar-
mateurs comme J.J. Rabaud, Baour et Veuve P. r:airac et fils (3) font leurs
expéditions vers le Nord sur des navires étrangers.
•
Le 14 Octobre 1790, J.J. Rabaud et Cie expédie 3 096 lb de sucre
-----""'l!eT1i!F-~ai-n"~-Bruges, le navire qui tram:'!Jorte le sucre ; le Ver.... 8.nç:htenlZ' est d'
Ostende. Le 8 Juin 1791, cette même maison charge 6 C55 lb de sucre pour'
Hambourg; le navire est hambourgeois : le grOS Rock. L'expédition du 31
Janvier
est destinée à Ostende: 2 165~ Le na'nre s'appelle les Trois Rois
•
il est d'Ostende.
La maison Baour et Cie dont les expéditions vers le Nord se font généralement
. :
l,,'
vers Hambourg, a recours aux navires dudit lieu.
(1) CARRIERE (C.),Néwociants marseillais au XV1IIè siècle, Tome II, p.591.
(2) THESEE (F.), Négociants bordelais et colons de Saint-Domingue, p.78.
cf. Paul BUTEL, OP. cit., pp.152-163.
(3) c'est le cas de tous les raffineurs. Ces trois noms sont choisis à titre
indicatif.
Il''. te de char&'ement
!d,uanti t~
Destination
;·Tavi re (nom et origine)(1)
lb
,.;.\\
.;,.:'1
...~
..:..:LSe;:tembre 17~
7 356
:iambourg
La ville d'Hambourg
1 l
Cctobre 179C
6 556
:Bruges
:ierwangh teng d'a stende
?::: ?:ovembre-
-
5 707
Hambourg
Le l';ercure de Hambourg
'-
, ..., Janvier 1791
7 770
Hambourg
La Dame Anne-Marguerite ?
1
1
i
l"évrier
13 168
Hambourg
Le :toffening de Hambourg
24 r1ars
3 704
:Bruges
Le Saint-Pierre de Naillac ?
6 147
Hambourg
Le Régent de Neweste ?
29 Avril
9 562
Hambourg
Le }Tercure de Hambourg
26 Juillet
1'2 514
H,mbourg
Les 4 Bons amis de Hambourg.
c'est la même voi,e qu'utilise la maison Veuve Pierre Hairac et fils.
Date de chargement
Quantité
Destination
NC'I'l.p:t origine du navire
4 Septembre 1790
175
Hambourg
Le Pol du Nord de Hambourg
24 Septembre
408
idem
Le Mercure dudit lieu
29 Septembre
954
Stettin
l'Espérance de Bremen
1e Octobre
5 460
Hambourg
Le ~ercure dudit lieu
14 Octobre
2 028
Eruges
Le Verwanghten d'Ostende
23 Décembre
7 590
Hambourg
La Dame Anne-Marguerite ?
27 Janvier 1791
14 565
idem
Le Tertunia dudit lieu
4 Février
3 766
idem
La Pallak de Hambourg
23 Février
9 554
Stettin
La Caroline Wilhminia ?
..
2 }Tars
6 063
Hambourg
Le Renard Man ?
26 Hars
1 920
idem
Le Guillaune de Hambourg
29 1v;ars
17 278
idem
La Minerve de Newcastle ? (2)
19 Avril
3 50 1
Bruges
Le Marsouin de Pimpol ?
29 Avril
6 912
idem
idem
30 Avril
9 553
Hambourg
La Karie-Elisabeth de Hambourg
21 Juin
7 716
Bruges
Le Saint-Pierre de ~aillac ?
28 Juillet
12 971
Hambourg
Les 4 Bons P~is dudit leiu
30 Juillet
7 200
idem
La Marie-Elisabeth dudit lieu.
18 Octobre
5 081
idem
La Tertonia dudit lieu
21 Janvier 1792
e 438
Bruges
Les Trois Rois de Bruges
17 Février
4 534
Hambourg
Les deux ~atherines dudit lieu
. ;
28 Février
8 599
idem
La Jeanne dudit lieu
:::.~
12 Avril
761
Zierickie
La V. Danist Lucurin ?
18 rl:ai
009
Hambourg
La Bonne Espérance dudit lieu
2 Juillet
137
Bremen
La demoiselle Cathrine dudit lieu
On retiendra de cette ~tude que la redistribution des sucres en Eu-
rope du Nord est faite essentiellement par les étrangers. Cette voie directe
n'est cependant pas l'unique forme commerciale utilisée. La vente par
(.1) Les poinil:;d'interrogation indiquent que l'origine du navire n'est pas préci'-
sée.
(2) L'origine de ce navire n'est pas indiquée mai3 le nom suggère qu'il s'agit
d'un navire anglais.
l'i~tF~édiaire des foires parart avoir joué un grand rale dans la circulation
du sucre en Europe.
La foire, en tant qu'occasion d'un croisement des circuits régionaux
ou nationaux et des circuits internationaux tient une grande place dans les
circuits co~merciaux. C'est l'occasion pendant laquelle le marchand entre en
relation avec le négociant. Il n'entre pas dans notre intention de recenser
toutes les foires qui se tiennent en France au XVIllè siècle. Un tel exercice
n'aurait d'ailleurs son sens que si les denrées coloniales y trouvaient un
réseau de redistribution. A cet égard, les foires qui se tiennent dans les
villes ou les généralités concernées par le commerce colonial sont les plus
dignes d'intér~t. Dans ce cas, les 2 foires franches de Bordeaux, les 10
foires franches qui se tiennent dans la généralité d'Orléans et le grand
rassemblement de la Madeleine à Beaucaire méritent d'être signalés.
Les deux foires annuelles de Eordeaux se tiennent en Mars et en
Octobre.La première du 1er au 15 Mars et la seconde du 15 au 31 Octobre (1).
Les 10 foires de l'Orléanais se tiennent dans les 4 élections suivantes
Chartres, Maintenon, Montagris et Gien. Chartes en 8~pte deux. L'une de
cG JOUiS lii~t1trrêe-'Par lettres-patentes d'!'t mois de Yai 1528, commence le 11
Mai; l'autre de 4 Jours est instituée en Aoû~ 1588. Elle commence le jour
de Saint-Barthélémy. Maintenon en compte quatre de 2 jours chacune. Elles
ont été toutes insti tuées par lettres-patentes àu ;;)ois de ~:ai 1626. La pre-
mière commence le premier vendredi avant la mi-carême, la seoonde, le 19
Juin, jour de Saint-Ge~ain, la troisième, le 14 Septembre, jour de l'exal-
tation de Sainte-Croix et la quatrième, le 6 Décembre, Jour de Saint-Nicolas.
Les trois foires de Montagris se tiennent dans la ville-même ; elles ont
été créées par lettres-patentes du mois de Mai 1430. La première se tient à
la Eadel~ine, la seconde après la fête de Saint-Rémy en Octobre et la troi-
sième, le lundi après la foire qui se tient après ~uasimodo à la Madeleine
de Chalemolandon. C'est la foire de Pont Ferault.
(1) 3UTEL (F.), Les négociants bordelais l'Euroue et les Iles ~u XVIII~ siècle,
"C.146.
~e r~ssemblement de Gien dure 8 jours. Il débute le second lundi de Car~me.
=ett D foire est connue sous le nom de le Cour (1). Sans qu'il soit besoin
- - - -
iE canna!tre l'afflux des sucres lors de ces rassemblements, il apparatt ivi-
dent que tout un
!éseau de redistribution est implanté, d'autant que la fran·
c~tisè
des foires est une agréable opportuni té pour les négocie.nts. Les mar-
ch~ndB
viennent S'} approvisionner directement en produits coloniaux.
?:ml :3lJTEL n' indique-t-il pas que le commerce colonial p ~1'1):; Hl:' gTand
~ôle dans l'expansion des deux foires bordelaises
(2)?
L'importance des sucres à la foire de Beaucaire peut ~tre appré-
hendée avec plus de netteté grâce aux rapports des inspecteurs des manu-
factures. Le grand rassemblement de la Madeleine à Beaucaire se tient
chaque année du 22 au 28 Septembre (3). La dimension internationale de ce
rassemblement est affirmée par les rapports des inspecteurs députés sur
place pour suivre la tenue de la foire. Le rassemblement de 1724 attire des
Espagnols, des Italiens, des Allemands, des Piémontais et des G~nois (4).
A celui de 1784 sont présents, des Espagnols, des Majorquins et des G~nois
(5). çette présence des étrangers ne suffit pas à donner à la foire de
Beaucaire un c~ractère international, affirme Charles CARRIEP~ à la suite
•
de Paul VILAR (6). Il invite à la prudence quant à l'appréciation des rap-
t
pOl ts des iM'lI'eeteurs. Pour lui,
comme pour Paul VILAR, "la dimension régio-
nale du rassemblement de la Sainte-Madeleine correspond mieux à la réali-
té"(7) •
•
Cette dimension régionale de la foire est certes prédominante, une
b~nne partie des sucres arrivés de Bordeaux ou de Cette est vendue sur
(1) Etat des foires franches qui se tiennent dans la généralite d'Orléans.
AN F12 1243.
(2) :BUTEL (P.), op. cit., p.146.
(3) "!"'. de Saint-Friest à V,., Necker, directeur général des finances. :Seaucaire,
23 Juillet 1779". AN F1è:1230.
12
(4) Etat de la fcire de Beaucaire, 1er Ao~t 1724. AN F
1229.
(5) Lett~2 de M. de l'Epinay à M. le contrôleur général 1er Aont 1784.
A~; F
1230.
(6) ~ARRIERE (C.), Né~ociants ~arseillais au XVIIlè siècle, Tome l, p.418.
(7) CARRIERE (C.), ou.cit., p.418.
395
olace e-: destinée à la consommation nationale, mais elle ne doi t pas occul-
t~ '." dimension internationale. Les sucres qui sont transportés à Beaucaire
;~i~l
s~nt, ~n ~qjorité, déclarés pour l'étranger: la Savoie, la Suisse et Genève
:l"'dinc i Pé'Ü ement.
Les sucres arrivent de 30rdeaux, de Cette, de rla.rseille et de
Yontpellier. Il faut y inclure les produi ts de la fabrication locale : en
1732, les balles de sucre du sieur Chabri~, propriétaire de la raffinerie
de ~eaucaire, portent la marque R.D.B. (1). Tou:efois, il est impossible
d'avoir une ~~e quantitative précise des sucres débités à la foire de Beau-
caire, les rapports des inspecteurs étant sur ce point très incorr.plets.
Les renseigneme:1ts qui sui vent concernent riarseille, 30rdeaux, Cette et
des provinces du royaume non identifiées sur les rapports. Il est vraisem-
blable que ces sucres viennent de Nontpellier.
Tableau nO~Î - Quantité de sucres signalées à la foire de Beaucaire (2)(en lb)
Marseille et
Provinces
Années! pays' ét.rang~.:rs ! du royaume
Bordeaux
Cette
Total
!
1772
225 857
5 000
45 167
17 163
293 181
1773
390 500
66 795
9 750
467 045
1774
299 100
2 900
eo 340
27 510
409 850
1775
305 700
108 165
7 670
421 429
1776
252 532
185 165
9 540
447 237
1777
286 200
150 292
12 850
449 342
1778
133 572
15 000
=:.:.~::
1779
75 645
95 200
29 230
200 155
;·ï-:···
178J
68 822
41 302
3000
113 124
17 81
10 000
1784
111 930
1786
299 797
1789
255 PF
(1) "Procès verbal dressé par le sieur Pierre de la Gerrière, inspecteur des ma-
manufactures pour parvenir à la vérification des sucre 1 apportés des diffé~
rentes raffineries de Beaucaire" 23 Juillet 1732. AN F 2 150 1.
12
12
(2) 1772 à 1777 : AN F
1229.; 1778 à 1779 : AN F
1230 ;
1784 "copie de la
lettr; de 1,:. de l'Epinay à fI:. le contrôleur général 19 Juillet 1784".
A1; ? 1_; 230.
17fè1.-.:L.1.1E6 : "Etat des marchandises dont l'0bjet est plus considérable
arri~~e~de ~arseile et des pays étrangers à la destination de l~ foire de
~eaucai.re èepuis ie 10 jusqu'au 19 Juillet: AN F12 1230.
17~q "2':at des marchandises entrées par le Bureau d'Arles à la destination de
la îoire de 3eaucaire venant de Marseille, des pays étrangers et des provin-
ces du roy:wme 1789".
Ar,; F 12 1230.
39~
Ces chiffres sont loin de rendre compte d'une façon précise de
l'afflux det1ere~à la foire de Beaucaire. En ce qui concerne Bordeaux et
Cette, les résultats que nous présentons sont la somme des sucres sortis
pour l'étranger et des sucres vendus à Beaucaire et destinés ~ la consomma-
tion nationale. pour ~tre complets, ces résultats doivent prendre en compte
les invendus. Ce dernier renseigne8ent nous échappe compl~tement. Les propri-
~taires
des sucres sont, pour Bordeaux, les raffineurs cités précédemment
plœ quelques noms nouveaux. Ce sont : Jacques Raymond et Durand, Flanges-
ques fils et Cie, Ambert et Tonnai, Paul Nairac, Nairac frères et Cie (Veuve
Pierre :Tairac et fils), Rabaud, Lassabathié, Bonafoux Fabre et Cie, Fadeville
~a~neau et Cie, Danai et Mangé, Tanays et Boulet, Sageran, Laffite et Du-
pont, Labrai et Burette, Pierre Sorbé, Dubreuille et Gaubert, Defos et Cie,
Duderans aîné, Pierre Sau, Archambaud et Laborde, Labottière, Fontanelle et
Cie, Baour et fils. Cette liste qui regroupe tous les grands noms du. raffinage
bordelais montre que les négociants ne négligent pas la foire de Beaucaire.
Ce grand rassemblement exerce un attrait inévitable sur les raffineurs. La
franchise de la foire leur offre l'agréable opportunité d'écouler leurs
su~es.
Le sucre de Cette appartient au sieur Guilla~~e Sabatier. Cette
(
'!'P".-:-~;:"":~- e-::~
opportunité est offerte par l'arrêt du 12 Février 1732. Rappelons
que le sieur Sabatié a été contraint de s'installer 3. ;'Tontpellier en gar-
dant ses privilégiés de Cette. En ce oui concerne Marseille, les rap~orts sont
•
particulièrement imprécis. Il est impossible de dire si tous les sucres
enregistrés aux bureaux d'Arles, de Fourques, de Ramatuelle et de Tarascon
proviennent exclusivement de Marseille ou si une partie ~rovient effective-
ment de l'étranger. La présence espagnole à la foire laisse aillnettre une
telle éventualité. D'Arles, de Fourques, de Ra.~atuelle et de ':'2.rascon, les
sucres sont acheminés par barques sur le Rhône jusqu'à Beaucaire. Que les
vents n ~ord empêchent les barques de remonter le fleuve,et c'est le retard
dans les o~érations avec comme conséquence, la he.usse des prix. C'est ce qui
B' est produ'i t -en 1780.
397
~a foire de ~P2uca1re est de plus d~rendante des ~v~nements politiques inter-
,
'
,
,
·,:;~i
:ca tion"ux. Les cnfl1 ts_ avec.l Ar...€:le.t.erre .. on:Lt.<2UJ().U:I:'ê r~pre.sen te des peI.i():"'
des difficiles pour l'arneme~t colonial, donc pour les importations. L'effon-
drement des importations coloniales se fait sentir sur l'afflux de sucres à
la'.foire. Les chutes de 1779,1702 et 1781 r<i'sultent des difficultés de com-
~unic?-tion avec les colonies pendant la guerre d'Indépendance américaine.
Trois types de sucres se retrouvent à la foire: le sucre en pain ou mélis,
le sucre terré et le sucre brut. Les états de Bordeaux et Cette sont muets
sur cette àistinction d'espèces. Ceux de Marseille les distinguent nettement
(1). Le sucre venu des ,rovinces è.u royaume en 1772 et 1773 est consti tu~
'1,.
,.
exclusivement de sucre DIane terr&.
b / Les chan;;ements de destinati~
2
Les états du commerce de Bordeaux et de Cette offrent un avantage
que n'ont pas ceux de ~arseille. Ils permettent de vérifier la destination
des sucres. Cet avantage provient du fait que les sucres sont accompagnés
d'un acquit-à-caution désignant la route à suivre, le bureau de sortie et
la destination effective. C'est l'une des exigences des lettres-patentes
d'Avril 1117' 'lhéori9tleme~~, elles font d~fense aux marchands et voi turiers
de rien changer à l'acquit. Mais dans la pratique, les fermiers se sont
~ontrés très coopératifs avec les négociants. En effet, ayant très tôt
compris que le bien du commerce l'exigeait, ils n'ont fait aucune difficul-
té à changer la destination primitive. Ce laxisme a duré jusqu'à 1770. De-
puis lors, sous prétexte de contrebande, le fermier général député à la foire,
manifeste beaucoup de réticence à cet égard (2). La ferme gén~rale ne réussit
en pain
Terré
:Brut
( 1) 1772
98 100
120 200
'7
557
1773
122 300
251 200
17 000
1774
160 300
99 7CO
39 100
1775
190 OCO
92 500
17 200
1776
159 100
84 ECO
2 632
1777
162 700
S2 500
35 000
1778
1779
49 062
1 2 783
13 645
17ec
35 53E
26 600
1"
0
684
(2) 08serv?tion ~énérale, le sieur Blanc.
1
Be 2.acaire 177 8. M! F 2 12 30 •
cepend3nt DRS ~ supprimer cette pratique.
En 1772, Lassabathié déclare ~ ~orèeaux 2 100 lb de sucre pour la
Suisse. ~ais u~e fois à ~eaucaire, ces sucres prennent la direction de la
Savoie. Il en est de m~me des 4 500 lb de sucre de Guillaume Sabatié et des
3 750 lb de sucre du sieur Archambaud. Quant é!-ux 4 623 lb de sucre que le
sieur Guillaume Sabatié a déclarés pour la Savoie, ils prennent, en défini-
tive, la direction de la Suisse. En 1773, Defos et Cie déclare 7 600 lb de
sucre pour Chambéry en Savoie qui sortent, en définitive, pour la Suisse.
C'est aussi le cas des 10 405 lb de sucre de l'Expédition du sieur Pierre
S~u. Les 16 652 lb de sucre du sieur Lassabathié déclarés primitivement pour
l'Italie, la Suisse, Genève et le Piémont (1), sont sortis pour la Savoie.
C'e'~,-ir-,si C!u'une partie des sucres, au lieu de sortir pour l'étranger, est
vendue sur place et,destinée à la consommation nationale. De cette manière,
la foire de Beaucaire constitue un réseau important de redistribution du su-
cre en France m~me (2). Nous l'avons indiqué, les marchands viennent s'y ap-
provisionner directement au prix du marché.
cl Le mouvement des prix en rrance.
- - - - - - - - - - - -
(
Rechercher les prix des sucres en France n'est pas un pxercice
superflu. Car, il serai t inexact de confondre les cours coloni2.ux et les
cours européens. Il existe entre ces deux prix une distorsion résultant
d'un certain nombre de données propres au commerce. De plus, le prix en
France permet d'avoir une idée du prix de vente aux étrangers. Porté ~~r l~
balance du commerce, il est le prix à l'exportation.
Le premier élément de diff8renciation est l'écart des cours. En
effet, nous savons que les sucres sont évalués aux îles en livres coloniales
en France, ils sont éval'ltis en livres-tournois. Cette
",onnaie de
(1) Italie 4 843 lb
Suisse 6 0 85
Genève 3 882
Piémont1
S36
En Î "'(72, sur le :otal àe sucré venu ~rdeaux
.
pt
~
dp Cette
- , 27 721 lb so
.
n-;;
vendus 0,. 3e"'vcaire et consomm";s dans le royaume soi t 44,47 01, 21 758 lb en
1773, 22,.12 0-: ; .)3 2,)C lb en 1774, 58,64 c
399
de ('ompte est surévaluée réglementairement par rapport à -c&lle des
c:Jlonies
: l'CB,l't l<stth€oriquement
de 33 ;/. !,'>r::-luation en livres-
:,,)'J.rnoi s goni'le donc d' ellbl cie le pri x •• Tl ?
~ijssi les frais de vente '
qui sont rép.r~uté8 sur les prix. Françoise
T~ESEE en a donné une liste
?ssez longue dans les relations entre la maison Henry ~omberg, Bapst et Cie
de Bordeaux et ses correspondants de Saint-Doming~e (1). Le montant des frais
de Nente des sucres et coton est justement le plus élevé, le fret étant plus
~)néReux : en 1789, il.s nprésentent 28~ des ,yentes sucrières réalisées
~ar cette maison •
En ce qui concerne le sucre en pain fabriqué en France, le cours
~oit tenir compte nécessairement du prix d'achat du sucre brut en entrepôt,
de la main-d'oeuvre, des frais de fabrication évalué à 8 It environ par
cuintal plus l'intérêt.et de l'intérêt des 9 mois d'attente de l'acquit-à-
..
caution pour le remboursement des droits acquittés (2). C'est ainsi que
~
,',
','
pour un prix d'achat en entrepôt, évalué à 371t 14s '3d, droit de Domaine
d'Occident non compris, le quintal de sucre brut reviendrait, en définitive,
au raffineur français à 471t 8s 8d selon les déclarations de la chambre
..
de commerce du Havre (3). Intérêt des 371t 14s 3d durant les 9 mois d'attente
(11t 8s 5d) et frais de fabrication (81t 6s) grossissent le co~t de 91t 14s
(
5d, dont le.raffineur doit tenir compte dans la fixation des ~rix. Cela est
d'autant plus nécessaire que les raffineurs ont toujours clamé, à to:rt ou à rai~
son, qu'ils ne rattrapent pas tous les frais engagés ~près la vente.
On ne doit pas ignorer aussi le profit du négociant. Toute chose
qui suggère que celui-ci a nécessairement intér~t à vendre à des conditions
avantageuses, donc à un prix plus haut que celui auquel les sucres sont
vendus aux îles.
(1) T~ESEE (F.), Né2Dciants bordelais et colons de
Ces droits sont: 8_ssurance maritime
2,5 % en
et avarie ordinaire, frais de décharge, Entrée et sortie des magasins, rac-
Co,c.:':"codage des toiles, =éparation des barriques, fonçage et défonçage, "vin-
dage" et "pezage", Droi t de domaine d'Occident, "aux gardes" et droi ts -="u
"poids", nagasinag," (1 C sous par banque et par mois), port de lettres, c(),~
"1issior. de vente (2;'), ducroire (1 %) et intérêt des divers "débours" c21-
cèllés à 0,5 (' -;;ar_::mois.
r
(2) Pémoire des reprL~sentants du commerce du Havre sur le commerce d'12sucre ra-
finé en France, en Angleterre et en Hollande. 20 rai 1766. AH F
1639.
(3) Ibidem.
4('(
Cette recherche des prix en France au XVIllè siècle peut paraître,
è-e ,n·i:r.e abord, UD.e tâc~.::. relativE!J!l~n~Jacile._AJ 'examen, cependant, les
difficultés de l'entreprise ressortent. Difficultés dues à lindigence des
informations. Le bureau de la balance du commerce chargé de cette collecte
d'information a fonctionné davantage Comme une simple chanbre d'enregistre-
~ent que comme un vérita.ble appareil statistique. Il s'est ?ar conséQuent
berné à rendre compte des quantités et des valeurs générales et jamais des
--:':"ix. Cettei:1dication n'apparaît systématiquement qu'à. partir de 1791. La.
loi du 22 Août 1791 prescrit de nouvelles dispositions quant à la tenue
des registres de commerce. Elle est renforcée par la circulaire de la régie
nationale des douanes du 17 Janvier 1792. Les instructions sont les suivantes
les receveurs particùliers dressent les états des importa tians et eX})orta-
tians de leur localité qu'ils adressent le 2 ou le 3 du mois suivant au re-
veur princip~l de leur arrondissement à partir desquels celui-ci dresse un
état général relatif à son bureau. Cet état est envoyé à Paris avant le 15
de chaQue mois. L'intérêt de ces registre réside dans le fait qu'ils désignent
désormais l'origine des sucres, la destination, le prix unitaire. Cela permet
de suivre la conjoncture particulière de chaq~e bureau.
Ainsi, si pendant l'Ancien Régime, les indications Œe prix s'avè~
rent épisodiques, [pendant la Revolution, elles deviennent nlus ré,çnl1ières.
.
~
~alheureusement, nous n'avons pas pu rassembler tous les registres des
différentes directions. Avec plus on moins des lacunes, les renseignements
concernent les directions de Nantes, le Havre, Bordeaux, Lille, ~:arseille et
Besançon.
~and ils existent, ces prix doivent être pris avec beaucoup de
préoaution. On doit vérifier s'il ne s'agit pas des évaluations administra-
ti~es faites )our la perception des droits d'entrée. En effet, le prix d'éva-
lU~Dion n'est pas le prix de marché ou le prix courant. ~Jr..e telle confusion
àonnerait au mouvement des prix, une vision trop uniforme, st2~ante parfois
Qu'il n'en est en réalité. En effet, il n'y a pas une uniformité de prix
~'une place à l'autre. C'est donc une reconstitution des prix par place de
<Ir Î
commerce l'Ju'il est uti:es ,::e f,qire.
Ce que, seuls les états du commerce :!,e la.
)...~
:'érioèe révollltionr:2,iY" -=-)er~"ttentdde. réa,liser. Cette évolution des prix
doit se faire égale~ent par espèce de sucres en tenant compte de l'origine
du produit. La précision est i~portante car, les sucres bruts, terrés et
têtes provenant de S2int-Do~ir;l"·ue, sont cotés généralerr:ent plus cher Gue
ceux des autres colonie::;, (~, tte colonie ayant la réputation de fournir les
neilleurs sucres
•
,,::: :'rix varie aussi selon la quali té du pro-
duit. rI est en effet évident que, les première; seconde et troisième sortes
de sucres"D!t"Ut et terré sor.t évaluées différemment. Les premières sortes
étant plus cher Que les secondes, les secondes plus cher que les troisièmes
sortes.
Nous étudierons le cas du sucre en pain un peu plus loin (1).
Nous retenons surtout les prix de vente aux étrangers étant entendu que ce
travail concerne la réexportation. D'autre part, on ne doit pas confondre
les prix courants en France et le prix fait aux étrangers. Le co~sommateur
français supporte le poids des impositions, les étrangers en sont exemptés.
Les évaluations unitaires sont souvent par quintal, mais on ren-
contre aussi des prix par lb, notamment en ce qui concerne le sucre en pain.
fous retenons donc les prix
2~ quintal pour respecter l'esprit.du commerce.
Rareté des prix unitaire caractérise la période d'Ancien Régime.
Nous ne disposons,en définitive,pour cette période, que de trois séries à
peu près complètes
deux séries de prix résultant du dépouillement des
documents relatifs à la foire de Beaucaire, prix des sucres terrés et prix
du sucre en pain (sucre fin et sucre mélis). La troisième concerne le sucre
brut ~ !1antes. Pour les autres places, nous nous contenterons de reproduire
les renseignements fragmentaires que nous avons pu rassembler.
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Eyolytion de. prix de• • ycre. brut., terré. et tlte dai!
différente. plac •• de commerce (176~-1792)(1).
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(1)~ 1. ~ 1 prix du sucra brut d. 1,~5 à 1789. Cf. DEER (N.), !2!
of .ugar, Vol.lI, p.5}0.
5. Marseille 1 Mi.oir. de l'iDspecteur des aanufsctures de
sucre tarré brut et tlt. 1 1791. Ré.xportation sarobaadi.es d ••
la l'n~ralité de PrOY.Dc. M. I.b.rt d. Saint-Paul(idé. du
t~l.s, Nante. année 1791. AN F121671.
co••erce da la navigation et des fabriques d. Haraeill.
(1779). Il s'.git d. la ... Botte d. suer. terr ••••
2. Dunkerqu. : 17119 : exportation,Port franc de Dunk.rqu•• AH1'12 1666 •
17')1 "Directio" de Lille, Bureau principal d. Dun-
6. Foir. d. 8.aucair. 1 AN y121229 . t 12}0.
kerq~•• Réexportation des .,rchandiaea des isl ••••
AN!,l 1671.
). L. Havre 1 1186 : Hém.oire des rcprés~ntaDt8 du cO.Ullerc. du Mayren
AIl Fl "'11>3"A.
'?~1 : Héexportation des marchandises des islee. L.
Havr. année 1791. AN!,12 1671.
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~otre analyse du ph~no~~ne des 9rix reposers sur l'exeMple de Nantes,
"Jou::.·....'!es· s~lcres bruts et de ~eaucaire p:mr les sucres terrés et r?!~finés.
~on point parce outil est repr~sentatif de l'p.sembJe rlu ph~nom~ne, mais
fau.te d'autres renseignements. 12. s'agit Clonc plus d'::'::'lustrer nos propos
sur les prix ~ue d'en donner la figuration exacte. ::ous ferons 3ppel à d' au-
tres chiffres cependant pour montrer la non-conformit4 des prix d'une place
~ l'autre et, en ce ~ui concerne les sucres bruts, pour montrer qu'il n'y a
pas un prix unique m2.is que celui-ci varie en fonction de la quali té con-
sidérée.
c / Le mo~ment des prix d~cre brut à :;;:mtes de i7M....i 1789.
Avant de décrire et d'expliquer le mouvement, il est utile de
relever l'imperfection de la s~rie statistique, base de cette ~tude. Elle
suggère deux remarques importantes. Lu. première concerne le marché. :~ous
avons déjà indiqu~ qu'il ne faut pas confondre les prix coloniaux et les
prix européens, les prix courantEet le prix réglementaire fix~ pour la
perception des droits.
L~s prix p~és par la ferme sont en fait ce qu'on appelle les prix d'éva-
luation pour la perception des droi ts. Ils ,représentent les
. .
4/5e du prix r~el des sucres aux îles t la remise du cinquième conpen,ant
le co~t du fret et les frais divers supp'ories par le·negoc1ant (1). Pierre
~LUCHON avance le chiffre de 17 % du prix payé aux îles : 10 ;~ pour erreur
de pesage et 7 ?~ pour perte au cours du voyage (2). Le chercheur doi t donc
~tre sensible à cette pratique générale car, prendre sans discernement les
chiffres qui apparaissent, c'pst se mettre en deç~ de la r~alit~. Les
r~sultats qui en ressortent seraient par conséquent inexacts.
Le prix colonial et le prix d'évaluation ne sont pas le 9rix de
vente en Europe. On doit donc nécessairement préciser l'origine des chiffres
utilisés. A défaut de cette précaution élémentaire, :Toël DEER nous offre
(1) TA~~DE (J.), ~~ co~~erce colonial de la France à la fin de l'Ancien Régi~e
Evolution du système de l'exclusif de 1763 ~ 1789. Teme I, pp.278-291.
(2) PLUc:1CN':(P.), L2 rcute des escLwes ••• , ~p.'2P9-290.
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tombe d?:1S 1", ",Êr:e erreur quand il parle d'~ mcuver:1ent 'ies prix bordelais
--_.
"lU XV1II2
si2cle (1). A partir de la série::es p:dx c=,:è::Ü?UX, il ;:rf-~ter.d
d4terminer le ~ouvement des prix ~ 30rde~ux. Ses c~if:res ~r8vienner.t de
la série du Domaine d'Occident. En tenarlt ccmpte des ex~li(.o.Livn5 que nous
avons fournies, il apprait nettement que l'auteur à confondu le mouvement
des prix aux îles et le mou~ement des prix à Bordeaux ~ême. Ce de~,ier ne
peut être retracé qu'à pa.rtir des prix de vente à Bordeaux, donc àu prix
européen. Les chiffres sont de plus inférieurs à Ce qu'ils doivent être en
rÉalité à cause de la remise du cinquième.
La sec~nde remarque ccnce~e le caractère uniforme du prix. Le
prix v2rie selon la qualité du sucre considéré. Or, l'auteur ne précise pas
la qu~:iJ.i té de sucre br'~ t en q'J.estion. On en di stingue généralerr:ent troi s
oualit2s ou trois sortes. Le prix varie selon les qualités. Un rappor~ des
co~~isGaires généraux du commerce en 1786 le montre s:~irement : cette
année-i.à, la pre:c.i~r,c ~C'rte de sucre brut est cot'e i! 3,2 \\. ,r
=.t le quintal
la;seconde sorte de 343..37 It et lé'. troisième scrted:! 3C >. ~3 It (2).
•
Ces deux remarq~es invitent donc à la prudence quant à l'appréci-
e.tion de cette série des prix. Le commentaire qui (sa en a~coaler-ne"'1JrétE'nd
nullement donner la figurqtion exacte de la conjoncture du marché nantais •
•
La série comporte, de plus, cinq années de lacune qui altèrent
considérablement l'analyse. Il s'~git des années 1766: 1778, 1779, 1780 et
1781. La courbe des prix permet néanmoins de dégager les tendances génér2.les.
On en distingue trois: une tendance à la baisse des cours, une tendance
à la hausse, une ~U";::-~ à la stagnation. en important cycle d'affaissement
des cours survient après la [lierre de Sept ans. Sùr le graphique: de 1765
à 1771. La hausse est de 6,45 ~; en 1767 p2.I' rapport au niveau de 1765, elle
(1) BUTEL(P.), Les r.él"Oci"l.nts bordelais, l iSu:::-o::e et les iles "'u XVIII~ siF>c~'"
pp.105-115.
(2)""Causes àe r.otre è.ésavé'_nt2.9"e dar.s le com:1erce de ::C2 2ucres r~fir.és c!1P2
l'étranger, ~oyer.s de:!.e réparer". !;,; !"12 1;:39 (.4).
,;.1' ;:
est de 3,45 " en 171)2 e~:e 3,57 en 1'769. La rerlont,oe de 17 7C· est purement
accid~telle. Ell'" provient vr;Üsemblablement rie;. dés2.stre de S2int-Domingue
donc d'une orientatiorl ~ L:::, haussp G""c ("'~"r':: coloni aux. L2 .~e,t.é ayant
-:endance à hausser les ~~;::,c'~9t 12. loi de l '8ffre et è.e 1:, de'J1;::r.de. C'est
sans doute pour casser les prix 8e;.X fles du Vent sur lesquels s'est faite
le transfert de la d.emande ::létropoli téiine Clue les négocLmts cnt répandu
cette année-là les bruits d'une guerre ::lQritime imminente. En effet, on sait
qu'à la veille des conflits maritimes, les colons qui ont peur d'une mévente
prochaine, ont tendance à liquider leurs denrées à des prix très bas. La
chute, l'année suivante, confirme le caractère accidentel de la hausse de
1770. La chute de 1784 est aussi accidentelle que la hausse de 1770. Elle
correspond à la ruée des négociants sur les îles après la Guerre d'Indépen-
dance américaine, donc à un accroissement subi t de la demande.' Celle-ci a
diminué pendant la guerre. Théoriquement, on devrait assister à une hausse
des cours et non à une chute aux colonies. A moins que cela ne corresponde
en Europe, à une diminution momentanée de la demande; les neutres qui ont
?articipé au commerce colonial pendant la durée de la guerre ayant eu le
temps de se constituer des stocks pour se dégager temporairement de la tu-
telle française. I l s'aGit 1.3. d',me simple hypothèse. La chute de 17e4 est
de 17,24 %.'
Deux cycles de hausse des cours se dégagent
nettement de la cour-
bes : l'une de 1774 à 1776, l'autre probablement de 1785 à 1787 (1). Ce
sont surtout les records d ' importations qui soutiennent ces ~~ri:-: élevés •
•
Trois cycles de stagnation des cours viennent interro~pre, le pre-
mier, la continuité de la baisse, le second et le troisième, la continuité
de la hausse: 1771-1772-1773, 1776-1783 et 1787 à 1789.
En somme, tout laisse penser que la tendance à la stagnation caractérise le
mouvement des prix àu sucre brut. ~ans le second cycle de stagnation, il y a
les années de guerre représentées sur le graphique, par les ann2es 17e1-17e2
et 1783 • Cette stagnation pendant les années de guerre surprend, àans la
- - - - , ' - - - -, --
(1) La hausse èst de 4,17 O( en 1774, r:e c ?' en 1775 et de 7,41 r~ ",n 1776 et de
7,69 en 1787.
4ln
~esure 0G le co~~ercp iu sucre est très li~ aux fluctuations de '- con~onc
ture atlantic_ue. Er. •~1, les débuts de guer~e se car'lcté:r-iser..t 'J2.C' ~lne
cou:r-s colJniaux qui ont, eux, tendance i
baisser. ~2.is cette ~e~~2nce ~6né
:r-ale à. ;'2. stagTlatior, ne "'!'!ontre-t-elle p;;s eue nous aVO:1S ::f:a.irp 1. :::es
llrix d'·5vùuation plutélt qu'8. des prix courants? Ç;ue les
sc~;.t issus
::e ~a sé~ie du Domaine d'Occider.t ? Paul '3r~ET;
A
01:'2>":"'V'-
=-e i:leme
:':oràeaux (1).
Les prix sont conçus ici à la fois comme indicateu:r-s et co~m~ fac-
teurs.de l'évolution économique elle-même.
Cette tendance géné:r-ale à la
stagnation des cours du sucre brut suggère donc des interrogations. Elle
invite à se demaDde:r- dans quelle mesure une telle figuration corres~ond
au mouvement réel des ~:r-ix des sucres bruts en Europe. Elle invite à se de-
mander si le.prix de ~arché des sucres bruts ~ cessé de dépendre des con-
ditions de sa production, et si les quantités offertes ne répondent plus
à aucun mécanisme régulateur.
Bien évide~~ent, nous ne pouvons pas répon-
dre à ces questions mainter.ant •. Ce qu'il est important cie signaler, c'est
que si tel a été le cas sous~ncien Régi"'!'!e, les événements révolutionnaires
..
y introduisent de sérieuses perturbations.
(
_.~"=~~
En effet, la péric:'..:; ,:,'~rolutiol'n2ire est caractérisée par une
exal t:::tion des cours' 2). Une hausse
qui provient des oauvaises récoltes
êUX fIes
dues aux troubles et de la politique inflationniste engagée depuis
•
1790.Cette flambée des prix affecte, du reste, toutes les espèces de sucres •
J.~1 premier trimestre de l'année 1791, le quintal de sucre brut est co-';;,:': de
~2 ~ 75 It lors de la réexportation vont de 55 à 88 It le quintal. Il~ vont
-: :
èe 88 à 166 l t au troisième trbestre et de 130 à 180 l t au quatriè:o~,: tri-
mestre. La progression est évidente.
(1) BJTEL (F.), Les r.é~ociants bordel~is••• , p.107.
(2)
VOlrer. ce qui concerne Bordeaux, F:r-ançoise '!'HESEE, ;Té,::-oci2.:1ts bordelais
et colons de Saint-Domingue, pp.126-19C. Le marché àes denrées coloniales
est désorganisée en raison des variations constantes des cours, cou:r-s des
assignats et cours des changes. Le:; prix en:r-egistrent donc :Ces ;:',1ls?tiJns :::e
l ' acti vi té poli tique et sociale.
-
- - - - ------- - --
sucre brut est cot'; ~ 5·~ Dunkercue,dè 3q 8. 40 It à 30rl:e"_ux. 2n 1791,
, ...
tand.i.s (lue 19 sucre bru t '=;1'0 t vendu
.L, ,
55 \\ 8<":
166 It et 130 2. 1(;( It, i l ::e Vê.ut que 30 It à Dunkeroue, au pre",ie:- et 2-U
second tri~estre et 45 lt 2-U dernier (1). Au Havre, le2 cotations sont
successivement: 60 It, 69 It, 73 It, 98 It et 150 It. C'est a~ssi le lieu
de montrer lEI différence de prix selon l'origine du sucre. Il n':,,- a pas
beaucoup d!ex~~ples ~alheureusement : notcns à titre indicatif l'exe~ple
du Havre en 1791. Au second trimestre de cette année, tandis que le sucr8
brut de Tabago et de Guadeloupe est coté \\ 69 It le quital, celui de Saint-
Domingue vaut 73 l t. L'écart est de 5, SO c:'. Cette distinction d'origine
disparatt aux troisième et quatrième trimestres.
Les rapports des inspecteurs sur la tenue de la foire constituent
la principale source statistique de cette étude. La régularité des informa-
tions,notamment de l'indication des prix auxquels les marchandises ont été
vendues, permet d'établir une sf-sie à peu près complète des prix des sucres
\\ 5eaucaire. L'intérêt de ces documents provient aussi de ce que les inspec-
•
teurs n'ont pas négligé les détails qui ~our le sucre, est important. A savoir
le prix par quali té de sucre terré et de sucre raffiné: sucré ... Iii è e strcl"e'
mélis, tous deux formant ce o_u 'e!1 appelle le sucre en pain. Pour les sucres
raffinés, l'origine du produit est indiquée. On peut ainsi non seule~ent
suivre l'évolution des prix de chaque qualité mais aussi percevoir la dif-
férence des prix selon l'origine.
....
On remarque donc que le sucre fin est coté plus cher que le sucre
mélis : en 1786, le ~remier est évalu~ ~ 20 It le quintal et l~ seco~d à
50 l t, au rlavre. La difféYE::,ce est de 3(', 1 t. A 3e2,ucaire, cette è.ifférence
varie selon que le sucre fin est oriGinaire de 30rdeaux, de ;'arseille ou ,je
Fontpellier. Un exemple: en 1771], le sucre ë1élis est cot:!. de 112,42 < J. 22,C6~
(1) Le niveau encore bas des prix à Dunkerque si,qnifie-t-il oue cettp ~lc:ce
r~siste plus eue les autres à la flaMbée des prix? San? ioute.
de "loins Que l~ sucre :ir. ':Ey,':~e ::'0rr: 0 '1UX, 54,22 0
à 37,65
de Ya~seille, et 43,22 ~ 22, .~~up celui de Montnellier.
~nest-ce p3.S :nontrer dé,j\\ 1ue le sucre ~ïn n'a p3.S llne'
. cotati:m l.mi:'"l!o:ne.
à Eeaucaire ? Le sucre fin de 'hrseille est cot"; plus cher ~U~ cel1.ü je
Bordeaux ou celui de Mo~~ellier ; le t8.ble~u numéro 2 le mont~e p?xfaite-
ment. Choisissons. quelques exemples pour illustrer ce const~t : en 1764, l~
différence avec le sucre fin de 30ràeaux est de 10 à
'6 l t en faveur de ce-
l_i de'Mareeille et de 5 à 6 It comparativement ~ celui de ~ont~ellier. ~
171:9, le sucre fin de Bordeaux vaut """'à 21 It de moins que celui de l'!arseille.
Le sucre fin venu de Yontpellier v2ut S à 18 lt de moins que le sucre fin
venm' de r-"arseille.
La cherté du sucre fi::. marseillais par rapport à celui de Bordeaux
et de ~~ontpellier ne signifie pas que les conditions de production soient
différentes à rarseille. Cela est le fait de la dualité contradictoire des
structures économiques d'Ancien Régime. Notamment du privilège de la res-
titution des droits d'entrée accordé aux uns et refusé aux autres.
Bo:deaux et Montpellier font partie des villes jouissant de ce privilège;
Marseille n'y est inclu qu'en 1786. ~ villes tioivent retrancher du prix
1
courant en France, le mon tant de 1"a ~esti tu tion. }1arseille ne le peut du
fait de ces droits. Théoriquement, ses pris devraient baisser après 1786,
...
c -
~ ~ ~
mais ce ne fut pas le cas.
Mais la série des prix à Eeaucaire, bien que détaillée, n'offre pas
la précision nécessaire. Les statistiques expriment des mouvements, des or-
dres de grandeurs plutôt que des valeurs absolues. Il y a un prix minimum
et un prix maximum entre lesquels la fluctuation s'effectue. Lé différence
de cours~est plus perceptible au niveau des sucres terrés. En ce qui concerne
le sucre fin, seuls les prix marseillais se dégagent nettement. Ceux de
:Bordeaux et de Montpellier sont difficiles ,~ différencier quelquefais, 3-
cause de cette imprécision. C'est le cas en 1769, 1773, 1777, 1778, 1779,
1728 et 1789. 'm"777, le prIx miniT':'lum est inférieur à celui de 30rdeaux,
Loi·
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GRAPH. N°a
EVOLUTION DU COURS OES SUCRER TERRES A LA FOIRE BEAUCAIRE
1764-1719
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tandis oue les p~iy. naxima sont ~dentin~e2. Sn 177 2, 17r.8 et 17 29, les ~rix
.,:,----
de ~ontpellier ne se distin~le~t de ceux rte 30r~e~ux que par le prix m a x i - · ·
1:U[;1.
Les autres 2.n:-:ées, les l'rix de ;"ont"Dellier ~e si -t'J.ent dr:'S ::2. four-
chette constituée par le prix niDirr.u!':\\ et le prix ':12xi:'7l'lL'J1 'eJordel2.is. En ;"764,
1771,1772,1776,1700,1782,1783 et 1784, les prix sont ideDtiques. Les
ieux villes se démarquent nettement en 1765, en 1770 e~ en 1776. ~ 17~~, }p
sucre fin de !':ont1Jellier est coté plus che~ que cel.15.::e ::'Cl'r>c":, en 17 70
et en 1774, c'est la situation inverse.
Il reste à analyser les courbes d'évolutions. L'observa.tion de
ces courbes révèle q11e d'une façon générale, les cours des sucres à Beaucaire
ont suivi le m~me cycle d'évolution. Celui-ci est caractérisé par un triple
mouvement: baisse des cours, hausse des cours et stagnation des cours.
Les phases de baisse des cours sont assez dis~ersées. Un premier
cycle d'affaissement s'annonce de 1764 à 1769. La baisse des prix en 1764-
1765 concerne surtout le sucre fin de Bordeaux et de Parseille ainsi que la
première sorte de sucre terré.
•
Le sucre fin de ~ontpellier et les deuxième et truisième sortes de sucre
terré soutiennent le·même prix que l'année précsdente. ~ 1769, tous les prix
sont en baisse, à l'exception du sucre fin de Marseille dont le prix reste
stable. Dans la décennie 1770, On constate deux baisses annuelles de prix,
l'ur.e en 1775, touchant le s-:.tcre fin de Bordeaux, le prix du suc~e marseillais
étant en hausse, celui des sucres terrés est en stagnation. L'uutre en
1779 touchant exclusivement le sucre fin.
Les sucres terrés sont en hausse.
Deux autres baisses annuelles apparaissent à la fin de l'Ancien Régi:ne : la
première----en-1783 liée sans doute à la fin de la guerre ma.ritime et à la re-
prise du commerce colonial.
La seconde en 1789, liée sans doute à l'2.bondpnce
des sucres sur le m2.rché.
La progression des prix F]e situe dccns 'é( ~i,;ci';mie 17 7C, déb1J-;; 17>:0 (1).
'4~.-
1e mouvement commence en 1770 (2) avec les ;i 'uvelle8 d~J désastre de Fort-'l'.l-
Prince. La hausse affecte surtout le ~rix d~ sucre :in de 30rde2ux et cel:1i
des sucres terrés. En 1772 ",t -;ca:diculièrement en 1775 et en 1776,
li" ':-l'lusse
des prix accompagne l' ?rri vée de grande quanti té è-e sucres ~ lé'. foire. La
hausse de 1772 affecte surtout les sucres terres. Tandis que celle de 177:
est plus générale : elle affecte aussi :ien les sucres raffinés que les
sucres terrés, notamment la s~co~de et la troisièT.e sortes.
La hausse de ;774 ~ffecte le sucre fin de Marseille et la première
sorte de sucre terré. Elle est liée aux conditions métécrologiques. Les vents
contraires en emp~chant toutes les baroues d'arriv~r ~ destination, ont pro-
voqué une certaine pénurie, d' 0'1 la i'12usse des cours des produi ts venant
de Marseille et au contraire p2.r une sta6'l;etion du prix du sucre fi" de
Bordeaux et de ;':0 nt::: el l i er. Celle de 1777 a été provoqué excer>tionnellement
par les négociants bordelais. En effet, "les Bordelais étant chargés de
beaucoup de sucres ont pour s'An défaire plus 2vantace'_<sement fai t courir
le brui t que les ourag::ms et la sécheresse avoient tout détrui t dens les
isles,'françoises de l'Arnériq:le et Que d'un autre CÔt2 lesin.surgens (sic)
Il
en prenaient beaucoup ce qui les a fait renchérir ici considérablenent
quoiqu'il. en eût plus que l'année der.-iière"(3). Telle est l'explic2.tion
qu'en donne l'inspecteur des ~anufactures de la province du Languedoc, le
sieu,r Blanc. Toutefois, les prix les Dlus élevés, les meilleurs de la
série correspondent à la période de la guerre d'â~érique. Les guerres
les crises internationales pèsent lourdement sur les prix du fait de la
désorganisation du commerce colonial. Mais aussi parce que les négociants
en profi tent pour spéculer sur la di s torsion créée par 1". guerre entre les
cours colonraux et européens.
La stagnation des prix des sucres ne se produit p~s simultanéT.ent
(1) Les années de hausse des prix sont: 1770-1771-1772-73 à 1773-1774- 1775-
1776 à 1776-77, 1777 à 1778, 1779-80 à 17EO-?2.
(2) Il arrive moins de sucres que les années précédentes à l~ foire.
12
(3) Ail F
1229.
,1
en 1764-1765, elle s'observe sur le prix "28 ?'.~res teyr~s :;re;r:i~Ye et
seconde sortes et sur le sucre fin de 1'~ont':)ellic'Y. SE 17.J5-176g et 1771-72,
seul le prix du sucre fi~ de ~aYseille yeste st~ble. De 1772 \\ 17 7 5, le
;rix des sucres terr~s, première et seCOE~e sor~es se stabilise ~ 3eouc~ire.
Cette stagnation des prix touche le S'lcre fin tie :2ordeo.ux et de !':on"t-pellier
en 1773-1774. Elle se généralise en 1783-1764. A q'~oi att:::-ibuer cette ten-
dance à la stagnation des prix? I l est difficile de r~pondre à cette ques- 0
tion, aucune explication de ce phénomène n'ét~nt do~née par les inspecteurs
charg~s de superviser les op~rations de la foire. Cn peut cependant penser
q~.elle correspond à des p~riodes de calme sur le marché, disons à des p?:::-io-
des d'~quilibre commercial. ~ais cela peut provenir aussi d'une certaine satu-
'r2tion de sucres sur le ~arch~ en raison de la poussée des importations
sucrières coloniales. La consommation intérieure ét~~t très limitée à cause
d~
droits qui gonflent le prix courant en France, il faut vendre aux étran-
gers à des conditions à peu près satisfaisa.ntes. Toute la politique com-
merciale française en matière de sucres ne tend-elle pas vers une expe.nsion
des ventes à l'étranger? Après l'analyse du rr;écanisme commercial tendant à
~limuler ce commerce, il nous reste maintenant à appréci~r les résultats,
c'est4-dire à analyser quantitativement le cow.merce sucrier français ~ l'étran-
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sucres vers l'étranger. La :;:-rinci;:.?le lac1..:.ne
00ncerne les sorties de sucres
de Dunkerque.
Elles r:. 'y fi?!";.1rent ~~S, du ~oi.:-:s elles r:e figurent ~~.:::,f. èans l~~
états du comnerce élabor4s sous l'Ancien ~2~i~e. Cela provient de ce eue
"les né,s-acians ~'ont jarnais voulu ~. '?~Ssu~,::,+/ir ~ f2.ire des déc12.r9ti0ris dE 12..
nature de leur COl!l:nerce B.vec l ' étr2.!1=~er et le REceveur des feMes ',;' 3. .larnô.i.o
pu donner que des été'. ts è.es oarcD.2.ndises envo:,rés à. :Jun.kerque pour l'étranger
':'~.ns désignaEJ:."( 1~.
Les serties en directio~ ces ?r~vin.ces à l'instar de l'~tr2Lg€r
effE-ctif ne son.t pas aussi c~r:rçt2oi::'i~ées. Cr, cee: pr'J'ri;,ces,cc;:::nerçant li-
brerr:ent avec l'étranger, il :l a des ch8.nces qu'une p?ytje d9S sucres au i "
•
J
sont envoyés passent à l'étr2nger. LES états d~ commerce de l'époque révo-
..
lutionnaire Tontrent qu'il ne s'2~it ;2S è'~j,e sim;le évent~?lit4 mais à'une
réalité. Ces ~tats p2rticuliers semblent 2voir schappé tot?le~ent ~u contrô-
•
La seconàe interro~2ti0~ touche à. la longùe~r de la série statis-
tioue ?insi constitu~e. i';ous n'2vcns cessé de le r~péte!', les c:üffres ne;
recouvyent pas toutes les années.
Examinons ?i présent la st::"1.lcture et les aires de comrr.erce. ::ous
2vons distingué le corru'Tlerce avec l ' ~tY?:1~pr des ventes :éJi ~es aux navire:::
fr-~ç2.is part2.::.t pour le cnr.:nerce colo,üaL
Car les sucres ai.nsi vendU3
sont destinés 9. la ccnsrffirnation de l 'équi~aËe. Il serai t inex2_ct cie le::::
inclure s'2r..S le comm erce extérieur.
Sont aussi excl'J.es è.e l ' ?nal:rse -l e2
ex?orta±±ons vers les prnvir:ce2 fr2.n~2ises, ~êmes Œ?ns cE-lles r~rutées
( 1) ,,~. é1"lo i re sur l.a
..
414
étrangères (Vidi, :=re-:agne, Franche-Comt.i) et ,\\ l 'i:~st;or ~.,.;.e l';:itre.nger. Cette
indication n'est pas suffisante pour juger de la ciestir.tion effective des
ffiarcnandises. lli reva!'1che, nous prenons en corr,pte le" f'~:::>~:-t?,tions C.2 sucres
effe~tuées de ces provinces.
JI reste ~ préciser deux termes
la r~ex"po:::,t2."'tion et "l.' ez-pc. rt2. tion.
I.. ' errellr
com:r.unÉment commise en parlent du COr!!merce du suc:-e c'est <e :1e p"s les disso-
ci8r. la r~exportê.tion d~sig!'1e le surpl~s ÙES sucres ~rriv~s ~es colonies,
vendu en nature à l'étranger. Elle ne concerne donc que la vente des sucres
~ts, terrÉs, t~te et blal1c. :;'·J'entre dar.s llex~ort2_tian que le sucre fabriqué
en France, ici le sucre en pain e?sentiellement, ~ais aussi le sucre vergeais
candi. Les co~%ondre, c'est
importations,excessifs et inexacts.
fOI\\
C'est l'erreur que commet Jean TARRAD&l'arlant de la réexportation (1). Une
analyse plus pertinente montre d'ailleurs que la réexporta;ion du sucre blanc
excède quelquefois les quantités reçues des colonies.
C'est ce qui se passe
er- 1775, en 1771et en 1700. (2), par exemllle. Un rource,,-tage de sucre en pain
~ortÉ n'a de se::s que com~arativemer.t3. la O'~ar.tité prod~.üte e:1 France.
C'est loin d'~tre le cas généralement.
•
?;ctre série stati:::;tiq"J.e est loin d'~tre parf,"-Ïte, avons-nous dit.
:~ous avor:s affaire 3. des r-ésultats partiels. Pourt[nt, leur faisceau procure
des informations clés, suggestives en tout cas ~our le réalisation de l'objec-
tif èe la préser:te étude. Cette série stetistique est lG suivante; elle Con-
cerne s"J.rtout les sucres •
•
(1) ~ARRADE (J.), Le co~r.erce colonial de l~ FT~ncp à 18 fir. de l'A~cie:1 Ré5i~e.
~volution du systè~e'ie l'exclusif cie 1763 3. 1;129. TCf",e l, Ta:Jle2.u XI, p.266.
(2) En 1775,12. ?r2nce r'?,;oit;O 561 530 lb 'ie 2'..:.cre b12r.c de 2E3 colonies; b
:::-<:?ex'Oortatio:l porte sur 57 940 :;31 lb.
Il y 2. c;.n su!'1l1us de 26 909 101 1':J.
En 177 7 , elle en importe 74 476 7(',0 F"
la.ré:o::qort2tion est de 16 413 E1 1 le.
Il :r a un surplus cie 1 937 111 l D; en 17 OC, l'il":portGtion est de 14 864 1 î7I è
et la dex:;)Qrtéotion 17 323 639 ::'j. ='e s··:Dlus est d.e 2 549 522 1:J.
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R E E X ? C R '!' A T l 0 Jr
to~al annuel
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suc~ ter:'~ 1SlOci-e,',the ,_ suc:'e blenc!é.e le rier,: •
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C':!Or.~3, è~~e~da~t de 2a directio~ de ~n~~béry (:16 93é:~ d~ ~~cr~ te~~ ~t
"5 ~2;lo de sUc~e =lar.e). Pou~ :e!ar.:cn.le! o~~~~x eÀ~o:-tat~~~s scr.t : Fo~
ta~~1 er, Vf!'rrif!'l;r~~ è.e ,,'l':'''..lX, l~ :':1r19, ~·:~uz et ::o~l eer:-:eux. ~our V~le!1c.i e!"...."1eE,
:! z'a.f'it. ë~~ :;':!"l!a:.:.x :i~ ':':-r:€!Oi.l
"?t de Cor:d~. ~! la.,so~s-!érie F'.t:1f71, ~!'.
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C~ so~t ~.i~1,.;.e~e::t l!s e>00=ta-:ions fa..i'te~ o;ar !a 1.1reoe'tior. c!e =E'-
S2.r.ç':'::
(~~. ~~:,,!, ~·C!"E~, F.-f!'i c~ur~, pC:'j-:a=~ier, Jou~_e, leS' ~".;,rf-'~ ~t roëlce:--
~e:~:~), ':.! L:':~~(~~:!.:e"...i.:, ..·.I:'nue!: ~a=t:'~s, ::ct:.sseec't~t? Cos't~2r?'!1)~~ èe :':2.:--
~~il~e'la :ic~a~).
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et t~te.
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EVOLUTION ANNUELLE DES VENTES SUCRIERES FRANCAISEs
1775-1783
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79
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92
93
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10 324 5~9 LI
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L.t-i5~
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Ce tableau donne en graphique l'allure sui v~r..te ('loi.-;,' ..;r!:J,jJhic;.ue
ci-contre). On distinguë deux cycles d' évolu tion, un de ;:ro8:re~sion des -"8n-
~d
tes, l'autre de chut3 des ventes. Cette évolution étént elle-:::ême le refl(·t
de celles des importations. En cela, celle-ci est étroitemer..t liée ~ la
conjoncture internationalè, c'est-à-dire des co~flits maritimes ~~ de la
conjoncture sucrière aux rIes, c'est-~-dire des récoltes.
Trois cycles de progression des ventes sucrières se d~gagent
nettement du graphique
la première de 1775-1776 à 1776-1777, ,la seconde
de 1781-1782 à 1784-1785 (1), la troisième de 1787-1788 à 1788-1789. I+s
corncident avec les ,~cl~s de progression, Eles importations, confirmant
ainsi l'idée selon laquelle les sucres intéressent avant tout le commerce
européen de la France. Les chutes seœroulent également en trois phases
distinctes. La plus sp~ctaculaire, sur le graphique et avant la Révolution,
à" lieu pendant la guerre d'Amérique: elle se déroule de 1777-1778 à 1779-
1\\700 ; la chute est de 49,48 % la première année et de 70 ,35 ~< la secor.de
,année. Mais, le phénomène n'a pas la même cause la première et la seconde
amnées. La chute des ventes en 1778 correspond sans doute à un repli ,stra-
tégique. Il semble en effet qu'en pr&vision de pénurie prochaine, les
négociants aient cru n~cessaire"de consti tuer des stocks pour y faire face
éventuellement. En revanche, celle de 1779 et de 1780 est liée à la chute
brutale des importations coloniales. La preuve est que, quand co~mence la
~prise en 1781-1782, les ventes reprennent vigoureusement. En 1783, r±en
qu'avec la réexportation, les ventes ont progressé de 57,97 % par rapport
•
à . 1782.
Un secondcycle de baisse des ventes s'annonce en 1786 pour se
concrétiser davantage en 1787. Cephénomène est lié ~ une certaine satura-
tion sur le marché international. Il s'agit par conséquent d'une crise de
'Té vente. Au premier Septembre 1786, 8 828 881 lb de sucre blanc et brut sont
Cette limite de 1785 n'est certainemer..t pas la meilleure. On pourrait cer-
tainement s'arrêter à 1786. Mais le chiffre des exportations faisant dé-
faut, et celui de la réexportation étant inférieur au chiffre de 17e5, il
nous a paru prudent d'adopter cette limite de 1785 comme ~ypothèse de
travail • .
encore eh entrep6t à Bordeaux. Ce chiffre est porté à 10 151 6fC: lb au pre-
.0--.-.
mier Octobre suivant(1). Après 1789, les sources statistiques sont éparses
e? pré~tent-des lacunes-importantes. Aucun chiffre de vente tot~le ~'~st
possible à reconstitQer. Tbutefois, après 1790, :es troubles rsvolutionr.aires
at1X
rIes aidant, les-impor;t.ations ne semblent pas avoir a tte int les ni veaux
records de l'Ancien Régime. La hausse des ?rix des sucres est tr9s sensible
depuis 1790 (2). Cette cherté des sucres est une cause évidente de ~évente,
ctacun voulant attendre de voir comment évoluera le cours. Ce faisa.nt, il
n'est pas hasardeux de situer un troisième cycle de baisse des ventes après
1789.
+
Celui de 1787 et 1788 est l'effet bénéfique de l'arrêt du 25 ~ai
1766 pour la commercialisation du sucre en pain. L'extension des encourage-
ments à tous les ports du royaume et la nouvelle prime de 4lt par quintal
de sucre exporté ont donné un coup de pousse à l'~xportation de sucre en pain.
Le million de livres-poids est dépassé pour la première fois en 1787 et 1788.
Nous l'avons déjà indiqué, le niveau relativement bas de la con-
sommation intérieure de sucres bruts, terrés et surtout de sucre blanc, est
•
la cause de l'expansion de la ré~xportation. L'essentiel de chacun de ces
tyy;es de sucre passe à l'étranger sans subir de transformation en France.
(1) Affiches américaines Samedi 6..Jan.v-i-er 1787 (n o 2). Ai1 Col F3 163.
(2) Un premier palier est atteint à Bordeaux dès l'automne 1790 : le quinta.l de
sucre brut est coté 50 livres au lieu de 40, celui àu sucre blar.c 70 à 75 au
lieu de 95 livres. Cf. Fr::mçoise THESEE, Négociants bordelais et les rIes, p.16?
Tableau n075 - Part de chacun de~ ty"'Oes de sucres réexnortés
(1775-1789).
années
sucre brut
sucre terré
sucre t~te
sucre bl?nc
1775
96,70
52,16
0,08
imp.+ 26 909 101 lb
1776
59,78
~1, 00
1,32
98,23
1777
51,52
48,72
7,21
imp.+
1 937 111 lb
1778
14,38
35,03
5,79
55,56
1779
62,34
25,62
91,82
17EO
90,64
28,00
1,56
imp. + 2 459 511 lb
1786
59,83
76,00
?
1787
43,66
82,38
?
1788
51,39
~+ 3 '5-S7'~57~
?
1789
54,53
+ 8 835 863
imp. +
899 773
Plus de la moitié des sucres bruts arrivés des colonies est réex-
portée et ce avant ou après l'arr~t du 25 Ao~~ 1786. C'est donc exceptionnel-
le~ent que ce niveau n'est pas atteint en 1778 et 1787 (1). Tbut comme le
niveau élévé du taux de la réexportation en 1775 et 1780. Nous ne pouvons
malheureusement paseBréciser les raisons. Cette forte réexportation des sucres
b~~ts est l'un des paradoxes de ce commerce. En effet, si l'esprit de la loi
était respecté, les sucres bruts seraient entièr~Dent transfo~és en sucre
en pain avant d'~tre exportés à l'étranger.
•
~ant aux sucres terrés,ils n'ont occupé qu'une place relativement
faible dans la réexportation avant 1786. C'est que, contrairement à ce qui
aurait dû ~tre, plus de la moitié des importations reste en France même; une
bonne partie entrant dans la îabrication du sucre en pain.
, ~ - - - - _ . -
On netera enfin qu'à l'exception des années de crise d'importation, les
t
ventes sucrières françaises à l'étranger connaissent une progression régulière.
C'est le cas de 1775 à 1777: la croissance est de 1,97 1 après la guerre
d'Amér;Lque. L"analyse du tableau montre que l' évolu tian des ventes sucrières
à l'étranger est déterminée )2.r celle de la réexpor ta tioll.
..,
..~~'.:
Le sucre est vendu à l'étranger sous forme br~te ou raffi~?e. P~r
brut, il faut entendre les sucres bruts proprement di+'s, terrés, t~te et
blanc qui ne font que passer en entrep~t en France pour l'étranger. La poli-
tiçue commerciale française en matière de sucre s'inspire de l'idéologie mer-
cantiliste en ce sens qu'elle ne s'est attachée qu'à la stimulation des
exportations, c'est-à-dire au secteur des ~anufactures. La restitution des
droits et la prime d'exportation n'ont-elles pas été conç~es dans le but de
stimuler'12s exportations de sucres raffiné en pain? Le résultat des ventes
sucrières annuelles permet de4~r~ le bilan de cette politique. C'est d'un
constat d'échec qu'il s'agit dans la mesure où la réexportation est demeurée
la principale branche de cette activité. Plus que le discours, les chiffres
sont là pour rendre compte de la réalité.
Part de la réexportation dans les ventes sucrières an..'1uelles.
1775
99,83 %
1782
99,82
1776
99,68
1787
98,57
1777
99,60
1788
98,47
il
1778
99,13
1791
98,88
1779
97,67
1792
96,42
1780
98,65
La réexporta.tion 'tourne régul~èrenent au tour de 99 %. Le léger
fléchissement de 1779 et de 1780 est lié à la chute sensible des importations
•
de sucres bruts, par conséquent.à
la diminution de leur part dans la réex-
portation.
A partir de 17E6, sucres terrés et sucre tête, n2.is ?articulièrement
les sucres terrés prennent en gr?nde partie la direction de l'étranger. L' em-
ploi de suc~es terrés dans le r2-ffinage étant sans doute devenu inccmpatible
avec l'abaissement du prix du sucre en pain ~ l'étraDger (1). La moins Donne
quâli té du sucre t~te e:>..-pliQue la part très limi tée iestinée à la réexportation.
42C
En reve.nche, le sucre blanc qui ne peut ~tre consommé en F!'2.nce 3. ce.use ,lU .c r'·
droi t élevé de 22 1 t 108, 'mais surtout à cause de la production orléan,üse,
-------·--pE'.sse presqu'entière.!It~nt à-P-êtrangEn'- chaque ?:mée. Les sur,lus ~!,I)'lie:1!':er.t
sans do~te de stocks faits pendant les années précédentes. L'exp0rt~tion
de sucre en pain (1) appara!t dès lors com:ne un appoint à lé. réexportc:.tion.
Pourquoi les raffineurs ont-ils alors réclamé énergiq~e~ent, im-
patiemment comme ils savent le faire, des encouragements? Pour relanc~r
l'Qxportation assurément. On se trouve donc devant l'un des cas typiques de
posi tions et contradictions caractéristiques de ce commerce. Il nous semble
évident que, si en dépit des encouragements, les exportations de sucre en
pain ne réussissent pas à rattraper-1e-retard sur la réexportation, c'est
parce que la législation ne fonctionne pas correctement du fait des contra-
dictions internes. C'est ce handicap QU'il faut Techercher maintenant. Deux
facteurs essentiels sont à la base de cette situation: l'insuffisance des
restitutions accordées et la concurrence étrangère sur les marchés.
b/ L'insuffisance de ~a restitution comme facteur de ralentissement du commerce
----------------------------------------------------------------------------
La restitution à la sortie a été conçue comme un moyen d'augmenter
l'activité du commerce d'exportation. Y.ais, à l'analyse, le bilan s'avère
négatif. Ce bilan n'a cependant rien à voir avec l'opportunité m~me du prin-
ci~e. La véritable raison de l'échec provient de l'insuffisance du montant de
la restitution accordée. Ce sont les raisons de cette insuffisance qu'il
faut rechercher à présent.
La toute première concerne le montant de la restitution par rapport
aux droits payés. Celle-ci ne soulage pas entièrement le négociant. En effet,
nous l'avons déjà montré, pendant longtemps, jusqu'à l'arret d~ 25 Mai 1786
précisément, cette restitution a été i~complète. Elle a été unique~ent en
•
Nous ne prenons ~2.s en compte les sucres vergrois et c8ndi. Ils ne ~ont ~;,s
concernés par les resti~ùtions. Le premier 4tant du résidu de sucre. Leu~
absence dans l'exportation est due à ce12..
421
proporttion des droits d'entrée ou droits de consommation; le droit èe ~c
maine d'Occident et les sous pour livres addi tionnels en étaient exclus. Il
va sans dire -que la.-re.s:Ututlon-"ü''l-decnarge 'Pas corri'plètement l' ~tr2nger des
dr~s ffilr les sucres. Il y a donc incontestablement un désavanta[e pour le
Français surTes marchés. Cette question a fait couler beaucoup d'encre en
1785-1786. En effet, à la suite des plaintes des raffineurs de Rotterà~~ 2U
sujet. d'une pression anglaise sur le marché du sucre raffiné, pression due,
selon eux, à l'adJnission des ét1rangers dans les colonies françaises depuis
1784, les cOIT.missaires généraux du commerce entreprennent une grande con-
sultation en France pour déterminer les cause du désavantage dans la vente
des sucres raffinés à l'étranger. De toutes les chambres de commerce des
principales places commerciales émaneri-t-éfe nombreux éléments de diagnostic.
La restir~tion incomplète des droits figure en bonne place.
Le montant des droits non restitués serait de 61t 158 5d à Bordeaux
Cela se passe avant 1784.
En 1784, le droit d'entrée est porté à 12 shilling 3d 4/10 onces(1+). Pour
•
compenser cette ponction, le gouvernement porte la prime à 26 shilling (2),
soft 31 It 4s (3). Pendant ce temps, elle n'est en France que de 71t 17s 6d
par quintal. Le raffineur anglais reçoit non seulement 161t 9s 2d
de plus
qu'il n'a déboursé, mais il a un avantage sUX-leFrançais de 231t 5s 16d.
C'est pourquoi la prime en Angleterre est ~~e dans les milieux d'affaires
français co;nme un projet 'formé pour écarter la France du com.":lerce du sucre
(1) "Observati :ms sur les différences qui existent entre le rapportdej·~. è-e
Colonia et les mémoires des différentes 12hambres de COITunerce rela,ti vement :,.
l'exportation des sucres rat;inés". AN F
1639 A.
(1+) Au change de 3C deniers, cela fait 141t 14s 10d (change en 1786).
(2) "Observations sur le mémoi're è-e Vessieurs Boyelet et Dupor!t, commissaires
géné,2ux du commerce,sur le bas prix des sucres raffinés e.ng12.is"?
AN F
1639 A.
12
(3) AN F
1639 A. Observation sur un mémoire de Londres oui nous 2 ~té remis le
23 Septembre 1786. Dans un autre mémoire, cette prime est je 311t 148 6d.
";'22
raffiné en pain (1). Cela est préoccupant dans la mesure o~ les Angl2is ap-
p~ovisionnent désormais le Palatinat, la Lorraine, les t~ois Ev~chÉs, l'Al-
sace, Genève, Bâle (prtnutpe.Ï.entrep~t du ~::. Suisse), Soleurne, Ostende, les
Pays-Bas autrichiens, Louvain et Rambourg, en sucre raffiné.
La question est de savoir si cette fo=te pri~e dédo=~age complète-
ment le raffineur ~~glais. Elle est légitime car les calculs ~ontrent que
personne ne comprend dans les dépenses des raffineurs anglais les menus f=ai5.
Il en existe cinq principalement(2) :
- les frais ùe déclaration à la douane,
- :':.e droi t au profi t d'une caisse de~rce~
- un droit pour servir à l'entretien de la jetée des douves,
- une rétribution aux officiers du Roi,
- les frais nécessaires au recouvrement de la prime.
:Tous ne pouvons y rÉpondre, faute d'informations. Il est cependant évident
Que ces ~enus frais réduisent le bénéfice réalisé sur la prime. L'important
est de savoir que le raffineur anglais a un avantage sur le raffineur fran-
çais.!es chiffres, sur ce point, sont loin de concorder.
•
L'intendant de Colonia l'estime à 11t 13s par quintal de sucre
raffiné(3). Pour la chambre de commerce du Havre, il faut à l'Anglais, 1501b
de beau sucre brut pour faire un quintal de sucre raffiné commun er. gros
pédn de' 301b ou lump. Or, si les sucres sans distinction paient en .Angle-
•
terre 12 shilling 3d 1/2 de droit d'entrée, l'Anglais ne débourse que
18 shilling 5d 1/2 de ùr6tt d'entrée, il lui reste par conséquent sur la
prime de 26 shilling, 7 shilling 6d 3/4 de bénéfice qui, au change de
Il s'agirait d'un moyen inauguré par la nation anglaise, au retour de la
paix, pour se rr.ettre en état de supporter le poids écrasant de sa dette
excessivement accrue par la guerre ct' Am~2iq'.le. Cf • Observation sur le :némoi·
re de Messieurs Boyelet et Dupont. AN F
1639 A.
"Observation sur les différences Qui existent entre le ran::.crt de. ~,rL de
Colonia et les mémoires des différentes c~abres de commerce relativement
à l'exportation des sucres rafinés". M~ F
1639 A.
~. Il part de.l'hypothèse suivante: pour mettre l'Anglais et le Fr2n-
çais ~ égalité, il prend comme base de calcul 2251b de suc~e b=ut ~our ~n
quintal de sucre raffiné. Les 2251b de suc~e brut acquitteraient e~ An~le
terre 30.1.6. de droits. rais, à l'ex,?ortation, le raffineur recevrüt
31.14.6. de prime.
29 deniers, font 91t(1). Pour Eordeaux enfin, le sucre raffiné reSs8rtant \\
l' Anglais à. 631 t 1 Be et au Français et au Hollanàais respectivement à 801 t et
..
à 921t 3s, le raffineur émel-ais a '.ln avantai!e de 161t ?ar fJ..uintal de sucre
raffiné sur le raffineur français et de 291t 10s sur le raffineur holl?-ndais
(2).
Dans.un autre mémoire, cet avantage est ramené à 81t 165 10d(3). La réalité
est donc difficile à saisir.
Le second facteur de cette insuffisance des encouragements en Fran-
ce rÉside dans le droit énorme sur le charbon de terre étranger. Cette ma-
tière enTe dans le rafDinage du sucre. C'est la chambre de commerce de 30r-
.• _----
, ~ _
deaux qui fait ce diagnostic. Cela se comprend, Bordeaux en est l'une des
victimes qui tire son charbon de !Jewcastle. Le droit sur le charbon revien-
drait par an à chaque raffineur, 40001t(4). Deux sortes de droits sont per-
çus sur le charbon: un droit de 6elt 'Par tonneau à la sortie de Newcastle
et 'un drai t de 1501 t par tonneau
à Bordeaux. Ils formeraient pour le
::ù.ffineur borde~:i.is. une dépense de près de 15 sous par quintal de sucre raf-
iné, au delà de celui de l'AnglaiseS).
Le dia~ostic serait incomplet si on ne p~nait pas en compte le
!lOi'ds des impositions sur les sucres terrés. C'est, à notre avis, l'une des
causes fondamentales du désavantages des raffineurs français dans la commer-
ciàisation du sucre en pain à l'étranger. Ils en sont conscients, mais ils
év~tent soigneusement de se mettre directement en cause. C'est, en effet, sur
le~ pression que le gouvernement royal a imposé fortement les sucres terrés
venant des colonies comme marchandises de luxe. Il aurait donc été sage de ne
point en employer dans le raffinage, la restitution n'étant pas en proportion
de la perception des droits sur le3 sucres terrés. ~àlheur~tt~ement, le même
(1) Lettre des re~résentants du co~erce du ~avre 20 ~ai 1786. A~ F121~39 A.
1
( 2) '1",
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d A ' " l;' 21?, 3Q A
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12
(3) Observation sur les différences ••• AN F
1639 A.
(4) Avantaees ehfacul tés des Anglais et des Holland"lis dans la fabrication des
sucre" AN F
1639 A.
(5) Observation sur les différences qui existent entre le rapport ~e ~2 de Co-
lonia et les mémoires des différentes cha.-nbres de commerce ••• A?'F
1639 A.
p~()fit égo'lste qui a été à l'o~igine de ces droits éle,,-és,les a poussés
à les raffiner. Une œlle inconséquence a rendu les encouragements totale-
ment inadaptés.
Il nous est pratiquement impossible de déterminer le poids réel
de cette imposition sur les prix. Toutefois, il semble évident que l'emploi
des sucres terrés dans le raffinage ne permet pas d'abaisser les prix à
l'étranger. Cela a engendré une insuffisance chronique des encouragements
et le Français, ne pouvant proposer son sucre à l'étranger à bas prix, r~
nonce à le faire pour se consacrer à la réexportation; celle-ci s'avérant
meilleure que la transformation. D'où le dépérissement de l'activité du
commerce d'exportation.
Ce déperissement est accentué par le fait qu'avant l'arr8t du 25 Mai 1786,
les encouragements sont limités aux$eules villes de Bordeaux, la Rochelle,
Rouen, Dieppe et Cette. Les autres, Nantes et Orléans en particulier, l'ont
toujours r~clamé en vain. Or, toutes les villes désignées n'ont pas pu
remplir toujours leur mission.
•
La raffinerie de Dieppe avait fermé ; Rouen aété très longtemps
paralysé par le droit local de 50 sous perçu sur les sucres et la cire(1).
Le nombre de ses raffineries serait passé de 20 à 3 en 1779, ne pouvant
établir avantageusement leur sucre à l'étranger au-dessous d'un certain
prix
• Nous n'avons pu trouver d'indications sur le raffinage à la Rochel-
•
le. ~uant à Cette, elle n'a abrité que deux raffineries. La deuxième, celle
du sieur Sabatié a été transféré4tà Montpellier. En définitive, seule Bordeaux
)i
est mieux munie à cause deres nombreuses raffineries. N'est-ce pas la raison
pour laquelle,il a été le premier ~xportateur de sucres en pain?
(1) Cf.
SUpra p. ,3D
425
L'encouragement à l'exportation n'a pas été institué pour con-
tenter le raffineur, encore moins le consommateur ~tranger. Il est l'élé-
ment d'une stratégie globale, la lutte contre la concurrence étrangère sur
les marchés européens, ceux dufurd en particulier. En effet, dans un con-
texte de concurrence effrenée, établir ses sucres au plus bas prix possible,
c'est obtenir la préférence sur les marchéswec comme conséquence, l'aug-
mentation de l'activité du commerce d'exportation. Mais cela suppose que
la France raffine la lI8.j eure partie des sucres de JI.a colonies. Or, si elle
reçoi t
150 000 barriques de sU'êrlr-par an, elle ne peut en
raffiner qu'environ 30 mo : 20 000 de sucresterré,.t 10 000 de sucr~ bru~
(1). Le reste, les 120 000 barriques sont réexportées. Nous avons montré
que la réexportation représente environ 99 % des ventes sucrières françaises
à l'étranger (2).
Les sucres terrés et le sucre blanc, du fait de l'éternel droit
qui les frappe, sont desœrchandises toutes indiquées pour la réexporta-
•
tion. Les étrangers étant autorisés à les enlever en entrepet en France
en ne payant seulement que les 3 % de Domaine d'Occident. La consommation
nationale demcres bruts se trouve paradoxalement réduite par l'usage d'une
partie des sucres terrés. Ce surplus est également réexporté. L'étranger
a donc entre ses mains deux sortes dell8.tière première: les sucres terrés
•
et bruts, et un produit fini, le sucre b~anc. Cette attitude contradictoire
est la cause fondamentale du dépérissement du~mmerce du sucre en pain.
Théoriquement, Hollandais, et Anglais n'ont ~~'avantage sur le
prix de la matière première par rapport au Français. ~lon la chambre de
commerce defurdeaux, le Hollandais qui tire son sucre de France, l'obtient
à 12lt de plus que le Français (3). Cette dépense supplémentaire $t la
somme des frais annexes acquittés : la commission l~i revient à 2 % de la
valeur dela Barchandise, l'assurance à 1 % 3/4 et le transport à 10 % 1/4.
Cela représente 14 %al total (4).
(1) Lettre des représentants du commerce du Havre 20 Mai 1786. ANF121639 A.
(2) Cf.ÂktPra p. L~1~
12
(3) Mémoire de Bordeaux. AN F
1639 A.
(4) "Résultat des informations prises dans les raffineries d'Orléans sur
l'examen des montres de sucre a~~lais tirées de Londres et d'une facture
d'un envoy fait à Ostende"~ ANF
1639 A.
426
A cela s'ajoute les 44 sous 8 de de droit d'entrée en Hollande(1).
Il est perçu sur chaque quintal de sucre. De plus, le Hollandais qui utilise
le sucre terré comme matière première paie plus cher que le Français. Il
lui faut 150 lb de sucre terré pour Jbtenir un quintal de sucre raffiné.
En 1786, un quintal de sucre terré
ordinaire œt ~alué à 54lt. Les 150 lb
de sucre terré valent 81 lt. En déduisant de cette valeur 10lt de bénéfice
relatif au droit de consommation qu'il ne paye pas, les 150 lb de sucre
terré lui reviennent en entrepôt à 71lt.
Un quintal de sucre brut est coté 30lt. Les 225 lb de sucre brut du raf-
fineur français, lui reviennent à 67lt 10s. Il peut,do~~ théoriquement
établir son sucre raffiné à 3lt 10s meilleur marché que le Hollandais(2).
Les sucres brutsœs colonies anglaises (3) valent communément un
cinquième de plus que ceux des colonies françaises : en 1785, le prix moyen
du sucre brut à Londres serait de 47lt 10s ; il est évalué à 59lt 8sous en
1786 (4), le sucre brut conte alors 30lt en France. Le Français bénéficierait
en plus, d'un huitième demins deatière première que l'Anglais, soit 4lt
1015 (5). Cela provient sans doute de~ différence des poids et mesures:
•
le quintal d'Angleterre vaut 112 lb, soit 103 lb poids de mare(mesure de
~---Paris). A l'analyse, cependant, cet avantage n'est qu'une apparence car,
Hollandais et Anglais SOLt à m~me d'établir leurs sucres raffinés à meil-
leur marché que le Français •
•
Les raisons avancées en France pour justifier cette situation
sont de trois ordres : emploi plus avantageux de h mélasse tant en Hollande
qu'en Angleterre. le sieur de Colonia estime à 20lt, le bénéfice que réalise
Observation sur les diff~rences~i existent entre le rapport de M. ~e
Colonia et les mémoires des différentes chambres de commerce ••• ANF1 1639A
"Cause de notre désavantage dans le cocv~erce de nos sucres rafinés chés
l'étranger, moyens de le réparer". ANF
1639A.
On distingue 10 espèces~ sucre brut: Antigue" Barbade, Dominique, Gre-
nade, Jama!que, Montserrat, Sàint-Vincent, etc.
(4) "Observation sur lf~ mémoire de Londres qui nous a été remis le 23 Sep-
tembre 1786". ANF
1639 A.
M8me source que la note 1.
427
l'Anglai~ sur la vente de la mélasse par rapport au Français: l'un vend
â24lt le quintal, l'autre a 101t. Le raffineur anglais tire, de plus,
25 lb de sirop de plua que le Français par quintal de sucre raffiné(1)
plus bas prix de l'intér3t de l'argent et 'du charbon de terre et écono~
dans les frais de ~ansport. Ce dernier facteur l'emporte largement sur les
autres, en ce qui concerne la Hollande. Sa proximité des principaux
marchés de consommation du Nord est un Œout fondamental. De plus, le
transport par canaux et par le Rhin étant moins coQteux, le raffineur
hollandais dispose des m!mes avantages vers le Sud.
D'après le sieur de Colonia, il peut faire ~ansporter à BAIe pour 6 It,
le quintal de sucre en pain. Le Bordelais doit p~yer')21 It de voiture; il
a donc un avantage de 15 It sur le prix.
En effet, le quintal de sucre raffiné revenant à Amsterdam à
92 It, i l peut tHre vendu à 98]t à B~le et à .3trasbourg, tandis que le
Bordelais, à qui il aura coQté 80 It, ne peut le donner à moins de 101 It.
A Soleurne, les frais du Hollandais sont de 8 It. Le Bordelais doit payer
20 It de voiture. Ce dernier n'obtient la préférence qu'à Genève: le
•
Hollandais a 15 It de voiture à payer, le Bordelais n'en n'ayan> que 13.
En somme, l'eMPérience démontre que l'avantage qu'ont les raf-
fineries étrangères de tirer des ports de France les sucres terrés et les
sucres bruts par entrepet joint au bon marché de leur transport, leur
1 permet
d'établir leurs sucres raffinés ~ un prix relativement bas, aussi
bien dans les pays du Nord que dans les pays et province à proximité du
Rhin. Il~t m!me indiqué que souvent, enœmps de guerre, les Hollandais
pouvaient en !ournir à Paris malgré le groS droit d'entrée (2). Il~ ont
ainsi été, pendant longtemps, l~s principaux fournisseurs européens, pro-
fitant de ce que la prime à l'exportation était insuffisante en Angleterre.
(1) Observation sur les différences qui existent mtre le rapport de M de
Colonia et les mémoires des sifférentes chambres de oommerce ••• ANF'21639A
(2) "Observations sur le mémoire de Messieurs Boyelet et Dupont, commissai-
res ,~néraux du commerce sur le bas prix des Gucres raffinés anglais".
AN F
1639 A.
428
Lo~sque oellé-ci augmente en 1784, la prime à un montant supé-
--<--- --rieur a.ü--arot~d'etftr-i-e-,. ses-raffineurs obtiennent- la préférence sur les
différents marchés, supplantant les Hollandais et les puissances moins
hab Hes qu'elle.
Le raffineur anglais semble avoir joui d'un avantage certain
aussi bien sur le Français que sur le Hollandais à partir de 1784. Les
calculs faits par les différentes chambres de commerce le démontrent.
Nous les citons à titre démonstratif, mais ils doivent en aucun cas Itre
pris pour argent comptant. Dans ce domaine, il faut compter davantage
avec l'illusoire qu'avec des vérités éternelles, l'exagétation-étant sou-
vent de règle.
La chambre de commerce de Bordeaux, l'un des centres les plus concernés
par la crise, estime l'avantage anglais ~ 16~ et à 291t 10s par quintal
de sucre raffiné, respectivement par rapport au raffineur français et
hollandais(1). Dans un autre mémoire, elle ramène cet avantage à 81t 16&
10d sur le Français(2).
1
Mais, en plus de l'avantage du cont de production, le ra~fineur
~-
=-=-angJ.ais_use de moyen de transport à meilleur marché. C'est largement suf-
fisant pour 8tablir à l'étranger son sucre en pain au plus bas prix pos-
sible. A preuve, il serait à m@me de vendre son sucre à 91 It le quintal
à Genève. Le raffineur français, le Bordelais tout au moins, ne peut
•
l'~tablir à moins de 95 It malgré la proximité de cette république.
La conclusion se dégage nettement : cette étude a permis de
découvrir que les causes du dépérissement du commerce français de-~re
en pain sont, d'une part, les contradictions-du
régime commercial et,
12
(1) Mémoire de Bordeaux. ANF
1639 A.
(2) Cité dans Observation sur les différences qui existent entre le mpport
de M. de Colonia et les mémoiresœs différentes chambres de commerce.;.
déjà mentionné.
-
~·'1
429
d'"utre part, la cor.currence étrangère. Dans tous les cas, la F!.'9nce nE:: pou-
V?~t prétendre
augmenter l'activité du commerce d'exportation tout en con-
tiI1QaJ1.t à
ell.9.9~J"ag.~:,-1;3. rée:lÇl>orta.:UQn.Liln_.ne p~tu.:v:a1 t .dQn.c_rés.oudr€-l.e .pro.. _
olème du èé~érissement du commerce du sucre en pain ~u'après avoir su~onter
cette contradiction. La" çande consultation de 1786 visai t cet objectif.
L'arrêt d~l 25 ~,=d 1786 apparatt donc, dans l'esprit du législateur, comrr:e un
remède \\ la crise.
d/ L'arrêt du 25 Mai 1786,:une solution de compromis avec les chambres de
----------------------------------------------------------------------
L'arrêt du 25 Mai 1786 intervient comme une réplique à la nouvelle
prime anglaise de 1784. La volonté politique et commerciale le veut ainsi.
D'ailleurs, pouvait-il en être autrement? Hollandais.et Hambourgeois sont
des alliée. De plus, ils tirent essentiellement leurs sucres de France .On
~i~~,
ne peut les exclure des marchés dans la mesure où s1ils ne peuvent pas sou-
tenir la concurrence, ils se verront forcés de renoncer à ces achats.
Du moment qu'il s'agit de sauvegarder leurs intérêts, les négociants ne man-
.:
•
quent pas d'habilité. De p~rtout, arrivent àonc des propositions concrètes
pour résoudre la crise. En Î~77 dsj~, les raffineurs orléanais suggéraient
~....-----d~'~"~i=m~p=oser-surles sucres à la sortie des ports de France un droit pareil à
! .
celui d'entrée affin que l'étranger fut du moins au ~ du regnicole" si non,
<te "fai re supporter au consomT:1a teur françai sune augmen tation de s drai ts d' en-
•
tréé qui serait fisé à la moitié des droits actuels(1) et d'employer cet
excédent de recette à payer une gratification de 28 l t par cent pesant à la
sortie des sucres raffinés"(2).
!':ais, à l'époque, une telle proposi t::'on est apparue aux yeux de la ferme---
générale comme quelque chose d'extrêmement dangereux. En effet, pour la ferme,
toute nouvelle augmentation de droi t accroîtrai t la fraude. Plus gr?ve encore
est son jugement sur les raffineurs. Elle les traita d'hommes avides qui n'ont
d'objet que leur intérêt particulier.
(1) Le quintal de sucre brut paierait 5 It 5s au lieu de 31t 10s et le Quintal
de sucre terré, 161t 16s au lieu de 81t.
_ _ _ _...,(c.=21..1'"iJIloire des nffineurs 1777. AN
F12 1639.
:i~4!I!
~
! '
:
430
1
Les débats se sont poursui vis jusqu'en 1779 pour ter:ni ~er sur
l1:c.efin Ge l".on-recevoir, la ferme générale estimant que les raffineries· fr2.n-
ç2i:::es ont obtenu "toutes les f8.ve'lrS possibles et qu'il r.'est point nécessaire
de leur accorder de nouvelles gratifications à l'exportation. Elle juge dJau-
tre part les droits sur le sucre raffiné à l'étrRnger plus forts qU'il ne
faut pour les exclure.
Lesproposi tions de 1786 se gardent bieYl de parler d'augmentation
de droits. Elles ~etteYlt davaYltage l'accent sur le montant de la prime.
L'ur§':eYlce de la situation L,'exig-e-t-elle pas une augmentation des gratifica-
tions ? La cha~bre de commerce de Bordeaux estime pour sa part qu'i+~fa~~
yorter la prime de 71t 17s 6d à 201t 1Cs si on veut obtenir l'égalité avec
le ra.ffineur anglais. Et au cas oü Hollandais et Ha.-nbourgeois voudraient à
leur tour exclure les Anglais des marchés du l~ord, ce qui nécessiterai tune
prime de 151t 10s êà par quintal de sucre brut et 201t 14s 2d par quintal èe
sucre terré, c'est à 3Clt au moins qU'il faut pcrter la prime (1).
Les représentants du commerce du Havre proposent d'abord une restitution de
18lt 8s 9d par quintal de sucre raffiné en STOS pain. Ils demandent en outre,
la restitution du droit du Domaine d'Occident: 3 It par quintal de sucre
1
raffiné en pain de 12 lb et en-dessous, 2 l t par quintal de sucre raffiné en
,...----'''''''l'IIe.f''''6''!!!§~pfii!a~1·!1~~u:;.;dessus de 12 lb. r':ais, da.ns le mémoire du ro !'fai 1786, ils ré-
clament une restitution unifo~e de 21 It sans distinction de
~osseur des
pains de sucre. Ces 21 It se décomposent comme suit: 18 It de restitution de
droit d'entrée et 3 It de Domaine d'Occident (2). Dans la lettre qui accompagne
le mémoire,lils jugent opportun d'ordonner de remplacer les 18 It par 150 lb
de sucre terré en entrep~t. Cela éviterait les 4 à 5 mois d'attente du retour
~s acquits-à-caution, le commissionnaire français n'avancerait plus le
DO~tant de la restitution à percevoir.
~ant à l'adjudicataire des fer:nes,il n'aurait plus de restitution
pécuniaire à faire (3). Les trois propositions d'un mémoire anoYlyne de la même
,
,
•
. ,
A
•
epoque s lnscrlven~ dans le meme sens. En effet, pour ses auteurs, il faut ~
(1) :·'éT:1oi re de 30rdeaux.
AN F12 1639 A.
-·---(z)Le-t"tre des représentants du commerce du Havre 20 Vai 1786. A~J F12 1639 Â.
(3) là A!:'i.
4;1
_ considérer les sucres terrés comme Matière première pour les r8ffineries
franç~ises ~u m~rr.e titre que les sucres bruts
- é+:iblTf-po1.lr le re'pporï=='dès sücre-s terrés 2.'.l sucres ~n pain celui de 7 à 4 ;
- ordonner que la resti tutior. des droi ts d' entr";e se fa.sse sui v2nt 18. volonté
~çs ~~ffineurs, c'est-à-dire soit en argent, soit ~ar remplacemer.t en sucres
terrés. Dans le premier cas, sur l'ancien pied, dans le second cas, en raison
des rapports de 4 à 9 pour le sucre brut, de 4 à 7 pour le sucre terré (1).
La chambre de COMmerce de rantes propose cinq remèdes :
accorder une prime de 6 It par quintal de sucre raffiné exporté
- exempter les raffineurs des droits sur le charbon de terre d'Angleterre et
,'-',---_..
sur les cuivres nécessaires pour les raffineries (2) ;
- Accorder à l'exportation des sucres raffinés, tant par mer que par terre,
toutes les facilités possibles, au moyen du transit et des acquits-à-caution
sous la:forrne la plus s~re et la moins gênar.te pour le corr~erce ;
- êtendre les resti tutions à toutes les raffineries du royaume (3).
Pour les raffineurs d'Orléans, si la cor.currence provient uniquement
du c~té hollandais, 12 It de prime suffiraient(4). L'intendant de Colonia
•
estime pour sa part qu'il faut la restitUtion entière des droits, ce qui, selon ~
"Jj, rédJli.rait à31 t 13s le motif de préférence des sucres 3.nglais. C'est lui
égaleme~t qui suggère d'accorèer une prime de 4 It par quintal de sucre ex-
ponté en plus de la restitution. Elle donnerait, espère-t-il, un avantage de
7s par quintal de sucre raffiné sur l'Angleterre sur les marchés du Nord. Il
•
suggère aussi1d'étendre la restitution à tous les ports du royaume, à l'Alsace
à Ba Lorraine et aux trois Evêchés. Cette indemnité tiendrait lieu de droit
de consommation Que ces provinces auraient payé sur les denrées coloniales ;
de restituer les droits entiers aux raffineurs qui font passer leur sucre h
l'étranger. par l'une "">11 l'autres d'e ces provinces. Pour cela, il faut
accrcî-
tre le contr~le sur les frontières de ces provinces pour s'assurer que
12
l':émoire(anonyme). N°26.\\ M1 F
1640.
1
ANF ,2 163.9:}';
l'.!
.
d
'T
t
A"",12 1 '3 Q A
.",,,moJ..re
e "an es .....,', ~
0
/
•
432
le~ sucres qui passent pa~ là, vont effective~ent à l'étranger et si l'étrange~
~'y introduit pas ses sucr9S. En revanche, les r~ffineurs de Bretagr.e doivent
~t:re <=>xclus des f?veurs parce qu'el:!.es n'acquittent pas de d~oit de conSO::lr.la-
La ::lultitude des prepositions reflète la diversité des intér~ts.
~n2.ctie ch~~bre de corr~erce pose d'abord les problèmes spécifiques de sa jur~
die t':on. Les propositions les plus conséquentes ont été retenues, dont parti-
cu:!.ière~aent celles de l'intendant de Cclonia. L' êcrr~t du 25 !':ai 1? 86 apparart
donc COT.me un compromis : il ordonne 12 resti tution enti8re des d1"Oi ts, a.ccorè.e
la prime supplémentaire de 4 l t par quintal de sucre exporté. Il étend l?,~
..
_
restitution à tous les ports du royaQ~e, y compris les raffineries de Bretagne.
Cet arr~t a-t-il produit les effets escomptés? Il nous est impos-
sible de vérifier comment le sucre raffiné français a supporté la ooncurrenoe:
étrangère sur les marchés. En revanche, en France même, des changements ont
été observés. Nous avons noté une augmentation de la part des sucres terrés
destinés à la réexportation que nous avons interprétée comme un rejet, le
1
gouvernement n'ayant pas accepté de les considérer comme ~atière première.
Le sucre blanc semble avoir considérablement diminué dans la réexportatioh,
lés iffip6rtatl6ns~ayant elles-mêmes considérablement chuté
• Un_progrès nota-
ble des exportations de sucre'~en pain est noté en 1787 et 1788 et sans doute
du~~t les premières années de la Révolution. Cela signifie-t-il que le sucre
en ~ain français se place mieux à l'étranger? Il serait hasardeux de répondre
•
affirmativement àJ défaut de preu'J'e. Cela peut provenir du fait que le nombre
de villes jouissant du bénéfice de la restitution a augmenté. Dans ce cas,
l'augmentation des exportations n'est point signe de compétitivité à l'exté-
rieur, mais pluta~ que la quantité de sucre proposée à l'exportation est de-
venue plus importante que par le p~ssé. ~J'oublions pas aussi qu'en 1787 et "an
17 88, le~ balances de commerce n'0nt pas opéré toutes les distinctions n&ces-
s8':res entre les sucres. Ce qui est déclaré COT.me sucre raffiné Feut comprenare
aussi le qucre blanc.
(Î) "Observation sur les différences qui existent entre le rapport de r-:. Q'e
Colonia et les mémoires des différentes chambres de commerce relativement
--~::i-l 'exportation des sucres rafinés". Al; F121639 A.
·1
en -;leut retenir que le commerce sucrier français repose essentielle-
;nent S').r la réexportation, l'exp,ortation du sucre en pain ayant été paralysée
:l1IIl
~
~ c".· : '? des nai.lts·!J1"tt···L'~xpêt'i·~M~·o·,-'/"",ontré que l'avantage c.u'ont eu les
r~ffi~eries étrangères de tirer des ports de France les sucres terrés et b~~ts
en er.trer~t est incompatible avec le riéveloppment du commerce d'exportation.
De ~lus, les étrangers, Hollandais et Hambourgeois, puis les A~glais; peuvent
établir leur sucre en pain à meilleur ~arché que le Français. Cette concurrence
est suffisê..nte pOUF exclure les Français non seule!l,ent des :narchés du Nord,
mais :nême de Suisse et de Génève. .
Avant d'arriver aux marchés d'appel, il convient de quantifier un
autre ty~e de produit entr~~t dans l'exportation et la réexportation; il
.~-
s'agit des sirops et taffia.
2-2. LES SIROPS ET' LE ,.TAFIA.
Le sirop mélasse et le tafia
sont deux produits essentiellement
Il
de réexportation, la conso~~ation étar.t prohibée en Fr~~ce à cause des eaux-
dA.,,; A de rai sj p
Ils _n'ont pas ter-us dans le corr.merce colonial. une place de
choix. Mais aux importations coloniales s'ajoute le sirop tiré du raffinage
en France même. Il est donc évident que les quantités exportées sont supé-
rieures à cell,.
importées des colonies. En France, le sirop mélasse est
•
vendu au poids ~1) comme le sucre. L'unité de mesure est le livre-poids. Le
!
tafia
est vendu à la mesure de càpaci té. Celle-ci est;v2.riée : tanMt elle
est exprimée en veltes, en muids et pintes, tant~t en veltes et barriques,
tant5t en pintes. En 1787 et 1788, les balances de commerce mentionnent le
rhum dans les exportations. Mais i1 fi~lre dans la ~ême rubrique que le sirop
et le taf~a, de sorte qu'il est i~possible d'en déterminer la quantité. Les
statistiques !TIanquent ?our -;JQrter un juge~ent :::lr l'ensemble de la deuxième --.
moi tié du XVlIIè siècle.
De toutes les façons, il ne ~ous ap~araît pas utile de nous étendre davantage
Sèlr le suj et, cOr.lpte tenu du caractère ?ccessoi!'e de ce COèlmerce.
( .\\ ~'est à C2use de sa viscosité.
\\
t ;
·.:1
,
.~
434
Si~op ~élasse(lb)
Taffia
17 7 5
3 406 305
6 609 veltes
1776
3 034 345
140 muids 2102 veltes 201 pintes
1:77
2 994 243
177.c:
2 492 462
39 978 veltes 77 barriques
1779
3 228 209
19 514 veltes 100 barri~ues
nEC
1 795 e50
12 809 veltes 267 barriques
1722
1 346 pintes
1724
703 913( 1)
1785
705 496(1)-
1786
1787
8 332 775
1788
13 384 104
1791
105 500( 2)
1792
2 857 772
33 764 pintes(3)
La France exporte la ~ajeure partie de son sucre colonial et tous
les sirops venus des colonies.
Il reste maintenant à analyser les marchés d' 3ppel et montrer
Il
l'importance des recettes sucrières dans :a balance Commerciale française.
3/ LES KARCHES n'APPEL •
•
;~ous avons déjàk.bordé cette question dans le chapi tre l (i~). Il
reste ~aintenant à analyser plus en profondeur l~s quantités de sucres que
la France exporte chaque Bnnée en direction de chacun d9 ces marchés.
(1) MT Col C10Cé. Té'-tleau 1. Il s'agit ici exclusivement è.e 12. ~éexport2tion:
12
(2) AN F
1671. Il s'agit exclusivement de sirop du Havre.
(3) Il s'agit c9pendant de rhum et taffi~ étrangers réexp~rtés.
(4) Cf. SOlra p?~4-7C.
..~
";-: t;::.::le2.~ c~,~ r<:è?1o" compte de la hiér;:>rchie::!es de~tinations s' inpose. Fâis
aV2.nt d'y arriver, il nous faut ap,orter quelques précisions sur son élabo-
ra -:i or;.
Nous avons à~ regrouper certains marchés. C'est particulièrement le
cas de la Suisse et "Genève. Jusqu'en 1700, les expéditions sucrières en direc-
tion de ces marchés étatent enregistrées séparément. A partir de cette date,
précisément depuis 17ê2,ell~~ le sont ensemole sous le nom de Suisse et Genève.
Il nous a paru utile de procéder de la ~ê~e m2nière peur teus les enregistre-
:::en ts &.n téri eurs.
Il Y a aussi le problème de la dénomination des marchés. Jusqu'en
1782, les exportations sucrières en direction de l'Empire d'Autriche sont
déclarées et enregistrées sous le nom de Flandre. Depuis 1782, la destination
enregistrée est "Etats de l'empEreur en Allemagne et en Flandre". Là aussi,
il nous a semblé utile de f~re un choix; nous avons retenu "Etats de l'em-
pereur", Flandre étant une possession autrichienne. Il en est de même de la
Savoi~ et de la Sardaigne. Jusqu'en 1782, la destination figJrant sur les
états du commerce est la Savoie ; à partir de cette date, la destination en-
•
registrée est: Royau.ï1è de Sardaigne. 1a Sevofe étant alors une possession
sarde, nous avons opté pour cette dernièr~ solution.
c
r:=. _.~:o...; __ •. "---
La dernière précision concerne l'Italie. A partir de 17e2, les états
du commerce introduisent une distinction qui mérite d'être soulignée. Le
•
marché éclate en deux: on distingue d'un côté le "Nilanès, Toscane et LuC;ques"
(1) et, de l'autre, les Etats' ecclésiastiques avec pour centre, Rome. :'!OllS
avons admis la distinction. Mais dans le tableau, nous avons conservé le nom
d'Italie pour toutes les expéditions en direction du '~1ilanès, Tosc~~e et Luc-
ques".
E;, ce qui concerne les données c~iffrées, il nous a paru
~lus
intéressant de montrer les parts en pourcentage(2), plutôt que les quantités,
car-
Les centres ?rincipaux étant !·:ilan et Florence.
~TOUS D1.,Cli':'r~s les c'tuantités en é'.nnexes.
cela ?er::>et de voir, 2.'.1 ?remier ~:)u? d'oeil, les e.ires privilégiées.
Les reT~2ei91er.-,e'-"';s-sont très liî.1i t~~_<!~ns_j.e_te_r::'é_~_!_J~sconcernent les années
1775 2. 1'7 'C, î722, 179"' :\\. 1789 et le prel'1Ïer semestre de l'année 1792.
Tai:::=-,=,~'t:.-o "77 - Fert de c(jac~le marché d2.ns les eX1Jort2.tions sucrières fr?;;.r:aise~
(1775-1792) •
,
,
1
! De st:. n-:-~:'on
!177'5 ! 177~ ! 1771,! 177E' 1779! 1700 " 1182 ! 1781 ,-1188' 1189; 1792
,
!
,
!
!
!
!
1
'
" ."
!
1
! Russie
1,65 ; 0,98! 1 ,64!
1,22! 1,45! 5,51 ! 6,05 !
3,34 . 3,23, 3,61! O,2e
,Suède
3,41; 2,21!
1,15 ! 3,45! 3,99! 5,23! 2,23
1,83 ! 1,,11' 0,82, 'J,55
,
,
,
,
1
1
1
, .Danemark
4,01 ! 2,45 ; 1,35; 0,14; 0,13 ; 0,11 ; 0,41
°,86! 0,64" 0,60 ! 0,25
;: Prusse
, 2,91 '5 l' l'
1
,OO! 4,86! 7,80 ! 4,)6
,
!
!
!
!
!
,
,
,
,
,
!Les 4 villes
41,18!33,23;34,45;3 2,65;24,15!31,14'17141
21,35!26,31!26,45;15,66
!hanséatiques
,
,
'
"
,
,
,
!
,
!
1
'
,
,
,
,
'
,
~·i
,Rollande
!21,14!41,39;45,12;31,5 1 ;27,60! 1,06'49,38
30,15 36,40!33,84;4~;72 ! ~~
,
,
1
!
!
!Angleterre
0,11 ; 0,14! O,18! 0,001
Co ,46;
0,32! 0,11 ! 0,12
,
,
,
!
!
,
!Etats de l'em-
1
1
!pereur
4,60 i 5,80 ! 3,60 ! 2,85! 1,22
6,15
1,29
13,83;10,18; 1,32; 10,08
,
!
!
!
,
,
; Alle'Tlagne et
!
!
;Pologne
!
4,04; 2,16
0,96, 0,09
0,00 ' 0,03
!
•
,
!
!
!
,
!Suisse et Ge-
l
1
1
6,33: 0, 411 6~6b' Cr, 7-9' 2,48
!nève
2,10;
1,59
0,11 ; 1,01 ! c, 84 i 1,19
1
,
,
!
!
!
,
,
!
rSardaigne
0, 58 i 0,51! 0,64! 1,081 2,26! 3,24; 1,31
1 ,91 " 1,64
1, eo ! 1,58
, l' ,
,
,
Italie
1,08! 1,51 ; 6,34; 9,1 2 ;11,94!14,41! 0,83
2,53 ! 2,56 ! 3,51; 5, E.C
!
}iaples
2,39!
1,74;
1,55 ; 1,92; 1,49! 2,34! 0,62
2,89,
2,80 ! 3,83' 2,39
fItalie Gênes
0,42! ô,51; 0,61; °,~4; 0,5 1 ! 1,0 5! 0,19
0,12 ; 0,11
0,61! 3,11
!
Venise
0,34! 0,02;
0,30!
! °,~Q)
0,11 "
!
0,93!,
..
Etats
!
!
!
!
'
ee-
t.":
1,13
2,42! 3,04; 5,22! 3,16
u~,
clésiastiques!
.:.'
,
,
,
,
!
,Espagne
0,15; 0,91! 0,16 ! 1,00 , 1,49!12,91! 2,45
1,40 ; 1,68 ; 0,19 ! 0,89
,
,
!
!
!
!
!Portugal
l'
0,02
,
,
,
!
;Barbarie
0,08
". r'5
\\. , '- ! 0,22; C, 1 4,
,.
,
1
"L
01-
! eva."1 v
5,35 ! 1,95 ! 1 ,75;
2,49!
6,19; 1,07! 4,54
2,28 ! 2,06 ! 2,59! 1 ,44
,
,
,
!
!
!
!
!Etats-Unis
!
0,05!
°
!
!
,~o?:; 0,02; 0,06;
.
( 1 ) ',;~nes pt Etcv ts-iJr.i s
C ,03 ri
,
/-
_.~
~
:;OU3
:::,ptiO"l:.c~:::'')"s ~ou:::' '.ctre er.él.2.::;se li'. ciistinction adoptée au chapitre l, à
savoir d'une ~2:::,t, le .r.arché eurél~éen et, d'autre part, le marché hors d'Euro;e.
~
- - - _ . _ - - - - - - - - -
3-1. E?: El:'ROPE.
::ous ?vor:s dé.:;?t vu que, si
, à 18. fi:'"! de l ' Ac·.cien Régi:::e, 12. ?rance
~end ~es sucres à l'~Jrope entière, tous les ~ays n'ont pas eu la mê~e i~por
tance ~u niveau de~ achats. L'Eur0re du ~ord constitue le d4bouc~é principal.
3/ L'D~ro~e du ~ord
----------------
Quanti tativenent, elle absorbe à elle seule plus de 50 ~~ des sucres
f-=c:m~ais
7C,C3 % en 1775, 80,30 % en 1776, 49,19 % en '~777, 75,60 % en 1778,
63,915/ en 1779, 49,71 % an 178J, 75,60 01. en 1782, 69,09 % en 1780 et 67,81 ;,(
en 1788.
.~.
même en Europe du Nord
tous les pays ne présentent pas les mêmes
t
c2.pa-
:~
"'"
cités d'absorption, en témoigne
le table?u ci-dessus.
a1/ Holl~, les villes hanséati~ e~ mll2.hé bal tique.
•
Hollandais et hanséates sont les acheteurs principaux. Le rôle d'entre-
:pot des denrées ,coloniales frança.ts~_s j.Cl';1É. paT la Hollande et les 4 villes ~an
séatiques explique pour une large part, l'importance moindre des achats àes
au tres puissances. Car ces sucres e.chetés sont redis tri bués dans tout le rord
Allemagne, Pologne et dans les pays baltiques(1). Paul 5VTEL note qu'à la fin
It
de l'Ancien Régime, le négoce bordelai~ reconnai t encore la nécessi té du recours
à l'intermédiaire hollandais pour la ~ratique du commerce baltique (2). Amster-
>.
:.
dam, Hambourg et Dantzig e.ssurent, au XVIllè siècle, le fonctionnement de ces
:~;
circuits de redistribution (3).
Aussi, bien que les pays bal tiques disposent de leurs ~ropres flottes
ô.vsir prog-ress2 d.ans la secor.de :::oi ti é du siècle, ainsi que le r<2vèle le t2.ble?,ü.
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432
Pa!":"1i les 2c:-Jete'.lrs :"'.<J~·e-::::; c:.e 1:< :22.t:'GUe, la Suè-:'e et 12 R.ussie semblent avoir
4t~ nettement ;r~domina~~Qs~~~a Su~de reçoit entre
~~
1 et 3 % des exportations
~
sucrières .E"':ra::ça.iss?, les :3.chats r'lsses rer,rt5sentent entre 1 et 7 l_: du ~élrcht3.
Qu'on nous cO::1prer.nec
"bien, ces repères n' inài Ciuent nullement CU 'on a affaire
à une évoLtion de 1 à ~ et à 7 ;'~. 1 et 3 ou 7 représentent seule~ent des limi-
tes e~tre lesquelles pr9àomine une très gr~~de variation d'une arnée sur l'autre.
EXcepté en 1775 et en 1776, le rôl€
du marché danois dans les ventes
s:JcrJ..e'!'es f'r8.n~aises parait négligeable. Cela ne doi t p::!s surrren~re car, en plus
è.e 12 ?résence des centres de redistribution du ~~ord, le :DaneT'lark possède des
colonies à sucres d8ns le 1Jouveau~"1onde, d '0'\\ s'organise aussi la contrebande
avec les possessions sucrières des autres puissances (1). Far ce biais, elle
peut donc atténuer sa dépendance vis-à-vis de la France pour son approvisionne-
ment en sucres.
Quant à la Prusse, elle ne s'ouvre directement aux sucres :rançais
qu'au cours de la guerre d'Amérique. Sans doute, parce qu'elle participe au com-
merce colonial français en tant que puissance neutre. Elle progresse très rapi-
œement dans ses achats: en 1767 et en 1788, elle achète 3 fois plus de sucres
qu'en 1782, 5 fois plus en 1789. Si bien qu'à la fin de l'Ancien R.égime, elle
s'affirme comme le 'Me±Ileur eIiént-l!à.ï'fs"Ta: :Bal tia.ue. C'est ·S.-aRS ~te la montée
de ce nouveau marché tout proche qui explique que, malgré les privilèges com-
merciaux français à Gottenberg en 1784, la part des achats sucriers suédois dans
les exportations françaises tendent à décroître dans les dernières 2nnées~de
l'Ancien Régime: de 1 ,83 ~< en 1787, elle! tombe à 0,89 ~'(. en 1789. Seule la Russie
semble avoir profité des avantages commerciaux du traité de 1787 signé avec la
Fra~ce.
L'année du traité 2st caractérisée par une remarauable croissance de ses im-
portations puisqu'elle a.bsorbe 18,55 c: des ventes sucriè:::-es françaises
.
record unique. "ais les 3 ;' des années SUiVé'_Etes, excepté en 1779 et
er. 1780, constituent an ~rogTès rar rapport à la ~ériode antérieure.
D'autre part, on doit noter que la croissance de ses i~portations devient conti-
nue jusqu'à la RÉvolution
9,57;/ er. 17S Q p2r :::-:::qport à 1787, 11,29 ?' ~n 17e.9
par rapport à 1788. C!e!!t vraisemblablement parce que à la fin de l'Ancien
439
~{~i~e, le tr~fic rJ2Sê co~~~~ce < être 2ss~ré ?Rr des bâtinents français(1).
l'essor des villes ha~s~~tinu~3 sur le ~arch~, l~ ~ollande garde u~e place essen-
tielle dans les e:cportatior:s sucrières fraY'-;:aises. Sa prédorr.inance :paraît, en
~Jt C2S, indisc~ta~le er,~re :~ zuerre de 7 ans et la guerre d'~érique et
'ô\\prè:s la guerre.
L'effondrement da la prépondérance hollandaise à partir de 1700 s'explique per
la p~rticipation de cette pUiss~lce à la guerre contre l'Angleterre et par la
~ise fin2~cière frappant Amsterdam(2)(en 1780, ses inportations chutent de
95, 95 ~/ pa::' rapport à 1779). Crise passagère car, au retour de la paix, la
Eollande retrouve sa position d'avant-guerre.
L'absence d'une loneue série statistique continue ne pernet pas de
suivre l'évolution du marché holl~~dais. Les renseignements de 1775 à 1789 ne
suffisent pas à en donner une i~age générale. De plus, ~ la veille et pendant
~a ~Jerre d'~~érique, la chute des exportations sucrières françaises vient
perturber ~e Dexché. ftnssi,les exportations sucrières holl~~daises cor_~Gissent
elles subitement un déclin très prononcé à partir de 1777. En effet, en 1776,
les achats hollandais enregistrent une progression de 52,21 %par rapport à
J,.'année précédente ; e~ 1777, cette crgi_!3s§iK"Je tonbe à 37,;6 ;S. :sn 1778, 2".1
lieu d'augmenter, ils chutent brutaler"ent de 58,42 ~S. Cette baisse atteint
78,23 ;S en 1779 et 95,95 % en 1700. Le. reprise est perceptible en 1782. En 17P8,
les importations progressent de 34,31f.par rapport à 1781. En 1789, une nouvelle
baisse est enregis'trée, elle est de 7,44 ;".
L'évolution des exportations en direction des villes h~~séatiques n'~
:9as toujours enregistré de s progrès. En 1776, elles chute:1:t de 17, 70 7~ p 2'" r;:>p-
port à 1775. L'ann,e suivante est caractérisée par un progrès: la hausse est
de 30,67 ;'. Les deux prc;"1ières émnées de la guerre entre.inent une très forte
rég-ression des ache.ts :-52,61 c~ en 1778 et -77,57 c.~ en 1779. En 1700, lors(1ue
l'~pprovisionnement de la Rollande est gêné rar la guerre, les villes hanséati-
ques qui gardent leur neutr21ité dans le conflit, accaparent l'essentiel des -
( 1 )
!:FTEL CP. ) , op. ci t. , p. :c .
(2) ?FTEL (F • ) , ,...,..,
_v. c~ ~.
44C
ve:1tes o:ucrih'es fra'.ç::i ses : 37, '7 c1"
cr)D"':re 1,06:
Four la :!ollande. Elles
2.:néliorer:t::onc leurs 2C:-:2.ts è.e 6(',49 C
par ré':pport q, l'année précédente. Au
~t~ur G.9 L' ~2.ix, 1<', ·-'Jl·~-";-;('.e i'C'C, ~O'l're C'é' ?~ac.e-.--è.~".v4Ult~e.rr.e.~.le
.~r0r-.è.s_è.es
i:nportations hanséaticmes ser:ble ".voir .5t~ !'1oins i~port2.nt : 9,38 ?/ seulement
'::'D
17 q::.
En 1789, l ' 9vol11 ·Uer. des i:'l:çort8 tions est identicue .3. celle de 1."
Pollar.de
i l Y a baisse: (0,10 0'. Le chiffre de 1729 ptant incomplet,car i l
:.e reflète aue 12 réex-;:ort?tion, "?eut eX"Çliquer cet-!:e chute. J,'ais ce~le-ci
p~ut trouver sor. origir.e dans l'éner?ence et le progrès d'eutres marchés euro-
Après 1789, les données sont fragmentaires. On ne peut donc suivre
avec certi tutie l'évolution des :narchÉs. Or. peut seulement supposer que, en rai.-
mn des spéculations s~r les sucres, donc de la cherté du produit, la demande
a dû baisser. La cherté est en effet cause de mévente, car acheteurs et vendeurs
craignent d'être victimes de l'agrotage(1). En témoigne la demande hollandaise
et hanséatique durant le premier semestre de 1792 ; les 4 villes hanséatiques
n'ont acheté que 6 377 253 lb de sucres, la demande hollandaise a porté sur
.19023 824 lb.
a2/ Les Etats de l'emnereur en Allema~e et en Flandre.
- -
- -
_ . . .
c
-
- - .-.-=~~,~
- . -
La Flandre autrichienne est l'un des principaux clients de la France en
~tière de sucres. Jusqu'en 1782, elle absorbe entre 3 et 7 ?~ des sucres fran-
çais vendus à l'étranger. Elle constitue le troisième marché sucrier frençç!.Îs e!1
Europe du ;;ord.
Sa participation très ancienne au C8mmerce sucrier madÉrois explique son
impor-
tance. Le commerce direct du sucre avec la Flandre est accordé en 1472. Et le
Portugal fait appel aux Flamands co,,"me colons à :r-;adère et comme r.larchands impor-
tateurs de sucre. La Flandre df'>vient par le félit mê:ne, un grand marché d'appel
ne sucre pour la consommation et ~our la distribution. Si bier. que, d'~près
Blaise ESSm-::BA; le tr~angle Flandre, P::Jrt-I_'E:O',2.., cclonies at12ntiaues étai t un
atout indispensable dans la politique co:nmerciale et coloniale de Lisbonne(2).
bo~de:".::i2 et c810ns de Saint-Do:'1in&·ue ••• ~,?
186-19('.
.~ ..:·1
Sa ~roximit~ de 12 ?~~~Cn est ;~ale~~nt une donn~e essentielle. Ses
~ C:-SèlX principac;.x ;,orts cl.' entrepôt
sor:t 3:::"'~lges et Ostende. Après 1782, les balan:--
':J.i::icile voire impossible è.e ciis :inryer ~es exportations destinées spécifi-
quernent Èl. ce marché. On ne sai t }":é:S '.c" ~111S si cette nouvelle désign2.tion si-
gnifie que les sucres exportés so"t de~tinés à l'emrire 2utrichien tout entier.
Si tel était.le cas, il expli~uer2it l'~ccroissement àe lê capacité d'importa-
tion à ~artir de 1782
4 068 572 lb en 1782, 15 510 324 lb en 1787, 12 948 63T:':
en 1788, 9 275 903 lb en 1789. En d'autres termes, l'empire autrichien importe,
en 1787, 4 fois plus de sucres ~l'en 17 82, 3 fois plus en 17A8 et 2 fois ?lus en
1769.
:)ans le cas contraire, :)n noter2. si::1plement que la Flandre autrichienne 8. f,ro-
gressé dans ses achats sucriers, ce qui signifie qu'elle s'adresse davantage
directement à la France pour sor. ~pprovisionnement qu'elle ~e le faisait a~.
parava::t.
A--la différence des autres puissances, la Grande-Bretagne ne paraît
~as avoir constitué un véritable marché importateur de sucres français. 1a riva-
li~é co~merciale entre les deux puissances dans le domaine des denr~es colo-
niales ne s'y prête pas. De plu~, les lnterêis c01oriia:uxanglais sont puissants
et influents. Ils ont réussi donc à protéger le marché national contre les
sucres ét~gers. N'est-ce pas la meilleure manière de ne pas laisser se dépré-
cier les prix?
tt
Aussi, ses achats sucriers à la France, quoiQu"en proiTession, portent-ils sur
des quantités très négligeables: 139 390 lb en 1775, 178 344 lb en 1716,
282 360 lb en 1711, 7 765 lb en 1778. Elle interrompt ses importations durant
la guerre d'Amérique car ce conflit l'oppose aussi à la France.
Elle l~s reprend au retour de la 92ix. Elle signe un trait~ de co~merce avec
la Fran~e en 1186. Bela pe~et à la France d'eX?orter un peu plus de sucres ver~
ce ~arché que par le passé ~u cours des deux 2nn4es oui suivent: 537 116 lb en
--------411-87 et 407 668 lb en 1782. i:ais, par r?TPort aux autres marchés du I:orr:!, le
'T12.rch~ bri!.tannique demeure tOl.'jours tr"s peu important.
-
-
- - - - - - - - - - -
44?
Er; "':' lus -l e ce cOrr>"1e rc e n8. v21 c, "[",C 1..' ;:;o,re" e c:J l,:::lrd, 1;:" Fr~nc e a déve-
..--- -
lo~~~ ~ussi des échanges terrestres avec le ~~rché allemand et suisse.
b1/ A11e"129'e et Polome.t.,
Le marché allenand et polon2.!.s n'est Flas,à vr2.i dire, un véritRble
:nportateur èe sucres fr2~çai3. situés à proximité des centres de redistribution
hollandais et ~anséatiques, Allemands et Polonais pouvaient se dispenser de ,.
s'aè.resser directe':;ent à la France poelr leu:!:' approvisioru:.e:nent en sucres. Zn
pls de cela, le coût de transport dans les échanges terrestres, qui fait que
les sucres reviennent plus chers au consommateur, gêne le développement de ce
commmerce.
C'est au cours de la guerre d'Amérique que des exportations sucrières françaises
en direction de ce marché sont enregistrées au bureau de la balance de commerce.
S2nS
doute, était-il apparu intéressant à la France de développer ses échan-
ges terrestré-affn d'échapper aux tracasseries des corsaires anglais sur les
i:lers.
En 1778, le marché allemand reçoit même plus de sucres que les marchés danois,
suédois, russe et flarnand : 3 159 492 Ibo l'oit d.Cd % deu~ptesfrançaises.
Les i~portations s'amenuisent ~rogressivement par la suite: 499 341 lb en
1779, 234 482 lb en 1780, 49 395 lb en 1782.
b2/ Suisse et Genève.
- -
- -
- - - -
La demande suisse oscille entre 0 et 2 % des ventes sucrières françai-
ses. Entre 1775 et 1780, ses importations se situent dar-s l'ensemble entre
400 et 600 000 lb, exception faite de l'année 1777 o~ elles excèdent la barre
èes 1 000 000 de lb(1 028 373 lb). La Suisse et Genève semblent avoir progressé
dans leurs importations au cours de la r,uerre d' Arr>érique, e,,- témoignent les
achats de 1782 : 888 359 lb, soit 1me crlJissance ce 74,09 l; par rapport à la
a-Ta -dE?r:l2:nde de 1700. Une croissance oui :!:'psul te du fai t que, lors des guerres,
la Suisse représente un relais 'ltile ~01].r l'Allema.sne (1~. T'ais,c'est surtout
(1) 3rTEL (P.), aD. cit., p.77.
/
' 7
L~!~ .J
~pr~s 1-~6 q~e
.~_._
la Suisse accro!t sa can2cit~
_
d'~n~ort~ticn
~
: 860, 101 ,~
_ J
~n
__
17 P9,
_,
1 365 4:1 lb en 17EE, ur.e croissar.ce de 57,11 "
1 C5? 6?-1 lb en 1729. Ce léger
- - ~ _ . _ . __ .- -..
lléc~isser'1en-t ne doi t p':! être inter,'rêt~ CO'71é:e tel Cé'.r i l :'::?:loue le chiffre
d'i~pcrtation de ffilcre en pain.
cl L'Euroue :.Jéditerr?n4enr.e.
-----------~-------------
.
La Sardai8!le, l'It",Ue, Gênes, Verüse et ;·'c>.ples, l'Espagne et le Por-
~~gêl sont les différe~ts n2rchés sucriers fra~çais en Europe du Sud.
Ce royauxe regroupe, en 1789, lé Savoie, le Piémont et la Sardaigne
wro,rement dite. Nous avons signalé Que, jusqu'en 1782, la Savoie ét2it la des-
tinaticn enregistrée sur les balances du co~merce. Malgré sa proximité de la
France, elle représente une part tr9s restreinte du marché sucrier français.
AVal'1tî 778, elle r'2çci t moins de
~ des sucres français. La France se tourne
un peu plus vers ce ~arché lors de la guerre d'Amérique à cause des difficultés
de navigation vers~le :;ord. Ainsi, de 1778 à 1762, la Savoie absorbe entre 1
et 3 % des sucres français. Ces ta.ux n'ont cependant de valeur que par rapport
au niveau quatitativement bas des exportations sucrières françaises au cours
de ces années. Ils ne doivent donc pas être considérés comme une a~élioration
(
-
de la demande. L'évolution de ses importations de 1775 à 1782 le montre bien:
1775
7C 4 201 lb
1776
712 150
•
1777
998 042
1778
844 268
1779
524 044
178J
788 934
1782
761 341
Seuls les taux plus élevés ~ la fin de l'Ancien Régime: elle absorbe
1,90 % des sucres français en 1767,1,64 c! el': 1766 et 1,76 % en 1789, corres-
pondent à une ~éritable montée de ce marché. Il importe,en effet~plus de
------2----900000 de lb de sucres frcwçais : 2 138063 lb en '787, 2 081 887 lb en 17e8
et 2 284 774 lb en 1789. Sans doute par~e que ces importations concernent tout
~e rCY2.ume sarde et non P~'~~s 'lniQ"J.e:ner:t 12 Savoie.
44L
Avec ses ~~~C CCC de lb 2r'.r:uels, 1:::. S2.::'~2.i.:';'r'.e ".p;'2rccît ,::cy-,c, ?>. :" fin de l'An-
Cler: :<4';:i'~e, cc~:r.e l'un des :;rincipsux 'iÉ1;O'lC!":~S 311Cè'i'?rs fr2nçais en Europe
c2/ T
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~
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-- ----- -- -- -- -- -- -- -- - -
Le ~arché italien constitue l'aire privil';'giée des ventes suc~ières
~~~~sises en Euro~e méridionale. Il repr~sente même, qU niveau de l'Europe
~te entière, la troisième aire dominante. L'Italie n'est dépassée que par
19s deux :;l'.1s ?TOS clients, la ~ol12nde et les villes hanséatiques.
.,
L'absence d'une statistique complète ne permet pas de suivre avec
pr'cision l'évolution de la part italienne dans les ventes sucrières françai-
ses. Tout a1.:. pIns, pouvons-nous borner à faire quelques constats. On remarque
que 3 années avant l'entrée en guerre de la France aux côtés des Américains
contre l'Angleterre, l'Italie absorbe 7 % des sucres français. Cette part
m0nte en moyenne à 1~,03 %durant les trois premières années du conflit. Nous
l'avons déjà signalé~ cela est lié au fai t que la France se tourne de plus en
plus vers les m8.::,chés à--l: 'ab!.'i des tracasseries des corsaires anglais. L'Ita-
lie, comrr.e la ';:;Ulsse, représente à cet égard une aire; 'd'échange utile.
G2ographiq'.1ement, ?lus proche de l'Italie, ~arseille est, ordinairement, le
(
.._.-~-, ....,.
",.
princip",_l fournisseur. i'!ais i l semble GU 'en cas de confli t mari time, des places
comme 50rdeaux, dont le rayonnement cor.~~r~ial atteint l'Europe méditerranéenne,
accroissent leurs exportations vers l'Italie. Par le canal du ~idi, les sucres
•
sont expédiés vers Agde et Varseille d'où ils partent directe~ent vers
l'Italie.
~ous
n'~vons pas les chiffres des années qui suivent ismédiatement
le retour èe la paix. Mais ceux des trois dernières années de l'Ancien Régime
démontrent que, co:nparati veme!1t à la si tue,tion ci '2.vant-gu.erre, 1'1 talie a per-
du de son importance dans les ventes sucri~res françaises. Ses achats ne re-
présentent plus en ~oyenne que 2, >:6 ;: des ver:tes sucrières fr8r:çaises.
ce--a:-écIlh--res1l1te d'une part de ce que les exportations en di rection des états
ecclésiastiques sont comptabilisées sép"'ré'-1en-t. Ce 'Q:5:::'ché 2.bsoroe "1,73 ?:, 2,42 ,1
3,C4 ~ et 5,10 % des exportatior:s sucri~res fè'an~aises,respectivementen 1782,
• ,le:,
..
~'
.;
1727, 1';','32 ~t 173°. D'8L:t~9 ~~rt, ;?c:::,ce q11'""
r2tour:le 12. ~:oix, et avec la re-
~
~rise des i.-.~-:()~tAti':,):ls c()lor~i2.1es, 1;]. Fr2nce ::o. r.-·;:oue ~.'}'t?C 2es r~rte!1e.ires d11
"
,_..
:',<II'r_ ,
nGgliçe~~t cuela~e ~a~ ceux du Sud.
Il fauèra 2.'188i ::t~outer lOt rro~e8~ion des ?~tre~ :'::>.~chÉs èu Suc:'(1). j~us8i,
cette dégrade.tion de 12 P"',::::,t i talie~r.e d2ns les verte~ ;~""'?r,?~i!':e" se tradui t-
elle pa::::' une di:::ir'.;tion q~2.::ti +'ati ve des:;,chat~, 12. se'...lle exception éb.!".t les
i::Jportations le 1789, en tÉsoi0-e le teble?u ci-dessous.
•
Italie
Et",. ts ec-
clési2.stiql.1eS
total
1775
," 616 964
1776
9 397 593
1777
0
J
925 779
1776
7 6')6 710
1779
2 76~ 1C 2
17EO
~~ 523 17r)
17E2
464 969
967 0 E2
1 432 051
1787
2 837 952
2 714 613
5 552 565
1788
3 264 ;?() 5
3 864 241
7 129 0.16
1789
11 132 00 6
On re:71é'.rqile eue l'Italie et les états ecclési<j.stiques réunis n'at-
teignent pas le r:i ve2.u::es i",~o::::,tatians d' avant-gueLie. Lé féU! C~liIe!ît"~'de' la
part de ce ~arché en 17 92
5,98 ~ pour l'Italie et 3,87 %pour les états
ecclé'Sisstiaues sont 9,85 cl
lies ventes françaises, témoigne du caractère
circonstanciel du recou::::,s massifjtes hostilités avec l'Autriche et surtout avec
la Prusse, paralyse les échaJîges avec les marcfrés du Nord et les villes;de la
Bal tique (2).
Le marché napoli tain ~rri ve en seconde position après 1'1 talie en
Europe ~éridionale. Jusqu'en 1778, il importe environ 2 OCO 000 de lb de s~cres
français. Pend.::mt la dur~e de la guerre, ses importatio"s chutent comme pa.rtout
du fait de 18 perturb2.tion ~es i:npo~tations coloni21es : 341 696 lb en 1779,
(1) r~.,
"yra~. ~\\,.
(2) CHAFŒC~TTŒL (~~.), COr:':':e:êce et CC~J::::'se sou:!:' la ~4vI)1'ü':'or: et le C0nSll'é!t \\ l"!
Rochelle, ;,.27.
446
56? 4EC:"'8 '?:l ·~::c et 345 5371"':.: en 17f::?
&?ftn'!
~;
,~"
tations au retour de la p~ix. Celles-ci [assent ~e 2 rea CCO de lb à environ
3 à 4 000 cac de lb. En 17Ç.7, 1722 2t 171=:9, ~>"cle~ ::':""I)rte 1~."èref"p.nt C'2.us de
sucres (1) o..ue l'Italie ~oins les ~t?t~ eccl{siê~ti..'"':.ues.
Com:ne ~:2ples, Gênes :çro?resse dans ses i!TJ!"lort2.tior:s sucrières après
:..~ guerre d.'&~~riQ~e : il i~~orte en soyenne 277 659 lb de sucres de 1787 à
~ 7 F9 contre 720 as= de 1775 à 17 7 7. T~a progression est ctl 21, se ~~. En 1792,
pour les mêmes raisons signalées pour le cas italien, les importations sucriè-
res gênoises dépassent la barre des 1 000 ace de Ib(1 510 756 lb exactement).
Les exportations sucrières fr2nçaises en direction de Venise semblent
avoir été très irrégulières. Cette irrégu~arité des exportations est plus mani-
feste avant la guerre d'Amérique; ces quelques ventes sucrières portent, de
plus, sur des quantités très négligeables: 411 266 lb en 1775, 35 196 lb en
1776, 68 730 lb en 1779,·986 lb en 1782. L€
narché italien ~e représente-t-il
- - - - -
~as un relais utile vers Venise? A la fin de l'Ancien Régime cependant, non
seulement les im~ortations vénitienneE deviennent régulières, mais elles dépas-
sent m~::Je 1 COO CCC de lb : 1 178 90 3 lb en 1788 et, 1 %7 184 lb en 17ê_9_._.~~...
La montée des ~arc~és napolitains, gênois et vénitiens explique en
partie le déclin du débouché italien proprement dit à la fin
de l'Ancien
•
Ré gi:ne.
c3/ L'Es-oagne.
-
..-...-
L'Espagne est un client ré~~lier
de la France sur le p18~ du commerce
sucrier. Sa situation de métro~ole coloniale ne la èispense ~as d'achats su-
criers ~ l'étranger. Cependant, il nlest pas lieu d'exa~érer ces achats. Car,
disposant d'îles sucrières dans les Indes OCCidentales, une bonne part de sa
~------,=-=-:=-=-=
oonsommatlon est couverte par sa propre production coloniale, celle de Cuba en
(1) C:. les i~rortations en annexes.
--'-~-"',;,"-'" -'.$'
"·;.-r'-:-''''''·
~_particulier.
.à.....
Elle ne peut è.cnc, de toute évidence, ~rogresser dans ses impor-_~
tati ons en provenen c.
de l ' é tr' nge r. Clle ac c ap are donc moi na ~d~ 1 jf aeS",cc::'c-:1
. .
V~!1t~~ su;;ières françn.ise~·ava::t-::..? f:Uerre d' ;.mérique.La gu---erre -et le· re'nl1-: .. ,
~
r
~~
d'J.oomrnerce vers le Sud lui permettent d'améliorer sa part dans les exporta-
~~1
tions françaises-T-1, 48 % en 1779, :;::,-9+ % en ~ 700, car cette année-là, l'Es-
_.j
pagne importe 3 145 195 lb de sucres français, niveau jamais atteint avant
'~::1
et
après la guerre.
,co:!
i
Toutefois, alors que de 1775 à 1778, la moyenne des exportations
•
sucrières françaises en direction de l'Espagne est de 770 270 lb environ,
durRllt les trois dernières années de l'Ancien Régime,-elles ont plus que
doublé: 1 570 717 lb : la croissance est de 103,92 %. Malgré cette progres-
sion, l'Espagne continue d'~tre un marché de seconde zone àc8té des pays
du Nord et m~me de l'Italie, si on y comprend G~nes, Naples et Venise.
c4/ Le Portugal.
- - - -
~
.L.e_Porto...gal n'est pas, à proprement p@.rlé, un pays véritablement
.
' ' ' , ' - ' -
- .
.impur tatettr de suere-s-;-~ai.-s-.--!ieceva.Il-t.s~ sucre du Bré$~J.,,-;~l ne peut
.
~"
,' .. ,.'-'.
. '-'~;':'-
._.
..,,·y-~;,-t'~'j~::,-~.5-":;':..~.':;_~~ ..t_ :~_~:\\:.'~'
-.:~~~'\\. __::~_F'~"~;'-'~~~f~;:"::·;,;t-~:/,-A:"~,,·>.~-~:.';-;-
_-:~...
"'-'-:-'.:~;:-
logiquement dépendre de la France pour son apProvisionnement. Ses achats
sont non seulement irrégulières, mais portent sur des quantités très négli-
geables : 11 309 lb en u1~'-ê2;·-_et seulement 12 lb en 1788.
=;:~~'., "~~.~,-
~.-·~_,
..
...7·_-,C.·..
3-2. HORS D'EUroPE.
Il
-'--.-
Nous avons déjà signelé (1) que, hors d'Europe, le--Levarit constitue
l'aire de vente dominante des sucres français.
Les deux années de fortes i~portations sucrières sont, pour la période 1775-
1789, les deux années terminales:, 6 508 454 lb en 1775 et 3 200 783 lb en
1789. Entre les deux, les achats évoluent comme suit:
i
.,., ,:;.;;~h-':"è.'ec:,:~·.~;_<;'..J1k'~:;~;:~:;~~;::k- ..-,:::; ;;~
f
,._'~w..'.....•'.-.~.:.~.:
a1~anti -1;"::
oot---+1'176-
2 422 1104 lb
'.- - -
_ .
J~l:~,;t-~'
1777
.~ 733 e34
....:
------_.--_.-
-'1778
---_._-
1 949 C05
- -
1779
2 431 4'23
'1'··.'1'"
;~~~ .
1?EO
1 722 963
~-I"..•
1782
2 534 168
~
1787
2 561 727
1788
2 620 608
Les importations chutent lors de la guerre, particulièrement en
1778 et en 1779 car, dans l'ense~le, elles semblent avoir mieux résisté à
la crise que les plus gros marchés du Nord. Sa situation hors du champ de
. ~
conflit explique cette situation. A preuve: alors qu'il n'absorbe que 5,35 %
,
des sucres français en 1775,1,95 % en 1776,1,76 % en 1777 et 2,49 en 1778,
en 1779, se part atteint 6,17 % et 7,07 % en 1700, avant de tomber à 4,5P %
en 1782, sur la fin de la guerre. A la fin de l'Ancien Régime, il importe
en rr.oyenne, 2,29 %des sucres français.
___---I..a-:Barbarie, qui n' apparaft sur les balances de cçllnmerce qu'à par-
,
ti!' de 1782, cons'titue und~bouché.trb négligeable, .sa part dans:les ventesc-,
~
sucrières françaises est inférieure à 1 %.
~
. 1
en peut en dire autant des Etats-Unis d'Amérique. Leur proximité des aires de
". Q
""'="~~~.'"......
production ne peut laisser prévoir une amélioration de leurs importé'.tions.
Il
Résumons-nous : il ressort du tableau que la Hollande et les quabe
villes hanséatiques, en Europe du Nord, représentent les aires dominantes du
commerce sucrier français. La Hollande, premier importateur, accapare entre
27 et 48 %des exportations, les villes hanséatiques entre 16 et 41 %. La
part restante est répartie entre des importateurs de moi~dre importance :
Italie, la Suède, la Russie et la Flandre autrichienne.
Le commerce porte sur cinq types de sucres. Il est dès lors intéressant de
- - - - - - - - - - -
montrer les marchés privilégiés de chacun de ces types de sucres.
\\'
---., *:,f
1
!
<.!
'::lanc.
Nous avons déjà vu qu'en raison de la concurrence sur les marchés
du !:ord (1), le sucre en pain de France, plus cher que celui dê-Hollande, y
est pratiquement e~clu· (1). Aussi, peut-on dire avec précision que les pays
du Nord ne sont pas importateurs de sucre en pain français, du moins, avant
l'arrêt du 25 Mai 1786.
En 1777, les villes hanséatiques n'achètent que 8,42 %du sucre en pain fran-
çais et la Russie, 1,74 %. En 1700, la Suède en reçoit 6,30 r: et la Russie
6,45 %. Ce sont les seuls exemples d'exportation de sucre en pain français
versle Ford entre 1775 et 1786. On voit à la faiblesse du pourcentage que
celle-ci porte sur de r-etites quantités (2).
L' arr~t-du-25-Ma.l 1186 qUi augméri.ten6tablement le monta.n;~,:de8en
couragements à l'exportation du sucre en 'pain (3), .. semble avoir permis aux
raffineurs français de proposer leur sucre à un prix plus compétitif. Car,
.
Q
. ç ._=,~---_.
c'est à partir de 1786 que le sucre en pain est de plus en plus enregistré
dans les exportations vers le Nord, plus particulièrement, vers les villes
hanséatiques. En effet, d'un achat quasiment nul, elles accaparent subite-
ment, en 1787, 45,96 ~~ du sucre en pain français vendu à l'étranger. Cette
Il
part monte à 70,37 % et à 61,21 % respectivement en 1788 et en 1789 avant
de retomber, au premier semestre de l'année 1792 à 7,69 %.
M~me la Hollande qui n'imrortait pas de sucre en pain français en
achète désormais, quoiqu'en quantités très négligeables. En témoigne la fai-
blesse des parts: 0,93 ;;, C,05 ;;, 3,45 ;:, ~urant les mêmes années.
(1) Cf. II/ra p. '2]-
(2)
'nlles hanséstiguGa
Suède
Russie
1777
51
··C'_'.'
.
434 lb
10 625 lb ~"'-
1700
20 08J 2. b
20 566 lb
La rest·itution à l'ex~ort2tion est ~-':;éndue àtOllS les droitsCper,?u's aux en-
trées de Fr~mce : drai t de nomaine '.-1 'Ccci dent et taxes somptuaires sur les
sucres. Il est,de plus, accordé 2UY. r2ffir.e'lr~, '-lne nri~e de 4 1 t na.r cuin-
tal de sucre en pain ex~ort~.
. .
.
450
}:ai ~ ,,,s e_::QQrtations de sucre en p?_in verE le :~ord coï:Lciè,ent avec la dis-
p~~i tiv~ (lu sucre bla:1c- sur les regi stres de 1" balance du commerce. Il y-~
do~c :-:écessité de savoir s'il n'y -9. ~2-S eèl CC';,:',-lsion daES les termes. Il
se:-:lble que non, car, au m~me moment, le sucre en }Jain est de moins en moins
expédié vers les marchés du Sud, les débouchés pri'nléglss avaEt 1786 •
...
De l'avis des raffineurs eux-memes, les bordelais en particulier,
la Suisse et la Savoie sont les deux principaux débouchés des expoxtations
françaises de sucre en pain (1). Cela provient de ce quë, si tuées plus au
Sud, le'ra!fir-eur français y a plus facilement accès. D'autre part, le c6~t
du transport par terre, du fait de la proximité, est relativement moins
~'
".
(
. f
élevé. Le transport est très important car, plus il est coûteux, plus le su-
f1
cre est cher. Signalons cependant qu'en Suisse, le Français n'a la préférence
'-''-!-r
-···1
qu'à Genève. I l ne peut concurrencer le Hollandais à Soleurne ou à 3~le(2).
t
La Savoie est plus à portée du raffineur français.
η"t
La Suisse et la Savoie ne sont pas cependant les deux seu~ débouchés
.,1
il
méridionau:lÇ. il y a a~_ssLl~ItaJi_~_e:t_p._or_lS'_·_(t'~:ropet_.leL~ve.nt.Les parts
'.
respecti 'les dans les exportations permettentdeîes.i~hiér'arch~s-er'.':;~';~~}';iJ~_~;~
.~
Taèleau n078 - Part de b. Suisse. de la ~AOOlé. de l'Ita'He et da T:ïevant~'d'ans-";'1
les exportations francaises de sucre en nain 1775-1792 (~n.
Suisse et Genève
Italie
Levant
Savoie
1
• f-
I
•
1775
86,70 %
!
1776
53,15
28,87
22,85
3i~46 .
"f
-.0'Ï:
1777
33,90
16,11
22,46
11,40
1778
63,33
16,02
18,57
21,26
4,10
il
.ô!;••• ;
1779
55,81
7,50
!
V780
43,13
28,90
2,08
9,51
i
,
1782
1,02
85,12
6,17
1,
· i
1787
t
12,34
3,1'6(3,32)(.1) 11,0 3
20,97
1788
6,60
16,83
1789
1792
19,80
4,70
5,30
· ;
( 1) Pétition des raffineurs de Bordeaux adreSSÉe à l'Assemblée Nationale. 2 y. _ar2
12
1791. ANF
652.
(» y compris les états ecclési.s.z tiques.
-
' - - - , , ; . . . - , ' -
' - - - , - - - - - . - . -
_ _ •
_0
' 0 _ _
451
C~~me r;ous l'avons i.71èiGu4, 1::. :;rf;c'.orina::.ce :::es è.ébouchés méridio-
n?~x se 8":'~tue ;!van+. i786. Après cette date, le ",,"_rcrf"s ::'anséatique devient
--1 'ai~èe vent-e -dominante.
La Suisse et Genève conet! tuent, avant 178.6, les pre,,:!iers clients. Après 1786,
principalement, en 1787 et en 1768, la Sardai~e devient le principal débou-
ché au Sud.
L'Italie et le Levant rivalisent d'import~nce. Eh 1775, en 1776 et en"1777,
le Levant est le-deuxième client. En 1779 et en 1780, l'Italie est le second
débouché après la Suisse et Genève. Elle est dépassée 3. nouveau par le Levant
~n 1782 et en 1787.
Nous avons déjà montré que~par les exemptions de taxes, la France
a ouvert aux pays du Nord la prérogative du choix des sucres. Il était alors
plus utile aux négociants de ces pays d'acheter la matière première et le pro-
dui t semi-élaboré p~]'i.J:lenter leurs propres raffineries.
la réexportation s'est imposée comme la seule branehe importante de ce oommerôe.';:l
La preuve indéniable est le renoncement à l'ë~riai~on au sucre en pain vers~= -~~f[,
le Nord avant 1786. Tous les pays du Nord non importateurs de sucre en pain
!
sont demandeurs de sucres blanc, bruts, terrés et t~te, m~me l'Angleterre 6~,
1
f
du fait de l'influence des planteurs, il est interdit de 'raffiner du sucre
•
1
brut étranger, Qn import: de France. Elle achète aussi des sucres te:l!lrés. Le
__ ~o ~:~~i
Danemark et la Russie progressent dans leurs achats de sucre blanc à Bor~
'~'....
*-~
deaux de 1764 à 1776 ; la Suède et la Prusse dans les importations de sucres
bruts (1).
f
{
. 'Vais au ni veau du cor.ll71erce fr2.nçai s en général, tout se joue entre
les deux principAUX clients : la Hollande et les villes hansé8tiqt1es. Ils
.,;b1t)3t[TEL (P. t, op. ci t., PP.71-72. Les ir.:portations danoises de sucre blanc en
provenance de Eordeaux triplent de 1764-1766 3. 17 74-1776. Cello.sde 12. Rus-
sie passent de 0,1 f'f lb 3. 3Y:. La Suède i1'1T;r')rte 4 fois Dlus de sucres bruts.
En 1783, la Prusse est 1'2 2e bportp. tC!ur pou~ h
::Ml::C:I'~g bruts-€ct-1-e--je.
pour le sucre blanc.
. i
oi'iJ
- - - - - - ' - ' - - ' - - - --_. ---
_:!:;.~".~.'.',..."'.'....;..."1.::,
452
accêparent 3. e,-,'b seuls _~l'~_s de la r.'!oi ti~ de la rée:qo!'ta ti·:m. Ils se distin-
gue!1t cependant da!1s le choix, comme en témoigne!"!t les y8r"ts res::ectives
- . _.--- .--.---_..
... -_._--. ------- ----.
_ ' - - - ~ -
-------,,--
Tableau n079 - Fart de la Hollande et des vEles ~2.!1S éé', t iGue s d8.ns les ventes
.....
françaises de
1;l?.nc, b~l ts, terrés e"t
_. ~-::
4 "70::>(<'q
sucres
"Cë~2
1 '
r )- 1 ( ,_ i.
•
1775
-t:l76
1777
1778
1779
1700 1782
1787
1788
1789
17~
l.es 4 villes
:B
25,60
30,78 31,96 36,65 28,68
40 ,35 19,92
--------~ -.~
b
55,06
36,82
hanséatiques
~e,59 19,54 22,57
47,05 2,38
5,12 10 , 6~i ~9,19 10,7
T .55,86
29,16
4,28 33,70
6,94
15, eo
.-
34,56 34,06 28,00 22,1
t 100
100
44,60 56,46
-
--- - --
Hollande
B
33,01
42,09 47,25 39,40 16,10
0,09
b
28,93
46,21 49
47,80 53,24
0,98 73,90 65,36 63,16 56,16 56,1
T
7
18,07 25,17 15,60 24,60
6 ..
19,1,822,36 18,60 43,4
t
49,°9 29,70
7~, 6o.
Légende
~
oU
= sucre blar.c
b = sucres bruts
T = suC'l'es terrés
~.~~_.
t = sucre t~te
{
La Hollande est prédomimmte dans les achats de sucres blanc et brut.
-,'~
·1
La régression de sa position en 1779 et 1700 dans les importations de sucre
~J
blanc et en 1700 pour les sucres bruts s'explique par l~s difficultés résul-
'1'
•
tant de la participation hollandaise à la guerre d 'Amérique contre l ' Angleterre.
~,
:::r~:t:~:sd~~:~::~:nf:~:::e~: ;~c::tb~:::l:::S;a:l~: ::::~::r:a::':e~el~~ .~.t
. prisé en Hollande du fait de la production locale. Aussi celle-ci accroit-elle
!
ses achats de'sucres bruts, 'tandis que les villes hansé8,tiques,~evenuesprin-
~paux clients pour le sucre e!1 pain, régressent dans leurs achats de sucres
bruts. Notons que c'est en tant que puissances neutres qu'en 1700 elles s'il-
lustrent dans les achats de suc=es b12nc et bruts au détriment de la ~ollande.
--------_ ..
Elles sont en revanche le premier client en ce qui concerne les sucres terrés
et le sucre t~te. C'est donc exceptionnellel!lent que la Hollande est le prin-
------·:~cipai acheteur du sucret~te en 1777 et en 17 20.
__ J
453
L'Europe -cin; djona'ieet la Earbarie, ;rir:ci:cs.l débouché du sucre en
-:::-
---L.ê:in av_a..'1.t 17_e2.,.. s2~~_:::oins d~~e~~.~é'..ntes dans le CCT'll':'!erce des su,c.res b:-u_!.~..!.. ..
terrés, blanc et t~te. !~us aurions voulu savoir si ce12 9tait lié ~ une impor-
tance ~oindre de l' acti vi té du raffina~e c.2.ns le Sud. ;'2io2 il ne nous a ?~s
~t~ possible d~ pousser les investigations en ce sens. C'est une riiréc~ionde
. j
recherche à suivre.
i
i
1
1
La Suisse et la S~voie ne jouent ~ratiQuement auc~n r~le d~ns les
i
---1
achats. Leur part dans la réexportation fré'.nçaise oscille entre 0 et 2 ~:. Outre
1
le sucre en pain, la Suisse et Genève achètent un peu plus de sucres terrés
que de sucres bruts
L'Italie et le Levant sont un peu mieux servis.
L'Italie surtout en sucres terrés et en sucre blanc, le Levant en sucre blanc.
cl Les sirons et le tafia sont ~éex~ortés vers le Nord.
--------~-----------------------------------------
Le tableau suivant me-t-€n
évidence la destination des six:ops
tafia arrivés dèS colonies •
•
~--------_._-_._--- ' - -
(1) Cf. les quantités en annexes.
..~J'~1•':",1
454
Table~u n~ 80 - Les ~a~c~2s des siroD~ ~t tafiq
,
2 OOOv;
47 O~
14 425!
,
!
!
852v;
.C'Déstination
1700
1782!
1787
1788
1792
;";c.~~~.
! sirop
tafia
! tpfiar------'sÎî'or;
siro"P
, sirop
tafia
~•.~anliJ;:,hl J86287
191bq
, "Hollande'
' ! '"
'14 000
1645èq
c< Su~de
!
160 500
Danemark
9 004v
-Prusse
Flândre autr.!
161 ~98
Angleterre
!
Allemagne
71 020
, ,Suisse
375p!
5 560
•
Italie
2 545
!
83 910(1)
Naples
!
470 600
Italief"Oe
~nes
122 913
Venise
Sarda.igne
9 030
'Espagne
3 376p
Portugal
Levant
92 943
?(2)
Etas-U1'li s
lége~de
quantité si~09
lb
p = pinte
tafia én-vetle-s---ou-pÎntes ou barriques
v = 'Telte
bq = ba.rri que
1787
1788
1792
(1) !"!llanais et Toscane 26e 0301 b
935 213
9 330
"'"Etats ecclésiastiqu.40.1 0071b
960 646
74 53('
(2) On ~'a mentionné que la 'Taleur.
455
,
,
Co:J1I'1e pour le cr)"TImerce ~:;uc~ier proprement di t, 1 '"S1.lrcne du :7ord est
1
. J
le débouché principal. L",il march9s i:::porta tet:.:::'E les plus régulie::,s et les plus
li
-----,-.-+i"Mnpor1:antss()nt- u :--1:-e-s--vi+les ha.!1s<faMqu-e-s,-1·aHoll-B..:l*et la-Flandr'
-y tri-
'---9
chienne; la Suède, le ~anemark et l'A:lg1eterre sont moi:ls ré~lli~rs. L2 P~~SEe
!
-
1
s'y ajoute après la guerre d'Amérique. Yais les villes h~nc~2ti~ues ~emeu~ent
~i
le marché dominant. Leus importations portent essentiellement sur les sirops;
!r
elles dépassent plus de 1 000 000 de lb par an. La Flandre at:.trichienne cons-
1
r
titue le seconè client. La St:.èô~peut être classée en troisième position pour
~
la Quantité de siroIls i:'lportés, 12 Hollande l"'2.rri'lant sur ce point ~u'en 4e
pl~.ce.
Le débouché allemand et polonais n'a été que temporaire
les importations
n'ont duré que le temps de la guerre.
En Europe méridionale, les sirops français sont exportés essentielle-
ment en I~alie. Les achats suisses, sardes, espagnols, portugais et levantins
sont épisodiques et peu importants.
On peut retenir de ~ ':tnalys9 ~~uchés-.que-V.Euro.p..e-duNord...est_
" ,..' ~ . .... <..~t··
····;t'i"$t,'",<S
le principal marché d'appel des sucres et des sous-produits sucriêrs. La H91- .
lande occupe la première place parmi' les clients étrangers pour les achats
des sucres. Les villes hanséatiques consti tuent le débouohép
sirops et du tafia.
Après cette brève analyse, il nous reste à montrer l'importance des
recettes sucrières dans la balance commerciale'
française.
•
456
4/
.
Un commeroe rentable : l' i:O:P",rta:lce des recettes sucrières d2.!1s 1<1.
--
cO~"nerciale fra~9~ise.~
..
Nous avons inèiqué, en a!1alysa~t :'~xclusif, qu'en d~~it ~u trio~~he
des idées physiocratiques dès 1750, la conce?tia~ mercantiliste est, Q2nS
la seconde moitié du siècle, encore très dominante dans le domaine èu co~merce
international. Notons que pour les uiercantilü:tes, 1 e profi t tiré du commerce
extérieur est la seule source d'accumulation et de revenus d'un pays. Cet
enrichissement passe par l'obtention d'une ~alance commerciale excédentaire.
Les colonies ont été fondées pour perT.et±re le plus gra~d développe-
~ent possible
du commerce extérieur de la métropole, en lui fournissant des
denrées tropicales, le sucre en particulier, dont une partie est revendue à
•
l'étranger.
lious savons que la majeure partie du sucre colonial français est réexporté.
IL nous faut maintenant apprécier l'importance des ventes sucrières dans la
balance commerciale.
-_... _- ._---·----:~ît .. ~~~t~:~;~;>;-::~~;~~,c~
Le premier travail à faire, c'est d'évaluer les recetteannuéJ:..lês_-
~
.
""::":... ,-.-':... .
- .-..
réalisées sur la vente des sucres et des sous-produits sucrie1"s. L~~c-rèniieI-
gnements sont incomplets faute d'une longue série statistique natiohâIë. Ils
portent cnr10 années: 1775-3. 1700, 1782 et 1787 à 1789. Ils permetetent-
œependant d'avoir une idée précise de la place des recettes sucrières danl;l la
balance commerciale.
'~57
.a
, _
Tot8.1
gén6ral
':"45 765
26 436
372 201
51 310 312
310475
42 536
353 011
51 593 051
314 753
169 1R8
483 941
78 578 054
525 050
124 039
649 089
50 246 465
512 493
66 612__
579 105
15 981 291
271 663
è5 404
357 067
15 649 072
1 463 688
1 684 000
3 148 488
30 242 7';5J
?
1 463 68é(2).
1 .163 688
57 e79 751
1 477 743
!
57 894 856
?
3 187 881(3)! 3 187 881
67 361 708
2 336 363(4)!
?
! 2 336 363
72116232-!
!
!
•
On remarquera d'abord que les recettes sucrières sont plus importante~ ~/
celles faites sur la vente Ces sirops et tafia. En valeur, les exportations
q$ sous-produits sùcriers enregistre~t un ~rogrès notable après la guerre
;Ù1-i~L~,;~,t:'4}~_J!~~,,~~.,~~~elquesmilliers de 1t ?-va;;t~gu~-~re,-ies recette8.att!.±l1~:.c""~t
--'
,
gnenie't m3mè dépassent le million de l t. Cela est lié au progrès ;dudë)~.,~tlT.'.
en "'génêral à la fin de l'Ancien Régime. La France exporte alors plus de '~'"e;~
~
et de sirops. A cela s'ajoute le f2i t que la F~2.nce vend aussi du-'~-rhwn
::)
"j.'.
coup plus cher que les sirops et le tafia.
Nous n'insisterons pas sur la diminution des recettes durant la guerre'; 'elle
;:1
est due à la chute des exportations.
':'1'
"':: ,
f
'f
lliiJ
1
Sources: de 1775 à 1782 : cf. AN F ;2242 à 249
~
.
\\'
~------
1787 et 1788 : cf. M~ F
1835
~
f
1789 : cf. AN ëol F2 B 12.
12
•
12
AN F
250 et 1835. Dans une autre source: F
251, la valeur des sucres
est : 5 6 4~5 300 1 t. La valeur du ta:'i ç:'2est de 8 332 775 1 t dans 1~'. sous-
série F12251 et de 1 644 200 dans le F 1 250.
12
12
F
251
sucres
65307 100 It (F
251) tari='. : 1336 3CO.
F12 251: sucres: 69 781 OOO~"""'SÎT01Js':
2'406000.
1
45P
1
Pour détenniner la part ::es sucres et des si!'o!,s dans les e::Qorta-
.
4
. .
-
1tior.s, ·11 ~fn..'lie~tde montrer aussi l'évolution d:s recettes glo':a.les pendant
- la ;n~me :pérHfde~' !:lIés tft êtabITss-enfc6!!lrne- sui t f
'!1ableau--no82 - Le commerce extérieur français 1775-178'1
les recettes(en lt). ~
-:::=-::~ -~.....,oç-:'="'":::,;..,.~~....-.~---"-
!
-Années
~ont~~t des recettes
1
1775
263 072 130
1776
267 124 270
1
r
1777
311 544 475
l
1778
237 561 694
1779
207 635 473
1700
1'5 914 282
1
260 479 437
~=~"'i!l~~,------ ,1782
1787
327 262 628
178-8
372 440 370
1
1789
441- 222 000
•
Il ne no-:.e ~ste plus qu'à montrer l'importance des recettes
sucrières dans le commerce extérieur français.
"
.$~~i~,~:e, -.Partdes sucres et sirons d<.tns la àahmce--commerc±a-le
1775
1776
1777
1778
1779
1700
1782
1787
1788
1789
sucres
18,19
19, je
2~,0 7
20,88
7,42
7,80
10,40
17,24
17,23
15,B1 -
sirops
0,13
0,13
0,15
0,27
0,29
0,19
0,65
0,45
0,85
0,54
et tafia
total
18,32
19,31
25,22
21,15
7,71
7,98
11,05
17 ,~9
18,08
16,35
En ne prenant en compte que les ~~nées de paix, les recettes réa-
lisées sur la vente des sucres et sirops représentent en moyer~e par an, 19,4~
de la balance commerciale françai se. Pour les seuls produi ts sucriers, cette
.
12
12
"~'7:-*-':,'=:,::",~;;;",,<,JJ~~f2~2~~ ., 349 727 0 i 8. F 25 1 : 445 30 1 300
(2) F
251
466 300 000 l t.
(»-eo-1F2B12 : 160 501 428. La recette retenue ici est celle conter..ue ~8r.S lP~
F12 :!51, car ell~ parart phts cotlplète.
~;!
en EU-rc,e. ~ais-très générale, cette ~~~t ne set ~~S suffi~~~~e~t en relif!
"'
~"'
---- ~------'-"'- -".. -,-----"-- ---~
. - - - - "------,
t6u-:e la v~..lell~ des sucr9S ':2.~:S le cc~~;-:·-~rce ~:·:~'~!'"i~u=-. ctez~ Sl1.r-:·Jut C~"!,:":~.~I~~.-
tiv'?~ent à la balance co:nf.1erci9.l8 ê3PC C;'2.q':E ;:'.1.J.2sence :::'.1t:. celle-ci. ::r",n:'
,
tou te sa valct=.r.
ll~ro:pe du ~Tord, non seule!T:e!"t ?cvec les de\\~x ~ri.ncip2.ux è.ébouctés, 13. :101-
Dar.e~ark et la ~~s8ie.
En té!!loigne~r1u ,(~\\\\.t..~ J\\A",~~b:
les villes
Ho Il a."1d e
hans é,'tti Que s
Suède
Danemark
Russie
1775
38,19
47,06
20,63
51,57
31,55
1771)
53,72
45,15
10,29
36,65
27 ,48
1777
59,19
27,31
19,31
24,16
39,17
1778
51,82
57,97
33,47
14,10
39,92
1779
14,58
17,38
13,44
0,89
50,47
1700
0,85
29,87
15,16
1,23~
45,67
~
On remarque qu'~ l~ veille de la ~~erre d'ftnériq'.1e, les recettes
:'
sucriêres rèprésentent en moyenH, 50,73 ~", 44,37 5<, 21,05 ~.~ et 31,62 ?J..des
~
Ve'l tes
totales de la !i)ranc'? à 12 Hollande, ?.ux villes hans~8.tir..~les, -3. la
Suède et au Danemark. De 1775 ~ 1780, elles fo~ent, en ~oyenne, 39,04 %des
irentes avec la Russie; de 1775 3. 1777, 13,31 %du commerce avec la Flandre
au tri chi enne.
En Europe méridionalè:, les sucres occupe...rone place moins importante
dans les exportations franç~ises. En cons~Quence,
ils jouent un rele négligea-
ble dans l~ balance con~erci21e française : moins de 10 ;,~ èes recettes généra-
les avec la Suisse et Genève, 12. Se.voie et l'Esyagne. Il en estodnsi du com-
merce avec le Levant. C' '?st seule ~!.vec l 'Itçüie Que la "9a..:'t des sucres dépasse
10 ~6" de 12. balance commerciale, 15,27 o( en 1'1oyenne, par e.n, de 1775 à 17eO.
Au terme de ~e cr.api"tr9, 7'.(".1S ~cê~,n,Jr:S:~le le 211cre ccl'Jnis.l iT'.té-
~ - -
resse aV~..!1t tout l;e cO~.~erce ext4r::'e~..:.r '-~p ~:- ?~'?.::c~. "?0"_~:::" s' i~.,l8.r.ter S'lr ~ef;
~:t;1
~archés européens, elle enCour2-IN les ,..,{:--r;c;i ",.:,tE' ~ ver:r.-::'2 " :ceilleur ~'?~cr.~
en:exemptent les sucres bruts, terrss et bl::-.:-IC destir:és ~ 12 r é ex?c::::,t8.tion
du-pè.iém'eYl tè.es droits do' entrse. ~l e PYlC0 1,:1""'';'8 l' e:cpo rt,?ti on tiu st:.cre en ~2ir:
au
~oyen du re:nboursement des r::roit~ è.'entr"e ~_uQ~lel
s'est 2.jouté en 17.':6,
une prime de 4 lt par quintal de sucre export~.
M2.is en ce qui concerne ce type de sucre~ la concurrence est plus
rude. Les négociants français, Yle pouvant placer le leur & un prix ~lus bas,
m~lgré les encouragements, se concentrent sur la réexport2.tion.
' ' : : " - - - - - -
L'Europe du Nord est l'aire domi:lante du commerce sucrier français.
Les doux principaux marchés d'2.ppel sont, la Eollande et les 'nlles hanséa-
.
tiques. Cette revente en Europe contribue de ~anière i~portante à l'excédent
de la vente commerciale frar-çaise. Elle ;r~c~re, en r.oyenne et p8~ an, 19,4~~
des recettes commerciales. C'est Rvec la ~0llaYlèe, les villes hanséatiques
et les pays bal tiques que la Frar:ce ré2.lisc de plus gros,.profits. Les !'ecettes
sucrières représentent, en moyenne -50,73 L',:' et 44, 37 % de la balance commer-
ciale avec le Hollande et les villes hanséatiques •
•
•
461
CONCi,USIC i,
~.~..-
Le CQ:T.merce sucrier fr2.nçê~is prcfi te-t-il 8l~X
colons COT.~e semblait le suggérer Zrnest iA3rtOUSSE?Au ter~e de
cette étude il ~st devenu po~s~ble de rép8ndre ~ cette çuestion.
Toute l'ana+y~e a dÉmontré que,contrairement à ce eue semblait le
dire Ersest' :LA_~ÏWUSSE,le corr.rr:erce sucrier français au XVIIIe siècle
et singulièrement dans la seconde moitié du siècle,a profité en
premi~r lieu aux négociants et au pouvoir royal.
'.1
a ~té élabor?e dans ce but.L'exc:usif,en liant le sort dei colons
•à celui des négociants nationaux a permis à ces derniers de donrer
libre cours à leurs desse~ns égo!stes.Ils jouent f~r l'offr~ et la
demande aux !_" s pour majorer le .;'ix de leurs march!='ndises tout en
sous-payant les sucres.Ainsi,le sucre colonial français est-il à
cette époque l'un des moins chers qui soient tendis que le nrix de
l'esclave noir,!nEtru~ent ce la prcduction sucri~re,~rc~resse eu
d
.' l( nT'
.pl
',"
.
.
' l
. l
~.p
cours
Q
Slec è. une ~ 2~OFe ~e8 ~rlX CUl, seme e t-l~,?:~ecte
daftlltage
.saint-Domingue e,ue la fo.a.rtir.i.o1.1.e et la Guedelo'J.pe .De
sorte ~ue l'emploi de la mpin-d'oeuvre noire crée un avantage certain
en f:veur du négoci:r.t.Nous avon~ ,u que dans une f~onomie de troc
•
~'~éralis(e,le déséquilibre entre les nrix se traduit par un
déséquilib~e du nivEau quantitatif des ~changes aux colonies.Cne
id,
:;:~r:~
cargaison négrière produit trois cprgEisons de derr~es col2~i21es.
8vantage en f~veur i~ né~ccic~t.Con ?i.:cu eue c'est du trev2il ~e la
mein-d'oeuvre noire oue dépend leur richesse, les colons ~2intiennent
une certaine cadence de t""'8v8il sur leB_.habitations.En ré21ité,loin
d'oeuvrer à leur propre prospérité,c'est à celle du comrrerce ou'ils
contribuent inlassaolerr:en.t.~n effet,ciu le.i t ... u rythrre. Éffrfné:iu
traveil,la production sucrière est toujours ébond2nte.Or,1'~ton8prce
se traduit cranE le com~erce,p8r l'2baisE,e~ent aes prix;c'e~t l? ~oi
de l'o~fre et de lé demande.Les n~gcci?nts jcue~t ~nor~?rc~~t fur ~s
--------------------------------------------------------------------
(1) Un e;clave rend jusqu'à '2000 livres à la veille de 12 révolution.
462
facteur.Le travail servile contribue ~onc à l'?b2isse~ent des prix
des sucres aux îles.Aussi,tant oue l'esc:2vage~,'.ét~it ]~c aboli
_ _ _ _ _ _~ .
dans
__o. _ • • • • _ _•• les
colon1es~le
~.
° 4
•
~
p~lx des sucres dEvait rester tou~ours bas.
Un troisiè~e aV8ntége en f8veur du nég~ci2nt
résulte du rëfi}-S-d"hOmogénéi té monét2.:"re e!1tre la métropole et les
colonies.La surévaluation de principe de la livre tournois nar
rapport à la livre coloniale, lui pernet de gagner à la fois sur la,
spéculation et sur le change.lotons Qu'en plus de celê,~uand il
dispose de piastres pour payer en 2rge~t cc~ptént,les ienrées
coloniales codtent 15~ ~oins cher(~)Ce~te distorsion ertre le~ prix
est partic~11èremept systématique à l'~nr.once des conflits maritimes.
_.'
Les colons qui redoutent une crise de mévente ~ cause des difficultés
de navigations avec la métropole s'empressent de .licuider leurs
sucres à très bas prix;Robert LACOi'iBE parle de ba.isse
allant de
40 à 50~.Alors que le spectre de la pénurie plarant,les denrées
d'Europe connaissent une hausse spectaculaire.Les négociants
compensent les pertes possibles qui pourraient n2ître du co1t
('exploitation des navires en raison ce la ~2uEse ~es ~ri~e~
d'assurance et des salaires,en participant aux eX0éditions moins
codteuses sous pavi1:10n neutre, celui ct 'Ostende pendant la E'"':erre
d'AIné ri c: -.1 e ( ~ )
Outre lé pratique quot~.:ienne du cOI','erce qui est
comme
':us venons de le voir 1 i'avantage du négoci~nt,la question
•
~'il faut poser est de savoir ~ui est le uéritable producteur des
sucres.La monnaie ;ui est un facteur d'rccumulation et trinvestisse~
~ent ne circule ~2S dans le com~erce colonial.Le pouvoir royal y
est opposé,mais en plus~ les colcY':s semblent pré:tfrer le troc C~'1':'
leur permet è.:- disposer en permanence lu wlrcl1é mé t.:'c, ~oli tain .Ce
troc em;êche to",;, s accumula tic;' du capi tc~':" é: ux îles donc tou"':
financement de la pr~~uction par les colons ea~-mêmes.
- - - - - - - - - - - - ----
( 1: cf JUpra p .167
(2)Bute:(P)ies négociants ~-rdelais,l'Europe ~t les îles 2U
XVIIIe ciècle,p.109
463
Dès lors tous les travaux d'2gr~ndisseTe~t des h2bit2tians et
d'e:nÉlior'ê.tion de la procJ.ucticr rec_uièrent lE' _" ~_D_ ~t:. c~'~-"è~i t
nÊ~ier.Cela est d'rutent ~lus co~r3~t eue
---._- - :--- •.. -~-_....- -----:::-----_._.-
.. _------
---
_ . . .
.-
s'assurer le~ services d'un négoci2nt.L'int~r@t !'~side dans le fait
que, propriétalre-<é -ôÈfnavires négriers ou assoc i-:~ , .: es 8rma teur:::
de négriers, i l 8St bie~ pJzcÉ pour fournir d8'~c ces dé12is réson!].a-
ble' ,la main-d'oeuvre necéssaire aux plrntations.
Dans ce ty;e de relation,le colon est connu sous
le nom de correspor-dant .:'e négooiant est Je commissionnaire .Le contrat
'J;?ssÉ ;:st l~. lia.J-.sol1 d ' habitation .Les esclaves noirs ne forment ci.or::c
pas seulement une main-d 'oeu7re, ils consti -+;'~ent le financement même
de :~ production s~crière.L.~ mauvais ~raite~e~ts auxquels ils so~+
soumis s'expl:.quent par ce sté.-l:-ut.En ef':et,en tant que ca:,.:tal
inves t~, ils doivent v'oauir 2 -.-.e plus-value .Du .71. ~ ns dans la vision
d'l
-0 lon .Cela pousse
iné::orablemen t à l' 2u~mentation de la duré.e de
la journée de tra~..ail.Ce que NARA appelle la plus-value abeollJe ( 1)
Seulereent,le danger est que les escl?ëes s'usent
~ é (2)
!'apL:. e:ren t et ~eurent:~a ~ort21it~ 92r~i les noirs est d~ ../"-
1....
Il :aut les remplacer.C'est ainsi que se noue la dépendance de
l'économie coloniale,les colons ne pouvant se passer du
commissionnaire du fait de ce renouvellement constant de la main-
d'oeuvretBotam~entles colons sucriers,car une habitation sucrerie
•
e:r.ploie toujours une rr'ein-d'oeuvre nombreuse.Lé è.épendence provient
de ce qu'un tel contrat ne va pas sans contrepertie.ie colon endetté
est contraint de livrer toute sa ~roduction à son créancier cui se
c.r.2rge de la revente er. France.ll est le seul à '-'ssurer 12 licllidttf.
Le colon Est seulecent infor~! de l'évolutio~ ée ses 2~fpires ~pr
le compte cour~~t ouvert à son intention.~e comrnissionnai~e est par
CQ'lséqtBlt, le gestionnê.ire v€ri teble des habi :stions. 3asé en Fra!lce,
il a. des interrn?di2ires ;::u:: îles cni sont cha.rgésnde facili ter le
•
(1)~~rX(L),~e c29itel Livre l ~2ction III
(2)cf '&lira p.2(.1
464
troc dans les deux sens.Ces intermédiaires sont soit des narents,
soit d'anciens commis de la maison-mère.Dans tous ~ei! ces,ils sont
.int.é re s.s.és_dans..i 'entre.pr.i..se •C' est pourq uo i i lE . ;> ') ven t tou jours
·ra.rnener les colon~ infidèles dC" s le droi t chem:n.
--.-:-
::::-~:
~..
Par ces ava'1ces, les armat -ors tiennent les colo .... ::
fix~s sur leursterr~s.Ainsi,tous sont de 0 ~gents cui travaille~t
sans relâche à constituer les cargaisons de retour.Tant qu'ils
peuvent encore re~bourser r~~llièrement ces dettes aux ~chéances
convenues,ils peuvent demeurer propriétaires.r~ais que.nd cela s'avère
impossible,le commissionnaire peut racteter pure~e~t et si~;le~ent
l' heti ta tion. '-.'-- ._.
Cr~dits èe cergaisons et li2i3Q~s Q'babitation font
oue ce sont les négociants qui,er. définitive,cc~trôlent toute
l'économie sucrière.Quanà ils ne sont pas les gestionnaires des
plantations, ils sont, par pare~ts interposés,producteurs eux-~êmes.
C'est le cas des frères Fo§che de ~antes.Stanisles Fo§che i~stallé
à Saint-Domingue,dirige les deux habitations:la sucrerie. f?~ilial~
à Jean Rabel et la sienne propre,au Trou,près du Cao.Dans ces cas,
i.e parent resté e!' métr(~'pole orépare les Cêrlpegnes négrières et vend
les sucres.Celui oui est irstall~ ~uy 11es co~stitue le cerfPisor ~e
retJur.L'!rt~r@t de l'pralyse des ~apDorts entre colors et n~gociants
réside dans le fait que les sucres constituent un maillon
indisqensable à la rècherche de g2in en..:::urope.l.a Fra.'1~e,er tan'" oue
•
puissance agricole,a besoin d'une denrée rentable et conv8itée sur
le marché européEn, nord européen en particulier.':"es sucres scnt,du
fait de la demande croissante en Europe éu :crà,l'')t~et mê7"'e c.e ce
CO!TIr.Jerce.::"eur p2rt ciel!.::; h:-~:,21?T'ce cG~rlerr::icle ~·r?pç:::j.3e "'vec les
puissar,ce3 du i.ord :-':Jr'.tre carel':"€:,;::
co:StitU2:'t,;' ,'t=-, -::,"irt "ou-:er,
l'u~e des ~ranches i~part~ntes du com~.erce ext~rieur françËis.A la
veille 1e la guerre d'A~~rique,les ventes sucrières cc~~:tituer.t à
elle_ seules.plus de 5J et 40% aes rec:·tes c.Q.L.t:.:.frçi.?lesdela.Fre::'"_ce
avec la Hollande 3+; lésvD.:es ha1lSéa'dques~ :i?S deux principaux c::'ie~ts,et
plus de 20~ ~es rec~ttes avec le ~2nemark,la Suède et 12 Russie •• "
1'inég?lit? ccm~erci21e e~t~E~E~ve ~ux coloris~
465
sous tE;:",due :;ar l' idfe r,'pêl".è.ue d'"'~c: .Les Tilieux è' ;:;:'f-~ire selon
laquelle les colons doivent coop~rer à le prospérité ~~~rOY8u:re.
_____ L' exp.ans1Qn du_c?mrr:e1:9_~_ S1.!9r.t~r :fr2n_çais en .suro?e è.2Y'S la sec~ns.~_.
moitiJ du lVIIIe siècle n'a ~té possible que parce ~ue les sucres
bruts, terrés -~t ble.nc achetés r:oir.s c:ers 21~X iles DC~.lVé i~rt être
è.étités un.e feis:' en Frè.nce. à ur. prix rel?tivery-er.t élevé rr~is bes
dans l'ensemble pour le consommateur ellronfen.~'est ainEi que le
sucre raffiné er. Frence,du fai t de ::.:or. T.rix plus Élevé ne pou-.T 2i t
se 9lacer sur les ~arch~s du ~ord ~ C2use de l~ csrcu~rence des
reffireries locales.
~-colcn est doYlC non seule""ent nrisonnier d'un
systèrre de relationscorplexes,meis intégré à un ~ystème écor.omique
rentable qui lui échappe totaleme~t.~u d~but et l
la fin du
système,se trouve le négociant qui accapare les bénéfices issus du
commerce.Ainsi,l'exclusif,en transfor~ant le commerce avec les
colonies en commerce forcé a permi de transformer le profit en
pillage.
,
Donc,contrairement à ce qu'a écrit E::r.est L.iL~:=t01.-SS.i:;
~î
le progrès de la revente n~ signifie pas ~ue le colon de Saint-
~omingue accumule une fortune de légende,mais que les profits
s'accumulent en ~étropole.
Il Y a eu certes de rictes colons,mais tous n'ont
pas baigné dans l'opulence.De plus, cette légende des fortunes
faciles aux Iles a été démentie parles voyageu~ de la fin du siècle.
L'un d'eux,le baron de wimpfen qui connait bien :aint-Jomingue pour
y avoir séjournÉ de 17SE à 1~~.O insiste sur le fait que "J,e Temps
des fortunes rapides est à l'~istoire de S2int-Do~inque,ce que sont
aux annales de la l"raLce, les siècles où. de simples chevaliers
conquÉraient des roy.a~es,,(1),invitant p~r là-m~me ses conp8triotes
à ne pas se laisser imposer par le faste puéril qu'ftalent certains
tabitants pendant leur séjour en }Yance .
•
(1)Cité par Pierre lluchon dans la présentation de :Voyage d'un
s~se dans différentes colonies d'Améri,;ue de Justin Gircd
de CHANTRANS p • 35
466
Ernest LA.èRJl.::i::::Z ir.siste 2ussi sur l' id~e lue le
progrès de la revente est ur. inàice eccÉssoire pour le ~~;nce.Cette
-- -ttude- :ge:rmet cie vo1-r-~-l~i4s--économique
de Ct:S ÉCÎJ2I:ges r:.e se
limi te pas seulement à la ;>lzce qu'ils o·:;cuper.t àer:.s les st2tistique:
de commerce.
Les taxes diverses sur les sucres n'ont-elles pas
permis à la ?rance d'étoffer so~ erT.ature financière?~out è'2bord,
les prélèvements fiscaux ont permis de montrer que le pouvoir rOY21
!'le dissocie pas le profi t d'un négocie.nt de celui du royaume.En
effet,on ne doit pas perdre de vue que la volonté de puissance des
états f2i t considére-r-I-a-prospéri té commerciale comme celle de la
nation toute entlère;celle-ci permettant au fisc d'alimenter le
'Xrésor royal.~~ous avons vu QU tà Bordeaux, comme à raI: tes, les
n~gociants les plus taxés sont directement impliqués dans le co~merCt
color.ial,donc dans le commerce des sucres.
Le droit du Domaine d'Occident et les taxes
somptuaires sur les sucres sont une source de profits.~alheureu5e
~ent .,ils étaient perçus par la ferme générale qui ne verse qu'une
partie seulement au Trésor.Il faut donc récriminer contre cette
institution qui,si elle avait versé toutes les sommes qu'elle
percevait,2urait peut-être contribu~ à restreindre la dette royale.
f~anmoins,leouvoir royel ne jouissait pes moins des avantages
•
fi~2nciers de ce commerce C2r les profits de la ferme sont souvent
placés en bons d'Etat(;)
Il Y a,enfin,le problème de la main-d'oeuvre.
~rnest LABROUSSE estime que le progrès de 12 revente ne réduit pas
pour zutant le chômage français .~.ous ne pouvons pas tot21ement
contredire cette affirmation,n'2Y2n~ pes orienté nos recherches dans
ce èamaine.
(1jEi~cker(F),~es français devant l'irrnôt sous l'ancler:. régime.p.33
'!li
-'l
t
467
lV.ais si au .~Vlllesiècle,le chômage est "la [ranne p12ie dl]
prolétariat a.es campagnes et des villes"( 1) ,il :l' er: àemeure 'J::<<C-
~. d~
t '
.-
t ' t ·
d'
l '
-----rr.!!:o±nsvrai qu-e-:~-:~n us~e-~crrere-e-s---~EB.-r1.-eee~p 01-& eR--------
France. i..es:raffineries qui se sont multipliées dans les po:c·ts
coloniaux et même à l'intérieur du royaume ~~ploier~ des ouv~iers.
L'enquête industrielle de 17S? et 17se dorne
~uelques informations à ce sujet.On y apprend que le raffinerie du
sieur Armand D~sir~ Varlet à Dunkerque emploie,avent la r~volution,
plusieurs ouvriers(2)8t que les deux raffineries àe la cor;mur:e
d'Arras e~ emploient vingt(})
'7---------- .-
Une autre enqu@te réalisée au rr.ois ae Fructitor
an 12 signale que les trois raffineries er: activ~té à ~ouen au
~omer:t de la révolution emploient respectivement,quinze,dix-tuit et
huit ouvriers(4) .La raffinerie d'Honfleur des sieurs Duval et
beaux-frères en emploie vingtt~) .~es onze raffineries T:p.r.taises
emploient en 1fcE,quatre-vingts ouvriers(~)En 1789,les vingt-six
raffineries borèelaises et les onze raffineries ~arseillaises
emploient respectiveme~t quatre-cents ouvriers(7),celle de la
Ciotat, trente ouvriers(8) .Signalons ;ussi que pour fonctionner, cette
industrie a besoin d'2utres manufactures créatrices d'emplois .
•
( 1) .L.2.-crousse( E),.LB crise de l' écor:omie fr8.nça ise à le. fir: rie
l'Ancien Régime et au d~but de la Révolution, p~XXVII
(2)cf iWfTa p.328
(3)cf !~fra p.32~
(4)cf $~fra p.330
(5)cf IVfra p.331
(6)cf S~tra p.332
(7)30rdeaux' S-pra p .334; [·larseille cf S'flra p. 33 S
•
(5)cf JU,ra p.340
468
~s chaudronniers qui faoriquert les cuves,les potiers,les moules
à pains de sucre,les ~ordiers,la ficelle)et les papeteries aui
fa ..,riquer.t du papier àsucre,gris et bleu,n'ont sa.ns doute p2S de
==:c----:-:,.,...",-,.,...",-m-e-ilï~~~s--~iie~-tsqüe leS raffineurs-:-En-'bOS-, les douze e-n tre'8rises
, .
l '
t
t '
t
.
(1)
de poterie ct 'Orlt.ans emp Olen
rOls-cen s ouvrlers.
.
Comme on le voi t,le pl'ogres de la revente du sucre
n'est pas UL inaice accessoire;au contra.ire,il est signe de
prospérité non pas aux colonies,mais en France.
Les négociants sont les animateurs principaux de
l'industrie sucrière.L'avenir de leurs intér~ts personnels
,'0-----.----------. '"--
commande qu'ile prennent toutes les
dispositions nécénsaires à
les faire valoir.Aussi doit-on se garder de les con:t:ondre avec
l'intérêt général.Cette stratégie des affaires ne va donc pas
sans contradiction avec l'esprit des lois régissant le commerce
colonial.Ils sont hostiles à tout libéralisme commercial aux 11es.
Four cela, i::'3 réclameLt e.t cc tiennent l'exclusif qui lel:r accorde
tout :oisir d'2pp~Gvisionner les colanies et d'enlever toutes leurs
product:JTIs.Dans la pratique,ils s'y dérobent, choisiss2nt de
fréquenter seule~nent les zones les pl~ prometteuses.Ainsi,
Sei~t-Domingue aéti privilégiée,en particulier le Nord et l'Ouest
~e l'lle.La partie sud de 12 colonie,la Mertinique et particulièr~
ment
la Guadploupe et la Guyane sont délaissées.Cette pratique
commerciale a débouché sur un développement inégal des colonies.
•
Le Nord et l'Ouest de 3?int-jo~ingue,~ieux r2vitailléB,so~t les
plus dÉveloypés.~a grande 11e,du lait Q~S liens privilégiés avec
la métropole~st~plus gros fournisseur de sucres.
L'éliminrti6n de la concurrence étrar.gère dans
les possessions françaises est,de plus,un moyen pour les négociants
de se livrer plus liLrement à la spéculation sur les prix qu'ils
contrôlent entièrement .Ils sous-payent les sucres alors au ' il§__ ~_
font payer leurs fournitureE
plus cher ~ue leur cofit réel.Aussi
é.U
ZV~:Iesièc'le, le sucre est-il beaucoup moir.s cter sur le ffi2TCl':{
colonial.
(1)Lefebvre(,}),Etudes Grl:fêrc,ises Tome I,p.114
469
~our s';ffranchir pertielle~crt Je cette pratique
sp~culative,mais aussi pour s'approvi~ionner en esclaves et en
----:--de;;i;~· neci~sé'.iresà---=l:a pc;~~-~~.lte è-e le'.trs act:'vi Vs, lES colo::s
delaiss~s se "';0urner~t vers ~e comm€;rce
i::terlope.1'c::ycl1..:2i:' re pEut
è.o::c s' 2ppliquer rigoure'..lse:nent.1e pcuvcir roy?l 2uto::::':3e les
étrangers à fournir aux colons,les marchandises dont ils or.t cesoin
et que la métropole ne peut leur fournir.Ces dérogations ~~~~~nT
en 1763,en 1767,en1783,et en 1784,en dépit des protestations
~nergiques élev6es par les milieux d'affaires.
~es n~gociants rÉclament des sucres bruts.rour
.,~;----_._.....-
favoriser le succès ùe leur demande, ils font taxer lourdement les
sucres te~rÉs et le sucre blanc dès la fin du XVrre siècle.1'exclusif
en 1727,insiste sur la sp~cialisation de l'€coromie
coloriale.Les
lIes ~~ peuvent four~ir ~ue des matières premières.~~ ré21ité,ils
ne peuvent se passer de sucres terrés.En temps de guerre, ils
réclament 'QU 's1lcre terré .De sorte que les prohibi tions sort tombées
rapidement en désuétude.De plus, les raffineurs se sont aperçus
qu'ils ne pouvaient travailler à profit sans un mélange de sucres
terrés et de S'..lcres bruts.En définitive,s~res terrÉs,sucre tête et
sucre ~lênc tiennent une place privilégiée dans les importations.
~es sucres terrés ~tant plus chers et imposés 2
8lt le quintal, leur ~affinage accro!t le cont de production et par
•
ricochet,le prix àu sucre en pain, cela d'2utant plus que le sucre
terré, étant classé comme ;~~ de ,luxe, cette taxe n'est p23
rem"Oours~e mêrr.e si le eucre t'affiné sort pour l' {trarger •Ce t ,~xcsè.e:r:
de droit est gênant pour la cornrnercialisetiondu sucre en pain en
iurope à cause de la concurrence hollandaise et aTI[laise apr9s 17éi.
lV:ais,la principale contradiction vie::t r:e la
pratique commerciale elle-m~me.Le gouv~rne~ent ~oyal,se situ2nt
dans la pure tradi~ion mercantiliste,téritÉe de Colbert,n'encourage
que l'activité dù commerce d'exportation des produits manuf2cturés,
repr~sentés ici par le sucre en pein.Jusqu'en 17f6,ure ~2rt~e des
drQi~s perçus p2r 12 ferme générale 2~r lES sucr~s bruts ey?:'t s6yvi
L la fabrication du sucre raffiné exporté,est restituée.
470
~e gouv~r·€me~t voulait eirsi,perrnettre 2~X
raffinéurs d'ltablir leur pro_uit p~ ~lus ors prix possi11G.~ette
internes._es droits de consommation élev~s fixés sur les sucres
terrés et le sucre blanc les destinent tout naturellement à la
réexportation. Celle-ci est même encouragée par le pouvoir royel.
En effet, par u~e faveur sp~ciale,les étrangers ont
l' é'Vê.!1 tage de les 2c:.eter en entrepôt sens payer les drai ts de
consommation.~e surplus de sucres bruts passe égaleœent à l'étrR~ger
êa.ns payer ce droit .Aêissant ai~si, la~&nce a donné, elle-même,
consciement ou i~consciement,les moyens aux ~trar.gers de concurrencer
ses raffi~éurs.Eol12n~ais et E8~séates ai~si servis,ort profité de
leur proximité des zones de consommatior. privilégiées pour les
approvisionner à meilleur marché que les Français.lesHollenè.a.is en
particulier,du fait QUc6ntlelativement bas du transport :luvial,se
sont e!Iparés des marchés proches du Rhin'.CE sont les fournisseurs
quasi institutio~nels des provinces françaises de l'étranger
effectif:Alsace,lo!raine,Trois Evêchés.Ils concu~rencent même les
Français sur le marché suisse •l'Je pouvant supporter la concurrer_ce
hollandaise dar.s le l:crd, ceux-ci se spécialisent dans la réexport:-
tien ,renforç2nt ainsi,d'année en année,la prédominance ~trangère
sur le marcté du sucre en pain .
•
C'es~ pour d~amiser le commerce d'exportation que
l'arrêt du 25 ~ai 1786 a·~té promulgué qui accorde la restitution
~e tcus les droits perçus et ur.e prime de 4 l.t par ~uirt81 ~e
. - - -
sv.cre en pain exporté .De plus"cet encouragement aété fte~du à tous
les ports du royaume.bordeaux,la ~octelle,~ouen,Dieppe et Cette
F'taient,ava::t cet arrêt,les seuls ports privilégiés pou~·ce
co::::rerce.
~ais cette politique d'encouragement à l'eyportetion
r'est pas du goGt des fermiers ~€ntraux,car,e~le leE J:ii~e a 38
~. +
pro:;:lws.
471
Ils élèvEht ùonc toute sorte de difficultÉs 20it pour rEt~rdç~ le
paiement 6 es primes, s-oi t ~cur l' éluc.er to taleme'~t.
Ce trav211 n'a cependant p2S la prétention d'a~cir
saisi tous les ~6pects du commerce sucrier.Elusieurs pistes de
recherche existent et méritent d' ~tre suivies. Une étude systÉrJ2.tiq"J.e
e
du financement de la production au X1III siècle gagrerait à ~tre
f2ite.Zlle permettrait de conn2!tre avec pr~cision l'idertit~ des
sucriers, ceux qu'on appelle les grands blancs.Il reste aussi à
faire une étude sur le t0rrage et le raffinage aux !les.
~n ?rance,une recherché systématique sur les
raffineries reste à faire afin de déterminer Jes profits r~alisés;
elle peut être faite en rapport pvec le probl~me de la main-d'oeuvTe.
On pourra s'intéresser éussi à l'emploi du sucre en Europe et aux
circuits de redistri8ution.
~n revancte,cette thèse permet de voir le r81e
joué p2r la m2in-d'oauvre ncire dans l'expansion commerciale au
'"
LVII.l.~siècle,p2rtan"t,da~s
':"2ccumulation des rich.esses en France.
Dès lors,les thèses selon lesquelles la traite
négrière n'était pas rentable gagnerait à être révisées.
ANNEX_S
•
412
. ..,
.....
colonies et cles ch'"'ribre.~ il oS co::-.rr.erces sur l ' escla'7~.t:;;e•
I. lle
. 2.rti~i-:.ue, le 2::' ?évrier 1670.
(;l~ col 8 A l Folio 37 )
" le d.·j:fricr.e::lel:t et 12. culture des terres que vous rl.e recom-
ma."ldés sy e~':presce!:lel':t ne :,;6 ~. eu t faire que selor.-la--i'orce et
10. faculté des b,2.bit2.lë.s, C"3St à dire que ceux q,uy ont beaucoup
de l':ègres, de cr..evau:c etie boeufs :;:Jour p12..nter et cou:p~:er leurs
cannes et tourner inces::,a::.::ent leurs moulins, sont forts, et font
beaucou:9 de sucre, et ceux c:ui n'en ont que .eu, font d.u tabac, ou
de l'indigo, r01ll'tant 12. terre ne me..nquG l=ilS à ceu.::-cy, car leurs
concessions sont a:'l~ les, ",ais ils ne
euvent lé', mettre en valeur
fauted.e bestiaux et 'ie nègres, et ce sont ces pauvres gens que la
com~agnie doit assister your les faire devenir sucriers, ainsy l':on-
seigneur le secours d.es Nèeres, et des bestiau~: est le ~'lus ir.rr-or-
tant qu'on ;uisse d.onne::: au.:: habi tans c:'r ils sont ric'hes :par le
no!!!ore des esclaves et très!! pauvres lors'Ju'il'ê n'en ont l:oint "
•
2.
Le ·luc ,i,~ ?énelon, eouverneur général de 3la Vartinit-:.ue
Saint ?ierre. 7 Occ'tobre 1763 ( lettre à Choiseul)
12T C 8A65·~·folio 160
.~
.
uLen nègrec sont u~ in8i~~::lent essentiel de cette culture
et co~e ouvrier dans les l!ifférentes rle.noeuvres d.e 3la sucrerie Il
47-3
;-:..ne :':'3 s
" T-,' e<.~cl<!.vage est un il'lstru::i8nt néces3é'.ire f?t i::clis ensC-:'ole
ie 1:- culture ·iss rUes
: elle s '-étend et se borne a"Tec eu:..:.
'~ro~uction.
Borner le nombre 1es noirs c'est l~iszer des
.~:,----
4
Cbambre è r
CO~Derce ~e N9rmandie
176 5
::é:::oire,? 16 ::.11 A1H19
" Il f2:~-t S8.ns rioute-:ue nos colonies soient cultivr-5es, il fau.t
Q.u' elles soient abor.d2.ntes '3~ ric~es '?r leu.r culture, et :,our cela
elles ont besoin =~c :~oirs, ::w.l!:.eureu::~ l'!13.is nécessaires instru:'!'!ents
de la culture des colonies"
5/
Barré rie S.:dn~ ',~enê.r.t, r:le!TI':)re ete l ' ancierme sociétt
i '2E'riC"..:.lture du Ct'.'0 1 ?!'0G'ent Sur-Seine, L~ .~.6ut 1806 ~
.''':T col F~=6I.
" our crée]! une l'o:;,ul ~tion L:.borieuse :ians ces contr<Ses, il faut
en tirer L, soucbe :L 'un cli~,t :::>lus chaud 'lue celui ç,u 'on veut :'eu-
~'l'~r. Si l'on tlillti±t cette souc:he lies ?'-'.ys froids, elle succo!!lberait
sous la c:h~::.leur•.•
~es l~èsr(;s ::~ui,
nés sous un soleil -or1l~cnt
et tr;).ns·ortés sous ur. cli::::at 'lui leur'" 'D'.ru froiét, ont iÜ su :r;orter
. - - - - - - -
le trav~il r:lieu:c "'ue le3 ~e:=ictüns "
1
~
~1~
~Qo~cerner.t leC.om:::erce. étr~ger.::.u~ Iles
fr~ç~isesde l'k::erique.
( Arrêt du 30 ~out 1784)
';..l'.T1C~3 l ,::r
L'entre ôt assigné au Carer.age de Sainte ~ucie sera ~eintenant
;our ladite sainte seulement,et il en sera établi
deux nouveaux,
- ; - " r - - - - " - - - - -
l'un à '2ainte Pierre _.our la r.~artinic!ue,l '.El.u-tre à Pointe ?:. Pitre
pour la Guadelou~'e et dé~.endances. Trois à Sainte-Domingue, un au
Cap Français,un ~u Fort au Prince, un aux Cayes Saint Louis.
Celui qui e~iste ians la nême col nie au ~81e ~aint' Yicolas
sera su
ri::é.
Le Roi ordor.Jle au~c navires :2tra.."'1.gers uninuerr:ent chargés de :Dois de
toute espéce,même de teir.t~re,ie charbon de terre d'ani!~~u~ et oestiauz
---------------v-l-·v-~t;"=ietoute nature,de no~te et ~oisson sal~,de riz, ~aïs,légumes
decuirs verts en ; oil. ou tê,nnésj de l'elleteries,de raisines,goudron,
,
~
d'aller dans les seuls ~orts d 'entre~:ôt designés ='ar l'article 1er•
•
Il f:era rer::lis aux dits navires étr~ers qui viendront ,ians les :orts
d'entrecJôt
soit charGés des :.:archand.ises
er~ises
er l'2.rticle 2
':
SOIT vides, d'y ch3.!'ger
our l'étr2.nger ,ies
siro~s et taffias,et :les
marchandises venues de F!'~nce.
475
:,-rticle .=:
~outes l'J8
:;:.roha.nd.ises dont l 'i~ .ortation et ex~.orte.tion sont
'-~:=:~--
sOl.~::!i3e'" é',\\;2:iroits 10c:,.1.1:: ,;tablis ou à ·~-:.:",olir :~:;.:-,C =l:a.<:ttS
c:o'.onie, e~ _a.~ert:t~ en outre un
our :::ent ,ie leu:, v9.1~ur.
~s(o:':c.is
our veiller 2. ce'u'il :r..o" :;0':': ':'r:.troè.uit, :r..i e:·::.ort4
i '::'..U tres- r::J.1'ch::,nè.i:J~::s lue c ell~8 '-'ui sor:t s~scifige~ dan~ les
~ - - - _ .
?:ticles 2 et 3. Lfi:r.. ::,-.' E
ne r831"3 :.uct'.n iout'? sur l ' e::acti tude
·1.e cette surveillanc0, ~utoriS9 s:' . ::-.jc:st ~ les né~ocie.!2s ::'rançais
tainss le n:-.vire t'lui _ou:,:,o:r..t S ''j' :rouye:.' 2. nO::-.l!lcr lI:eË:;:ectivement
entJ:'e-eu;~ des co:nr.lissaires :,:z.u(·ls i:0!'ont ch",r~és le d.snoncer les
négligenc'es et les sous ':;.u' ils _our:-oient "Acor.noi tre et assisteront
lors~u'ils l'estineront convenaols, ~è toutes les visites ,qui aUJ:'ont
lr::'cle 6
d'ent~c;ôt· seront tenus SOl:S ~eine de confiscat~on desdits navires
e~ ~e 1eur cargüison et de 300 d'a~er.de ~'avertir dans l'instant ~e
leur e.rrivée, et il sera sur le charr.:
envoyé :leu:,:: cOffi!:is à bord pour
e~p~cher ~u'il n'en soi~ rien décha=c j , ~e8dits ca~it~ines, s'ils ar-
rivent ~a natin, fe~on~ le jour, et s'ils arrivent l~ SC~~, d~s la
•
matinée du lend.e~ain un8 :1.écl::c:'::l.tion e::2.cte au '?u:-'32..U 2..3 2;;c ::ajesté,
:i.e l ' eS;Jèce 6t~e la '::''-l:::.:nti téies ::J2Tcl:ar-li:;;es dont 188 c!:argeI:lens
seront cO:!li'osés 'c: re_ resenteront leu:rs co:nnoisse:::ents -3~·ch3.rtes
::arties. Il leur se:::'2- alors délivr') ,éJ,r le l i t 'Jureau, un :longé
ou . e.:.:nis, <f 1 a~,rès h:::.uel ils ~.our:-ont _ ro~'~der au déch2,rc€::!ent
en )résence toutefois, J.e cleu:-: COr.l:ri:::: '~ui 'risi tarent l?s ::J~rchand.ises
et signeront l~d.it ~ er~.is, afin 'l~' c Grt i:ier~::.l 'iébe:-Cl.l.:e!';'!ent. Lor~que
- - - - - - - -
lescli t~ ne.vires ~ s.rtiront, il ne ,,:!our:-3. être fait aucu.."l che.rge!:lent
sans une p9.reillelécl:;;.ration et aens 12. :;:: résence du nO!:lbre égo:.l de
CO!:lIlÙS, qui sif,"neront Jareillement le )err.:is le oha::.'se=, afin de
ce:-tifie:- de l' e~lbarr~ue!!:er:t.
. . î···~.':·'··.t'..<
476
. ~
.~=ticle 7
2,i lore le l r " i s i te "t'~ite- [',v['.nt ~Ü _2.8.;:de,Lh ..9\\L[',~~~i:'..)-:~Q)j,8,;I:"ge0€m.L
; ~
S~ :rouvait ::lur leD navires 'h=:~r:.ce:-s vent:.s.~::-',r..:: l'::s . or~:;; ét' en-
-1;:,'9
ôt, ou .artant ~e3 :li-ts .:orts, 'i 'o.,utres ::i[',rc:l3.."'1ù.ises Que celles
j.ont '. 'im.ortation et l ".:x~ ort2.tion sont :.ersises ::2,1" les 2.rticles
~: ,-t 3, il ser2.
:'OC8::l{
3. L' cor..i'iscation :les r..::,:vires "t (te leur
":'8c:::"r:;e~ent et l:.: confisc2.'tiol1 ~~_u -i;o'.tt :::llr2,:,:,onor:cée '],.vec ::'..:.:ende
.~_.... ~h;:-",,*
0
-
.
- . . ;
..rti-:::le:
;·~uct:.n navires 0t!':l~,s:~rs ne
oU!'~'ont n:'.yiQ.:,er , à tme lieu90eutour
. 0
ies Iles et coloniès !"r~çaises ~ : eine '.'i.9 confinc<:'. tion desd.i te r.a.-
v .;.. "ro.s
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_.:. d' en,-,-_.o, O_,.>L~ e •. sor .. __ o••• ~e_on
soumJ. ...
:'U:: :!1ê:-:les l,eines,
lors~'.:."ils seront :::,eI1cor.tr<6s lo:'s ie ho, route
'-:'.l'ils -iO:7ent teni:', l;lt:.:: =rès:~'s 8ôtes::.u'~" l:'.:'istancei':u:e
lieue. O~onne sa "ajest: ? est e::3t ?l. tous
officiers-coI:I!l:-.nd.ans
:tes vaisseaux, et 8.U:: vapi taines des B1tinents garde-eête, de cO'Y.:r_~i~
'-',',i,.
sür les ~<!'vires étr:,neers --yi se trot:.-r-:,~:::: en contravention 2.U
1
_________-=.t<;~':;';..~;;.·-~r:;,;;..:~~t article, de les !"~'.l.i:'e
:r J.o, force d.es :;.r~es et les a~nen~r
fli
d.ans le ~:ort le llus _rochain.
_.rUcle·9
•
Seront néal1!::oins e:,:ced..§sour. les Isles du vent seule;:;ent, la
il
lieue de lir.:ite fi:,~ée:;.r l'article ~r<Scéder.t, navires 2,p.a.!'tenant
aux sujets du Roy de 1<:'. Grande '3retacne, ex:-";cliés soit des .orts
d '.~.ngleter::.'e, soit de toute i),utre ::")ossessoin J'illgloüse, lesr:"uels
nô.vires ne I;O~_lrront être arrêtés et soumis que ians le ca,s où ils
~
.
3.ur~de11:t:;.bordé ians
cuel'1ue _ or~, .',nse, ou P.::.ie rIes Islesies
colonies Françaises, ou '-,u' ils seroient sur:ris f2,is~'.Dt sous voile
le comr.:erce
-rohibé.
:':'j
'"
';
\\
~.."
___ - :_,',0;', ~,-,'",
'0:-: •
477
l.rticl., 10
~es n~vires Fr~nçai3, soit iu Royaume soit des Isles G~ colonies
Fr:.Dç'::.iS€lS
.' ourront QQJlQQt.\\l'Ri.r- à. l ' iffi70l"t;,.~n.des;;;'"3.I'chii1rAi-s.e-s· u
·§~rar.èères i:erm.ises par l'article 2 ,comme aussi 2. l'e:::,rortati-::m
:2.I'ei:Llement :flrrnises par l'article 3. Ils seront sour.üses eux mêmes
?r';cautions, aux !!l8meS fornalités, au:: mêmes :v,:i=i;.::o
.:,', 'lui sont
résentés ,,-our les navires étrangers ~t subiront en cas de contra-
.
vent ion les mê::es ::eines. -:-es dits navires se::-ont seulerne!:t 1is-
~"3!iGés ;:l.e '0a;rer le droit cl'ur. : our cer.t fizé :'é:.r l'a:'ticle 4- et ne
cu
orteront~ue 18s ;,Jerce tions loco.les da!:s c'haQue colonie.
.~
."-rticle II
Touii· ca~itaines et ?é.trons de TI1:\\.ti'cents Frar..çais ar::!ôs soit d.ans
les I:orts ;:lu Ro:.raume, soit de:.ns ceu:( ~les co l.onies }'r3.nçaises Qui
voulront s'e~~édier des dites colonies, ou::, al~e.r a~er 1e l'Améri-
c:.UE même à St ~'ierre et : i,:},uelon ne :;ourrlllJt partir que d'un d.es
::orts d'entre_ôt, sous I,ein'" de confiscat:"on des Bt1~iI:lens et de leur
cargaison et de 30~ d'~mende. Lesdits ca itaines et ;atrons se~oDt
tenus lie :r'3nd.re ainsi r::,u'il est d'usê.ge ;.our ces ~or·tes d'expéditions,
la permission liDitée du gouverne~ent et de l'Intendant et le ?asse-
port d ft l ',amir<:j,l, . '=lui serOl:t enrsgistrés s.u:( Greffes de l'ar:ir9.uté.
I:kt ~j fourniront en outre, toutes les d~cl2.rations et Subiront toutes
les visi:l:es prescri tef
our constater l'ét,-.t =le leu]!'S c1nree:-::. :.'1:"';;;
le:o::::,uGls ne
'ourron-: consiste::, "2.u' er.. siro.::
et to.ffi::.3 et rJarchc.ndises
•
venues de ~rance, ~insi et le la ~ê~e ~~~ièrs que s'ils étc.ient
'37.rO'.ngers •.
:,rtic1e I?
Doivent revenir clans c:"::s _'orts ~~
. ~
'·erlt::'r'.,fôt;
ovr f,;u;Ü::- les visi t'2S
i:;' :'heur 2era libre "i.e
:'.sser io::.ns tel ]ort ou =-[L.~'? le 1::.;, colonie
,
Cl
;·ro::o~.
478
.:-rticle 1")
a:::péd.i~s:i3s Islé:. et coLni3s F!'aJ".ç:'.ises
'_~n . ort d' c:r.:tre, ôt, serent tenus ::lOUS
ein6
d.~ confise s:t'd!on ·18 s bë,-
''..~3;:tS et d,e 1:.;;urs c~rsaisons e-tie 30c~a'2-é,;e",d.e, ;1' ",rbore:, ~ trois
li~u~s ~u 1~r~0 une f12~e ou ara~GUC d.ist~nctiv8 tele qu'el:e sera
•
indL~uée
,~r les ::èr::.ir?.utés, c..fin ':'lU':1.U mo;nent <:e lcu!'''\\.rrivée, il
,uisse être ey:vo~,·é ~ bor:1 ies cO:~.:::is . ar 12 ?ure au i.e sa ~:ajç::3té•
.".1'-l;icle l'-
Ces contraventions = jugés ~~r les officiers de l'~mirauté con-
forménent sou:: ::·êglemer..ts faits?. ce su~et, sau,' l'a
el 'du con-
seil sUIl-:5rieur.
iitJ...
~~
1
j.i-ticle I5
"'
.......•... l·..••......
L" ,. .
:Je produit des a:1.endes et cor..fisc::üions prononcées sera att:r:1bu,~
~.
en totalité au;;: corn.:'Jis d.es Buxe::::."..L: ~le sc:. ::Q.jest5 \\}.li ""uront fait
Q
J 2
sai si e
t
J ' éga.rd.. des navires
Clui :.ouror,t 0té ""ris en contraver:tion
pax les vaisceau:: de s"· : .2.j'3St,:, N', ,.:.or les 1Jati:::ents g2.r1e-eôtes
la totalité dudi t
_rodui t
app'èrtiend.r2. .9~~reillO'~lent au:: cor.l!'!:P""d.::ms
et ca;it2.i:c:es ~'reneUJ:.'s. LO!'S~1.1;lil y'aura :i:::s f6nonciatie.te1.~rs, un
tiers du :::ême :;:;rQ)dui t total se:'a T,rélevé j, l~ur r.ŒO_OS.
~,-!'ticle I6
2e:'o!ot au surI:lus e::i2cutées selon leur for:::·: C'·t teneu::-, toutes 18s
iis:::osi tions ies lettres p2.tenO!:es '.1.1 :.\\ois _~ 'octobre 17=7 ·~t:'C' -:: or-
,iorJl2.nces eo!: r,5;:;1er!lents 8t;.'":JS~·~'.1e~s conccrn::.ll-:' :'s con:e2.'c85tr:,.ns~r
l::m;:; les Isles '3: co10niss :::'!"'..!c'ç:~ises en ce ::1.:1 "'_ ql1i l::';;::..:t p:c.s
~6 ro~~ ~~r le ;r~sent ~rr~t.
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SOURCES
et
BIBL lOG RA PH 1E
•
483
SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE
Nous nlavons pas la prétention de dresser ici la liste complète des
références ayant trait au commerce du sucre. Pour ètre complète, cette liste
exigerait un temps encore plus lo~de recherche. Nous nous contentons seu-
lement de signaler les documents d'archives, les livres et articles de revues
qui nous ont été utiles pour la rédaction de ce travail.
1/ SOURCES MANUSCRITES
Nous avons travaillé essentiellement aux Archives Nationales, rue
des Francs-Bourgeois.
10 / F 12. Commerce et Industrie
a/ Balance de Commerce
F 12 241 Nomenclature générale des marchandises diverses.
F 12 242 Objet général du commerce de la France avec l'étranger y compris les
is1es françaises de 11Amérique en 1775.
F 12 243 et 244
idem
en 177 6.
F 12 245
Il
en 1777.
F 12 246
Il
en 1778.
F 12 247
("
en 1179.
F 12 248
Il
en 1780.
F 12 249 Objet général du commerce de Ta France avec chaque puissance étrangère
tant en importations qulen exportations pendant l'année 1782.
F 12 250 Idem en 1787.
F ·12 1834 A Statistiques du commerce extérieur de la france 1716 - 1772.
F 12 1835
Statistiques du commerce extérieur de la France.
Etat de la navigation 1782 - 1788.
F 12 1666
Importations et exportations. Mouvement de la navigation, année 1789.
F 12 1668
Importations et exportations de l'année 1790. Résultat de la navi-
gation avec l'étranger: entrées et sorties 1790.
F 12 1669
Importations et exportations de l'année 1790.
~------_. -- -·12
F
1670
Idem. Mouvement de la navigation de l'année 1791.
F 12 1671
Balance du commerce, navigation des commerces privilégiés, année 1791.
F 12 1672
Navigation avec les îles françaises de 1-Amérique, la côte d'Afrique,
les Indes orientales. Trimestre de l'année 1792. Entrées des bâtiments,
tous pavillons français.
F 12 1673
Archives du commerce. Direction de Besançon. Importations de
l'étranger pour la France, exportations de France pour l'étranger,1792.
F 12 1675 A Commerce extérieur. Importations et exportations 1792.
F 12 1675 B Importations et exportations 1792.
f - - - - - - - - - - - - - . . .
./.
12
~~- 1676
F 12 1677
Conmerce extérieur. Importations et expor:Jélt.ions 17~3.
F 12 1678
F 12 566-595
Documents sur les villes hans~atiques 1716 - 1812.
F 12 1866
Circulaire pour établir la balance de commerce, 1792 - 1793.
bl Commerce avec les colonies
F 12 2618
Commerce étranger avec les colonies françaises.
F 12 549-550
Conmerce extérieur et commerce colonial, 1741 - 1811.
cl Taxes sur les sucres
F 12 659 A
Dossier 3. Conmerce et industrie de Paris, 1786 - 1788.
F 1~113 (3)
Délibérations et avis des députés du commerce, 1779.
(Séances du 29 janvier 1779). Domaine d'occident et droits d'entrée.
F 12 799 (A)
Commerce du Canada et des colonies XVIIIe siècle.
(Droit du 1/2 pour cent).
F 12 818-
Recette du demi pour cent, 1773 - 1786.
F 12 809 B
Perception du demi pour cent XVIIIe siècle.
dl Manufactures sucres raffinés
F 12 1501 et
1502
•
F 12 1639 A
Manufactures sucres raffinés, 1786 an
VII.
F 12 1557
Etat des manufactures et fabriques existant dans les départements
(1798).
el Foire de Beaucaire
F 12 1229, 1230
fi Primes de commerce - Douane
F· 12-- 1932
Douanes. primes pour sucres raffinés, 1792 - 1793
F 12 1639 A
F 12 1653
Traite des noirs, 1791 - 17~3
F 12 1654-55
idem
- 1793
F 12 652
Pétitions au comité d'agriculture et de commerce, 1789 an II
F 12 1966 (0) Douanes, sucres, suifs, 1791 - 1813
,f.
455
<---_.
J!!~
g/ Dé 1i bérations et av i s des députés-~-du-'e~lRl1eree
i
!
F 12. 113 (2) 1778
F 121 113 (3) (1779)
III SOURCES IMPRIMEES (Commerce colonial et commerce extérieur)
AD XI 17
Sirop et tafia
AD XI 9
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Officiers de commerce
(1708 - 1777). Commerce maritime et extérieur (1617 - 1783).
,
AD XI 48
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;.~l.~.
AD XI 61
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i:.
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M.DCC LXXXIX. 122 p.
F 12 251
Résumés généraux de la Balance du commerce, années 1787 à 1789
·------P.n V à 1821.
F 12 252
Résultat du commerce extérieur de la République Française pendant
le premier semestre de 1792.
Paris - Imprimerie Natio~~)~le..._'7_9.3
~==
1111 FONDS COLONIES
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1. Collection Moreau de Saint-Méry
F 3 161
(
F 3 162
)
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(
produi ts.
F 3 163
)
2. Autres
Mémoires et documents divers sur le commerce entre la France et
ses colonies 1663 - 1773.
F 2 12
•
à 13
Bureau général de la balance du commerce. Commerce respectif de
la France avec ses colonies d'Amériqu~1774 - 1789.
F 12 B 14
Mémoires, ordonnances, arrêts et correspondances concernant le
commerce 1668 - 1776. Statistiques concernant le commerce colonial
et les pêches maritimes, 1766 - 1788.
.1.
486
BI Par colonies
1. Martinique. Correspondance générale.
C 8A 1
Correspondance générale. Le Compte d'Estrade, Vice-Roi. MM. de
Tracy etLe Baas, Gouverneurs Généraux, 1663 - 1676.
C 8A 4
Correspondance générale, le Compte de Blénac, Gouverneur Général.
MM. Bezon et Dumaitz de Goimpy, intendants, 1685 - 1687.
C 854
Correspondance générale, le Marquis de Champigny, Gouverneur
Général. M. de La Croix, intendant, 1742.
C 8A 62
C 8A 65
M. de Fénelon, Gouverneur Général et M. de la Rivière, intendant
1763.
C 8A 66
C 8A 68
Le Comte d'Ennery, Gouverneur Général,M. Peynier, intendant
1766 - 1767.
2.. Guade1ou pe
F 3
163
Cultures, manufactures coloniales, leurs machines et leurs produits.
Collection Mauro de Saint-Méry.
F 4 12
Collection de mémoires, plan~ et pio;ets 9~1 la Güadeloupe de 1777
à l'An 3 de la République.
3. Sainte-Lucie
•
C la C 8
Etats de commerce, 1764 - 1789.
4. Tabago
C la E 6
Finances et états de commerce, 1789.
C la E 8
Finances et commerce 17a5 - 1788.
5. Guyane Française
14
------C
45
Recensement population, état d'importation et d'exportation.
C 14 46
C 14 47
Correspondance de la Compagnie de Guyane, 1786 - 1790.
C 14 50
C 14 51
.1.
487
6. Saint-Domingue
C 9 A 10
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Le XVIIIe siècle. Première partie: La France et le monde de
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COHEN (14.B)
Français et Africains. Les Noirs dans le regard des Blancs
1500 - 1880 (traduit de l'anglais par Camille Garnier)
Paris, Gallimard, 1980, 409 p.
DEBIEN (G)
"Une sucrerie de Saint-Domingue et ses esclaves"
"Bulletin de la société d'Histoire de la Martinique"
n° 8, 1957, pp. 1 à 51.
Plantations et esclaves à Saint-Domingue
"
1. La sucrerie Lottineau 1750 - 1777 (p. 9-82)
2. La sucrerie Foache à Jean Robel et ses esclaves,I770 - 1803.
(p. 83-171)
Un.de Dakar, publication de la section d'Histoire, 1962, 184 p.
Une plantation de Saint-Domingue et ses esclaves
la sucrerie
t
Galbaud du Fort, 1690 - 1802, 136 p.
"
Le peuplement des Antilles françaises au XVIIIe siècle.
If
Les engagés parti s de la Rochelle 1683 - 171'5.
;
~,r
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4 c ..-,
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DEER (N)
The History of Sugar
London, Chapman et Hall, 1949 - 50
Volume 2.
ESS(Jt1BA (B)
Sucre méditerranéen, sucre atlantique et le commerce du Nord
européen aux XVe et XVIe siècles.
Thèse de 3e cycle d'Histoire, Paris l, 1981, XII + 636 p. dact.
FIERAIN (J)
Les raffineries de sucre des ports en France (XIXe début du XXe s.)
Thèse présentée devant l'Université de Nantes le 28 septembre
1974. Lille, édition et
reproduction des thèses. Université
de Lille III., 1976, 758 p.
LEFEBVRE (G)
Etudes Orléanaises. 1. Contribution à l'étude des structures
sociales à la fin du XVIIIe siècle.
Paris, Mémoires et documents XV, CNRS, 1962, 276.
Cf. pp. 111 à 114.
•
"Le Conunerce et l'Industrie d'Orléans en l'an XIII"
Ëxtrait du Bulletin mensuel de la Chambre de Commerce d'Orléans
et du département du Loiret, n° 1.
•
Orléans, imprimerie Orléanaise, janvier 1898, 26 p.
NICOLAS (P) et
MORREN (F.W)
Le Sucre
:.d
...it
PLI~
Un essai de contingentement d'importatnion au XVIIIe siècle
DUQUENE (R)
(épisode de la lutte entre raffineries coloniales et métropolitaines)
Paris, librairie du recueil Sirey, 166p.
REYN 1ER (J'1)
Contribution à l'étude de la question des sucres.
Paris, Domat Montchrétien, 1936, 287
RIGOTARD p-1)
La canne a sucr-e--;-s~CcÜTture, soriimportance économique
Paris, Société et éditions géographiques, maritines et coloniales,
1929,148 p.
o
"7----
TABLES
•
--:-4
::;r1,,
---------~-
4S8
;
' ; 1 . \\
;.',:"11
TA3LEAUX
,··:·r
-:-. ~
· - - i
Importations sucrières coloniales hollandaises
1753-1790---------------------------------------- 29
2
Sucreries en brut et s~creries en blanc de la
partie fra~çaise de Saint-Domingue 1763-1750----- 40
.0
3
Population noire, sucreries et quantité de sucre
exporté de chaque canton de la colonie de
Saint-ùomingue en 1788--------------------------- 41
4 :
Production de sucre de la Martinique 1671-1785--- 50
5
L'industrie sucrière g~aQ~loupéenne---~----------55
6
Gé~graphie sucrière de l'archipel guadeloupéen
en 1785----
--------------------------------- 55
7
Propriétaires de canne à sucre en 1785----------- 60
8 :
Les marchés sucriers français au XVlllè siècle--- 65
Villes e~ ports intéressés par le commerce
colonial dans la deuxième ffioitié du J.Vlllè
siècle------------------------------------------- 76
.
10
La navigation pour les îles françaises de
l'Amérique 1773-1788,17S1-1793 . ~8 <w:.::ti~~----- 80
- - - - - -----_..
11
Les entrées dans les ports de France 1773-17fE,
1791-1793----------------------------------------- 81
- - ,
12
Les sorties pour la traite sur lq côte occièe~tale
;
d'Afrique (Sénégal et Guinée)--------------------- ~1
t
- - - _ _
....
.. _- .. __ ..._-- -----
13
Hiérarchie des O~f:?~ ?~i~cip~ux ;u~ts G2~S le
commerce colo~i~:---~ ------------------------- 82
14
3xportation etréexportation sucrière en 1788--- 8S
15:
Estimation de lléYolutio~ cre- la pe~ceptiaD du
d=~!t de 3~ de Domaine d'Occident sur les sucres
1775-1789-------------------------------------- 132
16
Estimation àu montant de la perception du droit
de 3% sur les sirops et tafia 1775-1789-------- 132
17:
Répartition géographique àes bureaux de la
perception du 1/2 pour cent en 1780------------ 144
18 :
Recettes de la caisse de commerce 1773-1787---- 146
19 :
Etat général des sommes payé&s sur lés fonds
de la caisse de commerce en 1777---~----------- 141
20 :
Note des différents prêts faits : état
pendant les six premiers mois de 1777---------- 148
21 :
Prix des produits sucriers en Guadeloupe
•
1763-178S-------------------------------------- 177
22 :
Prix du sirop livré aux Nouveaux-Angleterrins
1764-1779-------------------------------------- 178
23:
Prix du sucre blanc et tafia à Cayenne Guyane
1766-1771 et 1776------------------------------ 178
24
Prix des produits--sucriers--à. Sainte-Lucie
1784-1788-------------------------------------- 178
25
Evolution àes prix de marché à la Guaieloupe--- 180
!
:-, 'II
,,"-
:
l
soc
26
rrix des sucres à 32i~t-?ierre,28 Jar.vier 1765--181
.-----
27
Prix courar.t des sucres bruts au Sap èepuis le
30 Dé:embre 173S jusqu'en 1744, 2C ~ovembre
1748 à Janvier et ;.ars 1749-------------------- 1é 1
28
Prix des sucres à Fort- au- Prince le 4 Janvier
1787------------------------------------------- 182
29
Quantité de sucre brut pour un Noir 1717-1765-- 185
30:
~ouvement d'une s~crerie en brut dans la
partie du r;ord de Saint-Domingue en 1788------- 1S8
31 :
Compte simulé du cont de 100 barriques de
sucre brut chargées à Saint-Domingue pour
France pesant net· au dit lieu 1CO CCC lb
(10 Décembre 174S)-------~---------------------212
HiÉrarcnie des destinations 1:73-1786,1789,
~
32
1
17S1 à 1793------------------------------------ 2~J7__~1
33
Hiérarchie des provenances 1773-1786,17S1~1793- 218
i~
34
P2rt de chaque colonie àans le trafic ~~~itime- 219
35
~tat de la navigaticr. directe de la ~artinique
et de la Guadeloupe avec la métropole
(importation-exportation) 1764-1792------------ 222
36
Ventee n?grièree e:1 Guadeloupe et en ;'2rtinique
en 17S1 et 17S2-------------------------------- 231
37
Ztat récapitulatif de la traite négrière à
destination de Saint-Domingue------------------ 233
38
Géographie des ventes négrières françaises
1763-17~3--------------------------------------
235
, - - - - - - - --. -----
5C1
39
:ntrées et sorties :es b2tiillents des pcrts de
France en 1767 et 1-~s~'8~---------------------- 2 S2
40
Entrées et sorties ues nevires en 17S1--------- 253
41
Importatior.s en FTance des sucres coloniaux
1765-1753-------------------------------------- 262
42
Part ~e chaque colonie dans les importations
sucrières françaises---------------------------26E
43:
~hargement de sucres arrivé à Nantes pendant
le premier semestre de 1767-------------------- 269
44 :
Quantité de sucres exportés de Sainte- Lucie
à la ~!artir.ique 1769-1790--------------------- 270
45 :
Exportation de sucres de la Guadeloupe à la
Martinique 1789-1792------
------------------ 271
46 :
Types de sucres composant les importatione
sucrières coloniales 1773-17S3----------------- 27 5
47
Part de chaque type de sucre dans les impor-
tations annuelles------------------------------ 275
•
48 :
Part de sucres bruts et t~és dans les
:.~
.~.~.,~.
exportations de Saint-Domingue----------------- 219
49:
Part de chaque type de sucre jans les exporta-
tions de Saint-Domingue------------------------ 279
50:
Part ùes SUCles-nruts et terrés dans les
export.ations de la l'.artir.ique et àe la Guade-
loupe------------------------------------------ 2SC
51
Prix de la ba~riaue de sirop livrÉ eux
Nouveaux-Angleterriens de 1764 à1774----------- 225
- - - - - - _ ...- ..., .....
SC2
52
Expor-:ation ;:;'2 sirop,tp,i':2 et r:;'um de S;::inte-
~ucie pour :es colonies~~_tr2ngères et les
Etats-Unis 1784-1790--------------------------- 286
53
Exportation de l' entreD)-:; du Cap en 1786------ 287
54
Importations de sirops,tafia et rhum 1773-1793- 293
55
Origine des sous-produits sucriers------------- 294
56
Ports de déb2rquement des sous-prod~its
sucriers--------------------------------------- 2S7
57:
Part de la consommation ir.térieure de sucres
bruts, terrés et tête ~ans les importations
.
sucrières coloniales 1775 à 1780,1786 à 1789--- 305
58:
Fart de chaque type de cucre dans la consomma-
tion intérieure-----------------~-~------------310
59:
Taux de consommation de chaque type de sucre--- 311
60
Etat des raffineries en activité en France
en 1663---------------------------------------- 325
61:
Les centres de raffinage de sucre au XVIllè
siècle d'après ~aurice REYNIER----------------- 325
62----:---
Les importations sucrières françaises de
l'étranger 1775-1793--------------------------- 347
63:
Les fournisseurs étrangers de sucre de la
France----------------------------------------- 356
64:
Valeur des importations sucrières françaises
de l'étranger 1775-1789------------------------ 36C
65
Part des ventes sucrières dans les exportations
d0 la Hollande, la Flandre,l'Antleterre,l'~spa-
gne et le Portugal vers la France 1775 à 17E9--- ~61
, - - - - - - _---_
..
..- _.--- -....-
503
66 :
Noms des raf:ine~~s et p~imes dues psr le gouverne-
ment pour le sucre e~ pain exporté à l'étanger
jusqu'à l'époque du 31 Juille~g1---------------
.....,.
,', v
67:
Etat des paiements de primes et de remboursement
d~ droit sur les sucres raffin~s exportés à
l'étranger 1793---------------------------------- 373
68:
Tableau synthétique de l'ptat des paiements des
primes et des rembourseme~ts de droits en 1793
(Bordeaux)--------------------------------------- 376
Montant et taux d€s
diminutions------------------ 380
70 :
Les navires français à l'étranger en 1790 •
Sorties et %---------~---------------------------390
71 :
Quantité de sucres signalés à la foire de
Bèaucaire---------------------------------------- 395
72:
Evolution des prix des sucres bruts,terrfs et
et tête dans différentes places de commerce
1764-1792---------------------------------------- 402
73:
Prix des sucres raffinés,du sirop et de la lO~lass:e--'~Cj
•
74 :
Tableau quantitatif des ventes ventes sucrières
annuelles à l ' é tra.nger 1775-1793----------------- 415
75 :
Part de chacun des types de sucre réexportés
chaque année(1775-1789)------------------------- 418
76 :
Exportation et réexportation des sirops et du
tafia 1775-178S-----:.-=:.-.:.:.......:.-..:.-=------------------- 434
77
Part de chaq~e marché dans les exportatiJr.s
sucrières françaises 1775-1792------------------ 436
504
78
Part de la Suisse,de le Sevcie,ce l'It;lie et
du Levant è.ans les export2tion~~ç2jses de
sucre e~pain 1775-1792------------------------- 450
79:
Part de la Hollende et des villes ~?nséetiques
dans les ventes de sucres b12nc,bruts,ter~és et
t~te 1775-1792---------------------------------- 452
80
Les marchés des 3i~ops et t?fie----------------- 454
81 :
Les recettes sucrières de 1775 à 178S----------- 457
82 :
Le commerce extérieur français 1775-1789 •
Les recettes------------------------------------· 458
83 :
Part des sucres ~t sirops dans la balance
commerciale 1775-1789----------------=~~_~-----458
CARTES ET GRAPHI~UES
•
::il Les cartes
La répartition des Antilles et Guyanes.
(Situation après la guerre d'AmÉrique, 1783)------ 22
2
Répartition géographique des sucreries à
Saint-Domingue en 1788--------------------------- 42:is
3
Les marchés d'appel des sucres au I.Vlllèsiècle--- 66
4 :
imr~~nz: dl en::egls-srGment de--S1!lcre r:lffï..t"1o
étran6cr entré en France en 1792-----------------
bl Les graphiaues
Prix' courant des sucres bruts au Cap,3C Jéc.1739-
1744--------------------------------------------- 182èn
505
2 :
Evolution du trafic maritime des Iles du vent.
Entrées et sorties----------------~~----------222b~
3 :
Evolution du trafic maritime des colonies •
Martinique et Guadeloupe------------------------- 222ter
4 :
Evolution des importations sucrières: 1774-1793- 262b~
5 :
Mouvement du prix du sucre brut à rantes
1765-178~----------------------------------------
4C4t~
6 :
__EYolution du cours des sucres terrés à la foire
de Beaucaire 1764-1789--------------------------- 409b~
7 :
~ouvement des prix des sucres fin et mélis à la
foire de Beaucaire 1764-1789--------------------- 409ter
8 :
Evolution annuelle des ventes sucrières
françaises 1775-1793-------~------------------415bica
ANNEXES
1 :
~uelques extraits de déclarations de gouverneurs
des colonies et des chambres àe commerce sur
l'esclavage-------------------------------------- 472
2
Projet d'arr~t concernant le commerce ptranger
aux îles fr2nçaises de l'AmÉrique (1784)----------474
3
Frix d'évaluation des sucres 1763-17SC------------479
Valeur des exportaticns françaises vers chacune
des puissances étrangères 1775-1780---------------480
5 :
Exportation sucrières françaises 1775-1792
(les quantités)----------------------------------- 481
6 :'
Valeur des sucres,des sirops et du tafia export~s
vers chacune des puissances 1775-178S------------- 482
- - - ' - - ' - ' - "
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506
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uARS LE MONDE DAi'-!S LA SECOI'~DE r-:OITIE DU
,
XVIIIe 5IECLE
':" : . • . . . 2 3
• l Zones àe production ••••.....••....................•.. 23
1 Le Brésil
e.o • • • • • 25
2 Les Iles danoises ....................•. _•.... 26
3 Les colonies espacnoles ..............•.•• -.•••27
4 Les colonies hollandeises ................•. ~-.2-$
5 Les"English West Indies"
# . ~ • • • • • 30
5-·/ La Barbade .•...•..........•........•..•.. 31
5-2 La Jamaiq ue
~
32
5-3 Dans les "Leew;:or.- s" ..•.••.••••...•••.•••• 32
~-4 Les Iles cédées
33
6 Les Iles et colonies françaises de
~rAmérique:la prospérité de la produc-
tion sucrière repose sur Saint-Domin~ue
34
6-1 Saint-Dominfue le pivot de l'ind~strie
sucrière fr2nça.ise
35
a) Le l·.orè.
43
b) L' Due st . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . • . . . . 44
c) Le Sud
45
6-2 La stagnation martiniQuai.se-:-:
~ .••..•• 46
6-3 L'erchipel guadeloupéen,la crise ouverte.51
6-4
•
Les petits producteurs ......•.•..•.....•. 56
a) Sa.iY1te-Lucie .•......••.......... _
~6
b) Cayenne et Suyane
56
c) 'Tabago
59
5e7
II Les zones de consommation •••...•••••..•.•........... 63
1 Les marchés européens d'appel des sucre~ français. 64
2 Hors d'Euro pe- •.•••••••••••.•••.•.....•.......... .:s 9
2-1 La Barbarie ..••.•.•.•••.•.....••......•...• 6~·
2- 2 Le Levan t. • • . . . • • • • • • • • . • . . • . .. ....•...... 69
2-3 Les Etats-F-is D'Amérique ••. , .••••••••..••• 69
III Les candidats au commerce ••••••..••.••••••.•••••••• 70
1 Les candidats au commerce colonial ••..••.•...•• 71
2 La hierarchie des ports ••••••••••.•.....•.••.•• 79
3 Les ports privilégiés pour le commerce de
ré.exportatiori des sucres •...••••••••••......... 86
CHAPITRE II L' EXCLUSIF, UN n~STRm~~::T DE SL'3CRD T rl.TICr
ECOLOi\\IQUE JES COLONIES AUX IFTERETS DE LA
~ETROPOLE ••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 93
l L'exclusif,ses principas,son fondement,son applica- --
tien ••••.....•.......•..............•................. 93
Principes et fondement .••.••••••••••••.••.•..•• 94
2 Contrebande ou dL:'ficile application de exclu-
si f •••.•••••....•...•...•••••.•••••.•••••...•.. 98
3 Les dérogations au syst~me prohibitif:
signification .•••.••••.••.•••...•.......•••... 1C13
•
3-1 La France favorable au con~erce ~ord
2.méricain ••••.••••••••••.••...•..••.•••••. 105
3-2 L'exclusif résiste aux dérorrations
accordées aux étrangers ••.............•••. 108
I I L'exclusif,1P- instrument au 3ervice des nr ociani::~;
~our réaliser de~ ~rofits en abaissant les prix
au:< colonies •••••••••.•••••••••••••••••.••.•••••••• 112
L'exclusif est élaboré en métropole-'auprofIt
dE::S négociants .•••••••.•.•••••••••....••.••..• 112
2 La sp~culation est la praticue cout~~te des
né;oc i2Y:. ts • • . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . • . . . . . . . . . . . . 116
III L'exclusif comme facteur important du prélève~ent
fiscal ••••••••••.•••••••......•.••••.•.....•..•.•• 121
1 Le niveau de capitation des négociants
impliqués dans le commerce coloniB1-.<.·,..
122 .' en•.•
2 Jroit de Dom2ine d'Occident et taxes
so~ptuaires sur le sucre •.••••.••..••••••••••• 127
2-1 Les 3~~ de Domaine d'Cccide!"
128
2-2 Les taxes somptu2ires sur Iffisucres •.•.•.• 134
2-3 Les sous pour livre additionnels ••••••.••• 143
3 La ceisse d~ co~nerce ••.•.•.....••.••••••.•••• 143
3-1 Les bureaux de perception du 1/2% ••••••.• 144
3-2 Les recettes ••••••••••••.••••••••••••••••• 14'
3-3 Destination des fonds de la caisse du
commerce •••••••••••••••••••••••••••••••••• 147
4 Les autres droits relev8nts du Domaine
d'Occident •••••••••...••••••••••••••.
151
1
• • • • • • • •
5 Les a~us de la ferme •. " .•••••.••••••••••••••• 151
CHAPITRE III CIRCF:LATION ~101ŒTAIRE DESASTREUSE,
ENDETTEI'r-ErT CHRONIQUE DES CO~OI';S ET rt;AIN-
~ISE DES NEGOCIANTS SüR LA PRODUCTION
SUCRIERE •••••••••••••••••••••••••••••••••••• 157
l Le fonctionnement du système monétaire •••••••••••••• 158 ~
1 La marchandise,une monnaie de nécf:3sité
inventée per les premiers habitarts .••..••.•.. 158
2 La liv~e co:oniale,u~e ~onneie de ~~Tnte sous
estimée •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••. 15S:
3 Les monnaies étr3~g~res transfor~ert les
conditions du commerce .•••.......••••••••••••• 165
3-1 .:..es monnaies d'prfent ••...•.••...•••.••••• 166
a) La gou~de cu pi~stre forte et ses
sous-multiples •..•••••••.•••••.•••••••• 168
b) 1a pias tre simple et ses so us- mul tiples .168
3-2 La monnaie d'or ••.•.••••••••••.••••••••••• 169
4 Les contractants préfèrent opérer par troc •••• 170
II Le d~s~~uilibre
entre les nrix et d;siruilibre du
nive2U :-:t<pntitatif des pch,:::."'ges .•.••..••••••••••••. 173
Les problèmes d'évalu8tio~ du prix des sucres.174
1-1 Les prix administr: tifs ••••••....••••••••• 177
1-2 Les prix ce marché ...............••••••••. 120
2 Le J~s!ruilibre du niveau
uantitatif des
échr·t·~ ·::'""es •••••••••••••••••••••••••••••••••••-••• 1S3
,
III Crédit de cargaisons ou fi~2~cement externe de ..La
proàuction et :":1pir.-i. i;- e cies n?~:oci~~nts su~ 12
valeur proQuite sur les h2Di~2tions pRr le tr~v?il
des esclaves .••.•.•••.••.......•...•••••••..•••.•• 187
Le travail de l'esclave noir comme mobile de
la production sucrière et base de la richesse
du colon •••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 187
1-1 L'insuffisance de la main-d'oeuvre blanche
comme cause du recours à la meir--d'oeuvre
T"_oire,ulJ faux prGolsme .•.••••••••••.•••••. 188
1-2 S'est du nombre d'esclaves au travail oue
dépend la richesse du colon •••.....•...•.. 1S4
2 Un prtt~xte
;our les négociants d'accap2~er la
prcàuction •••••••••••••••••••••••••..••••••••• 203
2-1
~es ~oyens à'pccroî~re le profit •••...•••. 203
2-2 Jettes de cprgaisons et li8ison
d'habitation:le contrôle de la production
par les négociants •••••••••••••••• , ••••••. 206
CHAP ITRE IV STRATEGIE DBS AFFAIRES ET r:OUVErŒ!'~T GEJ'ŒRAL
Î'
,-,
DES n:pORT"TIONS SUCRIZRiS ••••••••••••••••••• 215
l La hierar~~ie des desti~ations et la hier;rchie des
pro-·enance:un commerce déséq1J~libré••..••••••.•••••• 21-:;
La navigation en droiture:la place ~rpdomin2nte
de Sai~t-Domingue••.•..••.•.•••.•••••••••••••• 216
1-1 Saint-Domingue .••••••.••••••.•••..•••...•• ~20
1-2 Me.rtinique et Guadeloupe .••••••.•••• .'••••• 222
1-3 Guyane et Tabago •.•...•••••••••••••••••••. 226
2 Le ravitaillenent in~~al des colonies en ~?in
d'~euvre noire co~me f~cteur de désF0uilibre
co:r.~e'!'ci;:-~l•••••••••••••••••••••••••••••••••••• 227
2-1
Lê trpite :r2nçaise d€daigne
les Iles du
vent et la Guyane.Saint-DominçuernoroDolise
le trafic ••••••.•••••••••••••••••••••••••• 229
p) Cayenne ~lJY2ne ••••••••.••.••••••••••••• 22S
'c)
J:'a ba,go •••••.•••••••••••••••••••••••••••••• 229
c) r'.2.rtir;i~ue et Guede2.ouDe •••••••••••••••••• 230
d) Saint-Dominp-ue •••••••••••••.••••••••••••••• 234
2-2 Le monopole du trRfic négrier par
Saint-Domingue co~me cause de sa primauté
commerci21e •••.••••••.••..•••••••••••••••...• 235
3
Les causee èe l' engouem:.:-t pour Saint-D:,.ingue.::';;-
3-1 .L.J€
paiement en prE .. t et la contrebande
a~ec les colonies espEgnoles •••••••••••••••• 242
3-2 Les contrats de liaisons comme facteur
important de la fr~quence du trafic avec .
Saint-D?mingue •••••••••••••••••••••••••••••• 247
3-3 La qualit~ des sucres ••••••••••••••••••••••• 248
1
4 Les zones pr~f~rentielles du commerce frer.ç?is
à Saint-Domingue ••••••••••••••••.••••.••••...•.. 251
II Les i~portationE sucrièreE fr2~çaises,fidèle reflet
des particularités du commerce colonial •..•........... 257
1 Croissance des importations et hi~rarchie des
colonies dans les fournitures annuelles de
sucres •.••••..••.•.••••..•...••.••••••.••.•..••• 258
1-1 La croissance des importations sucrières
françaises(1763-17~3).Critiquedes sources •• ?5B
1-2 Rôle pr~pond~rant de Saint-Domingue dans
r
les importations sucrières françaises •••••• .--267
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a ) v2.1 .. , -.-Jom..L. .... gue •••..•...........•......••.• Lct".
b)~.~rtinique..•••.••.••.•..•••..••.•.•••••••• 269
c)La Gu2deloupe .••..•••••••••.•••••.....•••• 271
è. )La Guyane •••..•••••••••..•••••••••••..•••. 272
e) Ta-.. ,~go ••••••••••••••••.••••••••••••••••••• 2'7~
2 structure des impJ~tations sucrières ~cloniales
ou l'échec de la division intErnationale du
tra'J2il •.••.••.••••.•.......•......•............ 274
III Le commerce des sirops et ta:i?,u~e ~esure
,
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~onpl{mentGire d'erccur2~ement po~r 12 p~cte a ..L&
r.1 0 ru E: • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • ..... • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 28 3
1 Un premier compromis:la vente aux étrangers •••.• 283
2 Le second comprorris:l'admission des sirops et
tafia en entrepôt en France pour la
ré exporta ti on ••..•......•...•....••.......••...• 288
FR~i~C~I3 1~1: ~[~CF~ .•............................. 3C1
l Cne con2om~ation intérieure très réduite ••.•••••••...•. 302
Bvaluatian
u2n:it2tive de la consommRtion
intlrieure p2r ~apport 2UX i~Dortations
sucrières colo~ieles.••.••..•.••••••.•......... 303
2 Il est iu~o~siGle de se passer de toutes les
~ualités de sucres,mais le sucre brut
prédomine ••••.•.•••.....••••••••.•.•.•••.•..•.• ~08
3 Le mélange du sucre terré et du sudre brut dans
le raffinage:un cas de non respect de la
législation ~tablfe •••••••••••••••..•••••••••.• 313
e
rr C~e industrie f~:rissante au 17-Ir
siècle:le raf-
fj~age du sucre •••••..•••••••••••••••
..••••••••••••• 31E
1es facteurs d'expa~sion de l'industrie du
raffinage ••••.••••.•••..•••••••••.•••••••.•.•.• 318
1-1 La classification des raffineries en
manufactures royales ••••••••••.••••.•.••••• 320
1-2 Un protectionnisme rigoureux ou la guerre
des ta!'ifs •••••••.••..•••.•••..•..•••.•.... 322
2 itat ~es r~ffineries françpises de sucre •....••>24
2-1 En Flandre
française ..•.•................ ~327
2 )lJne
raffinerie à Dunker()ue ...•.•........ ~327
b)Une raffinerie à Valenciennes et à
Bergue s ••••••....•••.............••.....• 32E
c)~eux raffineries ~Arras Et à 30ulog~e .•.• 329
d ) Dix re_ffiner i es à Li Il e •...••••.....••••. 329
2-2 En Normandie ••••.••••••••.•.•.•.••••••••••• 330
~)Rouen:la perte d'une industrie jedis
florissante • • • . . . . . • . . . . . . . . . • . . . . . . . . . . . 330
b)Une raffinerie à 2onfleur
331
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d) A Dieppe: P::-es-en-cë hypo'th6 tique d'une.,
.
raffinerie au xVrrresiècle •••••••••..•.•• 331
2-3 En Br~tegne:les .raffineries de tTantes •••' ••• 332
2-4 Bn Guyenne(Guenne):les raffineries de
l:(o 1" d eaux •..•.••..•.•.••••••••.•••••••...•... 33;
512
2-5 La Gascogne:la raffinerie de 3ayonne ••.••• ;35
2-6 .Le Languedoc
a)ie raffin?ge à Sète et à ~ontpellier •••• 335
t)Le raffinage & Beaucaire •.•••••••••...•• 336
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(;.-1
Sn l:::,')vence
a)~8s raffin~ries ~e :ucre à Earseille
iE~ ~a deuxi~me
e
noitié du I.Vlll sièc1e,
l'his"toire d'ur. dÉclin
337
b)La raffinerie de la Ciotat .•••.••••••••• 34C
2-5 Dans la généralit0 d'Çrltans:les raffin-
eries de sucre d'Orlé2ns .•••••.•..•••••.•• ;40
3 Les produits du rçffinage • ••••.••••••.••••••• •343
III Acheter moins et vendre plus:le commerce sucrier,un
moyen de s'enrichir au détriment de l'étranger ..•••• 346
~ politique commerciale en matière de sucre .. 347
1-1 ~~S irnoortEticns licites en nrcvera~ce de
l ' ~ t r a~ ,~' ,: l' , i r .s .: ':; r_.i f i 2. rte s . . . . . . . . . . . . . . . . . 347
a)~es sucres r2ffinés:u~e import8tion plus
rfguliere malgré la lourde taxe,~pis
très fa~l11e
a . • • • • • 34E
b)Augr.€Yltation
des droits et ~li.fITlent2.tion ~
-
.
de la f~r- ud e
f5 2
c)1es sucres bruts et terrés,~re ir.troduc-~
tion ;JE'.) sig~ificative ....•.•••••.••...• 354
d)':'es p;ys fournisseurs •••..•.•••.••.••.•• 355
1-2 La ~tiQulFtion des exportatio~s...••....•• 362
<:).Lê. resti tl;-';icr. à 1:::
sortie du 3ucre er.
péirl
362
2-1 ~ES ai~ficult~s de rem~oursernent ..•• 365
a-2 Le r.ernboursement en 17S3
372
b)L'exemption de droit d'entrée et de
sor+.ie sur les sucres bruts et terrfs à
leur sortie pour l'étranger •••••••••.••. 3é3
1- 3 Le mé (; ani sme Com!Y!erciéll •••.••••••••••.•.•• 384
a)1a. voie è.irecte ••.••••••••••••••....•.... 384
a-1 les ~U8~es b~utst€rré et tête:de la
mut2tio~ dt~ntrep6t à 12 vente par
commission eux f trangers •••...••••.• 384
p-?
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ver~e è.u sucre en pêin
3EE
a-3 ~e problème du trpr.sport pour
l ' é t:~ange!' •••••••••.•••••••••••.•••• 3~: S;
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idtal,ls fcirE de 3eauc2ire ••••..••••••• 3S3
b-1 Il est malaisÉ de auantifier les
sucres vendus à ~eaucaire ••••••.•.•• ~95
b-2 Les changements de destination •••••• 3S7
c) Le mouvement des prix en France ••••••••• 3SS
c-1 ~ mouvement des prix ~u sucre brut
à l':2.~: t€ s de 1764 à 178 S •••••.••••••• 404
c-2 1€
~ouvement des pr~x des sucr~s
terrés e~ raffin~s ~ la foire de
Beaucaire
408
2 Analyse quantitative du commerce des sucres à
l'étranger
413
2-1 Les sucres:l'expansian des verites à
l ' É- trar:ger .••••••••••.•.••.••••.•.••.•••••• 415
a)1a rÉexport&tion,rr.ote~r de la croiss~~ce
des J7entes à l'r:"tranger
419
b)L'ir.suffisance de la restitution comme
facteur de ralentissement du commerce
d' expor't2 tion du Sl; cre en pain •••••• •'•••• 4~O
c)La concurrer.ce Étrangère sur les ~archés.425
d)~'2.rrêt du 25 ~ai 1766,ure solution de
.
compromis avec les cLambres de comTterce
contre les prÉtections anglaises .••...••• 429
2-2 Les sirops et tafia ••.••••••••••••.••.••••• 433
3 Les marchés d'appel ••••••••••.••••••••••••.•••• 434
3-1
E-,;.1
E'"J..rope ••••.••.•••.•••••••••••••••••••••• 437
a) l.J '7-1ro"e
~ 1"..
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........ I".{
.... '. or'
L.:. • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • .137
•
1
a-1 EollanQe,le~ villes :12'c:: sÉatiaues et
le :np;.rc;.'~é è2~1 tique . . . . . . . . . . . . . . . . . • • 437
a-2 ~es EtetE (e l'empereur E~ Alleffi2z~e
et en Flpntre
440
?: - 3 La.
Grand e-Bre tag~,e ••••••••••.•••••••• 441
b)Le mprché 211em2r~ et suisse ....•.•.•...• 442
b-1 Allem2gne et Iologr.e .••.....••.•...•. 442
b-2
':;v.isse et ":-e:-:è 1Te ••• •••••••••••••••••• 442
514
c)~'~UY )e ~t'dité~~8n~2~ne•••••••••••••• 443
c-1
St r:: a i ~~ ::: e • • . • . • • . . . • . . . . . • • • . . . 4- .1 3
c-2 i'It2lie,V"nise,Gènes,r2ples et
les étets écclésiastiques ••••.•••• 444
c-3 ~'Jspagne•••••.•••..•......•.••.•• 446
c -4 iJe Portugal •••••••••••••••••••.••. 447
3-2 fors è'~urope
3-3 ues zones privilégiées èe chaque type de
sucre •.••••••••••••••••••••••••••••••••••. 449
a)Le pucre e~ ~2in se plece mieux sur les
m2rct~s du ~u~ .....•....•••...........•. 449
b)~e5 ~UCTes ~r~ts,terr{s,tête et bl2nc
alimer-tent la r{.expoTt~tion vers ~Naro •. 45Î
c)~es sirops et ~2fia sont réexportés vers
le 2.. 0 rd. . . . . . . . , . . . . • . • . . . . • •........••• 4 .; 3
4 Un commerce ~e~ta~le:l'import2nce ~es recettes
dQU2ni~r~s ~ans la b212~ce commerciale
française •••••••••••••.••••••.••••••• ~ •••••••• 456
CCl~C~USIGN ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 461
Al;NEXES •••••••••••••••••••••••••••••• ~ ••••••••••••••••••••• 472,
SOURCES ET BIB1IOGRAi-HIE
4-8 1
TABLEAUX ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 49&1
CARTES ET GRA?HIQU3S •••••••••••••••••••••• , •••••••••••••••• 504
TABLE DES ArJIŒXE S •••••••••••.••••••••.••••••••••••••••••••• 5 C5
T.';':BIE DES ;v"IA TIERES ••••••...••••••••••••••••••••••••.••••••• 506
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