UNIVERSITE
ECYI'VOS
LORAND
BUDAPEST
HONGRIE
FACULTE
DES
LEITRES
LE SOCIALISME AFRICAIN
iCON5E!l AFRICAIN ET MAL-GACHE il
' POUR t'ENSEiGNEMENT SUPERIEUR
, C. A. {vi. E. 5. -
OUAGADOUGOU)
,Arrivé.e .,.. 2J JtU N. 19.9~ . '.. : 1
,Enregistre ~ous n° #(;).ttfi:5' . 1
....
. .

~
~ S = > : : o L ~
Thèse pour le doctorat 3è Cycle
Es-Lettres et Sciences
Humaines.
Option Sociologie Politique
Par SIDI3E KABINE 3EMA
Sous la direction de Monsieur LENDVAI FERENC
Budapest 1974.

Dédié
a
Mon feu père BANGALY
S l DIB E
transporteur à Kankan,
(République
de Guinée)
et à Divo
(Republique de Côte d'Ivoire)
à mes mamans:
Saran Kanté dite Wèrènani,
Condé Sidibé,
et Mamoudou_ Dj è n è S y 11 a .
a mes frères et soeurs Moussa Sidibé et Doussou sidibé
a Afrika group -de Gotebarg
(Suède)
(particulièrement a
Birgitta Everas) qui n'a cessé d'apporter son aide précieuse
aux mouvements de libération
(P.A.I.G.C.,
FRELIMO,
M.P.L.A.,
A.N.C
enfin à ma maisonnée:
ma compagne Nanfadima Condé,
Matomal
Sidibé n° 1,Matomah Sidibé n°
2, Marna Sidibé et Baba Sidibé.

REM E R e l E MEN T S
Après avoir passé tant d'années dans un pays aussi
charmant qu'est la Hongrie le moment est venu de remercier très
vivement et très respectueusement le peuple Hongrois pour son
aide,
son hospitalité et sa sympathie, qui m'ont permis de me
former et de m'épanouir au plan intellectuel et Universitaire
et d'apporter par cette thèse ma modeste contribution au dévelop-
pement africain.
A mes professeurs encadreurs élèves et disciples du
grand Hégelien Lucacs Gyorgy : Hermann
Istvan,
Lendvai Ferenc,
Tokeï Ferenc,
Szigeti
Jozsef etc . . .

PREFACE
La présente th~se a été soutenue à BJdapest (Hongrie)
en 1974 avec la mention ho~orable (Summa Cumlaude). Sa réecri-
ture a été renduenécessaire pour la compréhension du texte origi~
nal qui,
était écrit en hongLeis et aussi à cause de l'état
matériel de certaines pages.
Nous avons,
actualisé certaines
données sur la probl~matique du socialisme car il s'est produit
une certai:1e
évolution
de la part des tenants de cette idéolo-
gie
( l ) .
Nos différentes positions sur la question ont aussi
év 01 ué,,'-':-.
CI est pourquoi nous reprendrons cet te étude pour en
tirer de nouvelles conclusions.
Puisse cette présente étude donner des éléments d'appré-
ciation sur le socialisme africain en vue d'une meilleure compré-
hension de cel ui-ci.
( l) L' âctualisation en question n'a pas eu de grande
influence sur le contenu de la th~e.



~ ~ j
-
INTRODUCTION GE~ERALE
LE PROBLE~E
Pourquoi le Socialisme Africain
?
,
Pendant les enn6es d'ind6pendance les nouvelles alter-
natives qui se sont pos6es au niveau de l'Afrique 'taient fond6es
sur un choix politique. Ce choix politique constituait un moyen
l partir duquel il serait possible d'exercer la souverainet6 na-
tionale dans les conditions meilleures.
Alors socialisme Africain, socialisme en Afrique, voie
africaine du socialisme, socialisme l l'africaine, l'Afrique d6jA
socialis6e, peuvent être consid6r6s comme les produits alternatifs
de l'ire d'indépendance. Ces opinions malgré leur relativité et les
nuances qu'elles sous-tendent veulent traduire une même réalité à
savoir: l'importance de l'option socialiste comme voie de -déli-
vrance" nationale.
Les fondements explicatifs de ce choix sont liés certes
à l'existence de masses populaires qui, parfois de par leurs con-
ditions d'existence peuvent exercer des pressions et espérer dans
le changement. Par ailleurs ce choix tire son explication de le
pression exercée par certains pays étrangers(nouvelles alliances),
le prestige que présente pour les leaders africains, les partis de
gauche du monde entier lesquels n'ont pas manqué d'accroitre l'in-
fluence d'une politique anti-colonialiste à travers les forums et
autres organisations politiques internationales, enfin le rOle des
nouveaux dirigeants antérieurement éduqués en Europe et qui ont
connu les mouvements socialistes constituent des facteurs de pre-
mière importance que nous retenons pour cette étude. Cependant, les
invoqu6es par les tenants du pouvoir sont d'un Butre ordre •
... / ...

VOCATION AFRICAINE POUR LE SOCIALISME
1
Pour de nombreux efrlcBnologuea, hommes politiques d'Afri-
que, les mentalit6s, les structures Bocio-6conomiques, voire les '16-
ments culturels constituent autant de raisons explicatives de la vo-
cation des masses africaines pour le Socialisme. Ces hommes politiques
et africanalogues partent du fait que l'Africain est n6 socialiste car
dans la soci6t6 africaineftl'individu ne se d6finit pas en dehors du
groupe, il se d6finit dans et par le groupe auquel il appartient.
-(r6f D. THIA~, politique ext6rieure des 6tats africains cit6 par L.V.
THO~AS in Socialisme et l'Afrigue, p7)
Cette affirmation montre que le groupe et l'individu sont
li6s par une même r6alit6.
Les Sociologues et les ethnologues qui se sont pench6s sur
les soci6t6s africaines ont par ailleurs mis en relief ce même trait
dominant à savoir le caractère collectif des soci6t6s africaines. Par
exemple le R.P. lempels et le professeur ~arcel Griaule, en partlcu-
lier, ont essayé d'expliquer ce ph6nomène collectif par la philoso-
phie n6gro-Africaine.-Philosophie qui repose sur une vision cosmogo-
hiqUe, une interprétation de l'Univers selon laquelle l'~tre est un
\\et indivisible, n'est pas une réalit6 irr6ductible, mais un ensemble
luquel doit s'intégrer l'être et qui lui donne sa force et sa vie.
1
é
'
,
D'autres africanologues parcourent le ph nomene a travers la lib6ra-
\\
.
-
tian nationale et propose la compréhension du problème à travers la
\\
.
~ériode des luttes de libération nationale et de la crise acc6ler6e
de l'impérialisme international.
A cet effet ils donnent l'exemple de la r6volutlon indo-
.../ ...

·. ~
.. :5
-
chlnDls~.de la première Querre Imp6rlallate an Indochine, de la
lutte arm6e en Alg6rie, de le r6volutlon cubaine etc.
Pour eux les th60ries qui qualifient les ind6pendances
africaines, les id601ogies socialistes de r6sultat d'une action
spontan6e sont fausses. Elles r6sultent plut&t d'une lente 6volu-
tian en profondeur. Pour comprendre cette lente 6volution -il fau-
drai t aborder le colpniEllisme dans toute sa port6e". En faisant res-
sortir tous ses traits caractéristiques "positifs" et négatifs, de
même qu'avec ses cons6quences, ne peut être considér6 objective-
ment du point de vue historique qu'en conformit6 avec la réalit6.
Il est de par son essence un produit objectif se développant n6ces-
sairement à une certaine 6tape de l'évolution historique de l'humB-
nit6. Ce processus historique est une aide à la fois d'accéléra-
tion et de développement du capitalisme et aussi un moyen de prise
de conscience vers l'émancipation historique.
LES OBJECTIfS GENERAUX DU SOCIALIS~E
Hormis la restauration de la culture spécifiquement
africaine que la négritude s'efforce d'actBaliser - on peut dire
que les objectifs généraux sont d'ordre économique et politique.
a)
QBjectifs économiques
En pleine inflation démographique, insuffisamment
équipée, parfois pauvre et longtemps exploitée, l'Afrique se doit,
tant au nom de la dignité humaine que pour assurer sa place dans
la politique internationale, de définir une politique de dévelop-
pement aussi réaliste qu'efficace.
.../ ...

... 4 ...
Certes, &cet effet, plusieurs voiea 6'ev~reht
p08sibles. Le capitalisme priv6(lib6ralieme 'conomique) le
capitalisme de l'6tat, le socIalIsme, le marxIsme. Divers
'tats choIsIssent le capitelisme, tels la COte d'IvoIre, le
Kenya, la Haute-Volta~ le Lib6ria, le S6n6gal, d'autwes se
sentent attir6s - du moins l certains ~oments de leur d6velop-
pement - par le marxisme, comme la TanzanIe, le ~ali, le Congo-
Brazzaville et la Guin6e. ~ais la plupart optent pour le So-
cialisme à coloratIon africaine. Cette attItude qui s'explique
par l'engagement dans la lutte anti-coloniale, devait par l~
même lutter contre le capItalisme europ6en en quI les hommes
politiques africains voyaient le fondement du colonialisme.
·Cette nouvelle politique 6conomique 'tait due à
l'6volution 'conomique du march' mondial(nouveaux besoins).
Cette 'volution poussa de plus en plus l'Europe vers l'Afrique
et l'amena à y investir des mat'riaux techniques, des capitaux
et des hommes qui s"taient dispersés en d'autres régions au
cours du siècle préc'dent. Le rideau de fer des pays slaves et
balkaniques, l'émancipation de l'Asie, l'industrialisation et
l'autarcie de l'Amérique Latine ont ferm' définitivement à
l'Europe ses champs d'action traditi6nnels où elle avait su~
mener à bien des réalisations gigantesques. La seule w:p0:5-5ibili-
té ft qui s'offrait était l'Afrique. l'Afrique pauvre en main
d'oeuvre, riche en matières premières doit remplacer l'Asie
riche en main d'oeuvre et pauvre en matières premières, car la
machine remplace et vient renverser la situation.
(1)
depuis 1984 le Burkina Faso a optêtpour le "Socialisme"
.. .. / ...

_._ --0 ._ .-
.... "_
.__
~
-'.:"
....:'-
En outre le technique moderne permet de rendre salu-
bre8 et vlableB. eux technIcIens aurop6ens chargés de le con-
duite des machines. les r'gions qui jusqu'è présent leur 'teient
fer_ées. (Réf. ALPHA CONDE. GUINEE. L'Albenie de l'Afrique ou
n6o-colonie Am6ricaine - Notes et études documentaires ND129 de
ROLAND PRE).
La ~ise en place de cette infrastructure DU base 6co-
nomique(Unlt6 des forces productrices et des rapports de produc-
tion) s'6tait accomplie avec des
moyens inhumains tels que le
travail forc6.
~ectif8 politiques
La politique 'tant la haute sphère(th6orique) de
l"économîe
peut être séparée de cette dernière. Nous avions
déjà signalé dans les premières pages que le socialisme à tra-
vers la pensée philosophique africaine impliquait la négation
de l'exploitation de l'homme par l'homme, donc la suppression
de la tutelle coloniale ?
Il est vrai que la Révolution Socialiste de Russie
visait moins la libération du Tiers ~onde que le démantèlement
de l'Occident capitaliste, il est vrai également que ftl es pro-
létariats des pays européens ont assuré leur bien-être croissant
au dépend des travailleurs africains et qu'ils ont également
bénéficié du colonialisme, on ne peut nier, de même que la poli-
tique des socialistes français, anglais, portugais et belges soit
restée souvent très ambiguë:
sur le plan de la décolonisation, et
... / ...

Ri
Do
ca
que celle-ci, notamment an France et en Grande-Bretagne, ait
6t6 surtout le fait des gouvernements mod6r6s 'DU conservateu~,
Cependant, les lib6rateurs de l'Afrique, de Kwame Nkrumah
S6kou Tour', Ny6rer6, Senghor a Ben Bella, ont puis', dans le
doctrine socialiste, le plus clair de leur politique anticolo-
niele.
Il est A noter aussi que l'Afrique pr6sentait ~
l'6poque des forces politiques constitu6es de moder6s meis so-
cial~tes sur les bords. Cependent l'apparition de forces politi-
ques nouvelles a pos6 un problème s6rieux aux partis europ6ens
repr6sentant les classes ouvrières de ces pays. Une question se
posait è ces partis de gauche fallait-Il jouer la carte des mou-
vements politiques petits-bourgeois? la réponse ne peut être
analysée que si l'on considère également l'ensemble de la poli-
tique du mouvement ouvrier international dont l'orientation était
Staline durant cette période. la stratégie de l'époque n'était
autre que la reconstruction des économies nationales, la partici-
pation au gouvernement en place et la défense du Statut-quo mon-
dial au nom de la paix.
Ainsi le Parti communiste français (PCF) BU nom de
l'int6r@t national, au nom ,de la SOi-disant unité des travailleurs
français et africains (alors qu'il faisait la fine-bouche smr le
massacre des Constantinois et de ~adagascar) va préférer soutenir
les éléments les plus droitiers des mouvements politiques africains.
Bien qu'à ses débuts le p.e.F. ait mobilisé en 1925 la France tout
entière contre la guerre du ~aroc qui a d'ailleurs demontré ce
.../ ...

.
"
" - -
-~ ."','"'~
.. ? ..
dont est capable un parti revolutionnaire, en 1926 et 1930,
8ucun texte officiel n8 fut 61abor6 ~ur la question colo-
nIale et dans les diff6rents congris du PCF, de 1924 • 1829,
le probl~me coloniel est re16gu6 au second plan. En 1929 18
question ne figure mOme pas è l'ordre du jour. Dans les th~­
mes particuliers du VII COngr~s, Mars 1932, le PCF posera pour
la première fois et la dernière fois la question coloniale.
Après l'an6antissement du mouvement ouvrier allemand
qui lança, sur les directives de l'Internationale Communiste,
la lutte contre le wSOciel-Fascisme w malgr6 la mont6e du ma-
rlsme, le VIle Congrès de l'international communiste ( l 1 C )
1935, met A l'ordre du jour la tactique de cr6ation des Fronts
populaires.
C'est sur cette ligne, et è partir de cette 6poque
que se manifeste d'une façon claire la position de compromis
du P.C.f. sur la question coloniale. Au nom du principe de la
défense de l'intér@t national(thème toujours actuel dans la
propagande du peF) la question des colonies passera au deuxième
plan à tel point que le programme du Front populaire(Janvier
1936) ne comportera que la simple demande de création d'une
commission parlementaire sur l'Algérie. La plus grande trahi-
son sera en 1937, l'époque à laquelle les députés communistes
voteront le budget colonial. Cette trahison se révéla exacte
sur la question d'Algérie. Le problème algérien a été inco.mptis
par le P C F car le parti avait sacrifié son devoir d'aide aux
peuples exploités dans leurs soulevements contre les nations
qui les oppriment pour la théorie de la grande union française .
../ ...

- B •
1839, le discoure de "surice Thorez concernant cette Union
français. e. r6au.e ainai 1 -Et qui viendrà aujourd'hui eu
lieu d'unir, essayer de diviser et de dresser les uns contre
les autres tous ces hommes sous pr6texte qu'ils sont de reli-
glons, de races et de couleurs diff6rentes, celui-l~ fera une
besogne de criminel A l'égard de la patriefrançaiseW(Dicours
à Alger, 11 Février 1929). Une telle assimilation fut com-
battue par Lénine dans les six points des th~ses sur la ques-
tion coloniale les années de l'après-guerre, dès 1949 vient
apparaitre l'idée nouvelle de l'Union française afin deftcréer
les conditions de cette Union libre, confiante et fraternelle
des peuples coloniaux avec les peuples de France.W{"aurice
Thorez au XO Congrès, Juin 1945).
L'entrée des ministres communistes au conseil na-
tional de la Résistance, puis au gouvernement de 1945 devait
mettre en évidence jusqu'où la stratégie réformiste pouvait
aller.
les massacres de Setif en Algérie(1945) et la ré-
pression à Madagascar(1947) se sont produits avec la présence
des ministres communistes qui ne remirent pourtant pas en
cause leur participation au pouvoir, sans oublier les votes
de crédits militaires en Indochine où luttait Hochiminh.
le parti Communiste français jugera que sur ce
ftpoint il n'y a pas lieu pour les ministres communistes de
rompre la solidarité ministérielle parce que le p c a le souci
des intér@ts du pays et un sens ingu des responsabilités ft •
.../ ...

"
'
,,'
- E\\t -
Tout cela surrit A prouver qUI 1. principe r'volutlon-
naire du adroit des peuples ~ disposer d'8ux-~lmes· n"talt de-
venu qu'une r6f'rence abstraite. l'6victlon des ministres com-
munistes, 4 "ai 1947, va, alors changer en Juillet 1956, pour
la premi~re fois les d6put6s communistes votent les cr'dits de
guerre contre l'Alg6rie. Les premi~res explosions de bombes du
FLN Alg6rien{Novembre 1954) furent l'objet des déclarations
suivantes: "Fidèles à l'enseignement de L'nine le Parti Commu-
niste Français ne saurait approuver le recours 6 ces actes indi-
viduels susceptibles de faire le jeu des pires colons·. Quant 6
la position du P C F sur l'Afrique Noire, on trouvera peu de pu-
blications et de d'clarations officielles. Certes, les exp6rien-
ces, l'ancienneté et le niveau des luttes en Indochine et en Al-
gérie avalent largement orienté l'activité du P C F, pourtant il
n'a pas tiré de leçons de ces expériences car il fut loin d'ap-
pliQuer les thèses sur la question nègre votée au IV Congrès de
l'Internationale Communiste de 1923 et dont la Vè thèse affir-
mait :
-Le problème nègre est devenu une question vitale de la Révolu-
tion mondiale". A cet effet, le IV Congrès déclare Que tous les
communistes doivent spécialement appliquer BU problème nègre
les thèses sur la Question coloniale du Ile Congrès.
De la grève du Dakar - Niger d'Octobre 1947, è Mars
1948 aux massacres de ~adagascar, Dimbokro, COte d'Ivoire 1950,
Douala Cameroun repression contre l'Union des populations Carnerou-
naises{I~ PC), mais 1955 è l'assassinat de Nyobe, rien ne fut
... / ...

.. 1D_
organ1s' pour d'masquer les cri.ea du colonialisme fren;aie ..
Aalgr' le cr6ation de cercles d"tudes marxistes dans de nom-
breux pays d'Afrique Noire, surtout au sén6gal -(1) particulla-
rement à Dakar, le P C F obligera de fait les éléments na-
tionalistes de gauche , passer dans les rangs du R 0 Ae
Sans ind6pendance, idéologique vis' vis de ce der-
nier. Le parti communiste français croyait ainsi se racheter
vis à vis des peuples opprim6s.
La s6paration du groupe parlementaire RDA du groupe
communiste 1950 am6nera simplement le P CF' expliquer qu'il
renonçait -, rechercher les conditions dans lesquelles un ac-
cord est intervenu entre les d6put6s du RDA et le gouvernement
français" et que cela était affaire du RDA et des masses
africaines.
Quant aux Socialistes, ils jouj~~em~t
un rOle ignoble
Aç...'CI'> "e.etli:
durant cette période.I~s ~r~t des~~éf~.(s~farouchesde
..
~g 7,.. li M ra .\\ ~~
l'empire colonial. l'lise a part la ta(meJ,!se....!!.Loi-~~adre" de Gaston
~ \\
~ e
Deferre, aujourd'hui maire de ~arse~~~~~~~f~ntait de désa-
""-
r \\ H,e ~
morcer les luttes en accordant quelques- fntér@ts sans grande
importance aux politiciens africains, les Socialistes organi-
sèrent la répression.
"Béchard, membre du Comité directeur de la S F l 0,
haut commissaire en Afrique Occidentale, et Péchaux, gouver-
ne ur en COte d'Ivoire, Socialiste comme lui, sont les princi-
pau x responsables de la provocation de Janvier 1950 qui fit
dans ce territoire(Dimbokro) plus de 40 morts et plusieurs
1
1 )
lit l s'agit des membres du Parti Africain de l'indépendance (PAl) qui s'étaient
rendus. •• en Guinée en 1960 pour s'intégrer au PDG sans aubonomie politique.
ye f6sûltat fut catastrophique car au moment où les membres du PAl s'6taient
~endus compte qu'ils avaient affaire aux"moderés", ils se trouvèrent tous en
prison. (Le cas Nyang, Seni emprisonné pa---S-E-KO-U-T-O-U-R-E)-e--------------------------------,

.. '1 ..
~ent8ines de ble.s's et donna pr6texte • l'crrestation de
pr~s de 4 000 dirigeants et militants du RDA.
E~tre temps, en 1951, cela n'a pas empêché L60n
Faix du P C F de crier -Vive l'U.it6 d.~la Gauche-.
FRANCOIS ~ITTERAND. Secr'taire actuel du parti
Socialiste Français(P S F ) au moment des massacres d'Al-
g'rie 'tait garde des sceaux, ce qui veut dire que jamais
les Socialistes n'ont aid~ les mouvements pour l'ind~pen-
dance des peuples colonis~s. A ce sujet, Ny'rer', pr'sident
de la Tanzanie, n'a pas manqu' de mettre dans le même sac
le Parti Travailliste d'Angleterre et les conservateurs.
Dans le programme commun actuel de l'Union de la
Gauche rien n'est formul~ dur la question n'o-coloniale,
seulement des textes vagues qui touchent l'gèrement cette
question.
L'idée de l'indépendance en Afrique Noire fran-
çaise apparait dans une confusion totale. Après le vote de
la loi-cadre de G.DEFERRE, alors que le RDA manifestait
avec enthousiasme une victoire, un certain nombre d'organi-
sations estudiantines très lucides(la F E ANF )- Fédération
des Etudiants d'Afrique Noire en France, l'UGE A.O. Union
G'nérale des Etudiants d'Afrique Occidentale, sans oublier
le PAl - Parti Africain de l'lnd'pendance) s'élevèrent contre
cette mystification du cadeau empoisonné pour éclamer l'indé-
pendance immédiate au lieu de se laisser berner par cette
fameuse Loi-cadre, comme le furent les réprésentants du R.D.A.
oi-cadre:
Communaut' française dans laquelle tout citoyen part du m~me
droit. Elle ne donnait pas le pouvoir r'el car l'Administration
restait toujours aux mains des Français. En même temps par
cette loi-cadre, l'Afrique, se trouvait morcel'e car on donnait
à chaque politicard un petit royaume. Selon la formuleftdivisek
Dour rèone."

- 12 -
Ce sont d'abord les 6tudlanta qui, au cours du
VIe Congr~s de le FEANF, en d'cambre 1956, pOB~rent comme
ex10ence fondamentale la lutte pour la conqulte de l'lnd~­
pendance politique et la r'allsation de l'unit~ africaine
(qui est contraire eu morcellement de l'Afrique). ~ot d'or-
dre qui fut repris par les 6tudiants QuIn6ens lors de leur
con9r~s da Juillet 1957. ~ tonakry(capitale de la R6publique
de Guin~e).
En 1956. lors du r~férBndum (vote au cours duquel
les AfrIcains devaient se prononcer) l'U.G.E.A.O. s'6tait
lanc6e totalement dans la bataille pour l'lnd6pendance qui
devait mener aux grandes manifestations populaires de Dakar
desquelles DE GAULLE fut témoin actif car Il déclara : wJe
veux dire un mot d'abord aux porteurs de pancartes, je veux
leur dire ceci: s'ils veulent l'indépendance, qu'ils la
prennent le 29 Septembre".
Septembre 1957 nait à Dakar le parti africain de
l'indépendance qui proclama "pour la conquête totale du pou-
voir politique au moyen de l'indépendance nationale, pour la
remise des biens sociaux à ceux qui produisent ces biens, au
moyen du SOcialisme, il est devenu une nécessité historique
de créer un parti nouveau. Le nouveau parti lance le mot d'or-
dre"indépendance et SOcialisme" et estime qu'à l'heure histo-
rique" de Bandoueng et de la décomposition du système colonial
et de l'impérialisme, à l'heure où la confusion politique sub-
merge l'Afrique Noire sous domination française, notre devoir
d'Africain nous oblige à poser devant les masses de notre pays
... / ...

- 13 -
lm probl~me de l'lnd6pendance natlonals-R6f ALPHA CONDE
ibid. P.121).
Quelle sera la strat6gie du RDA dont le
congr~s doit se tenir du 25 au 30 Septembre 1957, A Bamako 7
Va-t-il opter lui aussi pour l'ind6pendance ? Bien que le
Congr~s affirmAt que l'ind6pendance des peuples est un droit
inali6nable leur permettant de disposer des attributs de
leur Souverainet6 selon les int6r@ts des masses populaires,
le R.D.A. proposa la r6alisation et le renforcement d'une
communaut6 franco-africaine et v6g6tale l'id6e d'Independance
aux oubliettes. Ce qui revient ~ dire que le R.D.A ne faisait
que flirter avec les masses africaines.
Au moment où les "domestiques" de l'Administration
coloniale jugeaient l'ind6pendance d'Utopiste, la F.E.A.N.F.
et le P.A.I. elevèrent leurs voix pour revendiquer l'indépen-
dance :
"La Révolution Africaine est décidément en marche,
aucune temp~te ne saura en briser le cours,
Vive l'Afrique Noire indépendante et libre Y
Vive l'Union Fraternelle des peuples libres et égaux"
Concernant cette intervention de la-part des
délégations de la F.E.A.N.F. et du P.A.I. Alpha COndé dans
son livre déjà cité écrit que "certains m@me déclarèrent en
privé Que ce n'est qu'après avoir expulsé les Allemands et
re~is les affaires françaises en ordre que la France décida
de sa libre volonté de s'associer avec les Allemands sur un
pied d'égalité."

-14-
Alla fln de 1857 jusqu'a l'ann6_ 1958, .l,.'abdication
devant la g~ande responsabillt6 historique qui 'tait l'ind6-
pendance, avait connu un grand 8UCC~S chez les r"ormistes du
R.D.A. En dehors du R.D.A. le P.R.A.(Parti du Regroupement Afri-
cain) 'tait aussi partisen de ledite communaut' française, mais
en 80n sein il y avait divergence de points de vue. Son congr~s
tenu i
Cotonou, du 25 au 27 Juillet 1958 rendit les choses claires
par la discussion sur le programme d'action du Parti.
Deux tendances s'effront~rent. D'un cet6 le tendance
opportuniste et Irresponsable repr'sent'e par Senghor qui misa
sur la l'galit' dite -r6publicaine" pour ecc'der A l'Ind'pendance
et plaça sa confiance dans le g~n~ral De Gaulle. De l'autre cOté,
la tendance dite ·progressiste" partisane de l'action directe et
qui pr6conisa l'ind~pendance avec h~sitation, eut comme chef de
file Abdoulaye Ly, et c'est cette tendance l~gèrent en meilleure
position Qui l'emporta à l'una~imit~. Senghor en fin de compte
s'~tait ralli~ à la résolution finale d'ind~pendance hypothétique.
Cette résolution fut: "Considérant le Colonialisme est,
aujourd'hui, condamné par les peuples et continue, à l'esprit de
notre temps, caractérisé par la volonté de paix, de fraternité et
d'égalité absolue des peuples du monde",Et c'est autour de ce mot
d'ordre d'indépendance que les mesures nécessaires furent prises
pour mobiliser les masses africaines dans une atmosphère de chan-
tage et de truquage électoral.
Le résultat fut catastrophique à un tel point Que seul la Guinée
Vota WNon".

- 15 -
En Guin'., les d'bats autour de 81'lnd6pendance
Imm6diate" commenc6rent d~s 1945 par la voix de kA BA LA~INE
Sadji. Qu&lques Intellectuels qui s'6teient ralliés i lui
furent rapidemènt isolés par la tendance reformiste du R.D.A.
Il fallut attendre les années 55 et 56 voir réapparaitre cette
noble id'e d'ind'pendance, gr'ce i
l'action des 6tudiants et
enseignants. A partir de ce moment,l'idée devint tellement
forte que les responsables locaux du P.D.G.(Section guinéenne
du RDA) ne purent trouver l'autres issues pour se dérober.
C'est ainsi que pendant la conférence pr'paratoire de Kankan,
(deuxième ville de Guinée) tenue en l'absence de 5ékou Touré
mais en présence des autres membres du Comité directeur, que
la délégation guinéenne au Ile Congrès du R.D.A. è Bamako fut
chargée de défendre le principe de l'indépendance immédiate,-
Oiallo 5aifou laye et Ismaël Touré ctiQisis' comme porte-parole.
5ékou Touré bien qu'absent lors du Congrès avait fait enregis-
trer au nom de la délégation guinéenne un discours ou le mot
d'l8dtpendance était resté à la maison. Cette attitude provoqua
de vives discussions au sein de la délégation guinéenne et
certains membres n'hésitèrent pas d'accuser Sékou Touré de
traitise pendant que d'autres décidèrent de reposer le problème
lors des débats politiques. ~ais lorsqu'ils décidèrent de porter
les amendements nécessaires à ta résolution finale, Sékou Touré
s'y opposa. Y.Blancher, dans "Itinéraire des partis politiques
africains, P.49, le dit bien:

' . ' ,
.
- Hi -
D'un geete qui ne .ouff~8It pa. de r6pllque, "r Sekou Tour'
errlte, en effet, sur le chemIn de la tribune, un porte-
parole de la Section Guin'enne qui venait de 8e lever, por·
te ur de contre-propositions.·
~algr6 l'attitude r6serviste de S'kou Tour',
l'id6e d'ind6pendance progressa rapidement en Guin6e.
Cette progression de l'id6e d'ind6pendance fut l'oeuvre de
la fraction de l'opinion publique repr6sent6e par les jeunes
et les intellectuels de gauche qui ont op'6
8ans compromis
pour l'ind6pendance. mettant dans le même sac 1 Colonialisme,
capitalisme et int6rlts des 6lus. Elus qui ·peu à peu 8'ln-
t~grent dans la bourgeoisie et la communaut6)les intellectuels
et les masses r6volutionnaires, les 6tudiants et les 6lèves
de Guin6e appelaient tout à la fois à l'ind6pendance nationale
et -à la r6volution Sociale ft (R6f. B.Ameillion z Guin6e, bilan
d'une ind6pendance, pp.38-52 Ed ~asp6ro Paris). Il est donc
clair que l'ind6pendance de la Guin6e n'est pas le seul tra-
vail du PDG Section guinéenne du RDA ni de son chef de file
Sékou Touré Qui se fait appeler -
RL'homme du 28 Septembre" voire même "L'homme du
coup d'Etat contre la France."
Devant une telle situation de l'époque, le PDG se
trouva devant un dilernne : ne voulant pas de l'ind6pendance
et ne pouvant pas non plus défendre le statut quo, il se
lança dans une troisième voie :(ind6pendance sans cassure
totale avec le gouvernement français de De Gaulle).

- 11 -
Noue affIrmons qu'elle ne sera favorable, c'est-A-
dire la position du PDG, qu'à la condition que la constitu-
tIon proclame le droit de dIvorce sans lequel le Dariage
franco-africain pourra être considér6 le temps comme une
construction arbitraire Imposée aux générations montantes.·
\\
(Réf.Discours de S6kou TOuré, lors du passage de De Gaulle i
Conakry, 25 Aout 1958) -
Malheureusement pour le PDG, l'Administration
coloniale n'a pas r6pondu ·oui" è cet appel, car De GAULLE
resta ferme sur 8a d'cision de former une communauté fran-
çaise .C 'était à prendre ou à laisser, l'issue était retrécie
pour le jeu politique.
"Cette communauté, la France la propose.personne
n'est tenu d'y adhérer. On 8 parlé d'indépendance, j'ei dit
ici, plus haut encore qu'ailleurs, que l'indépendance est à la
disposition de la Guinée.
Elle peut la prendre le 28 Septembre en disant
"non" à la proposition qui lui est faite, et dans ce cas, je
garantis que la métropole n'y fera pas obstacle. Elle en tire-
ra, bien sOr, des conséquences mais d'obstacles, elle n'en fera
pas, et votre territoire pourra comme il le voudra et dans les
conditions qu'il vaudra suivre la route qu'il voudra"(Oiscours
du Général De Gaulle à Conakry, le 25 AoOt 1958)-
De Gaulle à travers ce discours enlève le dernier
espoir pour la communauté, Que fait Sikou TOuré? Ce dernier

.. 11 ..
• e rend vite ~ Dakar peur obtenir l'appui de l'U.G.T.AIN.
et du Bureau du temit6 de Coordination du RDA. tes deux
organisations adoptirent la position de la Guin6e. ~ais tris
vite Houphoët Boigny fait renverser le courant en faveur du
·oui" l
la communaut6 française. Au sein du RDA les diri-
geants Guin6ens se trouv.rent ainsi seuls 1d6fendre l'id'e de
l'lnd6pendance qui n"tait pas le leur.
L'indépendance de la Guinée fut donc une victoire
du peuple de Guin6e(bien qu'il fut par la suite s6par6 des
fruits de la victoire) - Mais surtout celle des 616ments
progressistes sur les r6formistes.
Le désengagement colonial et le consentement de
l'ind6pendance arrivèrent juste au moment où les concessions
coloniales paraissent insuffisantes. Elles appartenaient è la
ea~gorie des poids-plume, alors que les masses exploitées
de~andaient des concessions appartenant à la catégorie poids
lourds( la prise du pouvoir politique et économique ).
L'indépendance réelle est retardée autant que
possible, surtout par la création d'une bourgeoisie locale
avec son royame et d'autres possibilités d'ascension sociale
et par la création d'institutions sociales et politiques
(parlementarisme et parti unique) capables de bloquer l'éner-
gie, la volonté pour le changement dans sa totalité.
Si au début des années 60 la vague d'indépendance
formelle déferlait sur l'Afrique, la domination impérialiste

·19
_
prenait 80n second eouffle. Il œpparalt en ce .oment que
l'Af~ique n60-colonialiste, en accord avec les tendances
objectives du mode de production capitaliste, traverse une
crise profonde sous les coups conjugu6s de la crise de
l'l.p6rialisme mondial et des facteurs de s6paration propres
au n60-coloniallsme africain. La destruction de l'6conomie
f60dale fut une strat6gie de l'Europe colonialiste et non une
oeuvre de bienfaisance vis-A-vis de ses anciennes colonies.
Avec cette strat6gie, le danger fut certes recu16, mais il
6tait suspendu au-dessus de leurs têtes comme l'6p6e de Damo-
cles.
Avec l'apparition de cette nouvelle tactique, être au
Gouvernement sans pour autant avoir le pouvoir, les mouvements
nationalistes" petits-bourgeols ft se sont lalss6s prendre au
piège(@tre .le symbole au d6triment du r6el).
Pour ces raisons, l'appareil d'Etat néo-colonial
était dès sa naissance en sursis. La nature de classe des
organisations les avait rapidement fait glisser sur la voie
de la récupération. Aussi c'est à la petite bourgeoisie mrbaine
que les anciens colons français, anglais, belges, avaient re-
mis le pouvoir à la fin des années 50 sans être rassurés de
leur capacité d'intermédiaire. Il est aussi vrai que les colons
. avaient pris soin d'éloigner les éléments les plusftradicaux"
(Au Niger, Ojibo Bakary, au Sénégal, fflamadou Dia, au Cameroun,
~eumier, au Kenya, Oginga Odinga, au Congo aujourd'hui ZaIre -
Lumumba, etc).(1).
)
1
Pourtant cette indépendance a été tributaire de beaucoup de sacrifices
1
consentis par les populations africaines.

- 2D
l'absence de capital .fricain, voire d'une bour-
geoisie euthentique. sur le.quels pouvaient .'appuyer les
monopolistes de l'Europe et des USA a eu pour conséquence
la prise de pouvoir par l'Arm'e seule force politique qui
soIt un peu coh6rente.
~ais la "mise en valeur 6conomique W dans le
cadre du néo-colonialisme donnait une chance au capital
africain de faire ses premiers pas à partir de l'accumulation
des bourgeoisies naissant~s liées ou intégrées aux pouvoirs
féodaux-capitalistes.
Le principe même de toute bourgeoisie naissante
est de rechercher le profit et ce principe n'a pas échappé
~
aux nouveaux riches au contrit$/Jl-a~\\\\utiliSépour la
diversification des partenai:r~~__~~r~l- l'Algérie est un
exemple, lors de son passag; à par:~~~73, son ministre
des Affaires Etrangères, BOutef~~~~~~~e~arait Que ftNous con-
tinuerons à réaliser notre développement avec d'autres parte-
naires et je pense Que les potentialités de l'Afrique sont
aujourd'hui à la fois suffisamment séduisantes et suffisamment
intéressantes pour de très nombreux partenaires dans le monde,
y compris ceux Qui n'ont jamais eu de rapports Bvec nous.ft(~)
(Réf Revolution africaine, organe centrale du F.L.N. Sommaire
L'une des caractéristiques de ces bourgeoisies
nationales, c'est le cramponnement aux secteurs non-clé des
activités économiques participant ainsi de manière minoritaire~
à des entreprises nationales et supra-nationales( à quelques
CS)
1
Cette diversification rencontre souvent des refus de le part du
pèrtenaire absolu. Souvent cela entraine des changements de règime
«(;OUPS .d' état)

\\

• 21-
exceptions pr.s 1 le Nig6ria et le Cameroun). Cela d'montre
que la bourgeoisie africaine manque de caract~re.
ala bourgeoisie nationale des pays 8ous-d6velopp6s n'est pas
orient6e vers la production, l'invention, la construction, le
travail. Elle est tout enti~re canalie6e vers des activit6s
de type interm6diaire : Itre dans le circuit, dans la combine,
telle semble Itre sa vocation profonde. la bourgeoisie natioR
nale a une psychologie d'homme d'affaires non de capitaine
d'Industrie. Et Il est bien vrai que la capacit6 des colons
et le système d'embargo instal16 par le Colonialisme ne lui
ont guère laiss6 le choix( •••••• ). Dans un pays sous-développh,
une bourgeoisie nationale authentique doit se faire le devoir
impérieux de trahir la vocation à laquelle elle 6tait destinée,
de se mettre à l'6cole du peuple, c'est-à-dire de mettre à la
,
disposition du peuple le capital intellectuel et technique
qu'elle a arraché lors de son passage dans les universités
coloniales. NOus verrons malheureusement que; assez souvent
la bourgeoisie nationale se détourne de cette voie héroique
et positive, féconde et juste, pour s'enfoncer, l'Ame en paix
dans la voie horrible, parce qu'anti-nationale d'une bour-
geoisie classique, d'une bourgeoisie bourgeoise, platement,
bêtement cyniquement bourgeoise."(Réf. les dmmnés de la terre-
Franz Fanon, p.114-Ed ~aspéro).
Dans ces conditions, la bourgeoisie bureaucratique
a toujours eu comme alliée la bourgeoisie compradore bien que

cette alliance ait 80uvent vu des collisions 8e terminant
en faveur de la premi6re cit'e. Dans d'autres cas, il est
possible de trouver diverses fractions bourgeoises se dis-
putant le march6 int'rieur ou mArne s'affronter autour de
perspectives plus lointaines pour d'tenir sans partage le
pouvoir d'Etat.
Compte tenu de cette situation de confusion,
des libérateurs à tendance socialiste. ont puisé. dans la
doctrine socialiste le plus clair de leur politique anti-
coloniale.
De nos jours, le problème se pose diff6remment
puisque l'essentiel est moins, peut@tre. de construire la
nation que de réaliser la grande unité pan-africaine. Soit,
en premier lieu, l'unité de grands et louables efforts ont
6té tentés pour favoriser l'unité nationale(neutralisation
de la Chefferie et du tribalisme, établissement de démocrati-
esfortes, conception du Syndicat unique, développement de la
conscience nationale, planification de~~'acculturatio~~ et
pour actualiser l'unité politique
(la charte de 1'0 U A -
o A U d'ADDIS-ABEBA).
Il y a des pays où la bourgeoisie a atteint une
certaine maturité ce qui lui permet d'engager des tentatives
de ftbrise-dominations étrangères~ - Ainsi au Nigéria. au Came-
roun, en Egypte, la bourgeoisie nationale veut jouer un
grand rele dans le commerce extérieur et intérieur.
La mission politique du socialisme comme nouvelle
idéologie, .se circonscrit bans nulle doute autour des axes

21. -
prIncIpaux quI aont les luivants 1 r'alisation d'une poli-
tique locio-6conomiquB co.mune pour toua 1•• Etats africains,
afin que ces derniers pulssent falre entendre leur volx et
aussl apporter leur contribution è la r6allBation d'une huma-
nit' reconcili'e avec elle-mArne. Dans une telle optique, le
Sociallsme nous appara1t comme une totalit' d6doublant le mo-
yen et le finelit'.
Parlant de cette strat6g1e nouvelle G.Mydal dit
que ftl e fait que de forts 616ments 6motionnels rattachent
l'effort de d6veloppement 6conomique
i la lutte pour l'ind6-
pendance politique nationale est d'une tris grande importance
en ce qu'il distingue cet effort de d6veloppement du processus
historique d'industrialisatlon tel qu'il s'est d6roul6 dans
les pays aujourd'hui avanc6s.
L'existence d'un effort politique au d6veloppement
6conomlque est un ph6nomène nouveau qui distingue la période
actuelle.
L'aspiration au d6veloppement économique dans les
pays sous-développés n'est pas une vaine chimère d'économiste
en mal de plan.C'est une force politique d'une puissance énorme
et irrésistible dans le monde contemporain.W{G. ~YROAl , une
économie internationale, Paris, 1958).
Les questions pr6alables se rapportant au choix
L'état major circonstanciel pour le développement
offre, de la sorte, une bipolarité: l'une est technique et
consiste en procédés, en méthodes, en réalisations concrètes
qui visent la r6alisation d'un être pluridimensionnel - le

24 -
le bien Itre et le .ieux Itre J l'autre est id601ogique
et aboutit lune ·v6ritable .yatique qui gelvenise l8s
.asses et soutient leurs efforts WR6f. O. NELKIN, Socialist
Sources ef Pen-AfricaIn Id601ogy, in Africen Sociellsm,
edited by W.H. Friedland end Carl G. Rosberg, 5tenford,
University press, Californie, 1964.
Cette position suppose un certein nombre de
questions préalables: où accumuler le capital pour qu'il
soit utilis6 au maximum? Faut-il développer l'agriculture
eux dépens de l'industrie? Faut-il ppter pour la solution
inverse? Quels types d'industries la planification doit-
elle privilégier?
-Comment organiser la coopération entre les Etats
africains ? Fédérations ? COnfédérations? Unions douanières,
Gouvernement Unique? conseil des Etats? Planification con-
certée ?
-Quelles seront les modalités dela Solidarité
~ondiale ? Quelle place l'Afrique peut-elle espérer dans le
concert des nations ? Que peut-elle apporter è la civilisation
de l'humanité? Plus précisément, la déontologie du dévelop-
pement Socialiste suppose la réponse à deux interrogations
capitales:
a) Comment préparer l'homme à son rOle de créateur?
AutEement dit, comment l'animer, c'est-à-dire, étymologique-
~ent, lui donner le souffle vital? C'est la tAche de nos
écoles et de nos Universités. C'est aussi celle de tous les
organismes spécialisés dans l'animation rurale. Nos programmes
et notre pédagogie sont-ils à la mesure de l'homme nouveau
dont l'Afrique a besoin?

- 2S -
b) Comment permettre l l'homme d'agir en cr'ateur ? Il
nous Bst apparu ~ tous que l'action en Afrique devait
reposer sur la vitalit6 des groupes, qui ont toujours
fait l'originalit6 de notre Soci6t6, et il m'a aemb16
que toutes les d6l6gations ici pr6sentes 6taient d'accord
pour que, demain, les Africains participent aux desseins
de l'Etat par l'interm6diaire de coop6ratives qui seraient
la forme moderne de nos groupes traditionnels. ~ais
comment mettre en place ces coop6ratives ? Comment relier
l'Etat et l'ensemble des citoyens ?W(R6f.colloque sur les
politiques de d6veloppement et les diverses voies africai-
nes vers le Socialisme, Paris, Pr6sence africaine, 1963,
P. 373 -
376.
DEFINITION
DU
CONCEPT
Une définition n'a de sens que lorsqu'elle est
appréhendée à travers toutes ses dimensions. De ce fait
nous pensons que le SOcialisme en tant que concept ne peut
être compris et saisi à la fois qu'à partir d'une réalité
historique, économique et culturelle.
Historiquement - le terme parait avoir été crée d'une
manière indépendante par deux écoles différentes, et d'ail-
leurs en deux sens différents : En France SaintSimon et ses
adeptes-le Socialisme c'est la -théorie qui subordonne entiè-
rement l'individu à la Société W(Réf. Revue Encyclopédique,
Nov 1883, tome Lx: pages 106-114.

.... ' .\\.- ..... --
- 26 -
En Angleterre, dans l'Ecole de ROBERT OWEN. Il Y
devint usuel eu co~rs des discussions de l'Association of
aIl classes of aIl nations, fond6e par Owen en 1835(Th.KINKUP,
art OWEN, dans l'Encycl. But.)WIl servait alora, nous a
6crlt Elle Halévy, i
désigner la tendance extrêmement popu-
laire de Robert Owen, suivant laquelle, par un libre essai-
mage d'associations coopératives, on pouvait arriver, sans
le secours de l'Etat, en révolte contre l'Etat, i restituer
un nouveau monde 6conomigue et moral( •••• ) la fécondité de
ces doctrines qui soulevaient des probl~mes nouveaux, non
plus politiques, meis 6conomiques et moraux."
Quant aux différentes formes du Socialisme elles
sont très distinctes :
a) Une forme démocratique : Chartisme, Socialisme
de louis Blanc en 1948, marxisme d'aujourd'hui. Ce Socialisme
poursuit une fin politique: La démocratisation intégrale de
l'Etat, afin que l'Etat, devenu l'émanation directe de la
volonté populaire, soit en m~me temps, par une sorte de néces-
sité inhérente à son essence, le se~viteur des intérets popu-
laires
b) Une forme aristocratique représentée par
Hegel Carlyle Aodbertus Wagner le Socialisme conservateur
d'Adolf Wagner depuis 1B7B, a inspiré la politique SOciale
de Bismarck.
Le Socialisme ainsi conçu a rompu tout lien avec
l'individualisme anglo-franoais du XVIIIe Siècle. l'individu

- 27 -
n'existe que pour la r6eli.etion de fin. Id6el• • • t im-
personnelles, art, science, religion, dont l'6tet est
l'incarnation.
~ais pr6cis'ment parce que l'individu a'par~ de
l'Etat est une sorte de paternalisme bureaucratique où
l'individu dans l'ali~nation de aon libre arbitre, trouve
la garantie de son bonheur mat~riel et moral.
Au d~là du Socialisme aristocratique et du Socia-
·lisme d~mocratique, on conçoit un Socialisme pur, degag~ de
ces survivances politiques et qui en diffère essentiellement:
La d~mocrati8 n'est qu'une doctrine n~gative, la d~fense de
l'individu contre l'oppression collective{de la religion, du
gouvernement du capitalisme).
Cette d~fense, si n~cessaire qu'elle soit, ne va
qu'à la dissolution des pouvoirs malfaisants, elle est seule-
ment lib~r~trice et destructive. Les id~es de droit, de justi-
ce, d'~gallt~ par lesquelles elle s'exprlme, laissent les hom-
mes dans un ~tat d'antagonisme, de raidissement et de s~che­
resse qui n'est ~videmment pas un idéal suffisant(Rf Vocabu-
laire technique et critique de la philosophie P U F, 1962
P.1000 - 10001).
Ainsi nous pouvons d~finir le Socialisme, en tant
que formation ~conomiQue et Sociale, fondé sur te mode de
production Socialiste, mode supérieur de production de la
vie matérielle, il se caractérise· principalement par des rap-
ports de productions nouveaux, rapports de production fondés
sur la coopération entre tous les producteurs. Ceci est devenu

-28-
possible et n6cessaire parce que les grands Moyens de
production et d'6change sont devenus propri6t6 sociele,
sous des fornles vari6es(forme de propri6t6 de la Soci6t6
toute entière, forme de propri6t6 coop6rative).
Avec la propri6t6 sociale des moyens de pro-
duction, disparait le travail salari6, c'est i dire l'ex-
ploitation de l'ouvrier par les capitalistes. Au lieu de
deux classes fondamentales antagonistes interviennent des
hommes, travaillant dans le même but :
Satisfaire des besoins mat6riels et culturels croissant
de la Soci6t6.
La r6partition est fondée sur la quantité et la qualit6
du travail fournir: "de chacun selon son travail."(phase
première du communisme).
Le r6gime socialiste implique déjà, avec la fin
de l'anarchie de la production propre au capitalisme, une
grande maltrise de l'économie qui se développera à partir
de plans rationnels, à long terme.
Le Socialisme en dernière analyse est, un régime
sociale caractérisé par la propriété sociale des moyens de pro-
duction et par la suppression de l'exploitation de l'homme
par l'homme, par la satisfaction des besoins croissants
comme mobile fondamental sur la base de forces productives
très développées.
"LE SOCIALIS~E AFRICAIN
Le "Socialisme africain" se situe - et se
distingue - aussi bien à l'égard du socialisme européen.

• 29 •
qua du marxisme. Il comporte l'6l6ment religieux comme
une de ses bases objectives. Il tend i int6grer certains
traits Socio-culturels. Il aboutit 6 l~ d6finition d'une
id6ologie et.6 des r6alisations originales.
Tels sont les traits communs qui se d6gagent
de l'examen de la Situation du Socialisme africain vis-6-vis
des formes europ6ennes du Socialisme africain vis-6.vis des
formes europ6ennes du Socialisme, des rapports qu'il entre-
tient avec les valeurs traditionnelles, de la consistance
de ses principales lignes de force id601ogique, des types
de r6alisations qu'il a actualis6s.
De part ses traits sp6cifiques le Socialisme
africain estWla recherche d'une idéologie négro-africaine
qui prend ses sources dans les thèmes fondamentaux de la men-
talit6 africaine traditionnelle (puissance du Verbe, sens
communautaire profond, résonnance avec la nature, caractère
sacré du chef, conception organique du monde et de la Société)
plus ou moins infléchie par la situation ColonialeftRéf. L.V.
THO~AS : le Socialisme et l'Afrique, tome II Ed Livre Afri-
cain 1966.
Le Socialisme africain est considéré par ailleurs
comme ftl a nécessité de nier le capitalisme aussi bien en tant
que facteur extérieur (en tant que cause de l'asservissement
colonial et néo-colonial), qu'en tant que propre système
social,mais dans des conditions où les conjonctures maté-
rielles et les forces sociales nécessaires au développement

- 30 -
des rapports 8ociaux-aocialistes n'existent pa. encore.
tette orientation Bocieliste implique une voie originale,
ap6cifique et acc6l6r6e pour cr6er cette conjoncture .ans
passer par le capitalisme, mais en le contournant et en
aspirant è des objectifs socialistes." réf Or JOKltA
KASILEVA : Africa l Socijaliram, dans la Revue mensuelle
yougoslave de Janvier 1974, pp 118 et 119.
tertes. les dirigeants africains anglophDnes ont
6t6 les premiers è flirter avec le panafricanisme, mais nous
pensons que ce sont surtout ceux de l'Afrique occidentale qui
ont commenc6 à parler de Socialisme Africain. Principalement
Leopold Sedar Senghor, ~amadou Dia, Gabriel oarboussier,
Abdaulaye Ly, et Kwame Nkrumah - En Afrique orl~ntale, les
repr6sentants du courant Socialiste sont: Julius Nyereré.
Jamo Kenyata, ~ilton Oboté. et Kaunda.
En Afrique du Nord
Egypte comprise ils sont :
Bourguiba, Ben-Bella. Nasser etc.
Socialisme Sénégalais
Le Socialisme Sénégalais a pour fondement l'idéolo-
gie du parti Socialiste Sénégalais. Et, cette idéologie repose
sur la négritude dont le représentant authentique est le pré-
sident Leopold Sedar Senghor. En effet le Socialisme Sénégalais
est le SOcialisme le plus comple, car il puise dans diffé-
rentes branches de la philosophie idéaliste: L'esthétique
id!alist~ l'humanisme Ka~tien. l'existencialisme chrétien-
français de Theillard de Chardin.

- 31 -
Il .e d'finit. d'apr~8 Senghor par"l'ensemble
des valeurs de la civilisation du monde noir" et cette
association de cultures fait d'elle une symbiose. C'est
un existencialisme ~ travers lequel la pr6sence de l'hom-
me noir au monde est r6alis6e par son simple contact 6mo-
tionnel avec les autres hommes~ avec tous les existants,
~!me ROieu." La n6gritude 6tant un moyen politique devient
une sociét6 qui n'est pas collectiviste, mais ~ommunuelle
tentative de tout un peuple vers le mArne but, anim' de la
.Ime foi.
Une fois de plus, nous pensons que pour saisir
l'essence de la n6gritude, il faudrait suivre son chemi-
nement historique.
.~
En effet la n6gritude est la cons6quence des expé-
riences amères des étudiants noirs des années 30 qui, une
fois en métropole, croyaient être exempts des problèmes de
leur pays, entre autres, changement de soci6té qui serait
la dernière étape de leur personnalité. Hélas, les r'alités
coloniales en disposaient tout autrement, car au lieu d'échap-
per à ces problèmes, il s'y trouvaient leurs vé~itables vi-
sages celui de "Sales riègres" que les Européens voulaient et
veulent maintenir sous leur domination, malgré leur licence
en Philosophie, en droit et en SOciologie. Et c'est au nom
de cette philosophie, de ce droit et de cette Sociologie
qu'on parle de l'égalité entre les hommes. C'est en leurs noms
aussi qu'on décide l'extermination des hommes(Franz Fanon).
1
La négritude est par ailleurs considérée par Stanslas Adotevi comme "la phase contempo-
raine let ultLme d'une croisade. Elle fixe et coagule à des fins inavouables, les théories
les plus usées sur les traditions africaines dont elle prétend être le reflet littéraire."
Réf.: Inégritude et négrologues, union générale d'éditions, 1972. p 113 - 114
\\

___ .
_
_.-....~.
. .
. ..•••. ~~~
4I-,_...
~'., ..•
- 32 -
Le n6gr1tude est l'oeuvre d'une '11te occi-
dentalis6e qui n'entretenait aucun rapport concret evec
la ~asse. Elle se contentait seulement de vivre de ses
souvenirs lointains et de ~n~rétl.~r-Son appartenance è
travers la négritude.
Concernant ce genre de manifestation politico-
culturelle, Engels disait que "dans la politique, pas de
place pour la sympathie poêtique."
Sen~~or et Aimê Césaire sont les promoteurs de
ce courant littéraire, la différence entre les deux est
grande, car Senghor parle de raison intuitive, de chaleur
'c-onimùnue"lle, d'image, de symbole et de rythme cosmique qui,
au lieu de st~riliser en divisant, fécondaient en unissant~
(conception raciste).
Quant à Césaire, sa nêgritude se trouve dans
"Les fils ainés de la terre."N'av~ons-nous pas dominé le
monde jusqu'au néolithique ~o~pris
fécondé les civilisations
du Nil et de l'Euphrate avant qu'elles ne fussent les victimes
innocentes des barbares blancs, nomades fondant de leurs
plateaux euroasiatiques 1"
Plus tard, avec le temps, les deux hommes aigui-
sèrent leur négritude pour s'en servir à des fins politiques.
C'est alors la naissance du Socialisme africain de Senghor.
l'une des caractéristiques de ce Socialiste c'est
son opposition au marxisme.
Q) "La très\\bizarre formule Senghorienne de division raciale du travail intellectuel (l'émotio:
est nègre comme la raison est hellène), vise uniquement à perpetuer un régime considéré
comme néd-colonialiste et dont il est le président ; La négritude doit être le soporifique
du nègreJ C'est l'opium. C'est la drogue Qui permettra à l'beure des grands partages d'avoi:
de "bons nègres-." Réf.: Stanislas Adotevi op citée p 114 - 115

,
- 33 -
SENGHOR ET LE ~ARXIS~E
D'après Senghor le ~arxisme est une id6010gie
'trang~re A l'Afrique bien que Rl e m'rite essentiel ~e
"arx n'est pas de nous avoir enseign' l'6conomie politique-
comme on pourrait le croire - ~ais l'humanisme, de nous
avoir r'v'l' l'homme dans et par d'là l'histoire 6conomique
des hommes concrets, avec leurs triomphes futurs dans la
libert' retrouv'e. Son but, il nous l'a d'fini:
t'est de p'n'trer l'ensemble r6el et intime des rapports
de production dans la soci't' b~urgeoise, de d'voiler la
loi 'conomique du mouvement de la Soci't' moderne, en ce
sens, ~arx est le fondateur de la Sociologie, c'est -à~dire
de l'humanisme moderne."{R'f. 1'Unit' africaine, p.77,26
décembre 1963).
"Mais la pens'e marxiste adoptée à la situation
de l'Europe du milieu du XIx9 SIècle n'est que le rationa-
lisme gr'co-Latin(Scc) repensé par un cerveau juif allemand.
Non seulement elle ignore l'id'ologie africaine, mais elle
est dépass'e par la pensée occidentale moderne.
"Ce qui nous gênait dans le marxisme, c"tait
avec son athéisme un certain mépris des valeurs spirituelles
troqué pour un mat'rialisme sans chaleur."(Voir le livre de
Senghor:(Pierre Theillard de Chardin, Paris-Seuil, 1960,
p.22).
"Marx a favorisé indument "Le déterminisme, le
praxis et les moyens au détriment de la dialectique et de
l'éthique, pour tout dire, de l'homme et de sa libert'"R'f.S.Natil

- 34 -
Et voie africaines-prisence .fricaine 1963, p.103).
Enfin, non seulement ~arx n'a pas suffisamment
d6velopp6 l'analyse 6conomique, il lui manquait les sta-
tistique et 8a formation restait avant tout philosophique
(Sic). ~ais encore la plupart de ses pr6visions ne se sont
pas r6alis6es.(R6f. D6veloppement et Socialisme, pp432 -424).
Devant les 6checs du capitalisme lib~ral et
l'6goisme des nations privil~gi~es, notre grande tentation
a 't~ de nous tourner vers le marxisme, nous n'avons pas
tard~ à nous apercevoir que le marxisme, s'lI pouvait nous
aider à sortir de notre sous-d~veloppement ne pouvait combler
notre faim de nourriture spirituelle, bien mieux, nous avons
6té amen~s à nous interroger sur la valeur du mat~rialisme,
même dialectique. C'est Pierre Theillard de Chardin qui nous
a permis de "transcender" l'antinomie du matérialisme et du
spiritualisme(sic). Les oeuvres de Pierre Theillard de Chardin
préseDtent selon SENG~OR l'avantage, premièrement de reposer
sur une conception moderne de la Science(mariage de la Science
et de la religion) ; deuxième, de d~fendre le spiritualisme
et la croyance en Dieu, de mieux comprendre la situation des
peuples sous-développ~s.
"Aussi soucieux que ~arx et Engels de la vie
internationale, plus soucieux qu'eux des phénomènes de la
race et de la nation, Theillard nous montre Que les conflits
entre groupes humains sont des faits naturels, qu'au demeurant,

-35 -
11s sont des temps n'cassa ires dans la procassus da
Socialisation où nous sommes actuellement avec la
guerre froide, avec le8 conflits de classes, de nations
et de races, A·~ne époque ~ une 'poque de divergences
extr8mes, mais que d'j~ s'amorce favoris6 par la tension
elle-m@me etla puissance de nos moyens techniques, paci-
fiques et militaires, un mouvement que naltra la civili-
sation plan6taire, symbiose de toutes les civilisations
particulières. Et le Savant de nous inviter nous, peuples
sous-développ6s, à apporter notre contribution ~ l'édifi-
cation de la civilisation de l'Universel. W(R6f Senghor
Théorie et pratique,(p.69).
w~arx et Engels ignoraient les Africains,
Theillard leur restitue leur dignité et les convie au dialogue.
Ainsi permet-il de "débroussailler" la voie africaine du
Socialisme, d'apporter notre contribution à l'édification
de la civilisation de l'Universel, de nous socialiser sans
~ous dépersonnaliser, slns rien renier des valeurs de la
négritude."
"La vision de Theillard de Chardin, loi de
"Corpusculisation," Loi de complexité, loi de conscience,
le principe de l'Universelle convertion dialectique, la
conciliation des contraintes" - il faut entendre par là
une compromission de la science avec la religion, concilia-
tion entre les différentes classes sociales, etc - L'impor-
tance dévolue à l'homme" telles sont les principales Valeurs

_ . _ • • a _ . . . . . . .
_ _ ,a4loa
- 36 -
qui, Belon L.S. Senghor doivent' nàuveau '6conder la
"6gritude.
CRITIqUE DE LA NEGRITUDE
Les accusations de Senghor i
l'endroit du marxisme
sont ·faibles" du point de vue Scientifique. Tout d'abord,le
marxisme n'est pas un rationalisme gréco-latin, mais plut6t
une antithèse de ce courant philosophique - Le marxisme n'est
point une théorie déduite d'une philosophie sans origine pra-
tique, comme le laisse penser Senghor, mais le résultat d'une
g6n6rallastion de forme expérimentale, fondée sur la totalité
de la pratique Sociale. Le marxisme n'a jamais été dépassé
par la philosophie occidentale moderne ou du moins par la
philosophie spéculative de Theillard de Chardin, car ladite
philosophie occidentale moderne .ne part jamais du concret,
mais seulement d'une spéculation métaphysique, "transcendée
par l'absolu."
Par contre, le marxisme puise ses fondements dans
les sciences naturelles et dans les sciences humaines. Le
marxisme réhabilite l'homme, pas l'homme fictif mais l'homme
réel qui, à travers différents rapports sociaux qu'il entre-
tient avec ses semblables, se forme. Le marxisme ne saurait
être, une nouvelle métaphysique comme ledit L.S. Senghor" avec
son athéisme, un certain mépris des valeurs spirituelles
troquées pour un matérialisme sans chaleur.
D'essence scientifique, le marxisme n'est pas
un nouveau système spéculatif pensé hors de l'expérience. Il
ne manque pas non plus au~ marxisme des statistiques bien
qu'on dise"queOsa formation restait avant tout philosophique-

-37-
-Le marxisme est une -transformation" du monde et non une
simple interpr6tation de celui-ci.
A ce sujet, la onzi~me th~se sur feurbach en dit
beaucoup.
"Les philosophes n'ont fait qu'interpr6ter le
monde de diff6rentes manières mais il s'agit de le transfor-
mer."
Le marxisme n'ignore pas les Africains, à plus
forte raison l'id'ologie africaine. De par son essence, le
marxisme est une 'tude sur les r6alit's humaines, ces r'ali-
t6s humaines forment une totalit' dans laquelle les Africains
et leur id'ologie ont leur place.
Pierre Theillard de Chardin n'a pas permis aux Afri-
cains de transcender l'antinomie du mat6rialisme et du Spiri-
tualisme, comme l'affirme le "Socialiste" Senghor, mais a
agrandi le fossé de l'ignorance dans lequel se trouve l'huma-
nité entière. Cet élargissement du fossé de l'ignorance humai-
ne par Theillard de Chardin se trouve dans son indécision et
son refus d"claircir sa position entre les courants mat6-
rialiste et idéaliste. Sa philosophie nous ramène à une philo-
sophie de l'histoire pré-scientifique "Ce n'est pas la première
fois que la chose se produit dans l'histoire de l'humanit6.
Par exemple, 50 ans après Galilée, 50 ans après la fondation
de la Science P~ysique, il y avait des philosophes qui défen-
daient encore la "physique" aristotélicienne ils luttaient
contre les découvertes de Galilée et voulaient faire revenir
la connaissance de la nature à son 'tat austotelicien, prés-
cientifique.

- 38 -
~8intenant, il n'y a plus de 'physiciens' arIs-
tot6liciens, mais ,a continue ailleurs par exemple il y a
des philosophes de l'histoire anti-marxiste qui font comme
81 ~arx n'avait jamais exist6 ou n'avait jamais fondé une
science. Il ne s'agit pas de leur intention, il s'agit des
effets réels de leur philosophie dans ce sens."(Réf.Louis
Althruser : Réponse A John Levis, p. 44).
Certes, Pierre Theillard de Chardin ne met pas
en doute les possibilités de l'homme, mais il refuse néan-
moins de voir dans la connaissance un reflet du monde maté-
riel dans le cerveau humain. A son avis, la connaissance est
une communion avec les idées pures, la compréhension de l'ac-
tivité de l'esprit absolu de la conscience Universelle:
Sa philosophie est inefficace parce que, la
religion n'a jamais accepté les fondements de la Science,
et si elle l'a acceptée c'est pour la déformer. La Science
lui a toujours paru un élément moteur de l'alhéisme. La phi-
losophie de la religion s'oppose carrément à la philosophie
de la Science, elles sont l'une et l'autre, aux antipodes.
Toute l'histoire de la civilisation est pénétrée
du combat que se sont livré la scienb8 et la religion.
Par ses découvertes, la première démolit peu à
peu les bases des dogmes religieux sur l'existence d'un Dieu
invisible pourtant souverain. Expliquant les phénomènes de la
nature par des courses naturelles, la Science ne laisse pas
de place à une divinité.
+ Reflet de
la praxis, Sociale - matérielle dans la connaissance.
C'est, cette praxis qui détermine la conscience de l'homme agissant
dans une Société donnée.

- " -
Dans 1. poss6, l'Egli •• poursuivait les savants et elle
fit peur i beaucoup d'entre .ux (Galil'e). Et aujourd'hui
encore, par exemple dans des villeges d'Afrique Sud-Saha-
rien il arrive que des jeunes africains ayant termin' leurs
6tudes soient empoisonn6s par des ,6ticheurs qui craignent
de perdre leur influence sur leurs wfidèles ft et par là leur
puissance.
Disons en conclusion que par leur essence comme
par leur rele social, l'idéalisme et la religion sont des
jumeaux, tous deux s'opposent è la Science, aux tranifor-
mations Sociales et au matérialisme. Ainsi matérialisme et
idéalisme représentent deux lignes essentiellement opposés,
deux cas inconciliables de la philosophie. Le point crucial
sur lequel s'affrontaient les deux courants opposés, maté-
rialisme et idéalisme réside dans la solution apportée au
problème des rapports entre la matière et la conscience, il
s'agit des rapports entre la nature et les hommes; la
transformation de celle-ci en fonction du bien que cette
transformation peut apporter à l'homme à toute l'humanité,
pas à quelques individus.
Le matérialisme avec son principe fondamental
considère que la matière est une donnée première, tandis que
la conscience est une donnée secondaire. l'être détermine
la conscience, disent les matérialistes en se fondant sur
l'ensemble de la pratique sociale et sur la science. Le prin-
cipe fondamental de l'idéalisme consiste à soutenir la pri-

• 40 •
••ut6 de la conscience et le caraetAre secondaire de
l'Itre et de la mati~re.
Theillard de Chardin est avant tout un anthropologue
6volutionniste. Sa philosophie cherche i prouver la eontinuit~
entre la nature et la vie, puis entre la vie et l'esprit.
Cette recherche des Rinterm~diairesR le rapproche du mat~­
rialisme panth~iste id~aliste, car Theillard de Chardin or-
donne toute l'évolution i la réalisation de l'homme spriualis~
dont le christ est l'exemple frappant. La philosophie ~volu­
tloniste du Rev~rend Père passe i première vue pour une philo-
sophie mat~riallste dialectique, mais en approfondissant les
écrits de Theillard de Chardin il apparait que cette philoso-
phie fait de la dialectique un tremplin pour montrer la supé-
riorité de l'esprit sur la matière; - un néo-positivisme
avancé - Le monde est une réalité mais une réalité transcen
dentale :
"La Valeur du monde se trouve dans son infail-
libilité et dans sa bonté. Le monde est le point Oméga. :
Le monde, en dernière analyse, est
la première et la dernière, est l'unique chose à laquelle je
crois. Cette croyance à laquelle je croirai jusqu'au dernier
moment de ma mort."Theillard de Chardin - Peking 19~4).
De par cette déclaration il met en pleine lumière
l'action de Dieu dans le salut de l'homme et de l'Univers.
La position philosophique de Theillard de Chardin
exploitée à fond donnerait un socialisme sans violence, une
compromission entre les différentes classes sociales, une

- 41 -
aorte de contrat aoclal entra exploiteurs et .xplolt6a.
Nous pensons que ctest cet aspect de se
philosophie (dialogue dans le cadre de mattre è esclave et
aussi de relation de mattre è affranchi), que Senghor a
retenu comme outils th'orique, pour justifier le Socialisme
S'n'galais.
Pour plus de preuve Senghor dit~Nous avons du
SOcialisme Scientifique rejeté l'ath'isme et la violence,
foncièrement contraires à notre génie, nous avons surtout
d'velopp' la coop'ration, non pas collective, mais communielle.
Car la coop'ration familiale, villageoise, tribale a de tout
temps ' t ' à l'honneur en Afrique Noire. Encore une fois, non
sous lp forme collectiviste, comme agrégat d'individus, mais
sous la forme communielle, comme conspiration, centre è centre
des coeurs.~(Réf. Pierre de Chardin, par Senghor)
C ON C LUS ION
Les bases du Socialisme de Senghor sont :
1)
Adopter le Socialisme aux constantes de la négritude,
ce qui veut dire le tirage de la civilisation traditionnelle
et des modifications apportées aux systèmes sociaux-culturels
par la situation coloniale.(Nation et Voie Africaines.}
2)
Tenir compte de la conjoncture économique africaine insépa-
rable du milieu géographique et des réalités historiques:
Il s'agit avant tout de pays agricoles, démunis de capitaux
et insuffisamment équipés techniquement.
3)
Prendre conscience des réalités sociales africaines. Le
problème n'est pas de supprimer les classes par la lutte
des classes au sein de la nation, mais plut6t de supprimer
le clivage international en nations sous-développées.
+~amadoJ Dia disait la mArne chose : ~nous devions choisir un socialisme
1
original, authentique, plongeant ses racines profondément dans le terroir,
issu d~ l'Afrique et non de l'Europe, de l'Asie ou de l'Amérique(Réf
~amadoJ Dia, réflexion sur l'économie de l'Afrique Noire Présence africaine.

- ~ -
Souvent, Senghor dit qu'eu S6n'gal il n'y avait pas de
proletariat, puisqu'il n'y avait pas de bourgeoisie,
il n'y avait pas de capital, pas d"pargne, donc pas de
capitalistes, il n'y avait que des groupes technico-
professionnels dont les int6rlts pour divergents qu'ils
fussent, n"taient pas oppos6s.(R6f : Th60rie et, prati-
Que du SOcialisme S~n~ga18is. Texte ron~otype, pr~sent~
par Senghor au S~minaire des cadres politiques, Nov-D~-
cembre 1962 p.77).
D'autre part il affirme que ·Si nous oublions
les centres urbains, il n'y aurait pas vraiment de ~las-
ses sociales en Afrique, mais plutet des cat~gorles ·Socio-
professionnelles, pas d'antagonisme de classes, mais plu-
tet une juxtaposition au coop~rat1on.
4)
Senghor voit dans l'amour et la religion une fin pour
le Socialisme" S'il est vrai que le but ultime de
l'activité gén~rique de l'homme est son accomplissement
en Dieu par l'amour, nous devons, auparavant, trouver
cet amour, hic et nunc (ici et maintenant) comme réali-
sation des objectifs politiques, économiques, sociaux
et culturels. Notre socialisme n'est rien d'autre que
l'organisation technique et spirituelle de la Société
humaine par l'intelligence et le coeur"(ibid, th~orie
et pratique, pp 81-87 -
Au vue de ces quatre dimensions du Socialisme
Sénégalais nous pensons que la nécessité de justification
prime sur l'abord réel des problèmes réels.

- ~3 .-
En effet, si le problème n'est pas de supprimer
les classes sociales è l'int6rieur d'une collectivit6
par la lutte des classes - mais de supprimer le clivage
international entre les pays pauvres et les pays riches,
cette suppression n'est possible que lorsque la bourgeoisie
nationale s'identifie è tous les int6rêts nationaux. Or il'
se trouve que cette bourgeoisie n'a pas encore eu confiance
en ses propres possibilités, elle reste intermédiaire entre
les masses et les capitalistes étrangers.
Dans la phase actuelle des choses, la conscien-
tisation des bourgeois nationaux est une nécessité pour tout
socialiste voulant éviter le pillage international. - La
présence d'un monopoleur étranger se voit à travers les re-
présentants nationaux, qui gèrent leurs intérêts à l'intérieur
des pays sous-développés. Donc la conscientisation pour la
bourgeoisie nationale consiste à limiter l'emprise du maltre
qui se trouve à l'extérieur. La lutte de classes n'est pas
au premier plan des préoccupations des Socialistes Sénégalais
que les groupes technico-professionnels existent avec une di-
vergence d'intérêts sans qu'il n'y ait contradiction entre
eux. Un peu comme deux équipes de foot-ball, chacune dans
son camp avant le coup d'envoi. Le match engagé ne veut pas
dire que chaque équipe va s'efforcer de gagner le match, car
le
but de chaque équipe est de bien jouer et non de gagner
la partie.
Chaque groupe existe dans son propre camp,' il doit

-
_Ii -
aa vie A ses propres conditions d'exiatence aur 1.
terrain. Un groupe peut utiliser un autre sans pour
autant qu'il y ait affrontement - l'essentiel est de
participer (Quelle na1v~te••• ).
A notre humble avis, l'existence des couches
sociales engendre une pr6sence d'int6rAts qui n'est pas
toujours sans heurt. Aussi l'exitence des groupes sociaux
dans une soci~t~ annonce d'jà une stratification qui peut
conduire vers l'exploitation d'une classe par une autre,
c'est donc la lutte de classes qui constitue la division
en classes.
Pour mieux corroborer notre pens'e, référons-nous
à la lettre de K.~arx à Joseph ~eydemeyer, à New-York,
2B,+Oean Street Soho, le 5 ~ars 1952.
ftIl suffit, par exemple, d'ouvrir le grand ou-
vrage de Ricardo(on the Principles of political Economy
and Taxation) pour, à la première page, tomber sur les li-
gnes par lesquelles commence l'avant-propos: The produce
of the earth, aIl that is derived fram is surface by the
united application of labour, machinery and capital, is
divided among three classes of the community, nomel, the
proprietor of the land owner of the stock or capital neces-
sary for its cultivation and the labourers. by whose indus-
try it Is cultivated. (Le produit de la terre, tout le pro-
fit que l'on peut en tirer par l'application conjuguée du
travail, des outils, et du capital, se r~partit entre trois
classes de la Société, à savoir : le propri~taire du sol,
le possesseur des capitaux

-
45
-
qu'exige sa culture et les travailleurs qui,
par
leur
industrie cultivent ce sol."
"Maintenant,
en ce qui me concerne,
ce n'est pas
à moi que revient le mérite d'avoir découvert l'existence
des classes dans la Société moderne,
pas plus que la lutte
qu'elles s'y livrent.
Les historiens bourgeois avaient exposé
bien avant mais l'évolution historique de cette lutte de
classes,
et des économistes bourgeois en avaient décrit
l'anatomie économique."
La non-Stratification de la S~ciété Africaine(2)
n'est pas un argument convaincant,
car la pénétration du
capital colonial a remanié les structures Socio-économqies
de l'Afrique,
elle a partagé la Société Africaine en dif-
férentes classes sociales qui sont :
la bourgeoisie bureau-
cratique -
la première formée à l'écriture et à la lecture
pour aider les colons dans leurs travaux administratifs.
La bourgeoisie compradore -
composée de petits
commerçants et autres frafiquants,
la classe ouvrière -
composée de travailleurs urbains et de paysans,
fixes ou
saisonniers. De par cette réalité,
il ne peut être question
de société sans classes,
Souvent en Afrique on assiste à
des confrontations déguisées entre les différentes classes
sociales.
N'est-il pas vrai que les paysans sénégalais et
les ouvriers de l'usine M'BAD sont constamment en mouvement
dans le cadre de revendication syndicale ?
~ )
1
Af
.
l

,
.
Bi e n. 'r q u . e n
r ;- que ,
e s
l e n s e t r 0 l t sen t r e l e s
pro b l ème s soc i a u x e t
racIF~x sontAnes de l'exploitation capitaliste. L'esclavage, les
rela~lons maItre-Serviteur" et la maintenance d'oeuvre a bon marché
en s~nt les caractéristiques(Réf KWAME N'KRUMAH, la lutte des classes
en Afrique ED présence Afrlcaine 1970
1

'._._.":""':~"~:'- __"';' :.~-~-- .
- ,~.-
En dernière analyse nous disons que l'amour et
la religion auxquels fait allusion ~onsieur Senghor pour
r~a11ser l'entent~ sociale ne sont pas suffisants ~n tant
que facteur de r~gulation. 51 la rél1gion et l'amour pou-
vaient règler les conflits sociaux, l'Afrique du Sud ne
saurait ~tre le pays de la discrimination épidermique. La
religion et l'amour sont des produits sociaux, ce n'est
qu'avec les changements de Structures Sociales que l'amour
et la religion peuvent remplir leur rele de conciliateurs.
Le Socialisme Tanzanien de Julius Nyereré
Fondements
Les villages UJAMAA et l'édification du Socialisme
en Tanzanie ont commencé avec la mise en place de villages
communautaires. En effet "Ujamaa est bon terme Sawali. qui
signifie une communauté de type familial dans laquelle tout
est en commun.
Pour rendre explicite son fondement du Socialisme,
Nyereré dit que "la famille africaine traditionnelle vivait
selon les principes de base de l'Ujamaa ; ses membres vivaient
et travaillaient ensemble et "répartissaient les produits de
leur travail conformément à des coutumes acceptées de tous."
Socialisme qui est différent du socialisme euro-
péen né dans le contexte de la révolution industrielle et de
la lutte des classes. Par contre, le socialisme africain,
fondé sur l'Ujamaa et prolongement de la Soiidarité familiale,
n'est ni le résultat de l'industrialisation ni le fruit de
la lutte des ouvriers contre les bourgeois.(Réf. Ujamaa, the
basis of African socialism in K.Freedom and Unity. Oxford U.P.

_ _ _ _ _ • •;.
_... _ _ ... -.-.:
• • • • 1..1 ........ ,\\.;..,,~
...... _ : .....- .... -:_ .. ~ ••• _-~- .:.
1966, p.1S2).
COncernant ce premier fondement nous pensons que
la famille est elle-même une conséquence de la désintégra-
tion de la grande communauté primitive dans laquelle les
hommes, les femmes et les enfants travaillaient, sans qu'il
y ait différenciation au niveau matriarcal ou patriarcal.
C'est avec l'apparition de la propriété privée(pas au sens 1
large du terme) que la séparation au niveau des clans, tri-
bus et familles s'est montrée. Dans la famille, certes, les
biens étaient consommés d'une façon communautaire, mais
n'empêche qu'il y avait une hiérarchie au sein des familles
qui faisait du père le chef, de la mère le Sous-chef, les
enfants et autres n'avaient qu'un rôle secondaire.
D'autre part, ce serait une mauvaise appréciation
de la dialectique que de dire que le~Socialisme africain"
n'est pas le fruit de la lutte de classes ni les conséquences
de l'industrialisation. Qui pourra nier que les premières
manifestations nationalistes en Afrique, ne sont pas des oeu-
vres des premiers africains ayant participé ou vécu en Eu-
rope avant et après les deux guerres mondiales ? Ces deux
guerres mondiales n'étaient pas des faits naturels mais plu-
tôt les conséquences des crises économiques de la première
moitié du siècle. Les premiers animateurs du Socialisme
africain étaient des militaires, des Syndicalistes et des
étudiants qui avaient eu des contacts pendant leur séjour en
Europe avec les ouvriers et les intellectuEl;'progressistes".


. '

. ; . . ' ' ' : -
4
'";;-
~
'~I~~..<t;·~'-:t -\\-~'t·':';'~-;.;:;~..~J1!1~:~}~.:;"'_~ ..:.'_~ ~<~.._::A~ .....'"..~,
._ .~:..
-.""1'"".~."
~.~ ~~"--; ~- ~
~,:.":"'-~-
_1- . _ .
:.-
'"
.
. _'._"••_ ~.._.,~ ' __.o! -
•• - ; - .
..;. . ' - -
-
_ 4.8
L'organisation du prolétariat est la conséquence
de l'êvolution de la production industrielle et de ses crises
durant la guerre. NOus n'affirmons pas catégoriquement que
les contacts lissés entre les Africains et europêens ont
influencé de fond en comble les mouvements nationalistes
africains mais les ont imprégnés d'une certaine idéologie.
Les mouvements nationalistes sont les fruits de
la misère coloniale et cette misère coloniale a été enfantée
par les crises économiques. C'est ainsi que la lutte de li-
bération en Rfrique a pu, après la guerre, s'appuyer sur une
base politiquement plus élevée parce que d'une part le pro-
cessus de prolétarisation était devenu plus intense au cours
de la guerre. D'autre part, les soldats de retour du front
ont donné une nouvelle direction et un nouveau contenu aux
mouvements d'indépendance en conservant nÉanmoins plusieurs
éléments tirés des anciennes formes de rÉsistance. Comme le
disaient les premiers missionnaires de la Côte d'or(Gold Coast),
on trouvait l'idée communiste" parmi ces soldats. Pour plus
d'informations voir le livre de J.WDDDIS
Afrique, le lion
s'éveille, P.21.
Les villages "Ujamaa" en vocable anglais"family
hood" , constituent sans doute des instruments de développement,
mais ils sont bien autre chose et l'on se méprendrait lourde-
ment sur leur signification si l'on se bornait à y vpit un
moyen d'accroitre la production agricole dans le cadre d'une
économie de marché.

,.;: .~'-.'-" ":..s·:~·L#··· ..'
· .',
....
"
~.~...-.-: ".~ ..""
'.
d7:;1;~~~~~~[,!'~~ );.t,~·~~;;t:Bf:.~~~~~~··· ~:\\:,~~=;.~~~2:L~::··'·~~~~~ .~:~:~_~~-2'..'~~-~. '...~_...- - -'.~~.'..'" .~.." , -- ~:.... ~--
.~. .:- ....•.
, .....-.:~..'~ ;~:'~ ...:
'; :~.:,~:.:,~...~~"'.
Ujamaa est surtout consid6r6 comme une manière de
penser, et il "appartient donc aux peuples du Tanganyika,
paysans, 'tudiants, salari's, nous tous de s'assurer que
cette manière de penser socialiste n'est pas d'truite par
les tentations du gain personnel ou de l'abus des postes de
commande que nous pouvons rencontrer. Du par la tentation de
considérer que le bien de l'ensemble de la communauté a une
importance secondaire par rapport aux intér~ts de notre grou-
pe particulier, "(Réf Discours de Nyereré prononcé à Nwansa
le 17 Octobre 1967, devant la conf'rence Nationale de la
T.A.N.U.).
Il est donc bien clair qu'il s'agit de la sponta-
néité d'une conception idéaliste qui met l'accent sur le sti-
mulant moral et met de cOté le stimulant matériel. La spon-
tanéité n'est pas l'anti-thèse de la conscience, mais une
conscience non lavée, d'où par conséquent, elle doit ~tre
éclairée par les dirigeants à travers leur pratique sociale
et renvoyée par la suite à la masse populaire. Cependant s'il
se trouve que ceux qui professent cette théorie ne sont pas
aussi concernés comme cela se devait, il y a des possibilités
que son application soit difficile ~
Le stimulant moral va de pair avec le stimulant
matériel car quel que soit le sacrifice demandé à la popula-
tion, il faut bien que ce sacrifice soit accompagné d'un mini-
mum de remunération matérielle.
Ce problème de stimulant moral et de stimulant
matériel n'est pas nouveau. A Cuba, il fut souvent discuté

- 50
-
au niveau du Comité Central. Et voilà ce que disait
Castro dans son discours de Santa Clara : "Nul ne
pourra nier qu'il est au moins possible de compter sur
une minorité assez importante d'hommes qui,
dans leurs
actes, sont uniquement poussés par des stimulants moraux
et des sentiments d'humanité.
Quand il s'agit de la
grande masse des hommes qui vivent en coupant la canne
à sucre,
il serait absurde de leur demander de faire le
maximum d'efforts en leur disant de le faire par devoir,
sans qu'ils se préoccupent de gagner plus ou moins. Il
serait idéaliste aussi. Mais partout où un homme a été
désigné comme administrateur au chef de n'importe quel
front de travail, on a le devoir et le droit inaliéna-
ble d'exiger que cet homme accomplisse son travail, le
plus complètement possible,
indépendamment de la rému-
nération matérielle qu'il reçoit"(Réf Commandant Ernesto
che Guevara Souvenirs de la guerre révolutionnaire ps.
II-III Editions Maspéro).
Les villages Ujamaa commencent d'abord par des
échecs. En effet l'existence des villages settlement
Schemes devrait être exploitée par les autorités Tanzanien-
nes pour réactiver les valeurs de la Société Tanzanienne.
Les communautés villageoises de 1959 correspondaient à ces
objectifs - La Tanzanie inscrivait à son programme une poli-
tique de regroupement des populations au sein des villages

, ...,,:.-"".
..
;,
~_ ...
_ . . _. -{....... ~
.>;'.~
.~
' . ,
."__ ":.'. ~.' _!.;~~ ....~~._:.. "~~.~:'.: ~'.~~; __....
. '..._~~~ _. _ .•....• _ .. ~ .._. .!.,:.::_A.".
... .eL
-
51 '-
communautaires là où la dispersion de l'habitat et l'exi-
guité des exploitations ne permettaient pas l'introduction
1
de méthodes de cultures rationnelles.
Le rapport effectué en 1961 sur la situation
économique du Tanganyika sous l'égide de la banque mondiale
pour la reconstruction et le développement,
recommandait
l'implantation des villages fondés sur de nouveaux prin-
cipes économiques,
techniques,
sociaux et juridiques.Suite
à cela, furent créés des villages Ujamaa par des volontaires
qui ne pensaient pas avoir de soutien de la part du gouver-
nement. Un peu plus tard,
le 10 Décembre 1962, Nyereré re-
prenait les mêmes formules avec la nouvelle notion de "vil-
lage community" et il ajoutait.
"A moins que les populations
dispersées du Tanganyika ne soient regroupées,
nous ne pour-
rons pas utiliser les tracteurs,
nous ne pourrons pas four-
nir des écoles à nos enfants, nous ne pourrons pas construire
des h6pitaux ou disposer d'eau potable."
Dans cette optique,
un comité d'étude préparatoire
soulignait la nécessité de créer une commission (rural settle-
ment commission) assistée d'une agence pour l'implantation
de villages (villages settlement agency), une commission
composée des divers ministres intéressés au développement rural
fut créée à la suite d'un vote au parlement.
En 1964, la Socialisation fut reprise en d'autres
termes
le premier plan quinquennal 1964-1969 accordait une

...
....
-~.
"
-~ ... ---. ~ .. .::
. " /
' . '
"
\\': .,. ~,~;. ,:· __ .,-\\·~2'..~i.'2'1J:_fk!~:E:)X:':~· i:'l:;~.~_:;· .'\\:.~~..,~~ :- ':';:' ::~_":'.::::.::~~' :.::~~~.~:~,~~·.:'1~: .:~~q]J~~;'
-....
~ '.",
~.........
. -"~ ~-
;',
~.'".
.
','.
'. ". . .. -
.. ....~ '. ~." .. " ...
- 52 -
, -
place importante à l'installation de villages communau-
1
taires et ses objectifs devenaient grands avec le temps.
Le regroupement devait se faire sur des sols plus fer-
tiles et mieux irrigués et l'objectif devait ~tre at-
teint d'ici 1980. Création d'un ministère spécialisé
(Ministère de l'Agriculture de villagisation et de l'irri-
gation) dans le gouvernement de 1B64. Parmi les projets
d'implantation de villages communautaires, plusieurs caté-
gories peuvent être définies. Le projet d'établissement de
villages -pilotes (pilot settlement Schmes) se proposait
d'augmenter le revenu net annuel du paysan Tanzanien de
20 F à 150 F. Pour atteindre ce résultat,
l'introduction
de nouvelles méthodes de culture et de mécanisation pous-
sée était prévue pour que ces villages soient exemplaires.
Entre autres,
le gouvernement apporterait une
aide massive provenant de l'aide étrangère." Il est à si-
gnaler que les premières notions de villages communautaires
ont été fournies par Israël (Agrider agricultural dévelop-
ment compagny of Israël) - aide de manifestation de solida-
rité internationale ayant pour but de briser l'isolement.
Les villages Settlment Schemes étaient des copies
conformes des Kiboutz.
Le coût de chaque village était évo-
lué à 150 000 F pour 600 acres de terre et envirion 250 à
2ffiO familles.
A l'avance,
30 000 F étaient déjà considérées
comme irrécupérables - construction de routes,
irrigation,
bâtiments publics qui appartenaient à l'Etat).

Pourtant le prix de la location de ces bâtiments
revenait au gouvernement. Le reste devait être remboursé
en 25 ans par les fermiers. Pendant les premi~res années,
une allocation de 30 schillings par mois était versée aux
pionniers pour les encourager et en même attirer d'autres
personnes. C'est ainsi que furent créées dans les districts
du Musane, M'butu, Lindi des Settlements Rwankoma, upper
Kitete et Kerere.
CONTRADICTIONS SOCIALES DES VILLAGES
COLLECTIVISEES
Ces communautés avaient leur comité d'autogestion
mais cela n'a pas empêché l'apparition de la bureaucratie.
Quant aux partages, il fut inégal car managers et membres du
comité se sont bien servis. Vu cette dégradation du système
communawtaire,
les paysans préfèrent avoir leur lopin de
terre en commun. Les projets simplement soutenus par "las-
sisted Settlement Schemes"étaient patronnés par l'Adminis-
tration régionale qui fournissait une part de son budget,
tandis que l'aide extérieur fournissait les semences, les
outils, les engrais,
et, éventuellement, une aide financièr-e,
Sur ce terrain, les réalisations les plus importantes furent
celles du 8uyambe, Mkata, Mativiga, Mlowamagi, Sekera et
Gulu.
La commercialisation des produits était effectuée
par l'intermédiaire des communautés à la tête desquelles se
trouvaient des commis-comptables qui profitaient de l'occa-
sion pour s'enrichir. Telle était la situation en général
avant les villages Ujamaa.
Avec la faillite des Settlements Schemes, le

·;
. 5"--
gouvernement se voyait obligé de réviser sa politique de
villagisation parce que ceux qui devaient donner l'exem-
ple étaient des petits-bourgeois qui ne furent nullement
intéressés par le travail communautaire, mais visaient
plutOt les anciennes places vacantes des colons.
Cette bourgeoisie bureaucratique est très représentative
dans le gouvernement tanzanien et c'est sur elle que ~e fonde
NYERERE pour bâtir son socialisme, et les mêmes erreurs se
répètent aujourd'hui dans les villages Ujamaa, car rien n'a
changé quant aux membres du comité de gestion, seulement une
bourgeoisie bureaucratique plus patiente a été placée à la
tête des Kiboutz tanzaniens. En 1966, -le second vice-prési-
dent, R.M. Kawawa, annonçait une révision de la politique
officielle(A ce sujet, voir le discours d'ouverture du Sémi-
naire de planification en matière de développement rural,
4 Avril 1966, Tanzanie to day) -
Peu après ce discours, la plupart des projets
étaient abandonnés. La plus grosse erreur fut que les diri-
geants tanzaniens n'ont pas fait d'autocritique. Les causes
de l'échec étaient diverses, celles qui furent le plus souvent
citées parlaient de modalités techniques de l'opération, ainsi
la corruption des managers et le favoritisme furent exempts
de critiques sévères.
Le manque de capitaux pour la mécanisation des
villages communautaires fut l'une des causes de la non réus-
site, mais le véritable échec était dû à la mauvaise orga-

nisation des communautés, en espérait transformer
aussi rapidement que possible les systèmes tradi-
tionnels de production et augmenter la productivi-
té sans réorganisation préalable des Structures
Socio-économiques qui ne représentaient aucun danger
pour le "Socialisme" de NYERERE parce qu'il n'y a
pas de classes sociales en Afrique .•• ! Les fermiers
des villages communautaires devaient rembourser les
4/5 des sommes avancées • par le gouvernement alors
que ces paysans étaient complètement démunis d'argent
par suite des exagérations financières de l'époque
coloniale. Sur une simple tent~tive de Socialisation,
ils ont répondu à l'appel de la TANU pour reconstruire
le pays, Hélas,
leur bonne volonté n'a pas reçu de la
part de la TANU l'encouragement nécessaire. De telles
charges grevaient lourdement les budgets familiaux pen-
da nt de longues années et absorbaient pratiquement tous
les revenus de la récolte. La mécanisation excessive et
prématurée dans certains secteurs entraina des frais
supplémentaires. Dans les villages communautaires, l'enthou-
siasme tomba rapidement et la réduction de l'aide gouver-
nementale entraine des défections. L'expérience montra aussi
les faiblesses d'une planification centralisée du dévelop-
pement rural par l'intermédiaire des villages Settlement
Schemes. Les projets avaient été établis à l'échelon cen-

tral sans que l'on se soit préoccupé suffisamment de
la participation à la base.
Partant de là,
les paysans
qui furent exploités par les colons ne se sentirent
guère concernés.
Les promesses d'amélioration rapide
du niveau de vie n'ont pas été tenues.
A l'inverse,
le
gouvernement avait laissé les villages de volontaires
sans aucune aide technique et financière,
si bien que
quelques tentatives avortèrent faute de moyens ou d'en-
cadrement.
Ce phénomène d'incitation et de laisser tomber
reste caractéristique à l'échelle Continentale.
CRITIQUES DU SOCIALISME TANZANIEN
Sur le plan Social, au lieu d'éliminer dans les
zones rurales le parasitisme,
la politique du gouvernement
contribuait indirectement à l'encourager.
- Les investis-
sements massifs en capitaux dans les villages -
pilotes con-
duisaient à la création d'une classe de fermiers.(des koulaks)
plus ou moins exploiteurs et,
parallèlement contribuait à
la naissance d'un véritable prolétariat rural.
Factum que
Nyereré fut obligé de reconnaitre malgré son "Socialisme"
sans lutte de classes:
Nous étions en train d'assister au
développement d'un système de classes."(Réf."Socialism and
rural development.)
Les fermiers des villages communautaires avaient
tendance à augmenter la superficie de leurs exploitations
personnelles et à employer des ouvriers agricoles pour réali-
ser des bénéfices supplémentaires sur les cultures de marché
de Coton,
de café,
etc.
Le document le plus important pour la
1
~ chef de lrétat Tanzanien Julius Nyérér~, chantre du «Socialisme à l'Africaine», dit que
:usha1967 ni'a pas tenu ses promesses. L'objectif de l'auto - suffisance n'a pas été atteint.
lr ailleurs Arusha est en partie responsable de la grave crise économique traversée actuelle-
!nt par la Tanzanie - Retrocession de l'entreprise nationale de Sisal au secteur priYée.
;f Frat-mat!Quotidien Ivoirien N° 6185 du 24-05-85 p.31.

-,
:57 .-
compréhension de l'expérience en cours, débute par un
rappel des principes qui gouvernaient la Société afri-
caine depuis des temps immémoriaux, ces principes ne
sont autres que ceux de l'Ujamaa,
et l'un des objectifs
est de leur redonner vie dans les villages communautaires.
Ce document est la déclaration d'Aruscha dans "Socialis and
rural development" after Aruscha -
Avant toute analyse de ce document,
il est bon
de souligner que,
les méthodes d'élaboration des systèmes
de villages Settlement Schemes sont reprises une par une,
d'où par conséquent Ujamaa est le prolongement et non la
correction des erreurs commises. Le document d'Aruscha com-
mence par la Société traditionnelle africaine qui était
constituée d'unités familiales menant à une existence com-
munautaire.
Vie commune,
travail collectif,
partage des res-
sources en fonction du travail accompli(mais aussi en fonc-
tion des besoins), chacun et chaque chose s'y trouvaient à sa
place. Le mode de vie "Ujamaa'I se caractérisait par une soli-
darité profondément ressentie,
un respect mutuel,
un sens des
responsabilités familiales et sociales. Le travail était
considéré comme une obligation morale. En revanche,
les plus
déshérités ou ceux qui se trouvaient dans l'incapacité pro-
visoire de participer à l'oeuvre commune savaient pouvoir
compter sur les autres.
Ce n'est pas dire qu'une telle Société était égali-
taire,
mais les différences de fortunes ou de situations
sociales n'y apparaissaient jamais intolérables car elles
,
' R 1 ,
0
t
l '
t '
11
d
'
, ,
apres
ene
umon
a raIson essen le
e
e cet echec a ete l'absence d'études
:onomiques ~érieuses, l'insuffisance des efforts et l'eBcès de subventions. Faute d'un
'~h~us~asme\\ pol~t~que "à la chinoise", on a attiré les colons par une série davantages
JI etaIent rxageres, non pas en eux-m~mes, mais par rapport aux ressources actuelles du
~ys."(Réf D~et Socialisme p136 collections Esprit"Frontière ouverte" Ed du Seuil 1969

,;. :~::f:§;~~-'.;:t;V~~:i'/':".':' ,:"':::"_\\~:':~..";;'-:'!:~:;.\\ ':~' "'1'_.~:"'L.:;.:: ';:"'~'.•':_"::~:'" .:··..X:. ,:,,::::,.:,.-::':;;'J::t;.~". ':::":'~; ..:::_:~~"'!.t. :_':l;~~:~.:< ~ .~. ~'~.:.:--:_'.s. )7~-;:. L,__ ...
....... . -
~58 -
étaient les résultats des efforts personnels que certains
membres de la communauté n'hésitaient pas à entreprendre
en dehors de leur contribution à l'effort collectif. Les
terres n'y faisaient pas, en principe, l'objet d'une ap-
propriation privée (mais la déclaration d'Aruscha ne parle
pas de la non-mécanisation de ces terres).
L'un des reproches le plus souvent formulés
contre l'expérience des villages settlement schemes était
qu'il aurait fallu revenir aux conceptions anciennes,
les
seules qui soient susceptibles d'assurer un développement
harmonieux au bénéfice de tous et non de quelques-uns, les
seules qui correspondent à la mentalité africaine. Au lieu
d'encourager les masses à combattre sans violence toutes les
coutumes nuisibles ainsi que les aspects négatifs des cro-
yances et des traditions,
la T.A.N.U. va se cramponner aux
problèmes les plus subjectifs. Pourtant ces familles dont il
est question sont loin d'être les familles pré-coloniales si
elles ont été des unités sociales fondamentales(Unités de
production et de consommation) du fait de la dispersion
écologique, le bouleversement destructif de l'époque coloniale
a fait que ces familles en Afrique ne sont plus des univers
clos dont l'individu n'éprouverait aucun besoin de s'expatrier.
De ce bouleversement de l'époque coloniale, le retour aux
sources est une simple "Utopie"
D'après les dirigeants Tanzaniens la viabilité

",
1 t",
.,...~.•'-
;~
~,
~ r --
. -10-
Y ~" ".' ,
,. , .
. ~ ~ ',,=:'-'~'-~ _.... -.....-::,....~...-..........--,...:- •.:-;-~.-""",,:_- ...
o
O .
-- -'-'
." ~
.
.-
..
des villages Ujamaa dépend de l'adhésion spontanée des
paysans, qu'ils acceptent d'oeuvrer à long terme et aussi
fonctionner selon les normes de la démocratie.
une asso-
ciation de volontaires.
Le volontariat est une solution à court terme
et peut', ~tre dans l'immédiat un moyen de mobilisation
populaire, mais un tel effort ne pourra se poursuivre
longtemps. surtout à un rythme infernal.
La Spontanéité n'est pas un processus, mais un
moment de reflux o~ "hommes et femmes.
jeunes et vieux
dans l'enthousiasme s'engagent dans un véritable travail
forcé et se proclament esclaves de la Nation."(Franz Fa-
non. op. cité:
)
La dernière phase du SOcialisme Tanzanie est
la réalisation de l'unité africaine. Comment s'y prend t-il ?
tidée de la famille sociale ne peut pas plus longtemps
être confinée dans les limites de la tribu.
ni de la na-
tian d'ailleurs. car aucun socialiste africain -
tout
véritable qu'il soit -, ne peut regarder une ligne tracée
sur une carte et dire
"Les gens qui se trouvent de ce
côté de la ligne sont mes amis, mais ceux qui habitent par
hasard de l'autre côté n'ont aucun droit sur moi. Sur ce
continent tous les individus sont ses frères.
C'est dans
la lutte pour nous libérer de l'empire colonialiste que
nous avons pris conscience de notre besdin d'unité.
Il nous
est revenu à l'esprit que cette même manière de penser ~ui,

au temps des tribus, donnait à tous les individus la
Sécurité provenant du fait d'appartenir à une famille
largement étendue, devait être conservée au sein de la
Société plus large encore que la nation. Mais nous ne
devons pas nous arrêter là. Notre conception de la famil-
le à laquelle nous appartenons doit s'élargir encore
au-délà de la tribu, de la communauté, de la nation et
même du continent, pour embrasser la Société humaine
dans son ensemble. C'est là la seule conclusion logique
du socialisme vrai~
La réalisation de l'unité africaine d'après les
dirigeants Tanzaniens doit passer par les régions. Ce pana-
fricanisme est le fruit de la Conférence des peuples
d 'AccT~ Ghana) à laquelle participaient beaucoup de "chefs
d'Etat" Africains.
La Conférence avait lancé des plans de regrou-
pement régionaux qui devaient être les premières étapes
de la formation des Etats-Unis d'Afrique.
C'est là que l'O.U.R.
(organisation de l'Unité
Africaine) prit naissance sur des bases assez morbides.
Au bilan qui ne comporte que de sérieuses faiblesses,
les-
quelles constituent des entraves dans la lutte anti-impé-
rialiste, contre l'Apartheid, contre les crimes des coloni-
sateurs soutenus par l'O.T.A.N. auxquels s'ajoute le pil-
lage scandaleux des peuples et de leurs richesses. - le
bilan de ses activités
montre bien où elle en est.
~-...-.

_"61.
L'organisation de l'Urlité Africaine s'entend
comme un rassemblement des nations africaines, pourtant
elle n'est qu'un Syndicat de "forces" pour la stabilit~
des pouvoirs de chaque gouvernement, bien que dans la
constitution de l'O.lI.A. l'accent soit mis sur la non
ingérence des affaires intérieures des autres pays •.•
Nous soutenons fermement le principe de l'unité
africaine mais nous disons que ce principe doit se réaliser
~ l'·~chelle nationale et non à l'échelle régionale. Cette
unité préconisée ne doit pas être une question de sentiment,
mais une question de réalité, d'ordre politique et économique
(le développement est fonction de marché) une question qui,
de par sa nature est une nécessité, vue la bakanisation de
l'Afrique. La thèse de l'Unité pour l'Unité doit être mise
~ part, elle n'est ni réaliste ni solide parce qu'elle ne re-
pose pas sur des principes clairs, et même pas sur des inté-
rêts communs des Africains(Les exemples en sont nombreux:
Union Guinée - Ghana - Mali, qui a très peu duré malgré la
bonne volonté de KWAME NKRUMAH, l'unité entre la Libye et
l'Egypte, et tout récemment entre la Libye et la Tunisie qui
n'a ét~ qu'une simple déclaration.)
Cette Unit~ est une simple solidarité de races et
De couleurs,
la solidarité raciale peut tourner facilement
\\ .
h · ·
t
, .
P
au raClsme, au C aUVlnlsme e
au pan-negrlsme.
ourtant la
1ernière guerre mondiale et le Sionnisme actuel nous montrent

. .,:'l',.;:",.':.;:_J. •.. ~•• ".:"~:-'-.-".
::. ,--:;: ~ '-';.,
" ,
• _
•• _~.:.., :.. • ...J-'_
'.
_
~.~
_ .
~.L._.~}k•. ~ ..:0_ •••• '''~ L ••
-~ __ .
bien le caractère agressif que revêtent toujours des
th'ories fond'es sur la race, la couleur et la reli-
gion.(8ien que le cas Polonais soit excepté.
Par ailleurs, le problème se trouve mal posé
car la lutte ne se situe pas au niveau des races, mais au
niveau des classes entre les exploiteurs et les exploités.
La notion de couleur ne détermine pas l'appartenance de
l'individu, mais plutOt les biens matériels dont dispose
l'individu qui eux déterminent son appartenance. Malheureu-
sement la majeure partie de l'intelligentia africaine
confond races et classes et se comporte comme une néo-bour-
geoisie. Tout en se croyant championne du Panafricanisme.
Le panafricanisme seriit louable dans la mesure
où il signifierait une lutte conséquente contre le colonia-
lisme, le néo-colonialisme et l'impérialisme, et dans la me-
sure où il signifierait Unité africaine assise sur des prin-
cipes conformes aux différents peuples de l'Afrique. Dans le
cas contraire, toute idée de panafricanisme est "égale" au
racisme", au chauvinisme, à l'isolement.
LE SOCIALIS~E GUINEEN SELON SEKOU TOURE
La base du SOcialisme de Sékou Touré se présente
comme la négation de toute idéologie, et cela a pour cause
le Syndicalisme à travers lequel il a abordé la politique.
Dans son livre il dit que
"Si réellement le Socialisme a
pour fonction historique de créer les conditions d'un dévelop-

." ......
~.
: ..~...
pement social devant satisfaire pleinement les besoins
et les aspirations de l'homme et des peuples, peut-on
affirmer que la qualité sociale des conditions créees
compte moins que le conditionnement humain de la Société
par la doctrine ?
Le parti démocratique de Guinée se refuse, quant
à lui, à conditionner le peuple en fonction de telle ou
telle doctrine, par contre, il entend définir l'application
concrète du contenu de telle ou telle doctrine, selon les
intérêts présents et à venir du peuple.
"(Réf. Rev. Guinéenne, T.V.L, 1963, pp 598-599)
De là il apparait que l'important chez les SA
cialistes guinéens n'est pas la définition d'une ligne poli-
tique car "l'existence des besoins à satisfaire l'emporte
sur les raisons philosophiques gratuites ou de simple idéo-
logie."(op Cité+VI, p.176).
Nous pensons que, la non définition de la ligne
politique est plut6t liée à une stratégie politique et écono-
mique et non à la satisfaction des besoins immédiats de la
population.(d'après les satistiques non officielles il y
aurait 2 500 000 Guinéens à l'extérieur) donc ce refus doit
être considéré comme un moyen de ne pas mécontenter les par-
tenaires occidentaux qui sont allergiques aux différentes
terminologies socialistes.
Et cela peut se vérifier à travers la déclaration
qu'à faite S.Touré, à New-York Times-195S) "Non, la Guinée

~.'.
. '" ~. ~'..
.~
1·"'_64_
ne peut pas se permettre de disperser ses forces,
ses
énergies, ses volontés dans le dualisme politique.
D'ailleurs, il ne faudrait créer les conditions propres
à une opposition, aucun guinéen ne peut ~tre conserva-
teur, nous n'avons pas de bourgeoisie, pas de classes
sociales, pas de dualisme d'intér~ts. Chaque Guinéen est
un nationaliste convaincu qui a élevé la définition du
sens national aux limites de l'Afrique.(Réf.S.TOURE)
New-York Time - 1958.
D'autre part la thèse de dignité africaine est
tr~s chère au Président Guinéen - "L'Afrique ne peut accep-
ter, au détriment du respect de sa personnalité de sa civi-
lisation et de ses structures propres, de devenir un élé-
ment organique d'un système étatique ou idéologique quel
qu'il soit."(cité par R.DAUNAYERSKYA - Socialisme Africain
;. <"/~ / < Y e t
problèmes nègres - Présence Africaine N° 48 , 1 963
p.59)
Une prise de position politique ne conduit pas
forcément au sacrifice ultime. Seulement, nous constatons
que pour la sauvegarde de la personnalité africaine i l
faut une véritable indépendance - qui ne soit ni verbalisme,
ni excès de langage mais plutôt un sens de l'histoire pre-
nant en compte les réalités circonstantielles.
Les Soit-disant lignes de force du Socialisme Guinéen
Les lignes de force du Socialisme guinéen sont :
"Nous croyons écrit S.TOURE -, et c'est ici le lieu de l'affirmer
sans équivoque, à la Socialisation inévitable de la Société

..
'...... ~ .....:., .."::.•• '~'.
~ __
:-i.
-',
~. ,: ....
'
..... -. --.:
- 65 -
Universelle. Notre expérience constitue une tentative
nouvelle de développement Socialiste à partir des réa-
lités paysannes(op cit6 + VI, p.19). A propos des réali-
tés paysannes. la volonté de collectivisation et d'étati-
sation s'avère nécessaLre : "Notre régime es~ un régime
populaire, démocratique et progressiste. Il est animé par
une démocratie nationale au sein de laquelle tous les ci-
toyens et toutes les citoyennes de Guinée ont la possibi-
lité de militer en vue de la réalisation d'objectifs col-
lectifs déterminés.{op.cité, t.VI,pS80) voir aussi le ~
grès social, II édition, p.48S).
C)1I
Avec ces formula,ionShdevine le rôle qui incombe
à l'Etat Guinéen."Il faut s lbstituer à l'Etat - moyen d'au-
torité - l'Etat instrument te Souveraineté populaire. nous
entendons que la raison de l'Etat, l'intérêt de l'Etat.
soient de manière constante [jéterminés par les intérêts
du peuple de Guinée.
le véritable rôle de l'Etat n'est
autre, en réalité, que d'assuj~er les charges les obligations
et les services de l'ensemble social, selon les intérêts.les
besoins. les moyens,
les aspirations de cet ensemble cons ti-
tué par le peuple."{Ibid : Rév. Guinéenne, pp2D1-20S).
La collectivisation s'impose au niveau de l'Etat
Si nous voulons que l'Etat, instrument de développement éco-
nomique et social,
puisse jouer son rôle ~ar une redistribu-
tion réaliste et équitable de l'ensemble du revenu national"
(ibid, p.3D6)

~
r' -;
:4~',-i,·
· .. ~r·.,.-.:,"'.;.r.:~f!: '.:....~.~~~~:::'6. ',- .;
:',
_ 1~':'
-.:-
,.
~-;,.'
'.
\\


; ; ; ; _ ' :
_
' . . . . . : : : , ; ; : . . , : . . : : : : : : . . . . .. . . .
- : :
- ' - :
_ _ . : ...
'Mo
-1
••:.;_
"
66
Toute cette restructuration avait pour but
de donner à l'économie nationale un caractère local
parce que "le commerce d'état a été établi en Guinée
parce que les pays Socialistes venus à notre aide après
l'ind~pendance avait refusé de traiter avec d'autres
organismes que celui de l'Etat"(Réf. Horoya+Avril 1962)-
En effet le capital colonial contrÔlait toute
l'économie du pays à travers la SCOA(Société Commerciale
Occidentale Africaine), la CFA (Commerce français de l'A-
frique Occidentale), Chavanel et Cie.
Après l'indépendance, les experts de la mission
de la planification qui s'étaient rendus en Guinée avaient
obligé le gouvernement Guinéen à contrÔler le secteur com-
mercial par la création d'une banque nationale. Ils pen-
saient ainsi que son établissement favoriserait la diver-
sification des courants commerciaux et une indépendance
économique à l'égard du marché international. Les facteurs
qui ont entra1né l'étatisation du commerce étaient: Pre-
mièrement la contre-attaque de la menace du gouvernement
français qui voulait étrangler la nouvelle république. Deu-
xièment, les accords signés avec les pays socialistes né-
cessitaient la cré~tion d'entreprises mixtes(50ciétés mixtes
dont 50S du capital auraient dQ @tre detenus par la Guinée,
chargée elle-m@me du commerce avec ces pays).
Troisièment, la pression de la bourgeoisie locale

-:;.'
" • ..
',' ~ -.
. .• t~ -
.,•. , ....
'.~ .... ;,~ ~.~
.
--.-:: ....,~,
.~.""............~
,~.~.~.~ ~ .
67'-
'.
qui voulait disposer pour son seul profit du secteur
le plus rentable de l'économie.
Contre tous ces facteurs,
les éléments de gauche
faisaient pression sur SEKOU TOURE pour qu'il en finisse
avec l'impérialisme français.
C'est de cette p~ession que
sortirent différentes coopératives agricoles dans les ré-
gions de la Basse-Guinée.
Ces entreprises d'état ainsi créees auraient eu
pour objet de procurer aux collectivités productives de nou-
veaux instruments de production qui auraient accru leurs
capacités de production.
CRITIQUES DES COOPERATIVES
Cps coopératives furent des mines d'or pour les
dirigeants guinéens qui, du jour au lendemain devinrent
des businesmans. Certains responsables des coopératives
ont utilisé les machines mises à leur disposition, soit
pour agrandir les exploitations de quelques gros paysans
de la région,
soit pour se créer à eux-mêmes de grandes
exploitations où ils emploient de la main d'oeuvre sala-
riée. A la régionalisation des coopératives,
on s'est
empressé de les liquider afin de pouvoir s'emparer du maté-
riel et de renforcer l'équipement des exploitations privées
ainsi créees."
(T.N. DIALLO cité par J.SURET-Canale.La Républigue de Guinée
p201) Eds Sociales 1970)

68'
Le renforcement de la Stratification sociale
devenait de plus en plus fort. L'action sociale est ainsi
devenue une action anti-sociale, l'efficacit' d'une haute
morale collective manquait d'encadrement. Certaines coo-
p'ratives manquaient de machines agricoles lesquelles pas-
saient dans les cha~ps de bananerais des gouverneurs des
.
régions. De cette énonciation de la collectivité, le déc ou-
ragement total fut la réponse des paysans, car ils étaient
en dehors de toute prise de décision, la collectivisation
en Guinée à certains égards peut être considerée comme de
l'autocratie. La parole de l'élève était sans valeur pas
de place pour la co-production.
La décolonisation des mentalités fut l'un des
thèmes qui a eu un grand écho dans le Socialisme guinéen.
Elle fut d'abord une arme pour l'intégration dans la nouvel-
le Société qui a été purgée de ses"tares cililturelles"
(moyen de combat contre la chefferie qui représentait une
/
"f8position organisée." Ainsi "La moindre des manifestations
artisitiques correspond à une participation active à la vie
de notre peuple.n(Réf. Sékou Touré: Révolution guinéenne,
t.VIII p.175).
Par ailleurs cette reconversion des mentalités
bien que arme politique interne fut aussi utilisée par le
Gouvernement Guinéen comme moyen de restauration de la di-
gnité africaine.

·
: ' . . ~
• _,
."~_<' ~·" ••".v ........,.:.··•.' 1':7-''-'
.i~ -.......' :7-·:r;.~·:·i"'~'-::.".~~·
.:-'.,,",
'" ".. _._.._~~~_._::~~ __r~t~~:~ >-,~~, .:...~~(*l:~~:./..;.~~ ~ ~__~;_ . ~~.. ,..:.{..--._'-'w.
..
En effet Monsieur NABI YOULA ambassadeur de
Guinée en France(1960) disait ceci dans le cadre des
pourparlers Franco-GuinéE'ns"Nous ne refusons pas de né-
gocier avec Paris. Nous dl~mandons seulement à ce que les
pourparlers soient conduits sur un pied d'égalité et que
nous ayons en face de nous des interlocuteurs responsa-
bles.Nous en avons assez de ces émissaires officieux qui
viennent pour des "Sondages fl et dont nous n'entendons plus
jamais parler. Le jour où nous enverra enfin des chargés
de mission ayant plein pouvoir, 4n ministre par exemple,ou
enfin le jour où en voudra bien inviter Monsieur SEKOU TOU RE
à Paris pour vider le fond d~ contentieux, tout reviendra
possible •.• " (Réf Chaffard Geo"'ges, les carnets secrets de
la décolonisation cité par Sylvain Stibba Cama ra la Guinée
sans la France p.167 Cd presse~; de la Fondationnat des Scs
politiques).
En fait cette décolonisation est plus psychologique
que structurelle car elle fut basée sur la transformation
morale et culturelle, alors que le problème-clé se trouve
dans le changement des conditions matérielles. Cette recon-
version commença par lê réforme de l'enseignement et du
folklore.
Et cette réforme qui devait être un défi culturel
fut un moyen d'endoctrinement pour le P.O.G.
Sur le plan culturel, les anciens ballets de Kéita
Fodéba furent transformés en Ballet National en 1959. Ce
ballet national, bien que créé pour propager la culture africaine,

.~~ :_: .',
• ~_
,,,,/#'.:
• ~ .~. "' .....-·~.f.
. ....:~~;:""~ ......
~.
-- ....__.__ •.. ~ ........ - -_._-- .,.-. --. _..:-4....~._._:_-:::..._:.:::.::.J-:
~.~..... - _..
,.~
-.:..-.. ........:.-.--...._ ....::.,.._:
-~-~ .. _~ ...
T' •
_70 •
et aussi ~tre le porte parole de la nouvelle situation
socio-politique et culturelle, se transforma en une
sorte de gagne devises faisant du tourisme dans diffé-
rents pays développés.
LE SOCIALISME tUINEEN FACE AU MARXISME
La politique humaniste dans le Socialisme africain
est un point commun à tous les leaders africains, pour eux,
le marxisme a sacrifié l'homme pour la société, d'où l'hom-
me n'est qu'un instrument et non une fin en soi. Donc pour
les Socialistes Africains il faut rehabiliter l'homme pour
qu'il tire profit de ses capacités et aptitudes. Cette reha-
bilitation de l'homme est définie ainsi dans le tome VI de
la Rev.guinéenne,
pages 494-595."11 est une qu~te pour la
dignité et le bonheur de tout homme, quel qu'il soit, d'où
qu'il vienne.
Pour nous, dirigeants et militants du PDG, il
n'y a pas d'autres objectifs à choisir que ceux qui con-
firment et consolident le contenu humain de notre Société,
et il n'y a pas d'autres moyens que ceux dont l'utilisation
n'ampute rien des immenses possibilités créatrices et des
facultés d'élévation culturelles et morales, de développe-
ment économique et Social de l'homme dont le bonheur,basé
sur un parfait équilibre de son être et de la Société dont
il fait partie, demeure la fin assignée à toutes nos activités,
et cela dans tous les domaines"

71 }~
Derrière cette prise de position c'est aussi
un moyen d'affirmer que le PDG se veut neutre+"Le PDG
(Parti démocratique de Guinée)
se refuse quant à lui,
à
conditionner le peuple en fonction de telle ou telle doc-
trine,
par contre,
il entend définir l'application con-
crète du contenu de telle ou telle doctrine selon les in-
térêts présents et à venir du peuple.( . . . ) notre état ne
veut entretenir aucune confusion dans ses rapports avec
les autres Etats,
il n'ambitionne ni de s'aligner aveu-
glément sur tel ou tel bloc,
ni d'imposer sa volonté à
telle nation du monde"(Réf.Horoya,
28 Décembre 1962).
Ce reproche à l'égard du marxisme découle de
certaines pratiques politiques dans les pays de l'EST et
aussi de certaines positions de la philosophie "humaniste."
Pour mieux éclairŒir ce débat nous pensons qu'il serait
mieux de
jeter un regard sur la conception marxiste de
l'homme à travers les différentes oeuvres de Marx et Engels.
LE MARXISME ET L'HOMME
La première oeuvre dans laquelle la conception
marxiste de l'homme fut traitée sont ]es manuscrits écono-
miques édités en 1944.
Les manuscrits économiques de 1844
représentp.nt une pré-révolution pourla
philosophie marxiste,
un dépassement par rapport aux articles du
journal de la
Rhénanie"Rheiniscke Zeitung "(La liberté de presse,
de mai
1942) et également un dépassement par rapport aux articles
des annales franco-allemandes"deutch.Franzosich yar
b.Jcher"
Nous tenon~ à souligner que Mr SEKOU TOLiRE se garde bien d'appliquer ses principes
dans ses r~lations avec les Etats voisins.exp parlant de la Côte d'Ivoire, S.TOURE
dit ~AInsi,1 camarades, l'impérialisme es~ toujours en guerre contre nous, nous menons
la meme gulrre contre Senghor et Houphouet, les trai~s à l'Afrique et agents rampants
je l'impérirlisme.(Réf.Horoya,2033,14 SEPT.1973).
Siaka Steve,ns, au Sierra-Léone, lui doit en partie son maintien au pouvoir, du moins
sur la période 1971-1973.
1

et non une étape décisive dans la formation de la théorie
marxiste,
comme le dit Garaudy dans "Cahiers du Communiste,"
mai 1963,
P.12.
Oans ses travaux de 1840-1847,
Marx s'ouvre plutôt
tout l'horizon des conditions historiques et s'assure le
fondement humain,
général,
sans quoi toute l'explication
des rapports économiques resterait le simple travail d'un
économiste sagace.
"Qui n'a pas saisi ce courant intime où se fait le travail de
la pensée dans ces oeuvres de
jeunesse,
et qui traverse toute
l'oeuvre de Marx,
ne peut arriver à comprendre Marx.Les prin-
cipes de son analyse économique découlent directement de la
vraie réalité de l'homme.
"Réf. Louis Althuser" pour Marx",
p.48 Ed.Maspéro -
La seconde oeuvre à travers laquelle la probléma-
tique de l'homme est abordée est la critique du droit de Hegel
(1843)
collection 10-18,
dans laquelle Marx dit "être radical,
c'est prendre les choses par la racine,
or,
pour l'homme la ra-
cine c'est l'homme lui-même"-
Cette notion de l'homme ne doit pas être comprise
à travers les articles de Marx dans la "Rheinische Zeintung"
car ces articles passaient par une petite critique de l'Etat
pour atteindre son but.
Attaquer
la façade,
mais non le fond,
d'où,
par conséquent,
"La liberté constitue tellement l'essence
de l'homme que même ses adversaires la réalisent en combattant
la réalité.
La liberté a donc toujours existé,
tantôt comme
privilège particulier,
tantôt comme droit général . . .

l ' ~
.. -•.-
~.. ~._.~
~:...,.,..,. -:~--- .. -.- .:.":- ,
.
-73-
La philosophie considère, l'Etat comme le grand
organisme ou la liberté juridique, morale et politique doit
avoir sa réalisation et ou chaque citoyen n'obéit, en obéis-
sant aux lois de l'Etat, qu'aux lois naturelles de sa propre
raison, de la raison humaine."
D'o~ le devoir de la philosophie est "de demander
que l'Etat soit l'Etat de la nature humaine."(Voir ltJëLnische
Zeitung, n0179, l'article de la Ko~he Zeitung, 14 Juillet
,.
1842, cité aussi par l'Althuser dans son livre "Pour Marx"
Dans la critique du droit de Hegel,
le concept
de l'homme a fini avec la raison et la liberté, comme le
montraient les articles parce qu'il est "Gemeiwesen"(membre de
la Communauté)-
Communauté à travers laquelle l'homme se forme,
malheureusement cette formation restait un vain espoir quand
K.MARX voyait cet Etat-là comme moyen d'émancipation à travers
ses articles dans Rheinische Zeitung. Cet Etat lui-même n'était
pas émancipé. De sa déception, Marx en tira la conclusion
suivante
"L'Etat politique •.. renferme précisément dans ses
formes modernes les exigences de la raison. Il ne s'arrête pas
là, partout il suppose la raison réalisée, mais pattout il tombe
également dans la contradiction entre sa définition théorique
et ses hypothèses réelles."(Op.Cité,L.Althuser, p.231)-
La critique de l'Etat - crée une nouvelle action
politique qui est la critique sévère de l'Etat.5'adresser à
la simple raison de l'Etat disparait.La politique n'est plus

- ..
. " \\...
. ~.; .'.':':-. :-- .- -' ---
édification de la raison par la presse libre, mais nettoyage
pratique de son essence par l'homme.L'illusion tombe.L'Etat
comme la religion :sont bien l'homme, mais l'homme aliené,
l'homme, divisé entre le citoyen (Etat) et l'homme civil,
entre deux abstractions.
La conception de l'homme à travers les structures
sociales provient du fait que K.MARX a subi une certaine in-
fluence de la part des économistes classiques tel que : Say,
Skarbek, Smith et Ricardo. [lest dans ce sillage que Marx se
donna comme tâche d'écrire les manuscrits Economiques Politi-
ques. Ils sont d'une très grande importance dans la pensée
marxiste, car ils sont les premiers écrits ou Marx se proclame
communiste, abandonnant ainsi la nation jeune hégelienne de la
philosophie active, au profit de l'analyse de la condition
prolétarienne. Pourtant le texte reste assez feurbachien dans
l'on se
la mesure o~
refère à l'emploi du concept aliénation"nature
humaine" de Feuerbach dans les manuscrits économiques. Dans
l'essence du chr:;.stianisme" Wesen:
christentum:" 1841,
Feuerbach attaquait les fondements du christianisme ainsi
"Plus Dieu est subjectif et humain, plus l'homme se dessaisit
de sa subjectivité et de son humanité, parce que Dieu est
lui-même le soi àlif'né"(Enta~ssertes) de l'homme". Par contre
les mêmes termes app,3raissaient dans les manuscrits économi-
ques avec le même sens, seulement en changeant d'objet. Dieu
devient la propriété ~rivée, et l'athéisme se transforme en
un communisme abstrait qui envisage à peine le dépassement des

.~ ,'- ~
_ 7$.
aliénations.
le prolétariat est considér~ comme "classe alien6e"
parce que Marx fait son analyse sur une situation donn6e qui
est celle des ouvriers à l'6gard de leurs productions qui
leur sont étrangères.
"Nous sommes dans un fait 6conomique concret plus
l'ouvrier produit,
plus il devient pauvre, plus sa produc-
tion augmente en puissance et en volume,plus il devient mar-
chandise. La valeur du monde des hommes diminue en fonction
directe de la mise en valeur du monde des choses •••
Plus l'ouvrier produit, moins il a à consommer,
plus il crée des valeurs, plus il se déprecie et voit diminuer
sa dignit~, plus son produit a de forme,
plus l'ouvrier est
difforme: plus son objet est civilisé, plus l'ouvrier est bar-
bare : plus le travail est puissant, plus l'ouvrier est impuis-
sant ... "
"
Le travail produit des merveilles pour les riches,
mais il produit le dénuement pour l'ouvrier.
Il produit des pa-
,
.
lais, mais des taniÈres pour l,ouvr1er.
"
Il produit la beauté, mais l'étiolement pour
l'ouvrier .•• Il remplace le travail par des machines, mais il
rejette une partie des ouvriers dans un travail barbare et fait
de l'autre partie des machines."(Ré~ManuscritsEconomiques de
1844 - Editions Sociales Paris 1962, 57-59).
Pour Marx,
la base de cet abrutissement est le
processus d'aliénation du travail. Il est bien clair que cette

-76-
analyse possède la même structure que la critique du
Wesen des christentums de Feurbach.
De par ce constat nous pouvons nous rendre compte
que non seulement Marx n'emprunte pas les concepts de
Feurbach d'une façon isolée,
mais il les emprunte grosso
modo comme un tout.
Ce tout,
étant la problématique de
Feurbach,
reste le point essentiel de
l'influence de ce
dernier sur Marx.+
Marx souligne constamment le point commun des
deux genres d'aliénation:
"Il en va de même dans la reli-
gion,
plus l'homme met de choses en Dieu,
moins il en garde
en lui-même. L'ouvrier met sa vie dans l'objet,
mais alors
celle-ci ne lui appartient plus,
elle appartient à l'objet."
Ce parallélisme conduit le
jeune I~arx à avoir dans la pro-
priété privée non la base de l'aliénation,
mais sa consé-
quence.
Marx ne tombe pas dans le piège de considérer la
propriété privée comme une conséquence de l'aliénation.
En
analysant très bien ce concept,
il apparait que,
si la pro-
priété est la conséquence de l'aliénation religieuse"L'alié-
nation religieuse en tant que telle ne se passe que dans le
domaine de la conscience,
du fort intérieur de l'homme,
mais
l'aliénation économique est celle de la vie réelle,
son dépas-
sement a pour condition
la suppression de l'un et de l'autre
est bienl vrai que Feurbach a eu de l'influence sur Marx,
surtout à cause
l'essence du christianisme, bien que sa prise de position à propos d'une discussion
re Feurbach et D.F. Strauss où dans un article il écrivait une anedocte dans le nouveau
letin publ]scite de la philosophie allemande, Zurich et Winterthur, 1843, Herausgegeben
Arnaold RJge, ou il disait" der Feureurbach das purgatorium der Gegen wart" (La pré-
ce du feu-~uisseau dans le purgatoire). Marx possédait déjà l'athéisme et l'anti-chris-
nisme avant d'avoir pris connaissance de l'essence du christianisme de Feurbach, car
moment où Bruno Beuer s'attelait à son travail de dernière critique de la philosophie
Hegel, il ~'était fait seconder par Marx auquel il avait communiqué son athéisme.
deuxième pa~tie de cette critique, il l'a faite avec l'aide de Marx. Cette critique
sistait à 1efuser la philosophie de l'art de Hegel et surtout son romantisme.
LUKACS donne plus de précision là-dessus dans son livre : UTAMA
rxthoz, pp.1 221 -222 - Ed maqveto Budapest 1970)

-77-
aspects."(Manuscrit économiques p.88). Et c'est à partir
de ces propos que Marx quitte le cercle Feurbachien car
la critique Feurbachienne est inhérente à la philosophie
hégelienne -
La suppression de l'aliénation religieuse
engendrerait automatiquement la suppression de l'aliéna-
tion économique.
Aux yeux de Marx,
Feuerbach était sur la
terre hégelienne,
il en restait prisonnier bien qu'il en
fit la critique,
il ne faisait que retourner contre Hegel
les principes de Hegel(Réf.
Althusser,
pour Marx p.42)+
"La critique allemande n'a pas,
jusque dans
ses efforts les plus récents,
abandonné le terrain de la
philosophie,
bien loin d'examiner ses présuppositions phi-
losophiques de base,
toutes ces questions ont même poussé
sur le terrain d'un système philosophique déterminé:
Le
système hégelien,
ce n'est pas seulement dans ses réponses,
mais dans ses questions elles-mêmes qu'il y avait une mysti-
fication"
(K.Marx,
Idéologie Allemande Ed Soc)
Bien que les manuscrits économiques de 1844
marquent une étape importante dans le passage du vieux point
de vue humaniste spéculatif vers le nouveau point de vue
histotique,
économique et scientifique,
n'empêche qu'une
grande part de l'analyse a encore la tête en bas et doit
être remise sur pieds d'une façon matérialiste.
Ce redres-
sement se fait dans les thèses sur Feurbach et l'idéologie
Alleman~.Un redressement qui a suscité beaucoup de discussions
~Phorikmes de Feurbach n'ont qu'un tort à mes yeux: ils renvoient trop à la nature
3t trop peL à la politique" réf lettre de K.MARX a Ruge du 13 Mars 1843 Ed. Soc corres-
1
Jondance Mars-Engels.
:t Engels Motera plus tard: Ni de la nature réelle, ni de l'homme réel,
il ne saitl rien nous dire de précis. Or an ne passe de l'homme abstrait
je Feurbacr aux hommes réels vivants que si on les considère en action
jans l'histoire, et Feurbach s'y refusait ... " Réf Engels
~~~3ir9~gLrbaCh et la fin de la philosophie classigue Allemande, Ed Soc

:r .
_.
~ '""_;~~:"::~~~:.~,~." ....,':"
~ ..... ···... -~ ... ·,····-·,~::-;~~~,I··'
..:"'-'-'.-- '":':' .~.
;j ..\\~~,.... ::.-~;~--.~,.... ~;...~~.""..~ .
. '- ~ ..;'.. .'
-78-
sur le plan philosophique, économique, et social.
Dans la préface de 1888 au Ludwig Feurbach et la
fin de la philosophie classique allemande, Engels mont~e
sur
que les thèses/Feurbach sobt le premier texte marxiste
de Marx, acte de naissance véritable de la théorie propre-
ment marxiste de l'homme concret."Das menscliche Wesen ist
kein dem einzelnen individuum inuwohnendes abstraktum in
seiner Wirklichkeit ist es das ensemble der gesellschaf-
tlichen Verhiltinissé(L'essence humaine n'est pas une abs-
traction inhérente i
l'individu isolé dans sa réalité,
elle
est l'ensemble des rapports sociaux."Réf Marx-Engels, Werke,
Dietz verlag-Berlin 1962, tome III, p.6)
Ces données cond~isent à l'essence des hommes,
leur humanité historiquement concrète,
n'a pas sa base ni
son origine directement dans l'individualité humaine consi-
dérée en général, mais bien dans l'addition des forces,de
production, de capitaux, des formEs de relations sociales
que chaque individu et chaque génération trouvent comme des
donn~es existant8s.
La même analyse est faite ainsi dans l'idéologie
allemand'=!+
Et c'est là que prennent source les polémiques
comme quoi l'homme est sacrifié en faveur des rapports so-
ciaux.
ns sa let~re à Paul Ar~nenkov dans
laquelle il fait une critique du livre
Prudhon(~isère de la Philosophie) il dit que: "L'histoire sociale des hom-
s n'est j~mais que l'histoire de leur développement individuel, soit qu'ils
aient la\\conscience, soit qu'ils ne l'aient pas. Leurs rapports matériels
~ment la mase de tous leurs rapports. Ces rapports matériels ne sont que les
-mes néce~saires dans 18squelles leur activité matérielle et individuelle
réalise" voir correspondance.

.,
'\\~"":-'."~'--~7,:;r""lV-"';i;::-'l"'''::'z.;,··' -')(0'
.-

,.....:-~t> '.t"" ••
·~ -,"
.
.,
-
y . ,
...
.

~ '. ".' •• ' - ••:.
J
' .

- . .
:.
: : , "
" " - ;
...
-79-
L'idéologie Allemande peut ~tre considerée
comme une rupture,
(entre le jeune Marx et le Vieux Marx)
mais une rupture sans retour à l'humanisme spéculatif
philosophique. Cette rupture ne fait pas disparaitre les
hommes réels du terrain de la théorie,
bien au contraire,
elle sort l'homme de la transcendance(homme de l'au-delà)
pour l'introduire dans le temps et dans l'espace(Hic et
nunc) -
D'autre part,
l'idéologie Allemande est aussi
une continuation probante du fait que "L'histoire des forces
productives" est aussi "l'histoire du développement des for-
ces des individus eux-mêmes". Par ce simple fait que toute
génération postérieure trouve des forces productives ac-
quises par la génération antérieure qui serventà elles comme
matière première de nouvelles productions il se forme une con-
nexité dans l'histoire des hommes, il se forme une histoire
de l'humanité qui est d'autant plus l'histoire de l'histoire
de l'humanité que les forces productives des hommes -
et en conséquence leurs rapports sociaux ont grandi,consé-
quence nécessaire,
l'histoire sociale des hommes n'est jamais
que l'histoire de leur développement individuel, soit qu'ils
en aient conscience,
soit qu'ils ne l'aient pas. Leurs rap-
ports matériels forment la base de tous leurs rapports. Ces
rapports matÉriels ne sont que les forces nécessaires dans
lesquelles leur activité matérielle et individuelle,
se réalise.
Les hommes ne renoncent jamais à ce qu'ils ont gagné,
mais

-&0-
cela ne revient pas à dire qu'ils ne renoncent jamœis à
la forme sociale dans laquelle ils ont acquis certaines
forces productives, tout au contraire.
CON C LUS ION
Nous pensons qu'au vue de la prospection sommaire
des oeuvres citées,
le problème de refus de la conception
humaniste de Marx par les "tenants" du Socialisme africain
est beaucoup plus politique que philosophique. En effet,
les pays africains nouvellement indépendants ont une atta-
che historique avec les anciennes métropoles qui dans une
certaine mesure ont parai né leur accession à la souveraineté
internationale. Ce parai nage a été "assorti" de conditions
parmi lesquelles : le lien privilégié dans tous les domaines
avec le pays colonisateur faute de quoi on risque de voir
s'installer une révolution féelle désamorçant"l'épée de Da-
mocles".Ainsi la "faille profonde du marxisme désaliénant
l'homme pour mieux l'enkyster dans une matière mal définie,
le soustrayant au colonialisme pour mieux lui extraire tout
caractère national,
le sauvant de l'impérialisme économique
et de "l'économie de traité,
pour le noyer dans un néo-colo-
nialisme culturel"(Réf Senghor cité par L V THOMAS dans le
Socialisme et l'Afrique t.I p64 Ed livre africain Paris 1966)
Une autre source d'opposition est la conception
de l'Etat.
Car les leaders africains qu'ils soient socialistes
ou libéraux ont été fortement influencés par le jeu de la dé-
t ·
b
.
(
. d
t l on peut
.
mocra le
ourgeolse.
OCCl en a e :; ... : tout dlre sans remettre

-61-
en question l'état lui-m~me. Pour eux, les régimes
communistes restent avant tout "totalitaires." De
par ce constat,
les pays socialistes européens ont
trahi Marx, qui finissent par faire de l'état une
fin en soi au lieu d'~tre un moyen(Pourtant dans ~
manifeste du Parti communisme l'état est appelé à
disparaître) Il est aussi vrai que l'Afrique d'au-
jourd'hui s'éloigne de l'idéal démocratique occiden-
tale qui est considéré comme un gachis d'énergies au
développement. La réserve à l'égard de cette concep-
tion démocratique peut aussi être la peur de partager
le pouvoir entrainant une certaine rivalité ethnique
et tribale - chose contraire à la réalisation du parti-
état dominant.
Le fait de partir des rapports sociaux pour
cerner l'essence réelle de l'individu ne signifie nul-
lement l'épiphénoménisme pour qui l'homme n'est qu'un
reflet du groupe,
un rouage perdu dans l'organisation
d'ensemble."(Réf.
S.TDURE). Mais un rejet de la compré-
hension spéculative de l'essence humaine pour aller
vers le concret, que Louis Althusser exprime à sa fa-
çon" Franchissez la frontière,
et avancez dans la di-
rection société,
vous trouverez le réel(l'homme)"
Réf pour Marx,
p.255.
Enfin,
l'humanisme marxiste paraît être un
véritable humanisme dans la mesure,
où il est affirmé

~
~ ~..
.-
,~..
. ,.
-82-
que le"Socialisme,
ce n'est pas un régime politique et
social qui fera de chaque homme un ~ozart, mais un sys-
tème politique, économique qui créera l'ensemble des con~
ditions économiques,
politiques et culturelles pour que
chaque homme qui porte en lui le génie d'un ~ozart puis-
se le déployer pleinement."
(Réf.
Idéologie allemande
p.242.
LE PARTI UNIQUE CO~ME ~OYEN DE CONSOLIDATION
DU POUVOIR EN GUINEE
De façon génfrale,
un parti politique peut être'
défini comme un groupe social sollicitant le soutien de la
population en vue de l'exercice direct du pouvoir, et orga~
nisé dans le temps et l'espace de sorte qu'il dépasse l'i~~~'
fluence personnelle de ses dirigeants. Cette définition met
.
~
en relief trois éléments
le fondement du Parti,
son orga~
nisation et sa mission.
Cette définition conviendrait au P.D.G.(Parti·~ '.-
démocratique de Guinée~ ne serait-ce qu'à ses débuts.
En effet dès Octobre 1946, s'était constitué à
BAMAKO le R.D.A.(Rassemblement démocratique africain) qui'-·
se proposait de devenir un grand parti de masse anticolonfal,'
rejetant l'intégration dans les partis métropolitains, maii
acceptant l'alliance av=c ceux qui se plaçaient sur des ~o~iJ
tions résolument anticolonialistes.(Ce qui conduisit ses~t~--.
0~
.,
députés à l'apparentement communiste). YACINE DIALLO, qui-!·~ i
avait pourtant signé l'appel au Congrès de Bamako,
s'absti~nV

-83-
finalement d'y participer sur la pression du Ministère
de la France d'Outre-Mer,
violement hostile à cette
initiat~.
Toutefois,
la plupart des associations ethniques y
envoyèrent des représentants à la suite de ce Congrès de
BAMAKO il avait été recommandé de créer dans chaque terri-
toire un parti africain unique,
section territoriale du
R.D.A.
c'est amnsi que le vice-président du R.D.A Gabriel
d'Arboussier,
effectua une tournée en Guinée en Mai 1947
et crut avoir constitué une section territoriale du R.D.A.
Mais cette section n'eut
jamais aucune existence réelle et
sous la pression de l'administration,
les associations ethni-
ques repudièrent rapidement le R.D.A+ Seul un noyau de mili-
tants,
jeunes fonctionnaires et Syndicalistes,
pour la plu-
part formés dans les "groupes d'études communistes"(impli-
quant le danger de
téléguidage politique et d'erreurs
psychologiques).
très actifs dans les années 1944-1947,
demeura fidèle au R.D.A Cette section prend en 1948 le nom
de "Parti démocratique de Guinée -
RDA",
- Conséquences
répression et provocation administratives et policières,
que le désapparentement des élus R.D.A.
du groupe communiste
en 1951
n'interrompt pas.
Autour des années 1950, parallèlement aux profondes
transformations économiques et sociales qui se font
jour en
Guinée,
une polarisation politique nouvelle s'effectue.
~ 5ecti~~1 GU~n~enne du.R.D.A. était, à sa création en 1947, composée
un 7 Unl0n Federale trlbale et de comités électoraux réunissant.
'Un~on des Métis, l'Union du Mande pour les Malinkés de la Haute~Guinée
'Amlcale IGilbert Vieillard pour les peulhs du Fouta-Djallon
l'Union
'
our la Basse-Guinée pour les Soussous de la GI~inée Maritime:

.. -" :. y: -., ,-.
. . : ' : ...-",~'--
-
84 -
D'un c8t~, se constituent des partis"administra-
tifs",
prenant appui sur les associations ethniques, ayant
l'appui ou la tol~rance de l'administration, recrutant leurs
adh~rents parmi les "notables traditionnels ou modernes.
Ces partis demeurent des comit~s ~lectoraux,
actifs seulement à l'occasion des consultations ~lectorales,
d~pourvus d'organisation en profondeur.
Ils demeurent divi-
s~s par les oppositions ethniques et les rivalit~s électorales
et s'apparentent ou se rattachent aux divers partis de la ma-
jorité métropolitaine (Socialistes, radicaux,
indépendants
d'Outre-Mer plus ou moins liés au M.R.P. ou au R.P.F.
du
Général de Gaulle.
De l'autre côté,
le parti démocratique de Guinée
regroupe peu à peu, malgré la repression,
les forces popu-
laires et anti-coloniales.
Il ne dispose d'aucun deputé et
seuls deux conseillers territoriaux(le conseiller Amara Soumah,
de Conakry qui quitte le RDA peu après son ~lection - et le
conseiller CAMARA KAMAN, de ~acenta) se réclament de lui.
Régionalement, ses forces sont surtout concentrées dans la
capitale Conakry, en Guinée maritime, en région forestière,
Mais son appui dynamique est surtout constitué par les Syndi-
cats C.G.T., largement majoritaires malgré la concurrence
syndicale CFT C qui dispose de l'appui de l'Eglise catholique
et du M R P et de la bienveillance de l'administration. Leur
leader, le SecrétBire Général de l'Union territoriale des
Syndicats CGT, est un jeune militant, Sékou Touré, fondateur

-85-
des Syndicats des PTT et du Trésor,
fonctionnaire de
bonne heure révoqué.
Il deviendra rapidement aussi le
leader du PDG lorsque son premier Sécrétaire Général,
Mamadou MadeIra Keita+ aura été muté disciplinairement
au Soudan.
Autour, du noyau constitué par la classe ouvrière,
le R 0 A(POG) dispose de l'appui d'une large fraction de la
petite bourgeoisie urbaine et des fonctionnaires,
que la
crainte de la répression empêche cependant, en règle générale,
de proclamer trop ouvertement sa sympathie.
'Cette section du RDA malgré son allure politique
n'était qu'un rassemblement qui se proposait de lutter pour la
démocratie dans l'état colonial et pour "l'élévation du nivaau
de vie des populations exploitées par le colonialisme;
f'est ainsi qu'il lutta contre les abus du système
colonial,
notamment la discrimination raciale,
le régime de
l'indigénat,les mutations,
suspensions et licenciements ar-
bitraires de fonctionnaires.
Sékou Touré le dira plus tard
vingt ans après que "le nouveau rassemblement n'avait ni doc-
trine ni programme politique et s'était doté d'une tête auto-
cratique.
(malheureusement cette autocratie demeure l'une des
caractéristiques de ce parti) Réf Mythes et Réalités AEGF
(Association des Etudiants Guinéens en France section de la
F.E.A.N.F.) -
Au sein de ce parti, unique et dominant,
existent
des clans, celui de "gauche" moins bien défendu et mal organisé,
(en fait il s'agit des opportunistes) et celui de droite soute-
1
inistre de la Justice du Mali avant le coup d'Etat milItaire de 1968.

.' ~
........ _._. ; __.. _ ~,~",.. _ .. _........,_~., ..., • .--._. ·...... _r·· • ......... ;....
- .~..-.-.:.:.-....
,
-86-
nu et organisé par le Sécrétaire Général - S.Touré dont le
Chef de file est Ismaël TOuré demi-frère de Sékou Touré.
Une fois "l'indépendance acquise", le PDG se sclérosè,
se défait lentement pour ne devenir en fin de compte qu'un
ramassis de domaines tenus plus ou moins par les clans et
autres dignitaires du Parti en collaboration avec les pa-
trons locaux et des commerçants.
L'exemple de cela est l'intervention de
~agassouba ~ôrib~ au VIle Congrès du Parti Démocratique
guinéen(horoya du 24 AOUT 1967). "Ainsi pendant qu'il cou-
vrent et protègent de treffés commerçants, ils emp~chent
l'accès à la direction de bons nombres de nos comités de
base, d'honnêtes artisans, militants convaincus et fidèles.
Aucun membre des comités directeur ou des fédérations de
Conakry, par exemple, n'ignore la manière injuste de ré-
partition dans les comités des denrées alimentaires. Les
Stocks attribués aux Comités sont-ils toujours totalement
enlevés ? Où va le reste ?
"La plupart de nos manifestations populaires de
comité ou de quartier se passent sous la présidence de com-
merçants et de trafiquants notoires. Le militant pose-t-il
une Question pertinente pour étayer les arguments Qui ne l'ont
pas convaincu, il se fait aussitôt rabrouer et couvrir d'ana-"
thèmes par les responsables du comité, il passe alors pour un
anti-parti, pour un contre-révolutionnaire."

-87-
A partir de 1962-1963,
la politique gouverne-
mentale se vide progressivement de son contenu révolution-
naire.
Aux objectifs énoncés après l'indépendance,
se
substitue un souci unique:
Le maintien du pouvoir.
Pour ce maintien,
le Parti "démocratique" de Guinée se
sert de tout l'appareil répressif de l'Etat pour se ma-
nifester et se renforcer." Un quadrillage serré du pays
par l'armée et les forces de police,
une
justice au ser-
vice des dirigeants du PDG,
une administration forte-
ment centralisée à la dévolution du système,
tels sont
les principaux moyens d'action utilisés dans le cadre
de l'appareil d'Etat pour opprimer les masses"(ibid A E G F
Section de la Feanf)
LES FORCES DE SECURITE EN GUINEE
Les forces de Sécurité sont la principale arme
de défense du Parti Etat de Guinée.
Généralement comme
dans tous les pays elles sont utilisées pour le maintien
de l'ordre,
(repression) et c'est à ce titre qu'on lui
consacre une très grande part du budget national.
En 1959 d'après le rapport de l'AEGF op citée,
dans le budget national le budget de fonctionnement se présente
de la façon suivante :
Sur un total de
FRS CFA
. . . . . . . . . . . . . . . . 8 078
614 000
Intérieur et Sécurité 10~4% 755 500 000
Défense nationale
9,7% 702 000 noo
1 457 000 000
En 1960,
le budget de fonc
est de
:

-88-
fRS C.f.A.
B 225 760 000
Forces de securité •••••••••••••••••••••••• 1 776 100 000
(L(équipement est financé dans le cadre du Plan triennal)
En 1961, le budget de fonctionnement est de
B 745 000 000
Forces de Securité • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 2 000 000 000
En 1967, le budget de fonctionnement est de ••
20.700.000.000 sur un total de 41
400 000 000
-Défense
2 337 000 000
-lEbtérieur et Securité
1 094 000 000
3 431 000 000
Ces données se sont multipliées avec le temps-impopula-
rité du régime plus la phobie de complots pas toujours justifiée.
Les forces de sécurité sont: la gendarmerie et l'armée.
Ces forces sont grandement représentées dans la
capitale (Conakry) mais il n'emp~che que dans chaque région
administrative il y a une section ou une c~mpagne de gendarmerie.
Depuis 1965, la direction de la gendarmerie nationàle
a 'été rattachée directement à la présidence de la République.
L'armée est répartie sur tout le territoire national
en fonction du danger que peut représenter chaque région.
EFFECTIFS ET REPARTITION GEOGRAPHIQUE
Dans différents camps, l'armée comprenait, dans les
années 1967, plus de 7 800 hommes qui se répartissaient à travers
les différents camps.


~. -
.. J"._.'.-'
-89-
LES CA~PS MILITAIRES
.
Ils sont au nombre de quatre en Basse-Guinée
Le camp Alpha Yaya, situé en face de l'aéroport de Conakry,
qui est composé d'une prison de triage pour les tortures et
d'une prison souteraine qui s'ouvre vers la mer, du cOté op-
posé à la voie d'accis principale du camp 1 Le camp de la
Garde Républicaine(camp Boiro Mamadou ) situé à Camayenne -
Conakry, composé lui aussi d'une prison de triage, d'un bas
fond, et différentes cellules avec des noms: Campala, Tête
de mort, etc.
Le camp Almamy Samory, qui sert en même temps de ministère de
la défense, est le siège de l'état-major de l'armée guinéenne
et du tribunal secret ;
Le camp Kemé BOuréma, a 150 Kms de la capitale est située à
Kindia avec une prison de haute sécurité.
.
En moyenne Guinée
Le camp Elhadjy Omar
à une dizaine de
Kms de Labé, un camp·."..ae parachutistes à Dalaba, Le camp disci-
plinaire de koundara, près de Gaoual
En Haute GUinée : Le camp Soundiata Keita à Kankan, le camp-
de Kérouané
En Guinée Forestière : le camp de Foumbadou
près de Beyla,
Le camp de N'Zérekoré près de la frontière Ivoirienne.
Il s'y ajoute aujourd'hui une marine Côtière et un embr~on
d'armée de l'air - quatre migs Soviétiques.
Pour l'équipement et la formation de cette armée,
le gouvernement a fait appel au début au concours des pays

..........~ - 'i"- j:' .
'..... *.'"- •.•. _~........
-90-
Socialistes, puis en 1961 è celui des pays occidentaux,
principalement l'AllemRgne fédérale, avant le désaccord
de 1970 causé par l'agression Portugaise. D'après le do-
cument de l'A.E.G.f. "l'équipement est en général composé
d'armes Soviétiques: 38 000 armes individuelles, 600 f~
et mitrailleuses, une centaine de canons, 400 Véhicules
dont des blindés" - raison pour l'installation d'une mission
militaire soviétique à Conakry.
La répression qui a toujours caractérisé les armées
nationales n'a pas épargnée celle de la Guinée. En effet les
manifestations d'élèves et d'étudiants de 1961 et de 1967,
des femmes contre la police économique 1977, ont été sévère-
ment reprimées par ladite armée. La même armée fut utilisée
contre la Sierra-Léone et la cete d'Ivoire en 1966. Agent
politique pour le P.D.G., l'armée est mise sous contrele per-
manente depuis 1965 - apparition de comités avec supervisa-
tion par un
commissaire
politique du PDG au niveau de
chaque région. Tous ces camps comportent des prisons - Insti-
tutions les mieux équipées en matière de tortures pour "faire
"!~avcuer" les détenus politiques ;elles sont dotées d'instru-
ments "modernes" que les écoles et hepitaux ne possèdent pas.
POurtant, quel grand besoin', à la Gginée en équipements médi-
caux et scolaires(1)
Les équipements de tortures sont des appareils
branchés sur courant électrique et appliqués aux partis sen-
(1)
Il ~'y a pas à s'étonner de voir arriver dans les pays Socialistes
les malades"sérieux" appartenant à des familles de dignitaires guinéens.

...
~
- . '
-
.....
-..-'
'...
.;. --.:.'
~
. ,
,
>
,.:r~ .,__-....-__~ .. .;...... ·~.:..:,w~_ ...... _1 ~-
...
":"". -"
·..:J..:v' '. ~-.. _ '. ::< ...'::,:
~'.~""
.-. .... , ... ~. '.-
"'::.' '','',','.~' .~...~;.
-91-
sibles du corps, des chaises giflantes mues 6lectriquement,
des sièges actionnés electriquement qui pivotent à grande
vitesse et sur lesquels se trouvent, ligot6s, les prison-
niers. Les s6vices subis y sont nombreux : bastonnades,
séances d'insolation accompagnées d'insultes, longessmarches
pieds nus, privation de nourriture et de boisson, système de
relais pour les interrogations, confinement du détenu dans
une cellule souterrainne, etc.~~)
~autre part les familles des détenus ne sont pas
épargnées pour autant. Ainsi N'FA SIAKA TOURE, membre in-
fluent du haut commandement et bras droit de Sékou Touré,
n'hésite pas à faire du chantage auprès des campagnes des
détenus pour asseuvir son instinct sexuel."Siaka emprisonnait
n'importe qui et n'importe comment au camp Boiro. Aussi, quand
il torturait un époux, il allait voir l'épouse et lui pro-
mettait. que le mari serait liberé à la prochaine f~te nationale
(sic). C'est pourquoi le nombre exact des victimes de ces camps
sera difficile à établir."(Ref Veuve Touré née Kadiatou Oiallo
lettre dans la page des rubriques jeune Afrigue n01266 du
10 Avril 1985
p 63). Na~urellement, il ne se contente pas
de prendre les femmes, les voitures des prisonniers passent
dans ses mains, environ tous les mois.
Dans certains pays africains qui ont le goOt
du "miracle", la caractéristique fondamentale du développement
est la multiplication des infrastructures administratives -
(1) - Ceci se resume en un trinome sinistre
les camps,les faux aveux
et 1a torture.

... ',.. '.::'
: .. ;;,.--: •...:'
, , ' , ;.
'~'.,
-.
. ~,
-",
' ... "
-92-
En Guinée c'est la multiplication des infrastructures péni-
tenti~res entretenues par une jeunesse vouée ~ la aause du
Parti.
LA POLICE
Institution para militaire, qui a pour vocation de
maintenir la sécurité publique - Elle est aussi, un système
qui implique une réglementation préventive des libertés en vue
de prévenir leur exercice abusif.
Tous ces fondements qui régissent la police n'inté-
ressent aucunement les autorités guinéennes. Pour elles la poli-
ce est un instrument de cadrage effectif des activités de la po-
pulation. Dans les dernières années, les services de police ont
été considérablement développés en fonction de cet objectif.
EFFECTIF ET ORGANISATION
L'effectif se situait au début de l'indépendance
aux environs de 40.000 hommes, mais avec le "complot permanent"-
expression de Sékou Touré lui-même - il est passé de 50 000 à
60 000 hommes. A ceté des anciens auxiliaires de police formés
dans le cadre du système colonial et qui ont pris les places
vacantes laissées par les commissaires français, se trouve un
certain nombre d'éléments qui ont reçu leur formation à Prague
et en Allemagne Fédérale.
La police en Guinée est divisée en plusieurs caté-
gories
La police ordinaire, la police économique, les agents
civils et la police politique(1) formée de sondeurs d'opi~ions
et de délateurs.
(1 )
Le ~ouvernement guinéen entretient des "Va-nu-pieds" à l'extérieur
pou~
obtenir des renseignements, principalement en Cete d'Ivoire
aUS~négal. au Libéria et en France. Le rOle de ces agents est cel~i
de irovocateur dans les milieux guinéens résidant dans ces pays.

-93-
L'Allemagne Fédérale est le pays qui 8 assuré la
formation de la police guinéenne, surtout en ce qui concerne
les tortures et autres tourments pour arracher des aveux
aux simples prévenus ou aux inculpés.
"Un certain nombre d'inspecteurs ont été formés
è Prague, chaque région devait désigner quelqu'un à cet
effet en 1959.
La Guinée, par le canal de l'écolede police de
Kankan forme depuis un certain nombre d'années un grand con-
tingent de policiers qu'elle envoie parfois en stage de per-
fectionnement à l'étranger. En 1963, des propositions avaient
été faites à des étudiants guinéens en France pour subir une
formation par le F .B.I.A. americain"(Réf Bulletin d'informa-
tion A.E.G.F.)
L'ADMINISTRATION GENERALE
Une administration tellement centralisée que cela
permet, d'une façon systématique, l'encadrement ~e la popula-
tion sur toute l'étendue du territoire national.
a)
Les ministres délégués de l'Etat
Ils sont quatre et se répartissent de la façon
suivante •.1 en Basse-Guinée, a Kindia,
,
1
en Moyenne-Guinée a Labé,
,
1
en Haute-Guinée, a Kankan et
,
1
en Guinée Forestière, a N'zérékoré.

·.
.
..
. ......':..~.•. t .
~_.
~
-94-
Avant le VIlle congrès du P.O.G., les quatre sus-
nommés sont des membres du Bureau Politique. Les raisons de
cette institutionalisation sont les suivantes : - nécessaire
contentement de tous les membres du Bureau Politique pour
éviter la frustration à leur niveau. Aussi un moyen de les
éloigner de la capitale - lieu commun des affrontements pour
le pouvoir.
-Face aux gouverneurs des régions, mécontent~ de
leur maigre portion de 'pouvoir, et face aux secrétaire s
fédéraux qui se conduisent en petits rois locaux et entre les-
quels existent des jalousies de compétence et de prestence,
(~tre le preféré de Sékou Touré) il faut un superviseur de
haut niveau, ministre-délégué qui a pour rele d'informer quo-
tidiennement le Chef de l'état et en m~me temps faire intervenir
l'armée ou la police locale pour mater la population en cas de
besoin.
b)
LES GOUVERNEURS DE REGIONS
Les critères de nomination de ces gouverneurs ne sont
pas fonction de leurs capacités ou de leur conscience politique,
mais uniquement à cause de leur fidélité vis-à-vis du régime
en place. Caractéristique principale: benis "oui","oui" comme
Jeannot H1approbateur du cente'
populaire hongrois :
"Bologato Janes". Ces gouverneurs ont purement et simplement
pris la suite des commandants de cercles de l'époque coloniale.
Ils n'agissent pas selon l'esprit de responsabilité, de ri-
gueur, mais la jouissance, médiocrité, trafic et vol sont leur
devise. "Ils ne valent que par leur démagogie et par leur
empressement

-95-
à faire constamment acte d'allégeance à Sékou Touré"
_ Préoccupation majeure, c'est de se cramponner à
leur poste par tous les moyens. Pour ce faire, tous les
moyens sont bons: corruption à travers les articles occi-
dentaux achetés dans les pays limitrophes - Libéria et
Sierra-Léone - qutlls partagé"t- ,_. entre les dignltai-
res du régime, particulièrement à la première dame de
la république remerciement ascension probable.
C)
LA JUSTICE
Le tribunal qu'on appelle révolutionnaire a été
tout simplement créé pour les procès politiques inventés à
l'occasion des soit-disant "complots" qui ne sont que le
résultat de la lutte pour le pouvoir. C'est une mise en scène
qui ne sert qu'à donner une coloration populaire à une con-
damnation déjà acquise au niveau de la présidence. Les accu-
sés qui sont directement concernés n'ont rien à savoir et
ceux qui les accusent ne sont pas concernés. De là, il est
facile d'arrêter, Qui l'on veut, où l'on veut, car ceux qui
en sont chargés ont la "conscience tranquille" n'étant pas
eux les victimes. Aucun moyen de défense et aucune voie de
recours(1). On accable les personnes arr~tées de multiples
accusations et on les oblige par des tortures à faire des
aveux préparés à l'avance, et par la suite on leur annonce leur
condamnation à mort sans aucune explication. Les explications
sont fournies après leur mort dans le journal du Parti"Horoya"
et à la rad'io dite "Voix de la Révolution".
A ~'intérieur du pays la défense des prisonniers civils est assurée
P61 des avocats de circonstance : Techniciens, commis aux écritures.
In;;lénieurs.
\\

-96-
Ce genre de procès n'est caract6ristique qu'aux
r6gimes dictatoriaux et ne peut recevoir en aucune façon
une compr6hens!on de la part des hommes politiques wsérieux ft •
Dans un article publ!6 par France-Soir, le d6puté de la
Nièvre tient bien compte des difficultés du régime de ~r
Sékou Touré (difficultés dues en partie, d'après lui, au
boycottage de la France), il n'affirme pas moins : ft~ais un
procès tel que le plus récent, avec ses accusés absents,
son tribunal populaire et les exécutions sommaires qui l'ont
suivi, ne peut suppoœter aucune complaisance, fat-elle cel-
,v
le des souvenlnr. Comparant le proèès de Conakry à ceux or-
ganisés à Burgos, à Léningrad et à Yaoundé, l'ancien prési-
dent du groupe parlementaire U.O.S.R.-R.O ..A. conclut:
ftIl n' y a pas d'excuses à la .parodie
de justice"(1)
Les tribunaux populaires de quartier, quant à
eux, jouent le rOle de justice de paix et ne s'occupent que
des petites affaires(cornmérages : ft~amadi a fait la cour à
la femme de Siaka, etc .•• ft );
La juridiction comprend, elle, un tribunal de
première instance dans chaque arrondissement, une justice de
paix à compétence étendue dans chaque région administrative,
une cour d'assises à Conakry, un tribunal supérieur de cas-
sation (qui ne fonctionne jamais).
La justice administrative est représentée par un
tribunal administratif créé en 1964 à Conakry dont la compé-
tence générale consiste à règler tous les litiges où sont im-
pllqués des fonctionnaires dans l'exercice de leurs fonctions.
)
1

FRANCE-SOIR, 31 Janv1er 1971 article cité par Sylvain Soriba Camara
danslla ftGuinée sans la France" Ed Presses de la Fondation Nationale
des ScIences politiques 1976 P 210 1976
\\

-97-
LA JEUNESSE DU RASSE~BLEMENT DEMOCRATIqUE AFRICAIN(J.R.D.A.)
Généralement la formation donnée aux jeunes à pour
objectifs de les intégrer et surtout de les préparer pour
leur futur contribution au développement national. Par contre,
là ou il s'agit d'édifier une nation il est évident que le
besoin se fasse sentir pour l'utilisation rationnelle de toutes
les forces vives. C'est ainsi que "Grouper les jeunes pour une
tâche commune et cimenter ainsi leur solidarité n'est nulle
part aussi facile qu'en Afrique ou l'entreprise se rencontre
avec la tradition des fraternités d'Age." Dans le cortège des
nouveaux problèmes posés à la jeune République, celui des jeu-
nes s'annonçait au leader de la "Révolution" comme l'un des
plus importants, plus important dans la mesure où i~ pouvait
@tre utilisé dans un cadre général d'émancipation de changement
se mentalité à l'égard du développement économique et social.
D'où la plus grande considération est accordée à la jeunesse
tant dans les discours-programmes, que dans la quotidienneté
politique. En effet, la jeunesse représente une force qui est
à mesure de dynamiser une "révolution Socialiste", d'où la pré-
•pondérance de la place de choix qu'elle occupe dans les af-
faires du pays.
8ien que le parti avait l'ambition de tirer profit
de la disposition et surtout de la fougue de la jeunesse il
devait lui tracer une ligne de conduite afin d'éviter que des
organisations multiples qui en naltront soient épargnées de
sectarisme et de réformisme en marge de la Révolution nationale"-

--
- ...
-- -
--~_.-_.-
...~
,..:;-.--~
._---~ -~. :.-.
-98-
- la solution la plus facile et la plus efficace 'tait leur
absorption pure et simple dans une jeunesse unique, intégrée
organiquement et spirituellement dans le P.O.G. présentement,
le Parti est la plus grande formation politique des forces
dynamiques qui transforme et modèle la conscience de la jeu-
nesse guinéenne et en dirige les activités politiques, écooe-
miques et socio-culturelles. La compréhension exhaustive de
l'état actuel de cette jeunesse conduirait forcément aux ana-
lyses s~ivantes :
- Position de la jeunesse dans la vie politique quotidienne,
- Position démographique du problème,
- l'organisation structurelle du mouvement J.R.O.A.
- la milice
iontribution économique de la deunesse,
- activités culturelles
- réforme de l'enseignement
- conséquences d'un enseignement reformé
- conclusion
POSITION DE LA JEUNESSE DANS LA VIE POLITIQUE
=============================================
QUOTIDIENNE
-----------
Impliquée dans un projet global de mutation des
structures, ce mouvement fut créé pour endoctriner la génération
montante dans le sens de la politique du P.D.G.
D'ailleurs son statut l'indique - "L'école du parti
et la réserve de la milice populaire."
C'est dans ce cadre politico-culturel que l'idée
de révolution culturelle a mQri plue DU 1II01n. confu8llment en Guln'e

-99-
jusqu'~ ce qu'elle ait trouv' au gr' du temps, dans le
modèle chin~is quelques 'l'ments d'une m'thode d'action
psychologiqua. G6n6~alement dans la plupart des pays en
voie de d6veloppement, la "recherche d'une personnalit6
totale" et d'une authenticit6 psycho-sociale est de mise
et, le cas guin6en n'6chappe pas à cette conception poli-
tique et souleverait même un problème culturel analysable
sous quatre angles à savoir :
- Transformation par l'6ducation et l'alphabetisation
des structures cognitives de la population,
- Transformation des valeurs hiérarchiques et de besoins
touchées par l'ali6nation coloniale J
- Intégration des diff6rentes cultures et~iques dans
une culture nationale,
- Pr6domination de l'idéologie du développement socialiste.
Afin de lutter contre les chefferies traditionnelles
qui servaient le colonialisme, la stratégie politique nécessi-
taèt, au niveau psychologique, une action simultanée sur les
plans cognitif, affectif et conatif. La fraction Sociale la
mieux indiquée pour cette entreprise était la jeunesse è cause
de sa nature de génération montante, son appetit de savoir,
gage d'une rapide modification des structures mentales et sur-
tout son enthousiasme anti-conformisme orientable. Cependant
par qui lui proposerait une idéologie de transformation sociale,
et un quantum d'énergie apte à se libérer dans une action
d'animation culturelle.

-100-
Bien qu'elle soIt, logiquement, la fraction sociale
la mieux choisie pour une accélération quelconque du proces-
sus de changement, c'est-à-dire à bousculer l'histoire dune
société fermée pour la rendre ouverte "open", une soclété"lente"
en Société "rapide", elle ne réaliserait cette entreprise que
par une forte cohésion et, aussi une impulsion exogène, canali-
sant ses énergies vers des buts convergents ; Le parti Unique
(p 0 G ) au pouvoir, qui avait recruté ses militants les plus
ardents du combat d'indépendance parmi les jeunes, profita donc,
dès 1959, d'en faire son fer de lance avant garde militante.
Cette avant garde unifiée à la différence des mouvements de
jeunesse de type occidental la J.R.O.A. de Guinée ne forme pas,
à proprement parler, une classe d'age politique, en contradic-
tion avec le régime en place, et prenant à son compte des ten-
tatives de restructuration radicale. Elle fait chemin avec le
régime en place de par son action
lneent dBnB un vaste ensemble
qu' e Ile sert en tant qu' élément "dynami que. ": tn gdndrel le J. R.O.A. de
Cuin'e COMIIl8 celle de Cote d'Ivoire ft toujour8i(
_~
été au service du pouvoir en place.
Elle n'a jamais été
autonome mais, plutôt une catégorie d'âge à forte communauté
idéologique au service de l'appareil politique.
Contrairement au mouvement de jeunesse de type
occidental qui fait son entrée dans le jeu politique par le
biais de sa personnalité. Celui de Guinée ne peut jouer le
rOle politique qu'étant une composante du grand ensemble poli-
tique.

101
C'est en devenant membre patent6 de cet ensemble
politique qu'elle peut entrer en concurrence Bvec d'autres
groupes formels ou informels ou s'allier à eux dans la pour-
suite de buts communs.
A priori sa position initiale est p6riph6rique
par rapport à celle des fractions sociales ayant des pouvoirs
politiques et 6conomiques(bourgeoisie bureaucratique, bourgeoi-
sie compradore, travailleurs urbàins, artisans, agriculteurs
etc).
La fonction de la jeunesse comme celle des femmes
organisées est d'amplifiée les idéaux du parti et surout de
neutraliser les différentes fractions concurentes.
Pour ne pas ~tre debordé par les autres organisa-
tions politiques et, aussi pour soutenir l'unité et le dynamis-
me national, le Parti s'est cherché des adeptes issus de toutes
èes couches sociales et de toutes les ethnies, mais il a su
aussi, en s'alliant les femmes et les jeunes, se fonder sur
des groupes dont la pureté idéologique est garantie par leur
impossibilité dans la conjoncture, d'acquérir une puissance
économique qui risquerait de corrompre l'exercice du politique
par des intér~ts sordides, comme cela se passe au niveau de
la bourgeoisie bureaucratique et commerçante dont l'une trouve
en l'autre sa clientèle et réciproquement.
Certes il est vrail
que la politisation de la jeunesse
est dictée par un dessein du pouvoir politique en place, mais
il est aussi à retenir que la politique post coloniale a pu
~tre façonnée plus ou moins consciemment par le tissu social

-102-
du pays, tout en observant qu'une physonomie d6mographique
assez semblable à celle de beaucoup de pays du tiers monde
ne joue que comme condition peut @tre n6cessaire, mais pas
assez suffisante pour en faire une force d'appoint politique.
LA
PR08LE~ATIQUE DE~OGRAPHIQUE
Le problème de la démmgraphie n'est pas propre
seulement au tiers monde mais est plutet un phénomène mondial,
.
plus accentué dans les pays sous-développ6s aux pyramides d'age
a base très 6talée. Toutefois, pour autant qu'il entraine une
prise de conscience, pèse sur le sérieux politique national,
il convient de le signaler et d'observer, d'une part, la struc-
ture de la population(pourcentage des jeunes, taux d'accroisse-
ment) ; d'autre part, ses mouvements migratoires qui affectent
surtout les classes entre quinze et vingt cinq ans) -
Le "communautarisme" de l'Afrique ne l'a pas seule-
ment introduite au socialisme, il lui a appris la loi du nom-
bre et la force de l'unité, ce dont les jeunes ont particulière-
ment, conscience. IL y a une dizaine d'années déjà les jeunes
représentaient plus de la moitié de la population 67 ~ en 1955
et 69,2~ en 1964.
L'analyse de l'état de la population, effectuée
d'après les données fournies parttois sondages démographiques
de 1955, 1958 et 1960, révèle les caractéristiques structurales
typiques d'une population jeune. La pyramide des ages de Cona-
kry montre que les groupes jeunes y sont plus nombreux que

- 103 -
dans les autres r~ions de la GW.née. En 1955, sur 100 habitants de CCNAKRY, 00
en carptait 42 au dessous de quinze ans, en 1958, 37 (l' imigratial des trava:U1eurf
entrainan',': une baisse de {X)l.lI'Œl'ltage) en 1960, 40, 18. A cette date, la pop.ùatial
jeune de la capitale se répartlssait en pourcentage par sexe et groupe d'âge de la
faÇCl1 suivante :
-
S
E
X E
------
..
---
GJ:'alpe d'âge
MascUlin
Faninin
Ensenble
-
o à 6 ans
11, 10
~1Sans
8, 09
16 à 20 ans
5, 78
J
.'
- - - - -
En nous référant au tableau ci-dessus nous constatons "qu'il Y a 52,35 %
de noms de vingt ans. Le déficit de la classe des sept-quinze ans, et tout spé-
ciale des anze-quinze ans, e"explique par le récent accroissaœnt de la ville
avec des jsmes ménages émigrés. Beau:oup de femnes O1t des enfants non scolari-
sables, ce qui s'observe dans la catégorie des n'Oins de six ans. "Réf. Claude
Rivi~ Mutations sociales en Guinée Ed M. Rivière 1971.
La population guinéenne évalué en Février 1964, par P. M1\\ES, expert
de l'lNE3:0, évaluait en 1972 à 1 700000 ~es 'bab1.tants de moins de vingt ans sur w;
total de 3.360.000,
soit 53,4 t.
Cet te forte présence de la jeun esse
est exploitée par le parti Qui en
fait l'ail,.~ narchante de la révolution. Mais par ailleurs, cette situation
a eu p:>Ur conséquence l'exode rural qui , bien que freiné par des ratissages
5p)radiques et périodiques des chaœurssurtout à Cana.kl:y a tout de nêœ
survécu.
Cepenê'ant, la concentration urbaine des jeunes exilée ruraux, notivée
par le marasne de l'agriculture guinéenne.

-104-
ne (bas salaires~ sous-emploit,absence de produits de
consommation dans les boutiques), par le refus pour
les scolarisés de faire du travail de la terre leur
activité principale, par désir de s'émanciper du milieu
traditionnel, par l'aspiration au salariat, par le~ pres-
tige du secteur tertiaire et par l'attrait des loisirs,
n'est pas sans affecter grayement le marché de l'emploi
et sans créer des comportements inadaptés.
Les jeunes chomeurs survivent dans les villes
grAce à la vertu de l'hospitalité, du soutien des parents
et du prêt à fonds perdus.
Ce genre de comportement représentant une gène
politique fut contrebalancé par la puissance cohésive de la
J.R.D.A.
Jouant comme force centripède, contre le risque
de libéralisme et d'anarchie, après une indépendance qui
cherchai t sa voie, la jeunesse unique arrivait' contrGler 1.
majeure partie des éléments jeunes laissés à eux-m~mes, et
sinon à leur imposer sa mystique et sa doctrine, du moins
à endiguer relativement les flots de deviance sociale, issus
d'un exode rural qui, souvent, prépare une violence potentiel-
le. Si les objectifs du combat mené par le mouvement J.R.D.A.
visaient la promotion sociale, ils étaient avant tout à do-
minance politique. moyen utilisé pour "l'édification" du
pays.

-101-
Cette oeuvre ne pouvait se faire qu'avec un mini-
mum d'unith corollaire de l'unicith du parti politique dans
un pays shduit par un autre modèle diffhrent du capitalisme.
L'ORGANISATION DU ~OUVE~ENT
J.R.D.A.
L'histoire de l'organisation de la jeunesse est
indissociable de celle du parti P.D.G. Bien que les syndi-
cats de corporation de l'hpoque coloniale soient parvenus
à déclébher un mouvement populaire, leur efficacith semblait
restreinte au milieu urbain et ne touchaient guère les zones
rurales; or le ~arti sentait le besoin d'agrandir sa clien-
tèle, c'est à dire avoir des appuis dans les milieux ruraux
et notamment parmi les in~atisfaits de leur sort qui pour-
raient cautionner un mouvement de masse. Or, de par leur htat
de sujétion à l'égard des hommes adultes, les jeunes et les
femmes pouvaient constituer des noyaux de ces organisations
nécessaires à la sutvie du Pertl.
Ainsi les cibles trouvées le parti s'atela à sa
tâche d'organisation de la jeunesse pour en faire des forces
de combat dans le cadre et sous la surveillance du parti.
De par ce constat nous pouvons déduire que :
1) La jeunesse R.D.A. n'est pas le fruit d'une spontanéité
politique mais plutOt une création du Parti.
2) Sa fonction fondamentale est de servir de courroie de
transmission entre les institutions nouvelles de la jeune
République.

-106-
3)
Sa création devrait permettre l'élargissement du
champ idélogique d'un parti qu'elle contribue à
modeler par la puissance ~e sa participation.
De toute façon, la création de cette organisation
fut un élément de coordination dans la mesure où elle est
appelée à reguler les rapports pour assurer au niveau na-
tional le fonctionnement des différentes cellules et diffé-
rents départements.
CAUSE
DE
L'UNICITE
DU
~OUVE~ENT
===================================
D'~pr~s Sylvain Soriba Camara cité pa~ ~r Rivi~re
les mouvements de jeunesse du temps colonial (Scouts, éclai-
reurs,
jeunesses catholiques, organisation estudiantines,
organisations professionnelles ét~iques avaient souffert
d'apolitisme(interdiction d'activité politique) qui entraina
la création."Au début de 1959, lorsque le gouvernement a
décidé d'unifier la jeunesse, l'ensemble des mouvements qui
ne dépendaient pas du parti a fait une proposition au gouver-
nement, nous avons d i t :
au moment où nous voulons construire une nation, il est né-
cessaire que nous coordonnions nos activités, nous allons
donc créer une Union nationale, au sein de cette union,
chaque mouvement trouverait son unité organique dans l'accom-
plissement d'un programme établi en commun. En dehors de ce
programme commun, chacun pourrait avoir ses activités propres.
~ais le gouvernement n'a pas jugé utile de retenir cette propo-
sition, il a supprimé purement et simplement tous les mouvements

-107-
qui ne faisaient pas partie de la jeunesse R.D.A.
Il n'y a eu officiellement aucun texte supprimant les
mouvements de jeunesse, mais on a convoqué un congrès
national et on a décidé qu'à partir de ce jour toute la
jeunesse de la Guinée serait organisée autour du RDA"
Réf ~.Rivière op cit p.168.~
Unicité et politisation a outrance furent
justifiées dans le cadre des objectifs du Parti Unique
et ~ar une situation de fait :
- Dans l'optique de l'organisation d'une jeunesse vouée à
la nation et surtout au parti.
- Parti unique en place, ~uquel est reservé l'éducation
politique de la jeunesse avec la canalisation de son dyna-
misme dans le sens de ses objectifs.
Le Président Sékou Touré lors d'une réunion
de la jeunesse avançait l'argument suivant pour justifier
la création du J.R.D.A.
"Quels que fussent les liens de fraternité et
d'amitié liant les jeunes, l'identité de leur éducation et
de leur première ascension sociale,selon qu'ils étaient muswl-
mans, catholiques ou fétichistes, foula, malinké, ou guer1és,
ils étaient tenus de militer dans des associations différentes,
de plus, les divisions à caractère ethnique et religieux se
compliquaient d'un clivage entre jeunes des deux sexes."

-108-
Certes il existait des mouvements à base ethnique
mais nous pensons que le chef du PDG a évoqué cette colore-
tion ethnique avec une certaine dose de partialité.
En réalité il s'agissait de contradictions intern.s
inhérentasaux associations luttant pour la suprematie nationale.
Ces contradictions ont été denoncées par le Président Sékou au
cours de la même conférence citée ci-dessus."Nos jeunes, mainte-
nus dans l'insouciance et l'instabilité, subissaient les tristes
effets des luttes de clans et des oppositions de races animées
par les colonialistes les rapports de camaràderie se détério-
raient r~pidement à travers les conditions violentes qu'engen-
draient les tendances individualistes, l'orgueil et la fraternité
qui étaient les caractéristiques principales des innombrables
petites associations de jeunesse qui se créaient et se dissol-
vaient au gré de quelques meneurs de jeu, uniquement préoccupés
de soigner une renommée éphémère et dérisoire •.. la jeunesse
guinéenne était devenue paradoxalement un élément de division
et de régression qui portait indirectement atteinte à l'unité
populaire et à la mobilisation politique de la nation" Transpo-
sée au niveau des luttes politiques l'argumentation est la même
pour justifier et imposer le parti unique.
Peut-on faire croire que l'unicité du mouvement
J.R.D.A. et la politisation obligatoire de toute la jeunesse
soient suffisants à supprimer les vanités, les clivages et autres
artificialités des leaders potentiels fréquemment félicité$au gré

- 109 -
des circonstances par la direction du Parti ? 6i S[êNi et
des oppositions de races animées par les colonialistes,
les rapports de camaraderie se detérioraient rapidement à
travers les conditions violentes qu'engendraient les ten-
dances individualistes, l'orgueil et la fraternité qui étaient
les caractéristiques principales des innombrables petites asso-
ciations de jeunesse qui se créaient et se dissolvaient au gré
de quelques men~urs de jeu, uniquement préoccupés de soigner
une renommée éphémère et dérisoire ••• la jeunesse guinéenne
était devenue paradoxalement un élément de division et de ré-
gression qui portait indirectement atteinte à l'unité populaire
et à la mobilisation politique de la nation" Transposée au ni-
veau des luttes politiques l'argumentation est la même pour jus-
tifier et imposer le parti unique. Peut-on faire croire que l'u-
nicité du mouvement J.R.O.A. et la politisation obligatoire de
toute la jeunesse soient suffisants à supprimer les vanités,
les clivages et autres artificialités des leaders potentiels
fréquemment félicités au gré des circonstances par la direction
du Parti ?
Question de moyenne importance dans la mesure ou il
s'agit de dévouement et de la discipline de l'ensemble de la
.
jeunesse, autant de données qu'on ne saurait élucider qu'en
fonction de l'organisation et du fonctionnement du mouvement.
Etapes et structuration du mouvement
La création du mouvement date du 26 Mars 1959 à
Conakry, et c'est au cours d'un congrès constitutif du PDG

.. "..'-
-110-
que la décision fut prise pour faire du mouvement une section
du Parti.
Dès sa création, la J.R.D.A se présentait comme
un mouvement de rassemblement de toute la jeunesse Guinéenne
Agée de sept à vingt-cinq ans, au sein d'une même organisa-
tion dépendante idéologiquement c'est à dire politiquement
du PDG. Pour rendre effectif la présence de ce mouvement
le parti a pris soin de le représenter à tous les niveaux.
Ainsi, dans les comités de bases du Parti, des comités spé-
ciaux de jeunes se constituent, qui "élisent ft un bureau de
treize membres dont au moins cinq filles. Un garçon et une fil-
le de ce bureau siègent au comité local du Parti. Au niveau
supérieur des sections du Parti sont constitués des comités
régionaux de jeunes.
Dans les premières années la phase de mise sur pied
du mouvement à poser quelques difficultés. Problème d'intégra-
tion à cause du passé politique de certains éléments et, pour
parer à certains errements, le parti a dressé des gardes fous
barrant la route vers le mouvement toute personne âgée de plus
de vingt-cinq ans. Par ailleurs dans ce mouvement ne pouvait
militer les anciens "commandos" des pattis dissous. Tout cela
pour éviter une seconde conscience au sein du parti auquel
revient le jugement final de l'exercice de la citoyenneté.
Pendant les deux premières années, malgré un bon
départ de la société guinéenne et particulièrement des jeunes
par le biais des investissements humains non encadrés suffisam-

""_'-~:' '... :..•. -
;
'C:J~·~n·r"'.-:-4·-: :·-?::Y!;':-;-:.
'·, ...:C· .. ::~;.
" •.:' ;~-
•. ":.... ,...:.t.';_-;..~ ..._4..=f'':.''''-I;'_".:J,~ .~...._. ':;"->.::;~--.} - ~ -.:.:.:-;:
-:-'-:',"',,<_-'" .;.~' . .J:'::~"~'.:_:'.
-111-
ment, le mouvement commence à montrer des signes de fati-
gue par :
- manque d'autorité de la part de certains jeunes dirigeants
dans l'assurance de la discipline particulièrement en
Haute Guinée (Kankan-Kouroussa)
- le conflit de générations entre les jeunes et leurs
encadreurs.
Ces antinomies amenèrent le parti à revoir sa
stratégie d'encadrement. D'où la réforme dans la composition
du comité national de la J.R.D.A., organe de conception et
de décision, et la restructuration des organes dirigeants
sous la surveillance du Haut-Commissariat à la jeunesse et à
la culture qui surviennent après la conférence des cadres de
Kissidougou en novembre 1960. Sans oublier que d'autres con-
flits sont apparus depuis, entre Parti et administration,
B.P.N. et Haut-Commissariat, qui ont provoqué l'éloigeement
de Conakry de ~ouctar Oiallo, ancien haut-Commissaire à la
jeunesse.
Le mouvement est une fraction dynamique du parti
à tel enseigne que ses activités n'épargnent pas les villages.
En plus des comités de vill§ge il a des comités de quartier,
dirigés chacun par un bureau de dix membres. La coordination
des activités politiques de ces comités est faite par un comité,
de section de dix membres, ceux-ci supervisés par un comité
régional. Le conseil national de la J.R.O.A. qui coiffe l'en-
semble comprend quatre délégués par èomité régional et se réunit

-112-
une fois par an. Tous les deux ans se tient un congrès
national. Le conseil national, comme le congrès sont
placés sous l'autorité du Secrétaire d'Etat à la jeu-
nesse et à la culture, r~levant du Bureau Politique na-
tional du P.O.IL
La~R.O.A. se compose de deux grandes sections:
La section sportive, qui se subdivise en autant de fédéra-
tions qu'il y a de sports pratiqués sur le territoire de la
République(football, baskett, 80me, judo, natation, athlé-
tisme, cyclisme, volley-baIl, moto-baIl, ping-pong).
Quant à la section générale, elle comprend six
départements spécialisés :
a) le département de la jeunesse féminine,
b) le département de l'action '
.
economl.que et sociale,
c) le département Art et Culture,
d) le département scolaire et Universitaire,
e) le département des Pionniers,
c) le département de la milice populaire.
Il est à savoir qu'au niveau de chaque fédération
sportive et de chaque département spécialisé fonctionne une
commission nationale technique chargée de l'élaboration des
programmes et de l'organisation des stages de formation des
cadres. Le programme général, le 3e Congrès de la J.R.O.A.
tenu à Kankan du 24 au 27 Février 1964, le présentait ainsi
A)
Sur le plan politique
La contribution de la jeunesse dans la sécurité de l'état
et dans la défense de son économie.

-113-
L'6l6vetion constante de la "conscience r'volu-
tionnaire" des jeunes,
- Une parfaite mémorisation des principes directeurs de
l'idéologie de la révolution Guinéenne
- Le poursuite de l'action engagée pour un développement
constant des sports, des arts et de la culture en République
de Guinée.
S)
Sur le plan économique et social :
- Le développement de la conscience professionnelle et de la
mystique du travail bien fait (malgré la médiocrité générale
encouragée)
- La liquidation de l'analphabétisme(une fois plus cette noble
entreprise n'a pas atteint son objectif à cause de l'inorgani-
sation et d~ gaspillage de fond mis à la dispositon par l'UNESCO
les véhicules qui devaient servir de bibliothèques roulantes
ont été utilisés par les dignitaires du Parti a des fins com~
merciales).
- La création des chantiers de travail volontaire et des
fermes-écoles ;(Encore le m~me détournement de l'objectif ini-
tial vers l'enrichissement de la bourgeoisie bureaucrati~e ~
En vérité ce sont les directeurs d'écoles qui profitaient de
la vente de produits en guise de complément de salaire) _
- L'encouragement et le soutien du mouvement national des
pionniers qui a pour vocation la formation du citoyen complet
(finalité citée dans la Revue R.D.A., n011,
1966, pp42-43.

-114-
En r6sum6, l'action politique du mouvement est
orientée dans le sens souhaité du parti.
En plus de l'impression de la marque politique, le Parti
entend aussi faire participer ses membres à l'édification
du pays. Cette participation est conçue de la façon suivante:
1° "que les problèmes inhérents aux jeunes Guin6ens
puissent être résolus dans le milieu de la jeunesse par la
jeunesse elle-même -
2) "que l'action de la jeunesse guinéenne soit une action poliÈ-
tiquement déterminée par l'amélioration du développement de la
révolution.
"Depuis sa création, les congrès nationaux de la J.R.O.A. de mai
1962, de Février 1964 et de Septembre 1966 ont mis en évidence
la juttesse de cette position" estime Sékou Touré Réf l'àction
politique du P.O.G. tome 12, Conakry S.d. p64.
CONSTAT DE PARTICIPATION POLITIQUE
En effet la participation de la jeunesse à la politique
du parti ne peut se mesurer qu'à travers le degré d'engagement
et d'endoctrinement de la jeunesse, sa lutte entreprise sur le
plan ethico-social.
Traditionnellement les jeunes ne pouvaient entre-
prendre quoi que ce soit sans l'accord des anciens. Aujourd'hui
dans la Guinée nouvelle les jeunes avec la bénédiction du parti
sont les premiers à prendre des initiatives et à soutenir l'ef-
fort d"animation "révolutionnaire". Quand ils mili tent dans chacun

. '
:,.. ;'
:,~-,.:.:.,,,.I~'\\"""";""':..1G.'.L.\\;:'+..:13~~..~:,~;~;"-t~;'::~~~~.:~''::/'"i ;,,-,..,.:v..\\~~:~.:.-:~:.'~:';.~ ..::j.~ ·.~.ii1·~·.~':.+;·.-~t -.~.=-.~. ,~ ".: '.....' ....:::".~ ~~. " -:>. .:. ",
-115-
des 7200 comit6s de base, les jeunes R.D.A. ont conscience
de participer, d'une manière active et directive tant à
l"élaboration des programmes de r6novation nationale à la
diffusion des mots' d'ordre, qu'à leur exécution. Convaincus
que le bon droit appartient au seul Parti démocratique de
Guinée, ils se croient détenteurs de vérité absolue et se
posent en dénonciateurs de l'O.C.A.~. donneurs de leçons re-
volutionnaires à toute la jeunesse intellectuelle africaine
qualifiée par eux de bourgeoise ou de néo-colonisée à moins
qu'ils n'assurent leur soutien aux différentes grèves d'étu-
diants de Oakar(1966) ou d'Abidjan(1967-1970). Leurs télé gram-
~e6\\1e~accusation des puissances impérialistes américaines
lors de la guerre de six jours entre Israël et l'Egypte, et
surtout lorsque le Président de la Cete d'IV6I~e ~onsieur
HOUPHOUET BOIGNY avait fait arrêter une délégation guinéenne
en partance pour une session extraordinaire de l'ONU(26 Juin
1967) pour faire libérer ses compatriotes détenus dans les pri-
sons guinéennes particulièrement FRANCOIS KA~ANO, directeur
de la caisse de compensation et des prestations familiales,
accusé d'avoir participé à la préparation du complot novemtbre
1966. Et,libérer aussi le chalutier Ivoirien Kérisper arraisonné
dans les eaux territoriales guinéennes.
Cette même juenesse a encouragé le Président Sékou
Touré à une surenchere verbale pour se discu~per d'@tre le
laquais des Américains, et à l'expulsion du Peace Corps par

.~........~-~ '. ..'- .
-116-
mesure exemplaire, et pour n'être pas en reste en face
d'une population déchainée par des harangues.
La solidarité militante des jeunesses communistes
de l'U.R.S.S., de la R.D.A., de la République populaire de
Chine, de Cuba, de la Tchécoslovaquie, du Vietnam leur est
assurée. Ils échangent d'ailleurs avec celles-là des messa-
ges d'amitiés, des délégations, des équipes sportives, des
troupes artistiques et culturelles, des groupes d'étudiants
et de pionniers. Ainsi, en Juillet 1968, comptait-on 150 par-
ticipants guinéens au festival mondial de la jeunesse et des
étudiants, à Sofia(Réf Festival mondial Revue de la F.~.J.D.
(Fédération mondiale de la jeunesse démocratique) 8udapest 1968).
Les taches et les intéf'ts assignés à cette jeunesse
sont d'ordre politique, sociàl, et économ~~ee.
- Condamnation de l'agession imperialo-Sioniste, et des mer-
cenaires du F.N.L.G.{Front national de libération de la Guinée).
- option pour la monogamie et l'éradication de la polygamie
- suppression de la malle d'habits et des frais divers exigés
du prétendant par les parents de la jeune fille ;
interdiction des manifestations tapageuses et dépensières à
l'occasion, des cérémonies de mariage, baptême, funérailles,
circoncision, etc.
Les contrevenants seront sanctionnés par le retrait
de la carte du Parti et la confiscation des biens matériels

-111-
réunis è l'occasion de la cérémonie J
- condamnation de certaines modes féminines jugées indécentes
iaux ruineuses,port de perruques, pantalons, mini-jupes •••
- décision d'engagement général dans la révolution culturelle,
- participation aux campagnes agricoles et d'alphabétisation.
R.F. Revue R.D.A., n022, Ve Congrès de la J.R.D.A. voir aussi
le journal Horoya du 15 ~ai 1968.
~ais quel est l'engagement réel de la jeunesse
guinéenne 7 A part les étudiants à l'étsanger (ceux de l'Europe
occidentale) et du fait de la mobilisation politique, les in-
souciants engoués par le mode de vie européen n'existent qu'en
~ nombre infime
en Guinée et suelement dans la capitale. Les
autres, peu engagés, sont a leur champ ou a leur travail ur-
bain, mais la milice tracassière les harcele si fort que, tenus
d'assister aux réunions de quartier, le jeudi soir, ils cap-
tent même sans le vouloir les thèmes de l'idéologie et les
directives auxquelles ils sont contraints d'obéir. Quant aux
intellectuels, Ils ironisent ••• au fond d'eux-mêmes, ou se lais-
sent tirer l'oreille, victimes de la propagande et d'un manque
d'information objective, à moins que, comme 1 000 000 de Guinéens
(sur les 5 000 000 que la Guinée devrait compter), ils ne pas-
sent les frontières.
Ce qui ressort de cette participation, hypothequée
c'est le ralliement obligatoire de toutes les énergies des
jeunes générations au service de l'état à construire, par contre

-"s-
s'il vise l'efficacit~, met gravement en p~ril la libert~
même de la jeunesse. Rien d'aussi
dangereux qu'un jeune
idéologue sans "back ground" culturel ~ l~ t. En cela la jeu-
nesse Hitlerienne passe pour un exemple ~loquent Got mit uni.
Heureusement, entre la phase de l'id~e exprim~e et celle du
concret, très influenc~e par la traditionnelle incurie de
l'A f ri que 1
i l Y a un pa s .
Quelle est la finalité des multiples rassemblements
imposés par la direction incohérente du Parti ? Fréquemment à
un gaspillage des énergies et à un decouragement des militants.
N'entend on pas dire souvent dans les quartiers de Conakry
et de Kankan: il s'agit toujours des mêmes informations t
Les responsables ne sont pas dupes de cette situation.
"Les jeunes négligent de préparer la réunion, on dit simplement
aux gens : "Réunion mardi, "Réunion jeudi" ; tous les jeunes
doivent obligatoirement y assister. Parfois les dirigeants n'ont
même pas preparé l'ordre du jour, ils n'ont aucune proposition
à faire,
on se contente de parler d'un sujet n'ayant aucun rap-
port avec les préoccupations des jeuneS"tRf. S.TDURE, l'actioh
politique du PDG tome 8 pg~SaUf de rares exceptions, la jeunes-
se rurale réagit faiblement et manifeste une tendance assez na-
turelle à la dépolitisation, explicable par les dimensions ré-
duites des groupes, le manque d'encadrement, les occupations
agricoles avec leur cortège de difficultés, l'empreinte du tra-
ditionnel." De nombreux jeunes des villes et des campagnes

-119-
continuent i
vivre en marge de la jeunesse guin~enne, d'autres
encore se bornent à participer aux seules activités sportives
ou culturelles de la J.R.O.A. et se désintéressent des autres
manifestetions de masse : défilés, séances récréatives, réunions
politiques, investissements humains, formation prémilitaire,
etc." ibid p82.
Un tel comportement inadéquat pourrait ~tre attribua-
ble partiellement, comme nous l'avons dit, aux défauts de l'en-
cadrement, car le "meilleur" militant politique du village (est
désigné en fonction de sa fidélité) promu cadre JROA, manque
parfois de véritable compétence et de sens de l'organisation.
Néanmoins, à la pointe du combat révolutionnaire pour
la libération et l'émancipation du pays, la jeunesse n'a cessé
de fournir les responsables les plus dynamiques à la nation.
La reférence qui s'impose en ceci est l'âge moyen
des principaux cadres du PDG et des reponsables d'entreprises.
En 1962, à l'Assemblée nationale de Guinée, l'â§e moyen était
de trente-cinq ans, au gouvernement, à peine de Quarante ans,
à la direction des services centraux de la République, de tente-
cinq ans environ, parmi les responsables des comités de base,
de trente deux ans(S.Touré ibid p44). Le parti continue de con-
sidérer les jeunes activistes comme ses futurs fonctionnaires et
dirigeants. En 1965, huit élèves sortant de l'Ecole Supérieure
d'agriculture de Kindia et âgésdde vingt-trois ans étaient nom-
més commandants d'arrondissement. En 1978
le même phénomène
s'est reproduit et celie fois-ci il s'agissait de l'élévation

_120 _
au rang de ministre d'un sortant de l'~cole polytechnique
de Conakry ~onsieur Gal~ma Guilavogui.
Cette promotion fut justifi~e par: "D'aucuns
pourrait dire: mais les polytechniciens sont devenus une
caste, les voilà, parce que l'un d'eux est devenu ministre,
ils se rejouissent collectivement, nous disons (S.Touré) : oui,
il faut la caste de la révolution, la race de la révolution.
"fRéf. Horoya, 16 Sept.1973).
De tels exemples pot pour effet de susciter les am-
bitions de leurs jeunes camarades de promotion, d'exciter la
vanité des nouveaux promus dont la formation universitaire ne
peut remplacer leur inexpérience de la gestion administrative.
A cette mauvaise gestion administrative il faut ajouter un cer-
tain fanatisme comportemental utilisé à tort à l'endroit des
paysans paisibles. La formation idéologique est insuffisante
à assurer le maniement des hommes ayant pour la plus part des
cadres de référence coloniales parce qu'elle se réduit trop
souvent à la récitation de formules, à la transmission unila-
terale de mots d'ordre.
Elle constitue, malgré tout, le point de départ de
toutes action
politique, économique et sociale, dans le sens
du progrès national.
Se rendant compte de l'insuffisance de l'encadrement
politique. Le parti a pensé a une large diffusion des journaux
politiques avec séminaires à l'appui: - diffusion de la revue

_121 _
mensuelle R.D.A., des cahiers du militant, du journal
horoya, organes du Parti, dans tous les organismes
responsables de la J.R.D.A. ~ais ceux-ci négligent d'as-
surer leur abonnement.
- Des stages à l'école des cadres du Parti.Mais
ceux-ci négligent d'assurer leur abonnement.
_ Des stages à l'Ecole des cadres du Parti. Mais
les cours par correspondance n'ont pas fonctionné comme prévu
en 1965 et 196B.
Les activités de l'Ecole étaient presque nulle en 1967
D~s~séminaires de formation idéologique. Mais il n'est
que Conakry, N'Zérékoré et Beyla à en avoir bénéficié en 1965
et 1966.
Idrissa Traoré, Secrétaire général de la J.R.D.A.,
qui fait les réserves précédentes et constate un sémi-échec,
dans des termes suivants : Attitudes néo-bourgeoises(r~ves de
villas, de voitures, de costumes), la légéreté, la fantaisie et
l'inconscience dans le travail, l'esprit de lucie, la tendance
au plaisir malsain qui conduisent à l'indifférence politique et
part à contre-courant de l'action révolutionnaire(Béf Revue
B• 0 • A ., n 0 11 t P• 47 .)
Il n'est pas douteux que, dans les sociétés urbaines
surtout, se fasse ,our actuellement une baisse générale de la
moralité concomitante avec le pourrissement bourgeois du monde
adulte. Inconsciemment, le jeune tire des
leçons de l'ascension

sociale des incomp6tents pourvu qu'ils "fassent de la politique-,
de la considération accordée aux riches dont le vol et le trafit
constituent des facteurs de réussite, du prestige des politiciens
qui détiennent les clés de la décision et de la distribution.
E~' conséquence, il profite du désordre social qui envahit une
nation deculturée pour ~chapper lui-même à tout contrOle.Ainsi
remarque-t-on en 1968 l'accroissement de la prostitution dans
quelques bars de Conakry, l'augmentation de la consommation d'al-
cool parmi les jeunes des villes du Fouta(manière de soustraction
et de défoulement de l'ancienne et de la nouvelle organisation
sociale), la réapparition de la délinquance(vols non chatiés,
école buissonnière par manque de contrOle) après sa quasi-dispa-
rition durant cinq ou six ans, même dans les quartiers les plus
atteints avant 1958, de Coronthie à C6n~kry et de Kindia.
Ce phénomène de l'élasticité des meeurs est dO à
l'échec, et la non réalisation du projet de la Société nouvelle
et, a une destruction généralisée exprimée en des phénomènes nou-
veaux tels que le matérialisme jouisseur, la démagogie politique
~ tendant à flatter les jeunes, les'rêves historiques illusoires qui
les ont engagés dans une révolte collective qui n'a accoochée
de rien tant sur le plan social qu'économique.
Dans cette sphère de la dépravation de la moralité
Conakry n'a rien à envier à Abidjan et à Dakar. Et il serait
injuste de ne pas noter l'effet bienfaisant, quoique nécessaire-
ment limité, de la J.R.D.A sur le planethico-Social dans les

premières ann6es de l'ind6pendance lorsqu'elle engagea une
lutte active contre le vagabondage et la délinquance juve-
nile, contre l'alcoolisme, le parasitisme et la paresse.
Quant au parasitisme, il ne semble pas près de
disparaitre, è cause du manque de structures capables de re-
sorbée la masse de chomeurs. Les discours ne peuvent que cons-
tater un tel phénomène mais pas le guérir"Encore trop nombreux
sont les citoyens et citoyennes de ce pays qui n'apportent pas
quotidien~ement leur contribution è l'édification d'un pays
prospère, nombreux sont les citoyens qui passent encore la
moitié de leur temps assis sous les verandas, flânant sur les
places publiques, gaspillant leur temps, alors que journelle-
ment ils pourraient se liver à des activités créatrices"(Réf
~.TDuré. l'action politique du PDG+8 P~
La plupart des tâches de contrOle et de cOercition
contre les fléaux sociaux sont menées par la milice populaire
dont le rOle, très modeste durant huit ans, a complètement été
considéré lors du C.N.R. de Labé, du 28 au 39 Juillet 1966,
qui en a fait l'aile laborieuse, vigilante, combative de la jeu-
nesse.
LE ~OUVE~ENT NATIONAL DES PIONNIERS ET LA ~ILICE
En réalité ce n'est pas pour lutter seulement contre
les fléaux sociaux que la milice fut créee par le parti mais
pour contrebalancer le pouvoir de l'armée. Quatre évènements
ont principalement conditionné sa réorganisation.

/.
_124 _
1° La loi-cadre du B nov.mbre 1964, décident de cr6er un
parti d'élite plutôt que de masse.
20 Le complot d'octobre 1965 (il en est deux indépendants,
en réalité : celui des commerçants dirigé par Petit Touré;
celui de l'armée,·fomenté~par le ministre fOOEBA KEITA~
et etouffé au su du premier), qui faisait craindre, comme
dans la plupart des pays africains, un coup d'Etat des chefs
militaires.
3° La destitution de N'KRUMAH, qui occasionna chez Sékou Touré,
profondément affecté, le 27 ~ars 1966, le premier discours
ou il fut question de.s tAches militaires de la milice.
4° L'exemple chinois des Gardes fouges, suivi attentivement,
depuis AoOt 1966, par quelques membres influents du P.O.G.
jusqu'au~ C.N.R. de Labé, le service de la milice populaire
avait pour but la rénovation du paysannat et le développe-
ment de l'économie rurale, la formation politique, militaire
et civique des jeunes des deux sexes de vingt à trente ans
(S.Touré + 12 pp 66-67) -
L'effectif de la milice n'était impressionnant que
dans les grands centres. Seulement, après le complot des mili-
taires en 1965, Sékou Touré disséquait le ministère des Armées
et confiait à trois instances différentes, dépendant toutes
direcèement de lui, le contrOle de la police, de la gendarmerie
et de l'armée.
Le parti se sentant mal affermi sur ses bases popu-
laires, Sékou Touré, conscient de la désaffection des masses,

-125-
estimait alors utile la création d'un relais organique
entre l'armée et le peuple, qui lui soit incondition-
nellement fidèle. La sécurité passait alors aux mains
des milices, ce qui ne serait pas sans créer des heurts
avec l'armée, la police, la gendarmerie et la garde répu-
blicaine. Et cette jeunesse armée, pepinière des futurs
cadres militaires aptes à remplacer ceux, de fidélité dou-
teuse, formés par l'armée du Colonisateur, devait entrai-
ner régulièrement dans les fédérations à une tache de sur-
veillance politique, éclairée par les directives de Straté-
gie d'un parti que l'ébranlement de son p~edestal rendait
anxieux et qui camouflait sa psychose de l'agression sous
des affirmations de production croissante et de p6rennité
d'un régime dit populaire.
Le rapport d'Ismaël TOuré au C.N.R. de juillet 1966
sur les milices populaires ne laisse aucun doute sur la perti-
nence de notre interpétation.
"Les milices populaires sont recrutés selon des
critères sévères de sélection parmi les cadres d~élite de la
J.R.D.A. Ayant donné la preuve de leur attachement au Parti.
C'est dire qu'on écartera systématiquement les jeunes gens
désoeuvrés et les faux chomeurs des villes. Par contre, aucune
discrimination ne sera faite sur la base du degré d'instruction.
gien au contraire, la milice doit réunir en son sein la véri-
table élite recrutée parmi les couches laborieuses authentique-
engagées dans la révolution(jeunes paysans, ouvriers, fonction-

.....~ ..
126 -
naires et universitaires).
L'Ige de recrutement des milices sera de vingt A
trente ans tableau d'effectifs des milices populaires:
CONAKRY
l
........... 2000
CONAKRY
II ••••••••••• 3000
KANKAN ••••••••••••••••
500
N'ZEREKoRE ••••••••••••
500
lABE
• . . . . . . . . . . . . . . . . •
500
KINDIA ................
500
Aut~ès fédérations ••.••
300
Total
7 300
La répartition BU niveau des arrondissements sera
assurée par les fédérations qui tiendront compte des néces-
sités de la défense de la révolution: Surveillance, des
frontières, des grandes réalisations économiques nationales,
sécurités, des villes, ports, aérodromes, banques, radiodif-
fusion, réservoirs de carburants et autres points de valeur
stratégique, etc, patrouilles de moralité publique dans les
villes, lutte contre les trafiquants, la prostitution et la
fraude économique. Les miliciens doivent subir un entraine-
ment militaire intensif, complet et continu. La discipline,
le comportement digne, le courage physique et moral, la dis-
crétion doivent constituer les qualités dominantes de la mi-
lice populaire.~éf Revue R.D.A." nOS avant 1966, pp130~131)
Pour rendre 3a milice opérationnelle, Sékou Touré

-127-
faisait appel, en septembre 1966, è des cubains dont l'effi-
~ cacité fut si contestée(légèreté vis à vis des moeurs' _ .
locales
sans oublier que la langue n'étant pas le moindre
handicap),(1) qu'après cinq mois d'essais, on dut les pla-
cer à l'école d'instructeurs guinéens de l'armée nationale.
En septembre 1967, soixante instructeurs formaient, au camp
Alpha Yaya, cinq cent cadres miliciens appelés à diriger
1ceu
que la population nomme les gardes bari.i~s. Pour mon-
trer leur maturité comme instrument d'auto-défense, ils agis-
sent sur les points stratégiques pendant des périodes de cri-
se. Exemple lors de la séquestration à Accra de la délégation
guinéenne de l'O.U.A., le 29 Octobre 1966, il a été fait
appel à la milice pour surveiller toutes les villas des res-
sortissants américains.
L'extraordinaire atmosphère de "patrie en danger"
les discours
attestèrent de la sensibilisation suraigu~ aux
sollicitations des thèmes de politique étrangère parmi la
jeunesse.
~ L'évènement fut l'occasion pour les milices, rece-
vant directement des ordres des fédérations politiques, de
mesurer leur surcroit de pùissance par rapport à l'armée et
à la gendarmerie, pour les étrangers enfermés chez eux, de
s'apercevoir que la rigueur de la surveillance dépendait
davantage du zèle et de la xenophobie( plus inculquée par des
slogans que naturelle) d'un responsable politique de quartier,
que de la conscience d'un peuple, en définitive bon enfant,
(1) Dans certainesrégions de la Guinée, les cubains ont laissé des enfants
difficilement intégrables dans les communautés locales.
1


,.' . "" , .. ' '!
- ". •
••
"
t;"•.~. --
;:
...~ 'I".... -!'~ r' -~"'"?"
.
... "
.
',.
-
. '
_
" . • • 1.
• • . .
.
L
- 128 -
sympathique, et reliant mal la th~orie imp~rialiste expos~e
par le parti avec telle brave dame souriante de l'A.I.D. ou
avec le beurre, le lait, le fromage, l"huile, la farine, le
coton ••• am~ricains•••. consommés ou utilisés dans l'ineons-
cience, comme des fruits normaux de l'arbre de l'ind~pendance."
Beaucoup de miliciens relâchèrent leur surveillance, trois
jours après, lorsqu'ils surent qu'ils ne p~rcevaient aucune
rémunération pour ce qu'ils estimaient être un travail.
"moins intensive son action de vigilance se poursuit cependant.
la milice peut jouer comme doublure des organismes de s~curité,
en concurrence avec l'armée et limitatrice de son pouvoir, et
comme garde prétorienne dont rien n'assure qu'elle en 'rempl ls-se·
58
toujours les fonctions, le moment venu, car le bravache pour-
rait bien fuir comme mouton de Panurge. Mais, psychologiquement,
dans la mesure où elle exerce ses pouvoirs sur la population,
par des moyens de coercition anti-démocratiques(entrée en grou-
pes dans les concessions pour forcer les gens à assister à une
réunion, à un défilé, dénonciation des apathiques ou des resis-
tants ••• ), elle dessert, même à un court terme, le régime, en
cristallisant l'opinion des adultes contre les jeunes violents,
insolents et impératifs, et en favorisant le mécontentement
contre les gouvernants tenus responsables des exactions com-
mises par les "têtes brûlées" du quartier organisées en milice"
\\réf C. Marcel Rivière mutations sociales en GUinée 0182 1971)
Du reste i l y une certaine confusion au niveau

.. i~ , : ," ',', ~ . . . .-.-.'"'::. .. .,~ '.'
"...._.,.c.:_.;":..""':.~-.;.- .;~._'.- 4.:~ _....- "
- 1'29 - -
de leur Statut, en ce sens que les désirs et besoins res-
sentis par les jeunes à leur bas niveau économique, sont
vécues comme tension, éventuellement déchargeables en ag're.s .
sivité. Dans les milices recrutées fréquemment, malgré les
souhaits des gouvernants, parmi les chOmeurs et le lumpen-
proletariat, les désirs et besoins, jouant un rele centri-
fuge par rapport à l'emprise familiale,
s'exaspèrent d'autant
que le besoin de subsistance et de logement ramène nécessai-
rement le jeune à sa famille et le contraint de vivre en un
champ de normes traditionnelles qu'il juge erodé, mais sur
lequel il fonde cependant ses attaches affectives les plus
solides. Pour le jeune travailleur émigr6, le cadre tradition-
nel remplit donc la fonction d'une structure d'accueil possible,
et la milice une fonction de réduction de son sentiment de mar-
ginalité. Dans le but de se protéger contre des modèles de con-
sommation souvent inacessibles, beaucoup de jeunes ont cherché
le refuge de la solidarité milicienne, ou le desir de puissance
sur les objets de consommation se sublime par l~exercice imagi-
naire de la puissance sur l'homme. Les descendants d'esclaves et
d'artisans, les fils de paysans pauvres trouvent dans les milices
l'occasion de s'introduire dans ce qui leur apparait comme un
circuit d'autorité, duquel ils se trouvaient jusqu'alors exclus
par leur condition.
Tout se passe comme si l'horizon vide de leur vie
quotidienne déclenchait, comme contre partie d'une frustration,
un formidable appel aux puissances de rOve, dans un monde distinct

.:....,."-:-~.~
;.,:....
- 130.-
de l'ordinaire et en plus grande agitation.
~ilcet effet, l'appareil vestimentaire para-militaire
concretise un processus de séparation, l'insertion dans un or-
gane de force et l'accès au statut du sujet institutionnel dans
la sphère du pouvoir.
En résumé les miliciens (les tontons macoutes) sont
les commandos qui sont recrutés dans le lumpen proletariat venu
des campagnes pour chercher de quoi manger. Sa situation amélio-
rée, le recruté est capable de faire n'importe quelle besogne
pour ne pas retourner dans sa campagne ou la famine fait ravage.
Au lieu de les instruire à des métiers divers, on se
contente de faire de ces miliciens des tueurs spécialisés.
Ils sont de véritables chiens de garde du régime,
tant à l'intérieur du pays qu'aux frontières. A l'intérieur, ils
sont prêts à toutes les éventualités. Aux frontières, ils dou-
blent les douaniers qui sont jugés sentimentaux et corrompus à
l'égard de ceux qui fuient le pays. Ils veillent surtout à évi-
ter toute entrée clandestine et font constamment des ravages
dans les villages frontaliers. Cette milice n'est pas infailli-
ble car lors de l'intervention portugaise en 1970 elle jeta
les armes et se refugia dans des maisons appartenant à ceux
considérés comme des "contre revolutionnaires". Cette milice
n'échappe tout de même pas au ~eyacoutisme malgré que ~r Claude
Rivière voit Rn elle ceci."L'observateur, même s'il tempère ses
assertions doit reconna1tre qu'en Guinée l'initiation militaire

• '
' ; " ,'. j'"
,.;.-......
\\~
.. -~',' ".
"
-':;.,. ,-- .~
;
--...
_.....
...
.
_ "4_'
__ •. _
J
:
_
• • __ •
. ; ' _ . : _ _

~
.~
~
~.
~
- 131 -
apprend, au moins à quelques miliciens, l'ordre et la disci-
pline, leur inculque un esprit patriotique, fait tomber les
préjugés segregatifs puisque des jeunes filles militent au
cOté des jeunes gens de toutes ethnies."CRéf mytations sociales
en Guinée p.183)
L'ACTION ECONO~IQUE DE LA JEUNESSE
Comment canaliser la pratique politique en activité
productive? Comment exploiter l'activisme juvenil à des fins
constructives? Quel fut le resultat de la coactivité-des jeunes
à l'intérieur de la J.R.O.A. ? La vie transitoire de quelques ins-
titutions répond à ces questions. Au sous-emploi des jeunes ruraux
et citadins, des remèdes tzemporaires ont été appliqués qui contti-
tuent ce qu'on peut appeler pompeusement le rOle économique de la
jeunesse. La plupart des pays savent que le profit matériel qu'une
nation peut tirer d'énergies juveniles n'est souvent pas très
grand. Un parti clairvoyant aurait pu faire l'économie d'~nttti~le
échec.
Les' tentatives principales d' ofganisation de travaux
productifSet collectifs ont avorté ou végètent de la même façon
que les travaux d'investissement humain pour l'ouverture des routes,
la construction des dispensaires, des maternités, des écoles et la
réalisation de champs collectifs, dont on ne parlait plus quatre
ans après l'indépendance.
Chacune de ces résurrections de l'investissement humain,
'sous la forme de chantiers de la Révolution, de collèges d'ensei-

~-"'. ,'.
_"~":. ~..'~' ';'\\ -,.. ....\\:r.
·
•.
'!.'"
• . ~:J .;~. J ~..,' "_ .1,\\.. ,<,
,~' __ ..
:,,'.- ....-.-:..t
~,."
....... -
,

'
. . . ~I
. _ - " _

, ' ,
. '. . .
,
• • •
- 132 -
gnement rural (C.E.R.), de brigades civiques, n'ont vécu
ou ne vivent que le temps bien juvénile d'un coup de boutoi••
Le décret n0416/PRG d'Avril 1964 créait les chan-
tiers de la Révolution. Lors des travaux agricoles d'hiverna-
ge, à Kissidougou, Labé, Pita, Beyla, Conakry, des brigades
d'amitiés ~e mettaient au travail. Le résultat, ~onsieur SEKOU
lOURE nous l'apprend: "Nous pouvons dire que l'expérience'
des chantiers n'a pas été satisfaisante.
En effet, l'intér~t suscité tant au niveau des
jeunes qu'au niveau des responsables n'a pas été soutenu et
constant. Dans certains chantiers, la vente des produits ré-
col tés n'a même pas pu couvrir le quart des dépenses engagées
pour leur fonctionnement.
Pour réussir, les chantiers auraient dQ bénéficier
d'un pré-~nvestissement destiné à l'entretien des brigadiers
et à la préparation des sols, surtout en période de démarrage.
On peut ajouter à cela l'insuffisance de l'encadrement et l'im-
patience des jeunes qu~ pensaient tiEer un pr~fit immédiat de
leur action et qui se sont découragés en raison des maigres
rendements du débutn\\ReYae R.D.A., n011 nov D.5Sd
Ces résultats étaient prévisibles dans la mesure
où c'est par ncoup de t~te révolutionnaire n qu'ont été conçus
ces chantiers: Sans préparation, insuffisance d'encadrement
et surtout manque de l'incitation primordiale au travail qu'est
le Salaire : Le Stimulant matétiel est toujours nécessaire

;"
"
": .. '
-~
/
- 193 -
quelque soit le dévouement révolutionnaire des ftengagés~
, .'
"f
Surtout quand il s'agi t des -j.eune~
qu'on laisse, pen-
dant six mois, ~ans rem~nération, dans l'attente d'une mai-
gre et hypothétique récolte. Deux mois après la mise en train,
plus de la moitié des jeunes avaient regagné leurs foyers et
leurs champs familiaux.
Ni les problèmes de l'emploi, ni celui
de la qualification n'étaient résolus, pas plus qu'ils ne
l'avaient été lors des projets de formation professionnelle de
1960 avortés par manque d'ouvriers qualifiés, d'instruments de
travail, d'individus bénévoles.
l:l'hrh.M1i l~entrepri.se' lOLlRE 8 couté chère à la Guinée il serai t di ff icile
d'établir un queloonque bilan du gachil Socio-économique et
Politique.
Or ces problèmes de qualification sous-tendent toute
politique économique scolaire.
Afin d'éviter la fuite des jeunes certifiés vers les
services tertiaires, de repousser le délai de leur entrée dans
une production industrielle incapable de leur assurer immédiate-
ment des emplois, et afin de leur offrir des éléments de fixa-
tion à la campagne, il était urgent, en 1966, de créer des éta-
blissements scolaires adaptés aux exigences de la vie rurale et
capables d'absorber une partie des 8D~ d'élèves qui ne pouvaient
suivre les cours des collèges d'enseignement général préparant
au brevet du Second cycle puis au baccalauréat. Ces collèges
d'enseignement rural se donnaient pour but avoué d'apporter un

~
- ,
' .
•• •
_o
'1
. . . . ' .
. . , '
. '

' . "
; : "
,~'w-/'_' ' •.
W''':,- •• '

.,
.;'
'.
~.

. . . _ .
_.~" _ ...... , •• ,
_ . " _ '
~ .. "--.
_ _ ,_• .:."'"._....

_
" 0 0 " ' _
.. __.~~,,-..>_._'l.-._.. _._--=-...
-
.. • .... 0
.~•• ;
. . . . . . . _ .
~.-
- 134 1.
complhment de savoir, en m@ma temps qu'une qualification.
Plus prhcisément :
d'aSSDDsr à la jeunesse une formation professionnelle
tournée vers les activiths agricoles et artisanales;
d'accroitre la production nationale et le taux d'efficacité
civique
d'introduire la révolution technique et le progrès à la
campagne, en participant à tous les travaux de modernisation
rurale
d'enseigne. la nécessité du travail, l'efficacité du labeur
en commun, les méthodes d'entraide.
\\
Conçus pour lutter contre l'anémie des campagnes, les
C.E.R. sont des établissements d'étude et de travail productif
à mi-temps chacun qui, après les six années de 1er cycle, visent
à former de futurs producteurs ruraux possédant les connaissances
requises pour moderniser le secteur agricole. Ils ODurenttleurs
portes en novembre 1966 et comptent un an après 12000 élèves
répartis en 306 classes et 200 collèges, ou enseignent des insti-
tuteurs ordinaires et adjoints, et pour un tiers, des contrOleurs
d'agriculture (70) et des experts Vietnamiens et chinois(30)-
Une fois de plus il est à signaler que si l'organi-
sation administrative était facile(classes de 40 élèves, brigades
d'une dizaine de personnes, tableaux d'honneur, réunions hebdo-
madaires d'auto-critique), par contre l'organisation technique
posait des problèmes souvent insolubles à
cause d'un départ

"
..
..
'
~
.
"
- 135 \\ ~
instinctif -
- manque de formation réelle pour les moniteurs, munis d'un
simple brevet d'enseignement général pour la plupart et
des instructions d'un séminaire plus politique gue pratigue
- faiblesse de la formation à travers des cycles culturaux
adaptés aux productions horticoles dans les pays tropicaux ;
inadequation d'outils et de travaux d'UTigation élémentaires
- pauvreté des terrains et gachis deSémences(un cas : sur 300
kg de haricots distribués, è peine 30 étaient semés le reste
consommé (ces cas furent vécus sur tous les chantiers pendant
la période de famine Seitane 74-75~
L'entreprise è ses débuts était noble et cela è cause
de son caractère nouveau nnos visites en 196B de trois C.E.R.
dits pilotes, dans les régions de Boffa, Benty et Kindia, nous
ont montré l'ampleur de l'effort consenti par le gouvernement
pour les premiers investissements, d'heureuses initiatives d'ex-
périmentation, le très faible rapport dans la première année
comparativement aux énormes coOts de production par exemple à
Laya, l'exploitation de 60 hectares en culture intensive (riz,
maIs, légumes ••• ) a seulement permis à la cinquantaine d'élèves
et mattres de se nourrir, de se vêtir et d'obtenir un bénéfice
de 600 000 F&. en 1967. (il est aussi vrai que les paysans ne
peuvent disposer de moyens financiers et techniques semblables
à ceux des CER)- Mesurerl'efficacité des C E R serait fonction
de leur impact SDr la production rurale et surtout nationale

,
. :~: ..
- 136 -
et aussi de leur retombée sur le niveau de vie des paysans.
Or 11 est connu de tout le monde, que la debande de la pé-
riode post indépendance, B commencé par la fuite des paysans
vers les pays frontaliers Sénégal, COte d'Ivoire, Sierra-Léone
etc.
En marge de ces C.E.R., on croyait "trouver un autre
remède au Bous-emploi rural des jeunes de dix-sept à trente
ans durant la saison sèche. A cet effet étaient instituées des
brigades de service civique comprenant, dans chaque arrondisse-
ment, une centaine de jeunes, soit 19000 au total, affectés à
des tAches de production agricole, d'amélioration de l'infras-
tructure (routes, ponts, barrages) pour une période de deux ans
au cours de laquelle ces jeunes devaient subir, parallèlement
à ces tâches, un entrainement militaire qui ferait d'eux la base
de recrutement de l'armée populaire, alors que la milice forme-
rait des futurs encadreurs.
Ce projet qui vient d'~tre mis sur pied présente le
dessin suivant : Démission de la part des responsables politiques
qui n'ont ni le courage, ni l'imagination, ni la compétence pour
organiser des plans d'aménagement agricole au d'infrastructure
( a part le barrage de manga-Labé, terminé en juin 1968 après
cinquante-cinq jours de travail, représente une heureuse ~~~ep­
tion) ;
- manque de moyens rémunerateurs des investissements non ren-
tables par manque de spécialistes(1) en la matière, de suite
dans les actions et de matériel adéquat,
(1) - En Guinée, le gourernement préfère le spécialiste politique à
l'expert technocrate.

~.,(, .. '":>\\,j:-:'- "; '.,,' .' ~~~... ;'
.'

~'J',
.... "
" . , '

".
,o.
.
.....
~'o<'
•__ ,
....... _ _
.... -. ' •
~'
' .
...... -
- 137 -
- la faillite de l'effet de catalyse pr~vu pour op~rer
les mutations n~cessaires è l'int6gration du paysannat
dans l'6conomie moderne. " (Ref t. ;Ri·vière r.
'
155-136)
S'il y a lieu de faire une conclusion sur ces tenta-
tives les ~l~ments , ont ~t~ déjà exprimés : irréalisme, laxisme
dans toutes les entreprises, imprévision, spontanéité mal en-
cadré, absence de moyens techniques, d~tournements des pro-
fits au bénéfice des responsables(ou des moyens de production
pour leur profit personnel), manque d'analyse sur les échecs
précédents, persistance démagogique des objectifs.
La responsabilisation n'est pas perçue comme une
marque de confiance mais, plutôt comme moyen d'attribution de
statut d'adulte. Et cela au détriment d'une bonne qualification
nécessaire. La jeunesse demande à la collectivité plus qu'elle
ne lui apporte. Alors on opte pour la création d'une place hy-
pothétique dans une école au lieu et place d'un emploi. ~ais il
arrive un moment où, sorti de l'école, le jeune offre sa force
de travail sur un marché ou la demande de main-d'oeuvre ne suit
pas les progrès de la Scolarisation. C'est compte tenu de cette
situation dangereuse à savoir pri~ entre le chômage et le dé-
classement professionnel, le jeune risquerait la désillusion
ou la revendication si l'Etat ne l'encadrait pas par ses comités
politiques et ses syndicats.
Au lieu de laisser errer cette masse de main d'oeuvre
(potentialité révolutionnaire), le pouvoir cherche epportuné-
ment à la mobiliser. Intention louable, résultats souvent mé-
diocres
! Les mesures transitoires reculent une échéance.


..
-;~ ~ ,-
-:. ...:":.'1·:-...· .-: ,--' .
:~ '~::lW~.:~~·:·::··.,: ... '
.
.
'-
~
:,
- 138 -
comme l'éducation même civique ne remplace pas l'apprentis-
sage, 11 n'est pas certain que les générations d'aujourd'hui
soient tellement plus prêtes à affronter le développement que
celles d'h~èr alourdies qu'elles sont et seront par le poids
de leurs expériences malheureuses.
Néanmoins, l'action politique et sociale en faveur
de la jeunesse aura transformé leur mentalité ~d'innocent vers
le magouilleur). Et cela est différent de ce que K.FADIGA
appelle nA l'opposition de cette jeunesse ivoirienne, abandon-
née à elle-même dans l'indifféreDce ou plus exactement dans
l'endoctrinement politique passif, se trouve une autre jeunes-
se, plus active et participante au sein de systèmes politiques
inté-grationnistes.
Citons seulement pour exemple, la jeunesse guinéenne
au sein du parti démocratique de Guinée n(Réf du Statut de la
jeunesse dans les Sociétés Africaines Ann. Univ.Abidjan, Série F
(Ethno-Sbciologie) tome x, p138-82).
A court terme, la mobilisation politique, la création
des structures pour les loisirs sportifs et culturels, l'amé-
nagement de l'éducation et le mouvement des Pionniers, qui
entrent dans le cadre de l'action sociale du Parti démocratique
de GUinée, à l'unité populaire.
REORGANISATION DES LOISIRS
--------------------------
Dans la Guinée nouvelle la reconversion des mentali-
tés a été conçue de manière pluri-dimensionnelle.

· ".'-
~- ....._- '-,:,---~ .
A cet effet les jeunes ont 6t6 invit6s à oeuvrer
pour un d6veloppement physique et culturel de l'homme nouveau,
par le moyen du Sport et la pratique des arts rythmiques, dra-
matiques et lyriques, qui conviennent d'ailleurs aussi bien à
leur Age qu'à leur besoin d'expression et à leurs aspirations
mentales.
Parmi les activit6s ludiques, le sport tient poar la
jeunesse la première place, surtout dans les Sociétés industriel-
les.
Dans l'Allemagne Hitlerienne et dans l'Italie de
~ussoloni, le sport servait d'alibi aux exhibitions de la force
juvénile à des fins de pression idéologique.
Dans d'autres circonstances il peut servir de pression
diplomatique pour une reconnaissance nécessaire - R.D.A (République
démocratique Allemande) En Guinée - bien que pratiqué en 1961
par seulement 4~ de la jeunesse(1) - il constitue désormais le
loisir le plus populaire. Sans aucun doute, c'est parmi les sala-
riés qu'il a commencé d'eaercer son plus grand attrait, mais en
raison de son organisation comme activité sociale sous les aus-
pices du P.O.G., il intéresse maintenant l'ensemble de la popula-
tian.
Pendant la période coloniale, le sport, qua~i limité
au foot-hall, se pratique essentiellement dans les villes, re-
groupant des fonctionnaires du cadre colonial de toutes nationa-
lités(Guinéens, Sénégalais, Dahoméens, ~artiniquais,Brésiliens••• )
(1)
Pourcentage donné au cours du Ile congrès national de la J.R.D.A, du 14
au 16 Sept. 1961

:I··i '. -~
- ."'.
"
" O " " " "
.-
.;.:.:!~ .•~~
~' •• ',
_ •. -.,.
-,•..•••
,..... ~>
- 140 -
et les principales êquipes furent pour la Basse Guinhe
le R.C.C.(Raclng club de Conakry,) la 5 5 G ~amaya (50-
ciêth sportive de Guin6e, la J.A. (Jeanne-d'Arc, groupe-
ment catholique) le club des cheminots, et la renaissance
de Kindia.
Pour la haute Guinée, le R C K (Racing Club de
Kankan), Espoirs de Kankan(jeunesse ambiante) J.A.(Jeanne d'arc
de Kankan élèves et travailleurs de l'école de la mission ca-
tholique) fRAG(groupement des ressortissants de la basse-
Guinée) Palmier (groupement des forestiers), et Africa Sport
de Kankan.
La variété des clubs reflète des différenciations
ethniques, religieuses ou professionnelles. Les métis, les
libano-Syriens, les militaires possèdent leur propre club, de
même que chaque cercle administratif. COnstatant le danger
de la tribalisation du sport(Phénomène contraire à l'union)
et surtout que ces équipes représentaient directement ou indi-
rectement des partis politiques. Le gouvernement post indépen-
dance, réorganise le sport pour lui donner une dimension poli-
tique unitaire.
- mobilisation de l'énergie potentielle de la jeunesse et
pour son contrOle par le responsable politique, lui organise
des loisirs, décentralise et multiplie les Sports, les portent
jusqu'au niveau des villagEs. Pendant les années 1962-64,
beaucoup de terrain de sport furent comptabilisés comme action
des comités, et des régions administratives.

- 141 -
En tant"qu'6lément culturel dynamique, il peut 8tre
instrument de mesure de l'6volution g6n6rale d'une Soci6t6.
Sa signification dépasse ainsi de beaucoup celle des activi-
. ..;
t6s économiques et de d6tenteA de!" i I~sr"';t car
comme les
autres compartiments de la vie sociale il est conçu et dirigé
par le parti (Haut-Commissariat à la jeunesse, fédérations
sportives, ligues sportives) aussi bien que dans l'esprit qui
l'anime, puisqu'on le considère primordialement comme facteur
de stimulation et ciment social, comme instrument de concorde,
et surtout de loyauté envers le parti, d'où son importance dans
le cadre de la formation milicienne, base de la vigilance révo-
lutionnaire.
.
Le sport suit le canevas tracé par le paru.. En ce
sens que son organisation fonctionne à partir d'un centre qui
est le Haut-Commissatlat à la jeunesse et, sui a pour tâche de
fixer les règles et sanctions, de pourvoir le pays en équipe-
ments sportifs, de nommer les arbitres nationaux et fédéraux,
de chosir, les entraineurs étrangers, d'établir le calendrier
des compétitions et rencontres, de contrÔler~l'Ecole nationale
des Sports fondée en 1965 pour former, pendant deux ans après
le brevet, des professeurs d'éducation physique, arbitres et
entraineurs, au statut indiciel d'instituteurs ordinaires .••.
Pa~mi les jeunes, le sport, comme le travail des brigades ci-
viques,
joue un rÔle therapeutique en ce qu'il permet à l'indi-
vidu de s'affirmer par voie compétitive et de concilier l'instinct

/
- 142· ....··'
/
agonistique avec le besoin de fraternité. Il répond i
un
goOt de l'éthique africain de la prouesse physique enten-
due comme facteur de prestige d'un champion mythifié. Et
cela convient aux sans occupation à savoir les chemeurs et
les sous-employés, il est une récréation hors de l'ennui,
une occasion d~ dépense et d'expression physique.(on est
tout de mAme bon à quelque chose).
D'après ~r G. ~agnanne "Le Sport est conçu dans
les Sociétés industrielles comme détente après un travail
harassant, ou désalienation de l'homme que son métier attache
à la machine" réf Sociologie du sport, Gallimard, "idées",1964,
p. 71. Cette conception du sport est loin d'Atre applicable
à la situation guinéenne car, cela demanderait d'abord des
structures réelles de création et de transformation industriel-
le : travail effectif et régulier, pénible ou fastidieux.
Les raisons que l'on peut avancer concernant la
diffusion du sport dans la Guinée post-coloniale sont les sui-
vantBS :
- La construction en "grand nombre" des écoles ;
- Les petites installations ratées des coins et
recoins de quartiers et villages ;
- Les commentaires incendiaires des journalistes de la
voix de la "Révolution"
- Le Cinéma it!nerant presentant les vedettes
sportives guinéennes( il s'agit de fooballeurs)
Le retour en leur pays des étudiants guinéens des pays

. .
;
.
..
._.- .. -
.. ....... -
~
'--.
--~
,.~-
..'
', ..-~~' .
"
" -
• • • '
.
<'.
-143 -
de l'est, rompus' certaines disciplines sportives.
- Le contact des 6trangers : les missionnaires ont
fourni des 6quipements de fott~all en Guinée fo-
restière ; "jusqu'à l'expulsion des pr@tes blancs
en 1966, un père blanc faisait partie de l'équipe
de football de Bey1a "Réf Claude rivière p.190.
- Les chinois de l'assistance technique de Kinkon
ont développé le pig-pong dans la région de Pita ;
les Soviétiques, le volley-baIl dans les établis-
sements scolaires ;
Les Sorties effectuées au compte des régions
- Le stimulant de la coupe du parti(P.D.G.),
- La rémunération des meilleurs ;
- La grande mob1ilité des jeunes entre ville et
campagne: la boxe, le judo, le basket, le cyclisme
ont été ainsi introduits en milieux ruraux.(La prati-
que de ces différentes disciplines à commencer à
perdre du terrain social dans les années 1970).
L'adhésion populaire va du cOté football, mais plusieurs
autres sports acquièrent de plus en plus d'importance, dont l'exa-
men tire son importance des perspectives d'une Sociologie dif-
férentielle. Chaque Sport a ses adeptes et ses lieux privilégiés
de diffusion. Pendant les années de famine 73-76 la chasse est
devenue le loisir des head of family particulièrement des fonc-
tionnaires urbains ~urant le Week-end ; la lutte entre individus

,'"
\\
.
.. ._. ~.".~.. ,.- .:: ....
" 144 -
d'une classe d'Age, de l'un comme de l'autre sexe(et, il
comporte tout un ensemble de règles), représente encore la
détente favorite des enfants de beaucoup de villages malin-
ké,
(malgré sa perte de vitesse) tandis qu'au Fauta, où ne
la pratiquaient que les serfs des rundé, elle tend à @tre
abandonnée depuis la rehabili~ation des captifs à l'ind'pen-
dance (acte tout de même courageux du P.O.G.) le basket-baIl,
comme le volley, est pratiqué surtout dans les milieux scolaires
Secondaires et un peu dans le supérieur, éventuellement par des
fonctionnaires, très rarement par des ouvriers(tailleurs exce-
ptés), et a beaucoup d'emprise sur le public féminin.
La boxe
attire à Conakry les portefaix, charretiers, chÔmeurs, petits
marchands ne disposant que d'une table pour inventaire, ven-
deurs de noix de colas, garçons de salle des hÔpitaux et contrÔ-
leurs d'entrée des salles de cinéma(résultat d'une enquête des
étudiants de Sociologie),
(réf.C.Riuière p19D) qui se défoulent
ainsi du sentiment d'infériorité sociale attaché à leur condi-
tian. Les même~ catégories d'individus du sous-proletarfat
pratiquent les autres sports violents. Le judo et autres sports
des arts martiaux est assez en vue dans le milieu des frustrés
du corps social.
Quant au cyclisme, produit de la colonisation, il
est le sport pratiqué en Basse-Guinée et aussi en Haute Guinée.
.
,
Il faisait l'objet d'un concours renomme lors des fêtes de la
revolution française(14 Juillet). Les champions d'alors se nom-

.~~
":
- 145 -
Niang, Bah pour la basse-cOte, Kaba Sadou, 01allo Balla
dit Balla, Sidib~ Korok6mo dit K~mo N'diagne pour la Haute
Guinl!e.
Dans la foull!e de l'indl!pendance il est continué
mais perd sa vivacit~-1966, des courses d'entrainement ont
lieu sur un circuit de Conakry, tous les dimanches matin.
Le Sport cycliste aurait pu faire son petit bonhom-
me de chemin dans les campagnes n'eOt ~té la démission des
autorités sportives. En campagne, la bicyclette est une né ces-
sité pour les déplacements et aussi signe de prestige en fonc-
tion de sa rareté. En Haute Guinée l'essor du cyclisme a l!té
considérablement favorisé, depuis l'indépendance, par les be-
soins du trafic clandestin. Des bicyclettes sont louées par
exemple à Kankan par des commerçants, contrebandiers profes-
sionnels, à de jeunes rompus à ce
genre d'activité-passage
de la frontière COte d'Ivoire-Guinée. Les produits acheminés
par des sentiers spéciaux évitent les taxations de la douane
et alimentent le marché noir de Kankan(sans risque d'@tre taxe
de cinquième colonne(1) De cette école de vélo-cross sortent
les meilleurs cyclistes du ~andingue.
Résultat la guinée n'a jamais enfanté un champion
de grand talibre de ces disciplines sportives précitées.
Au contraire elle n'a fait que piètre figure lors
des jeux africains de Brazzaville.
Pour ce qui est du foot-baIl, les équipes guinéennes
(1) - La vente de ces produits se fait dans une mise en scène: une commerçante
pour revendre ses pagnes, porte les échantillons autour de la hanche
en guise de parure

- 146 -
possèdent de valeureux ~l~ments. Sport pratiqu~ à grande
~chelle, mais seulement quatre grandes ~quipes : Hafia,
Horoya, Kindia, Kankan. Les deux premières forment l'os-
sature de l'~quipe nationale. Né en Basse-cOte, ouverte
d'avantage aux contacts culturels sous la colonisation; il
a gardé les traits de ses origines,
puisque l'~quipe nationale,
longtemps dénommée Sili Boys(un peu comme le Black Star du
Ghana, et qui se soJt elle aussi, à sa manière, porte drapeau
de la Révolution) comprend huit équipiers sur onze d'origine
Soussou en 1968. La seule infrastructe sportive méritant ce
nom (bien que delabrée) est le stade du 28 Septembre. Construit
par l'Union Soviétique(U.R.S.S.) inauguré en 1964 et auquel le
budget général accorde annuellement une subvention (en 1968 :
58 047 000 FG) est le Stade des rencontres nationales et inter-
nationales. Les bons joueurs de Conakry et de Kindia sont con-
voités par les ligues locales qui n'hésitent pas à leur proc~­
rer du travail et logement, élévant par cette migration le sta-
tut de p~estige du champion. Ce statut lui vaut d'ailleurs des
chances inespérées du succès dans
ses examens s'il est élève,
des facilités d'embauche et des élévations de salaire s'il est
ouvrier. Labé offre un atelier de menuiserie a un footballeur
de Conakry qu'elle veut attirer. Tel autre mécanicien est promu
chef d'atelier de l'usine de montage de camions Samova, tel me-
nuisier, sous-directeur de l'entreprise de meubles Sonfonia.
Quant aux idoles internationales(1) au nom repercuté par la
(1) - Keita Sory dit petit Sory l'un des stars du Foot-ball Guinéèn fut
emprisonné en 1974-1975 pour complicité avec la cinquième colonne.

.'!,?"-

\\'"-
~.~ ~;:-~-..
'.
'-~
,
." '"
~
" ' ,
,o.
'.' ,.:.. ~
~ ~~.....
._..... \\,_ • • _~~..;'''' •• "
. " :
. . . . . . . ' • . • •
;:'l_.
- 147 -
radio, elles offrent des modèles de réussite et de richesse
relative par rapport à une masse de jeunes desoeuvrés. Cette
discipline sportive est utilisée par les dirigeants guinéens
à des fins politiques: Le 28 Juillet, l'équipe nationale de
football de Guinée, invitée à Abidjan, est reçue par ~.Houphou~t-
Boigny, dans son village natal de Yamoussoukro. Le lendemain,
une réception officielle a lieu dans la capitale ivoirienne.
Dans l'allocution qu'il prononce à cette occasion, le
chef de l'Etat ivoirien souhaite la reprise des "relations fra-
ternelles" entre les deux pays en ces termes :
"J'espère que très bientOt, je dis très bientOt, mon jeune frère
le président AHMED SEKOU TOURE et moi jetterons le voile, un
voile très épais, sur ce triste passé d'lncompréhension."(réf.
AFP-Bulletin quotidien d'Afrique, 30 et 31 Juillet 1970).
Après cette visite, les présidents SEK~U TOURE et
HOUPHOUET-BOIGNY échangent de chaleureux messages de remercie-
ments et de sympathie, puis de voeux à l'occasion des fêtes
nationales de leurs pays respectifs.
Le 5 Octobre, le chef de l'Etat Guinéen reçoit de
nouveau l'équipe nationale de football de côte d'Ivoire venue
disputer un match à Conakry.
Le football n'a pas que soulevé l'enthousiasme il
a
aussi crée des problèmes sociaux sinon agravé des conflits déjà
existants - fameux match Hafia de Conakry et Asec d'Abidjan en
1976-1977 considéré par Mr Sékou Touré "L'islam contre le Féti-

- 148 -
chisme."
La m@me animosité s'exprime dans les compétitions
artistiques que dans les rencontres sportives, sous-tendue
par une résurgence du culte de la person~alité et par des
conflits de clochers sinon d'ethnies."Il a été malheureuse-
ment constaté qu'à l'esprit d'émulation fraternelle, il s'est
peu à peu substitué un esprit de concurrence passionnée dégé-
nerant parfois en rapports antagonistes entre différentes trou-
pes artistiques de nos diverses sections."(Réf S.Touré, L'action
politigue .. Of p.53) -
En 1961, les quatre troupes finalistes désignés par
le jury finissaient par avoir un comportement "revolutionnaire"
ou comme le porte-~rapeau d'un groupe ethnique de la nation.La
préparation de la compétition dans le plus grand secret, l'iso-
lement volontaire des jeunes des deux sexes •.• dans la plus gran-
de intimité, les commentaires plus ou moins desobligeants à
l'égard des équIpes perdantes,
tous les comportements indignes
de révolutionnaires democrates ont été stigmatisés par le parti.
Les représentations artistiques et culturelles n'en
restent pas moins, après le sport,
clest le loisir préféré de la
jeunesse. Des compétitions se déroulent d'abord au niveau des
quartiers d'une m~me ville ou des villages d'une m@me région,
puis ensuite au niveau de l'ensemble des sections du parti.
Elles comportent des épreuves de ballet, de chant
choral, de folklore,
d'ensemble instrumental et de représentation-
Théâtrale.

.-- 149 -
Vue l'intérêt qu'on porte aux manifestations
théAtrales, le parti à refuser de lui accorder l'autonomie
nécessaire condition de sa "fonction historique". Ainsi il
l'a emputé de son vrai style pour le couler dans la moule
de l'endoctrinement. Ce théâtre certes fait ressortir la
quotidienneté à travers les faits divers mals reste braqué
sur le passé colonial(bon dans une certaine mesure) et cache
les errements et crimes commis par le régime en place.
Les thèmes s'inspirent donc de la Révolution et de
ses mots d'ordre: l'émancipation féminine, la promotion ou-
vrière, la lutte contre l'analphabétisme et l'exode rural, la
rationalisation du travail et la bataille pour l'~ccroissement
de la production, la lutte contre les trafiquants, l'éducation
de la jeunesse, la démystification. Et ce théâtre convient au
Parti"Les ballets nationaux sont choisis en fonction de leurs
capacités artisitiques à représenter l'Afrique à.l'extérieur"
(Sékou Touré ibid, p56).
~n fonction de ce critère principal du théâtre
populaire qui est la qualité de la pensée exprimée, apte à four-
nir au peuple des perspectives nouvelles dans la voie de la Révo-
lution, la concentration de l'action, la progression de l'inté-
rêt, la mise en scène, l'interprétation, l'utilisation des ar-
tifices et accessoires de scène, n'ont qu'une importance réduite.
"En somme: un mauvais "théatre de patronage". Les auteurs? Mis
à part D.Tamsir Niane, Emile Cissé, Néné-Kaly Camara, aux oeuvres

- 150
déjà reputées, ce sont quelques instituteurs de village qui
se sont senti un jour la vocation d'un Brecht ou d'un Paul
Déroulède ••• Sans les
conna!tre. S'ils ne composent eux
mêmes, du moins donnent-ils la dernière touche à la tra-
duction française présentée pour les personnes du jury qui
ignorent la langue vernaculaire du texte original."
Le théâtre est un instrument théorique et pratique
à la fois pour la reconversion des mentalités. Mais, ça demande
une préparation sérieuse au point de vue de la conception pour
ne pas qu'il tombe au niveau de la gageure d'une révolution
ambiante.
La musique semble plus fidèle à ses sources auto-
chtones, si l'on se refère aux instruments de base: balafon,
belon, cora, tam-tam •.. ET les techniques d'expression. Elle n'a
tout de même pas été épargnée par la réforme du Parti. Car à
la place des chants traditionnels du terroir on chante le P.D.G.,
exalter ses leaders, proclamer des mots d'ordre, telle est la
tâche - tache autant qu'expression artistique naturelle -
qu'entreprennent désormais les jeunes formés en Stage dans les
diverses sections à imiter les griots, tandis que ceux-ci n'ont
plus le monopole de l'expression musicale épigue BU lyrique,
car à ses débuts la révolution a recommandée la decastisation de
la musique, que l'on élimine les préjugés relatifs au Statut pre-
tendu inférieur du griot, ce à quoi ont tendu les funérailles
nationales accordées en 1967 au griot Bakari Cissoko mort d'un

-
151 -
ulcère au Canada, de Camara Oemba chanteur animateur de
l'orchestre Bembeya-jaB& mort à la suite d'un accident
de voitDreià Dakar en 1973.
Au niveau des orchestres les instruments qui font
la loi sont: la guitare électrique, le tambour, la cymbale
et le Saxophone. Sur ce plan la Guinée n'a pas grande chose
à envier aux autres pays africains. Car elle a réussit à se
donner un fond de musique malgré le caractère d'endoctrine-
ment, et malgré que "La Révolution dan~moins sur les places
publiques que dans l'intimité nocturnes des salles du P.O.G.
où les plus charmantes reines de l'année viennent solliciter
le haut fonctionnaire pour le premier rumba ••• et l'ultime".
En résumé: Un théâtre de propagande politique avec
carence du génie inventif, une multitude de cheeurs adressée
au Président et à son parti, d'excellentes reinterpretations
de mélodies traditionnelles mandingues, Soussous, et peulhs
sur des rythmes afro-cubains, la conservation des repertoires
et des instrumentations locales par une revalorisation des
folklcres.
En réalité l'art cherche sa voie comme l'économie.
Toutefois, quoi que criticable, aucune de ses tentatives ne
peut ~tre considerée comme inutile. Il lui reste à parfaire ses
techniques, à décanter le verbalisme, être moins demagogù~, à
faire la Synthèse réelle des richesses de
la
culture nationale.

l,"
_
.. - .. ," ,". ·"--r~,;;:·~. ', ~---:~-:~";'--:--':~~::~7',;~
... ~"' .. ~:- ......
'...1.

-
152 -
, "
LA REFORME DE L'EN5EIGNE~ENT
Commencée en 1959, elle s'est poursuivie par des
ajustements
et des modifications incessantes, qui ont ,ar-
fois fait naitre le doute dans son caractère rationnel de
sa conduite. Les principes fondamentaux de cette reforme sont:
Africanisation du contenu de l'enseignement, nationalisation
de l'enseignement et école unique, développement de l'ensei-
gnement secondaire et création d'un enseignement supérieur.
Ces principes quoi que nobles, demanderait dans
certains domaines la soumission à l'épreuve de la pratique
d'autre part, ajuster les étapes aux moyens disponibles.
Si de telles précautions avaient été prise, on aurait pu éviter
des tâtonnements, des improvisations hatives. ~ais bien souvent
les critiques de la réforme, en s'attachant à ses modalités
parfois discutables ou imparfaites, mettent en question le prin-
cipe même du changement •.. L'idée qu'il aurait suffi de faire
une réforme une fois pour toutes et de s'en tenir là est parfaite
ment irrÉaliste. L'exemple en la matière est le suivant:
l'"africanisation" de l'enseignement de l'histoire - essentiel-
lement l'introduction à une place centrale de l'histoire du conti-
nent et plus particulièrement de l'Afrique noire - paraIt simple
en elle-même. ~ais il ne suffit pas d'Élaborer des programmes
nouveaux, fussent-ils excellents dans leurs principes : encore
faut-il disposer des moyens indispensables, à savoir d'enseignants
instruits dans les matières nouvelles(qu'on ne leur avait jamais

-
153 -
enseign6es A eux mêmes) et disposant des instruments
..
necessaires, livres~ 6tudes, manuels. La mise en place
de cette "infrastructure" est loin d'Atre achev6e, et
les programmes doivent en tenir compte(1).
Alors que la première phrase de la r6forme
avait mis l'accent sur la liaison de l'6cole avec la vie,
plus précisément avec le travail productif dans les con-
ditions qui sont celles de la Guinée, et dans son orienta-
tion qui est celle de la voie non capitaliste.
Le travail productif a été introduit à tous les
niveaux de l'enseignement, essentiellement sous la forme
du travail agricole; l'objectif n'est pas pour l'instant
proprement économique, encore qu'il serait souhaitable qù~11
le devint: l'extension de l'enseignement primaire en parti-
culier, qui représente dans son état actuel une charge qu'il
est difficile d'accro!tre, ne pourra se poursuivre au rythme
nécessaire que si l'école réussit à powvoir au moins partiel-
lement à ses besoins. Pour le moment, l'objectif est avant
tout éducatif: luttes contre les préjugés hérités à la fois
des temps coloniaux et ses temps précoloniaux) faisant du
travail manuel, et du travail agricole en particulier, une
activité dégradante(celle de l'esclave, ou celle da sujet
colonial), l'école étant appréciée comme le lieu qui apportait
pour la vie, la dispense de cette activité, lieu d'éducation,
1
( 1 )
~n exemple à titre d'illustration: Les programmes de l'école primaire
élaborés en 1961 prévoyaient une leçon sur Fodemoudou, Condé fondateur
de Kankan ••. ~ais si les instituteurs du lieu, possedant la tradition
Ii
locale, étaient en mesure de dire quelque chose sur ce sujet, aucun
~ocument écrit n'existait, même à l'institut national de recherches,
fui pOt aider à l'élaboration.
!

;...
..
-
153 -
enseign~es à eux mêmes) et disposant des instruments
..
necessaires, livres. études, manuels. La mise en place
de cette "infrastructure" est loin d'Atre achevée, et
les programmes doivent en tenir compte(1).
Alors que la première phrase de la réforme
avait mis l'accent sur la liaison de l'école avec la vie,
plus précisément avec le travail productif dans les con-
ditions qui sont celles de la Guinée, et dans son orienta-
tion qui est celle de la voie non capitaliste.
Le travail productif a été introduit à tous les
niveaux de l'enseignement, essentiellement sous la forme
du travail agricole; l'objectif n'est pas pour l'instant
proprement économique, encore qu'il serait souhaitable qu~ll
le devInt: l'extension de l'enseignement primaire en parti-
culier, qui représente dans son état actuel une charge qu'il
est difficile d'accroltre, ne pourra se poursuivre au rythme
nécessaire que si l'école réussit à powvoir au moins partiel-
lement à ses besoins. Pour le moment, l'objectif est avant
tout éducatif: luttes contre les préjugés hérités à la fois
des temps coloniaux et ses temps précoloniaux) faisant du
travail manuel, et du travail agricole en particulier, une
activité dégradante(celle de l'esclave, ou celle de sujet
colonial), l'école étant appréciée comme le lieu qui apportait
pour la vie, la dispense de cette activité, lieu d'éducation,
l
,
( 1 )
yn exemple a titre d'illustration: Les programmes de l'école primaire
~laborés en 1961 prévoyaient une leçon sur Fodemoudou, Condé fondateur
de Kankan ••• ~ais si les instituteurs du lieu, possedant la tradition
locale, étaient en mesure de dire quelque chose sur ce sujet, aucun
document écrit n'existait, même à l'institut national de recherches,
qui pOt aider à l'élaboration.

- 154 -
l'enseignement des Sciences, à la modernisation des méthodes
de travail, cet apprentissage à l'esprit coopératif.
Education Sector Memorandum
Average Growth RATE OF Enrollments, by Level 1958-1978
Taux de croissance moyen des effectifs par niveau 1958-1978
Enrollment
Indexes{Percentages)
Average GCIDwth
Effectif
Indices(Pourcentages)
Rates
(Percentages)
Taux de croissance
moyen (Pourcentage
'.
;
.
--
~5jl
-1968
1~l-& /1-5
495&
..(96&
-i~+2J ris
1953/63 ~!36' /"8 fi95J/73
u",b.z. r .:>f s~ude"l-s
lcmb;,,~ d'e+vdiGLl\\ts
1
45, 09t;> - 0
f114J156-0 ~~ 1'1M:J-O -100 -0
3~6 - ~
804- 6
14-5
;-6
-1:1- 0
FI1.. i IwtAR.-t
ç
1 _
R.1i"iAI~e
4~ , 5~';-O
,
~41+394-() .t5t .100-0 100.. 0
3~9 - 4
S~H, -6
-1 ~-o
5-1-
9 .. 3
~ cCC WI>A.R.'Y
s~co"'l)~ \\ ilE
~ ,,41-0
<.9,H8-0 89 941-0 100-0
1
I-Hl43 - ~
3,S:H-5 ar-li
~-1 - 9
tt_ 5
Ut-llvER.S'l'1
1
e;,VP i:.R.1 ~ U~t.
b44- 0 ~o "13~-O NIA
100 - 0
3, <..20-3 NIA
4--i - S
NIA
1 •
'
'Ilv."l\\6cr of l5c.hc.~ \\~
N.cmb;-e d'itQ.b\\i'>~olm.tn~
.zS'i'-lo
{)!ifl_O J. 1-61-0
"1.00-0
G1~- g
93~ -8
1~-9
4-3
'H- !
PR\\MA~~
PR.IMA-Il:l.E
~81- -10
I-i, 560 - 0
~I 31-<>-0 1.00 - 0
S, 43-&
8t5 - f)
-i8 ... 4
4- 3
-11 .. 1.
,
1
~EcO N bAotl.Y
S eGO N I)1A.1 ~ E-
l
~'6~ - 0
34'-0
~J 800- 0
3 154... -".
39-5
~o - 0
9-P
-{oo-o
3- -t
UN \\'( E.Q!~ i T Y
1
4s -0
NIA
--foo - 0
~,.eS~_o
NIA
36-5
t-(/A
co\\,) pe., U. \\Il:; u~E
.2-0
l"h.l."'n be f' d,~ "l'ea.c.t-,er.s.
1

N.olnbre d '1i1'\\~e.l5t\\al'\\k
050 - 0 l.o.1~ -0 100- 0
558 - 0 . 1)-(~t. - s
1~ - S
+-s
..~ -~
9051- 0
5L
P~IMAQ.'"
PRI MA!Il~.e.
~~-9
1'- S
5- ..
~O - S
84?> - 6
3,S3"-O 'J()OS-O
-foo-e
4't-~
>~CON DA, Il'1
SèCO~bA.llte
b.!l- 0
i} 09"-0 3}-t1-f - 0
1.00 -0
{J'l-~ -" ,)-tUt - S 33 .. .t
-t1.- 3
t-f - -;
U '" 1" ~ll::', T'Y
1
~u ot:~\\;,UILe
'le-o
1 J O i&-O
~/Â
NIA
?'o-7
--
100- 0
1)45-1.-4
NIA

..
:
....._--.. ~ ~ ....
'-
-:- :-:.:\\ -.,.~ "" ... _--
_... \\ "'~"_';'_'~-:". :.L..'...:':~ ....... '.... "
~ ~ , .
- 155 -
.
.
Ce qui peut être retenu de ce tableau, est le suivant:
En 1957-58, l'effectif total des enfants scolarisés était donc
de 45090 élèves, soit environ 9~ des Scolarisables, en 1960-61,
il atteint plus du dobble : 103 439 avec 18~, en 1963-64 :
200 075, presque 40~, et régresse légèrement en 1966-67 : 186 506,
après un mécontentement consécutif aux réformes et à la décision
prise par l'Education nationale de lutter contre les effectifs
pléthoriques dans les classes. ~ais aussi il est à souligner que
le concours des populations n'a pas été soutenu avec assiduité.
Autrement dit, l'état n'est pas à mesure de fournir du matériel
nécessaire et adéguat
a ces infrastructures scolaires.
Pendant ces mêmes années, l'enseignement primaire
compte 42 543 élèves en 1957-58, 96 629 en 1960-61, 189 927 en
1963-64, 149 527 en 1966-68, 144, 394 O(cette année-là un certain
transfert d'élèves des dernières! avait été opéré au bénéfice des
CEG, CET et CER), avec respectivement 309,665, 1702 et 3751 clas-
ses. La pre§Eession suivante est enregistrée simultanément dans
l'enseignement secondaire et technique: 2547 élèves en 1957-58,
6810 en 1960-61, 21032 en 1964-65, 36379 en 1966-67.
De 1961 à 1967, les crédits alloués à l'enseignement
représentent entre le cinquième et le quart du budget national.
L'enseignement supérieur est donné par les Instituts
polytechniques(Universités) celui de CONAKRY comprend huit fa-
cuItés ou écoles(sciences,sciences sociales, génie civil, géologie
et mines, agronomie, électro-mécanique médecine et pharmacie,

- 156 -
Ecole sup6rieure d'administration). L'enseignement est donn6
sur cinq ou six ann6es dont une annêe de propédeutique.
L'Africanisation du personnel enseignant des deuxième et
troisième cycle (premier cycle, classes de seconde, premlère
et terminale du système français) atteint 80~. La proportion
d'enseignants étrangers reste prépondérante dans les écoles
normales et dans l'enseignement supérieur.
En marge de l'enseignement "classique", la Guinée
s'est lancée depuis le 1er Avril 1968 dans une grande expérience
d'alphabetisation de masse, dans les langues nationales: Sasso,
PUlar, Kissi, Guerzé, Tome, Bassar~~alinké, et Coniagui. Cette
campagne a demandé "plusieurs années" de préparation: mise au
point d'un alphabet Guinéen", Système de transcription valable
pour l'ensemble des langues utilisées en Guinée et pouvant s'ac-
comoder des machines à écrire françaises, élaboration de manuels
élémentaires.
A la pédagogie classique occidentale qui avait formée
l'élite au pouvoir s'en est substituée une autre dès l'indépendance
cherchant, non à corriger les normes-françaises en matière d'en-
seignement, mais à les transformer de fond en comble. Les princi-
pes en paraissent fort louables :
- reconversion des programmes en vue de restituer les valeurs
africaines authentiques ;
gratuité de l'enseignement à tous les niveaux,
- augmentation de la scolarité obligatoire portée à neuf;
- extension des établissements de l'enseignement secondaire

-
157 -
aux Chefs-lieux des r6gions administratives notamment
,
'rimaut6 accordée è l'humanisme scientifique et è l'enseignement
technique sur l'humanisme classique européen;
liaison de l'enseignement aux réalités sociales, 6conomiques,
politiques nationales et è l'idéologie du Parti.
Résultat
Cmmme résultat, la réforme a manqué de perspectives
stables, fut considerée comme réforme une série de mesures, de
décrets pris au jour le jour, fait d'ordres, de contre-ordres,
de correctifs, de laisser-faire, de démagogie et d'abandons.
Toute cette confusion s'est fait ressentir sur les examens et
sur la valeur des futurs cadres, de cette instabilité délir~nte
des programmes, et l'effet psychologique de cristallisation de
l'opinion contre l'inspecteur général Behanzin, provoqué par ce
flot de réformes et de contre-réformes trimestrielles promulguées
dans l'espoir d'opter l'école aux exigences de l'unité africaine
(histoire, géographie, langues), de la civilisation technique
(mathématiques, chimie, géologie, mines) du socialisme guinéen
(idéologie, économie politique) et des besoins du monde rural
(agronomie, pédalogie). Le manque d'ouverture au monde de la
jeunesse, enfermée dans un cercle idéologie étroit, se complique
à la fois par une incohérence d'autodidate dans la soif d'appren-
dre de beaucoup de jeunes, par un enseignement qui tend de plus
en plus a ~tre conçu non seulement en relation avec l'endoctri-
nement mais sur son type m~me, c'est-à-dire comme l'étude de

- ....:.
','
-
158 -
formules è savo~oir par coeur et è réciter pour obtenir une
place, enfin par les lacunes d'une formation scolaire donnée
par un corps enseignant de compétence douteuse. La réforme a
créé plus de problèmes qu'elle n'en a résolus. - Désertion
massive des élèves et d'étudiants vers les pays limitrophes
(Sénégal, COte d'Ivoire). La baisse de niveau n'est pas pour
autant épargnée, elle représente la gangrène de tout le système
(niveau de l'étudiant de l'anseignement supérieur comparable ~
celui de l'élève de seconde des écoles ivoiriennes et sénégalai-
ses). Au début de l'indépendance ce contre coup du système sco-
laire avait été attribué au "relâchement de la discipline scolaire"
(réf S.Touré, l'action politique p.101) Hélas. !
l'ancien my-
the de l'école, temple du savoir, prédomine encore parmi les élè-
ves, sur la conception de l'école, organe de gestation du dévelop-
pement futur de la nation. En bref, l'école est l'antichambre d'un
bureau de pension civile et oon l'antichambre d'un bureau de
travail, comme en bien des pays d'Afrique.
Du cOté de l'alphabétisation et de l'utilisation des
langues nationales, le résultat a été négatif: pas assez de
preparation théorique, manuels imprécis, matériels pédagogiques
utilisés à d'autre fin, et découragement total des élèves et
des parents d'élèves.
Pour exorciser ce mal éducatif, il a été décidé de
donner une éducation progressiste et revolutionnaire à la généra-
tion montante par le biais du mouvement national des Pionniers,
LeJ Camions offerts par l'UNESCO ont été distribués aux dignitaires du
1
pa~ti par le canal de leurs domaines respectifs.

- 159 -
qui rassemble, ~ partir de sept ans, les enfants sous l'6ten-
dard du Parti, durant leurs 6tudes primaires.La tendance,
dans les premières ann6es de l'indépendance, 6tait d'en
faire une organisation à part de la J.R.D.A, dans laquelle
il était théoriquement intégré. La fonction de base des pion-
niers était de donner bon goOt au défilé et autre exhibition.
Le dynamisme très inégal et plutOt faible des groupements vil-
lageois dépendait en premier lieu de celui de leurs instructeurs
recrutés parmi les cadres politiques de la J.R.O.A. Trois ans
après l'indépendance, le Président de la République Sékou Touré
sentait la nécessité de clarifier les tAches et fonction de ce
mouvement, tenant du Coeur-Vaillant, du Scoutisme et du Komsomel :
a) combler le vide éducatif de la cellule de base(famille) et de
la vie scolaire par des activités de loisirs et d'éducation
extra-scolaires devant occuper les moments disponibles de
l'enfant(veillées, camping, sport, feux de camp) ;
b) combler les insuffisances éducatives familiales(principes
d'hygiène, bonnas fréquentations),
c) aider l'oeuvre scolaire(système d'émulation, d'auto-disci-
pline, d'équipes) ;
d) combler les lacunes du manque d'instruction dans la jeunesse
non scolarisée(alphabétisation, cours techniques ••• );
e) donner un contenu dynamique, révolutionnaire par l'éducation
po~itique, morale et civique(causeries, défilés, rencontres,
jardins potagers) (réf. S.Touré ibid pp 76-77) -

-
•.
\\
,.- ( ,~: -' ~
-
160 -
Pour ce qui est de l'encadrement, il fut confi6
en 1966 par le Haut-Commissariat à la jeunesse aux~institu­
teurs, déjà surcharg6s par des tAches scolaires, administra-
tives et politiques, l'animation de ces groupes à l'ardeur
6teinte, et d'existence fictive en dehors de sept ou huit
villes principales.
L'enseignement secondaire a un cadre de fonctionne-
ment dirigé par la J.R.O.A. ~ais il présente une autre caracté-
ristique qui est autre que l'~spect populaire - enseignement
r6servé à une 6lite, plus le renforcement du cli.age empirique
existant entre 6tudiants et jeunes travailleurs qui ne poursui-
vent pas leurs 6tudes. Il serait par ailleurs intéressant, dans
le but aussi d'évaluer les lignes de force de l'6volution des
futurs cadres, de connattre la nature de la population scolarisée
dans le secondaire.
A cet effet, nous utiliserons une enquête déjà menée
par Pierre Hanwy (1963) citée par Claude Rivière. A la question:
Quels sont les jeunes qui suivent l'enseignement du second dégré 1
Sur un échantillon de 522 élèves(soit 1/20è du total des élèves
de l'enseignement secondaire et technique) des classes termina-
les des lycées de Conakry originaires de tout le territoire de
Guinée et dont 90% étaient pensionnaires. Le questionnaire a
été soumis à tous les jeunes garçons(soit 440) et toutes les
jeunes filles (soit 48) des classes de onzième et douzième
(première), et à toutes les jeunes filles des classes de dixième

- ' ..:
"
- 161-
(soit 34). Bien que les cours soient mixtes, la proportion
des jeunes filles demeure faible: B à 12S salon les clas-
ses et les sections. Les élèves issus de milieux ruraux consti-
tuent 46~ du total, les 54~ restant viennent de milieux ur-
bains, c'est-à-dire des grandes villes(Conakry, Kankan,Kindia)
mais encore des chefs-lieux de régions(Labé, Kouroussa,N'zérékoré,
Telimele, Beyla, etc) dont la population est inférieure à celle
des trois grandes villes citées."La forte proportion d'élèves
originaires de milieux ruraux doit @tre soulignée, dit P.HanVy,
en raison du niveau culturel très bas des campagnes : 90~ d'anal-
phabètes, et des nombreuses langues vernaculaires qui,( ••• ) sont
utilisées par les populations de l'intérieur, si bien que les
élèves des premier et second cycles ne pratiquent pas la langue
française - langue officielle et scolaire - qu'à l'occasion des
cours reçus à l'école" réf P.Hanry, "Enquête sur la sexualité au
lycée de Conakry, 1963-64" document dactylographé déposé à
1'1 N R 0 G. Texte repris dans Erotisme africain, Payot ; 1970.
Situation défavorisante pour les ruraux par rapport
aux citadins. Cette disparite ne date pas d'aujourd'hui quoi
qu'une révolution "correcte" a le devoir d'y remédier. 68~ des
premiers ont dix-neuf ans et au-dessous, contre 76~ des seconds,
en ce qui concerne les garçons. Cette moyenne d'âge élévée
s'explique par l'entrée tardive dans l'enseignement primaire;
sept ans, sans maternelle préalable. L'ignorance de l'âge est
normalement plus forte en milie~ rural(1) : 14~, qu'en milieu
(1) Le phénomène concernant l'âge est courant en Afrique et il est une des
c~rac~ér~stiques de l 'âge scol~ire - ~eci pourrait n~us amener à dire que
l Afrlcaln à deux âges : un âge scolalre et autre qUl est extra-scolaire.

.,' . '
- 162 J-
urbain : 7~ chez les filles, dont 87~ sont d'origine citadine
et "S d'origine~urale, l'Ige moyen est plus 'lev' que celui
des garçons "plus grande application dans les études, favori-
tisme de la part des,professeurs dans la notation, facteurs
sociologiques qui rendent dès le depart la sélection plus sé-
vère, autant d'hypothèses explicatives ! ~ais les différences
d'origine s'atténuent dans ces classes en raison du régime qua-
si general de l'internat."
Quant au critère religieux il donne la selection
suivante : "12~ .des garçons sont chrétiens, de père et de mère
catholiques sauf quatre cas, alors que la proportion est seule-
ment de 1% dans la population guinéenne totale, 49~ se disent
musulmans, 39~ refusent de se situer dans un cadre religieux."
Ces données quoique montrant l'inadaptation des religions au cadre
de la culture scientifique, elles sont surtout révélatrices d'un
blocage entre la tradition et la modernité.
Parmi les filles, "6$ sont catholiques, 84$ musulmans,
10~ nient toute appartenance religieuse toutes, sauf les catholi-
ques et trois athées, ont des parents musulmans, ce qui, en con-
firmant les conclusions admises pour les garçons, marque une plus
grande fidélité religieuse chez les jeunes filles. Mais celles-ci
sont en général issues d'un milieu privilégié intellectuellement.
POur 6$ d'entre elles, leur père est analphabète, contre 50$ chez
les garçons. (Réf P. Henrj)
Une fois de plus la Révolution guinéenne est en retard
dans l'application de ces principes nobles - émancipation de la

r
. . . - -
- 163 -
femme africaine.
Quant aux parents 11s sont g~n~ralement des paysans,
commerçants et ouvriers sauf une infi me minorité qui a un
niveau secondaire - "En 1958, notre jeune R~publique comptait
moins d'une douzaine d'ingénieurs, de docteurs et de magistrats"
(Réf S.Touré, l'Afrique et la Révolution, tome 13 de l'action
Eplitigue du P.O.G., Conakry, Sida p.37,)
Ces détails, certes n'expliquent pas mieux le bran-
chement politique de la jeunesse au parti, mais permet tout de
même de fixer le contexte socio-politique dans lequel il s'est
operé, et voir même les éléments d'explication de conflits
entre, les jeunes et leurs famille, la religion et des idéolo-
gies nouvelles véhiculées par le parti et l'éducation.
L'Education n'est jamais neutre et cela se verifie
d'une façon plausible en Guinée car, les élèves des lycées ac-
cordent en générAl une place prééminente à l'action politique
dans leurs projets comme dans leur vision de l'avenir national.
\\\\ Ce qui a été confirmé par une enquête dans les classes de neu-
vième et de dixième de deux lycées de Conakry, ou "57~ expri-
maient nettement le désir de faire une carrière politique. La
correction des dissertations philosophiques et littéraires du
baccalauréat, en 1965 95~ des candidats raisonnaient dans les
termes mêmes et dans l'esprit de l'idéologie règnante, quitte,
un peu plus tard, à partir de la deuxième année d'enseignement
supérieur, à contester les dirigeants, à dénoncer les abus, à
critiquer l'absence de liberté d'expression dans des conversa-
tians intimes. Il est symptomatique qu'aucun représentant de

-;-'--1' -_.- .•.
__ ..•. __ ._._,~_.·4.~ ... ~- .....~.. ~ ~ ....--._ ......".....__ ., ...•-. -~ . _:
"';::~..J.~'.~'.':
- 164 -
l'Institut polytechnique de Conakry, qui constitue l'6lite
intellectuelle de la J.R.O.A., ne soit intervenu au 4è Con-
grès. L'absence de certairos délégués de cet Institut à deux
ou trois séances a aussi été particulièrement remarquée,
comme la rareté des polytechniciens présents aux meetings
populaires. Selon des estimations(sujettes à caution certes)
communiquées par plusieurs étudiants, il n'y aurait qu'un cin-
quième des polytechniciens qui soient entièrement favorables
au régime.
Parmi eux se remarquent le même radicalisme mythique,
les mêmes tergiversations spéculatives, la même horreur du tra-
vail manuel que chez les lycéens. Quant aux autres désengagés,
ils conservent les stigmates de la répression brutale d'une
grève de solidarité avec leurs professeurs en no.embre 1961,
qui entraina l'incarceration de quelques uns et provoqua l'rrri-
tation toujours vivace de Sékou TOuré, contre les intellectuels
et les étudiants. Engagés ou non, la plupart ne se défendent
~uère cependant de l'idéologie socialiste règnante."réf C.Ri-
vière ibid p205.
En ce qui concerne les étudiants Guinéens de l'étran-
ger. ils sont les plus violents contradicteurs du régime, à
savoir leur prise de position sur le plan des principes comme
celui des faits.
Ces étudiants sont divisés en plusieurs courants
U G G F et R G E(Union générale des Guinéens en France,)

·"'.'
".". _ ~"',r._.~~.~...
.. ~::--""':''''''''''_' __''-_'''''._''_''';_.'_"'''~ .,_'..k ..._ ....._~-':...-:'~· • t-.
/
:
- 165'-
Regroupement des Guinéens) - A E G F (association des étudiants guinéens
en France
Ces différents courants formulent certains griefs
qui peuvent se résumer de la façon suivante -
- Acuité de vue dans le décalage des faiblesses et
erreurs rl~~
politique: dénonciation de l'autoritarisme du
leader du pays
- Politique de sabotage économique avec destruction
des acquis de l'époque coloniale
- manque de structures d'exploitation des compétences
de la génération montante surtout la non création de conditions
de vie répondant à la valeur de leur travail, ayant pour consé-
quence 1 e "'b
.
ra1n d
.
ra1n "
- Frustration des espoirs d'ascension sociale, d'où
l'aspiration à la prise en considération de leurs qualités
d'administrateurs dont la génération de combatifs au pouvoir a
été depourvue, et au déverrouillage de la mobilité sociale pour
les jeunes générations.
- En réalité ces deux courants sont diametralement
opposés et de surcroit reposent sur des fondements idélogiques
différents. L'U.G.F. et le R.G.E. d'aubedience capitaliste pr6-
nent la libre entreprise à "outrance" avec pour toile de fond
le "réalisme" et le "mir~cle" Ivoirien-Opposition à coloration
et~ique de par sa fondation sociale.(90~ des membres du R.G.E.
sont de la moyenne Guinée-Peulh)-
Quant à l'A.E.G.F. section Guinéenne de la F.E.A.N.F •.

_o. ._-. r'. _._;,; .•.•.•: . - .
- 166 ',-
(F6dération des 6tudiants d'Afrique noire en France) -
Elle se distingue de la première opposition par son engagement
"Progressiste" mais un peu trop débordant - se perd souvent
dans des querelles intestines(lBtte eotre la Chine de ~ao
Tsetoung et l'Union soviétique) qui, en réalité n'est pas le
vrai problème guinéen.
Nous pensons que ce problème mérite une attention
particulière, mais la question cruciale est de montrer aux diri-
geants africains comment qu'ils peuvent aujourd'hui avec la con-
joncture actuelle soustraire les peuples de la grande misère.
wLe rôle du théoricien n'est plus de jeter l'éclair de la pensée
sur la masse passive, mais d'aider le proletariat dans son tra-
vail intellectuel, dans son évolution de la conscience encore
vague et informe, vers la clarification et la cohérence totale
"(K.~arx Oeuvre II, Werke-K.~arx) (1).
Ces confl i ts
entre le P.O.G. et les organisations
estudiantines se sont affirmé s
très tôt, peut~être expl i cables par
une surév8luit~on naturelle du rôle de l'étudiant dans la révo-
lution guinéenne, par rapport au rôle du peuple et, par une mé-
connaissance de l'évolution réelle du pays qu'ils ont quitté.
En fait le parti démocratique de Guinée a toujours
eu du mal à contrÔler les étudiants de l'extérieur~ Du temps
de la lutte contre les colonisateurs les mots d'ordre de com-
promission ont toujours été repoussés avec hargne par les étudiants
Attitude qui a provoqué une marginalisation au sein
1)
IL y a deux sortes d'oppositions à l'extérieur: une qui est officielle
et l'autre manifestée dans la quotidienneté par les "inconnus".par ailleurs
Rossana Rossanda, dit avec plus de clarté dans son article
"Lesl intellectuels révolutionnaires et l'Union Soviéti~ue" temps modernes
ma.rs\\ 1974, n 0 332, ilLe cou,rant trotSKyste.; avec tout re· respec
da à certaines exce-
ptiO"ns'- a, lui aussi, décroché, mais par une méthode inverse. Non par indifference, mais
par e1xcès de dramtisatiofl ll •
••
,
1
\\
-',
\\1'

1
- 167 -
de la J.R.D.A."5i, à l'exception des centres universitaires de
France, ces comités se sont effectivement constitués, leurs
activités ont été, dans leur ensemble, insuffisamment déve-
loppées" Réf. 5.Touré, l'action politique p.143. La création
de la J.R.D.A en dit long·
~ur la démarcation de ces organisations.
AUcune d'elles n'avait fait parvenir de rapports, d'articles
de presse, d'études sur ses activités ni de télégrammes de
félicitations è la direction du Parti(sauf Moscou, Rome, le
Caire), pas plus d'ailleurs qu'ils n'avaient reçu de comptes
rendus d'informations sur les manifestations et réalisations
de la J.R.D.A. en Guinée.
Le clivage s'est approfondi depuis, doublé d'un
conflit, d'origine peut-fttre autant psychologique qu'idéologi-
que. A Paris comme à Dakar, les étudiants guinéens, auxquels
les bourses du gouvernement guinéen ont été supprimées dès 1964,
(1) accusent tous, S8DS une forme ou S~5
une autre, le gouverne-
ment de conduire le pays à sa ruine, de faire preuve d'incompé-
tence et de rigorisme tyrannique.
Novembre 1970 a 't' sonné le glas de ia non compréhen-
sion car l'évènement qui se produisit (l'agression portugaise
contre la Guinée) donna l'occasion à Sékou Touré d'en finir avec
les mouvements par le biais de la condamnation par coutumance
de ses représentants. Ainsi, ces étudiants 1140., dont 449 dans
l'enseignement superieur et 691 dans l'enseignement technique
moyen en 1962, 1450 en 1966 - boursiers seulement) causent-ils
(1) - Pratique assez courante en Afrique
car, certains étudiants Ivoiriens
ont perdu leur bourse à la suite de leur refus d'adhérer au M.E.E.C.I
(Mouvement des Elèves et Etudiants de Côte d'Ivoire)

,1 t: ..
1 . L
-168
-
les problèmes les plus graves aux dirigean.ts guin6ens qui
se sont oppos6s en 1961 à ce que les boursiers contractent
mariage hors de leur pays et qui ont decidé leur retour
obligatoire en Guinée à l'occasion des grandes vacances, afin
de les retremper dans les r6alit6s nationales. N'6tant assurés
de retourner à l'étranger que ceux quI militaient activement
pour le parti chez eux et qui acceptaient(au moins comme prin-
cipe) d'aider l'alphabetisation rurale ou le perfectionnement
des moniteurs.
Nombreux sont ceux qui, une fois à l'étranger,
refusent de rallier la Guin6e. En 1966, on en comptait au
moins 400, en France, avec un passeport perimé, quatre y
étaient restés à leur retour de ~oscou ou de Prague ; de Juin
1966 à Juin 1968, sur cent soixante quinze Guinéens qui termi-
naient leurs études aux U.S.R., trente-neuf ont refusé de ren-
trer et ont pris d'autres destinations.(Amérique, Europe et
Afrique) Est-ce encore une manière de s'opposer au régime 7
Peut-~tre, mais la motivation avouée en recouvre bien d'autres
refus de devenir martyrs sans portée réelle sur le cours de
l'histoire(crainte de devoir partager un maigre salaire avec les
parents, de retrouver des tutelles familiales joyeusement se-
couées, de l'inadaptation de nouvelles attitudes fraichement
acquises).
Il s'agit surtout d'éviter le sevrage absurde de
liberté d'expression et de comportements intellectuels inexis-
tants sous la dictature du P.O.G. Revendication de droit élé-
mentaire que Sékou Touré qualifie d'attitude contre-revolution-

naire (ils ne sont pas décolonisés) (1).
Mais plus nombreux que ceux qui se tournent
'l'
"
. . vers des
'
régimes liberaux sont ceux qui, même en pays capitaliste,
cherchent le salut dans des attitudes radicales et pré co-
nisent une révolution de type marxiste." Les antagoniE mes
entre intellectuels vivant hors de Guinée et politiciens en
place rendent compte du peu d'écho de l'invitation, faite par
Sékou TOuré, le 28 Séptembre 1968, et dans El moudjaid,
(journal Algérien) aux Guinéens à l'étranger, de retourner
en leur pays. Bien que les réalités de l'exil ne sont pas
agréables pour bon nombre, en France par exemple, la plupart
préfèrent y demeurer pour ne devoir subir le sort de ceux qui
se sont laissé prendre par la demagogie de rassemblement(Diallo
SaIkou, doyen intérimaire de la Faculté des sciences de Conakry,
après son retour d'Europe, après son retour d'Europe, incarcéré
pour s'@tre exprimé avec trop de sincérité.)
Les efforts d'adaptation entrepris par les autorités
guinéennes sont louables mais demanderait plus que l'énonciation.
En d'autre terme "il ne suffit pas d'adapter l'enseignement au
développement par des solutions de détail sur tel ou tel point,
il faut repenser le problème dans son ensemble.
Le problème fondamental de l'heure, c'est qu'il n'y a
pas d'école,ni d'Université africaine, il n'y a qu'une école
ou une Université transplantée de l'extérieur en Afrique.
(1 ) "DécJloniSer" est une adaptation : à l'extérieur comme à l'intérieur
1
d'une communauté.

i'lO
Or, africaniser l'enseignement ne consiste pas à remplacer
dans les livres le Roman de Renart par les aventures de
Leuk le lièvre, (Baba la BAkréba)(1) Pierre ou John par
~amadou, le blé par le mil, ni même à augmenter l'horaire
des cours de littérature et d'histoire africaine. Africaniser
l'enseignement c'est le penser en fonction des problèmes qui
se posent à ces pays et qui commandent des structures, des
programmes et des méthodes particulières. La démarche consiste
à définir d'abord clairement les finalités et les objectifs de
l'Education, puis à modifier en conséquence le système existant.
"(Réf LE THANK KHOI Ltenseignement en Afrigue tropicale.
PUF 1 971
p~ 377.
L'école moderne, qui n'a pas réussi à s'adapter,
non plus à rester traditionnelle, créé toujours des fausses
notes à tous les niveaux comportementaux - Vulgarité et désin-
voIture d'une part, pédantisme et goQt de l'abstrus d'autre
part, qui sont considérés comme des attitudes et des modes d'ex-
pression nécessaires à l'affranchissement.
Des Attitudes quotidiennes de la J.R.O.A.
Ces réactions s'harmon~ent psychologiquement avec
toute une série d'attitudes modernistes à l'égard des adultes,
des moeurs coutumières, des idéologies religieuses etc., qui
permettent d'évoquer un réel conflit des générations. Par ail-
leurs ces réactions juvenilles ne doivent pas ~tre comprise à
travers les "modèles culturels en rapport avec l'éducation,
; (1)
1
Baba la SAkréba veut dire en "malinké" le bouc cownu de Baba

car c'est d'une certaine mani~re ne rien ajouter de nouveau
à la question, car modèles culturels, normes de conduite ou
éducation, n'est-ce pas la même cbose vue sous des vocables
différents? Peut-être conviendrait-il néanmoins de souligner
leur but commun qui ast de donner naissance à l'individu mo-
dèle. Par contre, penser les modèles culturels et l'éducation
en rapport avec le concept ~sychanalytique de frustration,
c'est en quelque sorte montrer l'envers du décor, c'est pousser
l'analyse dans le sens opposé afin de montrer l'autre de l'indi-
vidu modèle."réf Abdou Touré (La civilisation quotidienne en
COte d'Ivoire Karthala p51 1981
). Nous pessons que les réac-
tions en question doivent être placées dans le cadre du jeu
politique - L'articulation entre le niveau politique: adhésion
au Parti et mobilisation par lui, et le niveau social : essai
de liquidation des tensions entre générations, soulève une cer-
taine problématique à laquelle répond l'histoire.Ainsi serait-
il abusif d'affirmer Qu'un conflit de générations a trouvé son
expre~sion politique dans le mouwement J.R.O.A. La "restructu-
ration interne des rapports sociaux en GVinée n'a été qu'un
élément secondaire par rapport aux déterminations fondamentales
d'origine politico-économique n • Que le P.O.G. ait tenté de
rendre réelle, objective et quotidienne, la puissance des jeunes,
jusqu'alors latente, potentielle et source de tensions indivi-
duelles, face à la tutelle des vieux, entre seulement dans le
cadre d'une politique de desaliénation générale et dans une

.. -.
.- - ...---------_ .. - -
-
-: .
...~.
...
.... J'::"
..
l
'-' .'
. •
1.
Strat'gie de la r'volutlon dont partout dans le monde la
jeunesse, en tant que catégorie d'Age la plus liberée du
passé et la plus tendue vers le futur, a été l'inspiratrice
et l'élément moteur. L'exercice effectif de la puissance pa-
raissait d'ailleurs normal à la jeunesse en possession d'une
triple supériorité : la superioté du nombre, celle de la force
physique et la supériorité intellectuelle. Les deux premières
pouvaient jouer comme intimidatt1ces, la troisième comme facteur
d'accès de la Société ou monde moderne. Quelle fut la Stratégie
du P.o.G.? c'est le cata1ysation de ces forces à son pr&fit.
De par ce"coup de me1tre" le perti créait une situation nouve1-
le entre générations.~ais, cette strategie placée dans l'anté-
riorité historique, montrerait l'accélération et la liberation
du processus de divorce entre lettrés et analphabètes, inclus
dans le dynamisme de la colonisation(1). La rupture eAtre tradi-
tionalistes et modernistes avait précédé l'établissement d'une
nouvelle idéologie politique spécifiée.
Le concept "conflit de générations" a pour connotation
deux phénomènes: un clivage selon l'age, un rapport de domination·
subordination, en fonction de ces deux phénomènes la démarche du
parti, B été malgré des"intentions égalitaires et ses oppositions
aux hierarchies traditionnelles de séniorité, de ne pas reduire
le clivage, mais plutOt à renverser les termes du rapport domi-
nation-subordination.
Ce renversement a pour objectif pour le parti de dimi-
nuer
1
Le R.D.A a eu pour base Sociale pendant sa lutte de "libération" la
payJannerie et les travailleurs urbains

la force d'influence des ain6s et des vieux qui n'adh~rent aux
mots d'ordre que du bout des lèvre$.
"Déjà en ville, la contradiction commence à se depasser
par l'éclipse de l'antithétiqùe dans le rapport jeunes-vieux. Une
mentalité plus moderne des adultes, la di~ution du contrele so-
cial par les brassages ethniques au sein d'un habitat mêlé, le
cadrage plus léche de la famille relativement restreinte tendent
à produire moins un délestage des tutelles que l'annihilation de
ce problème de tutelle, par un lent glissement dans la perception
des sources de normes, celles-ci n'étant plus détenues par les
ainés et les vieux, mais par ceux que le jeune estime être ses
contemporains par la mentalité sinon par l'Age." ibid C.Rivière
p21D.
Ce renversement du rapport antérieur des forces a
exacerbé dans les villages plus de problèmes qu'Il n'a en a résolus
en produisant un retournement des contraintes idéologiques, une
perturbation des systèmes de coercission, une remise en question
des anciens circuits matrimonlaux, une liberation des pulsions
sexuelles et bien d'autres difficultés morales que l'approche
psychologique est la mieux en mesure de saisir.
Par ses problèmes propres et ses caractéristiques
singulières, la jeunesse forme bien cepndant une couche soclale
particuli~re quoique non antagoniste foncièrement, par sapport
au reste de la population. Coupé de ses geniteurs par son éducation,
son type de travail, son goOt des loisirs et son endoctrinement
politique, le jeune scolarisé se heurte si souvent à l'adulte

..
..........
...
-~
'.:---~.'" --:-.~.,
_~_ .... -:~.~
"';~~-:.-.~.~~:.""
..:-:.~ .•. "'-,".'"":"
: .. ~.
.. l __ ..... -
qu'on peut s'interroger sur le r6sultet de l'accumulation
des incompr6hensions mutuelles lorsqu'aure disparu la force
r6ellement cohesive de .1'id6ologie du PDG.
Il s'en suivra certainement la confusion et la tra-
g6die qui n'ont pas 6pargn6es les jeunes des pays-frontaliers
Cete d'Ivoire et S6n6gal.
En fait il y a une juxtapositton de deux mondes.
Au monde traditio"nel des adultes s'est cr6é un monde culturel
r6gi par les jeunes, par les scolarisés particulièrement, qui,
mal à l'aise dans leur milieu d'origine, cherchent de mille
manières è s'en affranchir.
Entre ces deux mondes règne une certaine incompr6-
hension. Les reproches des vieux portent sur le Rdéboulonnement"
des jeunes à savoir: l'irrespect, la vantardise, l'inutilité,
l'égolsme, surtout leur dedain pour la terre accompagné d'une
ignorance apparente des réalités du pays. Ils ne se mettent en
valeur qu'en semant le désordre en s'autorisant de directives
politiques, qui ne sont que moyens de soustraction aux ordres
familiaux tout en refusant de rembourser les sacrifices con-
sentis pour eux. L'inquiétude est de mise dans les villages à
tel point que, les villageois adultes sont ambivalemment agres-
sifs, déçus, critiques, face à l'excès d'autonomie des jeunes
et à leur refus de se conformer aux devoirs coutumiers, et
heureux de leur éventuelle réussite qui apportera honneur et
profit au lignage.

Ces malaises peuvent ttre attribués à l'inadaptation
actuelle aux exigences de l'avenir, du régime éducatif tradi~
tionnel, impuissant à dépasser le cadre étroit du clan familial
et de l'ethnie. D'où une ambiguité fondamentale au coeur du moi.
Le façonnement secondaire de la personnalité par l'idéologie
régnante et les courants d'émancipation acquis en partie è
l'école n'arrivent pas à supprimer les structures profondes d'un
comportement d'abord modelé par la tradition. A cela s'ajoute le
semblant superficiel qui joue l'attrait d'un style de conduite
nouveau qui représente pour le jeune une aventure, celle de
l'afranchlssement de la liberté. ~ais lorsqu'il s'agit d'affron-
ter l'isolement, de faire fi des menaces coutumières, les an-
ciens modèles en»acinés ressurgissent parce qu'ils assurent la
securisation de la personne. Ainsi la persuasion d'être affran-
chi se traduit-elle surtout dans des éléments de conduite acces-
soires et superficiels, tandis qu'est sauvegard6e la personna-
lité de base. TOut à l'occident(1) sauf l'aspect créateur, pro-
ductlf, économe et comptable. Il reste encore à certains égards
dans la logique traditionnelle. Un point est cependant commun aux
deux, parce qu'il est d'abord humain: Le prestige èe parâ!tre.
Dans l'Afrique moderne, l'habit est signe."mais, dit
P.Bonnaf6, la qualit6 du signe est ici décup16e : les vêtements
(une belle chemise) apparaissent comme le moyen le plus simple,
le moins onéreux, de transformer par son apparence vestimentaire
sa situation personnelle et sociale, de promouvoir son identité,
(1)
Les jeunes changent de noms pour emprunter des pseudonymes des acteurs
occidentaux - Samy Frey, Jean Paul Belmondo, Aldo, Franco Nero etc ..

_ 176 _
de prendre place par ce signe dans un autre champ de signi-
fication"(uns classe d'age politique, la J.~.N.R. du Congo-
Brazzaville, cahiers d'6tudes Africaines, VIII 31, 196B,P339.
Par ailleurs on peut aussi interpr6ter les presti-
ges dc~parattre dans un conte~te g'n'ral de la consommation.
Or, dit le m6me auteur, "la consommation est à saisir sous son
double aspect: de r'alisation(rare et effectivement limit'e),
mais aussi de relation à l'imaginaire. Ici peut r'apparaitre
la notion de modèle de consommation, non plus dans sa fonction
de structure abstraite de l'exP,rience, mais dans l'explication
d'un mode de saisie de valeurs 6conomiques modernes, d'un lan-
gage qui d'signe et signifie les objectifs du r'seau commer-
cial. Le modèle de d,signation o~ d'appropriation(vraie ou
fictive) 'tait- et reste en grande partie - le consommateur
blanc, il tend à devenir en plus le consommateur noir dans la
version qu'en fournit le commerçant ou le fonctionnaire, parties
d'une nouvelle sémantique qui se superpose à la précédente
sans l'effacer."ibid, P338-
L'impact de la consommation, se sent sur toute la
société, mais sur les jeunes, se marque d'avantage, car ils
détiennent des bourses,-et sont salariés grâce à leur degré
d'instruction qu'ils peuvent utiliser à leur guise sans con-
trainte aucune, et sans qu'aucune pression d'un milieu familial
abandonné en campagne ne les oblige immédiatement a redistri-
.\\
buer. De là, toute une nouvelle hiérarchie de valeurs fort
répandue, orientée vers la consommation, tandis que celles
(1)
~octroi des bourses dlétude siest arrêté en 1974 en Guinnée.

1
:J
177'
fondées sur la production et l'épargne manquent d'audience
autant par défaut d'exemples modernes que parce qu'elles
s'insèrent encore mentalement dans tout un réseau de frustra-
tions établies sous la colonisation.
L'engagement politique accentue encore le conflit
de générations(1). Cette accentuation provient du fait que les
jeunes croient à leur mission révolutionnaire de redressement
de la société et à partir de là une survalorisation personnel-
le qui n'est pas sans entrainer des heurts avec les générations
antérieures, surtout chez les miliciens. A la place du coloni-
sateur en allé, le génération africaine de l'indépendance s'est
installée, prolongeant parfois les abus qutelle dénonçait quel-
ques années auparavant: égoisme, ambition, gabegie financière,
cousinages, marchandages, réquisition à son profit, appropria-
tion illégitime des biens nationaux la tentation est grande
pour les jeunes, incités d'ailleurs par Sékou TOuré, de dé non-
cer les ainés comme a été dénoncé le colonialisme français.
C'est là une des raisons du conflit intergénération. A défaut
d!une reconversion des anciens, le gouvernement compte sur un
rajeunissement des cadres.
La crise de la civilisation traditionnelle n'a pas
que dévoilé le conflit de générations, mais ça aussi précipiter
la légèreté des mee~rs surtout dans les milieux urbains - 63~
des lycéens de dix-neuf ans, selon P.Hanry, ont connu de deux
~ cinq partenaires : nous pensons que dans une situation de ré-
(1) C'est contre toute évidence que 26% des jeunes lycéens enquêtés à Conakry
en 1965 nient la survie et l'emprise des anciennes coutumes. Leur attitude
lrréaliste revèle à la fois
le dérracinement,la méconnaissance du passé
et des générations antérieures et, le manque de clairvoyance sans passion,
par suite d'une propagande d'emblée révolutionnaire. Ref ibid C. Rivière
page 213.

- 178 -
de r6volte et de pagaille 1'6mancipation de la femme ne peut
que se d6rober de sa vraie mission.
Sur le probl~me de la virginit6, les réponses des
lyc6ennes enquêtées par P.Hanry manquent de sincérité. On serait
tenté de croire qu'en raison de la valeur qui y est attachée,
du contrOle effectué lors du mariage et de la crainte du scan-
dale, la virginité est en honneur
~ais, selon "l'opinion d'un médecin guinéen ayant
assuré la consultation scolaire, la proportion des jeunes fil-
les vierges a dix-sept dix huit ans ne depasserait pas 20~.
L'examen du dossier scolaire des filles de dixième, onaième,
douzième enquêtées apprenait qu'une d'entre elles était mère
et que plusieurs autres avaient été hospitalisées dans un ser-
vice gynécologique en raison de complications consécutives à un
avortement."
La vie "by night" des jeunes filles en Guinée est
liée aux conditions générales de vie - grande liberté laissée
aux enfants, absence générale de contraintes et de discipline
en dépit de l'action coercitive du PDG cherchant à effacer
l'héritage trop voyant du colonialisme. Cette vie de déb~che
n'a fait que raviver les flammes de la prostitution, qui sont
autant de facteurs qui font que la jeune GUinéenne a peu de
chances, et d'envie, de conserver sa virginité. Pour ce qui
concerne la virginité, elle est en réalité une institution so-
ciale qui a sa fonction dans la société traditionnelle - il
s'agit d'un comportement sexuel qui honore la famille bien que

_ 179 _
dans la situation actuelle, il peut naitre en dehors du m~iage
un enfant sans pour autant que cela soit vu comme une catastrophe.
"Quant aux c~rémonies de contrOle de la virginité, chacun
trouve avantage à se montrer créduŒk J les perents d'abord,
puisque la valeur marchande et morale de la fille se trouve
augmentée par la reconnaissance, même feinte, de la virginité,
et ensuite la fille et son fiancé, Qui acceptent sans hésiter
les félicitations Qu'on leur adresse. TOut le monde fait comme
si ••• d'un ou complice, en refusant de menacer ouvertement une
véritable institution sociale."
Les deux premières années de l'indépendance avaient
réussi à enrayer la prostitution professionnelle de l'époque
coloniale, mais peu de temps après elle a fait sa réaparution
dans les bars de Conakry(Eldorado, Tam-Tam, Bonne Auberge,
Calebasse, Camayenne ••• ) ou l'on rencontre de jeunes belles
de la lanterne rouge à l'affQt du client. Parallèlement à cette
prostitution de métiers'est crée une sorte de prostitution
"politique" : les cadres du P.O.G. - et non des moindres - ont
montré un penchant certain pour les jeunes filles et n'ont jamai
cherché à le cacher"La jeune écolière - et nous connaissons de
nombreux cas - qui devient la maitresse d'un personnage importan
est assurée de son avenir : Toilette, mariage(avec un fidèle
complaisant) et même souvent, succès universitaire lui sont
assurés. Dans ces conditions, nombreuses sont les lycéennes
qui cèdent à la tentation."Réf P.Hanry cité par C.Ricière P215.

-180.
CONCLUSION
DU
CHAPITRE 1
A l'instar de la jeunesse, on peut aisement se faire
une certaine idée du charme guinéen. Car "placée au point le
plus sensible de l'~volution historique, la jeunesse africaine
constitue le trait d'union le plus actif entre un pass~ contenu
davantage dans une certaine personnalité de base, encore mal
int~grée au moins, que dans une connaissance des traditions,
et un avenir qu'elle porte en gestation, qui sera guidé par ses
espérances, mO par son dynanisme, mais peut-~tre lourd aussI
d'un présent malfteureux. Principale force combattante, porte-
parole des aspirations confuses d'un peuple, la jeunesse a sans
doute l'étonnant privilège d'~tre associée à une période essen-
tiellement révolutionnaire.Qu'adviendra-t-il de ces jeunes dans
dix ou vingt ans? l'avortement des révolutions dites socia-
listes en Afrique et l'impossible développement économique sans
une assistance qui laisse de plus en plus le malade se vacciner
lui-même ou se suicider font augurer une génération de fatigués,
de deçus ou de profiteurs en place." réf C.Rivière P216.
Dans une certaine mesure cet état de fait peut être
amputée "à l'histoire récente de l'Afrique(qui) se confond
avec l'histoire de la colonisation. Il nous advient encore de
faire - chaque jour - la douloureuse expérience des séquelles
de celle-ci. Avec la subversion coloniale, l'Afrique connut la
Sauvagerie - elle fut baptisée sauvage afin d'être soumise au
processus de civilisation-décivilisation, elle, connut le sous-

,
~
~
,\\,~...
~
~---,:;',- •.._ ..........:'•.:.:..._:. ...... ,>
- 181 -
developpement - sous-développée par l'Occident capitaliste
pour Itre placée sur les rails du développement ~ l'occi-
dentale, c'est-à-dire seulement en voie de développementJ elle
connait également, entre autres maladies, l'analphabetisme -
an- alphabétisée afin d'être initiée au mode occidental d'al-
phabétisation." réf Abdou Touré P.78.
Certes cet aspect de la déroute est à prendre en
considération mais, il ne devient explicatif que si l'on se
refère au manque d'initiative et de responsabilité des ainés
dirigean~de la période post-coloniale. La génération nouvelle
a manqué d'encadrement.
- A la place du concret on a preferé le bourrage
de crane et le verbiage politique. Elle s'est aussi enfermée
dans des difficultés d'ordre rationnel paraissant sans issue
désir de retour aux sources d'une part, mais rejet des coutumes
matrimoniales, politiques et religieuses ancestrales d'autre
part; exaltation du Socialisme d'Etat, mais refus de consen-
tir à des sacrifices nécessaires, retour à la terre, privation
de biens de Semi-luxe, proclamation d'une auto-construction
de la Guinée, mais course au fonctionnariat, enlisement dans
la routine et bâillements rémunérés par l'Etat; déchainements
collectifs contre l'emprise contraignante des vieux, mais
respect du père et des sages chez chaque individu pris isolé-
ment.
La jeunesse guinéenne est victime de la politique
incohérente de l'éducation"maitres et élèves passent le plus
clair de leur temps a deux choses principalement: la récita-

_182
_
tion
des 6lu-cubratlons du tyran, et les r6p6ti tions des
"quinzaines artistiques". Inutile de dire que l'enseigne-
ment de masses ainsi compris et pratiqu6, s'est sold6 par
une baisse catastrophique des niveaux. Il a ramené l'école
guinéenne à la ligne d'horizon des hommes du P.D.G.Tout s'est
passé comme si ces derniers avaient voulu systématiquement en
détruire l'image aux yeux des Guinéens. De fait, il n'est pas
rare d'entendre une réflexion de ce genre :"Pourquoi, au fond,
envoyer les enfants à l'école 7 Sékou TOuré a-t-il fait
l'E:P.S.(Ecole Primaire Supérieure) 7 ~ais n'est-ce pas lui
qui fait la loi à tout le monde 7" Réf Sako Kondé. Guinée. le
temps des fripouilles, Pensée Universelle, p.126, 1974
Cette école, en réalité n'existe que de nom: infras-
tructure d'accueil limitée, des programmes à l'emporte pièce
d'où sont bannies la plupart des matières généralement enseignées
dans tout système d'éducation conçu dans l'intér@t de la jeunes-
se. Ce ~rofit d'une formation pseudo-idéologique fondée essen-
tiellement sur les discours incantatoires transformés en oeuvres
de Sékou Touré.
Tous ces éléments "d'appréciation" montrent bien que
la jeunesse se trouve entre le marteau et l'enclume - fondement
de déséquilibre psychologique est donc de fait, trouvant son eti-
gine dans la contradiction entre, d'une part, des aspirations
à un niveau de vie assez élevé, répercussion des modèles occi-
dentaux, appris par contact avec les étrangers et avec les moyens
d'information qui colportent la civilisation moderne universaliste,

'183-
et d'autre part, l'affirmation d'une personnalit6 proprement
efricaine et Quin6enne, hyperconsciente de la colonisation
culturelle dont elle a 6t6 l'objet et cherchenb sa voie dans
le respect des valeurs anciennes. ~ais la difficult6 engendre
inconsciemment une angoisse car ni les jeunes ni les adultes
n'ont encore conçu les moyens d'exorciser tout à fait les or-
ganisations sociales et les méthodes traditionnelles sans tou-
cher aux valeurs, pas plus qu'ils ne désirent ni n'arrivent à
inventer la manière de se désolidariser d'un monde bourgeois
officiellement abhor6 et inconsciemment ador6. La voie de Syn-
thèse, nul pays d'Afrique, à notre su, ne la encore trouvée.
Pour l'instant, le déséquilibre est considéré comme une injustice,
fruit d'une agression imperialiste •
.
Quant aux plus d~favor;sést
la voie de libération du
fardeau quotidien du manque à gagner, se trouve dans les activités
sportives demandant une débauche d'énergie(judo, boxe) et le ciné-
ma de violence(cow boy· et Karaté ). En fait ces activités ludi-
ques sont des compensations des desavantages de la vie réelle.
Quant à la jeunesse d'élite, la difficulté de synthèse est plus
intériosée et se ressent sur le plan culturel.
- envie d'agrandir l'horizon culturel sans se départir-de la
culture politique officielle, et l'idéologie de la "Révolution"
guinéenne. Tout est conçu et fait pour limiter la propension
de la raison critique. L'Etat dispose des moyens d'information,
et ne livre que les informations de conditionnement."Les programmes
de philosophie éliminent la philosophie première et l'idéologie

.. _.
-~
- ... -". .. ......,........
. ";-
-184
du socialisme d'Etat imprègne trop les esprits pour qu'un
ph6nom~ne,(un marxiste) un 8artiien ou un psychanalyste en
herbe ne se sente pas la mauvaise conscience d'un individua-
liste forcen6."C. Rivière P.218. La porte de sortie n'est au-
tre que la J.R.D.A mouvement à travers lequel l'on se défoule
par l'adoption d'une attitude pseudo-revolutionnaire -
- dénonciation collective de la "cinquième colonne", qui du
reste n'est autre que la classe dirigeante qui n'arrive pas à
faire la co:onne par un.
Toutes ces inadaptations sont d~es au manque
d'apprentIssage r6el, et à la sous information premeditée. Con-
séquences: difficultés de l'adolescence, avec tous les traits
psychologiques qui la caractérisent, gagnent en importance la
délinquance juvenille ne manque pas au tableau sombre de cette
jeunesse. Au lieu et place des bandes, ce sont les groupes de
miliciens et autres gardes prétoriennes qui commettent des actes
de vandalisme à l'endroit des personnes et biens publics.
Et ceci malgré "Toute fois, par comparaison avec
beaucoup d'autres pays africains, les enfants et adolescents
inadaptés ou délinquants sont rares." C.Riuière P.21B.
Cette conclusion partielle s'achevera sur la question
suivante:
un quelconque changement de système, sera-t-il suivi
de changement de mentalité après taot d'année de mystification?
CONCLUSION GENERALE SUR LE SOCIALISME GUINEEN
Une conclusion se veut généralement @tre un résumé

,\\..7._'-
"",.~' • • "
_ • • • •
- 185 _
/
sommaire de tout ce qui a 6t6 dit ou 6crit. ~ais dans le cas
de'_ la Guin6e, aucun 6crit ni même, une thèse n'est è mesure
d'6puiser et de circonscrire le drame guin6en car il dépasse
l'incomensurable. Ceci étant nous essayerons tout de mArne de
donner les grandes lignes de notre observation des faits.
FEU
~AGASSOUBA
~ORIBA
=======================
- ~édecin Africain de formation
- ~embre militant fondateur du Parti Démocratique de Guinée,
au sein duquel il a assumé les plus hautes responsabilités.
- Ancien Secréta~re d'Etat à l'intérieur de la Guinée
- Ancien ministre de l'éducation Nationale
- Ancien Directeur du Cabinet du Domaine Social.
- ArrAté,"jugé", condamné à mort et pendu publiquement quelque
part en Guinée le 25 Janvier 1971.
disa.t ceci lors du congrès de la bouche ouverte"j'ouvre la
bouche. Ce qui en sortira sera amer et désagréable. Ce sera un
tollé général, une véritable levée de boucliers! Vais-je m'atti-
r e r des i ni mit i é s pou r cel a ? 0u i, mai s peu mec ha[h
! Apl US d 1 un
niveau, on constate une négligence coupable(1) dans l'accomplis-
sement du devoir: l'enseignant qui se soucie peu de l'éducation-
des enfants qui lui sont confiés, le responsable d'entreprise
qui néglige le problème de ravitaillement de l'entreprise en ma-
tières premières entra!nant ainsi des ruptures de Stocks, le com-
mis qui vient en retard, fait acte de présence dans son bureau
et remet toujours au lendemain ce qu'il peut faire en quelques
(1) - Souligné
par nous

minutes, la eecr6taire dactylographe qui passe son temps
A se promener entre "Sonatex", "Confection" et autres ma-
gasins de luxe, le m6decin qu'on trouve rarement A son ser(-
vice même en cas d'urgence, le personnel infirmier qui aban-
donne son poste de garde pour aller au cinéma, la sage-femme
inconsciente et arrogante A l'égard de ses parturiantes, qui
préfère consacrer son temps à l'écoute des émissions radio-
phoniques ou à la lecture de photo-romans.
Sur le plan de la gestion, on peut dire que ce sont
les responsables administratifs qui donnent le ton dans les
malversations jusqu'ici connues et contribuent activement A
affaiblir le régime. Dans cette course au gain, ils ne sont plu.
ces responsables qu'on doit retrouver"devant".au "milieu" et
"derrière" les militants. Ils ne sont nulle part par ailleurs
que "devant" le coffre-fort du trafic, au "milieu" de la
de-
mobilisation qu'ils provoquent et "derrière" l'échec qu'ils
souhaitent. On nous dit que depuis notre indépendance nationale,
nous avons importé plus de véhicules automobiles qu'il y en a
en Espagne. Tout le monde roule "Fiat" eu caracolé dans les
voitures Citroën 2 C V.
DES DETOURNE~ENTS DE BIENS de la Nation pour
des fins personnelles se découvrent. La propriété du peu~ n'est
pas respectée. Et voilà que ce peuple accuse aujourd'hui tout
un chacun de faire des affaires sur son dos. De certains petits
commis à certains "haut placés" comme on dit, en passant par


. '. rt'-
,,"',, '.,,:
~.! ,,:-., ~
.
.__....."-'.---'.... - ~-.~.·:.I .....· ;-." ,'-'-.
certains responsables de régions. Toutes ces insinuations
ou accusations que l'on murmure doivent être vérifiés, en
vue de sanctionner les coupables ou de mettre fin à de t9ls
bobards de nature à ternir la réputation de la Révolution.
Alors, faisons confiance au C'Ongrès donc au peuple
qui, grâce à sa vigilance et à sa fermeté saura respecter
les fruits de son labeur en éliminant tous ceux qui le trom-
pent et qui se plaisent à tenir, suivant les milieux et les
circonstances, des langages ultra-révolutionnaires ou ultra-
réactionnaires.
Pâurvu que leur trahison réussisse et que leurs af-
faires florissent oui, il faut des hommes conscients, honnêtes
et dévoués, totalement engagés dans la Révolution et constam-
ment soucieux de l'intérêt général et de l'avenir du ,ays.
Nous comptons dix ans d'indépendance. Le temps des tâtonnements
et de l'inexpérience est résolu.
Nou~ avons des cadres, assez de cadres pour l'accom-
plissement correct des tâches qui leur sont dévolues. ~ais ré-
pondent-ils tous aux critères de conscience, d'honnêteté, de dé-
vouement et d'engagement révolutionnaire? VoilA ce qui doit:être
politiquement ~érifié par le Congrès et administrativement
corrigé par le pouvoir central immédiatement après le congrès.
Plus de discours foudroyants
Plus de poèmes farouches
Quant ils disent par conformisme ce qu'on ne pense
ni ne fait concrètement.

,
,
____ .
_." - __ ..
-
.
~'
,._
.~ ~'~''''~''.
'~~'~--."' .. '
-
'188
-
Plus d'applaudissements de façade
Plus de r6volutionneire du bout des lèvres.
Lp. parti O~mocratique de Guin~e n'est pas et ne
sera jamais un parti d'hypocrites. Car, enfin, on est ~coeur~
de constater à travers Conakry, par exemple, des caisses de
mat6riel non d~bal16s et qui sont expos~es aux intemperies
depuis des ann~es.
Des engins de haute valeur technlque sont jet~s çà et
là, pêle-mêle et à l'abandon(1). Des immeubles ou ~dlfices
administratifs se d~labrent à cet~ d'un service de gestion im-
mobilière sans initiative, incapable et plein d'irresponsables.
Des entreprises, telles que Transmat, Batiport, Na'aya, Sabouya,
Ematec, dont les chiffres d'affaires se situent autour des mil~
liards, manquent régulièrement de marchandises, alors qu'on
trouve sur le march~ ou avec,des "banabana"(2) mais à des prix
d'or, ces m~mes marchandises commandées pàr l'Etat et en devises.
Des entreprises telles que Enimob ne font que
du vol au niveau de l'Etat et du trafic au niveau des Ambassades
étrangères au cours de rachat de matériel aux frais de l'Etat.
Des Directeurs d'entreprises et chefs de services en pleine cri-
se d'autorité ne cherchent qu'à s'accrocher à leurs postes au
détriment du bon fonctionnement de leurs services et entreprises.
Le bien de l'état, donc du peuple, est mal geré, mal administré,
le matériel est mal entretenu ou volé parce qu'il appartient à
la Nation. Quand on pense qu'il y a en ce moment à Conakry, un
car ou autobus de la compagnie Minière qui circule depuis 1951,
C'~~t ainsi qu'une usine de montage de vélos Mifa made in D.D.R. est
resrée dans des caisses abandonnées au Port de Conakry.
2)
"Banabana" : Expression locale désignant les revendeurs ambulants.

·189 -
quand on pense que dans la mArne villE de Conakry sept cars
., .'"- .
"TUC"(3) seulement sur 22 sont en 'tat de marche pour 34
è 100 mille voyageurs, quand on pense è tout ce laisser
aller et è toute cette insouciance dans la gestion du bien
public l'on ne peut que s'indigner profond'ment.
Par ailleurs, comment pourrons-nous promouvoir une
véritable politique de développement économique, si l'agricul-
ture, soubassement de toute industrialisation, accuse des
faiblesses graves,si des jeunes gens, nantis de dip16mes
d'ingénieurs agronomes, des généticiens ou autres spécialistes
agricoles restent confinés dans des bureaux en costumes bril-
lants et souliers cirés, au lieu d'être auprès des paysans
dans la boue, sous la pluie ou au soleil pour les faire béné-
ficier des méthodes scientifiques nouvelles de l'agriculture
et permettre ainsi à nos collectivités rurales de ma1triser la
nature au profit de la productivité et de la production. Ce
n'est pas sur du goudron qu'on "produira pour se suffire"
Et pour mieux barrer la route à l'impérialisme, la
meilleure vigilance est que, nous devons, tout en utilisant
notre matière grise, être dans les champs, dans les plantations,
dans les ateliers, ou ailleurs plus que jamais dévoués et cou-
rageux au travail.
Or, quand on sait que le Parti a redonné au travail
tout son honneur et toute sa dignité, quand on sait que tous nos
artistes ne font que magnifier le travail créateur, source de
(1) - « TUC » Transport Urbain de Conakry.

'.'
".
\\
. ...
-
.
~
.,:... ,'. ~",. ': ... :.~;.. ,:"•.~ .. ··.,.;.~.t:..~l~!.~I.:, .. ~,~'~;~'
. "
, ..
.......
'
,
.~,.
.~...._._.'-_.
. . ,
-
• . _
-.~ ••. _ _ ..... , ..... ~ _ _ ,.. •. _ . _ - ...,...~.---...
__ .. _ ... :'..\\t.;-.':".-.'..:: ,.'7.,~ '': ...
.: .'_" ~: •.~.:"
•..,-. _"
.:".:1
.' .. ' . ' •
~. ~

,
• • • ,

: . } .
• •
_ 0
• •
'
-190
-
bonheur, à travers leurs chants et leurs pièces théAtrales J
quand à ceté de tout cela on considère le travail accompli
dans les opérations "coton" "canne è sucre" ou dans les ac-
tions de greffage de manguiers è Kindia, on ne peut gue se
révolter.
Nous avons applaudi la loi cadree,) qui a éliminé
les fossoyeurs et ennemis jurés du régime. ~ais depuis, que
voyons-nous? L'installation au niveau de nos organismes poli-
tiques et par une mauvaise utilisation de la démocratie, des
éléments peu scrupuleux et peu soucieux du travail, de la jus-
tice et de la défense des intérêts des militants. Ainsi, pen-
dant qu'ils couvrent et protègent les fieffés commerçants, ils
empêchent l'accès à la direction de bon nombre de nos comités
de base, d'honnêtes artisans,militants convaincus et fidèles~
(gargotières et leurs marmites, teinturières ou vendeuses de
galettes, etc) qui transforment les matières premières au pro-
fit des travailleurs. Aucun membre des comités Directeurs ou
des fédérations de Conakry par exemple, n'ignore la manière
injuste de repartir dans les comités, des denrées alimentaires.
Les Stocks attribués au Comités sont-ils toujours totalement
enlevés? Et où va le reste? S'il n'y a pas complicité à la
chaine, des mesures d'assainissement s'imposent au niveau de
ces comités. C'est l'installation dans nos rangs du népotisme
doublé de trafic. Quelques faits qui passent souvent inaperçus
ne sont pas moins symptomatiques de certaines tendances.
En effet, avant la loi cadre, la plupart de nos
1 )
(1).- Il slagit de la loi cadre du 8 Novembre 1965 sur"llétatisation" du
conunerce.

...
'
~
'
,
._ '._.'.'_.' _.. -
:.,' -O· ..-.... --
..... ~.
~ -_.~
191
manifestations populaires de Comit's Directeurs ou de
quartiers se passaient 80US la présidence des commerçants
et trafiquants notoires.
N'assistons-nous pas aujourd'hui au même chemine-
ment 7 Ecoutez un peu les communiqués qui passent à la "Voix
de la Révolution(1) et vous serez édifiés.
Aux assemblées générales on constate que les questions~
concernant la vie de la communauté des quartiers(propreté des
rues, des concessions et des maisons, ravitaillement, coOt des
denrées alimentaires, problèmes scolaires et de la jeunesse,
etc) sont à peine effl.ûrés par le fait de certains Présidents
de C~mités qui confondent autorité et autoritarisme et pous-
sent les militants à la prudence, sinon au silence, d'où la dé-
terioration du climat politique. Va-t-on continuer à s'accomo-
der de tels comportements en élisant de tels responsables ? En
d'autres lieux, c'est l'absence du sens de la responsabilité.
l
De Conakry à Diéké et de Niagasso a à Benty, les
~lèmes, qu'ils soient d'ordre politique ou administratif
ne se règlent pas ou sont traités en violation flagrante du bon
sens et de la justice que réclame le parti. Partout on cultive
l'irresponsabilité.
La position la plus commode étant, suivant les cas,
de se rabattre soit sur le Sécrétaire Général du Parti, soit
sur le Président de la République. Ce qui revient au m@me. Cette
fuite des responsabilités à la base inonde le sommet de toute
(1) «La voix de la revolution»
est le nom de la Radio diffusion Nationale
Guinéenne.

",",:,
'.' " -
"
..... , •• r~
.~. . -'.:..~ ....::.._---..::... -' -~. .. .
19~
une foule de probl~mes qu'il doit résoudre à longueur de
journée aux lieu et place des responsables politiques et
administratifs. Ne voyons-nous pas des militants venir des
fins fonds de la région de Beyla ou de Tougué pour soumettre
au chef de l'Etat ou au Secrétaire Général des problèmes
administratifs ou politiques que l'on pouvait résoudre au
niveau du Comité de la Section ou de la Région administra-
tive ?
Tout se passe comme si chacun, pour ne pas se
ftmouiller ft ou se ftgriller ft (ce sont les termes employés),
~e«NJe devant ses responsabilités.
Non camarades! Autant le peuple de Guinée s'est
débarrassé du colonialisme et de la féodalité, n'entend pas
du tout mettre à leur place des responsables omnipotents Jt
préoccupés seulement de leurs intér@ts égo!stes, autant il ne
peut et ne doit plus tolérer cette politique de démission na-
tionale •••
C'est tout cela gui doit changer fondamentalement.
Le Congrès le peut. Et il doit l'exiger si nous ne voulons pas
voir se superposer à notre régime populaire, un régime de fa-
cilités, banni par notre Révolution. Les postes de responsabilités
politiques, administratives, commerciales ne doivent @tre con-
fiés qu'à des militants honnêtes, à surface sociale étendue.
à la bonne moralité éprouvée à travers nos luttes, aux senti-
ments d'engagement total à la Révolution et de fidélité constante
au Peuple. Ouvrir l'intelligence, ouvrir la bouche, c'est en

même temps r6clamer, exiger un assainissement radical de la
Nation pour permettre aux honnêtes travailleurs de mieux se
qualifier et d'apporter une contribution plus grande ~ l'am6-
lioration des conditions d'existence du peuple. Ouvrir l'in-
telligence, ouvrir la bouche, c'est purger la Nation des trat-
tres connus ou en puissance, des incapables qui s'accrochent
à des postes de responsabilit6s, favorisent la gabegie et tri-
chent le peuple.
Ouvrir l'intelligence, ouvrir la bouche, c'est faire
du neuf dans la Nation. Et à tous les niveauxQ"(Réf Horoya 23
et 24 AoOt 1967 cité par Oiakité Claude Abou dans Guinée en-
chainée ou le li.re noir de Sékou Touré)
Ces éléments indicateurs de l'échec guinéen sont des
r~alités à partir desquelles on peut se faire une certaine idée
de la profondeur de la plaie sociale. C'est même dans l'articu-
lation des niveaux sociaux avec le politique et l'~conomique
qu'on en
jauge
le mieux la profondeur. EN effet la "révolution"
guin~enne n'a pas eu
d'impact positif sur le social ni
sur l'~conomie : "le mouvement(social) guin~en de libération
fut évacué de son contenu et détourn~ de sa finalité, le peuple
cong~di~ et frustré de 58 victoire. Pendant ce temps, le P.O.G.
gardait son style et son ton des années de lutte anti-coloniale,
et se dissolvait dans une déconcertante fuite en avant demago-
gique. C'est ainsi quel~euple de Guinée se trouva bientOt en
porte-à-faux,COUfront~ sur le plan extérieur à une situation
dramatique qui ressortit, suivant les cas, au quipro~uo à la

•. '
. ' l
'.~••
..... ~ ..'_._...:.......~_.
' .
'
- .......... ' '~'"
:
':
194
1
conspiration. A l'oppos6, les dirigeants P.O.G. s'appro-
prièrent purement et simplement le divendendt politique
du ft non " du 28 septembre. Et depuis, ils s'emploient Apre-
ment A conserver ce profit illégitimement confisqué, en
usant de la surenchère verbaleft (réf Sako Kondé ibid p.SO)
Surenchère verbale pour camoùfler les arresta-
tions, les perquisitions, les exactions, et les humiliations
publiques.
Bien que des fois, les faits relatés par certains
auteurs soient un peu "passionnés" - Des cadres bien"formés"
nécessaires au décollage de la jeune République furent sacri-
fiés : Oiallo Ibrahima, mort A petit feu, Touré Fodé, jeune
Pharmacien qui expira à la morgue de l'hOpital D~hka au moment
oi il est innocenté à l'autre bout de la ville."Il était resté
enchainé huit jours, n'avait ni mangé, ni but, avait été battu,
torturé afin qu'il avouât des fautes qu'il n'avait pas commi-
ses" Oiallo Yaya l'ingénieur, mort des suites d'une incarcéra-
tion injust.e et inhumaine (n.
Aucun inventaire ne peut dénombré les victimes du
régime guinéen car, aucune couche sociale n'a été épargnée
pour la cause de la "révolution" (~)
Quant à l'économie, elle est un
secteurs que la
révolution sacrifia a "bon escient". - Le Gouverneur de la G~inée
Monsieur Roland Pré disait ceci de l'économie guinéenne"voyons
.. .j
d'abord la production d'exportation. ELle peut être ainsi évaluée
pri\\son d'Afrique
de Jean Paul Alata en dit long la dessus
Ed Seuil t 1976 Paris
2)
Malgré la bonne volonté dedemystification de certains auteurs ils tombent dans le subjec-
tivisme par le biàis de la partialisation et de la racialisation des coups portés par la
di rd tlJrp du PDG.

.. ' - ~:... , ..,... . ,.....
,

' , ' ,
<.
._"-.~ .- .. :. :'R;"'~'~J. ..~-:-.--
- _: \\: ..

. . . . .
0
0
_.
· ' . 0
pour une ann6e normale sur la base des r6sultats de l'ann6e
1949"
Produits
Tonnages
Valeur
f L
1 ~15
T ••••••••••••••••••• 86 millions
Ca ~ •••••••••••••••••••
• .J
Bananes ..•..••••..•••.• 39.500
.. • • • . • • • • • • • • • . • . • SBB
Palmistes ••••••.•.•.•.• 30.370 •••.••••••••••••.•.•. 694
900 •••..•••••••••••...•.. 32
r'li el ...................
......................
Cire ...................
473
44
......................
Indigo
.
15
0,700
Agrumes •.•••.••••••••..
, .0750
. .
Ananas. . . . . . . . . • • • • • • • • •
270 .......•••.•..•••.••.• 12
Essence d'orange........
125 •••••••••••••••••••••• 23
Sesame. . . . . . . . . • . . . • . . . .
400
'2
"Ce qui fait, au total, pour les produits visibles
faisant objet d'exportation, une valeur d'environ 1.515.700.000
francs. Or contrairement à ce que beaucoup pensent, les chiffres
ci-dessus sont loin de donner une idée juste de l'activité pro-
ductrice de la Guinée(I).
D'énormes secteurs de celle-ci échappent totalement aux
statistiques d'exportation, c'est tout d'abord, dans le domaine
minier; notre production aurif~re qui représente un tonnage appro-
ximatif annuel de 3 tonnes dont la valeur, au cours actuel, est de
750 millions, notre production de diamant, d'environ 60.000 carats,
en grande partie en diamants de joaillerie, représentant une valeur
de l'ordre de 60.000 000 de francs. Dans le domaine de l'agriculture
(1)
Souligner par nous.

:. ~.:. ..
"-
,-'
c'est notre production de céréales entièrement consommés sur
place par les habitants qui constitue de loin le poste le plus
important de la production du Territoire: 180.00 tonnes de riz
représentant environ une valeur de 2.800.00 J 75.000 tonnes de
fonio représentant environ 400.000.000 J 23.000 tonnes de mals
représentant 180.000 000. Ajoutons encore 2100 tonnes d'arachi-
des de bouche expédiées sur le 5énégal(1) représentant 10.000.00C
10.000 tonnes d'huile de palme représentant 5.000.000rVolontaire~
ment nous ne tiendrons pas compte de la production d'arachides
ordinaires, de manioc, de fruit et agrumes consommés sur place,
pour lesquels aucune évaluation n'est possible mais qui repré-
sente des tonnages très importants et d'une valeur considérable
s'il fallait gue ces produits soient importés.
Oans le domaine de l'élévage, on peut estimer à en-
viron 100.000 bovins par an le nombre de bêtes abattues pour la
consommation locale ce qui représente une valeur de 500.000.000.~
POur les Ovins et les caprins l'abattage porte sur environ
100.000 têtes représentant une centaine de millions. Il faut
encore ajouter la consommation des produits laitiers pour envi-
ron 25 millions. Enfin, il yale gros poste de la production
en noix de colas donnant lieu à des très importantes transactions
et à des exportations invisibles de 5 à 6.000 tonnes, au moins,
représentant une valeur minimum de 150.000 OOO~ue l'on peut
doubler pour avoir une idée de la production totale, compte te-
nu de la consommation intérieure.
(1) - Présentement, en Guinée les produits de première nécessité
(Huile de table, riz, tomate concentré~etc) sont importés
du Sénégal et de la Côte d'Ivoire.

.,....:,'... '
L • '.'
. : #, / :•. J
. : ; " • • ' • • • • • • • •~ ~ •
. . : . ; '
• • _
•••• ;;..,
_.; • ._."
_l. _ _••
_197
Ajoutons enfin à ce bilan les quelques productions
indigènes e tel que l'indigo dont la Guin~e produit 500 tonnes,
les productions forestières, les industries fruitières(jus de
fruit et confiture), les fabrications de savon, le sisal, dont
la Guin~e produit plus de 600 tonnes valant une trentaine de
millions. Noûs arrivons à un bilan ,de production non export~ ou
invisible de l'odre de 5.450.000.000 de francs.
Ainsi, d'uh cOt~, 1.812.000.000 de production apparent~
et de l'autre, 6.262.000.000 de production r~elle.
Compte tenu de ces chiffres, on s'aperçoit que la valeur
économique de la Guin~e est consid~rable et on s'explique, dans
ces conditions, la richesse et la prosp~rit~ de ses habitants qui
se traduit par l'allure confortable de leur vie et l'aspect de
bonne sant~ qu'ils présentent en général(1)( •••• ), il est permis
de dire que le Territoire guinéen est certainement le plus riche-
ment dot~ de tous les territoires de l'A.O.F."(Réf.Gouverneur
Roland Pré l'avenir de la GUinée française Ed Guinéennes Conakry
pages 36,37.1951).
Ces données statistiques de 1949 comparées à celles
des années 1958, 1963-64, 1965-66 peuvent permettre de se faire
une idée de la "révolution" guinéenne. En effet voici les chif-
fres concernant les productions de la période de "l'indépendance"
Bananes - production avant le plan triennal: 1958 : 64 900 t ;
prévisions: 160 000 t réalisation: 1963-64 : 30 000 t- Café-
Production avant le plan: 1959 : 15 662 t ; prévisions: 16 000 t;
réalisation: 1963 : 8 700 t Riz- Déficit: 1959 : 7000 t ; 1962:
{1} - Cette bonne santé de la population guinéenne pendant la
période C l
o oniale'
"
t
.
'no es~~4S qu'un souven~r.

-
-.~
\\ I_~ ••,
-~ .....~,~- ..:.. .: ..'
,_. ' .. ~_ .....~..~ ~..::. '_04".:1"::
lB8
-'
30 000 t
J 1963 z 35 000 t
(donn~es statistiques cit6es par
Sako KOnd~ ibid p144)
Au vue de ces donn~es il apparait deux constats z
,) La production g~nérale de 1949 n'a pu suivre sa prog~ession
normale. Celle-ci 8 été perturbée par les maladies végétales:
cercosporiose et la trachéomycose,maladies respectives du bana-
nier et du caféier, et aussi par le manque d'encadrement techni-
Que. ~ais ce~ obstacles s'étaient signalés dès 1958. Et si ils
ent pris une telle ampleur, c'est surtout à cause de l'effarante
impéritie des dirigeants.
2)
Le plan triennal Qui devrait redresser la situation se
"traduisit par une baisse générale de la production, et res-
sembla à plus d'un égard, à une liquidation à grande échelle,
plut6t qu'à une mise en route de l'économie guinéenne. Le ré-
gime l'enterra sans bruit. Puis il lança le Plan septennal(1964-
1971). Celui-ci avait pour objectifs: La couverture des besoins
alimentaires du pays par la production locale, la transformation
des matières premières agricoles par les industries créées, et le
développement des exportations. Les dirigeants avaient-ils tiré
quelques enseignements de leur première expérience? Etaient-ils
pr~ts à s'astreindre à l'"étude et à la connaissance approfondie
des réalités" ? Rien n'est moins sOr. Citons encore quelques
chiffres de (J.Suret-Canale cité par Sako Kondé) relatifs aux
m~mes produits."Le déficit tendanciel de riz(') relevé plus baDt
s'est accentué pour se chiffrer à : 40 000 t par an en 1965-66.
(1) - Du reste, pour assurer les difficiles périodes de soudure,
1~ Sekou Touré oublie son anti-impérialisme et est très heu-
re~ de recevoir les surplus a~imentaires américains. Ainsi, en 1963.. les
Etats-Unie d'Amérique ont ~oUI'D.l. à la Guinée 16 000 T de riz, 11 000 :! de far
ne, et en 1964, 28 000 T de riz et 25 000 T de farine. En 1967, 40 000 T de
riz ant été importées soit plus de 11~ de la production estimée en 1965 (Réf
Diakité C. Abou p 119)

·
.' ;:' :.
. ' . , "
-: ..: ~
':.;'~. ..:::"
.,'
.........._.... 4_....
.:...
..
~
- 193 -
La producti6n bananière devait 6galer en 1971, le
record atteint en 1955 : 100.000 t
1 mais en 1966 et 1967,
elle n'atteignit respectiv.ment que: 44 771 t et 42 289 t.
Les chiffres sont encore plus accablants en ce qui
concerne le café: prévision pour 1970 : 43 000 t
; production
1966 : 12 700 t, production 1967 : 2 000 t.
En 1958 le Chef de l'état guinéen disait ceci:
"Le privilège d'un peuple pauvre est que le risque que courent
ses entreprises est mince, et les dangers qu'il encourt sont
moindres. Le pauvre ne peut prétendre qu'A s'enrichir et rien
n'est plus naturel que de vouloir effacer toutes les inégalités
et toutes les injustices. Ce besoin d'égalité et de justice nous
le portons d'autant plus profondément en nous, que nous avons
été plus durement soumis à l'injustice et.à l'inégalité( ••• )
Nous avons, quant à nous, un premier et indispensable besoin,
(1 )
celui de notre dignité. Or, il n'ya pas de dignité sans liberté,
car tout assujettissement toute contrainte imposée et subie dé-
grade celui sur qui elle pèse, lui retire une part de sa qualité
d'homme et en fait arbitrairement un être inférieur. Nous pré-
férons la pauvreté dans la liberté à la richesse dans l'esclavage
(2). Ce qui est vrai pour l'homme l'est ~utant pour lesSociétés
et les peuples"(Réf. Discours de ~r Sékou Touré lors du passage
du Général de Gaulle Paris-Dakar, n06.871 27 Août 1958)
La dignité de l'homme, certe ne se discute pas à
cause de sa particularité droit à l'existence. Mais pour l'en-
tretenir, il est nécessaire qu'on s'y prenne avec sérieux. Ce
SdUligné par nous
Kduamé N'krumah l'avait déjà dit en 1957 lors de l'accession du Ghana
à l'indépendance.

.,'
.
- -.,.
-"
________-:~~
~~li____'J:'J

~r---=~
......
=r-----~l
--
.....1---
~r-----
'II

••,..

- .
- '7'1
...
,.
J..
..
••
,.
-0
0
1
'"
•!t
!
i\\
-l

~
i-
..
"P
:'
!:
l
'"
co
..'"
~
'""\\
~
:l
""
..
~
.. 0
0
..
;Il)
e\\
l
iF'
~
.-
-,
...
~
&
"
~
cr-
e-
,
2a
:1
l,

' .. ,.
.
"
~."
~ .--
:,~,~:,,, ::;;<;":-::;;""'f'.:, ;,::5'.': ;...,;:...: :",,--:'c '
.~~: • • . • _~~• • ~. • ~ .•• ~ _ , _ , ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ . _ ~ _ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ _
• •
~
_ _ •• ~".·_..• r •.
,.~~~--
~
~
j
".••
""',
..
'"
..
."
1
-/
"'"-- --

'., ~ . ~ -:~ .-.... ~ .;.~ ~ ..~~.. _-- - ........-<--= _.••
Les
histogrammes
ci-contre
nous
permettent
d'illustrer
~t
de
comparer
les
différentes
productions
entre
elles.
et
aussi
montrer
les
différentes
tendances de
ces
productions.
D'autre
~art, il apparait aisement k travers ~'histoQramme les écarts
~ntre les taux de production de la p~riode coloniale et la
~ériode postcoloniale.
\\
Cette
situation d~sastreuse est agravée par
~<les exportations
clandestines
<café.
riz,
bétail.
cacao,
cola.
b 0 i s , o r ,
dia ma nt,
etc . . . l
k
1 00 mil 1 ion s
de
dol 1 ars
par
ans 0 i t
1
3S milliards
de
sylis.
<monnaie
locale>
ce
qui
représente
cinq
lnnées
de
salaires des
170.000
fonctionnaires
guinéens.
Prenons
1
l'exemple
du
café
dont
les
exportations
clandestines
sont
1

estimées
l
10.000
tonnes
3.000
tonnes
vers
le
LIBERIA.
3.000
1
lonnes
vers
la
SIERRA LEONE.
6.000
tonnes
vers
la COTE-
1
a'IVOIRE.
Le
pria d'achat
occulte au
producteur
guinéen est
de
1
150 svlis
le
kilo
<contre
55
svlis au cria
officiel)
1

• •
«trafiauants»
revendent
ce
café
à
350
F CFA à
la
COTE-D'IVOIRE
Jui
ell~-même revend le même café A 1.300 F CFA le kilo sur le
Jarché mondial.
Ainsi
le
bénéfice pour
la
COTE-D'IVOIRE est
de
1
~50
F CFA par
kilo
soit
5.7 milliards
de
Francs
CFA pour
les
6.000
tonnes.
de
2,85 milliards
pour
le
LIBERIA et
le même
Jontanl
Dour
la
SIERRA LEONE
au détrimenl
de
la
CUINEE.
Les
Jxcorlations
clandestines de
bétail
sont
estimées
à
1\\00.000
têtes
par
an.
l'or
(2
tonnes),
le
cacaO
<30.000
lonnes),
etc . . . . Il
esl
urgent
d'arrêter
les
ponctions
sur
les
ressources
~ationales au profil des pays voisins.»
Réf.
Jeune
Afrique
riuméro
1269
du
1 er Mai
1985 page
49.

_ 200 . _
Ce s6rieux, les dirigeants guin6ens l'incarnaient au d6but
de l'lnd6pendance. ~alheureusement avec le temps Il a c6d6
sa place A la mendicit6.
"le 17 Juin 1971, declarait KEITA N'FA~ARA,
ministre et mem-
bre du Bureau Politique National, a l'ambassadeur "d'un pays
ami" : "Le Peuple de Guin6e appr6cie hautement la compr6hen-
sion qu'il a toujours trouv6e auprès de votre pays et se f6li-
cite du concours qu'il lui prête constamment."
L'unique journal du pays, Horoya, qui rapporte la
c6r6monie, pr6cise que Ke!ta N'famara a charg6 le diplomate
...
d'être "l'interprète des sentiments de reconnaissance de notre
part à son peuple et de la volont6 du peuple guin6en et son
Gouvernement de pr6server et d'accro1tre les bons rapports
entre eux et nous"
De qui et de quel pays s'agissait-il? Chacun l'a~
deviné. Il s'agissait de S.E. Albert W.Sherer junior, Ambassa-
deur des U.S.A. en Guinée qui venait de signer un accord
d'assistance des U.S.A à la Guin6e comprenant "l'importation
dans le pays de la farine de blé, du riz, du coton, de l'huile
de Soya et de l'huile de coton pour une valeur d
un milliard
cent soixante-six millions de francs guinéens pour l'année
1971"(réf Oiakité C.Abou ibid p240)
Une telle assistance ne traduit nullement la dignité
dont il fut question lors du passage du Général De Gaulle en
1958. Nous pensons que l'homme, ne peut ~tre digne que lorsqu'il
est à mesure de s'élever au dessus des contingences immédiates.

· .• L"':'} ._'. .
~
~
-
, '
- 201 -
La mendicité permanente(1) n'est pas le propre d'un
régime qui se veut révolutionnaire - Elle est un frein i
la
liberté et au progrès social.
Par ailleurs la "révolution" guinéenne présente des
traits caractéristiques qui la differencie des revolutions
classiques.
"Vue de l'intérieur et contrairement i
la plupart
des révolutions classiques, la mutation, operée sans trauma-
tisme excessif, ne semble pas affectée par le tragique. L'espoir
en soutient au début le dynamisme, puis l'optimisme et l'incurae
en tempèrent le sérieux. L'hommeur révolutionnaire que le ~erleau
Pont y d'Humanisme et Terreur incriminait comme "une variété de
la dignité bourgeoise" n'apparait guère que parmi les jeunes
générations, en transit vers"les dignités", tandis que chez les
autres, l'acharnement pour le triomphe d'un socialisme s'est
transformé en souci de rééquilibration social'·.~r une ligne plus
proche du profit individualiste Que du désintéressement généreux
sbpposé par une idéologie radicale en ses débuts.
~ais, comme en beaucoup d'autres cas de telles ruptures
et déviances de l'histoire, la "révolution populaire" menace de
sombrer dans le desp.tisme Que ~onstesquieu
estime, @tre son
régime naturel, d'autant Que parmi le peuple elle a trop vite
basculé, soit du cOté de la victoire, soit du cOté de la lassi-
tude, ce Qui signifie le même résultat: l'élimination du jail-
lissement de créativité. Un semblable phénomène a toujours favo-
risé la prise en charge du destin de l'Etat par une fraction
)
La Chine de ~AO TSE TOUNG est constamment sollicité par le gouvernement
Guinéen pour les dons.

_ 202
ju?qu'à présent, le jeu de ce que F. Gigon appelle
"la democratie pendulaire" en limite certains inconvénients.
Quoi qu'il en soit, le futur est déjà porté par le sens du
vécu révolutionnaire".(Rivière p.390).
Ce rendez-vous manqué avec l'histoire peut se
résumer de la façon suivante : a) les révolutions classiques sont
nées des prises de conscience
de la misère, or celle de la
Guinée est la conséquence d'un
manque de liberté(1)-Souligné
par Sékou TOuré devant le Géné-
ral de Gaulle"Nous avons, quant
,a nous, un premier et indispen-
-(
sable besoi~ celui de notre di-
, -
.
gnité
Or, il n'y a pas de di-
gnité sans liberté, car tout
assujettissement, toute contrainte
imposée et subie dégrade celui
sur qui elle pèse, lui retire
une part de sa qualité d'homme
et en fait arbitrairement un
être inlflérieur"
b) Rupture avec le temps" ahistori-
que pour aller vers l'histoire
réelle, tout en recherchant
Ou temps colonial il y avait la misère mais elle était "moindre" par
rapport à ce que le peuple vit en ce moment. D'autre part la Guinée
d'aujourd'hui ressemble curieusement à l'orpheline du ballet national
à cayse des mille et une souffrances de cette dernière.

-20$'
-
passionnément une euthencité
africaine mal circonscrite.
c)
Elle s'est perdu dans la haine,
et la violence internes et ex-
ternes entrainant ainsi dans sa
sillage la destruction.
d)
Elle confond vigilance et tolé-
rance ancestrale qui à la limit
n'est que manque de rigueur.
e)
Elle a comme le pènse C.Rivière
produit sa défervescence et s'e
filée en institutions contrainte
de se protéger contre de nouveau
projets qu'elle qualifie de con-
tre-révolutionnaires. Ainsi,
du rite collectif initial de
régénération totale, il ne sembl
rester que les chantres.
Il est certes vrai que les mutations sociales se sont
engagées. ~ais leur finalité, quoique irréversiblement orientée,
demeure encore sur de nombreux points sujette à interrogation.
L'intégration sociale soulève le problème du mode d'adaptation
de l'individu aux cadres sociaux, éthiques, économiques d'une
société globale, ~lors qu'il se conformait jusqu'alors à ceux
d'un groupe restreint. L'émancipation" de la femme est une réalité

" . v
"
-204 .:. •
et nul ne contestera au P.O.G. d'être le parti qui a fait
descendre massivement les femmes guin6ennes dans l'ar.ne
politique. On les 8 vues, è l'époque heroique, militer avec
toute la passion et la véhémence qui caractérisent leur sexe.
Aujourd'hui encore elles sont è la pointe du combat économique-
1958
1966
Sage-femmes
49
114
AIdes-Santé
1
90
A.T.S.
3
209
Assistants Sociales 2
8
Aides-Sociales
0
*49
Sources: "Développement des services sanitaires et sociaux"
ministère de la Santé et des Affaires sociales,
Sept 1966, ..oneo
Les chiffres les plus récents fournis, en janvier 1968,
par la présidente régionale des femmes de Conakry II, madame
Tiguidanké Soumah, sont les suivants :
Combinat Cigarettes - Allumettes ... 196 ouvrières
Conserverie de l'Iamou •••••••••••••••• 113
Usine textile ••.•.•.••••••.•••••••• 110
Entreprises d'Etat •••••••••••.•••••• 991
Entreprises privées ••••••••••••••••• 208
quant au social - c'est la particpation aux grandes manifesta-
tions politiques (1) s6vamment entretenue par le parti unique.
"Si l'on devait s'en tenir à cet aspect extérieur, on dirait
volontiers que la Guinéenne a pris plusieurs longueurs d'avance
(1) - Au plus fort de la lutte anti-coloniale Sékou Touré lançait
cet appel aux femmes" chaque matin, chaque midi, chaque soir, les femmes doi-
vent inciter leur mari à adhérer au R.D.A, s'ils ne veulent pas, elles n'ont
qu'à se refuser à eux ; le lendemain, ils seront obligés d'adhérer au R.D.A"
1
RéfB~ Charles Guinée cité par Sako Kondé.

205·
sur l'Europ6enne. ~ais que signifie concritement l'6manci-L
pation f6minine style P.O.G. ? La perversion et, au-delà
l'éclatement de la famille rappelons, pour mémoire, quelques
aspects flokloriques de l'"action" du POG en ce domaine, il
s'agit d'un certain nombre de critères aussi spectaculaires
que superficiels présentés par le régime comme autant de preu-
ves de l'"évolution" du sexe dit faible: la création d'un
corps de "motards" et d'orchestres de danse animés par des
femmes de la profession devenue vite douteuse, de fille du pro-
tocole, sans compter, bien entendu, l'existence au sein du par-
ti d'organisations féminines, et la présence de Guinéennes
dans les instances supérieures du parti ••• "(Réf Sako Kondé
ibid p129).
La dite "émancipation" soulève des réserves surtout
concernant la cohésion de la famille élargie et sur le mode de
structuration de la famille monogamique restreinte. La mobili-
sètion politique des jeunes engendre des inquiétudes ~uant au
sens de leur acheminement vers l'âge adulte. En effet le "régime
a de formé leurs jeunes cerveaux, et fait d'eux desapprentis:
agitateurs de quartier. Alnsi, la production "d'hommes nouveaux"
a entrainé la multiplication d'éléments ratés, de bavards impé-
nitents, d'ignares agressifs, bref, d'être~ sociaux calqués sur
le model e : Sékou Touré"(modèle qui a rendu tout le pays malade
hommes comme bâtiments. ces derniers peuvent être détruits et
reconstruits mais les hommes ••••

• •
0;..'",
:~ . '..~
_ 20e
_
Compte tenu de cette situation on est amené è se poser
une série de questions : Choisiront-ils la voie de la
raison ou de violence, de la qualification ou de la vaine
prétention, du progrès ou du dépit? Comment réagiront-ils
aux virus inoculés par les idéologies des civilisations de
l'abondance et par celles des civilisations de la praxis
révolutionnaire? La démystification et l'affaiblissement de
la foi religieuse conduisent à s'interroger sur la sécurisation
affective du peuple et sur les mystiques de remplacement. Un
syncrétisme se cristallisera-t-il en doctrine et en culte?
L'islam ou·~e christianisme étendront-ils leurs conquêtes en
se réadaptant? Jusqu'à quel point le nationalisme suffira-t-il
à combler, chez le Guinéen, la qu~te de bénédications temporel-
les et jouera-t-il le rOle de religion désaffectée en répondant
au besoin de bonheur et de prospérité satisfait autrefois par
le substitut des mythes de surnaturel?
Chaque changement social comporte des aspects positifs'
et des aspects négatifs. Souvent la dynamique du changement
se heurte aux barrages de l'imprévisible futur, soit à cause
des résistances structurelles liées au passé, soit à cause de
la non disponibilité des acteurs sociaux.
Dans le cas guinéen, malgré la désagrégation des
anciennes structures socio-culturelles dans lesquelles s'étaient
forgés des liens linguistiques, religieux, culturels, la pré-
sence du groupe familial et tribal se fait eocore sentir par

.~.
.
.; .
l
"
-P
- 207 -
biais de la "solidarit6" et de la d6fense mutuelle -
comme en t6moignent les processus de qu6mandage, les ph6nom~nes
d'hebergement et de distribution des places, stigmatisés
dans leurs exc~s comme parasitisme, népotisme et favoritisme.
Ce genre de "néo-feodalisme secr6té par l'économie de pauvreté
ralentit la marche vers l'intégration des ethnies. A défaut
de pouvoir l'6touffer totalement, le PDG s'est souvent contenté
d'organiser le tribalisme en dosant les concessions à chaque
ethnie: représentativité proportionnelle dans les organismes
gouvernementaux, concession aux coutumes dans les tribunaux de
conciliation au sein de chaque comité, retour à l'utilisation
des langues nationales par l'alphabetisation etc."
Dans le même sillage, le passé glotieux est utilisé
à des fins politiques et ne constitue nullement une pierre
d'achoppement, pour autant qu'il n'est pas revecu, mais seule-
ment mémorisé. L'histoire év~nementiellê'est pas un mal en soi,
(l'exaltation des héros du passé Alpha Yaya, Samory etc) mais
n'éclipse pas pour auta~t le présent miséreux.
Les freins à l'évolution dans un domaine procèdent
fréquemment de causses exogènes - Les comportements et attitudes
religieux n'ont pu être adaptés à la nouvelle situation histo-
rique. Les mutations socio-religieuses sont aussi affectées par
la mobilisation mercantile des jeunes générations acculturées
et baignées dans un climat d'atheisme latent.

-
L'6volution" forcen6e et d6magogiQue de la femme
sans oublier une jeunesse sacrifiée, n'a pas du tout contri-
bué à l'accélération de l'histoire. Au contraire, entre les
deux groupes naissent des comp6titions, des empietements de
o/,.J
reles""des concurences lorsqu'ils jouent comme groupes de
pression. Des conflits deviennent "antagonistes" entre liberté
f6minine et censure juvénile, entre autorité familiale de la
femme et indépendance des enfants.
A ces phénomènes se greffe l'apparition d'une bour-
geoisie bureaucratique lourde, et partagée entre le pseudo-mo-
dernisme et des modes archaIques de clivage. Le parti qui aurait
pu jouer le rele de dynamique sociale s'est vite contenter de
l'acquis politique au détriment du capital social."Une structure
politique n'est pas une richesse que dans la mesure ou l'Etat
dispose d'un capital humain technique et financier capable
d'actualiser à son profit des potentialités économiques.
Le parti"democratique" de Guinée(1} a failli à sa
vocation historique. Son rOle s'est limité au cadrillage effectif
au jet de filet ne laissant aucune porte de sorlie.
Les deux reles inhibiteur et mobilisateur du Parti
s'exercent au plan des mentalités par le moyen de l'idéologie
agissant à la fois comme un sur
moi éthique et stimulant des
espoirs. Cette idéologie est"l'édification de constructions
théoriques sécritement destinées à masquer les (contra-
dictions) d'une réalité politique lente à se mouvoir.
)
Du reste Yves Benot dit du P.O.G. qu'il est fondé sur "une corruption
pauvre et mesquine par rapport à celle du Ghana ou du Nigéria, à la
mesure de l'éconmie du pays, et donc encore' plus insupportable pour
des masses plus démunies"

.. . ;
_'
.- ". - -. .
J,)
.
(R6f Yves Benot • Id6ologies des

ind6pendances africaines 2e 6d,
F.l'laspero.
Le parti dont se proclame l'Ir S6kou Tour6, est un parti can-
cereux et personnifi6(2). Il est semblable à celui que L.
Trotskya d6crit en ces termes-ci "Parti au nom du peuple,
puis appareil au nom du parti, puis la direction au nom de
,
i
l'appareil, et à la limite un seul pense et d6cide pour tous")
Le Socialisme guin6en est un socialisme sans social qui ne
trouve sa survie que dans le verbalisme, et la politique du
bêton. Il n'est pas capable de r6soudre les problèmes posés
par son fonctionnement. Il est en contradiction avec le cours
normal du d6veloppement de la civilisation africaine. Comme le
dit Cesaire dans son discours sur le colonialisme"Une civilisa-
tion qui s'avère incapable de
résoudre les problèmes que sus-
cite son fonctionnement est une
civilisation décadente. Une civi-
lisation qui choisit de fermer
les yeux à ses problèmes les plus
cruciaux est une civilisation
atteinte. Une civilisation Gui
ruse avec ses principes est une
civilisation moribonde."réf
présence Africaine, 1955
,2)
Bien que Sékou Touré en tant que président de la république pèse de
tout son poids sur les différentes décisions politiques, il reste tout
de même membre et "élément" d'un système, qui tire son essence de toute
l'organisation sociale, économique et politique. A la limite nous disons
que le fait guinéen ne peut et ne doit @tre compris que par l'analyse du
système.

- !,~ •. H
. : • • • "::'
. :
. ' .' •
..
• _ J:':. .
~ _-j~ •• _
..
( Le peuple a besoin de martyr,
je me pr6sente
PATRICE LUMUMBA
Du Socialisme du Sergent-Colonel Joseph
Désiré Mobutu à l'authenticité du général
Mobutu sésé Seko
L'authenticité zalroise est une composante du socia-
lisme africain. Pour sa circonscription il est peut Atre néces-
saire de faire un bref rappel historique. - En effet le créateur
de l'authenticité, Monsieur Mobutu Joseph Desiré commença sa car-
rière politique en tant que journaliste au quotidien de léopold-
ville. Cette profession fut du reste, assez compromettante pour
lui car, lors de son sejour Bruxellois Avril 1959 il est indexé
par les étudiants congolais comme espion de la sOre té Belge(1).
D'après le dictionnaire pratique Quillet imprimé en
France 1974 il est auteur du coup d'état de Janvier 1961 qui
renversa le gouvernement légal du congo dont Patrice Lumumba
était le premier ministre.
"Avec l'aide de Kasavubu,chef de l'armée congolaise,
le général Mobutu opère un coup d'état et fait emprisonner et
assassiner Patrice Lumumba(Janvier 1961) ( ••• ) A la fin de la
première législature (juillet 1964) et après la
démission du
gouvernement Adoula, le général Mobutu s'installe au pouvoir
et élimine Kasavubu(nov 1965) ( ••• ) En 1970, l'élection du pré-
sident de la République se fait pour la première fois au suf-
~
frage universel" et le général Mobutu est réélu.Le 28 Octobre 1971 l
i)
Ernest. Glinne, à l'époque deputé au Parlement Belge et ministre, écrivait dans la Gauche,
du 24 Septembre 1960 :"Journaliste à l'Avenir, quotidien de Léopoldville, Mobutu y était
aussi indicateur de la SQreté."
MicheljMerlier, dans son livre: le Congo, de la colonisation belge à l'indépendance,
Editions Maspéro, cahiers libres, n032-33 p.223, parlait de Mobutu comme ancien
compag~on de la securité belge.

-..
' - '
\\.. ...
- 211 -
la R'publique du Congo, rompant avec un nom qui 'voquait
trop l'6poque coloniale, prend le nom de Zalre, ancienne
d'nomination du fleuve Congo" c'est à partir de ce "coup
de main" de ~obutu que David Reed, dans s'lection du Readers
Digest Juillet 1971 declarait "que J.O. ~obutu est le paci-
ficateur du congo, sous son 'nergique impulsion, un immense
territoire, naguère livr' à tous les d'mons de l'Afrique et
de la politique, est sur la voie de la guérison".
Il est bien clair que le sergent, devenu général et
président à la suite d'un "coup de main" de son armée de "fan-
toches qu'il aime appeler: les cadres valabies capables de
comprendre sa politique et de lutter avec lui pour batir un
"Congo meilleur" doit trouver un remède po~·faire oublier son
passé tragique et effacer l'histoire du pays en lui substituant
une histoire à sa façon, tout à fait invraisemblable.
Ce remède fut d'abord le Socialisme, par la suite,
l'authenticité.
SOC l ALI S M E
Le Socialisme, utilisé comme moyen politique con-
joncturel, servit tout de même d'amortisseur contre les Slo-
gans Socialistes qui venaient de l'autre rive du Congo-Brazza-
ville - du temps de ~assemba Debat(1) qui venait de prendre
le pouvoir à l'Abbé Fulbert Youlou.
)
Massèmba Debat a été écarté du pouvoir par le militaire Marien N'Gouabi
qui lui reprochait à son tour de ne pas être assez socialiste. Ce dernier
appo~tait avec lui un drapeau rouge frappé d'un marteau et d'une houe et
également une nouvelle appellation de parti révolutionnaire "Le Parti des
travailleurs congolais." Malgré cet apport les élèves et étudiants congo-
lais demandent la décolonisation de l'Université et sa démocratisation
effectlve.
(voir a ce sujet A.F.P. Samedi 12 Janvier 1973)

/
Pour le Pr6sident ~obutu, une telle situation
comportait des dangers de destabilisation. D'une part les
plaies de son deuxième coup d'6tat ne se sont pas cicatris6e5,
d'autre part, le changement de r6gime survenu chez le voisin
n'arrange,ait pas non plus la situation parce que la radio de
Brazzaville 6met nuit et jour des slogans"socialistes" et "in-
cendiaires" à la fois, et ceux-ci son très 6cout6s par la popu-
lation congolaise(zalroise) qui n'avait pas encore oublié la
"demarche socialisante" de Patrice Lumumba.
Pour calmer cette population, ~obutu devait imiter
son voisin ~assemba Debat. Alors, le socialisme et la r6volu-
tion ont trouvées droit de citer à Léopoldville (devenue Kinsha-
sa). La "mode socialiste" se doit d'avoir un cannevas de compor-
tement. Le petit livre vert, imitation du livre rouge de ~ao,
est edité sous le titre "Paroles du Président". A la page 13
on y trouve la formulation suivante : "Issue du peuple, ou elle
puisait ses forces vives,
l'armée nationale congolaise
faisait partie intégrante de
la nation. Dès lors, elle ne
pouvait assister impassible
aux diaboliques machinations
qui se tramaient autour d'elle.
( 1 )
A la même période, Radio-Peking dans une de ses émis-
,
sions en langues étrangères, avait trait~Mobutu de "démagogue"
1)
Parlant de ce coup d'Etat, le commissaire à l'orientation Nationale
ditqu-il n'y a pas eu de coup d'Etat, car l'Etat n'existait pas"
Discours tenu à Paris au cours de la Conférence du 3 Avril 1973)
Pourtant le gouvernement de Kasavubu existait bel et bien.

,;'
...
- 213 -
se ·servant du socialisme pour camoufler la trag~die
congolaise. cette accusation fut port6e avant le mariage
Sino-zalrois, mariage qui a amen6 ~ao Tsetoung ~ faire
les 610ges du Pr6sident zalrois. Parlant de la r6bellion
muleliste de 1964-65. ft~ais l'argent que je leur ai donné
a dit ~ao - ils l'ont d6pensé è boire
du champagne et è se faire photographier
dans des poses avantageuses, tandis que
vous, vous vous battiez è la t~te de
vos troupes, et c'est donc vous qui
avez vaincu"(1) (Réf. Le moniteur belge,
hebd-Special de Pierre Davister le 3 Jan-
vier 1973
Ces propos sont hautement diplomatiques, car la
politique africaine de la chine est devenue une politique de
"gagne-terrain" vis-à-vis de ses concurrents américains,
Soviétiques, français et chinois de Formose. Cette politique
est en quelque sorte une politique de séduction, le bon flat-
teur est celui qui aura le plus de chance pour se marier avec
les chefs d'Etats africains)
1)
Parlant du vainqueur Mobutu, J.Chome dans son livre: L'ascension de
Mobutu Ed. F.Maspero page 133-134 dit "Ridicule, puisque tout le monde
saitl.que ce n'est Mobutu qui a vaincu les Patriotes, mais bien au contraire
il a toujours subi la défaite devant ceux-ci, jusqu'à ce que les Americains
et les Belges mettent le poids de leur aviation et de leurs parachutistes
dans la bataille et viennent au secours des mercenaires, recrutés par lui
parm~ lesanciens"afreux" du Katanga, la pègre raciste de l'Afrique du
Sud et de la Rhodésie, et les désesperados fascites du monde occidental .••
Ua jQur viendra ou Mao corrigera, avec sa m~me brutale franchise, un juge-
ment'aussi odieux que ni l'histoire ni les peuples d'Afrique n'avaliseront
jamais."

....~,
' ..-.~:_.
-
':..-:...~....
".••. ~
·· •.•.•L·,.
-"
'.:..
:... ~--'..
- 214 -
L'authenticit6 et ses grandes ligne~
Pour mieux teinter de couleur africaine son socia-
lisme, ~obutu .adopta le terme "authenticité". C'est cette
double "mystification" que son commissaire d'Etat à l'orien-
tation appela dans sa conférence donnée à Paris, le 3 Avril
1973,"les grandes idées qui forment une nation ne peuvent venir
que du peuple et non de l'extérieur. Celui qui les exprime ne
peut être qu'en enfant de ce peuple, pour nous, ce fut ~obutu
Sese Seko"-
Dans son discours du 5 décembre 1972, devant les
Rcommissaires du peuple", ~6butu disait "Nous voulons profiter
de cette occasion pour lever une équivoque entretenue par une
certaine presse qui voudrait savoir nous opposer à certains de
nos collègues et frères africains. C'est ainsi qu'on Doudrait
savoir comment situer l'authenticité par rapport à d'autres
philosophies africaines, notamment la negritude.
~on frère Senghor pour faire respecter son appartenance
de Nègre déclarait: Il y a une sensibilité africaine, une manière
africaine d'appréhender les choses, une vision africaine du
monde et c'est cela l'africanité.
Par ces mots le Président Senghor a montré quill
était le fils de l'Afrique noire et aussi le fils de l'Afrique
tout court"
"L'autaenticité est non seulement une connaissance
approfondie de sa propre culture, mais aussi un respect du pa-
trimoine culturel d'autrui. C'est ainsi que, forts de cette

.'1, ....,
·1.:· .
" y
• • " , ' .
-
. - . _ ' .
expérience, nous croyons modestement que le ZaIre peut
donner à la face du monde 8a propre lnterpr6tation des
problèmes qui se posent à ~ous" (Réf; discours à l'ONU
4 Octobre 1973).
Par ailleurs, l'authenticité est considerée comme
une prévention à l'acculturation "désalienation politique,
desalienation économique, desalienation sociale, encore une
fois, tout se résume dans le préalable de la désalienation
culturelle. - retour au passé, emprunt des noms "typiquement
africain". Contrairement à ce que pensent les autres chefs
d'Etat africains ~obutu situe l'authenticité au dessus de
toute action politique il n'est mArne pas un simple moyen ~e la
politique. L'authenticité est le préalable et la fin de toute
politique digne de ce nom."{voir le livre vert du Président
~obutu)
Le Président fondateur du ~.P.R. (mouvement' popUlaire
révolutionnaïr~épondantà un journaliste de la Radio-télévision
belge 28 mai 1972 disait ceci pour se demasquer de la négri-
tude : "l'Authenticité est universelle" et : "Defendre la négri-
tude, c'est depassé, de même que de défendre l'art et la civili-
sation nègres."
C'est en réponse à une question sur l'interdication
des partis politiques qutres que le sien mobutu révèle le conte-
nu de l'authenticité: "Vous, vous êtes un monde d'oppositions,
~
mais nous autres, zaIrois~ sommes un monde de juxtaposition.
Citez-moi un seul village zaIrois où il y a deux chefs dont un
de l'opposition. IL n'en existe pas, a ajouté le Président ~obutu,

_\\2~ .
- 216 -
qui a conclu ce chapitre en disant que chez les Zalrois
deux tAtes sur un seul corps constitue un monstre et que
la notion de Chef ne se discute pas. Par voia de consé-
quence, le Chef de l'Etat a dit qu'en créant plusieurs
partis politiques, les Zalrois pécheraient contre l'Authen-
ticité." (Réf compte rendu d'Elima-matin, 3D ~ai 1972(ce
journal n'est autre que l'ancien courrier d'Afrique, ainsi
"authentifié" en 1972. Ce m~me compte rendu a été cité par
Yves Benot dans Indépendances Africaines Idéologies et réali-
tés Ed. F.~aspero p73).tuelques jours avant, un journaliste
de service avait déjà mis les points sur les I"Dans nos pays
du Tiers-~onde ou l'analphabetisme tant culturel que politique
est une donnée essentielle, le Chef a un important rOle de
guide à jouer. A plusieurs occasions, il lui faut braver de
front son peuple( •••• ) Il lui faut être seul au dessus de la
m@lée ••• " (réf. Elima-matin, 25 mai 1972) Quant au Président
de l'Assemblée, Boboliko, dans une lengue et curieuse inter-
view sur le rOle du Parlement dans le Zalre mobutiste à parti
unique, il proclame : "Nous ne connaissons donc plus au sein
du parlement la lutte d'intér@ts entre des groupes sociaux."
(réf le Courrier d~Afrique, 15-16 Janvier 1972, interview
recueilli par ~akolo-Neloko.
Reflets de l'authenticité sur la quotidienneté
En tous cas, l'Afrique nouvelle a besoin d'une
idéologie précisement parce que dans cette Afrique qui retrouve

"..: 4,.~"~".;
,.T " ~~. . . . . ., '~,i~
" .
-..;.;.~~._ --,,~. - ..........;..... ~ ....•{~". -.. ..
: ". . ... ~'
- ,
1
- 217 -
l'ind6pendance politique, on n'a plus "l'ancienne 80ci6t6 mais
une nouvelle soci6t6 dont l'horizon s'est élargi par les in-
fluences islamiQu~s ~t euro-chrétiennes". Au ~aIre la fonction
idéologique est:. à la charge de l'authenticité: La radio et la
télévision sont des instruments utilisés pour la métérialisation
de l'Ideologie. La première est un instrument de propagande Qui
ne fait Que commenter les thèses de l'authenticité.[a télévision,
n'est pas différente de par son r~le de la radio mis à par sa
caractéristique audio-visuelle. Par exemple, pendant le journal
parlé, les nouvelles sont entrecoupées de phrases "célèbres" de
~obutu. Avant chaque programme, il y a d'abord sur l'écran une
brume épaisse qui peu à peu se dissipe pour faire apparaitre
~obutu, le Sauveur du Congo.
Quant à la presse écrite elle a la même orientation
Que les deux éléments mass-media cités - reprise des grands
discours avec photo à la base du président. Exortation du peuple
Zaïrois a l'engagement pour le père de la nation, au changement
de noms et de pré~oms, à verser à terre quelques gouttes de son
verre avant de le boire.
Plus récemment, les bandes illustrées ont fait leur
apparition avec légende en langue lingala(langue du pays) •.•
c'est peut ttre ça la vraie authenticité ':.
Cependant, en 1973, Mobutu était amené à prendre de
nouvelles mesures, reservant notamment les plantations et l'exploi-
tation We la forêt aux nationaux, nationalisant les filiales

2~
de la Forminière encore dépendante de la société Belge,
renforçant et créant un certain nombre de Sociétés nationales
pour les 'assurances, le commerce, etc, enfin, assurant à
l'Etat une part de 50% dans les Sociétés minières.Néanmoins,
la commercialisation reste entre les mains des Sociétés mul-
.tinationales de l'occident, et Mobutu, s'il s'en prend au
caRitalisme belge, félicite Unilever et "les n?UVealŒ investisseurs
Américains" Réf Discours du 30 Novembre 1973, ln culture au Zaïre
et en Afrique, 1974, nO 4, p 207 - 237.
Réalités Sociales et Authenticité
En Afrique ce ne sont pas les discours politiques
qui expliquent les réalités sociales. Mais, par contre les
réalités sociales expliquent bien le sens réel des discours
politiques.
Au Zaire la transformation des réalités sont à la
charge de l'authenticité - Elle a pour but de désaliener les
mentalités et aussi d'assainir l'environnement administratif
mais elle ne fait qu'empirer ses maladies authentiques:
Les visites privées dans les capitales Européennes
constituent souvent des gaspillages énormes en devise(occupa-
tion d'une suite, tout le troisième étage d'un grand hôtel
Berlinois).
Les comptes en banque à Genève, existent et reconnu
devant les journalistes Suisses au cours de l~interview du mont
N'galiema,
le 6 juillet 1973. Cette fortune aurait servi de
fond à la banque nationale du Zaire voire m~me de fond national
Il n'y aurait pas de villas et autres à Savigny pour
passer les vacances dorées, alors que le Zairois authentique se
"contente" du stricte minimum pour manger. L'argent ne serait
pas offert gratuitement au Général Jean Bedel Bokassa pour orner
son costume de "boy scout."
Les détournements des deniers publics ne manquent
pas. Mobutu a reproché à son ex-commissaire d'Etat aux Affaires
Etrangères, Mario CardosQ) baptisé "authentiquement" Lossembe,
d'avoir volé(1) 120.000 Zaires destiné au F N L A(Front national
ERUVIN BLWMENTHAL dans son rapport secret sur le Zaire paru dans Jeune Afrique n001139
du 3 Novembre 1982 disait ceci d'un parent de Mobutu "les mesures prises contre lui
impressiomnaient beaucoup mais à ca~se de sa position politique privilégiée elles res-
taient sa~s résultat. Quelques semaines plus tard, à mon insu, le gouvernement de la
Banque ce~trale ordonnait le paiement de 30 000 et de 20 000 dollars en espèce à Litho,
sachant pertinemment que le personnage était mis à l'index et que son compte à la Banque
accusait un énorme deficit ( ••• ) on pourrait continuer l'énumération des exploits
"heroiques" des "dirigeants" du Zaire ( ••• ) mais je crois qu'il n'est pas nécessai~
d'ajouter!d'autres exemples pour que ce rapport montre d'une manière flagrante à quel
point le $ystème de corr'Jption en vigueur au Zaire, sous ses B~BB~xi aspects les plus sordi-
des et malfaisantt l'impossibilité de contrOle des fraudes, anéantissent toute tentative
des insti~utions internationales des pays amis ou des banques commerciales qui persistent
croire à un redressement de l'économie Zalroise •
. ..'. '.'~'. !..>......
-::.0'
n
. : .

' , " : "
< ' • ••
'

·.....-. ~ , .\\.'..
_~1d
de la llberation de l'Angola). L'authenticit6 s'arrêtant
eu changement de nom du pays(') n'a pas pour autant re-
gler l'6pineux problème du sous-développement oh ! pardon
~obutu a interdit de prononcer le mot 'soUB -développement
pour l'authentifier par "sous-équipement. L'authenticité
aauthentique" n'a, en général, "rien apporté au développement
du pays, pas plus que les changements de prénoms n'ont changé
les persones(le tronc d'arbre a beau flotter longtemps dans
la rivière, il ne deviendra pas pour cela un calman(proverbe
africain).
Toutes ces manifestations "authentiques" du reste
"siériles" n'arrivent pas à cacher les réalités du pays -
grande disparité entre les zones d'habitation surtout à Kinshasa
avec ses beaux quartiers de la Gombe ou ne réside que la bour-
geoisie politique et affairiste(2) Les pauvres n'ont de droit
que de contempler ce Johanesburg ou se dégagent les bonnes odeurs
de cuisine dument importée de l'Afrique du 5ud(viande rouge)
1)
Beaucpup de pays africains ont marqué l'indépendance en reprenant un nom africain en
lieu et place de celui que le colonisateur leur avait imposé, du ~li au Ghana et tout
réce~ent le Burkina Fasse. Rien de plus compréhensible mais, dans le cas de mobutu,
le CO~goétait bien un nom africain, tandis que le ZaIre était le nom que les Portugais
avaient donné au fleuvee Congo. Tel est le paradoxe de l'authenticité.
2)
L'aut~enticité s'adresse donc, à une bourgeoisie Zalroise subalterne. Et c'est pourquoi
au li~u de voir dans cette idéolo~ie la seule manifestation d'une observation indivi-
duelle (comme aime le faire la presse européenne qui alimente ainsi le racisme, même
quand ielle cite des faits matériellement exacts), il convient avec Tuashinda de voir
qu'au idelà de l'établissement du pouvoir personnel c'est toute une classe sociale qui
cherche à se maintenir au pouvoir en invoquant un passé commun à tous les habitants du
ZA!RE"' réf N.TUA5HINDA, "Les mystifications de l'authenticité", la pensée juin 1974,
n0175, article cité per Yves Benot ibid p.72.

_ 220-
Cette r~action brutale du r~gime 8 l'endroit des
~tudiants est peut Itre due au rejet de l'appel de ~obutu
dans son petit livre vert, page 23, qui invitait les jeunes
à "marcher avec le gouvernement pour 6craser les "ennemis"
de la république."
le caractère authentique de l'information se situe
au niveau de la diffusion des thèses de l'idéologie- endottri-
. )Jour but
nement séculaire ayant,f.de brouiller l'entendement par des mots
d'ordre.
l'information donnée est en rapport avec les actualités
à savoir: les nouvelles sporlives(foot-ball l'opium du peuple),
les déplacements du Président ~obutu (durant l'année 1973 il
n'a vécu que 69 jours au ZaIre). la population touchée à tra-
vers les ondes radiophoniques ne porte aucun intérêt aux nouvel-
les: "C'est=toujours la même chose dit elle". la musique a une
forte centralité dans cette "dynamique". Pourtant, si l'on re-
garde sur une carte l'étendue du territoire, la radio pourrait
servir de contact entre les différentes régions. Hélas, la com-
pagnie informatrice a préférée la musique à la formation.
le depotoire culturel est encore plus accentué par
l'invasion des revues manipulatives de l'occident (Paris-Match,
Elle, lui, salut les copains, ~iroir du foot-baIl, etc). la
censure est une pratique constante."Jeune Afrique" hebdomadaire
international"indépendant" est trouvable, à condition que le
numéro ne contienne pas un article "objectif'! sur le Président

....
.,..'
~: ~ ,.;~.'
.~.
~
- ' .
,
.
.:
~..,
..
"
,
..
...
~-.
\\"
.
.\\..
. ..
...
~
.:..;.:~... -:.I ...~.J.
..
... -<~
'f':_~
••
"':. :-.:~~~""': •• ·..!-.'.l
~.'
~ .. '-;~,
• -
••~~'.-~. --~Y·~""
1.:"
.~
_ 221
~
Voir 8 ce sujet l'article de Jean de la Gu6rivi~re dans
le monde hebdomadaire du 21.27 ~ers 1974).
Quant aux villages, les conditions eont purement
authentiques, c'est l'Age de Pierre. Ces villeges n'ont reçu
de l'authenticit6 que les d'boires d'une population urbaine
désabus'e des
produits fantomes de la société de consommation.
Pourtant, ladite nouvelle politique économique de ~obutu par
laquelle les zalrois doivent jouir des richesses de leur pays,
n'a "rien fait" pour moderniser cette authenticité.
L'authenticité dansante (préparation d'une anthologie
de la musique zalroise) n'est pas mauvaise en soi mais, qu'elle
ne le sait pas au détriment des écoles, lycées, et Universités.
Infrastructures d'accueil insuffisantes avec son cortège de re-
pressions, telle celle du 4 Juin 1969 qui a subi le mouvement
estudiantin et a causé "112 morts dont 68 civils, d'après un
medecin belge"(réf.J.chome, op.cité, p.185)-
Par la suite, les rescapés de la manifestation
sanglante qui avaient manifesté un an plus tard en souvenir
de leurs camarades tombés sous les balles des militaires de
~obutu, ont été enwolés dans l'armée pour recevoir une correction
disciplinaire(1).
La répression ne s'est pas arr~tée aux frontières
du pays car les étudiants congolais à 8ruxelles qui s'étaient
solidarisés par une ~anifestation devant l'ambassade ont vu
leurs bourses suspendues comme à leurs frères au Zalre.
la mort de la mère de ~obutu, le deuil national a été decrété au ZaIre
dans le pays voisin centre Afrique.

-222·
et son pays. Les livres religieux temoins de Jeovah n'y
manquent pas. L'6glise du reste, s'est 8ccomod~ ~ la si-
tuation "authentique" malgré la petite incompréhension
du changement de prénoms(1).
L'essentiel de l'information hors du Zalre et du
continent est importée de l'occident par le canal de l'Eurovi-
sion: Western, Films d'amour, retransmission en direct de
quelques matches de foot-baIl, telle la finale de la Coupe
d'Europe des clubs champions qui opposait l'équipe hollandaise
Ajax d'Amsterdam à la juventus de Turin(30 ~ai 1973), le
Bresil et l'Allemagne Fédéral ('6 Juin 1973), septembre 1973
le combat ~ohamed Ali-Foreman.
Ces retransmissions ont pour but de montrer le
caractère genereux de ~obutu(car il est dit que c'est lui
Qui les offre au peuple zaIrois)- malheureusement pour le
travailleur moyen qui est loin de rentrer en possession d'un
poste téléviseur. Kinshasa est l'une des villes les plus chères
du monde et c'est précisément de cette chereté que sont nés
tous les "cadres mBtabiches"(les corrompus)-
Par ailleurs, la retransmission ou l'organisation
de telles festivités sportives demande des millions qui seraient
mieux employés pour la construction d'écoles et d'hOpitaux si
vraiment ~obutu Seseseko-comme son nom l'indique, était le
défenseur, le veilleur acharné de son peuple. Al' .oubliette
les intér~ts du peuple ! Seule compte la renommée du "père
1)
La position de l'église comme celle des téologiens musulmans en Afrique
est très ambigue. Parfois elle est plss royaliste Que le roi"Au mois
d'Octobre 1962, quand Jean XXIII ouvrit le concile du Vatican pour "faire
éclater la veille outre (d'après claude A Julien) il ee produisit une
sorte de révolution dans l'Eglise Africaine. Les premiers à prendre la
pos~tion la plus conservatrice de l'Eglise furent les cardinaux, les évèquE
et ~es pr@tres africains. Plusieurs membres du haut-clergé africain firent
état de leur réserve quant aux formes décidées par le Concile"(Réf.Nouvel
Obs~rvateur de mai 1971)

'\\,
'
:.' .....'~.~.:
" '.'
,; F, :~':,
'.
!~~,
' • •

t··
.
.'
i';/._~. ;.:>:::j:":,,:~~
. '
.~ .~ .' ~ .
l.
_. 22"3 _
de la nation". Pourtant la t'l'vision serait un instrument
id'al pour l'enseignement audio-visuel!
L'amnistie de 1968 considéré comme la réhabilitation des
"compatriotes égar6s"(terme de ~obutu) fut en fait un piège
politique.Pierre ~u16lé, ancien compagnon de Lumumba et con-
tinuateur de la lutte armée pour la libération du Congo contre
les mercenaires européens et cubains(1).
En effet après l'intervention des militaires améri-
cains et belges aux cOtés de Mobutu pour lui assurer la vic-
toire, P.~ulelé fut obligé de passer sur l'autre rive du
COngo, à Brazzaville qu'il croyait Atre un régime populaire
d'après l'appellation du pays: Republique Populaire du Cango.
Il ,
demanda asile. Pendant son séjour Brazzavillois, ~ebutu
mit sur pied un plan d'arrestation qui devait, dans ses pre-
mi ères phe~e6~,attirer ~ulelé et ensuite l'éliminer textuellement,
il en fut ainsi. A Brazzaville, ~ulélé est contacté par des
envoyés de Kinshasa qui lui laissent entendre que l'heure de
la réconciliation nationale a sonné et que par conséquent, il
peut croire à l'amnistie de Mobutu. Mulelé ne se laisse facile-
ment convaincre car il "connait" ~obutu, l'homme qui n'a pas eu
-". .
.....
~
. -
1)
Les Cubains en question, sont des anti-Castristes refugiés aux U.S.A.
qui furent enrolés dans l'armée de mercenaires. 8annis et dans l'impossi-
bili~é de faire une contre-révolution à Cuba, ils se sont mis à la solde
de Tchombé et de Mobutu. Le commandant dont nous saluons la mémoire dans
ses pages a relevé ce défi en participant activement à la lutte armée
contre les soldats et mercenaires du gouvernement"fantoche". Nous gardons
et garderons un bon souvenir du Commandant che-Guevava-commandant Tatu,
nom que les patriotes congolais lui avaient donné et qui veut dire"trois
hommes en un" Un internaliste que l'Afrique n'est pas près d'oublier.

de "scrupule à trahir" Lumumba et a le "tuer"(1) ne peut
être du jour au lendemain un "ange".
L'ancien ministre des affaires étrangères de Mobutu,
Justin Bomboko, qui, pour enlever toute méfiance à l'égard
de Mulelé, avait traversé lui-même le fleuve Congo, porteur
d'un message écrit disant que Mobutu avait donné sa parole
d'honneur d'officier.
Après de telles démarches, qui paraissaient aux yeux
de Mulelé suffisantes, il se rendit à Kinshasa. A son arrivée,
le même Bomboko l'accueillit et lui fit escorté. Le soir, une
réception était donnée en son honneur chez le Général de la
garnison de Kinshasa où le champagne et le wisky coulèrent au
milieu des ambrassades BU nom des retrouvailles.
Dans la nuit, les militaires qui viennent de fêter
le retour de Mulelé le criblent de balles sur "ordre" de Mobutu
- Bien Qu'on ait dit après sa mort qu'il a été jugé et condamné
à huit-clos par un conseil de guerre et qu'il a été passé par
les armes aussitôt sa condamnation declarée.
Lumumba a été proclamé "héros national" par Mobutu à l'occasion du 6e
anniversaire de l'indépendance du Congo"Gloire et honneur à cet illustre
Congolais, à ce grand Africain, premier martyr de notre indépendance
économique. Patrice Lumumba. Ce 20 Juin 1966,
jour historique s'il en fut
un, où;notre pays va faire ses premiers pas vers la conquête de son indé-
pendance économique. Comment en une telle occasion ne pa~'évoquer la fi-
gure qùe fut et que restera Patri~e Emery Lumumba 7
Au nom:du gouyer~ement, n~u~ vous demandons de 22Idér maintenant une minute
silence à la memOlre de·ce.luJ. Que nous proclamons ce jour"hérQs national" :
rice Emery Lumumba (~éf Jules chome, op citée p 107).
C'est à partir de ce jour que le grand Boulevard de Léopoldville(Kinshasa)
porta le nom Lumumba. Et la villa d'Elisabetville ou l'assassinat se passa,
devient un centre de pelerinage ee de recueillement. Le geste de Mobutu
n'a pas d'exemple dans l'histoire"Il est des éco&~rements qui se passent
de commentaire, et des imprudenceSqui coupent le souffle." Mobutu qui a
fait tuer ~~m~mba ose aujourd'hui commémorer son geste avec innocence
la mort de Lumumba est entièrement l'oeuvre de Mobutu: Tshombé le confirma
lors ~~ sa tournée à Kissangani, en 1964, ou la population lui posa la
questl0~ : "Qu'est-ce que tu fais ici, toi qui a tué Lumumba 7" Il répond
en Swa~li : "Mimi Siko muwa Lumumba walinitumiya yéyé karibu majiti", ce qui
veut dlre"on me l'a envoyé presque mort" La predilection de Lumumba s'est
averée ~xacte quand il disait"Si je meurs demain, c'est qu'un blanc aura
la main~ d'un noir."

'1 .~
,
h\\
-." _
.~ .• ~•.•"
_"0' ~
- 225 -
Le jugement en fait, n'eOt lieu qu'à propos du
corps. En Afrique"l'ennemi politique n'a pas droit à la dignité
Conclusion du chapitre
Le constat auquel nous sommes parvenu montre bien
la nécessité de trouver une idéologie"capable de couvrir le
pouvoir absolu" et la "dictature personnelle. C'est au monde
la tradition bantoue que l'on prétend justifier la soumission
inconditionnelle au pouvoir absolu d'un des principaux respon-
sables de l'assassinat de Lumumba.
L'authenticité n'est pas arrivée à sa fin politique
objective. Le Congo ZaIre continue a ~tre la risée, malgré la
décision de ~obutu d'en faire un pays respectable.(objectif à
atteindre après le deuxième coup d'état). L'authenticité au lie
et place d'une délivrance est un simple austisme, un replie-.
ment sur soi-même, perte de tous contacts avec la réalité.
L'idéologie de "tapage" et de "brouille" ne suffit
à elle seule à cacher les réalités authentiques du ZaIre.
Certes Mobutu est arrivé à rompre un certain isolement politiqu
sur le plan continental. Embrassade de Boumedienne-Mobutu lors
de la conférence des ~ays non alignés à Alger ; Sékou Touré
qui hier fustigeait Mobutu à la conférence de Casablanca avec
le roi Mohamed V pour la cause de Lumumba est devenu aujourd'hui
le grand ami de Mobutu en le recevant avec pompe en Guinée(1973),
Cuba vient de signer un accord de retablissement des relations
diplomatiques avec le ZaIre cela, pendant la session de l'ONU
sur les matières premières.

~obutu ne menque pas d'imitateurs en Afrique,
François Tombalbaya, Pr6sident du Tchad a changé de pr6nom
désormais il est ~onsieur N'garta Tombalbaye.(authenticité
oblige). le Congo bien que authentifié est resté le pays de
la "misère" et de la "corruption."
Conclusion Générale
le Socialisme africain(1) avec tout ce que cela, _....
peut supposel(,cornm\\.mautarisme négr i tude , authenticité) est un
socialisme de circonstance voire m~me une aventure.Gunna~
~yrdal économiste Suédois rappelait opportunément au Parlement
indien, en Avril 1958, que l'Europe n'avait abouti à ses di-
verses formes de "democratie" qu'après avoir atteint un degré
,
déjà élevé de développement économique. Et que la tentative
de l'INDE d'installer un type analogue de démocratie avant un
début assez prononcé de développement, lui paraissait fort ha-
sardeuse. Ce pays n'a établi qu'une mauvaise caricature de de-
mocratie : le continent africain risque d'en faire autant.
le socialisme en réalité, suppose un partage des
bénéfices énormes issus d'une accumulation réelle des capitaux
1)
Sous ses apparences de quête anxieuse, avec ses grands airs de sérieux,
le socialisme africain n'est rien moins que le désir d'assurer un déroule-
ment pacifique au mouvement progressif des marchandises et des prébendes( ••
Il est aujourd'hui la tarte à la crème des Africains •••
Socialisme, intér~t nationa~ construction nationale, autant de barbiturique
qu'on distribue au roulement' des tambours des anniversaires des indépen-
dances. Ils permettent d'occulter le caractère anti-national d'une politiqu.
de démission, produit d'une extraordinaire paresse cérébrale." Stanislas
Adotevi p.128-132.

,. ! ~.
- 227 -
par le canal de la grande industrialisation sans oublier
la socialisation des moyens de production existants en bonne
et due forme. Or en Afrique l'économie coloniale n'avait mis
sur pied que les fondements d'une 6conomie d'exploitation des
matières premières avec leur transformation en produits finis
et semi-finis dans les métropoles.
Une enquête de la F.I.O. déjà citée par Réné
Dumont sur l'Afrique tropicale, souligne non seulement la
gravité du sous-developpement mais v'a plus loin pour montrer
l'impossibilité du decolage réel."l'Afrique présente, à un
degré extrême, toutes les caractéristiques du sous-developpe-
ment. Le handicap à surmonter est tellement énorme, dans tous
ces domaines, par rapport è d'autres régions sous-developpées,
Que sa nature même en devient différente ••• la rigidité de l'or-
ganisation sociale et la force des traditions dressent un obsta-
cle ••• la misère tend à se perpétuer d'elle-m@me"(Réf.I'Afrigue
noire est mal partie Ed Seuil 1962 p.202)
En face d'une telle "calamité" la sagesse recommande-
rait l'analyse froide(1)
(c'est à dire regarder en face les
faits et les hommes, pour voir ce qu'on on peut tirer) au lieu
et place de la facilité et de la démagogie.
Le Socialisme n'est pas, et ne doit pas être une
transpasition des méthodes actuelles de développement qui ont
certes fait leurs preuves en Europe et en Asie. ~ais, dans des
contextes socio-culturels différents. Non plus une copie des
Le Président Ivoirien ~onsieur HOUPHOUET BOIGNY a eu le courage d'éviter
le piège historique en s'agageant sur la voie de l'accumulation _
donner un début de "miracle" ou "mirage" à son pays. On peut lui
reprocher son "néo-colonialisme" mais les brasseiies et fabriques
de coca-cola ou d'autos privées sortent de terre à Abidjan.

~.'-; ~
f
• • • ;
_ . :
• • •
" - - : - . :
..228
des socialismes chinois et sovi6tiques"Copier l'Europe
actuelle plus d6velopp6e, et pr6cisement dans un domaine
ou elle parait rarement exemplaire et se cherche pénible-
ment, ·serait une erreur. Le socialisme de l'Union soviétique
et même celui de la Chine ont démarré à partir d'un sous-
developpement matériel, bien moins marqué qu'en Afrique. La
Russie possedait déjà une certaine industrie, et le courageux
paysan chinois avait, en 1949, un niveau de connaissances
techniques, de civilisation agraire, très superieur à celui
du pasteur sahelien ou du cultivateur bantou de 1966"Réf.René
Dumont ibid p 211.
En dehors de ce phénomène d'accumulation il existe
aussi la différence essentielle qui tient aux voies d'accès
à l'indépendance. En Afrique occidentale ex française c'est
sous la banière du R.D.A. que l'indépendance fut conquise.
Cette organisation politique a fait ses premiers pas à Bamako
ex Soudan français(actuel ~ali) lors du COngrès de 1946 des
partis politiques africains. Cette rencontre des élites avait
pour but la définition d'une plate-forme commune à l'action
politique des différents territoires coloniaux.
Ce rassemblement africain n'était pas à l'abri des
contradictions internes, c'est ainsi que l'on pouvait remarquer
une lutte d'influence en son sein. D'une part, le groupe Houphouët
Boigny"moderé" d'autre part le groupe Gabriel d'Arboussier qui
était considéré comme le leader de la fraction "gauchisante"
du R.D.A. Dans le sillage de ces deux leaders les "accomagnateurs"


:.' ..... ... - .
. . . ..
'. ._ ..._J.::-_..... __ .
:.
.', .
~ ~.; ,.' '.
. ._
..
~:
~-
".
l
, . "
, ' : '
,'"
..
~.
' l ,
' " : " . '
-229
-
furent ~amadou Konaté, Ouezzin Coulibaly et 5~kou Tgur~.
Quant A ce dernier, actuel Président de la R6publt~eeGde
Guin~e, son appartenance au groupe HouphouBt BOig~y s'est
fait sentir lors du désapparentement du P.C.F.(Parti commu-
niste Français) en 1950 Conakry.
Les grands affrontements qui eurent lieu ~endant
la lutte du R.D.A. furent: celui de Dimbokro(COte d'Ivoire)
qui fut une repression sanglante, la grève de l'inter-syndi-
cal (C.G.T. cheminots et CFT C Guinée); la repression contre
l'U.P.C.(Union-Progressiste Camarounaise) etc.
A part ces affrontements il n'eut pas de lutte
arméel·~. ~ais consécutivement à ces mouvements de masse, une
force politique se forma sur la base du développement de la
bourgeoisie et de la petite bourgeoisie bureaucratique qui,
d'ailleurs n'étaient pas aussi touchées que la paysannerie
mais voyaient déjà leurs futurs intér~ts se former. - C'est à
elle que l'administration coloniale fut confiance pour l'octroie
de l'indépendance.
Le combat pour l'indépendance en Afrique fut mené
par les fellaghas algeriens, les ~au Mau, le PAl G C, le
m PLA, le Frelimo etc).
Contrairement à la situation africaine"L'armée
rouge chinoise s'est battue pendant plus de vingt et un ans
dans les conditions les plus difficiles : elle a ainsi forgé et
Dans l'hymne national de la Côte d'Ivoire il est dit"si nous avons dans
la paix ramené la liberté notre devoir sera d'~tre un modeL:,de l'espé-
rance promise à l'humanité."
Par ailleurs, aussi on peut aisement eB.rendre compte du car.ct~re pacifique
de la lutte enti-coloniale par les propos euivants tenus par Hr SEKOU TOURE
à l'endroit du Gouverneur de l"poque 1954 -Hr Parisot 1 Hr Parisot au nom
de l'union
française que voue repr'BBntez ici accordez 188 26 %

.... _- ---,
.~
.. _. ~-....
..- _.
_~io _
et durci dans la lutte ses cadres politiques, son administra-
tion, et mAme une partie de ses techniciens. Les ti~des et
les poltrons ont ' t ' vite 'limin's, seul est rest' à la
tête du pays le noyau pur et dur, courageux, honnête et aus-
tère, Qui a pu resi_ter aux effroyables épreuves de la "l.ngue
marche".
Le Sociali~me ne se fait pas ~vec les comptoirs
vides, ni avec le verbe(1) il se fait à partir d'"un gros effort
d'accumulation, acc'leré pendant plusieurs d'cennies Qui est la
condition préalable de la construction d'une société socialiste
en Afrique de l'Ouest jusque là, le socialisme restera seulement
d'intention.
Il n'y a pas d'autre financement que la voie adminis-
trative. Les handicaps hérités du passé ne justifieront pas aux
yeux de l'histoire la faible capacité de l'administration de
consacrer au developpement économique la ponction grandissante
qu'elle fait sur le revenu national .•• (car il y a ) une crois-
sance très rapide des dépenses administratives courantes"
écrit Samir Amin in (Le ~ali, la Guinée et le Ghana. étydes
Tiers-~onde, P.U.F. 1965.)
Le Socialisme c'est d'abord l'accumulation du
capital avant de passer à sa concrétisation. Le socialisme
ne se fait "pas avec une économie a faible densité" comme en
Tanzanie "As is typically
the underdeveloped economiesand
more so those of Africa, Tanzania's economy is based
on primary production with a harrow industrial secto~
and a large, "parasitic" services sector." réf Issa
Parlant des étudiants guinéens prenant leur rêve pour réalité René Dumont
disait ceci "certain~ guinéens, issus de notre enseignement superieur,
croya~ent possible, a l'aide materiel moderne, de depasser le rythme de
croissance chinois, tout en travaillant beaucoup moins : dangereuse nelveté '
réf L'Afrique noire est mal partie Ed du seuil 1962 p 212.

..,.'
' ..
','
.
~. ,( ,': ~ . .:.-
J....:
""o,' ~.
- . .
. . .
. . . . . _ _ ~ .•
A ~ _
. _
. '.
_ 231 _
G. Shivji Cla8S Struggles in Tanzanie He»nemenn London
p.1491976.
Il ne se fait pas non plus avec des dirigeants
guinéens "fort médiocres, e de rares exceptions près( ••• )
la ruée vers l'or, traduisan~ le pactole administratif,
avec attributions d'indemnités somptueuses, logements gra-
tuits pour les nouveaux princes du régime"(réf B.AmeillDn
La Guinée, bilan d'une indépendance, ~aspero 1964).
Le Socialisme ne se construit qu'avec l'apport de
toutes les forces vives et surtout demanderait un lourd sa-
crifice de la part des intellectuels(1)ré~uctiondes dépenses
administratives."Il n'y a donc pas de solution magique - la
voie socialiste pas plus qu'une autre - qui dispenserait
l'Afrique du rude effort indispensa~le pour sortir du sous-
developpement.( ••• ) Ne parlez surtout pas de socialisme, tant
qu'un ministre ou un parlementaire, en un mois ou deux de"tra-
vail" sous la brise du climatiseur, gagnera autant qu'ane pay-
sanne, pendant toute sa vie de rude effort sous le dur soleil.
Les syndicats africains, dirigés du sommet, défendent aussi
les plus hauts salaires, donc les privilégiés, mais non les
paysans-proletaires." Le socialisme tel qu'il est vécu dans
les pays analysés, mettra du temps à se réaliser. Autrement dit
l'exemple ivoirien considéré de néo-colonialiste fera tâche
d'huile dans le temps et avec le temps.
Les intellectuels Africains préfèrent la haute politique politicienne~~
retroussement des manches pour améliorer le sort de leurs compatriotes
paysans.

-. -.'.
.....
\\'.
\\ , '
'.
'.- "
·Ch.~ul tranc ratou-
\\
retourne eu donateur
Josud Castro disait
dans aon livre 1 gdo-

graphie de la Faim,
que chaque do
9n
~. par ,le. U
a un
~ay. de l'
'rique
35.~ SA, le8 ca-
dee {
c:.1a rapport
----
,-
1/
f ~.

23B'
. .
E
X E
=:=:=:=:=:=:=:=:=:=:=:=:=
L'aide internationale
( A chacun son ventre, ou la
maladie de l'accumulation
est-elle incurable ?
Dans les pays occidentaux, toute visite de chef
d'Etat africain, qu'elle soit visite de courtoisie ou visite
officielle, elle passe aux yeux de la population de ces pays
pour une visite de mendicité.
"C'est à PARIS. Un chauffeur de taxi conduit son client à
travers les embouteillages de voitures de la capitale française.
Soudain retentissent les pétarades et les cl axons d'un convoi
officiel qui contraint le taxi à se ranger. C'est un Chef d'Etat
~ africain en visite à Par:. Le chauffeur lance alors à la can-
tonnade:"Encore un qui vient chercher son argent de poche
"(Réf. L'éclair, organe bi-mensuel du ~ouvement de la libéra-
tian nationale de la Haute-Volta, N°36, 1972).
Effectivement, à travers ces anecdotes, le peuple
commence à comprendre petit à petit la politique inter-Etats.
On a beau mettre un os dans une calebasse, il finira toujours
par se faire découvrir- Proverbe africain).
Peut-on dire que l'aide des pays riches aux pays
pauvres est une aide désintéressée? Ou bien y-a-t-il possibilité
que les Etats regardent au-delà de leurs ventres ?
Toutefois, les pays riches qui ne courent pas après
le coeur mais après leurs intérêts le laissent voir. La soi-

" , ... ,
~ disant aide et coopération des pays riches è l'égard des pays
pauvres, malgré l'embellissement qu'on leur donne ressemblent
beaucoup aujourd'hui à "un cercueil que tentent de masquer sous
les fleurs et les couronnes les discours officiels"-Ibid).
L'aide accordée aux pays pauvres - disent-ils -
est égale à 13 milliards de dollars : "~ais si l'on en retire
les investissements privés qui rapportent des bénéfices énormes,
les prêts remboursés avec un certain pourcentage d'intérêt et les
avantages que procure l'aide aux pays donateurs, la vraie aide
se réduirait à 3 milliards de dollars pour les pays occidentaux
du Comité d'aide au développement, soit O,20~ ou un cinquième de
centime sur chaque franc du produit national brut de ces pays,
qui, par ailleurs, dépensent di~ fois plus (2~) pour la publicité
de leurs produits en vue de donner un élan à la consommation dans
une économie de "surabondance", et douze fois plus pour les ar-
mements."(Ibid).
En ce qui concerne la france, si l'on retire les dé-
penses qu'elle fait pour maintenir son autorité dans les colonies
appelées départements et territoires d'Outre-mer, c'est-à-dire
l'entretien de la police et de l'armée, son aide publique tombe
à O,65~ du P.N.S.(produits national brut).
Il en va de même pour le Portugal, pays sous-développé
qui prétend aider les pays africains parce qu'il y envoie des
militaires et autres mercenaires pour massacrer les populations
de la Guinée-Bissau, du ~ozambique et de l'Angola. Si le nouveau

Portugal voulait aider ces pays, la seule aide efficace
qu'il pourrait leur accorder ce serait de se retirer
sans conditions préalables de tous ces territoires Qui sont
parties intégrantes du continent africain.
La charge pour les pays pauvres
d'@tre aidés E!! les ~ riches
De la pratique de l'aide conditionnée Qui fait
du pays receveur une colonie du pays donateur, oblige le
bénéficiaire à n'acheter que dans le seul pays donateurs.
80~ environ des aides financières reviennent ainsi dans les
caisses des pays donateurs sous forme de commandes.
En plus de cela, l'aide avancée des +pays développés+)
ne vas
pas au profit des populations déhéritées par l'exploita-
tion coloniale. Au contraire, elle va à l'entretien de ses
propres industries marginales par une subvention à peine dé-
guisée, et ainsi l'exportation des pays donateurs ne fait qu'au-
gmenter sans pour autant que le rythme de l'importation ne
baisse. Les usines de montage -disons l'industrie légère -.
filiales des grandes compagnies étrangères, sont alimentées de
l'extérieur. Au lieu d'exporter des produits finis on exploite
Le développement dont il est Question ici est relatif en le replaçant dans
son contexte historique.
Le développement du monde dans sa totalité, surtout dans la période de sa
constitution en tant qu'entité, est dO au processus qui a créé son centre
et sa périphérie ; le centre est représenté par les forces dynamiques des
pays industrialisés, la périphérie par les pays colonisés et néo-colonisés
qui constituent actuellement le monde sous-développé. Ces derniers deviennent
ainsi périphériquement attachés au monde développé que la révolution indus-
triellel a transormé, d'où par conséquent, il est clair que ce monde sous-
développé dépende des centres de développement situés au-delà de ses propres
frontières.

.
.
.
\\
,-_."
.'
,
::......... _~ ....._.....:. ---'~",., _..
._~I~
235
sur place avec les mêmes intérêts. Avant, les bénéfices des
_ fimres européennes et américaines ne pouvaient être connus
qu'après la liquidation des produits sur le marché du tiers-
monde. Aujourd'hui, ces articles sont fabriqués sur place et
en grande quantité, ce qui permet de diminuer les frais de
transport. la mise sur pied de ces petites entreprises permet
aussi d'utiliser une main d'oeuvre surexploitée.
Une telle aide enfonce de .plus en
plus Te pays
receveur, dans le sous-développement. Une autre fonction de
l'aide internationale est de choyer les"contre-ma'tres" des
pays receveurs, afin qu'ils puissent veiller sur les intérêts
des .pays donateurs. Souvent ces contre-ma'tres utilisent ces
faveurs pour se payer des petits séjours à l'étranger où ils
profiterit pour emmagasiner dans les banques leurs
surplus qui
fructifient et rapportent ainsi d'autres profits aux pays dona-
teurs. le cas de Mabutu est un exemple."Après avoir reçu 100
millions de dollars de la part de la Chine, il est allé prendre
l'air à Monaco et en Suis.se. D'autre part, il n'y a pas long-
temps, des députés suisses ont interpelé leur gourernement
afin qu'il cesse son aide à la Côte d'Ivoire car son chef
d'Etat a 300 millions de francs quisses dans les banques suisses
(Rtf. Horoya, du 25 Septembre 1973)~ En 1972, de passage à
Budapest, l'ambassadeur guinéen en Yougoslavie, affecté tout
récemment à Moscou, feuilletant le journal "Jeune Afrique ll
voit une réclame sur la Barclay Bank et s'écrie
"C'est ici
qu'on a notre argent! Il En réal ité, l'aide dont il est question

236
nlest autre que les 2% des gains que les pays pauvres gagnent
de leurs exportations (Résultat du travail des masses).
"Ce nlest donc pas 1 1 aide qui fait vivre les pays
pauvres, et si elle persiste sous cette forme, on se demande
même si elle ne finira pas par étrangler les pays receveurs".
Par ailleurs, les pays riches ont tendance a créer leurs propres
structures dans les pays sous-développés parce que cela facilite
beaucoup le processus de leur propre expansion, tant sur le plan
intérieur que sur le plan extérieur.
Sur 1e pl an i ntéri eur, 1· a i de accordée est accompagnée
d'une main-d'oeuvre superflue composée de chômeurs qui s'embar-
quent vers les pays pauvres. Cette main-d'oeuvre est appelée
.~ aujourd'hui assistance technique ou d'une expression
plus moderne
"coopérants". Pompidou, alors premier ministre en juin 1964,
déclarait devant l'Assemblée nationale: "En fin de compte et tout
au moins pour l'essentiel, la pol itique de coopération est la
suite de la politique d'expansion de l'Europe du XIXe sièc"e qui
- s'est marquée par la création ou l'expansion de vastes empires
coloniaux. "5(Réf. Jacques Coulaud, dans les Cahiers du Communisme,
mars 1974, N° 3).
Sur le plan extérieur, ces assistants vont dans les pays
pauvres pour y chercher fortune.
Il est courant d'entendre dans
les pays r i che s, que 1a me i 11eu r e fa ç 0 n des e fa ire du Il f ri c ': cIe s t
d ' allertravail1er dans les pays du tiers-monde comme "coopérant"(1]
(1) Certes, il y a.deux catégories dl assistants techniques, ceux qui
vont en Afrique pour s'acquiter de 1eu~ devoir d' internationa1istes et ceux
qui "ayant échoué dans leurs tentatives de s'impos~r et de réussir daQS leur
propre société vont en Afrique pour y jouir du préjugé de la supériorlté
raciale et culturelle". (Culture et Aliénation en Afrique, A. Kashamura,p28)

237
Malheureusement cette tendance à soutirer des gains
personnel s sous le couvert de la coopération se fait sentir
aussi chez les cadres des pays socialistes qui vont en Afrique(1)
Toute la politique d'aide engendre en elle-même une subordina-.· ;:
tion de la part du pays aidé. Il y a un bon exemple en cela.
En recevant le 23 mars 1972 l lambassadeur du Dahomey, le prési-
dent français lui a déclaré "que la poursuite de notre effort
dans ce domaine (il s'agissait de l laide) dépend d'abord des
projets de votre gou'll'ernement. "Bien sûr tout cela semble con-
tredit par certaines exceptions dont on fait toujours allusion.
Parmi les pays pauvres, il y a des pays soit-disant riches -
le Brésil, en Amérique Latine,le Kenya et la Côte d'Ivoire en
Afrique - dont les résultats passent pour des miracles, voire
même des bonds en avant. En réalité il n'y a pas de bonds en
avant, simplement ces pays servent de vitrine pour faire croire
que l'aide apportée aux pays pauvres porte ses fruits. "Si la
prospérité est basée sur des injections à doses massives de
vitamines financières, cela ressemble à un dopping. "11 est
nécessaire de voir le niveau de vulnérabilité et de dépendance
par rapport à l'extérieur: dire au pays receveur "ferme ta
bouche ou je te fais crever de faim. Cuba nous sert d'exemple
(1) Souvent les populations des pays "donateurs", mal informées sur la na-
ture de ladite aide, s'en prennent aux ressortissants de ces pays aidés
(travailleurs et étudiants) pour les traiter de profiteurs et de fainé-
ants qui feraient mieux dé retourner d'où ils viennent. Cette incompréhension
sur la nature de l'aide existe aussi dans les pays socialistes. En Hongrie,
~1 par exemple, l'étudiant africain est ~njurié, même par certains camarades de
11 uni vers ité qui l'apostrophent de "bokszos, pi szkos ni ger, tOrzs fonok, voi re
même "Menjen szocialiszmus cs"inalnidzsungelbe! Il (Cireur de bottes, sale nè- .
gre, chef de tribu, vas faire ton socialisme dans ta jungle!) Il est courant
d'entendre de la part de la jeunesse cette réflexion: "Qu'est-ce que tu cher·
ches ici, on dit que vous n'aimez pas travailler, c'est certainement pour
manger notre pain ?"
Malgré l'opposition des autorités a ces genres de manifestations exté-
rieures.

car
nous voyons quel rOle peut jouer ou a pu jouer l'ancien
système de type colonial. Pour Cuba. les Etats-Unis avaient
réussi à le maintenir en vassal simplement en réduisant ses
achats de sucre chaque fois qu'il y avait une velléité de libé-
ration de Cuba. Cela se produisait en 1932 et en 1933. dès qu'il
y eut des manifestations d'indépendance. Il suffisait de réduire
de 5 à 2 le quotadu sucre d'importation des Etats-Unis, et le
régime ne pouvait plus bouger en raison du système de la mono-
culture. Ce chantage économique fut fait à l'égard du Ghana de
Kwame N'Krumah. le prix du cacao avait baissé sur le marché
mondial. Il en fut de même pour le Chili. le prix mondial du
cuivre passa comme par hasard de 750 livres sterlings la tonne
à 500.
Avec de telles conditions, on conviendra qu'il ne faut
pas confondre la croissance et l'élan autonome ni les arbres des
statistiques avec la forêt du développement. "La véritable aide
qui peut être faite aux pays sous-développés est de les aider à
diversifier leur industrie, par exemple la création d'usines de
transformation des matières premières comme le cacao au Ghana
qui lui permettrait de ne pas subir les fluctuations de ce produit
sur le marché mondial.
Les structures culturelles engendrées par l'aide pour-
raient être utile dans le cas où l'aide apportée à l'éducation

est un bien en sol, c'est-à-dire la formation de cadres indispen-
sables au développement des pays pauvres; mais les préférences
des pays aidant vont vers la création d'institutions de sauvegarde
... / ...

"
.
- .-..._.- . ----~ .._......--"--
','
'1
.:-....
1
239
des intérêts
colonialistes, qu'on appelle des institutions
africanisées ... mais comment? Au compte-gouttes, par la tech-
nique primitive des culture sur brûlis. La culture africaine
est tout à fait anihilée, laisant le chemein libre a la cul-
ture du pays néo-colonialiste et a la civilisation occidentale.
Tout le monde sait que l'école dans les pays du tiers-monde est
une école séparée de la vie courante, une institution d 1 aliéna-
tion culturelle, de déracinement social et enfin de compte une
1
usine de futurs parasites, car elle a gardé toute sa structure
coloniale.
Le contenu de l'enseignement est loin d'être le con-
tenu désiré. En plus du retard qui est lourd de conséquences,
une politique de limitation de la scolarité est pratiquée sur
une vaste échelle. Elle est faite par et pour l'impérialisme qui
veut limiter la formation des cadres à ses propres besoins. Cette
tromperie est acceptée par les chefs d'Etat africains sous le
prétexte d'éviter l'enseignement au rabais, comme si dans ces
pays on regorgeait de cadres supérieures.
L'université africaine ne doit pas être une "boTte"
à fabriquer des "têtes pleines" remplies de connaissances inuti-
lisables, sans aucun rapport avec le milieu africain. "Elle doit
opérer une spécialisation rapide des étudiants, ceci à l'avan-
tage de réduire le cycle général des études et de doter les cadres
ainsi formés de connaissances qui pourront être ada~tées à leur
future tâche dans la vie nationale, pour ce faire, l'université
... / ...

· .
en Afrique doit être différente de l'université bougeoise des
pays capital'istes. Le but des universités africaines n'est pas,
en effet, de délivrer des diplômes reconnus à Paris, Londres,
Washington, etc., mais de former des cadres efficaces et adapta-
bles (1). Cette apréciation seule peut conférer une valeur véri-
table aux diplômes universitaires. " (Réf. Sékou Traoré,
Responsabilité historique des étudiants africains"pp. 179-181).
Pour conclure, la coopération n'est qu'une opération de
des pays riches sur le dos des pays pauvres.
Si vraiment l'aide aux pays pauvres était une oeuvre
humanitaire, elle ne serait accordée qu'aux pays à régime démocra-
tique et non aux pa~s fascistes (Chili, Afrique du Sud, Portugal
de Caoetano, Israël). Aider ces pays àcause des intérêts économiquf
et s t ra t é g i que s, cie s t c 0 mmes i /.~~~~~~~4ct;~.~:c 0 nt r e Hi t 1er a va i t été
un procès momentum et non 1 a J§t~é Paû~~ jus t ; ce humai ne (2) ,.
~§ (, ~·~-I ~ij
Vi \\~
J.~
( 1)
Tout enseignement est en fonC'Non~du régime ..ln place.
'\\
'------~ ~
(
(2)
D'après le journal Reuter, le g~u~elir;leme'~.t'suédoiS avancerait en 1974:-1975
une aide de 15 millions de couronnes aux mouvements de libération du Mozam
bique, 50 millions de couronnes au mouvement de libération de l'Afrique
du Sud et 145 millions de couronnes au gouvernement TaRzanien.
Certes cette aide est très importante et salutaire, bien qu'elle soit un
moyen de stabilisation de la politique extérieure de la Suède. Mais là où
elle doit vraiment aider, clest-à-dire, reconnaTtre le nouvel Etat de la
Guinée Bissau, elle se réserve de ne pas prendre de décision.
Les ouvriers de la Liberrian American Swedish mineral company (LANCO) ne
sont-ils pas tragiquement exploités par les capital istes suédois? IILes
bénéfices avoués sont fabuleux, la production est assurée par 660 techni-
ciens et employés non africains - la moitié sont suédois -, et par 3.500
travailleurs africains dont le salaire mensuel, à raison de 48 heures de
travail par semaine, ne dépasse pas 300 francs! Si l'on rapporte la pro-
duction globale de chaque exploitation à l'ensemble du personnel employé
on const~te que la productivité des travailleurs libériens - à très bas niveau de salaire
tend à s~ raprocher - en raison de facilités d'exploitation à ciel ouvert - de la productivi-
té des mtneurs de fond suédois dont la reconstitution de la force de travail dans les condi-
tions des mines de Laponie exi~e un salaire mensuel de l'ordre de 2.000 francs impôts déduits
" (Réf. ~acques Arnold, le soclalisme suédois, Edition sociales. o. 78)_

BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages sur le continent Africain
(
) THOMAS
'(L.V.)
Socialisme et l'Afrique
livre Africain 1966
II Tomes
(4)
NELKIN
(D)
Socialist saurces of Pan-African
Idéology,
in African Socialism,
1
ed.W.H.
Friedland and Carl G. Rosberg
Stanford,
University press,
california, 1964
(6)
STANISLAS
(A)
négritude et négrologues,
Union générale
d'éditions,
1972.
(5)
SENGHOR
(L.S.)
L'Unité africaine
Seuil 1963.
(4)
SENGHOR
(L.S.)
S.Nation et Voie africaines.
Présence africaine 1963.
(3)
MAMADOU
(D)
Réflexion sur l'économie de.l'Afrigue noire
Présence africaine 1972.
(2)
KWAME
(N'K)
Lutte des classes en Afrique Ed pr~sence
Africaine 1970.
(1)
JULIUS
(NY)
Ujamaa,
the basis of African Socialism in
K. Freedomand Unit y,
oxford U.P.
WODDIS
(J)
Afrique,
le lion s'éveille ed présence Afri-
caine 1964.
REVUES SUR L' AFRIQUE ET SUR LA GUINEE
Colloque sur les politiques de développement et les diverses
voie africaines vers le socialisme,
Paris,
Présence Africaine, 1963.
Dr JOKICA KASILEVA : Africa Isocijalism revue mensuelle Yaugoslave janvier 1974.
HOROYA
Quotidien guinéen Avril 1962.
HOROYA
28 Décembre 1962.
HOROYA
20~3,
14 Septembre 1973.
HOROYA
du 24 Août 1967
JEUNE AFRIQUE :N° 1266 10 Avril 1985.
R.D.A.

Il 1966
R.D.A.

22 1968
HOROYA
15 Mai 1968
HOROYA
16 Septembre 1973
HOROYA
23,
24 Août sur le congrès de la bouche ouverte
HOROYA
25 Septembre 1973

OUVRAGES SUR LE CONTINENT AFRICAIN
DAUNAYERSHYA
(R)
Socialisme Africain et problème nègres
Présence Africaine na
48,
1963
KANVALY
(F)
du Statut de la jeunesse dans les Sociétés
Africaines Ann.
U
Abidjan,
Série F (Ethno-
socio)
t
x,
1982.
HANRY
(p)
Erotisme Africain
payot 1970
YVES
(B)
Idéologies des indépendances africaines Ed
maspero 1970
ABDOU
(T)
civilisatiori quotidienne en Côte d'Ivoire
Karthala 1981-
RENE
(D)
L'Afrique noire est mal partie Ed Seuil 1962.
·SAMIR
(A)
Le Mali,
la Guinée et le Ghana,
études tiers-
monde,
P. U. F.
1965.
OUVRAGES SUR LE CONGO -
ZA1RE
MICHEL
(M)
Le Congo,
de la Colonisation Belge à l'indépen-
dance,
Ed Maspero cahiers libres,
na
32-33.
CHOME
(J)
L'ascension de Mobutu
~d Maspero
ECIMA-matin Revue 25 l'v\\ai 1972.
Jeune Afrique na
011 39
3 novembre 1982.
TUASHINDA
(N)
L2:J mystifications
de L' au then tici té pensée juin 1974
na 175
JEAN de la
(G)
Monde hebdo 21.
27 Mars 1974.
JOSEPH DESIRE (M) Paroles du Président livre vert 1969.
OUVRAGESS SUR LA TANZANIE
SHIVJI
(G)
Classe Struggles in Tanzania Heinemann Landon 1976.
ANICET (K) Culture et Aliénation

OUVRAGES SUR LA GUINEE
ALPHA (C)
GUINEE,
L'Albanie de'l'Afrique
ou néo-coloni8 Américaine.
Ed Git.
le -
Coeur 1972.
SEKOU
(T)
Révolution Guinéenne
Ed Patrice Lumumba 1969
J.
SURET (C)
La république de Guinée
ed Soc 1970.
Association des étudiants Guinéens en France Section de la ~E~~
Mythes et Réalités 1970
SEKOU
(T)
L'action Politique du P.D.G.
tome 8
MARCEL RIVIERE
(C)
Mutations sociales en Guinée 1971
SAKO (C)
Guinée,
le temps des fripouilles
pensée Universelle 1974
DIAKITE
(A)
Guinée enchaînée ou le livre noir de SEKOU TOURE
Ed. D.A.C. 1972.
JEAN PAUL (A)
Prison d'Afrique Ed Seuil,
1976 Paris
GOUVERNEUR ROLAND (Pré)
L'avenir de la Guinée Grançaise
Ed Guinéennes Conakry 1951.
AMEILLON
(B)
La Guinée,
bilan d'une indépendance Maspéro 1964.
OUVRAGES SUR LE SENE GAL
SENGHOR (L.S)
Théorie et pratique du Socialisme Sénégalais
Texte ronéotype,
présenté par Senghor au Séminaire
des cadres politiques,
novembre-décembre 1962 P.
77.

OUVRAGES GENERAUX
FRANZ
(F)
Les damnés de la terrre
Ed.
Maspero
MYRDAL (G)
Une économie internationale
Ed.
Minuit 1958
Vocabulaire technique et critique de la philosophie P.V.F. 1962.
SENGHOR
(L.S.)
Pierre Therllard de chardin Paris-Seuil 1960
LOUIS
(A)
Réponse à John Levis ed
Maspero 1972
CHE GUEVARA
(E)
Souvenirs de la Guerre révolutionnaire
Ed maspero
1969.
RENE
(D)
Développement et socialisme
collections Esprit
"Frontière ouverte" Ed du Sellil 1969.
MARX (K)
Manuscrits Economiques de 1844
Ed Soc.
Paris 1962.
LUKACS
(GY)
UTAM A MARXHOZ
ed magveto 1972
MARX
(K)
Idéologie Allemande
ed.
Soc. 1970
ENGELS
(F)
Ludwig Feurbach et la fin de la philosophie
classique Allemande
ed Soc 1949.
ROSSANA
(R)
Les intellectuels révolutionnaire et l'union
Soviétique temps modernes mars 1974.

332
THANK KHOI
(LE)
L'enseignement en Afrique Tropicale P.V.F.
1971.
REVUES GENERALES
REVUE Encyclopédique,
novembre 1883, Tome L X.
Fraternité Matin (quotidien Ivoirien n° 6185 du 24 -
05 - 85 P.
31
NEW-YORK
Time 1958
KOLNISCHE ZE!TUNG,
N° 179 14 Juillet 1942.
Cahiers du communiste Mai 1963.
France -
Soir
31 janvier 1971
Cahiers d'études Africaines,
VIII 31, 1968.

TABLE
œs
MATIERES
-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-
Intrcx:luction générale (le prci>lèIœ) Pœrquoi le Socialisrre Africain?
1
-
30
Socialisrre Sénégalais
30
-
46
Socialisrre Tanzanien
46
-
62
Socialisrre Guinéen
62
-
64
Soit~sant lignes de Force du SOCialisrœ Guinéen
64
-
68
Critiques des CCXlpératives
68
-
70
I.e Socialisrre Guinéen Face au rrarxisrœ
70
-
82
I.e parti unique came noyen de consolidation du Pouvoir en Guinée .•.
82
-
87
Les Forces de Sécurité en Guinée
87
-
94
Les Gouverneurs de Regicns
94
-
95
la Justice
95
-
96
La Jeunesse du Rassenblaœnt DÉmXratique Africain (J .R.D.A.)
.....•.
96
-
98
Position de la jeunesse dans la vie politique Quotidierme ..•......••
98
- 102
La problématique Dérrœratique
102
- 105
L'organisation du ~ t J. R.D.A
105
- 114
Constat de participation Politique
114
- 123
Le ItO..lvement National des pionniers et la milice
123
- 131
L'action Econanique de la Jeunesse
...................................................... 131 - 138
Réorganisation des lDisirs
..................................................................................
138
- 152
La refol:ITle de l'enseignerrent .....•••......•••••..................•.•
152
- 170
Des attitudes quotidiennes de la J .R.D.A
......................................................
170
- 179
Conclusion du chapitre
..........................................................................................
179
- 184
Conclusion Générale sur le Socialisrre Guinéen
............................................
184
- 209
bu Socialisrre du Sergent-Colonel Joseph
........................................................
210
- 214
Désiré M:butu à l'authencité du général M:butu Séssé seko .......• ..
L'
thent"
"té
.
au
lCl
et ses grandes 11gnes .•...•.•.............•.•••......• 214
- 218
Réalités Sociales et Authenticité •.•..•.............•.......•••••..•
218
- 226
Cooclusion Générale
................................................................................................
226
- 231
Annexe
................................................................................................ 232 - 24?

!
1
i -
1