1
.
THESE POUR LE DOCTORAT
de
L'UNIVERSITE DE LA SORBONNE-NOUVELLE PARIS III
(l'Arrêté du 5 Juillet 1984)
···rc~-~
1 ONSEIR. AFRICAIN-~-------=
! POUR L'ENSEIGNE
ET MALGACHE,!
Il C.A. M. E. S. _ J\\1ENT SUPERIEUR!
Arrivée
OUAGADOUGO
! EnregiSh-~' ? ,1· J"'~N .iQQ.H:..
U '
no,.
-.
!
...
"OUs
:;j . • . • •
O' O' 7. -l 4.. ,
.
'J
J
.-., ··_._._i
QUELQUES TRACES DE RELATIONS DANS L'ENONCE ANGLAIS ET SENOUFO
===========~=======~=======3==========================
= = = = = = = = = = = = = = = = = = = =
ANALYSE META-OPERATIONNELLE
présentée par :
SILtJE Sassongo Jacques
sous la direction de :
Monsieur le Professeur Henri ADAMCZEWSKI
Mars-Avril 1986

A feu mon père Ofoua qui eut l'idée
de
m'initier au poro des 13lancs"
A ma mère Oofouon qui bravait l'abondante
rosée matinale pour me conduire à Kaplé,
A Sônan oui ~'y conduisait sur son vélo
à la fin des congés,
A ma grand-mère Pégnan ,
A mes petits frères •

-=-=-=-=-=-=-=-=
Je
tiens
~ exprimer,
en premier
lieu,
ma
sinc~re
Grati tucle
à (!onsieur
le
l'ro Cesseur Henri
An.\\,\\;CZ:~:;\\'~;!~l: qui,
par
son encadrement,
rn' a
.i n s u f f Lé
un goût poussé
pour
la
recherche.
~30n rapport
a
la
science du
If1ngag(~, sa phi losophie de la recher-
che m'auront permis d'acqu~rir une
certaine
sfrénit6
face
aux
choses de
la vie.
Je
lui
suis
reconnaissant
pour son soutien mo-
ral,
surtout
pendant
les moments de doute.
J'adresse mes vifs
remerciements
à
mon
plus
qu'ami,
YAO Kouadio.
Je n'oublie pas
les
longues ann?es d'appren-
t i s sage
commun,
la co llabora t i on sout enue,
le s
ppreuve s
traverspes.
Je
remercie mes
amis et
collègues de
Paris III.
Leurs
remarques
en dehors
et
pendant
les
spances du
CRELINGUA -
le
Centre de }~echerche en Linguistique Anglaise -
m'ont été bô-
néfiques.
J'exprime ma profonde
reconnaissance
a
mon ami
et aînè
A Ibert
f\\:IENT/
qui,
va lontairernent
ou non,
m' Cl
aigui llé
vers
13
ling-uistique,
depuis mon plus
j eun(~
Je n'oublierai
pas
tous
ceux des amis
-
en par-
ticulier ~~icolc :Sl:\\'nLL\\!C!(!~ et Luc l'üN;~TTT:~ -
qui m'ont
rendu
18
vie mat/'riellement.
supportable
en
terre
fra riç a ri s e .

l
N T il 0 DUC T ION

Sntreprendre un
travail de
recherche
sur
la Rel8tion peut
paraitre
à
la fois
prftentieux et m~me surprenant.
Pr~tentieux
dans
la mesure o l'! i l
est question de
re lat ion dans
les domaines
de recherche
les plus variis,
surprenant
parce que
la relation.
est
souvent évoqu~e implicitement.
Celle-ci est
invoquée comme
moyen et
presque
jamais,
directement
comme objetd'~tude linguis-
tique.
Cela doit
certainement
tenir à son statut
ontologique:
la
Relation n'est
pas
toujours
une
réalité
palpable;
peut-~tre sera-
t - i l facile de
chercher à
l'appréhender à
travers
certaines de
ses manifestations:
nous rechercherons
les
traces de relations
dans
l'énoncé
anglais
et senoufo(l).
Nous
sommes parti d'une hypoth~se tr~s simple:
le
sens gui
est
le propre de
la
langue et m~me du langage
ne
s'obtient que
par la construction de relations.
Par "sens"
nous n'entendons pas
seulement
ce qui
peut
~tre encore appelé "la signification" dans
les &changes verbaux.
C'est
le
sens
en tant qu'il est
construit
avec
tout
ce qui permet au spécialiste du
langage d'entrevoir
la
mani~re dont ce sens se construit.
L'hypoth~se est,
sans doute,
simple.
Mais pour en v~rifier
la v é r a c i, t<~ et même
le b i e n-s I'o nd
i l est nécessaire que
sa ren-
é
,
contre
avec
les
faits
s'effectue dans
un cadre
(théorique)
appro-
p r Lé •
Un cadre
t hé o r Lq u e
pour
lequel
le
concept de
relation fait
sens.
Pour certaines (coles
linguistiques,
la notion de
relation
n'a
pa s
cl("passé
la notion cie
"rapport".
Pourtant,
nous y
v oy o n s
(1)
Pour
la si t u at i.o n g{'ographiql!e et
linguistique du
senou:fo,
voir l'annexe à
la page
S\\-+

non
p a s
une
rru a n c o ,
.n a i s
1.1118
c1:ir'ff~rence df~
ta:llle.
':.~uo:iqu'il en
soit,
c o t t e
rJ:iCCI'-rrc>ncG
d',)p/îrl"c:iation pèsera de
tout
son poids
clans
I a
r:J{marche
1 .i Il[';ui s tique,
c' es t-8-clire,
à
la
foi s
clans
le s
th~me5 choisis et,bien entendu,
dans
leur analyse
et,ratalemen~
dans
la
teneur des
r-cs uL't at s
a u xq u o L, l'on parviendra.
Na i n t e nn n t
en
ce qui
concerne
ce
long
expos~ que nous allons faire,
peut-
être que
notre
caclre
théorique
la grammaire
m~ta-opérationnel-
le
-
favorise-t-il
la
[annulation d'une
hypothèse
comme
121
nôtre.
La gra:nniairé? IIi,Staop('rationnel 1.e mise
sur pied
par
le
Pro-
fesseur Henri
i,déllilCZe\\vs:-;:i
a
c!P j,') que lques anrié o s
d'existence.
~lais elle n'est PC1S encore b ion connue;
i l
importe donc
d'en fai-
re
unèpr6sentation,
s o i t - e l l e
succincte.
De manière
très
sch6matique,
c ' e s t
la
conception selon
laquelle,
i l
n'y a
pas
meilleure linguistique pour montrer le
fonctionnement
dp
la
langue que
la
langue
elle-même.
f':n première
approximation,
on
serait
tenter d'y voir
la
"fonction m~ta-lin-
guistique
du
Langage".
Cette
fonction du
langage
reprise
et
reprécisée
de
façon
toute
relative
par H.· .Jakobson est
a drn.ls a
des
linguistes.
La
fonc-
tion m~ta-linguistique du
langage
d'apr~s R. Jakobson,
comme
s ' i l
~tait besoin de le rappeler,
0st
l'acception
traditi8nnelle
-
deve-
nue
b a na le
d t a i Ll.e u rs ,
À. savoir,
un discours
pseuclo-,'S'rammatica L
sur quelque
uri i t.r'
cle
l a
lanc:ue
('2.g.
J~AT
--7
---;.
EAT~N est
LIll
verbe
irr(:'{;ulicr
un
éJnu;lé1is • . . )
L8
grarnm8irc
ill(;t8or/ra"tionnGlle
a
une
acception
autre
cle
la
m(~talangl.ll~, une ;,cception plus subtile,
plus
o x a c t.emo n t .
:lenri
l\\c1amczc\\vs:-;:.i
(;rige
1.'2
c o n c ep t
de
métalétngue
e n
d
marc h e
é

7
scientirigue.
Slle
devient ainsj
op~ratoir0 dans
l ' an a Lyse
lin-
guistique
et,
peut-~tre, dans
La recherche
en g~néral. L'id(e
de base est que dans un ~nonc~, une phrase,
en un mot,
une
struc-
ture,
cel' t a i ne sun i b; s
l i n gu i s t i que s
do u b l e :..:n:...t=---~l:...e:...u l'
f 0 n c t ion cl e
simpLe
constituant d'une fonction méta-linguistique.
Les
unités
en question participent
en
tant qu'op~rRteurs ~
l'?laboration
des
structures,
c'est-à-dire,
du sens,
puis re~viennent, mais cet-
te fois,
en tant que m~ta-opérateurs. 8n regard de
leur fonction
structurante et de
leur fonction m~ta-linguistigue, ces ~l~ments
qui
sont des
"mots" de
la
langue,
consti tuent
la méta langue nat~..."
l'elle. Voilà comment i l est possible de
concevoir que
la
langue
"parle naturellement"
d'elle-même.
I l va sans dire que nous
som-
mes
loin,
tr~s loin de la fonction m4ta-linguistique décrite par
H.
Jakobson.
Dire que
"la
longue parle d'elle-même"
est une m0taphore
facile qui pêche par simplisme.
En effet,
c'est au
linguiste de
repf.rer par
l'observation,
les
(~léments de la mo t a La ng'u e naturel-
le.
L'observation,
en retour,
est guidée par
l'intuition que
la
th?orie de description lui aura insufflne.
I l n'est
peut-être pas inutile de nous arrêter un instant
sur
les prillcipes mais aussi
les
contraintes que
suppose une
tel-
le
perception du fonctionnement des
Langues.
Ce la n:,poncl f>ga Le-
ment
R la rro c o s s Lt.é
de p r o c i s e r-
les
contours du cl{:bat qui va sui-
Lorsqll 'on a
fait
l'hypoth~se que certaines unités du syst~-
me
effectuent
en grande partie d6jà le
travail m(ta-linguistique,
et q u t e njc e qui
nous
concerne,
l'on voit
les ph4nom~nes linguistiques

:'30115
l'P-SP1':'CC
de
mises
o n
rr:L.4.tiolls,
Cart
log.i.quprn~.ènt, l'on est
ter c~l'é;lutreSj
l'on
est
r1rnellé
::,
éviter
ou rneme
8.
proscrire,
vigou-
r-c u s orno nt
p ar foi s ,
une
c c r t a in e
terrninologie.
Parce que
c e Ll.e-e c i.
a u r-a
(;·U:-
jl.l,c;/:e
.i.ri s uf'f'ri s a n t e ,
p a r-a s a t.r- e
ou
totalement
.i n a d o q u at o ,
1., ' 0 n
(', v i t e r a ,
par exp. mp le,
cl e
clire
CL u ' un
nom
est
" cl é r i ni"
0 1.1
" i n-
cl(~Cini", d'attribuer "la d u r-o c d'une action" au s 0rnnntisrne d'un
verbe,
de
parler de
"l'c:'motivit(~" due Pt l'antéposition ou à
la
postposition d'un adjectif.
Pour
la
juste
raison que,
d'une
part,
" '1
~e
"l'action qui
dure" ,
"l'émotion"
ne
sont,
en rien,
des
notions
grammaticales;
d'autre
part,
parce q u ' i l
ne
f a i t
pas
grand
sens de
dire qu'une
relation
"est
cll~finie", parce que la
durée
n ' e s t
pas
la meilleure manière
de
caractériser une
relation
et
encore moins
"l'émotivité"
L'une
des
caractérisations
les
plus
fiables
d'une
relation -
et
meme
pas
seulement
dans
le domai-
ne
du
langage
-
c ' e s t
sa datation.
La
cohésion ne
s'y
rapporte
que
très
indirectement.
Mais
n'anticipons
pas.
La
mftalangue
naturelle
n ' e s t
pas
seulement
forme;
elle
est
aussi
une
certaine
clisposi tion à
l ' endroi t
des
cb o s o s
linguis-
tiques.
Guidé
par l ' i n t u i t i o n ,
l'on parviendra,
par exemple,
à
d(~gager la va leur centra le cl 'un opérateur d onrio
ou
du
mo i no ,
ce
que
l'on
croit
~tre tel.
Pour
ill.ustrer nos
propos,
prenons
le
C85
de lJl":-ING de
l'anglais.
Ponrl a n t
longtemps,
on
a
pensé
que
ce
morphème
se
s uf f Lx a Lt
8UX
"verbes
d'action"
pour exprimer
"une
a c t i.on en cours".
j\\lais
devant
des
l-~lloncf.s comme

- 9 -
She J::;
a 1"'~1ysKNOi';JNC
t h.l lJG.'3
she
is
not
s u p p o s e d
ta k n o w •••
(1 )
.i. L f a u t
concéder -
s8g(~ment - que notre intui tion de d o pa r-t; Tl ' était
pas
tout à
fait
juste.
Parfois,
l'on sera
tenté
de
poser
le pro-
bl~me de
l'acceptabilit? de
la structure analysée.
Mais
la produc-
tion d'un (noncf dans une
situation de
communication natllrelle
(et
non pas pendant un cours de
grammaire)
est
la preuve même de
son acceptabilité.
De
sorte que,
par
l'emploi de KNOW
(+ING) qui
n'est
pas un verbe d'action,
notre hypothèse
entre en conflit
avec
le fonctionnement
naturel
de
la
langue anglaise.
Par cet
foone?
la
langue
se sera chargée
elle-même de
sanctionner notre
hypothèse
comme èrronée.
Dans une
telle
situation,
l'on peût
êt~e
encore tenté
par une autre
~chappatoire. L'on peut effectivement
considérer que
si
l'énoncé
cité
est
accepté,
i l n'en reste pas
moins que KNOW connaît,
en l'occurrence,
un "emploi
exceptionnel".
Ce
serait,
en réalité,
une
fuite
en avant.
L'exception,
dans
la perspective ffiétaopérationnelle des
langues/doit
avoir un statut
sp~cifique. Le contre-exemple angois-
-
1
se
le
linguiste honnête;
l'exception procède,
soit de
la naîveté,
soit cIe
la complaisance.
La dernière
est
ext8rieure au fonction-
nement du
I a ng a g e ,
un peu
comme
l'ambiguït(;,
reconstruite de façon
ar ti Ti ci elle p o nd a n t
les moment s
fart s
cie
la grammaire
tra nsfor-
ma t Lo nrrc Lle ,
D'un point cle vue épistémologique,
l'exception est
compte de
tous
les
cas
ros~ibles. Com~nentb~nir c o mp t e de tous
(1)
r~'6nonc/ a ('té cité
dans
1-1.
i\\D:\\;\\jCZlc:\\\\,.s:<:I:
iJE+L\\JG dans
la e-rall1l11aire de
l'anr;lais
conternporEdn,
Thè s o d'état p'ub l dé o par Champion,
1976. Nous no-
terons llS+ING,
1~76.

lU
-
les
cas (l'empLoi?
i';n
basant
l'analysp
sur (Ips ~nonc(.s naturels
et
cela dans
le
strict
respect de
la m~talangue naturelle.
C'est
en 0 rie nt an t
l ' a Il a lys e ver s
cl e s
'~n 0 n c (, s
na t li rel s,
cl e s
6 non c 0 s
produits en clehors de
tout
harc~lement ~pilinguistique (clu lin-
gujste
sur
l'informateur)
que
l'on peut
esp~rer envisager le ma-
ximum d'emplois possibles,
y
compris
ceux qui, assez fâcheusement,
pourraient être
classés clans
"les exceptions".
I l faut clonc fai-
re
l'effort cle
renoncer à
cette pratique
très ancienne qui
con-
siste a
construire des
exemples
in vitro,
tout
au
long de
l'ana-
lyse,et selon
les besoins de
la cause.
Car,
au delà du
caractère
insipide des
exemples
fabriqués
(e.g.
Peter is a
boy),
i l y
a
un
inconv~nientplus sérieux: fabriquer soi-même des exemples (même
s' i l s sont authentifiés par un
~
10cutel:::~7f.J.a-t;-:if-)~qp~les confron-
,
l '
I!~ ...
\\
()~
...
ter avec
les hypotheses que
on a
sor0rul:T~ rJ1ocrmUjl~ls, cela ote
a
l
analyse
e
son 0
jec lVl
P
s c i e n t,Uf;(~)l~
"
d
b
t '
' t '
,
l·.;>l~ue ou, J>~'
grave encore,
c;:...
~,çQ;!
l '
h
d '
t
'
... t
t '
.
't"
<-.;,'-1;1,
entac
e
une
cer alne malhonne
e
P.'
ln '9..11ec-tue,Tle.
~-: li;nefT'.~~''''''''
~;r...--oÇ'~
En ce qui
nous
concerne,
nos
sources(l)
sont diverses.
Les
énonc~s anglais et français proviennellt pour la plupart de
jour-
naux ou de romans.
Les énonc6s
senoufo sont
extraits
en grande
partie de
transcriptjons que nous
faisons
depuis plus d'une dizai-
ne d'années,
et d'un r~cueil de
contes
senouLo,
recueil pour le-
quel nous a.v o n s
eu
l 'honneur cl' être
co-auteur,
en particulier
pour
le
"moi:
Nous n'hésitons
pas à
reprendre des ~non-
CRS
an al y s é s
en d'autres
circonstaGces par d'autres
linguistes
lorsque notre
corpus ne
comporte
pas
les énoncps
suffisamment
illustratif's
pour un certain point de
l'anaLyse.
-----------------
voir bibliographie
Pour les
sigles lItilis6s dans
le
Illot
;:1
rn0 t ,
voir
l ' a n ne x e ,

11
La
m(~ ta langue na ture Lle part de s
"uni tÉ' s
Cl i s c r
t.o s " qui
cu-
è
irru le n t
une
l'onction
structurale et
une
fonction m('ta-linguistique.
nans
la
pr8tique,
elLe
consiste
à
soutenir
L'analyse avec des
(~noncps procJui ts en dehors de toute contrainte é}Ji linguistique.
l'ostuler
l'existence d'une m~talangue naturelle,
c'est aussi
con-
fronter des
systèmes
Linguistiques
dif:fôrents par
le biais de
la
contrastivi té.
l"lais
i l
convient de b i o n
sou ligner que
la contras-
tivit~ selon la th60rie m6taop~rationnelle n'est pas
la
recherche
mal
intentionn~e d'exotisme.
~lle n'y est pas perçue comme une fina-
l i té
non plu s.
C'est une
forme cle
contras t i vi tf>
qui di ffère
sur
taus
les
points de vue
de
celle pratiqupe
jadis par certains
linguistes américains
(e.g.
Pit
Corder)
dans
la recherche des
erreurs.
La constrastivit~ n'est pas
l'accumulation inutile de
diff6rences et de ressemblances.
Dans
le
cadre prcicis de notre
travail,
~ quoi
cela servirait-il de dire,
par exemple, que
l'an-
glais et
le français
comportent
des articles
et des
adjectifs et
que
le
système
linguistique du senoufo n'en comporte pas?
Au-
trement dit,
que
le senoufo est diff~rent de
ces deux
langues in-
d o-c e u r-o pé e rme s , ' D'un point de vue de
linguistique générale,
n'est-
i l pas plus rentable de montrer comment une
langue,
dans
ses
ten-
tatives
structurales de
combler un déficit
catAgoriel,
se
"trahit"
en
laissant
justement des
traces structurales?
N'est-il pas
plus intnressant de voir comment
le
senoufo,
par son système ver-
bal très fleuri,
~claire la v?ritable nature des constructions
attributives
en anglais ?
;,1ais
la
contrastivi té
n'implique pas
nécessairement que
l'on ait
plus de deux systèmes
linguistiques
en pr~scnce. C'est

un
rai t
d e
nlc" ta langue
nature IIp que
d' u t I l i ser
le
fonctionnement
In~ tél o po ra ti onne l de l' arti c le (donc le vrai) pour s'as surer qu' on
a
bien compris
l'organisation du système verbal.
Ainsi
serons-nous
ame ne
à relever,
à
l'int0rieur de
l'anglais
et du
senoufo,
des
similitudes Inrtaopérationnelles,
des
similitudes
fonctionnelles,
si
l'on pr?fère,
entre le
système no~inal et
Le
système verbal
par m~ta-op~ratcurs interpos~s, s'entend.
Ce va et vient
constant
entre
les micro-systèmes
à
l'int6rieur est
r~cup~rable sur le
plan th~orique: i l r~pond à un souci d'auto-v~riÏication. Si
la
contrastivitf
interlingue
et
intralingue s'avère pertinente,
ce
sera,
d'une
part,
la confirmation que ·",dans
la
langue,
tout
se
tient "';
d'autre
part,
ce
sera
la preuve que notre modè le de des-
cription va
rp.solument
à
contre-courant
des
pratiques atomisan-
tes;
en d'autres
termes qu'il y
a
accord parfait
entre
le Sujet
(la grammaire m~taop6rationnelle) et l'Objet
(les
langues d6cri-
tes) .
Le
sens,
ou
l'~noncp. construit avons-nous dit,
i l ne
reste
de
la
relation que des
traces.
A quel
niveau
d'analyse doit-on
rechercher ces
traces?
Nous postulons q u ' i l n'y a
pas de domai-
ne
reserve
aux
traces de
relations;
elles
sont
rr'prrables partout
ou
le.
s en s
est
en
construction.
No u s
proposons de
les
"traquer"
dans des niveaux aussi
variés que
le niveau m o r-p h o Lo g i q u o
~-èt ce
;'-1
travers
le
Fonctionnement du marqueur nominal du
senou:fo;
clans
le
dornaine mor-ph o-e s y n t.a x i.q ue
i-l
'travers
les
ph(~nomènes de composi-
tions;
si~~l1o Lons, en
passant,
'lue
le
t r a i t
rJ'union se r~vèlera
un
i ndi ce
~!tre
!I)l~ ta- li rl,<::'ll .i s tique dont
l ' exi s t o n o a ,
en tant
qu'opérc:d:eur,
n'a pé'tS
encore
été
s o ulLgnéo
au même
t i t r e que
les

-
1 J
-
8utres morphèmps .'r,r8Tmnaticaux.
r'~nrin, dans
l(~ d omni n o strictement
s~mantique, nous reviendrons sur
La question
sfculaire de
"la
place de
l'adjectif".
Son statut d'~l~ment s6m pntique sera
d'abord
longuement dfcrit.
Cela nOlIS autorisera
alors
\\
proposer
une
solution rnétaop/rationnelle que nous
croyons plus
intelligi-
b Lo au problème que pose
la mob i. lit,~
cle
l'acl.jectiJ' Cl.UX côtés du
nom.
Petr
la même occasion,
nous
serons arnene
à
reconsidérer sans
aucune
complaisance,
les points de vue de G.
Guillaume
sur la
fonction de
l'adjectif,
point de vue d'ailleurs
repris -presqu'au
mot près
-
par
les n~o-psychom~caniciens du
langage.
Mais nous n'avons
toujours pas dit dans quelle mesure
la
th60rie m~taop~rationnelle pouvait favoriser
la formulation de
notre hypothèse de
travail,
à
savoir,
qu'à
la base de
la construc-
tion du sens
existe une
relation.
Si
la relation est
à
la base
de
la cr~ation du sens
et que
le
sens est
ce qui
est propre au
langage,
i l nous
semble aller de
soi que,
pour approcher le fonc-
tionnement du
langage,
l'on s'int?resse directement
aux conditions
de génération du sens,
donc El. la Ro l a t i o n , nais i l faudrait
en-
core ~tayer notre hypothèse,
c'est-à-dire,
montrer en quoi
la re-
lation est g~n~ratrice du sens.
sera alors
l'occasion de pr~-
senter les
symboles de notre
cadre théorique
et d'asseoir notre
système de formalisation.

C ri A P I T R E
P HE }1 r
E H
LA
lŒLATION
AU
COEUR.
DU SYSTi~~lE
"le mot RELATION est au
coeur
de toute grammaire humaine".
(Henri Adamczewski,
Grammaire
linguistigue de
l'anglais,
Armand Co lin,
1982,
p.
9

15 -
I l est devenu banal de dire que les unités
linguistiques
n'ont de valeur que par les relations qu'elles
entretiennent
entre elles.
N'est-il pas acquis que
la langue est un systè-
me
et nra-t-on pas
"qualifié de système tout
ensemble d'éléments
interconnectés,,(l)?
Le
sens qui est le propre de
la langue ne trouve existen-
ce que par la Relation.
I l ne suffit donc m~me plus de souligner
l'existence de
relations entre les unités linguistiques;
le
concept de
relation devrait,
autant que faire
se peut,
devenir
la pierre de touche des
théories d'analyse de la langue.
"
le mot RELATION est au
coeur de toute grammaire hu-
maine" ,
nous dit H. Adamczewski(2).
Pour saisir la portée d'une
telle réflexion,
i l faut nécessaireme~t dépasser l'acception
scolaire de GRAMMAIRE;
le terme ci0it ~tre pris dans son exten-
sion la plus large,
c'est-à-dire,
tous les modes de significa-
tion
. Dans ce sens,
"grammaire humaine" s'applique,
non seule-
ment aux productions verbales,
mais au système
langagier tout
entier,
partout où le sens ou la signifiance et m~me le compren-
dre sont en cause.
(1)
"i'lodèles mathématiques et systèmes
linéaires".
Cours d'éco-
nométrie,
Paris II,
1985.
(Polycopie)
(2) H. ADJ-'\\}lCZ8IvSKI
C.ra~m<,li:re
linguistique de
l' 9_r~~~~, Arm8nCl
Colin,
19~~::, p. 9. Nous noterons GLA,
1982

-
16 -
A)
LA RELATION ET LA GENr'=SE DU
SENS
1)
La co-ordination des ph~nom~nes ou leur compr~hension:
la création du sens
Sans être un outil th~orique au sens ou nous
le verrons
en ce qui
concerne les mod~les linguistiques,
la relation est,
dans
le cadre g~n~ral de la recherche,
le moyen d'accès à
la
connais sance.
"Les re la tions",
di tA. Korzybski,
"en tant que
facteur de toute structure,
donnent
le seul contenu de toute
connaissance humaine" (1) ..
Ce qui guide toute recherche,
ce sont
les r~ponses à
trou-
ver aux questions que
l'on se pose devant quelque ph~nomène.
La r~ponse aux questions ou aux angoisses que suscite le ph~no-
mène consid~r~ se ramène,
elle,
à l a compréhension de celui-ci.
En effet,
nous comprenons un fait
lorsque nous arrivons à
l'in-
terpr~ter, c'est-à-dire, à
lui trouver une signification ou
encore un sens.
On sait que
l'explication d'un fait,
un ph(.nom~ne
phy-
~~ ue
par exemple,
n'est,
au fond,
que son interpr~tation for-
~..Lq
,
cément subjective.
C'est d'ailleurs
cette attitude des hommes
de science
que d~crit si admirablement T. de Chardin:
"Parvenus à
l'extrême de
leurs analyses,
les physi-
ciens ne savent plus trop si la structure qu'ils
(1)
A. KORZYBSKI
Le rôle du
langage dans
les processus percep-
tifs,
New York,
The International Non-Aristotelian
Librairy
Publishing Company,
1966. Cité par C. Delmas
(lY85, p. 28)

17 -
atteignent est
l'essence de
la matière qu'ils étu-
dient,
ou bien le reflet de
leur propre pensée,,(I).
I l n'est
plus utile de s'attarder sur
le
caractère néces-
sairement subjectif des résultats auxquels débouche toute entre-
prise de recherche.
De
cette subjectivité,
on retiendra seule-
est
ment que
la structure de
la matière,
telle qu'elle ~résentée par
les physiciens,
est une
construction abstraite. A partir de cet-
te construction abstraite d'autres hypothèses
sont formulées
mais
le plus important à
ce moment de la recherche est qu'elle
fournit une réponse aux hypothèses antérieures
et permet surtout
la compréhension (provisoire)
de la réalité
étudiée.
Elle per-
met de répondre à
la question "pourquoi
la matière est-elle a
ainsi et non autrement" c'est-à-dire qu'elle permet de donner
un sens à
la manière d'être de
la matière étudiée •••
Revenons
sur le processus de recherche lui-même.
Pour ex-
pliquer un phénomène particulier l'homme de
science prend sur
lui d'établir des
liens entre d'autres faits
épars,que ceux-ci
soient dif'férents
en réa li té ou en apparence.
La
chute
des
corps
par exemple,
.'a pu être interprétée,
c'est-à-dire,
comprise
comme phénomène naturel quand on a
établi
le rapport
entre
la
masse des corps
et
l'attraction de
la terre
sur celle-ci.
De
proche en proche on en arrive à des
faits
plus complexes
et,
corrélativement,
les mises en relations
en vue de
les expli-
quer ou
leur donner du sens deviennent de plus en plus abstraites.
(1) T. de Chardin cité par J.
CHAHON:
L'être et
le verbe
(1ère
édition,
1965) Monaco:
~ditions du Rochet, 198), p. 7
Citation reprise par C.
Delmas
(1985,
p.
25)

18 -
G. Holton rapporte cette discussion de Salviati et Simplicio
sur
le mouvement d'un corps
chutant
du mât d'un bâteau en dé-
placement.
"L'un d'eux propose d'analyser le mouvement en deux
composantes
( . . . )
la première rendant
compte de
la
chute
libre
vers
le centre de
la terre et l'autre à vitesse constante du
déplacement
initial . . . " (1)
On retiendra seulement que ce qui a
guidé
les intuitions
du physicien et ce qui
est à
l'origine de
l'explication qu'il
avance,
c'est
l'unification d'autres
lois déjà établies. Pour
plus de détails sur le contenu des hypothèses nous renvoyons
nous
à
L'Imagination scientifique de G. Holton. Par contre,
nous ar-
rêterons
sur l'oeuvre même de G. Holton.
C'est une entreprise
de recherche sur la recherche.
Cela ne nous interdit pas,
à
notre tour,
d'analyser ses méthodes de recherches.
G. Holton r~fléchit en tant philosophe et pédagogue sur
les moments cruciaux de la recherche scientifique. I l se deman-
de ce que représente
"la réalité
instituée par la science".
Sa démarche vient étayer
les
hypothèses que nous avançons,
à
savoir que la
relation est à
la base du comprendr~. Selon
G. Bolton,
"quand un spécialiste d'histoire des
sciences
( ••• )
procède à
l'étude du produit d'un travail scientifique
( •.• ),
cette étude porte d'ordinaire,
pour l'essentiel sur un EVENE:-
J-lENT" (2).
Ce qui est encore plus remarquab le,
c'est
la manière
(1)
G. BOLTON:
L'imagination scientifique,
,
Gallimard,
Paris,
1981,
p. 25
(2)
G.
BOLTON
op.
cit. p. 21

19 -
dont G.
Ho Lt o n
interprète
cet JSVENE?·lENT.
I l
le
localise dans une
chronologie historique
"L'événement au moment
t
apparaît
( . . . )
comme l'inter-
section de deux trajectoires,
de deux
lignes d'univers,
l'une correspondant à
la
"science
publique"
(notons S~)
,-:.:
l'autre ;\\
la "science p r-Lv e "
(S1)" (1) .
é
"La science publique",explique-t-il,
est
le
contexte de
la décou-
verte,
l'état des
connaissances
scientifiques
communes du moment.
"La science privée"est,
elle,
l'instant de genèse,
"la part qui
relève du chercheur particulier".
L'événement
scientifique se
situe,
pour ainsi dire,
dans une
sorte d'interface:
le point
de
jonction entre le
contexte général des
connaissances et ce
qL1e Einstein appelait
encore
"le
combat
personnel".
Cette
loca-
lisation de
l'événement
scientifique correspond,
dans
le fond,
à
la portée,
à
la signification qui
peut
lui être accordée en
tant que fait
de civilisation.
Et
CE
qui
est à
souligner dans
la démarche de G.
Holton est qu'il explique
l'événement
scien-
tifique,
sa pertinence plus précis~ment, par la mise en rapport
de
"la science
publique"
et de
"la science privée"
chronologie historique
(2 )
publique
science privée
l':VENEMENT
instant de genèse
Contexte
(~) de
la découverte
-----------------.
( 1 )
G.
110 L'lü N
0 p •
ci t.
p. :2:3
(2 ) Nous empruntons cette formalisation ;\\ C. Delmas
(1985). Toute
mauvaise exploitation qui
en pourrait
être faite n'engage que

-
2U
-
La notion d'EVENEJ'.lI-::NT pvoqupe ici
par G.
Holton ne doit pas être
perdue de vue;
nous verrons
comment,
dans une
8pproche mfta-op~-
rationnelle du
langage,
la g~n~ration du sens peut ~trè aussi
perçue comme un ~v~nement ...
L'unification des phénomènes,
leur interrelation pour ain-
si dire,
s'avère dons être une démarche obligée en matière de
recherche et i l va sans dire qu'elle vaut aussi bien pour les
sciences sociales.
Il suffit de
jeter un regard attentif sur les
fondements
du structuralisme de
Lévy-Strauss.
Un fait
socio-cu 1-
turel
(e.g.cannibalisme,
liens matrilinéaires •.• ) n'est pas
jus-
tifiable en soi.
I l n'a pas de sens par lui-même,
c'est-à-dire
.
~~:~
ne peut pas être interprété et comprls~~~1~antti7~pologueexté-
l~-,(
"'\\ C;,\\
rieur à
la communauté
(primi t i v e ) é tUi':rîf ~ S\\ue s' :hl;:,est mis en
-
(~l~) ~J.
relation avec d'autres faits
sociaux.\\~'~n sait j'~~lleurs que
<;~«;.,~_.(/;-tj
le structuralisme de Lévy-Strauss.
s 'est'~d,irecteJJi?Q,-nt inspiré .d e s
,,,::çnemen\\';
~..,
présupposés
théoriques de
la linguistique où,
dès
la première
articulation,
les phonèmes n'ont de valeur que par les relations
qu'ils entretiennent entre eux.
Nous y
reviendrons d'ailleurs.
Voyons pour le moment
comment
Lévy-Strauss fait
le rapprochement
entre la linguistique et
l'anthropologie en tant qu'objets
"La signification des règles d'alliance insaisissables
quand on les étudie séparées ne peut
surgir qu'en
les
opposant les unes aux autres de la même façon que le
phonème ne réside pas dans
son individualité
Phonique,,(l)
~ous. Chaque ellips6idereprésente un espace abstrait; l'intersec-
tion des deux espaces est
l'interface
relationnelle.
(1) C. LEVY-STRAUSS, dans la préface de Six leçons sur le son et
le sens de R.
JAJ'\\OBSON,
!i;d.
;-"linuit,
1978,
p.
12

-
21
Lévy-Strauss déplore d'ailleurs
les méthodes de deux de ses dis-
ciples qui
"avaient
eu
le mérite de dépasser
le stade
['de
la
multitude écrasante des variations'~ mais qui n'avaient pas pu
s'affranchir de
la considération des formes
pour s'élever à
cel-
le des relations.
Ne pouvant
saisir par ce dernier biais
la rai-
son des ph~nom~nes, ils s'étaient condamn~s à
la t~che sans issue
de
chercher les
choses derri~re les choses,,(1).
On reconnaît
13 le concept d'I~~ARIANT peaufiné dans la
recherche
linguistique par
Ji.
Adamczewski. Léy-Strauss
le situe-
rait
certainement du cat~ de
la
Relation. Ce concept d'invariant,
toujours dans
la th~orie linguistique,
s'opposerait à
celui d'ef-
fets de sens q~e l'on assimile aisément,
ici,
dans
le contexte
anthropologique,
à
la recherche des
"choses derri~re les choses".
Dans
le domaine purement
linguistique,
la réalit~ d'une
unit~ aussi abstraite que le phon~me n'aurait pas pu être appré-
hend~e sans le recours au concept de relation. A l'aide de moyens
techniques puissants on peut déterminer le maximum de traits in-
h~rents à un phon~me donn~. Mais les traits dégagés ont besoin
d'être unifiés pour départager des phon~mes tr~s voisins et pour
lesquels
la différence ne tient qu'à seul t r a i t minime mais n~an-
moins pertinent.
A en croire Saussure,
c'est
cette approche
syn-
thétisante qui
a
rait
défaut
aux phonéticiens anglais malgr~
leurs
très minutieuses
analyses sur les
sons du
langage
"Tant de détails accumulés n'ont pas de valeur en
eux-mêmes;
la synth~se seule
importe" (:::»

(1) C. LEVY-STRAUSS
op.
cit.
pp.
7-8
(:2) Ji'. ne SAUSSU\\lE
Cours de
linguistique générale,
5~me pd.,
Payot,
Paris,
1962,
p.
77

-
22
-
Ainsi
la phon~tique structurale,
nous
le rappelions ~
l'instant,
base sa caract~risation intrins~que et extrins~que
du phon~me sur la notion de rapports oppositifs:
un phon~me 'x'
est
'x'
parce qu'il n'est pas
'y',
'z' ••.
La valeur du phon~me
en question est rendu intelligible
à
partir de
l'hypoth~se qu'il
appartient à un syst~me. La synthèse des différents traits cor-
respond à
la définition linguistique du phon~me; elle est aussi
sa détermination dans une approche
syst~mique: saisir la réali-
té qu'est
le phon~me c'est mettre en relation le phon~me en ques-
tion avec le reste du syst~me :
svst~me
phon~mes
phon~me
VAU;;UH DU
PHONEf.1E
l'tais le p ho n èm e
est aussi une réa l i té physigue,
en ce sens
que certains moyens articulatoires
(physiologiques) sont mis en
oeuvre pour qu'il
soit exécuté
comme
"bruit". A ce niveau encore,
la notion de rapport ne doit pas être
compl~tement écartée. Le
son n'est-il pas issu de
la conjugaison du mode d'articulation
et du point d'articulation?
A un niveau abstrait,
mode d'arti-
culation et point d'articulation représentent un interface et,
à dans
leur interface se situe
le phon~me :
mode d'articulation

-
2J -
Plus pr~s de nous,
la d(marche adopt~e par C. Delmas con-
firme
cette n~cessité de placer la Relation au coeur des m~tho-
des de recherche.
L'objectif de
C.
Delmas n'est
pas,~ proprement
parler,
identique au n5tre,~ savoir,
la d6tection des
traces de
relation~dans l'énoncé.
Sn évoquant
la notion de relation dans
l'introductiori de son
tout rlernier travail,
celle-ci intervient
davantage
comme outil de travail qu'objet-même de
la recherche.
C.
Delmas a,
dans un premier temps,
cherché à
isoler "quelques
éléments de
la m~talangue naturelle,,(1). Ensuite, dans une ap-
proche plus g~nérale, i l s'est proposé de sonder le degr~ de
métalinguisticité des structures syntaxiques(2).
Pour rendre
compte de cette ~étalinguisticit~ tout aussi naturelle,
pour
en démontrer la réalité,
C.
Delmas établit un rapport entre
deux domaines disjoints en apparence:
le processus dynamique de
structuration et
la chaine
linéaire
"Il nous incombe d'évaluer le degré de métalinguis-
ticité de
la structure
( . . . )
c'est-à-dire de montrer
comment et
combien la "langue" explicite,
par le tru-
chement du
linéaire,
cette activité,
somme toute
aus-
si bien
constructive que métalinguistique.
Soulignons
le
caract~re hautement relationnel du
ph~nomène: entre la structuration
et
le
linéaire,
une HELATl ON" ( J) .
(nous soulignons)
( 1)
C.
DEJj\\I;\\S
Quelques éléments de
la métalangue naturelle,
Thèse Jème
cyc le,
Paris III,
1980.
( :2) C. DEVIAS
Structuration abstraite et
chaine linéaire en
anglais
contemporain,
Thèse d'état,
Paris 111,
1985
Nous
noterons C.
Delmas,
1985)
(J)
(C.
Delmas,
1985,
p.
9)

-
2 L~
-
Autrement dit,
i l part de
L'hypothèse qu'une structure syntaxi-
que explicite très souvent
la manière dont
elle a
été construi-
te.Et pour expliquer cette racult~ naturelle de la langue,
pour
la rendre accessible ~ la compr4hension,
donc
lui donner un sens,
i l s'appuie sur l'interactjon de
l'acte de
structuration et
la
disposition des mots dans
le
lin~air~.
Que
l'6tablissement du rapport
entre
le processus
de
structuration et
la chaîne
linéaire soit un moyen de rendre
compte de
la métalinguisticité de
la
langue trouve confirmation
dans
le fonctionnement des adjectifs. Afin de permettre ~ un
adjectif d'exercer sa métalinguisticité,
l'énonciateur,
auteur
des agencements;syntaxiques doit
s'arranger ~ placer l'adjectif
--
en question devant
le nom dans le plan linéaire
(cf chapitre V).
c'est essentiellement par ce positionnement
"stratégique" sur
la chaîne qu'il est possible de faire une
lecture métalinguis-
tique du fonctionnement de l'adjectif.
Nous avons donc d'un c~-
té,
l'instance st~ucturante et de l'autre,
l'instance structu-
rée
(le syntaxique);
c'est-~-dire, un rapport très abstrait, il
est vrai,
entre le sujet structurant et
l'objet
structur~.
Bref,
la mise en relation de
la structuration et du linéai-
re donne
réalité
~ la m~talangue naturelle
------_.-----
STHUCTUHATION
LINEAIJŒ
------~---~
pertinence de
la métalangue naturelle

-
25 -
Ainsi
pour le
linguiste dont
l'objectif premier est de
saisir la m~talangue naturelle,
le rapport
structuration-lin~ai-
re est de
premi~re importance. D'une certaine mani~re, c'est
la relation de
l'~nonciateur a son ~nonc~ qui s'~rige en outil
th~orique, un outil
indispensable pour "comprendre
la m~talan-
gue naturelle".
Nous y
reviendrons.
2)
Structuration du sens dans
le domaine du
langage
Le concept de
relation
(ou plus
exactement
la mise en re-
lation)
a
surtout ~t~ pr~sent~ jusqu'ici comme l'un des princi-
paux moyens de
la recherche du savoir.
Le sens,
disions-nous,
n'existe pas en soi,
et à
la base
de toute
cr~ation du sens: une relation. Cela est encore plus
patent Sur le plan du
langage,
le
langage sous
ses aspects
les
plus g~n~raux. Nous prendrons pour exemple,
le syst~me des co-
des visuels. Dans
le domaine de
la signalisation routi~re, on
attribuera volontier au panneau
8 la valeur de "sens inter-
dit".
Le message qu'il est
susceptible de v~hiculer n'a pas,
en
réalit~, une interpr~tation imm~diate. A y
regarder de plus pr~s,
ce panneau n'est pas plus qu'un cercle a
fond
rouge barré d'un
t r a i t blanc.
"Sens interdit" apparaît
comme message,
seulement
apr~s l'association (?au niveau mental) entre le panneau en ques-
tian et
la situation que
constitue
la circulation routi~re.
Autrement dit,
le sens
surgit uniquement à partir du moment Olt
l'on
JJJet
en relation -
inconsciemment,
i l est vrai
le

-
~! 6 -
symbole E) et le contexte de la circulation. Eri resumé, avant
la mise en relation, 8 n'est qu'un objet d'une îonne et d'une
couleur quelconques. On imagine bien que dans l'atelier de con--
îection des
panneaux routiers,
le panneau(3 ne signifie pas
encore l'interdiction de passer!
aucune relation
avec quel-
que
contexte n'ayant été établie. Disons en un mot que le sens
s'obtient à partir d'une sorte de structuration.
L'analyse sémiologique de U.
Eco refuse d'ailleurs
le sta-
tut de
"signe" à
toute entité
physique figée
et isolée.
I l sou-
ligne à grands traits
la primauté de
la relation dans
la consti-
tution des signes et
signaux :
" ••. a
sign is not a
physica1 entity;
the physica1
entity being at most the context occurrence
of the
expressivE pertinent e1ement;
a
sign is not a
fixed
semiotic entity but rather the meeting ground for
independent elements
(coming from different
systems
of two different planes and meeting on the basis of
a
coding correlation),,(l).
(nous soulignons)
Au risque d'anticiper sur la suite,
on peut déjà avancer
que
"le lieu de rencontre",
l'interface relationnel entre
les
deux plans,
lieu de
création du
signe
(et du
senSi
par ext~nsion)
est
un
lieu de compromis.
Deux éléments mis en rapport en
vue d'un projet de sens perdent ou,
mieux,
mettent
entre paren-
thèses
leurs identités respectives.
Dans notre exemple de départ
( 1)
U.
SCO
A theory of semiotics, Incliana University Press,
Bloomington,
1979,
pp.
48-49

-
? 7 -
e
on peu t
con s i cltO r e r
Cl u e
l e s ym bol e
pla nt p a u n
coi n de
ru e
(c'est-à-dire mis en relation avec un contexte)
cesse d'~tre
un objet d'une
forme
et de
couleurs
particuli~res; le destina-
taire ne se
pr~occupe plus de
la mati~re dont
i l est
constitu~;
ses propri~tps d~finitoires (plastique, m~tal, bois ... ) sont mi-
ses en sommeil.
Seul
compte
le message,
r~sultat de son articu-
lat ion sur un contexte
(1)
~tape pr~-structurale
(2) ~tape post-structurale
La description saussurienne du signe
linguistique mérite
elle aussi qu'on s'y arr~te un instant. Saussure commence par
le pr?senter comme une
r~alit6 en rupture nette avec l'extra-
linguistique
"Ce signe
linguistique unit non une
chose et un son
filais
un
concept
et une image accoustiQUe,,(1).
Saussure souligne ensuite
l'intime union entre
les deux
compo-
santes de
ce signe
linguistique
( 1)
li'
DE
SAUSSULŒ
Cours de
linguistique gén~rale, 5~me éd.,
Payot,
Paris,
1962,
p.
98

- 2:--~ -
"
Le
signe
li.ngui
t
es t
clonc une
i
psychi-
s
L q u
o
u
n
que à deux laces
( ..• )
Ces deux
~16ll1cnts [S,.; et Sa]
sont intimement unis
et s'appellent l'un et
l'autre,,(l)
Autrement dit,
à
ce niveau abstrait de
la création psychique du
signe
linguistique,
i l existe déjà une
certaine lorme de
cohé-
sion ou m~me une forte cohésion entre la notion (concept ou Sé
selon Saussure)
et
la nomination de
la notion
(Sa ou forme
ac-
coustique).
Mais qui dit
cohésion dit
forcément
relation.
En
un mot,
plut5t que de dire que le signe
linguistique est
compo-
se de deux faces,
i l serait plus à
propos de
considérer que
le
signe
linguistique est un interface,
une relation
e-----=:~)
I l s'agit là de deux perceptions tr~s différentes du si-
gne linguistique et
la distinction que nous essayons d'introdui-
re n'est pas gratuite.
Le sens de
la fl~che (cf.
schéma~i-dessus)
indique que
la relation a
une orientation.
I l
semble difficile
d'imaginer un concept,
plus précisément une notion que
l'on ne
puisse pas nommer.
De façon presque
circulaire,
nous dirons que
la nomination d'une notion est une preuve de
son existence.
L'on nomme une not ion
parce qu' elle EST.
I l Y aurai t
donc des
raisons de supposer une
certaine succession entre
l'existence
de
la notion puis sa nornination.
Dans une
chronologie abstrai-
te
le Sé
serait premier par rapport au Sa.
Nous
sommes ainsi
(1)
F.
DE
SAUSSURE
op.
cit.
p.
99

-
;.2 ')
-
oblig~ de constater notre désaccord avec Saussure sur la descrip-
tion du signe
linguistique
"à deux faces"
et,
par 'Voie de
con-
s~quence sur sa repr~sentation sch~matique

7 7 7
[1----+1
Sa
La double orientation des fl~ches laisse clairement supposer
qu'aucun rapport de successivit~ n'est observable du S~ au Sa;
ce qui nous
semble aSSez impr~cis et,
dans une
c~rtaine mesure,
inexact.
que
le signe
linguistique soit
l'articulation de
deux es-
paces
celle du Sé
et du Sa -que la relation ainsi institu~e
donne r~alit~ au signe
linguistique est d'ailleurs
op~ratoire
d'un point de vue th~orique. La
r6alit~ que repr~sente le S~
ou
la notion transcende
(en principe)
tous
les
systèmes
linguis-
tiques.
I l est,
en quelque
sorte,
le
côt~ invariant du signe
linguistique;
le Sa quant
à
lui,
se
si~ue du côté
des effets
(phoniques).
C'est
le
rapport du S~ unique aux diff~rents Sa,
t.r-ai. t amo n t s
cl .i. vers
<:; f fCc) ct ué s
par les divers
systèmes
lin-
guistiques,
qui perme~ de maintenir la notion très
contrever-
sée de
l'arbitraire du signe
linguistiuqe
angl ais:l'lAN
français:
HOIvIME
senou:fo· ç:)
,
'V
baoulé
sra
'"
r NVAH.IANT - - - - - - - - - - - - - " ' » EJi'FE'fS
(formes)

Nous ne devons
pourtant
pas
perdre de vue
notre objectir,
~ savoir que la relation est g~n~ratrice de sens. Pour ~tre
plus
pr~cis, i l raudrait conclure qu'il ne se cr(e pas de sens
sans relation,
que
l'on ne
peut
pas
imaginer de
sens
sans
pr~-
supposer une
certaine mise en relation.
Nous souscrivons presque entièrement
aux thèses de M.
Houis
dans
sa définition
du
sens alors qu'il analysait
la
"cJptermina-
tion en syntagmes" d a.n s
quelques
langues africaines.
"La détermination est un processus
spmantique visant
~ constituer du sens par un ap ort de si nes ~ un sup-
port préa lab le"
(nous soulignons)
Mais nous
optons pour une acception large de
"sens".
1 l
rre'
s ' agit
pas pour nous d'un rapport de référence d'une
forme
linguisti-
que ~ quelque entité
situ~e dans
le monde réel;
i l s'agit,
de
façon générale,
de tout
ce que
l'esprit peut
saisir comme signi-
ficatif,
comme intelligible. De sorte que lorsque M.
Houis dé-
crit
le s~ntagme comme comportant nécessairement deux consti~
tuant
(voir chapitre II)
sa caractérisation nous
semble par
trop limitative.
Lorsque
l'analyse atteint un certain degré d'abstraction

l'on a dépassé
le
"sens" au sens primaire,
lorsque cette
analyse parvient a détecter un signe au niveau meme de
la pre-
mière articulation,
c'est qu'elle aura réussi
à
le caractériser
comme significative.
La forme
ou
le signe en question aura été
--------~----~---
( 1)
1·1. HOU J S
"Helations de détermination en syntagmes et
com-
posés nominaux" in Afrique et
Langage,
16,
1981,
p.
5

:;1
iso lé
comme
pertinent
et
i l
l ' e s t
,par rapport
à
d'autres;
i l
l'est
parce qu'on l'aura associé
à
d'autres.
Nous
en d~dui-
sons que
la pertinence d'une forme devient
effective parce que
celle-ci est articulée sur un système plus vaste qui
lui
sert
de
contexte.· La mise en relation de
cette SlCULEforme avec
le
contexte en question en fait,
en réalité,
un syntagme
.--------Sy NTAGJl.lE--------
,axe~
système
forme
syntagmatique~
pertinence ou
inte~ligibilité de
la forme
'x'
M.
Houis aura donc observé
rigoureusement
le principe structu-
raliste de Saussure,
principe selon
lequel
"le syntagme se
com-
pose
( .•. )
toujours de deux unités
constitutives".
Nous ne rejetons pas totalement
cette définition du syn-
tagme.
I l s'agissait pour nous de
faire
remarquer
qu'une telle
définition était opératoire pour en découdre avec
le distinctif
et surtout pour assoir une théorie
structuraliste du système
linguistique.
Sans
cette d6finition i l efit ~té impossible aux
anciens d'élaborer une syntaxe structurale et
Saussure
le dit
d'ailleurs très explicitement
"En dehors d'une
somme de
termes
concrets on ne 13&U-
rait raisonner sur un cas de syntaxe,,(l).
(1) F. DE SAUSSURE
Cours
de
'linguistique générale,
5ème éd.,
Pa.y o t ,
n~_~ ~
1
",i' r,
.
. ,
~ ~ -
_.- ~,
. . / '-' - ,
t--'.
1
1
1

'32
De nos
jours
la question de
savoir si
le syntagme doit
être forcément
constitué de deux éléments n'est plus
vrai-
ment un problème
"intéressant".
Ce qui ne
signifie pas que nous
ne nous
sentions
pas redevable
à nos prédecesseurs.
Pour s'être
intéressés très
tôt à
la notion de
syntagme,
i l s nous permettent
de parler aujourd'hui de
structuration.
Nous disions qu'une forme
devient pertinente,
significati-
ve,
en un mot,
est susceptible d'être interprétée parce qu'elle
est
mise en relation avec un certain contexte.
C'est en ce sens que
nous ne refuserions pas à
la forme
en question,
même seule,
le
statut de syntagme.
L'on sait,
par ailleu~s, que la réalité du
syntagme
intègre non seulement
les groupes de phonèmes,
mais
aussi
les phrases;
la phrase ne marque d'ailleurs pas
les
limi-
tes d~ l'extension du syntagme ••.
Dans un domaine différent de
celui du signe minimal,
(e.g.
le plan de l'énonci.ation),
c'est par le biais de
la relation
qu'il est possible de décider de
la signification pragmatique
d'un énoncé.
A l'impératif,
par exemple,
l'énoncé peut être ré-
duit
à la seule :forme verbale
(1) e. «-
Get out!
1 Go!
L'interprétation pragmatique,
précisons-le,
n'est p a s , à propre-
ment parler,
le
contenu sémique des notions verbales
(G~T OUT,
GO);
elle consiste en
l'interprétation de
l'~noncé en tant
qu'ordre adressé 8 quelqèle co-énonciateur.
Si
la forme GO!,
au
delà de son contenu sémique, "signifie un ordre"
c'est
sans

- JJ -
aucun doute,
parce qu'elle a
~t~ mise en relation avec le con-
texte d'énonciation.
L'état notionnel de GO est dépass~ dans
la mesure o~ l'énonciateur s'est emparé de
la notion pour satis-
faire
ses besoins discursifs.
Donc en fait,
ce qui produit
l'ef-
fet
pragmatique d'ordre
c'est
l'emploi(l)
de la notion ou,
plus
pr~cis~ment, l'articulation de la notion sur le contexte:
le
sens
jussif de nos énonc~s est d~clench~ par une mise en rela-
tionou,
si l'on pr~f~re, le sens jussifse situe dans un inter-
face
relationnel
9,.0
d '-0 -
GO
emploi
ordre
Si l a relation n'est pas formellemen"t
e xp r-Lrné e -
comme c'est sou-
vent le cas -
cela tient au fait qu'elle a
~t~ appr~hend~e à un
niveau o~ aucune forme de coh~sion n'est à
l'oeuvre entre ses
deux composantes,
à savoir
C
et GO.
Certaines formes
de
l'im-
p~ratif correspondent à des ~tats diff~rents de la relation
(2)
a)
Do be quiet
b) You,
do be quiet
(2)
Le premier ~nonc& (2a) marque un dépassement de
l'~tat de
la
~elation en (1). Le dernier énonc~ se situe a un niveau encore
(1) Nous y reviendrons au chapitre V avec la portée des adjectifs.
(2)
Emprunté à A. E 1,1 i'lAJ' \\ :
"Prémis ses mé thodo logiques pour une
approche
linguistique de l'impératif" in THEj\\IA 8,
Paris III,
1982,
pp,
108-109

-
J.'I- -
diffprent.
I l nous
conforte d'ailleurs dans notre position
dans
la mesure o~, non seulement la relation est formellement
exprim~e, mais qu'en outre,
le second terme de
la relation se
trouve aussi présent. YOD,
en ce sens,
est
l'image de
l'allocu-
taire,
présent dans
le
contexte d'énonciation(l):
([YOD
be~
ordre insistant
Le senoufo observe
les m~mes étapes relationnelles dans le trai-
tement de l'impératif:
())
a)
kari
pars/vas
go
/partir/
b ]
da
çé
vas-y donc
Do
leave!
/(préd)/partir/
c)
maa
çé
You,
do
leave
/toi+(préd)/partir/
You
leave
!
/kâri/ et /çé/ sont les deux variantes possibles de
la
A
meme for-
me verbale.
Nous verrons au chapitre Il
que
c'est
le statut de
la relation pr~dicative qui impose à
l'~nonciateur un choix bi-
naire entre /kari/ et /çé/.
Quant à /maa/,
i l est
la réalisation
phonétique de /m;/
(toi)
et de /da/(l).
Nous retrouvons donc
la
.,
m~me situation que dans l'impératif anglais:
(1)
voir aussi
(C. Delmas,
1985,
p.
148)
(2)
I l est intéressant de noter que dans
le tableau des morphè-

cz -x ~
- 35 -
a)
b)
C
~ 2:>
c)
q-~ ~
maa
L'examen des énonces à
l'impératif nous a
entraîné dans
une digression qui peut être une anticipation sur la suite. Rap-
pelons pour conclure que ce qui permet
la
lecture
"impératif"
d'un énoncé,c'est
la relation qu'on établit entre
la production
verbale et
le contexte. Autrement dit,
comprendre un pnoncp
com-
me étant au mode impératif,
interrogatif,
affirmatif . . .
c'est
établir une
"connexion" ,entre deux espaces;
c'est considprer
Il
un énoncé
comme GO !
comme une structure complexe,
un syntag-
1
r
me pour ainsi dire.
La mise en relation est bien à
la base de
1
la compréhension (des ênoncps).
Nous souscrivons
1
enti~rement
aux th~ses de L. Tesni~re pour qui
II
.comprendre une phrase,
c'est
sàisi~~l'ensemble
des connexions qui unissent
les différents mots;' (1)
Cette définition du comprendre ou,
en d'autres
termes de
l'ap-
préhension du sens~2) s'inscrit bien dans une théorie structu-
rale où le concept de relation occupe une place plûtôt àpprpcia-
ble. Elle nous sert aussi de transition entre
la Relation en
tant qu'outil de recherche et la Relation telle qu'elle est
envisagp.e par certains mod~les linguistiques dans
la construc-
tion des énoncés.
mes verbaux,
les Baptistes américains décrivent 7/da/ comme
'em-
phatic'. Par cet effet de sens,
on peut faire un rapprochement
avec DO de
l'anglais. Grammaire Lessons
ebara-En~lish, Missions
Baptistes de Korhogo,
Côte-d'Ivoire
t
1974,
Part l ,
p.
12
(~)L. TESNIERE : Eléments de syntaxe structurale, Librairie
.. -
.".
-
Klincksieck,
1959,
p.
1?

-
)6 -
B)
LA RELATION DANS QUELQUES MODELES LINGUISTIQUES
Partons toujours du postulat que la notion de RELATION
est au coeur de toute
"grammaire humaine".
Jusqu'ici,
"grammai-
re humaine" a été envisagé
comme
tout processus d'organisation
de
la signifiance.
L'unification de
phénomènes épars
(en phy-
sique,
anthropologie,
phonologie etc.)
dans
le seul but de
les
rendre intelligibles revient,
en dernier ressort,
à
les struc-
turer en une sorte d'architecture abstraite.
Ainsi
les
lois éta-
blies par les sciences dites
"exactes" sont le reflet d'archi-
tecture abstraites et
l'ensemble de ces lois peut facilement
être assimilé à une forme de
"grammaire de
la nature" •••
La grammaire humaine est,
à
son tour,
assimilable à
l'ar-
chitecture des
langues naturelles,
c'est-à-dire,
l'ensemble des
lois que l'on observe lors de
la construction des énoncés. Il
s'agit,
on l'on ci.ura compris,
de
la grammaire interne(l).
L'on sait que
la grammaire externe,
construction artifi-
cielle du linguiste-chercheur,
est une simulation plus ou r~us-
sie de
la grammaire naturelle;
c'est cette dernière qui sert de
grammaire modèle. Pour que
la simulation soit
la plus conforme
possible,
le
linguiste doit nécessairement inscrire dans sa
construction analogique -
la grammaire externe -
ce qu'il y
a
d'essentiel à
toute grammaire:
la Relation.
C'est
là,
semble-
t - i l ,
un passage obligé.
La retombée épistémologique en est que
tout modèle qui n' amé na g e r-a pas assez de place à
la r e La t io n
( 1) voir H.
AW\\j"ICZElv'SKI
"Montage d'une grammaire seconde" in
Textes du CREL[NGUA,
UER
des Pays anglophones Paris III,
1982-8J, pp.
JI-50

-
'37 -
sera ainsi
condamn6,
d'une certaine façon,
à
"chercher les
choses derrière
les choses"; une autre manière de dire que
le
pouvoir explicatif d'un modèle
linguistique est strictement
li&
à
la façon dont le concept de relation y
est appréhendé.
1)
La relation-dans les grammaires structurale et
transformationnelle
En prenant pour référence
la Relation,
nous n'avons pas
trouvé de raisons sérieuses de séparer,
dans notre travail,
la
1
~
grammaire structurale de
la grammaire transformationnelle.
De
1
1
la "boîte de Bockett" aux
'arbres de Chomsky,. l'innovation aura
f
été,
on le sait,
une formalisation plus technique des phrases à
1
analyser' mais pas forcément une formalisation plus explicative,
loin s'en flâut.
Comme
les structuralistes,
les transformation-
nistes s'arrangent à
soumettre à
leurs indicateurs syntagmati-
ques
des phrases~ui ne s'écartent pas trop du schéma syntaxi-
que
classique. Et i l suffit que celle-ci présente un certain
degr~ de complexité, disons une certaine expansion,pour que sa
représentation par "arbrp'" pose un banal problème d'espace .•.
On comprend d'ailleurs que dans
les manuels de grammaire trans-
ïormationnelle,l'on sélectionne les phrases
les plus simples
(e.g.
He will be
coming tomorrow)
quand on ne les fabrique pas
(The cat eats the mouse).
C'est
là un moyen à
peu près sûr de ne
jamais atteindre
la métalangue naturelle ..•

Revenons
tout de m~me au probl~me de
la relation dans
les
deux théories
soeurS.
Dans un cas
comme dans
l'autre on proc~-
de à des scissions binaires et emboîtées
(presqu'en abîme)
des
structures à
analyser. B.
Pottier résume bien les méthodes struc-
turalistes
et partant,
transformationnistes
"On sait en quoi
elle (l'analyse par les
constituants
immédiats]consiste
:
diviser chaque forme
complexe
en deux éléments
seulement,
en répétant
l'opération
autant de fois qu'il sera nécessaire pour aboutir
aux éléments irréductibles,,(l).
De sorte que pour des énoncés
comme
(4;) eT'h e train leaves at fi ve thirty
(51 l am leaving tomorrow
(6) ••• Perhaps she didgo back to France ..•
(emprunté
à GLA,
1982)
on distin.guerait d'un côté
le SN et de
l'autre
le SV qui,
à
leur tOUl",
sont
sous-divisés ••. Aucune allusion n'est faite à
la relation en tant que
concept d'analyse. Sans doute
considé~
rait-on comme/allant de
soi que dans
la "boite de Bockett"
les
constituants immédiats sont reliés
par couples:
S N
/
S V
1
Il Det
/ w
/
W
/
1
SN
I l s'agit,
on le voit,
d'une lorme plutôt appauvrie de
la rela-
tion représentée ici par les barres obliques.
Avec une
telle
(1) B.
POTrIER:
Systématique des éléments de relation,
Klincksieck
Paris,
196~', p. 62

-
J9 -
représentation les
énoncés
(4 à 6) ne diff~rent que par le nom-
bre de
leurs emboitements
respectifs.
~lle tend à les pr~senter
comme structurellement identiques;
bref,
les
syntagmes restent
muets quant au statut des relations
entre
les
constituants.
L'indicateur syntagmatique de Chomsky ne prévoit pas,
lui
non plus,
de place pour DID en
(6). DO dont on a rappelé en (2)
qu'il était une trace non négligeable de relation, .est gardé
en
instance;
i l sera ensui te
"parachuté"
au moment vou lu au cours
des
exercices de dérivations. Toujours à
propos de
(5)
l'on dé-
vine bien que
lors de
la collecte des énoncés,
les transforma-
tionnistes n'auraient
certainement pas recensé PERHAPS comme
élément indissociable de
l'énoncé.
Non pas parce qu'il
poserait
un probl~me à
la formalisation par arbre,
mais parce
PERHAPS
pose,
d'une certaine mani~re, le probl~me de
la présence de DO
et qu'il soul~ve également des questions que les transformation-
nistes étaient alors
loin de se poser. Tout au plus,on se conten-
terait de constate-r que
les adverbes de même statut que PERHAPS
ont une relative facilité
de mouvement
(antéposition ou extra-
position par rapport à
l'ensemble de la phrase).
La mobilité
de l'adverbe serait intuitivement sentie comme ayant quelque
rapport avec son "scope" sur l'énoncé. Ma s
pour "port er" E1':1r
î
toute
la structure prédicative,
le moyen le plus efficace pour
PERHAPS en (5)
n'est-il pas de porter sur ce qu'il y
a d'essen-
tiel dans une structure,
à
savoir la relation
(1) ?
PEHHAPS
E
-_·~_DI
Fra~
go back to
(i) Pour une étude détaillée, voir GLA,
1982,
pp.
87-88

-
40 -
Notre objectif n'6tait pas d'analyser tous
ces ~nonc6s.
Nous nous
contenterons de
renvoyer aux travaux de H.
Adamczewski.
I l s'agissait simplement de montrer que,
sans unp
juste appr~-
ciation du concept de relation,
du
ètructuralisme au transfor-
mationnisme on ne pouvait proposer qu'une de8cription très
sim-
pliste des ~noncés, une description consistant à ramener tout
à des syntagmes plus ou moins complexes.
Par ailleurs,
nous re-
viendrons très souvent,
et sans craindre de nous
rep~ter, sur
les énoncés en DO.
Parce que cet op~rateur relationnel dont
l'anglais s'est doté pose des problèmes redoutables ou
A
meme in-
solubles aux modèles qui n'ont pas
su voir la primaut~ de
la
relation dans
la construction des ~nonc~s; et notre objectif
du moment est
justement de montrer que
l'on ne peut pas faire
sans une acception forte de
cette notion.
2)La relation dans
la syntaxe structurale de
L.
Tesnière
Du
structuralisme et dutransformationnalisme à
la synta-
xe structurale de L. Tesnière i l n'y a
pas qu'un pas.
Ne serait-
ce que
la manière dont
la Uelation est
envisagée de part et d'au-
tre.
C'est,
dans
le fond,
la pl~ce accordée à
celle-ci qui fait
la diffprence substantielle
entre
les diff~rents modèles.
Nous avons relevé
chez
les premiers
l'absence notoire de
la notion de relation;
elle se réduit à un rapport de
juxtappo-
sition entre
les
constituants immédiats,
ce rapport de
consécu-
tion que
le non linguiste peut
constater entre
les él~ments

constjtutil's de
la phrase;
on parlait alors de
"concaténation"
sans doute par besoin d'ésotérisme . . .
Mais
lorsque L. Tesnière écrit que
"une phrase du type
"Alfred parle"
n'est pas composée de deux éléments
1° Alfred,
parle,
mais bien de trois éléments,
1° Alfred,
2° parle et
( 1 )
la connexion qui
les unit"
(nous sou lignons),
on' èst bien
obligé d'admettre que la notion de relation prend une certaine
signication.
Par ailleurs,
lorsqu'il ajoute qu'après
la struc-
turation de deux mots ceux-ci cessent d'exister comme à
leur
état initial,
c'est-à-dire qu'ils perdent
leur autonomie(2),
i l souligne par là le caractère dynamique de
la
(mise en)
rela-
tion;
la relatiàn "naît" avec
la construction du
sens~J). Mais
L. Tesnière ne parle pas vraiment de relation ,mais de connexion
et nous nous garderons bien d'assimiler strictement
les deux no-
tions.
"Les connexions structurales établissent entre les
mots des rapports de dépenda~ce. Chaque connexion
met
en principe un terme inférieur à
un terme supé-
rieur"
(L. Tesnière,
1959,
p.
62)
L'idée de dépendance évoque celle de hiérar~hie et l'une et
l'autre sont indissociables de la notion de ~elatioD' Mais lors-
que nous parlerons de hiérarchie ce sera à
propos des étapes
(1) L. TESNIERE :
Elements de syntaxe structura le,
Librairie
Klincsieck,
Paris
1959,
pp.
11-12
(2) La perte d'identité ou d'autonomie consécutive à
la mise en
relation a déjà été évoquée à
propos de
l'exemple du panneau de
la signalisation routière.
(J)
La relation se dessine parfois dès
le niveau lexical.
C'est
ce que montre,
en tous cas,
le fonctionnement des termes de pa-
renté
en senoufo.
On d i r a :
mi t6 = mon père;
mi
n1
ma mère
'V

relationnelles;
i l semble y
avoir une diff?rence entre,
d'une
part,la hi~rarchie entre les constituants de
l'énonc?
et,
de
l'autre,
la hi~rarchie entre les mises en relat~on.elles-m~mes.
La connexion est une forme
très particulière de relation.
L. Tesnière double
la connexion d'une variante de
la relation,
le noeud structural.
Et
"de même que les connexions,_ les noeuds
peuvent se superposer.
I l existe ainsi une hi~rarchie deènoeuds
comme i l existe une hiérarchie des
connexions" (1).
flans
les
stem-
mas,
les noeuds structuraux de L. Tesnière font
penser aux indi-
cateurs syntagmatiques de Chomsky avec
la diff~rence que chez
ce dernier les embranchements
sont
toujours binaires.
Enfin,
on se demande pourquoi
L. T~snière ne
justifie pas clairement
la distinction entre connexions
et noeuds structuraux. En tout
état de cause,
ces deux types de rapports structuraux laissent
entrevoir -
et de façon fâcheuse -un certain ~clatement de la
relation,
la partie essentielle des structures.
mi
c?n?
= mon/ma petit(e) frère/soeur ..• Nous sommes déjà au
niveau structural, c'est-à-dire,
dans un plan où
la relation est
formellemnt
exprimée par les déterminants
(possessifs).
j'-lais
lorsque
l'on prend ces substantifs à
.I "é t a t
de rio>-
tion (lorsqu'ils appartiennent encore au domaine
lexical)

aucune relation n'est
construite,
i l faut n~cessairement leur
adjoindre le morphème /fJl~/ qui,
tout seul,
est traduit
sou-
vent par "possesseur",
"maître",
"propriétaire" .•• :
e.e. /to.f"Jl:)/
=
'père';
/n::>.f"Jlù/
'mère';
cJnJ.f"JI::'/
'petit(e)
frère/soeur.
/ f ) l ) / occupe,
en l'occurrence,
la place
des marqueurs nominaux
(indice d'actualisation d'une base
lexi-
cale en constituant nominal,
cf.
chapitre suivant).
Ce qui est
remarquable c'est que ce méta-opérateur: signifie déjà
la rela-
tion dès
le niveau lexico-notionnel.
A noter aussi que pour des
raisons
socio-idéologiques,
on n'est pas obligé d'adjointre /f)1)/
à
la forme notionnelle
de
"épouse":
/ cele')/
vs /mi
ce .wi/
= mon épouse/.
A en croi-
re D.
Creissels
(Les
constructions dites
"possessives",
Paris III,
1979)
ce phénomène ne concerne pas seulement
le senoufo.
(1) L. TESNI ER E : op . ci t. p. 1 5

-
l~ J -
J) Relations sémantigues ou casuelles
Ce qui
fait aussi
la différence entre
le structuralisme
(type Hockett,
Harris)
et
la syntaxe structurale de L. Tesnière
c'est le type de relation qui est supposé exister entre
les ver-
bes et les
constituants nominaux dans
la phrase.
Le transforma-
tionnisme chomskien d'avant
la 2ème formulation
(Standard Theo-
ry)
marque lui aussi un recul par rapport à la théorie structu-
rale de L. Tesnière toujours dans
leurs approches respectives
de la relation comme concept
linguistique.
I l a
fallu que
la
T.G.
soi t
taxée de
"oo n t e x t-e f'r-e e " grammar" pour que Chomsky ne
renégocie un retour adroit vers
les grammaires casuelles tradi-
tionnelles;cela s'est traduit par l'insertion des règles de sous-
catégorisation •••
L'un des retours
(aux sources)
les plus réussis aura cer-
tainement été
la grammaire casuelle de C. J.
Fillmore~ La phrase
n'est plus sectionnée froidement
en syntagmes muets.
Comme i l
faut maintenant
tenir compte des propriétés sémantiques et du
verbe et des
constituants nominaux,
le statut épistémologique
de
la relation
change radicalement.
La relation n'est plus sen-
tie comme un banal rapport de concaténation;
elle acquiert un
certain dynamisme par le revêtement sémantique:
"These relations which are provided for categorially
include such concepts as Agent
Instrumentive,
Ob-
jective,
Factitive,
Locative,
Denefactive and perhaps
severals others,,(l).
(1)
C.J. FI LUvIORE: :"The case for case" in Universals in Linguis-
tic l.heories,
Ohio State University,
1968,p.
32

- 44 -
On peut resumer l'analyse de C~J. Fillmore en disant que
ses relations lui permettent d'affecter les
constituants nomi-
naux à des fonctions
sémantiques et
ce,
en rapport avec
les
traits sémantiques du noyau verbal.
Son analyse est
certainement
légitime lorsqu'elle est appliquée à une langue comme
l'anglais
ou
le français.
Elle deviendrait plus diffilement
justifiable
si elle était appliquée à une langue qui màrque les cas
(a.g.
le latin).
Le reproche adressé
à
Chom~ky pourrait donc aussi
être formulé
à
l'encontre de C.J.
Fillmore:
Chomsky a
repris
sur ses arbres
les analyses des grammairiens de Port-Royal;
C.
J.
FjJlmore a
formalisé
les études ayant porté sur les
langues
casuelles.
Peut-être que
la "Case Grammar" représente-t-elle
quelque intérêt pour ceux des linguistes qui n'ont pas eu con-
naissance des langues à désinences casuelles ..•
L'analyse casuelle appliquée à une
langue comme
l'anglais
(contemporain)
n'est pas sans susciter quelques inquiétudes.
D'un point de vue pédagogique,
on doit effectivement s'attendre
à ce que l'étudiant,
placé devant une phrase,
hésite
longuement
quant à décider si tel constituant nominal assume,
par exemple,
la fonction
locative ou dative ou plutôt
bénéfactive.
Pour revenir au problème de
la relation,
une question
reste posée:
dans une phrase donnée,
a-t-on affaire à une multi-
tude de relations et dans
ce cas que fait-on du rapport classi-
que Sujet-Prédicat ?
L'étude de C.J.
Fillmore est strictement sémantique;
l'analyse du sens a pris
le dessus
sur l'analyse des conditions

-
ilS
-
d'organisation du sens.
En clair,
C.J.
Fillmore appr?hende
les
ph~nom~nes quand l'essentiel s'est d~jà d6roul~; pour reprendre
C.
Delmas,
C.J.
Fillmore arrive
en retard puisqu'il attend que
la phrase soit
construite avant de distribuer
les fonctions
sémantiques aux constituants nominaux.
Nous avons bien dit
"cons-
tituants nominaux" donc une réalité grammaticale.
Comment une
rpalité grammaticale peut-elle devenir agent,
bén~ficiaire... ?
Man i f o a t ern e n v ,
C. J.
Fi Ilmore amalgame deux niveaux re lati vement
différents, l'extra linguistique et
le
linguistique., Ainsi
"Age n t "
est
"the case of typically animate perceived instigator of the
the action .•. ,,(l). Ailleurs,
i l est question de
"animate subjet"
et pourtant i l semble s'agir du sujet grammatical et non du su-
(2\\
jet en 'phi losophie ou en psycho logie
. A propo s
de
"l' animi s-
me" du sujet,
C.
Delmas ~crivait tout récemment
"
tout
comme
le mot
CHIEN ne mord pas,
le sujet
n'agit pas,
un sujet ne saurait tuer,
courir
( ••• ),,())
Disons brièvement que C. J.
Fillmore ne pouvait pas distinguer le
plan linguistique du plan extra-linguistique(l+)parce que,
tout
simplement,
son analyse part du sens résultant -
donc des
effets
-
et reste au niveau des effets.
Et à
l'image des multiples effets
de sens,
i l d~gage de multiples fonctions
sémantiques,
de sorte
que dans
la phrase,
l'on assiste à une ramification de
relations
à
partir du verbe
( 1)
C. J.
FILLMORE :
0 p.
ci t .,
p.
25
(2)
voir A.
ELHIAi"1
Le statut du sujet en
linguistigue. Th~se
Jème
cycle,
Paris III,
1981
(
(4) Nous verrons qu'une approche méta-opérationnelle de la relation
permet de
contrôler,
et avec une certaine précision,
les
interféren-
ces possibles entre
les deux plans opposés.

"In the basic structure of sentences,
then we
find
what might be called
"proposition",
a
tenseless set
of relationships"
( . . . )
separated From
what might be
called the modality constitu~nt,,(l)
(nous
soulignons)
I l convient de tirer les
conséquences théoriques de
l'analyse
casuelle. Elle constitue bien un dépassement du transformation-
nisme
(du moins à
ses début). }Jais
l'on se rend bien compte que
C.
J. Filmore trouve difficilement sa voie dans le flou séman-
tique;
à preuv.e,
l'impossibilité à peine voilée d'énumérer tou-
tes ses fonctions
sémantiques
("Agent",
"Instrumentive",
"Objec-
tive"
( •.. )
and perhaps others". Nais
le mérite que
l'on ne
peut pas ne pas reconnaître à
C. J.
Fillmore est d'avoir séparé
de
la proposition l'instance modalisatrice.encore que celle-ci
soit écartée en l'occurrence pour des raisons de commodité de
l'analyse.
C'est
justement
ce
"modality constituant" qui
avait d'abord manqué à Chomsky,cè qui avait ~lors nécessité'
qu'il retourne retoucher pour la troisième fois
sa théorie trans--
formationnelle.
La théorie actantielle de
L. Tesnière a beaucoup en com-
mun avec
la grammaire casuelle de C.
J. Fimore. Parce que,
d'une
part,
les
constituants nominaux sont décrits
en termes d'agent,
d'agi . . .
et d'autre part parce que
la relation dont
i l est fait
cas est une relation de type sémantique ayant pour expression
formelle
le verbe.
En tous cas,
c'est ce que
laisse
supposer
C.
J.
FJ1!.D10RE
"The case for case" in Universals in linguis-
tic l:heories,
Ohio State University,
1968,
p.
:? J

· ,
L. Tesnière
lorsqu'il écrit
"On peut comparer le verbe à une sorte d'atome cro-
chu susceptible d'exercer son attraction sur un nom-
bre 61evé d'actants selon qu'il comporte un nombre
élevé de
crochets pour les maintenir sous sa dépen-
dance"( 1) .
On peut aussi bien entendre que
le verbe,
parce qu'il maintient
les actants sous sa dépendance,
domine la structure.
Seulement
le verbe exprime aussi
la relation et
l'on imagine mal unerela-
tion dominant les termes qu'.elle doi t
justement re lier. Une struc-
ture EST parce qu'il Y A relation;
la relation est,
pour ainsi
dire,
l'âme de la structure. Dans ces conditions i l est très
difficile que
la relation soit décalée par rapport à
la phrase,
c'est~à-dire, soit en deçà d'elle.
La notion d'actants est
tributaire de
la notion de tran-
sitivité et
la transitivité est,
à
son tour,
un effet sémanti-
que construit~ L. Tesnière devait tout naturellemebt déboucher
sur le fait que l'on dévine déjà,
à
savoir que
la relation,
dans
les constructions transitives,
est une action:
"Les verbes à actants
sont ,
dans
la grammaire tradi-
tionnelle/connus
sous le nom de verbes
transitifs
parce que dans une phrase comme
"Alfred frappe Bernard"
l'action passe ou transite d'Alfred à Dernard ll (2 ) .
(nous soulignons)
(1) L. TESNIEH.E
J~léments de syntaxe structura le,
Librairie
Klincksierik,
Paris
1959,
p.
238
(2)
Le TESNIIl.:RE
op.
cit. p. 2f~2

-
liS
-
La relation est ainsi réduite à
l'état d'action,
c'est-i't-dire,
d'effet.
Plus précisément,
c'est une relation de
type vérita-
blement extra-linguistique;
en effet,
on pourrait gloser en
disant qu~Alfred et Bernard sont en rapport de bataille!
Nous
faisons
cette interprétation extrême pour montrer à quelles
curiosités on peut aboutir lorsqu'on ne prend pas soin de bien
séparer l'extra~linguistique de
linguistique;
et cette inter-
prétation est possible si
l'on continue de croire que
les for-
mes ALFRED et BERNARD,
déjà des objets linguistiques parce struc-
turées,
sont strictement équivalentes aux personnes ainsi nom-
mées(1)
Mais
contrairement à
C.
J.
Fillmore,
L.
Tesni~re tient
compte des
cas de retournement de
la relation:
les diath~ses
actives et passives.
"
La diath~se passive est donc
l'inverse de
la
diath~se active c'est-à-dire le transit y est con-
çu en sens inverse,
puisque
le premier actant dont
i l émane dans
la diath~se active,
en est au contrai-
re l'aboutissement dans
la diath~se passive,,(2).
L'inversion du
"transit" est certainement
l'un des points in-
téressants de
l'analyse de L. Tesni~re. L'inversion de la re-
lat ion sémantique implique une re-orientation de celle-ci.
Seu-
lement
le tout est de savoir si
c'est strictement
la même rela-
tion qui est purement et simplement
retournée ou s ' i l s'agit
(1) voir C.
AUGUSTIIN:
"La transitivité est-elle un concept
opératoire~en linguistique anglaise ?
Essai de définition",
Colloque
S.A.E.S.
Caen, }tai
1985.
(2)
L. TESNIERE:
Eléments de syntaxe structurale,
Librairie
Klincksieck,
Paris,
1959,
p. 243

-
L~9 -
de
l'image de
la relationnelle originelle.
C'est
là une ques.
tion à
laquelle
L.
Tesni~re ne doit pas pouvoir r?pondre ~tant
donn~ qu'il fabrique
lui-m~me des phrases pour ~tayer ses hy-
poth~ses. Voyons cet ~nonc6 de GLA (p. 1~1)
(7)
Thomas
felt under the seat. The gun was s t i l l there.
The
car hadn1t been searched.
Ce n'est par pure caprice que
le passif apparaît
(partie souli-
gnée);
ce n'est pas non plus par hasard que
l'on a
"sauté"
l'éta-
pe de
la d i.a t h è s e active et que
l'on a
omis ,'dans
la d i.a t h
s e
è
passive,
le prime actant de
la relation de départ . (theyjthe po-
lice
haven't searched the
car)
pour faire
figurer
l'objet en
premier.
I l faut donc dépasser
le cadre des
phrases qu'analyse
L. Tesni~re pour celui des énoncés. Ce qui signifie qu'il fail-
le tenir compte de ce qui préc~de la phrase soulign~e. On se
rend alors compte que,
pour des
raisons de
cohésion discursives,
la phrase soulignée a
due
~tre commenc~e par THE CAR dont la
notion a
déjà été
suggérée dans
le contexte antérieur immédiat
et
ce à
travers
la notion SEAT et THEfŒ' (the
seats of the
car)
Bref,
L. Tesni~re parle d'inversion,
ce qui
ne peut pas
~tre
nié;
mais
comment
justifier théoriquement que
la diath~se ~cti­
ve préc~de la diath~se passive dans
l'articulation du discours?
Tl faut
une approche moins
chosiste
du
concept
de relation
pour qu'un début de réponse puisse ~tre trouvé à
cette question
tout de m~me pertinente.

su -
En résumé,
les
théories que nous v e rvons de passer en revue
et qui
traitent
surtout des
constructions prpdicatives
laissent
supposer
que
l'ensemble de
la phrase s'organise autour du no-
yau verbal.
Elles laissent aussi
supposer que,
dans
le
sch~ma
transitif,
la relation est exprimée par le signifiant verbal.
Or nous avons vu que
la Relation,
dans une perspective
pluri-
disciplinaire est un interface,
une abstraction. Par cons~quent,
i l semble tr~s peu probable que,
à
l'exception des opérateurs
dfsémantisés
comme B ':"
les ;verbes
transitifs,
lourds de leur
J J '
cont enu sémique,
puis sent
êti'e
le
support
fonne l
de
la re la tion
dans
la phrase.
4)
La relation chez O.
Jespersen
Si
la notion de valence et
la formalisation par stemmas
caractérisent
la syntaxe structurale de
L.
Tesni~re, la notion
\\1
l'
de rangs
est,
sans
conteste,
la base de The philosophy
of Gram-
mar chez O.
Jespersen.
Contrairement à
C.
J.
Fillmore
et
à
L. Tesni~re.dans une certaine mesure,
la transitivit~ (notion
de
cas
et
d'actants)
semble représenter,
aux yeux de O.
Jespersen
un cas
tr~s particulier des relations entre les unités linguis-
tiques.
Pour ce qui
est de
la transitivit6,
O.
Jespersen expri-
me
son désaccord vis-àvis des voix
(active
et passive);
i l recon-
nait
la difficulté
pour le
linguiste de se défaire de 1'~érita-
ge de
la tradi tion et p r é f è r-e
parler de
"tournures"
(active and
passive·turns). i·jais
l'analyse qu'il fait des deux contructions

')1
ne diff~rc en rien des
analyses
traditionnelles.
O.
Jespersen
(;tait donc parti
pour la mise sur pied d'une
"grammaire totale"
mais i l reste 8
savoir si
les moyens dont
i l disposait
alors
étaient a
la mesure de
ses ambitions . . .
La
"th(~'orie des rangs"
s'inscrit dans
une perspective de
linguistique gén~rale; elle semble indiquer le d~saccord
de
O.
Jespersen vis-à-vis des d?finitions traditionnelles des par-
ties du discours qui date~ pour l'essentiel,
de
1~6poque des
grammairiens
grecs
et
latins.
O.
Jespersen montre
combien ~t
surtout pourquoi i l est difficile de
proposer une définition
juste et
intelligible des parties du discours.
D'abord,
on a
pris
l'habitude de
les déterminer par rapport
au monde réel or
"the correspondance between external and grammatical
categories
is
( . . . )
never complete,
and we
find
the most
curious and unex-
pected intersections eveywherel,(l).
O.
Jespersen signale ainsi
le danger de mêler l'extra-linguistique au
linguistique
lors de
l'analyse des faits purement linguistiques.
Par ailleurs,
pour-
Buit-il,
dans
la plupart des
syst~mes linguistiques (en parti-
culier l'anglais)
les
catégories grammaticales ne sont
pas tou-
jours _formellement marquées de
sorte que d'une structure à
l'au-
tre,
une même fonne peut
se pr?senter tant5t
comme un verbe,
tant5t
comme un
substantif,
comme si elle appartenait
à
plusieurs
classes de mots a
la fois.
Mais
c'est
justement ce que
le
lin-
guite danois ne veut pas entendre:
(1)
O.
JeSPERSEN:
The philosophY
of grammar,
George Allen &
Unwin
Ldt ,
Lond o n ,
192L~,
p.
5!-~

-
52 -
"Jt is
( . . . ) very important
to
remark that
even if'
HOUND and
LDVE and
a
great many other j;:nglish words
belong to more than one word-class,
this
is true of
isolated fonn only:
in each separate
case in which
the word
is used in actual
speech i t belongs defi-
tely to one class and
to
no other.,,(l)
En clair,
O.
Jespersen propose d'attendre que
la structu-
ration de
l'énoncé
soit achevée avant de
chercher à
dpterminer
la classe d'appartenance.
Et
la classe d'appartenance d'une uni-

se détermine,
non pas par rapport
à
l'ensemble de
la struc-
ture,
mais par rapport à
un autre élément qui
se trouve dans
son environnement immédiat:
les
classes d'appartenance des mots
se déterminent 'selon le
"rangement" de
ces derniers
sur la chaî-
ne linéaire.
Ainsi
"rangés" dans
la structure,
les mots
se défi-
nissent
ou se qualifient
selon leur succession . . . Mais ecou-
tons donc O.
Jespersen:
"In any composite denomination of a
thing or person
( ••• ) we always
find
that
there
is one word of supreme
importance to which theothers are
joined as
subordi-
nates. This chief word is defined
(qualified,
modifi-
ed)
by another word,
which,
in i t s turn may b~ defi-
ned
(qualified,
modified)
by a
third word,
etc. We
are thus
led to
establish different
"ranks"
( •.. ),,(2)
Nous nous arr~terDn§ sur la notion de subordination
qui implique elle-même
la notion de relation.
La
relation de
subordination rappelle
un peu
la
syntaxe
structurale' de
( 1)
o , J Ji;S}-' ;:;HS EN
op.
ci t "
'P.
6;~
(2)
Ibid.
p.
96

- - - - - - - - - - - - - ------
-
53 -
L. Tesni~re ou l'on
postule une hi~rarchie entre les constituants
des
structures et
ce par le biais des rapports de
connexion.
Nous disions alors qu'il semblait plus pertinent de
s'int~res-
ser a
la hi~rarchie des
(mises en)
relations.
La remarque est
aussi vraie des
"rangs" de O.
Jespersen,
s u r-t o u t .q u t o n ne peut
pas en faire grand'chose sur le plan théorique(l).
La structure analysée peut avoir une
certaine expansion;
les relations de subordination ainsi d~crites s'emb01tent en
abyme;
les
"rangs"
se multiplient
à
l ' i n f i n i . Na i s
à
cela,
O.
Jespersen répond que
"it is needless to distinguish more than
three ranks,
as
there are no
formaI or other traits that dis-
tinguish words of these
lower order from
tertiary words,,(2).
Et pour la séquence
:
(8)
a
certainly not very cleverly worded remark
O.
Jespersen explique que
"
no one of the words
CERTAINLY,
NOT,
and VEHY,
though defining the fo llowing word, ':LS in any way gram-
matically different from what i t would be as a
ter-
tiary word
( . . . ),,(3)
(nous soulignons)
On aura remarqué que o. Jespersen réussit à ne pas dire claire-
ment de que I s
"'rangs" sont
CE11TAINLY,
NOT,
VERY • . Et
dire
que
CEHTAINLY
"défini t ""
CU~Vr~RLY
est on ne peut p lus douteux.
(1)
Nous ne mettons pas en cause
la notion de hiérarchie entre
les parties du discours. Mais elle ne doit pas
~tre consid?r~e
comme une finalité
de
l'analyse.
Elle nous
servira de point de
départ
pour rendre
compte de
la portée des adjectifs.
(:')
O.
~rESPEI{SEN
op.
c i t . ,
p.
96
(3) Idem.

Un peut
aussi
se demander à quels
"rangs" appartiennent
cer-
tains opérateurs comme
A/Tl-II~, CAN, DO... Et lorsque O. Jespersen
affrontera
les véritables
énoncés,
ce sera au prix d'une forma-
lisation touffue et tr~s indigeste(l) qu'il parviendra ~ se
rnaintenir dans sa "théorie des
rangs".
que peut-on donc dire de
la notion de
"rangs" par rapport
au p r-o b Lèm e de
la relation
en linguistique?
I l semble 'lue cel-
Le-ci se soit diluée dans cette sorte de
comptabilité ordinale
des éléments mis en relation.
Au
lieu de
compter ou de numéro-
ter les él~ments selon leur ordre de succession sur la chaine
linéaire
?
>
2
J
i l aurait fallu plutôt s'intéresser a
leurs modes d'articulation
sur cette m~me chaine linéaire
chaine
~---~~ - - c <2 =:9 ~linpaire
o
2
Dref,
s ' i l y
a quelque forme de
comptabilité à
tenir,
crest plu-
tôt
celle qui
se rapporte à
l ' occurren_ce
des éléments sur la
chaîne linéaire,
c'est-à-dire,
les constructions successives
de
relations.
J4'un des mérites de
la Philosophie de
la grammaire reste,
sans
conteste,
la distinction que O.
Jespersen observe entre
(1) Dans Analytic.
Syntax
(19J7,
p.
l~l). O. Jespersen représente
'1 b l u s h
ta
think of wh a t
foo 15 we .. ere 1
ainsi
S V p l
p
(1-'(2
)
S V ) ,

55 -
'nexus'
et
'jonction'.
Le nexus
est ~ rapprocher des
construc-
tions p r-é d Lc a t Lv e s ,
La
relation
y
est médiate
comme.
par exem-
pIe,
dans
la construction attributive oG
l'attribut est rap-
porté à un support nominal par
La m~diation d'un reLateur. La jonc-
tion est
un cas de
relation immédiate
comme dans
la construc-
tion épith~te. Nous y
reviendrons
en détail
Sans s'en rendre peut-~tre compte,
O.
Jespersen disposait
ainsi d'une nouvelle donn~e pour ce qui est de
la description
de
la relation en linguistique:
la hiérarchie
entre
les rela;;"
tions.
Cette distinction
(nexus
vs
jonction)
sera un atout dé-
terminant lorsque nOus
confronterons quelques mod~les linguis-
tiques dans
l'étude de
l'attribut de
l'objet.
Pour
l'avoir in-
troduite dans
sa Philosophie de
la grammaire,
O.
Jespersen cer-
nera de plus pr~s la vraie nature des mises en relation,
en
t ou s. cas de pLu s
p r-è s que
les psycho-mé cani ciens
t r-è s
attaché s,
eux,
à
la "théorie des
incidences".
5) Helation et/ou incidences chez G. Guillaume
Le m6canisme d'incidence
est
ce qui caractérise essentiel-
lement
la thÉiorie &uillaumienne;
aussi,
est-ce par ce biais
que nous
chercherons à
dfterminer
l'exploitation que
la psy-
cho-systématique rai t
du
concept de
r-eLa t i.o n
en tant qu' ou-
t i l d'analyse.
Nous n'avons pas
la
prétention,
cela m~rite
d '~t re ss o ul Lgrré ,
de rendre courpt s
cIe
l'oeuvre de G.
Gui llaume.

-
56 -
Ses Leçons cie
linguistiques
sont
S l
denses que
chaque petit
fait
analys6 peut faire
l'objet de nombreuses
th~ses. Une analyse
critique et
soutenue de
la notion d'incidence devrait
pouvoir
rendre compte cie
la
puissance explicative
(qui ne
saurait
~tre
ni~e) de la psycho-m6canique, mais aussi de ses propres
Limites;
dans
ce dernier cas,
i l suffirait de
se
pencher attentivement
sur les 6crits
(y compris
les plus
r6cents)
des adeptes
incon-
ditionnels de G.
Guillaume 'pour constater,
en première approxi-
rnation,
l'exploitation presqu'inconsid~r6e du concept d'inciden-
ce.
-,
A travers
la d6finition de
l'incidence,
on peut d6jà sai-
sir tout un pan de
La théorie
psycho-systématique
:
n :• • • La
psycho-systématique du
langage voit dans
le
mécanisme de
l'incidence
le principe définissant dans
~e· plan de la langue;,
I.es
relations
instituées
entre
les parties prédicatives
constitutives du système:
substantif,
adjectif,
verbe,
adverbe.
L'incidence est
le rapport qui s'établit entre un support et un ap-
port"( 1).
(nous
~nulignons)
Le
concept d'incidence ne
semble donc pas
~tre strictement 6qui-
valent à
celui de relation.
La notion de relation en
linguisti-
que est
à
la fois
plus généralisante et plus
précise que
celle
d'incidence.
Plus gén6ralisante,
dans
la mesure o~ la relation
(1)
G. HOlGNET :
"Lincidence cIe
l'adverbe et
l'adverbialisation
cIe
l'adjectif"
in Travaux de
linguisti<]ue et
de
littérature
r , 196J, p. 253

- 57 -
A
est
la base de
la syntaxe
(et melTle de
la phonologie,
r
c.
"z-a p po r t s
oppositifs")
et que
la syntaxe
transcende
la classe LIes
"parties
prédicatives"
élU
sens
strict.
L'incidence
est moins précise dans
la mesure où,
dans
la rencontre des
faits
linguistiques,
celle-
ci
semble revenir dans tous
les
contextes,
ce qui
est contraire
à
la définition
de
son domaine d'application
(voir citation).
L'analyse de
l'incidence adverbiale donne,
en tous cas,
une râ-
cheuse impression d'impr~cision de ce domaine d'application ...
L'incidence ~tablit des rapports de d~pendance puisque
lIon distingue d'un côté,
un apport
et,
de
l'autre,
un support.
Ainsi,
la promotion des él~ments prédicatifs adjectif;
adverbe,
verbe
(sauf à
l ' i n f i n i t i f )
dans
l'instance Discours dépend de
la pr6sence préalable d'un support.
Ces
rapports de d6pendance
rappellent d'ailleurs
la notion de hiérarchie chez O.
Jespersen
et
L. Tesnière.
L'incidence semble être
ce qui r~pondait le
mieux aux préoccupations de G.
Guillaume dont
l'oeuvre est
essen-
tiellement orientée vers une théorie du mot.
L'incidence inter-
nc-et-externe est
la propri~té psycho-mécanique du verbe,
de
l'adverbe,
de
l'adjectif;
le
substantif est,
lui,
d'incidencü
interne uniquement.
Ce qui n'est pas sans
conséquences
sur
l'analyse qui pourrait être faite de certains faits
syntaxiques.
~n effet,
les rapports d'incidence
sont réglés avec une sorte
de cJpterminisme depuis
l'instance puissancielle qu'est
la Langue.
De
sorte que
pendant
le parcours opéra t i f de
la Langue· au JJis-
cours,
le
s ub s t a n t i f
qui,
logiquement,
n'aura toujours
pas été

.58 -
pourvu d'une incidence externe,
ne saurait être incident à un
autre substantif.
Du même
coup,
les noms
comp o s
s
(e.g. HOil'[t··l.E:-
é
GRENOUILLlG,
GOUVEltNEjVjENT FABIUS . . • )
devraient,
en principe,
fai-
re problème à
la théorie des incidences.
A moins de concéder
que
l'un des
substantifs
"d4termine" ou qu ' i I. ":fonctionne adjecti-
valement", explication qui prendrait alors
les allures d'une
solution ad hoc.
La théorie guillaumienne ne
semble pas insis-
ter suffisamment sur la syntaxe(l)
et partant,
Sur la structu-
ration.
Une autre différence,
et
elle est de taille
celle-l~, en-
tre
la relation et
le mécanisme d'incidence
est que
la relation
est
construite en vue de l'obtention du sens.
L'incidence,
elle,
procède de
façon presque mystérieuse de
la Langue;
disons
qu'elle est postulée comme inhérente à
la
langue mais de fait,
elle sert à définir
intrinsèquement les parties du discours en
prévision de
leurs associations dans
le Discours.
La différence
en question revient à
ceci,
que
la mise en relation suppose un
Agent des mises en relation,
c'est-à-dire,
un énonciateur.
Les
rares allusions faites
par G.
Guillaume à
cette instance énon-
ciatrice est
"l'homme pensant"
à qui i l attribue,
implicitement
d'ailleurs,
l'e.ffection des phrases.
Mais
seulement
l'énoncia-
teur,
cet agent des
structurations est aussi un
r.epère:cn struc-
ration(2)
et
i l ne saurait être omis de
l'analyse ~inguistique.
( 1 )
J.
1-j.
LEAl?])
: "Sur un aspect de
la syntaxe gui llaumienne"
dans Systématique du
langage,
1,
1984,
pp.
2:~5-260.
Dans
cet article,
J .;'1.
Léard relève
cette grave
lacune.
(2) voir ~c
vs
~t chez C. Delmas. Nous y reviendrons brièvement.

-
59 -
Le paramètre
"énonciateur" est une contrainte tellement pressan-
te que
le grammairien et
linguiste G. Guillaume
se transforme
parfois en l ' énoncia teur G.
Gui llaume:
"quand JIS parle à un hom-
me,
JE lui dis,
JE ne lui parle pas d'une mani~re qui lui lais-
serait
la charge de découvrir
le dire . . . ,,(l)
Les pb nom ne s ' linguistiques sont déjà suffisamment
, corn ...
é
è
plexes -
à commencer par le fait que l'on soit obligé d'utili-
seI' la langue pour décrire
les
faits qui
lui
sont propres -;
i l serait donc souhaitable que
le
linguistè qui s'abstrait de
la langue pour en décrire le fonctionnement
reste suffisamment
distinct de
l'énonciateur déjà inscrit dans
la langue •..
Le recourS incessant au mécanisme d'incidence,
l'esprit
Inême du
pa.rcours
opératif de
la
Langue au Discours
consistent
presque toujours à partir de
la Langue pour expliquer ce qui se
passe dans le Discours;
concr~tement,le principe consiste à
partir du
"signifié de puis sance" pour a 11er vers
le
"signif:L é
d'effet".
Démarche ambitieuse et séduisante surtout qu'elle cher-
che à prévoir les faits.
}1ais
la
linguistique guillaumienne sem-
ble insister un peu trop sur le côté
"prévisibilitéade l'analy-
se.
L'analyse
linguistique ne devrait pas
consister seulement
en la pm~VISJON des faits;
elle devrait aussi
chercher à
les
JUSTIFIER. Or nous venons de voir que,
privilégier l'incidence
au détriment de
la relation conduit
logiquement à
évacuer l'énon-
ciateur,
le repère des
structurations.
Du même
coup
la comptabi-
lit6 que
celu~-ci-doit tenir tout au long de
ses
o pô r-a t i.o ns
( 1)
G
GU -r- T l '\\U":' P.

.
- .
r
J~
Leçons de
linguistique,
.LJ Ln
!
I .• ..J

de
l'Université
Laval,

-
60 -
discursives est r0légu~e au second plan ou meme ignor~e. Comment
PHEVOIH la p r-é s e n c o ou
l'absence d'opérateurs
comme DO ou Dl~-ING
à
partir des mécanismes d'incidence?
Concrètement,
comment
rendre compte des énoncés du type
(9 )~;ven ...eh o n J was a chi Id .I was frightened of her
but l
didn't
know
why. Eut l DO Know now.
( 10)
T
-'-
AH
not answerING
questions
Dans
l'énoncé
(10)
en particulier,
l'apparition de BE-ING ne
peùtêtre expliquée qu'en prenant appui
sur le contexte discur-
sif,
ce qui revient à
la JUSTIFIER.
L'énoncé
est une réponse do~-
nee à des
journalistes. L'énonciateur "nie" une relati:ièon (ici,
l
/
answer questions)
que
l'on aurait pu
croire automatiquement
validpe en ce qui
le cdncerne.
En effet,
l'énonciateur en ques-
tion est un homme politique qui sort d'une séance de travail.
I l s'attend donc à être
"traqué ll par les hommes de presse.
Le
contexte lui permet de pré-supposer la relation
(1 / answer ques-
tions);
seulement,
i l a décidé de la refuser le moment venu,
c'est-à-dire,
pendant son inévitable interview et c'est ce qu'il
f a i, t
en
(10).
En d'autres mots,
si la présence de BE-ING peut
être
justifiee à
partir des donnees
contextuelles,
elle sera en !
revanche,
difficilement
prévisible depuis 'u ri o instance puissan-
cielle comme
la
Langue chez G. Guillaume et
les néo-psycho-méca-
niciens.
Qu'on en
juge par cette analyse de IV. Hirtle en (11)
( 11)
He
lS
accept1NG
the orrer
(1)
~mprunt6s à H. Adamczewski; le premier est extrait des TEXTES
du CRELINGUA,
Ut:.:H. des
Pays Anglophones,
Patis III,
1982-83,
p.
18

-
61
"Si
l'on garde a
l'esprit que
ce gui
semble conditionner
l'emploi de
la lorme progressive -
une impression d'in-
complétude -
on peut décrire
le sens
véhiculé
par
la phrase
comme
"une action qui
est incomplète au
moment où
l'on parle"
( ..• )
on peut
comprendre
pour-
quoi
les verbes de perception·ne
s'emploient pas à
la forme progressive,
normalement,
un fait
de discours
qui paraît purement arbitraire
lorsque
l'on n'a pas vu
( •.. )
le signifié de puissance,,(l).
I l Y aurait trop de choses à dire sur ce qu'écrit W.
Hirtle à
propos de BE-ING et en 1984,
des
choses
sans rapport direct
avec
l'analyse qu'il propose ••.
Celle-ci
est pourtant un cri
d'alarme,
un appel insistant lancé aux enseignants afin qu'ils
cessent d'expliquer les faits
linguistiques par le recours aux
règles qui
sont,
d'après 11. Hirtle,
des
effets de
sens codifiés.
Nous devons
cependant
avouer ne pas voir quel signifié de
puissance explique
l'occurrence de BE-ING. 1,'i.
Hirt le ne dit pas
non plus en quoi l'~noncé (11)
s'oppose à
'1 accept
the offer'
qu'il fait
pourtant figurer dans
la même page.
A en croire
les psycho-mécaniciens,
l'incidence n'est,
au
fond,
qu'une affaire de portée.
Ne dit-on pas que
l'incidence
"est
le rapport qui
s'établit entre un support et un apport" ?
Dans
le Discours un terme s'appuie sur un autre.
Voyons donc
quelques analyses proposées sur le mécanisme incidenciel.
La définition de
l'incidence adverbiale par G.
Guillaume
lui-même parait d'abord
séduisante
"Si
je dis:
Pierre travai lle COURAG'<':USmJ~NT, COUn.A-
GEUSEt-tENT
est incident,
non pas à PIERRE,
non pas à
(1)
ÎL HIHTLE :
"L'anglais sans règles" dans Systématique du
Langage,
l ,
1984,
p.
4J

TRAVAILLE mais
a
l'incidence de TJL\\VAILLE Et PJEltRE" ( 1 ) •
G.
Guillaume ~tait certainement
loin de
se douter que
le fonc~
tionnement de 'La catégorie adverbiale ne
se
laisse pas résumer
en si
peu de mots.
Certains de ses
successeurs ont dn rencontrer
des
cas d'adverbes qui,
mani festement,
se r-e f'u s o n t
ré so lument
d'entrer dans
le schéma psycho-mécanique
pr~-établi. Et comme
pour sauver le
schéma en question,
l'on a
introduit
par des for-
mules pas toujours
très
explicites,
de
légères modifications.
La
conséquence immédiate
est que
l'incidence ~dverbiale prolifè-
re de
façon très
inqui6tant~. On s'en rendra compte avec l'ana-
lyse de G. Moignet.
Soit
It~noncé
(12) Pierre attend VAINL'~:'ŒNT
"Ce qui est qualifié de VAIN",
écrit G. }loignet,
"c'est
la base
( ~ )
sémantique du verbe ATTENDRE,
la notion d'ATTENDRE" - ' .
Nous
souscrivons
entièrement ~ cette explication si elle peut ~tre
comprise
comme une
complémentation du programme
sémique du ver-
be par le programme sémique adverbial.
Hais
les
choses
se gâtent
lorsque G.
i'·;o ignet s e s ent ob ligé d'ajout er que
"l'adverbe et
le verbe sont
conjointement incidents au sujet,,(J).
~lais ce
dernier d~tail semblait nécessaire parce qu'il fallait faire u
une diff~rence avec l'~noncé (lJ):
( 1 " )' Je
conserve
la
lettre
"J
PHI~CIEUSE1'lENT
(1)
C.
CUI LLAWll'~ :
I,eçons de
linguistiC]ue,19'56-57,
Presses de
l'Université
Laval,
1982,
p.
1JO
( :.»
_
G •
''''!()-I-('
~
1
__
~T';'T
:r1'\\:.,.
"L'incidence de
l'adverbe
et
l'adverbialisation
de
l ' adj c c t t r " in Travaux de
linguistique et
de
littérature,
1,
196'.\\,
p.
177
( ') \\
-1" ri r, '"
.
\\
_.'
1

-
G'J -
Cette fois,
l'adverbe est,
en dpfinitive,
incident a
l'objet et
G.
Moignet y
parvient
par un v6ritable tour de force
"Ce n'est
proprement
ni
la conservation,
ni
la lettre
qui
est d~clar8e pr6cieuse;c'est le rapport qui s'6ta-
blit
entre
le verbe et son Objet,,~l).
On
imagine mal
comment
le rapport
entre deux 61~ments
grammaticaux peut atre d6clar6
~précieux". Mais la suite prouve
bien que G. Moignet est d?cid~ment guidé par
les
effets
s6man-
ques
"L'idée de prix est plus ou moins directement
impliqu6e
dans
CONSEHVE
l? PRECIEUX]
en l' adverbia lisant,
on
l
f
'
l
h
'
,,(2)
a
_ ait
passer
resultativement sur
a
c
ose
conservee
Lorsque G.
Moignet
6crit d'abord que
la
"p r-é c Lo s i t
concerne
é
"
le rapport
entre
le verbe
et
l'objet
ce qui,
dans
la termino-
lOgie psycho-~yst6matique correspond ~ l'incidence passive du
verbe a
l'objet -
on se
serait attendu ~ ce qu'en (lJ)
l'adver-
be soit
incident
~ une incidence;
app.ar.emment,
ce n'est pas Je
cas.
Parfois,
au
lieu que
l'adverbe et
le verbe ne
soient
"con-
jointement incidents"
~ l'un des actants de la s6mantèse verba-
le,
l'adverbe intervient mystérieusement tout
seul ~ la jointu-
re du verbe et du sujet c'est-à-dire,
,,~ l ' e n t r
e du sujet dans
è
son action"
(sic)
( 1 '1)
Pierre écoute ATrjSNTJV!·~f.JENT
La situation des
pnonc(~s de (l") a (1/1) avec les mécanismes in-
cidenciels peut
~tre ainsi schématis6e
( 1)
G.
;-·j()JGNel'
op.
cit.
p.
177
(z_ ) -r- 1
.i.e em .

-
6 ~~ -
incidence active
incidence passive
S
oEoE--~-=:'='::~=-='----:;'-"-::":=''':'''''='----V----------'--'----''--...I.:....::::''''::'''':=-=-'':'''''='_-''''' 0
A
~
/
?
?
{14)
, (1:')
_______ i~ll
_
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - adverbe
Les
flèches horizontales
indiquent
l'incidence verbale
externe
aux abouts nominaux.
Ces f Lè c h e s
sont o r-Le n t.é e s ;
ce qui
engage
~pist~mologiquement d'une certaine manière.
Les flèches
en poin-
t i I Lé s
sDnt
les
cas o~ l'adverbe et
le verbe
sont
conjointement
incidents au sujet ou à
l'objet,
ou bien encore
les
cas o~ l'in-
cidence adverbia le intervient à
la
jointure du verbe
et-~ de l'un
de
ses
supports nomin~ux. . .
L'impression gén~rale qui se dégage de
la description de
l'incidence adverbiale est que ,celle-ci intervient un peu par..,
tout
et n'importe
comment.
La
cons~quence en est que certains
~l~ments
viennent
se disputer littéralement
le point d'inciden-
ce
(e. g.
le verbe et
l'adverbe
en
(1:3).
Encore un dernier énoncR
(15)
un enfant
EXTHEI·1B-1 H-;NT
f a i b le
G. Moignet explique que "l'adverbe intervient à la charnière de
l'ad jectif ET
(nous
sou lignons)
pr",; ci se que
la no tion de
l'ad j ec-
t i f devra ~tre entendue au maximum d'intensit~,,(1).
i'~n disant
que[~XTi(i.'~I,JE;:!i!:NT est
incident ou
"porte"
sur la
charnière entre
l'adjectif et
le substantif e~ qu!il intensifie'
( 1) Ibid.
p.
179

l'adjectif,
G. ;\\loignet fait
faire
~t ses adverbes deux opérations
et simultanément;
et
i l
semble douteux qu'un opérateur efÎectue
en m~me temps deux opérations aussi
fondamentales
et
aussi dif-
oi
férentes que
la quantification d'une relation et
l'intensifica-
tion d'un programme
s~mique. Sur ce point particulier,
l'analy-
se de G. l"Joignet
est
contraire au
principe d'ordonnancement des
opératiqns. Tout comme
"il faut du
temps pour marcher,
i l faut
du temps pour penser"
et
tout
comme pour marcher i l faut
faire
les pas
les uns après
les
autres,
pour construire un énonce,
i l
faut
effectuer
les
opérations
les unes après
les autres.
I l
est dommage que
l'analyse de G.Moignet
se soit
limitée
au français
seulement.
Si
en
(15)
EXTRI~M}i;.\\ll~NT est incident au
rapport
entre
l'adjectif
(FAIBLE)
et
le
substantif
(ENF'ANT)
que
dirait-on de
"( 16)
He
is aH.ATHEH good student"
?
Si dans
ce
cas précis
l'on maintient
l'incidence de second de-
gré
(l'incidence à
une incidence)
comment pourrait-on rendre
compte de
" ( 1 7 )
Il e
i s
RATI'IE:H
a
good
student"
?
L'anglais, sans doute,
plus métalinguistique sur
la question,
sépare résolument
les deux opérations
en jouant
sur
l'ordre des
mots.
En
(15)
tout
comme
en
(16)
la quantification est
portée
sur
les
programmes
sémiques adjectivaux;
plus
explicitement,
clans
l'énonce:'
de C.i'loignet
(1.':,)
let quantification est une in-
tensification comme i l
le dit d'ailleurs.
En
(16)
la quantifi-
cation revient
~l mo elu Ler le programme sémique de
l'adjectif.

-
66 -
Quant à
l'adverbe HATJ-JEI{ a
rapport
avec
la relation ins-
titu6e entre
l'adJ"ectif· et
l
b
t
e
su s
antif.
Selon
les termes de
GLA
(1 ~82 ,
p.
267 ) lliTJŒR "port e Sur la lègi tirni té de la con-
nexion" adjectif-substantif.
Autrement dit,
dans
l'effection
des opérations,
cette quantification intervient APHES
la mise
en relation.
Par contre,
là o~ GOOD est quantifié directement
comme FAIBLE en
(15),
la quantific<:ltion a,' dû
logiquement inter-
venir AVANT,·
peut At
t
.
-e re a- -on quantifié
les programmes
s~miques
adjectivaux pour obtenir -
selon les
convenances de
la situa-
tion -
une
sorte de
compatibi li té avec
le substantif.
En plus bref,
disons que
le
concept d'incidence peut don-
ner l'illusion de résoudre
toutes
les difficultés;
mais en rea-
lité
et nous
venons de
le voir
l'exploitation abusive qui
en est faite
contribue à
escamoter une bonne partie des problè-
mes
syntaxiques.
Par son extr~me imprécision,
le mécanisme des
incidences
trahit
les limites de
son
pouvoir d'explication.
Nous y
reviendrons dans
la suite de
ce travail.
Mais peut-~tre que
les successeurs de G.
Guillaume font-
ils mauvais usage de
la théorie des
incidences.
Lorsqu'on ap-
plique un principe th~orique et que
l'on aboutit à des
r~sul-
tats plut5t douteux,
de deux choses
l'une:
ou bien le
chercheur
qui
s'en sert n'en maîtrise pas
s u.tf'd s annno rrt
l'application,
ou
bien la théorie en question est
incomplète ou
totalement inadé-
quate.
C'est
là une évidence que nous n'avions même pas besoin
de rappeler.

67
Peut-~tre que G. Guillaume aurait-il ananlys~ ces ~nonc~s
tout à
fait
diff~remment. Quoiqu'il en soit,
les m~canismes in-
cidenci e l s
rendraient dciLfi ci lement
compte cl t un 0nOnC(~ comme
(18)
She had been drinking
et,
corr~lativement, ce m~canisme incidenciel m~me renforc~· de
la notion d'incidence de
second degr~ rendrait tout aussi·-dif-
licilement
compte de
(19)
Elle avait VISIBLEMENT /
MANIFESTEMENT
bu
Dans cet ~noncp l'adverbe qui n'est pas une partie pr~dicative,
lIres sort i t ~I se Ion les propres termes de G. Gui llaume, li à l' év~ne­
ment qu'est
la phrase";
ce statut
le place au dessus du domaine
d'application des
incidences
(voir d&finition de départ);
par
cons~quent, il ne saurait pas du tout ~tre incident à l'inciden-
ce externe du verbe à
l'objet ou
au sujet
et moins
encore à
l'incidence interne de
la notion verbale.
Ce
cas èe figure pose
des probl~mes qui dépa~sent largement
le
cadre de
la th~orie
psycho-syst~matique. Il faut nécessairement avoir recours à une
théo~ie d'analyse du discours,
la th60rie d'énonciation,
par
exemple.
Nous
sommes,
cependant,
tr~s loin de pouvoir dresser un
bilan de
la théorie
guillaumienne. Cela dépasse notre compéten-
ce.
I l nous faut
reconnaître no rmê t eme n t
que
la théorie guillau-
mienne a
vu le
jour dans un contexte où
les
exigences
théoriques
étaient autres.
Cela dit,
son apport à
la
linguistique g6nérale
dans
certains aspects
est
considérable.
L'on ne peut que
s'in-
cliner devant
le pouvoir explicatif ~ -disons plut5t la volonté de

- 68 -
généralisation -
des mécanismes de tension.
Par la notion de
tension, G.
Guillaume introduit
la notion de successivit6,
opé-
ratoire celle-là.
Nous
y
reviendrons d'ailleurs assez Souvent
mais dans le cadre d'une grammaire qui privilégie
la relation
et à
juste titre.
6)
La relation dans
les théories d'analyse du discours
Pour faire un tour à peu près complet des modèles
linguis-
tiques qui ont marqué la recherche
linguistique ces dernières
décennies,
i l est nécessaire
toujours en rapport avec
le con-
cept de relation,
de faire un bref exposé de la théorie des
"ac-
tes de
langage"
et de la théorie d'énonciation.
Ces deux modèles
ont pour objet l'étude du discours et
la première nommée -
la
pragmatique -
appartient à
ce que Saussure appelait déjà
"la
linguistique externe" qui
"peut accumuler détails sur détails
~ans se sentir serree dans l'étau d'un système,,(l). Nous nous
intéressons,
nous aux relations entre les
constituants de
l'énon-
cé,
c'est-à-dire,
entre
les unités
linguistiques du système
(de
la langue en général ou du système que représente une structure
quelconque).
La pragmatique semble s'exclure d'elle-même d'une
telle vision.des
choses
linguistiques.
Si l'on tient à parler
de Relation en ra.pport avec
la théorie des
"actes du
langage",
i l faut
admettre que cette relation
est
extérieure à
la cons-
truction du sens,
et partant,
des énoncé s.
F.
Hecana t i est
(1 ) F.
DE SAUSSURE
Cours de
linguistique générale,
Sème éd.
Payot,
Paris
1962,
p.
4J

- 69 -
d'ailleurs
clair sur cette question:
la pragmatique s'int~resse
aux rapports entre les protagonistes du discours
"Lors d-'une ~nonciation une phrase est adressée par
un locuteur à un auditeur et elle se rapporte à un
ptat de choses:
la pragmatique s'intéresse à
ce qui
a
lieu sur l'axe
locuteur-auditeur,
c'est-à-dire,
(
"l'échange de paroles'" comme activité intersub,jecti-
ve,
comme pratique sociale,,(l).
La pragmatique s'int~resse donc aux interactions comportementa-
les;
sans vraiment
exag~rer, on pourrait dire que si elle étudie
quelque forme de relation,
ell~ étudie ~lut5t des relations de
type s o c i.a l
:
locuteur
- - - - - - - - - - - - - 7 : : : > audi teur
·ce ~ACTED~ n
-----
~
<>
--------
audi teur .,~"'------------- locuteur
C'est donc
la Relation sous sa forme
circulaire et l'on comprend
que le concept ne puisse pas devenir opératoire au point d'~tre
,
,
(2)
utilisé comme outil d'analyse dans
la construction des enonces
.
Ce qui fait
la différence fondamentale
entre
les grammai-
res structurales et
la théorie d'énonciation,
c'est
certaine-
ment l'entité
"énonciateur".
C'est aussi
ce qui
constitue la plus
(1) F. RECANATI : La transparence et l'énonciation, Seuil, Paris,
\\q::j-6,
p.
92
(2) La construction des énoncés ~tant bien sûr diff~rente de
leur emploi.

-
70 -
profonde affinité
entre théorie d'énonciation et théorie des
"actes
de langage". En effet,
ii.:.
Benveniste uti lise indistinc-
tement
"locuteur" et
"énonciateur". Autour de
cet
"EGO,
centre
de l'énonciation",
gravitent
les autres entités de
l'appareil
formel d'énonciation. Mais prenant pour crit~re la Relation dans
les deux mod~les,on a des raisons de penser que
l'énonciation est
plus pr~s des faits
linguistiques.
Alors que les actes de
langa-
ge consistent à
instituer des relations extra-linguistiques
(intersubjectives)
à partir des"effets résultant de l'emploi
pragmatique des formes,
les instances de
l'appareil formel
d.' énonciation (JE,
ICI, f.'lAINTENANT)
sont une forme d' articula-
tion de l'énonciation sur le contexte,du linguistique sur l'ex-
tra-linguistique,
pour ainsi dire.
C.
Delmas
(1985) décrivait
fort
justement
ces embrayeurs comme symbolisant des interfaces
relationne I s .
linguistique
(énoncé)
)
Hais l'on sait maintenant que
l'essentiel n'est plus de montrer
que les piliers- de l'appareil formel d'énonciation "embrayent"
un contenu informationnel sur une situation.
I l faut,
à un mo-
ment,
admettre que
l'on rompt avec
l'extra-linguistique.
C'est
ainsi qu'en faisant
abstraction de
la coneeption concrète de
temps écoulé ou de distance parcourue,
on doit pouvoir expli-
quur le passage de
NO!>" ---7 THEN;
de
H~RE/ICI -7 THERE/LA. C'est

-
71
aussi n
cette
seule
condition
~ue l'on arrivera à
justirier
L'irnpossibilit<~ de 'I-SELF',
'JE-I\\lj~HE' (en anglais et français
contemporains)
et
la grarnmatica l i tr; de !'IY-SELF' ou l'lE-SELf', étape
pendant
laque lle
l ' énonciateur
cesse de parler de
ce qu' i L rai t
dans
le monde r~el pour parler de
lui~m~me, d~cliner' son identi-
t~, en quelque sorte.
Dans
les deux cas nous
sommes
toujours
dans
l'instance énonciatrice mais
parvenus à
l'ptape 2,
nous
nous
trouvons
à
un pôle opposé ~ celui de
l'extralinguistique
---
extra-linguistiC"jue
lin {:.... u :i s t .i fi u P.
~_~
-~~G>_~.~
1
2
;>~

-
72 -
C)
LA lŒLATION CO}i}'\\E
OUTIL D' ANALYSE DIES ENONCES
1)
L
" a re l 't i
1 " "
t"
" t 1"
.
't i
a
lon en
lnguls lque,
un evenemen
lnguls lqUe (1)
Nous étions partis des questions et rpponses
suscitpes
chez G.
Ho l t o n par la "dÉ'couverte" clans le domaine de
la recher-
che. G. Hot t o n
s'attachait à montrer qu'une découverte n'est
pas un fait banal ni contingent.
C'est un fait
social pertinent
au regard
du moment où i l survient dans
l'histoire d'une civi-
lisation. On en relève
la pertinence
ou la
portée quand
on le
situe à
ce point d'intersection que sont le contexte général de
la ré cherche et
le moment de
la d?couverte.
La portée10u.tout
simplement
la signification d'une découverte dans
la chronologie
historique en faisait,
aux yeux de G.
Holton, 'un EVENEMENT.
Dans le domaine
linguistique
la mise en relation de deux
unités en vue de
l'obtention du sens peut,
d'une cert~ine maniè-
re,
être considérée comme un "événement", mais un événement lin-
gùistique.
Lorsque
l'on considère une séquence d'énoncé
comme
A DOG,
sa structuration constitue en elle-même un événement ,lin-
guistique.
Le
lexique anglais met à
la disposi tion
du
locuteur
le signifiant DOG pour nommer la notion CHIEN;
lorsque celui-ci
retire DOG du stock lexical et
le met en relation avec une au-
tre unité
linguistique,
ici,
'_A_', il crée une structure synta-
xique
mais aussi une structure sémantique.
De
la notion CHIEN
qui ne signifie pas en elle-même - tant son extension est i l l i -
mitée -
i l opère une organisation plus pragmatique de
la forme
(le syntagme nominal)
et du sens
(la référence possible à un
(1)
Le
terme
d~événement méta-linguistique a été lancé pour la'
première fois par H. Adamezewski lors du colloque de Giel en 1979.

-
73 -
chien).
La mise
en relation de
'~'0DOG s'érige en événement
linguistique puisqu'elle peut être
localisée dans cette chrono-
logie qu'est
le passage du plan lexico-notionnel au plan séman-
tico-syntaxique.
L'pvénement lA DOG' sera
lui-même considéré
com-
me appartenant au passé de
la chronologie
linguistique
lorsque
surviendra un autre é~énement linguistique
(e.g. THE DOG).
L'on
aura compris que,
plus que de simples marques nominales,
. A
et
THE indiquent des étapes successives d'occurrence des événements
linguistiques dans
la chronologie linguistique.
PLAN
PLAN
LEXICO-NOTIONNEL
SEMANTICO-SYNTAXIQUE
\\ H C D::0 HC
__lf.::.~0
A
\\
chronologie
linguistique
Dans
la suite de notre travail,
l'interface relationnel
"r"
représentera toujours une relation dont
le statut n'aura pas été
nécessairement spécifié.
Comme le montre
le schéma,
(1)
et
(II)
symbolisent des étapes relationnelles successives. On y
recon-
naîtra le micro-système des phases de structuration mis sur pied
par H.
Adamczewski(l)
dans
le cadre de sa
"grammaire "des opéra-
tions" ou grammaire méta-opérationnelle.
-----------------
(1) voir en particulier les travaux sur DO et BE+ING.

-
7h -
2)
La datation des événements
linguistigues
i ) Quelques exemples de datation
Le métaterme de
"événement
linguistique" n'est pas un ar-
tifice terminologique.
I l prend tout son sens
lorsque
la méta-
langue du modèle reconnaît en certains éléments de
la langue un
rôle de datation des mises en relation,
c'est-à-dire de
la sur-
venance des événements
linguistiques.
L'un des
cas
les plus par-
lants de datation se cache derrière le fonctionnement de
l'opé-
rateur DO. Reprenons un énoncé déjà cité
(20)
Ev e n when T was
a
chi ld L was ;'fright ened of her but
l
didn't knowwhy.
But
l
DO
know now.
I l convient de bien voir que DO n'est pas la reprise du prédicat
contrairement à
ce que l'on a
souvnnt pensé,
mais la reprise
de
la relation
(1
/
know)
En ce sens,
DO a
rapport avec
l'avènement de
la mise en relation. De n'est donc pas
le symbole
postiche support du temps
(tense)
comme
le professait la grammai-
re transformationnell~mais le dateur métalinguistique de l'~vé­
nement qu'est
la constructiorr de
la relation prédicative.
La for-
malisation des états de
la prédication rend bien compte du phéno-
mene de saturation dont parle IL Ad am c z ew s k i
à propos de DO :
@-
Ci
~
~
CFi ~
(1)
> (n: )
L'interface
laisséevide
lors de
la mise en relation en "r" _
"r" est ici un véritable symbole postiche -
se trouve instancié
dans
la seconde étape relationnelle.
C'est un moyen pratique

•<1
-
75 -
mis en oeuvre par le syst~me linguistique de l'anglais pour ren-
dre visible cette abstraction qu'est
la relation. Au delà même
de
la datation-sur laquelle DO renseigne,et qui en fait un mé-
ta-opérateur,
DO fait
en sorte qu'une abstraction devienne visi-
ble à
l'oeil nu.
On aurait presqu'envie de dire de cet élément
qu'il est un super méta-opérateur •.•
La construction de ;_la relation en linguistique est donc
un événement datable;
et tant qu'événement,
son syst~me de da-
:.:=
tation a une successivité obligée:
(21 )
Payez
CECI,
pas CELA
(message publicitaire)
? ?
(21') Payez CELA, pas CECI
(22) KOFFI (is ill): "1 don't want yams, cassava, boiled
bananas . . . l
won't eat rice or sweet patatoes •.. "
lvirs KUHBA
(his mother):
You don't
like THIS,
you don't
like THAT .•• \\\\fha t
do you like ?
(L'anglais en Af~igue, 6~me)
?(22') ... You don't like THAT, you don't like THIS ..•
L'inversion de
l'ordre d'occurrence des opérateurs dans chacun
de ces énoncés produit un effet plutôt
"bizarre". On peut tou-
jours objecter qu'apr~s tout,
le message passe. Mais si
l'on
est déterminé à
aller au fond des
choses,
i l faut
se demander
pourquoi
les
locuteurs natifs préf~rent l'ordre CECI -+ CELA;
THIS ~ THAT.
La vérité est que ces couples d'opérateurs mar-
quent des époques différentes dans
la chronologie
linguistique

-
76 -
tout
comme 1914 et 1939 marquent des événements
historiques suc-
cessifs et
irn"versibles.
La relation a
presque toujours une certaine orientation.
Le dépassement du premier état de la relation peut
se traduire
méta-opérationnellement par sa re-orientation
(23)
And you've no idea who stretched that thread
THE HEAD OF THE STAIRS ?
(DUM1HT-
184)
(23')
Bod had disappeared but as .I
came to
the STAIR-HEAD
l
stumbled and nearly fell.
(DUivllHT -
65)
HEAD OF THE STAIRS et STAIR-HEAD renvoient sans doute au même
rp.férent; A. ~Iartinet aurait distingué d'un côté un syntagme et
de
l'autre,
un synth~me. Nous verrons combien i l est difficile,
et peut-être même iLlusoire, de maintenir cette distinction 'en
faisant
abstraction de
l'instance relationnelle.
Retenons pour
le moment que de HEAD OF THE STAInS à STAIR-HKW l'orientation
de
la relation a
changé et son statut avec
:
- - - - 7 )
~(---
(1)
_ _ _ _ _ _ _ _ _ _~~ (II)
ii)
La datation métalinguistique eillinguistigue général(~
Que l'on consid~re l'énoncé ou la phrase,
chacune de ces
réalités exprime un certain contenu sémantique en rapport avec
l'extra-linguistique. I l est banal de dire que
le sens n'existe

- 77 -
que par rapport au monde r~el. Par contre,
là o~ l'accord est
loin d'être unanime entre
les modèles
linguistiques,
c'est sur
la nature du rapport
entre
le linguistigue et
l'extra-linguisti-
que.
Les uns insistent sur le rapport
langue-extra-linguistique
et pr~sententla première comme copie conforme de la seconde;
ils donnent même parfois
l'impression de s'être instal16s dans
l'extra-linguistique
(voir les pragmaticiens supra);-les autres
ont une pr~dilection pour ce qui est suppos~ se passer dans la
tête des
locuteurs lorsqu'ils construisent les ~noncés (tentati-
ve de
la grammaire g~n~rative, accent particulier mis sur l'ins-
tance Langue en psycho-syst~matique). La th~orie m~ta-op~ration­
nelle mise sur pied par le Professeur H. Adamczewski depuis
quelques années se pr~sente comme un moyen terme entre les deux
tendances extrêmes.
Se situant sur le plan strictementlinguistlque- domai-
ne de
la construction des
~noncés -
la grammaire méta-op~ration­
n e l l e f a i t une distinction claire et nette entre
le plan de
l'extra-linguistique et le plan m~ta-linguistique; l'extra-lin-
guistique étant le domaine du monde r~el,
le m~ta-linguistique
~tant l'instance abstraite où le langage dévoile son propre
fonctionnement.
Nous parlons de
"distinction claire et nette"
parce ce que,
et l'on conviendra, i l ne suffit pas de reconnaî-
tre l'existence des deux plans s~par~s. Il faut aussi arriver à
quantifier,
disons,'à graduer cette relation de type verticalê
entre l'extra-linguistique et le mé t a-e I i ng'u i s t i.qo e ,
C'est à

-
78 -
cet~e exigence thnorique -
au fond incontournable -
que rfpond
le système de datation des événements
linguistiques,
c'est-à-
dire,
le micro-système des pnases de structuration Phase l
et
Phase
En dépi t
de l ' ins ertion de
l'instance "énoncia teu r" dans
la théorie d'énonciation,
la distinction entre les deux plans
est restée
floue;
nous en voulons pour preuve
la tendance à
prendre l'fnonciateur (réalité abstraite)
pour le locuteur (per-
sonne physique). Pour faire
face à
c e't t e
confusion,
C.
De Imas pos-
·tule l'énonciateur comme une valeur "absolue";
ainsi,
selon le sta-
tut de la structure analysée,
elle peut être mise sur le compte
de À c (énonciateur concret) ou de /~ 1:- (énonciateur non concret
ou énonciateur métalinguistique):
/); /
=-"'~ c
l'lai s
la subti-
--- ~ 1:-
lité de cette distinction est tèllequ'elle n'est pas toujours
bien perçue.
Voyons ce que donne le système de graduation de
la rela-
tion extra-linguistfque/méta-liIjlguistique en rapport avec l'ap-
proche métaopérationnelle de la 't r-ari s L t i vi té,
en particulier le
passage de l ' a c t i f au passif.
Les deux constructions ou les
deux types de mises en relation symbolisent deux événements
linguistiques décalés dans
la chronologie linguistique
(24) The Soviets make missiles
(24') The missiles are made by the Soviets
(24") The soviet-made missiles
(HETIn -
06 05 85)
(1)
Les Phases l
& II sont aussi synonymes de Rhématique/Théma-
tique; mais i l y
a une
préfprence de plus en plus marquée pour
Phase l
et Phase II parce que ces métatermes présentent l'avan-
tage d'être neutres.
En effet,
i l subsiste une tendance à as-
similer Rhématique/Thématique à Rhème/Thème euphémismes mis en
avant par Hathesius pour désigner TNFOR..1l.1ATION NOUVELLE
vs INF'OR-
l'lATION ANCIENNE. Rh(~matique/Thémat:iquemarquent des états de re-
lation.

-
79 -
(24)est
la Phase l
de
la construction de
la relation pr~dicati-
ve;
l'~v~nement lingtiistique se confond presqu'avec l'~venement
extra-linguistique. On peut supposer que
l'énonciateur d~crit
ce gue font
les Soviétiques,
leurs activit~s
économico-militai~
res.
Dans
la phase II
de
l'~vénement linguistique la construc-
tion de
la relation pr~dica~ive se trouve d~cal~e vers
le plan
métalinguistique.
L'~nonciateur manipule déjà des entit~s gram-
maticales:
MADE BY THE SOVIETS est rapporté
comme attribut à
un sujet grammatical,
ici, J'.!ISSILES.
De
la description d'un fait
extra-linguistique
l'~nonciateur revient parler d'un sujet gram-
matical dont i l relève une c ar ac t é r i s t i qu e . En (24")
nous avons·
encore
avancé
dans
la chronologie vers
le plan métalinguisti-
que.
Du traitement linguistique de la nomination d'une entit~
anim~e (les agents qui sont ici les Sovietiques), de la nomina-
tion d 'un
vé n erne n t
(la fabrication des missiles),
SOVIT~T-I\\'!ADE
é
devient d
t e r-m n arrt de l\\IISSILES.
La situation peut être ainsi
é
â
sch~matisée :
PLAN
PLAN
EXTRA-LING.
1
EXTRA-LING
1(r)
: 1
! (II) ESSILES~
I_V1A_D_~ H by THE SOVIETS· (1)l
MISSI"V (II)
PLAN
PLAN
H BTA- LING . - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
jvj]'.,vrA - LI NG •

-
80 -
Les grandes fl~ches ~ double orientation symbolisent la relation
entre l'extra-linguistique et
le méta-linguistique;
les petites
flèches représenteront toujours dans la suite du travail
la gra-
dation de cette relation. Happelons que
l ' u t i l i t é théorique de
la gradation,
d'un point de vue de
linguistique générale,
est
qu'elle permet de contr51er efficacement
les interférences tou-
jours possibles entre les deux plans
extr~mes. On n'exigera pas
d'un modèle linguistique qu'il observe la gradation méta-linguis-
tique
(Phase l
- ? Phase
II);
l'essentiel est de ne pas perdre
de vue que
les deux plans sont décalés. Et
l'on se rend d'ail-
leurs compte que,
lorsque cette distinction est observée,
le
métalangage gagne en précision,
en clarté et
surtout en cohéren-
ce.
L'on évite ainsi de parler indistinctement de "sujet-agent"
-
deux notions relevant de domaines contraires - comme c'est le
cas,
ici,
de SOVIET dans la structuration de
(24)
et
(24").
On aura remarqué aussi,
toujours dans le schéma de la pa-
ge précédente,
que les interfaces ne sont pas instanciés par
les m~mes indicateurs relationnels. Dans le troisième énoncé
(t.rois'ième étape relationnelle). A
symbolisera toujours une re-
lation non d~passée, une relation nouvelle,
en tous
cas par rap-
port ~
~ qui date, lui, une relation ancienne(l).
La distinction "claire et nette" entre extra-linguistique
et méta-linguistique,
la successivité obligpe dans
la survenan-
ce des événements linguistiques dp.bouchent sur cet autre fait
(1) Nous empruntons ces symboles à H. Adamczewski

-
81
de
linguistique
générale,
que
los
unité~
constitutives
de
l'énonc?
n'appartiennent
pas
au m~me niveau.
On
sait que
la
chaine
parlée
ou écrite "impose un ordre
linéaire donc
"unidimen-
tionnel".
C'est
ainsi
que
dans
(25)
(25)
I f a
young woman of twenty-four marries
a
man cLose
on to
o ighty,
i t ':3
r'AIRLY
OBVIOUS
tha t
she is marrying him
Îor his money.
(emprllntp
a
BJ~-ING, p. 107)
FAIRLY
OBVIOUS précèd~ la proposition nominalisée.
Au
nom du
principe de
datation FAIRLY
OBVIOUS
qui
est
indiscutablement unê
appré cia t io nt
intervi ent en tant
qu 1 évé nement
l ingtii st ique,
APRI~S l'pvénement linguistique antérieur q u t os t la structuration
de
la proposition introduite
par TIIAT.
En clair,
la proposition
en TIIAT s ' é t a l e
sur
la
chaine
linéaire,
J"AIHLY
OBVIOUS
se situe,
lui,
sur une
autre
chaine
linéaire,
mais
une châîne
li-néai-reâbs-
t r a i t e .
La
f'o r-ma l ts a t i o n
étant
le meilleur moyen de
contrôler
le
travai l
du
linguiste,
}J.
Ad am c z ew s k i,
présente
11" S
l·'ATRLY
ODVIOUS
comme dominant
la structure prédicative (1):
. chaine
linéaire abstrai te - - - - - - - - - - - - - - - - - I I T 1 S
FAIRLY
OBVIOU~
that
chaine
linéaire
l S
marryine him
for
his mone
( 1)
1\\1.
impor t e
de
sou ligner que
IT' S
F'AIRLY
OBVIOUS
n'es t
pas
en Phase
I I i
i l
indique
que
la relation sur
laquelle
i l
porte
est
en Phase
I I .
Nous y
reviendrons
en analysant
le
fonctionne-
ment
des
adjectifs m~talinguistiques.

82
-
Une telle formalisation r~sume a
elle seule
la conception mlta-
opérationnelle cie
la grammaire:
une grammaire c'est avant
tout
cles lŒLATIONS et cles OPEI{ATIONS sur cles relations,,(l).
On sait aussi,
empiriquement,
que selon leur mocle cie
r~f~-
renciation,
les unités figurant
sur la chaîne
linéaire
"orclinai-
re" gardent des affinités plus ou moins prononcées avec
l'extra-
linguistique.
Celles qui relèvent de
la chaîne
lin6aire abstrai-
te ont plus rapport avec
le plan méta-linguistiqe
(e.g.
DO,
CAN,
BE-ING,
déterminants . . . )
Ce
sont cI'ailleurs des
symboles de rela-
tion.
*
* *
La relation est une réalité abstraite.
Elle ne
l'est pas
moins
lorsqu'elle est exprimée concrètement dans
le plan linguis-
tique.
Aussi
les anciens de Port-Royal considéraient-ils que
dans
la phrase
'La terre est roncle'
la liaison entre
les deux
termes
(H') est proprement l'action de notre esprit,,(2).
La langue est aussi une abstraction.
L'on comprend ais~-
ment que pour app~ocher son fonctionnement
le plus près possible,
i l faille
se prémunir d'outils d'anFllyse suffisamment abstraits
comme
le concept de relation .
.. .... -........... - -. -- .. --- .. - - ........
( 1)
G LA,
1982,
p.
J 7
(2)
A.
AHNAULT s. C.
LANCI~I-OT :Grammaire générale et raisonnée
de Port-Roval,1660,
réed.
R~~ublications Paulet,
1969,
p.
r J

- 8J -
La Relation est le dénominateur commun à
toutes
les struc-
tures linguistiques
(phonologiques,
syntaxiques,
discursives ••• );
elle est au coeur du système.
En un mot,
la Relation peut être
considérée comme
l'INVARIANT dans
l'approche générale du langage.
Bitir son modèle th~orique sur ce concept,
c'est se dater
d'un pouvoir explicatif généralisant.
Cela légitime du même coup toute entreprise visant ~ cher-
cher dans
l'énoncé
la Relation sous ses configurations les plus
diverses,
qu'elle apparaisse sous le revêtement d'un morphème
grammatical ou même lexical,
ou qu'elle n'existe qu'à l'état
de trace.
Les morphèmes "classificatoires" du senoufo,
par exemple,
à
l'origine des effets sémantiques
les plus curieux après la
phase de structuration,
se révèlent être des symboles méta-lin-
guistiques de relation.
C'est,
peut-être seulement,
en tant que
tel que leus. système peut devenir comp~éhensible. Et si c'est
en tant qu'opérateurs relationnels q'u o ces morphèmes "classifi-
ca toires" deviennent irite lligi b les,
CI~ sera une preuve supp lé-
menatire que la Relation se dédouble pour instancier,
d'une part,
les rapports câtégorielsentre les éléments du système de
la lan-
gue,et,
d'autre part,
pour devenir un outil d'analyse aux mains
du linguiste.

1
1
i
:
CHA P I T H. E
I I :
CONTRIBUTION A UNE ETUDE m:s LA RELATION NmUNALE
(fonctionnement méta~9pérationnel du marqueur nominal en senoufo)

-
85 -
A la question de savoir s ' i l existe des articles en
senoufo on peut toujours répondre que certains morphèmes
jouent
un rôle à peu près identique et s'en tenir là. Mais lorsque l'on
considère un système
linguistique,
ce qui importe c'est,
non
pas
la présence de telle ou telle forme,
mais plutôt ses vir-
tualités métaopérationnelles dans
le système linguistique con-
sidéré. I l s'agit donc de voir en senoufo comment ces morphèmes
o pè r-errttd a ns
le domaine nominal p
et surtout comment,
en accord
avec les autres procédés linguistiques (morphologie,
tonologie ••• )
ils fournissent des indications sur le statut des noms sur les-
quels ils portent.
En quoi une étude du système de
"détermination" en senou:f.o
peut-elle ~tre intéressante pour la linguistique anglaise ou
la linguistique en général?
L'intérêt de notre analyse est
d'abord qu'elle propose une approche nouvelle des opérateurs
en question.
Nous dépassons résolument ce stade de la descrip-
tion des
langues où les opérateurs sont identifiés comme "affixes"
pour rechercher leurs potentialités fonctionnelles dans diverses
opérations.
L'intérêt réside aussi dans
le double objectif qu'elle~se
fixê:
les·problèmes seront posés en termes d'opérations,
donc
en termes de mises en relation.
Si
l'étude fournit un début de
solution intelligible au problème du marqueur nominal,
ce sera
une preuve de
la validité de notre cadre théorique,
ta ·preuve

- 86 -
gue le pouvoir explicatif de la grammaire méta-opérationnelle
transcende les différences entre systèmes linguistgiues-appar-
tenant à des familles de langues fort éloignées et que,
par
conséquent,
elle est d'un apport certain à
la théorie linguis-
tique en général.
Enfin,
en comparant plusieurs systèmes
linguistiques nous
partons de
l 'hypothèse que les moyens
uti lisés
ici et
là pour
mener à bien la même opération de détermination peuvent être
très différents. Aussi
l'analyse d'une langue qui ne comporte
pas d'articles en tant que tels infirmera ou confirmera-t-elle
ce qui a
été dit ou écrit à propos des articles en anglais et
en français(l) •
Nous avons dG reconsidérer les outils de description des
opérateurs du nom senoufo.
Cette démarche n'a pas été dictée
par un simple désir de
"faire un genre à part";;notre concep-
tion du fonctionnement des opérateurs du nom -
au fond,
notre
cadre théorique -
nous imposait un ré-ajustement
terminologi....
que.
La tràdi tion.~"a parlé de "morphèmes de
classes" ou tout
simplement de
"classificateurs".
Les étiquettes traduisent
assez fidèlement une tendance à
limiter l'analyse aux
taxinomies,
à
l'établissement plus ou moins
cohérent~ de listes de noms.
Certains
linguistes comme M.
Houis ont senti
la nécessi-
té de re-am~nager le fonds terminologique. M. Houis préfère
(1)
L'hypothèse a été formulée par H. Adamczewski
lors du sé-
minaire de DEA 03/03/
1984. Pour déterminer la valeur centra-
le d'un opérateur comme
l'article,
l'idéal serait de se tour-
ner vers des
langues qui n'ont
justement pas d'articles.
Les
moyens engagés par de telles langues pour parer au "manque"
d'article seront autant d'indices sur le fonctionnement des
opérateurs de détermination en général.

- 87 -
parler de
"nominants";
i l y
a
là une volonté réelle de recon-
naître aux "morphèmes" en question un rôle dynamique en struc-
turation. Mais
"nominant" n'est pas assez explicite.
Les opé-
rateurs du nom ne font pas que nommer certains signifiants com-
me des noms;
ils ne font pas que nominaliser des notions. M. Houis
passe notamment sous silence le côté méta-linguistique des mor-
phèmes:
tout en participant à
la structuration du signifiant
nominal,
ils
"parlent" de son statut.
Le moment venu,
nous pro-
poserons un métaterme
jugé plus adéquat.
Dans
la description des
"langues à
classes" i l est souvent
"
1
fait usage de la notion de
"genre".
Le genre correspond à une
~
réalité bien précise qui n'a rien à voir avec
l'organisation
i
,
du système nominal du senoufo. Pour toutes
ces raisons~- nous
1
,
y
reviendrons -
nous opterons pour une dénomination moins con-
1
traignante et moins parasitée parce qu'elle présente
l'avanta-
ge d'être neutre:
les noms du senoufo sont repartis en 5 GROU-
PES et non en 5 genres.
Dans l ' é t a t actuel des recherches sur les
langues afri-
caines,
les analyses passent toujours par l'étude phonologique.
Il ne s'agira pas,
pour nous,de procéder à une description pho-
nologique exhaustive; nous donnons en annexe certaines indica-
tions sur le système
phonologique
à partir de certains
essais
de description du senoufo.
Ce serait d'ailleurs une
entorse méthodologique que de se lancer dans une étude phono-
logique du système nominal,et
lui seul.
Comment prétendre en
effectuer l'étude,alors qu'il ne représente qu'un sous-système

-
88 -
~.
de
la langue ?
N'est-il pas admis que dans
la
langue "tout se
tient" ?
Ce
serait,
en réalité,
pécher par atomisme. Bref,
r
1
notre objectif n'est pas une approche morphologique du nom;
1
i l s'agit,
au contraire,
de relier,
dans
la mesure du possible,
la morphologie aux
opérations structurales et énonciatives.
Voilà pourquoi
les opérateurs du nom senoufo et
les articles
anglais seront analysés en tant gue traces dans
les
énoncés.
Mais avant de proposer une
solution méta-opérationnelle
du fonctionnement des marques nominales du senoufo,
nous ferons
un survol
critique de quelques analyses
sur
la détermination
dans les
"langues à
classes":
c'est
la problématique de
la no-
tion de classification.

- 89 -
,
,
~,
A)
PHOBLEMATIQUE DE LA CLASSIFICATION NOf-'lINALE
1)
La classification est-elle un problème
linguistique?
1
I l va de soi que
la position de n'importe quel problème
de recherche reflète,
d'une certaine manière,
l'esprit des
1
1
courants th~oriques d'une époque. En ce qui concerne "les clas-
1
sificateurs",
on s'est d'abord demand~ s ' i l s constituaient vrai-
ment un problème m~ritant d'être soumis à
la
linguistique.
C'est
ce qui transparaît dans
l'introduction de G. Manessy sur "la
classification nominale dans
les
langues
négro-africaines"
1
"
i l est postul~ implicitement ou explicite-
~.
ment que cette institution
lla classification]
n'est pas proprement
linguistique,
mais r~sulte
de
la transposition dans
le domaine du langage
d'une
"logique" que l'on tient pour caract~ris­
tique d'une "race"
(de
la race noire,
pensait
Lepsius)
ou d'un certain état de civilisation,
selon l'hypothèse prudemment avanc~e par M. Delafosse,,(l)
Ainsi on reconnaît
l'existence du problème mais i l est posé en
termes plus ethnologiques que
linguistiques. Rappelons que
l'~tude de M. DelaÎosse que cite G. Manessy date de 1902 et
que M.
Delafosse est
lui-même sociologue.
En tout
cas la probléma-
matique,
telle qu'elle est formul~e, trahit une volonté Îorce-
née de recherche d'un certain exotisme •••
Cette conception très peu
linguistique a
pr~valu pendant
près d'un siècle;
i l faut donc saluer l'attitude de G. 1'Ianessy
(1) G. ~lANESSY : "Observations sur la classification dans les
langues n~gro-africaines du Soudan et de la Guin~e" in Bulletin
de sociolinguistique,
57, l, Paris, 1962, p. 126

- 9°
lorsqu'il
consent à
s'attaquer à
"ce curieux procédé d'organi-
sation du vocabulaire"
(sic).
Mime s ' i l ne
se d~marque pas
fondamentalement des positions antérieures,
i l reconnaît au
moins qu'il s'agit d'un problème
linguistique.
L'essentiel de
l'étude est
un survol panoramique d'un cer-
tain nombre de
la~gues voltaïques dont le senoufo.
G. Man e s sy
constate que
le système de classification est
en nette dégrada-
tion et a même disparu de certaines
langues ..•
Comme
les autres
linguistes,
i l constate l'existence d'un rapport entre
les mor-
phèmes
classificateurs et
les pronoms;
comme eux,
i l ne
justi-
l
fiera pas
l'identité de forme
entre
les deux classes grammati-
cales
(opérateurs du nom et formes anaphoriques). G. Manessy
1
ne peut
le faire
puisqu'il énumère des syntagmes isolés et sem-
ble convaincu que ses classificateurs forment
une classe gram-
maticale à
part
"La c lassifica tion nomina le est
c onrnne
comme une
sorte "d'institution",
comme un système clos et
autonome
( •.• ) distinct des autres éléments de
la
langue où sa présence est
constatée et donc sus-
ceptible d'être étudié en lui-mime et pour l:=ême,,(l)
(nous
soulignons)
Avec de tels présupposés théoriques i l est évident que,
pour
une
langue donnée,
i l sera question,
non pas de décrire
le
fonctionnement des opérateurs,
mais plut5t de
chercher à
les
identifier en tant que formes.
(1) G. HANESSY
:
op.
cita
p.126

2)
La notion de classification:
le
cas du senoufo
A chaque fois qu'il est question d'une
langue dite Il'a
classes",
les
linguistes s'attachent R déterminer entre autres
phénomènes
le nombre de genres;
la valeur référentielle des genres;
-la corrélation
singulier/pluriel .•.
Les m~mes linguist~s s'enlisent dans
leurs analyses dès qu'à
un moment donné,
ils commencent à
se demander ce à quoi corres-
pondent
les genres
encore ce que représentent
les classifi-
1 0 u
cations.
Le genre correspond-il à un regroupement
formel des
noms,
c'est-à-dire,
est-il un phénomène intra-linguistigue ou
bien,
correspond-il à une répartition des notions nominales
en rapport avec
l'organisation du cosmos telle qu'elle est ap-
préhendée par les
locuteurs de
la langue;
bref,
s'agit-il d'une
répartition en rapport avec
l'extra-linguistique?
Bien enten-
du,
la question n'est
jamais poséee aussi
explicitement. Pour-
tant,
la réponse à
cette question est déterminante pour tout
ce qui peut
~tre dit des op~rateurs du nom dans les "langues à
classes".
Avant de tenter de répondre à
la question i l faut,
bien évidemment, : se
la poser et pour la poser correctement i l
faut que
la théorie du modèle ait une position très
claire sur
la distinction entre
l'extra-linguistique et
le
linguistique.
Malheureusement,
ce n'est
pas toujours
le cas •.•

-
92 -
Certaines de ces
langues auraient pour caractéristique
de
classer les noms selon
la forme
des objets qu'ils nomment(l).
D'autres systèmes classificatoires
ce serait
le
cas du wolof
-
s'articuleraient sur
l'opposition
proximité/éloignement.
D'autres encore feraient
intervenir le critère de
"taille".
I l s'àgit,
on
le voit,
de critères bien peu
linguistiques.
Nous
y
reviendrons avec certaines études faites
sur le senoufo.
Dans
l'étude de ces
langues en question,
c'est une priori-

incontournable que de chercher à savoir le nombre des mor-
phèmes
classificatoires.
A en croire P. Boutin,
le senoufo
comp-
terait
8
(huit)
morphèmes de classe repartis
en 5 (cinq) genres.
En simplifiant,
leur système peut être représenté ainsi
:
Sg
Pl
r
(1)
wu
(2) bulv
I I
(3 )
gu
(4) yu
III
(5 )
lu
(6) gulu
IV
(7) ru
Ir
(8) mu
(2 )
(1)
le haoussa?
(2)
D'après
l~ "schéma graphique des classes ,du ~odonon"
extrai t
de Elements pour un e
systpmatlgue du fodonon,
parler senoufo du nord de
la Côte-d'Ivoire,
DEA,
Paris III
INALCO,
1981,
p.
!~2 (non publié).

-
<;') -
Dan~ de tels tableaux on fait g~n~ralement abstraction de la tra-
ditionnelle opposition
ind~fini/d~fini;
peut-être considère-t-
on comme allant de soi que ce concept de description
est déjà
unanimement admis.
Nous verrons
comment
P. Boutin règle la ques-
tion en un tour de phrase;
or c'est
justement par cette oppo-
sition (d~crite en
termes plus ad~quats) que le senoufo four-
nit une foule de renseignements
sur le ph~nomène de la d~termi-
nation et sur le d~calage des ~tapes structurales.
Ce qui
semble s~duire les linguistes dans l'analyse des
"classificateurs",
c'est,
sans contexte,
la corr~lation Sg/Pl
et à
ce propos, la disposition des num~ros dans
le tableau de
la page pr~c~dente n'est pas faite au hasard. En linguistique
africaine,
une convention ~tablit que les numéros pairs ~ti-
quettent les
classificateurs du pluriel
et les num~ros im-
pairs,
ceux du
singulier.
Le
genre IV
et le genre
V,
souligne P. Boutin,
sont
"hors corr~lation de nombre". Ce qui doit
logiquement d~router
le
lecteur,
c'est que les genres
en question ont leurs classi-
ficateurs dûment num~rot~s. Une lecture coh~rente du tableau
amène donc à
penser que
la corr~lation Sg/Pl est ainsi recon-
duite à
travers
les num~ros (7) et
(8). Dans ce cas il y aurait
in~vitablement contre-sens puisque le classificateur /rv/ est
dot~ d'un numero impair,
symbole.du singulier
et,
plus
loin,
on apprendra de P. Boutin que /rv/
repr~sente un "pluriel col-
lectif".
I l en est d~ même de /mv/ qui,
avec son num~ro pair,

impose une
lecture "pluriel"; pourtant i l sera décrit par
P. Boutin comme
le classificateur des noms abstraits.
Il Îau-
drait alors décider si un nom abstrait est du singulier ou du
pluriel.
Le moins que
l'on puisse dire,
c'est que la formali-
sation universelle
(la numérotation)
est en désaccord avec
l'analyse elle-m~me. P. Boutin a peut-~tre dn se rendre compte
de cette anomalie dans le cataloguage.
Seulement le cadre
théorique dans
lequel i l mène son analyse
l'oblige à appliqu~r
cette espèce de classification pré-établieryet qui est
censée
marcher pour toutes les
"langues à
classes".
Les Baptistes américains ne parlent pas de
"genre" mais
directement de
"noun-class". I l apparaît très explicitement
que leur classification est liée plus à
l'état des choses qu'aux
véritables
,.phénomènes linguistiques. En lisant les auteurs
de la Grammar-Lessons,
les critères de classification en senoufo
apparaissent très hétéroclites;
outre le critère de
"taille"
les critères (+)hûmain,
(+)animé,
(+)abstrait
sont mentionnés:
"For most part,
wii class-noun·is made of animaIs,
people
and borrowed
nouns from other languages,,(1)
"The kii class
is made up mostly of inanimate
objects with a
tendency to
large size,,(2)
"The I i i class is made up mostly of small objects
in the house and the country-yard.
I t also includes
some small animals,,(3).
(1) Grammar Lessons
T ebara-En lish),
Mission Baptiste de
Korhogo
Cote-d'Ivoire,
Part l,
1974,
p.
8
(2)
Ibid.
p.
14
(3)
"
p.
20

-
Cj')
_
Nous épargnons au lecteur l'énumération des
traits définitoires
des deux autres
classes de noms.
On peut déj~ se rendre compte
que
la formulation même de ces traits définitoires
(~ .• for
~,
"
'\\'
most part ••• ;
objects with a
tendancy to
large size •.. ) trahit
un manque
d'assurance
de
la part des auteurs de
la Grammar Les-
sons
même si cette grammaire,
plus que pédagogique,
se veut
un guide d'apprentissage du senoufo.
De
ces
considérations extra-linguistiques i l s'ensuit
une confusion terminologique déroutante.
L'on pose -
et pas
seulement en ce qui
concerne
le senoufo -
qu'~ l'intérieur
d'une m~me classe de noms,
les noms
partagent des propriétés
sémantico-logiques.
Seulement, ce qui
est connu sous
le nom de
"classificateur" est une réalité
formelle et tant que telle,
le morphème est susceptible de variations;
tout
comme
l ' a r t i -
cle français,
selon qu'il
est
singulier ou pluriel.
Prenons
un exemple précis et plaçons dans
le tableau
les formes nomi-
nales
avec
les morphèmes appropriés et
leurs numéros.
Les au-
teurs de
la Grammar Lessons diraient que /sibt/:livre -
appar-
tient au
"wii class-noun",
ignorant ainsi
la forme pluriel:
1
le
livre =
sibt.wi
1
sibé.bèlè
= les livres
-
- - -
I I
J
2
I I I
5
4
1
,
1
IV
7
V
-
l
8

- 96
/wi/ est
le classificateur nOl
et /bèlè/
le classificateur n o ') .
"-
En tenant
compte de
la terminologie obscure qui accompagne
la
notion de
classification des noms on aboutit
à
ce curieux pa-
radoxe que LIVRE /sibé/
qui est marqué par deux morphèmes
appartient
à deux
classes à
la fois!
Peut-on ranger dans des
casiers différents un même nom selon qu'il
est
au singulier
ou au pluriel?
Dans de telles
conditions i l y
a des raisons
sérieuses de penser que
les classificateurs ne
classifient rien.
L'on
aura réalisé
par là même,
l'inconvénient de numéroter
des symboles aussi abstraits que
les opérateurs du nom. Voilà
aussi pourquoi nous sommes très mal à
l'aise d'entendre dire
que
le senoufo
comporte 8 morphèmes de classe.
Certaines voix se sont élevées pour dénoncer ce cafouil-
lage terminologique
"La notion de classes est opérationnelle quand
on traite des accords à l'intérieur des syntagmes
car ce sont des accords de classes. Toutefois
la réalité de genre domine
celle de classe.
( ••• )
C'est pourquoi
la désignation par "langues à
classes" nous paraît incomplète;
celle de
"lan-
gues à genres multiples" lui est préférable,,(1).
avec ce ré-ajustement
terminologique nous savons maintenant
que les classificateurs sont un sous-système d'unités formel-
les à
l'intérieur des
sous-ensembles appel~s "genres".
La principale innovation introduite par P. Boutin une
dizaine d'années après
la Grammar Lessons est due,
de façon
(1) l-l , HOUIS
:
"Plan de description systématique des
langues
négro-africaines" in Afrique et Langage,
1er semestre 1977,
p. 29

- 97 -
générale,
à une approche plus scientifique des
langues africai-
nes.
Par delà
la classification,
on s'intéresse aux compo-
santes du signifiant nominal.
En ce qui
concerne ce signifiant
nominal en senoufo,
on a
réussi à
déterminer qu'il est
composé
d'une base
lexématique et d'un morphème grammatical.
La base
peut,
quant à
elle,
être de nature verbale ou de nature nominale;
on pent veni~
la notion de
structuration~mais i l reste encore à
voir si
ce n'est pas seulement une description de
la langue se-
lon une perspective
structurale
classique.
On peut parler de
structure mais
lorsque
l'énonciateur n'y est pas associé
cela
signifie que
la notion d'opération n'est pas encore bien assi-
se dans
la théorie du modèle •••
1
Mais
sans doute
la mise en garde de M.
Houis n'a-t-elle
pas p.té
suffisamment explicite.
En
tout
cas P.
Boutin retour-
ne chercher des
"valeurs sémiotiques" aux genres qu'il a
déga-
gés, rejoignant
ainsi
les points de vue de
la Grammar Lessons;
à preuve,
le tableau récapitulatif qu'il propose
Valeur sémiotique de genres
~~-~._ .. _._---------_._--~-.,-_.~-------------~
Bases nomi na l es
Bases verbo-nominales
"humain" et emprunts
"actatif"
(celui qui
)
II
"augmenta ti f"
"concré tif"
(action de
)
1[1
"diminutif"
"actualisant" (acte de
..... )
IV
"collectif"
"répétitif"
(actes répétés de
V
"global i s a nt"
"abstractif"
(fai t de ..... )
(1)
I",
DUUTIN
"Rel.a t Lo n s
de dftermin;:'ltion en fodonon
(parler
s e rio u f o de
la n~gion cie Dikodougou, Côte-d 1 Ivoire)" in A.fri(Jue
et
L~an{;age,
1(-\\,
:':ème semestre,
l:)~;~·',
p.
~-;

- 98 -
Nous reviendrons
très
souvent
sur ce
tableau;
pour le moment,
j,
en parcourant
"les valeurs
s~miotiques, i l parait curieux que,
dans un même genre,
les valeurs
sémiotiques
soient aussi diff~-
rentes
selon que
la base
lexicale
est
de nature verbale ou
est
de nature nominale.
I l
parait
tout
aussi
curieux que dans
le genre II,
par exemple,
la valeur sémiotique soit
"augmenta-
tif"
quand
la base
lexicale est nominale
et que
cette valeur
devienne
"concrétif" quand
la forme
lex~matique est "\\Ierbale.
Toujours dans
le paradigme des bases
"verbo-nominales
(de droi-
te),
à
supposer que
le verbe exprime une action,
quelle distinc-
tion sérieuse peut-on faire
entre
"action de •.. ",
'acte de . . . "
et
' f a i t de ••• " ?
Surtout s ' i l
s'agit,
non pas du fait m~ta-
linguistique(l)
mais du fait
extra_linguistique?
Par ailleurs)une observation plus attentive des bases
verbo-nominales nous permettra de voir que
celles-ci
sont pro-
mues au rang
de
signifiant nominal dans des
conditions m~ta-
p~rationnelles très sp~cifiques.
Revenons maintenant
sur
la moiti~ gauche du tableau.
Plu-
sieurs raisons nous ont amené
à ~viter,
autant que possible,
le terme de genre.
D'abord quand on parle de genre en français
ou en anglais
c'est pour reférer à
l'opposition masculin/f~minin
avec,
parfois,
un genre intermédiaire,
le genre neutre.
C'est
dire que
chacun de
ces genres
se définit par rapport aux autres:
i l s forment un système.
En outre,
un nom est
toujours du même
(1)
Le fait
(m~ta}linguistique est synonyme d'~vénement (méta)-
linguistique:
voir P.
et
C.
KYPAHSKY
"Facts" in Semantics,
Steinberg & Jakobovits,
Cambrigde University Press,
1971.
Encore que
les auteurs ne fassent
pas
clairement
la distinction
entre
le fait
linguistique et
le fait
extra-linguistique.

- 99 -
genre
(si
l'on exclut
les changements intervenus sur de
longues
périodes).
I l n'y a
pas une telle systématique dans
les genres dé-
gagés par P.
Boutin.
La particularité essentielle du système
nominal senoufo est
la possibilité d'5ter à un nom son classi-
~icateur pour ensuite lui:appliquer le classificateur dévolu
à un autre groupe de noms. Pour parler en termes de genres,
cela correspondrait à faire
changer un nom de genre. Une telle
opération n'est pas envisageable dans
les
langues où la catégo-
rie du genre existe effectivement.
1
• Remarques sur les
classificateurs à
effets majorants
et à
effets minorants
Ce qui semble conforter les auteurs des valeurs sémanti-
ques dues aux morphèmes de
cLasse,
c'est qu'il y
a,
chez les
locuteurs,
une
connaissance
latente du groupe d'appartenance
d'un nom donné;
i l sait aussi qu'en transposant ce nom dans un
autre groupe de noms,
i l peu~ obtenir certains effets discur-
sifs.
Soit /n~.wV (un homme), du genre 1. Appliquons lui tour
à
tour les classificateurs des genres II et III
mJ
séé
.i,
16
nà'~g~

na
you /
capacity /
be
/(interro)the man /
thi~/
on
/your capacity is i t on this man? 1
Can you
defeat
that brute of a man?

-
100
-
m2'
dàà
n
ni
à
'

y a.î a
16
l i
m::>...
you/(pred)/
the man
/
let
/(interro)/ he/you/ defeat
/Are you accepting that this
l i t t l e man defeat you ?/
Can vou admit that this DwARF is
stronger than you ?
La substitution des classificateurs /-gi/ puis / - l i ou -nif ~
/-wi/ produit un effet majorant
en (1)
et un effet minorant
en (1').
Ce n'est,
bien
A
sur,
pas
la véritable taille des indi-
vidus qui est en cause.
C'est une forme de quantification du
signifié
HOMME qui débouche sur des effets appréciatifs.
Un moyen de saisir la valeur~centrale d'un opérateur con-
siste ~ synthétiser l'ense~ble des effets résultant de ses di-
verses occurrences.
Un autre consiste ~ remonter en diachronie
pour tenter de retrouver ce que fut
cet opérateur ~ un certain
moment du passé de
la langue. Dans ce dernier cas,
i l faut
se
tourner vers
les anciens écrits et ils sont
tout
simplement
inexistants en senoufo,
les premiers textes écrits se situant
vers
les années
1960.
Nous nous en remettons alors ~ la structure phonologique
des deux classificateurs des genres II et III que nous rappro-
cherons d'autres éléments sémantiques existants.
Le morphème
à
effet majorant
(du genre II)
est /~?v/, /-gv/ ou /-gi/; il
est à
rapprocher de /kpJ?::>/
'gros ~,
'grossir'.
Celui qui produit
l'effet minorant
(du genre III)
est
/-lv/,
/-nv/,
/-Li/ ou/-nif. De par sa forme,
nous
le rappro-
cherons de /pilè/
'âme',
'graine',
'petit' •.•
Les deux éléments ont en commun le sème de
' t a i l l e '
ou
mieux,
celui de
'quantité'. Par subduction morphologique les

-
1 () 1
dernières syllabes des deux lexèmes ont été
retenues comme mor-
phèmes grammaticaux. Dans
l'état actuel du senoufo,
ils reac-
tivent,
à
l'occasion,
les
sèmes de quantité. Que la quantifica-
tion du signifié du nom débouche parfois
sur un effet apprécia-
t i f
(qualification)
n'a rien de surprenant. Quantification et
qualification sont,
à un niveau abstrait,
deux variantes de
la même catégorie logique.
Ces caractéristiques du senoufo
montrent qu'il est diffici-
le,
voire impossible,
de déterminer des valeurs sémantiques
fiables aux morphèmes de classes ou aux genres.
Dans l'état
actuel de la langue,
les morphèmes répartissent effectivement
l'ensemble des substantifs en 5 (cinq)
GROUPES mais i l s'agit
d'une repartition aussi formelle que
la répartition des verbes
français
en 1er,
2ème et Jème groupe. Et
si c'est à partir de
ce regroupement formel des substantifs
senoufo que l'on a été
amené à parler de
-genre",
i l convient de prendre le métaterme
avec toutes
les précautions d'usage.
I l s'agit,
en réalité,
d'un .'-' emprunt mé ta langagier" fort
peu heureux. Par ailleurs si
le signifiant nominal du senoufo doit
être confronté à
ceux
d'autres systèmes
linguistiques,
ce n'est
certainement pas à
partir des répartitions en groupes ou en genres qu'il faut
cher-
cher les différences
et
les similitudes possibles.
I l semble
beaucoup plus intéressant et certainement plus rentable de cher-
cher à
connaitre le r51e
joué par les classificateurs senoufo
dans
la structuration des programmes
s~miques nominaux et,
en
ce qui concerne l'anglais ou
le français
voir aussi
l'action
7de

102
-
des déterminant-articles sur les notions nominales.En un mot,
pour approcher la réalité des
choses,
i l semble plus à propos
de rechercher
les similitudes fonctionnelles,
c'est-à~dir~méta­
opérationnelles.
Dans cette perspective,
la présence des morphèmes gram-
maticaux en question aurait pour premier rôle d'indiquer au
"sénoufoïsant" qu'une forme donnée est un signifiant nominal;
c'est
là leur fonction métalinguistique au sens lè plus banal
et c'est en tenant compte de cette première fonction que nous
parlerons de
'MARQUEUR NOMINAL'
(noté l'lN).
Les HN sont donc
ces morphèmes grammaticaux, mi.e u x , . ces' opérateurs gui répartis-
sent l'ensemble des substantifs en 5 groupes.
Vient ensuite
la fonction métalinguistique (au sens fort),
celle qui sert à déterminer,
dans
le plan énonciatif,
le statut
d'une relation nominale construite par l'énonciateur,
c'est-à-
d I r-ê,
le degré d'appropriation d'une notion nomina le par ce
dernier. Reconnaître cette virtualité aux MN,
c~est,
en même
temps leur reconnaître le statut de m'ta-opérateur.
Mais i l n6us faut d'abord terminer notre survol critique
de
la notion de
classification.
~) La classification: un critère typologigue
Les MN,
a-t-on donc pensé,
classent
les noms à
l'intérieur
d'une même langue;
c'est,
en quelque sorte,
une typologie inter-
ne. Mais
la notion de
classification est surtout
intervenue

lOJ
comme un des paramètres déterminants dans
la typologie
linguis-
tique. Dans ses
"Propostions pour une typologie·des
langues
négro-africaines"
M.
Houis prend en compte un certain nombre
de traits et parmi
"les traits qui
se sont
imposés comme les
plus pertinents figure
la présence d'un système de classes".
C'est d'ailleurs
le critère N°l.
L'expérience montre que
les études typologiques tiennent
rarement
compte des opérations abstraites.
On passe en revue
les différents faits de
langue sans réellement
montrer leurs
corrélations.
L'explication des phénomènes,
leur justification
font
souvent défaut.
En un mot,
i l est
très
souvent question
de décrire
les formes de surface.
M.
Houis
le reconnaît d'ail-
leurs
"La typologie est étroitement
liée à la linguis-
tique descriptive,,(l).
Les essais de typologie sont des projets de recherche ambitieux
puisqu'ils supposent
la prise en compte de plusieurs familles
de
langues. Mais
ceux qui entreprennent de tels travaux doivent
s'attendre,
en retour,
à
ce que
leurs
méthodes ne rencontrent
pas toujours
l'adhésion des autres chercheurs.
En effet,
on
éprouve à chaque fois un sentiment de frustration devant
la
faible quantité d'informations données sur chaque langue ..•
Ainsi,
pour quelqu'un qui s'intéresserait à
la classifi-
cation,
à
l'issue de
l'étude de
M.
Houis,
i l retiendrait que
(1) M.
HOUIS:
"Propositions pour une typologie des langues
négro-africaines" in Afrique et
Langage,
13,
1980,
p.
5

certaines
langues africaines
se particularisent par la présen-
ce de morphèmes de classes dans
leur
système
nQ)minab,
par
opposition aux langues dites
"économiques"
(e.g.
langues akan)
dont
le système nominal est organisé différemment.
Des premières citées,
certaines présentent
leurs morphè-
mes de classes sous forme de préfixes
(majorité des langues
bantou),
alors que
les autres ont
leurs morphèmes de classes
sùffixés
(langues voltaïques dont
le senoufo).
Mais
l'objet de l'article de
M.
Houis n'était pas,
à
proprement parler,
le fonctionnement des classificateurs. De
la fonction de ces opérateurs,
i l en est question très impli-
citement lorsqu'il donne la structure générale de
l'énoncé dans
les
langues africaines.
M.
Houis
commence par définir ce qu'il
entend par "constituant syntaxique"
"Un syntagme n'est pas un groupement de monèmes
mais essentiellement un groupement
de constituants
syntaxiques
( ••. ) I l va de soi que l'association
d'un morphème nominant
(ex.
type article)
et d'une
base
lexicale ne donne pas un syntagme mais un
constituant,,(l)
On notera que M.
Houis a une conception très particulière et
surtout très restrictive de la notion de syntagme. Nous
l'avons
déjà souligné ailleurs. Mais si M.
Houis s'entoure de tout ce
dispositif de définitions,
c'est en prévision de
l'opposition
entre syntagme et nom composé
qui
sont,
pour nous,
le produit
de
la m~me opération,
la diff~rence se situant au niveau du
(1) 1'1. HOUIS:
op.
cit.
p.
6

10') -
( +-)
,
statut
thematique de
la mise en relation qui préside à
leur
construction.
Nous y
reviendrons au chapitre suivant.
De
la définition de
M.
Houis,
retenons pour le moment
ce qui est dit de l'opérateur du nom:
une base lexicale et un
morphème s'associent pour marquer une fonction syntaxique.
Ce
que nous ne savons toujours pas,
c'est
la nature de
la relation
entre la base lexicale et
le morphème que
l'on identifiera ici
au MN; gue signifie cette mise en relation par rapport à
la
construction du sens qui est,
après tout,
la finalité des mises
en relation?
Dire que
l'association d'une base
lexicale et
du MN donne un constituant syntaxique est vrai;
c'est le côté
forme de
la mini-structure,
l'illustration du phénomène syntaxi-
que. Mais que représente la construction de cette relation d'un
point de vue sémantico-syntaxique ?
Continuons de traquer le MN et arrêtons-nous encore sur
cette autre analyse de
M. Houis.
Elle s e
rapporte à
la déri-
vation,
toujours dans
les
langues africaines.
La nature ~u MN
se précise de plus en plus,puisque cette fois,
i l est présenté
comme
"constituant nécessaire".,:
"Le constituant syntaxique comprend nécessaire-
ment une base
lexicale et un morphème.
Celui-ci
est du tyre des nominants si
le constituant est
un nom" ( 1
(nous soulignons)
(1) M.
HOUIS:
"De
la dérivation à
travers quelques
langues
africaines" in Modèles
linguistiques,
Li lle,
1982,
p.
50
Rappelons
que dans
la tenninologie. de
}L
Houis,
'nominant'
est ce que
les autres
linguistes appellent
'classificateur'
et que nous désignons par MN.

-
106
-
Traduisons:
le nom est
obtenu par association d'une base
lexi-
cale et d'un MN;
le schéma de
M.
Houis
est
sur ce point plus
complet.
Nous y
soulignons ce qui nous intéresse dans
le
cadre
de
l'analyse
nominnnts
NOM
lexème +
(ndérivatifs)
~
prédicatifs
VEHBE
verbaux
La définition de
M.
Houis renforcée par ce schéma se veut gé-
néralisante.
Cette structure abstraite du nom vaut
pour une
majorité de
langues africaines.
Ainsi,
à propos du
baoulé
qui n'a pas,
en surface,
de MN,
on dira que
le nom comporte
une base
lexicale ~-un MN ~
(zéro sériel). Mais
la principale
lacune de
l'analyse est qu'elle reste au niveau de
l'observa-
ble,
du distinctif,et au stnde du distinctif i l est difficile
de prévoir
dans la théorie du modèle
de
la place à un certain
dynanisme,
ce dynamisme qui
est
la condition de
l'?mergence du
constituant syntaxique.
D.
Creissels semble avoir senti ce
cô-
té dynamique qui sous-tend l'émergence des énoncés en généra 1;
i l parle de
"mise en forme"
"Le consti tuant
syntaxique est non pas
le signe
linguistique mais
le signe
linguistique tel gu'il
est mis
en forme
pour assumer un terme dans énoncé,,(l)
(nous
soulignons)
Soulignons
aussi
que
ce qui
est volontairement ou non pnssé
sous silence,
c'est
la face signifiante du
constituant.
(1) D. CRlnSSELS: Unités et catégories grammntica les, Uri i.v ,
lan-
gues et
lettres de Grenoble,
1977,
p.
71

107 -
L'association d 'un lex~me et d'un morph~me chez
M.
Houis,
la
mise en forme
chez D.
Creisseils sont des procédés tous guidés
par le
A
rneme but:
la structuration du sens et D.
Creissels au-
rait dG aller jusqu'au bout de
ses
intuitions.
Puisqu'il parle
de
"mise en forme",
i l aurait dG poser plus explicitement
l'exis-
tence de
l'agent de ces mises en formes,
c'est-à-dire
l'énoncia-
teur.
La prise en compte de
ces
deux réalités
(face signifiante du
constituant
syntaxique et agent des structurations)
rend bien
compte du dynamisme à
la base de toute production du sens.
Nous
dépassons ainsi le stade des descriptions formelles.
En termes
d'opérations,
la base
lexicale d'une part,
et
le MN d'autre
part, sont,
aux mains de
l'énonciateur,
des matériaux de struc-
turation du sens.
I l convient maintenant de voir de plus pr~s, dans ce pro-
cessus de structuration ,
le statut métaop&rationnel de
la ba-
se: lexicale et du morph~me grammatical.
~ STRUCTURATION DU NOM EN SENOUFO
UNE MISE EN RELATION
l)Le nom:
une unité
complexe
Le MN a
rapport avec ce qui est habituellement
connu sous
le nom de
"dftermination".du nom.
Sur cette question le point
de vue de
M.
Houis mérite d'être souligné
"La détermination est un processus sémantique
visant a
constituer du sens par un apport de
signes à un support préalable,,(l).
(nous
soulignons)
(1) .~I. HOUIS:
"Relations de détermination e n
syntagmes et
composés nominaux" in Afrique
et Langage,
lb,
1~81, p. 5

lUt.;
-
Au-delà de cette conception de
la d~termination, nous
retenons surtout qu'il y
a
structuration de
sens
par mise en
relation de deux signes.
Mais
l'organisation du sens ne concer-
ne pas seulement
la mise
en relation d
1~1~mentss~mantiques,
de deux noms en vue de
l'obtention d'un nom composé,
par exem-
ple.
La définition de
M.
Houis
est g~n~ralisable à
l'unit~
formelle qu'est
le nom .senoufo et dont
la structure abstraite
comporte au moins deux ~léments.
Cela signifie que
"!le nom" ne
correspond pas a
la même
réalité en anglais/français
et
en senoufo.
En anglais et fran-
çais,
i l apparaît sous
"une forme"simple,,(l)alors qu'en senou-
fo
nous avons affaire à une unité déjà complexe:
(2)
mc'.? ë
à
k k
ù
na
yÉ:
à
nam:.H~/(p(red) /
/
on
/ (neg)
+
neg)
(L.S.,
août
1979,
kUba(2)/
uni té, 1 l~ 7 )
/(a)
name is not on
. Kubà does not have A NA}JE
. Kuba has no
f> NA.i"lE
NN'iE
est catalogué dans
le dictionnaire comme unité
indivisi-
ble.
L'adjonction de
'A'
serait déjà un début de structuration,
ce qui est
contraire à
l'esprit des recueils de
lexique où
doivent être
jetées les notions,
les paquets de sèrn8s,
en un
mot,
la matière à
structurer.
Tel n'est pas
le cas de /m~.?è/
...
•(a)
A
name. Heme si
les recueils
~
( 1) Une ".forme simp le", non pas phono logiquement, s'entend.
(2)
/kùbà/
est un nom de chien;
le chien est d~sign& de la sorte
à
cause de
la
couleur de' sa robe.
Kuba est à
la fois nom propre
et nom commun.

109
de
lexique senoufo(l)
l'int~grent comme tel, il est le produit
de deux éléments distincts.
Au
terme d'une
conversation où nous
lui expliquions
le fonctionnement du MN,
un ami
comparatiste
concluait:
"le nom senoufo est donné
sous forme de r0sultat,,(2).
On ne saurait vraiment mieux dire.
Dans
la traduction de
l'énon-

(2),
A NAJ"IE est un renvoi à la notion; Kuba n'a rien qui
puisse correspondre à
ce que l'on entend par
'nom'. Dans
le mê-
me
énoncé,
/mé.?ë/ n'est pas une notion au même titre que
(A) NAHE. C'est une notion qui a déjà fait
l'objet d'un certain
travai 1.
L'anglais peut se permettre de structurer une notion no-
minale sans marque de détermination en surface,
comme
le montre
cette autre traduction :
'lëuba
is
just
kuba'
Lorsque le senoufo structurera la base
lexicale simple sans
adjonction de ~lN,
ce sera dans des
conditions particulières.
Nous y
reviendrons de toute
façon.
I l nous faut maintenant
tirer les premièrs enseignements
théoriques de
la structuration du nom senoufo.
Celle-ci pose
clairement
l'existence de deux plans:
la forme anglaise NAHE
est une notion lexicale;
/mi.?;;} l'est aussi avec la diffé-
rence que cette dernière forme
suppose un AVANT de
la notion
lexicale et
l'AVANT de
la notion correspond au signe
linguis-
tique qu'est
la base
lexicale.
A ce stade i l n'y a
pas encore de
structuration;
la substance sémantique n'est pas encore
(1)
Dictionary Tyebara-~nglish /
English-Tyebara,
Missions
Baptistes,](orhogo
(Côte-d'Ivoire),
Juin 1967
(2)
Nous remercions CISSE Idriss'
pour sa
disponibilité
et sa
patience pendant nos longues heures de discuss'lon ...

1 1 ()
-
organis~e pour signifier dans une situation de communication.
Cela explique,
d'une manière générale,
que
le
locuteur ordi-
naire senoufo _. le non linguiste -
ne
soit pas ?1. même de
recon-
naître en /m~-/ une unité de sens. Cela explique également qu'il
ne puisse pas commettre cette agrammaticalité(l):
(2 ' )
-
m~.".
à
kùbà
na
ye
/(pred)
/
/ on /
(neg)
+
(neg)
?
Kuba does
not have
~
NAj'vlE
Et le fait que
le
locuteur anglais reconnaisse en
,~ NA1\\1E' une
unité
significative prouve qu'il n'y a
pas d'égalité
stricte
entre
le déterminant-article anglais
(ici ~) et le MN (ici -?~).
2)
La fonction du MN
A partir de
ce qui a
été dit
sur la complexité de
la structure
du nom senoufo l'on sent déjà se préciser la fonction du MN.
D'abord sur le plan formel,
i l a un rôle formateur puisqu'il
s'intègre à
la base
lexicale pour donner le signifiant nominal.
Du point de vue de
l'organisation du sens,
le MN agit sur l ' i l -
limitation
de
l'extension de la notion dont
la base
lexicale
est
l'expression formelle ..
Le 1'IN b lOfJue une notion lexicale
illimitée afin de rendre son programme de sens opérationnel,
de
sorte
que l'énonciateur puisse
l ' u t i l i s e r comme
objet linguistique
(1) Une étude sur l'agrammaticalité peut
s'avérer pertinente,si,
au
lieu de
rechercher vainement
les
cas d'agrammaticalité,
on
s'intéresse plutôt aux e r r e u r s u ' i l n'est
as
ossible
u'un
locuteur-natif puisse commettre.
H.
Adamczewski,
DEA 07 06
1985.

111
(nom sujet,
complément d'objet . . . ) dans
ses activités de struc-
turation.
A.Lancri rappelait
récemment
l'existence des deux plans
décalés
localisables AVANT et APHES
la restriction opérée sur
une notion :
"( . . . )
toute
limitation de
la notion nominale re-
présente une intervention de
l'énonciateur
( ••• )
et i l y a
de
ce fait
passage immédiat
sur le plan
de l'énonciation,,(l).
En ce qui
concerne
le cas qui nous intéresse ici,
/m~-/, à cau-
se de son extrême illimitation,
peut intervenir dans
la struc-
turation d'une diversité d'autres éléments
sémantiques(2).
Pour qui voi t
les phénomènes
linguistiques
s o u s
L '-espèce
v
d'opérations,
les rapprochements entre des domaines différents
et dans des
systèmes
linguistiques différents}sont
toujours
tentants. Et i l ne faut pas hésiter à
les faire
surtout s ' i l s
ont quelque pouvoir explicatif.
Nous retrouvons une profonde
simi li tude entre le i'IN du senoufo et
l'opérateur Ta de
l'anglais j
la similitude est,
bien entendu,
métaopérationnelle
"l'absence de cet opérateur dans une construction
signale que
l'on a
affaire à une notion verbale
et non pas à un prédi ca t
( . . . )
La -pr-é sence de Ta
(1)
A.
LANCHI
Contribution a une étude rnétaopérationnelle des
quantifieurs
en; français
et' en anglais,
Thèse )ème cycle,
Paris III,
1985,
p.
106
(2)
/m~-t~.?à/='renommée', /m~-pi.?~/='médisance', /mi-c~.wà/
='lèche-bottes',
/m~-k~lâ?~.ri/= 'les critiques' ...

1 L~
-
signale que
la notion verbale est en quelque sorte
dépassée,
que
l'on s'en sert dans
le
cadre d'une
opération qui n'a plus pour seul objet de nommer
une notion/concept
( . . . )
on insiste sur le fait
qu'il y
a grammaticalisation de-la notion,,(l)
(nous
soulignons)
Une telle conception du rôle structural
de TO met à nu certai-
nes aberrations de
la grammaire traditionnelle qui a pu parler
"d'infini t i f sans TO".
Si
les
lexico logues
inséraient
dans
les
dictionnaires
le verbe avec TO,
pour être cohérents,
ils auraient
aligné les formes nominales précédées de
leurs déterminant-arti-
cles. Mais
le but du dictionnaire n'~tant pas d'énumérer des
segments déjà structurés,
dans un cas comme dans
l'autre,
les
notions sont données à
leur état
le plus pur,
c'est-à-dire,
sans
leurs indices relationnels
(TO,
articles).
Pour revenir au MN,
tout
comme TO grammaticalise une no-
tion verbale et en fait un prédicat,
le MN grammaticalise une
notion et en fait un nom,
de manière à
ce que ce programme de
sens
puisse être rangé dans une catégorie grammaticale. Mais
l'on aura compris que TO n'est pas assez explicite quant à
l'existence d'un plan notionnel et d'un plan énonciatif. A
l'impératif,
par exemple,
le verbe ne peut plus être considéré
comme une notion pure,
même s ' i l apparaît
sans son actualisa-
teur TO.
Sur ce point particulier,
l'impératif anglais,
par
rapport au français, _fourni~ un cas de déficit métaopérationnel,
selon l'expression de C.
Delmas.
En français,
les désinences
(1)
H. ADAMCZEWSKI
GLA,
1982,
p.
12

I l )
-
de personnes sur le signifiant verbal signifient
le d~passement
de
la notion.
Le fonctionnement
du MN dans
la construction du nom senou-
1'0
amene à penser que
la structuration peut
commencer parfois
dès
le niveau
lexical.
Il
confirme,
par la
A
meme occasion,
cette
intuition de H.
Adamczewski:
l'existence d'une grammaire du
lexigue (1) .
J) Sélection d'une base verbale dans le plan notionnel
L'existence d'une grammaire du lexique trouve encore con-
firmation lorsqu'on remonte
les mécanismes métaopérationnels
de
la structuration d'un nom à partir d'une base verbale. Pre-
nant
"à la lettre"
la'structure abstraite du nom suggérée par
M. Hoûis,
P. Boutin constate que
le nom senoufo est de
la forme:
1) base nomina le _ _ _ _ _ _ _ _
+nominant
2) base verbo-nominale~
Pourtant
chaque
langue dévèloppe ses
caractéristiques fonction-
nelles.
Parlant de
la base verbale,
i l faut
attirer l'attention
sur le fait que
le système verbal
senoufo veut que,
dès
le
lexi-
que,
le verbe
se présente sous deux formes(2).
Et
ce qui a
~chap-
pé à
l'attention de P. Boutin c'est Rue
l'une
de
ces
deux
(1 ) DEA,
12.. /05/
1 9 81~
(2)
Les deux tormes du verbes sont,
bien sfir,
données dans
le
dictionnaire;
voir Dictionary Tiebary-English /
J':nglish-Tyebara,
Juin,
1967

Il,'1
-
formes,
et pas n'importe
la9uelle,
sert de base lexicale dans
la construction du nom.
Autrement dit,
ce que P. Doutin appel-
le innocemment
'base verbo-nominale'
a
un statut métalinguis-
tique bien spécifique.
A en croire les auteurs de ~a Grammar Lessons,
i l s'agit
de
la traditionnelle opposition CONTINUOUS /
COMPLETE,
une
transformée du couplé non moins traditionnel INACCO,'v!PLI /
ACCOIv!-
PLI.
P. Boutin évite les deux étiquettes mais ne trouve pas
mieux que DYNAMIQUE /
STATIF. Résumons
les deux positions
..--complete
Grammar Lessons
verbe .../
~ontinuous
~statif
.P. Boutin
verbe
- """dynamique
Derrière ces étiquettes,
se profile la notion d'''action'',
donc des métaphores du concret et
chacun des deux auteurs ne
s'en prive pas ••• Une analyse métaopérationnelle de
la distri-
bution de ces deux formes montre que nous avons affaire à un
mécanisme bien régl~: l'énonciateur sélectionne l'une de deux
bases verbales en prévision du statut rhématique /
thématique
de la relation prédicative qu'il doit construire. Prenons donc
quelques énoncés.
La première série d'énoncés est extraite
de
la transcription d'une séance de divination.
Le voyant pose
une suite de questions à
ses dieux sous forme de suppositions;
i l cherche notamment à
savoir ce qui a bien pu
conduire son
client
jusqu'à l u i :

115 -
( 3)
waa
w1
na. • W]~

_.III
somebody/
/he /
/the man/
send
/Somebody has sent
the man/
.Somebody
has sent
this man !
. Is i t somebody who
sent
the man?
(4) w~~
n
wi

somebody/(pred)/ him/
send
·
Somebody has sent this man,
.,
(5)
c€lè.~
l
tudu
_a_aL
(a) woman /(pred)/
send
/
A woman is sending/
• Women are sending
(people to f.ortune-teller~)!
(6 ) n~.wà
..
si
i
tùdü
_.. _.
" ,
(a)
man /
then/
(pred)/
send
· Men are sending people
(to fortune-tellers)
La traduction des énoncés appelle une petite mise au point.
Nous n'avons pas
cherche,
par tous
Les moyens,
à traduire les
énoncés senouÎo par le BE+ING anglais.
I l se trouve tout sim-
plement que c'est cet opérateur qui rend
le mieux compte des
effets sémantiques produits en
(5) et (6). Le voyant se dit,
en ~uelque sorte,
ceci: ~on client a peut-être été envoyé en
consultation par une tierce personne et
cette
personne est peut-
être un homme ou un femme(2)
puisque
(1)
Cahier XIX,
p.
88,
Consultation + explications
(de Yaporo),
le 10/œ!/ 1985
(2)
Dans
le contexte de
la divination,
i l n'est pas évident que
ce soit une entité humaine qui ,envoie quelqu'un en consultation.

116 -
Une lemme
(ça)
peut envoyer
(quelqu'un en consultation)
.
Un homme
(ça)
peut envoyer (quelqu'un en consultation)
On aura compris qu'une autre traduction possible de
ces énoncés
serait
.
\\vomen ','OULD send
(people to
Ïortune-tellers)
. !·1en\\WULD s e nd
(people to lortune-tellers)
Ces
traductions
s'imposaient d'ailleurs,
eu égard au type d'hy-
pothèses formulée par le voyant.
Dans
le
contexte de
la divina-
tion,
le
client peut être une Ïemme ou un homme;
cela relève
de
l'évid~nce même.
La relation
'Un(e)
Ïemme/homme
C9 envoyer
quelqu'un en consultation',
non seulement peut être portée
au
cr~dit de tout sujet, :mais elle l'est déjà avant toute Ïorme
d'énonciation.
L'énonciateur -
ici
le voyant -
n'avait même
pas besoin de
l'énoncer(l).
I l semblait alors normal qu'en an-
glais
les énoncés
comportent des opérateurs
(BE+ING,
WILL)
qui
ont pour rôle de re-nouer des
relations qui pré-existent à
tou-
te structuration.
Quant aux énoncés
(3) et (4), ils se voulaient moins tau-
tologiques,
aussi
curieux que
cela puisse para1tre.
Au
cours
de
la séance divinatoire,
c'est en tout
cas par ces énoncés
que
le voyant
envisage
l'hypothèse selon~aquelle son client a
peut-
être été
envoyé
par une
tierce personne.
Suivant
la chronologie
de
la consultation,
ces énoncés apparaissent ainsi
en phase
,
,
première par rapport
aux enonces
(5 ) et
( 6) • Schématiquement,
nous aurons donc
(1)
Le discours divinatoire se caractérise par ce genre de ques-
tions plus que tautologiques:
e.g.
"Le client doit-il eÏlectuer
le sacriÏice un certain jour de
la semaine ?"

1 17
-
(1)
someone has sent him . . .
(II)
women
wou Id send .•.
Il nous faut maintenant observer les traces d'opérations,
les formes
elles-mêmes. En
(3), il n'y a pas de relateur prédi-
cationnel en surface.
Cela est peut-être dû à
l'effet de topi~
calisation recherché,
c'est-à-dire,
la mise en emphase du sujet
grammatical(l).
L'indice métalinguistique à
retenir en
(5)
est
la forme du signifiant verba l
1tul - 'send 1. En (6), notons
....
que
le signifiant verbal est le même et que,
cette fois,
i l
est précédé de Inl
En
(5) et (6) le lien prédicationnel est réalisé Iii et
cette fois
la forme du signifiant verbal est plus complexe sous
l'esp~ce de Itydyl ~ 'send~ Une étude phonologique plus poussée
permettrait de voir que
l'opérateur Iii est, en réalité, une
forme
complexe,
réduite en forme mono-monématique par condition-
nement
contextuel
Voyons d'autres énoncés dont
le sens
se rapproche du pas-
sé ou dufu:tur
:
(1)
C'est un cas de déficit au niveau de
la structure formelle
de
la relation prédicative.
Nous y
reviendrons plus en détail
lorsque nous réleverons
le parallélisme inattendu mais non
moins métaopérationnel
entre
l'opérateur,DO et
l'opérateur
(-))(lire
' t r a i t d'union').
Ce
sera au chapitre III.
(2)
Dans une étude exhaustive du syst~me verbal,
i l faudrait
postuler pour la forme
synthétique et de
surface du relateur
Iii, la structure phonologique ln
nil pour les énoncés (5 & 6)
e.g.
nà.w~
n ni
t~~~
~
n~.w~
i
t~d~

les phon~mes consécutifs Inl se neutalisent au point de dis-
paraître.
Dans
les cas de
co~trastes, on trouve Iii réalisé
sous une forme analytique:
ln ni/.

-
l 18
-
r
1
m~ni.wi
maa~:
s~e
wâ~.mi
l~.l~
ni
1
-
(preaj;----------
the rice /
(past)/ -/ bear /the drought/(a)moment/
in
/
the rice bore during the rlrought/
. ~he grains of rice appeared during the dry season.
( 7b )
mà.n I . wi
zà·' • gi
si
i
tYl)
the rice
/the rain/then/(pred)/fall
/the rice was bearing
and the rain was falling/
.The grains of rice were appearing during the rainy season.
,
(8a) bé
màa
~
ç~.ri
torigo
wà-lé.wi
ma
(---aj--------~--------------
i l s / p(:as~)/ - /the speech/send
/
the old one/
to
/they had sent
the language to
the old one/
.They had given the floor
to
the old man
($b) b~
maa
ni
c~.ri
t~ro?6
~ .
ku5
â
ilS/(p~;=r;;ï(;~~~)ï~~~-:;:::~ï::~d/ (pred)/finish/ and
/they were sending the
languge already and •.. /
.They were already giving the floor
when . . .
(9a)
-
mi
dàà
kâri

kàd~.y~
ca
------------
me /(pred)/
leave
/
(cent.F)/fire-wood/
look
/1
am going to fetch fire-wood/
.
l
am
going to fetch some fire-wood
(gb)
mi
d à à
cJà
çé
1
'
. '
,
.,.;:aje . Yl
t é-vc
'2 a
n'î.
à

----------------
me/
(pred)
/(pred/leave/the fire-wood/place-fetch/ in
/1 am going to the fetching
place of fi re-wood/
.1
am going to set for fetching the fire-wood

1 19 -
Notre objectif n'est
pas de faire
ici une ~tude compl~te
du système verbal senoufo.
On s'en tienùra
pour le moment à
l'organisation structurelle de
la relation pr~dicative.
i)
les relateurs
Dans
les énonc~s à effet d'accompli (7a,
8a,
9a)
la
liga-
ture prédicationnelle est assurée par un seul relateur.
Dans
les énonc~s (7b, Sb, 9b) -
à
effet d'inaccompli,
le dynamique
selon P. Boutin -
la ligature est d~j~ r~alisée et un autre
..
relateur vieht quand meme se sur-ajouter.
I l est intéressant et surtout
tr~s important de noter que
le relateur qui se surajoute /ni/
en (7b,8b),
/d~/(l) en (9b) ne
peut,
en aucun cas,assurer à
lui tout
seul
la ligature prédica-
tionnelle.
Nous avons ainsi d'un côté
les relateurs
"nécessai-
res" /màà/
en
(7 et 8)
et /daà!
en (9)
-
ceux qui
sont
les plus
proches du sujet -;
et de
l'autre,
unrelateur "non nécessaire"
/ni/ en (7b,
Sb)
et /dâ/
en (9b)
séparé du sujet par le pre-
mier nommé.
Signalons en passant que
les énoncés suivant seront
sentis comme imcomplets ou m~me agrammaticaux
(8') *

p
ni
cé.ri
toro? 0
'"
i l s /
/(pred)/
the speech/send
/they
sending
the speech/
La traduction anglaise ne rend pas
e xp Li c i t.nrna n t
compte de
l'agrarnmaticalité.
Eri français
la structure
La plus proche de
(S')
serait du type:
* Ils
circuler la parole •..
(1)
/da/ ou en tout
cas un opérateur de
la même
forme a d(~jà faLt;
parler de
lui dans
l'énonc~ a
l'impératif et ~
la forme
emphati-
que.
C'~tait au
chapitre J.

120 -
Tout
semble indiquer que
les relateurs InII et Idal crpent
une forme de redondance structurelle,
mais qui reste m0taopéra-
tionnelle.
C.
Delmas aurait
certainement parlé d'un "excédent
métaopérationnel"
pour dire que
les relatews Inil et Idal mar-
quent un dépassement d'un état premier de
la relation prédicati-
ve. Tout
se passe comme si dans la première étape structurale,
une place restait à
instancier dans
l'interface
relationnelle et
que dans
l'étape structurale suivante,
cette place venait à être
instanciée
:
E_i__G_àa
~ _)__~_ee (I)
• The grains of rice had appeared
E_'''_l
S_~_O
0
(II)
§D>_m_?:t_â
_n_i
1_
~ The grains of rice were appearing
Que dire du statut de
(pred2)
?
D'abord nous ne sommes pas sur-
pris que Inil et Idal soient appelés "morphèmes aspectuels" par
certains
'senoufoïsants'.
La formalisation montre clairement
que nous avons affaire à des saturateurs relationnels.
Leur pr6-
sence signale qu'en
(7b,
Sb,
9b)
les relations pr~dicatives sont
saturées,
avec
l'autre conséquence métaopérationnelle qu'est la
sélection de
l'une des formes de
la base verbale selon le carac-
tère rhématique ou thématique de
la relation.
L'énonciateur se
voit donc imposer un choix entre une base verbale rhématiqu~ (HVl)

121
et
la base thématique
(BV2).
La base verbale est en fait
une
valeur absolue de
la fonne
~Vl
/rm V / -
-----='13V2
ii)
statut et structure de
la base verbale
Le
statut des formes BV·)
et BV2
se p r-é c i s e
lorsqu'on les
rapporte à
la structuration du nom;
c'est,
après tout,
le but
de
la démonstration.
Pour construire un nom à
partir d'une notion verbale, une
sélection rigoureuse est opérée entre BVl
et BV2 et
les critères
de sélection sont très précis.
Le
locuteur senoufo retient
(in-
consciemment)
la
base verba le qui intervient dans les relations
prédicatives non saturées et ce pour une raison bien simple:
d'abord dans
le micro-système Phase l
~ Phase II,
la Phase l
est
l'étape relationnelle
la plus proche du plan notionnel. BV1
représente
l'état
le moitis altéré de
la notion et théoriquement,
une notion "pure" n'est,
a priori,
ni verbe,
ni nom;
ni adjectif ••.
Avant que
celle-ci ne s'affirm~ explicitement comme élément de
la ce.tégorie verbale,
l'énonciateur a
tout le temps de
la trans-
former en
signifiant nomina l
par adjonction d'un l'IN.
C'est,
en
q u eil q u e
sorte,
en suivant une
logique
métaopérationnelle
que
l'~nonciateur est amen6 à retenir BV1
et
non pas UV2
pour la
structuration des notions verbales en notions nominales.
Et sui-
vant cette contrainte,
les verbes présents dans les
é no n c
s
(7)
é
à
(9) donneront dans un cas des formes nominales attestées et
dans
l'autre,
des
structures inexistantes en senoufo:

122
-
(7c)

s1
i
cê-li.wè
( dei ct. ) / then/ (pred ) / (a)
old-woman
/then this
is
an.
old
woman/
and this is an old woman
.~.

wi
sëé .gi
-
na
(deict.)/he/take off
/
bear.MN
/
on
*sii.gl
bera.MN
/this she stops bearing /
• The one who's
stopped bearing children
(C.D.,
1983)
(8c)
sibé.wi
t6rigo.lo
na
the letter/
send.MN
/(pred)/over:take/you/
on
*tor6? G • 10
/the sending of the
let ter has over taken you/
You are
late in your letter sending
(9c)
kâri.li
i
forodi
nyà?àni
'1.
...
' "
leave.MN /(pred)/take place/tomorrow
* çé.li
/the
leaving is
taking place tomorrow/
. The departure is
s t i l l on tomorrow
I l
reste à expliquer la logique métaop~rationnelle du se-
cond critère de
sélection:
pourquoi
la base verbale BV2
-
celle
qui
intervient dans
la relation prpdicative saturée -
refuse
l'adjonction d'un ~N,
ce qui
la rend improductive de nom. Autre-
ment dit,
i l faudrait
expliquer l'impossibilité de
suffixer un MN
n la forme dite "imperfective,,(l) dan~ la construction du nom.
(1)
lJ'organisation du système verbal
senoufo rappelle
celui des
langues slaves;
on y
postule une forme perfective et une forme
imperfective.
Voir H.
,\\r1amcze,,,ski,
"L'aspect en anglais et dans
les
langues
sLaves" in
Textes du Ci-:,;iJl0:GUA,
Ui,;n des
l'a1's <ing1.o-
phones,
:'aris ILL,
]'Jl<:',
.;:>;J.
1-16

12 J
-
Les Baptistes arné r-Lc a i.n s ,
décrivant
les deux formes
alter-
natives de
la base verbale
ont accumulé
de nombreux détails
phonologiques sur la question.
De
tous
ces d~tails
ils n'ont
rien fait
puisqu'ils n'ont
pas réussi
à dépasser le stade de
l'observation primaire pour expliquer la différence
structurel-
le
(i.e.
forme)
et
la différence structurale
(i.e.
opérationnelle)
entre BV1
et BV2.
En un mot,
i l
leur manquait une théorie de
L '(~noncia tion pour .ra 1-1 i er les ope rations aux formes.
En observant d'autres formes verbales,
on remarque que
la base verbale BV2
en dissidence avec
la structuration nomina-
le a une forme bien plus
complexe
_____k~
'give'
l
:~ka?a
;2
'"
"-
-.~~
1
'build'
~
~fari
2
~à?à
1
'blame'
·~.fà?âri ~
1
'stand
t2
P.
Doutin consid~re que BV2
est
obtenu par une d0rivation qu'il
appelle
"th(~rnatique". Nous ne sommes pas tr~s sûr
de
comprendre
ce qu'il
entend par 1;',;
mais
sa dérivation "th6matique" n'a
rien a voir avec
la dacation des étapes relationnelles.
Dans
tous
les
cas,
i l ne
la met
pas en rapport avec l'impossibilité

d'avoir BV2 dans
la structure :formelle d'un nom.
L'essentiel,
semble-t-il,
est de voir que BV2
repr~sente un d~passement de
BV1:
structurellement,
par sa forme
plus
complexe,et,
du point
de vue des op~rations énonciatives ou structurales,
DV2 demande
un travail supplpmentaire. Enfin,
par le statut de
la notion,
BV?
représente une notion plus altérée puisqu'elle permet,
par
delà le contenu du signifié verbal,
de sentir un effet imper-
fectif ou
"continuous".
Il va sans dire que toutes
ces caractéristiques de BV2
ont une incidence directe sur son incapacité d'être suffixé
d'un MN pour d6nner un nom.
Le nom senoufo,
rappelons-le
(par
souci de clarté),
est
constitué d'un mon~ne lexical et d'un
mon~me grammatical (le MN). Or BV2, contrairement à BV1, a
déjà fait
l'objet d'une structuration;
c'est déjà une structu-
re66mplexe,
pour ainsi dire.
Et à
cette structure complexe
l ' ~nonciateur ne pe"lt plus a j o u t e r e
BV2 est une forme SATUREE,
tout
comme on parlerait d'une solution saturée en chimie
et
co~ne H. Adamczewski parle de relation prédicative satur~e
lors de certaines occurrences de
Nous devons cette derni~re explication à G.H 0 r a u l t (-2 ) . Après
que
nous
lui eûmes
présenté
certains
couplés de bases ver-
bales,
G.
H~rault devait expliquer que pour
'leave',
bien que
EV1
soit /kar{/ et
BV2
/çé/,
i l ne fallait
pas se
limiter
aux formes
de
surface pour en déduire que /kar::l/ est complexe
que /çé/,
qu'il soupçonnait /çé/ de n'être pas mono-mon~matique.
(1)
H.
ADAIV!CZE\\I'SKI
"Le concept de saturation en anglais et en
linguistique générale" in Textes du CHELINGUA,
UEH des Pays an-
phones,
Paris III,
1982-83, pp.
17-30
(2) Entretien du 18/12/ 1985

-
175 -
Ce qu'il y
a
de
tr~s reconfortant,
c'est qu'~partir de positions
th~oriques assez diff~rentes, on aboutit
aux m~me r~sultats.
I~n guise de conclusion partielle,
on retiendra que d~s
le niveau lexical,
le senoufo observe une hirrarchie en syst~me
suivant
le vecteur coulissant entre
Le plan notionnel et
le plan
&nonciatif,c'est-~-dire, entre la Phase l
et
la Phase I l ,
que
pour actualiser dans
leflot discursif un prax~me verbal sous
forme de signifiant nominal,
le MN s~lectionne
la notion la
moins altérée,
que,
fort
Lo g i q u em e.n t ,
ce l'lN refuse de
s' ajoin-
dre ~ urie structure déjà complexe
(BV2).
En clair, l'une des deux bases verbales
est orientée vers
le plan notionnel:
BV1;
l'autre est orientée vers
le plan m~ta-
linguistique:
BV2. Sch~matiquement, nous avons
(1)
PLAN NOTIONNEL
niveau
lexical
»> kari
- - - - - - - - 1
(1) base leXicale~,
l
...... çe
2
+HN
1
(2) nom
"
, 1
karl • Lâ .;
'departure'
niveau structural
(Il)
PLAN j\\'lETA-LINGUJSTIt~U!~

126 -
Parlant de
la mé ta lingui st ici té·
des
langues,
on peut au s s i
avancer que
le senoufo est plus métalinguistique que
l'anglais.
En anglais,
la saturation prend forme
en un seul point de
la
structure phrastique et

elle
est marquée par le
seul
opérateur DO
:
~CE2~
------
------
relation satur8e
Le senouÏo,
quant à
lui,
exprime
la saturation 5ur deux points
de
la structure phrastique
~ ~_.
__màa~~~ eas de saturation
l
/
(past)/-/
stand up
'1 stood up'
(II)
C Q
double
saturation
yirigi
l
/
(past)/(pred2)/stand up
'1 was standing
up'
Le phénom~ne de saturation structurelle que nous venons
de décrire est aussi une
saturation métaopérationnelle,
en ce
sens que
la forme BV2
ne permet plus d'effectuer une opération
de nominalisation ou de
substantivation.
Nous verrons 'lue
le
changement,de
c~tégorie est un cas de re-structuration. Ce phé-
nom~ne permet d'expli'luer,dans un premier temps,
pourquoi
la

r
-
127 -
nominalisation en
-ING n'est
possib.le .q u ' a v e.c un verbe n' ayant
subi aucune structuration antérieure
verbe
structuration en
-ED
·nominalisation
come
came
*camING
insult
insultED
*insultedING
I l peut ~araitre banal de reléver ce phénom~ne. Mais tout d~pend
en dernier ressort de
l'interprétation théorique du
-En appli-
qué à une base verbale.
I l s'agit,
en fait,
d'une
certaine al-
tération des notions
'COHE'
et
'INSULT'.
Nous montrerons,
à
la
suite de C.
Delmas et de H. Adamczewski,
que
l'adjonction de
-ED à une base verbale pour obtenir l'effet de participe passé
est unI? appropriation de1a notion verbale par l'énonciateur~
L'énonciateur retravaille une substance sémique verbale pour
mener à bien d'autres opérations.
Le verbe cesse alors de décrire
une action,
de relater un événement .••
Bref," pour obteriir une forme nominale à
partir d'une no-
tion verbale,
l'pnonciateur senoufo
ou anglais est sous
la pres-
sion des mêmes contraintes métaopérationnelles
verbe
(no tion)
structuration en
-ED
nominalisation
come
*
comING
insult
*
insultING
o .g.
Ile s a i-d he had nothing against your comING to the party
l
can' t
stand hcr
insu 1 tING our common f r-d o nd

-
1213
-
4)
Remarques sur l'absence du MN
L'adjonction d'un MN à
une base
lexicale donne un ~l~ment
structurable en ce sens qu'il devient
apte à assumer une fonc-
tion syntaxique dans
le plan ~nonciatif. Nous avons ainsi
la
fonction centrale du MN; op~rateur du nom,
i l signale
le pas-
sage d'un plan à un autre,
d'une ~tape relationnelle à une au-
tre.
L'on sait aussi que l'absence d'un opérateur est aussi
significative que sa présence(1). P.
Boutin remarque que cer-
taines bases
lexicales se constituent en nom sans même attendre
qu'un MN leur soit adjoint,
et
ce en fonction du statut de
la
relation nominale dans
laquelle
leur programme de sens est im-
tl
pliqu~.
,
"Il
(le MN ~ J est caractéristique des emprunts,,(2). Pre-
1
1
nons un ~noncé à
l'appui de sa remarque
;
-
( 10)
kàràna
i
s?gi
bl
m~t6.
ni
mabl:i
ç:>
/(pred)/think/
(act . ) / motor bike/ and 1 .r c.ar'
/buy
/Korona is in the intention of buying MOTOR
BIlŒ and A CAR
.Ko r-o ria wants to buy A
MDTORBIKE and A CAR
La remarque de P. Boutin,
c'est-à-dire,
son constat, n'est pas
suivifd'explication.
N'ayant pas dégagé
les deux plans
(notion-
nel et métalinguistique)
à partir de
la fonction du ~N, i l lui
(1)
Certaines
langues adoptent
le processus contraire c'est
le
cas du jukun
(langue du Nigé ria).
Dans
le
lexique,
le nom a un pré-
fixe qui est,
en fait un indice métalinguistique pour signaler
au linguiste qu'il a
affaire à un signifiant nominal.
Mais par-
venu au plan des structurations,
le signifiant perd son MN:
e.g~
akw1
'knife'
~
ku
hw€:
pkwi
'me bought a knife'
l l
faudr~i t peut-être voir dans la""dispari tion du l'IN un début de
cohésion.
(1) p. BOUTIN
E léments
pour une systprna tique du
fodonon,
parler.
senoufo du nord de
la C&te-d'Ivoire,
DEA,
Paris III INALCO,
1981,
p.
48
(non plubli f ;

r-
1JO -
non plus par hasard qu'en français,
les verbes apparus dans
les m~mes circonstances sont,
pour la plupart,
du 1er groupe.
Pour l'une et
l'autre des
langues,
c'est une manière de résou-
dre une fois
pour toutes
le problème des emprunts.
C'est peut-
~tre l'une des
meilleures manières ·de.règ~erle problème de
la
cohabitation entre les systèmes
linguistiques(l).
C)
LE STATUT DU NOM:
LE
M.N.,
INDICE META-LINGUISTIQUE
1)
Le MN,
symbole de relation
Jusqu'ici,
le fonctionnement du MN a
été analysé dans une
perspective générale. Nous avons illustré à travers
la structu-
ration du nom senoufo,
l'un des aspects de
l~organisation du
sens. Quelque soit
le système
linguistique considéré,
l'orga-
nisation du sens s'inscrit dans une chronologie en système en-
tre
le plan des notions et
celui des structurations.
Le MN du
senoufo représente clairement un seuil abstrait entre
les deux
plans
Extra-linguistique
base
lexicale
}lN -
-
-
-
-
-
-
nom
Méta-linguistique
(1)
Cela rnnè~e à penser que les langues aussi se discriminent
entre elle~ puisqu'elles tiennent à
signaler (méta-linguistique-
ment)
gue certains des ~léments qu'elles comportent sont
en
fait,
etrangers à
leur système.
'

lJ1
t
\\
~
I l convient maintenant d'examiner de plus pr~s son fonc-
1
1
tionnement dans
le cadre énonciatif. Dire que
le nom est une
structure,
c'est dire qu'il symbolise,
d'une
certaine mani~re,
une relation.
S'il a
été défini ailleurs comme
"constituant
syntaxique",
en termes d'opérations,
i l
correspond à un program-
me sémique introduit comme membre d'une relation majeure.
Nous
sommes dans
le plan énonciatif où
le programme sémique nominal
est introduit
comme objet
linguistique dans
le plan discursif.
Et
comme c'est
le MN qui est
l'introducteur du programme sémi-
que dans
le
contexte -
la marque de
l'introduction d'une notion
dans
le flot discursif -
i l est
la représentation abstraite du
rapport entre la programme sémique et
le
contexte.
En un mot,
le MN symbolise une relation.
Nous retrouvons ainsi et sans
surprise 1une similitude mr.taopérationnelle entre le déterminant-
article anglais et français
et
le "YIN.
"Plan
linéaire
et fonc-
tion
de l'article V ,
écrit
C.
Delmas,~convergent pour faire
de
l'article un relateur,,(l).
La schématisation illustre mieux le
phénomène
C
C
~
~
~
b_a_s-~
(n~ --
y
------
L'introduction d'une notion dans
le discours
s'accompagne toujours d'une réduction de son extension.
Le MN
étant
l'indice d'introduction du nom dans
le discours,
i l est
tout à
fait
logique que ce soit
lui qui rlonne
la mesure de son
extension
une fois
sa structuration effectuée.
C'est encore
(1)
c. Di~Uli\\S,.1985. p. 181~

-
132
-
une caract~ristique que
le MN partage avec
l'article tel qu'il
est d~crit par A. M.
Bruneau
:
"L'article est
le signe sous
lequel s'op~re la
transition du nom puissantiel de toute extension
au nom en effet,
que
le discours détermine,,(l).
Dans
la définition de A. M.
Bruneau,
on reconnaît
la conception
guillaumienne du probl~me de l'article.
L'extension de
la notion
devient de plus en plus r~duite au fur et à mesure que l'on s'é-
loigne de
l'instance Langue et que
l'on s'approche de
l'instan-
ce Discours. Mais G.~ Guillaume ne parlait pas tr~s explicite-
ment d'opérations.Quoi qu'il
en soit,
les diff~rentes réductions
op~r~es sur l'extension de la notion sont autant d'op~rations
successives sur le programme s~mique nominal,
réductions
consé-
cutives à
sa mise en relation.
Revenons
sur le MN senoufo et arr~tons-nous un instant
SBUr l'analyse de P. Boutin. Rappelons aussi que ses préoccupa-
tions sont diff~rentes des nôtres:
son analyse
se situe au sta-
de du distinctif.
I l pense en découdre d'abord avec
l'idéntifi-
cation des formes de sorte que, m~me s' i l reconnaît que le }1N
est indispensable à
la structuration du nom,
i l n'a pas su
voir que
cette fonction était doublée d'une fonction relation-
nelle.
Dans
le droit f i l des anciennes théories sur la détermi-
nation du nom,
P. Boutin reconduit dans
sa description du se-
noufo
Ids métatermes
(+)défini /
(-)déîini
"Le syst~me des nominants
( .•• )
comporte
la
corrélation fondamentale:
générique
(-)défini/
(1) A. M. DHUNji;AU :
"Particularisation et généralisation clans
te
système des articles français" dans
Langage et science du
langage,
Presses d.e
l'Université
Laval,
1973,
p.
145

IJJ -
s pé c i.f Lq u e
(+) dél'ini" (1) •
L'adjonction de
"spécifique" et de
"génériflue" ou
leur substi-
tution à
(!)défini ne repr6sente en rien une démarcation par
rapport à
la conception traditionnelle de
la détermination.
I l faut
surtout y voir un emprunt métalangagier mal adapté ou mal
m~îtrisé, avec
un
souci de plaquer sur le senoufo une méta-
phore qui n'a jamais convaincu personne y
compris ceux qui
l'on
toujours employée.
De
toute façon le syst~me ~inguistique senoufo
rejette de
lui-m~me la métaphore (!)défini. Soient les séquences:
a) kpaa.gi
=
the house
(+)dc?fini
(a) house
(-)défini
on a
les combinaisons
suivantes avec l'adjectif possessif
a')

çé
y~ l~
k p a a , g1.
(pred)/go
/
your/the house/
to
~
Go to your house
Fr:
Va dans ta/votre
maison
b' )
da
çé
y
l
è
è
1
'
?
Kpaa •. a
ma
(pT.'ed)/go/
your /
(a) house
/to
. Go
(back)
home
/
Va chez
toi /
vous
L'adjectif est -
en principe
(+)
défini.
Sa distribution avec
/kP~a.gi/-'la_mais6B· ~ ne pose pas de probl~me a la théorie
du défini. Mais dans
l'énoncé
(b') si /kpaa.?<i/ était aussi
(1 ) P.
BOUTIN :~Relations
de détennination en fodonon
(par-
1er spnnufo de
la région de Dikodougou)" in Afrique et Langage
1 8,
2~me semestre 1982, p. 6

indéfini qu'on
le
prétend,
i l n'aurait pas dû être prfcr-dé
par l'adjectif
possessif
qui marque d~jà le défini. La pertinen-
ce théorique des deux métatermes
se trouve de nouveau mise
à
l'épreuve et
cela ne surprend plus. ~(+)Défini~est tr~s souvent
synonyme de
l'identification des
choses du monde.
Cette concep-
tion chosiste de
la détermination est à
l'origine de bien des
déconvenues en linguistique.
Nous n'y insisterons pas inutile-
ment,
la question ayant été
largement discutée par d'autres.
"Les
choses s'empêchent,les idées ne s'empêchent point";
c'est G.
Guillaume qui
cite
Leibniz.
Pour qu'un mod~le ait
un pouvoir explicatif généralisant,de mani~re
à rendre compte
d'un grand nombre de faits
et à
travers plusieurs
langues à
la fois,
i l doit prendre suffisamment de distance par rapport
Ol!,' .
aux choses
concrètes,
c'est-à-dire,
être suffisamment abstrait.
C'est dans une
telle perspective
que nous analyserons
les for-
mes dites
(±)définies du MN.
2)
Statut de
la relation nominale:
l'harmonie vocalique
et la métalangue
naturelle
L'on se souvient que,
respectant
le schéma classique de
l'étude des
langues à
classes,
P. Boutin a
affecté des numéros
aux MN du senoufo.
L'étiquetage
était alors basé sur l'opposi-
tion Sg/Pl.
Cela signifie
qu'ppistémologiquement r c'est-le mar-
quage du nombre qui a
étf,
retenu comme p hé nom n e
Ln t
r-e s s a n t
è
é
dans
l'étude des
langues à
classes.
On situe ainsi
toujours
au
stade de
l'identification des formes.

....... ~.~~-
1:35 -
L'identification des
formes
est une 6tape obligée flU'il
faut
chercher ~ d~passer. I l ne suffit pas de poser flue
les
numéros pairs correspondent au . plllriel,. et
les impairs au singu-
lier.
I l faut
plut5t chercher à
expliquer la corr~lation Sg/Pl
par rapport à
la structuration en général,
clest-à-dire,
pren-
dre
en compte
l'instance ~nonciateur et cela ne doit pas concer-
ner seulement
le senoufo.
Du nombre,
i l en sera question
plus
loin.
Pour déterminer le statut de
la relation nominale en se-
nouro,
nous partirons encore de
la fonction centrale du MN,
la répartition du domaine
linguistique en un plan notionnel et
en un plan de structuration.
Cette distinction est capitale car
elle permet de se prononcer sur le statut de
la relation nomi-
na le vis-à-vis du repère énonciateur. Elle permet d·'une part,
de dire que
le nom,
tel qu'il est
introduit dans
l'énoncé,
a
quelques affinités avec
la notion
f,proche de l'extra-linguis-
tique);
dans
ce cas de figure,
la réduction de
la notion nomi-
nale est minimale.
La prise en compte des deux plans permet
d'autre part de dire si
le programme sémique est entièrement
intégré
comme objet
linguistique; dans
ce dernier cas de figure,
la réduction de
l'extension de
la notion nominale est maximale
d'où l'effet de sens possible de
(+)défini ou "spécifique".
il
le MN du singulier
Le MN indique les différentes étapes relationnelles; cela va
de soi;
ce qu~ e~t intéressant,
c'est
la mani~re dont il les mar-
que. Une caractéristique du senoufo et peut-être des
langues

1J6 -
dites
"à classes" sont
les
très nombreuses variations formel-
les {morphologiques,
tonologiques . . . ) qu'accuse
le MN et
ces
variations sont
autant d'indices métalinguistiques.
Pour être
plus explicite,
faisons une
comparaison très approximative avec
l'anglais.
'A "
'AN'
et' 0'
signa lent qu'un programme sémique est
proche ou
même se confond avec
la notion
.I
don' t
drink
~ \\HNE
~
\\'-"-
.. "-
~ "~.,.'_.
.r don' t drink~ french WIN};
j
">
i \\ ,>

,O<,;.
, ..... ,1
En
(lJ)
ce
qui
est en cause,
c'est
le vin dans
sa totalité,
tous
les vins,
en un mot,
la notion même de vin. En
(lL~) nous n'avons
plus affaire à
la notion de vin dans sa totalité.
L'extension
en a
été réduite:
i l s'agit,
en particulier,
du vin français.
D'un point de vue métaopérationnel
'A'
et
'0' indiquent que
le programme sémique est proche du plan notionnel;
THE indique,
quant à
lui,
que cette étape relationnelle est dépassée. I l est
bien connu que
la successivité de
ces états de
la relationnomi-
nale peut figurer dans une
A
meme séquence d'énoncé
(15)
She had décided to
leave Bowater Scott's and she
had accepted
A JOB as a barmaid
in the new Durwale
Botel.
She telephoned the manager and said she did not
......-a n t
THE
JOB .
j~ ~ To'10
ç§
1
~
(1)
>- (II)

-
1J7 -
Mais,
et
ceci est très important,
la forme m~me de
ces opéra-
teurs n'indigue pas que nous
sommes en Phase l
ou en Phase II.
Les
signes
'A'
et
'THE ne disent
rien en eux-mêmes sur le sta-
tut de
la relation nominale.
C'est seulement au terme d'une
longue observation
de tous
leurs
contextes d'emploi,
une obser-
vation fastiàLeuse
soutenue par une analyse perspicace, )que l'on
a
rpussi à dRterminer les virtualités méta-linguistiques des
deux opérateurs
A ~ THE.
En senoufo,
le
contexte n'intervien-
dra que pour confirmer ce que
la forme du MN nous aU~a déjà dit!
r'
Il ne sera pas nécessaire de passer en revue tous les groupes
1
l
de noms;
soient
les énoncés suivants avec
le MN du groupe l
( 16) maa
ni
p~~
mi
P~&..:~~
ya?a
baà
if+you/(pred)/come/
you/
the dog /
let / there
) l f you are
coming
let
the dog there /
. IV'hen you come_leave THE DOG at home
(16' )
PU
0
sèz~~.gi
ni

(a)
do /(pred)+
/
the sacred forest/in/
(neg)
g
(neg)
/
a dog does not get
into the sacred forest/
.
DOGS
are not allowed in the sacred forest
( 17)
pyà
11
t ") ,
a.a
il
kw5
ni
i
'" ""
(a)
child/
(pred)/ walk / (pred)/ finish/ and/ (pred)/
luru

kùgu
pii.wi
r-51-:5
il
gi
return/ (act . ) /
creep/
the chi Id/ o,.mer/
(pred)/ i t /
ny~
ka-pee.lè
see/
thing-bad.MN
(L.
S.,
août
1979,
unité 6)
/a child has finished walking and has
returned to
creep,
the owner of the child sees i t
a
bad thing/

-
1J8 -
.'l'hat
A
CJI1LD
who
is already standing on his feet
f'o r:
'va lking {joes b a c k
to
crawl ,
Tlm
CHILD
' s
parent"considers
thi-s to ,be very disturbing.
( 18)
A
~'i.:::~
il~~
mi
tàrà
il
kpô
(an)
agouty /
one/
l
/obtain /
(pred)/ kill
l i t is on~
agouty
l
carne to k i l l /
.
I t ' s only
ONE
AGOUTY
l've managed ta k i l l
-
-
B
s€
si
wi
ny.
muù.wi
?
-
_ - ' . J : _ _ _
where/
then/
he
/
be
/the agouty
/ wh e r-o then is it the agouty ? /
. So where is it, TH]~ AGOUTY ?
Les énoncés
sont assez explicites pour traduire
le statut des
programmes
sémiques nominaux.
Dans
la première partie de
(1~
l'existence du
chien est présupposée par rapport à
l'injonction
formulée par l'énonciateur.
S ' i l demande à
son interlocuteur
,de
ne pas venir avec son chien,
c'est qu'il sait que
ce dernier
en a
un.
La seconde partie de
l'énonc~ (1~ est formulée sous
forme de
loi.
L'interdiction concerne toute
entit~ répondant à
la c16finition de
"chien".
La notion
"CHIEN"
est
transpospe tou-
te
enti~re dans le ~lan énonciatif mais en tant que programme
sémique,
'chien'
-
reste proche du plan notionnel.
L'anglais opte pour une autre solution:
la pluralisation;
mais
l'essentiel est que
le d6nombrement débouche
sur une illimita-
tion afin que,
du
c5té des
effets,
on ait
l'impression que
c'est

-
1 J9
-
"la notion de
chien" qui est
incriminée oans
sa totalité.
Nous y
reviendrons.
Les 6nonc~s (17 et 18) présentent des cas de reprises
et
celles-ci simulent
la successivité des étapes relationnel-
les dans
la chronologie en système.
En
(18)
i l Y a
d'abord
un début de dénombrement avec
la première occurrence de /m~.w~/
'\\,
'agouti'
-;
ce dénombrement
reste bloqué à
côtp de plan notion-
nel.
Dans
la seconde partie de
(18) cette m~me forme ne poûvait
pas être reconduite;
i l ne s'agit plus de n'importe quel agouti,
'.
mais de celui qui est
l'objet de
la question,
'!l'agouti" autour
duquel se déroule
la conversation.
C'est pour cette raison,
en
particulier,
que
l'anglais peut faire
intervenir le pronom ana-
phorique IT.
flais
ce qui doit
surtout retenir l'attention,
c'est qu'en
Phase IJ,
la forme du MN /wi/ ne
change pas d'un nom à
l'autre,
a lors qu'en Phase l ,
on
a
l'impression que chaque nom a
son MN spécifique. Examinons quelques noms pour mieux apprécier
les variations du MN en Phase I
Phase l
)0
Phase II
(a)
book
sib€-~
s Lb
wi
é

the book
(a)
danger
nèri
neri .,."i
the danger
(a)
monkey
k5.1')
k5.W1
the monkey
(a)
hen
gà.là
gà' • w i
the hen
(a)
b lino
:ru .v/ '),.
f~.wi
the blind
'"
(a)
man
nà.wà
n~' .wi
the man
(a)
bee
séri.wE:
séri.wi
the bee

-
1 ~O -
Notre but n'est pas
n'énumération
de
tous
les i'-lN du senou-
fo.
I l est
surtout question de montBer le fonctionnement
de
l'opérateur dans
l'encodage des
étapes relationnelles.
P.
Boutin,
en bon phonologue,
a bien expliqué
les modalitfs de variation
des
formes de gauche.
Les premiers·norns de
la colonne
de gauche
ont,
en Phase l ,
le MN ~; peut-~tre s'agit-il d'emprunts. Les
variations du MN dans tous
les autres
cas -
toujours dans
la
~olonne de gauche -
s'expliquent
parun phénom~ne phonologique
bien connu:
l'assimilation progressive sous forme d'harmonie
vocalique.
Elle a,lieu entre
la derni~re voyelle de
la base
lexicale et
la voyelle du }1N.
Eri Phase l
(formes de gauche)
la
structure phonologique du MN est donc /wv/
ou,
plus générale,
/cv/;
la structure phonologigue de
la base
lexicale décide de
la forme
effective du MN.:
base
lexicale
+
}j
N
c V
r
..,..
c V
" " ~, --- - -- - - _....."
On aura aussi
remarqué que
le sch~me tonal du MN dans
les for-
mes de gauche accuse quelques variations.
Nous y
reviendrons.
Quant aux formes de droite -
noms
en Phase II -
on remarque
que ,
quell e
qu e
soit
la structure phono logique de
la base,
le
MN est
toujours
le m~me: /wi/.
Les Baptistes américains qui ont
v i, té
le terme
"genre" ont été amenés
à parler de ","ii c La s a-
é
nouns" tout
en feignant
d'oublier de donner une étiquette aux
[onnes de gauche
(sur notre
tableau).

1 LI 1
,\\'lais revenons au véri table problème.
Le phénomène d 'har-
mœnie vocalique rend compte des
changements morphologiques du
MN mais
cela n'est qu'un d~but d'explication.
Limiter l'ana-
lyse à
ce niveau signirie qu'on n'a pas réussi à d~passer le
stade de
l'observable.
Et
cette
lacune pourrait être interpré-
tée comme une
tendance à croire gue domaine phonologique et do-
maine grammatical sont disjoints.
Autant
les Phase l
et II
sont
des plans
complémentaires,
autant
l'harmonie vocalique et
la:
rupture d'harmonie vocalique sont des indices métalinguistiques
complémentaires.
Il faut
surtout voir que
le senoufo utilise
toutes
ses potentialités pour,
non seulement produire
le sens,
mais pour revenir parler de la production de ce sens.
I l faut
donc expliquer le pourguoi des
choses
et
c'est
là une des pré-
occupations mais aussi un des atouts de
la grammaire métaopé-
rationnelle.
I l faut
justifier pourquoi à "l' indr~finiIl on a
autant de formes de }lN que de bases
lexicales et pourquoi au
"défini ll on a une forme
fixe.
A ce stade critique où le modèle
théorique est mis à
l'épreuve,
l'on se rend compte que
(~)défini
conduit
l'analyse dans une impasse.
Nous
laissons de
côté
les effets
résultant du fonctionne-
ment du MN pour reconsid6rer les phases successives de
la struc-
turation des programmes sémiques nominaux.
Si dans une première
phase
le MN garde des affinités avec
la base lexicale -
des af-
finités
formelles
c'est que
le programme sémique construit
à des affinités métalinguistiques avec
le statut de la base
lexi-
cale;
la forme du MN est subordonnée à
la
forme de
la base lexi-
cale parce que
le programme sémique structuré
est métalinguisti-

1;~2
-
quement proche du plan notionnel.
Dans
la seconde étape rela-
tionnelle -
la
Phase II -
le MN fait
preuve d'une autonomie
formelle vis-à-vis de
la base
lexicale parce que
le programme
sémique construit est
très décalé
par rapport
au plan notionnel.
Prenons des énoncés dans un
au groupe de
noms,
le groupe II
par exemple

nu

kari
?
\\mere /your /father /
go
~
.
Where has your father go ne
?
l
B
(a)
wi
kari
sé.? ë
ma
1
he
/(pred)/
go
/(a)
farm /
to
· He's
gone to
(A)
FARM
wi
kari.
~gi:.
ma
he/(pred)/
go
/
the farm
/
to
·
He' s
gone to
THE FA~'l.1
· Be's gone to
FARH
B
(a)
I l est allé au
champ
(b)
I l est allé dans
le
champ
Nous avons dû forcer
les
traductions
françaises
et anglaises
dans
(b)
parce que
le français
en particulier n'arrive pas à
discriminer clairement
le
statut du nom.
~n donnant la répon-
se
(a),
l'interlocuteur veut dire que
son père n'est pas dans
le village,
c'est-~-dire qu'il est tout simplement absent.
Pour
(a)
certains
linguistes emploieraient
la m~taphore du
"fléchage".
/s~" .gi/ -
'le
champ'
se trouverait ainsi
-fléché";

1 !~J -
le tout est de savoir
jusqu'à quel point
ce m~taterme peut ~tre
op~ratoire.
Disons qu'en
(b),
celui qui pose
la question est
cens~ savoir de quel champ il s'agit. Dans un tel contexte,
i l est question du champ du père;
notons qu'une r~ponse comme:
wi
k à r-I
Wl
se' .gi
ma
he /(pred)/
go
/
him/ the farm /
to
.
Hers gone to HIS
.
I l est all~ dans son champ
paraitrait assez bizarre à moins que
l'~nonciateur ne cherche
intentionnellement un effet de
contraste:
i l est all~ dans SON
cham~
et non dans
celui du voisin comme son interlocuteur pour-
rait
~tre tent~ de le croire ••• Avec d'autres' programmes s~mi-
ques no~inaux l'anglais arrive à discriminer le statut des deux
relations~ Nous pensons aux expressions dites idiomatiques
"He's gone to r school" à opposer à "he's gone to the school,,(l).
Pour revenir au senoufo,
on aura compris qu'en
(a),
la
forme /se.?e/
(un)
champ
se
confond avec
la notion,
contraire-
ment à
/se'.gi/ _ 'le champ' -
très d~cal~ par rapport au plan
notionnel.
Prenons une paire
d t
no n c s
p a r-t a g e
é
é
011
l'anglais d é
les deux cas de figure
en s~lectionnant des formes nominales
différentes
(20 )
kapyë
a
maa
çé
kpa.?a
ma
..
i f
/(conn.)/ you/tire
/you+(pred)/go/(a)house/ to
/
i f you are
tired go to
(a)
house
.
In case you feel
tired go back
r 110j\\J]~
(1)
Nous verrons
(au chapitre IV)
que la diff~rence métaopération-
nelle entre
"go to ~ school" et "go to the school" est une affaire
de cohéSion,
elle-m~me liée au niveau de structuration des deux
s~quences d'énoncés.

(20')
sa
kp~â.gi
tt.?~
nib2~.wi
na
(centF)/the housel place
1 the strangerl on
IGo and show the place of the house to the strangerl
Lead
the guest
ta
THE
I-IOUS ID
Pris hors
contexte,
HOUS~ et HOME appartiennent au m~me champ
s~mantique; du point de vue de l'extension des deux notions,ils
ont des statuts assez diff~rents. L'extension de HOME est telle
qu'on
arrive difficilement
à
la restreindre à
l'aide d'un d~-
terminant-article.
Par rapport
aux cas qui nous
int(ressent ici,
HOME traduit mieux la forme Ikp~~.?~~~a plus proche de la notion
totale et THE BOUSE est,
lui,
m~talinguistiquement ?quivalent
à
l'él~ment de la relation nominale th~matiqu.e Ikpa:' .gi/: la
maison.
Voyons
encore un dernier énoncé
avec un nom du groupe 1:
m6.?c
b
k~bà
na
yc
(a) n:me/(pr(ed))1 - 1
on
I(né g)
+ neg
1(a) name is not on Kubal
.
Kuba do es not have
A
NAM!'::
(zz
__ )
b"art
ba'
k~
wl
~gi
b à k b r b
(a) sheep/when
1 die 1 he
1 the namel (pred)/stayl
-
-
ny~.n~
na
(a) hornl on
Iwhen a sheep dies his name remains on a hornl
.
~hen
a
sheep dies
ITS
NAJ'.1E
is
recaLled bv its horn
Ces ~noncés sont tout aussi explicites.
e;n
(:21)
le rtN s'harmo-
nise avec
la base
lexicale pour indiquer
que
la a t r-u c t u r-e ; est une

notion.
En revanche dans
l'énoncé
le MN est phonologique-
ment en rupture avec
la base
lexicale pour indiquer que
le pro-
gramme sémique nominal est décalé par rapport au plan d'appar-
renance de
la base
lexicale,
le plan notionnel,
bien entendu.
La traduction du groupe nominal
senoufo /wi m~.gi/ ~ar
'"
il ITS NAl'-jE /
HIS N.A.HE" en anglais pose un problème intéressant à
la linguistique générale.
En senoufo,
la rupture de
l'harmonie
vocalique entre le MN ~gi/ et la base lexicale /m~-/ indique
déjà que
la relation nominale est en Phase I l ;
le nom est
"défi-
ni" dirait-on ailleurs. Ha i s
en outre,
i l y
a
l'adjectif pos-
sessif /wi/ .'~on', un déterminant de Phase II ou du défini.
La thématicité de
la relation serait doublement marqu~e; le nom
"se trouve doublement défini",
si l'on peut
s'exprimer
ainsi.
Ce
type de redondance métaopérationnelle n'étonnera pas
le
lec-
teur;
nous en avons eu un cas dans
le traitement de
la relation
prédicative Je
Phase II.
Mais
la redondance n'est pas gratuite quand on la compa-
re à
l'opération effectuée en anglais.
Tout se passe
comme si
l'anglais estimait que
la presence du~déterminant anaphorique
ITS /
HIS suffisait pour signaler le statut thématique de
la
relation nominale. Nais
le senoufo récupère cette redondance
en d'autres occasions.
C'est ainsi que nous avons ae nombreux
cas où
la" struçtl.p;'enominale comporte
un MN de Phase l
-
l'indéfini -
et un déterminant anaphorique,
lui,
toujours défi-
ni
m è , ? ë
gi
'"
'"
his/{a)
name
/
i t
/
his name i t /
=
.
I t ' s
A name of HIS

-
1 i~ 6 -
(2J')
wi
m~.gi
gi
his /the name /
i t
/his name i t /
I t ' s his name
L'on voit bien que
le
senouIo tire profit de
la redondance dont
il-pourrait ~tre accus~ en (2J').On nkurait pas pu voir qu'il
y
a
'manque'
en anglais en examinant seulement
(2J~). On se
rend aussi
compte qu'en
(2J),
alors que
le senoufo r~alise une
certaine ~conomie en jouant sur le double marquage -
MN et d6ter-
minant anaphorique -'l~anglais se voit contraint à un investis-
sement plus grand(l).
A preuve,
la tournure périphrastique
'A
NAi\\lE OF HIS.
Examinons maintenant
les
"accidents
phon~tiques
dUI\\lN
de Phase l
à travers d'autres noms du groupe II
Phase l
> Phase II
(a)
farm
së.? ë
se
.gi
the farm
(a)
house
k p a ;? Et
kpa<.gi
the house
(a)
name
mé.? e
mé.gi
the name
(a)
way
kolo.?à
ko16gi
the way
-
(a)
tree
tii.ge
t i i . g i
the tree
-
(a)
foot
t')l,).?J
t~l).gi
the foot
(1)
Le double marquage du statut de
la relation nominale,
l'in-
tégration du déterminant
(l'H~) à la structure du signifiant riorn i.n a l
no va "p a s
. gans poser des problèmes à
l'apprenant
s o no u f'o ,
j~n
apprenant
le français,
cet apprenant projette
la structl1rp du
nom senoufo
sur le français.
Pour nommer
la notion /kpaa.? aJ en
français
"(une)
maison",
i l a
tendance i't la traduire di·recte-
ment par "une-maison".
De sorte que
lorsqu' i l
Y a un (10 terminant
possessif,
i l n'est
pas
rare de
l'entendre
dire
"mon une-maison"
On retrouve
le m~me phénomène dans
le franco-ivoirien. primaire.

Une autre mani~re d'expliquer et surtout d'exploiter sur
le plan th~orique les variations du ~iN est de
consid~rer que
les
cas d'harmonie vocalique
sont des occurrences
particuli~-
res du t-IN i
la forme uni taire,
ici / -gi/ serai t
a lors
la :forme
"la plus -grammaticale",
la .forme
la plus métalinguistique,:-pour
ainsi dire.
Sur cette question,
nous partageons enti~rement les
vues de
O.
Jespersen sur le rapport
entre
lexique et grammai-
re
"Grammar deals with the general facts
of langua-
ge,
and
lexicology with special
f'a c t s "
Hais
O.
Jespersen n'a pas
l'habitude des affirmations gratui-
tes
"That CAT denotes that
particular animal
is a
special fact wh i.c h
concerns
that word a lone,
but
the
formation of the plural by adding
'S'
is a
general factbecause
i t
concerns a
grea:t
many
other words aS well:
rat~, hat~,book~, cap~,
chieÎs etc.,,(1)
Le m~me raisonnement s'applique parfaitement aux variations for-
melles du MN en rapport
avec
les fonctions grammaticales qu'il
est
chargé de marquer.
Nous partirons de
cette m~me hypoth~se
de O.
Jespersen pour relever la diff~rence entre l'adjectif et
le nom face aux méta-opérations.
Pour
l'heure,
restons dans
le
domaine nominal
senouïo.
L'observation des
formes nominales du groupe I l
montre
que
(1)
o.
JESP\\SnSISN
:
The Phi losophv of Grammar,
George A I Le n (,::
Unwin Ltd,
London,
19 2 4 ,
p.
J?

148 -
/-?'), -go,
-? 0,
-?~"'/ ne servent pas de MN à n'importe quel
~
.
nom.
Ils
s'appliquent
en tant que MN à un nom à
condition que
la base
lexicale de ce dernier ait
pour voyelle
finale une voyel-
le post~rieure comme lu,
0 ,
'J,
J • • • /
...
/ -? c,
-?~
-?e . . . /
ont
leur domaine d'application réduit
....... '
à quelques noms;
ceux dont
la base
lexicale a
une voyelle fina-
le avec
les
traits
(+)ant~rieur et/ou moyen: /~, ~, e, i/
Snfin,
le MN aura
la forme /-?a,
-?~, -ga ..• / dans les
seuls cas où
la base
lexicale a une voyelle finale avec
les
traits antérieurs
et bas,
c'est-à-dire la,
al.
,-
Le
fonctionnement
-
mais au fond,
l'analyse métaopération-
nelle -
du MN confirme
les
intuitions de O.
Jespersen en ce
sens que
les
réalisations particulières du MN concernent des
contextes phonologiques particuliers;
quant à
sa réalisation
immuable /-gij
celle dont
nous disions qu'elle était
"la plus
grammaticale",
elle s'applique à TOUS
les noms du groupe I I .
I l
convient maintenant de t i r e r les enseignements théori-
ques qui pourraient intéresser la description des
langues afri-
caines.
La forme variable du l'IN est
sa forme
lexicale
(harmonie
vocalique
avec
la base lexicale);
la forme unitaire du MN est
sa forme grammaticale.
Ces
conclusions intéressent
la théorie
métaopérationnelle au premier chef:
la fonne
lexicale du MN
(notée 1\\iN1)
signifie une
orientation du programme sémique cons-
trui t
vers
le plan not ionne 1;
la forme gramma t i ca le du i'1N (no-
tée .t-;n:2)
oriente
le programme sémique construi t
vers
le plan
méta-linguistique. Au
nom du
principe de métalangue naturelle
ici,
le méta-linguisme morphologique -
i l Y n,
d'une part,

1 r~9
-
une diversit6 d'effets morphologiques -les
r~alisations phon6-
tiques particu lières avec
le j"'IN 1 -
et cl' autre part,
un invariant
morphologique -
avec
la réalisation phon~tique invariante de MN
-
c'est-à-dire
le n;..r~l .•
Phase T - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 7 > Ph a s e J J
plan notionnel
I------------~> plan méta-l,
linge
-? 0
..:.? 0
-gC(
-? e -----:;:;-;:;;;~
J'lN 1 f I\\MM:NN22f-
- - - - - - -
-gi
J
-?a
\\
1
1
-ga ,
1
"accident s
morpho logiuq es --_1
~
Invariant morphologiquE
<=~ di versi té des contextes
phonftiques.
Le MN de Phase II
transcende,
en quelque
sorte
les disparit6s
phoriologiques
(voyelle finale)
d'une base
lexicale à
l'autre.
Clue
le j-iNl
(forme
lexi ca le) b loque. un programme sémique no-
. mina l
dans
I es voisinages
de
la notion trouve
confirmation clans
certaines situations énonciatives particulières.
C'est
le ca~

-
150 -
des dialogues ~pilinguistiques o~ les linguistes ou anthropo-
logues enqu~tant en pays senoufo demandent parfois à
leurs
informateurs de
leur traduire
le nom de certains objets;
le
nom est
_presque toujours donn~ avec le MN de Phase l
(MN1 )
parce que demander le nom d'un objet ou
la traduction d'un con-
cept d'une
langue A à une langue B équivaut
à demander comment
nommer une
certaine notion;
i l n'est donc pas surprenant que
les
locuteurs fassent
appel aux indices m~ta-linguistiques de
Phase I.
Dans
la situation 0qui va lente en
anglais et en fran-
çais où un
Anglais demanderait à un Français de
lui donner le
nom de
l'objet
'broom',
on imagine difficilement
l'informateur
français
lui répondant:
"LE
balai";
disons qu'il sera enclin
à
lui r~pondre: "(un) balai".
En voici une illustration concrète. Une anthropologue
(N.S.)
après
l'enregistrement d'une
consultation divinatoire,
demande,
par l'intermédiaire de
son info:mateur
(S.D.)
au vo-
yant
(Y.)
ce que représente chacun des objets divinatoires.
Nous transcrivons
le dialogue(l)
( ... )
L'informateur (S.D.)
"il dit
c'est ça la maladie . . .
L'anthropologue
(N.S.):
" ..• la maladie c'est . . .
le bout de
verre rouge,
c'est ça la maladie .•.
Le voyant
(Y.)
yâa .rnà
yaa .rn I.
fàtô
'vi
bë-'vè
suffer .HN1
/ suffer .r'lN~: / (a)
picture/i t /
this
/Suffering!
the suffering-picture this i t /
Sickness
This is THE REPRESENTATION of
SICK1'1ESS
(1)
cahier XXI,
p.
1 L~,
10/02/
1985.

151
Le voyant qui ne parle pas français
r~pond directement;
la si-
tuation
Lui permet de savoir que
l'anthropologue veut se faire
expliquer la signification du
II·
bout de verrerouge" .•• mais
ce n'est pas l~ la question. Portons notre int~r~t sur l'Orclonnan-
cement
des formes nominales dans
sa réponse.
I l commence par
donner le nom avec
le MN1
/-m~/; il s'agissait de nommer l'ob-
jet;
parvenu ~ l'étape relationnelle suivante,
i l ne nomme plus
l'objet:
il.en parle et fort
logiquement,
i l
emploie le nom en
Phase I I
avec
le MN2
/-m{/.
L'énonciateur aura ainsi respecté
scrupuleusement
la successivité des étapes relationnelles.
Le MN1
bloque un programme sémique nominal dans
lesVoisi-
nages
du plan notionnel;
c'est une façon de dire qu'il marque
un nom en rapport direct avec
l'extra-linguistique.
C'est
la
raison pour laquelle
les noms communs utilisés comme prénoms
sont
toujours donnés avec
le }IN1
nyi .m€
m~a
ni
yugo
/(pred)+
/(pred)/your/ ask
(past)
/
Nyimè
has been asking
your affair/
Nyime
had
been looking for you
(25')
B
nyi.mi
b~'
na
m~
nYE
?
shadow~N~/it+interro)/on/
you/
~tre
/which
shadow(1)
are you on ?/
.'l':hich
Nvime are vou referring to ?
La
Phase r
caract~ristique de la désignation des personnes
étant d~passée en (25'),
la forme
thématique du nom produit
un
Tl)-litt(,rale~ent, le prénom /nyimc/ signifie 'ombre', c'est-à-
dire,
'repos',
'paix' . . . par extension.

152 -
\\l,
et'fet appréciatif.
Il aurait Ïallu
le traduire par "De quelle
1
ombre parles-tu ?" j'iais
l ' 0noncp origina l
senoufo
(:2 5') est
tout à
fait
corr~ct. Cn s'écartant de la Phase l
-
la forme
lin-
guistique habituelle ~vec le MN1) dévolue à la nomination des
personnes -
l'énonciateur fait
comme s ' i l parlait d'une vérita-
ble ombre:
i l y
a un effet de ~hosification~
En ang lais on re lève le mêlne phénomène et
là encore,
i l s'agit de
jouer sur le statut du nom par
déterminant-article
interposé. On sait qu'en anglais ou en français,
le nom propre
est habituellement structuré dans
le discours sans marque de
détennination en surface.
L'absence de l'opérateur dans
l'an-
técédence du nom est,
en général,
indicatrice de Phase 1(1).
De
sorte que,
dès que
l'énonciateur: feint d!exercer quelque
ré-
duction de
l'extension(2)
du nom propre,
l'effet de particula-
risation qu'il obtient
se voit doublé parfois d'un effet appré-
ciatif :
(26) Ivell, we survived A PRESImmT Nixon,
T guess we shall
survive A PRESIDENT Reagan,
l
hope.
(emprunté à
C.
Delmas,
1985)
[·lais
les résultats ne sont pas obtenus ,exactement avec
les
mêmes moyens et
dans
les mêmes conditions.
En anglais,
i l a
suffi d'introduire
le nom avec un
déterminant-article
porte lequel -
pour bbtenir l'effet discursif escompté
(1)
voir GL-'\\,
198?,
chapitre 8
(2)
Les noms propres seraient-ils auto-définis,
c'est-à-dire,
déjà en Phase I I ?
Voir S.
IŒIPIŒ
Naming and Necessity in
D~ DAVIDSON & HAHNAN eds,"Semantics of Natural Languages",
Dordrecht,
Reidel,
1972

-
15J
-
(27) The Tri pp w om e n say that
~ i'1iss L}\\~vSON wa s comple-
tly taken aback when the will wa s
read.
(DID1\\HT -
10J)
(27-')
"End ly sti 11 w o n t
on spending very little. Hesult,
she died a
rich woman and
THI;:; LA\\vSON \\V'O?-1AN
gets i t all"
(mn-l'VIT - 88)
Eri ~7) c'est seulement la personne
(~ Miss Lawson) qui est
en cause;
en
(27')
i l est question de
la même personne mais
on y
ref~re non sans une~~g~re connotation appr~ciative; et
cet effet
est
imputable autant à
la pr~sence de WOMAN,
qu'à
l'occurrence de THE à
la place de
(~). L'effet disphorique con-
corde d'ai lleurs avec
le contexte: 1''Iiss Lawson est
soupçonnée
d'avoir falsifié
le testament de son amie et patronne,
d'avoir
acc~l~ré sa mort, afin d'hériter d'elle ••.
Les effets de sens ne sont pas toujours faciles
à d~crire
mais on peut r~sumer.en disant que ce qui permet
l'interpr~ta­
tion
(~)apppr~ciative des noms propres introduits avec des
d8terminant-articles en français
et
en anglais,
c'est
la struc-
turation de
ces noms propres
comme noms
communs:
l'emploi de
ces opérateurs est -
en principe
dévolu aux noms
communs
et
IpTsqu'on en arrive à structurer un nom propre avec
les mêmes
op~rateurs, tout se passe comme
si
l'cinonciateur chosifiait
le
réfcirent.
Bref,
la structuration d'un nom propre sur la chaine
discursive à
l'aide d'un déterminant-article signifie que Ce
nom propre n'est
plus employ~ pour
interpeller ou d~signer, mais
que l'on en fait .uri objet,
et un objet du d i s co u r-a ;
I,e
p r-o c d
é
é

ainsi d?crit
est
l'un des
champs de pr~dilection des th~ories
d'analyse du discours,
la stylistique,
par exemple;
en senoufo,
en anglais
comme en français,
i l
consiste à
procéder par "écarts
"
1\\
metaoperationnels.
Nous aurons
l'occasion de
revenir sur le m~me ph~nom~ne
en senoufo avec
la différence que nous aurons affaire au procé-

inverse.
Au
lieu de traiter énonciativement
une personne
comme un objet
commun comme nous venons de
le voir,
le senoufo
jouera sur l'interEhangeabilité de
ses MN pour personnifier des
réf8rents non humains.
I l s'agit pour le moment de montrer qu'en
senouÏo,
la dfnomination même d'une
entité
non humaine s'effec-
tue a v e c
l e 1·1 N 1 •
L'un des meilleurs
exemples
est
celui des
contes où
les
protagonistes des intrigues sont des animaux.
Les noms
communs em-
ployés pour les désigner en tant que personnages
sont
tous mar-
qués par le MN1.
Cela ne doit
pas
surprendre puisque
le
conteur,
c~est-~-dire, l'~nonciateur, cherche à présenter son histoire
comme une
situation vécue
(28 )
a
ko 1 .~ c -) 1 ~
( . . . )

wélé
ni
jo
( (: 0 riri , ) /
Go d
/
them/
look/
and
,/
say
"bà
se
rry e
? "
""
(emp. ) /
where/ vau l ture •.Î'INl
/
he
/ . . . and God
looked at
them ~nd said
"but where
is
(a)
;aulture/
••. Then God stared at
thern and askec1:
"Sa
where is VAULTUHJ~ ?"

155 -
( 2 9) • •.
;-l '
k

à
,
jo
" kàc\\?:> .g2
il
(conn.)/village.MN1/ hen.MN1/sayj
vau l tuYe . YIN 1/ (precl)
mot
pi-fana.gi
ka
f '
,
,..
_,9:r Q
"
'"
/you
/chilcJ-crippled .r'lN2/(ptrd)/(pred)/(precJ)/hirn
/tire
wëè
dàà
gbà'
pi-fana.?a
'"
~
'"
him/(pred)+(nrg)/able /
stand /sornebody /child-creepled.MNl

/near /
(neg)
land Hen of the village said:
"Vaulture has said your
crippled
child tires him,
he
can't stand near somebody's
crippled
chi Id/
•.•
and BEN of the village answered
:
"Vaulture's
been cornplaining that
he has enough of i t . He can't
waste his time assisting a
paralytic chi Id . . . "
L'on
aura noté
l'harmonie vocalique entre les voyelles des MN
et
les dernières voyelles
de
leurs bases
lexicales
(s~Quences
soulignées),
ce qui,
nous
le savons maintenant,
est indicateur
d'une relation nominale de Phase :::E.
Il suffit de franchir cette étape relationnelle pour que
le signifiant cesse d'être un
(pré)nom.:
(JO)
k
ri
à
"

cërJ.
pi'i . wi
(conn. ) / vau l ture . /rneat .,\\IN2 /
cut /(pred)/put/child.)\\lN2
~<Nl
ny~
ni
( . . . )
à
wi
i
ç~
kàc~1~.g~
rn~
rnouth.;-'iNl/ in/
(conn.)
/
he /(pred)/go /
vaulture'~'1Nl/to
land Vaulture cut
the rneat and put in the mou th of the
child
( . . . )
and the
child rnoved to
Vaulture/
. Then Yhulture cut sorne rneat and put i t in the child's
mouth
(1) A.
KIENTZ
:
Dieu et les génies. Hécits étiologigues senoufo
(Côte-d'Ivoire),
SELAF,
Paris
1979,
~p. 129 & 1J9

156 -
(JO' )
sani
..,
go' \\-J i
kw1
ct
kàl)c-)l~
\\
before/ hen .}jN2
/(pred)/finish/(conn.)/
god
pii.wi
child.i\\iN2
/
walk
/before the hen be finished and the
child of God walked/
Long bef'ore THE: CHICK;~N finishes
the
son of God had
started wa U{ing
Ici
l'on portera l'attention sur une seule unit~. Lorqu'en (29)
POULE était personnifié on avait /gà.là/
_
'poule':;
le narra-
teur faisait
alors parler POUU~
DU VILLAGE. et ce lui-ci rappor-
tait
les ~carts de conduite de Charognard à Dieu. Mais en (JO')
/ "
,
go': .•WJ. /
'la poule'
ne désigne plus
le personnage.
T
,
'

L
pnonCla-
teur reprend
le f i l de son histoire,
se rendarit ainsi maitre
de
l'assignation de statuts aux signifiants nominaux.
/gà'.wi/
refère alors au
.met~ cuisiné destiné à
l'enfant de Dieu. On
notera,
dans
la traduction,
la solution lexicale de
l'anglais.
HEN OF THE VILLAGE devient
CHIC}CEN destiné
à
la consommation.
ii )Remarques sur l'absence du HN à "l'ind~fini"
Parvenu à
ce stade de
l'analyse,
nous
sommes en mesure
d'expliquer le pourquoi de
l'absence du MN dans
certaines for-
mes nominales,
en particulier les noms d'emprunt.
La Gramrnar
Lessons écrit·:
"l\\!ost of the wii
class-nouns d o not have an indE-)-
finite
suffix ( . . . )
The indefinite singular noun
is identica l
w it.h
the noun stem" (:2) •
(1) A. KlENTZ
op.
c it. ,
pp.
129,
139
(2)
Grammar Lessons Tyebara-l'~nglish, ~lission Daptiste de
Korhogo,
(Côte-d'Ivoire),
Part 1,
197L~, p. 7

157 -
A lire
les auteurs de
la Cramrnar Lessons,
on a
l'irnpression
que
"l'indéfini" n'est rien d'autre qu'une forme.
]\\'lais
ce qui
est plus sérieux c'est qu'ils ne
se posent pas
la question de
savoir pourquoi la base
lexicale
"the noun stem" -
peut
intervenir toute nue dans
l'énoncé
pour y
assumer une fonction
syntaxique.
L'absence du MN produit un cas de déficit métaopé-
rationnel.
Blle signifie que
la base
lexicale
signe
linguis-
tique servant à
nommer une notion,
est actualisée dans
le dis-
cours à
l'~tat de notion pure. Cela débouche tout naturellement
sur un effet de générique ou d'indéfini pour
la
juste raison
que
la notion nominale a
gardé
toute
son extension. Mais
en
Phase II,
le déficit métaopérationnel est reparé
et
la base
lexicale reçoit
le MN2
,
,
J.
e.g.
(a)
book
slbe.'P
the book
sibé.wi
L'analyse métaopérationnelle du fonctionnement
du ~·!N est
certainement généralisable à d'autres
langues africaines où
le
syst~me des MN est en déperdition;
ce serait
le cas du wolof:
"Le
s y s t èrne
classificatoire du wo l.o f
est en pleine
déterioration.
Ainsi un nom peut être utilisé
sans son morph~me de classe.
Lorsque
le morph~me
de
classe est ~tilisé, c'est pour exprimer le défini:
(a)
~ox
ma
ndox-mi
donne-rnoi
l'eau
(b)
jox
ma
ndox-rp
donne-moi de
l ' Rau
( 1 )
(1)
Spminaire de S.
Sauvageot
"Probl~mes de description des
langues aFricaines",
I.P.A.L.G.,
16/11/
1982

-
158 -
Notre explication vaut ~
la fois
pour le senoufo et pour
le wolof.
Le système classificatoire du wolof est peut-~tre
en pleine dégradation mais
si dans
(b)
i l n'y a
pas de ;\\IN,
c'est ~ue la visée du discours nécessitait qu'on introduise
Le nom à
l'état de notion et
la notion la moins altérée qui
soit est
celle ~ui est exprimée par une base
lexicale sans
la
moindre trace de réduction de son extension,
c'est-à-dire,
sans
J\\fN en surface.
L'(~noncé (b) peut ~tre interprété comme "donne-
moi à boire";
BOIRE intégrant dans
son sémantisme la notion
/ndox/ -
'eau' . En
('a),
par contre,
la notion /ndox/
est com-
plètement dépassée en tant que notion lexicale primaire.
I l
y
a,
en quelque sorte,
un parti-pris de
l'existence de l'eau
dans ',la situation.
Si
l'interlocuteur peut refuser de donner
de
l'eau,
i l ne peut pas prétendre qu'il n'y'
en a pas.
L'on ne
. perdra pas de vue que la fonct ion centra le d u.
HN
est de symboliser une relation.
En articulant un programme sémi-
que nominal sur la chaine
linéaire,
i l représente un point de
jonction entre
le programme sémique nominal et
la chaîne
linéai-
re donc une relation.
Ces diverses
configurations
(diversité
)
de ses réalisations phonétiques
vs.
unicité de ses réalisations)
constituent un
syst~me de datation de la relation nominale.
Dans
la successivité cles étapes relationnelles,
la forme
lexi-
cale symbolise la premi~re étape relationnelle et
la forme
ia
"plus grammaticale",
la seconde étape relationnelle.

159 -
1ii)
Le MN du pluriel
Nous (~h"noncions l'insuffisance exp Licative clu rium-s r-o t a g e
des MN
(num~ros impairs pour le singulier, num6ros pairs pour
le pluriel).
Jl vaudrait mieux,
sernble-t-il,
se demander ce
que
repr~sente le pluriel par rapport au singulier, bien enten-
du,
du point de vue des opérations.
Cela revient à
situer le
singulier et
le pluriel dans
le
système de
comptabilit~'que
tient
l'énonciateur au fur et à mesure de
l'effection des op~-
rations.
En d'autres
termes,
i l s'agit de situer singulier et
pluriel dans
la chronologie des étapes
relationnelles.
G.
Guillaume a
emprunté une autre voie
et
l'intprêt de
son analyse est qu'il met
en pvidence
le parallélisme profond
entre
le système de
l ' a r t i c l e et
celui du nombre dont
l ' a r t i -
cle est
justement
le support formel,:
"Le système de
l ' a r t i c l e
comme celui du nombre
se recompose
en·deux tensions,
l.'une extérieure
qui représente
la formation du ~ingulier à partir
d J.u n a plura l i t~
indéterminé e aussi
t e ndu e que
é
l'on voudra,
et
l'autre extensive,
représentati-
ve de
la formation,
à partir du singulier,
d'un
pluriel que rien ne
limite ll ( l ) .
G. Guillaume voit donc
le singulier et
le pluriel comme deux
phases rigoureusement ordonn~es. Nous reproduisons son schfma
en le simplifiant
(1) G. GUILLAU~iS :
ilLogique constructive et
interne du
svstème
des articles
français",
dans
Langue et
science.
du
langage,
Presses de
l'Universit~ Laval, Qufbec,
1973, pp. 169-70

161
un point de d~part et dans l'autre,
avec MEN,
elle constitue
un point d'arrivée. Mais on part de
la notion pour revenir h
la notion en suivant un sens obligé,
celui de
la chronologie
linguistique
(Sg ~ Pl). En bref, i'1AN et :-lCN nomment des notions
ayant
le m~me d6gré d'extension mais des notions ayant des sta-
tuts m6taop6rationnels bien diff~rents. On comprend pourquoi
le dictionnaire dont
le rôle est de recenser des notions dans
leur état
le plus pur,
n'accorde pas d'entrée
lexicale à MEN
au mème t i tre que MAN.
La différence de
statut entre j'·1AN et
M~N implique une sorte de hi~rarchie en système dès
le plan
notionnellMAN est en Phase l
par rapport à MEN :
plan notionnel
plan de structuration
(- extension)
(+ extension)
i'l A
N
1 1-\\- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - ,
MEN
2 ~(-------------------------------'
Tout
cela pour dire que, quelle que soit la langue consid~rée,"le
pluriel implique un d?passement de
llunique"(l)
et
le
concept
de d6passement à
est souligner.
~n senoufo,
la forme pluriel du MN accuse une certaine
homog6n6ité
morphologique d'un nom à
l'autre,
homogénéité quasi-
absente dans
le singulier dit
"indéfini"
ba
gàci;.n§
ka
think.~JN1/1ess/ if
/hen-egg.~lNl /
eat
J
c€

go-n?-pà.wo
wi
?
(conn.)/he /
know/(interro)/hen-mother-whole/
i t
---------------~-
( 1) GLA ,
1 982,
p. 2 1?

162
-
/ i f a mindless eats an egg,'
does he knowhe has
eaten
an entire mother-hen/
. \\vhen an unthinking_person eats an EGG ; he'-never rea li-
zes that he's eaten an entiremother-h~n.
,
(33' ) gà-c~.géle
S l
16
pyày~-lii.g~ 7
hen-egg.MN1/then/ be /(interro)/(a)
chilcl/thing~eat.
JIN 1
/eggs,
are they a
chilcl's eating thing 7/
.
Should
EGGS
become children's eating thing 7
A
gi
tàrà
kâb~. lè
na
7
what /
i t
/you
/obtain/finger.MN1/ on
! What got you on
( a )
fi ng e r
? /
. What is wrong with your finger 7
-
B
ng~' .ni
li
mi
lônl
këè
na
knife.MN2/
i t /me
/
cut /
this Ion
1.
kàbÈ' . gè lè
18
finger.MN2 /
swell
/the knife cut me,
on this,
the fingers
swelled/
. T eut myse If ,yi th the knife that' s ,yhy my
l''INGEj'tS s'ye lled
En observant
les formes
soulignées,
on remarque que
la
forme
du singulier est sujette au~.variations du contexte phonologi-
que,
ce qui n'est pas
le caS des formes
du pluriel.
Illustrons
le phénomène en prenant d'autres formes nominales du même grou-
pe
(III)

16J -
(an)
egg
cc.ne-
c~.géle
eggs
~
(a)
pen
si.lé
si.gélë
pens
(a)
Linger
k a b c v Lè
kabc.gèle
fingers
kabë' .gèlè
the fingers
(a)
sin
ka-pë.lè
kapé.gèle
sins
(a)
voiee
y€.,.kpo.lo
yé-kpog(" le
voices
y é-vk po. .gèlè
the voices
Les variations dans
la forme " singulier du MN s' expliquent enco-
re par le ph6nomène d'harmonie vocalique entre
la dernière vo-
yelle de
la base et
la voyelle du MN. La forme pluriel
"fait fi"
du contexte phonologique;
i l se mont~h~ de cette manière,
autono-
me vis-à-vis de la base lexicale,
indiquant
ainsi
undépas-
.s eme rrt métaopérationnel
de
la
forme - du signifiant nomi-
nal et partant,
une d6marcation du programme sémique du nom par
rapport au plan notionnel.
La pluralisation constitue effecti-
vement ,en tennes d 'opérations, un travail supplémentaire,
donc
une certaine intervention de
l'énonciateur. Résumons
les faits
pour bien mettre en 6videnee
l'opposition des deux plans
Ph a s e T
)
Phase JI
; · . l N P 1 J - - - - - - - - -gele
,
-'
1 /
.r
)
\\ ;
"accidents lfIorphologlques"
Invariant morphologique
-- diversités des
contextes
forme unitaire
phonétiques

1 6!~
-
La notation du pluriel est .i.n co mp l.o t o ; .i l
ma riq u o
IJ~ schème to-,
nal.
Ltexamen des formes
dans
les 6nonc6s et
le tableau de
la page préc6dente montre que
le
le MN pluriel est tant5t /-g~l~/
ou /-gélé/ . . . I l va donc falloir approcher le problème de plus
pr~s.
J)Le MN et
la valeur grammaticale du ton
Le ton 6tant pertinent en senoufo,
i l va de soi que ce
procédé
linguistique soit exploité au niveau grammatical et à
fond.
Nous y
reviendrons plus en détail
au
chapitre s~ivant.
Nous 6pargnons au
lecteur,
en ce qui concerne le marquage du
nom,
les détails
li6s à
la supperposition des
syst~m~ du déter-
minant et du nombre:
i l aurait fallu tenir compte à
la fois
de
la conjugaison des opérations de réduction d'extension des
notions~nominales et également du param~tre nombre (Sg/Pl).
Les phénomènes à analyser concernent
la structure inter-
ne des signifiants nominaux;
le
contexte n'est pas,
pour ainsi
à i r e , t r è s déterminant.
Nous
prendrons alors un nom da.nschacun
des 5 groupes pour
y
observer les diverses
configurations des
tons Haut
(H),
Bas
(8), Moyen (~). Le statut du programme sémi-
que sera déterminé
en fonction de ses affinit6s' plus ou moins
prononcées avec
le plan notionnel.

-
165 -
Groupe l
(1)
+
notion ~,'--------
i'lN2 - - - - - - - - - - - > . ) 0 (2)
- no t ion
sg:
pya
(a)
chilcl
pii:wi
the
chil.d
B
o \\]1 . BI
pl
pii.bélë
children
p]!l.bèlè
the children
B VI . B [n
(2) - notion
Groupe I I
(1) + notion ..~:....-------- MN1
t-IN2
--------..,,~ (2) - notion
- ,
sg:
ye.ge
(a)
moon
y e " . gi
the moon
l'I

H
MB
pl:
yë.yè
moons
ye ~ .yi
the moons
M • B
N [ g
(2) - notion
Groupe I I I
( t )
+ no t ion -E<~
j'lN1
~·1N2 _ _ _ _ _ _ _~>(2)
- notion
sg:
p~.lÊ;
(a)
plate
p€:' . li
the plate
pl:
pÉ:.gélë
plates
pe' .gèlè
the plates
M

H l'l
(2) - notion
Groupe IV
(1) + notion -l!!(:....--------
nN2
_______..}.) (2) - notion
ç~. r-e
(a)
Language
ç 8' . ri
the
language
l']

M
l'1 IH . D]
~-...

166 -
Groupe V
(1)
+ notion ~'---------;\\IN1
---------'>-~(2) - no t i on
, ,
,
mf.mE
(sorne)
flour
m11.m1
the flour
11
• n
• Commentaire:
Rappelons d'abord que
les indices
(1) et (2), que l1-e.que
soit
leur orientation,
repr~sentent toujours les saisies suc-
cessives en système duprogr~nme s~mique nominal,
c'est-à-dire
sa localisation sur un vecteur
RH ---7' TIL
Les observations por-
teront,
d'une part,
sur la structure tonale d~ MN, puis sur
celle de
la base
lexicale d'autre part.
~) schème tonal du MN
Dans
les
formes de gauche,
celles ou le programme s~mi-
que est proche du plan notionnel
(----.1- + notion), ·-,on relève une
diversit6 de schèmes tonals pour le MN. Une ~tude tonologique
plus soutenue permettrait
certainement de voir que
la structure
tonale du MN est influenc~e par celle de la base lexicale. C'est,
d'une certaine manière,
une servitude de r~alisation du MN
vis-à-vis de
la base
lexicale et
cela au niveau supra-segmental.
Autrement dit 1
a
c.b a qu e base
lexica le son lVIN et
à chaque
;vlN son
schème tonal sp(cifique.
Pour la forme que nous consid~rons ~tre
la forme
lexématillue du signifiant nominal,
i l y
aurait un~schè-
me tonal
lexical du MN1,
le MN de Phase 1.

167 -
Ce
n'est
po..s
le
CéJ.R
des
formes de droite.
Le nom est en
rupture avec
le plan notionnel
(~- notion); le l'IN indique
que
le programme
s~mique nominal est orient~ vers le plan méta-
linguistique.
Ce
que
la tradition d~crirait comme formes du
"dé:fini singulier/pluriel"
repr('sentent
en fait
un état de rela-
tion d e p a s s(~ e
et
ce c1~pas sernent signi.fi e que
l ' énoncia t eur est
plein dans
le domaine grammatical.
En effet,
la grammaire a
pris
le dessus
sur le
lexique et
impose à
l'énonciateur d'em-
ployer pour tous
les noms Sg/Pl un MN dont
le
sch~me tonal est
toujours
B(D).
)1)
sch~me tonal de la base lexicale
L'examen des formes
de gauche montre qu'il
ost difficile,
voire impossible de
leur postuler une structure tonale
commune.
Par contre,
en ce qui
concerne
les noms de droite,
les formes
thématiques du signifiant nominal,
i l y
a
au moins un tràit
tonal qu'elles partagent toutes:
à
cette étape relationnelle,
le dernier ton est
toujours Haut
(H).
A Y regarder de
plus pr~s (voir structuras tonales enca-
drées),
ce
ton haut marque un point de
jonction entre
la base
lexicale et
le MN.
De
ce point de vue,
le ton haut
est en fait
une interface relationnelle
base
lexicale
j\\j
N 2
T
T
r
T
Il
1 Il
' - - - - - - - - - - - - - '
soit
Il
CT T~
3
-------
-------
base
lexicale
f·l 0J 2

-
168 -
La présence du ton haut dans
l'inter.face relationnelle est
un ch-~tai L à ne pas perdre de vue. Il serai t
peut-être hasardeux
de postuler le trait
supra-segmental de hauteur comme indice d'ac-
quis de relation.
Ce
trait de hauteur devrait être rapport~ ~
la
d~term~nation en g6néral,
la détermination d'un nom par un autre
dans
la composition,par exemple.
Nous n'avons pas assez d'in.for-
mations
sur les phénom~nes supra-segmentaux pour le faire dans
le cadre du présent travail.
Nous y
reviendrons au chapitre sui-
vant mais
sommairement et i l sera surtout question de comparer
le ton à
l'accent sur la base de
la dynamique de
8tructuration
Apr~s l'examen des diverses configurations du MN,
on peut
dresser un tableau récapitulatif en prenant pour critère,
non pas
le nombre,
mais
la successivité
en système des étapes relationnel-
les.
Cet écart théorique par rapport à
nos prédecesseurs est
jus-
tifié:
le marquage du nombre
(Sg/Pl)
se constate et n'a pas besoin
d'être soutenu par quelque théorie d'analyse;
le système de pha-
- .
ses a t r-u c t u r-a les qui est plus subtil
mérited'~tre visualisé .. ,
plan
plan
méta-ling
notionnel
MN1
~
Sg
Pl
S g
:el
,
,
-~
.-.
r
-cv
-bvlv
-t'·wi
-'bèl~
-\\vv
1
,
-gv
r r
-yv
- gi
- yi
-?v
-gvlv
-lv
-?vlv
-':li
-g~ li'~
I I r
-uv
-gvnv
-?vnv
,
-rv
-~di
.V
r
~clv
1
;
1
, ml
V
-mv
-
,
1 - ( cv) cv 1
.:: (dr) dr 1
1
formes
lexi ca les du ~IN
formes
grammaticales du MN

169 -
êJ t·lise au point: l'étude de.; traces de relation et
et
l'approche phonologique
Le tableau rfcapitulatif s'est
efforc~ de r~unir toutes
les r~alisations du MN. Entreprise difficile puisqu'il aurait
fallu tenir compte de
tous
les
contextes phonologiques.
I l sem-
ble donc n~cessaire de faire une br~ve mise au point
concernant
le probl~me de la variation~du MN.
Par simple observation nous
sommes arrivé à
ce
constat,
qu'à la forme dite
"ind~fini", le MN se pr0sente sous une diver-
sité de formes,
formes
qui
s'opposent à
celle,
unitaire du "défi-
ni".
De
sorte que nous avons,
non seulement
plusieurs formes
de MN1
dans
le syst~me nominal en gén~ral, mais aussi plusieurs
configurations du MN1 à
l'intérieur d'un m~m~ groupe de noms.
Notre analyse pourrait ainsi ~tre tax~e d'atomiste.car i l s'agit,
dans un m~me groupe de noms,des r~alisations multiples
et super-
ficielles d'un seul et unique morph~me grammatical (le MN).
L'on a
pu aussi
se rendre
compte que,
au delà de
la varia-
tion conditionnée par l'harmonie vocalique
(entre
la derni~re
voyelle de
la base
lexicale et
les/la voyelle(s)
du MN) i l se
produisai t
aussi
un autre
phénom~ne d'assimilation:
Groupe II
(1) ~:>- - - - - - - phas~s -------7i>~ (II)
a)
kà.?à
kà0.gi
(a)
village
the village
ti.~
t~' .gi
~,J
(a)
noise
the noise
.',.

170 -
On note que de
a)
a
b)
la v~laire glottale /?/ devient une
v o l.ai r-o simple /g/.
Le m~me ph~nom~ne d'assimilation se constate dans
la
Phase l
des MNl
du groupe II
Groupe III:
(1) > > - - - - - - - - - phi'lses ---------~»(Il)
a)
ce.lf:
C8' • l i
(a)
ca labash
the ca labash
c~' • ni
(an)
egg
the egg
De
a)
à
b)
nous
passons de
la
lat~rale dentale (II à la
nasale dentale /n/.
A l'origine de
changement de
traits,
i l y
a
assimilation progressive sous ~orme de propagation par la droi-
te de
la nasalit~ propre à la voyelle finale de la base lexi-
ca le 1C€-j.
}'l~me après le passage en Phase II, la f'o r'm e di te "dé-
..
, t Lni "
la nasalité persiste i . e .
/c!2'.nil - 'l'oeuf',
Dans un cas
comme dans
l'autre,
postuler d'une part /gv/
ou /?v/ pour le ~lNl du groupe II, ,et /lvl ou /nv/ pour le j\\!Nl
du groupe III d'autre part) n'est pas une solution phonologique
très heureuse. Un m~me morphème assumant
la m~me fonction dans
les m~mes situations peut avoir des réalisations phonétiques
dif~érentes mais doi t
avoir,
à que lque niveau abstrai t,
une et
une seule structure phonologique.
Le s
diverses
réa lisations elu j\\iNl
sont des effets phon~-
tiques
A
au
meine
titre, que
les
"e~Îets de sens" d4noncés
dans
l'analyse des
é
no n c
s ,
Notre ~tude n'aura donc pas isolé 'cet t,
é

1 71
f 0 rm e
l NV A ln AN'l' [;; ri 1.1 ;. i i.J 1
e t
no u s
con c r'. don s
CI u ' e Llep eut
La i 5 se r
un
phonologue sur sa r~im. Il aurait fallu d~passer les varia-
tians superficielles
du MN1,
analyser les
conditionnements pour
atteindre sa structure phono logique abstrai te.
A
La meme
rernar-
'lue vaut pour l'analyse
sommaire que nous avons 6bauchée des
structures
tonales
Comment
justifier notre ~fmarche ?
Tout dppend,
nous
semble-t-il,
des objectifs th?oriques
de
départ.
I l s'agissait pour nous de rechercher les traces
de relations
symbolisées par le HN et montrer dans quelle mesu-
re
la diversité
ou
l'unicité de
ces traces
p o'u'va i 't
s'avérer
~tre des indices m~ta~linguistiques du statut de la relation
nominale.
Pour une analyse du conditionnement de
la forme pho-
nologique du MN, nous renvoyons aux
travaux
de P.
Doutin(l)
qui tente une étude plus
exhaustive.
Mais
pr6cisons encore
une fois que
son analyse
se situe au
stade du distinctif,
du
classificatoire,
une étape d'ailleurs
oblig~e .. Dans le cadre
d'une grammaire d'opérations,
i l nous fallait
relier le niveau
phonologique au niveau des
opérations énonciatives pour la
juste raison que
"le point de vue phonologique traduit
le point
de vue méta-linguistique" (2) •
Faisons une derni~re remarque a
propos de
la structure
abstrai te
(7 profonde) des i·m du
groupe··II
(j? vi, 1ev1) et
du grmJpe III
(/nv/, /lv/). Il Y a des raisons de penser que /nv!
est une variante
combinatoire de / l v / .
D'abord dans
la variante
(1)
voir bibliographie
(2)
H.
Adarnczewski,
le 07/05/
1985

172 -
de
s e no ufo Clue nous
a n a Ly s o n s
(kouf'lo-fonondi),
l'ensemble des
noms du groupe III
sont
tous marqu~s par le MN /lv/ à
l'exclu-
sion de
ceux qui ont une base
lexicale domin~e par
le trait
de nasalit~. Par ailleurs,
lorsqu'on compare
la variante senou-
fo que nous
~tudions au
fodonon
(ftudi~ par P. Hautin) et qui
est reput~ ~tre une langue plus nasalisante(l), on se rend comp-
te que
le j"iN du groupe III
est
presque toujours rralis0
/nv/
là o~ i l est r~alis~ chez nous /lv/. Un dernier argument en
faveur d'une structure abstraite /lv/
est que
lorsque cet op~ra-
teur se trouve isolé,
i l prend une
forme
immuable / l i / .
Le
m~me arc:ument vaut aussi pour le ;'lN du groupe II. S,a forme la
plus abstraite,
la plus générale est /gv/ au
lieu de
/?v/ puis-
que
lorsqu'il
apparaît tout
seul,lorsque sa forme n'est d~ter-
..
mlnee par aucun contexte,
i l est
réalisé / g i / .
I l
convient alors de voir dans quelles
conditions
le MN
apparait
tout
seul,
c'est-à-dire,
se d&tache de
la base
lexica-
le,
et
surtout
le type de métaopération qu'il
exhibe
par la mê-
me occasion.
D)
LE
~l N
et
LA ;vJISE EN ;\\lJ'=;YiOIHE SYNTAXIQUE
1)
La datation par l'anaphore
L'un des quatre
. ,
(~' )
c r-a teres
ùr~finitoires des La ng-u o s

classes" e5t
l'étroite corrélation entre le système des morphèmes
classificatoires et
le système des pronoms.
Le
doute ne serait
-----------------
(1)
Là o
le kouflo-Ïonondi dit:
/cç; .le/
ù
'calebasse',
le
ÏorJonon cIe
P.
Boutin dit:
/ce.nË:/
-v
'-
(2) Séminaire
de S.
Sauvageot:
"Problème de description c1es
Larigu e s
af r-Lc a i n o s "
16/ 1 -1 /
1 9 8:?

173 -
pas
s~rieux sur l'existence de ce rapport.
I l y
a
effectivement
un rapport
entre
le MN,~opérateur d'une relation nominale et
la forme pronominale ayant
pour ant~c6dent le nom. Mais cons-
tater un fait
est une chose;
en expliquer le pourquoi
en cons-
titueune autre.
Ici
la justification du fait
en question npces-
site que
l'on remonte
les mfcanismes métaop6rationnels que sup-
posent
la mise
en discours,
donc
la mise en relation
(avec
la
chaine
lin~aire) du programme s6mique nominal, puis sa substi-
tution par une
forme
anaphorique.
Au
terme d'une 6tude phonologique très rigourouse et qui
visait a
"la d6tection des
suffixes de
classes",
E.
Bonvini pen-
sait
avoir trouvé
le rapport
et
surtout
la nature du rapport
entre
le
système des anaphoriques
et
les
"suffixes de
classes":
"Si
l'analyse ci-dessus s'avère exacte,
i l se
confirme que
la fonction première des anapho~
riques
n'est pas
classificatoire mais r6f~ren­
tielle" (1) •
L'intitu16 m~me'de l'article de E. Bonvini indique clairement
que nos deux objectifs ne
sont pas
tout
à
fait
les m~mes.
r~. Bonvini pré c o n i s o de.s moyens (analyse phono logique) de dépis-
tage des formes
jouant
le
rôle de MN;
autrement dit,
i l doit
d' abord en d!'montrer l' exi st ence en kas em.
/1.
Ce
stade, d.to b s o r-»
vation,
l'analyse est
encore structurale et
l'on peut
effecti-
vement
p a r: Ler de
"suffixes de
cl a sses Il •
Nous pensons avoir
(1)
i';.
üONVINI
"Pr-o c d u r-e de d
t o c t Lo n des suffixes
classi-
é
é
Cicatoires
en kasem,
(parler de Pô,
ll au t o Vo l ta) "in l\\fri1ue
et
Langage,
S, ;..'èrne semestre 1977

174 -
s u f f Ls anun e n t; mo n t r-é
flue,
tout
en
participant il
ln
c o n s t r-u c t Lo n
cJu nom,
Le l"lN
se dédoublait
pour devenir aussi un opérateur par
lequel
le nom
s'articule sur la chaine
linéaire et
c'est en
cela qu'il est
interface.
Ce qui
trouble dans
les
conclusions de
~.
Donvini,
c'est
cette valeur r6férentielle des anaphoriques.
L~ aussi,
nos
deux positions divergent
sur la perception des mécanismes ~non-
ciatifs.
I l nous
semble difficile de reconnaître aux formes
ana-
phoriques un quelconque pouvoir référentiel.
Dans une
perspec-
tive de grammaire métaopérationnelle,
l'anaphore est un rappel
méta-linguistique de
l'introduction d'un programme de
sens
dans
l'antériorité du
contexte et
la r?férence est,
en quelque
sorte,
un rapport
entre le
linguistique et
l'extra-linguistique.
Uri seul
énoncé
suffira pour montrer que
l'anaphorique a
rapport,
non pas avec
l'extra-linguistique,
mais
avec
le plan (méta)-lin-
guistique.
(35) When a lizard loses its ThIL
IT grows back
(35') Quand un lézard perd sa
QUEUE
:~LLS / ÇA
repousse
I l semble tout à
fait
évident que
si TAIL renvoie a
cette par-
tie du
lézard qu'est
la queue,
IT ne s'y rapporte aucunement.
L'~nonc? dit bien que le lézard perd sa queue et la queue
tombée ne peut plus
~tre celle qui repousse. Si la référence
est bien le renvoi à un objet
l'anaphoriqlJe n'a pas véritable-
ment de valeur n"férentielle.
Dans
la version fr-ariç a i s o ,
on
D'après ,J-C. ALBU S
Ana lyse d' (~noncé s
en <1nr;-la is c o rnt ernpo r-a i n ,
Université d'~bidjnn, cours de
licence,
Département d'anglais,
1981
(non pL1bli(~).

175 -
note
la possibilit6 de
reprendre
qLJ!~lJE
l'aiele (le ÇA.
:,e mu-
à
tisme de
ÇA quant à
l'expression du nombre
et du genre est
significati\\
i l
indique qu'~ ce stade des
structurations,
l'~nonciateur rompt avec ces deux notions (~enres et nombre)
par trop tributaires du
concret.
n
n .
La f o n t
est
très
clair sur
le
statut de
l'anaphorique ÇA
"Dans
la communication la plus banale
( ..• )
ÇA
peu t
!TIa rq uer
l ' i mp 0 s si b i l té
0 u
1 e re .fu s
cl' as s 0 -
cier
à l a
erception d'un
rpférent"
(nous
soulignons)
J. Dubois est très
loin d'un tel
point de vue;
i l assimile
le
processus anaphorique à
une simple substitution
et
le pronom
anaphorique
est un moyen-~conmic]ue dans
la stratégie discursi-
vs
"L'existence dans: le
code de
classe de
substituts
( ..• )
r~ponel 8 un principe fondamental, celui du
coût elu message.
( . . . )
Le phénomène de substitution se ramène
finalement
au phénomène de
l'~conomie g~néraLe du
( r, )
message" ": : .
d

Lyons ad 0 pt e
la
A
m em e
position
(le
la pronominalisa-
tion et
trouve même une étiquette très
curieuse pour illustrer
la soi-disant
strat~gie économique.
L'op?rateur
1T
de
L'énon-
cr
(J'J)
s e r-a t t un "pronom de
paresse"
(1)
H..
:"!\\FONT
:
Le travai l
et
la
langue,
i"lamlnarion,
Paris,
197 5,
p.
lJJ
(:2)
LT.
DUBOI,S
Gramrn8ire structurale du
français:
nom et pronom,
;jarousse,
Paris,
1<;"05, p.:;1

176 -
"J t
i s
t 11 e
c 'h a ra c ter i s tic o.f
t pro no u n - 0 S'- 1 CI 7, .i. n 'c: 5 5 '
that
the)'
can be substituated for expressions that
are identical but not necessarilv
co-reCerential
w i t ri the i r a n toc e cle nt s " ( 1 ) •
-
S ' i l rappelle
ce ~ue tout
le monde
sait
-
que
le pronon n'est
pas toujours
en co-rrf{.rence avec
le nom.-
J
Lyons ne nous di t
pas quels r-a p po r t s
les deux entretiennent.
J L donne
l'impression
d'introduire
l'instance ~nonciateur mais on se rend
tout clesuite
compte quo pour ce
linguiste
l'~nonciateur est le locuteur,
la
v~ritable personne capable de paresse. On sait maintenant qu'il
n'en est
rien.
L'emploi des
formes
anaphoriques
n'est
pas non plus un
moyen d'économie dans
la structuration des
no nc
s .
I l
est des
é
é
situations où,
par une sorte de dl'Sterrninisme m~taopérationnel,
l '~noncia t eur ne peut q u "o p é rer' "une subst i tu tion",
ce qui prou-
ve bien que
le pfié norn rio n'est pas quo
f a c u l tatif' et
qu' i l n'est
è
pas
lié à
l ' f t a t physique des
locuteurs,
(36)
J ' a i
rencontrp des
AnIS;
ILS m'ont parl~ de toi.
Dictionn8.ire des
sciences
du
langage,
p.
361)
( 36 ') ??
J ' a i
r-o nco nt r-e clesAHTS;
1):'~::; ;\\j'U~) ml ont par16
de
toi.
La
Corme al1aphori~ue fait
partie de
ces
indices qui prouvent
qll e l ' (; non c i 8. t 0 LI r
co m pt Cl b i lis Cl
ses rni S 8 s e n rel a t i 0 11 cl ans
le
discours.
()')
et
') (r )
___J )
1'1'
et
r-op r-o n n o n t
respectivement
les
signiri<1nts TAI:, et
i\\;"'lIS,
ces
signifiants q u i
sont
le
trai tement
(1)
cl.
l;Y Cl NS
Semantics,
II,
C8mbriclge,
1'-)77,
p.
(J7.'1

177 -
'l i ngu a s t Lq u e
clos
notions
'TAIL'
et';\\i·n 1.
Bref,
IT ne
reprend
pas une notion nl~is enregistre
la mise
en discours d'une notion,
il
date m6ta-linguistiquement
la construction d'une
rel~tion.
Qu'en e s t - i l des
op~rateurs du nom?
A partir du
fonction-
nement
p s y c h o c-m o c an i.q u e
d c
l ' a r t i c l e ,
G.
C:uillaurne postule une
va leur mé:morielle il l ' a r t i c l e di t
"défini" du
français
"Au sujet de
l'antagonisme des deux articles
fon-
damentaux du français,
i l n'est pas dénué
d'intc-
r~t de faire observer que l'article
LE est
le
s8ul
rnr'-moriel,
du
fait
qu'il appartient
à une tension
centrifuge ayant derrière elle -
et donc dans
lél
' .
' . .
d
' f '
,,(1)
memOlre -
sa posltlon
e
re erence

;~) Le ;·H-l et le mèta-linguisme de la forme
Mais
en frélnçais
comme
en anglais
l ' a r t i c l e à
valeur mé-
morielLe
i.{LE/THE)
et
sa variante non mémorie~le; (UN/A) forment
un système
clos.
Parce que,
morphologiquement,
aucune
trace
tangible ne permet de
relever
la parent?
m~taop~rationnelle
entre
l ' a r t a c La
anaphorique
Li~ / THi~ et les véritables pronoms
anaphoriques.
C'est par une
reconstruction abstraite que
le
lin-
c;uiste est amene?
à
postuler l'existence d'une
telle
p ar-o n t é e.
i';n s c no u I'o
le
s y s t èrn e
d o s
d6terrnillants
et
celui cles ana-
ph o r-ri q u o s
sont
(:·troi t.o mon t
Li/' s 'pour ne pas dire
confondus.
115
ont pour c]r(nonlinateur c ommu n ,
la
forme du ;·L'IJ.
(1 )
"l,a question cIe
l'article" dans
[,aneue et
~)cience du
langage,
Presses de
l "Urr i.v e r s i té
La v aL ,':{uèbec ,197),
p.
l (î\\

.-.,\\
\\
178 -
(J7)
ka
. r i
ceri
li
(conn.)
1 vau l tu re •
1
)vIN11III Rat . ~\\; N:2
1
cut
1 (prec1)1
l~
pii.wi
nYl
nI
( . . . )
a
wi
i
çé
put Ichild.MN2/1ll0uth.1
in 1
(conn.)1 he/(prec1)1 go
kàc3?3.g~
ma
(1 )
Ivaulture
1 to
1 land Vaulture cut the me a t and put in the' mouth of the
chi ld;
( . . . ) and he w a s
going to Vau L turel
So Vaulture cut
sorne meat and
put
i t in the mou th
of TlJE CIII LD;
( . . . )
HE
moved
t O\\'élU l tu re .
Dans une première étape relationnelle
le t,j0J Iwil partici-
pe en tant que dr.terminant
à
la construction du signifiant nomi-
1
nal Ipii.wil
'lenfant'. Mais après
cette ~tape relationnelle
première,
i l
se substitue enti~rement au programme de sens
de
~n français,
on aurait
certainement
eu un pronom déic-
tique pour prévenir tout risque
d ' ambiguï té entre l'anaphorique
et
son antécédent
(37')
Charognard coupa c1e la viande et
la mi\\ dans
la bouche c1eVENFANT
( . . . )
CELUI-CI avança vers Charo-
gnard . . .
:':iais en dernière analyse J-i],~ cie
l ' anglais
,~t C:";LUJ-CI du français
datent
une mise en discours du praxèrne::";~.Jji''\\NT.
Le d otn a i, ne (Je
l 1 anaphore
et du :'iN c o u v r-o
tou 5
le s
cas
d t ana ph o r-Ls a t Lo n s (adjectiF po s s e s s I f a ,
d/'lTlonstrati.fs, pronoms re-
latifs ••. ) moyennant parFois quelques
re-arn4'nagernents morpholo-
giques
(l)A.
l\\J:ENT!.
:
Dieu et
Les Gr.nies .'Récits ~tiologiques
58110U10
._x .
,
'_··~u,-·-·u
_ l . V V _ l . l . ' V ) ,
•. )~...II_J1ll·,
Joçtris,
1:J79,
p.
139

179 -
-
(y) )
m)
tèné
çé.ri
I.6? 6
',\\.
.".
you/(pred)/ -
/ la nE,u ag e . ;·1 N2 /
he a r /
-
-
pii-pi.gèlè
nyigi
( ... )
es.
çJ
chi lcl- sma l l • i'îN2
/
refresh /
thern
save/their/enerny.MN2
ma
/to
/you've heard Tenin's speech .•.
refresh the
Little
chi Idren ( . . . );
take thern
f r-orn
their enemy/
. You've heard Tenin's prayers . . . Bring health to
her
young CHILDREN
( . . . ) Protect THEM aginst THEIR enemy.
(L . S . ,
août,
1 979,
lJ5 et 1J7)
(39) a:
ç~-ffi.re
c àd I
16
ç~
nYi
nl
?
(conn.)/language-white.fîNl/
jam/(interoo)/person/mouth/ in
-
ç t' .ri
di

jàva
..
i
ni
~
l anguage '1'-2/
.C,j\\!
i t
/(rel.pr.)/lie /
he
/
i t /
in
tëè
dl
jo .m~
b€
this
/
i t
/
speak.MN /
bad
/does a white speech
jam
in a
pers on 's mouth ?
i t is the
speech which has a
lie in i t
that
is difficult
l'or saying/
Do clear words ever jam in people's mouths.
l t ' s the
words
that
contain a
lie that are difficult to
say out.
(L.S.,
août,
1979,
1:39 et 1 1~6)
L'on aura tout de suite remarqué que
LA forme anaphorique est
identique ;~ que lques trai t s
phono logiques près du >;t-J ck terrlli nant
du nom.
Dans
chacun de
ces
no n c s ,
l'accord entre
Le s
f'o rm o s
é
é

180
-
anaphoriques
et
l(ès op/'l'ateurs du nom
s'effectue d an s
un meme
groupe de noms; l8S
lexèmes
J~NF'ANTS et PAI{OLES
appartiennent
r-o s p o c t i v ome n t
au aux groupes 1JI et
IV
(cf tableau r';capitula-
tif)
et
les
anaphoriques
correspondent
(morphologiquement)
CI
cles ;·1\\; de
ces f,TOUI)(~S. Autrement dit,
i l Y a,
dans
chaque grou-
p o ,
autant clei'i;\\; d,;terminants que de formes
anaphoriques.
Pour
faire
une br~ve allusion à
la mise au point que nous avions dt
faire
à propos les MN des groupes II et III
(/gv/
ou /?v/
et
/lvl ou /nv/), on remarque que le MN du groupe IV peut se pr~-
senter tant5tsous
la forme
/rv/,
tant3t
comme /dv/,
ou encore
/tv/.
Le
trait
commun à
toutes
ces r~alisations phon~tiques étant
le
trait
(+)dental que
le
contexte phonologique ne parvient pas
à clissoudre.
La forme
isolée du MN -
la forme
anaphorique
amè-
ne a
penser que
sa structure abstraite
est /clv/.
Se basant
sur l'organisation cles systèmes nominaux,
le
"
·1··
t ' 1
( 1)
f
. t
.
.
t
~rofesseuria
1 ) 0 . a 1
une assez cur1euse
compara1son en re
le :français/anglais et
les
langues
"à classes" .~:';n matière de
détermination,
pense-t-il,
les
langues
"à classes" tirent pro-
f i t
du nombre élevé de
leurs
formes
anaphoriques.
Le
français,
explique-t-iL,
divise
l'ensemble des noms en deux groupes
seu-
lement qui
correspondent aux cleux genres.
Chacun cles genres
comp-
te un nombre ~Lev~ de noms;
dans une
situation de communication,
l ' e mp lo i
ri 'un
pronom ana phorique dont
l ' an t
c o d e n t
n'aura pas
é
~t~ spécifi(
laisse l'interlocuteur clans une grande
ind~tennina-
tion quant
~ la restitution du référent,
c'est-à-dire,
l'objet
(1)
;':xPOS<:3
sur
1re?
kesukurna,
lang-ue de Tanzanie,
1. P.A. L.G.,
le
i 1/011
i(}2J

dont
i l est ~uestion. Si,
par exemple,
dans
la situation,
c'est
un pronom masculin qui
est
emp Lo y
l'interlocuteur sait
seule-
é
,
ment qu'il a
~ s~lectionner dans tout
L'ensemble des
noms a
l'exclusion rie
ceux qui
sont du genre f~minin. L'ensemble de
d~finition ~tant particuli~rement vaste, m~me s'il ne couvre
que
les noms du genre masculin,
l'indétermination est quasi-to-
tale.
Par contre,
poursuit-il,
dans une
langue où
l'ensemble des
noms
est
compartiment~ en un nombre beaucoup plus élev6 de sous-
divisions,
l'emploi d'un anaphori~ue sans mention de son ant~cé­
dent ne
laisse pas
l'interlo~uteur dans une tatale incertitude
quant à retrouver le
référent.
A partir de
la forme
anaphorique
i l n'a plus à
"d~viner" que dans les 10 groupes que comporte le
kesukuma.
I l a
ainsi beaucoup plus de bhancèsde tbmber sur
le
bon référent.
Cette conception de
1.a d6termination en rapport
avec
le
syst0me des genres
traduit d'abord une
tendance
grave à
confon-
dre
"genre",
réalit~ purement intra-linguistique (il s'agit
d'une
forme)
et
le regroupement
sexué des objets dans
l'extra-
linguistique.
La tendance en elle-m~me est
la conséquence d'une
autre
confusion non moins grave, ce I I e qui
consiste à
ne pas dis-
tinguer soigneusement
le NO,\\l qui appartient
à
la grammaire et
le NOM qui
rel~ve de
La
nomination ou de la désignation concrète.
L'anglais aura ainsi
raison de
parler de NOUN dans un cas
et de
NAME dans
le
cas des activités quotidiennes . . .
Dref de toute
cet t e s u i t e cl e
co nf'u s ion s i l s' en 5 u i t
que pou r
Le l' r 0 f es s eu r

182
-
Satibo,
lu rl~termination consiste ~
localiser et avec exactitu-
de -
à identifier -
quelque objet dans une
situation concr~te.
On r&alisera clairement qu~il lui Inanque un moyen de separer
sansambiguï té
L t e xt r-a-e l 'ingu is tLq u e du
linguistique,
en un mot
un système de graduation
(a.e. PhaseI~Phase II)
du rapport
entre deux domaines bien diff~rents.
Théoriquement)' la forme
anaphorique reprend
les noms appar-
tenant
toujours au meme groupe.
Si
l'analyse
se
limite à des noms
~vec les formes
anaphoriques
correspondantes)hors de tout
contex~
te,
c'est-à-dire,des énoncés
artificiels,
elle peut donner la
fausse
impression que
ce rapport
est
nécessaire. ;'iais
lorsqu'on
travaille sur des énoncés réellement produits,
on se rend comp-
te que ce rapport,
sans être contingent,
n'est
pas nécessaire.
Tout dépe~d, en dernier ressort,
des
opérations ~nonciatives
auxquelles
s'adonne
l'énonciateur
:
U~o)
•.• à

jo
pyè.lê
i
d a
ç6
(conn.)/
they /say,h.-abbit,.?-lNl/(prec1)/(pred)/ go
kafëlé.gi
à
pyè.lè
'jo
w ind JiN2
/
after
/
(conn.)/~abbit.MNl/say
" ç~,
mi
,n
gi
16? 6
"
yes
/
l
/(precl)/
i t
/
hear
/
and they said
that Rabbit go
af' t o r-
the w i nd .
He
s a i d e
"yes,
l've heard it"
.
So
they clecidec1 that Rabbit
should Catch the wind.
He
r:lIlswered:
"Yes,
l
agree".

18 J -
saa
wi
jo
( conn. ) / h el,,, ri en+ ( pre cl ) 1 (c (~ nt li' . ) 1arr ive 1 (conn . ) /
fI el 5 ClY
"k01àc:>l:>
br"
-jo
mo
i .
'"
god
1 they 1
/
1
say
/
you
(precl)
/
land ",hen he
c am e
to
arrive,
he
said:
"trloy tell you
.. 1
Then HE arrive,
HE said
"God,
T h8ve been sent to
t e l l vou
that
On se
serai t
a t t enclu a
ce que 1pyè . lèl - , li èvre "
nom du grou-
pe III
soit
repris
par l'anaphorique Ilil
ce qui
serait
le res-
pect
strict.
cles
"accords de
classe"
pour reprendre M.
~ouis.
;·;ais
l'fnonciateur en a décidé
autrement.
/pyè.lèl-'lièvre'
est
repris par
la forme
anaphorique Iwi/,
dévolu,
en ~rincipe,
au noms du groupe 1.
L'fnoncé n'est pas agrammatical pour autant.
Si
l'énonciateur a
pu
commettre une
toIle infraction sans que
l'énonc6 ne
souffre de
la moindre agrammaticalité)c'est que
le système
comporte
en son sein
la possibi l i t é (le
telles
"dis-
torsions métaopérationnelles"
et
le
conteur et
Les
locuteurs
en général n'hésitent
pas un instant
à en tirer profit pour
obtenir quelque
effet.
Ici,
la reprise de
Ipyè.lèl - 'lièvre'
du 'groupe I I I par un pronorn anaphorique du groupe L proc1ui t
un
effet de personnif ication.
On se
souvient qu'entre autres
ef-
fet s
s é ma.rrc i q u e s,
Les j·lN du groupe J
s e s pp cia l i sent dans
la
caract6risatioTl cles
signiri~s nominaux ayant le trait (+)humain.
On
retrouve
ainsi
les
effets discursifs
(mais
inversps)
obtenus
par
l'anglais et
le
['rança:is
lorsque
ces
Langues
intro-
duisent .un rio m propre avec un déterminélnt-article.
Cette mé t a-.

opération est
susceptible de proclu:ire une
sorte d'efret
rh~ " c h o -
sif'ication" des
rél?rents humains ou,
en tout
cas,
un
e fret
de TIlpture avec
le
processus de d?signation qui
est reconnu aux
noms propres.On en avait eu une
illustration en ang~ais avec
les
énoncés
8 )
( ') t':
t
r)
'.1
.
,--0
e
s-:

haJ. s
dans
Lo e
énoncés
(!~O et Z~O') c'est
vre qui
se trouve personnifi~ parce que
la situation s'y pr~tait
ou m~me
le demandait:
Lièvre (1 )
est
un personnage et
l'tnoncia-
teur introduit d'ailleurs
implicitement
le
t r a i t
(~)humain en
le mettant
en dialogue avec
ceux qui
l'envoient
chercher le vent
et Dieu:
i l f i i t
parler le
lièvre.
Rtsumons
en disant que dans
le
flot
discursif,
l'?noncia-
teur ne se sent plus
oblig0
de
tenir compte du grouped'apparte-
nance
du nom /piè.lè/ -
'lièvre'.
I l sait
seulement qu'il doit
tenir compte de la mention
d'un certain élément dans
le contex-
te-avant.
Les énoncés
(i~o et .!~O') confirment à leur manière qu'
une forme
anaphorique ne
saurait
avoir de .fonction rtf~rentiel-
le,
en tout cas au
sens o
le terme est habituellernont
pris.
ù
I l faut
a lors
considérer
les
cas di ts de
" c o- r?férence"
c o mme
des
colncidences heureuses mais qui
contribuent à
perpétuer la
con.fusion entre
les
plans
extra-linguistiquE
et .l Lrigu f. s t Lqu e
Bref,
/wi/ est une mémoire syntaxique en ce sens qu'il compta-
bilise et date
18
structuration antérieure d'une
forille norninûle.
Et pour
boucler cette
conclusion partielle,
disons que
la
"
personnification tout
comtnp
18. "chosi:fication",
on UIl mot,
les
m~taphores et toutes les figures de style sont rles cas de
rQ~
structuration.
En AFfet,
l'énonciateur structure une première
(J ) Lièvre est dans les c
senou:.o
ce que
",enarc, es ~
d8IlS
J
o n t o s
co-
f
[ ) ,
t
les fables Do
la Fontaine.

185 -
fois
en prenant
soin de
t r-aclu tr-o
l'extra-linguistique
(comme
pour permettre aux co-~nonciateurs de suivre l'orientation des
structurations du
sens)
puis re-structure
(une
seconcle fois)
à
son propre
c ornp t o ;
et dans
ce
cas, tout
se passe comme s' i l
reconstruisait un syst~me nouveau de ref6rentiation . . . Nous 1'0-
viendrons plus
longuement
sur le phénomène de
re-structuration
au chapitre suivant. Mai~ d'ores et déjà,
on peut retenir que
la
re-structuration est opacifiante.
I l convient -d'observer de plus pr~s le rapport entre le
;·jN opérateur du
nom et
les anaphoriques.
I l s'agit· encore d'un
méta-linguisme qui
se d~duit de la ~orphologie. Le MN est,
rap-
pelons-le,
un symbole abstrait que nous nous
s6mmes forgé;
c'est
une valeur absolui au sens oll i l représente deux états de rela-
tion
t r-è s
distincts
/1.lN1
/
li;'! /
·~1"iN2
Dire que
les pronoms peuvent
~tre
identiques aux morphème
clas-
sificatoires est
juste mais nécessite une
spécification (du moins
pour ce qui
est du senou:fo).
:~~t il n'est pas possible cl' a 11er
plus
loin ni
surtout de
îajre un rapprochement
intelligible que
si
l'on a ,
au prc"alahle,
c]oterminé
le
s t a t u t
méta-linguistique
du l,IN
(;';;:-Ti
---:>- :.iN?).
T-~n effet, l' irlcnti té
au niveau morpholàgique
n'a pas
lieu avec n'importe
laquelle des deux formes;
elle a
lieu avec
le j'!J\\i2,
c'est-:'1-dire,
la
J'orme
"inc1(\\filli".
Nou s
recon-
duisons
volontairement
ce métaterme
parce que
l'occasion

1 E:;G
-
nous est encore offerte
de
mieux en faire
ressortir la stéri-
lité explicative.
L'on peut constater l'isomorphisme entre l'ana-
phorique et
"le classificateur du d6fini"
sans,
en aucun cas,
être
à
m~me,de la justifier. Alors que si ce "classificateur
du défini" -
le ~'1N2 dans notre micro-système -
est caractérisé
selon son statut métaopérationnel,
la similitude formelle va
de soi.
Le lviN2,
avons-nous di t,
est
laJorme grammatica le du l'IN.
Il semble donc normal que ce soit elle qui partage des caracté-
ristiques formelles avec
le pronom anaphorique,
lui-même morphè-
me grammatical par définition.
Nous découvrons ainsi une admirable cohérence du système
linguistique. f.lais au fond,
c'est encore une preuve de
la vali-
té de notre cadre théorique.
La
variante
lexica le du }IN (MN1)
aYant, d.a'van t a g e d'aft'inité's avec
le plan Le xd c o e-rio t
o rrne L, (har-
â
monie vocalique avec
la base lexicale)
plut5t qu'avec
le plan
grammatical,
celle-ci ne peut pas se détacher de
la base lexi-
cale pour fonctionner comme forme anaphorique
(i.e. morphème
grammatical véritable);
cette fonction revient de droit à MN2
-
( l~ 1 )
maa
nyini
ç:l
-
ni
mè , ? e
"'-
caa
you+if /get out/person/you+
/(
red)/
/
look
(pred)
p
name.MNl
~iligè
maà
ka
mÉ:.gi
ya?a

piJni
y-é
/you+
/(ne g)/ your/
name .1\\lN2/
let/
i t
/lose/{neg)
(pred)
/ i f you get out a
person,
you are looking for a name,
Djilige,
don't
let your name be
lost/
. '\\lihen you are born a person,
you struggle for A NA!\\îE,
(=fame);
so,
Dji lige make sure YOUH NAI'JE is we ll-kno,,,n.
( L • S . ,
a oû t
1 9 7 9 ,
1 7 )

,
;.
1
-
187 -
L'6nonc~ (41) montre tr~s explicitement que le MN se d~double
pour marquer successivement
la premi~re étape relationnelle
(HNl
= -7c), la seconde ~tape structurale de la même rel.ation
nominale
(MN2 = -gi) pour enfin se substituer au nom
(anaphore
= gi). Les différentes étapes relationnelles 0chélonnent, bien
sûr la chronologie en syst~me
(1)
>(11)
C
(3) 3>
~ ~ 37 ~ c ~ .9.'~
-
1
(1)
:l'-( II)
Le senoufo aura donc servi de langue-test à
la vérification
de l'hypoth~se (formulée explicitement par G.Guillaume), hypo-
th~se selon laquelle l'article de Phase II -
article dit
"défini"
est une reprise anaphorique de sa variante dite
"indéfini". En
effet,
les différentes réalisations du MN et
les étapes struc-
turales qu'il marque confirme
l'hypoth~se en question:
la varian-
te du MN qui marque la Phase II de l~ relation nominale est
celle qui sert de rappel méta-linguistique
(i.e.
anaphorique)
à
la construction antérieure de
la mê~e relation nominale :
(Il EXTRA-LING
s e no u f'o
anglais
syst~me des
Dét.
MNl
A /
p
articles
( 1 )
--------------~l
svst~me
(2 )
,
des
Dét.
:
MN2
THE
anaphoriques
pronoms:
MN2
(II)
l'ŒTA-LING

-
188 -
Sn tenant compte
de
la fonction structurante du MN dans
le praxème "nom";
de sa fonction métalinguistique quant au statut de la
relation nominale;
-
de sa fonction d'anaphore mais aussi diinstrument méta-
discursif (1) .,
on
peut proposer la schématisation suivante
(1) Plan notionnel
.,
( 1 )
BASE LEXICALE
base + l'lN 1
\\1_(
(2 ) NOH
i
- -
.base + MN2
-----------
PRONOI'-l
:
PlN2
~
1
(II)
Plan méta-linguistique~~~·
~'1
(1)
Opérateur qui assume
la cohésion discursive en montrant mpta-
lin~listiquement que les enchainements discursifs ont un amont
et un aval;
ce sont des interfaces relationnelles entre
les sé-
quences d'énoncés.

189 -
J)
Le MN /wo-/ dans
l'op~ration de nominalisation
i)
effets
s~mantiques et métaop~ration
A
la
lecture du tableau
"de valeurs sémiotiques de genres"
le
lecteur a
dQ
s'~tonner de cette mani~re plus qu'insolite dont
le senoufo classifie
les noms dans
son syst~me nominal.
Parvenu
à ce stade de
l'analyse,
nous
sommes bien oblig~ de reconnaître
que
la classification,
dans
l'Rtat actuel du senoufo,
est stric-
tement formelle;
la classification
sémantique
(celle des signi-
fiés des noms)
derri~re laquelle se cache la notion de "valeurs
s~~miotiques"
êst
'un artifice qui
n'est plus maintenu'
que
par
les
linguistes.
En d'autres termes,
le senoufo ne classifie
plus
les noms
selon une
typologie des réfprents;
c'est au con-
traire
les
linguistes qui
continuent de classifier selon leurs
propres impressions s~mantiques. A supposer que
le senoufo ait
jamais classifip
ses noms,
ce sont,
pour ainsi dire,
les
linguis-
tes actuels qui
sont quelque peu en retard par rapport à
l'évo-
lution du système nominal
senoufo.
i1evenons donc sur
les
"valeurs
s4~miotiquesde genres";
par souci de
commodité,
nous rappelons
le tableau
Valeur
sémiotique
de
genres
~~Gas-e:r~~;n~nale~._~~_~~~~~r~[3o.s~s_~~C? -~o~~~~~~s
0
__. ;__~
.
"hurna i n"
et en:rnlnts
l
"ac tu t i f"
(celui qui
... )
1
"auu,;;cnt<ltif"
l "couc rè t i t"
(action dl'
.)
" G; rOI î r~ lJ t l f"
"collectif"

....
190
-
1
"
~
Nous avons déjà souligné quelques incohprences dues à cet-
te tendance à
assimiler trop facilement
la répartition formel-
le des noms en groupes à
une classification par genres.
Cette
lacune concerne donc
la méthodologie,
c'est-à-dire,
le manque
de rigueur de
la métalangue du modèle.
En retournant aux valeurs
sémiotiques,
en particulier
celles de gauche,
i l parait
très douteux que dans
certains gen-
res,
celles-ci
s'articulent
sur
la notion de taille ou mê-
me de quanti té
pour s'opposer aux genres "humain. "
"globalisant",
"collectifll. A cette incohérence s'ajoute une discordance de
taille:
le genre
r
comporte à
la fois
les
"humains" et
les
"emprunts",
de
sorte que dans un même ensemble nous avons une
catégorie sémantique et un concept de
Ir
description linguisti-
que.
On apprécie mieux la fragilité
des
"valeurs sémiotiques"
en considérant quelques signifiés de noms
contenus'dans
les gen-
res. lIL'élépha.nt"/so,' .wi/ et "la fourmi
., /ning;' .wJ!/ qui devraient
...
-
se trouver respectivement dans
les genres II
(augmentatifs)
et
III
(diminutifs)
se retrouvent· tous dans
le genre l
(humains et
emprunts) .l!;t
comme i l parait tout à fait
évident que les signifiés
"e léphant' et 1 fourmi' n'ont pas le trait (+ )humain, peut-être ar-
rive -t-on à montrer que
les signifiants / sa (.wi/
et/ningJ' .,.Ji/
"V
-'Aléphant'
et
'fourmi'
sont des emprunts.
Les contre-exemples,
on peut
en trouver à volonté.
Leur
nombre
est
tel
qu'il
n'est même pas envisageable d'ouvrir
une
liste d'exceptions
et
les auteurs des soi-disantes
"valeurs
sémiotiques"
le savent mieux que quiconque.
Outre
les innombrables

\\\\
contre-exemples, on peut trouver volontiers des valeurs sémioti-
ques diffprentes de celles énumprêes par
P. Boutin. Ainsi
les
opprateurs du genre IV dont
on peut penser qu'ils marquent
les
noms à référents
"collectifs"
en lisant
le tableau de P. Boutin,
peuvent,
dans
l'actualisation de
certains signifiants nominaux
produire un effet appr~ciatif disphorique
(42 ) midi.wi
ba
na
àbrija'
làkàlidé.ri

"'"
midday .>lN2 1
ifl come 1 Abidjanl
schoo l-boy .i·1N2 1 (pred)1
kola.yi:
t6
-
road .HN2
. 1 shu t
lif midday cornes the numerous schoolboys of Abidjan shut
the roadsl
• At midday in Abidjan HORUS OF SCHOOLBOYS would invade
the streets
L'effet "co llectifs" se trouve ainsi doub '.é
et même ob l i tp ré
par l'effet de "désordre".
Dans
les
"valeurs
sémiotiques" de gauche,
des effets autres
que ceux retenus par P. Boutin peuvent aussi être rélev8s;
c'est
en particulier le cas du genre V
:
(II]) s Lnô c mi.
ba
surU
yiri.mi

suru
lie .i-1N2 1
i f
Ibe wrong/stand.MN2 /(pred)1 bewrong
lif the lying is wrong the standing is wrongl
',(hen you
lie down in a
\\vrong HAY,
you' 11 get u}) in a
wr-o ng'
\\{AY
Selon P. Boutin,
la "valeur sémiotique"
serait
"abstractif (fait
de. ~.)". Or dans cet énoncé,
ce qui est en cause c'est/non pas

1 Sl2 -
\\.
.,
le "fait de se
coucher",
mais plutôt
la manière de
le faire
et
logiquement
cet effet aurait dû figurer dans
le tableau des
"valeurs sémiotiques".
Op aura compris que P. Boutin n'a fait que rélever guel-
ques effets sémantiques des opérateurs du nom.
Nous ne nions
pas que
les ;'iN puissent produire un certain s e na , Ce
serait pécher
par
simplification et tomber dans une autre erreur méthodo-
logique que nous dénonçons:
les opérateurs nominaux du senoufo
n'ont pas atteint
le niveau de désémantisation des articles
de
l'anglais ou du français(l)
et
le système
linguistique senoufo
en tire
le plus grand profit.
Les
sèmes qui
subsistent à
la de-
sémantisation permettent de parer
à
certains manques
lexicaux
avec des moyens grammaticaux(2).
F?ce au problème que pose
le
système nominal du senoufo
on a
le choix entre deux solutions:
ou se
lancer dans
la t~che
ingrate et vaine de recenser les
effets sémantiques consécutifs
à
la structuration des
relations nominales;
ou bien chercher à
isoler le rôle central des MN qui se résume à
la conversion
métaopérationnelle des notions
lexicales en objets
linguistiques,
conversion qui v a de pair avec
les coupes opérées
sur l'extension
des notions en question.
Nous avons,
bien entendu,
optf pour
la solution métaopérationnelle,
d'autant plus qu'elle rfpond
à
ce souci de génôralisation qui doit guider toute démarche dans
tous les domaines de
la recherche.
(1)
En jouant sur la possibilité d'intervertir les MN selon
les besoins discursifs,
l'énonciateur peut
re-activer tour à
tour des sèmes différents et obtenir des
signifiants différents:
l i i . l i = la nourriture;
l i i . g i = la
riprlil18; lii.mi = les mets
raffinés.
(2)
e.g. mabli.~
= voiture;
mabli.le = petite voiture (voiture
de tourisme); mâbli.ge = camion ..•

ii)
la nominalisation par /wo-/
Jusqu'ici, nous avons passé sous silence
les contraintes
liées 8
la structuration d'un signifiant nominal 8. partir d'une
base verbale.
L'analyse effectupe d'entréecde
jeu
sur la sélec-
tion de
la base verbale non saturée
(EV') pouvait laisser sup-
poser que
le
locuteur senoufo peut
"fabriquer" des substantifs
avec des BV'
suffixés de n'importe quel MN. Tel n'est point le
cas.
Le MN du groupe l
se refuse r6so~ument à une telle métaopé-
ration.
C'est,
cependant,
l'opérateur de nominalisation par
excellence.
Dire que
la notion verbale
/ l i i / -
'manger'
devient par
adjonction d'un MN
groupe II
l i i . g i
= la ripaille
groupe III
l i i . {l,i
= la nourriture
groupe IV
l i i .rn L
= le festin
pose le problème de
la n omLrra Ld s a t Lo n , Na Ls
comment peut-on sou-
tenir qu'il y
a
nominalisation alors
qu'a priori,
rien ne per-
met de dire que le ve~be est premier par rapport au nom(l).
Les étiquettes de
la grammaire traditionnelle ne sont pas
touteS inutiles;
le problème c'est de
savoir et avec précision
le facteur métaopérationnel qu'elles renferment. Pou r- les for-
mes ci-dessus nous préférons parler de
"substantivation"
d'un signifiant verbal;
la nominalisation correspondant à une
opération bien plus complexe
(dans tous
les sens du terme).
-y---------------
(,)
L'arguement
"de la forme
la moins
complexe" n'est pas con-
vaincant
(e. g.
que /l:tl. l:t/ soi t
dé rivé de /l:iï/.
On connai t
des cas o~ le dépassement en diachronie ou m~me en synchronie
(chronologie
linguistique,
dans notre terminologie)
~st marqué
pa~ la réduction d'une structure. Nous y reviendrons, chapitre III

1 Cj!~
-
Le ph~nomène dont i l est question ici n'est pas seulement
limit? au senoufo.
Ainsi
en
anglais
rien ne permet de
dire
si RECOHD est un nom ou un verbe. Tout au plus,
peut-on dire
que c'est
le signifié
"ENREGISTRE(n)",
tant i l est vrai qu'avant
toute structuration i l n'y a
pas de
cat~gorie grammaticale (nom,
verbe •.• )
A propos de RECOHD c'est
l'énonciation
du vocable qui
permettra de
le cat~goriser comme verbe ou nom et ce à
l'aide
de
l'accent de mot:
'RECORD
(nom),
RE'CORD
(verbe); mais
l'ac-
cent
(à la diffrrence du ton lexical) (1) est la preuve de l'énon-
ciation d'un mot,
de
la construction du sens,
et donc de
la struc-
turation d'une relation
(cf.
chapitre 1).
l,lais avec un mono-syllabique comme STOP,
i l faut attendre
un contexte franchement
syntaxique
(A STOP), (HE STOP§) pour
décider de sa cat~gorie d'appartenance. Dans ce cadre de la
relation nominale,
~ indique métalinguistiquement comme le r-IN
qu'un praxème a ~té actualisé comme substantif. A STOP et / I i i . l i /
'la nourriture'
sont donc des
substantifs.
Revenons, une dernière fois au tableau de P. Boutin et en
particulier les
"valeurs s~miotiques"
du groupe 1. Nous disions
que
les valeurs
"humains + emprunts" étaient en rupture
totale
avec
les autres valeurs et que
c'était
là une incohérence crian-
('.) )
te.
Seulement,
comme
le disait G.
Nauc1é "-
,
les effets de sens
ne sont
pas toujours inutiles;
i l faut
parfois savoir en tirer
pro fi t . . .
(1)
Nous verrons,
chapitre III que
l'accent est
construit,
c'est-
à-dire structur6 alors que
le ton est donné.
(2)
Journée du CRELINGUA .~
le 07/01/ 1984.

195 -
Les autres
'Jva leurs sémiotiques" engendrent,
dans
le
plan énonciatif,
des effets appréciatifs.
De
là à parler de
moda-
lit~s nominales à propos du MN, i l n'y a qu'un pas que certains
linguistes comme D.
Creissels
ont vite fait
de franchir(l),
ne serait-ce que par le biais de
la quantification
(augmentatif,
diminutif,
collectif,
globalisant).
i~ égard à ces potentiali-
tés modalisatrices des autres MN
(du groupe II au groupe V),
le
:-lN du groupe I
est sémantiguement neutre.
Les phénomènes
linguistiques
sont rarement isolés surtout
lorsqu'on les
considère à
l'intérieur diun même système linguis-
tique.
La neutralité du MN du groupe I
(de forme phonologique
/wv/)se répercute sur le plan morpho-syntaxique. Ainsi i l con-
vertira une notion verbale
en notion nominale dans des
conditions
de structuration.
spécifiques:
/wv/,
contrairement aux autres MN
se préfixe à la base verba le et se réa lise /wo-/. Na Ls on sait
aussi,
depuis
le début de
l'exposé que,
pour assurer une c15tu-
re structurale à
la forme nominale,
pour parfaire la finition
du signifiant nominal,
i l faut un MN suffixé;
c'est d'ailleurs
par cette suffixation du MN que
la notion est syntaxiquement
opérationnelle pour des fonctions
syntaxiques
(sujet,
objet •.. ).
Avec
la nominalisation en /wo-/ nous aboutissons alors à des
méta-structures:
l'un des j\\iN est a n t
po s c
:-\\
la base
l.e x i c aLe
é
(i.e.
pr6fixFJ)
et un autre se trouve
po s tpo s é
comme
i l 58 doit.
(1) D. Creissels à propos du bambara

A


faQ. gi
?
",here /
you/
say /
python.MN2/(pred)! get in
/where you said the python got into/
\\\\'here· did you say
the python
was?
B:
kpa'.gi

m~
nya?a
bà~-gè
'V
'V
house .}lN2/rel./you
see /
it+there
/
pro
/the house you see i t there /
Tt crawled into the house you can see over there
A
lepa-ta'- . gi
la
?
house-fall.~N2/(interro)
~The F'ALU'SN
housse?
B
~S
WO-doo.gi
yes/
(pron)-fall.MN2
. The FALLEN (ONE)
Le ~lN /-gi/ inhérent au nom /kpaa.gi/ -
'the house'
-
revient
chaque fois
à
la place qui
lui revient:
i l
je suffixe. Par con-
tre,
dans
la derni ère séquence,
la base
lexi ca le
(la notion ver-
bale plus précisémen~ a été reprise par
Iwo-Jo Que devient cet-
(1 )
te notion verbale /too/ -
' f a l l '
-,
c'est-à-dire,
quel est
le
statut grammatical de
la structure avec
deux MN dont un a
l ' i n i t i a l et
l'autre en final?
La traduction anglaise fait pen-
ser ~ un participe passé mais la présence du MN (-gi/ à la finale,
~arque-indubitable d'un. signifiant nom!nalJamène à douter de
cette hypothèse.
Certaines situations énonciatives amènent à la
(1)
/too/ -
' f a l l '
-
est devenu /doo/ par propagation du trait
(+)voisé de /
W /
et /0 /
(de /~O/)sur la
dentale sourde / t / .

197 -
rejeter compl~tement
A
màni-lii.w~
la
JT_~
caa
?
rice-eat.MN1
/(interro)/ you /
look for
/you
are
looking for rice for eating ?/
. Are asking for eating rice ?
B
mi
caa
no
/(pron)-sow.MN1/ l
/
look for
/no,
T am
looking for one for :oc so\\~ing/
No,
l
want
seedone
Nous penchons pour un statut nominal de
la structure;
mais i l
s'agit,
on le voit,
d'un nom "fabriqué de toutes pi~ces". Le
senoufo a
encore recours à une
solution grammaticale pour com-
bler un vide
lexical,
ici,
la notion
'SEMENCE' qui n'a pas un
signifiant propre en senoufo.
Nous sommes donc en droit de par-
1er d'une nomina lisation du verbe /waa/ -
'jeter'
; 'semer' •
L'opération de nominalisation ne pouvait qu'être concluante dans
la mesure o~ tous les moyens grammaticaux
(recours à
2 MN) ont
été mis en oeuvre.
I l convient de bien souligner que cette nominalisation
n'a rien à voir avec
la nominalisation anglaise en ~ING,
laquel-
le intervient dans
la relation pr~dicative. I l reste à noter
aussi que
le nominalisateur /wü-/ transcende
la répartition des
noms en 5 groupes.
En
(/14)
la structure nomina le origine lle est
marquée par le j,IN /-gi/ du groupe II /l<pa;oi-too .p:i/ et
la nomina-
,
"
'
f f
t '
,
r-:
/ " ' ( '
/ .
en
(l'<:')
La
fo r-m e
de
clél)art
lisPition ~ est
e:; cC;U'-:'C'
ave,_
'" j - / ,
,
' ' J
u
,
l ' l ' 1 '
;
est
ma rq u c e p a r
-e
.i-
l'~
/
-
wei
du
p:roup8 .I
et
li)
norni-
nalisation de
la notion complexe se parach~ve avec /WO-/ égale-
ment.
Le nominalisateur transcende aussi
l'opposition Sg/Pl. Tous

198. -
ces cas d'invariabilit( ne font ~ue confirmer que j~0-j est un mor-
phème cramrnéltical à l'art entière.
:';n e f f ot ,
comme
la
forme unitai-
re du ~'1N2 de Phase II,i l
reste
réfractaire a
toutes
les influen-
ces phonologiques qui
pourraient
provenir de
la base
lexicale.
Au contraire,
c'est
lui qui impose ses
lois phonologiques sur
les bases
lexica les
(cf .jkpaa.-.!oo .gi -
'-.'0-9.06 .giJ) .
Avec
le nominalisateur jwo-j
le senoufo cr0e ainsi de nou-
velles notions nominales et elles peuvent être structurées en
nombre illimité. Mais
l'on voit déjà qu'elles ne font
pas dou-
ble emploi
(cf
énonc4
(44 et 45) ou elles peuvent être tradui-
tes par des participes). Elles se présenteron~comme indispen-
sables
lorsque
le senoufo se trouvera dans
l'obligation d'expri-
~
mer des notions adjectivales,alors que la catégorie adjectivale
1
n'existe pas en tant que forme dans
le stock lexical,'
1
Nous
sommes
loin d'avoir épuisé
les potentialitps métaopé-
rationnelles du nominalisateur ItVO-j.
I l continue parfois à no-
minaliser même quand i l n'y a
de notion verbale
d'aucune
sorte
Dans son élan de nominalisation,
jwo-j se replie sur
lui-même pour donner une structure ayant pour fonction d'actua-
liser dans
le plan énonciatif,
une relation à
effet
"possessif"
comme ceci
(1 )'>--.- - - - - - - - - - -ph a s e s - - - - - - - - - - - - i >(11)
i -
Groupe J.
mi
Wü.o
mi
'.... 0. wi
Il
mi
WO.gi
mi
WO.?o
III
ml , hTU. la
ml
\\.;0. li
IV
mi
\\';0. ra
mi
\\VO. ri
v
mi
\\'lO.m J
mi
HO.mi
,..
jmyj wo.I-1Nl
jmy j wo .i'1N2
jmy
i t 1
j
jmy
i t
j
2

1C)C)
-
/
.'
Nous n'osons pas nous hasarder à donner un nom à une telle méta-
opération:
une forme nominale constitup.e exclusivement de mor-
phèmes grammaticaux(l) .Les systèmes
linguistiques anglais et
français n'ont pas encore secrété de telles méta-structures.
On peut
la traduire par un pronom
possessif
tout
en restant
convaincu qu'il y
a déficit quelque part.
Les formes de gauche
sont des pronoms possessifs de Phase l
et
celles de droite,
des
pronoms possessifs de Phase II.
Là les choses se corsent irr6-
versiblement pour les adeptes des métatermes du
(~)dpfini,ptant
entendu qu'il ne ferait
pas
sens de postuler un "pronom pos-
sessif défini ou indéfini". Pour départager les deux structures
l'anglais devra recourir à une tournure périphrastique,
en par-
ticulier pour les formes de Phase l
"one of mine,,(2) .
Mais
le MN du groupe 1,
/wv/ n'a pas fini de faire parler
de
lui. I l reste notamment à
justifier,
dans
la partie droite
du tableau de P. 13outin,
la .notion "d'actatif" qui,
on le voit,
a de fort
relents d'extra-linguistique.
C'est
la notion d'agent
qui est ainsi suggérée. Mais encore une fois,
les effets de
sens peuvent servir de point de départ à une analyse plus géné-
ralisante. Voilà pourquoi nous reviendrons
sur cette notion
d'agentivit~ à travers le MN /wv/ du groupe l mais dans le cha-
pitre consacré à
la composition nominale en anglais,-en français
et en senoufo.
(1) Il s'agit bien sGr d'une forme nominale authentique pr6c?dée
d'un déterminant possessif.
L'effet de possession est donc dG
au déterminant.
j:;-t;
dire que dans nos transcriptions
(y compris
les plus récentes,
01
1986) nous les avons traduites par "pos-
sessif"
!
(2) L'anglais
se trouverait
encore en difficulté
s ' i l
lui était
demandé ~e rendre /mi
w6-~àà/ = ? a certain one of mine.

-
200
-
Un tout dernier mot reste à dire sur le MN du groupe 1.
Nous d~duisions sa neutralit&
~~mantique de la possibilit~pour
les opérateurs des autres groupes d'être productifs d'effets
appréciatifs. Cette neutralit? sémantique ajoutée à
ce qui vient
d'être dit de /WO-/ morphologiquement proche de /~wv/ permet
de préjuger du devenir du système nominal senoufo.
D'abord,
on remarque que
les enfants,
dans
leur phase pré-
coce d'acquisition du langage,
ont
tendance à générfiliser l'em-
ploi du MN du groupe l
à tous
les noms des autres groupes.
I l
en est de même des
locuteurs non natifs qUl maîtrisent mal
le
système de répartition des noms e
Pour faire un parallèle ra-
pide avec
le frartçais,
i l faudrait
prendre
l'alternance mascu-
lin/féminin pour exemple.
Aucune grammaire,
en principe,
n'est
à même de proposer une solution magique pour faciliter
une ac-
quisition rationnelle de
la répartition
(binaire pour le fran-
çais)
et en cinq groupes pour le senoufo.
Cette répartition des noms en 5 groupes ne présente pas
que des avantages(l);
au mieux elle risque d'être perturbée.
La neutralisation de
la répartition par les
locuteurs non natifs
constituent une première menace.
I l y
a
aussi
le problème des
emprunts tous affectés au groupe 1. A supposer que
le senoufo
ait
jamais classé sémantiquement ses noms,
tout
se passe comme
si,
le système ne
sachant pas à
quelles
catégories sémantiques
(1)
A propos de
l'organisation dejsystèmes verbaux,
le français
et
l'anglais semblent aussi avoir c~dé à la loi de
l'économie.
quand
le français
emprunte une notion verbale i l
la revêt sous
une forme verbale du
1er groupe.
l'anglais ne génère plus que
des verbes
"réguliers".
Les verbes des 2ème et
Jème groupes du
français,
ceux dits
"irréguliers" en anglais ont des conjugai-
sons trops accidentées,
trop caduques pour &u!ils soient main-
tenus au cours de
l'évolution obligée des
systèmes.

-
201
i l s appartenaient clans
les
langues de départ,
i l
leur a
amena-
ge
le groupe 1. Seulement
les noms d'emprunts continuent d'af-
fluer et finiront
t5t ou tard par const~tuer l'essentiel du
lexique et
cela pour des raisons
socio-technologiques(l). Rap-
pelons d'ailleurs que
les noms du groupe l
sont dnjà les plus
nombreux.
Quoi'lu'il arrive au senou:fo dans
le tèmps,
la :fonction
métaopérationnelle
(conversion d'une notion quelconque en no-
tion nominale avec
toutes
les indications sur le degré
d'exten-
sion de 1; notion) ~eut se maintenir sans doute aussi longtemps
que
l'on sera en mesure de distinguer des formes nominales. Par
contre,
lorsque tout
se sera unifié
par une extension du groupe I,
ceux des
linguistes qui se cramponnent à
la classification se
rendront
compte,
trop tard.peut-~tre, que
le senoufo avait amor-
CP la phase de non classification sémiologique avant m~me qu'ils
n'aient
fai t
la connaissance d'une
'.angue s o no u f'o ,
Notre analyse se voulait
contrastive.
Le but recherché
~tait de faire ressortir les similitudes métaopérationnelles en-
tre détenninant-article et MN. I l n'était
donc pas question de
comparer des formes) ce qui explique que nous ayions pvitp
la
(1) On sait que les communautés technologiquement puissantes doi-
vent créer~de nouveaux noms pour nommer les nouveaux produits technolo-
giques.
Le "tTansfert de technologie" aux autres communautés s'ac-
compagne d'un transfert d'ordre lexical:
i l se traduit dans ces
communautés cibles sous forme d'emprunts.
Selon le Frofesseur Batibo,
en Tanzanie O~l la rehabilita-
tion du s'vahil;
est
très pous$ée,
une co~missi~n ~e réunit pour

-
202
-
comparaison a l ' énoncé près.
i\\
travers
le fonctionnement du ;'IN
s'est pr~cis~ le statut du nom senoufo
qui s'est revélp
être
une unité déjà complexe.
Pour d~tenniner les mécanismes de struc-
turation de cette unit~ complexe,
i l a
fallu
poser l'exis~ence
d'un plan notionnel et d'un plan énonciatif. Théoriquement
les
deux plans existent dans toutes
les
langues mais
l'on doit re-
connaître qu'ils ne sont pas toujours marqués avec
la même pré-
cision.
Le plan notionnel
correspondrait grosso modo au décou-
page du réel et
la structuration des énonc~s n'y est pas encore
possible;
en senoufo,
cela correSpond au domaine des bases lexi-
cales.
Après
le traitement
linguistique de ces notions
lexicales
par adjonction de l'lN on obtient des objets
linguistiques,
dès
formes aptes à
assumer des fonctions grammaticales.
Le l'IN,
comme
le déterminant-article, symbolise une relation
nominale
mais i l semble avoir mieux développé
cette
latitude
métaopérationnelle:
en tant qu'opérateur d'une rela~ion nomina-
le,
i l participe à
la construction du signifiant nominal
(le MN
s'intègre
à
la forme nominale);
c'est sa fonction complétive.
Outre la fonction complétive,
le MN s'avère être une mémoire
syntaxique de
l'introduction du nom dans
la chaîne
lin~aire;
tout en se substituant à
la forme nominale,
i l date la construc-
tion de
la relation nominale:
c'est une fonction supplétive.
L'approche métaop~rationnelle nous aura permis de fournir
une explication grammaticale et intelligible du phénomène d'har-
monie vocalique.
L'hannonie vocalique,
en signalant
la proximité
C;("f;;-;;'-~ti:f"i;i;llementde H!:JuvOIAIJX noms qui devront s e r-u i r- à nom-
mer les n6uvéaux produits d'importation.
I l reste à saVOlr si
la fabrication des noms ira suffisam-
ment vite pour r~pondre au~besoin de nommer"des Tanzaniens.

-
20J -
d'un programme s<"mique nominal du plan notionnel,
confirme à
sa mani~re la r~alit~ de la m~talangue naturelle.
Nous souscri-
vons enti~rement aux points de vue de C. Delmas pour qui "une
langue contient des ~ Lé me n t s à toUS" les niveaux "phono logiques",
"sémantiques",
et
"syntaxiques" pour marquer qu'elle comptabili-
se les différentes occurrences d'une structure
C. . . )
les occur-
rences [de la structure en question] se trouvent dat~es selon
leur ordre de passage,,(l).
Enfin,
l ' a p p r-oc h e !Tl~ 't a o p.é.r-a tionne lle du fonctionnement du
~N nous aura permis de dégager une forme lex~matique et une for-
me grammaticale de cet op~rateur, ce qui constitue indéniable-
ment une contribution appréciable aux théories de description
des
langues africaines.
~Les ph~nom~nes se limitent rarement à un seul syst~me lin-
guistique.
Ce qu'est
l'harmonie vocalique pour le senoufo,
l'ac-
cord en ri6mbre l ' e s t ~galement
po u r-vL't a.ng La i s ,
Nous y
reviendrons
avec certaines constructions anglaises du type
'a skull estima-
ted to BE
20,000 year§ old'
vs
'a 20,000 yearp old skull'.
"En senoufo la rupture d'harmonie vocalique entre la structure
phonologique du HN et celle de
la base lexicale signifie que
l'ptat
lexico-noti"nnel d'un nom a
~té d~pass~ et, de façon g~n~-
,
l'ale qu'une ~tape relationnelle a ~té franchie
Sn anglais,
ce st
la neutralisation du nombre qui
signifie ce dfpassement relation-
nel.
Nous touchons ainsi au probl~me de la composition avec pour
concept dominant
la Relation et tout
son syst~me de datation.
( 1)
C.
Di": U1A S ,
1 ~ 8 5 ,
p.
1 59

C H A P I T R S
I I I
LA
STHl.JCTURATTON DES
COMPOSES E'r
LE DECALAGr~ Di'~S ETAPES RELATIONNELLES

205
~,
1
Lorsque que la linguistique th60rique ~voque le phénom~ne
de la composition,
elle le met,
la plupart du temps,sur le compte
de la
cr~ativit? lexicale.
La cr~ation lexicale évoque,
à
son
tour,
la notion d'évolution de
la langue.
Ce
sont des propriétés
communes à
toutes
les langues,
et
l'on sait qu'une
langue qui
n'évolue pas,
qui ne peut pas évoluer,
est condamnée à disparaî-
tre.
En effet,
on imagine difficilement un syst~me linguistique
totalement rtfractaire aux emprunts ou fonctionnellement inapte
à
recomposer de nouvelles
lexies.
La composition a
également attiré
l'attention des grammai-
res à
tendances normatives.
Devant
la fertilitp
de
la composition
en particulier dans
le domaine nominal,
les puristes dénoncent
réguli~rement la gen~se de "monstres linguistiques,,(1) et s'in-
qui~tent de "la pollution linguistique" imputable,
elle,
aux
emprunts.
Hais avant de contribuer à
la créativité
lexicale,
la com-
position est d'abord structuration,
c'est-à-dire, une forme de
production verbale,
et chaque théorie
linguistique se doit de
fournir une réponse au probl~me qu'elle pose à la linguistique
g{nérale.
Nous postulons que la composition est un aspect particu-
lier des relations entre
les éléments sémantiques à l'intérieur
de l'énoncé, que l'on peut faire
l'économie des taxirnonies aussi
(1)
Nous pensons à
l'émission de H.F.I.,
"Franc parler",
en par-
ticulier celle du 04/01/ 1986 dans
laquelle i l était question des
énoncé s
comme VOYAGE VACANCB,
VOYAGE CHARTE:FL •.
(2)
I:e te~nnè:est d'un invi té de France
Cul ture.

-
20(; -
difficiles ~u'incertaines si
l'on soumet
le probl~me de la com-
position a une th60rie
linguistique ~ui reconnait à
la Relation
la place qui
est
la sienne au coeur du
syst~me. Nous soulignions,
chapitre l,
combien i l ptait gênant
que certains mod~les linguis-
tiques n'accordent pas assez de place au concept de relation;
nous prédisions alors que négliger l'importance de concept pou-
vait s'avérer tr~s préjudiciable à une
juste appréciation des phé-
nom~nes linguistiques.
A)
EjFŒY APEHÇU DE
qUZLqUi~S ETUDES SUR LA CmlVOSITION
Sn ~assant en reVUe les pcrits sur la composition,
ce qui
ne manque pas de frapper,
c'est
le mal que
les
linguistes se don-
nent pour d&finir les différents types de composition. Qu'on en-
juge par cette
"délimitation du sujet" par A-H.
Loffler-Laurian:
"Parlant de
la difficulté
à définir la notion de
mot
( ..• )
et constatant
les résultats divergents
de l'application de
ces crit~res sémantiques, pho-
nologiques,
syntaxiques et graphiques selon les
langues étudiées
( .•• )
nous avions proposé d'adop-
ter la notion de lexie,,(1).
Nous ferons
remarquer que si
les résultats sont si diver-
gents,
c'est en grande partie parCe que Ce qui
est
commun à
tous
les caS de composition,
et même à
tous
les phénom~nes énonciatifs)
a
été
omis:
la notion d'opération
et partant,
celle de relation.
(1)
i\\-!·j.
LUFFL.2R-LAUHIAN
"Fonctionnement des
lexies complexes:
cas ries
lexies contenant des noms de couleurs en finnois et en
"français" in Contrastes,
6, l'-iai 1982,
p.
51

-
207 -
C'est par ce biais que nos positions se rapprochent de
celles
d'un linguiste
comme E. Benveniste.
A-j·] • Loffler-Laurian
oppose d'abord
les
"lexies complexes"
aux "lexies
composées";
c'est toujours
ce que nous
considérons
comme
la "délimitation du sujet".
Ce
choix se rapporte à
la métho-
dologie et i l peut être
légitime,
à
condition,
bien sûr,
que
l'on parvienne à
opposer et de façon convaincante
"structure com-
plexe" à
"structure c omp o s o e !", A-j·!.
Loffler-Laurian délimite aus-
si
l~-'domaine sémantique dans lequel elle entend mener son analy-
se:
la catégorie sémantique des noms de couleur.
D'un point de
v u o théorique,:ce
choix semble un peu curieux; mais elle y
trou-
ve une
justification
"Tout comme
l'étude des perceptions spatiales,
celles de l'utilisation lexicalisée des couleurs
touche à
la perception qu'a un groupe d'individus
du monde qui
l'entoure ainsi qu'à la systématisa-
tion de cette perception.
En effet,
les couleurs
s'organisent en schémas diff~rents selon les cul~
tures et
les civilisations.
( . . . ),,(1)
On peut
SE'
demander si
l'on est toujours en linguistique;
le
moins que l'on puisse dire,
c'est que nous sommes
loin des phé-
nomènes structuraux,
et
plus précisément,
du domaine grammati-
cal.
Peut-être s'agit-il d'un des hybrides des
sciences sociales;
la socio-linguistique,
par exemple. Et
la recherche cont:i.nue •.•
Hais
la
lacune
la plus sérieuse concernant
le
choix méthodo 10-
gique de A-~i. Loffler~Laurian, c'est que les composps comportant
des noms de
couleur représentent une infime partie de
l'ensemble
( 1)
A-J··I.
LOF'FLEH-LAUHIAN
op.
cit.
p.
56

2UG -
des
"lexies complexes ou
comp o s
e s "
et une p a r t Le insignifiante
é
du phénomène g Rnéral de
la composition.
Dans le premier chapitre de
la Philosophy of Grammar,
O.
Jespersen fait quelques remarques sur les
"expressions
libres"
(free expressions)
et
les
"expressions figf.e"
(formulas).
8n ce
qui concerne les
"expressions figées"
(How do you do ?),
i l cons-
tate notamment que "one may indeed analyze such a
formula and
sho'~ that i t
consists of several words,
but i t is felt and han-
led-as a unit which may often mean something quite different from
the meaning of the·:component word5 taken separately,,(l)
En résumé,
O.
Jespersen,
relève
le glissement sémantique
entre
le sens propre des expressions dites
"idiomatiques" et
leur sens propre.
S ' i l avait abordé
le phénomène enLt~rmes d'opé-
rations,
c'est-à-dire,
de relations, s ' i l avait vu qu'une relation
était datable en linguistique,
enfin s ' i l avait su qu'il y
~ une
distinction à'opérer entre domaine
linguistique et domaine réfé-
renciel,
i l aurait pu expliguer linguistiguement
le glissement
sémantique. Nais nous reconnaissons vouloir demander vraiment
trop à un linguiste de
l'époque de O.
Jespersen.
Tout récemment,
ce type dténoncés a
été porté à
l'atten-
tion des participants du CR8LINGUA
(18/01/ 1986).
L'un des parti-
cipants proposait de remonter à
l'origine de ces expressions
"fi-
g?es".
La d6mArche peut paraitre sédûisante;
mais elle suppose
un certain capital de savoir de
la culture française(?).
Seule-
ment) peut-elle mener à une solution linguistique du problème des
(1)
Ü.
JI~SPEHSlCN : The Phi losophy of Grammar, London, George Allen
&
Unwin Ltd,
1924,
pp.
18-1))
(2)
I l s'agissait d le xp r-e s s i.o n s
comme
"casser la/*sa pipe",
"brûler la chandelle par les deux bouts" .•.

p u
-
20::;
-
expressions idiomatiques?
L' investissem ent
(en connaissances
historiques)
en vaut-il
la peine?
Voilà pourquoi
lors du brains-
torming' (la qu estion n' (. tant pas à
l'ordre du
jour),
Il.
Adamczewski
penchait pour une solution qui nous
semble
être plus
linguisti-
que,
à savoir,
le degré de coh~sion entre
les termes de ces ex-
pressions idiomatiques,
leurs possibilites de permutation et de
commutation à
l'intérieur des
structures •.• Tout
cela rapporté
à une théorie des opérations pourrait
confirmer certaines hypo-
th~ses sur la datation des mises en relation,
la cohésion li~e
aux dates de mises en relation,
le caract~refigé du sens de
ces expressions
(,.!. tant ent endu que le "caract~re ancien" d'une
mise en relation -
sa thématicité
-
est synonyme d'une prise de
distance par rapport au sens
propre). Bref,les expresssions figées
al] sens figuré
ou métaphorique font
partie de
ce que nous consi-
dérons être des
cas de re-structuration ••• Poursuivons notre ana-
lyse critique sur la composition.
A.
j\\lartinet est
fondamenta lement structura liste et au pro-
bl~me de la composition, i l ne peut que proposer des solutions
structuralistes(1). Nous montrions déjà au chapitre l
que
la théo-
rie structuraliste était passée à
plusieurs
lieues du concept
de relation(2)
et
les résultats qu'elle propose ne font que ra-
viver notre insatisfaction. Partant de
la notion tr~s contrever-
sée de
l'arbitaire du
signe
linguistique,
A. Hartinet explique
que ce n'est pas par hasard qu'un
'chemin cie
fer'
s'appelle
"CHE-
l'lIN DJ~ F'E;J{",
que
c'est par l'examen de
la fréquence d'emploi. q u e
(1)
i\\.
MAHTINCT
"Syntagme et synth~me" in La linguistique,
1967,
pp.
1 -1'~
(2)
On ne confondra pas
'rapport'
et
'relation'

-
21[)
-
nous constatons que
la
sfquence a
tendance a
fonctionner comme
un seu l
signe. J'lais
comment
peut-on mesurer la fréquence d' em-
ploi ?
Si
la séquence en question était décrite en termes de rela-
tions. A. Martinet aurait vu
lui aussi que c'est un événement
lin-
guistique et que sa répétition tout au
long de
la chronologie
linguistique
(ou réelle)
correspond,
en termes d'op/rations,
à
autant de relances de relation.
Et nous verrons en d ? t a i l q u e
si CHEMIN
DE FER fonctionne comme "un' seul-signe",
c'est par-
ce qu'il y
a
cohésion et
surtout que
la cohésion dépend du sta-
tut méta-linguistique de
la relation entre
les term_es de
la sé-
quence.
A.
~1artinet finit par distinguer d'un côté le "synthème"
et,
de
l'autre,· le "syntagme".
Le
"synthème" est constitué d' uni-
tés dont
le fonctionnement
correspond à
"celui des termes avec
lesquels i l
commute mais qui peuvent
~tre conçus comme sémanti-
qu~ment identifiables".
A. Martinet ajoute qu'ils correspondent
''d2,ns
le discours à un seul
choix" ou sont
le résultat d'un seul
choix.
Le
syntagme est un groupe d'unités auxquelles
on
peut
ajouter d'autres déterminations •••
On peut se demander,
et très
s~rieusement, si c'est par goQt pour les étiquettes un peu savan-
tes
(e.g.
synthème)
que A.
Martinet
s'efforce d'opérer une telle
distinction,
ou s ' i l pense vraiment qu'on peut isoler dans
le
discours,
ce qui est
le "résultat d'un seul
choix". T3ref,
la
frontière
entre
"synthème" et
"syntagme",
à
supposer qu'elle
existe,
doit ~tre très floue et aujourd'hui,
nul ne songerait
à
défendre une position th~orique aussi incertaine.

21 1
L'examen de quelques
langues africaines peut donner l'im-
pre s sion que /\\.
llartinet a,
peut-être,
rai son lorsqu' i l
parle
d'''un seul choix"
en ce qui
concerne
le
synthème et
(implicite-
ment)
d'opprations récursives pour ce qui
est du syntagme.
L'ana-
lyse des
langues africaines que nous allons passer en revue n'est
pas de A. J'lartinet mais de
Ji.
Houi s.
Cet te derni ère ana lyse s' ins-
j
cri t
dans
le clroi t
fi l
du
structura lisme de A. :'lartinet.
Très familier
des langues
africaines,
M. Houis base son
étude de
la composition sur des
~angues aussi diverses que le
swahili,
le kurundi,
le peulh et
le bambara.
Nous nous
arrêterons
sur la dernière nommée que nous
connaissons assez bien. M~Houis
oppose
le syntagme
au
composé et
les deux types de
constructions
sont é tuc1iés
sous
le
labe l
de
la détermination.
Nou s
lui emprun-
ton~~ces ~eux énonc~s bambara
( 1 )
mùsà
ka
fàtu
(a)
,,'oman/(a)
name/
say/ Fatou
/a name of a
woman that
says Fatou/
.
Fatou is a
NA,\\lE
FOr<. VQl·IEN
(2)
fàtü

mùsà
t6g~
ye
Fatou/ this/(a)
woman/(a)
name/
this
Fa tou i s
a ,,\\;m·IAN-NAj-Œ;
M.
Houis fait
ensuite un commentaire très inttressant
"l~e t r-a L t
es sentie L qui fonde
la difff rence
entre
le
syntagme et
le nom composf
est
le
t r a i t de
com-
raci t(,
absent d a n s
le syntagrne,
prr~ sent dans le y\\om
c o mpo sé " (1 )
( 1 );'.1.
HOUIS
"rte Id tions de d6 termination en' syntagmes
c omp o s
s
é
et
en composés nominaux"
in Afrique
et
langage, 16,
2ème semestre
1981,
p.
G

-
212
-
Nous n'avons rien a
redire
sur ce point de
l'analyse,
mais SeU-
lement nous
le
considérons comme point d'ar.ivpe.
Quels sont
les
mécanismes métaopérationnels à
l'oeuvre
qui déoouchent sur
la compacité dans un cas et
l'absence de
compacité dans
l'autre?
La
compacité, ou encore
la cohéston peut être "sentie" .na i s
si
elle n'est pas
expliquée dans
le cadre de
la théorie du modèle
nous
sommes bien obligé de
croire que cette notion de
coh~sion res-
te
intuitive. Mais M.Houis
aurait
certainement répondu que tout
dépend de ce que
lui,
1\\'1.
Houis,
entend par "syntagme"
et par "com-
p o s é "
"L'usage que nous faisons de
"syntagme"
correspond
à une définition étroite. Un syntagme n'est pas un
groupement de monèmes,
mais essentiellement un
groupement de constituants syntaxigues,
soit des uni-
tés telles
qu'elles soient systématiquement for~ées
pour assumer une fonction dans
l'énoncé" (1 )
(nous soulignons)
M. Houis précise et avec une certaine force
"Nous insistons bien sur le fait qu'un composé
n'est pas un syntagme mais un constituant dont
la base comporte deux lexèmes ou plus" (2) .
(nous
soulignons)
Nous avons déjà déploré
l'étroitesse de
la notion de syntagme
chez n. Houis
(et i l le reconnaît
lui-même).
F'.
de Saussure avait
donné une définition très
limitative de
la notion de syntagme
pour,
disait-il,rendre
la théorie structuraliste plus opération-
le;
c' étai t
encore
le stade de l ' élabora tion de
la thé o r Le
en
( 1) M. HOUIS
op.
cit.,
p.
6
(2)
Ibid

-
21 J
-'
question. Mais i l faut bien qu'à un moment ~onn~ l'on ait fini
de construire
les outils th~oriques et songer à
les rentabiliser
dans
l'analyse des faits de
langue.
S'ils s'avèrent
inop~rants
on peut alors chercher à
les renforcer ou mime s'en débarrasser
complètement(l).
Nous sommes amen~ à faire tout ce discours ppis-
t~mologique parce qu'en lisant les d~finitions de M. Houis
on
a
l'impression qu' i l faut donner des. défini tions nouvelles
à
chaque fois qu'on doit aborder un phénomène nouveau .••
Notre
cadre th~orique nous permet,
en
tout cas,
d'aller au delà du
point de vue structural et
ce même
cadre théorique nous en don-
ne
les outils nécessàires. A en croire M.
Houis,
le nom
'maison'
en senoufo
kpaa.?a
.ri'est pas qn syntagme parce que,
toujours selon'
lui,
ni le'monème
/kpa-/,
ici
la base
lexicale,
ni
le MN I-?a:
ne peuvent
as-
sumer de fonction dans un énoncé.
En clair,
/kpaa.?al n'est pas
un énoncé.
Nous ne pouvons pas souscrire à un tel point de vue.
I l n'est pas nécessaire de retourner
redéfinir ce qu'il faut
en-
, .
.,
tendre
par
enonce.
Nous avons débattu
la question au chapitre 1.
Nous disions alors que
"Go
!"
pouvait être considéré,
disons doit être considéré
comme un ~non-
cé,
puisque,
quelque part,
i l y
avait
eu structuration,
c'est-à-
dire,
construction dynamique d'une relation.
A plus forte
raison
/kpa
G;) ? al qui est une uni té comp lexe, comme ce la a été montré
(1) Certaines pseudo-th6ories ~~nent, après quelques années de
pratique,
à des impasses.
Il n'y a
pas que des inconvénients à
cela puisque,
tenant
compte de ces erreurs
"d'aiguillage",
les
autres chercheurs peuvent éviter ct'aller perdre du temps en cet-
'te direction.
La remarque ne
concerne pas M.
Houis en particulier.

-
:' 1 JI
_
au chapitre II.
Nous ne pouvons pas accepter non plus que
le composé,
que l qu' i l soi t,
ne soit pas un syntagme.
Ce la parait
d'ailleurs plus difficile à imaginer;
L'idée de
composition est
indissociable de
celle de syntagme,
les deux phénomènes ayant
pour dénominateur commun,
la relation.
Hais i l faut bien comprendre Ivi.
Houis;
i l
lui fa llai t
bien
nommer les deux structures analysées en
(1)
et en (2).
Seulement
les étiquettes font
problème et pmrtent, d'une
certaine manière,
un certain préjudice à
l'analyse;
à notre avis.
I l serait,
peut-
être,
plus rentable de décrire
les deux mouvements structuraux
effectués par l'énonciateur en (1)
et en
(2).
Dans
l'analyse de
la composition en général et la composi-
tion nominale en particulier,
le senoufo nous
sera d'une très
grande utilité;
ce sera encore une
sorte de
langue-test,
de
lan-
gue témoin,
parce qu'il se trouve être plus métalinguistique sur
la question.
En effet,
nous avons déjà vu que le MN renseignait
très franchement
sur le statut du nom,
que son absence ou sa pré-
sence sont indicatrices du statut de
la relation nominale; une
base lexicale qui aura eu le temps de recevoir un MN avant d'être
structurée en tant que fonne nominale sur un autre élément séman-
tique,
dessinera ainsi un certain type de relation.
Corrélative-
ment, deux bases qui auront été
structurées avant même d'avoir
reçu des MN symholiseront un autre type de relation.
Cela se com-
prend d'ailleurs aisément:
un programme sémique dont
le support
forme l
se pré sente avec ou sans l'IN se si tue à un niveau pré cis
du parcours NOTION ----7 Mf~TA-LINGUISTlqUE
(lire RH ~ TH) •

;PT
-
215
-
L'on aura compris que notre d
s a c c o r-d avec 111. JJouis se
é
situe au niveau de
l'acception de
la notion de relation et sur-
tout de
l'importance que chacun de
nous deux lui accorde dans
l'analyse
linguistique;
l'on aura compris aussi que si H. Houis
sent intuitivement
la présence de relation dans
les deux struc-
tures analysées,
i l ne se doute pas un instant que celle-ci peut
être datée;
méta lingui stiquement.
La Relation,
telle que nous
l'avons décrite
jusqu'ici,
n'est pas
le concept fort de
la théorie d'énonciation (cf.
cha-
tre 1). Pourtant en abordant le problème de la composition,
E. Benveniste considère ce concept
comme fondamental.
Dans une
forme
composée,
dit E. Benveniste,
i l faut
tenir compte de la
structure formelle mais aussi de
la relation logique entre les
constituants.
C'est la relation logique qui fournit
les indices
propres à
classer fonctionnellement
le composé. Elle constitue
donc
le critère fondamental,
"celui auquel tous
les autres sont
subordonné s" ( 1 ) .: E. Bo nv o n i. ste a
certainement vu p lus
loin que
les autres
linguistes dont nous avons évoqué
les analyses
jus-
que
là; en "tout cas,
vis-à-vis de la relation.
I l a
certainement
raison de parler de
t'la relation logique";
mais nous verrons qu'
\\\\
\\ \\
A
i l
lui manque un petit quelque chose:
une relation peut etre 10-
gique ou appartenir à
n'importe quelle autre catégorie tout aus-
si abstraite. Mais CH qui comptera
(et qui
sera déterminant pour
l'analyse de
la composition),c'est
le fait
de
la relation,
le
fait
(méta-)linguistique,
ou tout simplement,
l'événement
linguis-
que.
(1)
]~. Bl'::;NVENISTE : "fondements syntaxiques de la composi tian
nominale" dans Problèmes de linguistique générale,
2,
Gallimard,
Paris,
1974,
p.
146

-
216 -
E. Benveniste observe,
lui aussi,
un certain nombre de
répartitions avec
lesquelles nous ne
sommes pas tout à fait d'ac-
cord; mais sa classifcation a quelque chose de bien plus intel-
ligible.
Nous reviendrons en particulier sur
son
analyse
de
la composition verbale.
Toujours en rapport avec
la notion de
relation,
i l est intéressant de noter que E. Benveniste fait al-
lusion au caractère
"ancien" de certaines relations.
Ainsi,
"syn-
tagme"
"s'applique à n'importe quel regroupement,
même occasion-
nel,
opéré par des moyens syntaxiques,,(l).
Quant au
"conglomé-
,
ft
-
re
,
celui-ci
peut
être complètement ou incomplètement recon-
naissable: selon l'âge du congloméré. E. Benveniste opère de nom-
breuses autres sous-catégorisations:
les formes dont
les deux
termes sont
"équipotents"
(e.g.
père-mère),
celles qui sont des
composés "de dépendance"
et où deux substantifs sont en rapport
de détermination,
les composés savants •••
Nous ne reviendrons
pas sur cette dernière
catégorie; nous suggéron3 de
les considé-
rer comme issus de
la conjugaison de
l'emprunt intégral et de
l'emprunt remodelé suivant
les schémas structuraux propres à
cha-
que
langue.
A l'aide d'une perception plus
juste
de
la notion de
(mi-
se en)
relation,
on doit pouvoir proposer_une solution métaopé-
rationnelle au problème que pose
chaque type de composition.
(1)
E.
Bl:-:NVI:-:NISTE :
op.
c i t . ,
p.
172

-
217 -
B)
LA CmlPOSITION DANS
UNE PEHSPECTIVi'; H:STA-OPEr{ATIONW';LLI'~
L'~laboration du compos~ nominal,
par exemple,
n'est pas
une simple compilation de programmes s6miques;
pour mener à bien
quelque op~ration sur une cible nominale,
l'énonciateur prendra
sur lui de convertir un programme s~mique quelconque en outil
de structuration,et cette conversion s'opère dans une certaine
chronologie
linguistique,
c'est-à-dire,
selon une successivité
d'Rtapes
structurales.
Plutôt que de consid~rer les composés comme des
"espèces
morphologiques". des groupes de mots,
nous essaierons de remonter
dans
les mécanismes à
la base de
leur formation.
Cela signifie
que,
pour nous,
la composition n'est pas un phénomène
linguisti-
que à part.
C'est
pourquoi
nous n'hésiterons pas à
faire des
rapprochements -
comme nous
l'avons toujours fait d'ailleurs -
avec d'autres
types de mises en relation,
comme
la rel~~ion pr~-
dicative.
C'est aussi parce que nous croyons à la r~alité de la
métalangue naturelle,
la m~talangue naturelle sous toutes ses
formes.
C'est une forme de
contrastivit~ qui peut parfois s'ef-
fectuer dansuh seul système
linguistique •.
1)
Compatibilit~ naturelle des termes d'une relation
E. Benveniste
lançait
-
sans doute intuitivement -
l'idée
selon laquelle
la composition est une forme de micro-syntaxe.
H.
Adamczewski
suggère un rapprochement
entre
la structuration
des
compos~s et l'application d'un sujet à un prédicat
"On comparera cette mise en relation
dA
deux
noms avec
la construction de
la relation prédicative,,(l)
( 1)
C LA ,
1 982,
p.
? JO

-
21i3
-
En ce qui concerne la relation prpdicative,
c'est
le sujet qui
vient
limiter l'extension de
la notion verbale;
dans
le cas d'un
composé
comme
HAIN-COAT
c'est RAIN qui altère,
en la restreignant,la notion
'coat'.
La
restriction de
la notion
'coat',
l'enrichissement subséquent de
son programme sémique,
sont une conséquence de
leur mise en re-
lation.
Considérons maintenant
l'opération de mise en relation en
elle-m~me et par rapport à l'énonciateur. Dans la construct~on
de
la r e La t Lo n prédicative,
i l s'agit,
pourl'énonciateur,
"d'in-
··troduire dans l'espace verbal,
un sujet nomina 1"·( 1.). Du point
de vue purement
sémantique,
la construction de
la relation pré-
dicative.correspond à
l'introduction d'une notion nominale dans
l'espace sémantique du verbe;
corrélativement,
la composition
revient à
l'insertion du
"déterminant" RAIN dans
l'espace séman-
tique du nom cible de l'opération,
ici,
COAT.
Certains programmes de sens appartiennent au même champ
sémantique;
leur mise en relation (pour répondre à quelque visée
du discours)
produit forcément quelque chose de tautologique.
C'est ce que revèle cet énoncé repris chez G.LA :
(3) Oil
WILL
float
on water
( G LA,
1982,
p.
1 51 )
Ce n'est pas
l'énonciateur qui a
introduit OIL dans
l'espace sé-
mantique de
"îloat on water".
"l"loat on water"
est
la déîinition
par compréhension d'un ensemble qui
contient déjà OIL.
I l Y a
(1)
H. Adamczewski
Journée du CRELINGUA du
12/01/ 1985

1
-
219
-
donc au d~part un rapport
s~mantique entre les deux notions,
rapport que
l'~nonciateur ne peut pas pr~tendre avoir instaur~.
C'est,
au
contraire"
un rappe l
de
c o ng r-u.gn c e
entre
les deux ter-
mes de
la relation et
l'op~rateur WILL en est
la trace en surfa-
ce.
Parfois,
selon les données
culturelles dont
l'pnonciateur
Jispose,
i l peut
consid~rer
la relation Sujet-Prédicat
comme
allant de
soi;
de
sorte que
lorsqu'il
l'énonce,
son pnonciation
a
aussi valeur de rappel.
Là encore,
certaines marques formelles
indiqueront
le
caractère acquis de
la relation
(4)
But novelists write
for countless different reasons,
for money,
for fame,
for reviewers, ·for parents,
( ..• )
as Sici~
lians
like EMPTYING shot guns into an en em~'s back.
(J. Fowels, The French Lieute-
nant's woman)
Une glose rapide consisterait à
dire ceci:
"peut-être que vous
ne
le savez pas,
mais un ~crivain ~cri~ pour une foule de raisons;
et sachant
ce qu'est un Sicilien,
i l est évident que
le prédicat
"emptya shotgun into an ennemi's back" fait partie de ses pro-
pri~tés définitoires. Il n'est donc pas, besoin d'énoncer une tel-
le relation;
et
si
l'on tient à
le faire,
i l faut bien préciser
que c'est
là une
chose que nous n'apprenons à
personne." ,Toute
cette longue glose se traduit au niveau structural,
par
la prp-
sence de
l'opérateur -ING.
Le même phénomène s'observe dans
la structuration des com-
pos~s; mais la relation étant au moins plus abstraite que celle

-
220
-
qui rpunit
sujet et
prédicat,
l'on doit
s'attendre à
ce qu'elle
soit rappelée par des opérateurs plus formels
(et de
loin)
que
WILL et BE-ING encore susceptibles de réactiver quelques effets
séman:tiques.
Voici quelques cas de
compatibilité naturelle entre
les
termes d'une structure composée:
(5) Hiss Arundell was in the habit of coming out of her
room in the night
( . . . ) her EYESIGHT was not good.
(Dilll\\HT -
75)
(6)
... a
CEDAH\\\\'OOD
box w i th hinges
layon the
lower
leaf of the desk.
(BILEEP- 72)
(7) The change was immediate. The human being vanished.
The correct
MAID-SERVANT
returned.
(mmwr r- 65)
En (5),
on pourrait parler d'un "rapport nécessaire" entre
SIGHT et EYE;
le
sémantisme de SIGHT est déjà présupposé dans
celui de EYE. Autrement dit,
la relation entre
les deux program-
mes de sens pré-existe à
leur structuration dans
la chaîne
linéai-
re. Et i l en est de m~mc des autres
structures
composées en
(6)
et
(7). CEDAR et WOOD appartiennent au m~me champ sémantique ou,
plus précisément,
l'espace sémantique de CEDAR est incluse dans
celle de ~OUD. Le dictionnaire rev~le plus explicitement ce rap-
port d'inclusion avec ;\\IAID-Sli;nVANT;
le
Longman Dictionary of Con-
temporary English
(1978)
d~finit ~lAID à partir de SERVANT: "maid:
a
fema le SEH.VANT".

-
221
Il s'agit,
on
le voit,
de deux champs
s~mantiques emboi-
t~s. L'emboitement de champs s~mantiques peut correspondre à
la
relation logique
'de
la partie au
tout'
(8) Bob rushed trough like a
suddenly projected CANON-BALL.
(9) He \\.23obJ ut tered an exc lama t ion and stooped to Poirot' S
TROUSEH-LI.sG
(umnHT- 173)
La mise en relation des termes de
chaque
composé a
consist6 à
introduire un 616ment dans un espace s6mantique o~,
au fond,
i l
se trouvait déjà.
La fusion des deux termes,
leur soudure par le
trait d'union
sont
les indice méta-linguistiques du rappel de
congruence;
ce sont,
pour ainsi dire,
des indices du statut de~
relations.
La c o rtg r-ue nc e entre
les termes du composé peut résulter
de
la contiguité de
leurs
champs s6mantiques
(10) It was exacttly as though a spider had got into an
inkpot and was walking over a
sheet of
NOTEPAPER.
(DUr-nHT -
37)
(11) He went along the passage, passing two other BEDROOMS
and then came to
the
BEDCHfu~BER.
(12) On calling her in the morning the
C}~Al'·mFT0\\jAJD found
her derld.
(DWlh!IT -
::' J8)
Bon nombre de
linguistes dont
A.
i'iartinet
(on s'en souviendra)
et
L. Guilbert ont expliqué
certains
cas de
composition
(soudure

-
222
-
ou
fusion)
par "l a
fréquence d'emploi".
Cela ne peut,
en aucun
cas,
~tre ni~. Mais il semble plus int~ressant et plus rentable
de se demander pourquoi
l'usage a
favoris~ la composition ~ar
trait d 'union puis par
fusion ) de
telle uni t~ avec cet élément-ci
et non avec celui-là.
Pour revenir aux formes
compos~es de (10)
à
(12),
i l faut
se demander pourquoi NOTE a
été attiré dans
l'es-
pace sémantique de PAPER plutôt que dans
celles de CHAr-1BER ou
MAID pour donner
:
?
NOTECHAr.1BER
Las consti tuants semblent
s '~tre associés
par affinités
sémanti-
ques.
Il n'est donc pas
surprenant que deux notions appartenant
à
des &ires
sémantiques confondues
ou contigüës soient sollicitées
et conjointement dans
les memes environnements discursifs et par-
tant,
dans
les m~mes contextes structuraux. De par l'inclusion
ou
la contiguïté de
leurs champs sémantiques,
les éléments séman-
tiques en question s'interpellent mutuellement,
créant ainsi une
impression de fréquence de co-occurrence plus élevée que d'autres
couples d'éléments.
Pour parler de
"fréquence d'emploi" ,
quels
items linguistiques peuvent-ils ~tre plus récurrents que les déter-
minants
et les opérateurs
comme BE •••
c'est-à-dire les métaopé-
rateurs?
Seuletment;" cesouti ls sont eux-mêmes Helation
(la re-
lation étant présente dans
tous
les
cas de structuration)
et ils
se chargent de mettre
en rapport des
termes à
chaque fois
diffé-
rents.

-
22J
-
. Hise au point
L' assimi lation ou
la contiguï té
des espaces sémantiques
peut servir de base d'explication,
mais
un nombre très
limi té
" à
de cas de
composition.
Par ailleurs,
l'analyse qui a
été faite
jusqu'ici pourrait
laisser supposer que
le trait d'union ou la
fusion ont valeur d'équivalence
sémantique;
i l n'en est rien.
I l s'agissait seulement d'un point de départ
théorique,
pour sou-
ligner,
à partir de cas suffisamment explicites
(e.g.
EYESIGHT,
CEDARWOOD . . . )
l'existence d'une
certaine relation entre
les cons-
tituants du composé.
Contiguïté, assimilation,
inclusion . . .
sont
des relations de types
logico-sémantiques et dans notre analyse
de
la composition la nature intrinsèque de la relation est d'im-
portance secondaire.
L'important,
c'est
l'existence-m~me de la
relation et
le fait que celle-ci est antérieure à
l'insersion
du terme composé dans une séquence d'énoncé.
Le trait d'union
et la
fusion NE reprennent donc PLUS le rapport .sémantico-logique;
ils
disent
qu~il y a eu ce rapport,
c'est-à-dire,
qu'ils signi-
fient
l'antériorité du
rapport.
Inclusion et contiguïté
sont des types très particuliers
de relations,
des relations de type
concret.
Lorsqu'on prend seu-
lement en compte
l-'-occurrence de
ces relations en un
Qertain
point de
la chronologie
linguistique,
elles
se ramènent,
au ni-
veau structural,
à un m~rne cas de figure

-
224
-
(1) niveau logico-notionnel:
( - ,..,\\
(CEDAH)
NOTE
PAYER
~/
J
,
WOOD
autres
'inclusion'
'contigùïté'
types de
---------
. ,
------.----
1
relations
1
1
1
(II) niveau des -
structurations:
G&__NO
-
,
Chaque fois que nous aurons affaire à des
termes fusionnés ou
.- ...
reliés, par trait d'union,
nous
considérerons que
la constructiion
du composé
en question est au delà de
la compétence de
l'énoncia-
( 1 )
teurstructurant
.
Les
composés EYESIGHT,
CEDARWOOD,
MAID-SER-
VANT représentent ainsi des acquis de ::tructuration ou des acquis
de
(mise en). relation.
Un probl~me reste posé:
celui de
savoir o~ se situe cette
structuration.
Pour ce qui est des
termes fusionnés
ou soudés
"yar trait,d'union et qui ont droit à des entrées
lexicales dans
les dictionnaires,
l'on peut poser que
la relation qui
les
lie
est
thématique,et que
la thématicité est donnée ou avalisée par
la
langue.
Mais cette hypoth~se se heurte,
à
son tour,
à deux diffi-
cultés non négligeables.
D'abord
le corpus rev~le que ces cas
(1)
L'énonciateur "concret" dans
la terminologie de C.
Delmas;
la structur8tion de ces
composés rpl~ve de l'énonciateur "non
concret". Elles rel~vent de la chaine linéaire abstraite
alors
que
leur insertion dans un énoncé
appartient à
la chaine'lin~ai­
re ordinaire,
cell~ qu~ consiste en la Succession de; mots . . .

-
225
-
de composition ne
sont pas
tous intpgr6s dans
le dictionnaire;
nous en donnons quelques uns sans,
pour le moment,
tenir compte
de
leurs
contextes d'énonciation:
finger-ache
stair-head
dog-logic
gas-victims
Le second fai t,
tout aussi
troub lant,
est que pour une même forme
composée,
les termes sont
tantôt fusionnés,
tantôt reliés par
trait d'union ou tout
simplement
juxtaposés.
C'est,peut-être,
à
ce moment
prpcis que
la relation nominale dans
la composition
nominale devient un problème
linguistique intéressant. Mais
les
auteurs de
la fameuse grammaire de
l'anglais
contemporain en con-
cluent déjà à un arbitraire de
l'alternance des
trois procédés
"There is no safe rule-of-thumb
that will help
choice between the
three possibi l i ties.
Practice
varies in many words,
and some may
even occur
in the
three compound forms,,(l).
Dire que l'occurrence de ces symboles est arbitraire,
c'est
dire qu'ils n'ont aucune fonction spécifique à
assumer au sein
du système
de
là à
penser que
leur emploi
est facultatif,
i l
n'y a qu'uri pas~ Or nous verrons,
et en ce qui
concerne
le trait
d'union en particulier,
que certains
contextes imposent son em-
ploi à
l'énonciateur.
(1)
C~UII{K (& al) :1\\ Grammar of Contemporary English,Longman,
London,
1978

226 -:
Mais de toute ~açon Quirk ne pouvait pas soupçonner l'exis-
tence d'un mécanisme caché rRgissant
l'alternance de
ces symboles.
Fid~le à son habitude,
i l n'a ~ait qu[établir de longues listes
de ~ormes composées;
lacune plus sérieuse,
le mot HELATION ne
~igure même pas dans son index
des concepts
linguistiques,
long
pourtant de 27 pages . . .
La composition étant un phénom~ne linguistique comme tout
autre,
i l convient de
l'analyser en termes d'opérations et de
comptabilité des opérations.
Nous postulons alors que
la juxtap-
-position (notée &), la soudure par trait d'union (no~é (-)),
la
~usion (notée (.))
représentent des acquis de relation,
mais des
étapes relationnelles décalées ·les unes
par rapport aux autres
et la thématicité de ces relations peut être déclenchée par le
contexte-avant ou la situation.
en général.
2)
Le déclenchement des relations
(&) ~ (-)
Kous choisissons de nous arrêter un instant sur ces opé-
rateurs parce qu[ils sont plus récurrents que
(.)
et pour cette
même raison,
l'analyse privilégiera
(-)) surtout que c'est à par-
t i r du statut de
la relation qu'il symbolise que nous serons ame-
né à ~aire des rapprochements par~ois osés avec d'autres domai-
nes du
syst~me.
Une relation thématique en
(&) ou en (-) est une relation
qui ~ait écho à une autre relation survenue dans
l'antériorité
de
la chronologie linguistique,
le contexte-avant,
dira-t-on en-
core.
La relation de départ peut être exprimée par un relateur
prépositionnel:

-
227 -
(13) lt was internal
linguistics,
stimulated by de Saus-
sure' s w o r-k s
(1916),
tha t
was to be the main concern of
the 2üth century
scholars, and
with i t
there could be
no place for the
study of
THE FORMATION .i2!" \\WH.DS.
The next major change of emphasis in linguistics was
marked by the publication in 1957 of N.
Chomsky's Syn-
tactic Structure.
( . . . ) But sti 11 \\vOHD-VOHNATION remained
neglected by linguists for several
good reasons.
(I1E\\WF -
5)
(11-1-) It is perhaps most
helpful to begin with the notion
of an
ACT OF SPEECH
( •.. )
SPEECH ACTS thus involve the creative and repetitive
exercise of options in social and personal situations
and settings.
(emprunté
à
C.
Delmas,
1985
.
p.
652)
(15) The TELESCOPE AT MONT WILSON, in the United States,has
a
reflector 100 inches acros~,and reveals
one million
million.stars
(.~.). ( .•• ) the million million.
of stars
oÏ the Mount WILSON TELESCOPE
need not appeal us.
(emprunté
à
C. Delmas,
1985
p.
652 )
Pour nous
l'important n'est pas de savoir si d'une occurrence à
une autre les groupes de mots en 1:ettres capitales sont des
"syn-
tagmes",
des
"composés", des
"synthèmes" ou encore,
s ' i l s sont
le résu l t a t
de
"choix uniques".
Par contre,
ce sur quoi
tout
le
o
monde sera d'accord,c'est que de
la première occurrence
à
la
seconde occurrence
les structures en question ont gagné
en cohé-
sion.
Nous reviendrons
sur les raisons métaopérationnelles
(donc
les vraies')
de cette cohésion. Retenons,
pour le moment,
que
les

228
op~rateurs (~) et (-) sont des reprises (? anaphori~ues) des re-
lateurs ayant
encore quelques affinit~s avec
l'extra-linguisti-
que;
en effet,
dans certaines situations,
i l
sera encore possi-
ble
de
leur reconnaître
L'expression des effets de possession
(cf.
OY)
ou de
localisation spati~le (cf. AT).
Toujours pour indiquer qu'une relation est
très décal~e
vers
le méta-linguistique est qu'elle
est en rupture avec
l'extra-
linguistique,
l'opérateur
(&) va jusqu'à rappeler méta-linguisti-
quement une relation thAmatique.
Dans
les
formes
de surface,
i l
fait
ainsi écho à un autre métaopérateur :
( 1 6 )
Soi l i s turned over into the trench tha t
has been
excavated,
and this will range
to
two
SPADE: ... s
DEPTH,
compost being spread over the
first
SPADE DEPTH so that
i t will
lie at approximatively nine inches below the sur-
face.
(emprunt~ à C. Delmas, 1985
p.
658)
Et
(&) ou (-) - dans certains contextes - apparaissent ainsi com-
me
"l'abstraction d'une abstraction".
Si
les deux opérateurs sont
à même
de reprendre des
rapports
syntaxiques,
i l va de soi qu'
i l s puissent rappeler des relations
logico-s~mantiques introdui-
tes dans
la même
séquence d'~nonc~, une relation de coordination,
par exemple
(17) A third approach is being taken by Drs Augene Bell AND
Crispin Weinberg at a private firm
in Cambridge,
Mass.
Their process
combines dermal cells with a
collagen-based
solution that
is being poured
into a
protein casting ves-
se 1.
( . . . )
The D[i;LL-ÎI'F~INBEj{G vesse t . is a
four-layered
model.
NWK -
24/06/ 1985

229
(18)
Peters AND
IUTCIHE conc lucled tha t
transforma tiona l
grammar had to be constrained far more
lightly
( . . . )
The PETE1{S-11ICHIE findings
served as si lent wi tness to
almost all of the significant workin syntax in the 1970s.
(emprunt~ à C. Delmas, 1935
p.
61~7)
Mais en faisant
intervenir ces énoncés à
ce moment précis de
l'ana-
lyse,
nous devons avouer "tricher" d'une certaine manière;
parce
que ce n'est pas seulement
la reprise de
la
relation
origine
qui déclenche
l'op~rateur (-). En revanche, il-est vrai que la pré-
sence de
l'opérateur
(-)
peut aussi ~tre expliquée (partiellement)
par le processus de reconduction de
la relation.
La relation origine peut aussi ~tre lancée à
travers-
·une
longue séqu~nce·d'énoncé; c'est en cela que nous verrons encore
plus explicitement qu'une relation en Phase l
a de profondes
attaches avec
le
contexte au sens concret.
(19)
Parmi
les multiples organisations qui protestent con-
tre
la condamnation du
journaliste Jacques Abouchar,
le
COJIlITE E~~E:_];~_];~!?~E:~!~~~_~I: JACQUES ABOUCHAR a demandé
dimanche à
tous
les
journaliste$ de boycotteiles
cérémo-
nies organisées par l'ambassade d'URSS à Paris
( .•• )
Le
COl'IITE JACQUES ABOUCHAR a,d'autre part,
envoyé une
lettre au président de
la république
lui demandant audience.
Le Monde 23/10/ 1984)
La séquence d'énoncé -
la construction de
la relation de
départ
reprise par l'opérateur
(-)
peut se
trouver ~tre un
discours méta-linguistique sur la relation en linguistique
(20)
( . . . )
On ne peut mieux dire qu'une
limitation
(It is
high
time)
vient
limiter une autre
(la connexion cible).

-
2JO -
La
LIMITATION-CIBLE
doi t
être prête pour que
la LH'iITA-
TION-JUGIi:MENT
p'u Ls s s-
opérer.
(C.
Delmas,
1985
p.
3l l l l )
En (19)
le
Lien
entre
le journaliste J.
Abouchar et
ce comité
formé est clairement exprimé au départ:
"pour la
li b
ration" •
é
L'énonciateur a
progressé dans
l'effection des opérations et peut
se permettre de tabler sur ses acquis
structuraux.
I l n'a donc
plus besoin d'exprimer à
l'adresse de
ses intBrlocuteurs
(les
lecteurs du Monde)
ce qu'il y
a
entre
ce COMITE et J. Abouchar.
Dans
le cas de
l'anaphore pronominale,
c'est
ce qui a fait dire
à
certains que
l ' én~onciateur é conomi se ses effort s
éLo cutoires ;
en réalité,
i l fie fait que faire
référence au-déjà-dit
selon la
s u c c a s s i v i. té
Phase .I .-;;. Phase II
(1)
cmnrE
X
ABOUCH~
(II)
c CO}iITE
J.
Revenons maintenant
sur les énoncp.s
(17 et 18). Dans les
structures thômatiques
'the PE:TEHS-
RITCHIE findings'
et
'the
BELL-',I'EINBli:HG
results',
seul
l'opf-rateur
(-)
est possible.
Nous
y
reviendrons
en particulier pour voir les raisons pour lesquel-
les
la langue impose
(-)
et non
(&) .D'ores et déjà, nous avons
ainsi
la confirmation que
les deux opérateurs ne symbolisent pas

- 231
du tout des étapes relationnelles identiques;
ce qui
signifie
du même
coup que
leur
occurrence est
loin d'être un fait du
hasard.
Pour le moment,
nous nous
limiterons à
la thématicit~ due
·à une reprise en bonne et due
form~ (cf. 6nonc~s (1J) ~ (00)).
Tout
comme
la thématicité peut
consister discursivement
en la reprise
littérale d'une relation première,
~ètte th6mati-
cité peut être déclench6e par une mention implicite de la rela-
tion origine dans
l'antériorité du discours.
Ce
cas de figure
nous doririera
l'occasion de tenter de discriminer,
dans un premier
temps,
le statut de
(-)
vs
(~). Il va sans dire que les étapes
structurales que chacun des deux opérateurs représente sont très
voiBinasdans la chronologie en système;
aussi,
et pour un maxi-
mum d'objectivité,
prendrons-nous
Les mêmes
signifiants nominaux
ou,
à défaut,
les mêmes notions nominales
(21) "Thi s ~o~a~' ~ !o~ 1:, he (i30bJ seemed to be saying.
"Ba"Lls are kept
in certain places -
this drawer is one
of.those places;
( ..• )
there always has been a ball here
( .... ) That's obvious DOG-LOGIC".
(DUM\\HT -
59)
(21')
"But l
would remind you,
rny friend,
that is was to
me that l'liss
Lawson presented Bob,
not
to y oui"
"Po s s i.b Ly ,
( ••• )
But you are not any goo 'vith a doge
You don' t
understand
DOG
PSYCH()LOGY'~.
(DUlf\\HT -
255)
(22)
"Did his wife do any shopping here ?"
"Did she now?
l
don't recall.
Oh yes,
she came in
for a
SLEEPING-1)RAUGHT" .
(DUM\\HT -
178)

- 232 -
(2;.:' ')
"There seems
to be no doubt
that Miss Arundell ctied
of yellow at~rophy of the liver",
said Poirot gently.
"That's very satisfactory",
said Hiss Paabody. Bella
took an overdose of à SLEEPING
STUFI",
r hear".
(DUfv1\\HT
(22' ') A doctor had been sent for and had pronounced her
to have been dead for hours.
An empty glass was found by
the bed.
I t seemed fairly obvious that
she had taken a
SLEEPING-DHAUGHT,
and by mistake had taken an overdose.
(mmv r r - ~) 38 )
(22'")
"Do you ever prescribe chloral for your wife 7"
"1 may have done.
But not
lately.
She seems to
. . have taken an aversion to
any
form of
SLEEPING DRAUGHT'! .
(rnnrwrr - 205)
Considérons d'abord les énoncés
(21) et (21 ,); lorsqu'on
observe
les formes en elles-m~mes, en faisant abstraction de leur
contexte,
on ne peut pas
justifier la
juxtaposiition en DOG PSYCHO-
LOGY et
la soudure DOG-LOGIC.
Notons,
en passant,
qu'aucun d'eux
ne figure dans
le dictionnaire.
I l n'y a donc pas,
au départ,
de
relation logique
d'aucune sorte entre
les programmes sémiques
ainsi reliés,
mais
le statut de chaque composé
se déduit des don-
nees situationnelles.
lm point de vue discursif, (21) se présente comme un rai-
sonnement cohérent.
L'on insiste sur le côté
logique de
l'argu-
mentation. Bien avant
la conclusion
('That's obvious dog-logic),
on sait déjà établi un rapport
entre cette
logique argumentative
et son auteur H~. Mais i l s'agit d'un locuteur bien particulier:
Agatha Christie attribue
l'~nonciation de (21) à Bob, le chien.

- 2JJ -
L'op~rateur (-) fait alors 6cho RU rapport ant~rieurement sugg~-
r~. Le français opte pour une construction plus analytique o~
la thématicité
entre DOG et
I~GIC est rendue par le quantifieur
TRES,
et
l'on sait que
l'on ne quantifie que ce qui a d'abord
t5té posé
"
c 'es t
TH.ES logique de
la part d'un chi en . . . "
Tel n'est pas
le cas de
DOG PSYCHO r~OGY en (21'). DOG
a
~te~, bien
sar,
mentionné dans
le
contexte-avant;
mais de PSYCHOLOGY,
i l
n'en a pas
été question,
m~me implicitement.
L'énonciateur prend
ici
l'initiative de construire une
relation où
les pléments res-
tent relativement autonomes.
La thématicité de la relation en
(22)
dpcoule également
du situationnel(l).
I l s'agit d'un dialogue entre un détective
et un pharmacien et
les' éléments bloqués
se trouvent dans
la sé-
quence ~noncée par le pharmacien;
l'acquis de relation s'expli-
querait par le fait que le rapport
existant entre SLSEPING et
.
(2)
DRAUGHT appartient à
son savoir de P h a rrn a c a e n :

On comparera
cet énoncé
(22)
à
(22').
Les données
situationnelles ne privilé-
gient pas un quelconque rapport entre
les deux notions et
cela
tient, .en partie,
au s ôrnan t Lsmo très extensif de STUFF qui
le
rend apte à
servir de support nominal à n'importe quelle autre
notion;
cette aptitude
structurale se retourne,
en quelque sorte,
contre STUF'F:
STUFF n'entretient pas de rapport
parti cu lier avec
un nom particulier au point de se souder,
par coups de relances,
avec ce nom . . .
(1)
C'est par abus de
language que nous parlons de thématicité de
la relation SLEEPING;' DHAUGHT,
comme si elle ne
l'était pas avec
SLEEPING ~ DRAUGHT.
La mise au point vise à
ceci que la thématici-

est relative;
i~ y a une échelle de th6maticité qui se manifeste
sous forme
forme de degrés de cohésion.
(2)
On aurait des raisons de penser que pour un
libraire,
un lin-

-
234 -
(22") est le bilan d'une enqu~te sur la mort d'une dame.
L'expertise du docteur
la pr~sence d'un verre vide non loin du
l i t de mort
(surtout
ce dernier détail)
permettent à
l'énoncia-
teur de tenir pour acquis
la relation 5LEEPING-DRAUGHT. La situa-
tion est tout à fait différente en (22"
,) ou l'enqu~te est en
cours; .DH.AUGHT est seu lement
l'une des causes possib les de
la
mort de
jeune femme.
Encore un dernier énoncé avec
l'opérateur
(-);
i l sera
opposé à des
composés avec des termes fusionnés
et complètement
lexicalisés
(23) Sleeping draughts were good for weakling people who
couldn't bear a
FINGEH-ACHE.
(D1J}nnT - 28)
.. Le dictionnaire que nous utilisons (The Longman Dictionary, ~1-978)
n'a pas encore accordé d'entrée à F'INGER-ACHE alors que J1EADACHE,
STOMACHACHE sont non seulement intégrés
lexicalement,
mais ils
ne/"forment plus que des
items
unitaires.
Tout
se passe comme si,
dans un contexte médical,
par exemple,
l'énonciation de STO~ACH,
HEAD,
TOOTH évoquait plus directement
la notion ACHE .. que ne
le
fait
l'énonciation de
la notion FINGER.
Dans
le contexte médical
donc,
l'énonciation des premières notions citées
s~gnifierait
d'office une
certaine mise en relation avec ACHE;
c'est
la thé-
maticité qui est ainsi
enclenchée.
Celle,
inhérente entre HEAD
et ACH~ rend difficile,
par exemple,
une
(mise en)
relation
du
type
:
?
The ACHI;;
of
the H8AD
guisteou l'homme de
la rue,
"un livre de grammaire" ne soit pas
structuré en anglais de
la m~me manière. Il pourrait ~tre,
pour le
libraire et
l'homme de
la rue "a grammar
lit
book";
alors que pour
le grammairien qui
l ' a conçu,
on aurait ::-,I,,+~+ "r- ~:--:,:~~~:-._'-,~~1:"

- 2J5 -
Hevenons R. l ' o p é ra teur
(-)
pour ra ppe le r
qu' i l
indique un
d~passement m~taop~rationnel mais qu'il n'est pas la r6pp.tition
des programmes
s~mantiques. Il semble nfcessaire de le rep~ter
pour rppondre à notre manière aux 'înquiÉ'tudes de Mon s i e u r- Lavedrine
qui se demandait
"comment penser qu'une opération ne soit pas si-
gnifiante,,(l).
Sans vouloir jouer sur les mots,
on peut prp.ciser
qu'une operation est
toujours sigNificative mais non forcément
signifiante.
Les opérateurs
de Phase II
comme
(-)
sont des dateurs
et une date n'a pas de sens en soi;
elle est seulement significa-
tive de
la survenance d'un évp.nement
sur un axe chronologique,
exactement
comme la relation linguistique
(un ~vénement linguis-
tique)
sur l'axe Phase l
~ Phase II.
Les exemples abondent dans
la presse qui indiquent que
la' structuration
de certains programmes
s ma n t Lq u e s
sur la chaî-
é
ne
lin~aire correspond déjà à une première mise en relation et
-
à cette structuration antérieure,
l'opérateur (-)
fait écho
(24) Un porte-parole du Pentagone a
parl~ de dp.faillance
technique,
et exclu qu'il se
soit agi d'une provocation
dé libérée à quelques
jours de
la
rencontre SHULTZ-GIWHYKO
---------
.
à Genève.
(Le Monde 04/01/
1985)
(25) Ould Haidalla s'~tait pratiquement fait prisonnier
en regagnant son pays au terme du~~~~~!
FH.ANCO-AFTUCAIN
de Bujumbura.
nENCONTI{l':,
Smli'lET dans une moindre mesure,
supposent une certai-
ne relation même au sens
le plus banal.
I,'opérateur (-)
rappelle
méta-linguistiquement -
"au cas où on l'aurait oublié" -
qu'il a
(1)
Soutenance de
la thèse d'état de C.
Delmas,
le 25/01/
19R5.

~t~ question de relation.
Ce
cas de
rigure est d'ailleurs g~n~-
ralisable à
tous
"les noms de relation"
le tandem
PLATINI -G r H.ES SE
-
la dialogue
NOlm-SUl)
noms
-
le
confli t
IH..AN-IHAK
de
relation
-
la confrontation
REAGAN-MaNDALE
-
les relations
f~ST-OUEST
Et selon notre traditionnelle reprpsentation par éllipsoïdes
relation
rappel
*
eN1 6 0
=-f
llIA~
(1)
'> (II)
Pr~cisons tout de m~me que c'est en français que la chaine linpai-
re suit
le cours des événements
linguistiques.
En anglais,
la dis-
position des éléments est
contraire au sens de
la chronologie
lin-
guistique
(de gauche à droite)
(26) We had driven from Beirut to an Israeli checkpoint
at Froun,
( •.• )
and were stooped
just south of the Litani
River,
the present Israeli
line,
about 25 miles north of
the
ISRAELI-LEBANESE
border.
(HETHI 06/03/ 1985
(27) The developing dialogue is the most serious
ISIŒLI-EGYPTIAN
~~S:~~~~~ since the 1982 invasion of Le-
bDnon cast a
pail Over the US-sponsored peace treaty.
(;2 B)
j\\lr Peres
said he decided
to s tres s
in the pub li c
response his agreement with
the report published earlier
this week that
said Mr Mubarak was proposing direct
ISHAELI-JOHUANIAN
t.&11ks
with Palestinian participation.
(HI~THI 2&3/03/ 1985)

-
237 -
BORDER, EXCHANGE)et TAUC tout aussi bien} signifient l'6ta-
blissement d'un certain rapport
entre deux entit~s, ce rapport
ffit-il
contingent parce que
li~ aux choses de la vie ...
Mais
pour revenir dans
le domaine
linguistique,
la place à gauche sym-
bolise
la th~maticit~ et cela n'a rien de contradictoire par rap-
port aux ~nonc~s du français.
Nous montrerons -
à
la suite de
C.
Delmas -
qu'en matière de
composition ou,
plus pr~cis~ment
dans
le marquage de
la relation nominale,
les opérateurs de
l'an-
glais ont une pr6dilection pour
l'ant~position, surtout dans
l'ex-
pression des
relations de Phase I I .
E.
Benveni ste a
dé jà
fai t
cas d' un tY.P~ a peu près
simi lai-
re de
compos~s en v~dique
pitaramatara
=
père-mère
matarapitara
=
mère-père
Ces
constructions avec
le symbole
thématique
(-)
n'existent pas
seulement en v~dique, comme tend à
le penser E.
Benveniste.
Les
commentateurs de
la radio ou de
la t~l~vision, tablant sur le
déjà-su,
introduisent
souvent
leurs
journaux en ces termes:
(JO)
"
IRAN-lRA1-\\:.
Des
chasseurs irakiens ont pi I o n né ••
"
E. Benveniste expliquait alors à
propos de ses fnoncés
en v~dique
q u I i L s'agit de
la relation entre deux termes
"équipotents" puis-
qu'ils
sont intervertibles~ L'important,
en fait,
n'est pas
les
fléments
consid~r6s en eux-m~mes ni leur interchangeabilit~. Il
faudrait d'ailleurs
s'assurer qu'ils
sont vraiment
intervèrtibles
et dans quelles
conditions(l).
Mais disons
ici
que
l'essentiel
------------------
(1)
En français
par exemple,
i l semble plus naturel de dire
"père-mère" ou
"père et mère",
ou
encore
"femmes et en:fants";
on parle plus naturellement des
"relations
l~S'T-OUI';ST" plutôt que
des
"relations OUEST-EST" . . .
A la
journée du
CHELINGUA 18/01/19t\\6
H.
Adamczewski
sugg~rait de chercher à voir le mécanisme caché
qui règle
l'ordre de ces formes
cornpos~es.

-
2)8 -
réside plutôt dans
la nature du rapport qui
les unit.
La fusion
des constituants en v~dique, leur soudure en français sont des
rappels d'existence d'un rapPoTt
naturel entre
les notions
'pè-
re'
et
'mère',
rapport que personne n'ignore.
On se souvient que,
toujours en ce qui
concerne
la relation,
le
senoufo r~servait
un traitement
très
spécial
(cf.
chapitre 1)
à
cette catégorie
de noms
(noms des termes de
parenté) ,et
ce,
dès
le niveau
lexi-
cal.
."'-:!."--.
c) LES PLANS DE STRUCTURATION(;l) ET LES ECI-IELLES DE COHESION
Jusqu'ici,
la composition a
été abordée
par le biais de
la relation;
on a
notamment
passé
sous silence
ce qui advenajt
des
termes mis en re la tion.
Or,
i l parai t
évident que
Lo r-s q u e
la
nature d'une relation change -
son statut
-,
le changement
se r&percute ~névitablement sur les antagonistes de
l a d i t e re-
lation(2).
l-la i, s
si nous avons
cornmenc0
par l ' ent i t(~
"Re la tion" -
ce
qu'il y
a
d'essentiel dans une
structure
linguistique,- c'était
pour donner une première
réponse à
ceux des
linguistes qui
se
sont
lancfs dans
la t~che vaine et sans grand intpr~t de trouver des
6tiquettes à chaque regroupement de mots.
L'on sait maintenant
(1) Nous donnons ce sous-titre par analogie aux "Plans de l'énoncia-
tion " un ensemble d'articles réunis
sous
la direction de
L.
Danon-Boi leau dans
LangagE',~, 73,
198!~ .' .Le c ornp o s
et
l ' énoncé-
é
ordinaire ont,
en commun,
d'~tre le produit d'opérations étagées
sur des pLans décalés.
(.?)
(''''s. changem.ents ..~en ..chaine ne concerrient pas seu lement le do-
maine
linguistique.
Ils
concernent m~me les rapports entre individus

- 239 -
que ces ~tiquettes sont p8ufiables malgr~ leur consonnance par-
fois savante
(1). Tous ces
cas de figures
peuvent ~tre ramen~s
à une m~me structure sous-tendue par la m~me opération:
d'une
part,
i l s'agit de
la réduction de
l'extension d'une notion (no-
minale);
dans
les faits,
l'opération de réduction consiste à taire
interférer la notion réductrice dans
l'extension de
la notion-ci-
ble.
D'autre.
part,
et du point de vue de
la manipulation
des
paquets s?miques,
i l s'agit en gros d'enrichir le programme
s6mi-
que du nom-cible par apport de sèmes du nom dit
"déterminant",
qu'il est plus
juste d'appeler "complémentateur".
En fin de comp-
te,
le
travail
structural ainsi effectué donne un total sémique
que nous appellerons (après H. Adamczewski)
une connexion sémigue;
dans
la connexion sémique,
ce qui
est susceptible de varier,
ce
qui sera m~me amené à varier,
c'est
le degré d~ compacit~.
Toujo.urs.-:c~ guise de réponse à l' étiquettag~, nous nous
....f;, •..
proposons de montrer,
preuve à
l'appui,
que
certains faiis
~émart-
tiques,
syntaxiques,
morphologiques et m~me prosodiques militent
en faveur d'une solution métaopérationnelle du problème que pose
la composition à
la linguistique générale.
Dans
le droit f i l de
la perspective métaopérationnelle,
nous aurons
l'occasion de proposer une explication plus intelli~
gible
(et non plus intuitive)
au phénomène de
la cohésion.~nfin,
après une brève analyse de
la corrélation THEMATICITE /
DIACHRONIE
et rmi;;i'I;\\TICITI~ /
SYNCHIWNli~,
nous essaierons de faire
ressortir
Les similitudes métaopérationnelles entre
l'opérateur DO d~visa-

en anglais par A.
Adamczewski,
l'opérateur (-)
que nous avons
découvert ensemble,
puis
l'opérateur
(~) en senoufo.
(1)
C'est ainsi que E.
Benveniste fabrique
"synapsie" à
partir

1)
Statut des
termes de
la connexion s~migue
il
les ~chelles de cohésion de
la connexion
en anglais
c'est
L. Tesnière qui
lançait
l'idée selon laquelle deux
mots mis en relation cessaient d'exister comme i l s ~taient dans
le dictionnaire.
I l
le disait à
propos des
langues
indo-européen-
nes,
et du français
en particulier.
L.
Tesnière ne
se doutait
peut-être pas que
ce point de vue ~tait gôn~ralisable à d'autres
systèmes
linguistiques dont
i l ne devait même pas soupçonner
l'existence,
le senoufo,
par exemple.
Mais
c'est à
ce genre de
coincidences que se mesure
la portée théorique d'une intuition.
Non seulement
le senoufo
lui donne aussi
raison,
mais
i l apparai-
tra que
ce système
linguistique
montre beaucoup plus
exp li ci-
tement
l'altération oblige~ des notions mises en relation,
mieux,
en tous
cas,
que ne le font
l'anglais
et
le
français.
Le changement qu'6voque implicitement
L.
Tesnière se véri-
fie au niveau de
la modification du statut des notions.
Or i l
n'est pas ais~ de montrer à quelque linguiste dur d'oreille qu'
une notion change de
statut;
i l est,
en tous
cas,
plus difficile
de
l'amener à
ce constat que de
lui faire
ENT~NDRE qu'en senoufo,
deux noms mis
en relation voient
leur schème tonal changer radi-
calement.
Le
changement de
ton appelle naturellement une petite mi-
se au point.
Que représente
le
ton senoufo par rapport à
l'accent?
M~taop6rationnellement ?
de
substrats grecs,et
le
terme de
"synapsie" ne manque pas d'im-
pressionner ceux qui ont une
connaissance quasi-nulle du grec.
On se souvient que A.
Martinet,
lui,
parlait de
"synthème".

-
2l~ 1
Les phonologues
distinguent
sans aucune ambiguïté
le ton
de· l'accent.
Ils prouvent exp~rimentalement que
l'accent est
lié à
l'intensité
et
le ton à
la hauteur;
c'est
là une réalit~
indiscutable.
Dans une grammaire d'opérations o~ l'énonciateur est le
principal point de repère,
la nature du ton et de
l'accent doit
~tre rap~orté à son activit~ structurante. Le ton appartient
en propre au système de
la langue;
i l pré-existe à
tout travail
de structuration.
L'accent,
par contre,
n'appartient pas à
la
langue au même titre que
le ton;
i l est construit par l'énoncia-
teur selon les besoins discursifs
(emphase,
contraste . . . )
D'un point de vue de
linguistique gén~rale, cela a des
retombées
considérables qui ne sont pas sans
inquiét~r. les candi-
dats à
l'apprentissage du senoufo(l).
Cela implique que,pour ap-
prendre un seul mot,
l'apprenant doit mémoriser deux structures:
la structure morpho logique mais aussi
la. structure tonale.
Pour
la forme
T
T
/
k
.)
l
::>
/
i l devra décider,
selon le contexte,
s ' i l doit opter pour la struc-
ture tonale
( J 1 )
/k":) 1:)/
(1\\1 M)
=
to cough
/kj()/
(M B)
=
a hand
/k~ l 5/
(B H)
=
a
well
/k-51)/
(H 1\\'1 )
=
a monkey
/k~l}(-?J)/
(il B)
a bath-room
(1)
Notre collègue anthropologue,
amie et ~lève N. Sindzingre
en sait quelque chose

-
2i~2 -
On a
ainsi une structure morphologique pour une vari~t~ de schè-
mes tonals;
l'apprenant devra aussi
tenir compte du fait que
lors-
que
l'une de
ces formes
est mise en relation le
schème tonal de
départ se trouve modifié
plan supra-
T
T'
segmenta 1.
r
r
CVCVCV
C V
C V
plan morpho-
logigue.
Mais heureusement,
et
comme
l'on pouvait s'y attendre,
les varia-
,-
'
. (2)
tions consécutives aux mises en relations
sont en nombre f lnl
et les locuteurs natifs s'y-conforment inconsciemment.
De façon générale,
que peut-on entendre par le
changement
de statut d'une unité
suite à une mise en relation?
Ce
sont,
entre autres,
les
changements d'ordre sémantique
I(mod~fication
de s~n mode de référenciation),
sa fonction dans
la structure
construi te, ses diverses réactions face' aux
lois syntaxiques.
Selon le degré de méta-linguisticité de
la langue considérée,
la
fonction assumée par l'unité en question aura une incidence di-
recte sur son positionnement dans
la chaine
linéaire;
on sait,
en effet,
que
certaines positions
sont
stratégiquement favorables
aux unités
linguistiques pour mener à bien des métaopérations spé-
cifiques.
Enfin,
le changement de statut s'inscrit ~~ns~une suc-
cessivité d'étapes relationnelles.
(1) Ce n'est pas par pure fantaisie que nous amenageons desinier-
face relationnelles
entre
les plans morphologiqu~ et supra-seg-
mental.
Le ton n'appartient pas à
la syllabe maj_5 au mot en tant
qu'unité
totale.
I l est prouvé que dans
le verlèn ries
langues à
tons,
l'inversion des syllabes ne concerne pas
le schème tonal par-
ce que celui-ci est inhérent à
l'ensemble des
syllabes qui forment
la structure du mot.
"Cours de phonologie" de G.
Hérault,
Paris VIT
le 19/03/ 1985.
. ,
(2)
Nous n'insinuons,
en aucun cas,
que
le senoufo soit
plus dif-
ficile à acquérir que quelelue autr~
"'-~..I...I.Gl.,..o.'-.:·
~~'Vu.
lJ..L \\::..I!V..I..I':::>
L..L
t:.:::>
au

SÇl
"t
-
2 L~J -
Hevpnons
sur des énoncés déjà connus
(J2) Peters and Ritchie concluded that transformational
grammar had to be
constrained far more
lightly
( . . . )
The
P/,:;TEHS- InCHIE~~indings served as
si lent witness
to almost alL of the
significant work in syntax in the 70s.
Le CO~nTE pour la libération de JacCluesAbo.uchar
a demand8 dimanche à
tous
les
journalistes de boycotter
les
cérémonies organisées par l'ambassade URSS à
Paris.

COMIT~
JACQUES ABOUCHAR a
d'autre_part,envoy~ une
lettre au pr6sident . . .
Le ~onde 23/10/ 1985)
(J4)
She raised herself on her elbow and by the
light
of the
NIGHT-LIGHT that always burned
( . . . )
she
looked
at
the time.
( DUi\\1IVI T
-
2 3 )
(J5)
"And you have no idea who i t was
stretched that
thread a c r-o s s
THE 11).':AD 01ï' THE STJAIH.5 ?"
(DUl-J\\HT -
1 8i~)
(J5') Bob had disappeared, but as l
came to THE STAIH-HEAD
l
stumbled and nearly fell.
(DUJv1\\HT- 65)
Dans
le premier énonc8 de
la série,
l'énoncé
(J2),
la premi~re
occurrence de
'Peters & Ritchie'
peut être
considérée comme un
renvoi aux deux
linguistes,
"une c o n f or-mL té
à
I a
r(~f6rence
c o nc r-è t e v ,
;'1ais dans
la seconde occurrence,
l'(;tape relationnelle
de Phase I l , le statut de 'Peters and Ritchie'
a
changf radicale-
ment.
'Peters ancl Hitchie'
s'est
"trans-rorm(~" en
un véritable
~érieux cette mise en garde de H. Adamczewski adressée à ceux qui
croient qu'iL
suffit de vouloir parler une
langue pour
la
connai~
tre:
"n'importe qui ne peut pas apprendre une
langue '.' .

outil grrunmatical:
PET~RS-RITCHIE
Certains y
verraient une
adjectivation des noms propres;
dans
tous
les
cas
la pr~sence du
marqueur nominal(1)
TH8 t~moigne de la grammaticalisation des
deux noms propres.
La successivi t
des élT(-~nements linguistiques sui t
le même
é
schéma en
(JJ). Dans la première occurrence,
JACQUES ABOUCHAR
renvoie bien au
journaliste français;
nous
l'avons déj~ dit.
La
séquence
' .•. pour la
libération de ••• "
a
pour fonction de nous
renseigner sur un rapport
concret.
Elle répond~~ un besoin infor-
mationnel:
avant
la
lecture de
cette
séquence de
l'article,
nous
ne sommes pas
censés savoir qu'un comité a
été mis
sur pied pour
la
libpration du
journaliste.
Lors de
la reprise,
cette séquence
n'a plus
sa raison d'être.
L'énonciateur table
sur ses acquis
de relation;
JACqUES ABOUCI-lJ-\\.U. se trouve ré-investi cl 'une fonction
,
autre que référen tie lle:
celle de
reduire
l'extension de
la notion
conr-nc. La relation a gagné en thÉmatici té et la caractéristique
des relations thématiques
c'est de
s'ouvrir
sur une variété d'ef-
fets
sémantiques.
Sans
contexte explicite,
c'est-à-dire,
si
l'on
fait
abstraction de
la relation de Phase 1,
CO.HITTS J.
ABOUCHAR
pourrait être compris
comme: le
'comité qui appartient
~Monsieur
J. Abouchar' ~
'. le
comi té mis
sur pi ed par J.
Abou char';
'le comi-
té dirigé-
par J.
Abouchar';
ou celui qui oeuvre
contre
la
libéra-
tion de J.
Abouchar,
dans un cas
limite(2) . . .
( 1 )
Notre lIlétaterme
(hN)
s'applique ainsi
à
l'opérateur anglais,
ici,
(The -
s ) ,
en tout
cas i l
semble plus explicite que
"arti-
cle" qui ne dit
rien sur sa propre fonction méta-linguistique.
(~~) Devant l'opacité explicative des notions d' "appartenance",
de
"possession",
D.
Creissel
avait
choisi de parler de
"détermi-
nation associative"
(Le Comité
(d')Abouchar),
de
"prédication
associative"
(J.
Abouchar A un Comité).
C'était une manière assez
él.é g a n t e d'exprimer
le
concept de Helation.
Le tout
c'est de voir

-
2.'1::; -
l '
(
. -' '1 )
.I.'Jn
_J-
nous avons affaire ~ un type de compos~ dont on
dira qu' i l est
"lexi ca li s~". i'l~taop~rationne llement parlant,
ce la
signifie que nous n'avons pas ét~ témoin de
la première mise en
relation.
Le passa~e à
une étape relationnelle seconde se
traduit
par un glissement sémantique,
une m~taphorisation en ce qui con-
cerne le mode de réf~renciation. NIGHT-LIGHT ne désignera plus
seulement
les
lampes qui sont allum~es la nuit,
mais tout ce qui
fait
office de
"lampe de chevet".
Les énonc6s
(35) et (35') posent des problèmes syntaxiques
int~ressants: d'une ~tape structurale à une autre,
l'accord du
pluriel a disparu.
Nous reviendrons tout particulièrement sur la
neutralisation du nombre. Essayons de reconstruire
(in vitro!)
les
é
t a p e s
rela tionne lles de
chacune des structures;
d'abord
(35)
THE -
rappe lons-le -
indique qu'une' réduction substancie lle a p.té
.~.' .
op~rée sur l'extension des notions
'stair'
et
'head';
cela produit
un effet de '''d~fini'' et dans la si t u a t i.o n ,
i l a
~t~ très souvent
question de cet escalier;
l'escalier était,
dans
l'intrigue de
Agatha Christie,
une pièce à conviction de
l'enqu~tepolicière,
i l était suffisamment
"connu",
pour tout dire ..• Hais restons
dans le domaine des o pé r-a t a.o n s ~
En construisant THE HEAD OF THE
STAIRS,
l'énonciateur met
en relation deux tennes relativement
autonomes;
c'est
l'addition de deux paquets de sèmes bien dis-
tincts d t o
la possibilité d'expression du nombre sur STAIl~.
ù
En (35')
l'6nonciateur s'empare d'une notion complexe;dp.jà
structurée,de sorte que
le déterminant-article concerne
la
totali-
té de
la connexion sémique.
La chronologie des
év~nements peut
si
la no tion d' "asso cia t i vi té"
peut rendre compte d'un maximum de
cas de mises en relation,
par exemple,
la relation nominale étu-
diée au chapitre 1.
Voir-D~ CHEISSEL·Les constructions dites "possessives"
Thèse d t
t a t ,
Paris 111,1979
é

se résumer ainsi:
dans un cas
('35)
la relation des d(~terminant-
articles ~ leurs cibles nominales est ant~rieure à
la mise en
rapport des formes nominales;
dans
L'autre
cas
(J5') le d~ter-
minant-article intervient bien après
la structuration de
la no-
tion nominale complexe et
l'op~rateur (-) signale tout aussi bien
le d~passement de la relation s~mantique en OF.
L'on peut s'atten-
dre à
ce que
le senoufo explicite mieux ce genre d'opérations im-
briquées étant entendu que
les indicateurs du statut des notions
nominales -
le MN -
est intégré dans
les formes nominales.
Dans
les analyses des ?nonc6s comme
(35) et (35') il est
souvent fait usage de certains concepts de description qui,
à
nos yeux,
n'ont pas une grande portée théorique
d'autant qu'ils
ne sont presque
jamais traduits en termes d'opérations.
A propos
de
la forme présente en (J5)
la tradition parlait d'une
"fonction
adnominale" de
'OF TI-U:; STAInS',
sans d o u t o pour dé crire
l ' opé ra-
tion d'ajout sémique.
Pour ce qui est·de la forme
composée
,de
(J5' ).M~;rchand ( 1) a u t'ai. t vu à travers l' antépo si tion de J'iIGHT
un phénomène de
"transposition" ou èncore
"une dérivation par
morphème zéro";
c'est un euphémisme pour l ' "adjectivation
du nom"
appelé,. par ailleurs,
"déterminant". Encore une fois,
i 1. semble
plus
adéquat de
rapporter toutes
ces6p~rations aux activités
structurantes de
l ' énonciateur.
Prenons une forme moins métapho-
rique
(J6) Each morning China Dengwame and his family rise
before day-break and eat an hurried breakfast b y a
CA:m U':-LIGlIT.
( 1)
LI.
i\\lARCHANlJ
"Expansion,
transposition,
derivation" in La
linguistgiue,
2,
1967

-
2!~ 7 -
CANDLE occupe bien la place dévolue aux adjectifs
selon les ca-
nons de la syntaxe anglaise et
l'adjectif a
pour vocation "de
li-
miter une cible nominale"(:~). Hais il faut aussi admettre que,
parfois~ l'~nonciateur prend sur lui de forger des outils de r~-
duction d'extension,
même si,
en
l'occurrence,
i l doit retourner
chercher les maté~i~ux
de
construction de
ces outils dans
la ca-
gorie nominale elle-même.
On sait que
lorsqu'il y
a
structuration,
les pertinences catégorielles sont mises en sommeil,
disons d0-
passées.
Structurer,
au fond,
c'est attribuer de nouvelles fonc-
tions aux unités,
selon la nature de
la relation à
construire.
En ce qui
concerne CANDLE,
la structuration a notamment
consistf
à
tll'appeler à
d'autres fonctions",
c'est-à-dire,
l'adopter en
outil de réduction d'extension de
lQ notion LIGHT.
Cl';
Que dire du statut de
(LIGHT)
OF THE CANDLE et de celui
de
the CANJJLE(-LIGHT)
en rapport avec
la détermination ..?
Dans
les deux cas,
i l s'agit du résultat d'un total sémique,
une con-
nexion sémique, si
l'on préf~re. Mais avec
-OF THE CANDLE,
c'est
par l'effet résultant que
l'on peut dire qu'il réduit
l'extension
de
la notion LIGHT:
i l y
a
création d'une sous-classe de
LIGHT
(cf.
night-light,
traffic
light . . . ) Or en (J6)
l'effet r~sultant
la 80US classification -
et
la position s'accordent
pour recon-
naître à CANDL~ un statut de dpterminant.
N'est-il pas ant?posé
à
l'image des déterminant-articles eux-m~es ?
Dans
la chaîne
lin6aire CANULS se place à
gauche,
dans
l ' a n t v c c d e n c e du nom ci-
ble,
comme pour indiquer méta-linguistiquement que
l'extension
de
celui-ci n'est plus
intacte.
( 1)
C. D"STJ'j.\\S ,
1985,
p.
575

-
2LJg -
Ainsi de
TIlI~ LIGHT OF THE CANDLE
à
THI~ CANDU<;- LIGHT,
i l Y a
"dr'termination" mais c'est dans
la seconde étape relation-
nelle que
l'emploi de cette métaphore trouve une
lfgitimité
th~o­
rique. D'après les auteurs de
La syntaxe de
l'enfant avant
'5 ans ( 1 )
l'enfant dit d'abord
i'laman est gentille
avant de parler de
La gentilh~sse de Nam a n ,
Nous ferons
remarquer qu'à ce stade de
l'acquisition du
langage,
l'enfant respecte déjà une
certaine successivité dans
les ~tapes
relationnelles.
LA GENTILL~SSE de [-'IAI·jAN a quelque chose de plus
abstrait que i'lAHAN EST GENTILLE.
I l aura atteint un niveau d'abs-
traction langagière plus élaboré
lorsqu'il parviendra à
substi-
tuer
(la gentillesse)
DE HAJIAN à
SA
(gentillesse).
On retrâuve
d'ailleurs des ~noncés dans
le
langage anfantinqui trahissent
la maitrise rion encore r~ussie de
l'acquisition de
la dernière
opération,
étape pendant
laquelle
l'enfant
'abstrait difficile-
ment
sa
personne du
langage
:
e.g.
, (1)*
LA POUPEE DE MOI
(II) 7* MON
la poupee
(1)
Ma
poup~e
(II)
Pour revenir aux ~noncés de départ,
si dans
(la gentilles-
se)
DE l'IAj\\'lAN, ,i-lAf\\'IAN pouvait encore renvoyer à
la mère,
SA n'est
plus qu'une abstraction. Mais
l'essentiel
pour notre démonstration
(1)
F.
FRANÇOIS et al.
La syntaxe cie
l'enfant avant
cinq ans,
Larousse,
Paris,
1977,
p.
144,
cité
par ]\\1,
H.iegel: L'adjectif at-
tribut,
PUF,
Paris,
1985

- 249 -
est que
le substitut
formel de DE j,jAJ'-iAN
(SA)
introduit,
par la
1
-
gauche la notion nomina le GISNTILU':SSi~ dans
le contexte subséquent.
Plus important,il agit
comme n'importe quel op6rateur du nom sur
t'extension de
la notion GENTI:~C~!;SS:.s. Schématiquement, nous avons:
(1)
lCO)
Î'·lAMAN
(1)
1
C
C:~NTILL8SSE
(II)
Toujours concernant
les
cas de d~termination de STAIU-HEAD
et CANDLE-LIGHT,
i l est parfois tentant de parler de
"changement
de
catégorie",
("transposition",
selon H. Marchand).
L'approche
métaopérationnelle voit dans
"le changement de catégorie" une
opération de structuration et de re-structurationfet ce qui sous-
tend l'ensemble de ces op6rations,
c'est la notion de
successivi-
té.
'The HEAD OF' the STAIRS'
et
'the LIGHT OF the CANDL1~' sont
des mises en relation qui correspondent à un certain événement
linguistique;
les étapes structurales suivantes
'the STAII{-HEAD'
et
'CANDLE-LIGHT'
correspondent à un autre pv6nement
linguisti-
que.
En un mot,
le changement de
catégorie s'inscrit dans une
certairt~ chronologie.
Le changement du statut des termes de
la connexion sémique,
1.8 étapes !,elationnelles dans
lesquelles s'étallent ces change-
ments,
rappellent
les ~onditions de
la nominalisRtion anglaise en
-ING,
telle qu~elle est décrite par H. Adamczewski

-
250 -
(37) A girl has been strangled in the park. Girls
are
a Lwa y s
beING STRANGLED
( . . . )
(GLA,
1982,p. 68)
Hême si elle a déjà subi une première structuration (-has been
STRANGLED),
la notion verbale
'strangle'
a
encore une certaine
lat......:i tude à re later l'événement extra-linguistique. Avec
la no-
minalisation en -ING,
le prédicat devient un instrument dont
l'6nonciateur se sert pour parler de GIRLS et c'est bien des GIRLS
qu'il s'agit dans
le contexte.
Autrement dit,
le prédicat devient
le second terme d'une
relation a r t Lc u Lé e
sur DE et
comme
le mon-
tre
la construction de
l'0noncé,
le
changement de statut suit
la successivité des mises en relation;
en ce sens,
BE-ING peut
être considéré comme un dateur méta~linguistique.
Le
changement de statut des membres de
la connexion s6mi-
que concerne aussi
les
traits pro~odiques. ~'accent de mot est
indicateur de
l'état plus ou moins autonome des éléments d'une
structure. Ainsi de
,
,
The
LIGHT OF THE
CANDLE
nous passons a
,
..
The
CANDU~:-LIGHT

"il,
~t i l devient alors intéressant de noter que le passage en PhaseII
a
aussi des implications d'ordre prosorlique.
La cohésion qui dé-
coul.e du caractère
"ancien" de
la relation devient ainsi percep-
tible à
l'audition.
Cela répond aussi a
la question de savoir si,
dans
la connexion sémique,
nos opérateurs
(-),
et
(&) dans une
moindre mesure,
sont audibles,
plus explicitement,
si
"l'on entend
le trait d'union,,(l).
(1)
La question nous avait été posée pendant un cours de phonologie.

-
251
Mais en anglais
la longueur
(i.e.
le nombre de
syllabes)
des membres de
la connexion sémique peut
contribuer à neutrali-
ser l'unicit~ de
l'accent de mot parce que,
rappelons-le,
l'ac-
cent est
lié à
l'intensité,
c'est-à-dire,
l'énergie physique que
,.
l'énociateur investit
lors de
la
prononciation. Tel n'est pas
le cas du senoufo
comme nous allons
le voir.
ii)
les échelles de
cohésion dans
la connexion
sémigue du senoufo
a)
la connexion sémique
lâche
Quand on observe· ce qui est
connu
sous
le nom de syntagme
npminal en senoufo,
on peut avoir
l'impression que. les
consti~
tuants
sont
juxtaposés.
Aucun relateur n'est perceptible à
l'oeil nu
( J8) ~g_i
kolo.?,o
--,--,-

mi
na
field.l'iN2/road.Î'lN1
1 show
/
me /
on
/show me
(a)
road of the field/
Show me THE ,vAY TD THE F'IiSLD
ka. la
na
mi
pa
mo
ma
paddy-field./affair.MN1/on /
me/
come /you /
to
;'liN 1
/T have come to you for an affair of paddy-field/
,
1 've
come ta see you :for
:'.
l'\\;'JllY -?1 t:LD DUSINESS
l'ialgr8
l'absence de relateurs entre
les formes nominales,
la struc-
turation est déjà
commencée.
Pour en apprécier l'incidence sur

-
252
-
le statut des termes mis en relation,
i l faut
les consid~rer dans
une phase pré-structurale,
c'est-à-dire,
dans
leur état
lexical:
(38' )
se'~.gi
the field
vs
së' . gi
r
k616.?o
kolo.?à
(a) road
.,.;-:
(a)
paddy-field
vs
fa.? a
r
ka. là
(an)
affair
On remarque que c'est seulement un
terme
de
la connexion
1
sémique qui est concerne par le changement de tons.
Sn
(J8) la
structure tonale de'foute'
/kolo.?à/
(.1'11'1 B)
devient /-k616.?o/
(H H -H); en (J9),
la structure tonale de
'affaire'
/ka.là/
(H B)
d~vient /ka.la/ (H M). Il est encore plus intéressant de noter
que c'est
le nom di t
"d(~termj_né ",
le nom cible en termes plus
adéquats,
qui
subit
l'altération tonale.
Le
nom déterminant res-
te,
quant à
lui,
indifférent à
la mise en relation.
La question que
l'on pourrait se poser c'est celle de sa-
voir si
l'altération du ton est
liée à
la mise
en relation en
gpnéral ou si,
au contraire,
elle est
conditionnée par la présen-
ce f"ël.rticu lièrede j se' . gij -
'le champ'-
et/fa.?~j - 'rizière'
qui ont des structures tonales particulières.
Avec d'autres manipulations,
l'on réalise que
l'altération
de
la structure tonale du nom cible est dictée par celle du nom
antépos~; plus précisément,
c'est
le dernier ton du nom ant?po-
sé nui
en sc
propageant par la droite,
rencontre
le schème tonal
'.L
,
du nom cible
et
le modifie.

-
2)J
-
Les enseignements à
tirer de
cet ôtat des
faits
sont rnul-
tiples et très intRressants pour une grammaire d'opérations.
D'abord,
le fait que
l'un des membres de
la connexion s?mique m~-
me . lâche
voie sonsc-hème
tonal changer,
signifie que
les phases
de
structuration sont
.no t
e s méta- Linguistiquement
au niveau su-
é
pra-segmental;
le fait que
ce soit
le constituant en fonction
de déterminé,
le nom cible, qui
subisse l'altération tonale mon-
tre tout aussi méta-linguistiquement que c'est
l'extension de sa
notion qui est concernée
au p r-ern Le r-c c ho j",
par l "opération de limi-
tation;
cela prouve,
enfin,
que
la relation de
limitation a
bien une orientation
(~)-étape pré-struciurale:
1
r-T
1:~ )(
T
T
G V ~
C V
C V
- ,
1
e.g.
se
.gi
kolo.?à
(11) étape structurale:
>
T
T' 1
T' -
:c. V
c V
c V
e.g.
se
.g
r
o
o.?o
La propagation des traits tonals,
la relation de r6duction d'ex-
tension de
la
notion s'oriente dans
la m~me direction.
On note
qu'une fois de p l.u s
les phfnomènes supra-segmentaux et
les phéno-
mènes grammaticaux convergent selon les principes nlétaopérationnels

qui accompagnent
le
fonctionnement
de
la langue. En tenant
comp-
te de cette orientation de
la relation,
on est amené à rejeter
complètement
le tenne de
"subordination" que O.
Jespersen affec-
tionneen pareilles circonstances.
Le
nom que O.
Jespersen donne
pour "subordonnR"
(le déterminant)
est
justement celui qui con-
ditionne
la réalisation tonologique du nom dpterminé.
En suivant
(). Jespersen,
ce serait
le nom-r(~ducteur-de-notionqui est le "su-
borclonné ",
ce qui est bien évidemment
contraire à
la réa li té des
ch6~es. En tout cas,
en senoufo,
à
supposer que l'on veuille rete-
nir le métaterme de O.
Jespersen,
c'est plutôt
le nom-cible qui se
trouve être subordonné; ce qui
se conçoit aisément:
c'est,
en ef-
fet,
vers
lui qu'est dirigée
l'opération de
limitation d'extension.
Le schème tonal du nom cible varie donc' selon des
"règles
d'accord"
finies que nous n'analyserons pas dans
le cadre du pré-
sent travail(l),
nos objectifs étant autres •
. Remarques sur le statut
(:!:)TH des termes de
la connexion
Nous avons analysé
la connexion sémique
l&che en anglais
(type THE head of THE stairs)
sans insister suffisamment sur l ' a l -
ternance éventue lle des opéra teurs
A /
TH1'; qui indiquent
le statut
de chaque terme
de
la connexion.
En anglais,
les
locuteurs ac-
ceptent sans hésiter
(1)
Nous nous ferons
seulement quelques
. re~arques sur la combi-
natoire des
trois tons phonétiques du senoufo
-
quand deux tons bas sont
les plus proches de
l'interface
,relationnellec(le dernier ton du nom-limiteur et
le premier ton du
nom-cibl
bas
les schèmes tonals restent inchangés:
T
~~.-
hauts
se suivent dans
les m~mes circons-
__>a-'::>....L<~:::.\\:::~~...l:<..~tona le du nom-cible reste inchangée
[I·~
- +
~
~7nn?~~~~TV~~
haut
et bas apparaissent dans
ces mêmes

255
'l'lIE
head of
THE;
stairs
ils acceptent
encore
A
man of TI1E
people
(Chinua Achebe);
hors contexte,
ils se prononcent difficilement
sur
A
name of A
person
et
conseillent un autre type de structuration de
la connexion
s~mique (e.g. A person's name). Ils restent très ind~cis sur l'ac-
ceptabilit~ aû la non acceptabilit~ de
THE
son of
A
woman(l)
Les oc ho s es vs a ;prp.sentent
au t r-ernen t
en s e rio u f'o ,
Sans doute
parce que
le MN indiquant
le statut
(!)THdu nom fait
co~ps avec
celui-ci;
en tout
cas,
on ne
trouve pas de Cas
litigieux.
En (J8)
on a
:
se'!' .gi
k610.?O
the way to
the field
..
field.MN2
j
road.ïvlNl
~
Le nom-réducteur dans
la connexion s émLqu e
a
vu
s av.p r-o p r-o exten-
. ,
sion
la~&emen~ réduite~~ l'image du MN2 de Phase II
",
'le champ');
liextension de ~a notion-cible, quant ~ elle, a subi
une
légère réduction ,comme
1 '.indique MN1 (/kolo .? àl- , (une ) route).
En
(39)
les termes de
la connexion sémique ont des statuts iden-
tiques:
leurs extensions sont réduites au minimum puisqu'ils son~
chacun marqué par des MN1
indicesde Phase l
J
.
conditions -
sans considération de
leur
succession.
le
schème tonal du nom-cible ne
chan e
as
.
.
~
----7'
T BjI-I
-_~~--:::.-
Dans tous
les autres
cas, le ton.bas initial d'un nom-cible
devient moyen,
le ton moyen ini tia 1 des mêmes
noms devient haut.
Pour tout dire,
la structure
toriale gagne en hauteur.
Peut-être
cet te éleva tion en hauteur a-t-e 1 le rapport avec
le
ton
tOll.iollrs
haut des bases
lexicr:ales marguées par ,'lN?,
l'opérateur d'acquis
de relationo?
(;2)
'the
son of a
certain motherjwoman'
est possible;
mais
'the
son of ~ womanjmother' fait partie de ces constTIlctions qu'il
n'arrive pas aux
locuteurs de produire.
I l
faudrait
se dem~ndpr
pourquoi.

fa .?a
lui. la
a
paddy-field business
paddy-field.
/affair.l·.INl
j'IN 1
Toutes
les combinaisons
(avec
les MNl
ou MN2)
ne sont pas attes-
t6es;
on relève une contrainte incontournable:
le nom-cible ne
peut
jamais ~tre de Phase II
- ,
,
* se' .g1
kologi
/the
road of the field/
fie Id .~JN2/
road .1\\lN2
* fa.? a
A/the affair of the pad-
dy-f1eld/
paddy-field.MN2/ affair.MN2
ou dans une formalisation plus générale
*
c2_e__ ~base
1_'1_N_2
La contrainte semble
justifiée et elle peut
s'expliquer
à partir de deux niveaux d'analyse distincts mais
compl~mentaires:
le niveau phonologique et
le niveau énonciatif.
-contrainte phonologique
Nous avons vu
(chapitre 1) qu'en Phase l
(ou
"défini" se-
lon la t r-ad t t Lo n jcc t e s t
la base
lexicale qui décide de
la réalisa-
tion phonologique du MNl mais aussi de son schème
tonal d'une cer-
taine manière.
En Phase Il,
par contre,
le MN2
a
toujours
la m~-
merr~alisa tion phoné t Lq u e (, (cv) cv ). La lorme du JlIN2 (morpho 10-
gie et ton)
~tant toujours la m~me, cela oblige la base lexicale

-
257 -
marquée par l e JlIN:-~
a
avoir le
A
meme
schème tonal.
Pour reprendre
une de
nos m6taphores employée au
chapitre pr~c6dent, tout se
passe comme si
la base lexicale marqucie par le MN2 donnait au
nom sa forme
la plus grammaticalisée,
forme qui
se trouve fort
logiquement ~tre immuable. Et dans
les connexions sémiques quand
ce nom à
la forme bloquée
,parce qu'en Phase II) est
la cible d'une
opération de
limitation,
c'est-à-dire,
quand son sch~me se trou-
ve exposé à
la propagation (de gauche à
droite),
i l ne subit
jus-
tement aucune altération.
-contrainte métaopérationnelle.
"Le point de vue phono logique traciui t
le point de vue m(~ta-
opérationnel".
Nous avons
la preuve une fois de plus dans' la càn-
-
nexion sémique une convergence entre
la c on t r-a Lrit e phono logique
telle que nous venons
juste~de l' explique;- elarîs~ lé paragraplle
pr6 -
cédent,
et une constrainte
liée à
la compatibilité des op~ratiions
effectuées
lors de
la construction d'une m~me structure.
La construction de
la relation de détermination vise et
consiste à
réduire
l'extension d'une notion nominale.
Cette réduc-
tion est déjà
effectuée directement par le MN2 et
la réduction
est m~me maximale. En outre,
toujours dans
la connexion sémique,
le-nom ~ntépo~é se postule comme outil de r~duction d'extension
du m~me nom-cible. Tout se passe comme si deux opérations de réduc-
tion d'extension (taient dirigées vers
la rn~me notion cible. Cela
est
sans doute senti
par le syst~me comme une sorte d'excès dans
l'entreprise de réduction d'extension et i l rejette,
fort
logi-
quement
la connexion sémique nominale structurée selon le schéma:
J

-
258 -

l'lN 1/2
base
. ;·!N2
-~------_.----
st permet qu'elle soit
structur~e plut3t selon le sch6ma
)
E·;,N X
pour la juste raison qu'avec
le MNl
l'entreprise de r6duction d'ex-
tion n'a pas encore atteint un seuil
limite. En un mot,
la struc-
-
ture
(a)
est refus~e pourpr~venir les exc6dents de limitation.
I l reste à
faire quelques ~emarques sur le degré de cohé-
sion des
connexions sémiques.
La pr~sence des }lN en (38) et (3))
permetd'dentifier chacun des
termes des
connexions comme des
noms.
En effet,
nous avons vu
(chapi tre II)
que
le Ï'1N ~ tai t
la
marque du passage d~une notion dans
le plan 6nonciatif.
C'est
donc dire que
les mises
en relation ont été
effectuées après
la
structuration complète des notions en programmes semiques nomi-
naux.
Nous avions déjà vu en anglais que
la construction
'the
head of the stairs'
a é t é structuré
suivant
la m~me chronolo-
gie linguistique.
En senoufo
comme en anglais,
la conséquence
en est que
l'énonciateur a
structuré deux signifiants quis'~taient
déjà assurés une identit6 nominale par le biais des déterminant-
articles et des MN.
Une conséquence peut en entrainer une autre:
dans
chacune des deux
langues,
l'énonciateur aura mis
en relation
deux fonnes qui
jouissent de
leur autonomie
cat~gorielle, et la
connexion sémique reste tr~s lache du point de vue cohésion~
T~I-U;~A0
~ T~STI~
----
- - -

259
se .. .fil
k61a.?;
the way to
the field
La formalisation visualise mieux la successivit~ des 6v6nements
linguistiques:
au moment où
l'énonciateur mettait en relation
les deux programmes
sémiques nominaux en vue de l'obtention
de
la
connexion s~~ique, le rapport entre les op6rateurs du ncim (MN,pour
le senoufo et d~terminant-article pour l'anglais) et leurs cibles
ies~ectives 6tait ~~j~ établi. Selon l'ordre d'occurrence des di-
verses mises en relation la première nommée
est
la plus
"nouvel-
le"
des
deux autres. Une
connexion
sémique
sera
d'une
cohésion plutôt
lâche
si
la relation entre
les
termes de
la con-
nexion en question se
construit
"avec un
certain retard",
par rap-
port à
l'application des déterminants sur les notions nominales.
b)
la connexion sémique
compacte
Les deux types de relation qui viennent d'être décrits
voient parfois
leur ordre d'occurrence inversé dans
la chronologie
linguistique.
Cette nouvelle forme de successivité a une incidence
directe sur le d~gré de coh~sion de
la connexion sémique et ce pour
des raisons mptaopérationnelles.
I l va sans dire que
lE'
statut for-
mel de
la structure
(présence ou absence de relateur)
se r~p~rcute
Sur le mode de réf6renciation du produit
sémique;
Le
renvoi à
l'extra-linguistique apparaît moins direct.
Prenons un couple d'é-
rio n c oj.

-
260 -
(40)
wi

mo
pye
gà.là
fèri.g~
he l(neg)1 you 1 say
1 hen .j-lN 1 1
spur
. j"lNl
gi
wee
su

i t
1 him
1 prick
1
(neg)
Ihe did not tell you (a) spur of (a) hen it pricked hi ml
. He did not ·tell
you that he got prickecl by A COCK-SPUR
(40' )
wi.
il
ma
pye
gà~fèri . g~
gi
wee
sub616
.he
l(precl)/youl sayl hen-spur • MN1 1
i t
1 him Iprick
Ine has told
you that a hen-spur i t is ,pricking himl
. He' s been saying that he' s
got .A :;;STOMACHAflHE
Ce qui fait
la différence entre les deux connexions sémiques,
c'est
bien le degr~ de compacité.
Cela,
tout
le monde peut
le constater;
i l reste
le point de vue théorique.
Sémantiquement,
la différence entre
les deux structures est
aussi de taille.
Dans le premier Cas de figure,
i l s'agit de
la
référence concrète à
l'ergot du coq.
Les notions nominales sont
"en confirmi té
à
l'extra-linguistique" et cela se conçoit aisé-
ment étant entendu qu'elles gardent une certaine autonomie
(cf. pa-
ragraphe précédent, "ii.a). Dans
le second cas de figure,
la struc-
ture compacte ou thématique est en rupture avec
l'extra-linguisti-
que.
De
la d~signation concrète on passe à un emploi métaphorique
de ERGOT ( 1) • L'on sait que la métaphorisation est une prise de
distance vo lontaire de
l ' énonciateur vis-à-vis du concret,
une for-
me d'opacification,
en d'autres termes.
Cette distanciation se me-
sure en termes de phases
(1 ~ II )
sur le vecteur vertica l
entre
(1)
La traduction exacte pour la structure compacte est
"point de
côte".

-
261
-
le
linguistique et
l'extra~Linguistique (c~. chapitre I).
Pour revenir à
la svructuration de
la connexion spmique com-
pacte en
(l~ü'), disons que les bases lexi ca les ont cl' abord ..; té mi-
ses en relation en tant que notions avant d'être actualisées com-
me un seul constituant syntaxique
comme en t~moigne la pr~sence
du seul MN l-g~/;
on se souvient que
l'occurrence d'ün MN signifie
la présence d'un "individu nom".
Par la présence de
l'opérateur
unique,
la connexion compact e du senoufo
(j gà-f~ri . gèl -
'ergot')
peut être rapp:r(')chée de
celle de
l'anglais
(the STAIH-HEAD)
the head of the stairs
---~
the stair-head
(§)-~----
rl(II) c
@AIl~ Q
_
Igo.lo
Ï~r~.g~ 1
Igo - f~r~ . g~ 1
~
(I)~
---~
~~}
~
----------
(II)
:=_c_.~@-~
La schpmatisation a
essentiellement pour objectif la déli-
nciarisation des structures.
La structure senouÏo fait mieux ressor-
t i r les deux niveaux de
linéarité. T~ structuration de deux bases

-
262 -
d~passe la comp~tence de l'~nonciateur structurant; c'est une ro-
lation que
la langue
lui a
offerte toute faite(l).
Cette structu-
ration rel~ve de la chaine lin~aire abstraite et conform6ment aux
contingences du contexte discursif l'énonciateur structurant arti-
cule cette notion complexe sur la chaîne linéaire
"concr~te" par
adjonction du MN /-gè/
(r) plan des notions (1ère strcuturation)
E
X
f_~
(rr) plan ~nonciatif (2ème structuration)
~Cgà-Q ~
Avec cette formalisation,
la coh~sion s'explique plus clairement.
Le
sch~ma indiqu~ que, dans le plan ~nonciatif, les deux bases
lexicales sont
"prises" à
l'int~rieur de deux ellipsoïdes. Du point
de vue des op~rations, cela signifie que ces bases lexicales sont
"passées" à
travers deux trames de structuration,
c'est-à-dire
qu'elles ont ~t~ structur~es puis re-structurées,
d'où
le fort de-
dré de
compacité.
Le
fort
degr~ de compacit~ a parfois des répercussions sur
la forme phonique
des
constituants de
la connexion à
cause des
effets d'assimilation (progressive):
on réalise,
une fois de plus,
que
la thématicité peut
~tre auditive!
(1)
Plus ordinairement,
on parlera de "lexicalisation".

- 263 -
( L~ 1 )
tOÎ::>
-
tÉ .?E.
ni
ny,;;
father -place .l'lN1 /
in
/person.MN2/
be
( L~ 1 ' )
tOÎ?
d':.?G
ni
s~ . • wi
ny~
Îather
place .i'lNl /
in/
person.l'iN2/ be
l i t is in a
father's dwelling that
the person is/
The person in guestion lives with his own father ?
Nous avions déjà en (41) une connexion sémique compacte, structurée
dans""les m~mes conditions que celles de la page précédente; mais
lors de
la reprise,
l'énonciateur
ici
le voyant -
marque encore
le passage à une autre étape structurale.
Comme quoi une relation
n'est pas trop thématique pour ~tre elle-m~me dépassée; :c'est la
confirmation que
la thématicité
est relative.
G.
Naudé
l ' a d'ail-
L
1 "
,(2)
' 1 '
' d "
.
t
eurs sou 19ne
. l'alS revenons a nos
eux enoncesj
en reprenan
dans la foulée /tof~-té.?E/
'lieu du père'
-
l'énonciateur a
s~bstitu~l~·phonè~e /dj au phonème /t/ et il l'a fait inconsciem-
ment,
bien entendu.
Ce qui est remarquable) c'est que
les sons / t /
et /d/
s'échl::~lonnent sur un vecteur bien orienté. En (L~l) l'assi-
milation n'opère pas:
c'est un indice phonique de l',autonomie re-
lative des
constituants /tof~/-'père' et /te.?~/ -
'place',
disons
que
la cohésion n'
y
est pas marquée phonétiquement:
l'énonciateur
ne s'est
pas senti obligé de faire
"la liaison".
En (41 ,)
par contre,
le voisement de
la voyelle ouverte /~/
s'est propag~ jusqu'à la dentale non voisée / t / ,
la transformant
en dentale voisée id/.
On peut
résumer en disant que
la liaison
phonique est une preuve de
la comptabilité des
~tapes relationnelles
(1) Séence divinatolr~ + explications,
cahier XX,
10/02/ 1985
(2)
G.
NAUDi~ : Etude (le certains concepts (,51aborés par li;. Benveniste
dans
"Noms d'agents et noms d'action en Tndo-européen" et essai
d'utilisation de ces conce ts
our l'étude des
lanrrues modernes
an ~lais en
articulier
t
Thèse
Jème
cycle,
l)aJ.'~~ ~~~~,
J./;~\\~

-
2 61~ -
dans
les encha1nements discursifs;
l'id~e essentielle reste celle
de
la coh~sion liée au décalage dans
les étapes
'structurales. En
effet,
on peut considérer /d/
comme un dépassement de / t / puisque
la production de /d/ demande
(par rapport à
celle de / t / ) un effort
articulatoire supplémentaire
/ t / ( r ) ~ (rr)/d/. Autrement dit,
l'espace articulatoire de / t / est incluse dans
celle de /d/(l) .
.::
L'ensemble de~a d6monstration avait un objectif précis:
dépasser l'analyse intuitive du phénomène de coh6sionpour une ap-
proche métaopérationnelle donc plus intelligible de celle-ci.
Le
degré de cohésion d'une structure est stri~tement lié au caractère
"ancien". de
la relation entre les termes de
la dite structure;
structurer,
c'est entreprendre une oeuvre de
cohésion.
Bref,
la
structuration est
dans le fond,une
qu~te de cohésion et l'on ne
J
peut pas imaginer de cohésion
sans
structure;
la structure,
à
son tour,
ne peut pas se concevoir sans
(mise en)
relation. Et
quand E. Benveniste parle d'un "âge" des formes
"conglomérées"
l
une appre' c i a t i o n plus fine de
la notion
sans p us, manifestement,
de relation lui faisait défaut.
(1) H. Adamczewski fait un parallèle entre le système des labiales
et celui des modaux en anglais
(cf.
GL'\\,
lljEi::',
p.
1il;-~~)
rhonologiCjuement on pourrait aussi soutenir que /t/ est un
d6passement de /d/ en argumentant ainsi:
_
/t/(I)
> (n)/c1/+non voisement.
j\\1ais
cette perspective est
moins naturelle.

-
265 -
2)
Etapes relationnelles et
coh~sion
L'~nonciateur, disions-nous,
prend parfois sur lui de cons-
tr:uire des outils de
structuration pour ses besoins op~rationnels.
Parce que les unit~s linguistiques dont i l se sert ne lui sont pas
toujours donn'es par la langue comme op~rateurs; ces unit~sperd~rit
l~ur stàtut initial,
celuiq~'onpouvait leur reconnaiti'e quand
elles étaient encore à
l'état
latent dans
le
lexique.
Lorsque
le
mouvement structural est enclenché, les unitésen question sont,
en
quelque sorte,
"rn o b i. Lâ s
e s " pour les opérations,
perdant de
la
mê-
é
me manière
leur autonomie.
La perte d'autonomie se traduit formel-
lement par la cohésion visible parfois à l'oeil nu en l'espèce dB
traces comme
ou) mieux encore
(-).
)
i)
structuration des outils de
limitation d'extension
Le
rapport nécessaire entre
le degré de
cohésion et
la sur-
venanee d'une relation dans
l'axe
Phase l
----+ II devient encore
plus évident dans
le cas de
la construction des outils de
limita-
tion.
L~essentiel des études sur la composition a passé sous si~
lence les cas où une structure complexe se trouve en fonction de
déterminant.
C'est pourtant dans de tels
cas de figures que
l'opé-
rateur
(-)
montre qu'il est
loin d'~tre facultatif. Il se charge
notamment de relier deux notions,
quand celles-ci ne
sont pas en-
core f'u s i.o rmè es
( L~2 )
American tort
Law may holcl
Union Carbidc
It s t r i c t l y
liable"
for
the
G,,\\S
LEAK.( ••• )
l"i VB teams of Am o r-a c a n
Lawy e r s
Ti led negligence sui ts
agaisnt Union Carbide
( . . . )
on the bellalf of the GAS-LEAK
VICTli·:S.

-266 -
Rappelons qu'en mati~re de structuration,
ce qui détermine
le sta-
tut d'une unit6,
c'est
la fonction dont
celle-ci se trouve inves-
;. ...
tie .Lo s deux occurrerlce·E.de·C:AS
et LEAK s'opposent sur la base de
la fonction de ces él~ments. L'absence de relateur préposition-
nel signifie
la présence de
l'op~rateur (&): c'est la coh~sion
qui commence à
se préciser ainsi. tlais
cette cohésion toute rela-
tive ne parvient pas à dissoudre
les
spécificit4s fonctionnelles.
Toujours ,dans
la
premi~re
occurrence de GAS & LEAK, GAS est
l ' outi l
de réduction d'extension dirigé vers
la cible Li~AK.
La seconde occurrence voit
la dissolution des
spôcificités
fonctionnelles de GAS (outi l-restricteur)
et de LJ<..":AK
(cible de la
la restriction).
Chacune des unités
c~de son programme sémique à
la construction de
l'instrument de
limitation sélnantiquement com-
plexe. r'létaphoriquement,
disons que GAS et LEAI'<-
se solidarisent
pour effectuer une seule et m~me opération de restriction d'exten-
sion orientée,i6i,
vers VICTIMS.
La successivité des 6tapes rela-
tionnelles peut ~tre ainsi schématisée
(I)
l~re étape relationnelle
~__L-T§0
(.r
J r
, . )
')
....nd e
0tape relationnelle
~
---"---~:::::====:::::='-_--
.
VICTIJ'JS
~tS Q
L_~
.
J

- 267 -
Un è lJ~ment,
simp le ajout
sémigue clans
l ' (~tape structura le
primaire,
devient opérateur de réduction d'extension d'un nom dans
l'rStape structurale seconde
(43)
"1 think there is
no
doubt
that ?'iiss Arundell died
a natural death fromDISEASE of l.oNG STANDING"
( DU:\\]'.vr r -
? 1 3 )
.(1+3') "But remember, Basting, again and again a body is
exhumed -
and in each case a
certificate has
been ~igned
in all good faith by a doctor attending the
case."
"Yes,
but in this
case, ;\\liss
Arundell
diecl
of
a
LONG-STANDING
CQ?-IPLAINT".
(DUi','"nT -
1? L~ )
Comme dans
l'énoncé précédent
(42), la compacité de l'outi~ de li-
mitation est
corollaire de
la localisation de
la relation
LONG /
STANDING à un certain point de
la chronologie
linguistique.
Si en
(42) les spécificité~ fonctionnelles de GAS et de
LEAK se dissol-
vent au profit de
la métaopération,
i l en est de m~me des pertinen-
ces catégorielles.
Lorsqu'un signifiant-adjectif est associ~ à un
signifiant nominal pour l'élaboration d'un outil de structuration,
son statut d'adjectif ne
compte plus.
La
construction de
l'opéra-
teur de
limitation
transcende
les individualités
cat~gorielles
et toutes
les
latitudes
syntaxiques que suppose une
catégorie
grammaticale donnée;
dans
le cas de
L 'adjecti:f,
c'est
le soi-cJi-
sant régime de
l'incidence pui est concerné
.\\.
(4i~) "Here we are", saiel j'-·;r Grainger ( ... ) F'nur recep,
eight b o d and dressing,
t.t s u aL
offices,
OLD-l,':U:-:L,:) GAi-{Di';NS.
( ]·) U ~. , ,.r', .. "
" ':. )
.::!l~~".l
-
'·t~;

-
268 -
You mean to go
to Harket Basing ?
5hall we go in
the car ..• ?"
... 1 h~d acquired
a
SECOND-RAND AUSTIN •••
(DUi'·1 vrr - Il 1 )
~1':'
Dans
les deux ~nonc~s on se rend bien compte que
l'opéra~
teur
(-)
ne pouvait pas être omis.
Sans
lui,
en
(i~!~), l'adjectif
étendrait son incidence sur l'ensemble de
la structure.
Se
sens
de
l'~nonc~ sé trouverait ainsi modifié radicalement; "au lieu de
(OLD-1WRLD) GARDEN = jardins à
l'ancienne mode
on aurait
OLU (\\VOHLD
GARDEN)=? 'vieux jardins du monde
..
Il en-est de meme en
où,
sans
l'opérateur (-) l' énoncé aurait
une
lecture ambiguë
a
SECOND
HAND
AUSTIN
?
une deuxi~me austin à main
En français o~ l'opérateur (-) n'a pas une tr~s haute fr~quence,
parce que le français
est
moins enclin à
ce genre de composition,
le blocage des éléments de l'outil de
restriction de notion s'ef-
fectue par la droite mais
avec
le mime proc6dé
:
(46) L'op::;;nATION GTù\\ND-MAGHH.EB
d
c l.e n c hé e par le Polisario
é
et
les r~actions irritées des Maiocains
( . . . )
~uront ~er-
vi de détonnateurs à
cette crise . . .
(;.\\FEISI ..Jl/12!
19th)
(i:7) President Ilo s n.i ~'lubarak s ay s he is relative ly encour8-
ged
by
c o n t Lnu i ng . f"lury of HIGH-LEVEL
Cm~TACT::o between
Egypt and-Israe 1.
') 1 1 0 " i l ' ) rv - )
-
,
/
j /
:. l~;)

-
269 -
GRAND MAGHREB sans
(-)
serait une qualification réelle de
l'espa-
ce géographique;
l'opérateur (-)
à
lui seul signifie que des deux
éléments bloqués,
l'énonciateur ne retient plus que
les substances
sémiques. GRAND-MAGHREB devient ainsi un instrument
linguistique,
un code
(dans
tous les sens du tenne)
pour nommer une opération
militaire,
ce qui est,
en soi,
le passage à une étape relationnel-
le autre.
Que penser du mode blocage de
l'opérateur (-)
?
Bien qu'il
soit incrusté
à
l'intérieur de
la structure qu'il rend compacte,
i l convient de bien voir qu'il joue le rôle de parenthèses invisi-
bles évoquées par H.
Adamczeswki dans
l'analyse du blocage des
prédicats par le nominalisateur -ING.
Dans les énoncés qui viennent
d'~tre analysés, l'opérateur (-) restreint le domaine d'applica-
tion del'adj"ectif à
la forme nominale la plus proche.
Le blocage de l'incidence est-encore plus évident dans les
situations où l'adjectif a un effet de quantification:
(48)
"Wha t ' s
the Long Barn",
asked Lucy
"It's quite old",
he said.
GRAND-FATHER called i t a
Leak Barn and s ay s
i t ' s
Elizabethan,
but tha t ' s
just a
swank ":
(PADDI -
44)
(49) Mon
GRAND-PERE assure que cette bâtisse en
pierres
est du style élisabéthain,
mais i l bluffe.
(PADDI -
61)
(50)
Aux
GRANDS HOMMES,
la patrie reconnaissante.
(Panthéon)
..
(51)
••• Ahmed Sékou Touré,
PETIT-FILS de ce meme almami
Samory Touré ..•
(Bembeya Jazz,
Regard sur le passé)
(52)
••• Attendez une
PETITJ;~ SI~CONDE .•••

-
270 -
Commençons par les deux premiers ~nonc~s (48 et 49). En synchronie,
l'anglais a
dépassé
le niveau de
composition du français:
alors
que la fusion de GRAND et sa cible est déjà consomm~e, le français
est encore à
la soudure des ~l~ments à
l'aide de
l'op~rateur (-).
Mais
l'op~ration fondamentale est la même dans les deux langues.
Une preuve du degr~ zéro de cohésion dans ce genre de struc-
tures est
la possibilité d'intensifier le quantifieur GRAND avant
même que
la quantifi~ation ne soit op~rée su~' le nom cible :
*a VEI\\.Y GRANUF'ATHEH
.....de TRE:S GHANDS HOMMES
vs
*un TRES GRr\\ND-PERE
Cette opération n'est possible qu'en
(50);
le blocage de
la quan-
;,CQ.:-':- :
tification en (48 et 49)
est dû au fait que
les quantift'eurs GRAND
sont membres d'une relation qui appartient au pass~ de structuration,
urie relation qui ne rel~ve plus des compAtences de
l'~nonciateur
structurant. Dans
les ~nonc~s (50 à
52)
par contre,
la quantification
s'effectue
'hic et nunc',
et cela dans
la foulée discursive.
Nous
verrons que
ce genre de quantifieurs a
rapport avec l'emploi d'un
programme de sens alors que dans
les cas qui nous int~ressent, la
langue a
impos~ une relation (sous forme de structure bloqu~e) à
l'énonciateur structurant. Maintenant que nous avons une appr~cia-
tion plus
justa.
de
la coh~sion, on peut affirmer qu'en (49 et 48)
i l y
a bel et bien coh~sion entre les adjectifs et les noms,
coh~-
sion qui
est totalement absente en
(50,
51
et 52).
Mais i l fau-
dra attendre sans doute l'analyse métaopérationnelle de
la portée
des adjectifs pour mettre à nu le
caract~re erron~ des études qui
consid~rent comme allant de soi que l'adjectif ant~posé est en ço-
h~sion ferme avec son support nominal. Le probl~me de la relation

-
271
-
entre l'adjectif et sa cible nominale montre bien que
l'erreur
s'érige en loi à
force de répétition(l).
Le aécalage des niveaux de structuration ne bloque pas seu-
lement
les mécanismes d'incidences;
i l est aussi
cause du blocage
d'autres mécanismes syntaxiques plus perceptibles à
l'oeil nu,
l'accord en nombre,
par exemple.
I l faut
surtout y voir le dépas-
sement d'une étape proche de
la référence concrète à une étape
qui en est quelque peu éloignée
(53) T. Dale Stewart with cast of a 20,OOO-YEAR-OLD SKEL~­
TON
Most recently,
he has been accessing a mass of bones
from Egypt.
He figures
that
they are
20,000 YEAR~ OLD.
Asked what's the field of expertise Dr Stewart responded
firmly:
"Mankind".
(HETRI -
07/03/ 1985)
(54) The Vietnameese who invaded Cambodia in December 1978
( ••• ) are fighting their most successful dry-season offen-
sive of the SIX-YEAR WAR.
(HETRI -
07/03/ 1984)
(55)
A
7,OOO-YEAR SKULL found
last week in Florida
Archeologists in Florida have found two human
skulls they estimated to be 7,000 YEARS OLD,
containing
brains that were
largely intact.
(HETRI -
17/12/ 1984)
Le dénombrement,
i l est vrai,
implique une certaine conf~rmité au
concret. I l suppose que
les entités en question sont considérées
dans
leurs individualités respectives et cela se projette sur les
structures linguistiques. Ainsi dans
la seconde partie de
(53),
(1) Nous de'veloppons
"la po r t
e de
l'adjectif" au chapitre V
é

-
272
-
20,000 YEAR~ renvoie au nombre d'années;
le Dr Stewart donne des
informations aux journalistes sur l'âge du squelette.
La première
partie de
l'énoncé
(53) est le titre d'un encadré dans le Herald
-..
Tribune;le rédacteur de
la rubrique
"condense"
les paquets de
sèmes 20,000 + YEAR + OLD Rour en faire un apport sémique qui en-
richitsémantiquement le contenu de SKELETON.
(5~) reproduit le
m~me cas de figure~ais cet énoncé est moins intéressant parce
qu'il ne comporte pas la première étape relationnelle.
En (55) 7 ,OOO-YEAR~OLD s' est
é g a Leme n t
constitué en outi l
de complémentation sémique de SKULL et de réducteur de
la notion
du même nom.
La distance étant prise par rapport à
la datation'
réelle,
le nombre n'a plus de raison d'opérer. Mais dans
le déve-
loppement qui suit,
l'énonciateur semble dégager sa responsabili-
té quant à
l ' exacti tude de
la datation:
"two human skulls they lthe
archeologists]
estimated to BE 7,000 YEARS OLD". En d'autres ter-
mes,
i l revient sur la thématicité
exprimée dans
le titre de la
rubrique pour la remettre en question,
encore que cela soit impli-
cite. De
toute façon~ce refus de l'acquis de relation se projette
sur la structure
(seconde partie de
(55)
): 7,000 YEARS OLD est
rapporté à
son support nominal par la médiation de
l'opérateur
BE;
à cette étape relationnelle primaire,
la soudure,
c'est-à-dire,
la cohésion entre
l'outil de
limitation et sa cible reste toute
à
construire.
La conséquence structurale de
cette autonomie des
éléments est que
le nombre est
lui aussi
libre d'opérer.
Il est peut-~tre nécessaire de revenir sur la disposition
des deux parties des énoncés
(53) et (55), leur ordonnancement

1U'l'ft74?- -
- Fm" ••• _ _
-
27'3 -
dans
la rubrique du journal, métaopérationnellement,
la successi-
vité des structures soulignées dans
la chaîne linéaire.
Les struc-
tures
'compactes
sont les titres des rubriques; et les structures
lâches,
le développemen-e:~'de ces ti t r-e s , Le titre d'un article est,
dans
la plupart des cas,
conçu à partir du contenu de: l~article.
Dans les cas particuliers des énoncé
(53 et 55) les journalistes
reportent les informations reçues des archéologues et,
tablant
sur ces acquis structuraux,
ils re-structurent ces séquences selon
les canons du
langage
journa listï(ftre~:
Brefi
le blocage constaté à
l'intérieur des outils de réduc-
tion d'extension s'inscrit dans
la successivité des étapes relation-
nelles: une étape première où les éléments servent à
informer,
puis
une seconde
dans, laque-lle
ils contribuent,
par leur programmes
sémique~à la construction des opérateurs de réduction d'extension
des notions-cibles ou, dans une autre perspective,
à
enrichir,
à
complémenter le contenu sémique du nom-cible.
Les échelles de cohésion des connexion sémiques correspon-
.:.
,-'\\'
dent,
bien entendu,
aux étapes relationnelles
RH ~ TH dans le
domaine prédicationne1. I l n'est peut-être pas inutile de rappeler
ce que sont les duux états de la relation prédicative :
"Une relation prédicative rhématique est une rela-
tion libre où les mécanismes intrapropositionnels
fonctionnent normalement. Une relation prédicative
thématique est une relation
bloquée où to~t rhème
propositionnel est exclu,,(l).
H. ADAMCZE\\vSKI
:
BE+ING dans la grammaire de l'anglais contemporain,
Champion,
Paris,
1978, pp. 31-32

suffisamment Illontré Clue,
tout
en participant él
1" construction
du nom,
le ;'lN
se dédoublait
pour devenir a.u s s i, un opérateur pax
lequel
le nom s'articuLe sur
la chaine
linéaire et
c'est en
cela qu'il est interface.
Ce qui
trouble dans
les
conclusions de ~.
Uonvini,
c'est
cette valeur référentielle des
anaphoriques.
L~ aussi,
nos
deux positions divergent
sur
la perception des mécanismes 6non-
ciatifs.
I l nous
semble difficile de reconn~itre aux formes ana-
phoriques un quelconque pouvoir réf~rentiel. Dans une perspec-
tive de grammaire m6taopérationnelle,
l'anaphore est un rappel
méta-linguistique de
l'introduction d'un programme de
sens
dans
l'antériorité du contexte et
la référence est,
en quelque
sorte,
un rapport
entre
le
linguistique et
l'extra-linguistique.
Url seul énoncé
suffira pour montFer que
l'anaphorique a
rapport,
non pas avec
l'extra-linguistique,
mais
avec
le plan
(m~ta)-lin-
guistique.
(J5) When a lizard loses its TAIL
IT g r-o ws
back
(35') Quand un lézard perd sa
QUEUE
ELLE /
ÇA
repousse
I l semble tout
~ fait évident que si TAIL renvoie à cette par-
tie du
lézard q u ' est
la queue,
TT ne
s 'y rapporte aucunement ~.
L'~nonc~ dit bien que le lézard perd sa queue et la queue
tombée ne peut plus
~tre celle qui repousse. Si la référence
est bien le renvoi
à un objet
l'anaphorique n'a pas véritable-
me n t
cIe valeur n·;férentielle.
Dans
la version française,
on
D'après ,J-C.
ALBU S
Analyse d'pnoncês
en anglais
cOTlltemporain,
Université d'Abidjan,
cours cIe
Licence,
Département d'anglais,
1981
(non publié).

-
27')
-
La formal~sation de la relation pr~dicative (en
(56) n'est
pas sans rappeler celle de la forme
composée de
l'~nonc~ (42). Cet-
te remarquable convergence des faits métaopérationnels
rélevant de
domaines
relativement
diff~rents nous conforte dans notre
position.
C'est d'une part,
la preuve que
l'on peut atteindre un
niveau très poussé dans
la généralisati~n pour peu que l'on abor-
de
les phénomènes
linguistique~par le biais de la Relation;
c'est aussi
la preuve que
le système des phases
(1 ~ II) reste
un outil th~orique dont on peut tirer le plus grand profit. Tou-
jours en prenant
la relation comme INVARIANT dans
les divers phé-
nomènes
linguistiques,
on peut relever d'autres convergences mé-
taop érationnelles en-tre les outils formels
eux-mêmes •
........
• La convergence des datations méta-linguistiques:
-ED et
(-)
C. Delmas a montré que
l'opérateur -ED,
plus qu'une marque
d'expression du temps,
pouvait être considéré comme un opérateur
de datation méta-linguistique. Dans
le domaine de la prédication,
-ED par rapport à -S indique le dépassement d'une première étape
structurale en conformité,
elle,
à
l'extra-linguistique(l). Ainsi
le "participe passé" reste un avatar de
la grammaire traditionnel-
le s ' i l n'est pas rapporté aux métaopérations.
Si ce participe pas-
sé fonctionne parfois comme un adjectif,
c'est que la forme ver-
bale à
laquelle -ED vient se suffixer n'est plus seulement
l'ex-
pression d'une action ou d'un événement du monde réel,
mais un
outil de complémentation sémique destiné à
:former
une notion
complexe avec
la participation d'un programme sémique nominal •••
Nous y reviendrons au
chapitre suivant;
l'important
était
de
(1) C. Delmas,
1985; voir en particulier pp. 328-350

- 176 -
l'It is the
characteristic of
t pronoun--of-laziness 1
that they
can be
substituated for expressions that
are identical but not necessarilv co-referential
w i th
the i r a n tee e den t s Il ( 1 ) .
-
S ' i l rappelle
ce ~ue tout
le monde sait -
que
le pronon n'est
pas
toujours en co-r(~f(~rence avec
le nom. -
J .
Lyons ne nous dit
pas quels
rapports
les deux entretiennent.
I l donne
l'impression
d'introduire
l'instance ~nonciateur mais on se rend tout de suite
compte que pour ce
linguiste
l'~nonciateur est
le
locuteur,
la
véritable personne
capable de pàresse.
On sait maintenant qu'il
n'en est rien.
L'emploi des formes
anaphoriques n'est pas non plus un
Jnoyen d'économie dans
la structuration des
~nonc~s. Il est des
situations 00,
par une_sorte de d6terminisme m~taop~rationnel,
l ' ~nonciàteur ne peut qu' o pé r-e r-: "une substi tution",
ce qui prou-
ve bien qu e
le p h é rio mè n e n'est
pas q u o facu l t a t i f et qu' i l n'est
pas
li? à
l'~tat physique des
locuteurs.:
(J6)
J ' a i
rencontrp des
MUS;
ILS m'ont parl~ de toi.
Dictionnaire des
sciences
du
langage,
p.
J61)
( )6 ') ??
J'ai r'e nc o n t r-é
des :\\j'-ns;
DES ;\\HIS m'ont parlé
de
toi.
La
forme anaphorique fait
partie de
ces indices qui
prouvent
que
l'p.rlonciateur comptabiliso ses mises en relation dans
le
cliscours.
En (35 et
J6) TT et T f,S reprennent respectivement les
signifiants TAIL et AMIS,
ces
signifiants qui
sont
le
traitement
(1) ~T.
LYONS:
Semantics,
II,
Cambridge,
1977, p. {i7!'

- 277 -
L'évocation de
la structure passive nous donne
l'occasion
de
la confronter à
la construction dite
"active". I l est acquis
même en grammaire transformationnelle -
que
l'énoncé au passif
est p lus dé ca lé vers
le p i;~n mé ta-lingui stique que 1<'énoncé à
l'actif. Dans
le cadre de notre travail,
nous nous servirons dB
la cohésion comme test discriminatoire. Dans
la structure canoni-
S
o
que de départ
( ,-
v
N2 ), en fait l'étape relationnelle primai-
Nl
re,
la cohésion est minimale
:
e.g.
Moslems
control
the
branch
Le seul signe de cohésion est que
les éléments appartiennent tous
à un même domaine prédicationnel
:
H - - - - H
êif'~~';'·
H
~TROL
CMOSLEMS
3[ihe~ H
N l
~-_--...:..
~~ N2
Avec la structure passive -
l ' étape r-e La t Lo nnu Lt e
suivante
-
la cohésion se raffermit entre certains éléments au détriment
d'autres. C'est alors que l'agent peut se voir "expulser" du domai-
ne prédicationnel
:
e.g.
BRAN CH
r
CONTROLLED
BY
MOSLEMS
H CBRANCHRco";R~~
H
by MOSLEMS
N2
Nl
Le démarcateur structural ~ BY -
essaie do relie~avec plus ou
moins de succès,
le sujet-agent au domaine prédicationnel.
La GLA

- 278 -
souligne d'ailleurs
le caractère parfois redondant de
l'agent dans
la structure passive,
à
tel point que certaines
langues comme le
peulh ne l'expriment pas du tout(~)
"La raison d'être du passif c'est
la relation vt -
N2
et rien d'autre.
L'agent peut être donné mais i l sera
de surcroit,,(2).
On retiendra en gros que
le passif est employé
souvent à des
finsde stratégie discursive:
prendre l'objet syntaxique comme ob-
jet de l'énonciation pour focaliser l'attention de l'allocutaire
sur lui. En termes structuraux,
i l s'agit essentiellement de ren-
verser la valence transitive du verbe pour orienter la relation
prédicative vers l'objet passif devenu,
dans
la seconde étape re-
lationnelle,
le sujet grammatical.
Avec nos structures) la relation de réduction d'extension
est orientée vers l'élément qui aurait fait
office dlobjet affec-
té dans
la structure sémantico-syntaxique. Mais dans nos formes
composées l'élément objet est re'-introduit en tant que paquet
de
(1)
C'est peut-être aussi
le cas en senoufo:
(a)
tÇ.n(

16

dâà
go r. .w,i
kp6
monday/
inl (interro)/theyl
(pred)1
hen.HN2
/
kill
l i s i t on a monday that they will kill the hen ? 1
.Should they immolate the cock on Monday ?
(b)
s{b{r! .wi

16
kp6
saturday.MN?/in /(interro)/it+(pred)1
kill
lis it on the saturday it will be killed ? 1
• Should IT BE KILLED on saturday ?
On aura certainement remarqué que /bel -
'they'
-
ne figure plus
en (b);
seul l'objet y est repris par le MN 1 de gb'.wi -
'la poule'
et lors de
la reprise,
comme pour marquer la cohésion~e l'objet
avec le domaine prédicationnel,le pronom objet fait
corps avec le
relateur prédicationnel:
/waà/ = IwI + daà/
(2) Ho
ADAMCZEWSKI
: GLA,
1982,
p.
187

. '. ,_ -.~.'., l
-
279 -
sèmes
pour des raisons métaopérationnelles:
STATE (57), MOSLEM
et SOVIET (58)
contribuent,
à
leur manière,
à
l'élaboration de
l'outil de restriction de notions nominales,
notions qu'ils com-
plémentent sémiquement par la même occasion.
Ce ne sont donc plus
des agents,
en tout cas au sens où ce terme est habituellement
pris; de STATE, MOSLEM, SOVIET l'énonciateur ne retient plus que
les programmes sémantiques.
L'effacement du relat~ur prépositionnel est, quant à
lui,
un indice du dépassement de
la structure pàssive,
par voie de no-
minalisation.
La nominalisation,
comme s ' i l était besoin de rap-
peler,
est une étape décalée par rapport au niveau de structuration
de
la phrase de départ et par rapport aux struGtures compactes des
énoncés
(57 à 58) le passif relève d'une étape structurale plus
proche du plan extra-linguistique. On le sent d'ailleurs dans
_
l'une ou l'autre des structures:
(57' )
The
branch (that is)
controlled by Moslems
(57")
La faction contrôlée par les musulmans
structuré de
la sorte,
l'énoncé
servirait à
informer quelqu'un sur
"qui
contrôle"
la faction en question.
Avec la construction thé-
matique MOSLEM-CONTROLLED Bfu\\NCH nous aurons pour traduction
(57"') La faction d'obédience musulmane
Et dans ce cas,
i l s'agit de focaliser l'attention sur la faction,
d'en donner,
en quelque sorte, une définition par compréhension.
I l en est de même de
la seconde partie de l'énoncé
• Missiles
(that are)
made by Soviets
• Missiles fabriquées PAR les Soviétiques
ou
• Missiles
fabriquées
EN
Union Soviétique

-
280 -
Que l'on retienne l'une ou
l'autre des traductions,
les préposi-
tions introduisent une entité
caractérisable par sa conformité au
monde concret:
un
agent dans un cas,
un lieu
dans
l'autre.
La
traduction de la structure compacte,
en revanche,
fait ressortir
le statut thématique de la relation :
SOVIET-MADE
MISSILES
= Missiles DE fabrication soviéti-
que
Le français reconduit un relateur prépositionnel mais
l'on doit
reconnaître qu'il est plus formel que PAR,
EN.
Dans un autre micro-
système

vs,
de)
DE se spécialise dans
le marquage des relations
de Phase II. Bref,
la traduction de la structure compacte montre
que l'agentivité,
la localisation et autres ne sont plus de mise.
"
On n'informe plus sur la provenance des mLs s Ll.es j
DE FABRICATION
SOVIETIQUE sert,
comme dans
les cas ,précédents,
à définir MISSILES.
La composition a de
nombreuses affinités avec le domaine
prédicationnel mais ne se confond pas avec lui.
Les formes compo-
,
sées analysées ne sont pas
~dérivées" (au sens transformationnalis-
te)
de structures passives.
Les traductions ~rançaises montrent
d'ailleurs qu'on s'en écarte radicalement.
C'était pour mieu~ fai-
re ressortir un parallélisme structural que nous avons dû recréer,
i l est vrai,
des
constructions passiv~s comme structures de base
aux composés des énoncés ci-dessus.
Les connexions sémiques ne
sont pas forcément issues de constructions à
effet de passif.
L'ho-
mologie se situe au niveau de la structuration(l).
------------------
(1) On comparera ces énoncés cités par GLA, ( 1982 ) :
(a)
La circulation a ét4 détournée PAR LA POLICE
(b) La circulation a été détournée PAR LA DEPARTEMENTALE

- 281
-
(59) The
PARIS-BASED
ORGANIZATION
made up of NATO members
and Japan,
controls the flow of strategie products to Commu-
n i.s c.. Nations.
(HETRI -
06/03/ 1985)
(60) The Israelis wanted to know i f there was a bomb in the
car. Mr Maatook said there was only one rocket. Ovi checked
and found a
ROCKET-PROPULSED
GRENADE and two mines.
(HETRI -
06/03/ 1985)
Tout
comme dans les structures passives où le sujet-agent
est introduit par un relateur prépo si tionne l
-
BY -,
les conn'exions·
sémiques en (59 et 60)
auraient pu avoir pour corollaires des struc~
tures moins compactes où PARIS et ROCKET seraient introduits par
des relateurs de m~me nature :
(59')
the organization
based
IN
PARIS
(60')
the grenade propulsed
WITH
a
ROCKET
En structuration,
la préposition amène un ajout sémique;
la théma-
tisation n'est pas totale;
la cohésion reste à parfaire.
(59') et
(60')
se situent à des étapes structurales
primaires où les prépo-
si tions
ont encore certaines
.1ati tudes sémantiques qui permet tent
de
voir en PAInS et en ROCKET la localisation e t l ' instrumenta L,
notions,
en réalité,
tributaires
de l'extra-linguistiques. Or,
ce qui a motivé,
cette fois enoore,
l'énonciation des formes com-
posées en (59 et
(60),
ce n'est certainement pas l'indication de
la localisation ni quelque information sur les mécanismes mis en
oeuvre pour lancer les grenades. Des paquets sémiques PARIS, ROC-
KET,
l'énonciateur ne retient que les contenus sémiques en vue
d'autres opérations de détermination. A l'instar des opérateurs

Ifn
-
282 -
du nom
(type déterminants ••• ) PARIS-BASED et ROCKET-PROPULSED
sont
les principaux protagonistes d'une relation de réduction d'ex-
tension orientée vers des cibles nominales.
L'opérateur (-)
est
le souvenir structural de
la préposition et lorsque BASED IN PARIS
et PROPULSED WITH ROCKET sont passés du statut d'ajouts sémiques
à celui d'opérateurs de
limitation de notion,
de
la préposition
i l ne reste plus qu'une trace.
Le -ED est lui aussi la mémoire
structura le de
la co nv'e r-s Lo n
du programme sémique verba l en opé-
~ateur de limitation. Tous deux indiquent de la m~me mani~re l'an-
tériorité de
la structuration de
l'instrument de
limitation par
~apport à l'application de celui-ci sur la cible nominale:
(1)
l~re étape relationnelle: .
( 1) 2~me étape relationnelle:
~ ~ B~ORGANIZA~
t
1

28J
ii)
déca lage des étapes
re la t"ionriell'es'
diachronie/synchronie
L'on teste habituellement
la validité des outils dont on se
sert
dans la
rencontre avec
les faits,
c'est-à-dire,
dans l'ana-
lyse des phénomènes
linguistiques. Une autre manière de sonder la
pertinence de ces mêmes outils théoriques consiste à
les rapporter
à d'autres concepts de description solidement installés et finale-
ment acceptés de tous.
Le système de Phases
(r ~ II) mis en avant
par le Professeur Henri Adamczewski et que nous reprenons ~ travers
la notion de successivité des étapes relationnel~?s peut être rap-
proché des concepts de diachronie /synchronie propres à
la linguis-
tique historique.
Lorsqu'on
évoque la diachronie, c'est presque toujours pour
,
faire référence· aux divers changements intervenus dans une
langue
au cour-s de son évo LutLon , en un mot, le passé de la langue consi-
dérée.
Le domaine
lexical est celui o~ l'évolution d'une langue
se constate de
la façon la plus flagrante et
l'on sait que
la
composition est un moyen
d'enrichissement du fonds
le~ical. Cela
explique que,
tout en classifiant
les types de compositions
(10-
cutions,
lexies complexes ou composées,
synthèmes,
synapsies ••• ),
bien de~linguistes aient eu recours à
la notion d'évolution des
langues.
Celle-ci se manisfeste sous plusieurs formes:
fusion de
certains éléments,
troncation de certaines unités,
glissements
sémantiques,
changement de catégorie •••
Le passé d'une
langu~ (diachronie) s'oppose à son présent
(synchronie),
théoriquement.
Parce qu'il est difficile de tracer
une frontière
sûre entre
les deux moments. I l convient donc de
ne

_
2oL~ -
jamais perdre de vue qu'il s'agit
là d'une distinction tr~s arti-
ficielle. B. Pottier
qui remettait
en question la notion d'évo-
lution des
langues,
l'évolution liée au
"passé'':; faisait
remarquer
qu,n u n e langue se met à
changer dès que l'on se met à parler,,(l).
Et sa remarque n'a rien de caricatural:
la diachronie est dans
la synchronie;
le passé d'un système
linguistique se trouve dans
son présent,
A propos des études diachroniques, A. Crépin écrit:
"loin de ne s'intéresser qu'aux cadavres froids
et rigides,
la
linguistique historique doit travailler sur ce qui est en train
de se faire" (2) •
Tout cela ne signifie pas que,
pour des raisons de recher-
ches
(e.g. documentation ••• ) i l soit inutile de remonter en dia-
chronie pour expliquer en synchronie
le fonctionnement de quelque
opérateur.
Ce serait nier l'existence de
la fameuse dichotomie
diachronie /
synchronie.
Nous souscrivons entièrement aux postulats énoncés ci-des-
sus.
Et
l'on ne peut en saisir la portée que si
l'on admet que
.Le
caractère
systématique de
la 2angue prend forme
dans ses ac-
tualisations les plus spontanées:
les productions verbales,
autre-
ment dit,
les énoncés. De
toute façon,.on ne voit pas comment
la
langue pouvait marri.f'e s t e r- sa systéma tici té autrement.
Si
l'on ad-
met donc que
l'énoncé est secrété par les moyens propres à
la
langue,
on doit s'attendre à
retrouver dans
cet énoncé
cette no-
tion d'pvolution inhérente à
tout système linguistique. Mais i l
faudra encore que
la métalangue du modèle dispose de moyens de dé-
tection pour retrouver cette propriété dans
les énoncés; nous cro-
yons pouvoir dire que
le micro-système des phases de structuration
( 1)
TI.
POTTIEJ{ :
Séminaire de Di;;A.
"De
la langue au di s cours"
1982 -198J
(~-') A. CIŒPIN
Problèmes de grammaire historigue,
ru~, Jd~~~,
1978,
p.
18

-
28-')
-
-
le vecteur
RH ---:, TH -
remplit parfaitement ce rôle de détec-
tion. Soit l'énoncé
(61)
:
(61) The United States an~ its allies are working to break
a
logiam of applications for HIGH-TECHNOLOGY
to China.
( ••. ) The heavy increase in
HIGH-TECH
SALES to China
threatens to overwhelm the Coordination Commitee for Mul-
tilateral Exports Control.
(HETRI -
06/03/ 1985)
En l'espace de deux paragraphes on note un changement morphologi-
que de
TECHNOLOGY ~ TECH,
sous forme de troncation donc.
La
diachronie constate également cette tendance des formes à
se souder:
(62) ••• three separate operations to replace bis
heart;
( ••• ) a fantastic research for
ARTIFICIAL
HEART
that
ended withthe air-lift of an Experimental device to be
tested on a
calf,
and the opening of yet another chapter
in the national debate over how fast
to proceed in this
brave new world of medical technology.
G. Annas,
a professor of health law,
demonstrated that
"the whole
ARTIFICIAL-JJEART
THING is getting out of con-
trol.
(NWK -
18/03/ 1985)
Dans ces deux cas de figures peut-on parler vraiment d'''évolution
de
la langue" ?
Ce
sont certainement des indices d'évolution du
système
linguistique anglais mais la notion d'évolution (liée à
la diachronie)
peut prêter à
confusion. Elle peut donner l'impres-
sion que l'évolution du système
linguistique n'est observable que
sur des années,
voire des siècles;
c'est en cela que les mises
en garde de B.
Pottier et de A.
Crépin se r6vèlent encore plus. justes

-
286 -
De nombreux autres énoncés du type de
(61
et 62)
ont été
analysés;et i l n'est donc plus nécessaire de s'y attarder.
Le
passage de HIGH-TECHNOLOGY à HIGH-TECH et de ARTIFICIAL HEAHT à
ARTIFICIAL-HEART n'est pas temporellement quantifiable(1).
Dans
une grammaire où les diverses opérations sont perçues comme ordo~-
nées) ces deux changements morphologiques
(troncation et soudure)
doivent être interprétés comme des
cas de re-structuration. D'une
étape relationnelle à
une autre,
les besoins métaopérationnels
de
l'énonciateur peuvent changer et
i l est ainsi amené à
structu-
puis
à re-structurer certaines unités. En (61)
i l avait besoin
de HIGH-TECHNDLOGY
pour nommer la notion de
"haute technologie";
i l s'est ensuite rendu compte qu'il pouvait re-structurer cette
même forme pour en faire un outil de réduction d'extension de no-
tion et au.ssi un instrument de complémentation sémique _ de SALE •
.'
La séquence re-structurée en vue de
l'opération de
limita-
tion
et de complémentation
peut
avoir
une
expansion assez
importante.
L'énonciateur aura alors recours à d'autres moyens
de blocage de ses constituants,
mais i l lui faut absolument indi-
quer méta-linguistiquement que son outil de
limitation et de com-
plémentation est une re-structuration :
(63)
It is tempting to suppose that the inversions are
governed by some general pragmatic principals such as
the
"_,old information first,
new information last" dictum
of some Prague Schoo l
linguis\\:.
( ••• )
Examples in 13-14 ( ••• )
accomplish this by
predicate-first
order,
a
" n e w information first"
order
allowed by inversion.
(INVERS -
p.
589)
(1) G. Guillaume dit fort
justement que
le temps
"opératif"
(?) le
temps de structuration)
porte la projection "en des dimensions pla-
nes et,homo 9ènes le temps historique" et l~ temps opératif est ins-
tantane. Vo Lr- Leçons de Linguisc:Lque"
1';) ) 0 - ) ( ,
p.1 jD
-

-
237 -
Les guillemets effectuent ainsi la
A
meme fonction d'étau
que
l'opérateur
(-). Nous y reviendrons dans quelques instants.
La notion d'évolution du système
linguistique basée sur
la notion de "passé concret"
expliquerait difficilement
les cas
de compositions
effectuées-sur-le-champ:
(64)
Chaque mardi,
je me PETIT-DEJEUNE
avec
le President
de
la République •••
(de Lionel Jospin)
(65) ...Moi aussi, j'ai
mon "touche pas à mon pote" mais
je préfère le cacher derrière le pan de ma veste parce que
pour moi,
ce qui compte,
c'est le sentiment anti-raciste
qui vient droit du coeur •••
(Michel Hidalgo sur 7/7,
le 24/03/ 1985)
Le verbe "se petit-déjeûner" et
le groupe nominal
"touche pas à
mon pote"(l)
n'ayant certainement
jamais été énoncés auparavant,
on ne saurait dire qu'ils relèvent du français ancien. I l s'agit
manifestement de
cas de re-structurations d'où leur introduction
dans
la chaine lineaire avec des indices de Phase II,
m~me s'il
ne s'agit que de
leur première mention.
La notion de re-structuration rend aussi
c ornp t e de ce pro-
cédé discursif qu'est
la mention et que
la graphie rend par les
guillemets. Dans l'énoncé de surface,
ils isolent une séquence
du reste de l'énoncé;
selon la métalangue des
theories d'analyse
du discours
(e.g.
la pragmatique),
i l s'agit dans certains cas,
pour l'énonciateur,
de reprendre une séquence de discours tout
(1)
Les énoncés
(64 et 65) ne sont pas des énoncés écrits; c'est
en les transcrivant que nous avons
choisi de marquer l'opération
de re-structuration par (-)
ou
("
").

..:...
.:.:.:."," .:,», "", "-'-,:.:
"
~ .• :': ':-
. " "
:""",:: .,', .
- 238 -
en soulignant qu'il n'en est pas
lui-même
l'auteur. En termes
plus grammaticaux,les guillemets décalent une structure comme
étant
le fait d'une mise en relation antérieure. Et même quand
on passe du style dit
"direct" au style "indirect",
ce n'est pas
par hasard que
les propositions sont introduites dans
la matrice
de
la proposition principale avec des opérateurs comme THAT (QUE)
dont on reconnaît
les vertus
thématisantes.
L'évolution,
explique-t-on encore,
c'est aussi
les glisse-
ments
sémantiques: une expression perd son sens initial au fil
du temps. Nous avons déjà vu que ces glissements de sens étaient
tout à
fait
justifiables théoriquement dans une grammaire des éta-
pes relationnelles. Une structure comme
HOLIDAYS s'est complète-
- ,
ment détournée de
la désignation de certains
jo~rs spécifiqu~s
(jours saints,
dimanches,
fériés,.fêtes
réligieuses ••• );
cette
désignation correspondait alors à
la Phase l
de
la mise en rela-
tion
ROLY
t:!i
DAYS ;
le dépassement de la Phase l
par l'acces-'
sion à
la Phase II
s'est fort
naturellement traduit par l'alté-
ration morphologique
(HDLIDAY~ et par le glissement sémantique
(les congés,
en général).
Le dépassement de
la première étape structurale,
celle qui
est en conformité à
la référence immédiate,
nous
l'avons dit,
a
des incidences sur certains mécanismes syntaxiques,
l'accord en
particulier. Et
l'on note parfois quelques hésitations des
lexi-
cologues quant à
la variabilité de certaines structures complexes.
Mais dans
la pratique naturelle des
langues,
on est bien obligé
de se situer dans
l'une ou l'autre des
phases de structuration.
A ce propos, le
langage
journalistique semble être l'un des domaines

-
289 -
où les potentialités structurales sont
les plus exploitées;
la
langue,
à
son tour,
rev~le tout aussi explicitement la
r~alité
de
la métalangue naturelle
(66) The
UNITED
STATES
~~S
expressed readiness to re-
engage peace process in the Mideast
( ••• )
(NWK
Appliquer l'accord en nombre
(the United States HAVE ••• ) serait
-
.
considérer les Etats-Unis comme une pluralit~
d'~tats distincts.
Or pour le
journaliste de Newsweek,
cette connexion sémique ne
renvoie plus à
un certain nombre d'états
QUI
SONT
unis.
Le
dénombrement n'est plus de mise;
le
journaliste fait
r~férence
à
l'institution politique,
la Fédération.
En français,l'accord op~re sans doute pour des raisons de
bonne consonnance:
*les
Etats-Unis
a ••• "
Mais un indice méta-
linguistique en vaut un autre:
si
la neutralisation du nombre si-
gnifie le passage en Phase II
en anglais,
l'opérateur (-) de
la
construction française traduit tout à
fait bien la thématicité
de
la relation.
Cette convergence fonctionnelle de
la syntaxe et
de ce qui aurait pu être considéré comme un vulgaire signe graphi-
que
(-),
nous servira de transition pour passer à un autre cas
non moins intéressant de contrastivité •
• Une similitude métaopérationnelle remarguable:
l'opérateur (-)
en français,
(~) en senoufo et DO en anglais
Au fur et à mesure que nous avançons dans notre analyse,
i l
se c~~~irme _qu'approcher
les phénom~nes linguistiques par le
biais de
la relation n'est pas sans int~rêt. Au contraire, aborder

....~ .;.-'
'.
290 -
la langue par son côté
le plus abstrait permet effectivement d'al-
1er par delà les différences superficielles entre systèmes linguis-
tiques.
En anglais,
ce qu'il y a de commun à
tous
les énoncés com-
portant DO,
c'est le caractère pré-construit d'une relation pré-
dicative. Ainsi,
les mé~anismes métaopérationnels à la base de
l'énoncé emphatique
Peter DID open the gate
se résume en une forme de confirmation de
la relation prédicative
e
"peter
open the gate";
cette r-e.l a t i.o n- pré-existe à
son énon-
ciation.
L'énoncé à
la forme négative est bâti sur le même prin-
cipe:
pour avoir l'occasion de nier une relation,
i l faut d'abord
prendre le temps de la construire(l~ à moins de la supposer déjà
construite:
(68) Peter
DID
not open the gate

L'énvncé interrogatif a
le même statut méta-linguistique lorsqu'
on se réfère à
cette même chronologie des événements
linguistiques:
Did
he open the gate ?
La question a rapport,
peut-être,
avec l'événement extra-linguis-
tique
(l'ouverture
du portail s'est-elle effectuée)
mais
la ques~
tion a aussi et surtout
rapport à
l'événement
linguistique qu'est
G
la relation "He
open the gate". D'ailleurs quelle que soit
la nature de l'événement(2)
i l est présupposé par rapport à
la
formulation de
la question. Il. Adamczewski a da relier toutes ces
(1) B. Pottier montre admirablement la successivité observée dans
la construction d'une relation (e.g.
forme affirmative)
puis sa
réfutation (e.g.
forme négative). Pour dessiner,
disait-il,
le
symbo le
~
"défense de fumer",
on commence p;r ~ssiner la cigarette - l'événement qui consiste
à
fumer;
ensuite,
on barre le dessin de
la cigarette d'une croix
pour proscrire
le fait de fumer.
(2.) .cf.
ch~p~tre l où l'on a vu que lèS événements linguistiques
comme les evenements extra-linguistiques sont des interfaces.

-
21)1
caractéristiques des énoncés avec DO pour déterminer la valeur
centrale de cet opérateur.
Mais c'est seulement par le biais de
l'interrogation que
nous ferons
le rapprochement entre
l'anglais et
les deux autres
langues
(français et senoufo).
Le français ne dispose pas d'un
opérateur com~arable à DO,
en ce sens quil n'a pas détaché un de
ses verbes pour l'affecter aux opérations méta-linguistiques.
Le
français doit donc avoir recours à
des procédés aussi divers que
la courbe
intonative
(que
l'anglais et
le senoufo utilisent d'ail-
leurs)
ou se tourner vers une tournure périphrastique
(70)
EST-CE QUE
Pierre a
ouvert
le portail?
Dans
la tournure périphrastique on retrouve certains indices ré-
vélateurs du statut de
la relation prédicative;
ils ont été suf-
fisamment décrits:
on y
reconnaît
••• C'EST QUE••• ,
l'anaphorique
'c' et
'QUE'
qui se .mob Ll.Ls e n t
pour' e ss ay e r- de réaliser
dans
l'énoncé interrogatif ce que no fait dans tout le domaine prédica-
tionnel. j'iais
jusqu'ici,
a u c u n e étude n'a tenu compte de
la présen-
ce de
l'opérateur (-). I l est tentant d'eri ju~tifier ~aprésence
par l'inversion des constituants dans
"C'EST QUE" ~"EST-CE QUE-.
Mais i l semblerait que
l'opérateur (-)
et
l'inversion s'accordent
pour marquer,
à
leur manière,
le caractère pré-construit de la
relation prédicative,
c'est-à-dire en surface,
la structure sub-
séquente
EST-CE QUE
Pierre
ouvert
le portail
'---------
1

-
292
-
En l'absence de
la tournure périphrastique
(EST-CE QUE),
c'est bien entendu l'opérateur (-)
qui se charge personnellement
de dater la survenance antérieure de la relation prédicative:
(1)
~
~vert p~
__r_r_e
le
l(II)
L'interrogation,
nous venons de le dire,
ne se réalise pas
seulement avec l'inversion (cf. moyen prosodiques);
l'inversion
n'est pas non plus une preuve du statut interrogatif d'un énoncé:
(71)
Ces étoffes sont belles,
aussi SONT-ELLES
chères.
(Dictionnaire Robert,
entrée lexicale AUSSI)
Les deux parties de l'énoncé s'articulent selon une certaine logi-
que argumentative.
La seconde partie où interviennent l'inversion
et.l'opérateur (-)
se présentent
comme une conséquence
(la cher-
té)
de la première ~artie (la beauté des tissus, voire leur rareté).
L'on pourrait rapidement en conclure à un statut rhématique de
la
seconde partie de
(71).
I l s'agit,
en réalité,
d'une
"fausse" con-
séquence;
en effet,
elle se dessine déjà dans
la première partie
de l'énoncé. Après qu'on a.
été informé que les étoffes sont bel-
les,
en tout cas dans un contexte de vente,
on ne peut plus s'at-
tendre à
ce qu'elles ne coûtent pas cher. Au fond,
la première
partie de
l'énoncé sert de
justification à
la seconde qui est alors
forcément pré-construite. Un énoncp. bâti sur le sch?ma :

- 293 -
(72)
Ces étoffes sont belles,
aussi se vendent-elles bien
pourrait être rendu par un opérateur des relations thématiques
en anglais
:
(72') These clothes are nice and they ARS SELLING
well
Bref,
la seconde partie de
l'énoncé
(71) ayant un caractère de
re-structuration,
l'inversion et l'opérateur (-)
fonctionnent
en
tandem pour marquer cette métaopération.
Un dernier énoncé confirmera définitivement que l'inversion
et
(-) datent conjointement une relation prédicative dépassée
(7J) Sans doute
CONSIDERE-T-ON c~mme allant de soi que •••
où la périphrase à caractère
modal revient sur la relation pré-
dicative
"On
G considère.comme allant èe soi que ••• " pour
la moduler ou évaluer ses chances de réalisation.
Reste maintenant
le senoufo.
La similitude avec le frariçais
et
l'anglais se situe aussi dans
le domaine prédicationnel. Dans
"l'énoncé type" du senoufo un morphème prédicationnel assure le
l
lien entre
le Sujet grammatical et
le
Prédicat. Na i s
dans l"énoncé
interrogatif ou à
effet emphatique,
l'opérateur (&) prend la pla-
ce du morphème relateur.
Commençons par l'énoncé à
l'affirmatif:
kèri.gèlè
n
yéré
affair.MN2
/(pred)/
stop
/
the affairs have stopped/
Things
are
over
(75)
a
kér-'.gèlè
(&)
yéré
16
?
(conn.) /
affair.NN2 /(pred)
/stop/
(interro)
/have the affairs
stopped ?
1 = Are things over ?

, .', .r, J'<".:'.~,;,.:.',
L'énoncé emphatique est tiré du dialogue qui a
suivi
une consul-
tation divinatoire t
,
1
_
(76) -
le voyant
mi
çÉ . r i
la?a.la
S1.
l i
bë-lè
my!speech.MN2!limit.MN1!then!it!
here
!the limit of my speech is then here!
~Here is the end of my speech
-
l'informateur reprend sous forme d'énoncé emphatique:
a
keri.gèlè
si
(~)
yéré
(conn.)!affairs.MN2!then!
(pred)! stop
There we are
That's i t
!
français:
Voilà
C'est tout
(1 )
On constate également
l'absence du lien prédicationnel
(c'est-à-
eire la présence de
l'opérateur (~)) dans les cas dits de "topi-
Galisation" de
l'objet ou du circonstant
:
(77)
korigo_
ma
sièlè
(~)
kâri
Korhogo!
to
Sielle!(pred)! go
I t ' s to
Korhogo that Sielle has
left for
(7 8)
-
. ,
suro
.wl
p~
(~)
caa
food.MN1/dog.MN2/
(pred)!
look for
. It's sorne food that the dog is looking for
Si
l'opérateur (~) marque un dépassement de la contruction
d'une relation comme on l ' a vu jusqu'ici,
on comprendra aisément
qu'il intervienne en (77 et 78). Dans les deux énoncés l'élément
(1) Fin de
la séance divinatoire
(+ explications), 10!02/ 1985

- 295 -
nouvellement introduit -
l'élément rhématique -
est Korhogo
(77)
et /sü.r~/ -'nourriture' en (78). En (77) on savait que Siellé
était
allé
quelque part et on précise que c'est à Korhogo et
non à Abidjan,
par exemple. De même en (78) on a déJà,donnée, la
relation "le chien G chercher"; mais ce que l'on ne sai t'pas, c'est
ce
qu'il cherche. Pour tout résumer,
disons que lorsque le
circonstant
(Korhogo)
et l'objet /sü.r~/ -'nourriture' en (78)
étaient structurés sur le domaine prédicationnel,
la relation en-
tre les sujets et
leurs prédicats était déjà construite.
Ces re-
lations prédicatives sont donc des cas de re-structuration.
Au delà des .similitudes relevées dans
le syst~mede data-
. ,
tion,
i l Y a surtout à
retenir que le signe graphique
(-)
et le
symbole
(&) qui passent souvent inaperçus, s'affirment clairement à
présent comme de véritables métaopérateurs dont on ne peut plus
ne pas tenir c08pte. En effet,
en s'imposant comme élément~ de
la métalangue naturelle,
à
la fois dans
le domaine nominal et dane
le domaine prédicationnel,
ils tendent à
étendre leur domaine
d'application
au syst~me linguistique tout entier.

- 296 -
D)
LA CONNEXION SEMIQUE A CONSTITUANT VERBAL
De nombreux linguistes pensent comme E. Benveniste,
que
"chaque type de composé est à étudier comme
la transformation
d'un énoncé de syntaxe libre,,(l).
"Enoncé" est alors à prendre
au sens de phrase,
c'est-à-dire,
une structure comportant un su-
jet,
un verbe et éventuellement un complément.
A en croire donc E.
Benveniste,
cette hypothèse est géné-
ralisable à là construction des
composés nominaux et aux composés
comportant un élément verbal.
En ce qui
concerne par exemple le
premier .type de composés que nous avons analysé
longuement déjà,
E. Benveniste pose que
(79)
OISEAU -
MOUCHE
est issu de
la phrase de base
"l'oiseau
QUI
EST
mouche"
Cela confère à
son analyse une légère connotation transformation-
niste mais E. Benveniste ne s'arrête pas là. ETRE ne doit pas être
considéré ici comme un opérateur ad hoc introduit adroitement pour
orienter la dérivation de
la phrase vers une sorte d'épithétisa-
tion.
ETRE est
"une relation d'assimilation sémantique entre deux
notions sur la base d'un trait commun,,(2).
Ce trait
commun entre
OISEAU et MOUCHE est le sème de
"petitesse". L'opérateur a donc
pour fonction d'indiquer "ùne relation de similitude".
Nous interprétons cette relation d'assimilation comme un cas de
compatibilité,
compatibilité basée sur le critère de petitesse,
comme le dit E.
Benveniste.
(1) E. BENVENISTE:
"Fondments syntaxiques de la composition nomi-
nale" dans Problèmes de
linguistique générale,
2, Gallimard,
Paris,
1974, pp. 145-146
(2)
Ibid.,
P. 147

-
297 -
E. Benveniste pOse que
EST
signifie
l'identification et
n'en dit pas plus.
Le
EST
serait-il équivalent du signe
(-) dans
sa structure d'arrivée ou en serait-il le substitut et dans ce ca?
que signifierait cette substitution de
EST
par (-) ?
Lë rôle
du
(-)
ne semble pas être apprécié à
sa juste valeur. E. Benveniste
était,
sans doute lui aussi,
loin dB se douter que
la relation
en linguistique est un événemement et en tant qu'événement,
elle
est datable.
Si
EST est
l'affirmation d'une identification de
similitude,
l'opérateur (-),
on le sait maintenant,
est un RAPPEL
de cette identification;quoiqu' i l en soit ,
i l Y a
structuration
puis re-structuration abstraites:
~~CO"ESEAU'e_R_E_-__Î"_1O_U_~.
-'EISEAUfr}lOUC~
(1) ---------------..~(II)
H. Marchand part du même postulat pour trouver une histoire déri-
vationnelle aux adjectifs dits
"relationnels"
:
"POLAR ~n
POLAR BEAR] reduces the verbal comple-
ment of a
sentence
"the bear
LIVES
NEAR
the pole"
to a preposed adjective,,(l).
Dans les deux cas de figure ,
rien ne permet vraiment de
justifier le choix de
ETRE
et de
LIVE NEAR
comme éléments ver-
baux des phrases de base.
L'hypothèse de E. Benveniste est cepen-
dant plus défendable dans
la mesure où la construction de sa "stru-
ture profonde" part de
ETRE, un élément dont
la désémantisation
(1)
H. MARCHAND :
"Expansion,
transposition,
deri vation" in
La linguistig~e, 1,
1967,
p.
19

- 298 -
est
très largement
avancée/à tel point qu'il est devenu un ou-
t i l formel pour la langue
(diverses constructions avec ETRE)
et
un outil d'analyse pour le linguiste
(cf. dérivation adjectivale
en grammaire transformationnelle). Dans l'énoncé de En Benveniste,
seuls quelques sèmes ont été ré-activés •••
Par contre chez H. Marchand,
l'introduction de
LIVE NEAR
a quelque chose d'ad hoc.
LIVE aurait pu être remplacé par d'au-
tres verbes sémantiquement très différents.
L'utilisation de LIVE
dans
la structure de base serait
justifiée si
l'on pouvait établir
un lien entre l'élément sémantique verbal et le morphème
(POL)AR.
Or un morphème comme -AR est,
en première approximation,
la che-
ville ouvrière qui permet d'étendre le domaine d'application de
.
;~
.
.
",
- . '
. . . " .
. '
de POLE à un certain nombre de supports riomd na.u xçvy : compris, /b:ren
entendu BEAR. :Dans cetteperspective,t-AR, au lieu de réduire
l'extension d'une notion, ne fait que disten<ire celle-ci ••• Dans
une telle perspective,
i l n'est pas indispensable de faire ap)el
à un élément extérieur à
la structure
POLAR BEAR. Nous y
re-vien-
drons au chapitre suivant. I l semble plus naturel de parler de
"transformation" d'une phrase quand la forme composée comporte
effectivement un signifiant verbal.
1) Le composé à constituant verbal en anglais et en fran-
çais se lon les l'anciens\\\\
L'idée d'établir un parallèle entre le composé à
constituant
verbal et la proposition n'est d'ailleurs pas nouvelle.
Ce qui,
par contre,
peut être nouveau,
c'est
la manière dont chaque lin-
gu t s t e. . fait'
ressortir ce rapport.

"7 .. '7 ..' . . .
- 299 -
Les "anciens" d'avant
la grammaire trnsformationnelle
y
vo-
yaient une sorte de relation pr~dicative "concentr6e"
et fort na-
turellement,
s'attachaient à y
retrouver tout
ce qui
caract0rise
une proposition
.
Les principaux malentendus entre les·ancien~
provenaient surtout de
la composante modale de
ces propositions
"en miniature".
Pour
A. Darmesteter,
que
les composés du type
CACHE-NEZ
soient d€véritables
phrases,
cela ne fait
pas de doute.
Ce qui,
au contraire,
préoccupe
A.
Darmesteter et les grammairiens de
son époque,
c'est décider si les phrases en question,
qui sont
devenus des mots composés,
sont au mode indicatif ou au mode im-
pé r-a tLf",
Pour sa part, A.
Darmesteter 's' ou t L ent que dans les compo-
sés
(80)
porte-feuille
-
portemanteau
-
garde-manger
Boileau •••
)"
le verbe est à
l'impératif et que
le mode y
"garde sa pleine et
entière signification d'ordre et de
commandement(l). I l s'agit,
explique-t-il,
de s'adresser à un objet ou à une personne
(e.g.
dans
le cas de Boileau).
J. Marouzeau dénonce le
caractère "anecdotique" d'une tel-
le analyse :
"Quelle vraisemblance de qualifier un paresseux
de
FAINEANT
en l'invitant précisément à
ne rien
,,(2)
faire
( Fais néant ) ••• ?
(1)
A. DAffi~ESTETER : Traité de la formation des mots composés dans
la langue française
comparée aux autres
langues romanes et au la-
tin,Librairie
A. Franck,
1864,
p.
161
(2)
J.
HAROUZEAU
"Composé à
thème verbal" in Le français moder-
~ , 2 a , 1 9 52, P • 84

-
J{)O
-
J. Marouzeau alors de proposer une solution qu'il considère plus
grammaticale
" ••• tout se passe comme si nous ~tions en pr~sence
d'un élément verbal étranger aux notions de personne,
de temps et de mode"(l).
(nous soulignons)
Les deux points de vue opposés en apparence peuvent être reconci-
liés dans une métalangue plus actuelle.
La question de savoir à
quel mode
l'on a
affaire,
est,
semble-t-il,
d'importance secondai-
re.
Que ce soit
l'impératif où l'on ordonne à quelque entité ou
l'indicatif où l'on parle d'un sujet,
nous retenons que
la rela-
tion V -
0
déborde du cadre du composé. Que nous soyons,
comme
le dit fort
justement
J. Harouzeau,
en présence d'une construc-
tion où lé mode,
le temps,
la personne ne sont plus de mise,
si-
gnifie tout simplement que nous avons affaire à une structure blo-
guée.
Le trait d'union
et l a fusion,
on l ' a vu,
s'accomodent à
cet état de relations re-structurées.
C'est d'ailleurs ce bloca-
ge qui permet aux structures de fonctionner comme des formes no-
minales.
Si
les composés en présence sont des phrases,
i l convient
de préciser que ce sont des phrases nominalisées. En d'autres ter-
mes,
les composés se situent à un niveau de structuration autre
que
les phrases dont ils sont issus.
La GLA illustre ce
'décalage
des niveaux èes étapes relationnelles
:
Il
[ING]
transforme des phrases en groupes nominaux,
dépassant ainsi résolument le stade de
la Phr::::(2) •
(1) J. MAROUZEAU :
op.
cit.,
p. 84
(2) H. ADAHCZE1{SKI : GLA,
1982 t
p.
300

-
JO 1
2)
La relation et son orientation
L'une des retombées de
la mise en relation de deux notions
est bien sûr la restriction de leurs extensions respectives.
Mais
la mise en relation n'est pas seulement restriction de notions.
Q~elle que soit
le type de relation construite,
celle-ci se trou-
ve forcément
polarisée,
elle prend nécessairement une certaine
orieritation. Ainsi dans
la connexion de type nominal
, la
relation
se trouve orientée vers ce que
les
linguistes anglo-saxons
appel-
lent
"la tête du syntagme".
Une relation prédicative décrite en termes d'opérations a,
elle aussi,
sa propre orientation. Dans l'étape relationnelle pri-
maire,
elle est orientée dans
le sens
Sujet ----:0>
Prédicat.
La
premi~re étape structurale dépassée, il y a ~etournement du pré-
dicat en direction du sujet. En anglais,
l'opérateur -1NG,
par
exemple,
montre clairement cette double orientation. Soit ce cou-
pIe d'
no n cés :
é
>
(81 )
l
have washed my car
où "'l'accent est mis sur la transformation de
la voiture
( ••• )"
alors que
<
(82 )
l
have been
wash1NG
my car
"attirerait
l'attention de l'allocutaire non pas sur l'état pré-
sent de la voiture, mais sur l'état présent de 1,,(1). En d'autres
termes,
si dans
la première étape structurale c'est le sujet
qui vient,
en quelque sorte
limiter le prédicat, dans la seconde,
le programme· sémique du prédicat est bloqué et devient un instru-
ment
linguistique pour "décrire"
le sujet grammatical.
( ;) ~~ • .~~D;J.1CZEWSK1
BE+1NG,
p.
19

-
J02
-
La fonction métaopérationnelle du prédicat bloqué n'est
pas très différent de
celle des mots composés dont i l est question
ici.
(83)
-portefeuille
-
chasse-mouche
chausse-pied
abat-jour
chauffe-eau
-
Trompe-la-mort
(personnage du Père Goriot)
Ces composés,
de par leur sens,
sont des
caractéristiques,
mieux,
des propriétés ayant pour siège des élé~ents non ins~an-
ciés dans
le plan linguistique.Vues sous
l'angle de
la prédica-
ti~n, les formes c6mposées se rapportent donc~ un sujet récupé-
rable dans
le contexte.
Les composés en question jouissent d'une
,.' autonomie syntaxique te lle qu' i l.s : fonctionnent
comme 'des
subs-
tantifs.
Cependant,
ce qui
les oppose fondamentalement aux véri-
tables substantifs,
c'est le mode de référenciation. Un substan-
t i f peut renvoyer directement à un objet alors que ABAT-JOUR
ne
s'y rapporte que très indirectement.
C'est,
en fait,une dénomina-
tion métaphorique qui
consiste à nommer un objet par l'intermédiai-
re de ses propriétés.
Nous avons donc en théorie
la métaphore
et formellement,
les opérateurs
(-)
ou
(.),
indices
de
re-struc-
turation;
l'emploi du composé verba l
implique une distanciation
par rapport à un référent
concret et cela n'étonne plus:
c'est
le propre des
constructions re-structurées.
Si
les composés sont assimilables à un prédicat bloqué
vers un sujet non instancié,
ils représentent des cas différents
de
l'énoncé à
l'impératif; on sait que dans
l'énoncé à
l'impératif

-
]OJ -
l'énonciateur prie son interlocuteur ou lui ordonne de
jouer le
rôle de sujet grammatical
dans
la relation prédicative qu'il a
l'intention de construire • . Or dans
les cas qui nous intéressent
ici,
le sujet n'est pas une entité
concrète susceptible d'être
interpellé,
mais une réalité purement abstraite,
une réalité lin-
guistique.
CHASSE-MOUCHE,
par exemple,
ne se rapporte pas ~ un
sujet spécifique mais ~ TOUT objet auquel le programme de sens
"chasse -
mouche" est apPlicable(l).
Que cet élément soit une
réalité abstraite explique par ailleurs qu'il échappe
la carac-
à
térisation du nombre et se prête parfois difficilement ~ la déter-
mina tion du genre.
On peut
alors poser pour ces composés une étape relation-
nelle origine, étape maintenant dépassée:
(1) 1ère étape relatiomîelle:
La schématisation ~ elle seule justifie la cohésion entre les ter-
mes des connexions sémiqueS avec un constituant verbal.
La structu-
ration disions-nous est une quête de cohésion. Dan§ le cas qui
(1)
Le signifiant ARBRE,
par exemple,
renvoie ou peut renvoyer ~
un apbre;
CHASSE-)\\10UCHE,
quant
lui,
peut dé signer une feui lle de
à
papier, un gadget électronique ••.
ou même un fouet •..

nous intéresse,
i l y
eut d'abord la première étape structurale
"X
chauffe de l'eau" pour dire qu'un certain objet chauffe
de l'eau.
A force de relances,
l'énonciateur s'est rendu compte
qu'il pouvait bloquer le prédicat,
mobiliser les deux éléments
sémantiques et utiliser ce macro-programme de sens pour désigner
"ce qui chaufÎel'eau".
I l était ainsi passé à une autre étape
structurale.
En employant un déterminant-article
(~
chauffe-eau)
il homologuait
le blocage des
constituants; dans notre schématisa-
tion,
l'application du déterminant intervient au moment où CHAUF-
FE 0
EAU
est à
sa seconde phase de structuration (cf. deux 131-
lipsoïdes).
Bref,
les deux éléments se sont soudés parce qu'ils
ont traversé deux trames de structuration,
ce qui
justifie qu'ils
ne constituent plus qu'une structure unique et surtout compacte.
1' )_ l' 0 p rat eur
- ER d
e l ' ang l '
a1S
:
une t e
ra ·
•. ·
~ '
é
Subjecta le
Dans sa théorie des parties du discours,
G ..
Guillaume con-
sidère que le nom et
le verbe sont obtenus à
partir d'une étape
holophrastique par éclatement de
la phrase-mot.
Celle-ci est une
notion complexe à
noyau verbal et à
support nomina l
intégré.
Le
support nominal est la personne-sujet parce que
la notion verbale,
disait-il,
n'implique pas
du
tout
d'objet
,
du moins en In-
do-européen :
"Le verbe en Indo-européen involut un cas:
le cas-
sujet et celui-là seulement,,(l).
Les néo-psychomécaniciens poussent
la théorie de
la sémantèse ver-
bale jusqu'à certaines extrémités en y
intégrant notamment
l'autre
('ïY-G:-ëüÏiLA:ÜMË-; Leçons de· linguistiques, 19h7b, le 25-0).

-
J05 -
personne,
la personne-objet. Mais en réalité,
J.
Doblec
et
D.F. Leflem(l)
soulignent
la nécessité d'une personne-objet pour
mieux asseoir leur théorie de
la transitivité.
L'existence d'une
personne-objet dans
le programme sémique du verbe semble diffici-
lement
justifiable,
en tout cas,
plus difficile à
justifier que
celle de la personne-sujet.
Cette généralisation abusive de
la
notion de personne intra-verbale va se retourner et de façon as-
sez f&cheuse
contre ces deux adeptes de G.
Guillaume lorsqu'ils
s'attaqueron~ à l'analyse de l'attribut de l'objet. Nous y revien-
drons au chapitre suivant.
G.
Guillaume privilégie,
et à
juste titre,
le rapport su-
jet-prédicat. C'est en rapport avec un nom-sujet que
le verbe se
constitue en prédicat, qu'il se grammaticalise,
en un mot. Et s ' i l
est banal dt a vo i r- ,des 'prédicats' sans objet,
on imagine plus dif-
filement un prédicat sans sujet.
Les thèses de G. Guillaume trou-
vent d'ailleurs confirmation dans de nombreuses
langues d'origine
indo-européenne. On peut effectivement considérer qu'en espagnol,
la voyelle finale sur le signifiant verbal fait office de sujet;
c'est plus que le reflet de sujet.L'adjanctiandu pronom person-
nel
(YO
escribQ)
produit un effet emphatique,
en fait un dépas-
sement métaopérationnel.
Un autre fait
linguistique qui milite en faveur du caractè-
re obligé du rapport nom-sujet et verbe
(en anglais,par exemple)
est
la désinence de personne-sujet sur la forme du verbe;
l'obje~
lui) ne laisse pas de trace,
sans doute parce qu'il est ajouté au
verbe pour l'enrichir sémiquement •••
( 1) J. DOBLEC & D. C. LEFLEM :
"Morpho logie verba le et fonction
attribut"
dans Langage et psychomécanigue du
langage,
Presses
universitaireS'de Lille,
1982

-
J06 -
Il n'est plus nécessaire d'insister sur la similitude mpta-
opérationnelle entre
la structuration des compos~s et la relation
pr~dicative. Il s'agit de la m~me opération mais effectuée dans
des domaines différents.
Dans une relation prédicative,
les élé-
ments s'organisent autour du verbe
selon leur fonction grammati-
cale. Dans la structuration du compos~, les termes de la relation
ne sont plus vraiment
caract~risables selon des critères syntaxi-
ques;
cette étape .~t largement d'pass~e.
Ils
entretiennent sur-
\\
'
tout des rapports
de
"restricteur-de-notion /
cible-de-la-restric-
tion" ou selon le 6ch~ma "compl~m~ntateur /
complét~".
Corr~lativement,
les compos~s français analysés pr~cédem-
ment sont syntaxiquement des pr~dicats de sujets non instanci~s
mais s~mantiguement, ils se rapportent à une entit~ non plus su-
jet, mais sujet-agent(l). A la construction française,
l'anglais
oppose jusqu'à deux structures dont
l'une semble ~tre plus m~ta-
linguistique que l ' a u t r e :
CUTIHROAT
BREAK\\~ATEH
s'apparentent bien aux structures françaises
(COUPE-GORGE; BRISE-
LAMES ••• ) Hais en anglais,
cette structure reste très peu produc-
tive(2).
La seconde consiste en l'inversion de
l'ordre
V -
0
en
o - V
puis à
leur adjoindre
-ER.
Ce morphème qui est un
(m~ta)-
opérateur est souvent décrit
comme une marque d'agentivité sans
doute par analogie à
certaines formes grecques ou latines.
L'effet
(1) Rappelons que SUJET est une fonction syntaxique et
que AGENT
est une fonction s~mantique.
Nous concédons que
'sujet-agent'
n'est pâs une étiquette très heureuse.
(2) D'après H. Marchand cité par P.
Lloyd
(Studia philologica,
36,
1936),
les compo s és anglais
r:UTIHROAT,
B'REAK\\~ATER••• sont des tra-
ductions d'emprunt au fraçai~ depuis Seulement
L8
14ème siècls.
L'opérateur
-ER
serait d~adoption récente; il serait d'abord ap-
paru sous sa' forme phonique:
man-slag~ -
man-slaughtER
gold-giff~ -- gold-givER
(voir la suite à l a ~age suivant~)

-
)07
-
d'agentivité peut effectivement
coïncider avec
la véritable méta-
opération :
(84) Joe M. Rogers, the founder of Nashville construction
company and national
FUND-RISER
for Pt Reagan is expected
to be named the next Ambassador to France •••
(HETRI -
08/03/ 1985)
Mais
le métaterme reste tributaire de
la référence concrè-
te et
lorsque le référent n'est pas un humain mais plutôt un ob-
jet,
i l faut
concéder que le morphème
-ER
dénote aussi l'instru-
menta l
:
(85)
He picked up each letter ( ••• ) and s l i t the envelop
open with his
PAPER-CUTTER.
(DillvIWIT -
35)
I l devient ensuite difficile de maintenir l'une ou l'au-
tre des valeurs pour le morphème
-ER:
(86)
Liberal
LAW-MAKERS
have agreed on the terms of iden-
tical bills to be introduces in The House and Senate that
would prohibit US businesses ans banks from making new in-
vestments in or loans to South Africa
( ••• )
(HETRI -08/0j/ 1985)
(87)
The hin of
\\d~ED-KILLi.CR
had started a new train of
thoughts in my mind.
(DU~lWIT - 176)
------------------
L'explication semble assez juste. A.
Darmesteter note,
par exem-
ple dans son corpus qui date de
187 LI le composé
CUTPAPER;
dans
notre corpus,
nous avons
PAP::'~R CUrITEH. Peut-être faut-i l
en con-
clure que
l'anglais tend vers
la métalinguisticité,
du moins sur
ce point.

- J08 -
En (86)
-ER
dénoterait-i l
l ' agenti vi té de
"ceux qui :font
les
lois" ?
En (87)
l'objet dénoté
serait~il un instrument?
Le se-
mantisme de certains composés ne permet pas de parler d'agent ni
d'instrument
(88) l don' t
think your aunt is a grea t
CHILD LOVER. It is
probably just as weIl the children are 'nt here.
(DUHIHT -
2J)
(89) At a rally in Johannesbourg last week, Bishop Desmond
Tutu"
the
1984 NOBEL PRIZE WINNER
comp~ained that the
people who had
just rounded u p had mi.r-e.Ly been !'using pea-
ceful methods of expressing opposition"
( ••• )
(~~K - 04/0J/ 1985)
On ne peut pas postuler d'agent pour
LOVE
et WIN;
à moins de
recourir à d'autres métaphores
(bénéficiaire,
objet affecté .•• )
comme dans
la grammaire casuelle de C. J.
Fillmore.
ii)
la cohésion
0 -
V
et
l'analyse métaopérationnelle
de
la connexion sémique à
constituant verbal
L'opérateur
-ER
ne concerne pas seulement la notion ver-
baIe. I l s'adjoint au verbe lui-même complémenté en tant que pro-
gramme sémique par la notion nominale.
La notion nominale se pré-
sente comme ce que H. Houis aurait
certainement appelé
"consti-
tuant nécessaire" puisque sa suppression
c~ée une impression
d'incomplétude ou change radicalement
le sens de
l 'énoncé{l) :
(1) En anglais on peut avoir
~-'vRITER quand le' contexte n'exige
pas qu'on spécifie l'objet de
l'~criture (ce qu'on écrit), parce
qu'il est supposé connu. Nous verrons'que
la forme équivalente
(~-v-ER) est impossible en senoufo.
~V""'-,"'" '.. ''.-0.'-:.;,.-,'., ','"

-
309 -
(90)
American
POLICY-MAKERS
clearly believe that the mo-
ney that goes to Egypt is well spent.
(HETRI -02/3-03
1985)
(90') American
~
-MAKERS
clearly believe •••
c'est bien la preuve que
-BAKER
est une forme sémantiquement
complexe. Faisons une comparaison rapide avec des structures com-
posées de deux noms. Dans ce cas de figure, le nom qui fait office
de complémentateur peut être omis sans que
le sens du syntagme
ne soit autrement altéré
:
(91)
... Terribly ill she was ••• and a
HOSPITAL NURSE
we
had here,
and she made up Qer mind that i t was all over.
-. (DUM'HT -
61)
(91)
..• a
~
NURSE
we had here,
and she made up her mind.
Dans les composés o~ le complémentateur est sémantiquement complexe,
l'omission d'un terme altère le sens de l ' u n i t é :
(92) When the
FIRE-ENGINE SIREN
started wailing one night,
score of people ran through the street5in terror.
(NWK - 24/12/ 1984)
(92') When the
~
-ENGINE FIRE
started wailing
•••
I l Y a manifestement incomplétude informationnelle. Tout comme
FIRE et ENGINE
se constituent en outil de restriction d'extension
d'une notion nominale cible,
de la même manière nom et verbe fusion-
nent leurs contenus sémiques en vue,d'une
seule fonction.
C'est
la preuve de l'existence dfùne forte solidarité entre les formes
verbale
et nominale des énoncés
(84) à (89).
Syntaxiquement,
le

-
J 10 -
nom devient objet pour assumer avec
le verbe une fonction de pr~-
clicat.
La cohésion peut être
'Carmel le ;
c'est
le cas des
compos~s
anglais structurellement ~quivalents aux composés français
(COUPE-
PAPIEH:::CUTPAPER; ;
elle peut être de type métalinguistique; dans
ce cas,
elle se réalise par proc~dé d'inversion.
C'est ce que
l'on
,
. •
l
.
observe dans
la forme actuelle de
coupe-papler en ang alS
PAPEH
+
CUTT
-ER
Dans l'ancienne structure,
on pouvait voir encore en
PAPER
un
compl~ment dLobjet
/~"-:
verbe ""'-----
CUT
I - - - - - - - o b j e t
"'"
\\
/ /
-,
~,~.._---_.,.~ ./
Dans
la structure actuelle,
PAPER est plus que simple compl~ment;
i l n'assure pas
seulement une sorte de clôture
à
la transitivité
dans
le sch~ma syntaxique classique:
i l a
ér~ int~gré dans l'es-
pace s~mantique de CUT(l)
compl~mentateur
compl~t~
PAPER devient un compl~mentateur du programme sémique verbal d'ott
leur forte
cohésion fonctionnelle.
Quant à
l'opérateur,
nous lui accorderons difficilement
une valeur d'agent. I l semble plus à propos de parler cl'une trace
1
subjectale.
C'est
la marque de
la re-activation de
la notion sub-
jectale contenue dans
le programme s~mantique du verbe. Dans la
(1)
"complémentateur"
vs
"compl~ment (d'objet)" n'est pas un ar-
tifice terminologique.
La n6tion de
compl~ment d'objet évoque cel-
le du verbe;
c'est une fonction qui
est marquée parfois clans
le
plan structural
(cas accusatif en latin,
par exemple). Alors que
la complémentation est
la structuration de deux notions dont on
peut ne pas savoir si elles sont de
la cat~gorie suhstantivale,
verbale •••
La complémentation
est une ~tape structurale situ~e
dans
le plan des notions.

-
J 11 -
structure de surface,
les ~l~ments
0
-
V
constituent un pr~d~-
cat bloqu~ orient~ vers
-ER,
la repr~sentation formelle du sujet:
~
e.g.
FUN D
R I S E
E R
FUND-RISE,
en termes de relation s~mantique se constitue en
outil
de limitation ayant pour cible
-ER.
FUND-RISE,
pour être plus
pr~cis, d~finit par compr~hension l'entit~ concr~te pour laquel-
le la px-o pr-Lét
RISE FUNDS
est vraie. Nous ré joignons sur ce
é
point la position de H. Marchand pour qui
les formes
V-ER sont
des formes complexes où la base verbale est
le déterminant et 1'0-
p~rateur -ER le détermin~ :
"Deverbal substantives are characterized as substan':'
tives by
their flexional
ending. The verbal element
is the determinant
( ••• )
the determinatum of the whole
deverbal
substantivaI combination may be substantive
(draw- brigde),
a
suffix as in
ImITER ( ••• )" ( 1 )
Cependant,
nos deux positions divergent à ce detail près que
le
dé terminant
de -ER n'est pas "seu lement
la base verbale mais cet-
te base verbale
+
son complémentateur éventuel. Dans
l'exemple
de H. Harchand,nous aurions repr~sent~ la relation
d~terminant/dé
t e rm fné
ainsi
:
+
( N )
W R I T E
E R
H. ~larchand aurait dû sentir la nécessité d'un élément nominal
complémentateur de
la notion verbale,
lui qui parle encore d'agent
en ce qui concerne
l'op~rateur
-ER. Si
l'on postule
un
agent
(1)
H. ?-ù\\.RCHAND
"The ana Itsis of verbal noun substantives"
dans Studies' in Syntax and word-formation,
Selected articles"
1972,
p.
2~2

-
J12
-
i l faut aussi penser à prévoir un objet
(affectp.)
sur lequel
l'a-
gent exercera son agentivité.
L'on peut déviner déjà comment opéreront les mécanismes
de portée dans ce type de structures. Nous en avons une illustra-
tion en (88)
avec un adjectif de type méta-linguistique(l).
La
spécifi té. des adjectifs méta-linguistiques étant de se rapporter
non pas à des entités du monde concret mais de porter sur des ci-
bles structurées
(donc
linguistiques)
la quantification de
GREAT
concerne, bien entendu,
la trace subjectale,
c'est-à-dire l'opéra-
teur -ER.
En effet,
l'appréciation véhiculée par
GREAT ne concer-
ne pas vraiment
l'individu. (la belle-mère de l'énonciateur)
mais
"la personne dont on peut dire que le prédicat LOVE CHILD est une
propriété. Un prédicat -
entité grammaticale -
ne pouvant pas ca-
Éactériser une personne réelle mais une entité grammaticale,
GREAT
a,
fort
logiquement,
pour cible~
-ER:
t-
GREAT
[ CHILD -
LOVE
ER
J
I
1
En revanche un élément à
"portée radicale"
limiterait son inciden-
ce au nom qui fait office d'objet
comme en (89)
avec
"the 1984
NOBEL PRIZE WINNER
"tr
1 1984 - NOBEL - PRIZg - WIN
ER
où nous avons une suite d'opérations de réduction d'extension
doublées
d'opérations de complémentation récursives.
(1)
Nous rev~endrons sur la portée (épistémique ou radicale) des
adjectifs au chapitre V.

-
J1J -
J)
La connexion sémique à
constituant verbal en senoufo
L'on se souvient que nous reprochions à
P. Boutin (chapi.
tre rr) de n'avoir pas examiné plus attentivement les conditions
métaopérationnelles dans
lesquelles une base verbale venait
à
être convertie en signifiant substantif.
Pour avoir abordé
le phé-
nomène du côté des opération~,nous avons pu voir que le MN
s'ad-
joint à
la base verbale la moins grammaticalisée(l). Dans
la struc-
turation du nom
à partir d'une notion verbale,
cela constitue une
première sélection,
mais une sélection qui
concerne seulement la
base lexématique.
Nous reprochions aussi à
P. Boutin d'avoir présenté
les
choses un peu h~tivement dans son tableau des "valeurs sémiotiques
de genres".
Sa schématisation laisse,
par exemple,
supposer que
n'importe quel MN peut être appliqué à une base verbale pour créer
un nom;
ce n'est bien sûr pas le cas puisque nous avons vu: que le
MN du groupe l
ne peut pas servir"lui tout seul,
à
construire un
signifiant nominal à partir d'une base verbale unique.
Enfin,
dans ce que nous considérons être la connexion sémi-
qUH compacte,
P. Boutin continue de distinguer un constituant à
fonction de déterminant,
le second constituant ayant une fonction
deêl.éterminé. Nous n'avons p a.s d'obje.c~i,ons,· à opposer à
l ' attri-
bution ou à
la reconnaissance de ces statuts aux bases
lexicales.
Mais
les choses se g~tent quand on fait une synthèse de son point
de vue sur le statut des termes d'une relation de composition et
leur fonction
(déterminant/ déterminé).
En effet,
si
le composé
est constitué, d'après P. Boutin (et al.),
de bases
lexicales sans
(1)
Nous parlions alors de
"forme non saturée",
c'est-à-dire,
la
base verbale de Phase r
(BV1'.

-
J 1 L~ -
aucune autonomie syntaxique,
et
"qui ne peuvent pas assumer une
fonction dans
llénoncé,,(1),
on ne comprend plus pourquoi P. Boutin
tout
comme M. Houis continuent de parler d'une fonction de déter-
minant pour l'une et d'une fonction de déterminé pour
l'autre.
Ayant accumulé toutes ces
lacunes,
l'analyse de P. Boutin ne pou-
vait pas faire ressortir le comportement tout particulier du MN
du groupe l
(/wv/ au singulier et /bvlv/ au pluriel)
dans
le com-
posé avec un constituant verbal.
i)
les constituants de
la connexion sémique
Rappelons que nous appelons ~onnexion sémique ce que les
linguis\\es africanistes nomment soit syntagme, ,soit composé,
la dis-
tinction.'tant basée sur la reconnaissance plus ou moins intuiti-
ve du degré de cohésion entre les constituants
de chacune
des
structures.
Dans
la connexion sémique déjà analysée
se?gi
k610.? ô
=
the way to the field
field.HN2
/
road.MNl
On reconnaît
le nom restricteur de notion (/se~.gi/ -
'le champI)
et
le nom cible de
l'opération de réduction d'extension (/kolo.?o/
'une route'). Plus important,
on reconnaît dans
la structure du
premier nommé
le MN?
Jgi/ du groupe II;
le second substantif est,
quant à
lui,
marqué par le MN1
I?o/ du même groupe II. Mais dans
la seconde p~ase de structuration,
en fait, la re-stucturation,
le dépassement ne se traduit pas seulement par la coh0sion;
i l se
passe, des choses au rï i.w e a u des opérateurs du nom
:
( 1) M. HOU l S :
"Relations de détermination en
syntagmes composés
et en compos~s nominaux" in Afrique et langage,
16, 2~me semestre,
1981, p. 6

-
J15 -
( 9l~ )
s
e
-
k 6 l i . w i
= the field way
field-road
+
MN2
Les bases
lexical~s se sont soudées, c'est-à-dire que les notions
nominales se sont amalgamées.
On a
un seul
constituant syntaxique
qui,
fort
logiquement,
est marqué
par un seu l
MN;
le J-IN /-wi/ et
ce qui doit
être souligné,
c'est que
le MN ~wi/ n'appartient pas
au même groupe que
les constituants de départ
(cf.
énoncé
(93)).
Tout
se passe comme si
lors de
la re-structuration,
le groupe d'ap-
partenan~e des noms n'avait plus d'importance.
Ce qui
semble
logi-
que puisque structurer puis re-structurer,c'est quitter le plan
proche de l~extra-linguistique pour progresser vers le plan méta-
linguistique,
c'est,
par exemple,
quitter le plan où les mécanis-
mes intrapropositionels
(accords en nombre pour le français
et
l'anglais)
sont
libres d'opérer pour le plan où i l s sont tout de
suite neutralisés;
en un mot,
et de façon générale,
c'est effectuer
un parcours opérationnel sur l'axe Phase l
~ Phase II. Bref, c'est
ne pas
se retrouver au point de départ. En ce qui
concerne
la con-
nexion sémique en
(93 et 94), c'est prendre une certaine distance
par rapport à
la répartition des noms en 5 groupes.
C'est à
ce point de
l'analyse que se précise notre désaccord
avec P.
Boutin.
I l continue de
considérer que
la base
lexicale
/se-/
est déterminant et que /koli-/ est
le déterminé.
Rappelons
qu'aucun locuteur senoufo n'est à même de reconnaître en ces for-
mes
les
signifié~
de
'champ'
et de
'route'.
Le
linguiste,
tout
aussi difficilement pour la juste raison que
ces suites de phonè-
mes peuvent
servir de supports phoniques à
d'autres-signifiés.
En
résumant
les points de vue de P.
Boutin,
on se trouverait dans une

-
316 -
en
v
situation o~ une base lexicale d~termine une au~re, ce qui est tr~s
douteux.
On peut encore accepter qu'un
'nom détermine un autre- et
en grammaire métaopérationnelle on fait
cette concession pour per-
mettre au débat de se dérouler;
mais qu'une forme non encore gram-
maticalisée
en ..
d é t e rm Ln e une autre nous
pa.-rait difficilement
concevable.
Pour revenir aux énoncés
(93 et 94)
précisons tout de sui-
te que le passage en Phase II
n'est pas marqué.
exclusivement par
le MN /-wij du groupe l
:
l:>·'.gi
s u v n o
wa ter .1'-IN2
j worship .MN1
jthe water worshipj
• The worship of Water
(L.S., août 1979)
On note que le premier signifiant est marqué par le MN j~ij du
groupe II et que la seconde forme est marquée par le MN /-nJj du
,.
groupe III. Mais lors de la phase de re~structuration, c'est le
contexte discursif,
en fait
l'énonciateur,
qui d~cide dB la sélec-
tian d'un MN dans tout
le syst~mes des MN :
groupe III
I J -
s u
• n
;)
=
water adoring
water-wor~hip.MN1
ou
groupe
v
l
~ - s u . m.·)
=
the way how·to
water-wor;hip~l
worhip water
ou
groupe
II
lo-su.~
=
a
sacred waterj
water-worship.MN1
a
Sacred River
Que dire de cette possibilité de marquer la forme nominale
th~matique avec un MN à chaque fois différent ?
On remarque d'abord
qu'elle dérive de la structuration d'une base nominale et d'une base

-
J17 -
verba le •
Dans
la connexion sémique
lâche,
la base verbale est
promue au rang de nom par adjonction d'un MN du groupe III
(cf.é-
noncé
(95». ~1ais avant cette promotion dans le plan énonciatif,
rien ne permet de dire à quel groupe de nom
la forme d'arrivée
(BV1.MN1)
va appartenir. On ne sait peut-être même pas si cette
base va être actualisée sous forme de verbe ou de nom. Autrement
dit,
quand cette base verbale
(BV1)
est structurée avec
le lexème
/l~-/ -'eau', ce n'est pas à l'état de nom ni en tant qu~élément
de n'importe quelle autre catégorie grammaticale.
C'est après et
seulement après
l'application du MN /-no/ en (95) que la structu-
...
re complexe est
"sacrée" signifiant n6minal
:
(I) étape pré-structurale:
• bases l.:exicales
/1':)-/
r
/slJ-/
(catégorie grammaticales
'water'
'worship'
non encore connues)
NOTIONS
(II)
étape post-structurale:
.connexion sémique
u...
(catégorie grammaticale
connue puisque + MN)
NOTIONS COMPLEXES
C'est donc dire que dans
la connexion sémique compacte
~a notion
sémantiquement complexe)) on ne doit pas pouvoir dire que /l~-/ et
/su-/ sont déterminants et/ou déterminé~. A noter que chez P. Boutin
-
.
dans une connexion sémique compacte avec deux bases nominales,
la
base de gauche est
le déterminant et celle de droite le déterminé;

- - - - - - - - -
-
J18 -
quant aux connexion~sémiques compactes comportant une base verbale
et une base nominale
(cf /l~-su.go/ énoncés (96),
toujours chez
P. Boutin,
la base nominale est
le déterminé
et cette fois elle
se trouve à gauche de la structure j' . la base verbale qui est à
droi te est le
déterminant. Dans certains cas,
P. Boutin ira même
jusqu'à dire que cette base verbale est un constituant adjectival
alors que la catégorie adjectivale n'existe pas en senoufo •••
Pbur revenir aux formes de
(96), non seulement en Phase II
l'appartenance des bases lexicales à quelque groupe de noms ne se
pose même plus~ mais tout se passe comme si nous avions affaire à
des formes nominales différenteB' ay.arit,chacuneleurs signifiés spé-
cifiques. D'ailleurs la dernière forme /l'b-s~~go/ -
'Eau Sacrée'
est complètement lexicalisé~(1) • C'est donc :'di~~ que nous avons un
nouveau nom à
structure lexématique complexe et dans ce cas i l est
très
fâcheux de continuer de distinguer un déterminant d'un déter-
miné. On aura ,compris que cette incohérence est principalement due
au fa~t que l'analyse n'a pas pris assez de distance par rapport
aux formes et surtout qu'elle n'aborde pas
les phénomènes St~lctu-
raux par leur côté
le plus abstrait,
c'est-à-dire,
la Relation et
sa datation.
ii)
la connexion sémique et le MN du groupe l
(/wv/ et /bvlv/
L'analyse de P. Boutin laisse penser que les MN du groupe l
(/wv/,
Sg et /bvlv/,
Pl)
peuvent convertir une base verbale
(BV1)
en forme nominale;
en réalité,
ils restent absolument impuissants
à
subtantiver une base verbale isolée. On a bien
=
(a)
worship
worship.i'1N1
(1)
Nom d'une entité religieuse dans le système matrilinéaire.

-
')19
-
On y reconnait
le MN du groupe III. Mais
la ~orme
s u . W :J
=
?
~
v
wo r s h i.p .,f\\lNl
Avec le MN du groupe l
la forme ainsi structurée n' est pas attestée.
La base verbale doit être forcément précédée à gauche par un nom:
,
jiligè


ml
korù
l:>-su' .wi
J~
djilige/die 1 as 1
you I(rel. pr.)/stay/water-worship
MNl
IDjilige is dead,
so you stay the water worshipperl
. As Djilige i~ dead, Vou become the religious lea-
der in water adoring .
(L.S. août 1979)
.(\\.
0 ,
t6rtgo
k P a
-
w
a
a
• b
è
l
è
ma
wei
him
1
sendj
cQwrie-throw
.MN2
1 to
. "
t
li m n y
\\2
w é
l
é
b
è
l
è
sand
look
• MN2
1 we send him to
the cowrie-throwers /
sand-lookers
1
• Let's send him to the
COWRIE-THROWERS
( 1 )
SAND-READERS
(C.D.,
La contrainte h'estcertaineme~~ pas li4e:~u trait transiti~ du ~er-
be. La base lexématique nominale n'a pas seulement pour rôle de
servir de clôture à
la transitivité.
Elle continue de peser même
avec un verbe intrinsèquement intransiti~. Si l'anglais peut par-
1er de
RUNNER
le senou~o se sent obligé de spéci~ier le "type
de course que
l'on court"
k
à s
à -
~ ~
. w è
=
(a)
race runner
frace
run
.MNl f
(1) autre catégorie de voyant, genrède g&omancien.

-
320 -
Rappelons en passant qu'il est possible de substantiver /f~-/ _
'courir'
avec d'autres MN :
e.g.
fÈ:·' • l i
= the escape
run.NN2
fÈ: ' • mm
=
the way of running/escaping •••
run.MN~
où la base verbale de
'courir'
est actualisée comme appartenant
respectivement aUXgrbupes I I I
et~.
A quoi serait donc due cette néc~s~ité
d~
compl~mente~
la
notion. . verbale dans
les occurrences du MN /wv/ et /bvlv/
du groupe l
?
LàJnotre interprétation diffère de celle de P. Boutin.
Les
..
bases
lexicales n'ont pas de fonction déterminant/déterminé. Nous
rapprochons plutôt ces structures de la relation prédicative com-
me cela a
été fait pour l'anglais et pour le français,
à
savoir
que nous avons affaire à une relation prédicative "concentrée".
Pour la connexion sémique en
(98), /kpàà-w&a.bèlè/ -
'les
jetèurs
'"
de cauris'
la structure phrastique
canonique est
:.
wi
il
kpàa.rI
waa
he /
(pred)/
cowrie.MN2 /
throw
bèlè
they/these
ones/
He
have thrown the cowries
.u The'y
Sous sa forme de connexion sémique compacte -
/kpàà-waa.bèlè/
'V'
l~ relation prédicative "concentrée" présente
deux caractéris-
tiques métaopérationnelles très importantes:

-
321
-
.1°)
La disparition du relateur prédicationnel
(ln/) , preu-
ve que,
d'une part,
la première étape relationelle a
été dépas-
sée et qu'il y
a bien
eu re-structuration(l)
et,
d'autre part,
que l'on a ici affaire à des éléments sémantiques qui n'ont pas
eu le temps d'être promus au rang dé constituants syntaxiques
(nom-objet,
signifiant verbal).
L'on se souvient que
la mise en
relation précoce de deux éléments est
la compacité de
la struc-
ture'qu'ils forment une fois que celle-ci arrive dans
le plan
énonciatif
comme constituant syntaxique •
. 2°) Le sujet a é±é déplacé de gauche à droite et l'on sait
maintenant que toute modification de
l'ordre des constituants
implique forcément un changement de statut;
en d'autre termes,
le passage à une autre étape structurale(2). Le déplacement du
sujet-agent à droite n'est pas fortuit.
L'on a
en mémoire que
la relation de détermin~tion en senoufo est toujours orientée
de gauche à droite.
Cette relation nouvelle qui est une relation
de détermination est donc orientée vers
le sujet,
ici,
Iwil et
Ibèlèl :
l
[ k
P à -
w fi é. •
b
è
l
è
1 wi
Nous réjoignons encore H. Marchand qui considère que' dans la struc-
ture ,anglaise correspondante ~(COIITRIE' TI-iItOlf !...ER) , la trace subjec-
tale est le déterminé,
la structure sémique~(les monènes lexicaux)
étant, elle, le déterminant. Notre position et celle: de H.Marchand
(1) voir paragraphe C),p.
sur la similitude métaopérationnelle
entre les opérateurs
(-),
(e ) et DO.
(2)
cf. Nl
of
N2
~.
N2
.; Nl

-
322
-
s'opposent ainsi diam~tralement ~ celles de P. Boutin et M. Houis.
Le MN /wv/ ou /bvlv/ adjoint ~ une base verbale, on l'a vu, n~-
ces site une espèce de compl~mentation afin que la st~lcture pr~­
dicative canonique qui a
été passée ~ l'étau(l) conserve tous
ses
constituants
B N
B V
wi/bèlè
o
V
S
cowrie -
throw
he/they
Une dernière remarque s'impose. Dans les connexions sémiques lâ-
ches,
l'opération de complémentation ou de réduction d'extension
est récursive et de façon illimit~e :
diligè
c~.wi
nari.wà
yi~.li
kù.go
lo.?~
Djilige
/wLt'e .1>IN2 /nüphew .MNl /last year/ death .MNl /wa ter.
MN1/
su.n.::>
H
- ...
worhip.MNl
• The worship of water for the funerals of the nephew of
the wifeof Djilige •••
Mais dans
la connexion sémique compacte,
en particulier avec un
constituant verbal,
l'opération d'addition sémique n'est pas ré-
cursive. D'une part parce que c'est une relation prédicative qui
est re-structurée sous forme miniaturisée et que dans un seul
domaine prédicationnel i l n'y a pas de~ place pour deux compléments
d'objet; d'autre. part,
suivant
la chronologie en système, une for-
me qui n'a pas pu avoir le temps de se fRire structUrer depuis
.c 1 )
par analogie
l ' "effet laminoir- "
à

-
J9J -
le niveau notionnel avec
la base verbale et
lab~se nominale (en
rait) l'objet),
devra attendrel'arriv~e dans le plan ~nonciatif
pour s'adjoindre en tant que forme nominale "finie"
(pr~sence
d'un HN)
à
la structure compacte
e g ,
s u . n , - )
=
i
*- y
i
e
-
l
:'»
.....
the yearly water
adoring
year -
water
worship.MNl
mais plutôt
y
i
If
l
l
l
;) -
s u . n ,J
= the yearly wa-
ter adoring
year
• MN2
water-worship.MNl
• Remarques sur le statut du MN du groupe l
dans lesyst~me nominal du senoufo
A la fin du chapitre II,
nous attirions l'attention sur le
comportement assez singulier du 1'1N du groupe 1.
Nous étions mê-
me arriv~ à
l'hypoth~se que la détérioration de la répartition,
des noms senoufo en cinq groupes consistera ,en une g~n~ralisation
de l'emploi de ce MN pour marquer tous les noms senoufo, à
cause
des emprunts de plus en plus nombreu~ mais aussi à
c au s o de sa
neutralité sémantique •••
Dans
l ' acquisi tian
du senoufo,
ce la
lui vaut d'être plus facilement
"maniable" que les autres MN,
bref,
c'est l'opérateur de la cat~gorie nominale par excellence.
Dans le tableau des
"valeurs sémiotiques de genres"
de P.
Boutin et chez
les auteurs de la Grammar Lessons,
on s'efforce
de lui attribuer le trait
(+)humain et
cela ne manque pas non
plus d'attirer l'attention.

-
324 -
Dans
les connexions sémiques
qui viennent d'être analysées l
i l se rapprocherait du morphème de
l'anglais
-ER,
la trace du
sujet-agent.
En effet,
du trait
(+)humain au marquage de
la fonc-
tion de sujet(il n'y a qu'un pas mais nous nous garderons bien
de tirer des conclusions à
caractère philosophique.
Un autre fait
tout aussi significatif est que
la forme pro-
nominale ou anaphorique de ce même MN marque
le sujet
générique:
(99)
wô-leé.bèlè

cié
jia.la
na
WO-old.MN2
/they /refuse/forest.MN2/ break/
on
/the old ones they refuse for the breaking of the forest/
• It is the old people that are opposed to the destruc-
tion of the forest.
(99~) be
h
fyâ
t;~.li
p~i.b~l~
na
they/(pred)/fri ghten/moment/child.MNl
/
on
}1N2
/they fear the children of the moment/
• THEY don't
trust the youth today
La forme nominale
'OLD PEOPLE'
est marquée en senoufo par le MN
/bèlè/ quand la forme anaphorique est
/be/.
C'est cette forme
pronominale qui est sollicitée quand le référent-sujet n'est pas
spécifié:
(100)
be
à
f8fè.lè
wxi
yébili.gi
ni
yt
they /(neg)/whistle.MNl )Nhistlel night .HN2/
in /
(neg)
/ they don' t
b low
(a )whistl e·
in the night/
• YOD must not whistle at night.
• I t ' s
forbidden to whistle at night.
• Whistling
forbidden
/
No whistling
.
.~~:.
-, ..

- J 2 5 -
( 10-1 )
m&G

mo
yiri
?
how
/
they / you /
calI
/how do they calI you ?
/
.What's your name ?
On retrouve ainsi une autre similitude avec l'anglais par
l'intermédiaire de
THEY?
et
par
ON
pour'
ce
qui
-est
du
français.
ON
est le sujet méta-opérationnel
par excellence;
c'est à
lui que
l'énonciateur fait
appel
lorsqu'il doit constr'ui-
re une relation prédicative et qu'il ne connalt pas
le référent
extra-linguistique du sujet.
*
* *
Que peut-on dire du traitement
linguistique de la notion
nominale et de la fonction sujet ?
Dans 1'6tude de la sémantèse verbale,
G. Guillaume considè-
re que le signifié du verbe incorpore en lui la notion de sujet
(cf.
forme synthétique verbe+sujet en espagnol; désinence:
ver-
baIe,
reflet du sujet de troisième personne en anglais ••• ).
Au
niveau sémantico-lexical,
l'anglais marque aussi cette trace sub-
jectale avec l'opérateur
-ER. Dans un cas comme dans
l'autre,
l'objet niest pas exprimé~ Il est ajouté au verbe et l'on peut
considérer qu'il constitue une expansion sémique du verbe.
La synthèse de tous
ces faits
linguistiques
(inhérence du
sujet dans le signifié verbal,
marquage du sujet-agent par
-ER,
fonction nominale doublée de la fonction subjectale du MN du grou-
pe I
en senoufo)
a~ène
à penser que la catégorie nominale im-
plique la fonction de sujet •
. ~.. . ". .

CHA P I T R E l
V
STRUCTURATION ADJECTIVALE IIT STHUCTURATION PHEDICATIONNELLE
.
"
-.:~-; ~ ..

" ' C "

- J27 -
L'on peut
se demander,
avec raison,
dans quelle mesure la
catégorie adjectivale peut intervenir dans une étude sur la Re-
lation.
Dans
la construction des
(noms)
composés,
les prépositions
et parfois
les opérateurs
(-)
ou
(&) établissent certains types
de rapports
entres
les programmes
sémiques.
La Relation se trou-
ve ainsi actualisée sous forme
de signes grammaticaux,
donc des
symboles assez abstraits et ses membres
sont,
bien
A
sur,
des élé-
ments sémantiques.
L'adjectif étant un élément sémantique,
i l paraît évident,
en première approximation,
qu'il soit structuré en tant que ~-
bre d'une relation.
Mais nous avons vu aussi que
la structuration puis la re-
structuration d'un élément s'accompagne d'un changement de son
statut;
le changement consiste,
entre autres,
en une distancia-
tian entre l'élément sémantique et son référent extra-linguisti-
que:
d'une étape structurale à une autre,
i l y
a mise en laten-
ce de certains de ses sèmes,
ceux qui sont en conformité
au
monde concret.
I l faut aussi s'attendre à
ce que,
dans ce parcours de
la
chronologie linguistique -
une chronologie,
du reste très expan-
sible -
l'adjectif se dèsémantise,
ce qui
lui donnera alors
le
droit d'aspirer à un statut de morphème grammatical,
c'est-à-di-
re d'opérateur de relation.
Seulement
la désémantisation n'est
."~.
1
.r
,
_.~;<~,~l:.... ~

-
J28 -
jamais parfaitement atteinte;
elle n'est
jamais totale(l)
et
avant d'être
la relation comme,
par exemple BE,
OF,
(~), (-) ••• ,
l'adjectif se pr~sentera d'abord sous forme d'outil aux mains
de
l'énonciateur,
un outil servant à opérer des coupes dans
l '
l'extension de o; cibles nominales;
i l deviendra ensuite un instru-
ment de régulation des signifiés nominaux et dans
ce cas précis
i l lui appartiendra de revenir "travailler" sur une relation no-
minale déjà construite.
r .
Tout
cela signifie qu'il faut
commencer-par examineratten-
tivement
le statut de l'adjectif,
l'adjectif qui apparaît être
un élément sémantique assez particulier.
(1) I l faut à un élément sémantique traverser de très nombreuses
étapes relationnelles,
être re~structuré à plusieurs reprises
(une relation relancée en un" nombre illimité de fois)
pour attein·,
dre un état de d~sémantisation à peu près satisfaisante. O. Jes-
persen cite le cas de
VERY qui était d'abord adjectif avant de
devenir un outil formel en l'espèce d'adverbe. En souvenir de son
statut inïtial d'adjectif (première étape relationnelle)
on a
en-
core THE VERY DAY =
'le
jour vrai', 'le
jour "authentique", 'le
jourME:HE'
La philosophie de
la gJ.ë:tilllllC1..L..lt::,
;:; i-;,
1-'.
.r :

- J29 -
A)
STATUT lvIETA-LINGUISTIQUE DI!: LA CATEGOHIl!: ADJECTIVALE
1)
La hiérarchie des parties du discours
Pour se constituer en science,
la linguistique,
très tôt,
s'es~ inspirée des sciences de la nature: disséquer la matière
à
étudier pour mieux l'appréhender.
La langue qui est son objet
a donc été considérée comme un ensemble d'unités discrètes ce
qui,
a-t-on pensé,
était un préalable à
l'analyse de son fonction-
nement.
Les théories les plus anciennes sur les parties du discours
reconnaissent implicitement ou explicitement l'existence de deux
plans. Elles ont distingué grosso modo,
d'une part,
les parties
prédicatives et de
l'autre;
les morphèmes grammaticaux. S'inspi-
rant toujours- des sciences dites
"exactes" on a également pensé
que la langue devait avoir un rapport direct avec les choses du
monde. Ainsi,
en ce qui concerne
les parties prédicatives,
le
substantif dénote les substances,
le verbe,
les actions,
les évé-
ments; quant à
l'adjectif,
i l devait renvoyer aux qualités,
aux
dispositions;
aux états ••• (l)
Nous nous intéresserons surtout
à
la catégorie adjectivale mais aussi à
la catégorie nominale,
la première pouvant être difficilement évoquée sans la seconde.
L'on sait depuis qu'il est plutôt difficile de faire coïn-
eider le domaine linguistique et
celui de
l'extra-linguistique.
Bien de linguistes -
dont O.
Jespersen -
ont d'ailleurs dénoncé
la perméabilité de
la théorie des parties du discours:
(1)
J. TRICOT:
Aristote. Organon,
Librairie philosophique J. Vrin\\
Paris,
19J6

- JJO -
"
la distinction "substance" et
"qualité" n'a
donc pas grand sens en linguistique. On pourrait
ajouter que d'un point de vue
philosophique, on
n'appréhende
jamais les
substances que par leurs
qualités:
l'es sence d'une substance
est
la somme
de
toutes
les qualités dont nous percevons ou con-
~evons qu'elles sont reliées ent~e elfes· et d'une
c~rtaine mani~re,,(l).
Nous ne sommes pas suffisamment armé pour nous
lancer dans
un débat
philosophique mais
l'objection de O.
Jespersen,
on l'ad-
mettra,
ne manque pas de pertinence. Mais même en restant dans
le domaine de
la linguistique,
on est obligé de reconnaître que
l'adjectif,
à une époque réculée de
l'histoire de
la
linguisti-
que,
était ~éjà appréhendée comme une catég~rie bien particuli~-
re. D'abord i l a été dégagé
comme catégorie grammaticale assez
tardivement,
ce qui prouve qu'il a presque toujours fait probl~-
me. En effet,
on
.a pendant
~ongtemps, parlé de NOM pour se ré-
férer à
la fois au' substantif et à
l'adjectif;
la désignation
d'un sous-ensemble de noms sous l'étiquette ·"adjectif" est
l'un
des multiples indices d'un moment où la linguistique commençait
à prendre ses distances vis-à-vis de
la PhilosoPhie(2).
Le mé-
taterme de
"substantif"(de substance)
est une mouture des consi-
dérations philosophiques sur l'ETRE ou
l'ESSENCE.
Quant à
"adjec-
tif",
l'étymologie même du mot renseigne assez explicitement sur
une
c~nception tout à fait autre du langage. Derri~re "adjectif",
se profile dpjà l'idée de mise en relation,
de structuration:
on adjoint un terme à
un autre.
(1)
O.
JESPERSEN
La philosophie de
la grammaire,
Editions de
Minuit,
Paris,
1971,
p.
88
(2) G. Guillaume rapporte que c'est par decret ministGriel qu'
a
été établi~d0finitivement la distinction "nom-substantif/nom-.
âdJec (;1.1 ,;.

-
JJ1
-
Moyennant quelques
légères retouches.
certains
linguistes
reconduisent dans
leurs modèles,
les
concepts philosophiques de
ETAT et de PROPRIETE. B. Pottier, .par exemple.
discrimine
le
substantif et
l'adjectif en ces termes:
le substantif renvoie
aux entités;
l'adjectif et
le verbe,
aux comportements(1).
Quelle que soit
la position théorique adoptée -
y
compris
ce lle de B.
Pottier -
sur le rapport, langue/ choses du monde,
l'on admettra aisément que
l'adjectif et
le nom-_ n!ont pas
le~
même
type de rapport avec
l'extra-linguistique.
Si
le nom ren-
voie directement à un objet ou à une entité,
l'adjectif ne s'y
rapporte que très indirectement. En effet,
nommer un objet est
une chose;
parler de ses qualités,
de ses propriétés,
de son
état, de ses comportement~••• en constitue une autre.
Dans un
cas comme dans
l'autre,
i l y a manifestement dépassement du sta-
de de nomination.
Arrêtons-nous un instant sur la
nomi~ation. L'on sait que
ce n'est pas un a~tetoujours aussi simple que la désignation.
Nommer est déjà une opération linguistique d'une certaine comple-
xité. R.
Lafont a
raison de considérer que dès ~a phase de nomi-
nation,
la langue est déjà en rupture avec le monde réel
"Si l'on considère que l'objet
linguistique ne com-
porte pas en lui-même la preuve de
l'existence de
son référent
( ••• ) on voit dans
la nomination un
décrochage particulièrement aisé de
la réalité,,(2).
Pour revenir à
l'adjectif en rapport avec le nom,
à
propos de
la structure
A GREEN APPLE
(empruntée à O. Jespersen)
1ïj-sè;;;IiiaIrë-BËA:
"De la langue au discours",
Sorbonne,
198J
(2) R.
LAFONT :
Le travail et
la langue,
Flammarion,
Paris,
1978,. p.
14

une mRtaphore simpliste consiste à dire que GREEN "
On dira de façon tout aussi
laconique avec des termes pseu-
do-grammaticaux que
l'adjectif se rapporte au nom. Dans certai-
nes situations,
APPLE peut effectivement d~signer l'objet PO~frlE;
mais si l'on prend
"a green apple" comme le résultat d'une cer-
taine structuration,
i l est plus à propos de dire que~l'adjec~
t i f se rapporte à la nomination de
l'objet POMME, qu'il parle
de
l'opération de nomination.
A ce stade abstrait de la confrontation des deuxunit~s
(adjectif et nom),
à
ce stade de
la construction du sens,
on se
rend compte que l'adjectif ne sert pas seulement à
construire
le sens,
mais revient pour parler d~ la production de ce sen~.
là encore,
nous souscrivons entièrement aux thèses de R.
Lafont:
"Les praxèmes à
la disposition de
l'usager ( ••• )
sont les uns
comme VACHE, ROUE,
des praxèmes histo-
riquement pleins de sens
( ••• )
culturellement con-
tr8lés,
dans
lesquels nous restituons
le dynami~me
dialectique d'un programme.
Les autres comme GRAND,
TOURNE,
sont moins denses,
plus généraux;
ils nomment
en clair le dynamisme dialectigue.
Pour les uns
l'ip-
sum se produit en analyse du réel,
pour les autres,
non seulement i l analyse ce réel,
mais exhibe ce
procédé d'analyse,,(l)
(nous
soulignons)
Les observations de n.
Lafont· se passent de
cOmmentaire. On no-
tera simplement
(et provisoirement)
que
la métalinguisticité de
l'adjectif tranche nettement sur celle du nom.
( 1)
H.
LA VO NT :
0 P .
c i t ., p.
1 5 1

-
JJJ -
2)
L'extension de
l'adjectif et du nom
Il n'est pas besoin de chercher bien loin pour trouver les
limites de
la dofinition de
la catégorie adjectivale,
celle qui
se base sur les concepts philosophiques. Dès que l'on parle de
'qualités',
de
'dispositions',
d' 'états' . . .
l'on s'éloigne assu-
rément du domaine des faits
linguistiques.
'Qualités',
'disposi-
tions',
'états' •.• étant traités
linguistiquement sous forme de
nom
(e.g. méchanceté),
de verbe
(e.g. haïr)
ou d'adjectif.A y
regarder de plus. près,
ces catégories
logiques sont les: effets
résu l tant d'opérations
linguistiques ,
opérations -effectuées se lon
le ggût et
les moyens de chaque système linguistique.
o. Jespersen fait parfois des remarques très pertinentes
à
l'aide de sa théorie des
"rangs",
des remarques qui gagneraient
à
~tre davantage raffinées. Mais le métalangage de O. Jespersen
n'étant pas assez soupl~~ i l ne parvient pas à traduire ses in-
tuitions avec la précision requise;
rappelons sa notion de "su-
bordination"
:
"In any composite denomination of a
thing or person
( •.• ) we always find that there is one word of su-
preme importance to which others are
joined as su-
bordinates"(l) .
(nous soulignons)
En lisant O. Jespersen aujourd'hui,
on ne peut vraiment pas s'em-
p~cher
de
dire que son analyse a quelque-chose de naïf. Au
nom de quoi un mot peut-il ~tre dit plus "d.-mportant" que les au-
tres ?
Dans
la structure
(1)
O.
JESPF~RSEN : The Phi losophy of Gramrnar, George Allen &
Unwin Ltd,
London,
1924,
p.
62
.'-.~ .

-
JJ4 -
AN
EXTREMELY
HOT
l"EATnl~R
I;'EATHEH serait,
d'après
lui,
le mot
le plus important; viendrai t
ensui te
HOT
et fina lement
EXTHE~IELY.
O.
Jespersen devait
pr~ciser plus loin "important" par un terme non moins vague: le
nom
loJEATHER
serait plus
"spé cia li sé" que
HOT,
lui-même spé ci-
fié par
EXTREMELY.
Ce que nous reprocherons à O.
Jespersen,
c'est de n'avoir
pas déduit le statut des éléments sémantiques de leurs
propriétés
intrinsèques mais de
le déduire de la totalisation du produit
sémique,
c'est-à-dire au moment où les connexions sémiques sont
déjà effectuées.
Son analyse tente donc d'appr~hender les phéno-
mènes après les véritables opérations structurales.
En remontant
ces mécanismes structuraux,
l'on est
logiquement amené à
rejeter
la notion de subordination,
ce que nous avons déjà fait d'ail~
leurs.
L'on sait, depuis J-M.
Zemb,que ce que la tradition a
toujours appelé
"auxiliaire" constituait,
avant tout,
les prin-
cip_aux instruments du travai L structural. .-la Ls
le tout c'est de
voir si
l'on s'en tient au sens,
ou si l'on s'intéresse aussi
aux conditions de production de ce sens. Dans
le cas qui nous
intéresse à présent,
EXTREMELY
maximalise
le programme sémique
de
HOT
qui enrichit,
à
son tour, WEATHER.
Loin d'être le ter-
me subordonné,
EXTREHELY
est un re'gulateur du total sémique,
selon les visées discursives du moment •••
Restons dans le domaine qui nous intéresse,
à
savoir la
corrélation adjectif/nom. O.
Jespersen écrit que le nom est plus
"spécialisé" que l'adjectif et n'arrive pas à
préciser ce-qu'il
entend par là. Dans quelle mesure peut-on d~passer l'intuition de
,
.

- JJ5 -
o. Jespersen?
Le nom est appliqué
-
en principe -
à une entité spécifi-
que;
i l renvoie à un "référent précis". Quant à
l'adjectif,
l'effet impliqué dans
son sémantisme lui permet de s'appliquer
ou mieux,
d'~tre dit de plusieurs entit~s. En d'autres termes,
l'ad:~ctif et le nom peuvent ~tre opposés sur la base de l'éten-
due de
leurs domaines d'application.
Pour achever l'analyse es-
camotée de O.
Jespersen sur la séquence GREEN APPLE,
le program-
me de sens de APPLE s'applique à
l'entité unique qu'est
la pom-
·me;
son domaine d'applîcation ne dépasse pas
l'ensemble des pom-
mesj"'très réduit,
i l se limite à
ce type particulier de fruit.
Quant à GREEN,
i l peut ~tre dit d'un nombre illimité d'ob-
jets;
son domaine d'application est corrélativement plus étendu.
En un mot,
le nom ayant une extension plus réduite,
l'effet ré-
sultant
est cette impression de
"spécialisation" relevée intui-
tivement par O.
Jespersen. Et
l'adjectif ayant une extension
f
plus large,
cela donne tout naturellement
l'effet de non spécia-
lisation.
O.
Jespersen définit par ailleurs
les unités
linguistiques
selon leur degré d'abstraction;
ce qui est fort
juste mais théo-
riquement peu pertinent surtout s ' i l n'en fait
aucune exploita~
tion quant à
la structuration des Énoncés.
Nous y
reviendrons
pourtant très
souvent pour expliquer bien des phénomènes structu-
raux.
Attardons-nous sur la séquence qui nous sert d'illustration.
GREEN serait,
selon O.
Jespersen,
"plus abstrait" que APPLE.

encore,
son analyse se situe en aval de
la nature sémantique

-
JJ6 -
des deux unités d'autant plus qu'il n'explique pas
les modali-
tés du degrr d'abstraction.
Un terme est dit abstrait
lorsque son sens échappe à notre
compréhension immédiate,
lorsque nous n'arrivons pas à
établir
une référence Lrnmé-Li.a t e
entre l'objet
linguistique et
l'objet
extra-linguistique. Dans une métalangue bien à
lui,
G.
Guillaume
cerne de très près ce que nous
considérons être
la véritable na-
ture des éléments sémantiques
"adjectif" et
"nom". G.
Guillaume
les caractérise selon leur mode d'apport de signification:
"Il
~e substan~if] apporte avec lui une significa~
tion qui
se cherche un support
( ••• )
Or ce support
dans
le cas du suhstantif,
sera trouvé à
l'intérieur
de
la signification apportée par le substantif.
( ••• )
Autrement dit,
c'est dans le champ de ce qui est
apporté que sera trouvé
le support
( ••• ) Soit le
mot HO~~E. Immédiatement,
i l se détermine à
l'es-
pri~ s~us i'~~pèce d'un substantif. Cela parce que
le ~upport qu'il appelle à
soi comme apport ne sor-
tira pas de ce que connote
le mot HOHHE" •
(nous soulignons)
Dans un langage plus accessible,
cela signifie que pour saisir le
sens de
'HOMME',nous n'avons pas besoin de
l'attribuer à.un réfé-
rent autre que
l ' enti té HOi\\ll"lE •. Le mot
'HOMME'
se rapporte à une
entité spécifique;
sa compréhension est immédiate. Tel n'est pas
le cas de
l ' a d j e c t i f :
"L'adj ect:i,. f
est un mot qui a
son incidence non pas
pas en un ~upport compris exprèssément dans la
signification apportée
mais à
un
support
que
la. signification apportée ne comprend pas,,(l).
(1) G. GUILLAUME
Leçons de
linguistigue,
07/01/
1949,
série C.

-
JJ7 -
Autrement dit,
pour saisir le sens de
l'adjectif,
i l faut
attendre son actualisation dans
le discours,
attendre qu'il y
soit rapporté à un support nominal.
La compréhension de
la signi-
fication de
l'adjectif n'est donc pas aussi immédiate que celle
du nom;
sa compréhension,
c'est-à-dire l'interprétationJdiffère
en fonction de
la nature sémantique du support.
Notre interpré-
tation de GR~ND diffère selon que nous lui choisissons pour sup-
port
(grand)
HOMME
ou
(grand)
AIU3RE.
Cette "abstraction" de
l'adjectif dont parleO. Jespersen
s'explique par le fait
que celui-ci ne renvoie pas
(comme le
nom)
à une enti té spé-cifique mais peut être affirmé de plusieurs
autres.
Péchant certainement par excès,
certains linguistes ont ~
parlé d'une
"vacuité" référentielle de
l'adjectif. Mais ce qu'il
convient de bien voir,
rappelle M.Riegel qui dénonce cette pré-
tendue "vacuité" référentielle,
c'est "ll±nterprétation sémanti-
que des adjectifs assignés attributivement à une pluralité de
sujets non coréférents,,(1).
Dans le plan structural,cela correspond à une illimitation
du champ d'application de
l'adjectif. On retrouve d'ailleurs
chez G. Guillaume le caractère illimité de
la notion adjectiva-
le
:
"L'adjectif BEAU,
par exemple,
pourra se dire de
toute sorte d'objets sans
limitation d'espèces:
UN BEAU TAPIS, UN BEAU SOLEIL,
UN HOMME BEAU, UN
BEAU LIVRE, UN BEAU FEU••• " (2)
(nous soulignons)
(1) M~
RIEGEL :L'adjectif attribut,
PUF,
1985,
p.
71
(2) G.
GUILLAlIT'1E :
Leçons de linguistigue,
07/01/
19L~9, série C

-
338 -
La
notion d'illimitation évoque celle d'extension.
En logi-
que et depuis
longtemps en mathématiqu~,l'extensiond'un ensemble
correspond à
la totalité des éléments qu'il
contient.
On définit
un ensemble par extension en énumérant
les éléments,
en les dési-
gnant nommément0
si possible.
Quant à
la compréhension)- du point de vue
logico-mathéma-
tique,- elle correspond à
"toutes
les propriétés communes aux
constituants d'un ensemble"Cl). Un ensemble sera défini par com-
préhension si
l'on arrive à énoncer "les particularités communes
à tous
les éléments dudit ensemble,,(2).
Des deux concepts,
l'ex-
tension est celui qui nous sera
le plus utile.
En linguistique,
l'extension dG ne unité
se mesure par l'é-
tendue de son domaine d'application.
Pour reprendre
le métalanga-
ge de
la grammaire distributionnelle,
c'est
l'ensemble des diffé-
rents contextes où l'unité en question est sollicitée pour tradui-
re une réalité extra-linguistique dans
le plan linguistique.
Ce-
la a bien entendu rapport avec son mode de référenciation.
Repartons encore de
la structure analysée à moitié par
O.
Jespersen, A GREEN APPLE. Un élément sémantique comme APPLE
a
son domaine d'application limité à un nombre réduit de
(types
de)
pommes.
Cela revient à
l'ensemble des
contextes où i l est
fait appel à APPLE pour nommer l'objet
'pomme'
et
l'ensemble de
ces fruits
constitue un sous-ensemble de
l'ensemble
' f r u i t ' . Une
analyse componentielle inscrirait dans
le programme sémantique
(1 )1\\'1.
BOLL & J.
R8INHAHT : "Histoire de
la logique';,· Que sais-je?,
225,
PUF,
19l~6, p.
18
(2) B. PAULMIEH
"Intelligence artificielle et phonologie",
communication au CRELINGUA du
18/01/ 1986

-
JJ9 -
de APPLE un nombre très limité de sèmes,
à
l'image de
l'ptroites-
se de
l'extension de ce nom.
L'extension d'une unité
se ramène
finalement à sa structure sémique interne.
En comparaison à APPLE,
la structure sémique de FRUIT est
telle qu'il est sollicité dans un nombre bien plus élevé de con-
textes.
Son domaine d'application est tel que pour en:isoler le
référent,
au fond comprendre
le sens du mot FRUIT,
l'on a besoin
d'autres spécifications ou déterminations contexto-situationnel-
les.
Contexte et situation constituent ainsi une trame de filtra-
ge permettant d'isoler les sèmes nécessaires à
l'interprétation
de FRUIT dans
l'une de ses occurrences particulières.
Les paramè-
tres contextuels et situationnels restreignent
l'extension de la
...:~
notion nominale
'fruit'
pour en permettre
l'interprétation prag-
matique.
L'interprétation de FRUIT est moins immédiate parce que
son domaine d'application est vaste,
en un mot son extension est
quasi-illimitée
(en tout cas par rapport à APPLE).
J) L'extension de la notion adjectivale et
ses retombées métaopérationnelles
Que l'adjectif soit
"plus abstrait" que
le nom,
qu'il soit
"moins spécialisé" comme
le
laisse entendre O.
Jespersen,sig~ifie
tout simplement que l'adjectif a une extension plus
large que
celle du nom:
nom
domaine
/extension 1 C 0 M P R E H ENS l 0 NI domaine
d'application
des effets
»
Isémantiques
~-
-.,. Iprodui t s
structure
IE------------..!.......:.----_-.J
L . -_ _------::-
Il'
sémantique
X T ENS ION
!compréhenSion 1
adjectif

-
j.'.o
-
L'extension quasi-illimitée de
la notion adjectivale est
ce qui rapproche étroitement
l'adjectif des véritables instru-
ments de structuration (déterminants,
opérateurs de
la prpdication)
Un opérateur comme DE a une extension,
de
loin,
plus vaste que
celle de
l'adjectif; voilà pourquoi son interprétation sémantique
est plus difficile et
l'on sait qu'il est susceptible des effets
sémantiques
(i.e.
effets de sens)
les plus variés;
ailleurs,
on
parlera de désémantisation
domaine
domaine
d'application
des effets
éga l i té, a p-
E X T ENS ION
IcompréhenSion
partenance,
domaine des
inclusion,
structurations
localisa-
tion,
exis··
tence •••
'"
Le
schéma montre clairement q~'une
analyse du statut de BE
qui se situerait en aval de
la chronologie
linguistique irait
droit sur la recherche des interprétations,
c'est-à-dire du côté
des effets produits,
brûlant
de
la même manière,
l'étape
la plus
importante,
l'étape conditionnante.
Nous aurons d'ailleurs l'occa-
sion de montrer,comme dans
la
GLA et dans
le cadre des
construc~
tions dites
" attributives", que pour déterminer le statut de BE,
i l faut prendre en compte l'extrême extension de son domaine
d'application.
Et
tenir compte de cette étendue de son domaine
d'application revient,
du point de vue épistémologique,
à
recon-
naître que sa valeur est,
avant tout,
structurale.

- J41
-
L'étude des unités
linguistiques dont
l'extension est très
large
(e.g.
déterminants)
doit
s'orienter du côté de
la structu-
ration et non pas du côté des effets sémantiques produits.
L'ad-
jectif dont
l'extension prime de
loin sur celle du nom ne peut
bénéficier d'une analyse exhaustive et cohérente que si celle-ci
s'oriente du côté des
structurations.
C.
Delmas fait d'ailleurs
remarquer que
l'adjectif est
"éminemment
relationnel".
Par rapport
au nom,
l'adjectif est en rapport direct avec
la structuration,
le domaine des opérations abstraites.
La dichotomie traditionnelle entre domaine
lexical et domai-
ne grammatical acquiert une pertinence théorique une fois que
l'on
a
compris qu.'un élément comme l'adjectif dont
le contenu sémanti-
que est moindre se situe du côté de
la grammaire.
L'adjectif dont
l'extension est très
large
se rapproche, nous
l'avons dit,
des
éléments de structuration situés,
eux,
non pas du côté du
lexique,
mais en plein dans
le domaine grammatical:
l'adjectif serait une
catégorie "plus grammaticalü" qtie
le nom.
o. Jespersen a bien vu l'articulation
LEXIQUE /
GRAHHAIRE.
Nous l'avons déjà souligné
lors de
la description du nom en senou-
fo,
chapitre II
:
"Grammar deals with the general facts
of language,
and
lexicology with special facts.
The fact
that
CAT denotes that pari:icular animal is a
special
fact which concerns that word alone, but
the for-
mation of the plural by adding
'S'
is a
general
fact because i t
concerns a
great many 9ther words
as well,,(.l).
(1)
O.
JESPERSEN:
The Philosophy of Grammar,
George Allen &
Unwin Ltd,
London,
192L~, p. J2

Le schéma s'applique tout aussi bien aux éléments sémantiques,
en particulier au nom et à
l'adjectif.
Le nom ne renvoie qu'à
un seul référent;
la nomination de
la notion
'pomme'
en anglais,
ne concerne,
en principe que
le mot APPLE.
C'est un "un fait de
langage particulier",
propre à
l'organisation du
lexique anglais.
Alors que GREEN dont
l'application peut être généralisée à un
nombre illimité d'entités représente un "fait de grammaire géné-
ral ". Mais plut3t que de dire que
l'adjectif est
"plus grammati-
cal" que
le nom,
disons de façon moins cariéatura"IRet tout aussi
juste que
l'adjectif dispose de
potentialités métaopérationnelles
que
le nom est vraiment
loin d'avoir.
Cette longue introduction à
la structuration adjectivale
nous aura permis d'asseoir
les principes de base nécessaires à
la
description du fonctionnement de
l'adjectif.
L'on retiendra,
en
substance et pour le moment,que.
l'adjectif se rapporte en réali-
té à la nomination,
c'est-à-dire,
à un~ opération abstraite.
Cela
éclaire de mani~re intéressante un certain nombre de phéno-
m~nes au bénéfice de la linguistique générale.
Dans
la structuration adjectivale par exemple,
l'anglais
fai t
preuve d'une méta linguistici té plus affirmée qUE!
le français.
L'adjectif,
se plaît-on à dire,
ne s'accorde pas en anglais.
Le
fait
reste,
bien sûr,
inexpliqué;
pire,
i l n'est même pas envisa-

comme un probl~me à soumettre à
la linguistique générale.
Bon nombre de phénom~nes resteront à
jamais inexpliqués tant quils
ne seront pas approchés par le canal des opérations énonciatives.
Nous avons vu plus haut que le nom sert parfois à désigner une
entité dans l'extra-linguistique et que,
de façon tr~s générale,

-
J4J -
l'emploi d'un nom est une opération de nomination (in presentia
ou in absentia).
L'adjectif est appliqué à
ce nom en tant qu'il
est son support:
c'est que revèle
l'observation banale des for-
mes;
en fait,
i l se rapporte à
l'opération de nomination et non
pas à une réalité du monde concret.
I l est donc tout à
fait nor-
mal que,
se rapportant à une abstraction,
l'adjectif en anglais
échappe à la caractérisation du nombre et du genre par trop tri-
butaires du concret.
Cela est d'autant plus
logique qu'uneabstrac-
tion comme l'opération de nomination ne
se
laisse pas dénombrer
comme les entités discrètes.
L'invariabilité de l'adjectif en anglais qui pourrait être,
à tort,
considérée comme une défaillance est,
au contraire, une
,
'ii';;-•.
preuve ta:ngible~demétalingUisticité.
Nous r~joignons par ce biais les positions deH.Adamczewski
dans un domaine différent
(en apparence)
du problème que pose
l'invariabilité de l'adjectif en anglais. H. Adamczewski repous-
se vigoureusement avec d'autres
linguistes le terme de "défectif"
affecté aux mod~ux du système linguistique anglais. Mais l'auteur
de La grammaire linguistigue de
l'anglais va plus loin puisqu'il
fournit une explication métaopérationnelle à
l'invariabilité de
ëette "espèce de verbes"
:
"L'absence du
'S' manifeste de façon iconique l'ab-
sence de relation directe entre
le sujet grammati-
cal et le modal.
La morphologie marque ainsi de fa-
çon fort heureuse la dépendance des modaux de l'énon-
ciateur seul"( 1)
(1) IL AD.Al'1CZE1.,rSKI
GLA ,
1si 82, p.
1 4 J

En bref,
si
les modaux se refusent à
l'accord de personne,
c'est
parce qu'ils n'ont rien à voir avec le sujet grammatical; ils
servent seulement à moduler l'assertion ou à moduler la
relation
Sujet-Prédicat.
En un mot,
les modaux
se rapportent à une opéra-
tion abstraite.
Dire qu'ils sont sous
la dépendance de
l'énoncia-
teur,
c'est dire qû'ils se rapportent à
l'agent des structurations,
à
l'opération-même de mise en relation.
Nous retrouvons ainsi
la
similitude opérationnelle qui explique de manière cohérente l'ab-
sence d'accord entre
l'adjectif et le nom
en anglais(l).
Mais revenons à nos adjectifs.
Que l'adjectif s6it une abs-
traction même explique cet autre fait de
linguistique générale
selon lequel la catégorie adjectivale est
loin d'exister dans
tous
les systèmes'linguistiques. Nous pensons en-particulier au
senoufo.
L'adjectif n'existe pas en senoufo en tant
que catégorie
grammaticale,
en tant que forme.
Si les divers~s notions réparties
en classes grammaticales correspondent grosso modo au découpage
du réel,
l'on doit s'attendre à
ce que des systèmes
linguistiques
différents opèrent des découpages différents.
On doit aussi s'at-
tendre à ce que l'adjectif qui est une abstraction ne trouve pas
partout une expression linguistique en bonne et due forme.
Mais
en même temps,
comme les langues ont une constitution telle qu'
elles peuvent exprimer toutes
les abstractions et a
fortiori
tous
les effets
sémantiques,
une
langue comme
le senoufo re-struc-
ture d'autres éléments sémantiques
(verbes,
noms ••• )
-
selon les
visées discursives -
pour obtenir les effets sémantiques désirés.
(1)
L'adjectif s'accorde au nom en français;
les verbes à carac-
tère modal aussi
(e.g.
les affaires risquent de tourner mal). Mais
i l faut bien voir que RISQUER ne s; rapporte pas à
LES AFFAIRES
mais à
la relation
'les affaires /
tourner mal~
Le français
est particulièrement friand d'accords;
peut-être
faut-il mettre cette virtualité sur le compte de son origine latin

L'essentiel à
retenir de toutes ces observations d'ordre
contrastif est que
l'adjectif est bien une abstraction.
Le senou-
fo,
lorsque le besoin se fait
sentir,
structure dans
la foulée
d'autres unités sémantiques pour obtenir une notion dont on dira
qu'elle est de nature adjectivale dans
les
langues où cette caté-
gorie existe effectivement;
et qui dit structuration dit abstrac-
tion.
En d'autres termes,
le senoufo se tournera vers des méta-
structures,
comme nous
l'avons déjà remarqué
(chapitre II),
et
comme nous aurons l'occasion de
le préciser dans quelques instants.
L'approche métaopérationnelle du statut du nom et de l'ad-
jectif sur la base de
leurs extensions permet de mieux préciser
ce qui est connu comme la "substantivation" ou "1'adjectivation".
Là encore,
les problèmes n'ont pas véritablement été posés en
termes d'opérations. En effet,
l'on a
en mémoire
les exercices
de substitution soumis aux écoliers des
cours préparatoire et élé-
mentaire. Ils consistaient notamment à
substituer "une locution
nominale" à
l'adjectif correspondant. Nous
en p~oposons une illus-
tration :
••• un travail qui procure DU PLAISIR,
DE L'AGREMENT est
un travail AGREABLE,
s ' i l demande une dépense d'énergie,
beaucoup DE PEINE,
i l est PENIBLE ••• ,,(l)
L'enseignement télévisuel
en Côte-d'Ivoire
(maintenant
'supprimé
,
heureusement)
proposait aux écoliers de remplacer mé-
caniguement
(sic)
la "locution nominale" par un adjectif
"Comment naissent
les adjectifs" dans Avec
les
mots de chaque ,jours,
Langage CH2,
Librairie Ha-
chette,
Paris,
1970,
p.
100.
Na.nu e l
d uc Co llège
Jean Mermoz,
Cocody,
Côte-d'Ivoire.

-
J46 -
e.g.
la vie d'Abidjan
~
la vie abidjannaise
• Le Président du Gabon
~
le Président •••••••
• la capitale du Cameroun
~
la capi ta le
••••••
Ces exercices structuraux s'inspirent des présupposés théoriques
de
la grammaire structurale dont on connaît
l'impuissance à expli-
quer les faits
linguistiques compte tenu de sa perception plutôt
approximative de la Relation. Ici,
le danger
encore qu'il soit
moindre -
est d'amener l'élève à établir une équivalence directe
entre ABIDJANNAIS et D'ABIDJAN,
entre .~ GABONAIS et DU GABON et
entre CAMEROUNAIS et DU CAMEROUN ••• Bien entendu,
on ne disait pas
en quoi consistait cette équi~~l_~~_L__ la théorie structura le qui
, /
ne
s'embarrassait
pas
de
c~ genre de détails ne pouvait pas
se rendre compte que s ' i l y avait équivalence,
c'est seulement
au niveau des effets Etémantiques résultants"et
l'on comprend pour-
.'
quoi:
la notion d'opération
était tout simplement ignorée.
La grammaire transformationnelle n'a pas,
elle non plus,
d'explication valable à proposer au problème de
l'adjectivation.
Face à
ce phénomène~ les générativistes ont hésité entre considé-
rer
que
ces adjectifs qu'on appelle aussi
"relationnels" sont
directement fournis
dès
la structure ou dérivés par transforma-
tion.
La dernière alternative donnait alors
l'occasion de se lan-
cer dans les transformations
les plus ad hoc •..
Si
la différence fondamentale entre l'adjectif et
le nom
se ramène à une différence de degré d'extension (l'adjectif
ayant une extension plus large que
,elle du nom),
l'on comDrendra~
(1)
Exposé C2 Linguistique:
"Présupposés théoriques et applica-
tions pédagogiques ll Université d'Abidjan,
Avril 1982 •
. -: ~;::~~. .;: ...-. ~...., .

1'"
b±.
en se référant à
l'énonciateur,que l'adjectivation d'un nom con-
siste essentiellement à
en augmenter l'extension notionnelle,
c'est-à-dire,
augmenter le domaine d'application du nom à adjec-
tiver,
ou encore,
faire en sorte que son champ dstributionnel
soit plus vaste. Ainsi ABIDJAN,
GABON,
Cfu~EROUN avaient des exten-
sions très restreintes au départ puisque
leurs domaines d'appli-
cation ne comprenaiœnt que des points géographiques uniques.
Les
ajectifs ABIDJANAIS
,
GABONAIS,-
CANEROUNAIS sont d'extension
plus
large que
les formes nominales correspondantes.
L'extension
-du d orna i rre d'application, :-rappelons-le;
Se mesure par le nombre
de contextes où une unité peut occurrer et
les notions adjectiva-
les peuvent être appliquées à un nombre illimité de noms.
L'adjec-
tivation d'une notion nominale permet,
en définitive, ae la ren-
dre incidente à des supports nominaux,
n~importe lesquels, pour-
vu que pragmatiquement,
cela fasse du sens.
D'une manière généra-
le
l'adjectivation permet de faire d'un nom un élé ment ~ontle
propre sera d'être mis en relation.
Notre analyse
justifie du coup le fait que ,dans
les exerci-
ces structuraux les notions adjectivales soient équivalentes,
non
pas à ABIDJAN,
GABON, CAMEROUN,
mais plutôt à Q'Abidjan,
DU Gabon,
DU Cameroun. Dans la "locution nominale",
la relation est seule-
ment exprimée sous une forme plus analytique.
Ce doit certainement
être
l'étape relationnelle origine
(cf.
chapitre III); dans
l'éta-
pe relationnelle d'après,
les opérateurs -AIS prennent
le relai~:
nous avons alors avancé d'un pas vers
le domaine grammatical ou
méta-linguistique.
L'on retiendra pour finir
qu'un op~rateur .
comme _AIS(l)
est un indice méta-linguistique signifiant d'une
(1)
De l,WOLLEN et de "WOLLY
le second est d'extension plus large que
le premier à
l'image de ses context9s d'occurrence plus nombreux.
(voir la suite à
la page suivante)

part,
l'augmentation de
l'extension de
la notion nominale de dé-
part et,
de
l'autre,
l'existence d'une relation ne serait-ce que
virtuellement.
Après toutes ces explication~il n'est plus vraiment néces-
saire de s'attarder sur la substantivation de
l'adjectif. On
l'aura deviné,
i l s'agit d'effectuer l'opération en sens inverse:
réduire,
selon le type de relation à
construire,
restreindre
l'extension quasi-illimitée de
la notion adjectivale. Mais à
la
différence de l'opération d'adjectivation effectuée à
l'aide de
-AIS,
la substantivation s'effectue avec des préfixes;
des pré-
fixes non liés en anglais et français,
des
suffixes
liés en senou-
fo.
On ne perdra pas de vue que,
dans un cas comme dans
l'autre -
l'adjectivation d'un substantif,
la substantivation d'un adjectif
-
les deux opérations s'étalent tout au long de
la chronologie. lin-
guistique puisqu'elles impliquent un changement de
statut et l'on
sait que tout
changement de
statut suppose le parcours d'une dis-
tance abstraite d'une étape
relationnelle origine à une étape re-
tionnelle seconde
(Phases'J: ---;. II).
En résumé,on retiendra qu'un adjectif n'est rien d'autre
qu'un nom dont
l'extension ne souffre d'aucune restriction et ~
qu'un nom est adjectif à qui
l'~nonciateur a bloqué l'extension
pour des raisons métaopérationnelles.
'\\JOOLLY peut
8.PParat:re là où VOOLLEN
ap pa r-a
t
a lors que l ' inver-
Ï
se n'est pas forcément vrai. \\';OOLY
a
donc des propriétés structu-
rales plus affirmées,
d'où sa tendance à
effectuer des métaopéra-
tions plus complexes et à
~tre responsable d'effets sémantiques
(e.g.
effets de modalisation ••• ).
I l faut peut-~tre s'~n remettre
à
la morphologie pour expliquer cet état de fait:\\<lOOLLEN a quel-
ques affinités avec
le participe passé;WOOLLY cherche quelque pa-
renté du côté de l'adverbe dont on sait qu'il Se rapporte plutôt
à
l'événemerit qu'est
la structuration d'une relation •••

TI) LA STH.UCTUH.ATION ADJECTIVALE DANS LE DOMAINE prn:nICATJ~NNi~L
1)
L'attribut du sujet:
mise en relation de deux notions
A la suite des grammairiens de Port-Royal,
les transforma-
ti6nnistes considèrent que l'épithète est dérivée de
la construc-
tion attributive.
La structure profonde était alors aménagée de
manière à
contenir une proposition relative avec pour verbe,
la
copule ETHE.
Citons un énoncé de Port-Royal
(1)
Dieu INVISIBLE a
créé le monde VISIBLE
I l est dérivé de
, ,-
. _ (1 ,) Dieu
(qui EST)
invisible a
cree
le monde
(qui EST)
vi-
sible.
Poursuivant
leurs investigations,
les
transformationnistes
6nt vite fait desenrendre compte que toutes
les épithètes
n'étaient pas dérivables à partir de constructions attributives.
Comme avec
les adjectifs dits
"relationnels" ils
se trouvaient
encore devant une alternative:
l~ solütion de
la structure pro-
fonde
(considérer que les cas difficiles d'épithètes sont fournis
directement par la langue),
ou procéder par transformations.
Les
deux solutions sont aussi mau~aises l'une que l'autre;
elles ont
un point commun:
celui d'être ad hoc. En effet,
ceux des transfor-
mationnistes qui avaient opté pour la
so lution de
la structure
profonde
n'étaient pas à même de
justifier
pourquoi-ils déri-
vaient certaines épithètes et pas d'autres;
ceux qui prônaient
la voix transformationnelle -
pour garder l'esprit des inè~itu-
tions -
se mettaient en infraction avec
l'esprit du
"meaning
preserVing ll ( l ) . L'adjectif constituait décidément un problème pour
(1)
Pour atteindre la structure d'arrivée SACRE BROUILLARD,
a
MERE CHILD,
une transformation qui passerait par la structure pro-
fonde
"le 1;>rouillard (qui EST )sacré",
"the ;child (who IS)
mere"
ne pourrait plus prétendre être "meaning preserving".

-
350 -
la théorie transformationnelle.
Curieusement,
N.
Chomsky n'a pas
été interpe\\\\é très souvent sur la question; du moins pas avec la
même insistance que d'autres problèmes
(modalités,
détermination ••.
Sans doute parce que,
ceux qui voulaient bien le faire n'avaient
pas encore de solution de rechange;
ce n'est,
en tout cas,
pas
parce que
le problème de
l'adjectif était considéré
comme résolu.
Rien que
la position des
épithètgs en français,
par exemple •••
N.
Chomsky a
tout simplement passé sous
silence
le problè-
me de
la position de
l'adjecti~ sur la chaîne linéaire (peut-être
un anachronisme à
cette époque-là!). Mais comme excuse,
N.Chomsky
pouvait toujours répondre que son modèle,
après tout,
a été con-
çu pour l'anglais et que le système linguistique anglais a opté
pour une seule position pour ses adjectifs,
l'antéposition,
Re-
marquons en passant que l'antéposition de
l'adjectif en anglais
n'est qu'une tendance.
De toute façon,
nous verrons
(chapitre V)
que
le problème de
la position de l'adjectif,
partout 00 i l se
pose,
ne peut être résolu que dans
le cadre d'une grammaire qui
prend en compte
les opérations énonciatives. Au moins.
Or la gram-
maire de N.
Chomsky n'a pas pour objet des énoncés
"naturels"
mais des phraseJ "bien faites".
Bref,
la grammaire transformation-
nelle n'a pas
les moyens théoriques de poser le problème de
la
place de
l'adjectif,
et moins encore de
le résoudre.
C'est pour
quoi,
D. Bolinger est très sceptique vis-à-vis des probables in-
novations apportées par le G.T.
aux théories traditionnelles
"For i t s attractiveness generativists have been
a bit rush in adopting without debate the
Port-Royal description of attributive adjectives,,(l)
(1)
D. BOq:NGEH :
"Adjectives in English: attribution and predi-
cation" in Lingua,
18,
1974,
pp.
1-2

-
J51
Et pour les ~nonc~s
a) The only RIVER NAVIGABLE is to the north
(2 )
b) The only NAVIGABLE RIVER is
to the north
L'innovation apportée par D. Bolinger a
consist~ à trouver deux
structures profondes à
cette paire d'~nonc~s, deux structures
profondes diff~rentes parce que
l'une comporte
BE
.
temporalre
et
l'autre
-BEnon-temporaire
I l explique alors qu' ~en(a) le fleuve est navigable occasionne lle-
ment et que,
en (b)
le fleuve a
pour caract~ristique d'être navi-
gable. On se rend aussitôt compte que D. Bolinger n'a pas r~ussi
à se d~faire des pratiques atomisantes: à en croire ce linguiste,
i l Y aurait deux BE en anglais
S ' i l Y a
temporalit~,
elle
n'est pas seulement
li~e à l'~tat pr~sent des cours d'eau. Il
s'agit aussi et surtout d'une temporalit~ de type m~ta-linguisti-
que:
les deux ~nonc~s
retracent
la successivité des ~tapes struc-
turales dans
la chronologie linguistique
:
l river (!) navigable
navigable
([)
river.
Nous y
reviendrons plus en d é t a i l .
Pour le moment,
restons dans
le cadre de
la construction attributive.
La plupart des ~tudes
considèrent que
l'~pithète a pour origine la construction attri-
butive mais elle5ne font pas explicitement cas de
la ;comptabilité

-
'352
-
que tient
l'énonciateur pendant qu'il fait
ses mises en relation.
Cela laisse penser que
les affirmations selon lesquelles
l ' a t t r i -
but est premier par rapport à
l'épithète
ne
sont que
de
sim-
pies
intuitions.
L. Tesnière chez qui
le concept de relation
a quelque importance disait à propos des deux structures:
"L'opposition qui existe entre l'antécédence et
la
subséquence est aussi parallèle à
celle qUi existe
entre l'adjectif épithète et
l'adjectif attribut,,(l).
L'approche métaopérationnelle,
preuve à
l'appui,
conçoit égale-
ment que
la construction attributive précède
la construction épi-
",
,
thète dans
la chronologique 'linguistique;
c'est
ce que revele le
fonctiQnnement de l'adjectif en allemand:
(Ja)
Der Hund ist gross~
(le chien est grand)
(Jb) Der gross~
Hund
(le grand chien)
(4a)
Die Jacke ist
schon~
(la veste est ~9ire)
(4b) Die schone
Jac~e
(la veste noire)
En (Ja)
et
(4a)
on assiste à
la mise en place des notions;
ces
notions restent autonomes,
c'est-à-dire que les notions adjecti-
vales
jouissent d'un maximum d'extension parce qu'elles n'ont pas
encore praversé plusieurs trames de structuration.
En (Jb)
et
(4b)
l'accord opère et i l est à
interpréter com-
me une altération des notions adjectivales;
celles-ci ont perdu
leur état lexical initial après que
l'énonciateur ait effectué
son travail structural. Bref,
la connexion sémique est acquise
et,
l'allemand,
plus mé~alinguistique sur la question, tient à
dire clairement qu'il y
a
eu effectivement relation.
( 1)
L •. TESNIERE :
Eléments de syntaxe structura le,
2 ème
d i, tion,
é
Librairie ~linck~iedk, Paris,
1976,
p.
155

-
J5'3 -
Après
ce bref aperçu du fonctionnement de
l'adjectif en
allemand,
nous sommes maintenant en droit de dire que
l'~pithète
est en Phase II par rapport à
l'attribut.
2)
Nature méta-linguistique de
la construction attributive
I l serait difficile de rendre compte de
la construction at-
tributive tout en ignorant le principal artisan de
la mise en re-
-l~tion, l~opérateur BE. De nombreuses études ont d~jà ét~ effec-
tuées sur BE(l)
et par le biais du fonctionnement de
l'adjectif,
nous croyons pouvoir apporter une preuve supplémentaire sur le
rôle essentiellement structural
de cet opérateur.
On ne devrait parler de
la "valeur centrale" d'un opérateur
que si l'on retrouve des similitudes
(méta)opérationnelles entre
des domaines apparemment différents où cet opérateur apparaît.
Nous relevons une telle similitude entre la construction attribu-
tive d'une part,
et les constructions passives et en BE+ING de
l'autre. H. Adamczewski a
longuement montré que ce qui oppose
la structure complexe en BE+ING à
la structure simple correspon-
dante n'est -pa s une question de durée,
mais plutôt
le décalage
des étapes relationnelles,
doublé
d'une re-orientation
de la relation prédicative,:
(5) Every time she chucks anything dirty in it she is
insultING the old republic.
(emprunté à BE+ING)
(1)
Nous renvoyons en part icu lier à
ce Iles de C.
De Lma s
sur F~TRE
en anglais.,
en français et en espagno l
(voir bib liographie) •

De
" ••. she chu c k s . . .
a
"
she IS insultING . . . " nous assis-
tons à un changement de statut de
la relation prédicative;
ce
changement va de pair avec
le changement de statut des termes de
la relation.
D'une étape relationnelle à
l'autre,
i l Y a eu désa-
gentivation de SHE qui devient ainsi simple sujet grammatical et
cela ne tient pas seulement à
la nature sémantique de INSULT :
"Le sujet grammatical d'un énoncé
en BE+ING ne peut
en aucun cas ~tre agent pour la raison fort simple
qu'un tel énoncé est dominé par l'énonciateur qui
met en relief l'opération métalinguistique de pré":
dication,,(l)
Dire qu'un énoncé est dominé par l'énonciateur revient à
dire que cet énonciateur cesse de décrire l'action menée par quel-
que agent et qu'au contraire,
i l s'approprie la relation
prédi-
tive à des fins discursives.
Dans
la seconde partie de
l'8noncé
(5) SHE devient "objet du discours" en ce sens que l'énonciateur
centre son attention et celle des allocutaires sur SHE;
en d'autres
t e rme e ,
c "e s r de SHE qu' i l est surtout question dans
la situation
présente. Une autre série d'énoncés nous permettra de mieux voir
cette "mise en vedette" du sujet grammatical
(6)
At Little Paddocks also,
breakfast was in progress
( . . . ) Miss Blacklock,
a woman of sixt Y old,
the owner of
the house,
was at the head of the table.
She was reading
Lane Marcott in the Dayly Mail.
Julia Simons was
languishly
glancing through the telegraph.
Patrick Simons was checking
up on the crosswords in the Time. Miss Dora Nunner was gi-
ving her attention wholeheartly to the
local newspaper.
(emprunté à GLA)
( 1) H. ADAlvlCZE\\olSKI
G LA ,
1982,
p.
6 1

-
J55 -
La parenté métaopérationnelle entre
la prédication attributive
et
les énoncés en BE+ING n'est pas
seulement structurale. Elle
est à
situer aussi du côté du résultat sémantico-syntaxique; dans
l'énoncé binaire en BE+ING,
dit H. Adamczewski,
BE sert à ATTRI-
BUER le prédicat nominalisé au sujet grammatical. Dans
l'énoncé
(6),
comme le dit si bien l'auteur de la GLA,
"le narrateur pas-
se en revue ses personnages et
leur applique les prédicats no-
minalisés qui
les caractérisent au moment choisi comme référen-
ce,,(l).
En d'autres termes,
le prédicat nominalisé fonctionne com-
me un ATTRIBUT DU SUJET,
mais un sujet désagentivé et du point
de vue sémantique,
sert à
le décrire.
Le parallélisme métaopérationnel que BE crée entre le ver-
be nominalisé et l'adjectif attribut donne ainsi une belle occa-
sion à
l'énonciateur de
les faire
co-exister dans une même struc-
ture.
Programmes sémiques adjectival et verba\\ont alors pour rô-
le de faire ressortir en la décrivant,
une caractéristique du su-
jet grammatical,
objet de
l'énonciation,:
( 7) l{hen he went in he was swaggerinK._~!'!<:!__'proud: you unde r-
stand?
When he came out he was a different man. He
look-
ed i l l :
he was very white
( ••• )
(HISVEN -
77)
La même
observation peut être faite de
la structure passive dans
laquelle BE rapporte un programme sémique verbal comme attribut
à un sujet grammatical. En tant qu'opération énonciative,
le pas-
sif doit aussi être interprété
comme une description du sujet
grammatical;
l'énonciateur re-oriente la relation prédicative
( 1)
G LA ,
19 82,
p. 65

-
356 -
vers
l'objet syntaxico-sémantique,
affecté
jadis par l'action
exercée par l'agent de
la structure de départ.
L'objet affecté
devient dans
l'étape structurale du passif,
l'objet du discours.:
(8)
Britain's weather achieved new levels of perversity
yesterday
( ••• ) The Hihgland ski Pentathlon was
concealed.
Racing was abandoned at Newcastle and Beverly. All roads
across Pennines were closed by early afternoon.
(emprunté à GLA)
Les visées discursives de
(7) et de (8) sont sensiblement identi-
ques.
Ici
l'énonciateur s'arrête sur chaque élément pour en relever
une caractéristique particulière,
à ua moment donné-
de
l'énoncia-
tion.
L'opération a
consisté en fait à établir une relation de
compatibilité entre les sujets grammaticaux et
les programmes se-
miques verbaux.
J)
Le statut des membres de
la relation de compatibilité
Dans l·'énoncé au passif ou l'énoncé en BE+ING,
la notion
verbale ne sert plus à
relater une quelconque action;
les program-
mes sémiques
verbaux re-structurés deviennent des objets linguis-
tiques aux mains de
l'énonciateur.
Celui-ci s'en sert comme se-
cond terme d'une relation binaire dans
laquelle le lien prédica-
tionnel BE tente d'établir une certaine compatibilité
entre les
deux membres. Mais
l'on aurait tort de considérer que V-ED et
V-ING reviennent au même sous prétexte que,
dans
la relation
d'attribution,
les deux types de programmes sémiques verbaux,

-
357 -
tous re-structurés,
dpcrivent un sujet grammatical. On ne doit
pas perdre de vu e que
le concept d' "a t tribut"
est à
la limite
entre la métaopération et
les réalités d'ordre purement sémanti-
ques,
c'est-à-dire,
les effets résultant2d'un conditionnement
structural.
L'intégration des participes dans
la construction attribu-
tive donne souvent
l'occasion à
certains linguistes de parler
d'un "emploi adjectival des participes".
O.
Jespersen s'insurge
contre cette légère conception des faits
linguistiques qui trahit,
i l est vrai, une tendance à
confondre deux domaines,
certes liés,
mais décalés:
ort 'passe allègrement de la catégorie à la fonction
syntaxique(1) .
A Y regarder de plus près,
les participes
(pré-
sent et passé)
en fonction attributive
se répartissent entre les
deux catégories habituellement sollicitées pour mener à bien
la
structuration attributive,
à
savoir l'adjectif et le nom.
Nous
venons de montrer,
à la suite de H. Adamczewski, qu'en anglais,
~ING nominalise un prédicat mis en rapport avec son sujet par
l'intermédiaire de BE. Autrement dit,
i l Y aurait un rapport
structurel à relever entre :
My
father
IS
a baTIk clerk
et
She
II'AS
reading Lane Marcott in the Da.y Ly , .
Dans un cas comme dans
l'autre,
c'est un élément de nature nomi-
nale qui assure la fonction attribut
(1)
Cela nous rappelle une discussion avec notre ami physicien
et informaticien M.
Konaté.
Nous
lui faisions remarquer que la
différence entre NO.HBRE et CHIF[i'RE est
la même que celle qui exis-
te entre SUJET,
ATTRIBUT,
COMPU";MENT D'OBJET •••
et NOM
et ADJ~C­
TIF.
Le chiffre est une c~tégorie de signe;
le nombre est un chif-
fre
en situation de structuration.

::.: ::::;
.:' .' ::::: '.; ~. :;:
,'.",'
.
. :. ... ,.
.'.:->:-: ,', ::~:::;::->. '
- 358-
Sujet
DE
Att.
N
et
N
=
substantif
ou
N
V-ING
Comment
justifier qu'un prédicat
en -ING soit une notion totale,
métalinguistiquement équivalènte à un nom dépourvu de toute mar-
que de restriction
d'extension
(absence de d~terminant en surfa-
ce)
?
La forme
en V-ING n'est-elle pas
le résultat d'un travail
de re-structuration sur une notion verbale?
et
la
re-structura-
tion n'entraîne-t-elle pas un changement de statut 7 ou au moins
une altération de
la notion ?
Le prédicat -
quelle que soit son expansion -
étant devenu
par l~opération de nominalisation un signifiant nominal,
i l re~
tombe dans
l'illimitation de
l'extension des noms dépourvus de
toute marque de détermination.
L'énonciateur peut alors y effec-
tuer toutes
les opérations susceptibles d'être effectuées sur
une notion nominale authentique (1 ). En d"autres termes,
pour fonc-
tionner comme un attribut,l'élément qui a
retrouvé
son statut d~
nominal cl o L t
jouir de toute son e x t e n s Lo n r', aucune r-é du c t i.o.n ne doit
être portée sur èelle-ci.
C'est d'ailleurs à
cette condition que
le substantif assure
la fonction d'attribut
en français
Att.
Hon père EST
~
employé de banque
??
Att.
l'Ion père EST un
employé de banque
** Att.
She HAS
a/the reading Lane :-larcot t
in the D ••••
Bref,un élé~ent nominal peut assurer la fonction d'at~ribut
à
condition que
celui-ci bénéficie,au moment'de
la structuration,
(1)
De
l'opération de réduction minimale ou nulle:
"
r/J
Digging Ghana ,out of the red"
(titre d'article)
à
la réduction substantielle de
son extension:
THE
shooting of the hunters
(exemple favorit de
la G.G.T.)
De
l'étape "(to) dig Ghana out of the red"
à
celle de "digging
Ghana out of the red" ,
l'énonciateur aura effectué
le même parcours
métaopérationnel que dans
le passage de HAN ~ ?-ŒN. A cours de re-
structurations,
i l retrouve
l'extensivité de
la notion de départ.

..... .
............
:>:,:;.:;:;~;::~;.:»>:. ',
'. >....
-,» . : • • • • ' • • • • •
: : : : : : - ' .
- J59 -
de toute
l'~tendue de son extension.
L'~l~ment ou plus pr~cis~-
ment
le participe présent
(V-ING)
qui,
en anglais,
est un(e)
nom(inalisation)
peut
assurer
cette fonction si aucune coupe
n'est opérée sur son extension.
Le participe présent est ainsi
soumis aux même contraintes que
les noms authentiques et c'est
en cela que
l'on peut affirmer qu'il ~ bien desaffinités en commun
avec
le substantif en fonction d'attribut.
Quant au participe passé,
i l a
plus à voir avec
la catégo-
rie adjectivale.
En effet,
si
l'on peut affecter un déterminant
à V-ING (her readING Lane Marcott ••• ),
on ne peut
l'envi'sager
que très difficilement avec
le participe passé
(V-ED);
comme àvec
l'adjectif,
le participe passé est difficilement dotable d'un
déterminant
Sujet
BE
participes
1
passe
pr~sent
(V-ING)
~------?
ADJ
Mais toujours dans
la construction attributive,
les parti-
cipes et l'adjectif s'opposent par leurs statuts
respectifs en
regard à
leur localisation dans
la chronologie linguistique.
L'opérateur -ED suffixé à
la forme verbale indique que
la notion
verbale n'est plus aussi pure que dans son état
lexical. -ED,

- :360 -
nous
l'avons vu,
a rapport avec un passé de
structuration.
C'est
dire que le participe passé est obtenu après un travail de
l'énon-
ciateurj
i l se trouve donc décalé par rapport au plan lexical.
Le participe présent est,
lui aussi,
le r~sultat d'une opé-
ration. Dans un cas comme dans
l'autre,
i l y
a grammaticalisation
d'une notion verbo-lexicale en vue de
la fonction attribut.
Les
anciens de l'art-Royal considéraient d'ailleurs
que
"ce què le
participe retient du verbe c'est
l'attribut,,(l),
reconnaissant
ainsi) encore que cela ne soit implicite,
que
les participes cons-
tituent un dépassement
du plan lexical auquel appartient
le ver-
be
:
PLAN NOTIONNEL
PLAN METALINGUISTIQUE
(lexique)
(grammaticalisation)
V-ED
V
)
V-ING
(1)
(II)
Dans
la construction attributive authentique,
la notion ad-
jectivale n'a pas été
l'objet d'un tel travail.avant d'~tre rap-
portéeà son sujet grammatical. Elle n'est donc pas aussi altérée
que
les notions verbales V-ED et V-ING;
par rapport aux partici-
pes,le programme sémique adjectival n'a pas dépassé
la première
étape structurale et cela lui confère un statut rhématique
:
PLAN NOTIONNEL
PLAN î:'lETALINGUISTIQUT~
(lexique)
(gra~maticalisation)
-------------------------~) ADJ.
(1) Pierre VIT
~ Pierre est VIVANT
Sedeo
;; Je
SUIS ASSIS

- :361 -
Ainsi
la compatibilité de statuts entre l'adjectif attribut
et .. son sujet grammatical n'est_p~ strictement la même que celle
que l'énonciateur tente d'instaurer entre les notions verbales
re-structurées et leurs sujets
:
(9) His name is Bary McGuigan ( ••• ) He vas born in the
Republic of Ireland and raised a
catholic
( ••• ) He took up
boxing as a
school boy after his class-mates refused to
play with him because he was rough.
(NWK - 10/06/ 1985)
Dans
la première occurrence, BE établit
la relation de compati-
bilité entre HE, un élément thématique et BORN,
une notion verba-
le re-travaillée en terme de relation.
La compatibilté est donc
totale puisqu'elle s'établit entre deux termes ayant fait
l'ob-
jet de re-structurations.
Dans
la deuxième occurrence de BE,
la relation de compati-
bilité est établie entre d'une part,
un élément thématique HE et
d'autre part,
une notion adjectivale,
c'est-à-dire un programme
sémantique que
l'énonciateur n'a pas eu besoin de structurer lui-
même,
la langue l'ayant fourni déjà comme un terme de relation.
Pour ce qui est de
la relation binaire établie entre un
sujet thématique et une forme verbale en V-ED ou V-ING -
donc une
forme
re-structurée -,
on peut parler d'une égalité,
une identi-
té méta-opérationnelle( 1). Quant à
la construction attributive
avec la notion adjectivale,
l'identité n'est pas totale puisque
nous avons d'un côté un sujet thématique et de
l'autre,
une no-
tion à
peine altérée,
donc de statut rhématique.
Figurativement
(1)
A propos des énoncés en BE+ING,
H. Adamczewski
emploie une
métaphore plus illustra tive:
la re lation entre
le sujet grammati-
cal
(thématique)
et
le prédica~ nominalisé est équilibrée,
les
deux termes ayant un.statut thématique.

structure passive ou en BE+ING
programme sémique
Su j et ~
...- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
re-structuré
BE
(TH)
TH
structure attributive
notion adjectivale
Sujet ---------------------------------------------------~)non re-structurée
BE
(TH)
RH
En ne prenant pas le temps de déterminer le statut
(:)TH
des termes mis en relation par BE on aboutit à une multitude de
valeurs de cet opérateur. I l s'agit,
à
chaque fois,
d'effets dus
à ses emplois particuliers.
E. Benveniste,
par exemple,
pose d'abord pour ETRE deux
valeurs qu'il considère être les plus fondamentales;
on remarque-
ra que ses valeurs à
lui sont encore diff~rentes de celles déga-
gées par D. Bolinger
"Quand on parle d'un verbe ETRE i l
faut bien préci-
ser s ' i l
s'agit de
la notion grammaticale ou de
la
notion lexicale
t ... ) Il Y a, en effet, une notion
lexicale dont
l'expression verbale est aussi authen-
tique que n'importe quel autre verbe,
et qui peut
avoir son plein exercice sans
jamais empiéter
sur la fonction de copule.
Le
sens est
"avoir exis-
t'ence",
"se trouver en réalité,( ..• ),,(l)
(nous soulignons)
Nous trouvons E. Benveniste exagérément catégorique sur la dis~
tinction à opérer entre
'ETRE existentiel'
et
'~rRE copule'. Il
oppose non moins catégoriquement
le plan grammatical et
le plan
( 1) E. BENVICNISTE
Problèmes de
linguistigue~énérale, Gallimard,
Paris,
1966,
tome
1,
p.
18

-
J6] -
lexical qu'il est difficile de présenter comme absolument
dis-
joints. E. Benveniste ne devrait pas pourtant perdre de vue que
l'existence et
la localisation sont deux variantes de
la même
catégorie logique(l)
et que
la localisation n'est pas seulement
spatiale mais qu'elle e~t aussi et surtout métaopérationnelle,
c'est-à-dire,
grammaticale.
Dans un cas comme dans
l'autre,
i l y
a
caractérisation du
sujet grammatical par attribution d'un prédicat rhématique. Dans
l'énoncé
(9), nous avions, avec la première occurrence de BE une
structure véritablement équilibrée puisque
les deux termes de
la relation ont un statut' thématique.Tandis que dans
les autres
occurrences de B l~
LJ,
i l tente d'établir une relation entre,
d'une
part,
un sujet thématique et de
l'autre,
un programme sémique à
statut rhématique;
ce qui donne une structure sémantiquement
.équivalente à
la construction attributive réalisée a~ec une notion
adjectivale.
La prise en compte du statut des éléments mis en relation
pour obtenir la construction attributive nous r~conforte dans
notre position sur l'opposition entre catégorie adjectivale et
catégorie nominale.
Nous disions que
les deux catégoriE~s ne dif-
fèrent que par leur degré d'extension,
qu'un programme sémique
nominal fonctionne
comme un adjectif pour peu gue l'énonciateur
(1)
En senoufo,
par exemple,
la notion existen~ielle n'a pas
d'existence linguistique formelle;
elle se dilue dans
les cas de
localisation:
kàlàc~l~
i
baà
==
Dieu EST
là/ici
dieu
/
ETR1~ / l à , i c i /
L'opéra teur de
localisation ne peut pas être omis:
keLlà co 12>
i
0
==
Dieu
EST
0
(voir page suivante)

-
J6L~ -
prenne la notion nominale avec son maximum d'extension.
Prenons
quelques énoncés
(10) All .I know about him is that he WAS A SABOTEUR during
the war.
(NISVEN -
15)
(11) My father
~AS A BANK CLEIDC •••
(emprunté à C. Delmas)
(12)
(a)
Jeanne
IS
FRENCH
(b) Jeanne
IS
A
FRENCH
WOMAN
Pour fonctionner comme des prédicats adjectivaux:,
pour effectuer
·le
même· t r-av'a i, l
de'stiuctur'ation- que
l'adjectif dans
la cons-
truction du sens, ·SABOTEUR, BANK CLARK et· FRENCH WONAN doivent
se présenter en tant que programmes sémiques nominaux proches du
plan notione 1:.
Comment ce la peut-i l
être perceptible à
l ' oei l
nu ?
I l faut
donc~es notions à'peine restreinieS
et,
:en sUrface,
l'op~rateur !' indice de la réduction minimale de l'extension
d'une notion nominale est
là pour le signaler.
Le
français op~re "une saisie
encore plus précoce" de
la
notion nominale.
Pour être mis en rapport avec un sujet gramma-
tical en tant qu'attribut,
la notion nominale que
le français
choisit de promouvoir dans
le plan structural ne subit aucune
restriction. ,Cela se traduit en surface par l'absence notable
d'opérateur de nom:
Notons que
l'opérateur de
localisation peut être omis si
l'on nie
l'existence de Dieu:
kèlèc51~
è
yÉ-
dieu
/BE+(neg)/
(neg)/
Dieu n '~~ST PAS
Que la négation soit
la seule compatible ou même indispensable
dans la structure où la localisation n'est pas exprimée confirme
les th~ses des philosophes grec~"
Les Grecs considéraient com-
me axiomatique que "ce qui EST existe quelque part et ce qui n' ~S_T
NULLE PART n'est ri~n".

-
J65 -
(10') Tout ce que
je sais de
lui est qu'il
EST ~ SABOTEUR ••.
( 11 ,) Hon père étai t
~
ElvlP LOYE DE BANQUE•••
(11")
*Tout ce que
je sais de
lui est qu'il EST UN SABOTEUR
La structuration de
la relation attributive en senoufo
constitue une preuve supplémentaire aux thèses que nous avançons:
la seule différence entre les programmes
sémantiques adjectival
et nominal est avant tout affaire de degré d'eKtension. Pour que
le nom fonctionne
comme attribut,
i l faut qU'il soit membre d'une
relation nominale de Phase~I. Mais avant de décrire le phénomène
en senoufo,
i l
n'est pas inuti le de brosser,
ne serai t-ceque
d e
façonsuccincte,
le problèm~'de la catégorie ~~jectivale.
Nous avons rappelé,
en introduisant ce chapitre,
que
le
découpage du réel était souvent opéré de façon différente d'un
système Ld ng'ud s td qu e à l ' autre.
Lorsque nous abordions l'étude
du senoufo.il y
a quelques années,
nous HOUS attendions à retrou-
ver dans son système,
toutes
les catégories grammaticales connues
y
compris celle de
l'adjectif. Nous n'étions pas suffisamment ar-
mé pour réaliser que nous étions victime d'une .analyse contrasti-
ve limitée aux effets sémantiques~; 1
( 1 Ja)
ko 16 • gi
c
r-é
é
/the road is small/
road.MN2 /
(pred)/be smallj
.The way is narrow
( 1Jb)
ko16.gi
i
c~ri?€
/the road is bei~fiiall/
road.MN2/(pred)/be small/
• The way is getting
narrow

-
J66 -
màa
kpere
The tree was short
tree.MN2/(past)+ /be short/
(pred)
( 1 L~b )
t i i . g i
màa
ni
kpere?e
The tree was turn-
.ing short
tree.r"IN2/(past)
/(pred)/be short/
+(pred)
La faiblesse
de
la
pseudo-contra~~ivit~, r~sidait dans la tra-
duction directe des énoncés senoufo de sorte que
les
lexèmes
/ d r é /
(1 J),
/kpere/
(14)
étaient
considérés comme des adj EC t i fs
alors qu'il s'agit bel et bien de signifiants verbaux(1).
Compa-
rons
cette première série d'énoncés aux suivants:
( 1 Sa)
zà(.gi
I-
l.
to
cà?ani
I t rained yesterday
rain.MN2/(pred)/ fall
/
yesterday/
( 1Sb)
za
.gi
l
t~ij
c~.gà
6
·ca.gà
""
,"
AV
rain.HNZ/(pred)/ fall/day.HN1/(en.)/day.MN1
/the rain is
~?elling aday and a day/
There is rain every day
(16a)
pii.wi
mà~
to
n
k3' .gi
kabI
child.MNZ/(past)
/
fall/(pred)/
arm .MNZ/ break
+(pred)
/the child had fallen and had broken the arm
• J'h.e chi Id fe l land broke hi s a rrn .
(16b)
gboyO'.ri
màa
ni
tuu
ni
, 1<010?6
Cry
pigs.HN2
/(past)+/(pred)/
rall /
(pred)/ roll
(pred)
/the pigs were falling and rolling
(in the mud)/
• The pigs were falling and wallowing in the mud
(1)
voir D. BERNOT
"L'épithète en birman.
Contribution à
l'é-
tude des
langues sans catégorie adjectivale"
in La
linguistigue,
vo l
7,
1, 1971
D. Bernot observe exactement
le même phénomène en birmsn.

- - - - - - - - - - -
-
)67 -
La remarque qui s'impose est que
les
lex~mes soulign~s dans les
énoncés
(1 J et 1 L~) considérés comme des adjectifs sont structurés
dans
la relation prédicative comme
les
lexèmes des 8noncés
(15
et 16).
Ces formes
subissent
les m~mes variations morphologiques
en fonction du statut RH/TH de
la relation pr6dicativ~ (à savoir,
BV1 et BV2)
que
les verbes des énoncés
(15 et 16)(1). Dans la
première série d'énoncé) (13 et
14) nous avons dû traduire les no-
tion adjectivales en anglais en leur adjoignant BE ,
ce qui est
en fait,
une distors~on de la traduction; mais
l'on sait que la
traduction totale est impossible.
Qu'en est-il de
la construction attributive?
L'on ne per-
dra pas de vue que
l'attribut n'est pas une catégorie grammatica-
le mais une fonction syntaxique,
c'est-à-dire,
le résultat d'un
travail structural.
L'attribut trouve donc existence sous forme
de
"produit fini":
une notion nominale ou verbale est re-structu-
rée. Partons d'abord d'énoncés où la notion "d'origine" n'a pas
enore été re-travaillée
(17) ~ro-wü0.gi
ni
bro-ny§~.gi
gii
gi
mo
déné?
..
~
'"
shirt-black.NN2/and/ shirt-red.rvIN2} what/it/
you/ please
/the black shirt and the red shirt which i t pleases you?/
.l.,rhich shirt wou Id you cho_os~ between the black shirt
and the red one ?
......
(17') kà-jia
~-wû0.gi
16.r-5
n
gbà
.v
but /
IT-b lack .JI.'1N2 /pri ce.~1N1 /
(pred) /be hardi
~-ny~·.• g L
wo .ro
na
IT-red.MN2 /
IT-HN1
/
on
/butthe priee of the black one is ha rd on the one of
t.h e red' s/
But the THE BLACK ONE i5 more
axpen5ive than THE RED
ONE
.,
-----------------
(1)
voir chapitre II sur la "sélection d'une base verbale".

-
368 -
Les
traductions d'arrivée sont suffisamment nettes pour
rense~
gner sur le statut
des :formes nominales du senoufo.
Dans
la premiè-
re partie de
l'énoncé,
on reconnaît
le HN2
/ gi/ qui
confère au
nom un statut th~matique (voir chapitre II). Ce qui est plus in-
téressant à observer dans
la seconde partie de
l'énoncé,
c'est
Le
remplacement
. du lexème /bro.? à/ -' chemise'
par /::!.5!..-/,
l ' opéra-
teur de nominalisation.
On remarque aussi -
et ceci n'est plus
qu'un rappel de ce qui été vu à
la fin du chapitre II -
que la
structure obtenue
par la nominalisation est marquée par le MN2
/gi/;
ce qui
signifie que nous avons ainsi une forme nominale au-
thentique,
sachant que
la présence d'un MN égale la présence d'un
"individu nom".
On sait aussi .qu'une relation binaire articulée sur l'opéra~
teur ETRE correspond sémantiquement à une description du sujet
grammatical pour peu que
l'élément relié au sujet soit de statut
rhématique.
La structure attributive senoufo pour traduire
the shirt is
black/red
sera,
non pas
....
(18)
bro<.gi
l
WO-WÜ,') • .€2:.
/ wo-nyË -' •gi
shirt.j\\lN2/
BE
/
it-black.!'IN2//it-red.~1N2
• The shirt isTHE black/red one
mais plutôt
( 1 8 ')
bro'. gi
r
wo-wu'5.?:) /
wo-nyë.?ë
-
- '"
• The shirt is
A black/red one
L'énoncé
(18)
n'a pas beaucoup de chance d'~tre produit par un
locuteur
senoufo.
(18')
par contre,
est métalinguistiquement

-
369 -
(s6mantiQuement et structuralement)
~Quivalent
aux constructions
attributives françaises
et anglaises.
Qu'en (18')
les formes
/bro~Wu~.?~/ -'(une) chemise noire'
et /bro-ny€.?€/
-'(une)
che-
,.,
~
mise rouge'
soient en Phase l a
.été démontré
longuement au chapi-
tre II
lors de
la description de marqueur nominal.
Rappelons que
ce qu'est
le MN en senoufo,les déterminant~articles le sont pour
le français
et
l'anglais;
ces opérateurs ont pour fonction essen-
tielle de donner la mesure de
l'extension qui reste de
la notion
nominale une fois que le nom a
été structuré.
Et dans
l'énoncé
senoufo,
l'harmonie vocalique entre la voyelle du MN, (disons le
NN)
et la base
lexicale signifie que
"la saisie"
du programme
nominal a
été effectuée au stade le plus proche du plan lexico-
notionnel.
Nous disions alors que ce programme sémique nominal
n'est pas encore pleinement grammaticalisé.
Voyons
encore quelques
énoncés
karna
sinÉ

pyà
keè
na
bara.wi
~
/BE /still/{pred)/child) this /
on
/work .MN2
l"INl
wi
b€:
him/ dislike
. Karna is s t i l l A CHILD that's why he does not
like
working
(20 )
korona
i
s e n a vwa
p i.é ri
si
i
dàbu.wo
~
N
/
BW /senoufo.MN1/Fierre/then/BE !toubab.MNl
j
Korona is a
Senoufo and Pierre is a
European/
. Korona is
(A)
Senoufo as for Peter he is
(A)
European

-
370 -
Nous retrouvons
l'équivalence métaopérationnelle formulée anté-
rieurement entre
le MN1
(de Phase 1) et les opérateurs A/~ de
l'anglais:
l~vIN1-P
La similitude entre
les structures attri-
" " " - . . A

butives anglaises/françaises et
senoufo peut être ainsi schémati-
sée
:
anglais/français:
S -----....,.....-------------------~) notion adj.
ou
BE/ETRE
S --------------------------~> nom en Phase T
-
senoufo
"être"
S ------------------'---------~> ba s e l ex. +NN1
La formalisation la plus générale étant:
S - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 5 1 > programme
sémique
en Phase l
I l convient maintenant d'examiner les cas où ETRE établit
une compatibilité absolue entre les deux termes de
la relation,
c'est-à-dire,
les cas où les deux membres de
la relation ont un
statut thématique
(21)
His name is Bary l'lcGuigan and he is THE BEST BOXER
Ireland has ever produced
( ••• )
( l'nv}(
-
10/06/ 1985 )
(22 )The peasants protest that trading
coca is THE ONLY 1vAY
they can survive where steady employment is scarce.
(mvK - 25/02/ 1985)

-
371
(=' J) CArlos Ledher is THE HEPUTE:D NA\\(.COTRi\\FICANT~ numero uno
-
a
long-haired coke smuggler who bought an entire island
in Bahamas.
(NWK -
2S/0?/
1985)
(24) One every decade or so,
a
captivating new car comes
along to reignite your passion for driving. THE sport y
NIS-
SAN is THAT kind of car.
(pub l i ci té N\\'m.)
On pourrait objecter que ces énoncés ne sont pas
très différents
des énoncés
(10
à
12) où BE mettait en rapport un sujet thémati-
que et un élément rhématique; qu'il s'agit aussi en (21
à 24)
de
décrire un sujet grammatical en relevant
l'une de ses cractéris-
tiques;
autrement dit,
que dans un cas comme dans
l'autre,
on
attribue une propriété au sujet.
L'objection serait fondée mais
l'on doit admettre qu'il y
a une nuance de signification entre
les deux types d'énoncés.
"De
"He is A good boxer"
à
"He is
THE best boxer" i l y
a une différence sémantique de taille. Dans
le premi8r cas,
i l peut s'agir d'une propriété,
mais une proprié-
té que le boxeur partage avec d'autres.
Alors qu'en
(21)
la pro-
priét6 est attribuée en exclusivité à McGuigan.
Chacun des noms
de
(22
à 24)
présente un cas de
"description finie",
selon les
termes des pragmaticiens. Mais nous préférons nous en tenir aux
opérations de structuration.
Pour obtenir l'effet d'exclusivité des propriétés attribuées
au sujet,
l'énonciateur a
da agir au maximum sur l'extension des
no±ions nominales chargées de traduire
linguistiquement ces pro-
priétés;
et
l'on .r'é a l.'i s e que pour mener à bien cette opération,

- - - - - - - - - -
-
J72 -
i l n'a pas
lésiné sur les moyens,
c'est
le
cas de
le dire.
I l
met en jeu et
les moyens
lexicaux et
les moyens grammaticaux.
Ainsi BEST (21),
üNLY
(22)
et REPUTED
(23)
qui exercent déjà
une
action restrictive sur les notions nominales
se voient renforcés
par TH~, opérateur de restriction maximale de
l'extension des
noms. Mais au fond,
l'6nonciateur n'avait pas tellement
le choix;
après ,avoir employé des unités
lexicales à
effet restreignant,
effet parfois ponctu~ par les propositions relatives restrictives,
l'extension des notions nominales était suffisamment réduite pour
rendre
l'emploi de THE obligatoire. Pour tout résumer,
disons
que
l ' énoncia teur n'a f'a i, t
qu'observer une concordance mfitaopéra-
tionnelle.
M. Riegel aboutit ~ des conclusions identiques
"Le trai t
+défini
~u syntagme nomina IJ spé cifie que
dans
l'univers du discours de
l'énoncé,
l'expression
prédicative ne vaut que pour son sujet. On concluera
. que
les syntagmes nominaux prédicatifs définis et
indéfinis caractérisent leunsujets en les rangeant
dans un type mais que
les premiers sont
de surcroît
interprétés comme caractérisant exclusivement
leurs
su jet ~ " ( 1 ) •
Nous recevons
très favorablement
l'analyse de M.
Riegel mais
l'on aura remarqué que celui-ci part des effèts
("syntagme,
nom
définis")
pour revenir aux effets
("dans
l'univers du discours . . . •
l'expression ne vaut que pour son sujet . . . ").
Nous partons,
nous,
des opérations profondes pour,
logiquement,
arriver aux effets
énonciatifs recherchés par l'énonciateur.
(1)
M.
HIEGEL :
L'adjectif attribut,
PUF,
1985,
p.
59

-
J7J -
L'effet d'exclusivit~ s'obtient par la r~duction maximale
des notions nominales.
Reconsid~rons l'énonc? (21); au
stade de
"he is
!::. good boxer", GOOD 130XEH n'ayant pas été suffisamment
réduit,
i l peut être dit d'un nombre infini de boxeurs.
Lorsque
nous parvenons au stâde de THE B~ST BOXER,
l'extension de GOOD
BOXER se trouve réduitt et
corrélativement,
son domaine d'applica-
tion se voit
réduit à un seul élément,
ici, }lcGuigan.
L'énoncé
(24)
est
tiré d'un encart publicitaire.
L'annon-
ceur cherche à
présenter la Nissan comme
la voiture qui répond
le. mieux aux exigences des consommateurs;
c'est
la Nissan qui
correspond exactement aux passions des
conducteurs à
l'exclusion
de toute autre voiture.
L'on imagine' mal un annonceur déclarer:
The sport y Nissan is A kind of car . . .
Bref,
dans
le
cas qui nous intéresse,
l'énonciateur établit une
·égalité totale entre
la Nissan Sport et
la seule voiture que
les
conducteurs phevronnés attendaient
justement.
Sport y
Nissan
That kind of car.
La
thématicité de
la relation ne fait
pas de doute mais el-
le se déduit du contexte-avant d'une part,
et de
la présence des
opérateurs THE
(Nissan .•. )
is
THAT
(kind of . . . ).
En effet,
l'élément de relation -
BE -
reste
lui-même muet
sur le
statut de
la relation.
Et
c'est
justement à ce stade que
le senoufo appa-
raît plus m0talinguistique dans
l'encodage de
la relation de com-
patibilité.
~n effet,
non seulement i l
le signale par le
stat~t
thématique des termes de
la relation, mais i l s'arrange aussi à
ce que
la thématicité se répercute sur le relateur lui-même,

ici,
ETRE. Reprenons
l'énonc!>
(20)
et agissons sur .l'extension
des notions nominales en subtituant MN1
à HN2
(20' )??korona
i
senaa.wi
piéri
si
i
dàbu.wi
1 BEI
senoufo.MN2/Pierre/thenl BEI toubab.MN2
?
• Korona is THE Senoufo
and Pierre is THE European
La traduction donne des énoncés possibles en anglais ou
en français mais
les énoncés
senoufo de départ sont
très mal re-
çus.
La forme du relateur doit refléter la thématicité de
la re-
lation que celui-ci conduit
,
(20" )
korona
wi
sena' .wi
1 HIBI
senoufo ..t>IN21
IKorona is THE senoufo 1
. It is Korona WHO is TH}<~ Senoufo
Mais le relateur Iwil ne doit pas être
pris strictement pour le
MN2. du nom en Phase II et qui a unaforme ideritique.
Li3 relateur
fonctionne ici comme un pronom-copule bien connu,
du reste,
dans
certaines langues
comme l'arabe. Une traduction littérale donne-
rait
Korona him the Senoufo
Encore un énoncé avec
le relateur thématique
(25)
d av Ld L
wi
wolo
davidi
wi
wolo
David 1
HUI 1
our lowner
Dav i.dj' himl
our 1
kumada', • wl
davidi
na
wolo
Ûi?a
,."
~
'V
comrnand.HN21
David 1
on
1 we 1 follow
(1)
Extrait d'une version de
la bataille David-Goliath,
traduc-
tion effectuée sous la direction de A. Kientz,
Mission Catholi-
que de Dikodougou,
1970.

- J75 -
David is our king;
David is our leader;
David is the one
we'll always follow.
Le
relateur,
ne
l'oublions pas,
est un pronom-copule; en tant que
tel,
i l varie en fonction d~ groupe d'appartenance du sujet nomi-
na l
:
(26 )
yèlè
çé. ri
myé
i
-..
~izv~
yourl speech.MN2 1 a III BE Ilie.HNl
1 your speech is all a liel
. Anything you're saying is a lie
çÉ-.ri
.....-
di
kanyé.wi
... -
1~peech .:!'-!N21
i t
1
truth .MN2
Ithe speech of Nanga is the trut~-I
Gnly what Nanga
says is THETRUTH
Le senoufo marque ainsi clairement les étapes relationnel-
les successive~. En (26), Iii tente d'établir une relation d'iden-
tité entre deux programmes sémiques de statuts différents;
le
premier fait
officec de sujet grammatical et i l est de statut
thématique tandis que
l'élément rapporté par la médiation de Iii
au sujet grammatical est de statut rhématique.
Cela correspond
au schéma de
la construction attributive et
la traduction de
(26) en français
serait du type:
Toutes vos paroles sont mensongères
L'énoncé
(26') renseigne mpta-linguistiquement sur l'état de
la relation d'identité;
les deux termes de
la relation sont de sta-
tut thématique et,
fort
logiquement,
le relateur se conforme à
cet état de
la relation.
Dans un cas,
nous avons
donc
une

- - - - - - - - - - -
-
J76 -
compatibilité relative alors que dans
le second cas
la compatibi-
lité est
totale;
dans
ce dernier cas de figure,
la relation peut
être dite équilibrée:
(1)
S -:
s
7<-
_
- - - - - - - - - " " "
-
lex.+.:v~Nl
, lex .!'IN2
(II) ~"""'
----J.\\ = LZ
--=::::::::r-~
1
4) L'attribut de l'objet dans l'énonc~ complexe
i)
l'attribut de
l'objet selon le~ psychomécaniciens
La caractéristique
essentielle de
la construction attributi-
ve n'est pas
la présence de
l'opérateur BE. D'abord celui-ci peut
être remplacé par d'autres relateurs
(SEEM,
APPEAR ••• )
et d'un
point de vue plus général, l'on connaît de nombreuses
langues
o~ le relateur est tout simplement réalisé par le morph~me zéro.
Ce qui caractérise
la construction attributive,
c'est
l'é-
lément rhématique de nature prédicative qui est rapporté à un
support nominal.
L'absence de relateur prédicationnel entre l ' a t -
tribut et son support nominal se constate dans quelques structu-
res anglaises,
françaises
ou senoufo,et sont
connues
sous
le nom
d"'attribut de
l'objet".
L'objet d'une
relation
prédicative

- 377 -
devient
le sujet d'une autre prédication attributive.
L'attribut de
l'objet nous donne l'occasion d'opposer la
connexion sémigue à une autre qui est de type méta-linguistigue.
Nous l'avons appelé méta-linguistique parce qu'en surface,
elle
se présente comme une connexion sémique ordinaire;
c'est seulement
en suivant
l'ordonnancement des étapes relationnelles que
l'on
se rend compte qu'elle a un statut bien particulier.
Cela suppo-
se que la relation se retrouve encore au premier plan et
lorsque
l'on perd de VUe
cet aspect des
chosesJun certain nombre de pro-
blèmes syntaxiques se voient fâcheusement
escamotés. Voilà pour-
quoi nous commencerons par évaluer l'apport de certains modèles
qui se sont penchés déjà sur le cas de
l'attribut de
l'objet mais
'~..
qui,
nous le verrons,
ont une appréciation plutôt approximative
de
la relation en linguistique.
J. Doblec et D.C.
Leflem(l)
inscrivent
le problème
de
l'attribut de
l'objet dans
le cadre de la théorie psycho-méc2ni-
que dont on sait que le concept fort reste
l'incidence plus ou
moins précoce de l'adjectif attribut .à
son support nominal.
Soient les énoncés
:
(27) Jean caresse ce chat insupportable
(.28 )
Jean trouve ce chat insupportable
J.
Doblec
et D.C.
Leflem passent par le test de la prono-
Ininalisation :
(1)
J. DOBLEC & D.C.
"Horphologie verbale et fonction attribut"
dans Langage et psycho-mécanigue du
langage,
PUL,
1982

-
378 -
(27')
Jean LE caresse
(28')
Jean LE trouve insupportable
Cela constitue,
sans aucun doute,
une introduction élégante au
problème de l'attribut de
l'objet. En (27')
expliquent-ils,
l'ad-
jectif est nominalisé en même temps que
le nom;
i l fait partie
intégrante du syntagme nominal,
objet du verbe CARESSE. Par "so-
lidarité" avec son support nominal,
l'adjectif disparaît en même
temps que
le nom.
L'incidence de
l'adjectif attribut à
son support
a opéré de façon "précoce".
Dans l'énoncé
(28')
en revanche,
l'adjectif ne fait partie
du constituant syntaxique objet. En effet,
face au test de la
pronominalisation,
l'adjectif se
"désolidarise" du nom et subsis-
te à
l'opération de pronominalisation;
l'explicatipn psycho-méca-
nique du phénomène est que l'incidence a
opéré,
cette fois,
de
façon "tardive". On pourrait objecter déjà que l'explication est
-,
un peu courte. On polirrait,
on effet,
se demander ce qui
"préci-
pite"
ou retarde l'incidence de
l'adjectif.
Certains mécanismes
structuraux doivent bien être à
la base de l'alternance précoce
ou tardive de
l', incidence d o l'attribut.
I l convient de bien voir que
l·analyse de tels énoncos ne
doit pas se limiter à
l'attribut et à
son support nominal.
Le
sémantisme de la proposition matricielle n'est pas étranger à
cet état des choses. Alors que CARESSE fonctionne
strictement se-
lon son plein régime,
TROUVE connaî t
i ci un emp loi mé ta-lingui s-
tique. A Y regarder de plus près i l représente un cas de re-struc-
turation.
Dans un cas CARESSJi~ conserve toute
la transi t i vi té due

- 379 -
à
son sémantisme et fait de Jean un agent;
quant à TROUVE,
i l ne
véhicule aucune transitivité;
i l prend plutôt un caractère modal.
Nous y reviendrons.
J'vIais
les deux linguistes ont une acception plutôt lâc;he de
la notion de transitivité.
Selon eux,
"le verbe marque en lui un
double support personnel,
support d'ailleurs np.cessaire pour per-
mettre la mise en contact du verbe avec
les éléments nominaux
sujet et objet". J. Doblec et D.C.
Leflem soutiennent donc que
tous
les verbes
ont en eux les deux personnes,
que
la première
de ces personnes est marquée sémiologiquement par les désinences
'.:
du verbe,
que
l t existence de
la
s e c o nde per.50,nne: n'est pas,
bien
"(
sûr, marquée dans "le signifié t'ormel-du verbe" mais qu'elle cor-
respond à
"l'être patient,
senti dans tout pr~cès,,(1).
Les deux types de supports ne sont pas à
confondre avec le
sujet et
le complément d'objet
liés à
la réalité purement syntaxi-
que,
précisent-ils. Ce serait admettre l'existence de verbes
transitifs et de verbes non transitifs.
Les deux linguistes finis-
sent par poser que ETRE établit une identité entre les personnes
et 2 ,to~t en 'in' interdisant pas la comp lémenta tion adj ecti va le
ou substantivale. Tous ces postulats étaient nécessaires pour en
arriver au problème de
l'attribut de
l'objet.
L'attribut de
l'objet remplirait une t'onction d'apport de
nature adjectivale à
la personne intra-verbale.
Ainsi en (29)
(29)
Le vin rend
GAI
J. Doblec et D.C.
Leflem conseillent de ne pas passer par les
"théories du sous-entendu";
l'apport adjectiva l
GAI a;'pour support
(1) J. DOBLEC & D.C. LEFLEN
op.
c i t . ,
p. 316

-
380 -
la personne intra-verbale. On pourrait encore objecter que cette
personne intra-verbale est une
forme de sous-entendu. Nous n'irons
pas
jusqu'à poser l'existence d'une personne intra-verbale pour
trouver une solution métaopérationnelle au problème syntaxique
que pose
l'attribut de
l'objet.
Pour le moment,
on peut déjà sou-
mettre à
l'attention des auteurs de la morphologie verbale,
l'é-
noncé suivant
:
(JO)
" Fa ther died A POOH. MAN". \\vhen a
stroke ki lIed him
in 1978,
he
left about $100 and a
trunk.
His children be-
lieve the trunk might answer
sorne of the questions about
their father.
But they have not opened i t . Sorne things,
i t
appears,
are better
LEFT UNLEARNED.
(~wK - 24/07/ 1985)
~on imagine diffilement l'existence d'une personne seconde, même
intra-verbale dans
le sémantisme d'un verbe comme DIE; mais
JA Doblec et D.C. Leflem doivent certainement le penser,eux qui
laissent implicitement entendre que
le verbe ETRE a une valence
transitive.
Y.
St Gelais soumet,
à
sa manière,
le problème de
l ' a t t r i -
but de l'objet ÈL la théorie psycho-mécanique;
i l fonde également
son analyse sur le mécanisme de
l'incidence.
Sa position paraît
plus acceptable dans
la mesure même où i l a
évité
les abstractions
du genre "personnes intra-verbales" qui seraient présentes de fa-
çon latente dans
le programme de sens de chaque verbe4Aucontrai-
re,
i l semble tirer le meilleur profit des
concepts de précocité
des incidences. Voyons des deux énoncés
suivants analysés par
Y.
St Gelais
:

-
J81
-
(J1)
Pierre aime LES PO.l'''f}ŒS V~RTi';S
(J2) Elle croit SON ENFANT MALADE
Les deux énoncés peuvent être considérés comme ambigus mais pour
(31~ Y. St Gelais retient le cas o~ VERTE est une épith~te,
c'est-à-dire,
fait partie intRgrante de
l'objet de AIME. I l ex-
plique alors que
"l'attribution de VERTE
à
PON}1E
o p r-e avant
è
le déclenchement de
l'incidence passive du verbe.
En d'autres
termes,
l'incidence de
l'adjectif attribut à
sa cible nominale
est chose faite avant qu'entrent en relation fonctionnelle
le
verbe et son objet,,(1).
Et à propos de
(32),
i l explique que
"lorsque l'adjectif
",
est attribué à
l'objet,
l'incidence passive dû verbe est engagée
au moment o
s'effectue la qua lification de
l'objet" (2 ~ • .Dan s la
ù
terminologie psycho-mécanique,
l'adjectif attribut a une inciden-
ce de second degré,
c'est-à-dire, qu'il est incident à une inci-
dence
2° degré
1~-------
(32 )
Elle
croit
son
enfant
malade
~'analyse de Y. St Gelais nous paraltplus rigoureuse que celle
de J. Doblec et D.C.
Leflem; d'abord i l décrit avec beaucoup
plus de précisions la successivité des opérations qui président
à
la structuration de chaque énoncé;
i l ne se cantonne pas stric-
tement au phénom~ne d'incidence dont les psycho-mécaniciens, nous
disions,font un"usage e~cessif.
Chez Y.
st Gelais,
on sent
(1) Y.
St GELAIS:
"Praxéogénie adjectivale en français moderne"
in Systématique du
langage,
I,
PUL,
1984,
p.172
(2)
op.
cit.,
p.
171

-
J82
-
venir la notion de relation encore que celle-ci soit pvoquee 'as-
sez
timidement,
à notre avis.
~t c'est pour n'avoir pas mis la
notion de relation au premier plan que certains 8nonc~s ont pt~
laissés pour compte.
On peut,
en effet,
se demander comment i l
aurait rendu compte de
l'~noncé (29) :"Le vin rend GAI".
A quelle incidence de second degrp
l'adjectif serait-il incident?
La notion de successivité des ~tapes structurales n'est pas elle-
même pr~cise chez St Gelais et cela explique qu'il ait fini par
mettre dans
le m~me sac des ~nonc6s comme :
(33) Elle avait gard~ INTACTE la chambre de sa compagne
(34) Quelqu'un trouvait les
HmIJl1ES INTELLIGENTS BETES
Pour voir plus clair dans
la structuration de ces ~nonc~s1
i l est n~cessaire de les consid~rer comme des 8noncés complexes
quoiqu'ils diffèrent des énoncés en TtIAT ou des
no n cé s avec une
é
propositiJn relative.
Cela suppose qu'il faille
tenir compte du
s éma n t i sme des
prédicats matriciels. Y.
St Gelais a
entrevu un
aspect d e
ce paramètre
"
certains lverbesJ acceptent
qu'un adjectif s o i. t
at-
tribu~ à l'objet nominal pronominal que leur sens
r~clame, non pas cependant comme simple épingle épi-
thète mais
comme
l'équivalent d'une v~ritable propo~
sition dans
laquelle la restitution de verbe ETRE
fait de
l'adjectif
,l'attribut de
l'ohjet,,(l).
(nous soulignons)
Mais Y.
St Gelais s'est éloigné de
la solution dès qu'il s'est
orient~ du côt~ de la transitivité. Il se refère à R'. Le Bidois
( 1)
Y.
St GELA r S :
0 p.
ci t .,
p.
1 7 1

-
]8] -
pour qui
l'attribut de
l'objet suit des verbes transitifs qui se-
raient
:
"
des factifs
(FAIllE,
RENDRE),
( .•. ),
des verbes
marquant
l'état
(GARDER.) ,
des verbes qui énoncent un
acte de pensée
(CROIRE,
SAVOIR,
CONNAITRE,
TROUVER)
( •.. ),,(1).
Y.
St Gelais constate par ailleurs que certains de ces verbes
font
intervenir des unités grammaticales qu' i l
appelle
laconi-
quement
"prépositions"
"Pour marquer la fonction ·attributive de
l'objet,
le verbe TROUVER se construit aveC
les prépositions
DE ou EN,
le verbe PRENDRE,
TENIR, AVOIR avec la pré-
position POUR,
les verbes PARLER,
AGIR à l'aide de
la
préposition EN,
les verbes AVOIR,
REGARDER,
CONSIDE-
RER à
l'aide de
l'adverbe COM.L'1E" (2) •
La théorie des incidences ne semble pas pouvoir rendre compte,
de façon satisfaisante du moins,
du rôle de:ces véritables mé-
taopérateurs.
Pour l'énoncé
Pierre traite Paul DE
LACHE
G. }loignet expliquait que "l'incidence directe de l'adjectif LA-
CHE au
résultatif
'traité'
n'est pas possible;
la notion de LA-
CHE n'est pas propre au traitement.
I l y a
inéquation.
( . . . ) On
met donc en oeuvre,dans
l'intervalle sémantique ouvert
entre
"traite" et "lâche"
la préposition DE
qui si'3nifie
cet
éloi-
gnement,,(J).
L'explication de G. J'vfoignet est plausible mais
l'on
(1)
R.
Le BIDOIS cité par Y.
St Gelais,
op.
cit.,
p.
171
( 2) Y.
S t
G I~ LAI S : 0 p. c i t ., p.
1 7 1
(3) G. i-l0IGNET : \\'Incidence et attribut du complément d'objet" in
Travaux de
linguistique et de littérature,
XIII,
1,
1975, p. 265

-
JEI~ -
admettra
que
le
linguiste mêle ses impressions s6mantiques aùx
op~rations linguistiques de sorte que le r51e du relateur DE
n'est pas explicitement décrit.
Nous verrons que ces opérateurs
servent à
convertir une notion lexicale en notion grammaticale.
Enfin,
ni J.
Doblec et D.C.
Leflem,
ni Y.
St Gelais n'ont envi-
sagé
le cas où la fonction attributive pouvait être assumée non
pas par un adjectif,
mais 'par un élément de la catégorie substan-
tivale. Si
le substantif attribut a
été omis,
c'est parce qu'il
posait un problème presqu'insoluble à
la théorie psycho-mécanique.
On se souvient que
la
psycho-mécanique du langage professe que
seul
l'adjectif a une incidence externe,
celle du nom se jouant
entièrement en Langue avant
la remontée dans
le Discours.
Logi-
quement i l serait incohérent de parler d'''incidence de second de-
gré" dans un énoncé comme
I l m'a pris POUR
un ENFANT
où l'attribut est un élément nominal,
donc,
par définition,
sans
incidence externe.
L'avantage d'un modèle métaopprationnel sera d'aller par
delà les différences
catégorielles figées pour considérer les
opérations et c'est ce qui nous permettra de prendre en compte
tous
les cas d'attribut,
du moins ceux que
l'on considère comme
tels.
O.
Jespersen aborde
le problème de
l'attribut de
l'objet
par le biais de sa "théorie des rangs".
I l n'en fait
pas un grand
développement mais
l'essentiel est qu'il
le pose en termes de re-
lations. O.
Jespersen,
rappelons-le,
distingue deux types de re-
lations:
la
jonction et
le nexus.
La jonction revient à peu près

-
J85 -
à
ce que nous appelons
la connexion s~mique; le nexus serait à
rapprocher de
la relation pr<'dicative même si O.
Jespersen n'ai-
me pas
te llement
le mot.
Dans
les énoncés
(35) I found the CAGE ENPTY
(J6) I found the
CAGE
L'énoncé
(35) est un cas de nexus
et (J6) un cas de jonction. On
se souvient que
le mod~le de O.
Jespersen avait surtout
tendance
à insist~r sur l~ordonnancement des éléments sur la chaine linéai-
re mais pas assez sur l'étagement des différentes relations entre
les éléments.
En (35) nous verrons qu'il y a une relation de na-
ture prédicative entre CAGE et EMPTY et ce que O.
Jespersen ap-
pelle nexus
correspond à
ce que nous considérons être
la conne~
xion méta-linguistique.
ii)
Pour une s~lution méta-opérationnelle de l'attribut de
l'objet
a)
la connexion méta-:linguistique et EN,
POUR,
DE ••• pour
le français
et AS pour l'anglais
Nous avons reproché à J.
Doblec et D.C.Leflem de n'avoir pas
tenu compte du sémantisme des verbes matriciels;
quant à
St Gelais,
le flou dans
lequel baigne-sa notion de transitivité a
porté un
préjudice sérieux à
son analyse;
O.
Jespersen enfin,
s'appuie
sur la notion de relation mais n'a pas su voir qu'une relation
est datable.
Or la prise en compte de tous ces param~tres
est
indispensable à
l'analyse de ces énoncés et c'est aussi à
cette
seule condition que l'on peut déterminer le degré de cohésion en-
tre
l'adjectif et son support nominal, qu'enfin,
l'on peut voir

-
J86 -
le type de rapport que cet adjectif entretient avec
le verbe ma-
triciel.
Prenons quelques ~nonc~s
(J7) l
found the CAGE EMPTY
(38) President Sarney and the political parties E~~~~~ to-
tally UNABLE ta
control domestic political conflicts.
(HETHI -
20/0L~/ 1985)
(39) They treated me
A
LI AR
(40) Half a life time aga, the United Nations approved a
treaty that declares the ·mass killing;of ethnie,
racial or
religious group
AN
INTEHNATIONAL
CHIME.
(HETHI -
26/04/ 1985)
Faisons d'abord une remarque sur le statut catégoriel des élé-
ment en fonction attributive.
Les deux premiers énoncés
(37) et
(J8) présentent en fonction attributive, des éléments de la caté-
gorie adjectivale;
les deux derniers énoncés
(39) et (40), des
éléments de
la catégorie nominale.
La fonction attributive est,
en printipe,
dévolue aux adjectifs;
si
les noms fonctionnent
comme attributs,
c'est que
la "saisie" opérée sur l'extension de
leur notion s'est effectuée au niveau le plus proche du plan le
lexical de sorte que ces notions nominales gardant un maximum
d'extension,
s'apparentent aux adjectifs dont
l'extension,
on (
l ' a vu,
est maximale.
Ce
n'ôtait qu'un rappel.
L'occurrence d'un
op~rateur de thématicité impliquerait une réduction de la notion
jusqu'à un seuil critique;
l'énoncé
serait alors agrammatical:
(Lw')
? *
They treated me
THE
LI AH.

..:. Jt:S7 -
Nous reviendrons sur l'agrammaticalit6 de
(39') plus en d6tail •
Les énoncps de
(37) à (40) son éminemment complexes; la relation
de
la forme attribut à
l~objet est une forme de prédication.
Seulement,
l'anglais a
soumis la relation au principe de déficit
métaopérationnel et a
choisi de ne pas
l'exprimer formellement.
Cependant,
à tous ces énoncés on peut trouver des structures co-
rollairesen THAT dont on sait qu'il introduit une relation prédi-
ca t Lv e . :
(40°)
a
treaty that declares
THAT the mass killing
( ••• ) IS
an international crime.
La seconde observation non moins intéressante est que dans
les
énoncés
(37) et (39), FOUND et TREATED, des verbes à valence tran-
sitive ont vu leur transitivité diluée dans
la métaop6ration.
Ils
, .
sont ainsi devenus des méta-verbes,
instruments du discours.
I l
n'est pas besoin de chercher bien loin pour le démontrer: les 6non-
cés
(J8)
et
(40)"qui sont structurellement équivalents,
compor~
tent des verbes matriciels intrinsèquement énonciatifs,
c'est-à-
dire,
des verbes
liés au DIRE,
(i.e.
DECLARE).
L'espagnol observe
le même mutisme quant à
l'expression
formelle de
l'existence de
la relation prédicative entre
l'adjec-
t i f attribut et son support nominal objet
:
( 41)
.
eh
mi hermano!
~
.
tra tame
IQUAL,
tra tame
IQUAL!
~
-------
-------
(Los marvillas de ]\\lali)
Trad.
eh,
mon frère!
traite moi
EN
~GAL!
La traduction
constitue une transition facile pour passer à l a
connexion méta~"linguistique en français qUi,:lui,fait preuve d'une

métalinguisticité plus nette
(42) Pardonner à
son semblable,
c'est
le traiter COMME
UN CHIEN.
( 4!~) lIme E~~~~
POUR
UN IMBECILE
La pré sence des opé rateurs COÏ'l'\\'l1ï;,
POUR,
EN n'est pas fortui-
te;
ces opérateurs relient
l'attribut à
l'objet tout
en maintenant
les deux termes autonomes,
pour reprendre C.
Delmas. Ils signi-
fient
en clair que de
l'objet à
son élément de complémentation,
le rapport n'est pas immédiat,
gue nous n'avons pas affaire à
une connexion sémiguecomme s ' i l s'était agi .. d'une épith~te.
Les opérateurs eh question ont une fonction plus importante:
ils
ont pris la place de ETRE/BE habituellement sollicité pour éta~
biir
les relations d'attribution.
C'est donc dire que COMME,
EN,
POUR sont,
en l'occurrence,
des
liens prédicationnels.
Leur sim-
pIe présence signifie que
les termes mis en relation ne sont plus
des notions
lexicales pures mais des objets
linguistiques,
des
notions compl~tements grammaticalisées,
si
l'on préf~re. Ils in-
troduisent un sujet grammatical à gauche;
nous y
reviendrons.
On comprend
maintenant pourquoi nous reprochions à Y.
St
Gelais d'avoir écourté
son analyse en
appelant
laconiquement
"prépositions'~ des méta-opérateurs de plein exercice. Mais il
est vrai que ce
linguiste a une perception très approximative du
concept de relation.
Nous n'hésitons pas,
quant à nous,
de rele-
ver une similitude opérationnelle et même métaopérationnelle en-
tre POUH,
EN,
COf-lME •••
et
le mo t a o p é r-a t e u r- Ta de
l'anglais.

-
J89 -
Remarquons d'ailleurs que cet opérateur a,
pendant
longtemps,
été appelé
"préposition" même quand i l se trouvait à
côté d'un
verbe.
Bref,
c ornm e. le f'a i. t
TO dans
le système verbal anglais,
COi'iME,
POUR,
DE,
EN .•• du système
linguistique français
"fondent
une relation"
et cette relation peut être de nature prédicative.
Pour marquer la fonction attributive,
l'anglais oppose à
toute cette foule de métaopérateurs du français,
l'opérateur
AS
dont on sait qu'il a quelque chose à voir avec
le caractère rhé-
matique d'une relation(l). Mais n'anticipons pas avant
la synthè-
se finale;
pour le moment,
i l est surtout question de
convaincre
qu'il y a bel et bien une relation prédicative que seule une théo-
rie des
op0rations énonciatives peut nous amener à percevoir
(45)
Church sources ~~~~~~~ the let ter (addressedto all
church rectors] AS
AN
OVERDUE
EFFORT
by primate to dis-
cipline the Rev.
Stanislaw }lalkowski.
Cardinal Glemp has
E~~~E~~~ the priest AS particularly TROUBLESOME ( ••. )
(BETRI -
OJ/11/
1984)
Le
senoufo apporte une confirmation supplémentaire,
comme
s ' i l en était encore besoin,
à
l'existence supposée d'une rela~
tion prédicative entre le complément d'objet et son complémenta-
teur et cela de manière irréfutable.
Le senoufo dont
le système
verbal est
très
"é t o f f'é " (2)
pousse sa méta linguistici té
encore
plus
loin que
le français.
Au
lieu d'un opérateur du type COHNE,
EN,
POUR,
DE .•.
ou AS de
l'anglais,
i l fait
carrément appel à
(1)
voir Gù\\,
1982,
chaiptre XI,
p.
JJ5
(2)
A. Kientz nous faisait
remarquer que
le senouÎo comporte,
à
ses yeux,
un nombre impressionnant de verbes.
~n effet, même
certaines notions adverbiales sont exprimées par des
'verboïdes'.

-
J90 -
l'opérateur équivalent a BE
(46)
mi
gàséli.gi
nya
à
gi
i
wo-waa.?a
1 /(pred)/hen-cage.MN2/ see/(conn.)/it/ BE! it-empty.
MNl
/1 have seen the hen-cage and then it is empty/
.
1
found the CAGE
EMPTY
qui correspond en français à
(46") J'ai !'~::~~~~ que la cage était vide
Les traductions françaises
sont plus claires dans
la mesure où
leur.spropositionsmatricielles comportent des verbes présupposants,
donc déclencheurs de phase II
(cf. REALISER).
I l reste à prendre un énoncé où la fonction attributive est
assumée par un substantif authentique; dans
l'énoncé
(46) nous
avons une notion "adjectivale" ou
(?
participiale),
pauvreté de
la métalangue oblige, (on reconnait
le nominalisateur /WO-/ et le
MN /-?a/ qui ont contribué à
la nominalisation du verbe /waa/ -
'sécher').
L'attribut est
le nom /pyà/ -
'enfant'
dans
l'énoncé
suivant
:
(47)
a
wi
weè
pye
pyà
mi
nye(l)
(conn.)/he /(r~fl.)/say /child.MN1/me
/
BE
/he says himself that a
child that 1
am/
. He :!:!:~~~ (tha t) 1 am . A
CHILD
(1) /nYt/ est une autre variante de
l'opérateur ETHE.
Jusqu'ici
nous
l'avons connu sous
la forme I i i .
Nous soupçonnons la forme
/nYé/ -
'être'
-
d'être indicatrice de Phase I l .
Cette forme oc-
curre dans
les énoncés suivants
(a)
pyà
16
adama
nye?
=
'"
1s i t a
child that Adama is
~/~
- -
child./(inter.)i- /
BE
MN1
(voir page suivante)

-
391
h) la co~~exion sémique
La distinction que nous faisons
entre connexion sémique et
connexion mRta-linguistique n'est pas un artifice terminologique.
La connexion sémique se distingue de
la dernière nommée par le
degré de cohésion entre les termes mis en relation,
en l'occurren~
ce,
entre l'objet et sa complémentation adjectivale ou substanti-
vale. Et
l'on sait maintenant que le degré de cohésion se mesure
à partir de
la "date des mises en relations".
C~
sont
justement
ces outils théoriques fondamentaux qui font défaut à J. Doblec,
D.C.
Leflem et Y.
St Gelais et certainement à de nombreux autres
linguistes.
La conséquence immédiate est qu'ils ont presque tous
confondu la construction attributive et d'autres constructions
fondamentalement différentes.
Au moment où nous rédigions ces pages,H. Riegel proposait
une analyse de L'adjectif attribut. M. Riegel fait partie de
ces
linguistes dont on peut dire qu'ils sont des "adjectivïsants".
Les écrits de M. Riegel sur l'adjectif
s'étalent
sur onze ans.
Son premier article
(197 l. ) était exclusivement consacré à l'at~
tribut de
l'objet;
sa thèse d'état
(1982, Paris 1V)portait sur
la même construction et enfin,
son tout dernier ouvrage
(1985)
est un retour sur l'adjectif attribut du sujet. Nous nous devons
de situer l'ptude de ~1. Riegel par rapport à
la nôtre,
ce qui est,
bien sûr, une manière de
l'évaluer.
(a')
à
adama
i
16
pyà
1s Adama a
child ?
(conn.f/~-~/ BE /(inter.)/child
(b)
pyà
adama
= 1t's a child that Adama is
chi Id .J'lN1 /
-
/
What Adama is is that he
is a
child
(b' )
adama
i
pyà
= Adama is a child
'V/ BE/child.
~IN 1

-
J92
-
D'abord en ce qui
concerne son article sur l'attribut de
l'objet
(1974)
l'analyse de H.
Riegel ne diffère
en rien de cel-
les ~es autres
linguistes
cités.
Cela ne nous a
pas
surpris dans
la mesure où
les phénomènes ne
sont pas dp-crits
en termes d'opé-
rations et que,
par conséquent,
le
concept de relation est forcé-
ment ignoré. }Iais à
la différence de Y.
St Gelais
et de J.
Doblec
(& al.) M. Riegel donne parfois l'impression d'hésiter quant à
décider si toutes
les
constructions habituellement considérées
comme des
cas d'attribut de
l'objet,
le sont toutes.
Après avoir
passé
en revue des énoncés
comme
:
(48)
Les aubergines,
je
les adore farcies
Ce
colis,
tu l'as accepté
ouvert
7
Ses enfants,
Rousseau
les a
abandonnés
jeunes
Ses parents
~ nomment Georges
On l ' a nommé directeur
Je considère cette rpponse comme un refus
M.
Riegel
concède que sa
"définition prpsente néanmoins
l'incoI1-
vénient
(7)
de s'appliquer à des constructions qu'on ne range
pas habituellement dans
la classe des attributs de
l'Objet,,(l)
En clair,
M.
Riegel
se félicite d'avoir pensé à des
cas d ' a t t r i -
but de
l ' ob ..let que
les au t r-o s
linguistes ont oubliés. Na Ls i l
faut bien voir que ~I. Riegel pê~he à
la fois par excès et par
simplification et en un mot,
par confusion.
I l fait mieux que
les
psycho-mp-caniciens en tenant
compte du :fait que
l'attribut peut
être un él?ment de
la catégorie substantivale,mais
pour n'avoir
pas
tenu compte du s~mantisme du verbe matriciel,
i l se méprend
( c )
py
bk-
~,c1 ama
y~
= lt's not a child that
à
child.
/(neg)/'
1
(neg)
Adama is
>:N1
( c ")
adama
à
pyà
yI:'.
= Adama 1s not a child
" ~/(neg)/child.
I(neg)
;,IN 1
L'on aura
remarqué que
la :forme /nyc/
intervient dans
les énoncés
emphatiques,
qu'ils
soient interrogatifs,
n~gatifs
•..
alo~s que
1il intervi en t pour 'l';TrU~' dans les énoncé s qui peuvent être con-
sidérés comme non marqu~s.
(1)
r-l ,
fGT-~Gi~L
"L'adjectif' attr.i.but du
complément <l'objet d i r-o c t r
définition formelle
et analyse
s ornant Lq u o "
in Travaux cie
lineu~~­
tiques
et cie
littr~rature, \\;:11,
1,1~J7!1, pp. 2]6-7J7

-
J9'J -
sur les construction attributives et
celles qui
lui sont apparen-
t~es. Quant à L'adj~ctif attribut (1985), nous ferons trois rem ar-
ques essentielles. D'abord nous n'avons relev~ aucune évolution
dans
les positions de M. Riegel onze ans après
son premier arti-
cle/puisque
l'indétermination qui pèse sur le statut attributif
ou non attributif des énonc~s en (L~8) n'est toujours pas lev~e;
elle semble même oubliée et quand H. Riegel y
fait allusion
c'est pour parler de
"verbes di ts OCCASIONNELLEl\\lENT ATTRIBUTIFS
et qui en fait
ne sont aucunement attributifs,,(l).
On peut se
demander dans quelle mesure un verbe peut être attributif,
l ' a t -
tribut ~tant une fonction syntaxique, donc,
au mieux,
une rela~
tion et dans ce cas,
ne saurait être une forme.
Par ailleurs,
son analyse
récente se
limite à
l'attribut du
sujet(l)
alors que
c'est
l'attribut de l'objet qui pose
les problèmes syntaxiques
les plus intéressants dans
la mesure même où
cette construction
est,au fond,
un énonce
complexe.
La deuxième remarque est que certains points de
l'analyse
de Riegel nous confortent
dans
la formulation de nos hypothèses
sur la nature
s~mantique des ~lpments sémantiques (extension de
l'adjectif
(!) illimitée). Mais dans la caract~risation des pl~-
ments sémantiques,
l'analyse de M.
Riegel présente
le petit in-
convénient de ne
s'inscrire dans
aucun cadre th~orique pr~cis.
C'est ainsi qu'il passe allègrement d'Aristote aux grammairiens
(1)
On ne peut. quand même pas reprocher à M.
Riegel de n'avoir
pas trait6 de
l'attribut de
l'objet.
C'est un choix méthodologi-
que qui ne
concerne que
lui. Mais i l aurait dn intituler son der-
nier ouvrage:
L'ad,iectif attribut DU SUJET.
(2)
1'1.
RI !'~GEL
L'ad,j e c t i Î
a t t ri bu t,
PUF',
1 985,
p.
1~2

de Port-Royal.,
s'appuie
longuement sur les analyses
logico-philo-
sophiques de
Russell, Strawson,
Quine et autres . . .
La formalisa-
tion qui
ponctue son analyse est
le systèmes des
"règles de re-
~criture de N. Chomsky. De tout cet amalgame,il apparalt très
clairement que M.
Riegel ne fait
pas de distinction entre les
choses liées à
l'extra-linguistique et
les v~ritables op~rations
linguistiques.
L'~tude de M. Riegel nous aura tout de même ~t~ utile sur
un point:
elle nous aura permis de nous rendre
compte de
l'extrê-
me
extensiqnrle la notion d'attribut du sujet.
Des ~nonc6s comme
I l est
A PAlUS
Nous sommes EN 1985
sont des attributs du sujet tant i l est vrai que "la situation
dans
l'espace et
la situation dans
le temps
caract~risent (et
nous
le soulignons)
n~cessairement les entit~s particularis~es
qui,
par d~fi!1ition, occupent une portion d'espace et de temps".
"( ••• )ETRE en F'r-anc e ,
ETHE d a n s
le
jardin,
ETRE au 2üème siècle
sont des termes généraux qui peuvent être prédiqués d'une infini-
té d'entités particulières,,(l). Par termes
"g~néraux", l'on aura
compris que
c'est
l'extension quasi-illimit~e des él~ments rhéma-
tiques
(non encore re-structur~s} qui
est en cause;
on ne peut.
que déplorer le manque de finesse de la métalangue de M.
Riegel.
Ces remarques,' i l c orrv Lo n t
de'
sou ligner ,O' l .interpellent
le linguiste sur ce qui doit être considéré
comme attribut.
Le
moins qu'on puisse dire,
c'est que
le métaterme
"attribut" n'est
pas très heureux. Mais i l faut bien employer certains vocables
pour se faire
compren~re. L'on se défait trè~ difficilement de
(1)
op.
ct t ,. ,
p.
59

-
J95 -
la tradition et tous
les
linguistes désireux d'éviter les incohr.-
rence~solidement ùncrées à force de répétitiomconnaissent ce
problème.
C'est, par exemple,
par abus de langage que
l'on est
amené à parler à
la fois d'''adjectif'''et de "nom" pour décrire
les mêmes phénomènes structuraux.
"Nom et substantif" sont d'ac-
ception logico-philosophique;
"adjectif", nous
l'avons déjà dit,
décrit déjà un mouvement structural
(on adjoint un terme à un au-
tres) (1).
Dans le même ordre d'idée,
H. Bonhard en était arrivé à
se
demander si
l'attribut se rapportait vraiment au nom.
Les poutes
de H. Bonnard ont certainement été
suscités' par le flou qui en~
toure la notion même d'attribut(2) •••.
~-'".
L'attribut, disait-il,
se rapporte au verbe et pas au nom
en français.
Seulement i l basait ses ,croyances. sur le seul phéno-
mène de l'accord~ce qui ne nous semble pas suffisant pour recon-
nàître une forme de cohésion entre
l'attribut et le verbe plutôt
qu'avec
le sujet ou l'objet. A. Martinet n'était-il pas allé
jus-
qu'à dire que
"l'accord est un phénomène de surface".
Nous disons depuis un moment que
les constru~tionscabusive-
ment appelées attributives ne
l'étaient pas toutes.
Sans doute
H. Bonnard a-t-il confondu les deux types de constructions. En
tout cas? le principal argument qu'il avance ne
lui permet pas de
dire que dans
l'énoncé
( 1) H. Ada f;'l'.zewski attire souvent
l ' at tention sur l'incohérence
de
la formulation:
S(sujet)
-
V(verbe)
-
O(objet);
' S ' e t
'0'
désignent des fonctions
syntaxiques alors que V est une catégorie.
(2) IL BONNARD :
"L'attribut se rapporte-t-i l
au nom ?" in Le fran~'
çais moderne,
28,
4,
1962

- 396 -
(50)
My fa ther
i s
A BANK CLI.i:JU\\
SICK /
poon / RICH
les éléments en fonction d'attribut
se rapporte à Bl.':. H.Bonnard est
alors obligé de sortir du cadre purement grammatical:
"Que l'adjectif soit épithète ou attribut,
l'accord
en genre et en nombre reflètent
le
lien étroit qui
sur le plan sémantique,
unit
la
qualité à
l'ETHE,,(l)
On conviendra qu'il n'est plus vraiment question du ETHE gramma-
tical,
l'opérateur des structurations, mais de
l'entité
connue
dans
le domaine philosophique. A en croire H.
Bonnard,
l'attribut
serait une forme d'expansion sémantique du verbe BE avec lequel
i l est déjà ent~~ en relation avant qu'un sujet ne leur~soit ap-
pliqué. H.
Bonnard réjoint ainsi
les thèses de G. Guillaume qui
parle de "verbe5de discours"
(e.g.
ETHE MALADE, ETRE PETIT,
?
ETRE ELEVE). Hais H. Bonnard. serai t - i l prêt à soutenir que d a n s
les énoncés que ~ous avoas analys~s)l'adjectif se rapporte à des
opérateurs comme ~N, POUR,
COMME,
DE . . . . puisque ce sont ces o pé «
rateurs qui remplacent ETRiS en la circonstance pour relier l ' at-
tribut à l'objet? Peut-il soutenir que
l'adjectif entretient
quelque cohésion avec ces éléments qui n'ont qu'une fonction
structurale? Peut-on soutenir qu'ils sont
complémentps par le
programme sémique adjectival alors qu'ils sont eux-mêmes vides
de toute substance sémique ?
Pour dire si~la construction est véritablement attributi-
ve,
pour voir s ' i l y a
cohésion entre
l'adjectif et
le verbe,
en
un mot,
si
l'adjectif se rapporte
au
nom
ou
au verbe
pour
(1)
H.BONNARD' :
op.
cit.
p.,
243

-
J~7 -
complémenter l'un ou
l'autre,
i l faut dépasser la simple forme
attribut; une voie possible consisterait à suivre
les mpcanismes
métaopérationnels,
donc
la construction des relations.
Revenons sur les énoncés des deux psycho-mécaniciens pour
dire que ces énonc8s français
(51)
Le vin rend GAI
(52)
Grisou part CONTENT
ou ces énoncés anglais
(53) Three minutes later, she was asleep. She slept for
thirty-five minutes and AWOKE
REFRESHED
(PADDI -
6)
(54) i~e d o nt t
know what
WENT
\\~RONG but it wasn't as if
there were anything unususal about the plant.
(HETRI -
05/12/
1984)
Ces énoncés
ne r-ep r-é s e n tent
plus que ceux du type
(55) analysés par Y. St Gelais et considé-
rés à
tort aussi
comme des cas d'attribution:
(55)
Elle avait gardé
la chambre de sa compagne INTACTE
ou
(55') Elle avait gardé
INTACTE,' la chambre de sa compagne
M. Riegel,
quant à
lui,
ne tire pas non plus
les enseigne-
ments de son analyse structurale et/ou distributionnelle:
"Les constructionS attributives de
l'adjectif se si-
gnalent par l'effacement de
la copule,
par son ab~
sence dans
la majorité des paraphrases et par l'im-
possibilité de
la restituer clans certaines cons truc-

-
J98 -
tions
complexes
(Il semble
(ETHE)
l'urieux;
i l est
sorti
(*ETRE)
furieux),,(l).
Si dans
le second énoncé i l n'a pas 8té possible d'insérer ETRE,
le principal relateur prédicationnel de
l'attribut,
entre
le sup-
port pronominal et
l'adjectif YUHIEUX,
c'est que,
précisément,
la structure n'a rien d'une
construction attributive.
Ces énoncés font
penser à
certaines constructions anglaises
qu'on classerait volontiers parmi
les
"constructions idiomatiques":
(56) He drank himself DHUNK
(empruntés à o.
Jespersen)
(57) He read himself
BLIND
Commençons par l'énoncé
(52);
ce n'est pas la présence dè
l'adjectif CONTENT
qui peut nous autoriser à parler d'attribut.
On ne devrait parler de fonction attributive que si une relation
de type prédicative relie le programme sémique adjectival à un
support nominal et dans
l'énoncé en question
(52)
ce n'est
cer~
tainement pas
le verbe PARTIR qui établirait une relation de com-
patibilité entre
le programme sémique en fonction de sujet et le
programme sémique adjectival.
I l s'agit tout simplement de
la no-
tion verbale complexe PARTIR CONTENT.
L'énoncé
(51)
présente éga-
lement un cas de notion verbale complexe
(RENDRE GAI);
elle l'ait
partie de cette catégorie de verbes dits
"l'actifs" et
elle a
ici
pour l1 0 b j e t
a:ffecté" un objet non spécil'ié:
Le vin
NOUS
rend GAI
Remarquons que s ' i l n'est pas fo~mellement réalisé,
c'est que
nous avons al'faire à un objet méta-linguistique,
e~actement comme
(1) JlL IUEGEL:
L'adjectif attribut,
PUF',
1985,
p.
13

-
39:1 -
le sujet méta-linguistique dans
les constructions passives dites
"impersonnelles"
(cf. ON boit le beàujolais frais
--:r
le beau-
jo lais SE
boit frais J.
L'énoncé
(55) n'est pas
non plus un cas d'attribut de
l'objet contrairement à
ce que croit Y. St Gelais. L'énonciateur
n'attribue aucune qualité à
la chambre. Peut-on y voir une des~
cription de
l'état de
la chambre?
Là encore,
nous ne
le croyons
pas; on a,

aussi, une notion complexe dont
l'expression en sur-
face donne un macro-programme sémique. En revanche,
ce qui aurait
été intéressant à étudier dans ce cçuple d'énoncés
(55 et 55'),
c'est La, po si tion de. l ' objet par rapport au verbe;
ce lui-ci en-
tretient une cohésion plus ou moins
lâche selon que l'adjectif
est extraposé ou nop. En (56) aucune propriét~ n'est attribuée
à HIMSELF;
i l s'agit,
là aussi,
de
la forme
conjuguée.du verbe
(TO)
DRINK ONESELF DRUNK. Nous reviendrons plus en détail
sur
ce dernier énoncé; i l sera confronté à
ceux que nous croyons com-
po~ter de véritables cas d'attribut
de
l'objet. Examinons encore
quelques énoncés
:
(58)
"Father
DIED
A
POOR
MAN". 1vhen a
stroke ki lled him
in 1978, he
left about $100 and a
trunk •••
(m·il( -
2 4/07 /
198 5 )
(59) The gentleman had DRUNK himself OUT OF HIS FIVE SENSES
(emprunté à
o. Jespersen)
(60) He
DIDtNK
himself
UNDER THE TABLE
(dû à YAO K.)
En (58) POOR a pour support nominal MAN; personne ne peut le nier;
mais
le total sémique est intégré dans un prédicat majeur
'DIE A

-
400 -
POOR i'lAN'.
Les énoncés
(.5~ et 60) montrent qu'on
s'éloigne ré-
solurnent des constructions at.tributives authentiques,
pour une
com-
plémentation de type adverbial.
Dans ces cas-ci,
comme dans
le
le tout premier de
la série
(58) nous assistons à un enrichisse-
ment de la notion verbale de base.
L'on se souvient que dans
la véritable construction attri-
butive le senoufo restituait très explicitement
la relation entre
l'objet et son attribut par un lien prédicationnelj
tel n'est
pas le cas dans
les énoncés en question :
-
-
(61 )

m:)
pye
Wl
s ù' .rn L
séli
œ
they/(pred)/you/say /
he
/(pred)/alcohol./start /child.
MN2
MN1
(t'bey have told y o u he. 'l'las
started thé alcoho l
a
chi ld/
• They are telling you that he started drinking as a
child
La version française est plus proche de
la structure senoufo
• On te dit qu'il a
commencé
à boire ~ enfant;
dans
l'énoncé senoufo,
le verbe
comp lexe é t-ant
/bJ/
séli
pyà/ = commencer à boire dès l'enfance
Une autre série d'énoncés nous permettra de voir que nous avons
effectivement affaire à de véritables connexions sémiques et non
à
des
constructions attributives
(62 )
They
MADE
her HAPPY
(emprunté à O.
Jespersen)
(63) ;";e' 11 HAKE
you
PH.nIE l'JINI3TEH.
i f you
just te 11 us
where your friends are hiding
( . . . )
(d'après P.Abraham, A wreath for Udo-
~)
(6l~) La dou leur l' a v a i. t
HIDNDU FOU

-
I~Ol
Pour se convaincre que l'on a bien affaire à
des connexions
s~miques, il est n~cessaire de proc~der à u~e d61in&arisation des
~nonc~s. L'on se rend alors compte que, bien que certain~s formes
(pro)nominales s'intercalent entre
les verbes et
l
d'
t"f
es a
Jec 1
s,cel-
les-ci n'emp~chent ensrien la compl~mentation s~mique. L'~noncé
(62) a par exemple, de profondes affinités avec l'un des ~noncés
analys~s par H. Adamczewski dans le chapitre introductif de La
grammaire
linguistique de l'anglais
(1982).
I l était
justement
question de
la complémentation du verbe MAKE par une autre notion
verba le :
(65) They }jADE her
OP~N HER BAGS
O-IAPPY)
aucun relateur pr~dicationnel ne peut ~tre intercalé entre MiUCE
et OPEN HER BAGS
"car i l viendrait compromettre l'opération de
complémentattion s~mantique,,(l).
~ conclusion partielle sur la connexion sémique
et
la connexion méta-linguistique
Une confrontation semble nécessaire pour départager défini-
tivement
le statut des énoncés avec l'attribut de
l'objet -
cas
de connexion méta-linguistique -
dès
énoncés qui viennent d'~tre
analysés -
cas de connexion s~mique :
. cx. mé t a-e Ld ng v r
(66a) The doctor declares him dead
(66b)
Il me traite de menteur
( 1) H. ADAl'\\CZEWSKI
GLA ,
1 982,
p.
1 J

-
L~02 -
• cx sèrniquc:
(67a) They made her happy
(67b)
La douleur l'avait rendu fou
La première
série d'énoncés -
cas de
connexion méta-linguistique
correspond à des énoncés complexes.
L'objet de
la proposition
matricielle est passé dans
la proposition qui fait
office de su-
bordonnée et cet objet y acquiert
le statut de sujet grammatical.
Dans
l'énoncé
français,
en particulier (66b),
l'opérateur DE
fonctionne
comme relateur pr~dicationnel (cf TO en anglais) et
i l introduit un sujet grammatical à gauche.
Le programme s~mique
de MENT~~R fait alors office de prédicat. En (67) par contre,
les cas de connexion
sémique,
HEH et LE sont respectivement
"ob-
jets affectés" des verbes complexes 1VIAKE HAPPY et RENDRE FOU~ 1).
En ce qui concerne
la première série d'énoncés -
cas des
connexions méta-linguistiques -
le verbe TRAITER (66b)
donné
com-
me transitif dans le dictionnaire a
subi une subduction qui en
fait un méta-verbe.
La transitivité
se trouve dépassée
après
cette forme de re-structuration abstraite,
TRAITER devient un
verbe d'énonciation.
Dans cette phase de re-structuration,
i l
partage les mêmes propriétés que
le verbe d'~nonciation DECLARE
en (66a) ~ Les deux verbes traînent d'ai lleurs derrière· eux "une
coloration modale;
d'aucuns parleraient de
"verbes de
jugement":
i l s'agit,
plus exactement,
de verbes du DIRE.
Dans
l'énoncé
(67a et 67b)
-
le cas de connexion s~mique
les verbes gardent
leurs
latitudes sémantiques
(factivité),si
l'on
peut s'exprimer ainsi.
Les sujets grammaticaux THEY (67a)
et
LA DOULEUR (67b)
peuvent alors exercer toute leur agentivité.
(1)
Notons que
la
notion.complexe et compacte RENDRE FOU serait
rendue en senoufo par un
seul
signifiant:
/curo/.

-
l~O J -
Alors que dans
laconrlexion méta-linguistique HIIvl( 66a)
et
j'Ji~ (66b) sont objets du DIRJ~t dans le domaine de la connexion sé-
mique,
HER (67a)
et
L'
(67b)
objets affectés par l'agentivit6
des
suj~t-agents, sont objets du FAIRE.
Ce qui est encore plus intéressant pour nos hypothèses vi-
sant a
séparer les deux types de constructions voisines mais non
moins différentes,
c'est que connexions s8mique et méta-linguis-
tique peuvent être départagées. par le test de
la cohésion.
La co-
hé sion,
nous
l'avons. di t
souvent,
est due à la construction .p Lu s
ou moins ancienne d'une re lat ion dans
la chrono logie
linguistique.
La mise en relation est d'autant plus ancienne qu'elle s'effectue
entre des notions
lexématiques,
c'est-à-dire,
à un moment où le
plan grammatical n'a pas encore été atteint.
Elle est d'autant
plus récente,
c'est-à-dire rhématique) qu'elle
intervient à un
moment où les deux termes de
la relation sont d'abord structurés
en tant qu'objet~ linguistiques pui~ après,
et après
seulement,
sont mis en relation.
Soient
les énoncés
(68a)
The president
made
him
o Prime Hinister
(68b)
*? The president made him
THE Prime minister
They considered
him
THE
possible murderer
Comment expliquer la grammaticalité de
(68a)
contre l'agrammati-
calité de
(68b)
?
La réponse est bien simple si l'on accepte que
HA.:KE SOivlEONE PRIME 1'1INISTEH.
est une véritable notion complexe.
Pour obtenir une notion complexe et bien compacte,
i l faut
en
entreprendre la construction très tôt,
avec des notions ayant au

départ subi
le minimum d'altération. I l faut donc l'entreprendre
a un moment ou un opérateur restricteur de notion nominale comme
A (et à plus forte raison THE)
n'a pas encore adultéré
l'exten-
sion de la notion.
C'est à
cette seule condition que peut ~tre
épinglée,
et avec toute son extension,
la notion nominale sur la
notion verbale pour la complémenter. Or,
dans
le cas qui nous in-
téresse,
l'énoncé
(68b), THE a déjà bloqué
la notion pour en fai-
re un objet linguistique autonome. Bref,
la notion l'-1AKE était,
en principe,
partie pour ~tre complémentée en notion complexe et
la fusion ne pouvait pas ~tre effective si certains constituants
y
sont réfractai~es en gardant notamment leur identité catégoriel-
le(l).
Ils refusent par la m~me occasion l'association sémique.
I l a donc suffi
de
la:
pré sence de THE en (68b)
pour compromet-
tre définitivement la fusion notionnelle,
ce qui a pour principa-
le conséquence de rendre l'énoncé agrammatical.
Au contrair~en (68a), lorsque MAKE et PRIME MINISTER ont
été promus ensemble au rang de prédicat -
donc d'objets linguisti-
que}- ils avaient déjà été structurés depuis
le niveau notionnel.
MA...l{E PRDŒ }lINISTER est une séquence qui a
fait
l ' ohjet d'une
structuration antérieure d'où la compacité entre les constituants
du prédicat et cela en fait une connexion sémique.
Le problème est tout à fait différent en (69)
où nous avons
non pas un prédicat constitué d'une notion complexe et compacte,
mais
deux prédicats,
deux propositions,
si
l'on préfère. THE
permet à POSSIBLE MURDERER de conserv.er son identité catégorielle
de nom.
C'est donc une notion qui n'a plus son extension originel-
le
au point de se m~ler à une autre,
celle du verbe,
par exemple.
(1) Ra pp e l e la présence de THE ou A ou d'un MN signale la présen-
ce d'un "individu nom".

-
L~O 5 -
Une fois q u t e Ll e a été structurée en nom,
l'énonciateur se
l'est
app r-o p r i
a pour en .faire un autre objet
linguistique,
un
terme de
é
relation.
POSSIBLE i'1UHDEHli.:H a été
rapporté à HlM après avoir fait
l'objet d'une structuration antérieure,
à
l'image du restricteur
et marque de structuration, THE.
Une conséquence métaopérationnel-
le:
la cohé sion entre HD1 et POSSIBU;; HURDERER ne saurai t
être
effective,
la mise en relation ayant été retardée.
Le senoufo procède de
la même manière. Tout se joue encore
sur le réglage de
l'extension nominale,
réglage effectuée à l ' a i -
de du ?-1N :
- ,
(7 0
or
)
Wl
jo
be
wee
vote
'
'd'
prezJ: ê. 0
he /say
/
they/him/
vote
/
president.NN1
",
/he says they vote him
(a) presid~nt/
. He wants them to VOTE him PRESIDENT
weè
16
m1
wélé
(wi
i)
prèzida.wi
N _
him/(inter.)/you/look at/
he
BE
president .HN2
/Is i t him you look at as the president ?/
• Are you mistakening him for THE president ?
• Do you thiw( he is THE president ?
"'-
La version française fait mieux ressortir l'enchassement de la
proposition:
.
C'est lui gue tu prends pour
LE président?
Dans
le premier cas
(70)
nous avons affaire au verbe complexe
/bi'
wàa
votë
prèzida/ = 1. élire quelqu'un président 1
"-
o~ l'absence en surface de MN signifie que nous avons un
élément
structuré à l'état de notion, un élément non encore grammaticali-
s é ,
Dans
le second énoncé
(71)
en revanche,
l'occurrence du IvlN2

-
'~~06 -
dont nous disions qu'il est plus grammatical que
le MN1,
signale
que
l'~nonciateur a mis en rapport avec l'objet /w~~/ -'lui' -
un élément qui a d'abord été structuré en nom /prèzid~.wi/ -'LE
président'.
Signalons par ailleurs
la possibilité d'intercaler
(/wi
il)
- ' i l est',
le lien prédicationnel entre
le sujet et son
prédicat. On ne peut donc plus avoir une
connexion sémique.
Figurativement,
nous aurons:
la connexion sémigue:
they made him president
_ _ _
~ESID~
S
Préd •
• la connexion méta-linguistigue:
I l me traite de menteur
IL
~__~_DE -rz:
s
Préd.
Les ellipsoides rendent difficilement compte de
la présence
ou de
l'absence du phénomène modal,
une modalisation interne,
i l
convient de
le souligner(l).
(1)
Blle est interne
(i.e.
radicale)
et non externe
(i.e. épisté-
mique)
dans
la mesure où elle émane du sujet grammatical.

• The doctor declares him dead:
THE DOCTOn. ------------~}-I DI~Cl.J\\rm
r
• Il
me traite de menteur
IL -----------7"~~Q..I~
DE
Enfin,
schématisons la successivité des étapes structurales obser-
vées dans la connexion s ém.i.q.u o
:
Tlm'Y HADE HlM PRESIDENT
PLAN LEXICAL (domaine des notions)
-----------------------------
(1)
H
MAKE Ho> SQl\\1EONE
H
PRESIDENT H
.,~• •
'U
• • • • • • • • • • • • •
HlM
D.
PRESIDENT
2ème
1phase
•• - ••••••••.••••• THEY
0
MADE
6l
HHi
J PRESIDENT
(II)
PLAN META-LING.
(domaine des objets
linguistiques)--------------
Commentaire ~_
.
au moment où THEY (sujet)
est mis en contact avec son pré-
dicat,
ce sujet est à sa première phase de mise en relation.
• au moment où HMAKEH HlM H PRESIDENTH sont mis en con-
tact aVe~ le sujet en tant que prédicat, ils sont à leur deuxième
phase de mise en relation.
Parce qu'ils ont traversé deux trames
de structuration,
ils ont eu tout
le temps de se consolider en
notion complexe.

CHA P I T R E
v
DE LA COHPLE.fvlENTATION SEMIQUE A LA META-OPERATION

-
!~09 -
Qu'en représentation l'adjectif constitue un apport à un
support nominal -
selon la terminologie guillaumienne
signi-
fie que l'adjectif est un
matériau de structuration.
Cette con-
ception des choses revient à dire qu'il n'est pas encore,
aux
mains de
l'énonciateur, un véritable outil de structuration;
i l représente,
au moins,
la substance avec
laquelle se construi-
sent les notions complexes.
Dans
les paragraphes introductifs du chapitre précédent,
nous nous étions attaché à montrer que
l'adjectif est d'exten-
sion plus
large
que
le nom; que c'est d'aillètirs par cette ca-
ractéristique qu'il peut ~tre rapproché des véritables métaopé-
rateurs comme BE dont on sait qu'il est d'extension quasi-illi-
mitée.
En plus bref,
l'adjecti~ est à
la fois
substance sémique
et est légèrement engagé vers
la métalinguisticité.
Ce sont
les modalités de son changement de statut qui vont ~tre exami-
nées ici.

-
4H) -
A)
LA Cür-1PLE:r··IENTATION SEnIQUE ..
LE
DE:PASSCI'1ENT
D' UNE E:TAPE
RELATIONNELLE
1)
La phase II
de
la structuration adjectivale
Nous . disions
que
la structure attributive est en phase
première par rapport à
la construction épithète;
parce que t
syntaxiquement,
la construction attributive est une structure
binaire qui
consiste seulement en la mise en place de notions,
et que certaines
langues comme
l'allemand
marquent
cette rela-
tion origine par l'invariabilité de
l'adjectif attribut(l);
parce que,
sémantiquement,
l'attribut décrit
les caractpristi-
ques d'un sujet grammatical;
parce que,
d'un point de vue méta-
opérationnel)
i l n'existe aucune
~ohésion entre la notion
adjectivale
(ou nominale)
attributive et son support nominal
et que,
même si
la présence d'un relateur signifie
l'existence
de
relation,
celui-ci,
d'une certaine manière,
maintient
les
deux constituants
séparés.
Enfin,
parce que
la construction
attributive avec
l'opérateur BE peut
encore exprimer la tempora-
lité,
une temporalité qui n'est pas forcément méta-linguistique.
Bref, dans
la successivité des étapes s t r-u c t u r-a l.e s ,
l'attribut
est en Phase l
par rapport à
l'épithète.
La construction épithète représente une étape relationnel-
le o~ BE, ayant déjà rempli sa fonction de relateur,
n'a plus de
raison de re-apparaître et en
se débarrassant de
la parti cu-
le BE,
la construction épithète se décharge de
l'expression
de
la temporalité
liée au concret.
Mais
l'absence de relateur ne
(1)
A.
Crépin
remarque aussi qu'en vieil anglais,
l'attribut
restait invariable dans
certaines conditions:
"Les adjectifs
attributs,
les adjectifs placés après
le substantif,
les adjec-
tifs d s s
â
y Ll.ab Lq u e s
terminés par une consonne tendent à devenir
invariab les",
Grammaire hi storiCJue de_ l'anglais, PUF,
1978, p. 39

-
41 1
signifie pas pour autant
l'absence de relation entre
l'épithè-
te et son support. On pourrait,
sans exagérer,
dire que
la re-
lation ne relève tout simplement plus du domaine de
l'observa-
ble;
elle devient abstraction et pour être appréhendée,
elle
devra être visualisée et c'est dans
ces cas de déficit structu-
rale
que
le modèle de description doit avoir recours à
la
formalisation
:
~_N
~_BE
A_~
C__N ~ l-_\\l_J0
att
(1) -------------~> épi th (II)
Orientons
lianalyse vers des énoncés concrets
(1) The
car l
am referring to was RED,
not PINK
( ..• )
The RED CAH
collided with a
truck just before the
traffic
light.
(2) She pu lled off the white
lWOLLEN CAP
she was wearing
and threw i t on the ground.
(A.B.C -
)
Dans l'énoncé
(1) l'énonciateur décrit d'abord CAR ou du moins,
lui reconnaît
la propriété d'être rouge.
Dans
la seconde étape
relationnelle HED est plutôt présenté comme une caractéristique
...
de CAR.
I l Y a bien une différence entre,
d'une part,
reconnal-
tre,
mieux,
enoncer l'appartenance d'une propriété à quelque
entité et,
d'autre part,
affirmer cette propriété
comme carac-
téristique de
l'entité
en question.
Dans
le premier cas,
i l y
a
établissement d'une relation contingente entre RED et CAR et,
dans
le second cas,
l'expression
d'une relation inhérente.

,:~ 12
!''lais ces rn{'-taphores nous entraînent p r-o g r-e s s Lv erno n t
hors
du domaine
linguistique.
L'explication métaopérationnelle est
plus viable:
dans
la seconde étape relationnelle de
la structu-
ration adjectivale
(l'épithète),
les adjectifs RED et WOOLLEN
enrichissent sémiquement
les notions nominales CAR et CAF pour
donner des notions complexes.
Cette opération s'accompagne,
com-
me toujours,
d'une restriction de
l'extension des notions nomi-
nales.
En ce sens,
les adjectifs fonctionnent
déjà comme des
outils de structuration puisqu'ils agissent sur l'extension
des notions nominales
comme
le font
le MN du senoufo et
les
déterminant-articles du français
et de
l'anglais.
Le rapport de successivité dans
la chronologie linguisti-
que que
l'on observe de,:l'attribut à
l'épithète n'est,
bien sûr,
pas un phénomène isolé dans le système en général,
et dans
le
sous-système nominal en particulier.
Le même phénomène a
été
longuement examiné au chapitre III sur la structuration des com-
posés.
Nous en prenons pour illustration,
la successivité des
étapes structurales observée dans
l'énoncé-ci
(3) It was internal linguistics, stimulated by de Saussure's
work
(1916),
that was to be
the main concern of the 20th
century scholars,
and within it,there could be no place
for the study of !~~_~~~~~!~2~_2~_~2~~~.
The next major change of emphasis in linguistics was mark-
ed by the publication in 1957 of N.
Chomky's Syntaxic Struc-
ture.
( . . . ) Dut s t i l l WORD-FORMATION remained neglected by
linguists for several good reasons.
(r.I-E \\-i-Ii' -
5)
Ce qu'est BE dans
la construction attributive,
OF l'est pour le
syntagme
" formation 01" words";
la seu le différence i ci est que

-
L~'J -
dans
la seconde phase de
structuration,
le déficit métaopéra';"
tionnel a été repar0 grâce à
l'occurrence de
(-).
Dans
la struc-
ture épith~te, l'adjectif enrichit de son programme sémique la
notion nominale avec
l'autre retombée qu'est
la réduction de
l'extension de
la m~me notion nominale. Dans le composé,
c'est
1~ORD (3) qui s'est chargé de la fonction de réduction d'exten-
sion.
La similitude entre
l'attribut et
la
connexion s~mique
lâche d'une part,
puis celle entre
l'épithète et
la connexion
sémique compacte de
l'autre ne
s'arr~te
pas ici.
L'ordre des
éléments dans
le
linéaire ne saurait être ignoré.
La construc-
tion attributive veut que
le prédicat adjectival soit structuré
par la droite,
selon l'orientation classique des relations de
Phase 1;
les différentes étapes relationnelles qui échélonnent
la structuration du composé en (3)
respectent
le m~me schéma.
Quand la construction épith~te, parce qu'elle est décalée
vers
le méta-linguistique,
oriente sa relation vers
la gauche,
la
connexion sémique,
parce qu'elle a promu WORD au rang d'opéra-
teur-restricteur d'extension,
l'affecte à gauche,
exactement
dans
la m~me position que les déterminant-articles
Att
(1)
~_N
~
~
_ _
l
Epith.
(II)
:0
~
~
'
'\\' - - - - -
=:1
Cx
lâche
E_'_~_~
(1)
1
Cx compacte
(II)

Une dernière remarque
s'impose sur le rapport attribut-épi-
thète;
elle concerne la frt~quence des deux structures dans la
pratique discursive.
Certains linguistes
(dont D. Bolinger)
notent que dans certains textes,
l'on
récense beaucoup plus de
contructions épithètes que d'attributives.
Cela est fort
justeJ
mais n'est que
simple constat.
Nous comprenons d'ailleurs que
ce phénomène n'ait
jamais été expliqué,
parce que c'est
là une
question que n'importe quel modèle
linguistique ne peut se per-
mettre de se poser.
Notre modèle nous permet d'aller un peu
plus au fond des choses,
le concept de relation étant pour nous
de première importance. I l s'agit,
cette fqis,
de considérer
la relation,
non pas entre les unités
linguistiques,
mais entre
'-:\\
domaine
linguistique et domaine extra-linguistique.
La construction attributive est en Phase 1,
c'est-à-dire,
qu' elle co lle davantage à
Uextra":'linguistique;
l ' épithète est
corrélativement en Phase II,
ce qui revien~ à dire qu'elle est
légèrement décalée vers
15 domaine des opérations abstraites,
s'éloignant ainsi du monde concret.
Seulemnt,
dans un texte ou
un discours
donc un produit de structurations -
l'on parle
sans doute du monde extra-linguistique,
mais aussi de
la langue.
A ceux qui croient que
la langue n'est faite que pour décrire
nos activités,
H.
Adamczewski objecte:
"combien de fois
l'énon-
ciateur parle-t-il pour décrire le monde concret 7"
La concept ton métaopérationnelle du
langage voit d'abord
la langue parler d'elle-même et éventuellement,
du monde con-
cret par la suite,
même si
l'énonciateur n'en a presque
jamais
conscience.

-
L~I 5 -
2)
Adjectifs de Phase l
i)
ILL
vs
.SICE
Lorsque
les
linguistes caractprisent
les adjectifs selon
leurs propriétés sémantico-syntaxiques,
l'accent est presque
toujours mis sur le cas des adjectifs non prédicables,
c'est-
à-dire,
ceux qui ne peuvent pas être rapportés à leur support
nominal par l'intermédiaire du relateur prédicationnel BE(1) .On
n'en dit pas assez sur ceux qui r~fusent l'~pithétisation (donc
la connexion sémique)~ au fond,
conformément à
ce que nous avons
dit au paragraphe précédent,
ceux des adjectifs qui sont
"en
dissidence" avec la métaopération.
En effet,
en rgfusant d'être
rapportés directement à un support nominal,
cës adjectifs se
refusent p a r l a même occasion à
effectuer des opérations de ré-
duction d'extension des notions.
D. Bolinger remarque d'ailleurs qu'ils sont en nombre re-
lativement peu élevé
"There are also adjectives,
but few of them that
are predicative but
seldom or never attributive,,(2)
(nous soulignons)
D. Bolinger illustre sa remarque de quelques exemples:
The man is
ASLEEP
~
*an
ASLEEP
HAN
The man i sFLUSH
~
*a
FLUSH
MAN
The girl is SOHH.Y
~?
-*a
SORRY GIRL
( 1)
A.
IJANC1U
Contribution à une étude métaopérationnelle des
guantifieurs en français et en anglais,
Thèse Jème cycle,
ParisIII
1985. J\\..
Lancri avait surtout affaire aux adjectifs dits d'in-
tensité.
(2)
D. BOLINGEH
"Adjectives in English:
attribution and ]3r~di­
ca t ion" in .I:"i ngu a ,
1 8 ,
19 7 L~ ,
p.
J

-
I~ 16 -
1).
Dolinger traite
l'~pith6tisation dans le cadre de sa
théorie de
l'ordre
des mots.
I l fait
aussi un· détour -
comme
nous -
par les èonstructions passives où
le participe passé
fonctionne
comme un attribut. :Ainsi
:
(4) The Jew~ls STOLEN
est à rapprocher des
constructions attributives,
tandis que
(5)
The STOLEN .j e w e Ls
a plus a
voir avec
lescollstructions épithètes. En (4),
ce qui
est en cause,
ce n'est pas une caractéristique des bijoux mais
au contraire,
un de
leur état temporaire.
En (5)
en revanche,
nous avons affaire à une
caractéristique de~ bijoux. D.BQlinger
devait finir par opposer
'OCCASION'
vs
'CHARACTERISTIC'.
L'analyse de A Grammar of Contemporary English est stric-
tement identique à celle de D. Bolinger :
"Adjectives that are restricted or virtually res-
tricted to predicative position are
like verbs
and adverbs. They tend to refer to a
(possibly
temporary)
condition than to
characterize,,(1).
(nous soulignons)
Les positions de D.
Bolinger et de Quirk
(& al.) peuvent être
ainsi synthétisées:
les adjectifs
exclusivement. attributifs ~i-
gnifient
l'attribution d'une propriété,
ici,
propriété
contin-
gente;
les adjectifs épithètes expriment
la reconnaissance d'une
propriété nécessaire,
"inhérente",
selon les termes mêmes de
Quirk.
Nous avons déjà soulign0 que
"contingence" et
"inhérence"
( 1)
QUIRK (& a T, ]
A Grammar of contemporary l':nglish,
Longman,
London,
1976,
p.
239

nous entraînent hors du domaine
purement
linguistique.
Ils po-
sent
le problème de
la "Nécessité" qu'il
semble plus sage de
confier aux philosophes.
Sn tout état de cause,
les concepts
de
'.'contingence" et de
"inh8rence" ne peuvent pas nous éclairer
sérieusement sur l'~pithétisation possible de SICK et l'impos-
sibilit~ d'~pith6tiser ILL:
(6a)
The baby is
SIC1\\:
The SIC!\\. baby
(6b) The baby is
ILL
?* The ILL baby
Pour discriminer
les statuts de ces deux adjectifs,
nous
avons ~t~ cherché du c5t6 o~ ils sont
le plus employés:
dans
le domaine médical
"Historiquement,
l'identification des maladies re-
lève d'un processus empirique.
L'expression
de
la maladie peut être
le fait
du patient
(ang.
ILL...;.
NESS)
ou d'un médecin
(ang.
DISEASE)
sur la base
de
l'exp~rience pFatique cliniqu~ qui lui aura per-
mis de bâtir les premiers syndromes des maladies
( .•. )"
Interpr~tons les dires de ces médecins(l). Le patient sait
ou du moins,
croit savoir ce de quoi i l souffre;
l'entourage
profane suppose qu'il est atteint de telle ou telle maladie;
le médecin le
constate expérimentalement.
L'expression de
la
maladie par le patient relève d'une croyance peut-être non fon-
1
de~ mais elle est plus objective que celle de l'entourage qui
le j~ dans tel ou tel
t a t , (~u'il le veuille ou non,
cet en-
é
tourage profane est donc
plus enclin à
la subjectivité. Pour
(1)
]1.1.
JENICf.=K & H.
CLEIU~UX. : "Santé, maladie, nonna li té" dans
~pid~miologie: Principes
Techn~ques - Applications, Edicem,
Inc,
1982,
p. 2J

tout
r~sumer, nous dirons qu'il y a plus de subjectivit6 dans
SICK que dans ILL(l).
Le dictionnaire fournit un début de
solution plus
"linguis-
tique" au problème de
la discrimination du statut de ILL et SIC1\\::
ILL = not well in health:
she is ILL,
so she can't come;
SICK = not well; ILL; having a disease ( ••. )
upset in the stomachso as to want to throw up what
i s
in i t
( . . . )
Parmi
les
14 entrées
consacrées à SIC1<~,
nous avons retenu les
plus illustrativès. Plus
loin,
le même dictionnaire précise:
"a sick person has a disease not,
for example,
a wound or a bro-
ken leg,,(2).
L'exploitation que nous faisons des définitions du diction-
naire
s'orientera
en deux directions:
d'abord,
la synthèse
des définitions pour retenir l'essentiel de leur contenu
. et,
plus intéressant,
les méthodes méta-linguistiques du dictionnai-
re.
ILL
a directement rapport avec
la santé d'ordre physiolo-
gique; ILL fait
référence à
l'incapacité physique
(cf.
she is
i l l ,
so she cantt come),
ILL serait plus
"objectif".
Le program-
me sémique de ILL sera d'autant plus indiqué pour décrire un
état physique du
(suj et)
ma lade. Tout
comme ASLE.8P,
i l se com-
plaît seulement dans
les constructions 'attributives,
celles qui
appartiennent à
la Phase l
des
structurations.
Le programme sémantique de SICK ne concerne plus uniquement
la description physique;
le dictionnaire ne semble pas d'ailleurs
(1)
Nous reviendrons
sur le statut véritable des
"adjectifs sub-
jectifs".
(2') Longman Dictionary of COT1+"'m:-,,,.,..,,,~r !'~T1crl; ch
~'ih.,..r-l-, '~78

-
l~1 9 -
reconnaitre ~ SICK la facult~ de d~crire des ~tats de santé liés
à
l'incapacité
physique:
" a
sick pers on has a disease not,
for
example,
a wound or a broken leg".
SICK n'exprime pas autant
d'objectivité que ILL.
Les méthodes méta-linguistiques du dictionnaire sont tout
aussi revélatrices du caractère
(+)concret de ILL et
(-)concret
de SICK. I l n'accorde que trois entr~es à
ILL alors qu'il en
accorde
jusqu'à quatorze à SICK.
On ne perdra pas également de
·vue que les définitions de ILL à SIC1\\: pa rv-Le Longman Dictionary
ne
sont pas aussi circulaires que celles que
l'on propose habi-
tue llement de VR..A..HlENT
vs REELLEMENT. Le Longman Dictionary défi-
nit ILL sans renvoyer à
SICK,
alors que
la définition de SICK
-'.
,
fait
nécessairement appel à
celle de ILL.
Les trois entrees
lexicales de ILL et les quatorze de SICK sont à
chaque fois éta-
yées d'exemples et
le nombre d'exemples correspond,
dans
le fond,
aux différents
contextes dl o c cu r-r-e nc ee.d e s
deux lexèmes.
Le
champ
distributionnel de SICK est donc plus vaste que celui de ILL:
le champ sémantique de ILL est,
pour ainsi dire,
inclus dans
celui de SICK.
Cela signifie du m~me coup que SICK est d'exten-
sion plus
large que ILL.
Mais,nous
l'avons déjà vu,
ce qu'un
lexème perd en extension,
i l
le gagne en densité sémique:
ILL
est d'interprétation plus
imm~diate, c'est-à-dire, qu'il est
d'une densité
sémique plus élevée que SICK :
champ sémantique
champ sémantique
ou extension de ILL--~Hf~\\~~)~~'
Il:l"--ou extension deSICK
forte densité
sémique
faible densité
sémique
... ~.

SICK se rapproche davantage des v~ritables m~taop6rateurs
par deux voies
complémentaires •.
Etant d'extension très
large,
i l partage quelques affinit65avec un op~rateur comme BE,
notion
verbale d'extension quasi-illimit6e. Toujours parce qu'il est
d'interpr~tation moins immédiate,
c'est-à-dire,
a un. sens rela-
tivement vague
(en tout cas par rapport à
ILL),
le s~mantis-
me de SICK ouvre plus directement
la voie à
la subjectivit~ •
L'emploi de SICK implique une
certaine subjectivité de
l'~non­
ciateur(l);
en ce sens,
i l est
légèrement décal~ vers le méta-
linguistique. Toutes ces raisons
expliquent que SICK accepte
le statut d'épithèt~ -
une ~tape structurale
l~gèrement d~cro-
ch~e du plan extra-linguistique.
Cela explique aussi que SICK
s'ant~pose comme les op~rateurs du nom~
l'antéposition étant
certainement
la position la plus favorable pour influer sur
l'extension des notions nominales.
ii)
l'REGNANT
(de
l'anglais)
vs
ENCEINTE (du français)
Nous n'avons oppos~ jusqu'ici que SICK et ILL; nos hypothè-
ses devraient être génnra lisab les aux corré lations LI'ITLE/S~lALL,
BIG/ LARGE,
NICE/HANDS01'Œ,
NICE/PRETIY . . . En ce qui
concerne
le cas particulier du dernier couple d'adjecti~) l'on sait q~e
NICE peut avoir pour support nominal
la presque totalité des
noms y
compri s
les supports nominaux de HANDSOl"IE et PI?E'ITY,
a lors
que
l'inverse n'est pas possible. HANDSO.Î'lE,
par exemple,
exige
(1) En 6nonçant
'X is sick'
sans autre spécification coniextuel-
le,l'interlocuteur peut ~eulement comprendre (et vaguement d'ail-
leurs) que
l'individu X en question a quelque malaise

-
1~2 1 -
d~jà que son support nominal ait le trait (+)m~le, ce qui signi-
fie qu'il exclut un tr~s grand nombre de noms de son domaine
d'application.
Quant à NICE,
l'immensit~ de son extension (i.e.
son domaine d'application)
le rapproche des outils grammaticaux;
i l peut notamment se prêter à
la structuration des prédicats
Inatriciels
(e.g.
i t ' s NICE to •.. )
ce de quoi sont incapables
les adj ectifs comme HED,
ELECTRI C,
PHETTY" HANDSOHE (e. g.
i t ' s
Rl':D,
? i t
is HANDSmlE to •.. )
I l faudrait d'ailleurs se demander pourquoi
la langue main-
tient des couplés du type BIG/LAHGE,
LITTLE/SMALL . . .
ce
n'est
pas
la question ici.
Cependant le cas d'un adjectif comme ENCEIN-
TE mérite qu'on s'y a~rête un instant.
L'anglais antépose PREGNANT,
comme d' ai-lleurs
la plupart
de ses épithètes. A cause de cette tendance à
antéposer tous
ses adjectifs épithètes,
l'anglais
accuse un certain manque de
métalingUistiCité(l)
. Nous le verrons plus en détail
lorsque
nous aurons décrit
le véritable statut de ENCEINT!!: du français.
L'adjectif ENCEINTE est
loin d'exprimer une quelconque
forme de subjectivité.
C.
Delmas l ' a montré
en confrontant cet
adjectif
à d'autres qui,
eux,
trahissent un engagement à
peine
déguisé
de l'énonciateur(~). Nous le confirmons en nous référant
à la densité sémique de ENCEINTE,
cet adjectif d'extension très
réduite et de
compréhension bien large;
l'on comprendra d'ail-
leurs que son emploi métaphorique soit plutôt rare,
la métapho-
re ~tant un décrochage
vis-à-~is de la réalité.
(1)
Au cours de
leur 6volution,
certaines
langues semblent avoir
gagné en métalinguisticité en adoptant l'ordre des mots
(antépo-
sition,
pastposition de
l'adjectif)
comme indice des états dere-
lation. A en croire M.
Wilmet,
l'ordre initial et immuable du
français était
l'antéposition.
(2)
C. DI';U1AS :
Que lques éléments de la méta langue
n e t.u.r e l 1 e.
Jème cycle,
Paris III,
1980,
pp~ 216-229

Un adjectif comme :':NCli:INTE,
les
locuteurs français pvi tent
de
lui accorder l'ant~position, une place stratégiquement impor-
tante sur la chaîne
linéaire.
L'antéposer,
serait
lui reconnaî-
tre ' cl e 5
virtualités métaopérationnelles comme GRAND,
SACH.E ••.
Bref,
ENCEINTE est condamné par son sémantismeà la postposition.
Quant à PREGNANT,
par trop tributaire du concret,
lui aussi,
i l
se voit exclure du domaine de
la relation prédicative thémati-
que,
cette relation qui est en rupture avec
le concret
???
She is being PREGNANT •.•
En ce qui
concerne ENCEINTE,
le vrai probl~me est de savoir
si,
postposé,
i l constitue avec son support nominal, une conne-
xion sémique. Dans
'une FEjv]HE ENCEINTE'
s'agit-il d'une com-
plémentation sémique de FEMHE
par
ENCEINTE?
En langage de
grammaire métaopérationnelle,
s'agit-il d'une opération de ré-
duction de
l'extension de
la notion l"El'n"1E,
comme,
par exemple,
une FElIn·J!;:; Cfi:LIBATAInE où l ' adjectif réduit, l'extension de
la
notion-cible à
la mani~re des déterminant-articles du français!
anglais et des MN du senoufo ?
En un mot,
(une femme)
ENCEINTE
est-il un adjectif épith~te ?
H.ien n'est moins sûr. Parce que,
sémantiquement,
i l ne s'agit pas d'une propriété-inhé:tente à
la femme,
pour reprendre Quirk et D .. Bolinger,
mais d'un cas
de description liéeà son état du moment.
Dans
( 8)
une
t'emme
(EN) CI~INTE,
le processus discursif consiste À attribuer un certain état à
FEMM8.
ENC~INTE est strictement attribut et il faut,
peut-~tre,
remonter en diachronie pour se rendre compte que
l'opérateur

J~2 3
/F~N-/ s'est soudé au fil du temps El /.,..ccn,rr/. Cela signifie que
pour nous
1-
Une femme
(EN)CEINTE
Une fi 1"1-e EN grossesse
(9)
Un enfant
EN larmes
(~r{
Un soldat EN armes
Un enfant EN bas âge. . .
représentent bel et bien des descriptions de sujets grammati-
caux.
Nous avons donc affaire ici à de véritables structures
attributives.
L'on admettr.a aisément que
ce sont des construc-
tions attributives une fois que
l'on a
compris que
l'opérateur EN
est un relateur prédicationnel
(cf.
chapitre IV). Rappelons que
des énoncés du type
I l me traite
EN
ami
fournissent
des cas de structures attributives o~ M1I estattri-
but de
l'objet ME.
B)
L'ANTEPOSITION DE L'ADJECTIF ET SA l'~ONCTION HETA-LINGUISTIQUl:C
Une
littérature très fournie a
été
consacrée à
la place
de
l'adjectif épithète~ en français en particulier.
Nous n'au-
rons pas assez de place pour passer en revue toutes
les tenta-
tives de solutions qu'il nous a
été donné d'évaluer.
E.
Reiner
a
consacré
tout
une thèse
(de
J47 pages) non pas au fonction-
nement de
l'adjectif
mais
à
(presque)
tout
ce qui
s 'y est rap-
porté depuis
les grammaires pré-scientifiques
jusqu'à nos
jours.

-
L~2 4. -
Si
l'analyse de E.Reiner(l)
ne reçoit pas une entière adh~-
sion de notre part,
ce n'est pas tant à
cause de son extr~me
concision;
en effet,
l'apport personnel de E.Reiner ne tient qu'en
une cinquantaine de pages.
Comme
la plupart des
linguistes
"ad-
jectivisants",
i l n'a pas pris le temps d'examiner s~rieusement
le statut intrinsèque de
l'adjectif en tant qu'él~ment sémanti-
que,
nous entendons par là les deux faces de
l'~l~ment s~manti-
que
(extension
vs
compréhension).
Le
problème de
la place de
l'adjectif ne se pose pas avec
la m~me
a cu l t
en français et en anglais.
En anglais,
l'épithè-
é
te est
(presque)
toujours ant~pos~e. Ce qui pourrait donner
l ' illusion que le problème est d
j
r-é s o.Lu
de moi t Lé ,
La double
é
à
position
(ant~position, postposition) que le français a fini
par adopter vis-àvis de
ses ~pithètes, au
lieu de constituer
une difficult~ suppl~mentaire, constitue d~jà un début de solu-
tion dont
chaque Ld rig'u Ls t e v.d e v r-a L t
tirer profi t,
à
condi tion,
bien entendu,
que son cadre théorique s'y pr~te sans accroc.
L'on sait que
ce n'est malheureusement pas toujours
le cas.
Nous nous attaquerons d'abord à
l'antéposition de
l'adjec~
t i f en français
et en anglais.
La mobilité de
l'adjectif fran-
çais sera ensuite examinée en m~me temps que l'ordre des épithè-
tes
co-occurrant~à plusieurs aux côt~s du nom; ce dernier phé-
nomène sémantico-syntaxique concerne surtout
l'anglais qui,
ne
pratiquant que
l'antéposition,
est bien obligé d'imposer une
succession aux épithètes
lorsqu'il y
a
accumulation.
(1)
1';.
JŒTNEi(
:
La place de
l'adjectif 0pithète en français.
Théories traditionnelles et essai de solution,
Stuttgart,
1968

-
425-
1)
L'outil de structuration et
le méta-op~rateur
Quand II. Adamczewski
lançait
l'id~e de m~ta-op~rateur
après un long et minutieux examen du fonctionnement de BE+ING(l),
c'~tait pour renvoyer à une r~~lit~ bien pr~cise. C'est l'id~e
selon laquelle
certaine~unit~s servent à construire les énoncés,
tout
en indiquant
le type d'op~rations qu'elles effectuent et,
éventuellement,
la manière dont
elles
les effectuent.
A la sui-
te de H. Adamczewski,
C. Delmas précise
le
statut du méta-opé-
rateur par rappo~t à celui de
l'opérateur tout
court;
i l était
question, ,en particu lier,
de
l'.:NOUGH :
,,( ••• )
J~NOUGH est un opérateur et même un -in~ta.op~"",
rateur à
part entière.
Opérateur dans
la mesure où
i l n'est plus un simple mot mais un outil qui per-
met
le travail de
construction du sens
(cf opérer,
cheville ouvrière etc . . . )
et métaopérateur dans
la
mesure où i l permet non seulement de
construire
le
sens,
mai~ aussi de renseigner sur la structure en
question" (2) .
On constate de plus en plus,
surtout dans
les conversations,
une sorte de généralisation abusive de"rii~taopérateur" à ce
qui n'est qu' "opérateur" . . .
Pour les énoncés
(10)
She raised herself on her elbow and by the
light
of the
NIGHT-LIGHT that always burned
( ..• )
she
looked at the time.
(DUlVJ vr r
- 2 En
(11)"So you are a
private cletective",
she
s a i.cl ,
"1 didn't know
they really exist,
except in books.
Or else they were
_____~J~:~~~_~='~'~L!.: j·I!SN snopping around hote 15. (BISLlCl<:l' _ 15)
( 1) H.
ADA1\\'!CZ!~1;'SKI
mC+ING,
1976
( z
~ )
C
"Enough" et
J

DV·J·
.l.'J
1\\1
~l·, vs
1:::;
:
"n s s e z " in T~{:~1'1A S,
Pu b 1.i cation de
l'UEr{ de s
Pays ang1.ophones,
Paris 111,1983,
p.
35

-
426 -
(12)
Encore une question sur le
52·'f-7000. Nous avons enco-
re un PE:TIT QUAHT .D'BEURl:: •••
(France Inter 26/0J/85)
Dans chacun
des
trois ~nonc~s, les él~ments soulign~s
contribuent
à
leur mani~re -
à
l'~laboration du sens. En cela,
ce sont des matériaux de structuréltion.
L'on sent
leur statut
se préciser lorsqu'on consid~re les modalités de
la structura-
tion de ce sens.
L'apport sémique de NIGHT à LIGHT
(10)
donne
une notion complexe
lexicalisée d'ailleurs
comme substantif
dans
le dictionnaire.
La fonction opérationnelle fondamentale
indissociable de
la complémentation s~mique -
est
la r~duction
de
l'exf~nsion de la notion LIGHT. L'apport de s~mes des deux
adjectifs en
(11)
à MAN donne,
du point de vue effet,
une des-
cription de MAN,
description qui
correspond à
l'image que se
fait
l'énonciateur de ce que doit être un détective.
Là aussi,
l'op~ration essentielle reste la
réduction de
l'extension de
la notion
de HAN. Mais NIGHT et GREASY,
LITILl'~ (dans une moin-
dre mesure)
restent des op~rateurs. S'ils réduisent l'extension
des notionsi!Dominales,
i l s n'ont pas atteint
ce seuil de méta-
linguisticité
tel
qu'ils soient à même de renseigner sur l'im-
portance quantitative de
la réduction opérée sur leurs
cibles
nominales
comme
l'auraient fait
les déterminants
(articles et
t-lN) •
Dans
l'énonc~ (12) en revélnche, outre la tr~s probable ré-
duction d'extension o p é r-é e par PETIT sur QUART D'IlSUHJ~, outre
son tout aussi probable élpport s~mique, i l a,
sur sa cible, un
effet minorant.
Cela signifie en clair que
le rapport de NIGHT

-
427 -
à LIGHT, et GH_EASY & LITTLl~ à j\\jAN n' est pas exactement le même
que celui que PETIT entretient avec sa cible nominale.
PETIT
quantifie QUAHT D' llEUHE à
la manière d'un nombre e.n t Le r- é levp
n);
à une certaine puissance
(X
i l di t
que qUART D' I-IEURE doit
être pris dans son sens le plus étroit
et
c'est ce qui en
fait
un méta-opérateur.
C'est aussi cette faculté
qui fait défaut -
dans
le contexte -
à LITTLE et plus encore à NIGET et GREASY.
Que
la même unité de sens
(LITTLE de
l'anglais et PETIT du
français)
soit
tour à
tour opérateur puis métaopérateur est une
question qui trouvera réponse dans
la suite de
l'analyse. Fai-
sons seulement ramarquer que l'unité sémantique qui veut préten-
dre au statut de métaopérateur doit avoir une extension suffi-
samment
large pour contenir des
sèmes très ~~rié~de sorte qu'~n
strut~uratio~on~puissey
retrouver les effets de quantification
(majorant,
minorant).
L'énonciateur n'aura plus qu'attendre une
occasion
qu'il aura jugéeadéquate~pour ré-activer'les sèmes ap-
propriés au contexte ou à
la situation.
L'on peut toujours dire qu'une unité donnée a un statut
de métaopérateur à
condition,
à
chaque fois,
de prendre
le
temps de préciser en quoi sa fonction d'opérateur est doublée
d'une fonction méta-linguistique.
A.
Lancri,
dans
son analyse des opérateurs de quantifica-
tion,
a
parlé d'adjectifs m~ta-linguistiqUes(l) et l'emploi du
terme semble pleinement
justifié-
"( ..• )-N'ayant aucune valeur référentielle,
ils
[les adjectifs méta linguistiques] ne peuvent inter-
(1)
L'idée d"'adjectif méta-linguistique"
est due à H.Adamczewski.

-
428 -
venir qu'en situation,
sous
l'enti~re responsabi-
lité de
l'énonciateur,,(l).
(nous soulignons)
Cette mani~re de caractériser les adjectifs métalinguistiques
mérite qu'on s'y arrête quelque
instant
• Dire qu'un adjectif,
même métalinguistique,
n'a "aucune valeur référentielle" ouvre
la polémique sur la notion de référence.
Quelque soit son de-
gré de subduction sémantique,
quel que soit
son degré de re-stru-
turation,
l'adjectif reste un élément intrins~quement sémanti-
que,
c'est-à-dire,
générateur de sens.
Le sens quant à
lui,
n'est réalité que par rapport à
l'extra-linguistiqueet pour ETRE,
i l .
doit
n'cessairement faire~ppel à l a référertce.:Dis~ns
simplement que
le degré de subduction d'une ùnité
linguistique,
la distance parcourue du plan extra-linguistique au plan méta-
linguisti.que en passant par les trames de
structurations,
ce
parcours au terme duquel
l'unité revient pour parler de la
structuration du sens,
se mesure par l'extension de sa notion.
Si cette extension s'élargit à
l'infini,
la compréhension de
l'unité
tend à
s'annuler et son interprétation n'étant plus
possible,
on peut
effectivement penser qu'elle
-n'a plus de
sens",
en d'autres termes,
qu'elle n'a "aucune valeur référen-
tielle".
Dire que
les adjectifs métalinguistiques ne "peuvent in-
tervenir qu'en situation" demande davantage d'explications;
en-
fin la notion de
"responsabilité totale de
l'énonciateur" n'est
pas toujours
clairement perceptible.
A.
Lancri a
donc dû revenir
sur la fonction méta-linguistique des adjectifs
(1)
A.
LANCHI
Contribution a une étude métaopérationnelle des
guantifieurs en français et en anglais,
Th~se )ème cycle, Paris)
1985,
p.
120

-
4::::9 -
"11
semblerait que ce soit
l~.l ( •.. ) des signaux
mis en place par l'0nonciateur au niveau de
la re-
lation nominale pour clonner la marche à
suivre,
quant à la façon cl'envisager le contenu
sémique
du nom" ( 1 ) •
Nous souscrivons enti~rement à
cette acception de
la fonc-
tion des adjectifs métalinguistiques.
Elle n'a plus qu'à être
approfondie et
c'est
ce que nous nous attacherons à faire.
Nous
inscrivons,
bien entendu,
la description du fonctionnement de
l'adjectif (métalinguistique)
dans
le cadre général de
la rela-
tion en linguistique. Nous puiserons à
l'int&rieur-même de la
langue,
des preuves du fonctionnement méta~linguistique de l'ad-
jectif en le .rapprochant de certains opérateurs dont
la fonction
métaopérationnelle est maintenant établie;
c'est une démarche
qui s'inscrit,
comme toujours,
dan~ le droit fil de la contras~.
,
tivite
intra-lingue.
2) L'adjectif et son statut dans le linéaire
Tr~s t5t,
dans
l'histoire de
la linguistique,
les grammai-
riens
ont senti
(intuitivement)
la rapport que
l'adjectif a
toujours entretenu avec
les vrais morph~mes grammaticaux.
Ce qui
prouve,
comme s ' i l en était encore besoin,
que
l'adjectif est
un
lex~me bien particulier.
Pour prouver l'existence de ce rapport,
les recherches se
sont orientées en plusieurs directions.
On a,
par exemple,
cher-
ché du c5té de
la détermination -encore
l'un des
concepts qui
traine derri~re lui,
un lourd héritage dans
l'histoire de
la
( 1)
A.
LANCJI.I
op.
cit.
p.120

- 4JO -
linguistique.
I l n'empêche;
aujourd'hui encore,
P.
Cahné parle
d'une
"valeur déterminative"
de
l ' a d j e c t i f :
"Au niveau du discours on voit que
lorsque
la va-
leur déterminative de
l'adjectif est au premier
plan,
l'adjectif ne peut être omis sans rendre le
message incompréhensible" (1) •
A l'appui de ses thèses,P.
Cahné prend pour exemple
le syntagme:
(13)
les tulipes NOIRES
P. Cahné en est déjà au "message",
a
l'interprétation des èffets,
pour ainsi dire.
Mais nous
r~joignons ses positions lorsqu'il
se décide à
parler en termes d'opérations:
NOIRES réduit
l'ex-
tension de TULIPES créant ainsi une sous-classe du référent TU-
~PE. En ce sens,
on peut effectivement déduire que
l'adjectif
joue le même rôle que
l'article et par ce biais,
i l ressemble
a un morphème grammatical;
mais i l faut
s'empresser de préciser
qu'il effectue cette fonction "déterminative"
"à peu près com-
me
l'article".
Nous avons déjà vu pourquoi un adjectif comme
NOIRE et dans
le contexte de TULIPES NOIRES était
loin d'entrer
sérieusement en compétition avec l'article;
sur le
terrain
de
la métalangue naturelle,
s'entend.
Comment est-il possible
qu'un adjectif comme NüIH.E,
postposé comme i l
l'est,
détermine
de
la même manière gue
l'article qui est,
lui,
toujours antépo-
sé ?
Certains
linguistes
(nous n'en citons que quelques uns)
ont cru voir juste en prenant exclusivement
l'antéposition pour
(1)
P.
CAHNE :
"Place,
valeur et adverbialisation de
l'adjectif"
in H.evue des
langues romanes,
SO,
197:~, p.
121

crit~re.
Leur raisonnement revenait à
ceci:
comme
l'article
qui
est un morphème grammatical,
l'adjectif détermine;
comme
l'article,
l'adjectif à valeur déterminative s'antépose au nom.
Sans peut-être le savoir ou sans
le vouloir,
ces
linguistes re-
fusaient du même coup,
ou,
en tout
cas,
méconnaissaient
le pou-
voir de déterminer à ceux des adjectifs qui
sont uniquement
postposés.
On se souvient que P.
Cahné parlait d'une valeur dé-
(
terminative de
'(tulipes)
NOIRES', qui est
un cas de postpo-
si t.ion.
L'on aura senti naturellement que ce qui
fait
problème,
c'est
le terme de "détermination".
L'argument de P.
Cahné ne peut
d'ailleurs avoir de valeur explicative que s ' i l avait décrit clai-
rement
les modalités de
la détermination effectuée par l'article
français;
mais i l semble considérer cette fonction comme allant
de soi.
Il.
Weinrich (1966)
s'est surtout intéressé au crit~re syn-
taxique pour monter que
l'adjectif antéposp a
de profondes af-
finités avec
les morphèmes grammaticaux. I l prend trois crit~-
res formels dont nous retiendrons
le plus défendable;
en appa-
rence.
L'adjectif antéposé
est dans une forte
cohésion avec
le
no~ auquel i l se rapporte; il n'est donc "plus qu'un préfixe
ou une anticipation Pléonastique,,(l). Mais pour que cet argument
de \\veinrich .fût
convaincant,
i l
lui fallait d'abord convaincr~
que
les adjectifs antéposés entretiennent effectivement une
forte
cohésion
avec
les noms qui
les suivent.
La cohésion en-
tre
l'adjectif antéposé et
le nom est également un fait
consi-
déré comme allant de soi par la majorité des
linguistes; mais
(1)
H. Weinrich cité par E.
FAUCHER:
"La place de
l'adjectif.
Critique de
la notion d'épithète" in Le français moderne,
39,
1971

nous verrons que,justement parce que
l'adjectif ant~pos~ fonc-
tionne parfois comme un article
(un morphème grammatical,ou un
outil de
structuration),
i l ne saurait être dans une forte
co-
h~sion avec sa cible nominale.
Par ailleurs si
l'on affirme que
l'adjectif antéposé déter-
mine
le nom à
la manière des articles,
c'est
insinuer l'exis-
tence de quelque incohérence dans
le système que constitue la
langue:
l'adjectif postposé détermine
(cf.
P.
Cahné),
l'adjec-
t i f antéposé aussi.
En~ore une foi~, si' l'adjectif, quelle que
soit sa position,
agit sur l'extension des notion nominales i l
parai t :
assez curieux qu'il
le fasse
exactement
dans
les
mêmes
conditions;
et ce sont ces conditions qu'il faudrait plu-
tôt s'efforcer de clarifier.
M.
Wi Imet ( 1 )
introduit
le rapport entre l'adjectif antépo-
sé et
les morphèmes grammaticaux par le biais de
la quantifica-
tion.
"Les caractérisants numéraux",
ccmprenant
les a.dj e c t Lf s
cardinaux/sont une série assez spéciale d'unités;
elles forment
un système clos comme
justement
les morphèmes grammaticaux. L'ad-
jectif antéposé a beaucoup de
choses en commun avec ces unités
jus-
tement toujours antéposées elles aussi.
En outre,
du point de
vue fonctionnel,
l'adjectif antéposé applique une
sorte de quan-
tification sur les noms tout
comme
les adjectifs cardinaux (li-
re
les
"caractérisants numéraux'!).
Le
lien entre
l'adjectif antéposé
et les
"caractérisants
numéraux"
semble avoir bien été senti.
Ces
"caractérisants nu-
méraux" et
les
"caractérisants indéfinis"
"présupposent une
(1) M. WIUIET :
"La place de
l'épithète qualificative en fran-
çais o o n t omp o r-a Ln "
in Revue de
linguistigue romane,
!~5, Janvier-
Juin 1981

-
~I JJ -
référence contextuelle ou situationnelle
(le THOISIEHf~ homme,
l'AUTHE femme,
un :-lEHE enfant)" et
l'adjectif antéposé assure-
rait
la même fonction.
M. Wilmet est à deux doigts de
la solution. I l
lui aurait
seulement fallu préciser davantage ses intuitions en explicitant
deux points:
d'abord,
la véritable nature du rapport
entre l'ad-
jectif antéposé à valeur de quant~fication, ensuite, dire en
quoi les· "caractérisant s
numéraux et indéfinis" ont un rapport
avec
le contexte ou la situation.
Les deux points se r~joignent
d'une certaine manière;
i l suffit de
les rapporter à
l'instan-
ce Relation.
Nous prendrons comme illustration,
un adje~tiÎ
dont
la fonction anaphorique ne fait pas de doute
(lLI) La ligne de partage entre le nominal et le verbal se-
ra trouvé ici si l'on veut bien comparer le verbe au subs-
tantif selon les représentations
les plus générales. k':2~
~o~~~j~~ qui a~parait ainsi est du type continu/discontinu.
( ••• ) Le singulier,
le pluriel ont u~ sens dans le dis-
continu
( ••• ) I l est impossible d'affecter d'un nombre le
lexème verbal lui-même.
Une
TELLE OPPOSITION
associe
le verbe et
l'adjectif
face au substantif.
(R.
Lafont,
La phrase occitane)
L'adjectif TEL
qui est
aussi un "caractérisant" dans
la termi-
nologie de M. Wilmet fait
charnière entre
le contexte-avant et
la seconde occurrence de OPPOSITION;
i l symbolise ainsi une re-
lat ion :
contexte-avant
OPPOSITION
chaine
linéaire

Les numéraux
(UN,
DEUX,
TROIS .•. )
sont,
dans
la structura-
tion du groupe nominal,
des m~taop~rateurs de cibles nominales.
D'abord,
ils impliquent un dénombrement,
op0ration résolument
concrète puisqu'elle suppose un parcours énum~ratif de chacun
des
Lérne n t s
considér~s dans la'situation... Opérateurs de Phase 1,
é
les noms qu'ils
introduisent sont ainsi à
leur première phase
de structuration dans le plan énonciatif; une autre manière de
dire que
l'extension de ces notions nominales ainsi introduites
est à peine r~duite. Mais
l'essentiel à
retenir est que ces op~-
rateurs numéraux sont des points de
jonction entre le contexte
et/ou la situation et
le nom,
entre
le contexte-avant et le
contexte subséquent sur la chaine
linéaire.
Les opérateurs en
question signifient
l'articulation d'un programme s~mique (i.e.
la construction du sens)
sur la chaine
lin~aire :
NOM
c_c ~_'
_o~::[_t_:_i_r
~
chaine
linéaire
Le schéma
montre clairement que
les op~rateurs numéraux
sont des éléments de relation,
comme
les anaphoriques
(voir
chapitre II)
mais aussi
comme
ces morphèmes grammaticaux que
sont
les articles.
C'est donc
la notion de relation qui manquait
à M. Wilmet,
ce qui ne
lui permettait pas d'aller plus loin pour
découvrir les similitudes métaopérationnelles
(c'est-à-dire,
les vraies)
entre
les articles et
les adjectifs indéfinis

-
!~ J5 -
comme TELLE,
MEME, AUTH.E ..•
eux-mêmes plus morphèmes grammati-
caux que morphèmes
lexicaux. Mais
i l reste encore à préciser
davantage
la parenté
entre le déterminant-article et
l'adjec-
t i f antéposé et partant,
l'adjectif métalinguistique.
i)
l'antéposition de
l'adjectif,
l'extension de
la notion
adjectivale,
le contexte,
la subjectivité
Partout o~ i l a été question des adjectifs,
l'on a presque
toujours fait
appel à
la notion de subjectivité.
Certains lin-
guistes en font un usage très modéré
compte tenu même de
l'ex-
trême imprécision du métaterme.
Comme "détermination",
"subjec-
tivité" fait partie de
ces pseudo-concepts à' proscrire de
la
linguistique théorique dès que cela sera possible.
Les adjectifs exprimant
la subjectivité impliquent,
par
leur emploi,
un jugement, une forme de modalisation;
on les
appelle encore
"adjectifs appréciatifs"
(e.g. GOOD,
BAD~ NICE ••• )
Modalisation,
appréciation,
subjectivité sont des réalités que
l'on ne peut pas ne pas prendre en compte dans
l'analyse de
la
langue, mais i l convient de ne
jamais perdre de vue que ce ne
sont
jamais que des effets
(de
sens).
En première approximation,
nous appelions
ces
"adjectifs appréciatifs" des adjectifs d'ef-
fet.
Les adjectifs appréciatifs ou subjectifs dit-on,
manifes-
tent une tendance très poussée à
l'antéposition.
Cela ne peut
plus être contesté;
pourtant M. Wilmet fait mine de d~fendre
cette thèse à
coups de statistiques(l).
Par contre,
ce qu'aucun
(-1.) M.
HIUIET op.
cit.
a
fait
faire
à
ses étudiants
le recensement de
29.
106 syntagmes adjectivaux;
but de
l'entreprise:
trouver ce
qui régit
l'ordre des adjectifs.

-
4J6 -
linguiste
(à notre connaissance) n'a su expliquer, c'est le
pourquoi de
l'antéposition des adjectifs subjectifs. Rappelons
qu'en matière de recherche,
l'observation qui mène à
la consta-
tation est une étape préliminaire,
le pourguoi des phénomènes
constituant
l'étape essentielle.
1
"
b'
t '
i t é "
Nous expliquerons
le pourquoi de . a
su Jec lVl e
d e
cer-··
(
tains adjectifs,
le pourquoi de leur antéposition, ,par la nature
même de l'élément sémantique en général:
le degré d'extension .des
notions .auxquelles les adjectifs font référence.
Ce degré
:d'ex-
tension est,
lui-même,
en étroite corrélation avec l'effet res-
tricteur du contexte ou de la situation,
en un mot,
avec la mi-
se en relation.
L'adjectif,
en général,
est d'extension plus
large que le
nom.
C'est
le degré d'extension qui introduit dans
la gradation
extra-linguistiqu.e ---7 méta-linguistique, une hiérarchie entre
l'adjectif et
le nom. Mais comme les noms entre eux-eux~l), les
adjectifs sont eux aussi hiérarchisés entre eux.
Un adjectif comme METALLTC a une extension à peine plus
La r--
ge que le nom HETAL dont
i l est directement dérivé.
Son domai-
,
.
( 2 )
ne d'application se limite,
en prlnclpe
,
aux entités carac-
térisables par leur constitution physique.
Le domaine d'appli-
cation de METALLICétant réduit -
son extension restreinte -
i l
se présente comme un é lément.sémantique de très forte teneur
sémique.
(1) R.
Lafont montre que
les noms dits abstraits sont,
en fait,
plus méta-linguistiques que
les noms dits concrets.
L'apparition
d'un nom comme
CHARIT1~
dans
la langue renseigne sur la surve-
nance d'un certain fait
social dans
le monde européen:
ce com-
portement préconisé par la religion chrétienne.
(2)
Un personnage de C. Dickens a pu décrire sa tante comme
"advIETA'LLTC ,\\rOMA~". Un emploi mé taphorique,
dira-t-on.
La si tua tian

-
L~ J7 -
Quant à
l'adjectif NICE,
i l peut être dit d'un nombre i l -
limité de référents,
ce qui signifie qu'en structuration,
i l
peut prendre pour cible,
la presque totalité des formes nominales.
Son domaine d'application (ou son extension)
4tant donc très
vaste, un adjectif comme NICE,
disons
les adjectifs autrement
appréciatifs
(PRETTY,
GOOD ••• ) tendent à
effectuer les mêmes,tâ-
ches structurales que les adverbes de modalité.
Nous reviendrons
plus en détail
sur l'adverbialisation des adjectifs •••
L'exten-
sion d'une unité,
rappelons-le,
concerne son contenu ou sa struc-
ture sémique;
l'interprétation sémantique,
elle,
se situe du cô-
té de l'effet et
les effets sémantiques sont étroitement dépen~
dants du contexte ou de
la situation. Dans
les énoncés
:
(15)
Ohls looked at him silently,
his eyebrows bristling
and stiff and round like LITTLE VEGETABLES
( ••• )
(BISLEEP -
)
(16)
"Let's take a
LITTLE WA.I...K" T s a i.d ;
"Let's take a
NICE LITTLE IvALK". We took a
LITTLE IvALK.
(BISLEEP -
J!~)
(17)"Quels renseignements pouvez-vous fournir sur la mal-
heureuse
PETITE ASSASSINEE 7"
(A.B.C.
-
57)
(18)
"ScQtland Yard 7" said Mr Bernard hopefully.
"This
murdering vilain's got
to be
laid to
the heels. ~ poor
LITTLE
GIRL •.• "
(A.B.C.
-
58)
perinettai t
à
l'énonciateur de qualifier sa tante de
"Ml';TALLIC."
la da~e ~n question é'tait to~t'e couverte' de bLj ou x , En vapp Ld e-
quant cet adjectif à WOMAN,
i l prenait sur lui d'étendre son
domaine d'application jusqu'à un-référent ayant
le trait
(+)hu-.
main. I l faut
aussi voir que
le sémantisme de i''IETALLIC fait
écho
ou est conforme à
la situation d'énonciation (i.e.
une dame cou-
verte de bijoux,
c'est-à-dire des parures
métalliques).

-
4J8 -
(19)
Au Zimbabwe,
les choses se passent plus simplement.
Le pays saigné par l'exode des PETITS
BLANCS et notam-
ment des cadres nécessaires au fonctionnement de
l'écono-
mie et de
l'administration,
vit sous la pression croissan-
te de
l'Afrique du Sud.
(J-P Cot,A l'épreuve du
pouvo Lr-,.... p_~J 27)
Essayons d'analyser ces énoncés en nous basant sur l'effet
appréciatif de LITTLE et de PETITE.
En (15)
et
(16)
LITTLE vé-
hicule
l'effet de
' t a i l l e ' :
la taille des
légumes pris en com-
paraison (15),
la longueur de
la promenade ou sa durée
(16).Mais
en (17)
l'effet sémantique approprié,
celui qu'il convient de
retenir dans
le contexte n'est pas aussi facile à déceler.
Lors-
que
le détective énonce PETITE ASSASSINEE ii~ est plutôt diffi-
le de décider s ' i l fait référence au
jeune âge de la victime
ou si,
au contraire,
P}<~ITE, lia quelque chose de gentil". Par
contre,
en prenant en compte les données situationnelles,
l'on
a des raisons de penser que PETITE
a
rapport avec
l'âge:
la
victime est une fille de moins de vingt ans.
Dans
l'énoncé
(18)
ce sont encore les données contextuel-
les qui permettent de retenir pour LITTLE l'effet appréciatif.
M.
Bernard se
lamente sur la mort de sa fille
et ce qui
l ' a t t r i s -
te ce n'est pas tant que sa fille meure
jeune, mais que ce soit
sa fille à
lui qui soit assassinée.
I l convient maintenant de traduire toutes ces gloses dans
un métalangage plus approprié aux opérations
linguistiques. Si
LITTLE signifie d'une part,
la taille,
la longueur ou la durée
et de l'autre,
l'affectivité,
c'est à
cause de
l'étenduede son

-
l~ J9 -
domaine d'application.
L'immensité de son extension lui permet
de contenir des
catégories sémantiques
très
éloignées les unes
des autres.
C'est ainsi que peut être expliquée l'extrême varié-
té.
des effets sémantiques dus aux adjectifs dits appréciatifs.
L'étendue de leur extension leur permet de
comprendre des effets
sémantiques très variés,
si variés,qu'ils peuvent devenir con-
tradictoires. Ainsi,
(20 )
Ça,
c'est du
BEAU
travail
traduira,
selon la situaiion,
une appréciation tr~s favorable
ou,
au ~~ntraire, pourra être une exclamation de carcatère très
disphorique.De tous
les effets sémantiques,
le sujet énonciateur
choisit,
mieux,
sélectionne celui qui convient
le mieux à sa vi-
sée discursive;
de sorte que le sens de l'adjectif appréciatif
relève,
en dernier ressort,
de
la seule intension discursive de
cet énonciateur.~n d'autres termes,
l'adjectif (appréciatif)
prend le sens que
l'énonciateur décide de lui accorder en fonc-
tion du contexte. Et
tout
cela explique du même coup la soi-di-
sante subjec~ivité attribuée aux adjectifs appréciatifs: une sé-
lection personnelle et donc forcément subjective d'un effet séman-
tique particulier par l'énonciateur structurant.
Dans le plan des structurations,
la sélection opérée par'
l'énonciateur correspond à
la ré-activation de
l'un des effets
sémantiques que
comprend l'extension des adjectifs du type GOOD,
NICE,
BAD••• ,
En guise de
conclusion partielle,
nous dirons que
l'extrême
immensité de
l'extension de ces adjectifs
~eur
donne
·~ette

latitude
~ produire des effets sémantiques en nombre quasi-il-
limit~; quant aux adjectifs directement dérivés de substantifs.
(type ~ETALLIC, WOOLLEN ••• ),
leur extension est bien sûr plus lar-
ge que celle des substantifs dont ils dérivent,
mais beaucoup
moins large que celle
des adjectifs dits subjectifs. A cause
de
leur extension relativement limitée,
ces adjectifs encore pro-
ches de
l'élément sémantique "nom" sont condamnés à ne pouvoir ex-
primer qu'un nombre très
limité d'effets sémantiques.
Corrélati-
vement,
en structuration,
ils sont incidents à un nombre tout
aussi
limité dë-cibles nominales. En se basant sur la possibili-
té d'exprimer des effets sémantiques,
la situation des deux
types
d'adjectifs peut être ainsi
schéma~isée
Al
METALIC
BAD
ou
ou
1WOLLEN ·~ln efféts -
n+l
effets
GOOD,NICE
Remarquons que ce sont les adjectifs qui expriment, le plus -;grand
nombre d'effets qui sont les mieux préparés aUx tAches
métaop4-
rationnelles. On sait,
en effet,
par expérience, que
les métao-
pérateurs sont les unités linguistiques qui sont les plus sujet-
tes à
produire le plus grand nombre d'effets en structuration.

_
L~I~I
_
Cela a pour principale consequence de rendre
l'analyse de
leur
fonctionnement
plus délicate au
linguiste. Retrouver l'invariant
dans
le fonctionnement d'un métaopérateur se ramène.
à
cette
tâche
fastid~euse qui consiste à prendre en compte la totalité
de son extension,ou encore,
son domaine d'application;
dans
la
pratique de
l'analyse linguistique,
cela revient à
tenir compte
de tous ses contextes ct' 0 ccurrence.
L'on comprendra,
p a s-vv o Le de
conséquence, qu'un modèle linguistique qui se propose d'isoler
les invariants s'en remette résolument à
la collecte d'énoncés
authentiques puisque c'est seulement par ce biais que
le cher-
cheur peut avoir la chance d'embrasser tous
les contextes
d'eril-'
ploi du métaopérateur étudié.
ii)
nécessaire antéposition des adjectifs métalinguistiques
dans le. linéaire
Notre objectif a
certainement besoin d'être rappelé:
faire
ressortir la similitude entre l'adjectif antéposé
et
le morphème
grammatical,
le déterminant-article,
en l'occurrence.
Le terme d'adjectif métalinguistique ne date pas de
long-
temps. Rappelons qu'il est dû à H. Adamczewski et
les
linguistes
qui se sont intéressés de près ou de loin à
l'adjectif ne faisaient
pas de différence entre adjectifs métalinguistiques et
a d j e c t Lf s
"ordinaires".
L'on a ainsi traité de l'antéposition des adjectifs
sans prendre
le temps ou plutôt sans rllême
chercher à
les distin-
guer par leurs
statuts. A. B'Li nk e nb e r-g ,
cité par D. Delomier,
écrit~

"Nous devons nous attendre
( . . . )
à voir une certai-
ne relation subsister entre le sens et
le degré de
naturel de
l'emploi de
l'adjectif antéposé.
( ..• )
Plus
le sens d'un adjectif se rapproche du sens de
BON,
~~UVAIS, PETIT, GRAND (qualité, nombre, degré)
plus ordinaire et partant,
plus naturelle sera l'an-
téposition;
plus
le sens s'écartera de
ces sens,
plus
exceptioty1elle sera l'antéposition,,(l)
Les observations de A. Blinkenberg sont difficiles à exploiter
c~mpte tenu du caractère extrêmement vague de son métalangage:
"degré de naturel",
"antéposition ordinaire,
exceptionnelle" . . .
Ce
sont~les ex~mples d'adjectifs souvent antépos~s (qui le sont
~ffectivement)qui donnent un certain crédit à sa remarque et c'~st
ce qui lui vaut,
peut-être,
d'être cité aux çôtés des F. Brunot
(1926), J. Marouzeau (1941),
C. Bally (1965). D. Demonier qui les
cite,
résume
leurs points de vue
:
"Plus le sens d'un adjectif se réduit à ne contenir
qu'une notion tout à fait
générale de qualité,
de
degré,
d'intensification ou de nombre et plus
cet
adjectif tend vers
l'antéposition,,(2).
(nous soulignons)
La synthèse des deux remarques nous conforte dans
l'exploi-
tation que nous faisons depuis
le d~but de l'analyse du concept
d'extension
vs compréhension.
Les adjectifs qui ont tendance à
l ' antéposi tion,
d'après A. B linkenberg,
sont du type BON,
;\\IAU-
VAIS,
PE:TIT, GR.:\\.ND...
autrement di t,
les adj ectifs appré ciatifs .
(1) D. DELOMIER :
"Place de
l'adjectif français.
Bilan des points
de 'vue du XXème sip.cle" in Cahiers de
lexicolo-
gie,
37,
1980, p.
(2) D. DELmUER
op.
cit.,
p. 9

Ces adjectifs,
disent
les derniers
cités,
sont ceux qui expriment
"une notion tout à
fait
générale",
c'est-à-dire,
ceux qui ont
une extBnsion très
large.
Nous considérons cependant
leur analyse incomplète dans
la
mesure o~ ils n'expliquent pas pourguoi ces adj~ctifs qui expri-
ment
"une notion tout à
fait
générale"
et dont
le sens dépend
finalement du ~ontexte sont enclins à
l'antéposition. Pourtant
la raison en est fort
simple:
le sens qu'ils prennent,
l'effet
sémantique qu'ils ré-activent ayant été sélectionné en fonction
du contexte ou de
la situation antérieure,'. ils se placent iconi-
guement entre ce
contexte~avant et
la notion nominale gu'ils in-
troduisent dans
la subséguence
linéaire. Essayons d'illustrer nos
positions
:
(21)
"There is nothing authentic in i t ,
i t ' s SHEER FORGERY •..
(mvK à propos des carnets
secrets d'Hitler)
Le
contexte-avant introduit une forme de quantification par l'in-
termédiaire de
"nothing in";
cette quantification rejaillit sur
FORGERY
par StlEER interposé. I l apparai t
ainsi que SH~ER sert
d'intermédiaire entre ce contexte-avant et FORG}"~HY: SHEI~R occupe,
une interface relationnelle,
i l s'identifie à
la relation entre
le contexte-avant et
le nom.
Pour ne pas anticiper,
disons que
l'adjectif
SHEER a
rapport avec la relation nominale:
nothing in i t
FORGERY
<~SHEER
-------~------
contexte-avant
contexte après
- - - - - - - - - - - - - - - - c h a i ne
li né ai re- ------------------'5'>

-
44L~ -
Pour faire référence aux anciens linguistes cités,
l'on ne
doit pas perdre de vue que
leurs travaux se situent à une époque
de
l'histoire de la linguistique Oll le concept de relation n'é-
tait pas encore pleinement assimilé;
l'on doit aussi reconnaître
que ce qui
l~ur faisait défaut, c'était une théorie solide de la
structuration dans
le linéaire ( 1 ) •
Iconiquement donc,
l'adjectif m~talinguistique se place en-
tre le contexte-avant et
la notion nominale qu'il introduit par
la suite;
c'est dire que' dans
le linéaire,
i l se place à gauche
du nom •••
comme l'article.
La position à gauche de
l'adjectif
métalinguistique
le rapproche syntaxiguement du déterminant-arti-
cle;
et leurs
similitudes ne s'arr~tent pas là. Plus intéressan-
te est l'action de
l'adjectif métalinguistique et du déterminant-
article sur (l'extension de)
la notion nominale.
Le travail effectué par le déterminant-article,
C. Delmas
l ' a suffisamment décrit.
Ainsi en anglais,
'A'
et
'THE'
symboli-
sent des
coupes graduelles opérées sur une notion nominale.
Nous
avons montré
(chapitre II) qu'en senoufo, HN1 -+ MN2 sont des
étapes relationnelles successives de la réduction notionnelle.
L'extension des notions ·diminue (quanti tati vement) lors du passa-
ge de
'A'
à
'THE'
en anglai s
et de }lN1 à MN2
en s e no uf'o , En struc-
turation,
le choix de
'A/TI-IE'
ou de l\\1N1/HN2
est régi,
dicté par
le degré d'extension que l'on veut retenir d'une notion nominale.
C'est selon les convenances du discours gue
l'on décidéra d'opé-
rer une coupe plus ou moins importante dans
l'extension de la
(1)
Nous renvoyons tout particulièrement à
C.
Delmas,
1985:
Structuration
abst:r9..i:te _et._chaîtie
linéaire en anglais contempo-
rain,
Paris III.

notion
nominale. Une autre manière de dire,
comme s ' i l était be-
soin de le rappeler, que c'est
le contexte qui impose à l'énoncia-
teur de choisir
'A'
ou
'THE', MN1
ou MN2 •••
L'effet quantificateur des adjectifs métalinguistiques n'a
pas besoin d'être démontré
.
La métaphore employée par le Pro-
fesseur H. Adamczewski est qu'un adjectif comme SACRE dans
'SACRE
BROUILLARD'
sert à
"porter la notion nominale à son degré
le plus
haut". Voyons quelques énoncés:
(22)
Choses vues au Sénégal
"Celui-là, .c'est un SACRE MAGOUILLEUR". J'lon interlocuteur
me désigne le magouilleur:
c'est Andy Niang,
l'ancien patron
de
la B.C.E.A~O. ( ••• ) Il vient d'être viré.
(Le Canarq enchaîne, 20/06/84)
(2J)
••• Dribbler de cette manière dans une surface de répa-
ration ••• Il faut un SACRE CULOT ••. Mais Battiston est un
joueur d'exception ..•
(Antenne 2,
19/06/ 1984)
(24)
~t took then a LONG TEN r.UNUTES to get off the hill. Don
had calculated i t was a GOOD SEVEN MILES to the farm-house
from where they were.
(HISVEN -
147)
(25) Un l i t , Un
VRAI
LIT
pour une VRAIE ..:t\\TUIT.
(Japan Airlines)
(26)
••• Encore une PETITE DIZAINE DE HINUTES.
Les Français
mènent
toujours par le score de 4-0 devant
les Belges •••
(TF1
-
17/06/ 1984)
(27)
Vous voulez voir ;\\lonsieur le Directeur?
•••
Il était
là tout à
l'heure ••. Ma{s c'est vous qui avez cass~ votre
l i t ?
Attendez une PETITE SECONDE .••
(19/06/
1984)

Chacun des adjectifs
"gonfle" ou
"contracte"
l'enveloppe sémique
du nom qu'il préc~de dans la chaine linéaire; une belle métapho-
re pour dire qu'ils quantifient
chacune des notions nominales.
Mais le plus important,
ici,
est quiil ré-active des effets de
quantification en "concordance avec ceux.qui sont déjà investis
·dans le contexte-avant.
Dans
l'énoncé
(22)
l'on arriverait difficlement à
saisir
Je type d'appréciation formulée à
l'endroit de MAGOUILLEUR si
l'on ne tient pas compte de
l~effet péjoratif que le contexte
permet de retenir du sémantisme de SACRE:
Monsieur Andy Niang,
directeur de
la ~anque Centrale des Etats d'Afrique de l'Ouest,
a détourné
100 milliards de francs;
ce qui ne
peut guère susci-
ter une appréciation tr~s favorable.Ce qui e~t intéressant dans
la suite de
l'analyse,
c'est que dans
l'énoncé
(23),
le même
le-
x~me (SACRE) ré-active l'effet diamétralement opposé: dribbler
dans une surface de réparation est considéré
comme un exploit à
saluer et à
applaudir;
c'est
le sème
(+)positif qui quantifie
CULOT.
(25)
et
(26)
sont tout aussi intéressants; une dizaine
de minutes,
aux yeux du
commentateur
français,
ne représente
rien pour que
les
joueurs belges remontent
le score qui est mon-
té à
4-0.
Le contexte
(du match de football)
fait donc que,
du
programme sémantique de PETITE,
l'énonciateur n'a ré-activé que
l'effet
(+)minorant
pour quantifier DIZAINE DE MINUTES.
Le
con-
texte de
(26)
est que l'interlocuteur est connu pour son impatien-
ce •••
L'énonciateur -
ici,
l'intendante d'une maison d'étudiants
-
use de toute sa diplomatie
pour présenter une SECONDE comme
le
laps de temps
le plus bref qui soit.
Là encore,
c'est l'effet
(+)minorant qui est retenu pour la quantification de SECONDE.

L'énoncé
(25)
est un message publicitaire et
le contexte
propa-
gandiste de
la publicité nécessite que VR~I ré-active son effet
mélioratif en vue de
la quantification de LIT et NUIT tout en
les introduisant dans
le discours. L'on notera en passant que
l'énonciateur "falsifie"
la notion LIT en désigna~t par "lit",
ce qui n'est rien d'autre que
les sièges des appareils de la Ja-
pan Airlines.
Le contexte de
(20n'est pas assez explicite et i l pose,
par ailleurs,
un problème de délinéarisation moins intéressant
dans
la mesure où l'anglais antépose généralement tous ces adjec-
tifs à commencer ~ar ceux qui sont les plus métalingu~stiques.
Quoi _qu'il en soit, retenons gue l'adjectif ώtalinguistigue'guan-
tifie ou modalise.en concordance avec les effets sémantiques in-
vestis dans l.'antécédence dù discours.
La fonction d'élément de
relation ne fait donc pas de doute. Retenons également qu'il
prend la notion'nominale pour cible,
à
la manière des déterrninant-
articles
articles ~-
~.
NO"
chaîne linéaire
adj. méta-ling~
C __ ~_·'_~-~i~_-_L_"
.Q
__N_O_M_~
L'antéposition de
l'adjectif métalinguistique et du déter-
minant-article est un indice de convergence métaopérationnelle
entre deux catégories différentes. Mais
l'on aurait tort de
";". -. :

-
'1!~8 -
conclure de quelque redondance
lorsqu'ils sont co-occurrents.
Les deux catégories quantifient
chacune des cibles nominales mais
l'adjectif effectue un travail supplémentaire de qualification.
De toute façon,
qualification et quantification sont,
à un niveau
_abstrai t,
des
.variantes de
la catégorie moda le.
La preuve en
est qu'en senoufo o~ i l n'existe pas de catégorie adjectivale,
le MN se charge
d'eXprimer
conjointement
la qualification et
la quantification :
,
.1
...
e.g.
mabli-~ = 'automobile'
m~bll.wi = la voiture,
mabl{.gi = la Glù\\NDE automobile
N
le camion
m~bl{.ll = la PETITE automobile
'"
Le français utilise}et
le quantifieur de notion nomina~ LA
et
- ' )
quantifieur-qualifieur
PETITE/GRANDE;
c'est un procédé analyti-
que.
Le
senoufo qui n'a pas d'adjectif dans son système lexical
rend.
de façon synthétique de
l'effet appréciatif (quantifica-
tion et qualification)
par adjonction du MN majorant /-gi/ ou mi-
"
norant /-li/.
Notre principal ohjectif était de relever la parenté
struc-
turale entre
l'adjectif métalinguistique et
les déterminants
(ar-
tic les et MN).
Cette parenté
est métaopérationnelle mais aussi
positionnelle;
les deux facteurs
sont,
dans
le fond,
indissocia-
bles car pour ~tre adjectif métalinguistigue,
le signifiant-ad~
jectif doit NECESSAIREMENT ~tre antéposé.

J) Probl~me de coh~sion et port~e de l'adjectif
L'on consid~re habituellement comme allant de soi que les
adjectifs métalinguistiques et même
les adjectifs antéposés
sont
dans une forte
cohésion avec
le nom.
C'est
là une opi-
nion tr~s largement partagée. L. Tesni~re, pour ne prendre que
cet exemple pour commencer,
en est absolument convaincu
"Dans
le cas de l'ordre centrip~te, UN BRAVE HON-
ME,
UNE BRAVE FEMME, on constate que
l'adjectif tend
à s'agglutiner avec
le substantif pour former un nou-
veau substantif qui est un véritable substantif com-
po sé " ( 1 ) •
Comme preuve de cette forte cohésion entre l'adjectif antéposé
et son support nominal,
L. Tesni~re évoque (entre autres raisons),
le phénom~ne de la liaison (e.g. un mauvais~él~ve
vs
un enfant f
intelligent). Nous commencerons par remarquer que s ' i l y a
liai-
son entre l'adjectif antéposé et son support nominal c'est,
non
pas parce qu'il y a
cohésion,
mais parce que
l'adjectif antépo-
sé tend à
jouer un rôle identique à
celui du dét~rminant-article
comme nous venons de
le voir.
Cette
liaison est tout aussi connue
en anglais, encore que ce soit sous une autre forme:
les
varia-
tions d'ordre phonique de
l ' arti c le
(j eil ou à 0' , d il) lorsque
le nom comporte ou non une voyelle à
l ' i n i t i a l . Eh senoufo elle
se réalise sous forme d'harmonie vocalique entre le MN1
et
la
base lexicale
(cf.
chapitre II). Bref,
parler de cohésion entre
l'adjectif antéposé et son support nominal en prenant
la liaison
pour crit~re serait admmettre qu'il y a quelque forme de cohésion
(1)
L. TESNIERE :
Eléments de syntaxe structurale,
Librairie
Klinck~ieck, Paris, 1976, p. 148

entre
l'article et
le nom qu'il introduit dans
la chaîne
linéai-
re,
ce qui nous semble assez difficile à concevoir.
Toujours pour illustrer le phénomène de
cohésion,
Tesnière
évoque la formation d'un "nouveau substantif" ou parle encore
d'''agglutination''~ Nous n'entendons pas revenir de façon détail-
lée sur le problème de
la cohésion;
i l a été
longuement analysé
dans nos chapitres précédents. Notre désaccord avec
la majorité
des
linguistes sur le problème de
la cohésion tient en partie au
fait que ceux-ci situent la cohésion sur le seul plan formel
(agglutination,
liaison ••• )~' Le lecteur admet maintenant que la
cohésion s'acquiert au fur et à mesure qu'une relation est struc-
turée puis re-structurée tout au
long de
la chronologie
linguis-
tique. En certaines occasions favorables aux oanifestations de
la métalangue naturelle,
c'est
l'opérateur (-)
qui indiquera
l'existence effective d~
cohésion.
Soient
les séquences:
(28)
une
SAGE-femme
~
des SAGE~-{emmes
un
BON professeur
de BONS
professeurs
Preuve de
l'absence de cohésion entre BON,
adjectif antéposé et
surtout métalinguistique et PROFESSE~R, l'applicabilité de l'ac-
cord du pluriel;
en clair,
à cette phase première de la structu~
ration (du nom),
les mécanismes syntaxiques sont
libres de fonc-
tionner.
Par ailteurs,
i l est possible d'intercaler un autre élé-
ment entre BON et PROFESSEUR (e.g. un bon PETIT professeur).
La
cohésion
que l'on obsexve en (29)
avec SAGE-FEMME n'est pas du
tout due à
l'antépositi~.n de SAGE mais au caractère ancien de

-
!~ 51 -
la relation qui unit
les deux unités.
I l faut
remonter dans
le
passé de
la langu~ française pour retrouver les circonstances
de
la première mise en relation
'SAGE
€)
FEMME',
ce qui per-
mettrait de
justifier la thématicité de
la relation
aujour.....
d'hui.
Comme preuve de
la thématicité de
la relation,
le bloca-
ge des mécanismes syntaxiques
(l'accord du pluriel) mais aussi
l'impossibilité d'intercaler un autre élément(l) dans
la structu-
re compacte
(*une SAGE- intelligente -FEMME).
L'agrammaticalité
est patente:
une cohésion longuement
construite a
été brisée.
Comment expliquer cette erreur
des
linguistes ?
Cette erb
reur
plusieurs fois
séculaire vient encore du fait que l'on a
basé
l'analyse sur des syntagmes isolés et toujours
les mêmes
(un bonhomme,
un mauvais enfant, une belle femme ••. ) I l s'agit,
en réalité,
d'un problème de fréquence d'occurrence; à force de
voir les mêmes éléments apparaître ensemble,
l'on peut avoir
l'impression d'une certaine forme de cohésion. Autrement dit,
et
en première approximation,
la fausse impression de cohésion dé-
coule directement de
la méthodologie. Mais
l'erreur devient plus
sérieuse lorsqu'elle est imputable à
l'esprit,
à
la philosophie
du modèle théorique.
Nous
le verrons avec
le traitement que la
psycho-systématique du langage propose du problème de
la cohé-
sion
et partant,
de
la portée des adjectifs.
L'impression de cohésion peut être due aussi à
la déséman-
tisation très poussée des adjectifs métalinguistiques.
Nous re-
viendrons sur la désémantisation avec plus de précisions. Pour
(1) On retrouve déjà ces procédés chez les anciens structuralis-
tes.
Pour décider s ' i l s ont affaire à un morphème lié
(le cas le
plus évident de cohésion)
et non à un morphème libre,
les struc-
tructuralistes
vérifiaient s ' i l s pouvaient intercaler d'autres
éléments dans
la séquence étudiée:
A bad driver
A bad CAR drive!
A second-hand car
*A second-
OLD -hand
car.

-
1>52 -
fonctionner comme des opérateurs de quantification des éléments
sémantiques comme GRAND homme
(vs homme GRAND),
PETITE seconde
(vs PETIE enfant) ••• gardent à
l'état
latent,
les catégories sé-
mantiques de
"taille",
"longueur"
et ne ré-activent que le s~me
le plus général,
celui de quantité,
en la circonstance.
Leur
poids sémique n'est donc plus tellement senti
lorsqu'ils apparais-
sent dans
l'antécédence du nom. Prenons un énoncé où l'adjectif
apparaît dans
les deux positions
:
(JO)
•••
~!_~~_~~!_ai~s! 9u_r~tab!isse~ent, largem~nt souha!-
té,
de
la peine de mort ou du retour dans
leur pays d'origi-
ne des travailleurs émigrés
( ••• ) Sur ce dernier point,
la
!égère réticence des électeurs d'Extrême Droite est El~t~t
l~é~ ~u_r~f~s_d~u~e_PE~~~_9~_9~E~E!.
Plutôt que d'une EXTREME DROITE,
i l s'agit d'une DROITE
EXTREME ( ••• )
(Le Monde 14/02/ 1984)
Dans le syntagme EXTREME DrOITE,
le· nom DROITE
met en jeu
le maximum de son poids sémique indépendamment de
la quantifica-
tion opérée par l'adjectif ant6posé;
quant à
ce dernier précicé-
ment,
étant chargé d'une fonction méta-linguistique,
i l n'a ré~
activé que
le s~me de quantité et dans ces conditions,
i l n'agit
plus que comme indice
(au sens mathématique):
extrême
DROITE.
c'est ainsi que peut être schématisée
l'opération de quantifica-
tion. Mais du côté de
l'effet sémantique résult~nt, c'est-à-dire,
au pôle du décodage,
le co-énonciateur tend à focaliser le

d6codage sur le principal ~l~ment s~mantique DROITE pour la bon-
ne raison que
celui-ci est réalisé avec tout son poids sémique.
De
EXTREME,
le décodeur (le co-énonciateur)
ne retient que le
sème unique de quantité.
C'est dire que pour ce décodeur,
le sens
du syntagme EXTREME DROITE
se ramène grosso modo à
celui de
DROITE,
EXTREME n'
t arrt plus senti que comme une fonne d' Lrrt e ns L«
é
fication parmi d'autres:
le co-énonciateur peut effectivement
avoir l'impression d'avoir affaire à une seule.unité sémantique;
ce que
le linguiste peu averti peut,
lui aussi,
interpr~ter com-
me un cas de cohésion.
En réalité,
lors de la construction du
syntagme,
les deux él~ments ne participent pas avec la même im-
portance quantitative de
sèmes.
Les différents apports sémiques pour la construction de la
connexion
EXTREt-iE DROITE peuvent être ainsi schématisés
:
1ère étape
deux éléments sémantiques pleins = EXTREME-:+ DROITE
ITE~
autres
sème de
la
sèmes
quantification
2 ème étape
un seu le élément sémantique plein = DROITE (intensi-
fi~ par le sème de la quantification)
- - - - - -
ROI T E
sème de
la
quantification
(~) Le schéma montre que dans la portée des adjectifs m~talinguis­
tlques,
d~s processus très subtil~
de re-structuration sont mis
en oeuvre:
l'interface relationnelle est
située dans
le croise-
ment de dpl1x (>ll;~"'oïdes.

En d~finitive, l'impression de coh6sion est due au fait
qu'au déco~age, l'on ne tient compte que d'un seul
élément sé-
mantique.
Nous retrouvons
le même rapport du déterminant-article
à
sa cible nominale. Dans le syntagme
~ CAT, on a affaire à un
seul élément sémantique et
là i l serait tout aussi absurde de
dire que le dé codeur .' \\:
retient,
lors de
l'interprétation de l ' é-
noncé
"A CAT" ,
une seule unité parce que
l'article et le nom
sont si soudés qu'ils ne fonctionnent plus que comme un seul élé-
ment ( 1 ) •
Dans la seconde occurrence de
l'adjectif (JO),
EXTREME n'a
plus pour fonction de quantifier,
du moins pas exactement de
la
même manière,
comme s ' i l avait été antéposé. Dans cette nouvelle
occurrence,
EXTREHE participefranchement.à la construction de
la connexion sémique;
i l apporte tout son poids sémique au syn-
tagme . DROITE EXTREME
1ère étape pré-structurale:
deu>' éléments.sémantigues non reliés
\\
2ème étape:
structuration des dt3UX éléments sémantigues
~ROI T '3:[E X Tn~
Lors du décodage,
le co-énonciateur peut aussi avoir l'im-
pression d'une absence de cohésion;
cela
se comprend aisément:
les deux éléments ont été structurés à
un moment où chacun d'eux
avait tout~s ses potentialités sémiques.
Cela peut également
(1) On peut,
pourtant,
parler de cohésion plus ferme dans
l'uni-

"THE CAT",
cohésion qui n'est pas aussi ferme dans
liA CAT".
Mais dans ce cas,
i l faut bien voir que la cohésion en question
ne se situe pas entre le déterminant et
le nom;
c'est une cohésion
(voir page suivante)

-
L~55 -
donner l'impression que. postposé,
l'adjectif est p lus autonome,
d'où l'effet
"accrocheur" recherché et obtenu par le chroniqueur
du
Monde dans la structuration de EXTREHE DROITE (vs extrême
droite).
Un linguiste de l'envergure de G. Guillaume a,
dans sa théo-
rie de 1'adjectif, abouti
aux mêmes conclusions que
l~ensemble
des autres linguistes qui soutiennent que l'adjectif est en for-
te cohésion avec le nom lorsqu'il est antéposé.
Les adeptes de
la psycho-mécanique ne pouvaient que reconduire la même erreur:
"En règle général~,l'adjectif postposé conserve son
sens propre et qualifie le substantif avec pleine
valeur informative alors que l'adjectif antéposé
"s'in-
fléchit dans un sens qui en fait
l'adverbe d'un pro-
cès de qualification dont
le substantif est
l'essen-
ce"
(G. Guillaume,
25/11/194Jb,
p. 25)'~et acquiert
une'valeur formative,,(l)
(nous soulignons)
Nous nous arrêterons
longuement sur cette déclaration con-
jointe de G. Guillaume et de Y.
St Gelais.
Sans l'écrire en tou-
tes lettres, Y.
St Gelais introduit adroitement
le phénomène de
cohésion lorsqu'il
parle
d'une "valeur formative" de l'ad-
jectif antéposé.
Nous avons déjà vu que ce n'est pas par l'anté-
position que l'adjectif fait
corps avec
le nom qu'il précède
dans
le
linéaire. Y.
St Gelais parle aussi d'un "sens propre"
que
l 'adjectif postposé conserve. Une, te l·leformu la tian ' doit être
réservée
aux théories d'analyse du discours
(actes de
langage,
entre le programme sémantique nominal et
la chaine
linéaire.
L'opérateur THE qui témoigne de la re-structuration de CAT est
aussi indicateur de cette forme de cohésion; mais i l s'agit,
on
le voit d'une cohésion métaopérationnelle dont
la perception
n'est pas à
la portée de n'~~~~~te quelle théorie linguistique.
,~- -
- - - -
< - .~.
-
(1)
Y.StGELAIS
:
"Praxéogé.nie adjectivale en français moderne"
in Systématique du .langage I,PUL,
1984, p.
162

stylistique ••• ).
Lorsque
les mécanismesstructuraux sont perçus
sous l'espèce d ' opérations,
i l est diffici le d' a.dma t.t r-e que les
unités
linguistiques prennent,
à un moment donné,
un "sens pro~
pre" et plus tard,
un "sens figuré".
Expliqué de
la sorte,
le
phénomène du
glissement sémantique pourrait
laisser croire que
les éléments sémantiques
"changent" de sens,
ce qui rendrait
l'apprentissage d-es
langues presque impossible .•
I l nous faut,
peut-être,
rappeler que la structuration est
un lieu de compromis entre les éléments sémantiques mis en rela-
tion.
Lors de
la structuration,
chaque élément ré-active certains
sèmes s eLo n les besoins discursifs du moment et conserve, bien
entendu,
les autres à l ' é t a t latent. Au terme d'une opération
de structuration,
le produit sémique d'un syntagme,
une conne-
xion sémique par exemple,
son sens,
si l'on préfère,
est l'ensem-
ble des sèmes que chaque
membre de
la structure aura consenti
à. ré-activer en la circonstance. En tenant compte du sens résul-
tant,
o~ peut effectivement avoir l'impression que l'un des élé-
ments sémantiques
(ou les deux)
a
changé de sens ou en a perdu;
mais à
ce stade,
i l convient de ne pas perdre de vue que l'on
est en deçà des opérations de structuration
lieu de
compromis
~_Sf_y
.~~'_Q_"-']V
n
sèmes
n
sèmes
n-l
sèmes
n-l
sèmes
étape pré-structurale,
étape post-structurale,
total sémique = 2n
total sémique = 2n -
2
(1 ) - - - - - - - - - - - - - - - - + ) (II)

Revenons tout de même au problème de
la cohésion.
L'on ne
devrait parler de
"valeur formative" de
l'adjectif ou d'un quel-
conque élément sémantique que
lorsqu'avec le support nominal,les
deux éléments forment une structure
compacte
(e.g.
SAGE-FEMNE),'
ou lorsque l'apport sémique est suffisamment important comme
dans
les noms composés
(e.g. OISEAU-NOUCRE,
RAIN-COAT).
L'on
n'est pas sans savoir que dans
les noms composés
l'apport sémique
du nom antéposé
(en anglais)est presque
aussi important que celui
du nom complémenté
:
rain
coat
RAI N -
C 0 A T
I~---------I-----------I
<F----:---
n
------>
~---- n+ 1 -------->
/
Nous ne tomberons pas cependant dans
l'autre extrême avec
E. Reiner(l).
Ce dernier proteste que rien ne permet vraiment
de dire qu'antéposé,
l'adjectif a de très fortes attaches synta-
xiques avec le nom;
rien ne p e rme t
non plus,
di t - i l, de par
1er d'un très fort degré de cohésion lorsqu'il est postposé. Si~
gnalons en passant que E. Reiner n'aborde pas
le fonctionnement
de l'adjectif en termes d'opérations et de relations,
ce qui ne
lui a
pas permis de distinguer les adjectifs métalinguistiques
des adjectifs de complémentation sémique.
Nous restons convain-
cu
que
la cohésion se raffennit en fonction de
l'importance de
l'apport sémique de
l'adjectif au nom;
cela est d'autant plus·
vrai que
lorsque l'énonciateur met en relation deux éléments sé-
mantiques ayant à peu près le même poids sémique,
c'est pour
(1) E. REINER
La place de
l'adjectif épithète en français.
Théories traditionnelles et essai de solution,
Stuttgart,
1978

-
458 -
construire une notion complexe et une notion complexe s'actuali-
se très souvent dans
le plan énonciatif sous
forme de structure
compacte
:
(J1)
Poor Mr Poirot.
Not
so good at
these LITTLE CRIMINAL
HATTERS as you thought yourself,
are you ?
(A.B.C.
-
77)
l
did not kill her
!
l
did not kill her
I t ' s aIl
lies
You are
GODDAMNED
ENGLISH PIGS.
(A.B.C.
-
2J)
(JJ)"TlÎis is Miss Grey,
gentlemen. My brother's secretary"
My attention was
caught at once by the girl's EXTRAORDINA-
RY
SCANDINAVIAN FAIRNESS.
(A.B.C.
-
86)
Dans chacun des énoncés
et dans
chaque groupe nominal,
chacun
des adjectifs effectue un travail différent sur le nom.
Les plus
proches
(dans tous
les sens du mot) du nom sont des apports sé-
miques en vue de
l'olJtenti<;>n de notions complexes
(CRI~iINAL MAT-
TERS,
SCANDINAVIAN FAIRNESS,
ENGLISH PIGS) • Comme preuve de la
:forte cohésion qué ces adjectifs -entretiennent avec les noms qui
les suivent dans
le linéaire,
le fait qu'ils ne puissent pas~tre
omis des structures en présence;
comme preuve de cohésion,
ces
adjectifs ne sauraient ~tre extraposés par la gauche,
c'est-à-
dire,
~tre séparés de leur support nominal par les adjectifs à
effet appréciatif,
en l'occurrence LITTLE,
GODDAMNED',EXTRAORDI-
NARY.
La première série d'adjectifs
comprend des adjectifs déri-
vés directement de substantifs,
ce qui revient a dire qu'ils sont
d'extension très réduite et donc d'une densité sémique plus

-
459 -
élevée que
les adjectifs métalinguistiques.
L'importance de
l'ap-
port sémique avoisine celui du nom qu'ils doivent
justement com-
plémenter,
presque comme dans
les noms composés
:
rain
coat
FL' AIN -
C 0 A T
I - - - - - - - - - I - - - - - - - - - - - - I
~----- n
----->
~------ n+1------~
english
pigs
ENGLISH PIGS
I - - - - - - - I
l
~--- n-1
~-------- n+1 ------~
,~-------'v""-----------"
connexion sémique compacte
Les adjectifs extraposés par la gauche ont un apport sémi
que qui approche la nullité.
Ils impliquent,par leur sémantisme,
un jugement de
l'énonciateur .. En
(31)
en particulier,
l'énoncia-
teur,
un assassin non encore identifié, nargue Hercule POlrot,
s'étonnant que ce dernier ait autant de mal à élucider une si
/
PETITE affaire crimine.lle.
Ce s
adjectifs sont donc des métaopéra-
teurs introduisant des notions nominales dans
le linéaire;
les
autres ne sont que des Ln s t.r-ume rrt s de complémentation et de ré-
duction d'extension des notions:
ce sont de simples opérateurs.
Nos schémas de
la page précédente ne font pas
figurer
les
adjectifs métalinguistiques;
c'est parce que cette formalisation
n'est pas suffisamment puissante pour rendre compte de la portée
des adjectifs métalinguistiques.
G. Guillaume évoque très implicitement
le problème de
la .
portée de
l'adjectif lorsqu' i l voi t
en l'adjectif antéposé) "1' ad-
verbe d'un procès de substantivation".
L'adjectif' antéposé,
dit

- 460 -
encore G.
Guillaume,
"interfère un procès de
substantivation
non encore aChevé,,(l).
Le
"'procès de substantivation" est-il la
structuration du substantif,
sa genèse?
Ou bien s'agit-il de
la structuration du nom dans
la chaîne linéaire?
Dans ce cas,
i l est nécessaire de préciser que cette structuration n'a rien à
voir avec
la structure morphologique.
En tout
cas la formulation
de G.
Guillaume,
(formulation reprise toujours au mot près par
les psycho-mécaniciens)
impressionne par sa complexification mê-
me.
Nous pencherons pour la seconde interprétation,à savoir que
"le procès de substantivation" revient,
en définitive,
à insérer
un programme sémique nominal dans
le flot discursif. Dans ce cas,
l'adjecti~ antéposé et/ou métalinguistique intervient au point
~.'articulation du nom sur la chaîne linéaire:
l'adjectif méta-
linguistique
"parle" de cette articulation du nom sur le linéai-
re.
Que faut-il entendre par "articulation d'une unité sur la
chaine
lin~aire" ou sur le contexte discursif?
C'est,
bien en-
tendu,
l'insertion du mot dans un contexte dlscursif donné,
c'est
à-dire,
son emploi pur et simple. Ainsi
les adjectifs métalingui
tiques se rapportent-ils à
l'emploi que
l'on fait des programmes
sémiques nominaux dans ~es contextes particuliers(2). D.Bolinger
le dit d'ailleurs en passant mais i l ne parlait pas alors d'ad-
jectifs métalinguistiques.
Ce
linguistes'int4ressait
à
----------------
(1)
G. Guillaume cité par Y.
St Gelais:
"Praxéologie adjectiva-
le en français moderne"
in Systématique du
langage I,
PUL,
1981~,
p.
16
(2)Dans "une
(trop)
CERTAINE justice'
(titre d'un article présen-

lors d'un exposé sur le passif par A.
Elimam à
la journée du
CRELINGUA du 8/05/ 1984),
si
l'on ~ait abstraction de l'intensi-
fieur TROP,
i l est question,
dans
le syntagme,
de l'emploi que
le
journaliste fait de
la notion nominale
'justice'.
S'il avait
inti tulé son article "une jnstice (trop)
CERTAINE" i l s ' agiralt
plutôt de décrire
la
justice E..:;:-~::;~.-.::; ~u·c::c c",:" "':.L'" , ':" ....l'ailliblE

- 461 -
l'adjectif pour d'autres raisons,
la prédicabilité entre autres:
"
'The STUDENTis eager'
uses STUDENT in a different sense,
as a designa-
tion of an individual,
and amounts saying
'The BOY is eager'.
'An eager STUDENT'
however,
suggests someone who is eager gua student.
The first
(noun phrase] is refrent-modification,
the
second is reference-modification,,(l)
(nous soulignons)
P.
Cahné,
lui,
ne parle pas non plus d'adjectifs métalinguisti-
ques;
i l préfère parler -
ou ne trouve pas mieux
de "valeur
explicative".
Dans tous
les cas
l'idée essentielle y est:
l'ad-
jectif a
"une fonction explicative" signifie qu'il
"donne la mar-
che à suivre" :.(nous reprenons-la glose de A.
Lancri). Mais écou-
tons P.
Cahné
lui-même:
" •.. aiùsi
lorsque nous évoquons une NOIRE MACHINATION
l'extension de HACHINATION n'est-pas touchée par la
caracterisation que nous
lui donnons,
mais nous ne fai-
sons qu'isoler et mettre en valeur ( ••• )
ce gui,
dans
le concept de HACHINATION nous importe étant donné
le
contexte où nous sommes Placés,,(2)
(nous soulignons)
La valeur méta-linguistique de
l'adjectif ne peut pas être
mieux exp~i~itée. I l est tout aussi important de souligner que,
lorsque
l'adjectif métalinguistique opère,
i l ne touche pas di~
rectement à
l'extension du nom.
Les remarques de D. Bolinger sont
(1)
D. BOLINGER :
"Adjectives in English:
Predication ami attri-
bution" in Lingua,I'~,1974, p.
15
(2)
P.
CAHNE
"Place,
valeur et adverbialisation de
l'adjectif"
in Revue des
langues romanes,
80,
1972,
p. J21
.
..
- ~- ~
-"

-
~~62 -
tout aussi éclairantes. D. Bolinger donne d'abord
l'impression
de
jouer sur les mots
lorsqu'il oppose
"referENT-HODIFICATION à
refeRENCE-l'lODIFICATION;
sa glose devient véritablement méta-lin-
guistique lorsque pour
'an eager STUDENT'
i l explique que la qua-
fication est effectuéesur le ré'férent "en tant que
(qua) ••. "
Ces différentes approches du statut de
l'adjectif apportent
des informations supplémentaires
sur la nature de
la cohésion
qu'un adjectif peut avoir avec sa cible nominale;
plus important,
ces approches qui ne diffèrent que par leurs formulations portent
un coup sérieux à
la "théorie des
incidences précoces outardives" •.
La valeur adverbiale dont parle G.
Guillaume à propos de
l'adjectif antéposé concerne,
dit-il,
"le procès de substaritiva-
tion",
c'est-à-dire la structuration du substantif sur la chaine
linéaire. En termes plus clairs,
l'adjectif métalinguistique se
comporte comme un adverbe d'énonciation(l)
o~ le substantii re-
présente l'énoncé en tant que produit de structuration~ l'adjec-
t i f "porte"sur l'insertion du nom dans
le
linéaire. Il est,
et
cela est très important,
décalé
lui-m~me par rapport à ce linéai-
re et ne peut,
en aucun cas,
~tre en relation directe avec le no-
.yau nominal au point d'entrer en forte cohésion avec ce nom.
L'adjectif métalinguistique domine le nom:
i l a une portée épis-
témique.
Les choses changent radicalement lorsqu'il s'agit d'un ad-
jectif de
complémentation sémique.
Cet adjectif non métalinguis-
tique,
comme
le nom-apport dans
la construction des composés,
at-
teint sa cible nominale au coeur m~me de la notion nominale.
(~) voir YAO KOUADIO: Linéaire adverbial et structuration modale,
Thèse de Doctorat de Paris III,
Janvier 1986

-
46J -
C'est d'ailleurs pour cette raison que
l'apport sémique du nom
(qui est aussi restricteur de notion)
s'accompagne toujours d'une
altération substantielle de
l'extension de
la notion du nom sup-
port. On a même vu que
le total sémique ne représentait parfois
qu'une notion complexe. Bref,
l'adjectif de
complémentation sémi-
que a une portée rad~cale.
L'explication psycho-mécanique selon laquelle
l'adjectif an-
téposé et partant, métalinguistique a une incidence précoce sur
le nom serait donc à
revoir très sérieusement.
Si l'adjectif mé-
talinguistique et épistémique -
l'adjectif qui est
"adverbe d'un
procès de substantivation",
pour reprendre G. Guillaume lui~ême
~,:si"cet adjectif domin~ sa cible nominale comme nous venons de
le voir,
cela suppose que le nom-cible est
déjà en place,
c'est-
à-dire déjà structuré.
L'adjectif à portée épistémique le prend
en cible après.
D'ailleurs G. Guillaume dit bien que
l'adjectif
qui précède
(lire antéposé) devient,
pour ainsi dire,
regardant
à
l'endroit du substantif regardé,,(1). Et en prenant à
la let-
tre
les propres mots de G. Guillaume,
on arrive à
l'évidence que
l'adjectif métalinguistique et sa cible n'appartiennent pas à la
même étape relationnelle:
la désignation du substantif par idée
"regardée"
(un participe passé)
et de l'adjectif à portée épisté-
mique par idée
"regardante"
(un participe présent)
indique,on ne
peut plus clairement,que le premier appartient au passé de struc-
turation et
le second,
au présent de
la chronologie linguistique.
Que deux éléments de statuts différents,
relévant de niveaux de
structuration décalés donc différents viennent à être soudés par
quelque forme de cohésion, voilà qui est vraiment difficile
à
( 1)
G.
GUI LLAill-Œ
Leçons de linguistigues,
04/oJ/ 194Jb

imaginer.
Peut-on penser un instant qu'un adverbe de modalité
(HANIFESTEMENT,
Eli'FECTIV EMENT ,
A VRAI DIRE .•• )
ou un moda l
CAN,
WILL, f.1AY ••. )
entretient une que lconque forme de cohésion avec
le moindre élément de
la structure phrastique qu'il domine
juste-
ment?
Nous verrons à propos de
l'adverbe dérivé de l'adjectif
que G. Guillaume fait de très bonnes suggestions mais
l'on sait
aussi que
la théorie guillaumienne est surtout une théorie du mot
de sorte que cette partie du langage qui a
rapport avec la portée
des instruments de
la validation des mises en relation y
est quel-
que peu négligée •••
Et si"l'adjectif postposé ~ont les psycho-mécaniciens pen-
sent qu'il est d'incidence tardiv~ interfère dans la notion nomi-
nale,
cela signifie qu'il touche sa cible nominale AVANT même
que
l'incidence de
l'article ne s'applique. En d'autres mots,
l'adjectif de complémentation sémique touche le nom au coeur de
la notion et i l est censé intervenir avant que
la notion nomina-
le
(ou complexe)
ne soit actualisée dans
le discours.
L'on peut refuser le débat sous prétexte que
les deux théo-
ries
(guillaumienne et métaopérationnelle)
ont chacune raison
dans
leurs domaines respectifs;
i l reste cependant vrai que
la
théorie des incidences ou des tenseurs
est impuissante à rendre
compte de
la portée de l'adjectif antéposé
en rapport avec sa
valeur adverbiale que G. Guillaume évoque
lui-même.
Confrontons
les deux théories sur la formalisation des syntagmes UNE VRAIE
FEM}1E·
vs
UNE. FE1'11'1E VRAIE.

-
':~6 5 -
D'après G.
Guillaume:
substantivation de F.l<=!vj}LE
(a)
une femme vraie
r
vraie
substantivation de FEMME
(b) une vraie femme
t
vraie
La formalisation de G. Guillaume ne tient pas compte de la pré-
Sence de
l'opérateur du groupe nominal,
'UNE'.
Ce n'est, bien sûr,
pas le probl~me débattu; mais i l eût été, tr~s intéress~nt dten te-
nir~6mpte puisque l'article a quelque chose à voir avec l'articu-
lation du nom sur la chaîne
linéaire; G. Guillaume parlerait peut-
être de son ascerid~nC9' dans le plan du Discours.
D'apr~sune approche métaopérationnelle
(a)
une femme vraie
:
C
(b) une vraie femme
~------~I
C
femme
chaîne
linéaire
On ne peut que reconnaître à
la formalisation métaopérationnelle
son pouvoir de aélinéarisation;
en
(a)l'adjectif appartient au
(1)
G. GUI'LLAUHE
Leçons de linguistigue.
17/03/ 1949

même plan de structuration que
le nom FEÎ'[i'1E:
ils sont tous
les
deux membres d'une connexion sémique. En (b)
VRAIE domine
le
noeud structura l
de FEM]\\11~. Etant clé ca lé par rapport au noeud
structural et au plan linéaire,
i l ne saurait être soudé par co-
hésion à
sa cible nominale,
l'article non plus d'ailleurs •••
Pour revenir aux énoncés authentiques de départ,
LITTLE CRI-
MINAL MATTERS,
par exemple,
la cohésion se situerait plut5t en-
tre CRIMINAL et ~~TTERS; LITTLE qui assure le commentaire méta-
talinguistique,
se trouverait déca18
• LITTLE
(CRIMINAL + MATTERS)
)- LITTLE
~-----~~~
C
A quels moments de
la chronologie linguistique
les structu-
rations des deux adjectifs se situe~t-elles ?
L'on pourrait pen-
seI' que la localisation des moments successifs d'occurrence d~s
àdJeotifs -
localisation des moments dans
la chronologie
linguis-
tique -
pose des problèmes
à une théorie qui tend à assimiler
le caractère mét~-linguistique des structures à
la Phase II. En
d'autres termes,
l'adjectif métalinguistique,
parce qu'il por-
te un commentaire sur une structure,
est-il en Phase I I ?
I l
importe de bien préciser que
l'adjectif métalinguistique porte
sur. un noeud,
c'est-à-dire le point de
jonction entre
le nom-ci-
ble et le contexte ou
la chaine
linéaire
:
~------------~'> adj. méta-ling.
=ci5=
----
~
C
NO"
'------
chaine
linéaire

._,~ -
.
«<' ..
-
~~67 -
Mais seulement pour viser sa cible
(en fait,
la relation),
i l
faut que
celle-ci soit d~jà en place. En d'autres termes,
i l
faut que
le nom soit déjà articulp
sur le contexte,
c'est-à-dire,
que
l'énonciateur ait déjà choisi son
(contexte dl)
emploi.
On
comprend alors que ce qui prpcède dans
la chronologie des pvéne-
ments
linguistiques c'est,
non pas l'application de
l'adjectif
au nom,
mais plutôt
la structuration du nom sur le contexte,
la
substantivation,
comme dirait G.
Guillaume.
C'est donc la rela~
tion entre le nom et
la chaîne
linéaire qui
est en Phase II.
Si
l'adjectif métalinguistique s'antépose,
c'est
justement pour ou-
vrir
directement et
lui-même,
la voie à
la métalinguisticité,
signaler que
le nom sur lequel i l porte son commentaire avait
été déjà "envisagé" même s ' i l n'avait pas été prononcé concrète-
ment.
Certains énoncés très transparents montrent explicitement
la première structuration du nom sur le linéaire -
ce qui corres-
pond,
en quelque sorte,
à
l'emploi du nom -,
puis indiquent tout
aussi concrètement
la seconde structuration lors de
laquelle l'ad-
jectif vient porter effectivement son commentaire méta-linguisti-
que.
Rappelons
l'énoncé
(25)
(25) un LIT. Un vrai
LIT
pour une vraie nuit.
L'énoncé
est particulièrement parlant
parce qu'il simule,
dans
la chaîne linéaire,
la successivité des étapes relationnelles
de
la structuration du programme sémantique(l)
'LIT'
~ --~:. ~ -------------~'ilun vrail
=
c
~
1:t LI'~
f
___IV
(1) - - - - - - - - - - - - - - =--
- - - i ' " > (II)
(1)
Dans
le cas de
la connexion sémique, l'adjectif non méta Li rigu Ls «
tique enrichit un programme sémigue;
i l est mis en relation avec
un élément sémique. L'adjectif métalinguistique porte sur un élé-
ment auquel
l'énonciateur a déjà décidé de donner une connotation
en fonction de
la situation de discours.
Son contenu sémique n'im-
porte. donc plus en tant que tel •. L'adjectif métalinguistique por-
-t~ d~ns ce cas sur un élément sémantique, un programme sémantique.

-
~f68 -
Dans
la première étape structurale,
lorsque
l'annonceur du
slogan publicitaire a
énoncé
'LIT',
on pouvait encore
le croire.
On pouvait encore prendre la notion LIT avec tout son programme
sémique et tel qu'il existe dans
le stock lexical:
c'était alors
le véritable
l i t ,
le
l i t concret ••• le LIT VRAI. Mais
lorsqu'il
s'est cru obligé de falsifier cette notion authentique en la re-
modelant à
l'aide de VRAI,
on a
tout de suite compris qu'il cher-
chait à faire
prendre pour des
lits,
les sièges du Boeing de
la
Ja~an Airlines.
En conclusion, bien que VRAI soit dans une position straté-
giquement méta-linguistique,
i l n'est pas en Phase I l ; plus exac-
tement,
i l indique que sa cible
(qui est
le noeud structural)
est
en Phase II.
A ce stade de
l'analyse on se rend
compte que le caractère
unidimensionnel du linéaire empêche
la schématisation d'être plus
parlante.
L'élément LIT est,
en réalité,
un cas de re-structura-
tion:
i l a d'abord été structuré,
constituant ainsi la mise en
place de
la cible,
puis re-structuré
lors de
la finition du syn-
tagme adjectival,
c'est-à-dire au moment où l'adjectif métalin-
guistique "prenait sa cible"
,-- ---. ~'VRAI .....
J
-
"":" ...........
vL
=sit.~~
Qu'en est-il de
la survenance des adjectifs de complémenta-
tion sémique dans
la chronologie linguistique?
Ceux-là sont dans
(1) Rappel:
un élément
"pris" dans deux ellipsoïdes est un élé-
ment qui a' traversé deux trames de structuration,
comme c'est ici,
le cas de LIT.
Cette schématisation est généra\\iSa~le à tous les
cas de portée épistémique
(adverbes de moda 1 i + o
" " ,

-
469 -
une relation de Phase II
avec
leur support nominal. Dans le cas
particulier de
:
LITTLE
CRI!vIINAL ~1ATTERS,
LITTLE qui est
le commentaire méta-linguistique attend que la no-
tion complexe soit d'abord formée avant de porter sur le point
de
jonction entre cette notion complexe -
un macro-programme sé-
mantique -
et le contexte
:
PLAN NOTIONNEL ------------------------------------------------
(1)
~HINAL~ MATT~
LITTLE
c§NINAL~-----
(II)
PLAN MEAT-LING. -----------.--------------------------~--------.
4) Remarques sur la prédicabilité et l'adverbialisation
des adjectifs
Tous ceux des
linguistes qui se sont penchés surie problème
de l'adjectif ont dn,
à un moment ou à un autre,
se poser
~des
~uestions·su~.les conditions d'adverbialisation des adjectifs.
La solution peut se trouver à portée de main ou nécessiter des

développements fastid~eux selon les outils théoriques utilisés.
Le
probl~me de la prédicabilité des adjectifs se pose exactement
dans
les mêmes termes.
D. Bolinger a
traité de
la prédicabilité des adjectifs
(et
de
leur non prédicabilité)
lorsqu'il faisait
part de son scepti-
cisme vis-à-vis d'une solution tra~sformationnelle de
l'épithéti-
sation.
Le cheminement
suivi par D. Bolinger serait
long à
expo-
ser ici;
cela parce que
ce
linguiste ne fait
pas toujours
la part
des choses entre l'extra-linguistique et
le
linguistique.
L'ad-
jeGtif prédicable,
c'est-à-dire l'attribut,
est un cas de
"refe-
RENT-modification";
ce que nous
considérons être
l'adjectif
métalinguisti,que est un cas de
"refeRENCE-modification".
Les in-
tuitions de D.
Bolinger sont certainement
justes mais
la notion
de référence ne nous
semble pas être un concept de description
t r-è s fiab le.
. G.
Gu i, llaume a
fai t'une remarque beaucoup plus in-
téressante et elle ne concerne pas seulement
les adjectifs mais
ce qui
est traditionneliement appelé
"parties du discours"
"Sont prédicables,
les parties du discours dont
l'in-
cidence
(exteme
ou externe
)
ressortit à
l'événement
1
2
que relate
la phrase.
Ne
sont pas prédicables,
les par-
ties du discours dont
l'incidence ressortit au mécanis-
me de
l'~vénement qu'est la phrase elle-même,,(l).
Pour rendre cette remarque exploitable au plan théorique,
i l suf-
f i t
de comprendre "phrase"
comme
"p.noncc5 " ,
c'est-à-dire,
"produit
de structuration" ou
"structuration" tout
court.
En ce qui concer-
ne
le rapport adjecti:f-nom,
nous savons maintenant que
la struc-
turation du nom se ram~ne à
son introduction dans
le discours,
(1) G.
GUILLAUl\\IE
Leçons de
linguistigue,
?8/02/
1957

-
471
-
en un mot,
son emploi. Ainsi l'adjectif qui se rapportera plus
ou moins directement à
l'objet que désigne le nom sera prédica-
ble, et pourra intervenir
dans des
constructions attributi-
_.-...._-
-~
ves. Tandis que l'adjectif qui aurait seulement rapport avec
l'emploi parti~ulier que l'~nonciateur fait d'un nom .pour d~si~
gne:r __.Q.uel_q':le objet,
l'adjectif qui serait une sorte de comrnentai-
re sur le noeud du groupe nominal serait un adjectif d'~n9n~ia-
ti0n~ Il devient un outil formel et dans ces conditions,
i l ne
peut plus prétendre à
la
prédicabilité.
La non prédicabilité évoquée ici concerne, bien entendu,
la
construction attributive. On sait qu'en d'autres occasions,
l'ad-
......
jectif non prédicable peut être sollicité dans
la structuration
d'un prédicat matriciel
:
I t ' s UNUSUAL
for
a
priest t o k i l l
(d'après un énoncé de
GLA)
UNUSUAL effectue, ici une.. moda lisation interne;
l'important res-
te cependant que,
l'adjectif à
éffet modal, bien qu'intégré dans
un domaine prédicationnel,
i l décrive,
non pas "l'événement que
relate
la phrase" mais porte directement sur
TO
donc sur l'év~-
ment linguistique qu'est
la relation
UNUSUAL
for a priest
L'on aura remarquf que, malgr~ sa prédication dans ce contexte
particulier, UNUSUAL domine un noeud relationnel à
l'image des
autres adjectifs métalinguistiques.

- 472 -
L'adverbialisation des adjectifs pose des problèmes telle-
ment intéressants qu'elle n'a pas échappé même à
l'attention des
hommes de presse(l). Nous resterons dans
le domaine des sciences
du langage pour apprécier ce que dit P.
Cahné des adjectifs en
-ABLE,
-IBLE productifs ou non d'adverbes en -MENT.
L'occasion
sera ensuite donnée à G. Moignet de proposer une solution psycho-
mécanique au problème de
l'adverbialisation des adjectifs.
"Les adjectifs en -ABLE /
-IBLE",
écrit P.
Cahné,
"qui
ont
une valeur de possibilité passive,
sont très stériles en adverbes
à
la forme positive,
tandis que
leurs antonymes produisent pres-
que tous des adverbes
réparable
irréparable
~ irréparablement
réfutable
irréfutable
---.,.. irréfutablement
etc •• • "
Par ailleurs,
P.
Cahné remarque ~qu'alors que l'adjectif po-
s i t i f est obligatoirement postposé
(nous soulignons),
l'antonyme
a
la liberté de placement
une preuve contestable
place fixe;
une preuve incontestable /
une incontestable preuve ,,(2)
P.
Cahné donne ensuite une
longue liste d'adjectifs en se basa.nt
toujours sur le critère
"adjectif positif"
vs
"adjectif anto-
nyme" auquel i l ajoute le facteur positionnel. I l y
aurait, d'ores
et déjà des objections sérieuses à formuler à
propos de
la post-
position obligatoire des
"adjectifs positifs".
Nous les r6servons
(1)
J.
Cellard,
journaliste du Nonde,J
se posait des questions
sur
les conditions d'adverbi.alisation des adjectifs.' Son article a
été
soumis à
l'attention des pa~ticipants du CRELIN~UA du 1J/02/ 198J
.
. '.
. .;: ~
~. . '
.
(2)
P.
CAHNE
"Place,
valeur et adverbialisation des adjectifs"
in Revue des
langues romanes,8,
1972, p. 117

-
L~7 J -
pour la conclusion partielle de ce paragraphe;
remarquons seule-
ment que rien n'empêche d'énoncer "une CONTESTABLE preuve". Si
P.
Cahné vient à
croire que le français a astreint certaines épi-
thètes à des places fixes,
c'est parce qu'il n'a analysé que des
syntagmes au
lieu d'énoncés •••
P.
Cahné définit d'abord ce qu'il croit être la fonction de
l'adverbe.
L'adverbe,
selon lui,
sert à
caractériser "un procès",
"une action"
(e.g.
i l court LENTEMENT).
Nous ne nous arrêterons
même pas sur les métatermes de
"procès" et d'''action''. I l expli-
que ensuite que le procès ou l'action s'inscrivent dans l'espace
et surtout dans le temps.
Les adjectifs,
eux,
se sous-divisent en deux catégories; i l
y aurait ceux qui ne peuvent pas passer le plan temporel comme
GROS,
VASTE,
ROUGE ••• De
la seconde catégorie,
i l ne dit presque
rien;
en tout
cas,
i l ne dit pas en quoi elle diffère de la pre-
mière. Quoiqu'il en soit,
les adjectifs qui,
toujours selon lui,
se rapportent exclusivement à
l'univers-espace ne peuvent pas
donner des adverbes aptes à caractériser un procès. A en croire
P.
Cahné,
si un adjectif comme TERRIBLE donne TERRIBLEMENT,
ce
serait parce qu'il intègre à
la fois
l'univers-espace et l'un±-
vers-temps. On ne voit pas très bien comment un adjectif du type
TERRIBLE "intègre l'univers-espace",
au même ti.tre que VASTE,
par
exemple. Peut-être faut-il attendre
l'analyse de G. Moignet~ui
est très explicitement d'inspiration guillaumienn0pour y voir
un peu plus clair.
Pourtant,
à
l'opposé de TEH.RIBLE,
les adjectifs comme REFU-
TABLE,
REMEDIABLE ne s'adverbialisent pas. P.
Cahné semble,
cette

fois,
recourir à
la d?monstration par l'absurde
,
"Les adjectids en -ABLE qui devèloppent
l'idpe de
possible -
celle-ci exprimant explicitement le temps
en devenir virtuel -
ne se
laissent pas intégrer au
plan spatial que doit aussi
caractériser l'adverbe"
Pour ces raisons obscures,
ce type d'adjectifs ne s'adverbiali-
sent pas. P.
Cahné apporte ensuite une précision assez curieuse
pour expliquer que IRREPROCHABLE,
IRRENEDIABLE •••
s'adverbialisent
"On voit alors que
le négatif,
dans
la mesure o~
l'idée de possible ne l'habite plus,
se pr~te à l'ad-
verbialisation là o~ son correspondant positif résiste,,(l).
Si
"l'idée du possible n'habîte plus un ad je.ct if" n'est-ce pas,
en suivant les propres explications de P.
Cahné que
l'expr~ssion
du temps lui est aU8si enlevé à
cet adjectif?
Et dans ce cas,
tout comme ROUGE,
GROS,
VASTE . . . qui n'intègrent pas
le temps
-
domaine de l'adverbe
(sic)
-
IRREFUTABLE,
IRREPROCHABLE,
IRRE-
~IEDIABLE
devraient aussi résister à
l'adverbialisation. On ne
voit toujours pas comment P.
Cahné arrivera:
_à prouver que les
adjectifs qui
viënrient d' ~tre ci tés se rapportent "à l'univers-
espace" au point de pouvoir s'adverbialiser.
Le dernier argument
est,
de loin,
plus convaincant
:
"On peut noter qu'IRREPARABLE,
par exemple,
ne fonc-
tionne pas comme le simple négatif de REPARABLE ( ••• )
L'idée de possible qui,
pour l'adjectif positif,
se déploie sur le plan représentatif passe,
pour l'ad-
jectif négatif sur le plan expressif.
L'impossibili-
té en général gue signale
le négatif ne caractérise
pas tant
le DIT gue
le DIRE,,(2).
(1)
P.
CAHNE
ci t . ,
p.
125
(2)
Ibid.
p.

-
L~ 7 5 -
Nous
lui donnons raison sur l'opposition m6ta-discursive entre
HEPARABLE et IRREPARABLE.
Le passage de
l'adjectif "sur le plan
expressif"
correspond pour nous à son passage sur le plan de
l'énonciation.
TRREPARABLEMENT,
IRREFUTABLEMENT e n c o r-e plus nette-
ment,
apporte une sorte de commentaire méta-linguistique sur les
énoncés avec
lesquels ils occurrent. En outre,
nous ne sommes
pas surpris que les adjectifs en -ABLE /
-IBLEet qui sont dits
"positifs" ne s'adverbialisent pas ou,
du moins,
le fassent plus
difficilement. On a
en mémoire
l'équivalent sémantique de -ABLE,
'CAN'
en anglais qui implique la capacité physique; H. Adamczewski
lui refuse d'ai lIeurs
(à ABLE) le st8."tut de modal; il n'est pas
concerné par les métaopérations.
Cela expliquerait -
en français
-
qu'ils soient plus ou moins réfractaires à
l'adverbialisation.
Pour revenir à
l'adverbialisation des antonymes,
l'explica-
tion métaopérationnelle se baserait sur l'opération de négation.
La négation suppose le çlépassementd'une première étape structu-
rale,
donc un passage en Phase II;
l'adjectif ayant basculé dans
le plan méta-linguistique,
i l devient tin "adjectif du DIRE"
com-
me le dit si bien P. Cahné.
P.
Cahné s'était fixé pour objectif
l'adverbialisation en
-l'vIENT des adjectifs ayant pour suffixes -TBLE /
-ABLE. G. Moignet
aborde
le phénomène de
l'adverbialisation dans un cadre plus gé-
néral et
les conditions d'adverbialisation d'après ce dernier
sont à peu près les mimes que celles que nous venon~ de présen-
ter. Hais G. Hoignet traite le problème dans un cadre théorique
bien précis:
la théorie guillaumienne des incidences et des ten-
seurs;
cela devrait conférer à
son analyse un certain crédit.

G. Moignet explique d'abord que
ce qui fait
la diff?rence
entre le nom et le verbe,
c'est que
le premier a une tension qui
se confine à
l'univers-espace(l);
le second a une tension qui
transcende
l'univers-espace pour l'univers-temps. Et
"un adverbe
en -MENT qualifie conjointement
l'action en cours et son terme.
L'effet de sens est
souvent
l~idée de la manière dont l'action
se fait.
La manière d'un procès,
c'est proprement sa qualifica-
L'adjectif qui
sera incapable "d'inférer l'univers-temps
dont
le verbe est
la traduction linguistique,,(J)
ne pourra pas
prétendre à
l'adverbialisation.
Du coup,
les adjectifs sémantique-
ment inaptes sont ceux qui signifient
les notions
spatiales. Mais
force est de reconnaltre que
la s~paration "univers-espace/uni~
vers-temps "
n'est pas chose aisée.
C'est ainsi que J~NG qui
donne LONGUEHENT recouvre
les deux domaines,
ce qui va d'ailleurs
dans
le sens de l'hypothèse de G. Moignet. Mais son antonyme qui
les couvre tous deux également devrait être logiquement produc-
t i f d'adverbe
?COURTEMENT.
Le même problème se pose pour LARGE/
GRAND qui donnent respectivement LARGEMENT et GRANDEMENT alors
que PETITEHENT est difficilement acceptable.
Les adjectifs de couleur dont G. Moignet dirait qu'ils ne
se rapportent qu'à l'univers-espace se prêtent à
l'adverbialisa-
tion :
"interpeller VERTEMENT
/
méditer
SOMBREMENT "
(1)
On aurait pu s'amuser à
lui demander s ' i l pense aussi que le
nom TE?-lPS lui-même est aussi
"confin6 à
l'univers-espace"
(2)
G. J>.lOIGNET
"L'incidence de
l'adverbe et
l ' adverbia li sa tion
de
l'adjectif" in Travaux de
linguistique et de
litt~rature, I,
196J, p.17S
(J) Ibid. p. 182

Devant ce premier accroc,
G.
i'loignet rrpond que
leur a dv e r-b i a li-
sation s'explique
par "l'acquisition de valeurs m~taphoriques".
Mais i l ne dit pas
ce que
la métaphore représente par rapport au
mode de fonctionnement des adjectifs
c'est
le genre de ques-
tions que
les psycho-mécaniciens de
l'époque ne posaient pas en-
core.
G. Moignet doit
trouver d'autres crit~res; les adjectifs du
vocabulaire technique
"se pr~tent mal ~ l'extension au plan tem-
porel";
selon les
crit~res dégagés par G. Moignet, ils devraient
rester improductifs d'adverbes. Mais ~ quelle r~alit~ (vraiment)
grammaticale renvoie
"adjectifs du vocabulaire technique" ?
ECONOMIQUE (MENT)
et STATISTIQUE(MENT)
sont déj~ des contre-exem-
pIes que G. Moignet a
ignorés. D'autres sous-divisions sont opé-
rées;
ainsi G. Moignet distingue-t-il les
"adjectifs appartenant
au genre animé"
et chaque fois
les contre-exemples affluent. EN-
fin,
i l
étale
au grand
jour l'inconsistance de ses
crit~res lors~
qu'il essaie d'expliquer pourquoi
les participes ne s'adverbiali-
sent pas:
"ils sont
trop proches de verbes
correspondants,
trop
associés ~ l'idée du déroulement du proc~s,,(l). On se souvient
que c'était exactement
le même
crit~re qu'avait retenu G. Moignet l
le crit~re idéal,
pour qu'un adjectif s'adverbialise. Quant aux
participes passés en particulier,
"ceux des participes qui sont
incapables d'accéder ~ la fonction adjectivale
donc inaptes ~
s'adverbialiser, ce sont
ceux des verbes intransitifs qu'ils
soient ou non frappés d' invariabi l i té" (ETE,
p'lAHCHE,
EU,
ALLE,
SOHTI etc . . . ) Si G. Moignet int~gre SORTIR dans sa liste, on
pourrait aussi y
intégrer DECIDER et lui rappeler par la même
( 1) G. r-IOIGNET :
op.
ci t .,
p.
182

- 478 -
occasion que
l'on di t
aussi DECIDE(I-nO:NT).
A l'issue de
l'analyse de G. Moignet -une analyse
largement
insuffisante ~:quelques remarques·s'imposent~onprojet th~orique
consistait à déterminer les conditions d'adverbialisation en -MENT
de toutes les catégoriesd'adjectifs.IL est allé t~op vite en beso-
gne,
à notre avis.
I l
lui aurait fallu
examiner les adverbes eux-
mêmes un peu plus longuement.
Des adverbes
comme MANIFESTEMENT,
DECIDEMENT,
CERTAINEMENT (pour ne citer que ceux-là) lui auraient
certainement posé des problèmes quasi-insolubles,
lui qui carac-
t~rise:
l'adverbe comme d~crivant "un procès en cours" ou "à son
terme".
L'on aura compris qu'il manque à sa théorie de
l'adverbia-
lisation un pouvoir g~néralisant.
Les adverbes du type, DE Cl DEi'IENT ,
MANIFESTEMENT ••• se rappor-
tent,
si
l'on veut,
à un procès mais un procèsde nature
(méta)-
linguistique. Ils reviennent parler de proc~s(sus) de structura-
tion,
c'est-à-dire,
l'insertion d'un certain énonc~ dans le con-
texte discursif.
Ils symbolisent,
d'une part,
le Relation de
l'énonciateur à
son énoncé mais instituent, d'autre part,
un au-
tre type de Relation entre les protagonistes de
l'énonciation et
ce,
par leur caractère polémique.
Ces adverbes sont,
du point de
vue métaopérationnel)
à rapprocher des adjectifs métalinguis-
tiques.
Quant aux adverbes dont G. Moignet dit qu'ils
caract~risent
une action -
ce qui est
l'effet r~sultant, comme i l le reconnalt
lui-même -
nous dirons qu'ils apportent une expansion ou une
complémentation
sémique aux notions verbales.
Ils ont une por-
t~e radicale, exactement comme les adjectifs de complémentation

- Lf 79 -
s~mique ~ l'endroit des programmes s~miques nominaux. Ces m~mes
adverbes non métalinguis1iques sont,
~ l'image des adjectifs s~­
miquement denses,
des opérateurs-restricteurs de-l'extension des
notions verbales.
Devant
la perméabilité des
critères établis par G. Boignet,
on doit
considérer
-TOUS les adjectifs comme virtuellement ad-
verbialisables. A propos des
cas-limites,
G. Hoignet évoque
"l'emploi métaphorique".
La métaphore est un effet monté de tou-
tes pièces par l'énonciateur et autant i l est impossible de pré-
voir les effets résultant des opérations structurales,
autant i l
est impossible de prévoir "l'acquisition de valeurs métaphoriques"
par les adverbes dérivés) de façon parfois insolite,d'adjectifs.
Autrement dit,
i l serait vain de vouloir - établir statistiquement
des conditions à
l'adverbialisation de -l'adje~tif.
C)
LA PLACE DE L'ADJECTIF DANS LES ENCHAINEMENTS DISCURSIFS
1) Problématigue de
"la place de
l'adjectif"
"La place de
l'adjectif" dans
les enchaînements discursifs
est un titre que nous avons formulé volontairement ambig~. Il
s'agi t
la foi s de
la tradi tionne Ile "p lace de l'adj ectif ~pi­
à
thète" aux côt6s
~ nom (antéposition / postposition) et de la
position de
l'adjectif dans
les articulations du discours. Peut-
~tre qu'au fond,
les deux "places" ont-elles quelque rapport.
Ce rapport ne peut ~tre trouv~ que si l'on tient ~ la fois comp-
te des opérations très
localisées que
l'adjectif effectue dans

le seul rayon du s y n t agme nomina l
(dé terminant
-
nom ® adjectif)
et des autres opérations qu'il est
susceptible de mener ~ bien
dans un périmètre plus vaste,
celui d'un énoncé,
d'un texte,
di-
sons le ctiscour~
en général.
Cet autre aspect du statut métaopé-
rationne~ de l'adjectif pose des problèmes structuraux dont la
solution s'avère être hors de portée de certains modèles
linguis-
tiques;
c'est-à-dire que certains modèles
théoriques se voient
déjà éliminés au départ.
C'est ce que nous allons
commencer par
examiner.
Parler de
"la place de
l'adjectif" est une formulation qui
date du structuralisme. Au moins.
L'on
accordait d'abord de
l'importance. à
la distribution des uni tés linguistiques selon
l'axe syntagmatique ou l'axe paradigmatique et,
éventuellement,
on se préoccupait de
leurs fonctions
(méta)-opérationnelles.
Tout cela explique que
le problème de
"la place de
l'adjectif"
par rapport au nom et
lui seul ait hanté
l'esprit des grammai-
riens puis des
lin~~istes pendant des siècles. La majorité des
travaux cités traite de
la place de
l'adjectif sans dépasser les
limites du groupe nominal
(voir titres des travaux en bibliogra-
phie). Très peu de
linguistes ont vu que
l'antéposition ou la
postposition de
l'adjectif pouvait être décidé~par l'énonciateur
après un véritable calcul sémantique.
Après avoir d6gagé
les fonctions principales de
la catégo-
rie adjectivale,nous avons montré que c'est par une sorte de
déterminisme métaopérationnel que
l'adjectif métalinguistique
précédait le nom dans
la chaine
linéaire,
que
ce soit en français
ou en anglais.
Si un adjectif tient,
selon les contingences du

contexte,
a quantifier une notion nominale,
u ~tre son introduc-
teur dans
la chaine
lin~aire, il ne peut que s'ant~poser. Remar-
quons en. passant qu'en senoufo o~
la cat~gorie adjectivale n'exis-
te
pas en tant que forme,
les
lex~mes à effet de quantifica~
tion m~taphorique (donc m~ta-linguistique) se placent à droite de
la base nominale . . .
comme
le MN :
ç~-kp::)
=
une GRANDE person(nalit~)
personne-gros
• HNl
En anglais et
en français,
l'adjectif à effet de quantification,
l'adjectif m~talinguistique, se pl~ce à gauche pour ~rendre le
hom en cible en ~tant dans une position aussi favorable que l'ar-
ticle,
lui-m~me ant~posé; ce niétait qu'un rappel(l).
Nous n'avons peut-~tre pas insisté assez sur la postposition
de
l'adjectif;
non pas que nous n'ayions pas de solution à pro-
poser.
La postposition de
l'adjectif est une métalinguisticit~
d'une autre nature;
elle est
su~tout d'ordre positionnel
l'ad-
jectif non métalinguistique enrichit sémiquement une notion nomi-
nale par ajout de s~mes. Il semble tout à fait
logique que,
dans
la chaîne
linéaire,
i l vienne s'ajouter au support nominal pour
lequel i l const~tue une expansion sémique
·1 adjectif!
adjectif
c
métalinguistique
NO}l
chaîne
linéaire
adjectif de
c
(§_~_l__~
~
compl~mentation
Î
1
apport
sémique
(1)
~n français et en anglais, les nombres et les adjectifs méta-
linguistiques
(les opérateurs de quantification)se placent à gau-
che du no~,
comme les articles. En senoufo,
les nombres et
les
lex~mes à effet de quantification se placent à droite comme le MN;
les opérateurs de quantification e t,
le::;
Li,-·~ !,;t::.I.'IILLllall"'" V11;" '.:'-'11'- une

-
482 -
Pour n'avoir su voir ces deux fonctions de l'adjectif,
le
problème de
la place de
l'adjectif est resté
en partie insoluble.
Pour en venir à bout,
on a
fait assaut de présupposés théoriques
diver~Nous ne nous y attarderonS plus.
Citons seulement quelques
uns(l). I l y
eut l'explication à
caractère stylistique:
l'ordre
ADJ.+ NOM produirait un effet
'affectif'; une explication à
ca-
ractère culturel ou psychologique
(sic):
le même ordre
(ADJ.+NOM)
reproduirait dans
la chalne linéaire,
la succession des idées •••
M. Wilmet,
nous
l'avons déjà signalé,
a procédé à
partir de
"données expérimentales";
i l a aussi cherché du côté de la dia-
chronie
("enquête historique"):
l'ordre ancien du français est
ADJ+ NOH et
les adjectifs ayant acquis à
la longue un sens très
général
(e.g. BON,
GRAND, PETIT •••• ) ont tendance à
l'antéposi-
tion. Quant aux nouveaux adjectifs
(dérivés de substantifs),
ils
sont postposés.
Nous nous sommes même
laissé attendrir pendant·
qU0lquss temps par cette approche à
caracière historique,car elle
sûmblait concorder avec le parallèle que nous avons établi entre
THEMATICITEjDIACHRONIE et RHE~lATICITEjSYNCHRONIE. En effet, si
l'ordre initial en français était ADJ.+NOM,
les adjectifs com-
me BON, GRAND, PETIT ••. qui sont presqu'aussi vieux que la langue
auraient tout simplement gardé
leur ancienne position.
Les ad-
jectifs dérivés de substantifs sont des générations récentes de
la langue en son propre sein;
ce sont des·structurations à
ca-
ractère ou à
statut rhématique;
fort
logiquement,
ils viennent
s'ajouter par la droite à
leur support nominal et l'explication
était d'autant plus séduisante que
l'on sait que la structuration
(1) H. \\HUIET :
"La place de l'épithète qualificative du français
contemporain" in
'. Revue de
linguistigue romane,
45, Janvie~-Juin, 1981

-
483 -
par la droite
(dans
les constructions adjectivales)
symbolise
des relations de type rhématique. }1ais nous nous sommes ressaisi
à
temps après avoir constaté que
certains adjectifs dérivps de
substantifs pouvaient être soumis à
l'antéposition. Qu'on en ju-
ge par cet énoncé
extrait du Canard Enchaîné:
(35)
••• La Cour devait être saisie,
i l y
a quelques temps,
de ce MOUSSEUX PROBLEHE
(Le Canard Enchaîné 06/06/84)
De nombreux autres
linguistes dont L. Tesnière,
C. Bally,
M;Wit~~t•• ~ ont-p~6posé une ~xplication d'ord~e phorioloiique:
l'euphonie interdit,
par exemple,
la postposition de certains
adjectifs monosyllabiques etc •••
I l s'agit,
on le voit,
de E~lutions bien hétéroclites. Et
très souvent quand on fait une
synthèse de tous
les critères ac-
cumulés,
on retrouve des incohérences criantes. Nous n'entrerons
pas dans
ces détails:
le fait,déjà,qu'il y
ait une foule de solu-
tions non concordantes suffit pour dire qu'il y
a problème. Un
grammairien allemand observait déjà en 1848
:
"Partout où les grammairiens ont besoin d'une foule
de règles
coordonnées qui n'ont point de rapport en-
tre elles,
on peut être assuré qu'ils n'ont rien com-
pris à
leur sujet. I l faut une théorie simple et
générale dont
toutes
les règles dépendent rigoureu-
sement"( 1).
Remarque fort
juste mais pas toujours facile
à
respecter.
Le mo-
dèle linguistique doit
être suffisamment souple
pour s'adonner à
la formulation de solutions généralisantes
sans s'étouffer. Et
(1) HELLEn. : De la place de l'adjectif, Berlin,
18!~7-1f8, p.178

-
48L~ -
ce modèle se construit au fur et à mesure que
l'on lui soumet
les problèmes. En effet,
c'est dans
les épreuves
(les problèmes
abordés)
que
les théories linguistiques elles aussi se fortifient.
Et
le problème de
la place de
l'adjectif a
justement. été mal po-
sé.et ce pendant longtel!lpS.Pendant
longtemps,
on a
cherché à pré-
voir la place de
l'adjectif en fonction de son sémantisme.
La
solution était d'autant plus
lointaine que
l'on a
cherché à pré-
voir cette place de
l'adjectif par rapport au nom en manipulant
de simples syntagmes,
donc des fragments d'énoncés,
lorsque les
syntagmes eux-mêmes
n'étaient pas fabriqués pour les besoins de
la cause.
Nous verrons que seul
l'énonciateur décide de
la place
de
la place de l'adjectif et que sa décision intervient après un
calcul sémantique lui-même étroitement
lié aux contingences du
contexte. Autrement dit,
la place de
l'adjectif est un problème
qui dépasse le cadre restreint du syntagme pour celui,
plus lar-
ge,
de l'énoncé. Pouvait-on prévoir l'antéposition des adjectifs
dans
les énoncés qui suivent
:
(J6)
mais dans
le classement général, Bernard Hinault
conserve son
JAUNE
MAILLOT
(Tour de France sur France Inter,
Juillet,
1985)
(J7) TARDIVE W~vIIERE
(titre du Figaro)
(J8) ... Les VERTES PRAIRIES
(P. Verlaine)
Nous reviendrons,
bien entendu,
sur ces énoncés dans
leur inté-
gralité.
Les énoncés
(J6) et (J8) en particulier prennent au dé~
pourvu les théories qui prévoyaient que
les adjectifs de couleur
soient toujours postposés. Désespérant rie ne
jamais
parvenir à

-
!~8 5 -
prévoir avec certitude
la distribution des adjectifs par rapport
au nom,
certains
linguistes ont purement et simplement d~claré
forfait,
et i l s'agit encore d'un forfait
très mal exprimé:
les
linguistes en quest.ion estiment que
le problème de
la place de
l'adjectif n'est pas un problème qui concerne
la linguistique
mais qu'il relève" d'une caprice stylistique et devra être trai-
té dans
le domaine purement littéraire.
Comme si
la stylistique
ne faisait pas partie intégrante de
la linguistique
Y.
St Gelais contourne la difficulté
tout en donnant
l'im~
presssion de la résoudre
:
"Dans la langue poétique,
l'antéposition des adjec-
tifs de couleur est possible,
mais i l s'agit,
au re-
gard de la langue commune,
d'un usage e~~aptio:n~(1 )
Y. St Gelais se trouve lui aussi le dos au mur:
i l est con-
traint d'ouvrir une rubrique d'exceptions et d'établir une dise
tinction entre
langue
commune et
langue canonique.
Non seulement
cette distinction est difficile à
faire,
mais elle interdit l'ac-
cès à
la métalangue naturelle.
Lors du "dépistage ll de
"quelques
éléments de la métalangue naturelle"
C.
Delmas s'est orienté vers
le ~okney english~ c~st que, pensait-il,
les énoncés dont on dé-
nonce l'agrammaticalité sont ceux qui r~cèlent en renseignements
méta-linguistiques.
I l partait ainsi de
l'hypothèse selon laquel-
le
:
"Certains énoncés déviants sont plus révélateurs
pour le linguiste que
les énoncés normaux
( ••• )
(1) Y. St GELAIS
"Praxéogénie
adjectivale en français moderne"
in Systématique du
langage I,PUL,
1984,
p.
175

-
~~86 -
le ronctionnement prorond d'un m~canisme gramma-
tical se
laisse-t-il mieux saisir dans
les ~nonc?s­
limites que
les ~nonc&s habituels"(l)
Pour revenir à
la position des adjectifs,
disons qu'il est di ffi-
cile,
voire impossible d'en pr8dire
la postposition ou l'antépo-
sition en français.
En anglais i l serait tout aussi hasardeux de
chercher à
prpvoir leur ordre de succession lorsqu'ils s'accumu-
lent en tant qu'épithètes dans
l'antécédence du nom.
Dans
les
deux ,langues,
on pourra,
tout au plus,
tenter de JUSTIFIER leur
positionnement et sur ce point particulier,
nous revenons à l'un
de nos principes de départ:
le pourquoi des faits
(linguistiques),_
,2)
L'adjectif dans
sa fonction d'instrument méta-discursif
Rappelons que nous désignons par "instruments m~ta-discur""
sifs" ces unités
linguistiques qui servent de point d'articula~
tion aux séquences de discours.
En tant qu'opérateurs,
ils assu-
rent ce qui est habituellement appelé
"la cohésion discursive";
en tant que métaopérateurs,
ils indiquent plus ou moins explici-
tement que
le discours a un amont et un aval:
ce sont des che~il-
les ouvrières de
la logique argumentative.
Les instruments méta-discursifs cumulent donc une fonction
anaphorique et une fonction cataphorique.
Les uns se sont vidés
de toute substance sémique pour devenir des outils formels.
C'est
le cas de
'SO'
en anglais:
( 1)
H.
ADj,\\,;'·'lCZE\\·/SKI
BE+ING,
1976, p. JOJ

-
!~87 -
(J9)
... that's the r-e a s o n :for most suicides. Someone is
torturing you. You want to kill him but you can't. AlI that
pain because you
love him
( ••. )
SO you kill yourself.
(HUFOCA -
21-22)
Certains instruments méta-discursifs restent suffisamment trans-
parents pour exhiber leur mode de fonctionnement
:
(40) Hy eyes distractly consult it
[the mirroJ
-
are down
to i t against my will,
as they sometimes are by the sensiti-
veness 0Z.a flickering unregulated television set. It has
..
that kind of frivelous power.
TI1EREFORE l
shall describe i t
-
in the manner of those French avant-garde writers.
(MUFOCA -
7)
La morphologie de THEREFORE permet de distinguer,
d'une part,
un
instrument de
la mémorisation syntaxique THere et de
l'autre,
un
indice
annonçant-
une programmation à venir
(FORE).
Les deux opé-
rateurs conjuguent
leurs
latitugessémantico-syntaxiques pour
effectuer un rappel et un appel syntaxiques.
On l'aura certaine-
ment compris,
ils constituent une interface relationnelle entre
l'antécédence et la subséquence
:
---
R A P PEL
EV --A-0 E L
- - - - - - - - - -
chaine
linéœ.ire
L'adjectif n'a pas encore atteint un seuil de désfmantisa-
tion aussi poussé et qui
le rendrait strictement équivalent aux
morph~m~grammaticaux.Iln'arrive donc pas à cumuler tout seul

-
L~88 -
les fonctions
cataphorique et anaphorique.
Dans
le domaine pure-
ment sémantique,
l'anglais et le français
semblent avoir opté
pour une solution analytique en scindant
les fonctions anaphori-
que et cataphorique.
Certains él~ments sémantiques seront alors
chargés du rappel,
d'autre~se spécialiseront dans la fonction
d'appel et,
dans un cas comme dans
l'autre,
la position de
l'élé-
ment sémantigue sera iconigue de
l'une ou l'autre des deux fonc-
tions à assurer dans
le plan
du discours. Un adjectif comme
SAME joue un rôle assurément anaphorique;
qu'on observe les deux
parties de
l'énoncé suivant
(41)
qui se rapportent à deux séquen-
ces de la même histoire
:
(31)
The portrait wasa stiffy posed jo~ of an officer ( ••• )
The officer had a neat black imperial, black mustachios,
HOT COAL BLACK EYES,
and the general look of a man i t would
pay to get along with.
l
was s t i l l looking at the HOT BLACK EYES when a door
opened far back under the stairs.
(BISLEEP -
2)
( ... )
A man opened the door and led me along a
side hall to
the main hallway and
left me there,
saying Mr Norvis would
he down in a moment. The main hallway looked just the same.
The portrait over the mantel had the SÂME HOT DAill( BLACK EYES,
(BISLEEP -
195)
La première mention de la suite d'adjectifs était une mise nn mé-
moire de
leur programmation dans
la construction de
l '
no n c
r
le
é
é
pouvoir anaphorique de SA}lE a
rappe lé ce macro-programme séman-
tique
(presqu'à la forme adjectivale.près)
e t cela,19J pages plus
loin !
On notera surtout que
l'instrument de rappel se situe à

-
1~89 -
gauche de HOT DARK BLACJ\\: EYES
lors de
la seconde mention;
remar-
que banale,
dira-t-on,
étant entendu que
la place habituelle de
l'épithète anglaise est
l'antéposition; mais i l est intéressant
de noter que-dans le traitement
lexical de
lacataphore,l'angli:l.is
prend soin de placer l'élément sémantique à
effet de cataphore
APRES
le terme dont i l va ensuite donner la définition détaillée:
(42) The results are
AS FOLLOW:
Philip Carter first,
Sam
Cohen second,
Sandra Postlethwaite third.
(J~ngman Dictionary, 1978)
~En (41) S_~IE rappelle un répérage antérieur; il peut être dit
thématisant. Quant à
.•• AS FOLLm~ . . . ,
i l introdui t
un programme
de sens nouveau,
ce qui fait de
lui un opérateur de rhématicité,
..
à
l'image d'ailleurs de
'AS'
dont
les potentialités rh€matisantes
on déjà été rélevées ailleurs.
Le français
retrouve dans
son fonds
lexical les adjectifs
approprié s
et ce qui est, encore plus remarquab le,
c'est qu' i l
joue davantage sur
la posi tion
de s ".: adjectifs que sur leur sé-
mantisme,
à
moins que
les deux plans
(position et sémantisme)
ne soient
complémentaires
:
Je n'augure pas bien de
l'AVENIR PROCHAIN
(~e Petit Robert d'après Renan)
La mort,
la FIN PROCHAINE
(~e Petit Robert)
(44) Mais la PROCHAINE FOIS tu sauras qu'un agent n'est pas
un' guigno 1.
(Le Petit Robert,
d'après A.Camus)

-
:190 -
La Glose proposée par le dictionnaire pour rendre compte de
l'ant~position de PROCHAINE est tr~s éclairante pour une fois:
"la premi~re fois que la chose se RE-PRODUIRA".
Le morph~re RE-
rend bien compte de
l'effet de rappel anaphorique. Bref,
en (44)
PROCHAINE simule,
par son ant?position,
le renvoi non seulement
à un événemenr antérieur,
mais aussi à
l'antécédence du discours;
i l a déjà été question d'une
"p r-em i.è r-e fois".
En (LI3),
i l simule
par ~a postposition,
l'effet cataphorique :
-----------------~)
APPEL
(1)
PROCHAIN
RAPPEL ."lI!~:..------------__,
PROCHAIN
(II)
Cette br~ve analyse des éléments sémantiques à valeu~anapho­
rique et
cataphorique confirme que l'ordre des éléments dans la
chaîne linéaire est bien une forme ·::1e métalangue naturelle
qui
consiste à
dater les étapes structurales.
Les instruments méta-
discursifs choisissent sur la chaîne linéaire la position qui
leur est
la plus favorable pour mener à bien l'opération dont
la
langue les~aura chargés. Les mêmes phénom~nes s'observent dans
le fonctionnement des adjectifs dans
leurs rapports avec
le nom
et l'environnement discursif.
Mais l'adjectif est,
avant
tout,
un élément
lexical.
Sa mor-
phologie ne peut pas
traduire
les opérations de reprise comme on
l ' a vu,
par exemp le avec
le ~IN2 en s e no u f'o , Ce sera a lors par son
s~mantisJne que l'adjectif indiquera sa compatibilité avec le con-
texte-avant ou
le contexte à venir.

· ./
-
l~91 -
Nous commencerons par le français qui tire proEit de sa dis-
position à
antéposer ou à postposer les épithètes
(L~5) Je vais vous donner une réponse à ma question. La voi-
ci:
le parti recherche !~_E~~!~!~_~!~!~~!!~~~~!_E~~~_!~_E~~­
~~!~. Le bien des autres ne l'intéresse pas. Il ne recherche
ni même la richesse, ni
le
luxe,
ni une
longue vie,
ni
le
bonheur.
Il ~~_~~~~~~~~~_g~~_!~_~Q~~2!~.Le PUR POUVOIR. Ce
que signifie LE POUVOIR PUR,
~~~~_~l!~~_!~_~~~E~~~~~~_!~~!
de suite . . .
G. Orwe 11
1 98'+ ,
p.
J 70 )

Intéressons-nous d'abord à POUVOIR PUR.
I l aurait,
peut-être,

intervenir avant PUR POUVOIR si
l'énonciateur voulait respecter
strictement la successivité des étapes relationnelles; mais de
toute façon, i l s'est ressaisi puisqu'il confère implicitement à
la postposition de
l'adjectif, un statut cataphorique:
i l se pro-
pose d'expliquer ENSUITE.
La séquence "vous allez le comprendre"
signifie bien ce qu'elle veut dire;
par rapport au-déjà-dit du
contexte-avant,
i l Y a
retour en Phase 1.
Revenons maintenant à PUR POUVOIR. l'1ême si PUR n'a pas été
mentionné,
son sémantisme est déjà suggéré dans
le contexte-avant
(cf.
séquence soulignée en pointillés). PUR
(pouvoir)
fait
séman-
tiquement écho au contexte antérieur immédiat.
Nous avons
la mê-
me situation dans
l'énoncé qui va s~~vre; en (46),
c'est un ad-
jectif dit d'''intensité'' qui
joue,
par son antéposition et sa
postposition,
le rôle d'instrument méta-discursif:
(l~6) ••• Il en est ains i du ré tab lissement, largement souhai-
té,
de
la peine de mort ou du retour dans
leur pays d'origin~
des travailleurs émigrés •..
Sur ce point,
la légère réticence

des électeurs d'Extr~me Droite est plutôt li~e au refus
d'une prime de départ.
Plutôt qu'un&EXTREME DROITE,
i l s ' agi t
d'une DTWITE SXTRE-
ME,
p}~~_~~~~2_E}~~_!~~~~~~~!e qu~ }e~ ~u!res c~mp~sa~t~s
de l~oppo~itio~.
(Le Monde,
14/02/ 1984)
La fonction cataphorique est celle qui est
la mieux exprimée ici.
Entre
le syntagme ad j ect i va l
DROITE }':XTREHE et sa suite,
on au-:
rait pu insérer un
'c'est-à-dire'
ou,
mieux,
deux points
(:).
Quoiqu'il en soit,
la virgule
(,)
remplit parfaitement
la m~me
fonction.
L'antéposition de
l'adjectif épith~te français a souvent'
été expliquée par "sa forte valeur émotive"
(cf.
C. Bally).
Cet
argument reste bien fragile puisque les m~mes auteurs explique-
ront dans
le m~me ouvrage ou article que,
postposé,
l'adjectif
p~se de tout son poids sémantique. La. réalité est que, antéposé,
l'adjectif fait
sémantiquement écho au contexte-avant et postpo-
sé,
i l est en rapport de
compatibilité sémantique avec le contex-
te subséquent. Voyons encore quelques cas d'antéposit±oris
(47) Mieux que personne,
l'archev~que de Cantorbery, autre-
ment dit,
la plus haute figure de
l'église,
vient de résu-
mer la situation ( .•. ):
".:!:-~_~~~~~_~~!~~l~e_découlege la_pe~r,_de_la_pe!:,plex~té
et des_profon~s chan~ements qu! prennent Elace dans notre
soc i été
( . . . )
I l s e mb le qu' i l Y ait un mou v e 1'; e nt de con sen-
sus à
l'affrontement.
( •.. )
Le danger d'un autoritarisme de
droite ou de gauche s'aggrave.
( . . . )
Je crois que
un jour,
t
les gens vont
se r~veiller
et découvrir qu'on ne peut plus
vivre décemment dans une société
comme la nôtre".
Ce sont

de FOHTSS PAROLES.
(Le Monde -
2~/10/ 1984)

-
h9J -
J ç.)
\\
t .
J
>-
( "h)
;
par l r ce rra r s
1982 ,
en plein "r"tat de siège",
i l
organise ses fameuses
"messes pour la patrie".
( . . . )
Le nom
donné à
l'office est à
lui seul !~~!_~~_EE~gE~~~~~_!~_E~!Eig,
la_vEa!e~ ~e_n~e~t_p~s ~el!e 9ui_pr~tend_repr~senteEun EOu-
voir art!ficiel,
mais bien celle qui a fait
surface en AoGt
1980 et qui: survivra à D~cembre 1981,
comme elle a
survécu
à
tant d'autres ~preuves. On prie pour les prisonniers poli-
!iques, _ le Pèr~ Popi~luzko _ dé ngn c e , le '::men2ong~",_ la_pr~wa­
ga~d~, _l~~EEE~~~!~~~ ( .•• ) Ce sont là de bien ETRANGES r·1ES-
SES,
interminables.
(Le Monde -
JO/l0/ 1984)
Non seulement
les adjectifs ant~pos~s font ~cho au contexte ant~-
rieur,
mais ils dressent surtout un bilan du sens-d~,jà-investi.
La position strat~gique de l'adjectif et
la pr~sence d'opérateurs
de Phase IIfLA en (47)
et BIEN en (48)
convergent pour traduire
un effet conclusif.
La
reprise des effets s~mantiques ant~rieurs peut ~tre ef-
fective ori tout simplement suggérée :
(49)
La France voudrait bien vendre de 1~_9~~E~ aux Allemands
Qui
sont rÉticents.
( . . . )
En effet,
les cousins germains in-
voquent une loi du XVlème siècle,
le
"commandement de pure-
té" pour barrer la route aux 9!~E~~_~~E~::~~E~~' et en parti-
culier aux nôtres.
La Cour de
justice europ~enne devait ~tre saisie, i l y
a que lques temps de ce MOUSSElJX PROBLEr.lE.
(Le Canard Enchaîné, 06/06/S!f)
(50)
Le mur
danois
se forme .•. Mais_E~~_~::_E~~!~_~~E'
Ils sont 2i~~_~~E!~~~_h~i~_~~g2i!
Susie tire; mais ~ien
entendu la b a lle est r-e nv o y é e par cet IIvlPRESSIONNj\\NT ]\\HJR.
(Antenne 2 -
16/06/ 1984)

- 49~~ -
L'énoncé
(l~9) présente un cas de reprise clans la rrie s u r-e ou le
programme sémique de BI8RE comporte déjà
le sème
'mousseux'
Qu~nt à (50) l'aspect du mur form~ par le nombre excessivement
~levé de joueurs danois n'est pas sans impressionner le commenta-
taire.
L' antéposi tion de DiPRESSIONNANT -
somme toute inso li te -
traduirait,
si
l'on peut
le dire,
sa forte émotion.
Ce
serait
la
projection de certaines dispositions de
l'énonciateur sur le plan
structural.
En ce qui concerne
(49) force est de reconnaître
que
l'on ne s'attendait pas à
l'antéposition d'un adjectif comme
MOUSSEUX;
ce qui prouve bien que
l'alternance de
l'antéposition
et de
la postposition de
l'épithète obéit à un mécanisme qui dé-
borde largement
le cadre du syntagme adjectival.
Parfois,
i l faut
remonter loin dans
le contexte-avant pour
retrouver ce qui
a déclenché
l'antéposition d'un adjectif dont
on se serait attendu à
ce qu'il
fût
postposé
(51)
On se souvient que
ce
linguiste américain a
E~J~!~_~2~~~
"EE'~E2~!eEo~s: .!a_n2 t i2 n ~êm~ de for~e PEogre~sive et qu';!;l
_soutien! que
le_rôle de BE+ING est de dire gue.!qu~ c~o~e_de
.!a_PE~9~~~!~2~·
( ... )
( ..• )
On aura remarqué au passage
te caractère vague de
la notion de prédication (que Joos n'a jamais vraiment cher-
ché a définir)
et surtout
l'espèce de fascination que
la no-
tion de
"durée" a
exercé même chez un linguiste qui nous a
habi tué par ai lleurs à
d' AUT1-lENTHlUJi;S AUDACli;S.
(BE+ING,
p.
)
('2) La grande cit~ de Sebokeng, la plus importante de cette
zone du triangle du Vaal qui recroupe près de
120 000 habi-
tants a
été,
au cours de
la nuit,
~2~E.!~!~~~~!_~~~e~t~eE~r

-
1~9 5 -
l'armée et
la police. Toutes
les routes d'accès 1 cette vil-
le dortoir
( ••• )
~taient bloqu~es par les soldat~. D~ puis=
san!s proJec!~~~~_~~~~~~~~~~!_~~~_~~~~i ... ) U~e ~is~t~ ~n
engins blindés a
été organisée au petit matin pour découvrir
l'ETONNANT SPECTACUS d'une ville assiégée.
(Le Mo rrd e -
21~/l01 1981~)
(53) Oui, ETONNANT SPECTACLE que __ ~~~_~~~~_~u~ ~a~a~i~s_ éven-
!rp~, ~al~in~s, ces chemins d~ terr~ rouge_filant droit en-
tre
les petites bâtisses au
long desquels
: les troupes ont
pris position.
L'intendance a
installé
ses campements sur
les terrains vagues.
Les énoncés
et 53)
sont directement plus parlants que
(51)
qui nécessiterait que
l'on connaisse
la teneur scientifique des
travaux de M.
Joos pour se rendre
compte que
le linguiste améri-
cain a
l'habitude des positions audacieuses en matière de recher-
che. Des deux énoncés
s u i.varrt s ,
(53) est encore plus illustratif
que
(52).
Comme pour marquer le dépassement de
la première anté-
position en (52),
la seconde mention de ETONNANT SPECTACLE est
ponctuée d'un OUI qui est à interpréter comme un EFFECTIVEMENT,
indice méta-lingu,istique d'une
structuration de sens antérieure.
On pourrait objecter que c'est après ETONNANT SPECTACLE
(53) que
le caractère étonnant du spectacle est décrit. Mais
seulement
7non
(53) est une reprise de (52) comme nous venons de le dire; en plus
du OUI,il y, a
aussi l'opérateur QUE,
introducteur d'une structure
bloquée donc
pré-construite
D'ailleurs une paraphrase de
(53) serait
(53 ') Pour un s p o c t a c le (tonnant,
c' en e st VH!\\I~IENT un ...
On dévine que
l'anglais aurait
opté pour une
solution prosodique

avec un accent fort
sur WAS
:
,
a
striking sight i t
WAS . . .
La successivitf des étapes structurales pourrait être ainsi re-
présentée
:
(1)
(SPECTACLE
ETONNANT
"
"
)
l
ETONNANT
SPECTACLE
(II)
(1)
J,
OUI,
ETONNANT
SPECTACLE
qUE
...
(II)
On a,
pendant
longtemps,
pensé que
le sémantisme de certains
adjectifs
les prédisposait à
la postposition;
cela n'est vrai
que statistiquement.
L'énoncé
suivant montre qu'en dernier ressort
tout dépend du contexte;
i l suffit que
le sémantisme de
l'adjec-
t i f ou ce qu'il connote soit compatible avec un
contexte discur-
sif particulier. Ne perdons pas de vue que
la position de
l'adjec-
t i f est surtout affaire d'harmonie discursive
(sh) Dans cette étape contre la montre B. Hinault a couru
contre
le vent.
Ces conditions météorologiques défavorables
lui ont fait perdre
la première place au profit du Belge X.
Hais au classement général,
B. Hinault
conserve son JAUNE
ivIAILLOT.
(Tour de France sur
France Inter,
Juillet 1985
I l n'y a
pas eu de mention explicite de
la couleur jaune aupara-
vant;
i l faut
alors prendre appui sur le contexte,
la situation.
Nous sommes au Tour de France cycliste oG i l était question (com-
me d'habitude)
de B. ITinault dont on sait qu'il enfile souvent

-
l~97 -
le maillot
jaune.
En concluant
le reportage J.Vendroux (journalis-
te sportif)
a
trouvé naturel d'antéposer JAUNE
puisque tout
son
commentaire
se déroulait autour du
jaune encore que cela ne se
fit pas explicitement;
on sait que
le
jaune est associé
à
la
meilleure place dans
la compétition. Tout se passe comme si par-
1er de B. Hinault revenait à mentionner cette première place sym-
balisée par le
jaune.
Parmi
les
"antépositions insolites" les
linguistes citent
souvent ce vers de P. Verlaine
Les
VERTES PRAIRIES s'étendaient .••
L'antépositio~ estfdans ce cas précis, classée dans la rubrique
"style poétique".
Les coordonnées énonciatives sont ainsi igno~
rées.
En fait,
ce qui favorisait
l'antéposition ici,
c'est la
"situation ambiante". P. Verlaine décrit un paysage printanier
où l'ambiance est à
la verdure.
L'antéposition de VERTE,
pour in-
solite qu'elle puisse paraitre,
est
la traduction métaopération-
le la plus légitime de l'effet de verdure qui est
justement le
thème de ce poème.
Les adjectifs
'relationnels'
sont ceux qui dprivent directe-
ment de substantifs;
ils se refusent,
dit-on,
à l'antéposition.
L'énoncé suivant
contredit
cette fausse
impression
(55) Elle Ll'hotesse] se tourna pour lui adresser un sourire
de reconnaissance.
S=~_~~~~=~_~E~~~~=~ étaient presque vio-
lettes à'force'd'être noires' ( .. ~) mais le ,visage ne manquait
pa~ de charme grâce à ~~~_r=~~_~~_~~~~~_~~_~~~~~~'
( . . . )
La
SCULPTURALE HOTES5E revint et se pencha sur lui:
( ... )
(POUAUAGA -
95)

Dans
le cas particulier de
l'fnonc~ (55), c'est la postposition
de
l'adjectif dit
"relationnel"
(SCULPTUHALE)·qui paraîtrait bi-
zarre;
sans doute parce qu'elle aurait introduit une cassure
dans
la coh~sion du discours. Encore un dernier énoncé avec une
antéposition qui pourrait être
jugre curieuse:
(56) - TARDIVE LUf-HERE -
( ... )
En tendant
la main à
Adenauer
quelques ann~s seulement après
l'écrasement du IIIème Reich par les forCes alliées,
Charles
de Gaulle avait montrÉ
la voie à Georges Pompidou et Val~ry
G. d'Estaing
devait suivre avec la même fidélité.
F. Mi tterrand,
lui,
n' avai t
pas compris d'abord cet te leçon
magistrale;
( ••• )
!!_!~~_~~~~_!~!!~_E!~~~~!_~!~~_a~s_d~erre­
ment et de d~conve~ues pour ret;:-ouve;:- ënfin la lumière.
( •••.
Nous ne pouvons que nous féliciter de ce sain retour à
la continuité
tout en d~pl~r~n! }~_!~~E~_E~~9~ ( ... )
(La Figaro -
JO/05/ 1984)
Le
syhtagme adjec~ival est un titre d'article.
L'on pourrait être
tenté de recourir aux explications selon lesquelles l'antéposition
de TARDIVE produit une "très forte émotivité":
un titre ne doit-
i l pas être accrocheur?
Par la même occasion,
on pourrait objec-
ter que dans
le
linéaire,
le titre d'un article précède
l'ensem-
ble du texte.
Ce serait
là une ihterprétationtout de même simplis-
te de la notion de contexte-avant.
Nous avons dpjà eu affaire à
un cas de figure identique
où la structuratiop abstraite était
nettement en rupture avec
la structuration concrète,
celle qui
concerne
la disposition des séquences d'~noncés dans un texte.
La délinéarisation est un exercice plus subtil.
Le titre
d'un article ne précède presque jamais la conception ~ême de

-
L~99 -
l'article,
sa structuration pour ainsi dire.
Cela est
tellement
vrai que
la traduction du titre d'un ouvrage d'une
langue A à une
langue B nécessite toujours que
le traducteur lise le texte de
départ. Autrement dit,
le traducteur est toujours amen6
à refai-
re
les structurations qui
sous~endent la gen~se de l'ouvrage de
départ et
cela dans
le but d'obtenir une
compatibilit~ entre le
titre et le texte d'arrivée.
Pour schématiser,
on pourrait compa-
rer la traduction des titres d'ouvrages ou d'articles à un calcul
sémantique dont
le
bilan constitue le titre effectif. Pour reve-
nir à
l'énoncé
(56) disons qu'en s~rface, c'est-à-dire, l'organi-
sation du t~xte du journal,
le ti~re préc~de bien le corps de
l'article ma Ls-vd a n s
le domaine de
la structuration abstraite,
le
titre est un r~sumé de l'ensemble du texte(l). Dans l~ordre d'ef-
fection des opérations,
le titre intervient dans
la phase secon-
de des
structurations;
tout cela justifie
l'antéposition de TAR-
DIVE en (56).
Si
l'antéposition se ramene
en définitive à
la reprise du
sens-déjà-investi,
l'on doit s'attendre à
ce que
la postposition
consiste en l'investissement nouveau de sens.
L'adjectif postpo-
sé fera cette fois
écho à
l'ensemble du macro-programme sémanti-
que situé en aval de
la chaîne linéaire.
Et si
l'on a
pu parlér
d'une"valeur informative" de
l'adjectif postposé,
c'est parce
que,
d'un point de vue métaopérationnel
la séquence que l'ad-
jectif postposé rattache ~ l'ensemble du contexte -
assurant ain-
si
la cohés~on discursive -
n'a pas encore fait
l'objet d'une
mention antérieure sous quelque forme que
ce soit.
Voyons plut5t
(1)
L'intitulé d'une th~se, par exemple,
se formule
(i.e.
se struc-
t~re) apr~s la r~daction compl~te de celle-ci

-
500 -
quelques énonc0s
(57) L'an pass~ il y a eu beaucoup de probl~mes internes au
comité mais on a quand même fait pas mal d'ACTIONS APPRE-
CIABLES,
~~~~~~~~!~~~_~~_~~~s! ~o~l~ct~s_.~._d~ ~'~r~ent p~ur
des organisations humanitaires ••.
le
journal de
la Cit~ In-
!ernati~nale, les jeux qu'on a achet~s .•• les fers à repas-
ser
(Réunion du Comité des Résidents
de
la M.A.S.E.
19/10/ 1984)
(58) L'inconvenient d'une confusion de la catégorie gramma-
ticale et d'un cas syntaxique n'est pas un INCONVENIENT VRAI~
~~~~_~~_~~~!~~~~~!_~e!t~ ~d~n!i!é !er~in~log~que_sig~ale
qu'il s'agit de
la même fonction de représentation du
réel qu'on interpr~te comme "cat~gorie" en considérant le
prax~me lui-même et'un "cas" en considérant son insertion
dans l'~nonc~.
(H.
Lafont,
Le travail et
la langue,
p. 239)
En (57) l'ensemble des activit~s énum~rées après l'adjectif post-
posé est ce que
le Secrétaire G~néral de Comité
juge positif,
c'est une forme do' expli ca tion (ou de
justification) de APPIŒCIA-
BLE.
S'il Y a
reprise,
c'est
l'adjectif APPRECIABLE qui est don-
né dans
la subséquence du discours sous sa forme analytique
(énu-
mérations des actions appréciables du Comit6).
L'6noncé a
été
produit dans un contexte pré-électoral et
l'énonciateur laisse
entendre que
> organisation de bals, collectes .•
Dans
l'éI
. ....
~ o n c ~.
(:;8)
~
'
1
l '
n y a pas d'"pnumera t 'lon d e
t ype exp l'lca t'C'
é
lr
mais
la ponctuation (:)
à
elle seule a
valeur de
justification.
L'on doit d'ailleurs reconnaître que
l'adjectif' VRAI
a plutôt

-
501
-
l'llabitude d'~tre ant~pos~; mais ant~pos6, i l quantifie et l'ef-
fet
r~sultant a parfois quelqtie chose de m&taphorique (cf. VRAI
LIT). Or R.
Lafont dont
connait
la rigueur dans
les explica.tions
cherche,
ici,
à
démontrer.
Retenons en un mot que
l'adjectif an-
téposé produit un effet
conclusif aux séquences d'~nonc0.
qui
le
pr0cèdent et que
l'adjectif postposp est une introduction aux sé-
quences d'pnoncé qui suivent.
Le rappel anaphorique,
on le sait,
peut
~tre basé sur des
données situationnelles.
La cataphore qui introduit un &lément
rhématique'peut,
elle aussi;
prendre appui sur des données situa-
tionnelles et dans ce cas,
i l s'agira de données de caractère non
.-.,",
linguistiques,
l'acte d'osteniation,'pa~ ~i~mple.
(59)
Ce téléphone compact,
livré avec son support mural,
est
doté de cinq
FONCTIONS
très
ETONNANTES.
[-I.e.gardez vi te
le
".----------------
~~s:~~~~!_J~~~!.
( ••• )
N'hésitez pas;
l'offre qui est faite est unique:
40~ de remise, un choix de 7 durées d'abonnements au Matin
de Paris et un
ETONNANT TELEPHONE
en ca.deau.
(Services de publicité du }latin
de Paris)
(60) Il Y a trop de
DEFINITIONS DIFFERENTES de
"phrase"
pour qu'il soit
intéressant de
les donner toutes ici pour
en faire
la critique.
(Et en note):
cf Noreen,
Vart Spark
Sonnenschein,
( ..• )
et bien d'autres encore.
(La philosophie de
la grammai-
re,
p.
435)
(59) a été extrait d'un texte publicitaire explicitement argumen-
t a t i f avec des photos à
l'appui.
L'annonceur invite
le destina-
taire à
regarder
(concrètement)
le document
joint afin de se

-
502
-
rendre compte que
le t~léphone comporte cinq fonctions surprenan-
tes;
dans
la seconde partie de
l'6noncé,
i l est pass~ à une ~ta-
pe structurale seconde et i l peut
conclure que
le destinataire
a
affaire à un té léphone EFFECTIVEMENT étonnant.
L' antéposi tion
de
l'adjectif a
suffi pour restituer la thématicité que
l'adver-
be EFFECTIVEj·fENT aurait exprimé P lus exp l i ci t ement
:
c:2:0NCTION~ETONNAN~
ENANTE~T"ONCT3
(1) -------------~'> (II)
L'énoncé
(60)
marque une seule étape relationnelle.
J~ aussi, le
statut rhématique de
la relation se déduit du
contexte: formelle-
ment,
la postposition de
l'adjectif. O.
Jespersen renvoie par
une note en bas de page
à
l'~numération des différentes défini-
tions. On dévine que s ' i l les avait d'abord énumérées,
i l aurait
pu ensuite renégocié un nouveau départ par
' •••
ces DIFFERENTES
DEFINITIONS sont •.• '
et cela aurait essentiellement pour but
d'assurer la cohésion discursive.
Le probl~me se pose un peu différemment en anglais;
c'est
la succession des épith~tes accumulées qui sera en cause.
Les
adjectifs épith~tes devrons se répartir plus ou moins équitable-
ment les fonctions que nous avons dégagées
jusqu'ici:
la fonc-
tion d'apport
sémique et
la fonction méta-linguistique. Cette
derni~re doit alors ~tre prise sous son aspect le plus général,
c'est-à-dire,
de
la quantification stricte au rattachement de la
notion nominale au contexte-avant(l),
assurant ainsi
l'harmonie
(1)
Rappelons que
l'effet de modalisation (quantification,
appré-
ciation ..• )
est
lui-m~me étroitement dépendant du contexte-avant,
au sens large.

- 503 -
du discours
(61)
l
suppose you are pretty pleased with yourself?
Peo-
ple like you disgust me and not only me but a hell other
-------
peoFle in this world. You're smug, you are self-sufficient,
you think.
( ..• ) You are a DISGUSTING LITTLE l'tACHINE,
noth-
ing else.
(DORA~ - 7)
(62)
She was somewhat disturbed by the interview. Did he
guess that she might be a
spy
( .•• ) ?
His voice anp man-
ner had made her ~~~~=~~~~~~t~~~~~~d.-.
( ... )
Neverth less she went to
s leep tha t
night "li th an UNPLEA-
SA.NT LITTLE CLUTCH offear at her heart.
(REBAG -
117)
(63) His voice rose to a scream. The Inspector nodded to his
underling:
"Take him aw a y , Detained on
suspicion n'.
"1 don't know what to think" ,
he said as the UNPLEASANT
SHAKING OLD HAN
w i t h
the malevolent,
mouthing .j aw wa s
re-
moved.
(.~.B.C. - 24)
En (61)
et
(62)
i l Y a
compatibilit~ des effets s~mantiques du
contexte-avant et l'adjectif le plus extrapos6 par la gauche;
ce-
lui-ci reprend
(s6mantiquement)
d'autres programmes s6mantiques
presqu'à la forme près.
Le principe de succession des adjectifs
repose ainsi
sur deux axes,
en fai~ les deux fonctions qui ont
6t~ d6gag6es:
l'adjectif extrapos~ par la gauche, par son s~man-
tisme,
a plus d'attaches avec le contexte ant~rieur, pendant que
le plus à droite recherche une forme de coh~sion avec le nom
qu'il enrichit s6miquement

-
50'~ -
-=:::Jj
C
< >
il+ 1
notion complexe
chaîne linéaire
En (63)
l'antéposition de UNPLEASANT trouve sa justification
dans
la mani~Fe dont
le personnage -
Asher -
a
été antérieurement
pr~senté. Non seulement il est mauvais époux, mais il est aussi
reputé
ivrogne,
ce qui
lui vaut
les appréciations les plus dispho-
riques
(i.e. UNPLEASANT). Quant
à SIIAK1NG et OLD,
i Ls r-é f'è r-e rrt
davantage à
la description physique du personnage.
L'on a aussi tenté de prévoir l'ordre d'occurrence des épi-
th~tes ~
exactement comme on l ' a tenté pour la place de l'épith~-
te en français. W.E.
Jones et W.E. Brocken,
cités par C. Delmas,
ont établi une sorte de mode d'emploi des adjectifs
lorsque ceux-
ci s'accumulent à gauche du nom.
Selon leur tableau récapitulatif,
les adjectifs dits
"relationnels" devraient ~tre les plus pr6ches
du nom. Quelques énoncés semblent confi~ler cette tendance:
(64) "1\\Tith this engine", he gestured towards the gun train-
ed on trough the desk drawer,
"1 have already blown
many
holes in many stomachs.So l
am quite satisfied that this
l i t t le mechanical toy is a
SOUND TECHN1CAL ACH1EVEHENT.
(LELID1 -
1 7)
(65) Catherine was clressed as a hospital nurse and she took
her duties seriously,
9~~!~_~~!~~~~~~~_~~!~~_!~_!~!!~
Victoria's
s i.d e ,
( ••• )
Victoria 100kecl ot Catherine's STUBDORN FANAT1CAL FACE
without enthusiasm.
(nEBAG -
1 82 )

-
505 -
(66) !.:!:~!~~!_r~~::_~:::~~~~!~ from dust and d ania g e w h e n not in
use by keeping i t in its
PROT8CTIVE PLASTIC BOX.
(Cassettes TDK)
Il faut
surtout voir dans cette distribution des épithètes
la
meilleure répartition des tâches métaopérationnelles qui soit.
(64)
et
(66)
en particulier,
les adjectifs dérivés de substantifs
(avec lesquels ils gardent quelques affinités quant à
la densité
sémique)
enrichissent
les notions nominales mieux que ne l'au~.
raient fait dans
ces contextes,
PROTECTIVE (66)
et encore moins
SOUND (6L~). ?~n(64).le
fait que l'on ne puisse pas intercaler
SOUND entre TECHNICAL et le nom confirme nos hypothèses sur la
cohésion:
l'a9jectif dont
l'apport sémique au nom est d'une cer-
taine importance,
forme avec ce~ui-ci une notion complexe que
rien ne doit pouvoir faire éclater. Mais en dernier ressort,
c'est l'énonciateur qui décidera,
selon les convenances de la si-
tuation,
quel adjectif ex~rapaser par la gauche et ce sera l'ad-
jectif qu'il aura jugé apte
(sémantiquement)
à servir de point
de
jonction entre le contexte-avant et
la notion complexe.
C'est
le même principe qui régit la succession des adjectifs en (65).
Le p e r-s o nnag e Cathérine est membre d'une secte internationale et
elle s'est surtout montrée dans
l'intrigue comme une fanatique.
Mais dans
le contexte particulier de
(65),
ce qui est mis en re-
lief,
c'est plutôt son entêtement. Des deux épithètes à
effet
appré c i.a t i.f",
STUBBOHN ()tai t
le plus indiqué pour faire sémanti-
quement ?cho au contexte antérieur;
d'o~ sa position iconique
entre
FANATICAL F'ACJ': et ce contexte antérieur immédiat.

-
506 -
Sn guise de conclusion partielle,
disons que
l'adjectif le
plus extraposé par la gauche est un résumé,
une condensation sé-
mantigue du contexte antérieur,
alors que l'adjectif le plus pro-
che du nom
complémente ce m~me nom au point de former avec lui,
une notion sémanti4uement complexe et une structure syntaxique
compacte.
*
* *
Nous sommes conscient que beaucoup reste encore à dire du
fonctionnement de l'adjectif. Notre objectif était de montrer
que l'adjectif -
catégorie intermédiaire entre le nom et le ver-
be -
présente
certaines facultés à
remplir des tiches métaopéra-
tionnelles.
Le parcours effectué par l'adjectif du domaine pure-
ment
lexical au
domaine
(méta)-linguistique n'est pas sans rappe-
1er la promotion de pseudo-verbes comme
'HOLTf
et
"SHAL" au rang
d'outils grammaticaux aux prix seulement de quelques modifica-
tions morpho logiques
(IWLT ----+ WILL;
SIH,L -4-~HALL) •
L'objectif a
largement été atteint. Nous avons pu voir l'ad-
jectif,
tour à
tour,
matériau de structuration du sens,
cette
fonction elle-m~me doublée de celle de la réduction d'extension
des notion nominales cibles;
cela fait de
l'adjectif un outil,
un opérateur.
L'adjectif fait un pa~ vers la métaopération dès qu'il se dé-
tourne de sa fonction de
complémentateur (ou plutôt
la prolonge)
popr devenir Un véritable
quantifieura.son statut
méta-lin-
guistique devient alors plus net.
~nfin,
et dans un cadre plus

-
507 -
g~n~ral,
l'adjectiî assure une
certaine coh~sion dalls l'articula-
tion du discours;
i l s'apparente alors aux "mots de
liaison":
c'est un opérateur de relation.
Lorsque nous avions entrepris les investigations sur le fonc-
tionnement de
l'adjectif,
nous nous étions d'abord arrêté,
comme
la plupart des
linguistes,
à
"sa place" par rapport au nom.
Cette
"place de
l'adjectif" ne constituait-elle pas un phénomène lin-
guistique intéressant,
surtout pour
la théorie métaopérationnel-
le o~ "liordre des mots,,(l)
est
consid~ré comme un indice méta-
linguistique de première importance ?
"La place de
l'adjectif" a
soUlevé des débats parfois très
passionnés,
à
preuve,
l'a1:rondance de
la littérature qui lui est
consacrée. Mais i l s'agit,
en ~~rité, d'un débat inutilement pas-
sionnéj
surtout si
l'on a
cherché à
"r~gler" la question de la
position de
l'adjectif en prenant
comme échantillon d'analyse,
le
simple syntagme nominal.
Cela revenait à
décrire les formes
pour les formes.
Que ce soit en anglais ou en français,
la position de
l'ad-
jectif dans
le linéaire est un tout petit aspect des phénomènes
que recouvre son fonctionnement,
la partie visible de
l'iceberg,
pour ainsi dire.
D'abord en ce qui concerne
la quantification,
le fait que,
pour intensifier ou minorer une notion nominale ce-
lui-ci précède sa cible nominale n'est pas un fait fortuit.
Mais
seulement,
pour
percevoir
le caract~re obligé de l'antéposition
de
l'adjectif à
effet de quantification -
un cas de déterminisme
métaopérationnel -
i l est indispensable de passer par la descrip-
tion du fonctionnement de certains
opérateurs qui exercent une
( 1)
A.
CH01'C1U
L'ordre des mots en anglais
et en arabe tunisien,
Thèse en cours,
Paris III.

-
508 -
fonction
a peu près
semblable sur les notions nominales,
par
exemple,
les d~terminant-articles (en français et en anglais)
les MN
(en senoufo). Cela suppose,
par voie de
cons~quence, qu'on
ait r~ussi à maîtriser efficacement les m0.canismesmétaoppration-
nels
des opérateurs en question.
Et
ce n'est pas tout:
i l est
tout aussi indispensable de disposer d'une théorie solide de
la
structuration dans
le
linéaire.
Cette théorie ne devra pas con-
sister seulement en des
considérations d'ordre typologique
ob-
server des
structures de
surface pour conclure de
l'existence
d'un "ordre centrifuge" ou centripète" ou encore
"mitigé,,(l).
La contrastivité intralingue nous aura permis de rélever
la parenté métaopérationnelle entre,
d'une part,
l'adjectif m8ta-
linguistique et
le système des déterminants et,
de
l'autre,
la
similitude entre ce type d'adjectif et
les adverbes de modalité.
Fort logiquement,
cela devait nous obliger à reconsidérer puis
à rejeter les croyances solidement assises sur la soi-disant
cohésion entre
l'adjectif ant~posé et le nom qui le suit(2). La
cohésion entre deux éléments est,
en première approximation,
strictement dépendant de
la relation entre les termes en questioni
P lus p r-é ci sément,
la fermeté de
la cohé sion dépend de
la "dat e"
de
leur mise en relation,
de son caractère
(±)thématique.
Et
si
l'on tient absolument à parler de cohésion entre l'adjectif et
le nom,
i l faut bien voir que celle-ci a
plutôt
lieu entre le nom
et
l'adjectif postposé;
l'adjectif postposé
n'est-il pas une for-
me d'expansion
sémique de
la notion nominale?
Quant à
l'adjec-
t i f à effet de quantification,
i l convient de ne pas perdre
de
(1)
voir en particulier L. Tesni~re et C. Bally.
(2)
H. Adamczewski nous faisait
remarquer que
la notion de coh~­
sion est ~purement intuitive" chez les
linguistes,
EXPO-03 du
03/07/
198 11

-
509 -
"rue
sa
portée essentiellement adverbiale.
I l faut,
enfin,
tenir
compte du fait
beaucoup plus important qui est que
l'adjectif m6-
talinguistigue ne porte pas directement sur le noyau nominal mais
sur le noeud entre
le nom et
la chaîne
linéaire.
En ce sens,
l'ad-
jectif m6talinguistique guantifie une relation.
Pour utiliser un symbolisme plus explicatif sur la question,
disons que
le fonctionnement de
l'adjectif s'apparente au systè-
me de quantification dans
les mathématiques;
dans un cas,
nous
avons affaire à une opération d'addition
(sémique)
et dans
l'au-
t r-e ,
à une opération plus abstraite,
qui est
l'élévation d'un entier
à une certaine puissance dans
les fonctions
exponentielles
• addition sémïgue
(NOM
cohésion possible:
+ ADJECTIF)
(1)
. quantification,
absence de
cohésion
(N 0 M)ad j .
(II)
entre l'indice et
la variable:

CON C LUS ION

-
511
Au terme de ce travail,
l'on aura retenu en substance que
la Relation,
de par son statut
en linguistique,
n'a pas
la même
pr8pondérance d'un modèle
linguistique à
l'autre.
Cette différen-
ce d'appréciation de
la relation,
la relation que nous croyons
être l'âme de toute structure
(linguistique),
a des incidences
sur la teneur'des solutions apportées aux problèmes considér8s.
L'importance accordée à
la relation dans
la théorie du modèle va
. _o.
jusqu'à déterminer la thématique
linguistique,
c'est-à-dire,
les
phénomènes
linguistiques analysés.
Du structuralisme
le plus ancien
pratiqué encore dans
les analyses phonologiques -
autransformationnisme chomskien,
la
relation
est
tout simplement synonyme de rapport. Or,
un rap-
port se constate;
la relation,elle,
se construit. On relèvera
la "passi vi té"
imp liqué e
par la notion de rapport,
contre -I e dyna-
misme suggéré. dans
"la structuration d'une relation". Et
les
structuralistes, et
les transEormationnistes auront donc ignoré
qu'il y
a,
dans
la langue,
un agent responsable des mises en re-
lations.
Ce qui
les condamnait à décrire les formes pour les for-
mes, disons, sans arrière pensée,
à décrire pour la forme.
Avec les études casuelles
(transitivité.et valences ••. ),
les rapports syntaxiques
ou
les rapports oppositifs entre les
unités discrètes ne sont pas complètement mis entre parenthèses,
mais on insiste surtout sur les fonctions
sémantiques.
Cette nou-
velle approche de la langue se confinait très fâcheusement au

512
domaine pr?dicationnel.
Sans exag~rer, nous dirons que les mod~-
les
linguistiques qui ont mis les notions de
transitivité au pre-
mier plan sont lesmeilleures illustrations de
la confusion g6né-
ralisée entre les choses
linguistiqueset
l'extra-linguistique;
En effet,
dans
les analyses strictement sémantiques
(cf.
J.Fillmore)
l'énonciateur est absent;
c'est
le 'linguiste qui,
guidé par ses
impressions sémahtiques,
distribue all~grement des fonctions
d'agent,
de b~néficiaire, de patient à des formes grammaticales.
La théorie guillaumienne fait,
en quelque sorte,
genre à
part. Mais
le concept d'incidence que
l'on pourrait assimiler -
par inattention -
à celui de relation,
n'est pas plus qu'une af-
faire de paTtée. Mais
justement dans.l'analyse du rapport ,de l'ad-
,: .
jectif au nom où i l question de portée,
les néo-psychomécaniciens,
par esprit de suivisme,
n'ont pas rectifié apr~s G. Guillaume.
La th60rieguillaumienne n'est pas vraiment une théorie d'opéra-
tions énonciatives.
Or,
le probl~me que pose
l'adjectif déborde
largement des f:Donti~res du syntagme nominal ou adjectival. La
philosophie linguistique de G. Guillaume reste~ependant valide.
Nous y relevons un rapport intéressant avec
ce que G. Holton ap-
pe Ll.e "1 ' imagination scientifique". Pour en finir avec G .GUi llaume,
i l faut parfois admettre qu'une théorie a
son époque et que son
époque peut tracer,
parfois,
ses propres
limites.
Nous étions parti de
l'hypoth~se qu'à la base de la créa-
tion du sens existe une relation.
La..
linguistique théorique dis-
tingue plusieurs niveaux d'analyses dont
le niveau phonologique,
le niveau syntaxique,et
le niveau sémantique.
Ces distinctions
sont
toujours arbitraires mais cette répartition se comprend,

-
51J -
contraintes heuristiques obligent.
Par le fonctionnement du MN
senoufo,
par les phénomènes de composition,
et par le rôle de
l'adjectif,
nous pensons avoir recherché
la relation dans
les ni-
veaux d'analyse ainsi dégagés.
I l va sans dire que ces différents
niveaux ont quelque rapport,
ne serait-ce que
leur appartenance
au même système:
la langue. Hais
leur rapprochement,
par le biais
de
l'analyse n'est pas forcément
chose aisée.
Il nous fallait
donc un modèle
linguistique qui puisse
restituer .. au système,
toute sa systématicité; un modèle capable de généralisation,
donc
un modèle qui permette d'embrasser d'un regard de
linguiste,
tous
ces micro~systèmes. Autrement dit,
la grammaire métaop6rationnel-
le,
par sa· cohérence, dépasse
l'intuition selon laquelle ."dans
la langue,
tout
se tient".
La description des
"classificateurs",
c'est-à-dire,
l'ana-
lyse métaopérationnelle des marqueurs nominaux du senoufo,
nous
a
apporté une satisfaction personnelle.
C'était,
au départ,
une
sorte d'exercice destiné à
rélever un défit que nous nous étions.
lancé:
appliquer les présupposés théoriques adamczewskiens -
qui
ont fait
leur preuve en anglais -
à une
langue éloignée,
très
~loignée de l'anglais~ Et au délà de cette satisfaction person-
ne lle,
i l
n'est P!'ls s ari s int6T_êt de noter que· 1..' ana lyse métaopé-
rationnelle a
été conçue à un moment où,
à
ce .que nous croyons,
H. ,Adaczewski n'avait pas encore fait la connaissance du senoufo.
Cette souplesse visant à
la généralisation n'est pas le
fort de tous
les modèles.
I l n'est pas rare de rencontrer des
modèle créer des termes de description à
chaque fois d Lf'f'é r-e n t-s j
selons les
"points" analysés,
et ce,
à
l'intprieur d'un même

-
51 i, -
syst~me linguistique. Dans cette cat~gorie de mod~les, l'on dira
que tel article est
"défini",
que tel morph~me "reprend la per-
sonne
qui a été nommée",
que HERE d Lf'f r-e de THERE ~~sélon la
è
distance à
laquelle le
locuteur se trouve~••
Beaucoup d'étiquettes
pour rendre compte d'un SEUL état de relation. I l est évident
qu'il ne faudra pas s'attendre à
ce que de tels mod~les linguis-
tiques envisagent un éventuel rapprochement entre une
langue né-
gro-africaine et une
langue indo-européenne •.•
Bref,
par l'approche métaopérationnelle,
nous pensons avoir
proposé une solution plus intelligible,
en tout cas nouvelle,
au
probl~me des marqueurs nominaux. Nous avons même été amené à fai-
re des incursions dans
le domaine verbal dù senoufo. Nous avouons
avoir douté un moment que cela puisse "marcher".
Encore une fois,
"dans
la langue,
tout se tient".
C'est aux
théories de description de
le prouver. Mais nous n~h~sitons pas
à affirmer que certains phénom~nes linguistiques, objets d'analy-
se,
peuvent prouver,
en retour,
que dans
le mod~le de description,
"tout se tient u •
Mais au delà de toutes ces considérations d'ordre épistémo-
logiquei retenons que
le fonctionnement du MN du senoufo aura
permis de rejeter définitivement
les concepts de "défini"et de
"indéfini", qu'ils soient invoqués à
propos de
l'article anglais
ou français.
Lfanalyse,même succint~ de la relation pr~dicative
aura permis de trouver des preuves supplémentaires à
la validité
du concept de saturation en grammaire m~taopérationnelle. Par
ces deux points d'analyse,
le senoufo confirme
la stabilitp. et

-
515 -
et
le suivi dans
les analyses d'un système de description selon
les moments
(Phase 1,
Phase II)
de
la structuration du sens.
L'étude des phénomènes de composition en anglais
une étu-
de qui privil~giait la relation et pour cause -
nous aura été
utile sur deux points principaux. D'abord de proposer une descrip-
tion non intuitive du phénomène de cohésion. Ce qui.,
plus tard,
devait nous obliger à
opposer un démenti
cinglant à
ceux qui con-
tinuent de croire ou d'écrire que,
antéposé,
l'adjectif est dans
un rapport de forte cohésion avec
le nom qu'il précède dans
le
linéaire. Enfin,
l'étude du phénomène de composition nous a
ame-
né à
la conviction qu~un signe graphique comme le trait d'union
qui passe ina~erçu, est un opérateur et même un métaopérateur
en bonna
et due forme.
Dans la foulée,
nous nous sommes .rendU. comp~
tequ'une foi~ de plus,
la théorie métaopérationnelle restituait à
la langue,
ce qui lui est propre;
l'énoncé est secrété par le dy-
namisme fonctionnel de
la langue;
i l comporte en lui tout
ce que
la lan~ue a en propre. Nous n'avons donc pas été surpris de retrou-
ver dans "la vie des
langues",
les étapes relationnelles répéra-
bles dans un énoncé. Dans
l'énoncé, 'ou plus généralement,
la struc-
ture,
i l y
a un avant et un après;
dans
les systèmes linguistiques
i l y
a une Phase l
et une Phase II,
donc également un,
avant et
un après que les spécialistes de
la question appellent synchronie
et diachronie.
L'adjectif anglais et français,
par son fonctionnement,
était certainement
la catégorie grammaticale
la plus indiquée
pour nous conforter dans notre perception du fonctionnement des
langues,
à
la lumière de
l'approche métaopérationnelle.
D'abord

-
516 -
l'explo~tation en th60rie linguistique des concepts logiques de
"extension" et de "cornpr6hension" nous aura amené à
penser que
les théories,
lorsqu'elles sont bien conçues,
se
rejoignent
bien quelque part.
La successivité observée des chapitres IV à V
sur le statut de
l'adjectif simule
les conditions dans
lesquelles
.
, , ( 1 ) ,
,.J
ria i s s e n t
les metaoperateurs
.
L adjectif intervient, ~-':fHns .··sa
fonction attributive avec son sens plein.
C'est un élément séman-
tique,
sémiquement presqu'aussi lourd que
le nom. Parvenu à
la
phase d'épithétisation,
i l participe avec t'efficacité dl~ri'arti-
cIe
à
la réduction de
l'extension des notions nominales;
comme
s ' i l avait les m~mes potentialités que l'a~ticle. Ensuite,
i l at-
teint un degré de désémantisation tr~s poussé qui en :fait un opé-
..:.,"
rateur de quantification.
Là,
i l n'a plus rapport avec le noyau
r
notionne l
du nom mais
"renseigne" m e.t a linguist iquement sur l ' em-
ploi quel'6nonciateur fait du programme sémantique d'un nom:
au
fond,
l'adjectif intéresse la structuration d'une relation nomi-
nale dans un contexte discursif donné~
L'adjectif représente,
à
lui tout seul,
ce~qu'il est con-
venu d'appeler la métalangue naturelle:
d'une part,
i l participe
activement à
la construction de sens -
par apport sémique au nom
support et,
d'autre part,
revient porter un commentaire sur le
sens construit,
c'est-à-dire
la relation nominale ainsi struc-
turée.
(1)
nous renvoyon~ à
la très belle page
(p.
110) de
la th~se d'é-
tat de C. Delrnas
~Strucuration abstraite et chalne linéaire en
angalais contemporain,
Paris III,
1985. Cette page pourrait ~tre
extrai te et inti tu lée:
"Comment naissent
les métaopérateurs".

A N N E X E

-
518 -
;\\)
SITUATION DU SENOUFU
Selon les typologies ~tablies par les
linguistes africanis-
tes,
la langue senoufo -
/sen~s.ri/ - appartient à la famille
des
langues GUR,
elle-même faisant
partie de
la grande fammille
Niger-Congo(l) •
Le senoufo est parlé par environ une million et demi de
locutèurs répartis sur quatre territoires d'Afrique Occidentale:
la Côte-d'Ivoire qui
compte le plus grand nombre
(670 000),
le
Mali
(6JO 000),
le Burkina Faso
(45 000)
et quelques milliers au
Ghana (2) •
En Côte-d'Ivoire,
~e senoufo fait partie des quatre
langues nationales que
les autorit~s projettent d'intRgrer dans
"
les programmes scolaires. Dans
le cadre de notre travail,
les
énoncés senoufo sont d'une variante parlée dans
la sous-préfec-
ture de Dikodougou,
le kouflo-fonondi
(voir carte à
la page sui-
vante)
~~ous reprenons P. Boutin (voir bibliographie) qui cite:
M.
DELAFOSSE : "Les
langues voltaïques
(bouc le du Niger) '!,
·~ié~o'i'r:~-d'·~-~·~··d.~o·-linguist:iguede Paris, 16,
1911.
M • A.
BYRAN,
D. IV I~STERHAN
: Handbo ok 0 f
Afri c an Language s,
II,
Languages of Ivest Africa,
Lo nd o n, Oxford Uni ver-
si ty Press,
1952.
J .
GHEENBEH.G
The Languages of Africa,
La Haye, Mouton,
196J,
2 0
Ed.
1966
G.
~1ANESSY
"Typologie du verbe voltaïque" dans Bulletin de
sociolinguistigue de Paris,
61,
l ,
1966
J .J.
Bl'~NDOH SAJ\\1U8L :
Niger-Congo GUH. in SEBEOK T. A.
Ed.,
Con-
tributions to current
trends in linguistics ~ub­
§.aharian Africa,
VII,
La
Haye, Mou t o n ,
1971
(2)
Ces chiffres ont ~té reconstitués par P. Doutin.

-
519 -
>IALI
BUHKINA FASO
GUINEE

Il GUll A
."A~":OU"A
IOUAH •
OIMIO.AO
AI/ NGOUAOU


• AOlO'1
• AGIOYIIII
AIOIUO
ABIDJAN o

SASSA.--OAA
Oc~an Atlantique (Golfe. de Guin~e)
zone occupée par les
Senoufo en C5te-d'Ivoire
n~gion de Dikodougou ou la variante kouflo-fonondi
est parlée.
(1)
"Carte cie
situation" établie par i\\.
Kientz,
à
partir cI'un
fond de carte administrative de
la C~te-d'lvoire, dans
A.
KII:;NTZ
Dieu et
les g~nies. r{tcits étiologigues senoufo,Câte-
d'Ivoire,
SI':LAY,1979,
p.
9

-
520 -
D)
Glossaire des
symboles et sigles utilisés
1) Transcription phon~tigue
Pour la transcription ges énoncés
senoufo,
nous avons adop-
té une écriture phonétique basée à
la fois
sur les conventions
de
l'A.P.I.
et
les instructions de
la commission pour l'Unifica-
tion de
l'orthographe des
langues de Côte-d'Ivoire(l).
Le systè-
me des consonnes
se présente comme ceci
:
-
Ll..ê..!~
lab-dent
dent
é.llv-pal
~ vél lab-vél glot
- -
--
.Occlusives
- sourd es
p
t
c
k
kp
7

_. s o no-r es
b
d
J
S*
gb
'.
. Affriquées
-
s o ur-d e s
f
s
~*
sonores
v
z
.-*
1
-
...
:
Nasal es,
m
n
*Jl
1)*'
-1
Latérales
l
!1
---_.
1
Vibrantes
r
i
-----
Î
Continues
y
H
i
-
'-
1
-----
Par commoditp
typographique
(clavier utilisé)
les signes
mar-
qués·parun astririsque
~nt ~tp transcrits dans les ~nonc6s de la
manière suivante
:
ç
pour
I~I
g
pour
191
ng
pour
I~ 1
ny
pour
1 pl
t
1 7, 1
(1) INSTITUT DEUNGUISTI\\)Ul~ APPLIqUEI~: Une orthographe prat igue
des
langues ivoiriennes,
Universitp d'Abidjan,
I.L.A.
1979.

-
521
Le
syst~me des voyelles se pr~sente ainsi:
Orale~.
J.ntérieures
Posté:-ieu:-es
Fermées
~
u
Mi-fermées
e
o
Mi-ouvertes
E
Ouvertes
•1
a
1 ----------- --------------
La nasalité
serait un trait syllabique donc additionnel.
El-
le est notée par un tilde
sous
la voyelle nasalisée,
de sorte que
la place
laissé~vacante au dessus de la voyelle puisse recevoir
le signe du ton
Cent.
Post.
Fermées
Moyennes
Ouvertes
La notation des
tons a,
elle aussi,
posé qu~lquesdifficul-
tés de typographie:
dans
le ton modulé,
la première
séquence de
la modulation porte effectivement
sur la voyelle;
mais
la seconde
partie a
les apparences graphiques d'un ton flottant.
On ne devra
(1)
No u s
a v o n s
repris
ces
tableaux après l'.
Uoutin qui
,~tait por-
t(~ davantage vers la phonologie. Voir Bihliographie

-
52 2
-
donc pas confondre la voyelle à
ton modulé avec
la suite de deux
voyelles aux tons différents
/à'/
/àa/
2) Traduction des énoncés senoufo
Le passage de
l'énoncé senoufo à
sa version anglaise oU
française
confirme,
on ne peut plus clairement,
cette remarque
de H. Adamczewski:
"la traduction totale est impossible". Nos
traductions ont surtout valeur de gloses méta-linguistiques. Voi-
...
là pourquoi,
contrairement à
la traduction
faite
des docu-
ments d'anthropologie,
nous proposons géné~alement trois versions:
le mot à mot,
pour donner une idée de
l'organisation du lexique,
la traduction littérale -
entre déux barres obliques -
qui est
proche de l'énoncé de départ,
et enfin la traduction que nous
croyons ~tre la plus canonique qui est soulignée.
Le mot à mot a dû faire appel à
certains sigles
-
(centF'.)
morph~m~grammatical qui serait la subduction
du verbe alle:-(lpang/)
~ /ba/; il véhicule
l'effet d'éloignement
(centrifuge)
(centP.):subduction du verbefkari/ -
/çe/) ~
/saa/ qui
est maintenant un morph~me du syst~me verbal;
i l véhicule
l'effet
de rapprochement (centri-
p~te)
(conn.)
connecteur discursif
-
(emph.)
emphatique
(interro)
interrogatif
(neg)
négation
-
(Pred.)
relateur prédicationnel

B l
B LlO G R A P H I E
- ' -
.1

-
52~~ -
A)
TRAVAUX CITES
AD:A1,1iczm';SKI, Il ,
:
D8+ING dans
la grammaire de
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A B L E
DES
!vI A T l
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TABLi~
lJi;~S MATI i~H.l~S
pages
AVANT-PHOPOS --------------------------------------------
3
INTHODUCTION --------------------------------------------
4
CHAPITRE PIŒi'HER :
LA RELATION AU COEUr? DU SYSTE~lE
14
A)
La relation et
la genèse du sens ------------------
16
1)
La coordination <les plv:nûmènes ou
leur compr8hen-
sion :
la création du sens
16
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Structuration du sens dans
le domaine du
langage
25
B)
La relation dans quelques modèles
linguistiques
36
1) La relation dans
les grammaires structurale
et
transformationne lle
--------------------------- ... 37
2)
La relation dans
la syntaxe structurale de L. Tes-
nière l~O
3) Les relations sémantiques ou casuelles
43
4) La rela~ion
chez O.
Jespersen
----:---...,- ... ------
50
5) Relation et/ou incidences chez G. Guillaume ------ 55
6) La relation dans les théories d'analyse du discours 68
C)
La relation comme outil d'analyse des énoncés -------
72
1)
La relation en linguistique,
une événement linguis-
tique
74
2)La datation des événements
linguistiques ----------
74
i) quelques exemples de datation ---------------
76
CHAPITRE II
:
CONTRIBUTION A UNE ETUDE DE LA RELATION
NOMINALE
(fonctionnement méta~op~rationnelle du marqueur
nominal en senoufo)
--- 84
A)
Problématique de
la classification
nominale ---------
89
1)
La classification est-elle un problème
linguis-
tique
89
2)
La notion de
classification:
le cas du senouÎo
91
. Remarques-.sur l~s classificateurs à effets
majorants et à
effets minorants ------------
99
3) La classification: un critère typologique ------
102

-
539 -
B)Structure',Îormelle du nom senoufo:
une mise en relation 107
1)
Le nom senoufo:
une unit~ complexe --------------- 107
2)
La
fonction du MN --------------------------------
116
J) Splection d'une base verbale dans le plan notionnel 11J
i)les relateurs ----------------------------------
119
ii)
statut et structure de
la base verbale --------
121
4) Remarques sur l'absence du MN -------------------- 128
C)
Le
statut du nom:
le MN indice m~ta-linguistique ----- 1JO
1)
Le MN,
symbole de relation ----------------------- 1JO
2)
Statut de la relation nominale:
l'harmonie vocalique
et
la m~talanRue naturelle ----------------------- 1J4
i)
Le Î''lN du singu lier ----------------------------
1 J5
ii)
remarques
sur l'absence du MN à
l'ind~fini ---- 156
i i i )
le MN du pluriel ----------------------------- 159
J) Le-MN et la valeur grammaticale du ton ----------- 164
i) sch~me tonal du MN --------------------------- 166
ii)
sch~me tonal de la base lexicale ------------ 167
4) Mise au point:
l'~tude des traces de relations et
l'approche phonologique -------------------------- 169
D)Le MN et
la mise en m~moire syntaxique --------------- 172
1) La datation par l'anaphore ----------------------- 172
2)
Le >IN et méta linguisme de
la forme --------------- 177
J) Le MN /WO-/ dans l'opération de nominalisation --- 189
i)
effets sémantiques et m~ta-op~ration --------- 189
ii)
la nominalisation par /WO-/ ----------------- 19J
CHAPITRE III
LA STHUCTURATION DES
COMPOS:i;S ET LE DECALAGE
nies ISTAPES IŒLATI ONN I<:LL!~S
204
A)Bref aperçu de quelques ~tudes sur la composition ----- 206
13)
La composition dans une perspective mpta-opérationnelle 217
1)
Compatibilit~ naturelle des termes d'une relation -~17
• Mise au point --------------------------------- 22)
2)
Le d e c Lo n c hom o n t
des relations
(®.) ~ (-) -------226

c) Les plans de structuration et les échelles de cohésion
2 J8
~Statu~ des termes de la connexion sémique ---------
240
i)
les ~chelles de cohésion de la connexion sémique
en anglais -----------------------------------
240
ii)
les ~chelles de cohésion dans la connexion
sémique du senouÎo --------------------------
251
al la connexion sémqiue lâche --------------- 251
.
remarques sur le statut (: )TH des t e rme s :
de la connexion ----------------------
254
contrainte phonologique ----------
256
contrainte m~ta-opérationnelle ---
257
bl la connexion sémique compacte -------------
259
2) Etapes relationnelles et cohésion ---------------
265
i)
structuration des outils de limitation
d'extension -----
265
• congruence des datations méta-linguis-·
tiques en -ED et
(-)
275
ii)
d~calage des ~tapes relationnelles
-
diachronie 1 synchronie -------------------. 28J
. une similitude m~ta-opérationnelle remar-
quable
:
l'op~rateur (-) en Îrançai~, (~)
en senouÎo et DO en anglais ---------
289
D) La connexion s~mique a constituant verbal ----------
296
1) Le composé à constituant verbal en Îrançais selon
les
"anciens" -----------------------------------
298
2) La relation et son .orientation ----------------~- JOl
i)
l'opérateur -ER de l'anglais:
une trace
subjectale
J04
ii)
la cohésion
o - V
et
l'analyse méta-op~ra-
tionnelle de
la connexion s ém Lqu e à constituant
verbal -- J08
J) La connexion s~mique à constituant verbal en senouÎo J1J
.i ]
les consti tuants de
la connexion
sémique
J14
ii)la connexion sémique et
le !"IN du groupe l
----- J18
. Remarques sur le statut du MN du groupe l
dans
le système nominal du senouÎo ---------
J2J

CHAPITRE IV
STHUCTUHATION ADJECTIVi\\LJ~ ET STlmCTUH..ATION
PREDICATIONNELLE
326
A)
Statut méta-linguistique de
la catégorie adjectivale -- 329
l)~a hiérarchie des parties du discours .-----------
329
2) L'extension de l'adjectif et du nom -------------
333
3) L'extension de la notion nominale et ~
Ses retombées méta-opérationnelles --------------
339
B) La structuration adjectivale
dans
le domaine prédicationnel ------------'----------- 349
1)
L'attribut du sujet:
mise en place de deux notions 349
2) Nature méta-linguistique de la construction
attributive -----
353
3) Le statut des membres de la relation de
compatibilité -------
356
4) ! L ' attribut de l' obj et dans l'énoncé comp lexe ----
376
i)
l'attribut de l'objet selon
les psychomécaniciens -
376
i i )
pour une solution méta-opérationnelle
de l'attribut de l'objet
385
al la 0connexion méta-linguistique et EN, POUR,
DE •.•
en français et AS en anglais ----- 365
bl la connexion sémique ------------------- 392
cl conclusion partielle sur la connexion
sémique et
la connexion méta;"linguistique 401
CHAPITRE V
:
DE LA COHPLEHENTATION SEMIQUE A LA ~mTA-OPEH.ATION·
408
A)
La complémentàtion sémique:
le dépassement d'une étape
relationnelle ----- 410
1) La phase II
de la structuration adjectiva le ------ l~ 10
2) Adjectifs de Phase l
415
i)
ILL
vs
1.j.15
SICK
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
ii)
PREGNANT
(de
l'anglais)·
et ENCEINTE (du .français)
--------- l~20
B)
L'antéposition de
l'adjectif et sa fonction méta-
linguistique ------ 423
1)
L'ou t i l
de c ornp lérnenta tion et
le m6ta-opè ratHuJ: ---- 1.~2 5

- 542 -
2)
L'adjectif et son statut dans
le linéaire -------
i)
l'antéposition de
l'adjectif -
l'extension de
la notion adjectivale -
le contexte
la subjectivit~
----------------------------
ii)
nécessaire antéposition des adjectifs méta-
linguistiques dans
la linéaire -------------
J) Problème de cohésion et portée de, l'adjectif ----
L~ ) Remarques sur la prédicabilté
et
l'adverbialisation des adjectifs
469
.-~.
~:),\\"E."'t~
~.~
1,~
C)
La place de;j:...?,y/ba~j~~1·~~.~)ns les enchaînements
[t.
479
~\\VI~ _
~
discursifs --------
,
C
1 )
Probléma\\ti~cte"l .;'P,lace de l'adjectif" -------
lî79
2) L' adjec~{t'\\:~ r;.i.t'ion d'instrument
<--/'It
:~~"';'
mé ta-dis cursif --------
486
I?SEignel1'
CONCLUSION
----------------------------------------------
510
ANNEXE
--------------------------------------------------
517
A)
Situation du senoufo --------~---------~------------ 518
B) Glossaire des symboles et
sigles utilisés ----------
520
1) Transcription phonétique ------~----------------- 520
2) Traduction des énoncés senoufo
522
BIBLIOGRAP1-J.IE
------------------------- ------------------
523
A) Travaux citês
52l~
B)
Ouvrages
généraux
---------------------------------
530
C) Sources des énoncés
-------------------------------
536
1) Romans
-----------------------------------------
536
2) Presse
-----------------------------------------
536
3) Dictionnaires -----~----------------------------- 536
4) Enonc6s senoufo
--------------------------------
536
TABLE DES MATIERES
--------------------------------------
538