UNIVERSITE DES SCIENCES SO,CIALES DE
TOULOUSE
L'INSTALLATION DES JEUNES AGRICULTEURS
~."
..
'I:N COTE D'IVOIRE:
ASPECTS JURIDIQUES
,THE5E
pour le DOCTORAT DE '36 CYCL"F
Spécialité: DROIT RURAL
présentée et soutenue en octobre 1987
.
.
~...
par
"
Alain ABOA
MEMBRES DU JURY
.;ident :
M. .J~P.__TH,E80r~t Protêsseur de Dro,it Public '
, -
SUff;agant~: -'M~~D~~PE~=i;N,=:Pr~fe~se~r ~-eDro~t PriV~ et Sctenc~s-c~~I~S-~~::~c--=-- -
,M.B! SAINT-GIRONS, Maître de Conférence de Droit Public

CO,R RIGE N0 A
?ag e
PUF,
Paris,
1972
Page
20,
Yèote nO l,
ajouter
1978,

150-151,
pp. 17-28.
Page
22,
entpe la
11ème
ligne et
Za
12ème ligne,
ajouter:
Enfin, les attributions s'effectuant en fonction d'une dévolution
successorale
peuvent constituer une source importante d'instal-
lations (chapitre 3).
Page 48,
note nO l,1ère
ligne,
ajouter
Page 50 à 52
Pa g e
52,
1 <1 è.m e
l i g ne,
li r e
:
étant d'environ quarante cinq ans
Page
52,
31ème ligne,
remplacer
notre par le
Page
56,
note nO 3,
l i r e :
Ministère de l'Agriculture
Page
57,
27ème
ligne,
l i r e :
que par décret notamment dans les régions
Page 70,
remplacer
la note nO 1 par:
Dans les sociétés
traditionnelles, la majorité,
à
nature sociale
et à caractère rituel,
s'acquiert après une série d'initiations
correspondant. dans certaines sociétés. au passage d'une classe
d'âge à une autre.

Page 77,
remplacer la 6ème ligne par:
de satisfaire la cupidité de ces derniers malgré le caractère
souvent illégal
Page 92,
note nO 1,
remplacer la
1ère ligne par
:
Mutation qui devrait se caractériser, entre autres, selon le
Page 98, remplacer
la
18ème ligne par:
le cas; il
eut été plus simple de n'offrir cette possibilité
Page 102,
lire à la
23ème ligne
Il
eut été préférable que
Page 135,
21ème ligne,
lire
discrétionnairement
Page 141, note nO 1,
5ème ligne,
l i r e :
LALIGAN T
Page 144, note nO 1,
1ère ligne,
l i r e :
SODEPALM
Page 171,
27ème
lign~, l i r e ·
Ba UA KE
Page 227,
supprimer
GRANGER Roger: "Pour un droit de développement dans les pays
sous-développés"
(Cf. addendum
bibl iographie)
Page 227,
15ème ligne,
l i r e :
Les politiques agricoles
Page 229,
supprimer
THE Ra N ( ~. P.)
: "A pro po s d e l a lib e r t é die nt r e pre ndr e " (C f .
addendum
bibl iographie).

ADDENDUM
BIBLIOGRAPHIE
OUVRAGES
- GODIN
(F.)
: "La logique de l'Etat africain"
Harmattan,
1986.
-
LALIGANT (M.)
: "L'intervention de l'Etat dans le secteur
agricole",
LGDJ,
1970.
-
Les Cahi~rs français,

213, Oct -
Déc.
1983,
p.
6
DEr1AISON
: "Le régime de l'immatriculation foncière en AOF".
Revue juridique et politique de l 'Union française 1956,
pp.
421-478.
-
DAUBREY
(A.)
: "La BNDA et le financement du développement
en milieu rural"
Revue juridique et politique, indépendance
et coopération, 1978, 1,
pp.
457-469.
- GRANGER
(R.)
: "Pour un droit de développement dans les
pays
sous-développés"
in Dix ans de conférence d'agrégation.
Etudes
de droit commercial
offertes â HA~EL,
Paris. 1961.
- ~IAILLE (M.)
: "De la
nature du
plan"
in l'interventionnisme
de la puissance publ ique,
Etudes en l'honneur du Doyen Georges
PEQUINOT , CERAM, Mai 1984,
T.2
,
pp. 489-503.
THERON
(J.P.)
: "A propos de la
liberté d'entreprel}c:lr~_" in
l'interventionnisme économique de la
puissance publique.
Etudes en l'honneur du Doyen Georges
PEQUINOT • CERM~, ~1ai
1984,
T. 2 •

1
UNIVERSITE des SCIENCES SOCIALES de TOULOUSE
PERSONNEL de l'UNIVERSITE
Année Universitaire 1986 - 1987
HONORARIAT
MM. VEDEL G.
G. Of. L H. ; G. C. O.NM.
.Professeur honoraire à l'Université de PARIS II
Doyen honoraire de la Faculté de Droit et des
Sciences Economiques de PARIS
BARRERE A.
Of. L H. ; Com. O.N.M.
Professeur honoraire, Doyen honoraire de la Faculté de
Droit et des Sciences Economiques de PARIS
JAMES E.
Of.L.H.
Professeur honoraire. Membre de l'Institut
LASSEGUE P.
Professeur à l'Université de PARIS 1
RAYNAUD P.
Of.LH.
Professeur honoraire à l'Université de PARIS II
VIGREUX P.
Ch. L H. ; Of. O.NM.
Professeur honoraire
OORUAC P.
Of. L H. ; Com. O.N.M.
Professeur honoraire. Membre de l'Institut
CLUSEAU M.
Ch. L H. ; Of. O.N.M.
Professeur honoraire
LETINIER G.
Ch. O.N.M.
Professeur honoraire
PALLARD R.
Ch. L. H.; Ch.O.NM.
Président honoraire de l'Université
PROFESSEURS
MM. ISAAC G.
Professeur de Droit Public - Président de l'Université
BOYER L.
Professeur de Droit Privé et Sciences Criminelles
MERLE R.
Ch. L H. ; Ch. O.N.M.
Professeur de Droit Privé et Sciences Criminelles
MARTIN de la MOUTTE lCh.O.NM.
Professeur de Droit Privé et Sciences Criminelles
DUPEYROUX O.
Ch. O.NM.
Professeur de Droit Public
VELLAS P.
Ch. L. H.
Professeur de Droit Public
VINCENS J.M.
Of.O.NM.
Professeur de Science Economique
VIDAL J.
Professeur de Droit Privé et Sciences Criminelles
DESPAX M.
Ch.O.NM.
Professeur de Droit Privé et Sciences Criminelles
Président honoraire de l'Université
SICARD G.
Professeur d'Histoire du Droit et des Institutions
SIORAT L.
Professeur de Science Politique
GILLES H.
Professeur d'Histoire du Droit et des Institutions
BARRERE J.
Ch. O.NM.
Professeur de Droit Privé et Sciences Criminelles
, MAZERES J.A.
Ch. L. H.
Professeur de Droit Public
DEVILLEBICHOT G.
Professeur de Sciences de Gestion
SEMPE H.
Ch.O.NM.
Professeur de Science Economique
ROUJOU de BOUBEE G.
Professeur de Droit Privé et Sciences Criminelles
MOURGEON J.
Professeur de Droit Public
GOUR C.
Professeur de Droit Public
Vice-Président de l'Université
DAGOT M
Professeur de Droit Privé et Sciences Criminelles
SALETIE G.
Professeur de Science Economique
MOLINS-YSAL G.
Professeur de Science Economique
POUMAREDE J.
Professeur d'Histoire du Droit et des Institutions
Mlle BRUGUIERE M.B.
Professeur d'Histoire du Droit et des Institutions
MM. SPITERI P.
Professeur de Sciences de Gestion
MOLINIER J.
Professeur de Droit Public
COSTA F.
Professeur d'Anglais
CABANIS A.
Professeur d'Histoire du Droit et des Institutions
SERLOOTEN P.
Professeur de Droit Privé et Sciences Criminelles

2
MM.
BASTIER J.
Professeur d'Histoire du Droit et des Institutions
ROUSSILLON H.
Professeur de Droit Public
DUPEYRON C.
Professeur de Droit Privé et Sciences Criminelles
TOMASIN D.
Professeur de Droit Privé et Sciences Criminelles
BAZERQUE G.
Professeur d'Informatique
PISTRE M.
Professeur de Sciences de Gestion
CAPIAN A.
Professeur de Science Economique
BOUYSSOU F.
Professeur de Droit Public
PINHAS M.
Professeur de Mathématiques
MORIN F.
Professeur de Science Economique
ROZES L.
Professeur de Droit Privé et Sciences Criminelles
PLAGNET B.
Professeur de Droit Public
LAFFONT J.J.
Professeur de Science- Economique
CRAMPES C.
Professeur de Science Economique
MOREAUX M.
Professeur de Science Economique
MATIEI J.F.
Professeur de Mathématiques
LLORENS F.
Professeur de Droit Public
TIlERON J.P.
Professeur de Droit Public
VELLAS F.
Professeur de Science Economique
MARTY J.P.
Professeur de Droit Privé et Sciences Criminelles
COURET A.
Professeur de Sciences de Gestion
LUGAN J.C.
Professeur de Sociologie
DEVEZE J.
Professeur de Droit Privé et Sciences Criminelles
REGOURD S.
Professeur de Droit Public
LABIE F.
Professeur de Droit Public
Mme
HOUIN C.
Professeur de Droit Privé et Sciences Criminelles
MERUNKA D.
Professeur de Sciences de Gestion
LOUBET deI BAYLE J.L.
Professeur de Science Politique
PEYREFITtE L.
Professeur de Droit Privé et Sciences Criminelles
MAITRES de CONFERENCES
M.
LABAUVIE S.
Maître de Conférences de Science Economique
Mmes
CAMBOULIVES M.
Maître de Conférences de Droit Privé et Sciences
Criminelles
HEUZE D.
Maître de Conférences de MaÙlématiques
MM.
ARLANDIS P.
Maître de Conférences de Sciences de Gestion
COULET W.
Maître de Conférences de Droit Public
.' MARICHY J.P.
Ch. O.NM.
Maître de Conférences de Science Politique
TOURNIE G.
Maître de Conférences de Droit Public
AUBERT 1.
Maître de Conférences de Sciences de Gestion
BAUX P.
Maître de Conférences de Sciences de Gestion
Mme
BRUGNES M.P.
Maître de Conférences de Science Economique
MM.
ARAGON Y.
Maître de Conférences de MaÙlématiques
ALBOUY S.
Maître de Conférences de Science Politique
DESMOUTIER H.
Maître de Conférences de Sciences de Gestion
Mlle
GUERRIERO M.A.
Maître de Conférences de Droit Privé et Sciences
Criminelles
MM.
MANDEVILLE L.
Maître de Conférences de Science Politique
SABIANI F.
Maître de Conférences de Droit Public
Vice-Président de l'Université
ASSARAF E.
Maître de Conférences de Sciences de Gestion
Mme
ALCOUFFE C.
Maître de Conférences de Sciences de Gestion
M.
HEN C.
Maître de Conférences de Droit Public
Mme
ERNST M.C.
Maître de Conférences d'Anglais

3
MM.
DIES lE.
Maître de Conférences de Mathématiques
DUPUY Y.
Maître de Conférences de Science Economique
MARTIN P.M.
Maître de Conférences de Droit Public
MIGUET J.P.
Maître de Conférences de Droit Privé et Sciences
Criminelles
Mmes
CALMETI'E M.F.
Maître de Conférences de Science Economique
BONNES M.N.
Maître de Conférences d'Anglais
MM.
COUZINET IF.
Maître de Conférences de Droit Public
ERNST C.
Maître de Conférences d'Informatique .
PERARNAU G.
Maître de Conférences de Science Economique
MARIS B.
Maître de Çonférences de Science Economique
Mme
TIGNOL M.R.
Maître de Conférences d'Informa~que
MM.
LE POTIlER J.
. Maître de Conférences de Science Economique
GRELLIERE V.
Maître de Conférences de Droit Privé et Sciences
Criminelles
ALCOUFFE A.
Maître de Conférences de Science Economique
LECHUGA A.
Maître de Conférences de Science Economique
MAZAN M.
Maître de Conférences de Math6matiques
PARIENTE S.
Maître de Conférences de Sciences de Gestion
Mme
THERON M.
Maître de Conférences de DroIt'Public
MM.
CABANNE IC.
Maître de Conférences de Droit Public
ARSEGUEL A.
Maître de Conférences de Droit Privé et Sciences
Criminelles
Mme
CABANIS D.
Maître de Conférences d'Histoire du Droit et des
Institutions
MM.
CROUZATIER J.M.
Maître de Conférences de Droit Public
LAVIALLE C. .
Maître de Conférences de Droit Public
BARBIER! J.F.
Maître de Conférences de Droit Privé et Sciences
Criminelles
Mlle
DIZEL M.
Maître de Conférences de Sciences de Gestion
Mme
BARTHET M.F.
Maître de Conférences d'Informatique
MM.
BOURGET J.L.
Maître de Conférences d'Anglais
COUDERC R.
Maître de Conférences de Géographie
Mme
BARBIER! C.
Maître de Conférences de Science Economique
MM.
CAZARRE M.
Maître de Conférences de Sociologie
DAYNAC M.
Maître de Conférences de Science Economique
SIBERTIN-BLANC C.
Maître de Conférences d'Informatique
Mme
TEYSSIE L
Maître de Conférences de Droit Privé et Sciences
Criminelles
M.
HENGVONG L.
Maître de Conférences de Droit Public
Mme
ALQUIER A.M.
Maître de Conférences d'Informatique
MM.
POUGET M.
Maître de Conférences de Sciences de Gestion
VILLEVIEILLE J.F.
Maître de Conférences de Droit Public
GRIMAUD A.
Maître de Conférences de Science Economique
SAVARY 1.
Maître de Conférences de Science Economique
SAINT-GIRONS B.
Maître de Conférences de Droit Public
DEJEAN P.
Maître de Conférences de Droit Privé et Sciences
Criminelles
LORTIiEJ.C.
Maître de Conférences de Droit Public
MAITRES-ASSrSTANTS
Mmes
ROUJOU de BOUBEE M.E.
Maître-Assistant de Droit Privé et Sciences Criminelles
ROCA M.C.
Maître-Assistant de Droit Privé et Sciences Criminelles
Mlle
BAJLLOD R.
Maître-Assistant de Droit Privé et Sciences Criminelles
MM.
DUCOS G.
Maître-Assistant de Science Economique
FIORINA D.
Maître-Assistant de Droit Privé et Sciences Criminelles

Mme
POUSSON J.
Maître-Assistant de Droit. Privé et Sciences Criminelles
MM.
LARRIEU J.
Maître-Assistant de Droit Privé et Sciences Criminelles
CHARREL P.J.
Maître-Assistant d'Informatique
JEANBLANC P.
Maître-Assistant de Sciences de Gestion
Mmes
NEIRINCK C.
Maître-Assistant de Droit Privé et Sciences Criminelles
LLORENS F.
Maître-Assistant de Droit Public
MM.
LEMOULANO J.J.
Maître-Assistant de Droit Privé et Sciences Criminelles
VARETIJ,E B.
Maître-Assistant de Droit Privé et Sciences Criminelles
ASSISTANTS
M
BOYER R.
Assistant de Science Economique
Mmes
DAGRAS T.
Assistant de Science Economique
CAMPAN E.
Assistant de Science Economique
MM.
MARTY J.L.
Assistant de Science Economique
LOUSTAU M.
Assistant de Sciences de Gestion
PEY A
Assistant de Sciences de Gestion
SORBARA A.
Assistant de Droit Public
Mmes
DOUNOVETZ C.
Assistant de Droit Public
LOUSTALAN C.
Assistant de Science Economique
M
LAPORTE P.
Assistant de Science Economique
Mmes
DEMARAIS M.H.
Assistant de Droit Privé et Sciences Criminelles
ROUSSll..LON D.
Assistant de Droit Privé et Sciences Criminelles
MM.
GIAMARCHI M.
Assistant de Mathématiques
PLASSARD J.M.
Assistant de Science Economique
Mmes
CARRE D.
Assistant de Science Economique
COITIN C.
Assistant de Droit Privé et Sciences Criminelles
M.
DUCOMTE lM.
Assistant de Science Politique
Mme
PRIM: MF.
Assistant de Droit Privé et Sciences Criminelles
MM.
COMBELERAN T.
Assistant de Science Economique
MARFAING R.
Assistant de Science Economique
Mme
GARRIGUES B.
Assistant de Science Economique
M.
COURONNE P.
. Assistant de Science Economique
Mmes
PIERCHON M.B.
Assistant d'Histoire du Droit et des Institutions
PREVOST F.
Assistant de Science Economique
M.
CAVAGNAC M.
Assistant de Science Economique
Mme
CHAMPREDONDE J.
Assistant de Psychologie Sociale
MM.
KEPHALIACOS C.
Assistant de Science Economique
MARTY J.C.
Assistant de Droit Privé et Sciences Criminelles
GASQUET M.
Assistant de Sciences de Gestion
Mme -CONTE C.
Assistant de Science Politique
Mlles
TEYCHENIE F.
Assistant de Sciences de Gestion
Vll..LAC D.
Assistant de Droit Privé et Sciences Criminelles
MM.
DELVIT P.
Assistant d'Histoire du Droit et des Institutions
MENOU M.
Assistant de Science Economique
GUY J.L.
Assistant de Science Economique
Mme
SALLES M.
Assistant de Science de l'Information et de la Corn.
MM.
POUSSON A.
Assistant de Droit Privé et Sciences Criminelles
SIRE B.
Assistant de Sciences de Gestion
BOUISSOU M.B.
Assistant de Science Economique
Mme
CHARLES M.N.
Assistant de Droit Privé et Sciences Criminelles
MM.
VIGUIER J.
Assistant de Droit Public
IVALDI M.
Assistant de Science Economique
DUDZINSKI A.
Assistant de Science Economique
GALAN P.
Assistant de Droit Public
FOUGERE D.
Assistant de Science Economique

5
M.
VIGNEAU D.
Assistant de Droit Privé et Sciences Criminelles
Mlle
MANDEVILLE A.
Assistant de Science Politique
M.
BLANQUET M.
Assistant de Droit Public
PERSONNEL DETACHE
MM.
JACQUET lM.
Professeur de Droit Privé et Sciences Criminelles,
détaché à DAKAR
GALAN Paul
Maître-Assistant de Sciences de Gestion,
détaché à BAMAKO.
FRAYSSEJ.
Maître de Conférences de Science Economique,
détaché à l'INRA
LAISNEYF.
Maître de Conférences de Science Economique,
détaché à l'Université de HEIDELBERG
ALBERTB.
Assistant de Droit Privé et Sciences Criminelles,
détaché à l'Ecole Nationale de la Magistrature.
*
*
*
Mme ROULLAND D.,
Secrétaire Général de ruDiversité
*
*
*
PRESIDENT de la THESE :
Suffragants:
L'Université n'entend Di approuver, Di désapprouver les opinions particulières du candidat

6
A mes parents

7
A l a mém 0 ire d e Vin c en t

8
REM ERCIE MEN TS
Qu'il nous soit permis, au moment où ce travail sera mis à
la disposition d'un public que nous souhaitons important, d'adres-
ser nos vifs
et sincères remerciements à :
- Monsieur THERON qui patiemment et minutieusement a conduit nos
travaux depuis le D.E.A. Outre sa rigueur intellectuelle qui
nous a séduit, nous avons appris auprès de lui l'humilité,
vertu qu'on ne retrouve pas très souvent en milieu universitaire
- ~'essieurs DUPEYRON et SAINT GIRONsqui, une fois de plus, ont
accepté d'êtr-e membres de notre jury.
- Monsieur GRANGER de la faculté de droit d'Abidjan qui a bien
voulu nous faire profiter de sa longue et riche expérience
des pays du Tiers Monde.
- Monsieur PRA TSprécédemment Directeur de recherche à l'Institut
d'Administration Publique de Paris qui nous a généreusement
aidé dans nos recherches bibliographiques.
- Monsieur DIDI LANGUY, Directeur de cabinet au Ministère du
Développement Rural dont nous saluons ici les qualités humaines.
- Monsieur .OGUIE précédemment premier Président de la Cour d'Appel
d'Abidjan qui nous a autorisé l'accès au greffe.
- L'ensemble du personnel de la Direction dè la Promotion Rurale.
- Madame BONI Bernadette.
- Mademoiselle GUINLE qui a réal isé les travaux de dactylographie.
Nos amis AONON et CACOU qui nous ont toujours encouragé dans
cette oeuvre de longue haleine.
- Raymond DOSSA, en témoignage d'une longue et fidèle amitié.
- Notre cousine Marie et notre tante Berthe.
~us ceux que nous n'avons pu citer; qu'ils trouvent ici
l'expression de notre profonde gratitude.

9
AVANT-PROPOS
La rareté des études. la non-fiabil ité des statistiques ainsi
que la sacral isation abusive par l'administration des documents
n'ayant pas un caractère "confidentiel" sont les principaux
écueils auxquels peut se heurter le chercheur effectuant des
travaux sur l'Afrique.
A la première difficulté. nous n'avons pas échappé et notre
bibliographie s'en ressent. Ce.
handicap. nous avons voulu en
faire un avantage par une exploitation méthodique donc ration-
nelle des matériaux dont nous disposions.
Y sommes nous arrivé?
Le lecteur en sera seul juge.
Le deuxième obstacle est plus classique. Nous avons dû nous
contenter des chiffres existants, parfois vieux d'une décennie.
Cette lacune, préjudiciable à toute étude scientifique, l'est
peut être moins dans notre cas dans la mesure où le paysage
agricole ivoirien nia pas connu de véritables changements struc-
turels depuis au moins dix ans.
Enfin. s'agissant de la dernière difficulté. et non la moindre.
pour avoir travaillé dans l'administration du Développement
Rural. nous avons su la contourner gr~ce à la collaboration de
certains collèges et amis.
Cependant. la sévérité des critiques. corollaire de la rigueur
des analyses ne saurait être assimilée ni à un sentiment
a-patriotique. ni à un vulgaire règlement de comptes tant il
est vrai que l' une des am bit ion s des go uver na nt s du Ti ers
Monde est d'uniformiser la pensée des citoyens. Mais l'idéologie
peut-elle avoir sur la science les mêmes effets anesthésiques
qu'elle a sur les hommes?
A cette question, la présente étude a voulu répondre par la
négative: la rigueur nous a guidé et l'objectivité nous a
aidé; le travail s'en est trouvé fécondé.
Mais il n'en est pas pour autant parfait. C'est pourquoi solli-
citant l'indulgence du lecteur nous n'avons pas le sentiment

10
de sacrifier à une quelconque coutume car il nè s'agit pas là
d'une simple précaution de style: le droit rural
ivoirien,
jeune, pas toujours cohérent est encore en formation et peu
connu.
Avons-nous contribué à dégager quelques
tibles
de structurer son avenir? La satisfacti
era,
du moins le souhaitons nous, la preuve q
ura été
atteint.
Toulouse, Octobre 1987.

I l
Il
• • •
Les gouvernements des pays qui ne l'ont pas encore fait
(devraient) ... incorporer dans leur structure politique et
sociale et dans les institutions juridiques fondamentales un
système de réforme agraire intégrée qui ... (reconnaisse à
l'exploitant le droit) ... d'obtenir un crédit suffisant
octroyé en temps opportun et à faible intérêt ainsi qu'une
assistance technique, des prestations sociales et des marchés
assurés, afin que la Terre devienne non seulement la base de
sa stabilité économique, mais aussi le principal instrument de
l'amélioration progressive de sa situation sociale et la
garantie d'une vie digne et libre pour lui et sa famille ll •
Résolution n° 15/63 de la 12ème session de la Conférence de la
FAO.

12
INTRODUCTION GENERALE
LaC ôt e d 1 1v0 ire, pa ys côt i e r de liA f r i que 0cci den t ale, 0 f f r eau
visiteur foulant le sol de cette ancienne colonie française,
l limage enchanteresse d'un Etat paisible et chaleureux bercé par
l'Océan Atlantique à la faveur duquel la moitié Sud du pays,
régulièrement arrosée, bénéficie d'un climat humide tandis que
le Nord connaît annuellement une longue période sèche dont les
affres sont vite
effacées par une saison pluvieuse qui dure
environ six mois. Ce contraste naturel n'a cependant pas entamé
l 'hospitalité séculaire de ces dix millions d'hommes et de femmes
qui se côtoient sur un espace d'environ 322.000 km2 dont les
caractéristiques physiques permettent, avec la complicité d'un
climat généreux et d'une végétation plus luxuriante que rare,
l'exercice d'une agriculture intensive. C'est sans aucun doute
cette prédisposition naturelle qui a conduit les nouveaux gouver-
nants au lendemain de l'indépendance (1) "à baser la politique
économique sur la paysannerie en fixant les paysans sur les lieux
de productioA" (2). t~ais aujourd'hui, des raisons tant économiques
que sociales commandent une ré- orientation de la politique agri-
cole qui doit davantage favoriser l'installation des jeunes dans
le secteur primaire.
Cependant, cette mutation des exploitants agricoles se heurte à
de nombreux obstacles. Ces trois éléments permettent de comprendre
l'importance de la réussite d'une politique d'installation.
La vocation agricole de la Côte d'Ivoire siest affirmée trés tôt,
notamment sous 11 impulsion du pouvoir colonial qui, dès 1925,
décida d'intensifier la culture du café afin d'enrayer le mono-
pole des exportateurs brésiliens. Cette spécialisation culturale,
reprise par les autorités ivoiriennes a permis, grâce aux devises
ainsi dégagées de financer les autres secteurs économiques, mêlne
si aujourd'hui elle est remise en cause eu égard à la mévente des
(1)
La Côte d'Ivoire est indépendante depuis le 7 août 1960.
(2)
HOUPHOUET-BOIGNY~ interview accordée à la revue "Côte
d'Ivoire-Afrique" supplément trimestriel 1966~ nO 5 cité
par M.
LAPORTE "La pensée sociale de Félix HOUPHOUET-BOIGNY~
Président !le la République de Côte d'Ivoire".
Mémoire C.E.A.N.
Bordeaux~ 1970.

13
produits de base dans un contexte international
particulièrement
difficile (1).
Pou r tan t, les pe r for man ces d e laC ôt e d 1 1v0 ire dan s les cul tu r e s
de rente - en l'occurrence le café et le cacao (2) II ne reposent
pas sur une exploitation intensive a technologie progressive ll (3).
Elles sont surtout le fait des mesures incitatrices prises par
le gouvernement pour la promotion de ces deux cultures auxquelles
s'adonne la quasi-totalité de la population agricole (4) comme
l'atteste le tableau suivant:
Population agricole
Producteurs de café et de cacao
\\
5.134,6
3.100
(en milliers d'habitants)
Source :Statistiques agricoles, Ministère de l'Agriculture, 1982.
Mais la détérioration continue des termes de l'échange, la
lutte pour l'indépendance alimentaire (5) rendent nécessaire la
diversification des productions primaires par l'introduction de
techniques nouvelles plus performantes. Or, la population
aqricole
est
majoritairement
composée
de
ruraux
encore
attachés
aux
méthodes
culturales
ancestrales
tandis
(1)
Les cours des deux principaux produits d'exportation - cgfé et
cacao -
ont ~onsidérablement chuté dans une proportion allant
de 2 à 5~ occasionant en deux campagnes agricoles un manque
à gagner de plus de 300 milliards de francs C.F.A.
(Il
existe
une parité fixe entre le franc
C.F.A.
et le franc
français;
1 franc C.F.A.
= 0,02 FF).
.
(2)
Un exemple comparatif permettra de mieux apprécier la situa-
tion.

En 1978~
tandis que la Co~e d'Ivoire produisait
312.000 tonnes de cacao et 275.000 tonnes de café,
le Cameroun
produisait en 1976~ 90.000 tonnes de cacao et 93.000 de café.
(3)
J.A.
FAURE:
Le complexe politico-économique in "Etat et
bourgeoisie en Côte d'Ivoire" sous
la direction de J.A.
FAURE
et J.F.
MEDARD~ Karthala~ 1982.
(4)
La population agricole~ en Co~e d'Ivoire~inclut les personnes
pour lesquelles
l'agriculture n'est pas nécessairement l'acti-
vité principale.
Sur la notion d'exploitation agricole,
voir
infra~ 1ère partie.
(5) A titre d'exemple~ la production nationale en matière de
protéines animales ne couvre que 55 % de la consommation.
Le
riz~ aujourd'hui aliment de base est toujours importé; en 198
ce sont 500.000 tonnes de riz qui ont été achetées à l'exté-
rieur
(Bulletin de l'Afrique Noire"~ nO 1165 du 6 janvier 1983)

14
que les urbains qui ne vivent pas sur les lieux de production
sont moins des agriculteurs que des hommes d'affaires" (1).
La répartition de la population agricole est contenue dans le
tableau suivant:
POPULATION AGRICOLE
1
i Urbaine ( 2 )
Rurale
Ensemble
\\
dOhabitaJSJ
~
4.542,2
5.134,6
(en milliers
Source . statistiques agricoles, Ministère de l'Agriculture, 1982.
A ces deux caractéristiques de la population agricole s'ajoute le
fait que celle-ci vieillit. Or la vitalité d'une agriculture se
mesure à la capacité des producteurs
à s'adapter au progrès techni-
que, vitalité dont le tableau indiquant le nombre des chefs d'ex-
ploitation (3) d'après la classe d'âge n'est pas une parfaite illus-
tration.
~~o i ns de 30 ans
30 à 39 ans
40 à 49 ans 50 à 59 ans
A partir
de 60 ans
92.736
247.369
254.760
186.365
146.000
Nombre des Chefs· d'exploitation d'après l a classe d'âge.
Source .. Re ce ns em en t national de l'Agriculture, 1975.
1
(1)
Voir AFFOU YAPI :
"Les planteurs ab.;;entéistes sont-ils des
entrepreneurs agricoles".ORSTOM
Petit -BASSAM,
1986.
3
(2)
En l'absence d'une définition légale, on peut supposer que
la population agricole urbaine désigne
les personnes ayant
leur domicile réel en milieu urbain et vivant principalement
ou accessoirement de l'agriculture.Entrent
donc dans cette
catégorie les "agriculteurs absentéistes" et les exploitants
qu~ résidant en ville,
se rendent néanmoins sur les lieux de
production de façon régulière.
(3)
Sur cette notion
voir infra,
1ère partie.
3

15
Ces statistiques, quoique anciennes, sont toujours susceptibles
de refléter la réalité dans la mesure où le monde agricole nia
connu, en une décennie, aucun changement structurel
la mécanisa-
tion, lente
et non accessible à tous (1) n'est encore pas parvenue
à réduire la pénibilité des travaux tandis que les revenus agrico-
les restent largement en deçà de ceux issus des autres activités
économiques (2). Ainsi donc,l'environnement institutionnel n'est
pas de nature à favoriser le maintien des jeunes à la campagne
et les
conduit
vers les grands centres urbains déjà menacés de
surpeuplement (3) et incapablesd'absorber ces demandeurs d'emploi
tandis que, corrélativement, croît le déficit de main-d'oeuvre en
milieu rural
(4). La démographie qui se caractérise par une augmen-
tation rapide de la jeunesse ne manque pas d'être alarmante puisque
aujourd'hui, les moins de vingt ans représentent '60Xde la population.
C'est pourquoi il est devenu impératif d'encourager l'ins-
tallation des jeunes dans le secteur agricole: des considérations de poli,
(1)
Un tracteur de 45 chevaux coûte environ 10.000.000 de francs
CFA,
soit 200.000, francs
français
(Voir infra,
le financement
de
l'exploitation agricole).
(2)
Les revenus annuels issus d'une exploitation de café de 3,5
hectares représent~nt, toutes proportions gardées, le salaire
qu'obtiendrait un professeur de
lycée a~ bout de 30 jours de
travail ou encore le traitement trimestriel d'un sous-officier
de la Police Nationale.
Cette comparaison nous a été inspirée
par la lecture de l'article de M.
Guy DELAPORTE :
"Le r5le
du café dans l'économie de
la C5te d'Ivoire" in Marchés tro-
picaux et méditérannéens, 21 avril 1978, p.
1068.
(3) Abidjan,
la capitale économique du pays,
compte 2.000.000
d'habitants, soit 1/5 de la population totale.
(4)
Un rapport du Bureau Politique du Parti Démocratique de C5te
d'Ivoire
(P.D.C.I.)
élaboré par la Commission d'Etude pour
la prise du travail des Nationaux reconnait que le nombre des
élèves issus du système scolaire est largement supérieur aux
besoins en main-d'oeuvre non agricole;
en conséquence de
quoi,
i l est urgent de les orienter vers le secteur agricole,
le seul susceptible d'absorber cet excédent de main-d'oeuvre.

16
tique économique et sociale exigent qu'une attention particulière
soit attachée à la définition et la mise en oeuvre d'une stratégie
en la matière.
Pourtant, l'idée de moderniser l'agriculture et de freiner l'exode
rural
par une politique de maintien ou d'installation des jeunes
à la terre n'est pas nouvelle; des actions ont été tentées au
lendemain de l'indépendance, renouvelées par la suite, mais sans
grand succès (1).
L'avant dernier congrès du parti qui s'est tenu en 1980 (2), expri-
mant ainsi les préoccupations du Gouvernement, rappelle la néces-
sité "de promouvoir la paysannerie et de maintenir les jeunes à la
terre". Un comité interministériel
institué en 1980 est chargé de
réfléchir sur les problèmes liés à l~installation
des jeunes agri-
culteurs. Enfin, un bref regard sur le plan quinquennal 1981-1985
confirme l'idée que désormais, l'installation des jeunes fait par-
tie des grandes orientations de la politique agricole ivoirienne.
Il
convient donc de faire oeuvre utile en orientant le sujet sur
le terrain théorique car l'élaboration et l'application d'une po-
litique visant à installer les jeunes dans le secteur agricole se
(1)
Voir "Insertion des
jeunes dans
l'agriculture en Côte d'Ivoire'
Ministère de l'économie e~ des finances~ Ministère du travail
et de l'ivoirisation des cadres.
Rapport de
Consultation,
CINAM Abidjan,
1979.
(2)
Le P.D.C.I.,
parti politique au pouvoir est le seul qui existe
en Côte d'Ivoire, malgré cette disposition de l'article 7 de
la Constitution du
J
novembre 1960
:
"les partis et groupe-
ments politiques concourrent à l'expression du suffrage; ils
se forment et exercent leur activité librement sous la condi-
tion de respecter les principes de
la souveraineté nationale
et de la démocratie, et les
lois de la République".
Ce texte
qui ne trouve pas un écho dans la réalité a conduit certains
auteurs à écrire que "ce multipartisme, ouvert par les
textes
est resté fermé dans
les
faits. Le P.D.C.I.
est le seul parti
existant et susceptible d'exister
légalement; ce monopole
lui confère un statut dérogatoire au droit commun".
WODIE Francis et BLEOU Martin
:
"La chambre administrative de
la cour suprême et sa
jurisprudence".
Annales de l'université
d'Abidjan,
1981,
Série A (droit),
Volume 6.

17
heurte à de nombreux obstacles. La première difficulté résulte
de la résistance de la jeunesse, celle-ci étant trés peu attirée
par le métier d'agriculteur tant il est vrai qu'aujourd'hui, les
valeurs sociales ne sont plus celles de la Côte d'Ivoire tradi-
tionnelle. Naguère activité première des populations et source
de prestige, l'agriculture est devenue, à la faveur des mutations
de la société, l 'activité des analphabétes et des bannis du sys-
tème scolaire. Le discours paternaliste du pouvoir politique à
l'endroit du paysan n'a d'égal
que le mépris dont ce dernier est
l'objet dans l es services publ ics de l'Etat. Cette atmosphère
malsaine car dévalorisante n'est pas de nature à encourager les
jeunes à embrasser le métier de la terre.
En sus de cette difficulté se pose le problème de l'intégration
dans les villages d'accueil.
En effet, le comportement des commu-
nautés rurales à l'égard des nouveaux agriculteurs, transfuges
des milieux urbains, est souvent teinté d'hostilité; l'intégra-
tion - ou la réintégration - de ces jeunes n'est guère aisée
leur retour es t souvent reçu comme u ne menace à l' équ i libre
social
(1). A ces problèmes sociaux s'ajoutent des obstacles
d'ordre économique: les revenus agricoles sont nettement infé-
rieurs à ceux des autres activités et malgrê un mythe faussement
entretenu (2), l'agriculture n'est pas rémunératrice pour le
prodûcteur moyen
~ bien qu'elle fournisse près de 35 % du
produit intérieur brut et emploie un peu plus de 50 % de
la population. Ce paradoxe peut s'expliquer par
(1)
Une enqueAte de
la revue
"Agripromo" effectuée dans plusieurs
pays africains évoque ces difficultés d'intégration.
Voir
Agripromo, nO 40,
janvier 1983.
Inadès
Formation.
Abidjan.
(2)
J.M.
CASTELLU et J.
AFFOU YAPI
:
"La bourgeoisie des plan-
teurs,
un mythe d décomposer" in Etat et bourgeoisie en
Côte d'Ivoire,
op.
cit.

18
l'exiguïté des exploitations (1), la faiblesse des investissements
productifs (2) ainsi que les prélèvements effectués par l'Etat (3).
La parité des revenus, revendication
des agriculteurs européens
pourrait
être celle des producteurs ivoiriens (4) même si ces
derniers, à la différence des premiers, ne disposent pas d'une
plate - forme juridique (5).
Cet écart entre les revenus agricoles et non agricoles a pour corol-
laire la faiblesse
voire l'inexistence de l'épargne et la médiocrité
de la vie en campagne, l'agriculteur moyen étant constamment obligé
d'avoir recours aux usuriers en l'absence d'aides financières pu-
bliques.
Mais ces obstacles d'ordre économique ne sont que le reflet de
l'environnement institutionnel, Le sol, premier facteur de la pro-
duction agricole est d'un accès difficile pour les jeunes. L'exis-
tence séculaire d'un droit positif - ~u demeurant très peu connu
et à parfaire - n'est pas parvenue à éclipser un droit coutumier
traditionnel, aujourd'hui dénaturé et pourtant maintenu par une
gérontocratie hostile à l'émergence des jeunes agriculteurs. On
est alors tenté
de rendre la rareté des terres cultivables
res-
ponsable
de ce conflit mais le tableau qui suit ouvre la voie à
d'autres expli~ations.
(1)
Le recencement national de
l'agriculture
(déjà cité)
indique
que pour
la seule "région du
Sud ~ ce
sont
40.547 personnes
âgées
de moins de 40 ans qui exploitent une superficie infé-
rieure à 1,99 hectares tandis que,
toujours dans
la même tran-
che d'âge~ 105.798 agriculteurs exploitent une parcelle compris~
entre 2 hectares et 9,99 hectares, nombre
qui correspond à un
peu plus de 1/10ème de l'ensemble des chefs d'exploitation en
Côte d'Ivoire.
(2)
Sur
les causes de cette faiblesse,
voir infra,
2ème partie.
(J)
Messieurs CASTELLU et AFFOU, se référant à une étude de J.C.
BERTHELEMY, relèvent que "les totaux cumulés des prélèvements
et des reVersements
(en ce qui concerne le café et le cacao)
sont passés de 400 millions de francs
CFA pour la campagne
1961-1962 à 59,4 milliards en 1974-75".
Cf.
Etat et bour-
geoisie en Côte d'Ivoire,
op.
cit.
(4)
Pour une étude critique sur la notion de parité
entre les
revenus agricoles et non agricoles, voir KLATZMANN "Les poli-
tiques agricoles:
idées fausses
et illusions".
(5)
A"rticle 39 du Traité de Rome.

OCCUPATION DU TERROIR PAR REGIONS (1984)
Parcs Nationaux
Superlfc'ies
Autres terres (3T
Superficie
Agri cul ture 1 Forêts du DFP (1)1
et reserves
incultivables (2)
REGIONS
total e
en Ha
1 en %1 en Ha
1 en % 1
en Ha
1 en %
en Ha
1 en %
en Ha
1 ~
(t',m2)
SUD
47.780
948.300 1 19,9
608.790 1 12,7
23.000 1 0,5
386.677 1 8,1
2.811. 233
58,8
EST
1
38.300
1
190.0001
5,01
35.0001
0,9 1
900.0001 23 ,5
1
232.8961
6,1
1
2.472. 104 1
64,5
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
CENTRE 1
65.470
1
727. 200 1 11 ,11
667.144\\
10,2
1
116.0001
1,8
1
400.8151
6,1
1 4.635.8411
70,8
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
~~~~~E 1
44.450
1
795.000117,9/
345.3201
7,8 1
80.000 Il,8
1
248.4001
5,6
1
2.976.2801
66,9
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
~~~ST 1
26.350
1
245.700 1 9,31
607.820 1 25,1
1
285.000110,8
1
84.5611
3,2
1
1.411.9191
53,6
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
....
OUEST
1
39.655
1
378.0001
9,61
643.8361
16,2 1
262.0001
6,6
1
245. 757 1 6,2
1 2.435.5071
61,4
I.e
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
NORD
1
60.360
1
201. 300 1 3,41
593. 090 1
9,8 1
280.0001
4,6
1
782.852113,0
1 4.178.7581
69,2
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
TOTAL C. l
322.365
3. 485. 900 1 10,8 1 3. 501.000 1 10 , 9 1 1. 946. 000 1 6,0
2.381. 958 1 7,4
20.921. 642
64,9
(1)
Domaine Forestier Permanent de
l'Etat
(2)
Les superficies incultivables comprennent
-
les lacs~ lagunes~ cours d'eaux
-
les
zones bâties~ routes~ voies ferrées
-
les inselbergs~ zones latéritiques
(3)
Les autres terres sont considérées par la fôret,
la
savane~ les jachères et les pâturages.
Source: Documents inédits du Ministère de l'Agriculture

20
Ainsi,
pour une surface agricole utile
de 244.075 km2, l'agri-
culture occupe seulement 78.289 km2 : le pays est encore loin
d'une éventuelle pénurie de terres, même si on s'accorde pour
reconnaître que ces dernières ne se valent pas qual itativement
mais n'est-ce pas là le défi que doit relever l'homme, à savoir
améliorer son environnement naturel?
Nonobstant une disponibilité foncière, l'économie du droit agrai-
re et les résistances d'une société encore féodale
ne favorisent
pas l' ace è s des jeu ne s à l a t e r r e. t~ ais l' eus sen t - il s perm i s, ces
derniers n'auraient pas pu l'exploiter, eu égard à la faiblesse
de leurs moyens financiers.
En effet, les règles du crédit agricol~
élaborées dans un contexte socio-économique différent se distin-
guent peu de celles du crédit classique en ce que la solvabilité du
demandeur constitue une règle sacro-sainte. L'orientation par les
pouvoirs publics du crédit agricole, les buts qu'ils lui ont assi-
gnés permettent moins la création d'exploitations familiales moder-
nes que le développement dlune agriculture industrielle à base de
grandes exploitations. Or la politique visant à une "mutation du
paysan ivoirien en agriculteur moderne" (1) ne doit-elle pas inté-
gr e r l a que s t ion rel a t ive au fin an c em en t de l' i ns ta l lat ion des
jeunes?
,
'~:..~\\C';FrUè~/,,;,
C'est dans ce contexte trouble quIa é t é '
en I08A:
le ministère
G
~u ~
du développement rural, chargé entre a :,{
C.<jtl~ "lli' tallation des
jeu ne sen mil i e u r ur al" ( 2 ), tan dis que rf-'e r1 i n i
è r
~
l' a grie ul t ure
',~
<
reste compétent pour "l'installation
dIa hi
'lteu
m 'dernes"
(3)
,
, & > , v'
,
!1JenrSu?0
(l)
D. BRA. XANON
:
"POUI' une nouvelle pI'oblématique du développ€ment
agI'icole ivoiI'ien" in Revue fI'ançaise d'études politiques
afI'icaines.
(L'auteuI'
est MinistI'e de l'agI'icultuI'e en
Côte d' IvoiI'e depuis plus d'une décennie).
(2) AI'ticle leI' du décI'et du 7 maI'S 1984 fixant les attI'ibutions
du MinistèI'e du Développement RUI'al.
(3) AI'ticle 2 du décI'et du 7 aVI'il 1984 fixant les attI'ibutions
du MinistèI'e de l'AgI'icultuI'e et des Eaux et FOI'êts et OI'ga-
nisant son ministèI'e.
En Côte d'IvoiI'e, on oppose volontieI's
les agI'iculteuI's modeI'nes aux agI'iculteuI's tI'aditionnels,
les
pI'emieI's à la difféI'ence des seconds, ont des exploitations
plus gI'andes, utilisent - ou sont susceptibles d'utiliseI' - un
outillage plus peI'foI'mant et de pal' leuI' fOI'mation scolaiI'e,
univeI'sitaiI'e,
pI'ofessionnelle -
sont plus ouveI'ts au pI'ogI'ès
et à la technologie agI'onomique.

21
Bien que les attributions àu premier ne se l imitent pas à la seule
profession agricole (1). Il est davantage sollicité pour ce sec-
teur (2).
En définitive, deux Ministères sont en vertu d'une com-
pétence d'attribution. chargés dl installer les agriculteurs moder-
ne s : leM i n i st ère duO ével 0 ppem e nt Ru ra l e t cel u ide liA gr i cul -
ture. Cette responsabilité conjointe n'est pas nécessairement pré-
judiciable à la politique d'installation d'une nouvelle race d'ex-
ploitants agricoles (3)
; seulement. elle commande une étroite
collaboration. élément essentiel
pour assurer la coordination dans
la conception et l'exécution des programmes d'installation. Pour-
tant. les relations entre les deux départements ministériels. loin
de refléter ce schéma, sont plutôt conflictuelles. Ces relations
conflictuelles sont sans doute le fait du pouvoir exécutif qui.
instituant le Ministère du Dévéloppement Rural
ne l'a pas investi
des prérogatives indispensables à l'exercice de sa mission. Ainsi.
la délivrance des titres juridiques d'exploitation du sol relève
de la compétence exclusive (4) du Ministère de l'Agriculture; il
(lJ
A la profession agricole s'ajoutent tous les métiers qui
peuvent s'exercer en milieu rural
(artisanat, commerce
. . . J.
Sur la définition du milieu rural,
voir infra. ,
(2J
Le Ministère du Développement Rural a été crée à un moment où
"le r~tour à la terre" et "l'aide à la pay~sanerie consti-
tuaient les slogans toujours scandés par le pouvoir politique.
Une partie de la jeunesse
(chômeurs,
déscolarisésJ
a donc
accueilli le nouveau ministère comme naguère les hébreux
accueillirent la naissance du Christ.
--( 3 J Les Minis tèr~s, de l ' Agricu l ture et du Déve loppement Rura l
étant respectivement responsables des cultures de rente
(café,
cacao,
coton . . . J et des produits viviriers
(manioc,
rizJ
on aurait pu s'attendre à ce,que les installations en
agriculture
s'effectuent sans heurt en fonction de cette spé-
cialisation par produit.
(4J
Sous réserve de la compétence de l'autorité administrative
territoriale
déconcentrée de délivrer des titres provisoires,
(Cf.
infra,
1ère partie, chapitre 1,
section 1, paragraphe 3J.

22
en est de même pour l'enseignement et l a formation professionnell e
agricole. Quant au crédit agricole et au droit coopératif malgré
une compétence conjointe affirmée par les textes, clest en réalité
le Ministère de l'Agriculture, qui les contr61e eu égard a son
antériorité dans la gestion du monde rural
et également parce que
les structures du Ministère du Développement Rural
sont, par
rapport a cell es de l' Agricul ture très peu étoffées (l).
On peut, a la lumière de ce cadre institutionn.el se demander si le
principal obstacle a l'installation des jeunes agriculteurs n'est
pas d'ordre politique. Pourtant, le discours politique ne tarit
pas d'éloges a l'endroit des paysans "premiers artisans" du déve-
loppement économique de la Côte d'Ivoire. Le retour à la terre,
devenu en trés peu de temps un véritable leitmotiv ne peut
être
suivi d'effets eu
égard aux attributions formelles conférées du
Ministère du Dêvel·oppement Rural. Tout concourt â donner â ce
discours un caractére mystico-idéologique dans la mesure 00 le
pa.ssage à l'action est loin d'être amorcé.
Cependant, le maintien de cet environnement démagogique n'est pas
fortuit.
Il obéit à une logique économique qui a permis à l'acti-
vité primaire de financer le développement national
(2), grice au
surplus obtenu à partir de la vente des produits d'exportation
A cet égard, la ca~sse de stabilisation et de soutien des prix et
des productions agricoles occupe une place de choix (3). Organis-
me public détenant le monopo-le de l'achat et le contr61e des
ventes des cultures d'exportation (4), elle est devenue, grice à
l'accumulation réalisée par la différence entre le prix payé aux
(1)
A titre d'exemple,
le Ministère de l'Agriculture dispose d'une
Direction de la Mutualité et de
la Coopération, bien structurée
tandis que le Ministère du Développement Rural n'a qu'une cel-
"
lule composée de deux personms pour exécuter la même mission.
(2)
Le secteur primaire a-t-il réellement financé
le développe-
ment national
? Sans vouloir soulever ici une polémique classi-
que sur la notion de développement,
i l est bon de souligner que
le SMIG s'élève à 33.000 francs
CFA
(660
FF)
tandis qu'il
n'existe pas un système général de sécurité sociale et que
les soins ne sont pas toujours gratuits
(3)
Voir infra pour d'autres développements sur la caisse de sta-
bi lisa tion.
(4)
Il s'agit du café,
du cacao, du coton . . .

23
planteurs et les prix d'exportation, la deuxième source de revenus
de l'Etat après les recettes fiscales et sa part dans le budget
spécial d'investissement et d'équipement a pu passer ainsi de
0,59 % en 1972 à 78,59 en 1978 (1). Cette
ponction considérable
réalisée au détriment du producteur n'a pourtant jamais suscité
de troubles particuliers~ En effet, l'analphabétisme quasi général
des paysans a favorisé, outre l'absence de groupements syndicaux
organisés, la non-représentation des petits et moyens exploitants
agricoles au sein des chambres d'agriculture
permettant ainsi
l'exploitation économique du producteur rural. C'est pourquoi
procéder à une mutation des exploitants agricoles en installant
des jeunes ayant reçu une formation scolaire ou universitaire
revient indubitablement à ouvrir la voie aux revendications, certes
légitimes, mais susceptibles de remettre en cause "l'ordre établi".
Le pouvoir politique~ on le sait, n'est pas
masochiste.
Mais les préoccupations de l'homme politique ne sont pas celles
du chercheur. C'est pourquoi nous nous proposons de poser les
grands problèmes liés à l'activité agricole pour voir d'une part
comment les règles générales sont appliquées aux jeunes se desti-
nant à l'agriculture, et pour proposer d'autre part une réglemen-
tation spécifique. Nous ne nous limiterons cependant pas à l'étude
du droit positif. En effet, celui-ci étant le fruit de la volonté
politique, il nous a paru indispensable de cerner cette dernière.
L'ambition peut sembler démesurée tant la volonté politique est
.
.
mouvante. Peut ~tre eut-il été plus raisonnable de se limiter aux
objectifs que se fixe le pouvoir politique. Or, et c'est là le
point essentiel de notre démarche, la connaissance du droit, notam-
ment dans les systèmes mon~partisans, se heurte à un problème
épistémologique dans la mesure où il n'y a pas toujours une iden-
~ité parfaite entre la volonté politigue et les objectifs affirmés
par le pouvoir politique. Dans notre cas, l'objectif des gouver-
nants est d'installer les jeunes dans le secteur agricole; les
règles juridiques conséquemment élaborées doivent, en principe,
permettre de réaliser cet objectif. Mais encore faudrait-il
(1)
Chiffres cités par J.A.
FAURE:
"Le complexe politico-
économique" in "Etat et bourgeoisie en C6te d'Ivoire".
op.
cit.

24
qu'elles existent car l'objectif fixé par la politique peut ne
jamais connaître un début d'éxécution en l'absence d'un cadre
juridique; bien plus, celui-ci peut exister mais être contraire
aux objectifs fixés.
Dans ce dernier cas, le droit joue un rôle
de "fétichisation" au service de la volonté
politique.
Le but de notre étude est donc double; il
s'agit de savoir si
la politique d'installation des jeunes agriculteurs affirmée par
les gouvernants a reçu un cadre juridique; si celui-ci existe,
permet-il ou peut-il
permettre la mise en oeuvre effective de
cette politique? En d'autres termes, le droit existant est-il
adapté aux objectifs fixés par le pouvoir politique? Mais on ne
saurait s'arrêter à cette question car le droit, même adapté
peut, pour diverses raisons,
ne pas être appliqué. Cette recherche
constitue le deuxième but de notre travail.
Mais auparavant, il
nous faudra expliquer et délimiter le sujet.
A défaut d'une définition légale de l 'épithéte jeune, seront aux
termes de cette étude, considérés comme jeunes, les hommes et les
femmes âgés de trente cinq ans au plus
(1) ayant subi en tout
ou par t i e une .f 0 rm a t ion s col air e 0 u uni ver s i ta ire et se des tin a nt
à exercer l'activité agricole à titre principal,c 'est-à-dire à
y consacrer plus de 50 % de leur temps.Quant
à l'agriculture. elle
comprend les produits du sol, de l'élevage et de la pêcherie.
Ainsi l'installation des jeunes da~s le secteur agricole - par
commodité jeunes agriculteurs - se résume en une série de mesures
visant d'une part à leur concéder un immeuble rural et d'autre
part à leur fournir les moyens financiers et techniques afin que
de la combinaison des différents facteurs de production agricole
naisse l'exploitation agricole
Parce que la terre restera encore pour longtemps le facteur
e s sen t i e l - sin 0 n lep r em i e r de l ' ac t i vit é a gr i col e. n0 usé t udie -
rons dans une première partie l'accès à la terre.
Quant à la deuxième partie, elle s'interessera davantage aux
moyens que le jeune devra acquérir pour accéder à l'exploitation
agricole.
Ainsi, notre travail s'articule autour de deux grands points
- 1ERE PARTIE
L'ACCES A LA TERRE
- 2D1E PARTIE
L'ACCES A L'EXPLOITATION AGRICOLE
(1)
Cette limite d 'a....ge~
quoique arbi'traire~ tient tout de même
compte de la période à laquelle une personne décide~ dans
l'environnement social ivorien,de choisir une activité.

25
PREMIERE PARTIE
- - - - - - - -
---------------
L'ACCES A LA T~RRE
=-=-=-=-=-=-=-=-=-

26
lERE PARTIE
L'ACCES A LA TERRE
Le futur exploitant agricole doit d'abord acquérir une terre
qu'il
intégrera ensuite dans un processus de production. Or dans
l'ordre juridique ivoirien (1), un bien peut être exploité de
deux manières différentes: soit en propriété, soit sous un régime
exclusif de la propriété (2). Il s'agit donc de savoir les possi-
bilités qui s'offrent au jeune agriculteur: comment peut-il accé-
der à un immeubl e rural
?
Cette installation peut se faire conformèment aux régimes juridi-
ques d'exploitation du sol en droit positif (chapitre 1) ou en
marge de ceux-ci (chapitre 2) (3).
En Côte d'Ivoire, toute occupation d'un immeuble rural pour être
légale doit être justifiée "par la possession d'un titre de conces-
sion provisoire ou définitive délivrée par le ministre de l'agri-
culture ou par une autorisation d'occupation à titre précaire et
(1) Aux termes de l'article 76 de la constitution ivoirienne,
"la l'gisZation actuellement en vigueur
(c'est-a-dire au
moment de l'Ind'pendance donc le droit h'rit' de l'admini~­
tration coloniale)
...
reste a~plicable, sauf l'intervention
de textes nouveaux, en ce qu'elle n'a rien de contraire a la
pr'sente constitution".
(2)
Si en droit positif g'néral,
la propriét' et les diff'rents
modes de jouissance relèvent du code civil de 1804, i l en va
autrement en droit positif rural.
Cf.
infra, chapitre pr'li-
minaire.
(3)
Bien entendu, notre analyse resterait incomplète si on n'en-
visageait Que l"tude de la seule règle de droit dans un pays
où celle-ci est moins une réalit' Qu'une fiction.
De surcro"1.,-t
avec une population essentiellement rurale et solidement
attach'e aux valeurs traditionnelles,
le droit positif n'est
pas encore parvenu a supplanter le droit coutumier qui conti-
nue de r'gir les rapports entre Zes individus.

LI
et révocable, délivrée par le Ministre
de l'Intérieur ou son
représentant. Cette autorisation peut donner lieu à une concession
définitive ou un bail emphytéotique" (1).
Cette disposition d'apparence anodine constitue en réalité la
clef de voûte du droit foncier rural. C'est pourquoi il
convient
de s'y arrêter un instant avant d'apprécier les différentes moda-
lités d'attribution qu'elle prévoit. Tel sera l ·objet de notre
chapitre préliminaire .

(1)
Article 1er du décret nO 71-74 du 16 février
1971 relatif
aux procédures domaniales et forestières.

28
CHAPITRE PRELIMINAIRE : DU DECRET DU 16 FEVRIER '1971 INSTITUANT
LES REGIMES JURIDIQUES D'EXPLOITATION DU SOL
1. SES FONDEMENTS
Le décret se fonde essentiellement sur quatre textes (1)
:
- la Constitution du 3 novembre 1960 en son article 41 (2),
- le décret du 26 juillet 1932 portant réorganisation du régime
de la propriété foncière,
- le décret du 15 novembre 1935 portant réglementation des
terres domaniales,
- l'arrêté du 9 juillet 1936.
Il ne s'agira pas de faire ici une étude exhaustive de ces
textes (3). Mais il convient d'en dégager la quintescence afin
de mieux cerner les manifestations du droit en vigueur
1. Le décret du 26 juillet 1932
Il organise le régime de l'immatriculation foncière en
Afrique
Occidentale Française et est toujours applicable et appliquée
en Côte d'Ivoire (4).
(1)
Le décret de 1971 régl~mente aussi bien le secteur rural que
le secteur urbain.
Pour les besoins de notre étude,
les dis-
positions relatives à celui-là l'ont emporté sur celles rela-
tives à celui-ci.
(2)
L'article 41 énumère les
matières qui sont du domaine de la
loi.
Ainsi, relèvent du Parlement "les principes fondamentaux
du régime de la proprié~é".
(3)
On lira avec profit M.
LEY "Le régime domanial et foncier et
le développemen t
économique de la Côte d' Ivo ire". LGDJ,
1970.
Mais il nous faut préciser que nous ne partageons pas certaines
idées développées par l'auteur,
notamment sur le régime fon-
cier actuel comme facteur de développement.
(4)
Cf.
DEMAISON :
"Le Régime de l'immatriculation foncière en
AOF".
Revue Juridique et politique de l'Union française,
1966,
pp.
421 -
478.

29
Rappelons que l'immatriculation est censée assurer à ceux qui
l'obtiennent la garantie des droits réels qu'ils possèdent.
Dans des pays où chaque parcelle est sous la juridiction d'un
chef de terre (1), l'immatriculation peut permettre d'éviter
toute spéculation foncière (2).
En Côte d'Ivoire, c'est l'Etat,
par le biais du service de la conservation foncière (3), qui
assure cette garantie (4). Après avoir rapidement dégagé, l'es-
prit du décret du 26 juillet 1932, voyons ce qu'il en est de
celui de 1935.
2. Le décret du 15 novembre 1935
Ce texte a permis à l'Etat ivoirien de se considérer comme proprle-
taire des terres vacantes et sans maître ou des terres inexploi-
tées depuis plus de dix ans (5).
Il appartient désormais à l'Etat
de procéder à la répartition des terres.
(1)
Cf.
A.
ABOA, Mémoire DEA, Université des sciences sociales
de Toulouse, 1984, p 10 et suivantes.
(2)
La spéculation foncière constitue dans des pays comme le Beni~
un fléau
socio-économique que l'Etat est loin de mattriser.
(3)
Le service de la propriété foncière
et des droits fonciers a
été institué par le décret du
24 juillet 1906 dans les colo-
nies_de l'AOF.
(4)
L'article 6 du décret du 26 juillet 1932 dispose:
"l'immatri-
culation est définitive;
aucun immeuble immatriculé ne peut
être soustrait du régime ainsi adopté pour être placé à nou-
veau sous l'empire de celui auquel i l était soumis antérieure-
ment ".
/(5)
Aux termes du décret de 1935,
seules les terres ne faisant
pas l'objet d'un titre régulier de propriété ou de jouissance
pouvaient faire retour du domaine de l'Etat en cas de non ex-
ploitation ou de non occupation depuis plus de dix ans.
Depuis
la loi du 12 juillet 1971, tous les terrains ruraux acquis à
quelque titre que ce soit peuvent faire retour au domaine de
l'Etat en cas de non mise en valeur.

30
3. L'arrêté du 9 juillet 1936
Il
fixe les modalités d'application des dispositions du décret
du 15 novembre 1935 relative a l'aliénation des terres domaniales.
Le régime .juridique résultant
àe ces textes a permis au pouvoir
colonial d'avoir la maîtrise du territoire d'une part en ce que
par la théorie des terres vacantes et sans maître, la quasi tota-
lité des terres est entrée dans le patrimoine de l'Etat français
(domaine privé) et d'autre part en ce que ce dernier a pu discré-
tionnairement fixé les modes d'attribution ou de jouissance des
terres qui devenues domaniales échappaient au régime du Code Civil.
Quels sont donc dans l'ordonnancement juridique ivoirien les effets
du décret du 16 février 1971, fils du droit foncier colonial?
II. LE CONTENU ET LES EFFETS DU DECRET DU 16 FEVRIER 1971
Le pouvoir exécutif, par ce texte, opère une habile synthèse de la
législation coloniale.
Il s'agit, in fine, d'une véritable réforme foncière qui n'ose dire
son nom (1). Cette réforme sur bien des points a ïes caractéres
d'une nationalisation (2) qui s'est opérée dans la plus grande
(1)
Nous faisons
nôtre cette définition de la réforme foncière:
"elle -
la réforme foncière - modifie la nature des titres
détenus sur l'espace ...
et pose le problème de la nature du
droit sur la terre".
LE BRIS,
LE ROY,
LEINDORFER (études réu-
nies et présentées par)
:
"Enjeux fonciers
en Afrique Noire",
Karthala,
1985.
(2)
Même un état comme le BENIN qui se réclame du marxisme -
léninisme reconna~t à côté de "la propriété d'Etat,
la proprié-
té des travailleurs individuels,
des nationaux et des étrangers"
article 18 de la loi fondamentale.

31
discrétion (1). Cette réforme siest faite à partir de deux repères.
Le texte a dlabord aboli - bien sûr sans le préciser - les droits
coutumiers à travers cette disposition laconique: IIl es droits
coutumiers sont personnels à ceux qui les exercent et ne peuvent
être cédés à quelque titre que ce soit (2). Nul
ne peut se porter
ces s ion na ire des dit s d roi t s sur lie ns em b1 e dut e r rit 0 ire de 1a
Républ ique ll (3).
(1)
Il est regrettable que presque toutes les études qui abordent
de près ou de loin le système foncier ivoirien soient obnubi-
lées par la loi non promulguée de 1963.
On remarquera par
exemple que ce texte prévoyait à l'article 29 du titre B la
possibilité d'immatriculer la terre au nom d'un particulier~
disposition que l'on ne trouve nulle part dans
le décret de
1971.
De surcro~t~
i l peut sembler curieux que le reg~me ivoirien
qui se réclame fort bruyamment du libéralisme opte pour un
tel système.
Au-delà et indépendamment de l'interv~ntionnisme
auquel aucun état ne saurait échapper apparaissent-certaines
contradictions et dysfonctions propres aux Etats africains
(sur ce point~ cf.
F.
GODIN "La logique de l'Etat africain"
Harmattan~ 1986).
D'autre part~ sur le. plan strictement juridique~ on peut
s'interroger sur la légalité du décret de 1971.
Notre senti-
ment est que ce texte~ de par les matières qu'il réglemente~
est plutôt du domaine de la loi.
Il serait à cet égard anti-
constitutionnel.
(2)
Souligné par nous.
(3)
Article 2 du texte maintes fois appliqués par les tribunaux
(Cf.
à titre d'exemple Cour d'Appel d'Abidjan~ Chambre civile
et Commerciale~ arrêt civil nO 42 du 23 janvier 1981~ inédit.

32
Le décret de 1971 a réussi là où la loi non promulguée de 1963 (1)
a échoué car les droits coutumiers du fait désormais de leur carac-
tère personnel et incessible sont nécessairement appelés à dépérir
et donc disparaître.
Le deuxième repère est constitué par l'immatriculation de tous les
terrains ruraux au seul
nom de l'Etat (2). Or, nous savons que
l'immatriculation confère à celui au nom duquel elle s'effectue
un droit de propriété (3).
Ainsi, en C6te d'Ivoire, l'Etat est le véritable propriétaire de
la quasi totalité des terres soit parce qu'elles sont immatriculées
en son nom (4), soit parce qu'elles sont vacantes et sans maître.
Il lui appartient de les concéder aux personnes qui sollicitent
un titre d'occupation (5).
(1) Sur cette loi,
cf.
A.
LEY,
op.
cit.
(2)
Il s'agit d'une ancienne pratique administrative qui a été
légalisée.
cf.
A.
LEY, pp.
436-437.
(3)
L'Etat est également propriétaire des terres non immatriculées
en vertu de l'article 1er du décret du 15 novembre 1935.
(4)
L'Etat peut,
dans des conditions que nous verrons plus loin,
vendre à un particulier une portion de son domaine.
Cette Vente
a un régime juridique dérogatoire au droit commun.
Cf.
infra
la concession définitive.
En outre ceux qui occupent des terres
en vertu d'un droit coutumier doivent,
s'ils veulent légaliser
cette occupation -
et ils y ont intérêt -
se soumettre à la
procédure du décret de 1971,
procédure qui aboutit à l'immatri-
culation au nom de l'Etat.
(5)
Il ne s'agit nullement,
comme on pourrait le penser, d'une
appropriation collective, cette notion n'ayant de sens que dans
un type d'organisation sociale et politique.
Cf.
T.
OLAWALE
Elias
"La nature du droit coutumier africain".
Présence afri-
caine,
p. 183 et suivantes. M.
LEY a pu comparer le Chef de
l'Etat au Chef de la terre en droit coutumier,
celui-là subro-
geant celui-ci dans ses fonctions
en procédant aux répartitions
dans l'intérêt de la collectivité nationale
(ouvrage déjà
cité, p.
437).
M.
LEY qui fut conservateur de la propriété
foncière en Côte d'Ivoire commet à notre sens trois erreurs:

33
Maintenant que nous savons à qui appartient le sol, il convient
de déterminer les règles selon lesquelles l'Etat concède la Terre
aux particuliers, en d'autres termes les régimes juridiques d'ex-
ploitation. Mais cette analyse en elle-même ne présenterait pas
d'intérêt pour notre étude si on ne la mettait pas en relation
avec la condition des jeunes agriculteurs.
En effet, les condi-
tions d'accès à ces régimes sont-elles suffisamment souples pour
les jeunes qui veulent intégrer le secteur agricole? La nature
juridique de ces régimes assure-t-elle la liberté et la sécurité
du jeune exploitant? Ces attributions de titre d'occupation qui
sont de la compétence directe et exclusive des représentants de
l'Etat s'effectuent donc à l'exclusion de toute dévolution
successorale et constituent l'objet du chapitre 1. Cette connais-
sance du droit positif permettra dans le deuxième chapitre de mieux
mettre en exergue les attributions qui s'effectuent en marge du
cadre légal. Enfin le chapitre trois, fort des enseignements des
développements antérieurs s'attachera à mettre en lumière l'in-
fluence de la dévolution successorale sur l'installation des
jeunes.
(5)
suite:
-
la premi.re est de "transposer" -
la formule
est de lui- des
principes de droit coutumier dans le droit positif alors qu'il
est patent
que les deux syst.mes reposent sur des considéra-
tions sociales~ politiques et économiques différentes.
-
L'auteur semble oublier qu'en droit coutumier~ le chef n'est
pas propriétaire de la terre
:
tout au plus exerce-t-il des
pouvoirs d'administration.
-
Enfin~ M.
LEY écrit que le "Chef de l'Etat~ donc
(le)
Service des Domaines
(est)
le Chef suprême de
la terre".
Emporté dans
son élan~
l'ancien conservateur de la propriété
fonci.re identifie le Chef de l'Etat,
personne physique,
à
l'Etat de Côte d'Ivoire~ personne morale. Au-delà de ce dis-
cours qui révolutionne la science juridique et les principes
élémentaires de la République~ il faut indiquer que ce sont
les ministres
de l'agriculture et de l'intérieur qui sont
compétents pour délivrer des
titres légaux d'occupation et
non le service des Domaines.

34
CHAPITRE 1 : LES ATTRIBUTIONS EN DROIT POSITIF DES IMMEUBLES
RURAUX S'EFFECTUANT A L'EXCLUSION DE TOUTE DEVOLUTION SUCCES-
SORALE ET LEUR INFLUENCE SUR L'INSTALLATION DES JEUNES
Pour la clarté de l'exposé, il
nous faudra distinguer les attri-
butions qui s'effectuent selon un régime juridique propre au droit
public (section 1) de celles qui s'effectuent selon un régime ju-
ridique propre au doit privé (section 2).
SECTION 1 : LES ATTRIBUTIONS S'EFFECTUANT SEUUN DES REGLES DE
DROIT PUBLIC
A côté du régime des concessions se dresse celui du permis d'occu-
per. Aussi faudra-t-il déterminer la nature juridique des diffé-
rents actes visés par le décret de 1971. Dans un pays à économie
libérale comme la Cfi"te d'Ivoire, il est important que les person-
nes privées soient dans l'exercice de certaines activités sur un
même pied d'égalité que l'Etat. Il en va notamment de l'agricul-
ture, activité, aléatoire par nature (1). Or l'équilibre des forces
entre l'exploitant et l'Etat est dans une large mesure subor'donné
à la qualification juridique du titre d'exploitation.
De l'acte
unilatéral au contrat administratif et de celui-ci au contrat de
dro.it commun. il s'en suit, on s'en doute bien, des régimes juri-
diques différents. Cette clarification est d'autant plus impor-
tante que la seule situation juridiquement protégée est celle
éd i c té e pa r l' art i cl e 1e r du déc r e t deI 971 pré c i té. No us ver r 0 ns
successivement la ?ituation du jeune dans le régime de la conces-
stion provisoire (paragraphe 1) puis dans celui de la concession
définitive (paragraphe 2) et enfin dans celui du permis d'occuper
(paragraphe 3).
(1)
Il
est connu que les al~as naturels sont les premiers ennemis
de l'agriculteur.
A d~faut de ma~triser les ~l~ments quelque_
fois capricieux de la nature,
les gouvernants peuvent tout
au moins ~quilibrer les rapports entre l'exploitant et le
propri~taire de la terre. Toutes proportions gard~es, le
d~cret français de 1983 relatif aux baux ruraux en est une
parfaite illustration.

35
Paragraphe 1 : La concession provisoire
C'est la mise à disposition par l'Etat à une personne physique
ou morale d'une partie de son domaine pour une période détermi-
née (1).
A) h~~ _~ ~!] ~ j ! ip ~ ~ _2~ ~ ~!: ~ ~ ~ ~ _~ ~ ~ ~ ~ ~ ~
Au regard de la réglementation en vigueur les conditions eXlgees
sont classiques et se rapportent aussi bien au candidat qU'à la
parcelle sollicitée (2).
a. La nationalité
Aucune condition relative à la nationalité n1est eXlgee. Il faut
et il suffit que le demandeur de la concession élise domicile en
Côte d'Ivoire. Cependant, précise le texte "à défaut de domicile
élu, les significations seront valablement faites dans les bureaux
de l ' a dm i ni s t rat eur duc e r c l e 0 Ù son t s i tué s les bi e nSil. Que fa ut-
il
penser de cette disposition? En toute hypothèse, elle laisse
entendre que l'élection de domicile en Côte d'Ivoire n'est pas
obligatoire. Ainsi, toute personne quelle que soit sa nationalité
et sa domiciliation, peut solliciter et obtenir une concession
rurale (3).
b •. L'âge
C'est une condition qui n'apparait nullement dans l'arrêté de
1936.
Ainsi donc, une personne qui aurait atteint l'âge de la retraite
dans l'exercice d'une autre activité peut solliciter et obtenir
.une concession rurale.
(1)
Cf.
infra De la nature juridique à la concession provisoire.
(2)
C'est l'arrêté du 9 juillet 1936 qui est toujours appliqué et
que les gouvernants ont adapté à l'organisation administrative
de la Côte d'Ivoire indépendante.
(3)
Nous avouons n'avoir pas de chiffres précis concernant le nom-
bre d'étrangers ayant pu obtenir un titre de concession grâce
à la générosité du texte "Sont désignés sous le nom de conces-
sions rurales~ les terrains situés en dehors des centres urbain
et utilisés en principe pour des entreprises agricoles ou indus
trielles" article 2 de l'arr6té du 9 juillet 1936.

36
c. Capacité financière
Le candidat doit fournir tous renseignements relatifs à sa capa-
cité financière. On peut s'interroger sur l'intérêt et la portée
de cette disposition pour le moins laconique. Le demandeur doit-
il avoir un certain degré de fortune pour que sa demande soit
prise en considération? L'esprit et la rédaction du texte invi-
tent à répondre par l'affirmative. Cependant, il semblerait que
l'autorité compétente ne tienne pas compte de la "capacité finan-
cière du demandeur" (1).
La fiche de renseignements mise à la disposition du public par
l'autorité compétente indique que tout demandeur "d'une conces-
sion moderne doit faire cadastrer son terrain par un agent, de
préférence un agent de l 'agricul ture".
Qu'appelle-t-on concession moderne. S'agit-il des demandes por-
tant sur de grandes superficies? A moins que la modernité ne
soit liée à la qualité du demandeur.
De telles formùles - au demeurant vides de sens - devraient être
évitées. Les textes parlent plutôt de concessions rurales par
opposition aux concessions urbaines. Ajouter l'épithète moderne
au mot concession peut créer un effet pervers certainement non
recherché.: cel ui de démotiver le jeune qui peut croi re que de·
telles concessions sont réservées aux urbains (2).
De surcroft, il est exigé, ce qui paraît tout à fait normal, un
plan de la parcelle sollicitée. L'arr€té
de 1936 parle "d'un plan
(1)
L'auteur invite à prendre avec beaucoup de r~serve cette
"confidence" d'un fonctionnaire du Ministère de l'Agriculture.
En effet,
le nombre insignifiant de concessions accord~es aux
jeunes laisse plut§t perplexe !
(2)
Les discussions que nous avons ~s.avec de jeunes ruraux nous
confortent dans l'id~e qu'ils sont extrêment m~fiants à
l'~gard des pratiques administratives. Monsieur ROYa pu dire
à ce propos que "les paysans manifestent dans tous les pays
qu'ils soient capitalistes ou à vocation socialisante.
leur
m~fiance à l' ~gard d'un pouvoir moderne insta l l~
à distance et
consid~r~ d~jà comme bureaucratique". M.P. ROY, "Les r~gimes
politique du Tiers Monde" L.G.D.J.,
1977

37
â"l'êchelle, en triple exemplaires ... " tandis que le ministère
de l'agriculture demande que le plan soit reproduit en dix exem-
plaires. Il faut, à ce stade avouer qu'il
n'est toujours pas faci-
le pour le jeune d'obtenir le concours de l'agent du ministère de
l'agriculture. En sus d'être en nombre insuffisant, ces fonction-
naires sont ~ouvent indêlicats ce qui bien entendu ne permet pas
au futur agriculteur de rêunir les pièces exigêes.
En dêfinitive, seules les pièces relatives à la parcelle sont exigêes.
bus les autres renseignements donnês par le soliciteur et sans lesquels la
demande serait incomplète permettent à l'autorité administrative
de constituer un dossier au nom du demandeur et de se prononcer à
partir des renseignements ainsi
fournis.
Ces conditions ainsi réunies (2), comment le dossier est-il
ins-
truit ?
C'est en principe et en droit le Ministre de l'Agriculture qui est
compétent pour délivrer les concessions rurales. En fait le dossier
est instruit par l'administration déconcentrée.
(1)
L'autorité administrative peut-eLLe hormis Les cas prévus par
La Loi -
opposition d'un tiers par exempLe - refuser d'accor-
der un titre de concession provisoire? En d'autres termes
dispose-t-eLLe d'un pouvoir discrétionnaire? Le juge de
L'excès de pouvoir peut-iL être saisi en cas d'un refus non
motivé de L'administration ~
Devant Le siLence des textes~ on
peut supposer que toute demande injustement rejetée autorise
L'intéressé à ester en justice.
(2)
L'articLe 7 bis de L'arrêté de 1936 dispose:
"toute demande
qui ne répond pas aux conditions exigées à L'articLe 3 (reLa-
tives au demandeur et à La parceLLe)
est écartée d'office".

38
1.
Au niveau du Sous-Préfet
Le candidat qui réunit toutes les conditions précitées adresse sa
demande au Sous-Préfet territorialement compétent. Ce dernier
ouvre un dossier et procéde à une enquête dont le délai, est, aux
termes de l'arrêté de 1936 de quinze jours. Cette enquête, dite
de commodo et incommodo permet de recevoir toutes oppositions for-
mulées par d'éventuels ayants droit ou autres tiers et dure dans
la pratique trente jours. Le Sous-Préfet so11 icite l'avis de cer-
ta i ns se r vic est ec hni que s, no t a mm en t ce ux d e l ' a gr i cul tu r e, des
eaux et forêts et de l'urbanisme. Après les mesures de publicité
e t d' e nquê te, l e dos sie r est t r ans mis a u r~ i ni s t r e de l ' A9r i cul t ure .
2. ~~_~2~~~~_~~_~i~j~!~~_~~_~~~~~j~~~!~~~
Le dossier complet de l'affaire qui a été instruite par le Sous-
Préfet arrive donc à la Direction de l'Agriculture et plus préci-
sément à la Sous-Direction des Affaires Domaniales et Rurales
(SADR). C'est
ce service qui, au plan technique, prépare le pro-
jet d'arrêté de concession provisoire (1) et le présente à la si-
g na tu r e du Min i 's t r e de l ' Ag r i cul tu r e. Lac 0 nces s ion pro vis 0 ire
ainsi accordée,
il reste à apprécier la liberté et la sécurité du
jeune dans ce régime d'exploitation. Auparavant, nous analyserons
la nature juridique de la concession provisoire et ses effets sur
. les conditions générales d'.exploitation.
La concession est en droit public général définie comme un contrat
par lequel une collectivité publique confie à une personne, une
dépendance du domaine publ ic ou privé pour lui en donner la jouis-
sance (2).
(1)
Il s'agit de la rédaation du aahier des aharges annexé à l'arré-
té de aonaession (art.
2 arrêté de 1936).
L'autorité administra-
tive en rédigeant un
aahier des aharges type ne respeate pas
les presariptions édiatées par le décret de 1935 et s'enferme
ainsi dans une routine préjudiaiable au droit rural ivoirien.
(2) Bien entendu,
le aontrat de aonaession est générateur pour les
deux partiaipants de droits et d'obligations aontenus dans un
aahier des aharges.
Cf.
A.
DE LAUBADERE,
F.
MODERNE et P.DELVOLVE
Traités des aontrats administratifs~ L.G.D.J.1983~ 2ème éd.'

39
A partir de cette définition on peut distinguer deux types de
concessions: celles qui portent sur le domaine public et celles
qui portent sur le domaine privé, les premières étant généralement
qualifiées de contrats administratifs et les secondes de contrats
de droit commun (1). Or, devons-nous le rappeler, la concession
de terrains ruraux est l'une des trois modalités d'exploitation
que r econ na î t l e décr et
deI 97 1 : con ces s ion, a ut 0 ris a t ion d 1 0 ecu -
pation et bail emphytéotique.
Le problème qui se pose est donc le suivant: les concessions pro-
visoires de terrains ruraux portent sur le domaine privé de l'Etat.
Est-on autorisé à partir de là à conclure qu'il s'agit de contrats
de droit privé de l'administration?
~ous trouvons dans le décret du 15 novembre 1935 un élément de ré-
ponse. En effet, l'article 12 de ce texte dispose: II son t soumises
a la juridiction administrative toutes les contestations relatives
à
l'acte de concession ll (2). Si le contentieux de la concession
provisoire est attribué par le décret de 1930 à la juridiction
administrative, on peut affirmer là qu'il
s'agit d'un contrat admi-
nistratif en vertu d'une qualification légale par le biais d'une
attribution de la compétence contentieuse (3).
(1)
Dans la pratique une telle distinction n'est pas aussi ais'e.
La pr'sence d'un service publi~ ou des travaux publics
peut permettre de reconna~tre l'existence
d'un contrat administratif.
En revanche, une concession peut
porter sur le domaine priv. et contenir des clauses exorbi-
tantes du droit commun qui r'vèlent à cet 'gard un
v'ritable
contrat administratif.
Cf.
A.
LAUBADERE,
op. cit.
(2)
La Côte d'Ivoire conna~t, à la différence de la France,
ce
qu'on a coutume d'appeler l'unit. de juridiction.
C'est le
même magistrat qui est saisi aussi bien des affaires adminis-
tratives que celles relevant du droit commun.
Il applique selon
la nature du cas et les qualifications légales tantôt le droit
administratif tantôt le droit commun.
(3)
Voir A.
de LAUBADERE, op.
cit.
Tome 1, p.
131 et suiv.

40
La nature juridique de la concession provisoire étant précisée,
il
reste à apprécier la sécurité et la liberté que ce régime
d'exploitation peut conférer.
"La terre ne peut renvoyer celui qui l'exploite", dit la sagesse
populaire. Il
s'agit de ce que plus d'un auteur a appelé la sécu-
rité foncière (1) et qu'on subordonne volontiers à la propriété
du sol
(2). La sécurité devrait, à notre- sens, être de nature
juridique; une véritable politique agricole faite pour les agri-
culteurs devrait offrir à ceux-ci la possibilité de disposer et
d'exploiter de manière satisfaisante, durable et donc stable, le
premier capital de la production agricole: la terre. A favoriser
cette sécurité qui est d'exploitation le droit devrait s'attacher.
La liberté souhaitée par le jeune se traduit dans la formule "tra-
vailler quand bon lui semble". Au-delà de la naTveté et du carac-
tère anti-économique d'un tel désir, apparaît en filigrane la
liberté de l'entrepreneur sur son exploitation (3). Le concession-
naire dispose-t-il d'une marge de manoeuvre suffisante pour mener
à bien - et à sa guise - son entreprise?
(1)
Insertion des jeunes dans
l'agriculture en Côte d'Ivoire,
Rapport de consultation,
CINAM,
Abidjan,
1979,
p. 14
(2)
La propriété du sol semble être recherchée par la plupart des
jeunes.
Mais nous verrons plus loin que cet état d'esprit est
moins lié à des considérations culturelles qu'à un environne-
ment juridique,
administratif et bureaucratique étouffant.
(3)
Pourrait-il en être autrement pour tous ces jeunes qui aspi-
rent à un bien-être matériel
?
Sur les rapports entre exploitation agricole et entreprise
industrielle,
cf.
P.
DELNOY,
op.
cit.
p. 34 et suiv.
L'agriculture ivoirienne,
i l est vrai,
est encore très loin
du modèle français ou belge.

41
1. De la sécurité du concessionnaire
Nous l'envisagerons par rapport A la possibilité qu'a l'adminis-
tration de suspendre ou de modifier le contrat. Cette interrup-
tion peut €tre
une sanction prononcée pour inobservation par le
co-contractant de ses obligations ou peut intervenir même en
l'absence d'une quelconque défaillance du concessionnaire. Mais
il
nous faudra au préalable préciser la durée de la concession.
a) Durée de la concession provisoire
La concession provisoire est accordée pour une durée de cinq ans.
Ce délai, commence A courir A compter de la notification de l'arrê-
té de concession. Ce délai, sans être exceptionnellement long,
semble raisonnable pour mettre en valeur la parcelle concédée A
condition bien entendu, que le bénéficiaire posséde des moyens
conséquents (1). Qu'advient-il lorsque cette mise en valeur n'est
pas réalisée?
b) L'interruption-sanction
La déchéance, a pu dire M. ROMIEU, a un caractère de "sanction
exceptionnelle" (2). C'est pourtant elle qui
intervient lorsque
le concessionnaire a failli A son obligation de mise en valeur.
Ainsi, la non-mise en valeur est sanctionnée par la déchéance qui
met ainsi fin au contrat. Le défaut de mise en valeur résulte, aux
termes de la-loi du 12 juillet 1971, relative A l'exploitation
des terrains ruraux détenus en pleine propriété "soit d'un défaut
de mise en culture, soit d'un mauvais état de production, soit
encore de l'abandon d'une exploitation industrielle installée
sur ces terrains".
Il est curieux et regrettable que le contrat
de concession provisoire soit muet sur la notion de non-mise en
valeur. En effet,si nous pouvons par analogie nous servir des cri-
tères retenus par la loi du 12 juillet 1971 précitée, il demeure
que celle-ci n'a pas vocation A réglementer les situations qui
pourraient surgir lors de l'exécution d'une concession provisoire
(1)
Cf.
infpa~ b.
(2) ROMIEU~ Conclusions 8UP CE~
20 janviep 1905~ Cie Dépaptementale
des Eaux~ p.
57 cité
A.
LAUBADERE . . . op.
cit.
p.
T2 p.
157

'42
portant sur un terrain rural
(1). Ainsi, sur le point de savoir
quand le concessionnaire n'a pas satisfait à l'obligation de
mise en valeur, le mystère demeure entier. Aussi, l'administration
peut-elle, usant de son droit de déchéance, sanctionner une faute
dont le contenu reste énigmatique.
Fâcheuse et inconfortable est
la position de notre concessionnaire qui acquiert un terrain dans
la hantise permanente d'en être expulsé pour des motifs qui lui
seraient totalement inconnus et cela au mépris des règles élémen-
taires en matière de contrat (2). Bien plus, la procédure de déché-
ance pour non-mise en valeur n'est guère satisfaisante (3). En
effet, l'autorité compétente n'est pas tenue d'adresser à l'occu-
pant une mise en demeure. Cette faculté laissée à l'administration
nous semble injustifiée d'autant plus que l'objet de la concession
n'est pas le fonctionnement d'un service public (4).
(1)
Cette loi est citée pour éclairer la notion de mise en valeur.
En réalité,
elte ne saurait s'appliquer cl la concession pro-
visoire puisqu'el le vise "les terrains ruraux acquis
en pleine
propriété cl quelque titre que ce soit" et dont le défaut de
mise en valeur a été constaté
sur une période de dix années.
(2)
Le contrat,
aussi bien en droit civil qu'en droit administratif
est générateur d'obligations.
Celles-ci doivent être clairement
énoncées car le contrat peut,
en l'absence de cette précaution
,
.
être sans objet.
De surcrott, i l est patent que le co-contrac-
tant de l'administration,
dans une relation où celle-ci dis-
pose de prérogatives exorbitantes, soit suffisamment informé
de ses droits
et obligations.
(3)
La déchéance peut être prononcée pour d'autres motifs,
notam-
ment le non-paiement de la redevance,
la cession des droits
sans autorisation et l'abandon du terrain.
Ces raisons qui
nous paraissent suffisamment claires ne seront pas exposées.
(4)
La jurisprudence du C.E.
a pu considérer que selon la nature
du contrat ou les circonstances d'espèce,
l'autorité compétente
pouvait passer outre la mise en demeure pour prononcer la dé-
chéance en dehors de toutes stipulations explicites du contrat.
Cf.
A.
LAUBADERE . . .
T.2 op.
cit.
p. 115 et suiv.

43
La déchéance, dernière sanction en droit des contrats administra-
tifs est la seule mesure coercitive prévue par le cahier des char-
ges de la concession provisoire à l'endroit de l'occupant défail-
lant (l).
En sus de ce pouvoir d1interruption-sanction, l'autorité adminis-
trative peut, durant l'exécution du contrat exercer ce que l'on
pourrait appeler un droit de reprise total ou partiel qui ne met
pas nécessairement fin au contrat et qui est exclusif de toute faute
du concessionnaire.
c. Droit de reprise
Deux cas de figure peuvent se présenter si le premier est classi-
que, le deuxième l'est moins.
~~_!~~~~!2~~_~~_~~!!~!~_1!~~_~_1~jD!~r~!_9~D~r~1_g~-~~~_!r~Y~~~
P~~~2S~·
Il est gé né ra l em en t r e con nu que l' ad min i st rat ion ale pou v0 i r de
modifier ou de résilier unilatéralement le contrat. Le cahier des
charges annexé à la concession provisoire prévoit que l'occupant
pourra subir toute réduction dans la contenance du terrain à
l'occasion de travaux publics ou lorsque l'utilité générale le
commande: l'autorité administrative tire donc cette prérogative
des clauses contractuelles (2).
Or en matière agricole, toute réduction de la surface cultivable
.
.
peut compromettre les conditions d'exploitation.Pourtant, le conces-
sionnaire ne sera indemnisé que "si la réduction porte sur une des
parties mises en valeur". Ainsi, si la réduction porte sur plus de
deux tiers de la parcelle, l'occupant ne sera pas indemnisé pour
peu que la partie concernée n'ait pas encore fait l'objet d'une
mise en valeur. Une telle disposition, indubitablement, ne tient
nullement compte des spécificités de l'activité agricole.
(1)
Bien entendu,
la déchéance,
conformément au droit des contrats
administmtifs ne donne droi t
à aucune indemnité.
(2)
Il est de jurisprudence constante que l'administration peut
mettre fin au contrat en dehors de toutes clauses contractuelles
Cf.
A.
De LAUBADERE T.
2 op.
cit.
p. 659 et suiVe

44
L'indemnisation a pour objet de réparer un préjudice; or la ré-
duction d'un terrain rural à usage agricole peut avoir des consé-
quences sur la viabilité de l'activité en question, ce
qui alors
causerait ainsi un dommage certain au co-contractant de l'adminis-
tration. Celle-ci exerce à l'égard de son partenaire un véritable
droit régalien que les travaux publics et l'intérêt général ne
sauraient justifier. Pourtant, et en sus, l'administration dis-
pose d'autres motifs pour évincer le concessionnaire.
~ ~ ~ y. ! ~ ! !~ ~ _! ~ ! ~! ~_ ~~ J? ~!! ! ~! ! ~ _e~ ~ ! _~ ~ ~ ~ !! ~ ~ _~ ~ ! ! f ~
Le cahier des charges stipule que l'occupant "devra subir, le cas
échéant, et sans prétendre à aucune indemnité toutes ... évictions
totales ou partielles qui pourraient se produire pendant la durée
de l'occupation provi soire dans l es droits de l'Etat par suite de
revendication pour tout autre motif".
Les concessions provisoires, contrairement au droit en vigueur,
portent très souvent sur des terrains non immatriculés (1), ce
qui
autorise des particuliers à contester l'occupation du concession-
naire dès lors,qu'ils ont des droits qui ont été antérieurement
reconnus par l'Etat (2).
A l'évidence, l'immatriculation préalable de la parcelle mettrait
le concessionnaire à l'abri de ces évictions
qui
peuvent être
incontrôlées. Pourtant, il .semble que la loi n'exige pas que le
terrain soit immatriculé lorsqu'il s'agit d'octroyer une conces-
sion provisoire comme écrivent certains auteurs (3). Le législa-
teur serait donc fauteur de troubles. Qu'en est-il?
L'article 5, premièrement du décret du 26 juillet 1932 indique
que l'immatriculation est "obligatoire dans le cas d'aliénation
ou de concession des terres domaniales" et précise plus loin que
(1) Au nom de l'Etat~ cela s'entend.
(2)
Comme l'indique l'arrêté de concession~ il s'agit d'une conces-
sion provisoire sous réserve des droits des tiers.
(3)
A.
LEY "Le régime domanial
. . . " op.
cit.
Chantal BLANC~ "le
foncier rural en Côte d'Ivoire"~Ministère du plan et de
l'industrie~ 1981.

45
"1 a formalité - c'est-à-dire l'immatriculation - doit précéder
la passation de l'acte qui consacre l'accord définitif des parties,
à peine de nullitédu dit acte". Pour ~1. LEY, l'immatriculation
n'est obligatoire que lorsque l'Etat accorde une concession à
titre définitif (l).
Pourtant, l'article 5 est clairement rédigé et ne saurait prêter
à équivoque: il s'agit bel et bien de concession des terres do-
maniales, quelle qu'elle soit. En réduisant l'immatriculation à
la seule concession à titre définitif, M. LEY distingue là où la
loi ne distingue pas
: à cet égard son interprétation est abusive
et nécessairement erronée. A moins qu'il n'ait établi - ce qui
serait improbable - une synonymie entre accord définitif des par-
ties et concession à titre définitif.
En effet, l'accord des parties - administration et futur conces-
sionnaire provisoire est l'élément décisionnel de la conclusion
du contrat et constitue, à cet égard, la source du lien contrac-
tuel. Il faut que cet accord soit définitif pour que le contrat
soit réputé conclu. C'est le ministre de l'agriculture qui agit
au nom de l'Etat.
Nous pouvons donc dire que l'immatriculation est une formalité
obligatoire exigée par la loi lorsqu'un terrain doit faire l'objet
d'une concession provisoire, a fortiori définitive (2).
Malheureusement, ces terrains provisoirement concédés ne sont
presque jamais "immatriculés (3) et c'est la sécurité" de l'occupant
qui est compromise: ce dernier peut être à tout moment évincé
sans être pour autant dédommagé.
Indépendamment de toute revendication des tiers, l'occupant pro-
visoire peut également être évincé "pour tout autre motif sans
(1) A.
LEY~ Le pégime fonciep en Côte d'Ivoipe, P6nant ~ 19?5~ nO ?4t
p.
202 et suiv.
(2)
M.
DEMAISON a pu écpipe que "la ppatique se tpouve en contpa-
diction avec les dispositions de l'apticle 5 du décpet fonciep
de 1932".
Cependant nous ne paptageons pas les conclusions de
cet auteup qui ppopose que le texte soit modifié.
(3)
L'Etat justifie son incupie pap les fpais
élevés de la ppocé-
dupe d'immatpiculation.
Un tel apgument~ nous semble inopépant.
Cf·
infpa~ P.4-9

46
prétendre à indemnité ll • Il
ne s'agit ni de l'intérêt général,
ni de l'exécution de travaux publics que nous avons étudiés plus
haut. L'administration se réserve ainsi un véritable pouvoir
discrétionnaire pour mettre fin à la concession (1). Il apparaît
après ces développemen~ que le régime de la concession provisoire
est loin de procurer une quelconque sécurité à l'occupant. Il ne
constitue donc pas, tant s'en faut, le modèle idéal susceptible
d'emmener les jeunes à l'activité agricole. Bien plus, les diffé-
rentes règles étudiées semblent faites pour les en éloigner. A
défaut de sécurité, le jeune exploitant peut-il espérer la liber-
t -
?
e .
Le concessionnaire provisoire a la jouissance des terrains avec
tous les droits qui en résultent. Or la jouissance est un terme
de droit civil dont la clef de voûte réside dans l'article 578
du code civil et ainsi libellé: IIl'usufruit est le droit de jouir
des choses dont un autre à la propriété, comme le propriétaire
lui-même mais j
la charge d'en conserver la substance ll •
M. DELNOY a montré combien les pouvoirs de l'exploitant sont limi-
tés dans le reglme de l'usufruit (2). En effet, l'aspect le plus
important réside dans le fait que l'exploitant est tenu de lise
conformer à l'affectation et.au mode d'exploitation établis par
le propriétaire ll • Or,dans le système ivoirien, faut-il
le rappeler,
c'est l'Etat qui est en principe propriétaire de la terre. Dès
lors, la question devrait se poser différemment car les rédacteurs
du code civil avaient en esprit de protéger la propriété indivi-
duelle.
Aujourd'hui celle-ci n'est pas toujours compatible avec les inté-
rêts économiques et sociaux du pays; c'est pourquoi au régime
(1)
Bien entendu,
l'occupant qui subit une éviction qu'il estime
arbitraire peut saisir le juge du contrat; Une telle hypothèse,
séduisante en théorie a peu d'intérêt en pratique dans un pays
ou l'indépendance de la magistrature est moins une réalité
qu'une fiction.
De surcro~t il est peu probable que le conces-
sionnaire provisoire exerce un quelconque recours : le droit
est tellement éloigné de la grande majorité!
(2)
Cf.
P.
DELNOY,
op.
cit. p.
117 et suiVe

47
classique de l'usufruit on a préféré d'autres mécanismes juridi-
ques d'exploitation du sol
(1).
Ainsi apparaît-il nettement que la liberté pas plus que la sécu-
rité n'est assurée dans le régime de la concession provisoire. Ce
régime peut-il alors permettre l'émergence de jeunes agricul teurs ?
Toutes les dispositions se rattachant à ce
reglme - qui en droit
ivoirien demeure un passage obligé - sont d'ordre général. Le
cahier des charges annexé à l'arrêté de concession n'est pas ré-
digé
intuitu personae
il édicte des mesures standard incom-
patibles avec toute politique visant à installer les jeunes dans
les ec t eu r a gr i col e (2). D' ail leu r s, à reg a rd e r de pr ès, i l s ' agi t
moins d'un contrat synallagmatique que d'un contrat unilatéral où
l'administration est toute puissante. Celle-ci n'y a que des droits
tandis que son partenaire immerge dans un océan d'obligations dont
la bonne exécution est, en fin de compte subordonnée à sa capacité
financière. On voit donc l'iniquité qu'engendre un tel acte qui
dans ses éléments essentiels s'éloigne du contrat pour prendre
les traits d'un acte administratif unilatéral.
Le passage de la concession provisoire à la concession définitive
vient confirmer cette qua1ification.
PARAGRAPHE 2 : LA CONCESSION DEFINITIVE
Le jeune installé, à force de persévérance a satisfait aux condi-
tions requises par les clauses de la concession provisoire et peut
avoir accès à la concession définitive. Quelles garanties lui
donne son nouveau statut? Sa sécurité et sa liberté y sont-elles
(1)
L'inadéquation des règles du code civil appliquées à l'agri-
culture et notamment à l'utilisation du sol a amené l'Etat
français à intervenir de plus en plus dans ce secteur: l'ins-
titution d'un statut des baux ruraux en est une illustration.
(2)
Paradoxalement~ le concessionnaire ne peut céder ses droits
sans l'autorisation de l'administration.
On peut s'interroger
sur le fondement d'une telle interdiction qui non respectée
entra~ne la déchéance de l'occupantl

48
assurées? (B). Auparavant, nous verrons les conditions d'accès
à ce régime (A).
1.
Définition
Clest le décret du 15 novembre 1935 qui distingue entre la conces-
sion provisoire et la concession définitive. Le décret du 16 fé-
vrier 1971 reprend cette distinction indiquant que la concession
définitive a lieu "soit sous forme de transfert de propriété,
soit sous forme de bail emphytéotique". Cette disposition qui
dans sa formulation ne souffre d'aucune ambigufté signifie qu'il
existe deux types de concession définitive (1). Celle qui ici re-
tiendra notre attention est le transfert de propriété (2). En
droit civil différents mécanismes permettent de transférer la pro-
priété d'une personne à une autre
parmi
lesquels la vente occupe
une place de choix. La concession définitive opère à cet égard
transfert de la propriété de la terre concédée par l'Etat à l'occu-
pant provisoire ayant satisfait à ses obligations moyennant un
(1)
Sur le bail en tant que concession définitive,
cf.
infra,
p.
L'emploi de "concession définitive" nous semble abusif et
inapproprié.
En effet,
i l s '.agi~ de la vente d'un immeuble
appartenant à l'Etat même si en réalité cette vente portant
sur le domaine privé de l'Etat ne constitue pas un contrat de
droit commun.
D'autre part,
i l semble que cet accès à la pro-
priété par l'occupant provisoire ayant rempli ses obligations,
ne soit pas un droit.
En effet une telle possibilité doit avoir
été prévue par le cahier des charges annexé à la concession
provisoire.
Or i l nous a été donné de constater que certains
contrats ne prévoyaient pas l'accès à la propriété.
Sur le
point de savoir pourquoi ce régime dualiste,
notre curiosité
n'a pu être satisfaite.
S'agit-il encore d'un pouvoir discré-
tionnaire ou arbitraire de l'autorité administrative?
(2)
En droit comme
en fait,
i l ne s'opère pas un transfert de pro-
priété avec tous
ses attributs, du moins pendant une période
trentenaire.
Cf.
infra,
B,
lei r~strictions au droit de pro-
priété et ses conséquences.

49
prix a payer. Quels sont les frais que devra engager le jeune
agriculteur?
A-t-il droit a tout ou partie de la superficie qui
lui avait été provisoirement concédée?
2. Le Prix de la parcelle
Un he ct are c9 ût ait i l y a que l que t roi san s, en z0 ne d é f a v0 Y' i s é~ •
cinquante mille francs
(1) soit plus d'une fois et demie le
salaire minima d'un manoeuvre temporaire sur unè exploitation de
cacao (2).
Il s'agit manifestement d'un tarif prohibitif destiné
aux plus fortunés, ce qui est contraire a la volonté - si elle
existe - d'installer de plus en plus de jeunes agriculteurs.
Pourtant, le décret du 15 novembre 1935 prévoit en son article 4,
la possibilité d'octroyer a titre gratuit des concessions rurales.
Et au prix élevé de la parcelle s'ajoutent d'autres frais.
3. les autres frais
Il s'agit des frais d'immatriculation (3) et des droits de muta-
tion foncière pris en charge par les services administratifs. Bien
que le terrain soit immatriculé au nom de l'Etat, les charges sont
supportées par le requérant.En effet, ce dernier dispose de quinze
j 0 urs a co mpte r de l a no tif i ca t ; 0 n de l' arr êt é de con ces s ion dé-
finitive pour libérer entre les mains du service compétent les
sommes dûes. A défaut de le faire, il
peut être replacé sous le
reglme de la concession provisoire "avec toutes ses obligations
et conséquences". En toute hypqthèse, le jeune agriculteur moyen
ne peut faire face a de telles dépenses. Serait-il donc condamné
a ne jamais être propriétaire.?
4. Caractéristiques de la parcelle
La concession définitive ou propriété porte donc sur un terrain
immatriculé et ne saurait excéder douze hectares. En effet, lorsque
(1)
Sgit 1.000 francs français,
1 franc
C.F.A.
=
0,02FF.
Les
redevances appliquées jusqu'en 1985 sont fixées par la loi
des finances nO 79-1048 du
27 décembre 1979 fixant
les rede-
vances relatives aux terrains ruraux et tiennent compte des
différences géographiques.
(2) Salaire en 1982.
(3)
Les frais d'immatriculation sont constitUÉS par les frais
de bornage.
Les droits de mutation fonci~re désignent la
taxe fiscale prélevée à l'occasion du transfert d'un droit
de propriété.
Et c'est à ce niveau qu'appara~t toute l'ambi-
gu~té de la concession définitive

50
l'administration accorde une concession provisoire et prévoit au
cahier des charges la
possibilité d'accéder à la
propriété,
celle-ci
porte nécessairement sur une superficie inférieure ou
égale à douze hectares, le reste de la
parcelle faisant l'objet
d'un autre régime d'exploitation
(1).
Cette restriction, presque aussi
vieille que le régime de la
concession définitive
(2)
n'est
pas fortuite et est liée à des
considérations d'ordre historique.
En effet, dès 1937, l'adminis-
tration coloniale se proposait de supprimer
purement et simplement
la concession définitive que l'autorité administrative octroyait
de manière inconsidérée.
Car si
le régime de la
propriété est en
lui-même satisfaisant, sa mauvaise manipulation le rend dangereux aussi
bien pour les agriculteurs que pour le pouvoir
pol itique.
On en arrive
à des contrastes scandaleux d'une exploitation à l'autre qui
conduisent à une lutte farouche des classes entre agriculteurs et au bout du
par cou r s s e des sin e 1e vis age dés 0 1a n t
d e pa y san s
san s ter r e s ( 3) .
Clest sans aucun doute tous ces dangers
que les gouvernants ivoi-
riens ont voulu
éviter en limitant la pleine propriété à douze hec-
tares.
Seulement, dans le cadre d'une politique d'installation des
jeunes cette pratique doit
être
institutionnal isée et devrait tenir
compte de la
~ualité du requérant et de sa capacité financière de
façon à limiter 1 laccès à la concession définitive aux personnes physiques
n'exercant
pas l'activité agricole à titre principal
et àl'inter-
dire aux personnes morales, les uns comme les autres ayant généralement des
revenus.plus élevés que llagriculteur moyen .. Enfin, des dispositions
spéciales
pourraient être prises en faveur des plus démunis - facilités
de paiement par exemple - afin que l'octroi des douze hectares
puisse pro-
fiter
à ceux qui en ont le
plus
besoin.
B) ~~~!~!~!!~~~_~~_~~~!!_~~_e~~e~!~!~_~!_~~~_~~~~~9~~~~~~
La
clef de voûte de cette restriction est contenue dans la dispo-
sition suivante:
"A peine de déchéance immédiate. aucune opéra-
tion commerciale autre que la vente des
produits récoltés ne
(1)
Cf.
infra~ le bail emphytéotique.
(2)
Cette mesure a été édictée par circulaire de
l'autorité colo-
niale.
Nous n'avons malheureusement pas pu retrouver ce texte.
(3)
Déjà~ en 1962~ en Espagne~ les exploitations de plus de 500 Ha
occupaient 31~3 % de la superficie exploitée alors qu'elles ne
représentaient que 0~4 % de l'effectif des exploitations. En Amérique
Latine~ l'absence de terres constitue une véritable bombe à retardement.

51
pourra être faite sur le terrain concédé qui est a usage exclu-
sivement agricole. Cette clause restrictive édictée par l'arrêté
de concession définitive nlest qu'une application des articles
8 al inéa 3 et 9 al inéa 3 de l'arrêté du 9 juillet 1936. Restric-
tion fondée dans le régime de la concession provisoire, elle
parait insolite dans celui de la concession définitive d'autant
plus que cette restriction dure trente ans.
Il
nous faudra nous
interroger aussi bien sur les raisons de cette restriction que
sur ses effets.
1. Les fondements de 11 interdiction
L'agriculteur ne peut vendre que les produits qu'il a récoltés
sur sa propre exploitation.
Historiquement, les concessions étaient essentiellement délivrées
aux colons et a la petite bourgeoisie locale que constituaient
les gros planteurs disposant de moyens importants.
Il
fallait
les empêcher de racheter a bas prix la récolte des petits produc-
teurs le prix officiel des produits agricoles étant insignifiant.
La prohibition de toute opération commerciale pendant trente ans
visait essentiellement l'achat pour la revente dans le but d'évi-
ter des spéculations incontrôlables.
En reconduisant
pareille disposition,le pouvoir politique enferme
l'agriculture dans un schéma traditionnel de production.
Ce dirigisme peut s'expliquer par 1~ volonté des gouvernants de
développer l'action des sociétés d'Etat et de renforcer l'hégémo-
nie de ceux que certains,auteurs ont si justement nommé les plan-
teurs absentéites (1). Toujours en vigueur, cette clause restric-
tive a des effets aussi bien sur la nature juridique de la conces-
~ion définitive que sur le profil du jeune agriculteur.
(1)
Ces soci~t~s sont~ en droit~ et cela depuis 1983 des Etablis-
sements Publics Nationaux
(EPN)
qui interviennent soit dans
la production~ soit dans la commercialisation des produits
agricoles.
D'autre part~ et ces chiffres sont ~loquents~ sur
un total de 443.295 Chefs d'exploitation que comptait le Sud
de la Côte d'Ivoire en 1975~ 386.267 soit 82~88 % avaient une
exploitation n'~xc~dant pas 10 hectares.

52
a) Sur la nature juridigue de la concession définitive
Nous l lavons écrit pl.us haut, le décret du 16 février 1971 auto-
rise l'administration à octroyer une concession définitive sous
forme de transfert de propriété. Au regard des développements
précédents il ne slagit nullement de la propriété telle que défi-
nie
pa r l' art i c l e 544 du cod e c i vil , même s i l a loi du 12 j u i 11 et
1971 nomme abusivement "terrains ruraux acquis en pleine propriété"
les concessions accordées à titre définitif parce q~'il n'y a pas
de pleine propriété mais de propriété suspensive ne produisant ses
pleins effets qu'après trente ans. A ce titre, la concession défi-
nitive est un droit de propriété en devenir que le bénéficiaire
ne risque pas de savourer, l'espérance de vie en Côte d'Ivoire
étant de quarante cinq ans. Il ne s'agit donc pas d'une restric-
tion au droit de propriété puisque celui-ci n'existe pas. Nous
sommes pendant un délai trentenaire en présence d'une concession
pure et simple car la sanction en cas d'opération commerciale
n'est rien d'autre que la déchéance.
En toute hypothèse, un indi-
vidu ne saurait ~tre déchu de son droit de propriété; tout au
plus, encoure-t-il l'expropriation avec toutes les conséquences
attachées à cette procédure. Hélas, la concession définitive en
est bien loin!
b) Sur la sécurité et la liberté de l'exploitant
La concession définitive, pas plus que la concession provisoire
n'est sécurisante pour le jeune agriculteur. Cette insécurité ré-
sul tee n pr em i e r lie u - no us l' a von s dé j à men t ion né - du délai de
quinze jours qui lui est accordé pour slacquitter des différents
frais (prix d'acquisition, remboursement des frais d'immatriculation,
paiement des droits de mutation foncière).
A défaut de s'exécuter - hypothèse la plus probable - dans les
limites du délai ainsi imparti notre jeune exploitant peut ~tre
replacé sous le régime de la concession provisoire. Cette insécurité
résulte également du droit qu'a l'autorité administrative de pro-
noncer la déchéance au cas où l'agriculteur effectue une quelconque
opération commerciale autre que la vente des produits récoltés.

53
Insécurité aggravée par le silence du cahier des charges sur la
procédure à déployer. Qui constate qu'il y a eu, à l'exclusion de
la vente des produits de l'exploitation, opération commerciale?
Quand y a-t-il opération commerciale. Autant d'omissions qui
mettent l'agriculteur à la merci de toutes sortes d'injustices.
Appréciée sous cet aspect, la concession définitive n'est en fait
que provisoire.
C'est pourquoi il eut été utile que la liberté de l'exploitant y fût
assurée. Lui
interdisant
d'accomplir des actes de commerce, l'au-
torité administrative détermine les conditions et le mode de ges-
tion de son exploitation. Une telle mesure est incompatible avec
l'esprit d'entreprise des jeunes.
Pourtant, le cahier des charges de la concession provisoire n'édicte
pas cette interdiction bien que l'article 8 alinéa 3 de l'arrêté
de 1936 stipule clairement que "pendant toute la durée de la conces-
sion provisoire, aucune opération commerciale autre que la vente
des produits de son exploitation ou de son industrie ne pourra
être faite sur le terrain concédé". Une telle omission n'est cer-
tainement pas fortuite.
Car, faut-il
le rappeler, les gros exploi-
tants - personnes physiques ou morales - ont nécessairement besoin
de plusieurs dizaines voir plusieurs centaines d'hectares. Le ré-
gime de la concession définitive présente à cet égard peu d'inté-
rêt pour eux vu qu'il ne porte que sur douze hectares. Seuls les
régimes de la concession provisoire et du bail emphytéotique -
que nous verrons plus loin - peuvent leur permettre de mettre en
oeuvre les importants moyens dont ils disposent. Ainsi, l'autoritè
administrative en "omettant" de rappeler dans l'arrêté de conces-
sion provisoire l'interdiction de commercer permet-elle à ceux
qui en ont les capacités de bâtir une exploitation agricole,
moderne, ouverte sur l'extérieur. C'est pourquoi la restriction
operee par la concession définitive est à notre sens injuste et
mal fondée (1).
(1)
L'arrêté de 1936 ne précise pas ce qu'est une opération commer-
ciale.
Ce silence peut être préjudiciable au concessionnaire
dans la mesure où i l appartiendra à l'autorité administrative
d'apprécier de façon discrétionnaire,
la nature des opérations
effectuées par l'exploitant.

54
D'un accès difficile pour ~e jeune. la concession définitive ne lui
offre pas
la sécurité et la liberté d'exploitation recherchées.
Pompeusement et abusivement nommée régime d'exploitation en pleine
propriété. elle constitue pour la jeune génération. ce que le lan-
gage économique appelle "facteur limitant". A ce titre. la conces-
sion définitive devrait être réaménagée.
Conclusion sur le Régime des concessions.
A l'issue de cette étude sur les concessions domaniales en tant
que régimes juridiques d'exploitation du sol
et leurs effets sur
l'installation des jeunes agriculteurs. plusieurs remarques s'im-
posent :
- Ces dispositions sont très peu connues des jeunes désirant inté-
grer "légalement" le secteur agricole (1). Cette question pose le
problème général de la connaissance par les jeunes des disposi-
tions qui leur sont applicables. On ne peut solliciter un titre
d'exploitation dont on ignore l'existence. Des efforts de vulgari-
sation doivent être faits dans ce sens et commandent que les dif-
férents service~ techniques concernés aient une connaissance profonde
et réelle des dispositions légales (2).
- La procédure est â la fois lourde et "perverse".
Lourde parce que les conditions requises sont de nature à démoti-
ver plus d'un jeune. Cette lourdeur est accentuée p~r l'apathie
générale des services de l'administration déconcentrée chargée
(1)
Depuis la création du Ministère du Développement Rural en 198J~
ce sont des milliers de jeunes qui se sont adressés à la Direc-
tion de la Promotion Rurale
(DPR)
pour obtenir qui une parcelle
cultivable~ qui une aide quelconque. Or la DPR chargée de "pro-
mouvoir l'intégration et l'installation des jeunes en milieu
rural" est incompétente pour délivrer des titres d'exploitation!
(2)
Mme BLANC qui a travaillé en qualité de coopérante au Ministère
du Plan et de l'Industrie (avant la création du Ministère du
Développement Rural) a par exemple distingué entre "la conces-
sion provisoire sous réserve des droits des
tiers"~ "la conces-
sion provisoire pure et simple" et "la concession définitive".
Nous avons recherché en vain les textes-1ui lui ont permis
d'opérer cette classification juridiquement insoutenable.
Cf.
Chantal BLANC op.
cit. p.
8 et suiVe

55
d'instruire les dossiers (dans le cas de concession provisoire,
premier titre légal). En fait, les Sous-Préfets jouissent de
pouvoirs insoupçonnés car trés souvent la Direction de l'Agricul-
ture - quoique n'étant pas liée - donne un avis conforme. La consé-
quence est que les concessions sont accordées de manière anarchique.
La procédure est d'autre part, perverse parce qu'elle requiert que
le postulant joigne à sa demande les plans de la parcelle sollici-
tée, ce qui signifie que, de facto, il en possède une. ou dans le
meilleur des cas, que la parcelle, objet de sa convoitise est inoc-
cupée en droit et en fait.
Cas rarissime, eu égard à la place que
le jeune occupe dans la société rurale (1).
- Les cahiers des charges ne tiennent compte ni des spécificités
régionales, ni de la qualité du demandeur. Or les conditions d'ex-
ploitation diffèrent selon que l'on s'installe au Nord ou au Sud
et selon qu'il s'agit d'une première installation ou non. Consé-
quemment, le régime des concessions fait obstacle à une politique
cohérente d'installation des jeunes. En est-il de m~me pour le.
permis d'occuper? Les développements qui suivent nous éclaireront
davantage.
PARAGRAPHE 3 : LE PERMIS D'OCCUPER
Instauré par circulaire en 1968 et institutionnalisé par décret
en.1971, le permis d'occuper a de nouveau fait l'objet d'une cir-
culaire explicative en 1984. Nous verrons successivement son do-
maine d'application et ses effets sur l'émergence des jeunes agri-
culteurs.
A) fb~~p_9~~pe11~~!1~~
1. Origines et fondements du permis d'occuper
Le permis d'occuper a été créé par une circulaire du Ministère de
l'Intérieur en 1968 (2).
Il s'agissait pour le pouvoir politique
(1)
Cf.
Infra~ chapitre 2.
(2)
Circulaire nO 78/INT/AG du 17 décembre 1968.

56
de réglementer un tant soit peu l'attribution des terres en atten-
dant la promulgation de la loi de 1963 (1).
Ce permis d'occuper se fondait sur deux principes chers au gouver-
nem ent :
- "L'Etat est propriétaire des terres non immatriculées
- Les droits coutumiers sont abolis" (2).
Le décret du 16 février 1971 parmi les titres d'occupation légale
fait allusion â "une autorisation d'occupation â titre précaire et
révocable délivrée par le Ministre
de l'Intérieur ou son représen-
tant". Cependant, le texte ne précise pas les modalités d'applica-
tion de cette disposition.
Il
faut donc se référer â la circulaire
de 1968 modifiée par celle de 1984 pour mieux apprécier la valeur
du permis d'occuper (3).
2. Modalités d'application
La circulaire de 1984 (4) prévoit au niveau de chaque Sous-Préfec-
ture une commission compétente pour attribuer des parcelles culti-
vables. Cette commission présidée par le Sous-Préfet - représentant
du pouvoir central - comprend les représentants de certains servi-
ces techniques ainsi que les élus et les notabilités traditionnelles
(1)
Loi tomb'e dans les oubliettes car n'ayant jamais ' t . promul-
gu'e.
Cf.
A .. ABOA op.
cit.
et A.
LEY op.
cit.
(2)
Ce sont les termes 'nonc's par la circulaire de 1968.
(3)
Circulaire nO 3680 du 19 d'cembre 1984~ Ministère dell'Agricul-
ture et Ministère de l'Int'rieur ;
Objet:
attribution des
terres cultivables.
(4)
On peut s'interroger sur la l'galit' de cette circulaire ant'-
rieure au d'cret 71-74 du 16 f.vrier 1971~ mais cependant
reprise post'rieurement à celui-ci.
En effet~
le décret de
1971 entendait-il subordonner la décision
"du Ministre de
l'Intérieur ou de son représentant" -
ce dernier, agissant~ en
droit~ au nom du Ministre de l'Agriculture - à l'avis d'une
Commission ?

.57
de la région concernée.Le permis d'occuper est généralement attri-
bué pour cinq ans (1) et produit pratiquement les mêmes effets
juridiques que la concession provisoire.
A l'expiration de la période de cinq ans, le décret de 1971 ne fait
pas obstacle au droit qu'a l'intéressé de solliciter directement
une concession définitive, malgré l'avis contraire de certains
fonctionnaires du Ministère de l'Agriculture.
La commission ne peut accorder une parcelle dont la superficie
est supérieure à cinquante hectares: seul le Ministre de l'agri-
culture est compétent pour donner une suite favorable à une telle
demande.
Le permis d'occuper, on s'en aperçoit, est d'une souplesse parti-
culière. Permet-il pour autant aux jeunes de solliciter et d'obtenir
des terrains?
B) ~~_P~!~!~_~~~~~~e~rl_f~~!~~!_q~j~~~~ll~~1~~
?
Instauré de façon fort anodine,il constitue un véritable titre
d'exploitation au même titre que la concession provisoire. Mais
à la différence de celle-ci, celui-là n'est pas strictement régle-
menté, c'est pourquoi il est de plus en plus détourné de son but.
Pour le Ministère de l'Agriculture le permis d'occuper sert à
attribuer des terrains issus de forêts ayant fait l'objet d'un
déc)assement. Pour les Sous-Préfets il
p~rmet d'attribuer des ter-
rains non immatriculés quels qu'ils soient.
1. Le permis d'occuper, acte administratif permettant d'attribuer
des terrains issus de forêts déclassées.
Depuis quelques années, le déclassement d'une forêt ne peut s'opé-
rer que par décret (2) dans les régions où la pression foncière se
(1)
La circuLaire de 1984 ne dit rien sur Les conditions de déLibé-
ration de La commission.
Les avis s'obtiennent-iLs à L'unanimi-

? à La majorité reLative ? Mystère.
Dans
La pratique Les
éLéments dont nous disposons ne nous permettent pas de trancher
La question~ car iL est souvent reproché aux sous-préfets
d'attribuer seuLs Les terrains.
Déjà~ en 1975~ par La circuLaire
nO 24/INT/CAB-1,
Le Ministre d'Etat chargé de L'Intérieur
tirait sur La sonnette d'aLarme.
(2)
Face au dépérissement du patrimoine forestier~ Les décLassements
ne se font pLus par arrêté mais par décrêt pr~ en ConseiL des
Ministres.


58
fait cruellement sentir. Il arrive que des jeunes reçoivent une
portion du domaine ainsi déclassé; il s'agit le plus souvent
d'attribution spectaculaire dont les fins politiques n'échappent
à
personne.
En l'absence d'une réglementation stricte, le permis d'occuper une
partie du domaine forestier déclassé est arbitrairement délivré
par les Sous-Préfets qui ne sont pas eux-mêmes à l'abri de diffé-
rentes pressions.
La conséquence est que, avant même le déclassement, une bonne partie
de la forêt est "annexée" car destinée à une côterie bien précise (1).
Dans ces conditions, le permis d'occuper profite très peu aux
jeunes qui désirent vivre des fruits de la terre.
En est-il de
même lorsqu'il
porte sur d'autres terres?
2. Le permis d'occuper attributif de toute terre cultivable
C'est dans ce but qu'il a été institué. Le Sous-Préfet étant davan-
tage proche des populations, il lui est plus facile, à la tête de
la commission qu'il
préside, de procéder à la répartition des
terres non encore appropriées dans les formes légales.
Le texte précise que les superficies agraires accordées doivent
être en proportion des facultés des demandeurs. L'appréciation de
la Commission est souveraine. Le permis d'occuper devrait sortir
de sa neutralité .pour être un véritable instrument d'i.nstallation
foncière des jeunes.
3. Le permis d'occuper comme instrument d'installation
Malgré son caractère précaire et révocable, le permis d'occuper
constitue un moyen privilégié d'installation pour peu qu'il soit
aménagé. Le préalable réside dans une modification de l'ordonnan-
cement juridique; à la circulaire de 1984 doit se substituer un
arrêté - texte qui serait alors pris en application du décret de
(1) Si de tels comportements ne constituent pas la règle,
i l demeure
qu'ils sont loin d'être des cas rares,
nous a avoué avec dépit
un fonctionnaire du Ministère de l'Agriculture.

59
1971 - règlementant le permis d'occuper et instituant un régime
de faveur pour les jeunes (1).
L'accès des jeunes à la terre est à ce prix.
Le permis d'occuper constituant le dernier et non le moindre pro-
cédé de droit public qu'utilise l'Etat pour attribuer des terrains
ruraux à usage agricole, il reste à étudier la place du jeune
dans les attributions s'effectuant selon des règles de droit
privé.
SE·C TION 11 : LES AT TR 1BUTI 0 NS S'E FFEC TU AN T SEL 0 NOE S REG LES 0E
DROI T PRIVE
Le décret du 16 février 1971 parmi les différents types d'exploi-
tation cités, institueJentre autres, le bail emphytéotique. En
droit civil. l'emphytéose est un bail de longue durée qui confère
un droit réel
susceptible d'hypothèque.
Régime d'exploitation souvent vanté par les auteurs, permet-il
dans le cadre ivoirien, l'éclosion et la consolidation des jeunes
agriculteurs? Pour répondre à cette interrogation, nous étudie-
rons les obligations du preneur et leur compatibilité avec la
sécurité et la liberté indispensables au jeune. Mais auparavant,
une étude sur les fondements de l'institution ainsi que les
conditions pour y accéder nous permettra de mieux la replacer
dans la stratégie globale en faveur des jeunes agriculteurs.
PARAGRAPHE 1 : ORIGINES ET FONDEMENTS DU BAIL EMPHYTEOTIQUE
------------
---- -- ---- -------------------------- --------
Le bail emphytéotique est régi par la loi du 25 juin 1902 (2).
Avant 1938 la France propriétaire des "terres vacantes et sans
~aTtre" en vertu du décret de 1932 attribuait aux particuliers qui
en faisaient la demande des concessions rurales. Celles-ci, eu
(1)
Cf.
infra,
Nos propositions.
(2)
C'est cette loi qui fait
l'objet~ en Prance~ des articles
L451-1 à L451-13 du statut des baux ruraux.

50
égard aux disponibilités de l'époque - les terres, inexploitées
s'étendaient à perte de vue - pouvaient atteindre deux mille hec-
tares. Après une période probatoire, la superficie ainsi octroyée
pouvait être définitivement accordée (1). "O r , par l'octroi incon-
sidéré des concessions définitives particulièrement dans les ré-
gions favorisées, l'autorité administrative risque (risquait) de
se trouver à un certain moment dans l'impossibilité de donner
satisfaction aux besoins fonciers d'une population indigène accrue
en nombre ... Il sembl e que de tel s inconvénients pourraient être
évités si, au lieu de délivrer un titre de propriété, un bail
emphytéotique ... était consenti au concessionnaire ayant accompli
un effort appréciabl e de mise en val eur à 11 expiration du dél ai de
concession provisoire"(2).
Trés tôt donc, l'administration coloniale s'est aperçue de la né-
cessité d'avoir la maîtrise foncière de son territoire et redoutait
plus les colons que les indigènes, ces derniers se contentant géné-
ralement d'exploiter leurs terres sous le régime du droit coutu-
mier. L'application en Côte d'Ivoire de la loi de 1902 poursuivait
essentiellement deux buts:
- permettre à l'Etat français d'être toujours propriétaire des
terres car le régime de la concession définitive avait l'inconvé-
nient d'opérer un transfert de propriété. On craignait de passer
de la propriété d'Etat à la propriété individuelle.
- "Protéger la colonisation contre la non-exploitation ou l'abandon
de concessions de terrains accordées à titre définitif" (3).
Les initiateurs de ce projet étaient certainement loin de s'imagi-
ner que le territoire deviendrait un jour indépendant! Un demi
siècie plus tard, l'emphytéose demeure le dernier titre légal d'ex-
ploitation. Les conditions d'exploitation résultant de ce contrat
sont-elles favorables au jeune agriculteur?
(1)
Cf Suppa'
les concessions ppovisoipe,
et définitive
.
(2)
Cipculaipe 263 SE/4 du 27 avpil 1937 pelative à l'amodiation
des
teppes domaniales pap bail emphytéotique.
Celui-ci a été
pendu applicable en Côte d'Ivoipe pap un appêté en date de
janviep 1938.
(3)
Cipculaipe nO 292 SE/4 du 6 mai 1938 pelative aux baux emphy-
téotiques.

61
PARAGRAP~E 2 : LES OBLIGATIONS DU PRENEUR DANS LE CONTRAT
D'EMPHYTEOSE
Avant d'en arriver aux obligations proprement dites (B), nous
étudierons les conditions d'accès au bail emphytéotique (A).
A) Les conditions d'accès
Elles sont relatives au demandeur et à la parcelle.
1. Les conditions requises au demandeur
Il doit avoir passé avec succès l'épreuve de la concession provi-
soire, c'est-à-dire que les terrains doivent avoir été mis en
valeur conformément aux conditions prévues au cahier des charges.
La condition exigée pour accèder au bail emphytéotique est donc
l'exécution d'une obligation contractuelle. Cependant, il n'en
a pas toujours été ainsi. En effet, avant l'introduction en Côte
d'Ivoire du bail emphytéotique, les concessionnaires de terrains
ruraux ayant satisfait aux conditions du titre de concession pro-
visoire pouvaient, sur leur demande,se voir attribuer "la propriété
définitive du terrain" (1). Mais depuis la modification de l'arrêté
du 9 juillet 1936, "à l'expiration du délai imparti pour la mise
en valeur, le terrain concédé devra ... sortir du stade provisoire
pour être attribué, soit en pleine propriété, soit à bail emphy-
t é0 t i que . . .. (2). L' ac c è s à lac 0 nces s ion dé f i. nit ive é tan t dés 0 r -
mai s su b0 rd 0 nné à l' é t end ue dut e rra i n (3"), i l s em bl e que cet te
caractéristique soit déterminante pour l'ouverture au bail emphy-
téotique. Qu'en est-il exactement?
2. Les conditions relatives à la superficie du terrain concédé.
,
Lorsque .1 'étendue du terrain excède dou~e hectares, le surplus
fait ipso jure l'objet d'un bail emphythéotique qui bien entendu
(1) Apticle 9 de l'appêté du 9 juillet 1936.
(2)
Apticle 10 bis de l'appêté du 9 juillet 1936 modifié pap
l'appêté nO 83 D du 31 janviep 1938.
(3)
Cf.
Suppa,
La concession définitive.

62
est sollicité par l'occupant.
L'autorité administrative ne saurait,
en principe, s'y opposer.
Mais que se passe-t-il
lorsque
la superficie du terrain est
inférieure
à douze hectares ou que
le concessionnaire pour des raisons
personnelles
ne désire pas
acheter la parcelle? Si l'article 9 de l'arrêté de 1936 déjà
cité subordonne l'accès à la concession définitive à la volonté
de l' a t tri but air e qui
do i t ad r e s s e r à cet e f f et une d em and e à
l'autorité administrative compétente, on peut penser que ce régime
juridique d'exploitation, à la différence de la concession pro~
visoire, ne constitue pas un passage obligé.Le concessionnaire,
quelle que soit la superficie du terrain,
peut, après expiration
du délai
imposé pour la mise en valeur et dans la mesure oa il
a exécuté ses obligations, solliciter directement le régime de
l ' emphYt é os e (1).
En définitive, aucune condition relative à l'étendue de la par-
celle n'est exigée,
ce qui
peut permettre aux jeunes agriculteurs
d'opter
pour le bail
emphytéotique dont le loyer est d'une modi-
cité heureuse (2).
Il
nous reste à étudier les clauses du bail
emphytéotique
sont-elles de
·nature
à assurer la sécurité et la liberté du jeune?
B) Les obligations du preneur
Le probl ème
L'emphytéose, droit réèl
de jouissance sur une propriété, s"obtient
moyennant le paiement d'une rente annuelle.
Il
"confère au
preneur
un droit réel
susceptible d'hypothèque; Ce droit peut être cédé
et saisi dans les formes
prescrites pour la saisie immobilière".
Ignoré par les rédacteurs du code civil, le bail
emphytéotique
est peu usité en Europe (3).
Il
constitue pourtant le régime
(1)
C'est le contraire qui aurait été injuste dans la mesure où
l'obtention de la concession définitive suppose des moyens
financiers importants.
(2)
Le loyer annuel s'élevait en 1985 à 300 F.
l'hectare~ soit 6 FF.
(3)
Selon l'enquête sur la structure des exploitations agricoles
réalisée par l'Office statistique des Communautés Européennes~
la surface couverte par le bail à ferme serait de 70~2 % de la
S.A.~contre 29~3% pour la surface utilisée en propriété ~ sait
99~5 % pour ces deux régimes juridiques d'exploitation (Résultatl
Récapitulatifs 1966-1967~1971. BELGIQUE) cité par P. DELNOY~
op.
cit. p.
19.

63
d'exploitation que le droit pos~~if ivoirien tend à privilégier.
La loi de 1902 est-elle toujours aussi opportune lorsqu'on sait
qu'en règle générale, c'est l'Etat qui est le bailleur? Ce
contrat, qui, en droit, est rédigé à partir d'intérêts privés
mais, en fait, oppose presque toujours une personne physique (le
jeune agriculteur) et une personne morale de droit public (l'Etat)
permet-il d'assurer la sécurité et la liberté de l'exploitant?
l·_~PP!~~i~!!~~_~~_l~_~~~~!!!~_~~_!~~a~i~~!~~~!_~~~~_l~_~~1!
~~pb~~~~!j9~~
a) Durée du ba il
Le bail emphytéotique doit être consenti pour plus de dix-huit
années et ne peut excéder quatre vingt dix neuf ans. Sa durée mini-
mum 'est donc quatre fois plus importante que celle de la concéssion
provisoire ou du permis d'occuper. A cet égard, elle permet à
l'agriculteur d'avoir une stabilité certaine sur son exploitation.
Malgré le silence de la loi,il semble qu'aucune reprise ne puisse
être exercée en cours de bail aussi bien par le bailleur que par
un éventu'el acquéreur hormis bien entendu le cas classique d'expro-
priation pour cause d'tilité publique.
Pourtant, le contrat type prévoit "la reprise par l'administra-
tion, en cours de bail des terrains qui seraient nécessaires aux
services de. l'Etat, notamment pour l'exécution de travaux publ ics".
Si le régime de l'expropriation pour cause d' util ité publ ique
obéit à des règles précises, il n'en est pas de même pour "les
services de l'Etat", formul e dangereusement évas ive pour le
co-contractant de l'administration. En effet, "s'il s'agit de
terrains bâtis, la reprise aura lieu moyennant une indemnité à
fixer à l'amiable avec le preneur, l'expertise sera obl igatoire
si elle est demandée par l'une des parties ... En cas de désaccord
entre eux, un
troisième expert sera désigné à la requête de l'une
des parties par le Tribunal du ressort duquel
relève le terrain".
Ces dispositions du contrat, on s'en aperçoit aisément, peuvent
être largement interprétées.
En premier lieu l'expression "les services de l'Etat" est un
" fou r r e t 0 ut" qli i met l ' ex plo i tan t dan sun e s i tua t ion pré ca ire
dans un pays où l'Etat exerce à l'égard des administrés, toutes

64
proportions gardées, une véritable autorité parentale. D'autre
part, il est à craindre que l'indemnisation ne porte que sur des
terrains bâtis alors que la reprise même portant sur des terrains
nus peut être préjudiciable au preneur. Conséquemment il semble
que la philosophie du bail emphytéotique ne soit pas entièrement
respectée à cause de l'imprécision de certaines dispositions, ce
qui peut compromettre la sécurité du jeune (1). Qu'en est-il
alors des règles relatives à la dénonciation du contrat?
b) Résolution du bail
La condition résolutoire dans un contrat est, en droit civil,
prévue par l'article 1184 du code civil. Elle nlest pas ignorée
par la loi de 1902 qui prévoit en son article 5 que "à défaut de
paiement de deux années consécutives, le bailleur est autorisé,
après une sommation restée sans effet, à faire prononcer en justice
la résolution de l'emphytéose. La résolution peut également
~tre
demandée par le bailleur en cas d'inexécution des conditions du
contrat ou si le preneur a commis sur le fonds des détériorations
graves. Néanmoins, les Tribunaux peuvent 'accorder un délai suivant
les circonstan~es".
Ainsi, seul le juge peut prononcer la résolution de l'emphythéose,
ce quoi est fort heureux pour le co-contractant de l'administration
à l'abri de tout arbitraire. Cependant, le bailleur ne dispose-t-il
pas d'autres moyens pour"se débarasser d'un exploitant?
c) Q!~~~_~~_!!~~~!~!l!~!~~
Une disposition du contrat type d'emphytéose indique qu'à l'expi-
ration du bail,si le preneur n'en a pas demandé le renouvellement
au moi nsun a n à l' a van ce, 0 u en cor e sic e r e no uv el l em e nt ne 1 u i
est pas accordé, il devra laisser et abandonner au bailleur les
constructions et plantations qu'il aura pu faire, ~ns pouvoir
prétendre pour les unes et pour les autres à aucune indemnité (2).
(1)
L'article 11 de la loi de 1902 est ainsi libell' :
"En cas
d'expropriation pour cause d'utilit. publique~ le bailleur
devra faire conna~tre le droit de l'emphyt'ose.
Des indemnit's
distinctes sont accord'es au bailleur ou au preneur".
(2) Soulign' par nous.

65
Cette clause contractuelle qui ne souffre d'aucune ambigurté nlest
toutefois pas satisfaisante; en effet, dans quels cas le preneur
n'a-t-il pas droit au renouvellement quand bien même il le sollici-
terait ?
Le bailleur peut-il slopposer au renouvellement? Si oui pour
quels motifs? Autant de questions auxquelles le contrat ne répond
pas qui pourtant prévoit un congé non motivé signifié par le bail-
leur du preneur qui quitte les lieux sans prétendre ~ aucune indem-
nité. Or donc, le droit au renouvellement est un procédé qui habi-
lement manipulé par les pouvoirs publics peut permettre d'assurer
au jeune exploitant une sécurité réelle en même temps qu'il est un
instrument efficace susceptible de favoriser l'installation de
nombreux jeunes.
2. ~pp~~~!!!1~n_~~_!!_!j~~r!~_~~_!~~~p!~!!!~!_~!~~_!~_~!!!_~~P~l-
!~~!19~~
La loi de 1902 est
suffisamment claire sur la liberté de l'emphy-
téose pour que nous ne nous y attardions outre mesure (1). Le pre-
neur a, contrairement au régime de la concession provisoire, le
droit de céder son bail qui peut d'ailleurs être "saisi dans les
formes prescrites pour la saisie immobilière".
En outre, si "le preneur s'engage a n'utiliser le terrain donné ~
bail que pour-l'usage agricole" ce qui au demeurant paraît tout a
fait normal, il ne lui est pas interdit d'effectuer des opérations
commerciales.
Toutes ces dispositions font du bail emphytéotique un régime d'ex-
ploitation sécurisant et favorable aux jeunes.
C!est pourquoi le bail emphytéotique est le régime qui nous paraft
être le plus conforme à une véritable stratégie d'installation des
jeunes. Il
peut offrir la stabilité et la liberté tant recherchées,
sous réserve de quelques modifications du contrat type (droit de
renouvell ement, repri se des terra i ns en cours de ba il ). Il n' y a
pas a priori incompatibilité entre l'intérêt de l'exploitant et
(1)
Sur la liberté de l'emphytéose,
Cf.
DELNOY,
op.
ait.

66
celui de l'Etat (1). C'est pourquoi il nous semble impératif de
vulgariser le bail emphytéotique en modifiant autant que possible
l'éthique contractuelle de façon à protéger un peu plus les inté-
rêts de l' emphytéot e.
CONCLUSION AU CHAPITRE l
Le droit de l'exploitation du sol actuellement en vigueur en
Côte d'Ivoire peut être conforme à une modernisation et une restruc-
t urat ion de l' a gr i cul tu r e . Le pr i nc i pe de l' i mm a tri cul a ti 0 n des
terrains au nom de l'Etat devrait être maintenu à condition que ce
~ernier prenne ses responsabilités en faisant face aux frais.
En matière de concession provisoire, le cahier des charges devrait
tenir compte de la qualité du demandeur. Dès lors qu'il s'agit
d'une première installation et que le requérant a moins de 35 ans
et remplit certaines conditions, des normes suffisantes de sécu-
rité et de liberté devraient lui être assurées; la présence du
concédant ne devrait pas être trop lourde. Par contre, la concession
définitive qui engendre le transfert de propriété nous semble inu-
tile et à la limite dangereuse. Non seulement peu de jeunes peuvent
y accéder mais elle entraînera dans le long terme de véritables
spéculations foncières. C'est pourquoi, nous réaffirmons notre
adhésion à la propriété d'Etat en ce qui concerne les terrains
ruraux. Nous suggérons donc que la pleine propriété soit purem~nt
et simplement supprimée au profit du bail emphytéotique qui peut
être un instrument efficace permettant à l'Etat non seulement
d'avoir la maîtrise foncière du territoire mais de surcroft de
maîtriser davantage sa stratégie en matière d'accès des jeunes
agriculteurs à la terre.
(1)
Il est vrai que la plupart des dispositions concernant l'agri-
culture indiquent le contraire.
Mais faut-il
le rappeler,
la
politique des structures en Côte d'Ivoire a toujours eu pour
objectifs et
(ou)
pour conséquences :
-
de favoriser
la productivité au détriment de tout autre consi-
.dération,
-
de consolider l'hégémonie d'une race d'agriculteurs non exploi-
tants
(les absentéistes ou encore les agriculteurs aux mains
blanches comme on les appelle en France).
Et comme l'Etat en Afrique Noire procède d'une autre logique
(servir la minorité et asservir la majorité),
on comprend aisé-
mRn+.
lRR
TnnnRmRn+'R
nR ~R+'+'R in~nmnn+.ihili+.&_

67
Mais l'élaboration de ce cadre juridique est en lui-même insuffi-
sant; encore faut-il
que l'ensemble des règles précédemment étu-
diées soit observé par les intéressés. Or l'observation de la
règle de droit suppose sa connaissance. L'adage "nul n'est censé
ignorer la loi" n'est dans le contexte d'un pays sous-développé
qu'un miroir à alouettes: l'analphabétisme. la non-efficience
des médias. l'absence de syndicats organisés constituent autant
de facteurs qui limitent la publicité des textes et la diffusion
de l'information. Sans doute ces problèmes constituent-ils un
préalable sans lequel toute réforme. même opportune et bien menée.
est condamnée à rester. selon l' heureuse formul e de M. GRANGER "l e
droit du journal officiel" (1). C'est une oeuvre de longue haleine
dès lors qu'on considère que jusqu'à ce jour, la plupart des
installations s'effectuent au mépris de la règle de droit.
(1) Roger GRANGER :
"Pour un droit du d.veloppement dans les pays
sous-d'velopp's" in Dix ans de conf.rences d'agr'gation~ Etudes
de droit commercial offertes à M.
HAMEL~
PARIS, DALLOZ~ 1961.

68
CHAPITRE II
LES ATTRIBUTIONS S'EFFECTUANT EN MARGE DU DROIT
POSITIF
Malgré donc l'existence d'une législation qui reste à parfaire,
l'exploitation des terrains rurQux à usage agricole s'effectue
le plus souvent au mépris de la règle de droit applicable. Cela
résulte de deux situations différentes.
La première, et sans doute la plus préoccupante, est la présence
irritante
du droit foncier coutumier auquel la quasi totalité des
terres - et donc de ceux qui les exploitent - est encore soumise.
La deuxième difficulté est liée à la méconnaissance par l'adminis-
tration des textes régissant le foncier rural; il sien suit un
embroglio juridique préjudiciable au jeune exploitant.
Ces deux questions feront l'objet de nos deux sections.
SECTION 1 : EN
DROIT COUTUMIER
La Côte d'Ivoire a, au lendemain de son indépendance, opté pour
l'unité juridique du territoire: la loi s'applique à tous parce
que générale et. impersonnelle. Il
n'y a pas eu codification du
droit pré-existant
mais substitution de celui-ci par le droit
occidental hérité de la puissance colonisatrice. C'est pourquoi
l'existence d'un droit foncier coutumier constitue, toutes propor-
tions gardées, "une zone de non droit" présentant un inconvénient
majeur pour les jeunes désirant s'installer en agriculture: leur
statut y est très précaire (paragraphe 2). Mais auparavant, il
nous faudra voir en quoi la présence de règles foncières coutu-
mières est irritante (paragraphe 1).
~~~~§~~~~~!_: h~_Q~Q!!_EQ~Ç!~~_ÇQ~!~~!~~!_Q~~!~Çh~_~_~~_~~!~!!Q~
DES EXPLOITANTS AGRICOLES?
La démarche, classique, est d'opposer droit coutumier et droit
moderne, le deuxième étant facteur de développement tandis que le
premier n'a pas été élaboré dans cette perspective. Malheureusement,
on affirme plus souvent qu'on ne démontre, et ce qui devrait être
science devient dogme. La question qù'il
faudra nous poser est
la suivante: le droit foncier coutumier est-il, de par sa nature,

69
un frein à l'installation des jeunes?
(A).
La réponse à cette
question détermine la place
à assigner à l'ancien droit
(B).
A) ~~_~~!~~~_q~_~~~1!_!~~~1~~_~~~!~~1~~_~!_!~1~~!~!l~!1~~_~~~_j~~~~~
Le problème de la nature du droit coutumier africain, a, pendant
longtemps, alimenté les débats doctrinaux.
L'analyse a souvent été
conduite à partir de la conception romaine de la
propriété posée
par l'article 544 du code napoléonien (1) avec ses trois éléments
traditionnels:
l'usus, le fructus et l'abusus.
C'est ainsi qu'on
a pu soutenir que "le droit de propriété existe bien en droit cou-
tumier ...
(même si) pour faire entrer ces droits
(coutumiers) dans
les catégories romaines
il
suffit d'écarter systématiquement les
analyses qui
ne permettent pas cette opération ... ". (2).
Notre objectif n'est pas de présenter toutes ces études
(3). Rappe-
lons que si
la
propriété n'est pas, en droit coutumier toujours
individuelle, elle n'est pas non plus toujours collective; elle
est fonction du
bien concerné (4).
"C'est ainsi que la terre ne fait jamais l'objet d'une propriété
collective de la
part de la collectivité toute entière, à l'excep-
tion de quelques bois sacrés, marchés et portions de forêts vier-
ges"
(5).
Il
appartiert au Chef de terre ou du groupe,
selon les
sociétés, d~ répartir les parcelles entre les chefs de famille, à
charge pour ces derniers de les rétrocéder aux différents membres
du groupe familial.
Le droit étant construit et non donné, toutes ces règles d'acquisi-
tion d'un immeuble à usage agricole étaient liées à l'organisation
sociale, politique et économique de. ces sociétés. C'est pourquoi
---------------------------------".----:-----
(1)
On oublie trop souvent les conditions historiques dans lesquelleE
fut élaboré le code civil de 1804 exaltant la propriété privée
qui~ si elle a favorisé l'activité économique du 19ème siècle
a cependant été posée au
lendemain de la Révolution :
la féoda-
lité~ les grands propriétaires terriens et leurs serfs~ le
peuple français
n'en voulait plus.
Le système foncier d'avant
1789 était-il le même que le droit foncier coutumier africain?
(2)
A.
LEY,
op.
cit.
p.
201
(3)
Cf.
T.
OLAWALE ELIAS:
"La nature du droit coutumier africain"
Présence Africaine 1961.
(4)
Cf.
OLAWALE ELIAS~
op.
cit.
p.
183 et suiv.
(5)
Cf.
OLAWALE ELIAS~
op.
cit.
p.
192

70
le jeune pouvait - et devait - recevoir, à sa majorité (1), une
portion de terre susceptible de lui assurer une certaine indépen-
dance, au demeurant jamais absolue,
puisque le socle socio-politique
est le respect des valeurs ancestrales.
L'économie rurale étant
de subsistance, il
n'était point nécessaire d'exploiter des super-
ficies importantes.
Ce système fonctionnait de manière plus ou moins harmonieuse dans
un cadre juridique, économique et politique cohérent.
On ne saurait donc accuser le droit foncier coutumier de tous les
maux. Dans sa structure interne et analysé dans le contexte social
qui l'a secrété, il ne constitue pas un frein à l'installation
des jeunes agriculteurs. Doit-on pour autant en déduire que le
droit ancien est à l'abri de tout reproche?
B) ~~~_~~~~~~_~~~!1~~_~~_!~!~~P!2!~~~_~~_~~~2!_!~~~2~~_~~
~~!!!~~~~!
~_~~~!!~~!_1~2~~!~!1~!2~~_~~~_J~~~~~
Les pouvoirs publics en Côte d'Ivoire ont accusé le droit foncier
coutumier d'être un obstacle au progrès et au développement de
l'agriculture ;' il ne permet pas aux jeunes d'acquérir des terres ...
Les critiques sont nombreuses et pourtant les développements pré-
cédents ont montré que le droit coutumier originaire n'est pas res-
ponsable de tous ces maux.
Nous serions-nous alors trompé
?
A conduire plus loin la réflexion, il apparaît que les raisons qui
font du droit foncier coutumier un droit éculé et hostile à la pro-
motion des jeunes tiennent moins à sa nature qu'à l'évolution de
la société ivoirienne. Ces raisons sont d'ordre politique, juridique,
économique et social.
1.
Les raisons d'ordre politique
La succession d'Etat qui s'est effectuée en Côte d'Ivoire posait
le problème général du choix par les nouveaux gouvernants d'un
(1)
La majorit~~ dans les soci~t~s traditionnelles~ à nature sociale
et à caractère rituel~ s'acquiert après une s~rie d'initiations
correspondant,
dans certaines soci~t~s~ au passage d'une classe
d'âge à une autre.

71
régime politique orienté vers le développement
. Le libéralisme
économique, voie dans laquelle s'est engagée la nouvelle République
démocratique (t) était-il compatible avec l'organisation tradition-
nelle de la société? On était en droit de penser que le pouvoir
politique ne ferait pas table rase des coutumes,
puisque l'article
41 de la Constitution stipule que "la loi fixe les règles concer-
nant ... la procédure selon laquelle les coutumes sero~t constatées
et mises en harmonie avec les principes fondamentaux
de la Constitu-
t ion ... ". L' i dé e don cd' 0 pé r e r une s ym bi 0 s e en t rel '0 r ga ni sa t ion
traditionnelle et les institutions modernes n'était pas exclue à
priori qui trouverait son appl ication dans un cadre juridique ori-
ginal et adapté. Mais force est de reconnaître que l'article 41
suscité ne constituait qu'une précaution de style puisque le sys-
tème juridique progressivement mis en place par les gouvernants ('2.),
devait prononcer, à l'endroit du droit coutumier, la peine capitale.
2. Les raisons d'ordre juridique
L'élaboration d'un arsenal
juridique moderne de type occidental (q)
a marqué le déclin formel
du droit coutumier (4).
(1)
Aux termes de l'article 2 de la Constitution "La R.publique de
Côte d'Ivoire est un.e et indivisible,
la'Ïque,
d.mocratiquf3 et
sociale ... ".
(2)
Avant 1980,
les d.put.s .taient d.sign.s sur une liste unique
dress.e par leP. D. C. I.
(voir supra)
le par ti unique au pouvoir
proc.dure faisant du Parlement constitu. par une Assembl.e uni-
que une véritable Chambre d'enregistrement.
Depuis la loi nO 80-
1038 du 1er septembre 1980
(article 29 nouveau de la Constitu-
tion)
les déput.s à l'Assembl.e Nationale sont élus au suffrage
universel direct.
Doit-on en d.duire que désormais,
le Parlement
exerce librement ses fonctions
? Le système mono-partisan de
la Côte d'Ivoire doublé d'une observation de la pratique quoti-
dienne invitent à répondre par la négative.
(3)
P.F.
GONIDEC :
"Les droits africains,
évolution et sources".
Bibliothèque africaine et Malgache,
Tome 1.
(4)
Ce déclin s'est traduit -
et se traduit - au niveau de la règle
de droit et non par rapport aux comportements sociaux. Voir infra.

72
A la différence de certains pays (l). la Côte d'Ivoire a choisi de
se tourner vers le droit français en posant des règles juridiques
appelées à orienter le comportement des individus (2). Le droit du
sol
n'a pas échappé à ce mouvement général et aux règles coutumiè-
res se sont purement et simplement substituées les règles héritées
de la colonisation. Le conflit entre les deux systèmes ne peut
qu'être préjudiciable aux jeunes.
3. Les raisons d'ordre social et économique
L'immigration massive des années 1950. l'introduction dans la socié-
té traditionnelle des lois du marché ont amené progressivement les
Chefs de Terre ou de famille à se conduire en véritables spécula-
teurs. La terre. en principe inaliénable est vendue par les adminis-
trateurs coutumiers qui ne sollicitent pas l'avis des membres de
leur lignage; il s'en suit des revendications en propriété ou plus
exactement en jouissance que le juge a bien du mal à trancher à
défaut de preuves probantes et d'allégations fiables (3). Les jeunes
sont de moins en moins disposés à exploiter de micro
parcelles
dans un contexte économique nouveau (4). Bien plus. les conflits de
génération nés des bouleversements sociaux conduisent les jeunes à
(1)
A titre d'exemple,
les autorités malgaches ont choisi la commu-
nauté traditionnelle -
le
fokolona
-
comme cadre juridique inté-
grant les populations à
l'oeuvre du développement.
Au Maroc,
la
commune rurale constitue le cadre privilégié du développement
communautaire.
(2)
C'est ainsi que les lois de 1964 sur le mariage ont supprimé
la dot et la polygamie;
de surcro~t, seul le mariage célébré
par un officier de l'Etat civil
a des effets légaux.
Pourtant,
une partie importante de
la population -
essentiellement des
ruraux -
se contente du
seul mariage coutumier,
situation que
le droit positif assimile à up concubinage.
(3)
Voir Cour d'Appel d'Abidjan,
arrêts civils des
13 et
20 février
1981,
inédits.
Le juge,
en présence d'une parcelle litigieuse
qui n'a pas été délivrée par l'autorité administrative compétente
recherche,
lorsqu'il s'agit d'un terrain bâti l'auteur de la
mise en valeur.
(4)
Voir AFFOU YAPI :
"Le grand planteur vi llageois dans le procès
de valorisation du capital social; une introduction à l'orga
nisation socio-économique AKYE" ORSTOM,
PETIT BASSAM,
1979.

73
contester l'autorité des anciens (1), nagère sacrée. A cette insu-
bordination des cadets correspond le refus ou la réticence des aînés
à céder aux
premiers des terres cultivables. Le droit foncier cou-
tumier,ainsi dénaturé, devient objectivement un frein au développe-
ment agricole et à l'installation des jeunes.
Ainsi, l'incompatibilité entre droit coutumier et installation des
jeunes tient moins à des facteurs endogènes qu'exogènes. Vidée de son
contenu par un environnement institutionnel et social qui lui sont
hostiles, la coutume foncière ne saurait être maintenue.
Pourtant,
elle continue à être appliquée. C'est pourquoi il
nous faudra étudier
le statut du jeune dans le droit foncier traditionnel.
PARAGRAPHE 2 : LE STATUT DU JEUNE DANS LE DROIT FONCIER COUTUMIER
Outre les difficultés pour y accéder, le jeune jouit dans ce régime
de peu de liberté. Les problèmes rencontrés diffèrent selon que la
terre appartient (A) ou non à. la famille (B).
A)
~~~~~~~_~_l~_!~~r~_~~~~_l~_~~~~~_~~~_i~~~~pl~~_~pp~~!~~~~!_~_!~
famille.
Nous écrivions plus haut que si la propriété n'est pas en droit
coutumier toujours individuelle, elle n'est pas non plus nécessai-
rement collective. C'est en principe la famille qui est détentrice
de la terre, quitte à la répartir ensuite entre ses membres.
L'économie rurale de subsistance aidant, ce régime a fonctionné de
manière plus ou moins harmonieuse avant que l'introduction en milieu
rural des lois du marché et l'occidentalisation du droit ne viennent
rompre cet équilibre. Aujourd'hui, la situation s'est dramatiquement
dégradée pour plusieurs raisons.
En premier lieu, la qualité de la terre n'est pas partout la même.
L'exploitation anarchique et sans répit du sol l la appauvri
(2).
(1)
Voir Seydou BADIAN
:
"Sous l'Orage" Présence africaine.
(2)
Poul'tant~ la surface agricole est presque insignifiante pal'
l'apport à la surface agricole utile.
(cf.
supra introduction).

74
Avec l'avancée du désert, il s'opère à la base une inégalité natu-
relle des chances entre les jeunes dont on ne tient pas toujours
compte. Cette différence qui est régionale appelle des solutions
régionales.
La deuxième difficulté est que les terres sont, au niveau de chaque
famille, administrées par les plus âgés. Plusieurs cas de figure
peuvent se présenter
- le jeune n'est pas Chef d'exploitation, tout au plus peut-il être
regardé comme aide familial
ne disposant d'aucune autonomie et
jouissant d'un revenu marginal qui n'est que de subsistance. Son
émancipation est subordonnée à des facteurs aussi objectifs que sub-
jectifs (région concernée, rapports personnels que le jeune entre-
tient avec les ainés, disponibi1 ité de ceux-ci
... ). Il
n'est donc
pas rare que ce jeune que ni le droit positif ni le droit coutumier
ne protège s'en aille vers les centres urbains.
- le jeune reçoit une parcelle du domaine familial, ce qui suppose
qu'il a supporté le long apprentissage lié au statut d'aide familial.
Le terrain peut être bâti ou non. La coutume lui reconnaît les pré-
rogatives traditionnelles de l'usufruitier (1). La différence avec
le régime précédent est qu'il cultive et récolte les fruits de son
exploitation en toute liberté.
Il
nous faut cependant avouer que le droit foncier coutumier s'est
bien effrité et on peut dire aujourd'hui qu'il
est éculé (2). Sa
survivance est liée moins à des considérations culturelles et so-
ciales qU'à une situation économique dominée par les lois du marché.
Bien des propriétaires coutumiers ne sont que de vulgaires spécula-
teurs qui violent le principe sacro saint de l'inaliénabilité de
la Terre. Le maintien des jeunes dans le carcan traditionnel
(1)
Sur les notions de propriété et de possession en droit afri-
aain~ af. T.
O.
ELIAS, op.
ait.
et G.
KOUASSIGNAN~
L'Homme et
la Terre.
(2)
Nous parlons du droit fonaier aoutumier en C.I.

75
n'obéit à aucune logique communautaire (1). C'est pourquoi, las
d'attendre, ils partent vers les domaines n'appartenant pas à la
famille.
Dans cette situation, les jeunes sont en réalité des manoeuvres
agricoles, sujet qui a priori n'est pas la préoccupation de notre
étude. Nous l'envisageons pour dire qu'il
ne s'agit nullement d'un
type d'installation contrairement à une confusion entretenue par
certains ministères s'occupant de questions agricoles.
D'ailleurs ces jeunes en vendant ainsi leur force de travail n'ont
qu'un seul objectif: réunir un peu d'argent pour joindre la ville.
A cet égard l'agriculture est, et demeure pour eux, un tremplin.
Devant la résistance du droit coutumier, certains ont proposé de
négocier avec les tenants du pouvoir foncier (2). Pour les rédacteurs
de ce document, lIil ne s'agit plus de purger une partie de l'espace
national des droits coutumiers, mais de négocier avec les responsa-
bles des terrains villageois ll •
Cette proposition qui a le mérite de la souplesse nous semble irré-
alisable dans la pratique lorsqu'on tient compte de l'enjeu en pré-
sence et des actes posés par l'autorité administrative.
Indépen-
damment des difficultés relatives à une telle procédure, le problème
réel
est que les détenteurs coutumiers se méfient des exigences des·
pouvoirs publics.
Lorsqu'il s'agit d'octroyer des terrains ruraux à des personnes mo-
rales - de droit privé ou de droit public - et même parfois à de
simples personnes physiques, l'Etat
ne négocie point! Les déten-
(1)
Au Congo,
un document relatif à la mise en oeuvre de la réforme
foncière et agraire montre que la coutume foncière créë des
situations de rente au profit d'une côterie.
Toutes proportions
gardées,
la Côte d'Ivoire n'en est pas bien loin.
Département de la Réforme-foncière et agraire et de la Promotion
Coopérative,
nO OOJ / DRAFPC/86.
(2)
Politique Nationale d'installation des jeunes en milieu rural.
CINAM,
1984,
T.l,
p. 45 et suive

76
teurs de ces terrains - qu'ils soient bâtis ou non - sont purement
et simplement dépossédés et indemnisés lorsqu'il y a eu destruc-
tion de plantations (1). Comment peut-on négocier avec des indi-
vidus frustrés?
la solution, pour nous, réside ailleurs. Et elle commence néces-
sairement par une meilleure connaissance de llétat actuel de la
coutume foncière en Côte d'Ivoire et mieux, des comportements
des détenteurs coutumiers (2). Ce nlest qu'après ce travail pré-
liminaire qulil sera possible d'informer et de sensibiliser les
détenteurs coutumiers sur la nécessité de libérer les terres au
profit des jeunes (3).
Gigantesque est l'oeuvre, mais l'installation rapide et sans heurts
des jeunes est à ce prix.
Ainsi donc la coutume foncière, à la différence du droit positif
offre peu de possibilités aux jeunes; elle est appliquée de
manière perverse - en fonction des intérêts en présence - elle
est plus ou moins rigide selon la région donnée et se situe
pour finir en dehors des transactions légales. En réalité, le
droit coutumier nia jamais constitué un frein à l'intervention
(1)
A.M.
PILLET-SCHWARTZ montre comment l'opération SODEPALM
(Société d'Etat pour la culture du palmier à huile) a boule-
versé l'environnement social et économique d'un village situé
prés d'Abidjan.
"AGHIEN,
un
terroir Ebri é,
15 ans de
"Techno-
structure" en Côte d'Ivoire,
ORS TOM,
1982 surtout p.
96 et suiv.
(2)
L'ouvrage de Mme BLANC -
déjà cité -
est à ce titre édifiant.
On s'enferme dans une conception théorique et caduque de la
terre en droit coutumier pour dire qu'elle est "une déesse
que l'on honore" qu'elle "est inaliénable comme le domaine
public" alors que la pratique quotidienne dément cette vision
pour le moins statique.
(3)
Sur les problèmes connexes
et la procédure, cf.
nos proposi-
tions en conclusion de la première partie.

77
de l'Etat dans le secteur agricole et plus singulièrement dans
le régime du sol. Au-delà de la question foncière, le problème
de fond demeure économique:échappent à l'emprise de la coutume
foncière ou mieux des coutumiers fonciers ceux qui ont les moyens
de satisfaire leur cupidité malgré le caractére souvent illégal
de la Procédure (I). Or donc, très peu de jeunes peuvent se libé-
rer de ces contraintes dont seul
le droit - et par voie de consé-
quence le pouvoir politique - est responsable.
Il apparait une
volonté manifeste de ne pas atténuer les rapports de force en
présence.
Est-ce cela qui explique que l'administration, loin
d'appliquer les règles relatives aux régimes d'exploitation du
sol s' é ri g e en" Lévi a t ha n"
par leu r dé na tu rat ion ?
SECTION 2
LA DENATURATION DU DROIT PAR L'AUTORITE ADMINISTRATIVE
Le droit foncier rural
ivoirien, devons-nous le rappeler, est,
malgré quelques imperfections, relativement clair et peut être
l'instrument d'une politique d'installation des jeunes. Il doit,
pour ce faire, être correctement appl iqué par ceux auxquels cette
t â che i nc 0 mbeau x te rm e s d e l a loi, en l' 0 c cu r e nce, les min i st ère s
de l'agriculture et de l'intérieur. Or ces derniers, notamment
le premier, ne font pas toujours une bonne application des règles
régissant l'exploitation du sol. Le Ministère de l'Agriculture,
.
.
avant la création de celui du Développement Rural a initié de
coûteuses opérations d'installation des jeunes - certes toujours
marginales - mais dont le point commun réside, en matière foncière,
dans la mise à disposition d'une partie déclassée du domaine fores-
tier de l'Etat. Les jeunes bénéficient-ils à l'occasion de ces
(1)
Le décret du 16 février 1971 dispose dans son article 7 que
les infractions au décret nO 64-164 du 16 avril 1964 portant
interdiction des actes sous seing privés en matière immobi-
lière sont sanctionnées par une amende de 2.000 à 72.000 F.
et d'un emprisonnement de dix jours à deux mois ou/de l'une
de ces peines seulement.
L'article 2 du même texte indique que les droits coutumiers
sont personnels et ne peuvent être cédés à quelque titre
que ce soit.

78
opérations des titres juridiques d'exploitation prévus par les
textes en vigueur? Si non, sous quel régime sont-il placés?
Et quelles sont les conséquences de ce régime d'exception sur
leur liberté et sécurité d'exploitants? A répondre à ces ques-
tions nous choisirons deux cas parmi les plus significatifs: la
convention pour la cession de lots sur le domaine de BOZlavant
la création du Ministère du Développement Rural
(MDR) et le
cahier type des charges des jeunes ruraux bénéficiant d'une
aide de l'Etat pour leur installation sous l'égide du Ministère
sus-cité.
PARAGRAPHE 1 : DE L'APPLICATION A L'EGARD DES JEUNES DU DROIT
Initié par le Ministère de l'Agriculture et mené par la SATMACI (l),
le projet BOZI visait, entre autres, l'installation des jeunes
de la région de Yamoussokro Bouafle comme chefs d'exploitation
sur des blocs .de culture de café institués sur des terres déclas-
sées. C'est ainsi qu'il a été constitué une Commission d'attribu-
tion et de surveillance des parcelles de BOZI, Commission formée
des autorités politiques, administratives et coutumières des
régions de Bouaflé et de Yamoussoukro (article 1). La 00nvention
qui a pour objet - pour ne citer que celui-là - de "préciser les
droits et obligations des attributaires" dispose en son article 8
que "le droit d'occupation d'un lot est précaire et révocable
pendant les cinq premières années".
Un droit d'occupation n'est pas une autorisation d'occupation
(permis d'occuper) et n'entraîne pas nécessairement un acte admi-
nistratif ; Or la commission, a conformément à l'article 6 de la
(1)
Société d'assistance technique oeuvrant dans
le secteur agri-
cole~ la SATMACI est depuis 1983 un établissement public
placé
sous la tutelle du MDR.

79
Convention, compétence pour lI a ttribuer et retirer les lots ll •
. Il
s'opère en quelque sorte un transfert de compétence de l'au-
torité administrative déconcentrée à la Commission dont les
décisions sont prises à la majorité des voix (1). Si le Ministre
de l'Agriculture est compétent pour créer une telle commission.
il demeure que les prérogatives attribuées à celle-ci sont exces-
sives et heurtent non seulement l'esprit, mais également la lettre
du décret 71-74 du 16 février 1971. De surcroît l'article 8 de
la convention ajoute que Ille droit d'occupation peut être défi-
nitif ... les propositions d'attributions définitives de la Com-
mission devront être approuvées par le Ministre de l'Agriculture
qui sanctionnera son accord par un arrêté d'attribution défini-
tive du lot ll •
La terminologie employée est pour le moins nébuleuse. Qu'est-ce
qu'un arrêté d'attribution définitive? La convention ne le dit
pas. S'agit-il d'une concession provisoire? Certainement pas,
puisque celle-ci est instruite par le Sous-Préfet et non par
une Commission.
Pourquoi Ille bénéficiaire à titre provisoire ou
définitif d'un lot ll doit-il obtenir III 'accord préalable de la
Commission avant de Ille transmettre à ses parents ou héritiers ll ?
En toute hypothèse, la violation de la règlementation foncière
rurale, déjà insatisfaisante - n'est pas de nature à favoriser
l'accès des jeunes à la terre,
(2).
Et il est dommage que ce
.
.
soit l'autorité administrative qui porte la responsabil ité
de ces tortures juridiques. Le jeune Ministère du Développement
Rural
échappera-t-il à ces errements?
B) h~_~~b1~~_9~~_~b~~g~~_~~~_j~~~~~_~~!~~~_~~~~f1~j~~!_~~~~~
~19~_~~_1~i!~!_p~~~_1~~~_!~~!~1!~!1~~
L'article 1 de ce document dispose: IIS 0US l'égide du Ministère
du Développement Rural, il est confié aux structures d'interven-
(1)
Cette commission dont nous récusons la légalité ne doit pas
être confondue avec celle non moins litigieuse créée par cir-
culaire en 1968 et reprise en 1984.
Cf.
supra p.
61 et suive
(2)
Les discussions que nous avons eues avec certains fonction-
naires du Ministère de l'Agriculture semblent indiquer que
ces violations sont hélas de bonne foi.

80
tion en milieu rural
la maîtrise d'oeuvre des opérations d'insta-
lation des jeunes exploitants modernes" ceci en vue d'une "uti-
lisation rigoureuse" de l'aide que l'Etat accorde à ces jeunes.
Cette préoccupation incontestablement justifiée devrait permettre
de minimiser les coûts d'installation et de responsabiliser da-
vantage les jeunes. Mais là n'est pas l'objet de notre propos.
Sous quel régime juridique le jeune exploitera-t-il sa parcelle?
La réponse nous est donnée par l'article 6 : "En cas d'attribu-
tion d'un lot par une structure locale, ou par l'administration,
le droit d'occupation est réputé précaire et révocable". Curieuse
disposition car hormis l'autorité administrative territorialement
compétente aucune "structure locale" ne peut - en droit - attri-
buer un immeuble rural. Le Ministère du Développement Rural
voudrait-il encourager les transactions illégales? Nous n'osons
le croire. Il est pourtant indiqué que même lorsque la parcelle
aura été attribuée par l'administration, le droit d'occupation
sera réputé précaire et révocable pendant cinq ans.
Il n'existe
dans ce cas que deux hypothèses :
- Nous sommes en présence d'un permis d'occuper. Dans ce cas, la
disposition suscitée - et du reste superfétatoire - est applica-
b1 e,
- Le jeune bénéficie d'un arrêté de concession provisoire qui, à
la différence du permis d'occuper nia pas un caractère précaire
et révocable.
En sus de ces aberrations juridiques, l'article 7 indique que ce
droit d'occupation peut faire l'objet d'une concession définitive
avec l'accord du comité villageois, Comité manifestement inconnu
du décret du 16 février 1971.
Faut-il le rappeler, le Ministère du développement rural n'a mal-
heureusement aucune compétence en matière foncière,mais cette igno-
rance du droit foncier rural se justifie-t-elle pour autant (1)~
(1)
Bien entendu les dispositions foncières du Cahier des charges
sont restées théoriques.

81
L'exemple du projet BOZI (Ministère de l'Agriculture) et celui
du cahier type des charges des jeunes ruraux (Ministère du
Développement Rural) montre qu' il
n' y a pas que l a coutume qui
fasse entorse à la bonne application du droit positif et à partir
de là,l'accès des jeunes au foncier.
Il s'en suit dès lors des
conséquences sur la liberté et la sécurité de ces exploitants.
P~~~§~~P~É_? : QÉ~ __ ~ff~I~_QÉ_~~_QÉ~~!~~~!!Q~_Q~_Q~Q!!_~Q~!!!E
SUR LA SECURITE ET LA LIBERTE DU JEUNE EXPLOITANT
A)
~~~_~~~~~!~~_p~~~~!~~
Cette insécurité résulte non seulement de la nature juridique du
titre d'exploitation - permis d'occuper dans le cas de l'opéra-
tion BOZI - mais également des prérogatives exorbitantes des
partenaires des jeunes exploitants.
Hormis donc l'instabilité liée au titre d'exploitation.
, la
commission dans le domaine BOZI a le pouvoir d'attribuer et reti-
rer les lots dés lors que IIl'attributaire ll viole une de ses obli-
gations, étant entendu que IItrois avertissements équivalent à
une annulation d'attribution du lot".
Les dispositions du Cahier type des charges élaboré par le MOR
font étrangement penser à la convention de BOZI en ce qu'elles
prévoierrt (aussi) une commission chargée d'ex-aminer les litiges
nés de l'application du cahier des charges. Cette commission,
peut, entre autres prérogatives, exclure le défaillant récidi-
viste. Si le bénéficiaire de l'aide est propriétaire foncier,
elle ne peut que l'exclure du programme national d'aide à l'ins-
tallation (I). Aussi bien dans le cadre de l'opération BOZI
(1)
S'agit-il du propriétaire foncier en droit coutumier ou en
droit positif ? Q~ôiQu'il
en soit~ et dans un cas comme dans
l'autre~ il est peu probable qu'un Jeune soit "propriétaire
foncier".
Cf.
supra.
Encore faut-il
rappeler qu'il n'existe
à ce jour aucun programme national.

82
que dans le "programme" du MDR, l es jeunes expl oi tants sont à
la merci d'une commission aux prérogatives exorbitantes dont les
décisions peuvent être sans appel
(1). A-t-on choisi la formule
idéale pour encourager les jeunes à intégrer le secteur agricole?
Nous ne le pensons pas et au-delà de ces deux exemples, c'est
toute une éthique qu'il
faudrait revoir et même combattre. En
sus de ne pas assurer la sécurité d'exploitation, c'est également
la liberté du jeune qu'elle limite.
B) ~~~_!2~~~!~_!j~!!~~
Les jeunes qui bénéficient d'une quelconque aide de l'Etat ont
en retour leur liberté d'exploitant atrophiée.
Il
ne leur appar-
tient pas de déterminer le type de cultures à pratiquer; ils
n'ont pas non plus la possibilité d'ad~pter les bâtiments à leurs
besoins et goOts.
Il leur est interdit de vendre la production
en dehors des circuits de commercialisation érigés par les socié-
tés d'intervention. Bien plus, sont prohibés les "troubles,
grèves" sous peine de déchéance. La liste des interdictions est
bien longue ~ais point n'est besoin de les citer toutes. Qu'il
nous soit permis d'écrire que ces conventions et cahiers des
cha r gest r ans f 0 rm e nt l' exp loi tan t a gri col e en man 0 eu vr e qui à
aucune initiative n'a droit. En toute hypothèse, ces conditions
d'exploitation sont ~n contradiction avec les ambitions profes-
sionnelles de ces jeunes qui veulent avec leurs bras et leur
coeur vivifier l'agriculture ivoirienne. Le pouvoir pol itique
gagnerait à les écouter un peu plus afin de leur faire jouer
pleinement le rôle qui devrait être le leur.
CONCLUSION AU CHAPITRE II
L'obstacle essentiel à la bonne application du droit foncier
rural est indubitablement sa méconnaissance aussi bien par
(1)
Le MDR serait-il moins démocrate que le Ministère de
l'Agriculture? On pourrait le croire puisque la commission
prévue par celui-là prend des mesures dont on ne peut relever
l'appel

83
l'autorité administrative que par la population rurale. Pourtant.
celle-ci est essentiellement composée de jeunes qui n'aspirent
qu'à disposer librement et en toute sécurité du premier capital
de l'exploitation agricole: la Terre. Des campagnes de vulga-
risation devraient être entreprises pour que les terres soumises
au statut coutumier soient libérées. Une telle entreprise suppose
que l'Etat ait la maîtrise foncière d'un territoire très peu
cadastré.

84
CHAPITRE 3 : LA TRANSMISSION DE L'EXPLOITATION AGRICOLE,
OBSTACLE A L'INSTALLATION DES JEUNES AGRICULTEURS?
Les développements précédents ont mis en exergue les difficultés
rencontrées par les jeunes pour accéder à un immeuble rural non
bâti aux fins de l'intégrer dans un processus de la production
agricole. Mais les régimes d'utilisation du sol ainsi étudiés
ne constituent pas les seuls moyens de mettre à la disposition
du jeune exploitant le sol qui est nécessaire à son activité.
Il est en effet possible de favoriser l'installation des descen-
dants de l'exploitant agricole dans le cadre des régimes de droit
positif (1). Cependant vu que la quasi totalité des terres est
jusqu'à ce jour sous l'emprise théorique de ces règles, le droit
positif général devrait venir au secours du droit positif spécial
Dans un cas comme dans l'autre, la philosophie guidant les règles
relatives à la transmission de l'exploitation agricole (2)
(1)
C'est-à-d,il'e,
te"LSqu'ils l'ésultent du décl'et 71-74 du 16
févl'i el' 1971.
(2)
L'intitulé de notl'e chapitl'e ne doit pas pl'êtel' à confusion.
Notl'e objectif n'est pas d'étudiel' de façon exhaustive les
diffél'entes techniques jUl'idiques,
en la matièl'e, mais de
voil' si l'économie génél'ale du dl'oit de la tl'ansmission de
l'exploitation agl'icole est susceptible de contl'ibuel' à l'ins-
tallation en tant que chefs d'exploitation de jeunes agl'icul-
teul's.
De SUI'CI'O~t,
dans le contexte ivoil'ien, il s'agit moins de
tl'ansmission entl'e vifs qu'à cause de mOl't.
c'est poul'quoi
nous insistel'ons davantage SUI' la dévolution successol'ale,
dans la meSUl'e où la tl'ansmission entl'e vifs constitue une
A
technique peu utilisée, du moins dans le monde agl'icole.
Nous
l'envoyons le lecteul' désil'eux de s'infol'mel' SUI' le dl'oit
successol'al ivoil'ien à l'excellent ouvl'age de Mme OBLE que
nous avons lu avec beacoup d'attention.
Mme OBLE "Le dl'oit des successions en Côte d'Ivoil'e.
Tl'adition
et model'nisme".
Les nouvelles éditions afl'icaine~, Abidjan,
1984.

85
peut-elle contribuer à une politique d'installation des jeunes?
Cette question fera l'objet de la section 1.
Mais puisque le droit ne rend pas toujours fidèlement compte de
la réalité, il nous faudra voir dans une section 2 comment dans
la réalité quotidienne s'organise la transmission d'une exploi-
tation agricole et ses effets sur l'émergence des jeunes exploi-
tants.
SECTION 1 : L'INSTALLATION DES JEUNES AGRICULTEURS ET LA
TRANSMISSION DES DROITS D'EXPLOITATION AGRICOLE EN DROIT POSITIF
Par souci de clarté, nous distinguerons les cas où l'agriculteur
bénéficie d'un contrat d'exploitation - le co-contractant étant
l'Etat - de celui plus répandu où il exploite sans contrat.
PARAGRAPHE 1 : LE PROBLEME DE LA REPRISE PAR LE JEUNE DU CONTRAT
D'EXPLOITATION
Il nous faudra au préalable définir succintement les concepts
d'exploitation agricole et de transmission.
A) P~~_~~!j~~~_~~~~pl~j!~!j~~_~9~!S~!~_~!_~~_!~~~~~!~~!~~
M. BOBIN a pu écrire, s'agissant de l'exploitation agricole,
qu'elle "est l'organisation par l'homme, de la mise en valeur
d'un sol à vocation agricole avec l'aide d'un matériel et éven-
tuellement d'un cheptel vif, en vue de la production orientée de
récoltes et de biens de consommation. Cette organisation doit
revêtir le caractère d'une entreprise au même titre que toute
entreprise commerciale ou industrielle".
(1).
Les recensements agricoles tels qu'ils sont organisés en Côte
d'Ivoire définissent l'exploitation agricole comme "toute terre
utilisée entièrement ou en partie pour la production agricole et
qui, considérée comme une unité technique, est exploitée par
une personne seule ou accompagnée d'autres personnes, indépen-
damment du titre de possession, du mode juridique, de la taille
(1)
Georges BOBIN : Fftploitation agricole et pdlitiqt.lé des structures,
Librairies toohniques, 1969, p.3. Nous S017U1les toutefois d'accord avoo
M. DELNOY pour dire que "cela ne signifie pas qu' ex;ploitation agricole
et entreprise industrielle ou c017U1lerociale doivent se confondre, l'une
présente par rapport à l 'autrae des diverogences qu'aucune politique ne
peut ignorero". P. DELNOY, 9p. cit. P
34·
--..
'-
~..

86
ou de l'emplacem'ent"(l). En outre, une personne dont l'activité prin-
cipale n'est
pas
l'agriculture mais
qui
cultive au moins une
parcelle ou
pratique l'élevage a
été considérée comme chef
d 'exploitation.
Définition
bien
simpliste qui
masque l'hétérogénéité du monde
agricole puisque l'agriculteur
est
ici, celui
qui
se consacre de
quelque manière que ce soit à
l'agriculture et l'exploitation
agricole l'endroit où
l'on
produit à
quelque titre que ce soit
des
biens de nature agricole.
Pourtant, au-delà des considérations
agronomiques ou
géographiques,
"une classification
économique
et sociale des
exploitations agricoles.
présente un double intérêt
elle contribue à repérer
les
problèmes relatifs
à chaque type
d'agriculture ou
chaque catégorie d'agriculteurs
et
par consé-
quent permettrait de diversifier
"la
législation
et
la
politique
agricole
selon
les
besoins
et les difficultés de chaque type ou
d e cha que ca té go rie"
(2).
Led roi t
i v 0 i rie n gag n er a it à te n i r
compte de cette classification
(3)
pour une meilleure orientation
(1) Recensement national de l'Agriculture, Ministère de l'Agri-
cu l tur e,
1975.
(2)
QUADEN C.
"Parité pour l'agriculture et disparité entre
agriculteurs",
1973.
Faculté de droit,
Liège, p.
80
(3) Pourtant,
nombreuses "sont les études qui ont été effectuée"s
sur la question.
On citera, à titre d'exemple:
- LA VASSIER E (P.
de)
: "Typo logie des exp lo i ta tions agrico les
en zone forestière de C5te d'Ivoire,
premiers résultats".
CIRES,
nO 9,
Université d'Abidjan.
- CHA VEAU et RICHARD : "Apports et limites de l'analyse des
exploitations agricoles en économie de plantation villageoise.
Essai de confraontation intera-disciplinaire". Abidjan, ORSTOM~
PETIT BASSAM.
- S.
AFFOU YAPI et J.M.
CASTELLU:
"La bourageoisie des plante~
un mythe à décomposer".
Etat et bourageoisie en Côte d'Ivoire
(sous la diraec tion de Y. A.
FA UR E et J: F.
MEDARD)
Karatha la, 1982.
Il faut donc craoirae que le pouvoira politique préfèrae ignoraera
les traavaux des cheracheuras~ ce qui est bien une caraactéraistiqu~
des pays sous-développés.

87
des r~gles visant à installer les descendants de
l'exploitant
agricole.
Cette installation ne peut s'effectuer que selon des
techniques de droit
privé, notamment la transmission entre vifs
ou à cause de mort.
En France, le législateur il
progressivement transformé l'écono-
mie du droit des baux ruraux en prévoyant des mesures spécifiques
favorisant l'installation des descendants du
preneur ou du
bail-
leur (droit de préemption, droit de reprise ... )
(1).
En Côte
d'Ivoire,
le droit de l'exploitation du sol
prévoit-il
des
mesures analogues?
Avant de répondre à cette question il
semble indispensable de
rappeler qu'en droit
positif ivoirien,
les terrains ruraux sont,
hormis les exceptions prévues par la loi, propriété de l'Etat qui
les concède à des
particuliers aux fins
d'usage agricole, contrai-
rement au droit français où la propriété individuelle demeure le
principe sacro-saint.
Conséquemment,si dans le deuxième cas le
droit de propriété peut se transmettre d'ascendants à descendants,
dans le premier cas
il
reste presque toujours aux mains de l'Etat
qui
ne consent à céder qu'un droit de jouissance transmissible (2).
B) ~~_!~~~~~i~~i~~_~~_~:~~pl~!!~!!~~_~9~lS~!~_~~~~_!~_~~2
1!_9~
!:~~p!~i!~~i~~_9~~_!~!r~1~~_r~!~~~
Par droit d~ l'exploitation des terrains ruraux qu plus simplement
droit de l'exploitation du sol, nous entendons l'ensemble des ré-
gimes juridiques d'utilisation du sol, tels qu'ils résultent du
décret n°
71-74 du 16 février 1971.
Pour la clarté de l'exposé, nous les envisagerons successivement
en omettant du champ de notre étude le permis d'occuper et la
(1)
On pourra lire l'article de G.
CHESNE et E.N.
MARTINE:
"Le
statut du fermage et l'installation des jeunes agriculteurs".
paru dans
la revue de droit rural nO 77
(nO spécial) mai-juin 197.
On appréciera également l'excellent ouvrage de M.
Christian
DUPEYRON :"Droit agraire"XParis, Economica,
1985.
Enfin,
1
l'article suivant sera d'une utilité certaine: P.
OURLIAC
et M.
JUGLART :
"Le nouveau statut du fermage" J.C.P.,
1975
I ,
2732
(2)
Le droit civil distingue entre la transmission et la successior
celle-ci ne s'ouvrant qu'à la mort d'une personne tandis que
celle-là désigne la transmission d'un droit ou d'un bie~
titre aratuit.
onéreux).

88
concession définitive. Le premier, acte unilatéral de l'adminis-
tration, est accordé à titre précaire et révocable et ne consti-
tue pas un contrat d'exploitation; quant à la concession
défi-
nitive, plus proche de la propriété, elle est régie par le droit
général des successions.
1. La concession provisoire
Le problème de la transmission des droits du concessionnaire
peut sembler à priori sans intérêt dans la mesure où le droit
des contrats administratifs a depuis fort longtemps résolu la
question (1).
Pourtant,l'intérêt nous paraît double
- En premier lieu, il s'agit de concevoir des dispositions
déro-
gatoires au droit commun dans le cas où l'occupant provisoire dé-
cêderait dans le délai de cinq ans.
- La deuxième raison est que les descendants du concessionnaire
peuvent lui succéder non seulement pour incapacité de tout ordre
mais également en cas de vieillesse, surtout si l'autorité admi-
nistrative proroge le délai de cinq ans.
Rappelons que le principe en matière de concession provisoire
est que l'occupant ne peut céder, à peine de déchéance, ses
droits sans l'autorisation de l'autorité administrative compé-
tente et qu'en cas de décès, c'est le droit général des succes-
sions qui est appl icabl e (2).
Le particularisme du système ivoirien réside dans ce que la
concession d'un immeuble à usage agricole par l'Etat constitue
le régime de droit commun et la première pierre de l'édifice
foncier rural.
L'arrêté du 9 juillet 1936 qui règlemente l'aliénation des ter-
rains domaniaux prévoit-il des dispositions particulières en vue
(1)
Voir A.
de LAUBADERE ...
op.
cit.
(2)
En France,
l'article L.411-2 du statut des baux ruraux prévoit
que le statut n'est pas applicable "aux conventions conclues
en application de dispositions législatives particulières
ainsi qu'aux concessions et conventions portant sur l'utili-
sation des
forêts ou des biens soumis au reg~me forestier,
y compris sur le plan agricole ou pastoral".

~9
d'installer les fils et descendants du concessionnaire? Il nlest
pas superflu de reproduire in extenso l'article 37 uu texte
IIToute substitution de personne ou de société, tous transferts
de droits relatifs aux terrains concédés à titre provisoire ne
pourront avoir lieu, à peine de déchéance, que sur autorisation
du Lieutenant-Gouverneur (1) qui décidera après production de
tous les éléments d'information nécessaires, notamment en ce qui
concerne les impenses faites par le cédant, les conditions de
la cession et la capacité financière du nouveau concessionnaire.
En cas d e déc ès, i les t rés er vé a ux hé rit i ers d ûm e nt qua l i fié s
la faculté de prendre la suite de l'occupation provisoire sous
les conditions imposées au précédent concessionnaire, à charge
par eux de notifier leur acceptation au Lieutenant-Gouverneur (U)
dans le délai d'un an à partir de la date du décès ... 11
Deux remarques s'imposent à la lecture des dispositions de l'arti-
cle 37 :
- le texte prône le principe classique de l'interdiction de céder
une concession domaniale sans requérir au préalable l'autorisation
de l'autorité admnistrative.
- L'administration coloniale n'a pas prévu de mesures particu-
lières visant à installer les descendants du concessionnaire pro-
visoire. Omission qui se justifie à une époque où la terre était
largement disponible d'une part et où les concessions domaniales
.
.
n'étaient accordées - ou sollicitées - que par les colons et
une minorité d'autochtones dits lIévolués ll d'autre part, la popu-
lation indigène dans son ensemble était soumise au régime foncier
coutumier (2).
5'il est devenu classique de dire que par le décret du 15 novem-
bre 1935, l'administration coloniale voulait obtenir la maftrise
foncière de ses territoires, il nlest pas vain de rappeler que
(1)
Lire Ministre de l'Agriculture.
(2)
Cf.
Supra,
la place du jeune dans le droit foncier coutumier
et l'économie de subsistance.

90
les reglmes d'exploitation des terrains ruraux par elle institués
visaient principalement - ou uniquement - la sécurité des tran-
sactions et la stabilité des colons (l).
Un quart de siècle après l 'ére - théorique? - de la colonisation,
le décret non modifié du 15 novembre 1935 ainsi que son texte
d'application - non modifié non plus - font toujours partie de
l'ordre juridique ivoirien à un moment où le problème de l'ins-
tallation de jeunes agriculteurs se pose avec acuité. Conséquem-
ment. le cahier des charges annexé à l'arrêté de concession pro-
visoire ne saurait.sous peine de nullité. édicter des mesures
spéciales favorisant la transmission de l'exploitation aux des-
cendants de l'occupant provisoire. aussi bien avant qu'après la
mort de ce dernier.
Si le législateur ivoirien n'a pas encore suppléé les défaillan-
ces des textes règlementant les concessions, en est-il de même
pour la législation relative au bail emphytéotique?
2. Le bail emphytéotique
Il constitue ,la pièce maîtresse du droit de l'exploitation du sol.
Bien qu'ayant été étudié
séparement du régime de la concession
provisoire (2) il
ne s'en distingue en fait pas en ce que cons-
tituant sa suite logique.
En effet. un concessionnaire provisoire
bénéficiera presque toujour? d'un bail
el)lphytéotique (3). ce
qui ramène la durée de sa présence sur un terrain domanial
à un
minimum de vingt trois ans. Or. écrivions-nous. le droit ne doit
pas (plus) ignorer le sort de ces milliers de jeunes au risque de
les condamner à ne demeurer que des appendices du monde agricole.
Le bail emphytéotique dont la durée peut atteindre légalement
quatre-vingt-dix neuf ans prévoit-il des dispositions particu-
lières aux fins de transmettre l'exploitation aux descendants du
preneur ?
(1)
Sécurité et stabilité renforcées par le décret du 26 juillet
1932 en son article 5.
Cf.
supra.
(2)
Cf.
supra p. 5:1 et suiv.
(3)
Bien entendu,
sous les réserves édictées par la loi.
Cf. supra

91
A cette question, la loi du 25 juin 1902 ne permet pas de répon-
dre par l'affirmative, et pour cause.
En effet le bail emphytéo-
tique de par sa nature (droit réel
susceptible d'ypothèque) et
de par ses caractères (durée, preuve du contrat. prix ... )(1)
constitue un contrat spécial qui ne permet pas d'élaborer un
ensemble de structures favorables à l'installation (2).
En outre,
l'introduction du bail emphytéotique en Afrique Occidentale
Française visait à suppléer les titres de propriété "inconsidé-
rablement octroyés", l'autorité coloniale n'entendant "pas per-
dre de vue ses responsabilités de tutrice à l'égard des collec-
tivités autochtones" dont elle n'entendait pas "hypothéquer
l'avenir"
(3).
Cette "magnanimité" inhabituelle de l'autorité coloniale confirme
l'idée que
le bail emphyt~otique n'est pas le régime idéal susceptible de
favoriser une transmission satisfaisante-de l'exploitation agricole.
Pouvant être accordé pour près d'un siècle, le bail emphytéotique,
séduisant pour la sécurité et la stabilité qu'il offre peut se
réveler à long terme, si on n'y prend garde, une arme dangereuse(4
(1)
Voir supra,
le bail emphyt'otique.
(2)
En France,
le bail emphyt'otique qui constitue le titre V
du statut des baux ruraux rencontre peu de BUCC.S
:
on lui
pr'fère le bail à ferme qui demeure la clef de voûte du droit
de l'exploitation agricole.
(3)
Circulaire du 27 avril relative à l'amodiation des terres
domaniales par bail emphyt'otique.
(4)
La r'alit' est que le bail emphyt'otique est plus souvent
accord' à des urbains -
personnes morales et gros investis-
seurs - qu'à des ruraux.
Sans doute parce que ce sont les
premiers qui sollicitent des titres juridiques d'exploita-
tion.
Imaginons un seul instant que ce soient toujours
les
mêmes qui bénéficient de l'emphyt'ose.
Qu'adviendrait-il
des descendants des "v'ritables" agriculteurs
?

92
En effet, le législateur ivoirien ou plutôt le pouvoir politique
en ne prévoyant pas pour ce bail de si longue durée des mesures
spéciales afin de favoriser l'installation des plus jeunes est
loin de contribuer à une II mu tation de l'agriculture ll (1).
Ainsi donc, l'examen du bail emphytéotique, tout comme celui de
la concession provisoire, nous permettra d'affirmer qu'il n'exis-
te pas un droit spécial de la transmission des exploitations agri-
coles. Cela reviendrait-il à dire que tous les régimes juridiques
d'exploitation - y compris celui de la propriété - sont soumis
au droit des personnes et de la famille résultant des lois de
1964
(2).
PARAGRAPHE 2 : LE PROBLEME DE LA REPRISE PAR LE JEUNE DE
--- -- ---- ---- -- ---- -- - - - - - - - - - - - - - - - - - - -- - - - - - - - - - - - - - - - -
L'EXPLOITATION AGRICOLE
Les développements précédents nous ont permis de nous rendre
compte que la législation sur les contrats d'exploitation du
sol - concession et bail emphytéotique - ne prévoit pas de dis-
positions particulières autorisant le jeune à reprendre ou à
continuer le bail. A défaut donc d'un droit spécial dérogatoire,
(1)
Muta~ion qui devrait se caractériser, entre autres, selon le
Ministre ivoirien de l'agriculture
"par la promotion d'exploi-
tations familiales moyen~es modernes, pro~otion qui corres-
pond au double refus d'une agriculture traditionnelle assis-
tée et d'une agriculture moderne exclusivement à base de
grandes exploitations industrielles".
Or à quoi sert l'actuel
droit d'exploitation du sol sinon à contribuer à l'exode rural
et à désintéresser
les
jeunes de
l'activité agricole?
D.B.
KANON :
"Pour une nouvelle problématique du développement
agricole ivoirien,
R.F.E.P.A:, 1978, pp.
17-28.
(2)
En 1964,
soit quatre ans après l'indépendance,
le législa-
teur ivoirien,
dans
le but d'unifier les statuts civils,
a voté un ensemble de lois dans
le domaine des personnes
et de la famille qui,
tout en faisant
table rase des cou-
tumes,
présente peu d'originalité par rapport au droit
français.
Cf.
J.
OBLE,
"Le droit des successions en C.I." op.
cit.

93
ne faut-il
pas diriger notre regard vers le droit général sur
les personnes ~ Cette démarche nous conduit à aller au-delà
de la transmission du droit résultant du contrat d'exploitation
pour nous pencher sur la question de la transmission de l'exploi-
tation agricole.
Celle-ci peut s'effectuer de deux manières différentes:
- avant la mort de l'exploitant.
- après la mort de l'exploitant.
Dans la première hypothèse. hormis le cas de dispositions légis-
latives ou règlementaires particulières - qu'au demeurant le
droit ivoirien ignore - il ne peut s'agir que de libéralité ou
de vente. Or toute transmission (1) d'un immeuble rural bâti
qui est soumise à la seule volonté du propriétaire. exploitant
ou non, présente peu d'intérêt dans la mesure où le don, notam-
ment d'une exploitation agricole à des jeunes est loin d'être
l'acte juridique le plus répandu.
Qua nt à l a ven te, el l e ne s a urai t ê t r e r ete nue eu
é ga rd à l a
faible capacité financière de la plupart des jeunes candidats
à l'installation. Reste donc le deuxième cas. c'est-à-dire la
transmission s'effectuant en vertu d'une dévolution successorale.
Le seul texte applicable est la loi n° 64-379 du 7 octobre 1964
sur les successions.Il semble que le législateur de 1964 ait tenu
compte de la spécificité de l'exploitation agricole. Cette man-
suétude législâtive peut-elle pour autant contribuer à l'installatio
des jeunes ?
(1)
A ce stade de la réflexion,
i l nous faut lever ce qui peut
parattre comme une équivoque.
En effet si la transmission
du droit. résultant du contrat -
dans
le cas de concession
provisoire et de bail emphytéotique -
entra~ne nécessairement
la mise à disposition de l'immeuble rural,
i l demeure que ce
dernier reste propriété de l'Etat.
Il n'en va pas de même
lorsque l'immeuble rural a fait l'objet d'une concession
dite définitive.
Dans ce dernier cas l'immeuble est,
sous
réserve des clauses restrictives du droit de propriété (Cf.
supra),
transmissible.

94
Une premlere lecture du texte nous autorise à répondre par
lia f f i r mat ive mêm e s i l es dis po s i t ion s pré v0 yan t
1 e r e pris e
de l'exploitation ne sont pas entièrement satisfaisantes
(A).
Cependant, une seconde lecture de la loi de 1964 montre que le
jeune est sacrifié sur l'autel du droit successoral
(8).
A) ~~_~~_!~P!j~~_~~_~~~~p~~j!~!j~~_~~~!~~!~_p~~_!~_~~~~~~~~~!
~~-~~~~p~~j~~~!
Le législateur de 1964 dans son infinie sagesse a tenu à assurer
la continuité de l'exploitation agricole.
En effet l'article 106
i nd i que que "t 0 ut hé rit i e r qui, a nt é rie ur em e ntau déc è s du de
cujus, participait avec ce dernier à l'exploitation d'une entre-
prise agricole, artisanale ou commerciale dépendant des biens de
la succession et susceptible de faire vivre une famille, a la
faculté de se faire attribuer celle-ci
par voie de partage,
après estimation par experts commis".
Noble est le but de l'institution qui cependant peut faire
obstacle à l'émergence du jeune et cela à plusieurs titres.
L'article 106 'ne distingue pas entre les héritiers et vise "tout
héritier" aussi
bien les descendants que les ascendants, les
collatéraux que le conjoint survivant.
Cette attribution est subordonnée à des conditions tenant aussi
b i en au dem and eu r
qu'à l' exp lo i ta t ion.
1.
Les conditions~uises au demandeur
a.
~~_P~!!j~jp~!j~!1_~_~~~~~~~P!j~~
Ne peut solliciter l'attribution de l'entreprise agricole que
l'héritier qui a
participé à l'exploitation de celle-ci. Ainsi,
un quinqua,génaire peut obtenir du juge l'exploitation du de
cujus, même au détriment d'héritiers plus jeunes et donc
plus
valides, pour peu qu'il
remplisse la condition exigée par l'arti-
cle 106 ; le législateur dont le souci de clarté n'est pas la
principale des vertus offre au juge du fond une marge de manoeu-
vre assez importante.
En effet, la condition de participation
édictée par l'article 106 est loin d'être restrictive contraire-

~) 5
ment à ce qu'écrit r·lme aBLE (I). la participation vise-t-elle
les activités d'exploitation ou alors les activités domestiques
C'est-à-dire en définitive tous les travaux s'exerçant sur l'ex-
ploitation agricole ou dans le cadre de l'exploitation agricole?(Z
Doit-on avoir nécessairement exercé des travaux pour satisfaire
à la condition de participation? Un bref regard sur l'article
110 nous invite à repondre par la négative (3).
A l'évidence, plusieurs héritiers peuvent soll iciter l'attribu-
tion intégrale de l'exploitation. Cependant, cette requête est
dans une certaine mesure liée à la capacité financière du deman-
d eur.
b) ~~_p~j~~~~!_~~~~~_~~~l~~
Les co-héritiers non attributaires ont droit à une soulte dès
lors que la reprise porte sur un terrain bâti.
Plus l'exploitation
attribuée sera importante et plus le montant des soultes que
l'attributaire devra verser aux co-héritiers sera élevé.
Il est
dans ce cas peu probable qu'un jeune puisse se faire attribuer
l'exploitation agricole aux fins de l'exploiter personnellement(4),
(1)
Mme OBLE~
op.
cit.
p.
430
(2) Monsieur ANCEY désigne par activités d'exploitation les
"façons cult.urales"
(débroussement~ brûlis ... ) ~ .les "acti-
vités culturales"
(récoltes
.. . )~ les activités d'exploita-
tion.
Les activités domestiques visent les corvées ménagères ..
Cf.
G.
ANCEY Les notions d'activités et d'actifs à l'intérieur
d'une exploitation agricole AMIRA nOl1
octobre 1975;p.20 et su'iv.
3
(3)
L'article 110 à propos du bénéficiaire du contrat de travail
à salaire différé édicte que la participation à l'exploitation
doit être directe et effective, ce qui veut dire a contrario
que la simple participation visée à l'article 106 ne saurait
être réduite aux seules activités d'exploitation et domesti-
que.
(4)
Il
nous faut rappeler que notre étude porte sur les jeunes
désirant faire du métier d'agriculteur leur activité princi-
pale.

96
pour la raison que disposant de moyens financiers insignifiants,
i les t d' emblé e é car t é de lac 0 m' pé t i t ion. an est te nt éd' é cri r e
qu'en matière de successions vertes
en Côte d'Ivoire, ce ne sont
pas les jeunes qui succèdent aux ainés mais les ainés qui se
succèdent. ~1ais vu l'économie des plantations ivoiriennes, l'ex-
ploitation agricole ainsi attribuée est-elle toujours viable?
2. la condition relative à l'exploitation
l'exploitation pouvant faire l'objet d'une attribution intégrale
est celle qui est "susceptible de faire vivre une famille".
Mme aBLE déduit de cette disposition,nébuleuse il est vrai,
"qu'une entreprise ne peut faire l'objet d'une attribution inté-
grale que lorsqu'elle a un caractère familial. Sont alors exclus
les entreprises d'une grande dimension" (1).
Notre sentiment est qu'une exploitation agricole susceptible de
faire vivre une famille n'est pas nécessairement uneexploitation
familiale dans la mesure où celle-ci constitue "une cellule qui
utilise principalement et souvent exclusivement le travail des
membres de la, famille"
(2).
Bien plus, si la conférence de Stresa a, au niveau de la commu-
nauté économique européenne clairement affirmé que l'exploitation
agricole doit rester une entreprise familiale, emmenant ainsi
les différents pays à revoir. leur politique en matière de struc-
tures agricoles (3), il n'en est pas de même en Côte d'Ivoire
où l'importance numérique des micro-exploitations n'est pas de
(1)
Mm e OB L E ~ 0 P • ci t. P • :3 9 3
(2)
P.
MAINE:
"Les exploitations agricoles en France" ~ 1969~
P.U.F.
Collee.
"Que sais-je" c i t ' par P.
DELNOY~ op.cit.p.49
(3)
En France par exemple~ la surface minimum d'installation ne
peut être inf'rieure de plus de
30 %
à la surface minimum
d'installation nationale~fix'e tous les cinq ans par arrêt'
du ministre de l'agriculture" loi nO 80-502 du 4 juillet
1980~ article 43.

97
nature à encourager le jeune à reprendre l'exploitation fami-
liale (1).
En toute hypothèse, la loi de 1964 sur les successions agricoles
notamment en son article 6 est, à cause même de son intelligence
incompatible avec les nouveaux impératifs de l'agriculture ivoi-
rienne. loin de favoriser la reprise par le descendant de l'ex-
ploitation parentale, le texte pré-cité constitue un véritable
goulot d'étranglement pour la jeunesse agricole en devenir.
l'institution d'un contrat de travail
à
salaire différé peut-il
pallier ces insuffisances?
B) ~~!~!!~_~jf!~!~_~!_~~2~!!~~_~~_J~~~~_~~!_l~~~p!~!!~!!~~
P~!~~~~!~
le contrat de salaire différé est une rémunération fictive des
enfants travaillant effectivement sur l'exploitation agricole fa-
miliale et qu'ils peuvent faire valoir au moment du règlement de
la succession.
Il suppose que les enfants ne sont ni associés, ni
salariés.
Mme OBlE a pu écrire que "le contrat de travail à salaire différe
est une mesure d'ordre économique et social dont le but est de
maintenir les héritiers dans l'exploitation de leurs parents"(2).
le droi t
i v0 i rie n, à lad i f f é r e nce du d roi t f ra nç ais (3) perm e t
à tous
les héritiers de bénéficier du salaire différé, ainsi donc aux
(1)
Nous sommes surpris de lire sous la plume de Mme aBLE "Qu'en
droit ivoirien~ un minima(entendez~ surface minimum d'instal-
lation) a ' t ' fix''',qui serait de trois hectares. A quel
texte se r'f.re l'auteur? Nous ne saurionE le dire.
Le recensement national de l'agriculture effectu' il y a un
peu plus d'une d'cennie indique que 94.148 chefs d'exploita-
tion travaillent sur une superficie
inf'rieure à 1~99 hectare.
pour la seule r'gion du Sud~ pourtant la plus prosp.re.
(2)
Mme aBLE~
op.
cit.
p.
396
(3)
Le d'cret loi du 29 juillet 1939 n'offre le b'n'fice du
salaire diff'r' qu'aux seuls descendants de l'exploitant
agricole.

98
ascendants, descendants, collatéraux et même au conjoint survivant.
Cependant,
eu égard à l 'exiguité des exploitations, on peut se
demander si cet élargissement à tous les héritiers est utile.
Une fois de plus, le législateur n'a pas tenu compte des spéci-
ficités de l'activité agricole, nerf de l'économie ivoirienne;
en effet, aussi bien les dispositions relatives à l'attribution
intégrale qu'au salaire différé s'appliquent non seulement à
l'entreprise agricole (1) mais également à l'entreprise artisa-
nale et commerciale.
Quelle est donc la portée du salaire différé ainsi institué sur
le maintien des jeunes à la terre? Au plan théorique, le texte
ne constitue pas un instrument efficace au service d'une poli-
tique d'installation des jeunes agriculteurs. Bien que poursui-
vant plusieurs finalités, le salaire différé institué par le
législateur de 1964 n'a pas pour fonction première de couvrir
le montant de la soulte aux fins d'une reprise intégrale par le
jeune aide familial
de l'exploitation parentale. Si tel était
le cas, il
e~t été plus simple de n'offrir cette possibilité
qu'aux seuls descendants de l'exploitant agricole. A un autre
niveau, plus pratique celui-là, l'institution du salaire différé
présente peu d'intérêt pour au moins deux raisons:
- La première, et sans aucun doute la plus importante, résulte
des bas revenus et salaires du secteur agricole. Si la collabo-
(1)
Nous ne pouvons nous empêcher de nous demander si l'économie
générale des
exploitations agricoles permet d'assimiler ces
dernières à des entreprises.
La Cour de Justice des Commu-
nautés européennes, rejoignant en cela les économistes,
indique que "l'entreprise est constituée par une organisation
d'éldments
matériels,
personnels et immatériels, rattachée
à un sujet juridiquement autonome et poursuivant d'une
façon durable un but économique déterminé.
Qu'on rapproche cette définition
à celle de l'exploitation
agricole retenue en Côte d'Ivoire
(supra,
p.~5 ).

99
ration a duré cinq ans et que le salaire minimum de l'ouvrier
agricole travaillant sur une exploitation de cultures vivrières
est de 140.040 Francs CFA (1983), le bénéficiaire du salaire
différé percevra a peu près 350.000 francs CFA - du moins sur
le principe - ce qui équivaut aux prix d'une parcelle de 7 hec-
tares attribuée par l'Etat en concession définitive.
- La deuxième raison est que la créance salariale est rarement
exigée peut être parce qu'elle "est contraire ~ la mentalité
africaine selon laquelle le fils doit aider le pére sans atten-
dre une rémunération" (1) mais certainement davantage ~ cause
de l'ignorance de la grande majorité.
Pour exercer un droit,
encore faut-il
le connaître.
Socialement fondé, le contrat de salaire différé institué
par le législateur de 1964 est d'une utilité contestable.
Il ne
contribue pas à un rajeunissement de l'aqriculture ivoirienne.
Cette insuffisance n'est pas fortuite.
Elle résulte de la phi-
losophie générale du droit agraire en Côte d'Ivoire,
philosophie
~ laquelle les règles relatives aux successions et libéralités
n'échappent pas. Le problème, il serait vain de le cacher, est
politique et le secteur primaire gagnerait à ce qu'il
ne soit
pas contourné. Mais sans doute le contournera-t-on encore
pendant longtemps car ~ côté d'un droit positif peu favorable
~ la transmission de descendants ~ ascendants de l'exploitation
agricole s'élèvent ou subsistent des pratiques successorales
négatives ~ l'instauration d'un nouvel ordre agricole.
(1)
Mme GBLE, op.
ait.
p. 398

100
SECTION II : INSTALLATION DES JEUNES ET TRANSMISSION DE
L'EXPLOITATION AGRICOLE EN MARGE DU DROIT POSITIF
Le droit ivoirien des successions vertes. piètre instrument au
service d'une pol itique d'installation des jeunes exploitants.
reste à parfaire. Mais encore faut-il
qu'il soit appliqué.
En
effet, la violation quotidienne de ces règles compromet davantage
la mutation de la population agricole et singulièrement des
chefs d'exploitations.
Peut-il en être autrement lorsqu'on sait
que depuis des décennies droit moderne et droit coutumier se
vouent une haine farouche. celui-là tentant sans grand succès
d'étouffer les velléités de celui-ci? (Paragraphe 2).
Mais plus surprenant encore est le comportement de l'autorité
ad min i st rat ive, qui d' es prit l é gal i ste, n' en a po i nt (pa ra gr a ph el).
PARAGRAPHE 1 : LA VIOLATION PAR L'ADMINISTRATION DU DROIT
SUCCESSORAL
Cette entorse au droit positif déjà si peu adapté résulte des
installations autoritaires réalisées par les ministères techni-
ques intervenant en milieu rural
(1).
La nature des relations
entre ces dernières et les candidats à l'installation (A) favo-
rise la dénaturation des règles successorales (B).
A) De la nature des relations entre l'administration et les
candidats à l'installation
Les ministères techniques concernés (Agriculture et/ou Dévelop-
pement Rural
(2) agissent par le biais des sociétés d'Etat dont
ils ont la tutelle.
En fait, ce sont ces sociétés d'encadrement
(aussi bien de production que de commercial isation) qui ont
vivifié l'agriculture (3) à une époque où il fallait produire
(1)
Cf·
infra
(2)
Cf·
supra ?:,.e
(;5)
J.
DUTHEIL DE LA ROCHERE : "L' Etat et le développement
~aonomique de la Côte d'Ivoire".
Paris, Pedone,
1976.

101
pour
produire
(l).
Conséquemment,
il
appartient à ces mêmes
sociétés de réaliser les différentes opérations d'installation
en agriculture
(2).
Fort malheureusement, ces organismes
publics
ne font
pas toujours un bon usage des
prérogatives de
puissance
publ ique qui
leur
sont conférées
par la
loi.
r1algré la termino-
logie mouvante employée dans les documents officiels
(conven-
tion, contrat, cahier des charges
... ) ce sont des
liens contrac-
tuels qui
liènt les candidats à l'installation à ces organismes
publics
intervenant en milieu rural.
les
pouvoirs de direction
et de sanction reconnus au co-contractant du
futur agriculteur
-
qui
vont du
simple avertissement à l'exclusion -
permettent de
reconnaître la
présence d'un contrat administratif.
Mais les pré-
rogatives exorbitantes autorisent-elles
pour autant l'administra-
tion à violer les règles déjà si
imparfaites
des successions vertes
B) ~~_~~~~!~~~!19~_P~~_l~~~!9~1!~_~~~!~!~!!~!!~~_~~_~~~!!_~~~~~~­
~~~~l_~!_~~~_1~~j~~~~~~_~~~_l~1~~!~ll~!1~~_~~~_J~~~~~_~~~1~~l-
teurs
Ces entorses au droit positif ont d1abord été le fait du ~inistère
de l'Agriculture puis de celui du Développement Rural.
1. la violation Ear le Ministère de l'Agriculture du droit suc'ces-
soral
Elle est essentiell~ment le fait des organismes qui
sont.sous
tutelle du ministère précité (3).
l'absence d'une
politique cohé-
rente en matière d'installation des jeunes, le maintien théorique
(1)
Entre la production intensive et l'amélioration des condi-
tions de vie du producteur,
le pouvoir politique a pendant
deux décennies sacrifié celle-ci pour privilégier celle-là.
Depuis 1980 s'amorce un changement -
encore théorique - de
la politique agricole qui désormais devrait réaliser l'harmo-
nie entre les deux objectifs sus-cités.
(2)
Opérations qui ne visaient pas toujours l'installation des
jeunes.
(3)
Ces organismes publics,
sociétés d'Etat puis Etablissements
publics nationaux depuis 1983 ont été_malgré_les excès commis_
avec les paysans,
les véritables artisans du développement
agricole de la Côte d'Ivoire.
Depuis 1984, bon nombre d'entre
eux sont passés sous la tutelle du Ministère du Développement
Rural,
Cf.
Supra.

102
de la règle de droit qui caractérise l'administration ivoirienne
ont souvent conduit ces organismes. dans le cadre des opérations
d'installation qui leur incombaient. à réinventer le droit des
successions.
Ainsi. la convention pour la cession de lots sur le domaine de
BOZI (1) indique-t-elle, dans son article 8 que "le bénéficiaire
à
titre provisoire ou définitif d'un "lot" peut le transmettre,
dans les formes légales. à ses parents ou héritiers, mais avec
l'accord préalable de la Commission".
Toute l 'ambiguTté de cette disposition réside dans le mot "trans-
mettre". S'agit-il du transfert - entre vifs - des droits du
bénéficiaire de la parcelle à un tiers. situation qui justifie-
rait l'accord préalable de la Commission? Ou faut-il
croire que
cette transmission aux parents ou héritiers - distinction au
demeurant superfétatoire - ne s'effectue qu'à la mort du béné-
ficiaire ?
Impossible est la premlere hypothèse parce que, en tout état de
cause, on ne sollicite pas une parcelle pour la céder au moment
où elle doit produire des fruits (2).
La deuxième hypothèse semble plus plausible même si le texte
est incorrectement formulé.
La nécessité d'une autorisation de
la Commission pour le transfert des droits du de cujus à ses
héritiers manque de base légale.
Il
eût été préférable que la
Commission favorisât la reprisé de l'exploitation par les descen-
dants de l'ayant droit (3), ce qui n'est malheureusement pas le
cas.
Les dévolutions successorales s'effectuent anarchiquement au
détriment, cela s'entend, de la mutation recherchée au niveau
des chefs d'exploitation (4).
(1)
Cf.
sup ra "p."1- g
(2)
Même s'il est vrai que les opérations ainsi menées, contraire-
ment aux projets initiaux ne visent pas toujours une première
installation.
(3)
Par cette mesure on contournerait les dispositions des arti-
cles 106 et suive
de la loi de 1964 sur les successions.
(4)
Peut-on véritablement parler de chefs d'exploitation dans
ces opérations dirigistes
?

103
Plus éloquent encore est le contrat sur la culture de l'arabus-
ta
(1) établi entre "le planteur candidat" et la SATMACI. Cette
opération qui à l'origine ne visait pas l'installation des jeunes
n'a pas manqué d'avoir des conséquences sur leur émergence puisque
le cahier des charges en son article 6 prévoit qu'liEn cas d'exclu-
sion, de démission, d'abandon
de parcelle, la parcelle devra être
affectée à un nouvel attributaire.
En cas de décès, cette affec-
tation échoit automatiquement à un héritier du défunt, désigné
par sa famille".
Il est peu probable que la famille illégalement investie de ces
pouvoirs fasse le bon choix c'est-à-dire désigne un descendant
du de cujus aide familial
ou ouvrier agricole sur une exploitation
non familiale (2).
En voulant réaliser l'harmonie au sein des
famille l'autorité administrative non seulement viole le droit
successoral mais pis confère aux ainés un pouvoir insoupçonné
celui de perpétuer la gérontocratie du monde agricole.
Le Ministère du Développement rural
récemment créé et dont l'une
des attributions est l'élaboration d'une politique d'installation
des jeunes agriculteurs évitera-t-il ces maladresses préjudicia-
bles à sa mission?
2. L'attitude du MDR face au droit successoral
Le cahier des charges des jeunes ruraux bénéficiant d'une aide
de l'Etat pour leur installation prévoit en son article 8 qu'lien
cas de décès ou tout autre cas de force majeure se produisant
pendant la période probatoire de cinq ans, les droits d'occupation
sont transférables aux héritiers ou aux parents avec l'accord des
parties concernées"
(3).
Curieuse disposition qui identifie la force majeure à la mort (4);
(1)
L'arabusta est une variété de café.
(2)
Voir supra,
chap.
II,
section 1, paragraphe 1, B.
(3)
Cf.
supra.p.':1.9
(4)
Pourtant en droit civil,
les successions ne s'ouvrent que
par la mort.

104
les régimes juridiques sont-ils pour autant identiques?
Dans un cas comme dans l'autre, le MOR estime que les droits sont
transférables ... avec l'accord des parties concernées, celles-ci
étant le jeune bénéficiaire de l'aide, c'est-à-dire ... le de
cujus en cas de décès, les parents ou héritiers et le MOR.
Nous n'insisterons pas outre mesure sur le caractère baroque de
cette disposition qui rappelle étrangement les pratiques insti-
tuées par le ~1inistère de l'Agriculture.
L'erreur souvent commise par les différentes administrations inter-
venant en milieu rural est de ne pas considérer la politique
d'installation des jeunes dans le secteur agricole comme un tout
cohérent, c'est-à-dire une stratégie qui nécessite un arsenal
ju-
ridique homogène. La bonne volonté de l'autorité administrative
ne suffit pas.
Il lui appartient de faire des propositions afin
d'harmoniser la législation. Nous ne le répeterons jamais assez
le problème est essentiellement politique et non technique. A
défaut d'adapter le droit successoral agricole aux impératifs éco-
nomiques et sociaux de l'agriculture d'aujourd'hui et donc de
demain, on devrait éviter de le torturer. Le pouvoir politique
devrait y veiller qui refuse de prendre des initiatives. Mais
p eut-il y veiller si son inertie participe d'une certaine logique,
celle de maintenir la population agricole dans les labyrinthes
de l'obscurantisme en évitant la promotion des jeunes pour accuser
le droit coutumier de tous les maux?
PARAGRAPHE 2 : LA RESISTANCE DE LA COUTUME AU DROIT SUCCESSORAL
Cette résistance se justifie par le fait que,
plus de deux décen-
nies après l'avènement de la loi de 1964 sur les successions,
le monde rural dans son ensemble est resté attaché aux valeurs
a ne est ra 1es et 1es con f 1 i t s,on sie n d0 ute, son t fort nom br eux (1).
A ce problème général s'ajoute celui plus spécifique de la trans-
mission à cause de mort de l'exploitation agricole.
(1)
Cf.
Mme OBLE,
op.
ait.

105
Le décret 71-74 du 16 février 1971 prévoit en son article 1er
que "toute occupation de terrain (rural) pour
être légale doit
être justifiée par la possession d'un titre ... " (1).
Or, il se trouve que la grande majorité des agriculteurs exploi-
tent les terres sans aucun titre officiel. Interprétant le texte
à la lettre, n'est
on pas autorisé à exciper de l'·illégalité de
toutes ces occupations? Si oui, n'est-il
pas logique que les
successions agricoles s'effectuent en marge du droit positif?
La loi, dit - 0 n, ne pro t è ge que les droi t s lé gal em en tac qui s .
Dans ces conditions, les jeunes seront encore pendant longtemps
soumis au droit coutumier qui ne favorise pas la reprise par eux
de l'exploitation familiale. Conséquemment, et las d'attendre
une majorité sociale et économique sans cesse repoussée, ils
s'en iront vers les villes grossir le nombre déjà trop important
de désoeuvrés. Et cette situation, c'est moins le droit coutu-
mier que le droit positif qui en est responsable.
CONCLUSION AU CHAPITRE III
L'importance du droit successoral dans la politique d'installa-
tion des jeunes agriculteurs ne fait plus de doute. Il est donc
indispensable d'adapter la législation aux objectifs fixés.
Cependant, une telle entreprise resterait vaine si les autorités
administratives violent quotidiennement le droit en vigueur.
Au-delà de ces réformes encore lointaines, sensibiliser l'ensemble
de la population rurale sur la ré-orientation de la politique
agricole demeure le préalable, la condition sine qua non de toute
refonte.
(l)
cf. Supra

106
CONCLUSION A LA 1ERE PARTIE
Les problèmes fonciers liés à l'installation des jeunes tiennent
moins à la raréfaction des terres qu'à l'inadaptation du
droit
de l'exploitation du sol.
Ce dernier, peu connu, gagnerait a être largement diffusé auprès
des populations. L'intérêt général exige une réforme du droit
foncier rural dont la vital ité de l'économie agricole dépend.
Dégager une classe de jeunes agriculteurs à la tête d'exploita-
tions modernes devrait être l'objectif prioritaire à intégrer
dans les plans de développement et qui
verrait sa concrétisation
par les mesures suivantes:
1. Rapprocher davantage le droit de la grande majorité. Comment
obtenir une terre cultivable?
A quelle autorité administrative
faut-il
s'adresser? Nombreux sont les jeunes qui se posent ces
questions hélas sans réponse. Des actions d'information (brochu-
res et autres) devraient pouvoir être conjointement menées par
les Ministèrès de l'Agriculture, du Développement Rural et de
l ' i nf 0 rm a t ion.
2. Rapprocher également le centre décisionnel
pour les titres
d'exploitation des populations afi~ d'alléger la procédure. On
ne sauràit en effet attendre trois années pour obtenir une conces-
sion provisoire.
3. Adapter les régimes juridiques d'exploitation du sol aux néces-
sités de l'agriculture. La concession définitive (régime dit de
pleine propriété) nous semble inutile et même dangereuse pour les
raisons évoquées plus haut. Nous proposons sa suppression pure
et simpl e.
Par contre la concession provisoire et le bail emphytéotique de-
vraient être maintenus sous réserve de quelques aménagements
notamment en ce qui concerne le premier régime. Le cahier des
charges ne devrait plus être standard mais s'établir intuitu
personae . Ainsi on prévoierait des clauses spéciales pour les
jeunes s'installant pour la première fois
(en matière de stabili-
té, sécurité, redevance ... ).

107
4. Recenser toutes les terres cultivables non mises en valeur.
Si au plan juridique ces terres peuvent appartenir à l'Etat,
la résistance des détenteurs coutumiers crée des conflits préju-
diciables à l'installation des jeunes.
Ce recensement devrait se faire par région. Une fois cette opéra-
tion terminée il s'agira pour l'Etat de négocier avec ces pro-
priétaires coutumiers afin d'obtenir "de facto" définitivement
et irrévocablement ces terres. Tâche ardue mais non impossible
pour peu que les notables des villages soient réellement et fran-
chement informés aussi bien de la nature, de l'intérêt que de
la finalité de ces mesures. Les élus
(maires, députés) ainsi
que les chefs de village auront un rôle essentiel à jouer.
5. Coordonner harmonieusement les compétences du Ministère de
l'Agriculture avec ceux du Ministère du Développement Rural. Le
premier auquel
incombe l'orientation de la législation foncière
est compétent pour délivrer les titres d'exploitation du sol
(concession,bail
) tandis que le deuxième est chargé de la poli-
tique d'installation des jeunes agriculteurs. Or l'installation
en agriculture ne commence-t-elle pas par l'acquisition du sol?
C'est pourquoi, à défaut de responsabilité conjointe, une colla-
boration efficace entre les deux Ministères est souhaitable.
Ainsi donc le MDR reçoit les demandes d'attribution des terres
et les transmet au Ministère de l'Agriculture. Doivent être
contenus dans le dossier du demandeur les renseignements suivants
- le site géographique où l'installation doit avoir lieu (indi-
quer le nom de la Préfecture, de la sous-préfecture, du village)
- l'état civil du candidat
- son niveau scolaire
- son activité professionnelle.
Et tout autre renseignement que le MDR jugerait utile.
Led 0 s sie r ne s e ra r e c eva blep a r leM DR qu' à t ro i s con dit ion s
cumulatives:
que le candidat ait moins de 35 ans,
- qu'il s'agisse d'une première installation
que le candidat s'engage à exercer le métier d'agriculteur à
titre principal et à demeurer sur les lieux de production.

108
Le dossier une fois étudié et retenu par le MDR est transmis au
~1inistère
de l'Agriculture dont la compétence est ici liée;
il devra en effet accorder dans la région sollicitée un terrain
rural dont la superficie ne saurait excéder 25 hectares.
Ma i s tout es ces mesures seront dl une effi cac ité limitée
s i l Ion
ne prend pas le soin de réaménager le droit successoral tant il
est vrai qu'une installation sur une exploitation agricole est
moins onéreuse qu'une autre s'effectuant sur un immeuble rural
non bâti. Ce n'est que lorsque le premier facteur de la production
agricole aura été pour le jeune acquis que ce dernier songera à
l'intégrer dans le processus général de production. Mais l'acqui-
sition des autres facteurs ou leur combinaison avec le capital
terre suppose une capacité financière que le jeune n'a souvent
pas.
Il faut donc rechercher les moyens de financer son installation.

109
DEUXIEME
PARTIE
=-=-=-=-=-=-=-=-=
L'ACCES A L'EXPLOITATION AGRICOLE
=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=

110
INTRODUC TION
Aux problèmes liés à la disponibilité de la terre, s'ajoutent
ceux relatifs au financement des autres facteurs de production
à partir desquels l'exploitation agricole verra le jour (1)
:
bâtiments,
plantations, cheptel, matériel
L'exploitation agricole en Afrique noire et singulièrement en
Côte d'Ivoire est une exploitation aux dimensions généralement
modestes, mal gérée et incapable d'assurer efficacement son pro-
pre développement parce que manquant de capitaux propres.
Ainsi donc, le financement du capital d'exploitation est un pro-
blème qui concerne l'ensemble des producteurs agricoles obl igés
de recourir aussi bien aux bailleurs de fonds privés qu'aux éta-
blissements de crédits, les aides internationales et celles de
l'Etat constituant une source non moins essentielle (2).
Plus spécifiques sont les contraintes financières
liées,à l'ins-
tallation des jeunes. Leur insolvabilité au départ, la nécessité
de moderniser leur activité et de les adapter au progrès techni-
que commandent qu'une attention particulière soit accordée à la
recherche de 'capitaux nécessaires à l'installation. L'Etat doit
en être le principal artisan qui s'attachera à dégager des règles
subséquentes, notamment en matière de crédit agricole et de sub-
ventions.
En Côte d'Ivoire, le crédit agricole est étroitement lié à une
institution bancaire, la BNDA (3), bien que depuis la réforme
monétaire intervenue au sein de l'UMOA (4) en 1975, on ne distin-
(1)
Même si le MDR affirme que chaque année 15.000 à 20.000 expJoi-
tations nouvelles se
créent
sans aide particuli~re, chiffres
dont nous devons nous contenter à défaut de pouvoir prouver
le contraire.
Cependant,
on ne sait pas avec précision s'il
s'agit de premi&res installations et si ces exploitations rem-
plissent les normes minimum de viabilité.
Cf.
supra.
(2)
Giordano DELL'AMORE:
"Le crédit agricole dans
les pays
d'Afrique",
Milan,
1973.
(3)
Banque Nationale pour le Développement agricole.
(4)
Union Monétaire de l'Afrique Occidentale dont l'un des
principaux objectifs est d'harmoniser
la politique législa-
tive des banques et du crédit dans
les pays membres.

111
gue
plus entre banques commerciales et banques de développement,
les unes à l'instar des autres pouvant désormais participer au
développement des secteurs jugés prioritaires par chaque Etat.
Pourtant, un peu plus d'une décennie après la réforme, la part
de la BNDA dans le financement de l'agriculture représente plus
de 63 % des crédits globaux du système bancaire à ce secteur (1).
Au-delà de ce chiffre, la question qui se pose est de savoir si
la BNDA, l'unique établissement bancaire spécialisé dans le cré-
dit agricole, prévoit des mesures spéciales en vue de financer
l'installation des jeunes en tant que chefs d'exploitation.
Bien plus, sa structure peut-elle lui
permettre de contribuer
efficacement à la politique d'installation des jeunes dans le
secteur agricole? (chapitre 1).
Mais sans doute le concours de la BNDA a-t-il
été jugé insuffi-
sant ce qui a conduit le Ministère du Développement Rural à éla-
borer une nouvelle stratégie d'aide à l'installation. A défaut
de connaître les résultats de cette refonte de l'interventionnisme
tout au moins peut-on en analyser l'économie et la conformité
avec l'objectif visé (chapitre 2). Alors surgit l'incontournable
question: le seul engagement financier de l'Etat suffit-il à
transformer des jeunes en exploitants agricoles? Cette aide fi-
nancière ne devrait-elle pas être subordonnée à l'indispensable
compétence technique (chapitre 3)?
(1)
Les banques commerciales dans
leur ensemble acceptent les
dépôts mais accordent rarement des crédits aux agriculteurs
contrairement à la BNDA même si celle-ci n'octroie pas tou-
jours les crédits aux plus nécessiteux.

112
CHAPITRE 1
JEUNES
Les règles d'organisation et de fonctionnement de la banque (sec-
tion 1) ont été pendant longtemps un frein à sa contribution
dans la mutation de l'agriculture ivoirienne.
Cependant, les timides réformes récemment opérées semblent témoi-
gner de la volonté du pouvoir pol itique de passer du discours dé-
magogique à l'action (section 2).
Mais l'Etat ne gagnerait-il
pas à associer les coopératives ru-
rales de crédit au financement de l'installation des jeunes agri-
culteurs ? (section 3).
SECTION 1 : REGLES D'ORGANISATION ET DE FONCTIONNEMENT ET LEURS
CONSEQUENCES SUR LE CREDIT EN FAVEUR DES JEUNES
Les critiques les plus communément faites à la BNDA sont relatives
à sa
structu~e. A étudier celle-ci.nous distinguerons d'une part
les règles d'organisation (paragraphe 1) définies à partir de la
législation sur les sociétés à participation financière publique
et les textes instituant la banque et d'autre part les règles
de fonctio~nement (paragraphe 2) qui n'échappent pas à la loi sur
les professions bancaires.
PARAGRAPHE 1 : REGLES D'ORGANISATION
A la nature juridique de la banque (A) nous opposerons son objet
(8) afin de déterminer si l'une et l'autre sont adaptés
au fi-
nancement de l'installation des jeunes.
A) Nature juridique
La loi n° 68-08 du 6 janvier 1968 portant création de la BNDA
stipule en son article 1er qu'lIil est institué, sous
l'appelation
de banque nationale pour le développement agricole, un établis-
sement bancaire d'intérêt national
... 11.

113
Si llobjet de la banque qui est "de promouvoir le développement
agricole de la C6te dl Ivoire" ne souffre d'aucune ambiguTté, on
ne peut pas en dire autant de sa nature juridique, du moins si
l Ion sien tient à la terminologie nébuleuse dont est si friand
le législateur ivoirien qui qualifie la BNDA "d ' établissement
bancaire d'intér~t national".
(1).
Depuis la loi du 5 novembre
1970, notamment en son titre 1, on a pris 11 habitude de regarder
la BNDA comme une société dléconomie mixte (2). Ce texte, qui a
abrogé la loi du 31 juillet 1962 concernant " une catégorie inter-
médiaire" de sociétés, a dégagé deux critères à partir desquels
,
peut être identifiée la société déconomie mixte (3).
- le capital y est parallèlement détenu par l'Etat et ses démem-
brements,
- l IEtat quel
que soit le montant de sa participation y exerce
des prérogatives de puissance publique en matière de contr61e et
de gestion.
Au regard de ces critères,
est-on autorisé à écrire que la BNDA
est une société d'économie mixte?
(1)
Pour une définition de l'établissement bancaire, cf.
infra,
paragraphe 2.
(2) A.
DAUBREY :
La BNDA et le financement du développement en
milieu rural en C.I.
Rev.
jur.
et pol.,
ind.
et coop.
1978, 1
La nécessité, au lendemain des indépendances,
pour les Etats
africains,
souvent confrontésà des problèmes de trésorerie,
d'intervenir dans
les secteurs les plus sensibles des écono-
mies nationales les a conduits à faire appel "aux capitaux
privés et publics dans
le cadre juridique de la société
anonyme"
(M.
SURBIGUET,
cf.
note nO 3).
(3)
"La société d'économie mixte permet une association finan-
cière, administrative et technique d'établissements publics
ou de collectivités publiques et de personnes physiques ou
morales de droit privé,
dans un but d'intérit général".
M.
SURBIGUET :
Les sociétés d'économie mixte dans les pays
en voie de développement.
L:G.D.J.
,
1970.

114
1. La diversité des actionnaires
De 700 mill ions au départ, le capital social de la BNDA s'élève
aujourd'hui à 3 mill iards de francs CFA principalement souscrits
par les actionnaires figurant au tableau ci-après:
r-----"
1978
1986
ETAT
66 ,7 %
66 ,6 %
--------- ---- --- ----------------------- -- ---------------------
BCEAO
8 ,3 %
16 ,9 %
------------- --- -- -- ------------------ - -- ---------------------
CCCE
8 ,3 %
8,6 %
----------- ----- ---------------- -- ----- -----------------------
CCSPPA
16 ,7 %
6
%
Curieusement, la part des organismes (1) non nationaux a augmenté
dans des proportions plus ou moins importantes tandis que celles
(1)
BCEAO : Banque Centrale des Etats de
l'Afrique de l'Ouest qui
revêt la forme
juridique d'un institut public international.
CCCE : Caisse Centrale de Coopération Economique, établisse-
ment public français.
CSSPPA
:
Caisse de Stabilisation et de Soutien des Prix des
Produits Agrièoles, organisme public ivoirien, nerf de l'éco-
nomie agricole,
dont la mission est,
entre autres,
de garan-
tir au producteur ivoirien un revenu minimum en agissant com-
me mécanisme de compensation pour amortir
les fluctuations
des prix mondiaux sur le marché national ivoirien.
La gestion financière de cette institution est,
depuis tou-
jours,
l'objet de bien des controverses.
On estime par exem-
ple cl plus de 500 milliards de francs
CFA,
la différence
entre les recettes officielles déclarées et les recettes
réelles sur une période de cinq ans
(1978 -
1983), information
dont nous ne saurions garantir la fiabilité.

115
d e l ' Et a t e t d e laC ais s e des t a b il i s a t ion a sen s i blem e nt ba i ssé (1 ) .
Ce changement doit-il être interprété comme un désengagement pu-
blic national?
2.
Prérogatives de la---..Quissance publique
Elles sont classiques et résultent aussi bien de la composition
du conseil d'administration où le secteur public est majoritai-
rement représenté que de l'article 3 de la loi du 6 janvier 1968
qui prévoit que Ille contrôle de la banque par la puissance publi-
que sera exercé conformément à la législation en vigueur ll (2).
La réunion de ces deux critères, tels qu1ils résultent de la loi,
nous autorise à qual ifier la BNDA de société d'économie mixte.
(1)
L'Etat, en faisant appel aux capitaux étrangers dans le cadre
de la société d'économie mixte dont i l est le principal
actionnaire vise une aide au démarrage appelée à s'amenuiser
avec le temps,
les capitaux nationaux étant appelés à prendre
le relais.
Ici, cette recrudescence des capitaux étrangers
est d'un illogisme inout.
D'autre part,
l'article 8 alinéa 1 de la loi sur les sociétés
à participation financi&re publique stipule :
"est société
d'économie mixte,
toute société dont le capital social est
pa~tiellement détenu ... par des person~es morales dont le
capital social est détenu en totalité ou en partie par l'Etat
ou des organismes publics nationaux.
Or la CCCE, 4tablissement
public français pour ne citer que cet exemple,
n'entre pas
dans cette catégorie.
Faut-il dans ces conditions soutenir
que la B.N.D.A.
est une société d'économie mixte? Sans doute
faudra-t-il rechercher, dans
le cadre général de la politique
économique ivoirienne,
l'intention du législateur dont le but
n'est certainement pas de prohiber la participation des capi-
taux é tra ng er s.
(2) Aux termes de l'article 16 alinéa 2 de la loi de 1970, "les
sociétés d'économie mixte dont l'Etat,
les collectivités lo-
cales et les établissements publics ivoiriens détiennent sépa-
rément ou conjointement plus de 50 % du capital
(social)
sont
controlées par la chambre des comptes de
la cour suprême".

116
A ces deux critères M.
DAUBREY en a ajouté un t~oisième
: le but
de la participation de l'Etat ne saurait se limiter à la réali-
sation d'un placement. c'est-à-dire qu'il
doit poursuivre une
mission d'intérêt général.
3. Mission de la BNDA
La BNDA est, selon l'article 3 de ses statuts. IIhabi1itée à appor-
ter son concours technique ou financier pour la réalisation de
tout projet de nature à promouvoir le développement rural de la
Côte d'Ivoire. notamment en matière de production agricole. ani-
male ou forestière. de pêche ou d'artisanat rura1 11
(1).
Statutairement, la BNDA aurait. dans une certaine mesure, une
mission d'intérêt général
(2) résultant du texte constitutif et
non de la loi sùr les sociétés à participation financière publi-
que, mission qui, en toute hypothèse, est incompatible avec la
recherche exclusive du profit. ~'ais la nature juridique de l'ins-
titution - société d'économie mixte - n'étant pas la plus impor-
tante. nous ne saurions arrêter là notre réflexion. Sans récuser
l'intérêt que' revêt toute qua1 ification juridique, nous pensons
qu'elle n'a réellement de portée qU'à partir d'une appréciation
dynamique et non figée.
Cette préoccupation devrait. selon nous.
habiter tout chercheur s'intéressant aux institutions juridiques
a f ri ca i ne s t r o'p sou ven t déc rit e s plu s qui é t ud i é e s d-a nsun con tex t e
socio-po1itique où la règle de droit. établie pour être violée.
n'accomplit pas sa véritable fonction: contribuer au déve10ppe-
men t e n sem e t tan tau s e r vic e d e 1a ma j 0 rit é, de l ' i nt é r êt gé né -
ra1
(3).
(1)
Cette disposition est,
à quelques mots près,
la même qui dé-
termine l'objet de la Caisse Nationale de Crédit Agricole
du Burkina Faso
(ex Haute Volta).
(2)
C'est sans doute pour cette raison que la loi de création
la qualifie d'établissement bancaire d'intérêt national
appelation que la réalité tend à démentir.
(3)
Ces développements nous ont été inspirés par l'article de
M.
Roger GRANGER :
"Pour un droit du développement dans les
pays sous-développés" in dix ans de conférences, d'agrégation,
études de droit commerciales offertes à M.
HAMEL, Paris, Dallo~
1961, p.
47 et suiVe

117
C'est pourquoi la question suivante mérite d'être posée: la
composition et la répartition du capital social, l'objet même
de la banque sont-ils conformes ou tout au moins compatibles avec
l e f -j na nc em e nt de l' i ns ta l lat ion de mil lie r s de jeu ne s a gr i cul -
teurs ?
B) De l'adaptation de la répartition du capital social et de
l '0 bjet a u fin a nc em e nt de l' i ns ta l l a t ion des jeu ne s
Aujourd'hui, un peu plus du quart du capital social de la BNDA
est dé t e nu pa r deux pers 0 nne s pub l i que s non na t ion ale s : laC CC E
et la BCCAO (1) à concurrence de 25,5 %. Cette intervention dans
le capital social conduit nécessairement ces sociétés à jouer
un rôle prépondérant dans la mise en oeuvre et l'exécution des
programmes de la BNDA, non seulement par le biais de leurs admi-
nistrateurs (2), mais également et peut être surtout par l'influ-
ence qu'elles peuvent exercer du fait de leur expérience et de
leur savoir faire. Or, l'intérêt de ces actionnaires non nationaux
n'est pas toujours conforme aux impératifs économiques de l'Etat
ivoirien.
En effet, si la distribution du crédit à des personnes
morales publiques ou privées spécialisées dans la production ou
la commercial isation des produits agricoles a souvent réalisé la
convergençe des intérêts en présence (3), il e!l est autrement
des prêts d'investissement et d'équipement octroyés par la banque
(1)
Respectivement Caisse Centrale de Coopération Economique et
Banque Centrale pour les Etats de l'Afrique de l'Ouest.
Pour
les autres actionnaires, voir infra.
(2)
La BNDA est administrée par un Conseil d'Administration de
douze membres, chaque souscripteur disposant d'au moins un
si.ge.
Aujourd'hui, les
principaux actionnaires sont au nombre
de 6.
(3)
Cette orientation du crédit a été à la base du développement
de la production agricole longtemps tournée vers les cultures
de rente.
Cet âge d'or a été bénéfique aussi bien à l'Etat
- grâce à l'action de la caisse de stabilisation - qu'à la
BNDA.

118
aux
petits agriculteurs
(1).
Mais sans doute faut-il
condamner
l'inertie de l'Etat qui.
en n'adaptant pas les ressources et
l'objet de la
banque au financement de l'installation des jeunes.
contribue lui-même à l'essoufflement de l'agriculture.
Si
l'objet
de la
BNDA ne se limite pas à un
placement.
il
n'en demeure pas
moins
imprécis
parce que général.
Qu'est-ce qu'un "projet de
nature à
promouvoir le développement rural
de la
Cô'te d'Ivoire"?
Il
peut s'agir aussi
bien de la construction en milieu rural
d'une usine de transformation de produits agricoles que de l'amë-
lioration de l'habitat.
Or l'installation des jeunes suppose un
ensemble de mesures structurelles
précises et cohérentes
parmi
lesquelles le crédit occupe une place importante.
Une réorienta-
tion des objectifs de la
BNDA devrait intégrer le principe des
prêts bonifiés au
profit des candidats à l'installation sur les-
quels les contraintes économiques spécifiques à l'agriculture
(1)
Il
est constamment reproché à ces petits agriculteurs -
souvent non scolarisés -
de considérer les prêts octroyés
comme des dons.
Pourtant,durant les premiers exercices de la
BNDA
(1968-69 et 1969-70), les impayés ne s'élevaient qu'à
0,17 %.
La vérité est que la BNDA n'a jamais véritablement
contribué à l'élévation du pouvoir d'achat de ces "petits",
ses interventions étant réservées "en priorité aux opérations
qui,
visant l'accroissement quantitatif et qualitatif de la
production,
reposent sur des techniques culturales avancées,
l'utilisation de matériel végétal sélectionné . . . ".
(A.
DAUBREY, ancien directeur général de la BNDA, op.
cit.
p.
465).
Le procés de l'ancien maire de la ville d'Abidjan,
traduit
en justice par la BNDA en sa qualité de PDG d'une société
de négoce, débitrice de ladite banque a
stupéfait
l'opinion
publique :
le contentieux portait sur plus de quatre milliards
de francs
CFA, somme largement supérieure au capital social
de la BNDA et qui équivaut à peu près à 1/6ème des prêts
octroyés durant l'exercice 1984/1985.

119
pèsent trés lourdement. Cette nécessaire réforme commande
un
interventionnisme dans la mesure où c'est la bonification de
l'Etat qui
permettra de réduire le taux d'intérêt effectif appli-
qué aux jeunes emprunteurs (1). Cependant, cette réforme suppose
un préalable: une redéfinition des objectifs statutaires et des
priorités de la BNDA dont certaines règles juridiques de fonc-
tionnement font entorse au financement de l'installation des
jeunes.
PARAGRAPHE 2 : REGIME INSTITUTIONNEL - REGLES DE FONCTIONNEMENT
ET FINANCEMENT DE L'INSTALLATION
Nous distinguerons, par souci de clarté, les règles générales
de fonctionnement
(B) de celles qui sont relatives au régime
institutionnel
(A).
A) De l'adaptation du régime institutionnel à la mission de la
Banque.
Il résulte de la nature juridique de la BNDA, établissement ban-
caire d'intérêt national aux termes du texte constitutif et régi
par la loi relative aux sociétés à participation financière pu-
blique. Cette loi, en son article Il, stipule que "les sociétés
d'économie mixte sont soit des sociétés anonymes~ constituées
suivant les règles du droit commun, soit des sociétés de type
particulier dont la forme est définie par le décret de création".
Cet encadrement juridique d'une relative précision fait echo aux
statuts de la BNDA qui fixent, en leur article 1er le régime
applicable à la banque: "la banque nationale pour le développe-
ment agricole ... est régie par le droit commun des sociétés par
actions, sauf dérogations des présents statuts.
Elle est soumise,
(1)
En France,
le principe des prêts bonifiés est posé par Za loi
nO 46-1181 du 24 mai 1946 relative à l'attribution de prêts
d'installation du crédit agricole mutuel aux jeunes agricul-
teurs.

120
en outre, aux dispositions de la loi
portant réglementation du
crédit et organisation de la profession bancaire et des profes-
sions s'y rattachant".
La BND A est,.e u
é ga rd à ses st a tut set par a pp lie a t ion de lia r t i -
cle 17 de la loi sur les banques, une société anonyme d'économie
mixte (I).
La banque peut-elle dans cet environnement institutionnel distri-
buer efficacement le crédit aux jeunes?
Malgré une forte participation financière du secteur public, on
peut douter de la mission de la BNDA à l'égard des premières
installations (2). L'eût-elle voulu qu'elle ne saurait l'accomplir
En effet, banque de développement jusqu'en 1975, la BNDA est
depuis cette date une banque comme les autres. Cette réforme ban-
caire a-t-elle eu ou pourrait-elle avoir des incidences sur la
politique de crédit de la banque? Répondre à cette question nous
conduit à apprécier la mission de la BNDA avant et après la loi
de 1975.
1. La BNDA et la loi du 4 août 1965
La loi du 4 août 1965 organise la profession bancaire en Côte
d'Ivoire et toutes les professions s'y rattachant. L'article 1er
du texte donne des établissements bancaires la définition suivan-
te : "Ne sont considérées comme banques, aux termes de ~a présen-
tel 0 i, que les en t r e pris e sou é t ab lis s em e nt s de droi t
pub lie 0 u
privé qui font profession habituelle de recevoir du public ou de
l'administration, ou d'établissements de l'Etat, sous forme de
(1)
Voir supra.
Il
en va de même de la Caisse Nationale de Crédit
Agricole du Burkina dont les faiblesses,
au même titre que
la BNDA ne sont que les conséquences de son régime juridique.
Article 17 de la loi sur les banques :
"Les banques établies
en Côte d'Ivoire ne peuvent être constituées que sous la
forme de sociétés anonymes à capital fixe ou sous forme de
sociétés d'Etat
. . . ".
(2)
La BNDA octroie des prêts dits d'investissements pour les
plantations nouvelles et la modernisation des exploitations.
Seulement,
une nouvelle plantation ne signifie nullement qu'il
s'agit d'une première installation et encore moins que l'ex-
ploitant
est un jeune aux moyens financiers
insignifiants.

121
dépôts ou autrement, des fonds qu'ils emploient soit pour leur
propre compte, soit pour le compte de leurs clients en opéra-
tions d'escompte, en opérations de crédit, ou en opérations
financières".
A cette définition qui permet de ranger la BNDA dans la catégorie
des établissements bancaires s'ajoute ce qui
nous parait être la
clef de voûte du système bancaire ivoirien.
En effet, l'article
2 de la loi établit une distinction fondamentale entre "les ban-
ques commerciales et de dépôt" et les "banques d'affaires et de
développement" les premières
étant seules habilitées à collecter
auprès du public des dépots à vue ou à moins de deux ans (1).
Quant aux deuxièmes
elles ont pour activité principale "la
prise et la gestion de participations dans des affaires exis-
tantes ou en formation et l'ouverture de crédits sans limitation
de durée aux entreprises publiques ou privées, bénéficiant ou
non desdites participations"(2).
La BNDA qui appartient à cette deuxième catégorie de banques a
été créée, rappelons le, dans le but de suppléer les défaillances
du système bancaire classique inapte à distribuer le crédit en
(1)
Aux termes de l'article 4 de la loi,
"sont consid.r.s comme
fonds reçus sous forme de d.pôts,
quelle que soit leur déno-
minat~on, tous fonds reçus, avec ou sans s~ipulation d'int.-
rêts,
de tout tiers, sur sa sollicitation ou à la demande du
d.posant,
avec le droit d'en disposer pour les besoins de son
activit. propre,
sous la charge d'assurer audit d.posant,
un
service de caisse et notamment de payer,
à concurrence des
fonds
se trouvant en d.pôt,tous ordres de disposition donn.s
par lui par chèques, virements,
on toute autre façon,
en sa
faveur ou en faveur de tiers, et de recevoir,
pour les joindre
au d.pôt,
toutes sommes que ladite entreprise ou personne
d.positaire aura à encaisser pour le d.posant, soit d'accord
avec celle-ci, soit en vertu de l'usage".
(2)
Article 2,
B,
alin.a 1 de la loi du 4 août 1965.

122
milieu rural et singulièrement à financer l'installation des
jeunes agriculteurs.
Cette distinction posée par l'article 2 de la loi permet aux
pouvoirs publics, du moins sur le schéma théorique, d'orienter
exclusivement les activités de la
BNDA vers le développement rural.
Cependant, cette spécialisation de la banque et l'interdiction
qui lui est faite de collecter des dépôts à vue ont été fortement
critiquées par les responsables de la BNDA qui rendent le régime
institutionnel coupable de la faiblesse des ressources de la
banque. C'est pourquoi la loi du 5 août 1975 fut fort bien accueil-
lie. Mais aura-t-elle permis ou peut-elle permettre à la BNDA de
mieux accomplir sa mission, notamment à l'égard des premières
installations dans le secteur agricole?
2. La BNDA et la loi du 5 août 1975
Ce texte qui a modifié la loi du 4 août 1965 supprime en ses arti-
cles 3 et 4 la distinction entre banques d'affaires et de dévelop-
pement et banques commerciales et de dépôt, les unes comme les
autres pouvant désormais effectuer toutes opérations bancaires.
Mais si la loi nouvelle permet à la BNDA de mobiliser beaucoup
plus de ressources que par le passé, il faut avouer qu'elle peut
produire des effets non désirés.
On peut craindre, de prime abord, un certain recul de l'interven-
tion de l'Etat dans la mesure où la BNDA dispose de ressources
supplémentaires. notamment les dépôts, susceptibles de financer
ses opérations de prêts. Or la faiblesse de l'épargne en milieu
rural n'est pas de nature à couvrir les besoins réels en crédit (l).
En deuxième lieu, l'unité réalisée par les articles 3 et 4 de la
nouvelle loi a considérablement modifié l'éthique déjà bien fra-
gile de la BNDA. Banque d'intérêt national aux termes de la loi
l'instituant, la BNDA est devenue en réalité un établissement
respectant à la lettre la règle sacro-sainte inhérente à toute
institution bancaire classique: le profit.
(1)
Difficulté renforcée par les articles 32 à 40 de la nouvelle
loi relatifs aux opérations de banque et qui visent à imposer
des conditions de gestion assurant aux clients le maximum
de garanties.
Voir en outre,
l'article de M.
DAUBREY déjà
cité.

123
De surcroît, intervenant pour son propre compte, la BNDA a
compétence, conformément à l'article 3.a de ses statuts " pour
réaliser, sous sa responsabilité, toute opération présentant
des garanties suffisantes d'équilibre financier".
Il semble
dans ces conditions légitimes que la banque ne prête qu'aux
personnes solvables ce qui, en tout état de cause, l'éloigne de
sa mission dl intérêt national.
Or le crédit orienté vers les jeunes désirant s'installer en
agriculture présente un caractère essentiellement social que
la BNDA dans son rôle de banquier ne saurait satisfaire (1). Car
installer des jeunes, au-delà des enjeux économiques, revient à
rés 0 r ber l e c hôm age e t à lut ter con t rel ' ex 0 der ura l , mis s ion
qui incombe au pouvoir politique. Et, en toute hypothèse, les
charges financières liées au crédit en faveur des jeunes présen-
tent des risques certains que la BNDA ne saurait prendre à moins
qu'elle ne choisisse
de violer, ce qui bien entendu est hors
de question, l'article 3.a de ses statuts pré-cité (2). Mais,la
législation à laquelle est soumise la banque ne fait pas obstacle
à "l a réalisation et à la comptabilisation (par elle) d'opéra-
tions au moyen de ressources ne lui appartenant pas et q~'elle
n'emploie pas à ses risques (3). Seulement, la BNDA en sus qu'elle
(1)
Il ne s'agit pas du crédit social dit prêt de soudure d'un
montant inférieur à 80.000 francs CFA que la banque accorde
à la clientèle paysanne et qui est garanti au quart de son
montant par l'Etat
(wit au plus 20.000 francs).
(2)
Sans doute faut-il prec~ser que la BNDA peut~ au titre de
ses opérations propres
:
- mobiliser les ressources locales~ soit sous forme de dépôts~
à vue ou à terme~
soit par émission d'emprunts à court~ moyen
ou long terme.
- recourir au réescompte de ses crédits et contracter tous
emprunts nécessaires à la réalisation de sa mission~
-
prêter à court~
moyen ou long terme~ escompter~ avaliser.
- d'une façon générale~ effectuer toutes opérations finan-
cières~ mobilières ou immobilières se rattachant directement
ou indirectement à l'objet social.
(3)
Article 3.b des statuts.

124
ne peut prendre aucune initiative a. en la matière. une compé-
tence liée.
Bien plus. cet environnement institutionnel a des conséquences
sur le fonctionnement de la banque entravant davantage sa contri-
bution éventuelle au financement de l'installation.
B) Les règles de fonctionnement qui font obstacle au financement
de l'installation.
"Ce sont les dépôts. dit-on. qui font le crédit". La BNDA n'échap-
pe pas à cette "loi" de l'activité bancaire et doit non seulement
col l e c ter l' é par g ne mai s des ur cr 0 ft ve i l 1er à une bon ne dis tri -
bution du
crédit
c'est-à-dire prendre toutes les précautions
nécessaires afin de s'assurer que les prêts octroyés seront rem-
boursés. A cette garantie s'ajoute une préoccupation d'ordre
financier: le taux d'intérêt doit être suffisamment rémunérateur.
Ces considérations juridiques et économiques n'ont rien d'origi-
nal
; pourtant, appliquées stricto sensu. elles apparaissent
inadaptées à une politique visant à installer des jeunes dans
le secteur agricole. Pourtant. la création d'une banque spécialisée
à côté des banques commerciales est une preuve de la spécificité
du crédit a~ricole. C'est pourquoi une banque agricole créée par
l'Etat devrait se distinguer d'un établissement bancaire classique
au risque de ne demeurer agricole que par les attributions. Les
règles de crédit de la BNDA. jusqu'en 1981 (1) accordaient peu
de place aux jeunes.
Les prêts d'investissement sont destinés à la création de planta-
tions nouvelles. à la transformation des produits, à l'équipement.
à la modernisation des exploitations et à l'aménagement.
Quant aux prêts de faisance valoir (2). ils sont accordés pour
l'entretien d'une exploitation ou l'achat d'intrants et sont
(1)
Cf.
infra, section 2 :
le nouvel engagement financier de l'Etat
(2)
Ce- te;pme est utilisé par la BNDA pour désigner cette catégo-
rie de prêts.

125
valables pour une campagne avec un taux d'intérêt de 12 %. Les
prêts de
commercialisation
qui ont la préférence de la BNDA
sont assortis d'un intérêt de Il %. Nous n'insisterons pas outre
mesure sur les conditions eXlgees qui ne différent pas de celles
qu'on rencontre en milieu bancaire classique (1).
Quel est donc l'intérêt, dans un pays sous-développé, de créer
une banque pour les agriculteurs, si la majorité, et donc les
plus nécessiteux ne doivent pas y avoir accès?
A cette rigidité du crédit non conforme a une politique de finan-
cement de l'installation s'ajoute la question de la décentrali-
sation de la BNDA.
2) La décentralisation de la banque
La BNDA dispose a ce jour d'une agence principale basée a
Abidjan, capitale économique du pays et de sept agences régionales
auxquelles il faut ajouter trois agences principales et 19 agen-
ces locales, soit trente structures susceptibles d'octroyer des
prêts. Si l'ouverture de ces guichets â permis aux dépôts de
passer de 94,8 millions de francs CFA en 1971/1972 a 28,2 mil-
liards de francs au 30 mai 1985, les besoins du pays sont loin
d'être couverts. Les jeunes ruraux, a la quête d'une aide a
l'installation sont souvent éloignés des antennes de la BNDA.
Bien plus, le centre décisionnel reste pour l'essentiel a la
.
.
capitale. C'est ainsi que les directeurs d'agences régionales
et principales ont le pouvoir d'accorder aux particuliers cinq
millions de francs et aux coopératives dix millions. Quant aux
(1)
Il s'agit,
entre autres, d'avoir une certaine surface finan-
cière
(revenus réguliers)
et de se faire avaliser par une
personne solvable.
La spécificité de
la BNDA face aux banques
commerciales a pu dire un responsable de la BNDA est que celle~
celles-ci acceptent les dépôts mais n'accordent pas de crédit
et que d'autre part la BNDA n'utilise pas
les fonds collectés
en milieu rural au financement de projets urbains.
Réunion
BNDA,
Ministèpe du Développement Rural~ 14 février 1986,
document inédit.

126
responsables des agences locales, ils ne peuvent octroyer plus
de cinq millions de francs.
Malgré l'intérêt que pourrait présenter la création de bureaux
ruraux (1) la BNDA reste, pour des raisons d'équilibre financier
trés prudente (2).
Il demeure qu'au-delà de ces problèmes structurels dominants,
se pose la question des rapports entre la puissance publique et
la BNDA. Une réforme juridique de l'institution est tentante mais
mais n'est pas nécessairement un gage d'efficacité. Il est vrai
que notre préférence va à l' établ issement publ ic qui, "s' il est
riche de potential ités" n'est pas toujours efficient, tant "le
divorce entre les principes et leur
application Il est grand (3).
Là encore, il faut éviter le piège de la séduction théorique qui,
en pays sous-développé et singulièrement en Côte d'Ivoire a ten-
dance à assigner au droit
un rôle mystificateur.
La BNDA, sous sa forme juridique actuelle, peut financer les pre-
mières installations à condition que l' Etat témoin cède la place
à l'Etat acteur.
Il s'agira, pour ce dernier, de rompre avec
(1)
Un projet de création de bureaux ruraux a été institué,
qui
sera progressivement mis en oeuvre.
(2)
Une telle prudence quoique justifiée peut sembler paradoxale
dans la mesure où le laxisme .qui a gouverné la gestion de
cette banque a fini par un scandale financier,
le plus impor-
tant que le pays ait connu
(cf.
supra).
Pourtant,
l'article
15 de la loi sur les sociétés à participation financière
publique les assimile à des établissements publics en ce
qui concerne le contrôle financier
économique et technique
de l'Etat dès
lors que la participation publique est majori-
taire.
(3)
J.P.
THERON :
"Recherche sur la notion d'établissement
public".
LGDJ,
1976,
pp.
301-302

127
l'hérésie économico-idéologique du premier (1). Une exploitation
agricole naît de la combinaison de plusieurs facteurs de produc-
t ion et l' a c qui si t ion de ces der nie r ses ton é r eus e. El ém en ta ire
est la règle mais l'application n'est est pas forcément aisée.
Sans doute .. la puissance publique l'a-t-elle comprise qui a déci-
dé d'apporter son concours financier aux jeunes.
SECTION 2
LE NOUVEL ENGAGEMENT FINANCIER DE L'ETAT
La nécessité de faciliter l'accèsau
crédit agricole aux agricul-
teurs défavorisés souvent confrontés à la lourdeur des garanties
bancaires classiques et aux taux d'intérêts exorbitants a conduit
l'Etat à créer des fonds de garantie agricole (F.G.A.) et de boni-
fication d'intérêts (F.B.I.) déposés à la BNDA et gérés par elle.
Ces fonds pourraient être l'instrument privilégié de la politique
d'installation des jeunes. Pourtant la destination
que leur a
réservée le texte constitutif (paragraphe 1) n'a pas été jusqu'à
ce jour totalement suivie par la BNDA (paragraphe 2).
PARAGRAPHE 1 : PRESENTATION DES FONDS DE GARANTIE AGRICOLE ET DE
BONIFICATION D'INTERETS
A) Règles gé·nérales d'organisation
Le fonds de garantie agricole et le fonds de bonification d'inté-
rêt créés par l'Etat en septembre 1981 sont "destinés à faciliter
l'accès au crédit agricole de certains paysans, artisans ou pê-
cheurs, et de leurs groupements professionnels qui, sans, ce
recours, y rencontreraient obstacles dans les conditions usuelles
des crédits de la banque" (2).
(1)
On a coutume de dire aux jeunes:
"Retournez cl la terre ...
mais prenez des initiatives: l'Etat ne peut tout vous offrir"
Mais offre-t-il seulement le minimum ?
(2)
Cette initiative fait suite au congrès tenu en 1980 par le
Parti Démocratique de Côte d'Ivoire
(P.D.C.I.)
le parti
unique au pouvoir depuis 1960,
dont l'un des thèmes était
"l'aide cl la paysannerie".

128
1. Ressources
Le F.G.A. a bénéficié d'une dotation initiale de l'Etat d'un
montant de cinq cent
millions de francs C.F.A. et devrait être
alimenté par des dotations annuelles accordées, soit par la
Caisse de stabilisation et de soutien des prix des productions
agricoles, soit par l'Etat. Quant au F.B.!., outre une dotation
initiale de l'Etat s'élevant à deux cent millions de francs, il
pourra être alimenté par des dotations annuelles prévues au pro-
gramme d'action de la BNDA. De surcroît, 1I1 es ressources des
deux fonds pourront être augmentées ou reconstituées
par :
- De nouvelles dotations budgétaires,
- Des apports en numéraires d'organismes publics et para-publics,
de collectivités locales et professionnelles, de particuliers et
sociétés privées ou de la BNDA elle-même sur ses propres résultats
- Des contributions d'institutions financières internationales.
- Des rabais et escomptes consentis à la BNDA par les fournis-
seurs de matériels. engrais et fournitures diverses.
- Le reversement au F.G.A. des sommes recouvrées par la BNDA
dans le cadre des actions conduites à l'encontre d'emprunteurs
défaillants en faveur desquels aurait déjà joué la garantie
dudit fonds ll (1).
2. Administration des fonds
Il est créé une Commission dite d'agréments et de gestion unique
chargée d'administrer les deux fonds. Cette commission composée
de six membres dont quatre représentants du secteur public, un
représentant de la BCEAü et un représentant de la BNDA est compé-
tente pour fixer les règles de fonctionnement des fonds.
ADrès aVQi~ dégagé les règles générales relatives aux deux fonds,
il convient d'examiner chacun d'entre eux afin d'apprécier la
compatibilité des règles les régissant avec le financement de
l'installation.
(1)
Article 2 du texte cit~ in extenso.

129
B) Le fonds de garantie agricole.
Il a pour objet de "garantir dans leurs opérations avec la BNDA
les petits exploitants ruraux ... demandeurs de crédits", ce
qui veut dire que le fonds leur est réservé parce que les garan-
ties qu'ils présentent ne correspondent pas aux conditions nor-
males exigées par la banque (1).
Le F.G.A. ne s'adresse pas spécifiquement aux agriculteurs seuls
et encore moins aux jeunes. Il est ouvert aussi bien aux coopé-
ratives qu'aux groupements informels même s'il vise également
les cas d'implantations nouvelles, notamment l'installation de
jeunes agriculteurs ou la réinstallation d'exploitants déplacés.
C) Le fonds de bonification d'intérêts
Il vise les bénéficiaires du F.G.A. - parmi lesquels les jeunes
agriculteurs - qui, à cause des contraintes spécifiques à leurs
activités, rencontreraient des difficultés à "atteindre sur leurs
exploitations les taux de rentabilité nécessaires à la couverture
des frais financiers usuels des crédits consentis par la BNDA".
Le F.B.!. a donc pour objet d'alléger la dette de l'emprunteur
en agissant sur le taux d'intérêt habituellement pratiqué par la
banque.
Socialement fondés, les fonds de garantie agricole et de bonifi-
cation d'intérêts ont-ils répondu - ou peuvent-ils répondre - à
l'attente des jeunes? Leur util isation par la BNDA permettra
sans doute de répondre à cette question.
PARAGRAPHE 2 : DE L'UTILISATION POUR L'INSTALLATION DES JEUNES
--------------------------------------------------------------
DES FONDS DE GARANTIE AGRICOLE ET DE BONIFICATION D'INTERETS
------------------------------------------------------------
Nous distinguerons les conditions d'éligibilité des éventuels
privilèges qui sont effectivement accordés aux jeunes
(B).
P·1ais au
préalable, nous présenterons succintement les règles essentielles
de fonctionnement des fonds (A).
(l)
Cf·
supra P :121,.

130
A) Règles de fonctionnement des fonds
Elles sont définies par le Conseil d'Administration de la banque
et la commission d'agrément et de gestion. Ainsi, pour la période
83-85, les fonds étaient prioritairement destinés
- aux petites entreprises paysannes ou rurales,
-
à
la structuration du monde paysan et rural autour des groupe-
ments informels, des groupements à vocation coopérative, pré-
coopérative
et coopérative,
-
à
la promotion des cultures vivrières et des spéculations à
objectif vivrier
: élevage paysan, pisciculture, pêche (1).
Les prêts accordés en court terme ou moyen terme s'adressent aussi
bien aux groupements pré-coopératifs qu'aux personnes physiques.
Le tableau ci-après indique les différents plafonds fixés par la
banque:
Prêts
Pr êts aux groupements
individuels
pré-coopératifs
court terme
3.000.000
5.000.000
------------- --------------------- ----------------------------
moyen terme
5.000.000
10.000.000
En francs C.F.A.
Les taux de bonification varient entre 4 et 6 % tandis que les
taux de garantie ont été fixés à 80 % (2).
Ce régime spécial dérogatoire au droit commun nous conduit à nous
interroger sur la place accordée aux jeunes.
(1)
BNDA~ note d'instruation~ mars 1984.
(2)
Si la garantie entra~ne néaessairement la bonifiaation~
l'inverse n'est pas toujours vérifié.
En effet,dans aertains
aas, les garanties réelles ou personnelles peuvent être jugées
suffisantes, exaluant ainsi l'emprunteur du P.G.A.

131
B) Les conditions d'éligibilité des jeunes aux fonds
Peuvent être élus aux deux fonds ~ ce qui ne signifie pas qu'ils
le sont en réal ité - les jeunes encadrés et installés par des
sociétés de développement sur les mêmes programmes d'élevage, de
pêche ou pisciculture, de production vivrière et de mécanisa-
tion"
(1) dans la mesure où les
prêts sollicités n'excèdent pas
les plafonds fixés par la banque.
Si les jeunes peuvent, sur le schéma théorique, bénéficier des
avantages offerts par les deux fonds, y ont-ils effectivement
accès ?
Quelles sont les difficultés rencontrées par la banque pour finan-
cer l'installation des jeunes à partir des fonds de garantie et
de bonification?
C) De l'utilisation effec'tive' des fonds de garantie agricole et
de bonification d'intérêts aux jeunes agriculteurs: réalités
et contraintes
Pour bénéficier de la garantie ou de la bonification, les jeunes
doivent être installés par les organismes publics intervenant en
mi1ieur rural
(2) ou tout au moins les programmes par eux présen-
tés doivent s'insérer dans le cadre "des actions des grands pro-
jets gouvernemefltaux de déve1oppement"
(3).
Cette disposition qui réduit considérablement l'initiative privée(4
est d'autant plus inopportune que les installations conduites par
l'Etat ou des organismes pub1 ics sont onéreuses, souvent mal
(1)
BNDA, note d'instruction, op. cit.
(2)
Cf.
supra, 1ère partie, chap.
1,
(3)
BNDA,
note d'instruction,
op.
cit.
(4)
Même s ' i l est précisé que les "programmes individuels présenté
sur la propre initiative des emprunteurs en dehors de ces
grands projets ...
et retenus par les Directions.générales et
agences locales pour être éligibles aux fonds ont tous vocatio
(souligné par nous) d être bonifiés.
La pratique dément ce
voeu pieux !

132
orientées, et toujours marginales lorsque la cible visée est une
population jeune (1).
La BNDA excipe de l'insuffisance des ressources des fonds "pour
assurer une politique systématique d'interventions en faveur de
l'installation des jeunes"
(2).
L'argument, pour être plausible,
ne saurait être convaincant. Certes, il est vrai que la dotation
initiale de l'Etat aux deux fonds aurait pu - et dû - être plus
importante; bien plus, les dotations annuelles ultérieures pré-
vues pour alimenter les fonds de garantie et de bonification de-
vraient avoir un caractère certain. Mais au-delà de ces handicaps
structurel s, l'installation des jeunes ne sembl e pas avoir été
inscrit.e au tableau des priorités; à ce jour, seuls les dossiers
concernant la culture attelée peuvent bénéficier de la bonifica-
tion tandis que le fond de garantie,insuffisant, est ouvert à ce
jour, aux seuls agriculteurs de SASSA~DRA (3).
Pendant encore combien de temps contournera-t-on l'épineux pro-
blème de l'installation des jeunes? La structure actuelle de
la BNDA ne sembl e pas être suffisamment adéquate pour résoudre
la question. Mais en attendant d'hypothétiques réformes, le sys-
tème mutualiste amorcé il y a un peu plus d'une décennie ne peut
t-il
pas contribuer au financement de l'installation des jeunes?
SECTION 3 : LES CAISSES RURALES D'EPARGNE ET DE PRETS (CREP) ET
LE FINANCEMENT DE L'INSTALLATION DES JEUNES
Créées en 1976, les CREP sont de plus en plus regardées comme des
Caisses de crédit agricole mutuel; mais l'examen des règles d'or-
(1)
La rigidité de l'encadrement, l'absence d'objectifs précis ont
souvent conduit les jeunes cl déserter ces "chantiers" qui
forment plus des ouvriers agricoles que des chefs d'exploita-
tion.
Cf.
Insertion des jeunes dans l'agriculture en Côte
d'Ivoire,
Ministère de l'économie des finances et du plan,
Ministère du travail et de l'Ivoirisation des cadres, CINAM,
Rapport de consultation, Abidjan, 1979.
(2)
BNDA, note d'instruction,
op.
cit.
(3)SASSANDRA. est une ville située au Sud-Ouest de la Côte
d'Ivoire.

133
ganisation et de fonctionnement fait apparaître le caractère
erroné de cette qualification (paragraphe 1). Pourtant, il demeure
que les CREP peuvent, dans le cadre des dispositions légales, par-
ticiper à la politique d'installation des jeunes agriculteurs.,
( pa ra gra ph e 2).
PARAGRAPHE 1 : ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT
A) Origine et évolution de l'institution
1.
Origine des CREP
L'agriculture ivoirienne bien que contribuant pour une part impor-
tante à l'équilibre de la balance commerciale n'a pas élevé, du
moins de façon sensible, le niveau de vie des producteurs (1).
Le monde rural dans son ensemble est resté en marge de la crois-
sance générale du pays. L'économie du marché"ne semble pas avoir
gagné les campagnes où l'exploitation agricole est encore gérée
traditionnellement et l'épargne quasi-inexistante. Jusqu'en 1975.
la prophétie du Président de la République était loin d'être réa-
lisée (2). C'est dans ce contexte que sont nées les Caisses
Rurales d'Epargne et de Prêts (CREP). Leur création résulte moins
(1) M.
PELISSIER a pu .crire, pour justifier cette anomalie "que
tout développement. est, dans sa première phase,
et sous
que lque régime que ce soi t, inéga lita ire". Affirma tion qui
manque d'originalité puisque dans aucun pays l'.galité sociale
n'est une réalité.
Le problème se pose en termes de bien-être
social auquel tous les peuples ont droit malgr. la pratique
contraire des gouvernants africains.
N'est-ce pas d'ailleurs
cette originalit. qui fait
les pays pauvres ?
(2)
Dans une interview accord.e en 1966, d la revue "C6te d'Ivoire-
Afrique",
le Pr.sident HOUPHOUET
a pu dire "que d'ici dix ans
la scolarisation sera totale . . .
le dernier taudis aura dis-
paru et le niveau de tous aura consid.rablement augment.".
Voir M.
LAPORTE,
op.
cit.

134
de la volonté des ruraux que de celle
des pouvoirs publics en
l'occurrence l'Office National de Promotion Rural e (ONPR), éta-
blis s em en t pub lie a uj 0 ur d ' hui dis sou s. 1l s' agi s sai t à l' 0 r i gin e
de collecter l'épargne villageoise qui devait servir à financer
des projets ruraux, une sorte de développement auto-centré.·
Cependant, la vérité historique mérite d'être rétablie: les
CREP ne sont pas nées, selon une formule consacrée,"de la volonté
librement exprimée des villageois" (l).Pourtant, leur nombre
croît rapidement pour atteindre soixante six en 1981, alors qu'on
n'en comptait que quatre en 1976. Toujours sur cette période, les
dépôts passent de 6.654.000 francs CFA à 232.650.000 francs CFA.
Mais l'euphorie des premières années s'est vite estompée et le
désengagement progressif des villageois s'est vite fait sentir.
Aujourd'hui, le bilan indique que seules vingt CREP ont un rende-
ment positif
quarante sont en baisse et il faudrait en fermer
dix.
Ce marasme est sans aucun doute dû au non-respect des règles ju-
ridiques régissant les CREP.
B) La violation par l'autorité administrative du droit applicable
Les CREP, régies par la loi 77-332 du 1er juin 1977 portant
statut de la coopération, sont "des coopératives d'épargne et de
cr édit .ayan t pou r but d' en cou ra ge r l' é pa r g n~ et d' ace 0 rd e r des
prêts à leurs adhérents" (2).
La CREP est donc une coopérative orientée vers l'épargne et le
crédit dont les membres vivent en mil ieu rural.
A ce titre, elle n'a pas vocation à faire du crédit agricole et
encore moins à supplanter la BNDA en l'absence d'une volonté
(1)
Un document du Ministère du développement rural mentionne que
"la naissance du crédit mutuel ivoirien commença en été 1974,
par la rencontre sur le quai de la gare de Mulhouse
(sic) ... ".
Pour information~ Mulhouse est une ville située au Nord-Est
de la France et cette rencontre eut lieu entre deux européens
dont l'un était collaborateur du Ministère ivoirien du Plan.
(2) Art.
2~ alinéa 6 de la loi.

135
législative clairement exprlmee. La CREP peut, tout au plus,
fournir des prestations à ses membres ce qui suppose la présence
d'intérêts communs que l'institution ne semble pas refléter.
En effet, l lune des conditions pour être membres d'une CREP est
d'habiter en milieu rural
(l), indépendamment de l'activité pro-
fessionnelle exercée. Au-delà de l'hétérogénéité d'intérêts,
l'absence dlautonomie des CREP a certainement contribué à la démo-
tivation des sociétaires.
Déjà, en 1978, l 'ONPR agissant au nom et pour le compte des
CREP (2) concluait une convention avec la BNDA, au mépris des
règles élémentaires sur la coopération (3).
La CREP, société civile ne peut-elle pas agir en son propre nom?
Cet env a hi s s em e nt de lia ut 0 rit é ad min i st rat ive qui déc ide de
Ill' implantation des CREp lI èt leur font obl igation d'ouvrir lI exc l u-
sivement leurs comptes dans les livres de la BNDA" est non seule-
ment anormal mais de surcroît nuisible au mouvement.
Fâcheuse
situation que la création du Ministère du développement rural
nia
pas amél iorée. Outre le confl it de compétences qui l'oppose au
Ministère de llagriculture, le MOR tend à transformer les CREP
en instruments aux mains de la puissance publique. Aussi pour
obtenir (4) une CREP faut-il
remplir certaines conditions discré-
tionnaire posées par le jeune Ministère (5).
(1)
"Le milieu "rural" si d.finit comme l'ensemble des agglom~­
rations de moins de 4.000 habitants ainsi que celles de
4.000 à 10.000 habitants ayant plus de 50 % de chefs de m.nage
exerçant une activit. agricole".
Statistiques agricoles,
Côte d'Ivoire,
1982.
(2)
Soulign. par nous.
(3)
La coop.rative, soci.t. civile cr •• e par un groupe de person-
nes ayant des int.rêts commun a bien entendu la personnalit.
juridique.
Pourquoi l'ONPR,
.tablissement public se substitue-
t-il aux CREP,
personnes morales de droit priv. ?
(4)
Soulign. par nous.
(5)
Il s'agit,
pour ces villages d'avoir entre autres "une mutuel-
le de d'veloppement locale et cr.dible ... "

136
Il s'en suit que la crêation en milieu rural d'une coopêrative
d'êpargne n'est plus un droit qui rêsulte de la loi mais une
faveur accordêe par la puissance publique.
La conjugaison de tous ces facteurs n'a pas permis un dêveloppe-
ment harmonieux de la CREP qui pourtant pourrait être, dans une
certaine mesure, un instrument de crêdit au service des jeunes.
~~~~§~~~~5_?_~_~~_Ç~~f!_!~~I~~~~~I_Q~_f~~Q!I_~~_~~~y!Ç~_g~~
JEUNES ?
Cette possibilitê peut rêsulter des relations que les CREP entre-
tiendront avec la BNDA (A) ou de la rê-orientation du mouvement(B).
A) Des relations~idigues
entre les CREP et la BNDA
La D.M.C. a passê une convention avec la BNDA qui vise a accorder
aux CREP, l'assistance technique et financière indispensable à
leur promotion (1).
L'article 8 d~ cette convention indique que la BNDA, "caisse
centrale des CREP, reçoit les dêpôts de liquiditês dont le volume
est dêterminê par un règlement de trêsorerie ... ".
Cette collecte de l 'êpargne prêsente un double intêrêt
- En renf10uant les caisses de la BNDA, elle peut lui permettre
de jouer efficacement son rôle d'organisme de crêdit agricole,
- La BNDA, en "rênumêrant les comptes a vue des CREP au
taux en
vigueur augmentê d'une prime de 1 %"~ (article 10 de la convention:
encourage et dynamise les caisses rurales dont l 'intêrêt n'est
pas toujours perçu par les paysans.
(1)
Cette convention est,
à peu de choses près,
la photocopie
de celle qui liait l'ex ONPR à la BNDA
(cf.
supra).
Toutes
proportions gardées et hormis nos précédentes critiques,
ces conventions présentent quelque intérêt que nous nous
proposons de mettre ici en exergue.
Pour information,
la DMC
est la Direction de la Mutualité et de
la Coopération du
Ministère de
l'Agriculture.

137
A partir de ces repères
des dispositions particulières pourraient
9
être conjointement prises par la BNDA et les CREP aux fins de
financer en tout ou partie 11 installation des jeunes agriculteurs
futurs membres de la CREP de leur lieu de résidence. Cependant 9
l ' env i r 0 nnem e ntac tue l tan tau pla n i ns t i tut ion nel. soc i ale t
économique ne permet pas la mise en oeuvre de ce schéma théorique.
Au plan socia1
ceux auquels sont destinés les CREP, c'est-à-dire
9
les ruraux ne s'y intéressent guère pour des raisons liées à la
nouveauté de l'institution et à la méfiance séculaire des paysans.
C'est pourquoi, aujourd'hui 9 les CREP ne sont pas économiquement
rentables, le volume des dépôts étant faible par rapport aux
objectifs qu'on pourrait assigner à l'institution qui 9 dans son
organisation actuelle, peut difficilement apporter son concours
aux jeunes.
En effet
la trop forte tutelle de l'autorité administrative sur
9
les CREP. émousse l'engouement des sociétaires. étouffe les ini-
tiatives privées et. au-delà de
l'anormalité de cette pratique.
donne aux paysans le sentiment que l'administration'ya un
intérêt
pécuniaire. D'autre part. le conflit de compétence qui oppose le
r1inistère de l'Agriculture à celui du Développement Rural à propos
de la tutelle des CREP n'est pas de nature à assainir et à har-
moniser une politique d'installation à laquelle personne ne semble
croire.
Enfin. le trés vaste domainè d'intervention des CREP ne consti-
tue-t-il pas l'obstacle majeur à une coopération BNDA - CREP
pour des crédits d'installation en agriculture? Le caractère
rural de ces caisses d'épargne met en présence des sociétaires
dont les intérêts ne sont pas nécessairement compatibles avec
l'idée de favoriser. en leur octroyant certains crédits. l'instal-
lation des jeunes agriculteurs (1). Or la CREP n'est-elle pas
d'a bo rd une co 0 Pé rat ive ? Et 9 en l' a bsen ce de dot a t ion s pub l i que s •
sans doute faudrait-il songer à des coopératives de crédit plus
spécial isées.
(1)
Une CREP peut regrouper des personnes exerçant différentes acti
vités : commerce, artisanat,
agriculture . . .
Comment pourrait-
on instituer un système de crédit en faveur de telle ou telle
catégorie professionnelle alors que les différents intérêts
en présence ne sont pas nécessairement convergents ?

138
B) Pour une ré-orientation des CREP
LI idéal de llaction coopérative réside dans la réduction à l'unité
des intérêts de l'ensemble des coopérateurs. A défaut de réaliser
cet idéal dont la règle de droit est le reflet n'est-il
pas possi-
ble de susciter et d'encourager la création de coopératives de
crédit en fonction des principales activités du monde rural,
c'est-à-dire agriculture, artisanat et commerce? Dans cette pers-
pective des actions d'information et de vulgarisation pourraient
être entreprises afin que se créent spontanément des coopératives
agricoles d'Epargne et de Crédit (CAGEC) réservées aux seuls agri-
culteurs.
Bien plus, les CAGEC pourraient donner naissance à des coopérati-
ves de crédit pour jeunes agriculteurs.
L'intervention de l'Etat
au niveau des fonds de garantie d'intérêts permettrait une meil-
leure coopération BUDA - CAGEC pour le financement de l'installa-
tion des jeunes.
Mais l'élaboration et la mise en oeuvre d'une réforme, quelle
qu'elle soit suppose, voirepré-suppose un environnement favorable.
Cet environnement n'est pas seulement institutionnel; il est
égal ement huma in. Ce dernier él ément revêt, en mil i eu rural, une
dimension souvent insoupçonnée. C'est pourquoi la véritable réfor-
me est d'abord celle des esprits. Mais encore faut-il
que ces
esprits puissent se mouvoir librement et s'exprimer spontanément
dans un cadre administratif et juridique souple, susceptible de
mobiliser les énergies.
CONCLUSION AU CHAPITRE 1
Les objectifs assignés à l'agriculture ivoirienne au lendemain de
l'indépendance, à savoir les performances productives à partir
des exploitations industrielles ont déterminé les règles juridi-
ques régissant la Banque Nationale pour le Développement Agricole.
Adulé par la minorité, contesté par les autres, le droit du crédit
agricole doit aujourd'hui s'adapter aux impératifs d'une agricul-
ture qui se veut moderne et dynamique, au risque d'être responsa-
ble de bouleversements sociaux et économiques que le pouvoir poli-
tique ne saurait contenir plus longtemps. C'est pourquoi s'initie
une nouvelle stratégie d'installation des jeunes qui tend à ren-
forcer l'intervention de l'Etat.

139
CHAPITRE 2 : VERS UNE NOUVELLE STRATEGIE DU FINANCEMENT DE
L'INSTALLATION?
En 1983, suite à un appel d'offres du Ministère français des
Relations Extérieures, Coopération et développement, la CINAM (1)
a été chargée d'exécuter une "étude de faisabilité d'installation
de jeunes agriculteurs modernes en C6te d'Ivoire" (2).
Depuis, le M.D.R. s'attache à mettre en oeuvre les propositions
de l'étude pré-citée dont nous ne retiendrons ici que les princi-
pa ux aspe c t s .
Le M.D.R. qui a repris in abrupto à son compte les principales
conclusions de la CINAM espère pouvoir installer dans le moyen
terme plusieurs milliers de jeunes. Mais l'imprécision et l'absen-
ce d'un cadre juridique dans la détermination des objectifs
(section 1) ainsi que la lourdeur des structures envisagées
(section 2) ne sont-ils pas des signes prémonitoires d'un nouvel
échec ?
SECTION 1 : LA DEFINITION DES OBJECTIFS ET LES MODES DE FINANCEMEN
PARAGRAPHE 1 : LES OBJECTIFS
A) Les objectifs généraux
Il s'est progressivement opéré un gl issement dans la terminologie
utilisée car "d'installation des jeunes agriculteurs" on est pas-
sé à "insertion de~ jeunes en milieu rural".
A l'agriculture s'ajoutent d'autres activités économiques comme
l'artisanat ou le commerce qui se distinguent nettement de l'acti-
vité agricole et posent
conséquemment des problèmes différents.
Pourtant, l'ambition du M.D.R. est d'élaborer u~e ·stratégie géné-
(1)
Compagnie d'Etudes Industrielles et d'Aménagement du terri-
toire.
Il s'agit d'une société de droit français.
(2)
Convention de financement
:
49!CD!83!CIV!13.

140
rale ~ partir d'une opération témoin appelée "Projet pilote
d'aide ~ l'-insertion des jeunes en milieu rural". Il s'agit
pour le MOR de faire intervenir les communautés villageoises dans
leur ensemble, les coopératives,les différents organismes publics
intervenant en milieu rural mais également les personnes morales
de droit privé dont les activités sont orientées vers le dévelop-
pement rura l .
Le projet pilote qui vise deux zones géographiques, le Sud et la
région du Centre Est, s'adresse ~ environ 150 jeunes même si
jusqu'~ ce jour, seule une cinquantaine de demandes émanant de la
zone Sud ont été retenues.
En fait, une observation attentive de
la réalité indique que le MOR s'intéresse davantage aux instal-
lations en agriculture, objet de la présente étude. Voulant rompre
avec les pratiques antérieures, l'autorité administrative se pro-
pose de responsabiliser davantage les candidats ~ l'installation
et les
communautés villageoises en subordonnant son inter-
vention ~ des cond"itions relatives aux uns et aux autres.
B) Les con dit.ion s d' i nter ven t ion d e 1a pu i s san cep u b1 i gue
1.
Les conditions relatives ~ l'organisation villageoise.
Au terme critère retenu par le MOR nous avons préféré celui de
condition dans la mesure oa il s'agit de sélectionner les villa-
ges gui méritent une aide en
faveur des jeunes ~ installer.
C'est ainsi que tout village qui sollicite une aide ~ l'installa-
tion doit avoir en son sein une structure locale de développe~
ment (1), la priorité étant donnée "aux villages qui s'engagent
dans les actions concrètes en faveur de l'installation des jeunes:
(1)
Certains ont même avancé l'idée que les SLD bien gérées et
enracinées dans le milieu rural pouvaient être une garantie
auprès des banques, perdant ainsi de vue le caractére réel
et personnel de la garantie bancaire.
On croit trop souvent, à tort, que dans les campagnes, il
existe une communauté d'intérêts indivisible nécessairement
orientée dans la même direction.

141
attribution de terres, dotations en matériels, cheptel,etc
"
Ces deux exigences marquent un nouveau type d'intervention
en milieu rural qui privilégie le cadre général au détriment des
véritables cibles, c'est-à-dire les jeunes. L'Etat n'est plus
incitateur et refuse de se substituer à la communauté villageoise.
Pourtant, il
nous semble naTf de vouloir "sélectionner les villa-
ges qui perçoivent l'installation des jeunes comme une évolution ..
et non comme une perturbation".
Hisser 'les jeunes à la tête d'exploitations
agricoles revient à
couper le cordon ombilical qui les rattachait aux ainés. Or, le
monde paysan, depuis l'introduction par le colonisateur de valeurs
nouvelles, se caractérise de plus en plus par une opposition fa-
rouche entre jeunes et anciens, ,les premiers étant ouverts au
progrès technique et à la modernisation de l'agriculture, tandis
que les seconds, rebelles à tout changement structurel, sont plus
enclins à maintenir leur hégémonie. Dans ces conditions, est-ce
raisonnable et jus~e que l'Etat demeure passif?
La spécificité du monde
rural
en Côte d'Ivoire et en Afrique,
les différentes contraintes qui lui sont inhérentes doivent faire
du droit rural - notamment dans les pays sous-développés - l'une
de's br an che s les plu sin ter ven t ion n i ste d e las cie nce j uri di que (l)
A maintenir les conditions sus-énoncées, il n'est pas douteux que
l'autorité administrative entrave les objectifs qu'elle s'est
fixés, à savoir susciter et encourager l'initiative des jeunes
d'une part et participer au financement de leur installation
d'a ut r e pa r t .
PARAGRAPHE 2 : LES MOYENS DE FINANCER L'INSTALLA TION
Le crédit est, dans la stratégie générale du M.D.R., l'unique
(1)
La politique agricole 'commune instituée par le traité de Rome
et aujourd'hui assez bien élaborée,
l'évolution en France de
la législation agricole et rurale depuis la fin de la guerre
sont, malgré
les inévitables imperfections, la preuve du
nécessaire interventionnisme dans ce secteur.
Cf.
M.
LALIBANT
L'intervention de l'Etat dans
le secteur agricole,
LGDJ, 1970.

142
moyen (1) accordé au jeune pour faciliter son installation.
Il
peut lui être octroyé avec ou sans intérêts.
A) Les prêts sans intérêts
Abusivement appel és "dotation", ces prêts sont une avance accordée
au jeune afin de lui permettre de résoudre les contraintes liées
à une première installation.
Malgré leur caractére insignifiant (2), ces prêts offrent l'avan-
tage d'être consentis sans intérêts. Pour l'autorité administra-
tive, cette avance devrait permettre d'apprécier la motivation
des jeunes candidats. C'est pourquoi elle est versée au fur et à
mesure que les bénéficiaires réalisent les travaux prévus au
cahier des charges (3). Pourtant l'étude de la CINAM sur laquelle
repose cette nouvelle stratégie proposait, à l'instar du modèle
français une "politique de dotation, outil décisionnel de fixation"
dotation qui pourrait être cumulée avec des prêts."
Ce schéma ne semble pas avoir l'agrément des autorités ivoiriennes
ql:li, pour employer une formule aujourd'hui consacrée, s'opposent
à toute idée ~e "cadeau", c'est-à-dire à l'octroi aux jeunes
agriculteurs d'une prime non remboursable, d'une subvention sur
fonds publ ics. Cette méfiance à l'égard d'une dotation réelle
t i e nt, sem ble - t - il, ~ l l é che c des exp é rie nces an t é rie ure s .
Une telle appréhension nous semble injustifiée dans la mesure où
"
"
les premières opérations d'installation ont été souvent mal
(1)
Ces prêts qui doivent permettre au jeune de s'installer ont
pour objet l'acquisition du matériel agricole,
du cheptel
...
Des actions dites d'accompagnement s'attachent à réaliser
des ouvrages collectifs
(pistes,
points d'eau ... ).
L'inté-
gration de ces coûts dans les opérations d'installation nous
semble inopportune
(voir supra nos conclusions en fin de cha-
pitre) .
(2)
Cette avance,
consentie sans intérêts, est plafonnée à
300.000 francs
CFA.
(3)
Il s'établit une sorte de contrat entre l'autorité administra-
tive et le bénéficiaire de l'aide qui s'engage à réaliser un
programme d'exploitation.
Quelle sanction encourt le jeune en
~as d'inexécution de ses obligations, surtout si une partie du
prêt l~i a déjà été versée ?

143
conçues (1) et ne sauraient donc servir de modèles. En réalité,
l'installation des jeunes à la tête d'exploitations agricoles
n'a jamais été considérée comme un élément essentiel de la moder-
nisation de l'agriculture. La politique agricole ivoirienne a
toujours eu cette constance, maximisation de la production par un
interventionnisme rigide au détriment de la condition sociale et
économique du producteur; ce développement agricole, il faut
le rappeler, a été essentiellement l'oeuvre des sociétés d'Etat
à vocation agricole
(2) qui, lorsqu'elles se consacrent essen-
tiellement ou exclusivement à la production, exploitent plusieurs
milliers d'hectares (3) et obtiennent de la BNDA d'importants
crédits. L'action de ces sociétés sur les paysans - assistance
technique ou financière - n'a pas contribué véritablement à la
promotion de ces derniers, l'objectif étant la productivité et
non l'élévation du pouvoir d'achat des "petits paysans". Cette
orientation ~e la stratégie agricole soutenue par une agricul-
ture d'Etat a donc permis, pendant longtemps, d'occulter les pro-
blèmes relatifs au vieill issement de la population agricole.
Conséquemment, les expériences antérieures d'installation tant
décriées, n'ont jamais été l'objet d'une planification rigoureuse,
et étaient démunies d'objectifs précis.
Il s'en suit que ces
opérations parcellaires n'ont jamais eu pour objet ou pour consé-
quence d'installer de véritables chefs d'exploitation. Comment
dans ces conditions les "primes", "salaires" ou "avances" géné-
reusement attribués auraient-ils pu être utilisés à bon escient
par les bénéficiaires?
(l)
Voir supra.
(2)
Ces sociétés étaient~ à l'origine~
classées par produits;
ainsi le palmier et le cocotier étaient de la compétence
exclusive de la SODEPALM (voir supra). Mais depuis
19?5~ a
été mise en place une spécialisation régionale.
Ainsi aux
productions traditionnelles de la SODEPALM dont l'action
couvre la Basse Côte se sont ajoutés le riz~ le ma~s~ le m~nio
(3)
En Côte d'Ivoire ces exploitations sont appelées plantations
industrielles par opposition aux plantations Villageoises.
A
titre d'exemple~ la Sodesucre exploite dans le Nord du pays
environ dix mille hectares de terre.

144
La formule des
prêts sans intérêts retenue par l'autorité admi-
nistrative dans le cadre de la nouvelle stratégie d'aide à l'ins-
tallation ne nous
paraft pas très indiquée.
La mesure, loin d'être incitatrice,
est de nature à briser l'élan
des éventuels candidats. Or, il
s'agit pour l'Etat de susciter,
d'inciter en allégeant les charges
incompressibles liées à toute
installation.
C'est pourquoi
l'aide qu'il
accorde ne devrait pas
être remboursable,
au risque d.e s'identifier au crédit classi-
que
(1). A cet engagement de l'Etat - accorder une aide finan-
cière non remboursable - devrait correspondre celui du candidat
à
l'installation,
règlementés dans un cahier de charges.
En toute
hypothèse, cette aide ne devrait pas faire obstacle à l'obtention
d'un crédit d'installation.
Si la nouvelle pratique du MDR ne prévoit pas de dotation à l'ins-
tallation, elle n'exclut cependant pas la possibilité pour le
jeune d'obtenir un prêt assorti d'un intérêt.
B) Les prêts assortis d'un intérêt
"L'accès au ~rédit, est-il
indiqué, sera facilité grâce à une
procédure d'aval
global
de l'Etat qui
se limitera à 30 % du
montant des prêts".
(1)
On cite souvent l'exemple de la SODEPLAM (Société d'Etat
chargée de la production du palmier à huile) dont les acti-
vités couvrent la zone Sud et s'étendent aujourd'hui aux
vivriers
(riz,
ma~s, manioc).
Cet établissement Public
national octroie aux jeunes une prime de 1.000.000 de francs
C.F.A.
dont 80 % en matériel.
Mais
les rapports juridiques
entre les jeunes agriculteurs et la société restent toujours
flous.
Une enquête nous a permis de nous rendre compte
que les premiers ne jouissent pas de la liberté d'exploita-
tion à laquelle ils ont théoriquement droit, étant par
exemple, obligés de pratiquer les cultures que leur impose
la SODEPALM.

145
Quel est le sens et la portée de cette disposition? On pourrait,
à priori,
penser qu'il s'agit d'un système de garantie à l'image
du fonds de garantie agricole de la BNDA précédemment étudié (1).
Si une tell e hypothèse peut être retenue, comment peut-on l' har-
moniser avec le système déjà existant. d'autant plus qu'il
est
prévu. au niveau de l'élaboration du dossier, la compétence
conjointe de la BNDA et du MDR ? (2).
En fait, il s'agit pour le Ministère du Développement Rural,
dans le cadre du projet pilote. d'aider les jeunes à avoir accès
au crédit de la BNDA grâce à un système de bonification. Il est
en effet prévu
environ 150 millions de francs CFA pour la boni-
fication des intérêts. Singulièrement, le MDR exclu de cette boni-
fication. les prêts à moyen terme, contrairement à la règlemen-
tation et à la pratique de la BNDA.
Ainsi, il apparaft que les jeunes pris en compte par le projet
pilote bénéficieront en sus d'une avance remboursable sans inté-
rêts. d'un crédit de la BNDA grâce à l'intervention de l'Etat
qui s'engage à bonifier ces prêts.
Mais à ce jour, la contribution financière de l'Etat n'est pas
encore acquise. c'est-à-dire que les fonds ne sont pas encore
disponibles contrairement à l'aide du Fonds d'Aide et de
Coopé-
ration qui a permis de démarrer effectivement le projet.
Qu'adviendra-t-il si. par extraordinaire. la participation de
l'Etat ivoirien reste au sta~e des promesses? Sans aucun doute.
aboutira-t-on à l'échec du projet pilote initié par le r~.D.R.
Au-delà de ces balbutiements et incohérences se pose la question
du rôle du plan dans l'aide à l'installation en agriculture.
PARAGRAPHE 3 : PLAN ET FINANCEMENT DE L'INSTALLATION DANS LA
NOUVELLE STRATEGIE DU M.D.R.
Quelle que soit la nature des aides retenues. l'élaboration d'un
programme d'investissement dans le cadre et ·selon les principes
(1)
Cf. supra)j>.42:J à. :132-
(2)
Sur la comp.téncecde l'organisme de gestion, cf. infra,
section 2.

146
du
plan est indispensable (B).
Mais auparavant, les pouvoirs
publics devraient s'attacher à la confection d'une stratégie
souple, réaliste et
peu onéreuse (A).
A) Le
choix de la stratégie
Le principe de l'installation groupée nécessitant sur une aire
géographique déterminée un
ensemQle de jeunes est celui qui a retenu
l'attention du ~1.D.R. Il a, conformément à la logique de cette
démarche, accordé peu de place aux
initiatives personnelles et les
candidatures individuelles sont marginal isées.
C'est l'administration qui, en réal ité, sélectionne les jeunes
devant bénéficier d'une aide de l'Etat même s'il
est prévu qu'un
tel choix doit se faire avec le concours des communautés villa-
geoises.
L'absence de conditions objectives de sélection, l'omni-
potence administrative, "la marionnettisation"
(1) des
pseudo-
candidats rappellent étrangement les expériences antérieures
d'installation.
Or ces dernières qnt, à quelques exceptions près,
toutes échouées
(2).
Les mêmes causes
produisant les mêmes effets,
il
n'est pas douteux que la stratégie d'aide à l'installation
retenue par le M.D.R.
soit d'ores et déjà vouée à l'échec.
Il
semble que le M.D.R.
n'ait pas encore trouvé la voie suscepti-
ble de mettr·e véritablement en route une politiqu.e d'aide à l'ins-
ta 11 a t ion (3).
l ndép end am men t
des con s é 'q u e nces soc i 0 - pol i t i q u és
que pourrait engendrer la naissance de cette nouvelle race d'agri-
culteurs (4), les termes de la stratégie présentée par le M.D.R.
ne sont pas de nature à encoul"ager le gouvernement à dégager les
fonds
nécessaires à cette opération
(5)
à moins que l'on ne
(1)
L'expression est de nous
(2)
Cf.
document CINAM,
1979,
op.
cit.
(3) Dans un document confidentiel adressé par le Ministre des
finances à son collègue du Développement Rural,
i l est repro-
ché à ce dernier le caractère démesuré et imprécis du pro-
gramme d'aide à l'installation des jeunes agriculteurs.
(4)
Cf.
supra
(5) A titre d'exemple,
l'installation de 150 jeunes coûtera à
l'Etat ivoirien environ 180 millions de francs CFA.
Cf.
infra
section 2.

147
décide, pour des questions d'ordre idéologique, de s'engager dans
une mascarade (1).
Le choix d'une stratégie efficace en matière
d'a ide à l' i ns t a l lat ion p0 sel e d é lie a t
pro bl ème dei ' 0 rie nt a t ion
et du rôle de l'intervention de l'Etat dans ce
secteur.
Si d'un
côté, les pouvoirs publics sont hostiles à toute idée de dotation
au motif qu'elle aurait pour effet de déresponsabiliser les can-
didats à l'installation, de l'autre ils n'hésitent pas à se sub-
stituer à ces derniers en décidant pour eux.
La mauvaise orientation des choix stratégiques proposés par le
M.D.R., les contradictions liées à l'interventionnisme sont autant
de facteurs susceptibles de compromettre l'action administrative.
A ces difficultés, s'ajoutent celles liées à une mauvaise plani-
fication du projet.
B) De la planification du projet
La cohérence interne d'un projet quel qu'il soit, n'est pas garante
de son efficacité et encore moins de sa mise en oeuvre dans la
mesure où il est subordonné à une a ide financière de l'Etat. Les
aides à l'agriculture n'échappent pas à ce principe, qui doivent
trouver leur source dans le plan (2). De façon plus spécifique, le
concours financier de l'Etat dans l'installation des jeunes agri-
culteurs abordé par le plan 1981-1985 et réaffirmé par celui de
1986-1990 est posé dans des t~rmes trop généraux et imprécis pour
avoir un caractère contraignant (3).
Or financer l'installation des jeunes dans le secteur agricole
revêt deux aspects qui constituent l'essentiel de toute politique
(1)
Mascarade dont sont friands
les gouvernants africains pour
dissimuler,
feindre,
tromper ...
N'envisageait-on pas au M.D.R
l'organisation d'un séminaire national sur l'installation des
jeunes avec son inévitable lot de discours et recommandations-
certes sans effet - mais largement diffusés par la presse ?
(2)
Les fonds de garantie agricole et de bonification d'intérêts
gérés par la BNDA ont été créés en application du plan quin-
quennal 1981 -
1985.
(J)
Ce qui ne signifie nul lement que ces textes ne font pas partie
de l'ordonnancement juridique.

148
agricole:
- l'Etat agit sur les structures et les conditions de la production
en accordant au secteur agricole une aide financière conséquente,
- il effectue, de cette façon, des dépenses sociales dont le monde
rural et singulièrement le monde agricole ont cruellement be-
soin (I).
Le plan quinquennal 1981-198Q, évoquant le problème de 11 insertion
des jeunes indique de façon bien laconique que " ... les problèmes
fonciers, de crédits, de formation professionnelle spécifiques aux
cibles humaines visées, sont autant d'éléments essentiels à pren-
dre en compte dans les opérations de développement, Tout projet
qui négligera désormais cet aspect sera réputé non conforme au
plan ll (2).
La spécificité de cette disposition est d'exercer à l'égard de
l'autorité administrative ce que nous appellerons une contrainte
passive. A qui incombe-t-il la charge d'élaborer ces différentes
politiques, notamment celles relatives au crédit? Aux gouvernants,
sans aucun doute. Seulement le texte pose une obligation de ne pas
faire et non une obl igation de faire. A cet égard, il
présente peu
d'intérêt.
C'est pourquoi le projet expérimental du M.D.R. tendant à instal-
ler 150 jeunes rencontre des difficultés non seulement pour les
raisons déjà évoquées mais éqalement-auraft-il
pu en €tre
autre-
ment - parce "qu'il
nlest pas inscrit d'une manièrè précise dans
les dépenses plJbl~ques '"
qui demeurent pourtantllinstrument
privilégié de la modernisation de l'agriculture.
(1) Même s'il est vrai que les dépenses à caractère social ne
sont pas celles qui préoccupent le_plus
les gouvernants du
Tiers Monde.
(2)
Le problème de la nature juridique du plan quia soulevé
bien des controverses parmi les juristes ne constitue pas
notre préoccupation première.
Le débat,
sans être épuisé,
suscite moins de passions.
Cf.
M.
MIAILLE :
"De la nature du plan" in L'interventionnisme
de la puissance publique
Etudes en l'honneur du Doyen
l
Georges PEQUIGNOT/ CERAM, Mai 1984, T.2.
pp.
489-503.

149
D'un c6té. le plan pose le principe de l'aide financière aux
jeunes désirant exercer une activité en mil ieu rural
de l'autre.
il
reste muet sur les moyens susceptibles de dynamiser le princi-
pe posé qui est dans une certaine mesure vidé de son contenu (1).
A éviter ce cadre juridique peu efficace. certains pays comme la
France ont élaboré un cadre juridique spécial destiné à guider
l'action des pouvoirs publics dans le domaine agricole notamment
dans celui de l'installation des jeunes. Celle-ci. en France moins
qu'en Côte d'Ivoire. ne saurait se réaliser sans le concours bud-
gétaire de l'Etat. Màis encore faudrait-il mieux coordonner les
actions des principales administrations agricoles (3) afin de
mieux reglementer les rapports de l'Etat avec les organismes pu-
bl ics ou para-publ ics intervenant en mi lieu rural. C'est pourquoi
les institutions prévues par le M.D.R. pour soutenir la politique
d'aide à l'installation nous paraissent inadaptées.
(1)
Cet arsenal juridique rappelle étrangement celui de l'ordre
international:
Liberté du Travail,
droit à la santé ...
(2)
"L'aide financi&re de l'Etat - édicte l'article
8 de
la loi
du 5 août 1960 d'orientation agricole - sous forme de prêts,
... de subventions ...
est accordée en priorité aux exploi-
tants agricoles ... pour les encourager
à s'installer,
lorsqu'il s'agit de jeunes agriculteurs
Les comptes de
l'aide financi&re ainsi consentie sont présentés chaque année
au Parlement . . . ".
Au législateur de 1960 s'est substitué
celui de 1980 qui a institué une nouvelle "chartre" de l'agri-
culture française.
Malgré leurs imperfections -
peut-il en être autrement ? -
ces textes constituent des outils nécessaires à la modernisa-
tion et à la restructuration de l'agriculture française.
(3)
L'existence du Minist&re du Développement Rural à côté de
celui de l'agriculture est-il utile? Nous osons en douter,
~u égard aux nombreux çonflits de compétence qui ne sont pas
de nature à faciliter
la bonne affectation des crédits publics
Cependant,
si pour des raisons politiques et économiques une
telle dualité devait 6tre maintenue ne serait-il pas plus "sage
que rel&vent de la compétence exclusive du Minist&re de
l'Agriculture toutes les activités agricoles de production
et de commercialisation ?

150
SECTION II : LA MISE EN PLACE DES STRUCTURES
La diversité de situations corollaire du caractère régional de la
nouvelle stratégie d'installation commande un interventionnisme
soupl e. 11 Etat se refusant comme par le passé. à toute interven-
tion directive. C'est pourquoi le M.D.R. envisage la création de
structures administratives déconcentrées chargées d'animer et de
suivre sur le terrain les opérations d'installation; les commu-
nautés villageoises. fer de lance de la politique d'intégration
des jeunes en milieu rural. doivent recevoir un cadre juridique
précis. susceptible de faire participer l'ensemble des popula-
tions. L'étude de ces structures à venir."l 'opportunité réelle
de leur création feront l'objet de notre paragraphe 2. Mais la
mise en place de ce dispositif sera l'oeuvre de structures déjà
existantes dont nous analyserons le rôle dans un paragraphe premier
PARAGRAPHE 1 : LES STRUCTURES ACTUELLES
Dans les termes de référence. le M.D.R. est le chef du projet
dont la mise ~n oeuvre incombe à la Direction de la Promotion
Rurale (1). Ce département technique est chargé. à partir du pro-
jet pilote pré .. établ i. d'élaborer une stratégie générale et co hé-
r e nt e vis a nt à m0 yen te rm e l ' i ns t a ~ lat ion de mil lie r s d e jeu nes.
De façon plus spécifique. le Directeur de la Promôtion Rurale
délègue ses pouvoirs au responsable de la Sous-Direction de l'ins-
tallation des jeunes qui constitue la cellule nationale chargée
de planifier et de coordonner les activités des cellules régiona-
les (2). Les promoteurs du projet indiquent qu'"il est nécessaire
de renforcer l'équipe de la Sous-Direction de l'installation -
c'est-à-dire de la cellule nationale .. en la dotant des moyens
nécessaires lui permettant de maîtriser les divers volets de
l'installation des jeunes afin de garantir, dans les relations
avec les maîtres d'oeuvre. une homogénéité d'approche".
Cette disposition pose un problème essentiel, celui des sources
de financement du projet et leur gestion par le Ministère du
Développement Rural.
(1)
Sur les attributions de la Direction de la Promotion Rurale
(D.P.R.)
voir :f"i:'jA
(2)
Sur les cellules régionales,
voir infra,
para.
2

151
Il est fait appel à l'aide étrangère pour soutenir l'effort fi-
nancier que devra consentir l'Etat ivoirien.
A) L'aide étrangère
Il est prévu la participation financière du Fonds d'Aide et de
Coopération (F.A.C.) qui accorde une subvention s'élevant à
43,5 millions de francs CFA (1) dont l'utilisation est ainsi
pro-
grammée
En mill iers de francs C. F.A.
Participation aux dotations initiales
12,810
des structures
---------------------------------------------
Formation des cadres
1, 200
---------------------------------------------
Aides
29,490
Source: Projet pilote d'aide à l'insertion des jeunes en
milieu rural. Document inédit du Ministère du Développement
Ru ra l .
En contrepartie, la coopération française s'octroie la prérogative
d'intervenir dans le projet, d'en modifier les termes, d'en pré-
ciser le contenu. Certes, le problème n'est),pas nouveau mais il
nlen est pas moins scandaleux. De fait, la liberté d'action du
M.D.R., chef de projet n'est que formelle. Constamment obligée
d'obtempérer aux injonctions de la coopération française, l'auto-
rité administrative tend à lui transférer tout ou partie de ses
compétences (2).
(1)
Convention nO 142/C/DPL/85/CIV
(2)
Nous avouons avoir été surpris de constater que les travaux
entre la coopération française et la sous-direction de l'ins-
tallation des jeunes se tenaient presque toujours en présence
d'un assistant technique du M.D.R.
S'agissait-il d'un simple
hasard ? Notre expérience sur le terrain nous invite à répon-
dre par la négative.

152
Situation illégitime classique en Afrique et singulièrement en
Côte d'Ivoire, maintes fois décriée(l) mais toujours aussi pré-
sente. La sensibilité du monde
rural, sa complexité, l'enjeu
qui représentent les jeunes dans la mutation des structures
agraires exigerait un déploiement de ressources publiques que
les finances de 11 Etat peuvent assurer.
Il appartient au pouvoir
pol itique de prendre ses responsabil ités en révisant sa concep-
tion des dépenses dites prioritaires (2).
Les conditions de sa participation au projet pilote prouvent que
cette refonte nlest pas prête de s'opérer.
B) La contribution financière de 11 Etat.
Il s'agit, pour le M.D.R., de présenter au Ministère de lléconomie
et des finances son projet pilote selon la procédure dlengagement
des dépenses publiques (3). L'aide de l'Etat évaluée à près de
180 millions de francs CFA, devrait permettre de conduire à bon
terme le projet.
Tableau des coŒts et financement
Financement
Côte d'Ivoire
F.A.C.
Structures
5.212
12.810
· Dotation initiale
212
-
· Fo nc t i onnemen t
5.000
-
F0 rm a t ion des cadres
-
1. 200
Ai des
165.500
29.490
· 1ns t r uct i-o n dossiers
29.000
19.000
Bonification intérêts
129.000
-
· Formation
-
9.890
Ac t ion d'accompagnement
7.500
-
170.714
43.500
Source: Projet pilote d'aide à l'insertion des jeunes en milieu
rural, document inédit du Ministère du développement rural
(1)
La littérature sur ce sujet est abondante.
Voir à titre d'ex-
emple,
sur le caractère extraverti
de l'économie ivoirienne:
J.A.
FAURE et J.F.
MEDARD,
op.
cit.
p.
22 à 60.
(2)
L'exemple peut sembler banal mais 43 millions représentent le
prix d'achat de quatre voitures de fonction attribuées à un
seul ministre.
Les exemples peuvent être multipliés.
(3) Cf.
P.
LALUMIERE :
"Les finances publiques". Armand Colin _
Collection U,1983" Au moment où nous rédigeons ces lignes,
les
crédits n'ont pas encore été dégagés.
C'est la subvention FAC
qui devr4it permettre de démarrer le projet.

153
Comment seront geres ces différents fonds? Un examen attentif
des documents officiels fait apparaftre quelque ambiguTté.
C) Le problème de la gestion financière du projet
L'examen de cette question semble à priori sans intérêt voire
inopportun
dans la mesure où, traditionnellement, c'est le ~1inis­
tère des finances qui a la responsabilité d'assurer le respect des
décisions financières, du moins à l'égard des administrations pu-
bl iques n'ayant pas une activité financière hors budget, même
si de plus en plus ces dernières ont tendance à vouloir s'extraire
du carcan des règles de la comptabilité publique (1). Seulement,
les termes de référence du projet pilote indiquent "qu'en atten-
dant la création des fonds régionaux d'aide à l'insertion des
jeunes en milieu rural
(2) qui devront gérer les avances initiales
(3), celles-ci seront gérées directement (4) par la Direction de
la Promotion Rurale.
Quel sens doit-on accorder à cette disposition? Signifie-t-elle
que le Directeur de la Promotion Rurale exerce les prérogatives
d'un ordonnateur et d'un comptable public? A moins qu'on ne soit
en présence d'une simple maladresse administrative et que le
Directeur de la promotion rurale 'soit seulement compétent pour
ordonner, par délégation du Ministre du Développement Rural, les
dépenses qu'il
juge nécessair-es en cours de projet, le paiement
de celles-ci étant réservé au fonctionnaire juridiquement compé-
tent.
Or dans le cas d'espèce, il s'agit de la gestion des avances ini-
tiales qui, plus précisément, sont des prêts dont la spécificité
est de n'être assortis d'aucun intérêt.
Il s'en suit que le Mi-
nistère du Développement Rural, par le biais de la D.P.R. se pro-
pose d'être distributeur de crédit au même titre qu'un établisse-
ment bancaire. Or en droit public, seul le trésor public peut
exercer des fonctions bancaires (5).
(1)
P.
LALUMIERE,
op.
cit.,
p.
317
et suive
(2)
Cf·
infPa j'4S'i
(3)
Cf·
suppa f .'11.t-1
(4) souligné pap nous
(5)
P.
LA LUMIERE,
op ..
cit.
p. 401 et suive

154
t~ais, indépendamment de cette entorse à l'orthodoxie
bancaire,
se pose le problème de l'efficacité de la distribution du crédit
par un organisme non financier. Ce procédé avait été utilisé dans
l'opération terroir tendant au financement de l'habitat rural
sur fonds publics distribués par les services régionaux du Minis-
tère de l'agriculture. Le projet s'est soldé par un echec dû essen-
tiellement au non remboursement des crédits.
En outre, l'expérience malheureuse des sociétés d'Etat chargées
il y a quelques années de distribuer directement le crédit, montre
s'il en est encore besoin que l'intervention dans ce secteur d'or-
ganismes non financiers n'est pas souhaitable (1).
En effet, ces
différentes structures - services ministériels et sociétés d'Etat-
ne maîtrisent pas le système d'encadrement et ne sont pas adaptées
à de telles fonctions.
Les prêts accordés dans ces conditions ne
sont généralement pas remboursés car considérés comme un don de
l'Etat. D'autre part, leur mutation ponctuelle en organismes de
crédit ne saurait favoriser la collecte de l'épargne dans la mesure
où elles ne disposent pas de guichets de banque, n'étant pas habi-
litées à receyoir des dépôts.
Enfin, la monétarisation de l'économie en milieu rural exige une
"bancarisation" de ce milieu qué ne saurait effectuer le Minis-
tère du Développement Rural.
C'est pourqu?i la gestion des avances initiales p~r la Direction
de la Promotion Rurale nous semble inopportune car préjudiciable
à la bonne conduite du projet. Cette mission devrait être confiée
à
un 0 r ga ni sm e s péc i a lis é com me l a BNDA s ion veut é vit e r une
décentralisation primesautière du crédit agricole.
Il convient à cet égard de s'interroger sur le rôle des organismes
auxquels devrait faire appel le M.D.R.
(1)
Au Congo,
le crédit agricole était directement lié aux moyens
financiers que l r Etat pouvait dégager sous forme de subventions.
Le crédit agricole, ainsi en marge du système financier et
bancaire n'a pu être compétitif en égard à la lourdeur admi-
nistrative et à la mauvaise gestion des fonds accordés.

155
D) L'intervention des autres organismes
1. De l a compétence de la BNDA
La BNDA est régulièrement citée comme "partenaire financier"
appelée à "collaborer" sans que sa compétence ne soit clairement
définie.
Il est stipulé, dans le document maintes fois cité du M.D.R., que
"l'accès au crédit sera facil ité grâce à une procédure d'aval
global de l'Etat pour les prêts octroyés au titre de ce projet.
Cet aval se limitera à 30 % du montant des prêts. La BNDA parti-
cipera conjointement avec la Direction de la Promotion Rurale,à
l'élaboration des dossiers technico-économiques et aux études pré-
visionnelles d'installation qui permettent de définir le montant
des prêts et leurs différentes modalités de déblocage et de rem-
b0 urs em e nt .•. Il •
L'interprétation stricte de cette disposition conduit à penser
que l'avance initiale pourra être cumulée avec un autre prêt qui,
lui, sera assorti d'un intérêt (I).
Il est d'ailleurs précisé
que 1I1 es projets retenus bénéficieront de prêts bonifiés à moyen
et long terme, ...
(et que) les prêts à court terme ne seront pas
bonifiés ll • Quelle est la place de la BNDA dans cette construction
théorique?
Avant de répondre à cette question, deux contradictions méritent
d'être levées qui existent entre les modalités de crédit fixées
par le M.D.R.
relatives à la bonification et la réglementation
qui a cours à la BNDA.
Alors que le M.D.R. n'entend pas bonifier les prêts à court terme,
ceux-ci sont en principe pris en compte par la BNDA dès lors que
le demandeur bénéficie du fonds de bonification d'intérêts.
(1)
Si le cumul dans son principe ne saurait être contesté,
on ne
peut en dire autant de son fondement.
Le jeune installé sera
doublement débiteur d'une part au niveau de l'avance initiale,
et d'autre part, du prêt qui lui aura été ainsi octroyé.
Ces
charges, même si elles ne sont pas élevées, peuvent consti-
tuer un blocage psychologique dont l'autorité administrative
devrait tenir compte.

156
D'autre part, si la bonification prévue par le M.D.R. est un taux
d ' i nt é r êt 0 s cil l a nt en t r e 6 et 8 %, cel ui env i gÙ eu r à l a BNDA
n'excède pas 5 % (1).
Ces oppositions structurelles laissent supposer que la BNDA ne
s'engagera pas financièrement dans la mesure où il existe une
inadéquation entre le modèle proposé par le M.D.R. et ses règles
de crédit!
Tout au pl us pourra-t-ell e apporter sa compétence
technique, notamment pour les études prévisionnelles.
Il 5emble pourtant que le M.D.R. espère un engagement financier
de la BNDA (2) qui devrait être facilité "grSce à une procédure
d'a val glob al de liE t a t " (3) au dem e ur a nt non pré c i sée.
Tout se passe comme si le M.D.R., fort du financement obtenu, ne
songeait pas à élaborer une stratégie globale susceptible de fa-
cil iter l'accès des jeunes au crédit. Ce projet, pour être pilote,
bénéficie d'un cadre financier exceptionnel
: subvention d'un
organisme international et aide ponctuelle de l'Etat. Notre sen-
timent est qu'il
ne s'agit nullement d'une stratégie, mais plutôt
d'une opération marginale qui, compte tenu de la cible visée, est
insignifiante: Le concours de la BNDA dans une 'politique d'instal-
lation des jeunes doit être posé à priori et non de manière inci-
dente, surtout à l'occasion d'un projet pilote qui est censé
poser les bases d'une stratégie. Il
faudrait que l'Etat renforce
sa particip~tion aux fonds de garantie agricole ~t de bonifica-
tion d'intérêts de façon à ce que tout candidat à l'installation
puisse saisir directement les services de la BNDA qui statuera
en fonction de critères définis pa.' l'autorité administrative.
En dehors de ce cadre juridique et financier, il est douteux que
le projet initié par le M.D.R. atteigne son objectif essentiel
(1)
Dans la mesure où le taux de rentabilité interne du projet
objet de la bonification est inférieur à 15 %~ ce chiffre
étaHt le taux d'intérêt débiteur fixé par la BCEAO.
(2)
Des négociations ont lieu entre le M.D.R.
et la BNDA pour
une intervention financière de cette dernière.
(3)
Sur 170.774 millions représentant la participation de l'Etat
ivoirien au projet~ il est prévu 129 millions au titre de la
bonification d'intérêts.

157
qui n'est pas d'installer 150 jeunes mais d'inaugurer une ère
nouvelle. celle d'une politique dynamique de l'Etat visant à
opérer une mutation des exploitants agricoles.
C'est pourquoi au concours financier de la BNDA s'ajoute la contri-
bution technique de certains organismes publics, bras séculiers
du développement agricole.
2. L'intervention des organismes publics à vocation agricole
Les organismes visés sont des sociétés d'Etat couramment désignées
par le sigle SODE (1). Ce sont des sociétés de production ou
d'encadrement quand elles ne sont pas spécialisées dans la commer-
cialisation des produits agricoles. Parmi ces SODE seules celles
qui ont vocation à encadrer les agriculteurs sont citées par le
projet (2). Elles n'auront qu'un rôle technique à jouer, celui
"d'amener les jeunes à maTtriser les techniques modernes de pro-
duction pour augmenter leur productivité grâce à la vulgarisation
de thèmes techniques (semis en ligne, emploi d'engrais, produits
vétérinaires ... )". Vu sous cet angle, aucune structure d'encadre-
men t n' est a prio rie xclue. Il r est e pou r l aM. D. R. à dé fin i r l e
cadre dans lequel
interviendront ces structures d'encadrement et
surtout de veiller à la bonne application du modèle retenu afin
(1)
Ces organismes,
reg~s p~r la loi sur les sociétés à partici-.
pation financière publique -
à ne pas confondre avec les so-
ciétés d'économie mixte -
sont,
pour la plupart, devenus
Etablissements publics nationaux depuis
la loi de 1983,
quoique ayant conservés leur sigle.
(2)
Cette distinction entre les SODE n'est que théorique.
En fait,
elles font toutes
"de l'encadrement" dès
lors qu'elles inter-
viennent,
comme c'est le cas,
en milieu rural.
En effet,il
s'est progressivement opéré un glissement dans
leur mission
originelle car développer une culture c'est également initier
le producteur aux techniques culturales adaptées.
Aujourd'hui
un découpage géographique permet de mieux apprécier leur
mission.
C'est ainsi que la compétence géographique de la
Compagnie Ivoirienne De Textile
(èiDT)
couvre tout le Nord
du pays tandis que l~ société pour le développement du palmier
à huile
(SODEPALM)
et la société d'assistance technique
(SATMACI) opère respectivement au Sud et au Centre du pays.

158
d'éviter que les erreurs commises par le passé ne se répètent {l}.
L'Etat, pendant longtemps producteur - il l'est d'ailleurs toujours·
a l'ambition de se convertir en encadreur des jeunes exploitants
puis en coordinateur, régulateur des activités de production en-
tre particuliers {2}. La création, par le M.D.R., de structures
nouvelles destinées à soutenir le projet pilote est-elle conforme
à cet objectif?
PARAGRAPHE 2 : LA CREATION DE STRUCTURES NOUVELLES
A} De la création de services administratifs déconcentrés
Deux cellules régionales sont prévues pour la conduite du projet
qui devraient être mises en place à partir de janvier 1987, l lune
à 11 intérieur du
pays et llautre à Abidjan {3}. Ell es seront ani-
mées par un fonctionnaire, chef de cellule, dépendant hiérarchi-
quement du Directeur de la promotion rurale auquel
il rend des
comptes.
Ingénieur des techniques agricoles ou économiste II rura lll, il sera
investi des fpnctions suivantes
- La sélection des villages,
- Le recrutement des candidatures avec l laide des comités villa-
geois,
- Le maint~en des relations entre les partenair~s,
- La bonne coordination entre les structures interventionnistes
(1)
Ces sociétés se sont toujours distinguées par un encadrement
lourd et dirigiste qui a été à la base des échecs enregistrés
à l'occasion d'opérations visant à installer de jeunes exploi-
tants agricoles
(cf.
supra).
Sur le choix d'un modèle d'enca-
drement,
cf.
nos propositions, chapitre III.
(2)
A.M.
PILLET-SCHWARTZ s'est, fort pertinemment,
posée la ques-
tion de savoir s ' i l ne s'agit pas là d'une utopie,
eu égard
à l'environnement actuel.
Anne-Marie PILLET-SCHWARTZ: Les
Grandes entreprises de culture et la promotion des paysans en
Côte d'Ivoire in Etudes Rurales,
avril-juin 1978,
nO 70,
p.67.
(3)
Si la Direction de la Promotion Rurale,
cellule nationale est
basée à Abidjan,
quel est l'intérêt de créer une cellule ré-
gionale dans
le même lieu géographique
?

159
- La participation à l'élaboration des études prévisionnelles,
- La centralisation des informations,
- Le suivi des dossiers de demande de prêts,
- Le suivi-contrôle de la mise en place des crédits et de leur
bonne utilisation, des approvisionnements, des réalisations
physiques, de la gestion.
- L'évaluation de l'efficacité du dispositif d'intervention.
A observer de près les tâches qui seront exercées par les chefs
des cellules régionales, on peut affirmer que ce sont eux les
véritables artisans du programme d'installation. Cependant, on
peut douter de l lefficacité de leur mission d'une part pour des
raisons liées à la conception'
de certaines de leurs attributions
et d'autre part pour des raisons tenant à l'opportunité de la
création de telles cellules.
1. les attributions des celluYes régionales sont-elles de nature
à favoriser 11 installation?

Nous pouvons les ranger dans deux rubriques:
- le choix de la cible
- la participation à l'élaboration des études prévisionnelles.
a) Le choix de la cible
Les cellules régionales so~t chargées de "pré-sélectionner" les.
villages susceptibles de recevoir une aide de l'Etat (1). Or tel
que le projet pilote est conduit, il apparaît que l'installation
dlune cellule régionale est postérieure à la sélection des villa-
ges (2). Comment, dans ces conditions, une cellule régionale
peut-elle procéder à une pré-sélection dès lors qui elle n'existe
ni de jure, ni de facto? Or, quoique contestable dans son prin-
(1)
Cf.
supra.
Cette attribution ne pourrait s'exercer dans le
cadre du projet pilote dans
la mesure où les villages cibles
ont déjà été retenus.
Il
faut donc croire qu'elle ne vaut
que pour l'avenir.
(2)
La cellule nationale
(D.P.R.)
est en effet compétente pour
élaborer les dossiers techniques d'identification des opéra-
tions d'installation.

160
cipe, cette opération devrait pouvoir être effectuée par des
fonctionnaires du M.O.R. en poste dans les services régionaux
du Ministère: la déconcentration du pouvoir doit, à cet effet,
soutenir la décentralisation des activités (1).
Leu r bo nnec 0 nnais san c e des réa lit é s l 0 cal es, l a néces s i té de
minimiser la charge financière de l'Etat constituent des raisons
sùffisantes pour les investir de certaines prérogatives.
Si les cellules régionales sont également chargées de recruter
les candidats à l linstallation, un profil type du jeune agricul-
teur doit être défini afin dléviter tout arbitraire.
Cependant,cette méthode dite de recrutement retenue par le M.O.R.,
nous semble inadéquate. Il eo-t été préférable de permettre aux
jeunes so" icitant une a ide financière de li Etat (2) de soumettre
librement et directement leur demande à llautorité administrative
territorialement compétente -eusse été dans lecadre dlun projet
. .
pilote - à charge pour celle-ci'de statuer à partir de critères
préalablement établis. Cette démarche ne doit-elle pas être anté-
rieure à toute opération dlinstallation ?
b) La participation à l lélaboration des "études personnelles" (3)
Ici encore, le problème est de la même nature que celui analysé
précédemment. Les études prévisionnelles ne doivent-elles pas
être antérieures au démarrage du projet? Bien plus, ne consti-
tuent-elles pas la matière première dlune stratégie' globale?
Il semble que llautorité administrative soit davantage orientée
vers l'empirisme. Or un projet pilote est un modèle à partir
duquel on s'inspire, d'où la nécessité de slentourer de toutes
les précautions utiles surtout dans un domaine aussi sensible que
(1)
Quel est l'intérêt réel,
pour les fonbtionnaires de la cellule
nationale,
d'effectuer tant 'de missions
d'investigation 'qui,
dans le cadre du projet pilote représentent une charge de
plusieurs millions de francs?
(2)
Encore faudrait-il que cette aide soit certaine et non à venir.
(3)
Etudes prévisionnelles désigne,
dans
la terminologie du
Ministère du Développement Rural un certain type d'opérations.
Voir page suivante, note nO 1.

161
l'installation en agriculture. La conception du présent projet
laisse à penser que la réglementation interviendra à posteriori,
ce qui peut paraître un peu hasardeux. Cette défaillance peut être
préjudiciable à la bonne conduite du projet (1). Les études pré-
visionnelles devraient pourtant s'entendre de tout ce qui particip
à
la conception d'une politique d'installation à savoir les pro-
blèmes liés à la disponibilité du sol, le financement de l'exploi-
tation, etc ... Ce dernier point qui constitue une préoccupation
essentielle du M.D.R. ressort aussi des attributions des cellules
régionales (2).
A ce stade de la réflexion une réponse doit être apportée à la
question suivante: est-il opportun de créer des cellules régiona-
l es ?
2. De l'opportunité de créer des cellules r:'égionales -
Si le principe d'une stratégie régionale de l'installation a
notre adhésion, il demeure que sa mise en oeuvre par le M.D.R.
suscite quelques inquiétudes. Créer autant de cellules régionales
qu'il y aura de projets d'installation nous semble superfétatoire
pour deux raisons essentielles:
(1)
Dans les termes de r.f'rence du projet,
les 'tudes p~'vision­
ne lles d 'ins ta llation sont. :
la description technique et le calendrier de mise en place
(paradoxalement d.jà .labor' s par la . cellule nationale).
-
l'.tude de rentabilit.
-
le plan de tr.sorerie
-
les bilans pr.visionnels
Une conception aussi .triqu'e de la pr.vision devrait inviter
les pouvoirs publics à plus de prudence.
(2)
Il est .vident que cette attribution restera formelle
en
l'absence de l'engagement d'une institution bancaire; on ne
saurait en effet contrôler la bonne
r~alisa.tiron d'un cr.dit
qui n'existe pas.

162
- la premlere est relative au coût; en effet, la dotation ini-
tiale de deux cellules régionales est estimée à un peu plus de
cinq millions de francs, tandis qu'il est prévu environ quatre
millions pour leur fonctionnement, soit un total de neuf millions
de francs CFA.
- la deuxième raison est d'ordre technique. La mauvaise défini-
tion des attributions de ces cellules laisse présager une certaine
lourdeur voire une incohérence dans la conduite des opérations.
C'est pourquoi le M.D.R. pourrait utilement avoir recours à ses
huit directions régionales (1) réparties sur l'ensemble du terri-
toire. L'administration ivoirienne à l'instar de bon nombres de
pays africains dispose de fonctionnaires compétents mais hélas
employés bien souvent à ne rien faire car affectés à des tâches
ne correspondant pas toujours à leur profil
(2), Quand il ne sont
pas tout simplement sous-employés. L'absence de fonctionnaires
ne saurait être ici évoquée.
En sus de la création de cellules régionales, le M.D.R. entend
instituer des comités villageois.
B) Les structures villageoises
L'installation des jeunes dans le secteur agricole suppose leur
intégration harmonieuse au sein des communautés villageoises
soucieuses de.préserver certaines valeurs traditio~nelles (3) que
la promotion sociale et économique des jeunes peut bouleverser.
A éviter des heurts susceptibles de rompre l'équilibre déjà si
précaire du monde rural, on s'attachera à associer l'ensemble
(1)
Sous réserve de changements ultérieurs.
(2)
Nous nous permettons de douter de ce slogan forgé par le
pouvoir politique et selon lequel on peut servir à tous
les
postes,
l'essentiel étant de le vouloir.
c'est peut-être ce
qui explique qu'au M.D.R.
des ingénieurs rédigent contrats
et conventions
. . .
tandis que des centaines de juristes sont
au chdmâge.
(3)
Cf.
supra,
1ère partie; i l s'agit notamment de la
prééminence
des anciens dans
l'organisation socio-économique du village.

163
des communautés villageoises aux différentes opérations d'instal-
lation en les responsabilisant; il s'agit, pour reprendre un
concept qui fait aujourd'hui autorité d'un développement auto-
centré qui devra être auto-entretenu (1).
La création en 1971, des Fonds Régionaux d'Aménagement Rural
(F.R.A.R.) visait, outre la réduction des disparités régionales,
la participation des villageois dans des opérations de développe-
ment de leur terr9ir
. Ils ont la faculté, depuis la mise en
oeuvre des programmes FRAR, de solliciter le concours financier
de l'Etat pour la réalisation d'un équipement qu'ils auront libre-
ment décidé (2), l'intervention de la puissance publique étant
subordonnée à une participation minima des villages concernés par
le projet (3).
Pour une meilleure coordination et efficacité des
programmes FRAR,les villages ont été regroupés en pays ruraux au
nombre de 1060. Le M.D.R. entend aujourd'hui
asseoir sa str~tégie
d'installation des jeunes sur ces pays ruraux dynamiques et bien
structurés qui seraient chargés de proposer des candidats à l'ins-
tallation et de participer activement à partir du projet pilote
aux installations à venir.
(1)
Sur une définition de développement auto-centré~ cf.
les
cahiers français~ nO 21J, oct. déc.
198J~ p.
6
(2)
Les demandes
sont adressées au Sous-Préfet territorialement
compétent.
Une fois par an~
le Conseil de Sous-Préfecture
statue sur ces demandes qui sont classées par programme trien-
nal.
Ces programmes prévisionnels une fois parvenus à l'auto-
rité centrale sont sectorialisés~ c'est-à-dire orientés vers
les ministères techniques pour avis ou autorisation.
Par exem-
ple~ un projet de construction d'une maternité devra recevoir
l'approbation du Ministère de la santé.
(J)
De 1974 à 1985~
sur 5.700 projets FRAR correspondants à 4.750
équipements~ pour un""investissement total d'environ 20 mil-
liards de francs
CFA~ la participation des populations s'est
élevée à 8~5 milliards~
les secteurs les plus sollicités
étant le scolaire
(50 %)
et le sanitaire. (25 % ).

164
Si l'initiative est louable, elle ne va pas sans poser des diffi-
cultés parce que, jusqu'à ce jour, les pays ruraux n'ont pas de
base légale (1)
; On ne saurait donc donner une forme juridique
à ces comités auxquels le M.D.R. espère confier d'importantes
attributions (2). Pourtant, le projet pilote s'appuie sur ces
comités qui n'existent ni en droit, ni en fait. Sans doute
faudra-t-il d'abord susciter la création de ces comités, même
de façon informelle car il s'agit dans ce domaine moins de "juri-
diser" que d'animer, de créer un esprit de collaboration et de
participation, une sorte de volontariat villageois, facteur de
développement du milieu rural.
La conception des structures, éléments essentiels dans la nouvelle
stratégie du M.D.R., reste à parfaire. Elle gagnerait à être plus
réaliste en tenant compte du droit existant et des expériences
antérieures. La création de structures lourdes et bureaucratiques
n'est guère souhaitable. Il est par contre indispensable d'encou-
rager les initiatives individuelles en mobilisant les énergies:
à l'engagement des
populations rurales doit correspondre l'enga-
gement financier de l'Etat.
CONCLUSION DU CHAPITRE 2
L'analyse de la nouvelle stratégie d'installation des jeunes
conduite par l~ Ministère du Développement Rural met en exergue
la nécessité d'un cadre juridique souple et cohérent. On ne
saurait opérer la mutation tant souhaitée des exploitants agrico-
(1)
Le découpage administratif du territoire relève de la compé-
tence du Ministère de l'Intérieur qui ne partage pas les
idées réformistes du Ministère du Développement Rural dans
la mesure où i l existe déjà~ du moins de jure~ des communes
rurales.
Or estime le M.D.R.~ ces dernières quoique "rurales"~
sont éloignées des populations parce que bureaucratiques.
(2)
Par exemple~ percevoir certaines taxes fiscales ce qui est
impossible en l'état actuel du droit ivoirien.

165
les à coups de subventions étrangères et d'aides sporadiques de
l'Etat. Au crédit bancaire doit s'ajouter une dotation d'instal-
lation des jeunes agriculteurs. Celle-ci, annuellement votée par
le Parlement serait mise à la disposition du Trésor public, puis
ventilée dans les différentes trésoreries départementales et
perceptions. L'ordonnateur de la dépense pourrait être le Préfet
ou leS 0 us - Pré f et, selon les cas, qui sol lie i te 0 bl i ga toi rem e nt
l'avis du représentant du Ministre du Développement Rural et
donne un avis conforme. Les modalités d'accès à la dotation. son
montant.seraient définis par les services du M.D.R. en fonction
des réalités régionales et divers autres facteurs.
A cette dotation pourrait s'ajouter un prêt octroyé par la BNDA
qui, dans sa forme actuelle. exige une meilleure dotation des
fonds de garantie agricole et de bonification d'intérêt.
Mais le financement n'est pas le seul élément décisionnel dans
l'installation des jeunes. Au risque d'être inopérant, il devrait
être renforcé - ou sans doute postérieur - à la compétence techni-
que et à l'engagement du demandeur.

166
CHAPI1RE 3 : L'ENSEIGNEMENT AGRICOLE. CONDITION SINE QUA NON
DEL ' 1NS TA LLATI 0 N ?
Le financement par l'Etat ou par des établissements spécialisés
du capital d'exploitation du jeune agriculteur suppose que ce
dernier soit en mesure de diriger effectivement son entreprise.
c'est-à-dire de combiner harmonieusement les différents facteurs
de la production agricole afin d'atteindre l'objectif qu'il se
sera préalablement fixé.
Il
s'agit pour le jeune exploitant de rompre avec la routine
ancestrale et de s'adapter aux exigences de l'économie moderne
l'époque de "l'agriculture de subsistance" du 18ème siècle est
révolue, et aujourd'hui, l'activité agricole n'a plus pour fonc-
tion la satisfaction des besoins d'auto-consommation d'une petite
unité économique familiale.
Si donc le travail de la terre ne doit plus être soumis aux capri-
ces de la nature, la compétence technique indispensable au jeune
agriculteur n~ saurait être non plus le fait du hasard. Elle exi-
ge une formation certaine, adaptée aux nécessités de l'économie
nationale et internationale et acquise dans des structures créées
à cet effet. L'enseignement agricole qui prépare à cette forma-
tion "comprend l'enseignement et la formation à tous les niveaux,
.
.
dans toutes les branches de l'al imentation et de l'agriculture:
agriculture proprement dite. production animale, production végé-
tale, industrie laitière, sylviculture, pisciculture. horticul-
ture, nutrition, commercialisation, économie rurale y compris le
domaine des institutions et services ruraux: crédits, coopéra-
tives, réformes agraires,vulgarisation et recherche" (1).
Ainsi défini, l'enseignement agricole en C6te d'Ivoire remonte à
la période coloniale avec la création, en 191?, d'un centre de
formation rurale délivrant un brevet professionnel d'agriculture
(1)
F.A.O.
:
"Enseignement et Formation agricoles en Afrique" ~
Rome ~ 1969 ~ p.
1

167
ouvrant l'accès à la fonction publ ique en tant que moniteur
d'agriculture
(1).
Depuis. le nombre de ces centres a sensible-
ment augmenté.
Pourtant l'incompétence technique et l'impéritie
des jeunes agriculteurs demeurent un obstacle à la modernisation
de l'agriculture ivoirienne. A éclaircir cette érJigme. nous
sommes conduit à nous interroger sur la philosophie de l'ensei-
gnement agricole en Côte d'Ivoire. A qui est-il destiné et comment
est-il organisé?
Si depuis 1984 la formation des jeunes agriculteurs relève de la
compétence du Ministère du Développement Rural. il
n'en a pas
été toujours ainsi. C'est pourquoi notre chapitre
s'articulera
autour de deux repères. Dans une première section. nous nous atta-
cherons à mettre en lumière l'oeuvre du Ministère de l'Agricul-
ture. traditionnellement compétent en matière d'enseignement et
de formation agricoles.
La deuxième section qui sera consacrée à l'action du M.D.R .• nous
permettra d'apprécier sa contribution à la formation des jeunes.
SEC TI 0 NI: L' ENS E1GNEMEN TET LA FOR MATI 0 N A'G R1COL ES SOU S LA
TUTELLE DU MINISTERE DE L'AGRI:CUL llJRE
Il n'est guère aisé de systématiser les actions de formation
tant el~es sont diffuses et parfois éphémère~. Cependant. une
observation attentive de la réglementation et de la pratique
permet de dégager une stratégie globale et cohérente. Le Minis-
tère de l'Agriculture dispose. pour exécuter sa mission. d'une
Direction de l'Enseignement et de la Formation Professionnelle
(1)
Ce centre
est~ semble-t-il~ le premier qui ait été créé par
le pouvoir colonial en Afrique Occidentale Française
(A.O.F.)
Le choix de
la Côte d'Ivoire n'est PQ8
fortuit;
le café y
fut introduit dès 1881 par Verdier et en 1925
(soit une décen-
nie après la création du centre)
le gouvernement français
décida d'intensifier la production de café pour enpayer le
monopole des exportateurs brésiliens.
Rappelons que c'était
le Sénégal et non la Côte d'Ivoire qui était la capitale de
l'A.O.F.

168
Agricoles et Forestières (1) qui "a pour mission essentielle
d'apporter un appui technique global au développement agricole
et forestier en formant des cadres opérationnels et compétents
de tous niveaux"
(2).
Cette direction est elle-même subdivisée en deux grands services
la Sous-Direction de l'Enseignement qui s'occupe de la formation
technologique par la voie scolaire et universitaire et la
Sous-Direction de la Formation Professionnelle qui est chargée
de la "coordination et du suivi des actions de formation continue
de formation permanente, de formation des agriculteurs moder-
nes"
(3).
L'étude de ces deux points fera l'objet des paragraphes
1 et 2.
PAR AG RA PH E 1 : 0 ELA CON TR 1BUT ION 0 EL' ENS E1GNEMEN T AGR 1COL E A
LA FORMATION DES JEUNES AGRICULTEURS
Sous tutelle du Ministère de l'Agriculture, il est dispensé par
le seul secteur public bien qu'en Côte d'Ivoire l'éducation sco-
laire ou universitaire ne soit pas un monopole de l'Etat. Le
secteur privé qui a contribué à vivifier les différents secteurs
économiques du pays ne s'est jamais intéressé à l'enseignement
agricole jugé non productif par les investisseurs.
Il s'en suit
que si l'Etat jouit d'un monopole de fait, cela est da à la
philosophie qui a toujours guidé la formation agricole en Côte
d'Ivoire. Une réflexion sur cette conception de l'enseignement
agricole (A) permettra de mieux comprendre son organisation (B).
A) La philosophie de l'enseignement public agricole
Elle a été posée dès 1912 par l'administration coloniale (4) et
est contenue dans ce slogan qui aujourd'hui fait école: "la for-
(1)
Depuis la fin de
l'année 1986, le Ministère de l'Agriculture
et des Eaux et Forêts a été scindé en deux Ministères distincts,
celui de l'Agriculture d'une part et celui des Eaux et Forêts
d'autre part.
A ce jour,
nous ne disposons pas du nouveau texte.
(2)
Décret de 1984 fixant les attributions du Ministère de l'Agri-
culture et des Eaux et Forêts.
(3)
Ministère de l'Agriculture, Direction de l'Enseignement,
programme d'action pré-cité.
(4)
Voir supra.

169
mation des formateurs".
L'analphabétisation des populations,
leur attachement
à des techniques culturales peu
performantes,
a conduit le pouvoir colonial à concevoir la formation d'une
élite qui à son tour enseignerait les agriculteurs avec des
méthodes de vulgarisation. Ce système, simple et souple, avait
l'avantage d'être réaliste et adapté même s'il n'avait pas pour
objet de concourir à la promotion des producteurs (1).
Aujourd'hui, "la formation des formateurs", telle qu'elle fut
initiée par l'administration coloniale demeure le principe de
base de l'enseignement agricole (2), d'abord et essentiellement
conçu pour développer la production agricole par le biais de
fonctionnaires souvent zélés (3). Cette philosophie séculaire de
(1)
Le travail forcé,
institué pour faire
prospérer les exploi-
tations agricoles des colons est la preuve que l'encadrement
technique dont pouvait bénéficier les paysans n'avait pas
pour objet de les instruire.
(2)
Il en est de même pour la plupart des anciennes colonies
françaises
qui préfèrent former des diplômés de l'enseignement
général
. . .
destinés au chômage.
En France,
"l'enseignement et
la formation professionnelle agricole s'adressent aux adoles-
cents des deux sexes et ont pour objét . . . d'assurer une forma-
tion professionnelle de qualification et de spécialisation
aux futurs agriculteurs . . . et de préparer pour la profession
agricole . . . des exploitants hautement qualifiés".
(J)
La nécessité de la formation professionnelle a été affirmée
en 1955 par les travaux de la J8ème session de la Conférence
Internationale du Travail
(OIT).
La conférence, suite à ses
travaux devait lors de sa J9ème session de 1956, définir les
principes et objectifs de la formation agricole.
Celle-ci doit
itre dispensée "aux hommes et aux femmes appartenant à diver-
ses catégories de
la population agricole . . . (afin)de leur don-
ner le sentiment de l'importance sociale du travail qu'ils
effectuent et de mettre en valeur la profession agricole aux
yeux du public en général
. . . (c'est pourquoi)
la formation
devrait itre adaptée progressivement à la capacité de la popu-
lation agricole d'assimiler
l'instruction~.. et devrait itre
conçue de façon qu'en fin de compte,
la population rurale
puisse . . . recevoir une instruction et une formation qui soit
équivalentes . . . à celles dont bénéficie la population urbaine".
Cette pecommandation de l'OIT reste actuelle et devrait enfin
itre mise en oeuVY'e
DaY' leR aouve'Y'nnn-tR'1~1Jni'Y''1~enR (1Jn'1~'Y' inr'Y'n J .

170
l'enseignement agricole nous semble incompatible avec une poli-
tique visant à opérer une mutation des exploitations agricoles.
Le taux actuel de scolarisation (1), le chômage des jeunes, le
développement des techniques agraires, commandent que l'on se
débarasse d'intermédiaires encombrants dont on peut douter de
la capacité à traduire des messages à des agriculteurs ayant le
mêm e nive a u s col air e qu' eux ( 2 ).
Fau t - i l r a ppel e r que l a pré sen t e
étude se limite à une frange de la population agricole: les
jeunes. La formation de ces derniers se pose en des termes dif-
férents de ceux des agriculteurs dits traditionnels; les pre-
miers, souvent scolarisés sont plus ouverts sur le monde extérieur
à la différence de leurs ainés, conservateurs et rebelles aux
techniques agricoles modernes (3).
Les en c adr e urs a gr i col es, cha r gé s de vul ga ris e r auprè s
des pa ysa ns
les techniques culturales modernes ont bien des difficultés à
exécuter leur mission non seulement parce que leur formation
réste à parfaire (4) mais, de surcroft, parce qu'ils sont confron-
tés à des problèmes relationnels, de communication (5).
(1)
Aujourd'h~i le taux de scolarisation excède 70 %
(2)
Notre pensée mérite d'être précisée.
Il ne s'agit pas d'arrê-
ter de former des techniciens de l'agriculture ou des vulga-
risateurs
(sur cette dernière notion voir infra)~ car il
n'est pas douteux que "la vulgarisation~ la recherche et
l'enseignement constituent~ dans le domaine agricole~ trois
des services essentiels qu'un gouvernement se doit de fournir
pour assurer le développement agricole du pays".
C.W.
CHANG:
"Comment dévelo2per la production alimentaire par l'éducation
la recherche et la vulgarisation" FAO~ Rome~ 1963.
Seulement~ l'enseignement agricole gagnerait à être adapté au
développement économique et social.
Dans le cas ivoirien~
cette adaptation aujourd'hui suppose la formation technique
et professionnelle des futurs agriculteurs de plus en plus
issus d~s établissements d'enseignement général.
(3)
Notre
étude étant consacrée aux problèmes relatifs à l'ins-
tallation des jeunes dans le secteur agricole~ la formation
professionnelle des agriculteurs traditionnels ne sera abor-
dée qu'incidemment.
(4)
Voir infra~ nos développements sur l'organisation de l'ensei-
gnement agricole.
(5)
Voir à ce sujet P.
CHANTRAN, \\"lo. vulgarisation en Afrique et à

171
Pourquoi ne pas, dans ces conditions, permettre aux futurs
exploitants agricoles de bénéficier directement d'une formation
de haut niveau?
Au plan juridique, la réponse à cette question est donnée par
1a st rue t ure de 1 a Di r e c t ion de l' Ens e i g nem e nt du Min i st ère de
l'Agriculture qui a pour mission essentielle, outre la formation
des techniciens et cadres de l'agriculture, la définition de
modules de recherche sur la manière de mieux diffuser le progrès
agricole auprès des paysans (1).
C'est cette philosophie qui expl ique que l'enseignement agricole
soit en marge du système éducatif.
B) L'organisation de l'enseignement agricole public
On peut distinguer l'enseignement supérieur de l'enseignement
intermédiaire.
1. L'enseignement supérieur
L'enseignement agricole au niveau universitaire est, en Côte
d'Ivoire, dispensé par deux établissements: l'Ecole Nationale
Supérieure d'Agronomie (EN5A) et l'Institut Agricole de Bouaké
(IAB) (2).
a)
~~~~~~
Elle a.vocation à former des ingénieurs agronomes destinés au
Ministère de l'Agriculture et à celui du Développement Rural.
On y accède par voie de concours à condition d'être titulaire
d'un diplôme universitaire d'études scientifiques.
L'institut agricole de Bouadké a pour mi~sion la formation d'in-
génieurs, des techniques agricoles forestière~ d'élevage ... Y
ont accès par voie de concours les titulaires du baccalauréat.
(1)
Le droit étant construit et non donné,
à cet obstacle juridi-
que s'ajoutent bien entendu les raisons politiques que nous
n'avons cessé d'évoquer tout au long de ce travail
(voir
supra,
1ère et 2ème partie, chapitre 1).
Bien plus, ce sont
les résistances politiques qui déterminent la règle de droit.
(2)
BOUAKE est la deuxième capitale économique de la Côte d'Ivoire

172
Les débouchés offerts aux étudiants sortant aussi bien de
l'ENSA que de l'IAB sont essentiellement ceux de la Fonction
Publique. Il
n'existe malheureusement pas de statistiques pré-
cises sur les carrières qu'embrassent les jeunes diplômés, mais
une observation attentive de la réalité et le rapport entre
ceux qui sont recrutés par la Fonction Publique et le nombre
de sortants permet d1affirmer que trés peu choisissent la pro-
fession d'agriculteur. Une telle orientation n'est au demeurant
pas surprenante dans le mesure où, dès l'origine, les candidats
â ces différents concours sont appelés â !tre des "cadres de
l'Agriculture" (1). D'ailleurs, le Ministère de l'Agriculture
ne met-il pas "de plus en plus l'accent sur la formation â
l ' emplo i a fin d' é vit e r l e c hôm age des d i pl ôm é s" ? (2). Une tel l e
menace pèse-t-elle sur les élèves des établissements agricoles
seconda ires ? ~
(1)
Depuis quelque deux ans a été introduit dans l'enseignement
primaire un cours d'initiation à l'agriculture visant à fami-
liariser les enfants à l'activité agricole et surtout à leur
apprendre' à aimer le métier de la terre. Cette réforme~ satisfai-
sante en eUe-même~ restera
sans effet si on ne prévoit pas -
ce
qui est actuellement le cas -
des structures susceptibles
d'intégrer les adolescents désirant être des exploitants
agricoles~ A moins~ bien entendu~ que les pouvôirs publics
considèrent que les rudiments reçus à l'école primaire cons-
tituent une formation agricole suffisante ...
(2)
Programme Annuel d'Action 1985.
Document inédit de la
Direction de l'Enseignement et de la Formation Profession-
nelle Agricoles et Forestières~ Ministère de l'Agriculture.
Bien entendu~ du fait que la Côte d'Ivoire soit un pays à
vocation agricole~ il semble superflu d'insister sur le
rôle de l'enseignement agricole supérieur qui doit permettre
de former des cadres compétents pour la recherche et l'en-
seignement dans les écoles d'agriculture pour une meilleure
efficacité de la vulgarisation et des rendements agricoles.
Mais encore faut-il que les élèves issus de l'ENSA et de
l'IAB soient utilisés à bon escient; pour l'année 1983-1984~
l'ENSA délivrait 68 diplômes d'ingénieurs agronomes tandis
que l'IAB 40 diplômes d'ingénieurs des techniques.
N'est-il
pas paradoxal~ eu
égard aux besoins de l'agriculture ivoi-
rienne.
au'il u ait des aaronomes menacés vap le éhômaae ?

173
2. L'enseignement intermédiaire
Nous désignons par enseignement intermédiaire les premier
et
deuxième cycles des collèges et lycées agricoles. Le Ministère
de l'Agriculture dispose de cinq écoles nationales dont deux
établissements d'enseignement agricole, les
trois autres prépa-
rant les jeunes aux carrières forestières.
Pour les besoins de
notre étude nous ne retiendrons que les deux premiers, les éco-
les forestières n'ayant pas vocation à former ni des exploitants
agricoles, ni des encadreurs agricoles.
Cet établissement a pour mission la formation d'Assistants des
productions végétale et animale (APVA). Il accueille les jeunes
gens et jeunes filles titulaires du BEPC (2), ayant subi avec
succès un concours organisé annuellement par le Ministère de
l'Agriculture. La formation dure cinq ans et est sanctionnée par
le Brevet Supérieur Professionnel d'Agriculture (BSPA) ou de
Coopération (BSPC}.Les jeunes diplômés sont à la sortie de
l'école intégrés ipso facto à la Fonction Publique et chargés
de l'encadrement direct des paysans.
b) ~~_f~~!:~_~~_f~:~~!l~~_~~:~l~_~:~p~~~~~~~~
Ce centre forme des Moniteurs des Productions Végétale et Anima-
le (M.P.V.A.). Etablissement mixte, il est ouvert sur concours
aux jeunes titulaires du BEPC. Les études, d'une durée de deux
ans, permettent aux plus méritants d'obtenir le Brevet Profes-
s ion ne l d' Ag r i cul tu r e Tr 0 pic ale (B. P. A. T. ). 1cie ncor e, les
élèves sont chargés, à l'issue de leur formation de l'encadrement
des paysans et "sont le plus près du terrain et au niveau le
plus bas de l'administration territoriale" (4).
~fi) BINGERVILLE~petiteville située au Sud de la Côte d'Ivoipe fut
pendant plusieups années de l'èpe colonia~e, la capitale admi-
nistpative du pays.
(2)
Le Bpevet d'études du ppemiep cycle sanctionne la fin des
classes de tpoisième de. l'enseignement génépal.
(3)
Abengoupou ville,
située dans l'Est ivoipien est péputée poup
sa contpibution impoptante à l'économie du café et du cacao.
(4)
Selon la tepminologie du Ministèpe de l'Agpicultupe.

174
Le lycée Agricole de
BINGERVILLE et le centre de formation rurale
présentent des simil itudes dont l'analyse critique rend compte
des faiblesses quant ~ la formation des jeunes exploitants agri-
coles modernes. On envisagera successivement les problèmes que
posent les conditions d'entrée ainsi que le contenu de la forma-
tion et ses conséquences.
c) ~~~_~~~~j!j~~~_~~~~~~~_~_~~~_~~~~_~!~p!!~~~~~~!~
Le particularisme de ces deux établissements agricoles est qu'on
y accède par voie de concours. La singularité de cette procédure
ne peut s'apprécier que par rapport au système éducatif ivoirien.
Ce dernier, malgré ses nombreuses imperfections, offre la possi-
bilité aux jeunes ayant subi avec succès la fin du premier cycle
de l'enseignement général, de poursuivre leurs études, ~ l'exclu-
sion de tout concours, soit par la voie de l'enseignement général
de cycle long, soit par celle de l'enseignement technologique
et professionnel, une commission nationale d'orientation étant
investie de cette prérogative.
Il existe donc à l'issue des classes de troisième de l'enseigne-
ment général un régime dualiste qui détermine l'avenir des
jeunes. Le premier, élitiste parce que hautement sélectif, concer-
ne la formation agricole; le deuxième, moins élitiste que le
premier, touche plus de 65 % des intéressés. Cette .situation qui
résulte d'un choix politique conscient est paradoxale pour un pays dont la
population agricole, veillissante, est incapable de s'adapter à la
technologie moderne. Les pouvoirs publics assurent aux diplômés
des établissements agricoles, la sécurité de l'emploi grâce à
leur intégration automatique à la Fonction Publique. En réalité,
ces établissements agricoles fonctionnent,toutes proportions gar-
dées, comme des écoles d'administration, dans la mesure où l'Etat
s'engage à être le futur employeur. D'ailleurs, le fait que les
élèves du Lycée Agricole de BINGERVILLE
et du Centre de formation
rurale d'Abengourou perçoivent pendant leur scolarité une bourse
de la Fonction Publique - qui n'est qu'un pré-salaire - est
suffisamment éloquent. En effet, dans le système ivoirien, seuls

175
les élèves qui sont assurés - voire qui sont tenus - d'être
fonctionnaires jouissent de ce qu'il
convient d'appeler un pri-
vilége (l).
C'est sans aucun doute ce privilége qui justifie le taux de re-
crutement comme l'atteste le tableau suivant pour les résultats
des concours au titre de l'année scolaire 1983 - 1984.
Nombre de
Nombre de
Taux de
ANNEE 1983-1984
candidats
candidats admis
réussite
Lycée Agricole de
Bingerville
2.591
65
2,5 %
--------------------- ----------- --------------- -------------
Centre de Formation
Rurale d'Abengourou
1. 591
60
3 ,8 %
Source: Programme Annuel d'Action prée.
Pour la m€me
année, le Lycée de Bingerville et le Centre de For-
mation d'Abengourou ont formé respectivement quarante deux A.P.V.A
et trente et un M.P.V.A.
(2) soit un total de soixante treize
agents destinés à servir à la Fonction Publique tandis que le
nombre de jeunes susceptibles d'intégrer le secteur agricole,
excède, tous niveaux confondus, sept cent mille (3). Dans ces
conditions la formation tant souhaitée des jeunes agriculteurs (4)
(1)
Privilège d'une part à cause du montant relativement élevé de
la bourse -
30.000 francs
CFA par mois pour le Lycée de
Bingerville contre 12.000 francs
CFA par trimestre pour les
élèves suivant un enseignement non agricole -
et d'autre part,
cela va de soi,
pour la garantie de l'emploi.
(2)
Sur la signification de ces sigles,
voir supra.
(3)
Voir étude CINAM,
op.
cit.
(4)
Le Ministre du Développement Rural avait demandé à tous les
Préfets de Côte d'Ivoire,
d'élaborer avec le concours des
services techniques déconcentrés une étude sur les problèmes
liés à l'insertion des jeunes en milieu rural.
Bien qu'à ce
jour nous ne disposions que de résultats partiels, i l appa-
ra~t que la formation professionnelle des futurs agriculteurs
constitue une préoccupation réelle.

176
demeure un leurre.
Il
est indispensable de repenser les condi-
tions d'entrée dans les établissements agricoles qu'on gagnerait
à multiplier (1).
Au niveau des conditions d'accès, la voie du concours ne semble
pas être la meilleure. On pourrait lui substituer le système de
l'orientation qui serait effectuée non par une Commission Nationa-
le, mais par des Commissions Régionales sur avis du Conseil des
professeurs siégeant par étabi issement. A cet égard, il est
souhaitable que le niveau requis soit celui des classes de troi-
sième ou de cinquième des collèges d'enseignement général. On
pourrait en outre prévoir
une formation agricole adaptée aux
jeunes gens ayant achevé à un âge relativement avancé leur cycle
primaire (2).
(1)
Les élèves issus des classes de troisième et appelés à
suivre majoritairement un enseignement général du second
cycle rencontrent sur leur parcours deux obstacles ;
le pre-
mier est le bac probatoire examen qu'ils subissent en classe
de prem~ere et sans lequel il ne peuvent accéder à une clas-
se de terminale ;
le deuxième est le baccalauréat proprement
dit.
La réussite de ce dernier examen n'est pas un gage pour
l'avenir dans
la mesure où chaque année~ des centaines de
jeunes ne sont pas orientés par la Commission Nationale
d'Orientation à l'Université ou dans
les grandes écoles.
Or~
en Côte d'Ivoire~ l'inscription dans
les
établissements pu-
blics supérieurs n'est pas libre.
C'est pourquoi tous ces
jeunes rejetés par le système éducatif sont~ en l'absence de
toute formation professionnelle~ condamnés au chômage.
N'est-il pas grand temps de les orienter vers le métier
d'agriculteur?
(2)
Il n'est pas rare~ surtout en milieu rural~ que les écoliers
achèvent le cycle primaire à 14 ou 15 ans.
Or l'orientation
à l'issue des classes de troisième tient compte de l'age
des candidats.
Ainsi~ un élève ayant satisfait aux examens
sanctionnant la fin du premier cycle des
établi8s~ments
d'enseignement général~ aura peu de chance dr.être orienté
s ' i l a plus de 18 ans.
Conduire cet adolescent jusqu'au
brevet d'études pour ensuite l'abandonner sans qualification~
ne releve-t-il pas d'une inconscience voire d'un sadisme
politique
?

177
Auni veau des s t r uc t ure s d' a c c ue il, e n. a t t end a nt
l' éd i fic a t ion d e
nouvelles
infrastructures, des établissements d'enseignement gé-
néral
pourront être transformés en écoles d'agricultures ou tout
au moins scindés en deux. Car est-il
sensé de former dans les établis-
sements
d'enseignement général un nombre important voire pléthorique
d'élèves dont on est assuré qu'ils iront grossir le nombre de chô-
meurs?
t1 ais
e n a t t end a nt
que s e des sin e nt
à
l 1 ho riz 0 n d ete l les
mesures, les écoles secondaires d'agriculture, outre qu'elles présentent
des co nd it ion s d' a c c è sin c 0 mpat i bles a v e c l ' i ns t a l lat ion des jeu n e s
agriculteurs, offrent à leurs élèves une formation peu adaptée.
d)_~~_~9~!~~~_~~_l~_f~~~~!j~~_~!_~~~_~~~~~9~~~~~~-
Les élèves du Lycée Agricole de Bingerville et du Centre de Forma-
tion Rurale d'Abengourou étant donc destinés à l'encadrement paysa·
nal, leur formation
devrait logiquement tenir compte de leurs fu-
turs interlocuteurs: les exploitants agricoles. Ces derniers cons
tituent unmonde
hétérogène parmi lequel on peut distinguer les
jeunes des moins jeunes, les analphabétes des non-analphabétes,
les diplômés des non-diplômés.
L'encadrement,outre son
caractère intuitu
personae, s'inscritdans le cadre global du mi-
l ieu rural. Or de plus en plus, les mots vulgarisation ou encadre-
ment ont un c6té péjoratif qu~ ,personne ne saurait nier (1). Le
(1)
Pourtant, la vU,lgarisation est d'finie par la FAO comme "un
service éducatif, extra-scolaire et d'nué
de formalisme, qui
vise à former
les agriculteurs
(et
leurs familles)
et à les
amener à adopter des méthodes amélior'es de production, d'ex-
ploitation, de conservation et de commercialisation sur
le
double plan de la culture et de
l'élevage.
La vulgarisation
agricole a pour but non seulement de dispenser un enseignement
et d'assurer
l'adoption de telle ou telle pratique améliorée,
mais aussi de modifier l'optique de
l'agriculteur de façon
qu'il s'int'resse aux moyens d'am'liorer
son
activité agrico-
le et son foyer et les recherche
sans cesse de son propre
chef".
c i t ' par C.W.
CHANG in "Comment d'velopper
la produc-
tion alimentaire par l"ducation, la recherche et la vulgari-
sation".
FAO, Rome, 1963.

178
formateur, imbu
de son savoir, se hisse sur un piedestal qui
rend la communication difficile. Cette difficulté ne pourra que
s'accroître dans la mesure où les formateurs issus des écoles
d'agricultures auront
à encadrer des exploitants agricoles par-
tageant avec eux le même niveau scolaire. Cette approche souvent
dédaigneuse du milieu rural résulte de la formation quelque peu
étriquée reçue dans les étab1 issements agricoles. En effet, sur
le plan pratique, la formation reste à parfaire. Les élèves ne
sont pas suffisamment "imprégnés des réal ités et contra intes du
milieu agricole (I).
Les stages ne sont pas réalisés dans les
exploitations agricoles mais dans les organismes pub1 ics interve-
nant en milieu rural. L'élève n'apprend pas, durant sa formation,
à
côtoyer
le monde qui sera le sien, à mieux le comprendre pour
ne faire qu'un avec cet univers si différent de la ville. En dé-
finitive, être fils de paysan ne saurait être significatif dans
la mesure où un long séjour en milieu urbain aura contribuer à
modifier des comportements d'homme jugé attardé (2).
Cette ré-orientation de l'enseignement public agricole en C6te
d 1 1v0 ire a ux .f i ns d e for mer des che f s d' exp loi ta t ion dy na mi que set
à l'esprit créatif, passe nécessairement par une valorisation
réelle du métier d'agriculteur. Ce projet entre dans un cadre glo-
bal qui intégre plusieurs éléments comme les groupements profes-
s ion ne 1s,le s y nd i cal i sm e . pa y san, 1are pré sen ta t ion des i nt ér êt s
(1)
En Allemagne Fédérale,
les candidats aux établissements
supérieurs agricoles doivent avoir passés dix huit mois
(soit deux cycles culturaux complets) dans une ferme agréée
afin d'acquérir une expérience pratique.
OCDE:
L'Enseignement agricole au niveau universitaire, 1965.
(2)
C'est l'image encore classique du paysan africain méprisé
par l'homme de la ville et que les gouvernants doivent
combattre en essayant d'établir
la parité -
économique,
le
reste suivra -
entre l'agriculture et les autres activités
économiques.

179
agricoles (1). L'Etat pourrait également faire appel au secteur
pri v é na t ion a l qui con tri bue dé j à a u d é ve l 0 pp em e nt de l' en sei g ne -
ment général et technologique non agricole (2). Mais l'initiative
privée n'est pas
philanthrope: il appartiendra à l'Etat de créer
les conditions susceptibles d'orienter les jeunes vers les métiers
de la terre. C'est pourquoi toute réforme de l'enseignement agri-
cole devrait être accompagnée ou précédée d'un ensemble de mesures
juridiques. économiques et sociales (3).
(1)
En application de la loi 60-340 du 28 novembre 1960 portant
institution des Assemblées représentatives des intérêts
économiques en Côte d'Ivoire,
fut pris le décret nO 64-20
du 9 janvier 1964 portant organisation des chambres d'agri-
cultures qui sont, aux termes de l'article 2 alinéa 1 dudit
décret "auprls des pouvoirs publics, les organes consultatifs
et professionne l s des intérêts agrico les de
la Na tion".
C'est le décret nO 64-21 du 9 janvier 1964 qui porte création
de la chambre d'Agriculture de Côte d'Ivoire dont le siège
es t
à Abidjan.
Il existe donc en Côte d'Ivoire un Chambre d'Agriculture
unique représentée par un bureau élu parmi ses membres
(article 46 nouveau du décret 66-182 du 14 mai 1966 modifiant
le décret nO 64-20 du 9 janvier 1960 portantorganisat~on des
chambres d'agriculture)
pour une durée de deux ans.
Pourtant,
depuis
le premier bureau constitué en 1966, i l n'y eut jamais
plus d'élection jusqu'à ce jour.
Les membres du bureau sont
"reconduits" par le pouvoir exécutif.
La Chambre d'Agriculture dans ces conditions de fonctionnement
représente-t-elle vraiment les intérêts agricoles de la Nation
(2)
Contribution qui tend a être plus quantitative que qualitative
En effet,
les établissements privés respectent de moins en
moins les normes imposées par les Ministères de Tutelle:
effectif des
élèves, qualité des
locaux,
niveau universitaire
des enseignants.
Le contrôle souvent laxiste de l'autorité
administrative peut contribuer, si l'on n'y prend garde, à la
déliquescence de
l'enseignement privé.
(3)
Cet environnement institutionnel concerne aussi bien les reve-
nus et le niveau de vie,
l'équilibre en matière d'emploi entre
l'agriculture et les autres branches d'activités, la sécurité
de
l'emploi, le droit agraire ...

180
Cependant, une refonte de l'enseignement agricole par la voie
scolaire ou universitaire ne fait pas obstacle à l'indispensable
formation professionnelle qui doit permettre aux jeunes issus ou
non des écoles d'agriculture de suivre l'évolution de techniques
agricoles et au besoin, de s'y adapter.
PARAGRAPHE 2 : LA FORMATION
PROFESSIONNELLE DES JEUNES
AGRICUL TEURS
La formation professionnelle agricole peut être définie comme
l'enseignement dispensé par la voie non scolaire à des agricul-
teurs, afin de leur permettre de mieux diriger leur exploitation,
et à des jeunes gens et jeunes filles qui, se destinant à l'agri-
culture, n'ont pas suivi un enseignement technique agricole dans
les lycées et collèges. L'objet de notre étude nous conduira à
retenir le deuxième volet de cette définition, c'est-à-dire la
formation professfonnelle des jeunes.
Cette "formation devrait viser à inculquer aux élèves des techni-
ques et des méthodes de travail approprlees, à développer leur
capacité de Jugement ... à leur apprendre à organiser les opé-
rations agricoles et à leur enseigner les principes et les métho-
des de gestion des exploitations agricoles ... " (1).
Le système de formation en vigueur en Côte d'Ivoire vise-t-il à
réa lis e r cet 0 bj e c tif ? A l a' d i f f é r e ne e de l ' e nsei g nemen t tee hni -'
que, la formation professionnelle dans l'agriculture n'est pas
dispensée par le seul secteur public. C'est pourquoi notre réfle-
xion portera d'une part sur son organisation par les structures
étatiques, (A), et d'autre part sur l'action des institutions
privées (B).
A) La formation professionnelle des jeunes sous l'égide du
Ministère de l 'Agricultur~
La Conférence Internationale du
Travail recommandait Il ••• (aux
a~torités publiques et (aux) autres organismes appropriés
(de)
(1)
Projet de recommandation de la trente neuvième session de la
Conférence Internationale du Travail, document déjà cité.

181
faire en sorte que la formation professionnelle dans l'agriculture
soit organisée selon un programme efficace, systématigue et coor-
donné ll (1).
La formation professionnelle en Côte d'Ivoire ne semble pas obéir
à cette
trilogie
tant elle est diffuse et mouvante; elle est
pourtant le moyen privilégié retenu par les autorités ivoiriennes
pour former et éventuellement perfectionner les exploitants agri-
coles (2) , l'enseignement technique étant destiné aux fonction'"'
naires de l'agriculture (3). Les quelques écoles pratiques dis-
pensant une formation agricole disséminées çà et là sur le ter-
ritoire ne retiendront pas notre attention dans le cadre de cette
étude pour une raison essentielle et dans le cas d'ëspèce suffi-
sante: elles n'ont pas pour objet de former de véritables ex-
ploitants agricoles, c'est-à-dire des agriculteurs possédant des
compétences techniques économiques et agricoles suffisantes qui
leur permettraient de diriger de façon effective et autonome une
exploitation agricole (4).
(1)
B.I.T., op.
cit.
(2)
La formation professionnelle agricole en Côte d'Ivoire et
dans un nombre important de pays africains
(Burkina,
Faso,
Niger,
Benin . .. ), se distingue fondamentalement de la for-
mation dans les pays développés comme la France j
dans les
premiers cas, à
la différence du deuxième groupe cité,
la
formation ne s'adresse pas à des agriculteurs possédant déjà
un minimum de connaissances techniques mais plutôt empiriques.
Lorsqu'elle s'adresse à de jeunes scolarisés, cette formation
est souvent dispensée au rabais
(voir infra).
(:5)
Voir Supra '1' .--16~ c.i:. -1 1~
(4)
Cette formation, un peu trop polyvalente, excède rarement
une année.

182
En réalité, la formation professionnelle agricole des jeunes est
l'oeuvre des structures d'encadrement intervenant en milieu ru-
ral
(I).
Elle a lieu
soit à l'occasion d'un projet d'installa-
tion de jeunes agriculteurs, soit de façon
incidente.
1. La formation
professionnelle à l'occasion d'un projet
d'installation
Il
s'agira moins de décrire les différentes opérations d'instal-
lation que d'analyser l'esprit qui
préside à la formation des
jeunes. Celle-ci est effectuée, soit à priori, soit de façon
concomitante.
a) h~_f~~~~!j9~_~_P~j9!1
Elle s'effectue avant l'installation sur l'exploitation agrico1e(2
par la structure d'encadrement initiatrice
ou "martre d'oeuvre" du
pro jet. Lep u b1 i c - c i b1 e, nu mé ri q u em en t i n sig nif i an t , r e ç 0 i t des
rudiments
de techniques culturales.
Ainsi, dans le cas du Comité
des volontaires pour le développement
(3), les
jeunes, durant le
(1)
Depuis 1984,
un certain nombre de sociétés d'Etat ne sont
plus sous la tutelle du Ministère de l'Agriculture mais sous
celle du M.D.R.
Ces développements concernent donc l'action
de ces organismes publics .lorsqu'ils étaient sous la tutelle
du Ministère de l'Agriculture.
Ce sont essentiellement:
-
La SODEFEL
(Fruits et légumes)
-
La SODEPALM (Palmier à huile,
riz, mais, marioc)
-
La MOTORAGRI
(Mécanisation)
-
La SATMACI (Assistance Technique aux agriculteurs).
Ces organismes sont depuis
1984 sous la tutelle technique du
M.D.R.
D'autre part,
les centres de formation agricole en
Côte d'Ivoire s'adressent pour la plupart à des agriculteurs
déjà installés; c'est pourquoi,
ne s'adressant pas spécifi-
quement aux jeunes, futurs
exploitants agl'icoles, nous les
excluerons de
l'analyse.
(2)
Sur la nature de cette installation et le titre juridique que
détient le jeune exploitant,
voir supra,
1ère partie.
(3)
Le Comité des Volontaires pour le Développement a été créé en
1973 à l'initiative d'un groupe de jeunes se destinant à
l'agriculture.

183
premier cycle de six mois, sont initiés aux travaux agricoles,
pu i s à l' 0 c cas ion d' und eux i ème' cyc l e appr ennent· lac ul tu r e qu' il s
auront à pratiquer sous l'égide de l'organisme encadreur.
Il s'agit d'une formation minimum et orientée, concernant des
jeunes de niveau d'études différent
qui, à l'issue de ce stage,
sont installés sur un périmètre donné. Mais cette formation peut
se faire également en cours d'installation.
b} ~~_f~!~2!j~~_~~~~~~j!~~!~_~_!~!~~!~!!~!!~~
Cette formation démarre en même temps que le jeune reçoit une
parcelle cultivable. Elle est souvent exclusive d'une initiation
générale au travail agricole. Les jeunes suivent les directives
de la société d'encadrement et sont censés acquérir progressive-
ment la technique culturale que leur enseigne les responsables
de l'encadrement.
Quelles que soient les variantes qui peuvent être introduites
dans ces deux types de formation, des similitudes existent qu'il
nous faut relever.
Il ne s'agit pas d'une formation profession-
nelle agricole mais de l'apprentissage d'une culture donnée. Il
s'en suit que les jeunes à l'issue de leur stage ne peuvent
gérer de façon autonome une exploitation agricole. En effet, tout
le long de la "formation", c'est la structure d'encadrement qui
organise péremptoirement l,e travail tant au niveau des horaires,
qu'à celui du planning,
elle finance les équipements et les cam-
pagnes de commercialisation. Bien plus, la formation ne tient
pas compte des différences qui existent entre le niveau d'études
des jeunes; elle s'adresse donc indifféremment à tous.
Conséquemment, aux lieu et place d'exploitants agricoles, les
organismes étatiques intervenant en milieu rural et responsables
des différentes opérations d'installation forment des ouvriers
agricoles aux connaissances étriquées et très vite las du métier
de la terre. Le profil et le contenu de cette formation profes-
sionnelle agricole se trouvent-i.ls lorsque l'encadrement ne tient
pas compte de l,!ge des agriculteurs?

184
2. La formation "incidente" des jeunes
Dans ce cas de figure, la formation n'est pas spécifiquement
destinée aux jeunes; elle s'adresse à un ensemble d'agriculteurs
de tous âges et de niveau scolaire différent.
Elle peut se dérou-
ler dans le cadre d'ateliers de formation où les paysans reçoi-
vent de façon rotative des cours accélérés. Mais cette formule
dont l'efficacité ne fait pas de doute (1) est loin de constituer
le régime de droit commun. En effet, les structures d'interven-
tion du Ministère de l'agriculture préfèrent conclure avec les
paysans des conventions d'encadrement. A l'obl igation de l'orga-
nisme publ ic de dispenser l'assistance technique et de fournir
certains facteurs de la production agricole, correspond l'enga-
gement de l'agriculteur à suivre scrupuleusement les conseils
et directives qui lui seront adressés (2). Bien entendu, les
planteurs ne sont pas juridiquement tenus d'avoir cette relation
contractuelle avec la société d'encadrement (3), mais les avan-
tages que peuvent leur procurer cette "tutelle", en fait les y
contraint (4).
(1)
C'est la méthode recommandée aux pays sous-développés, notam-
ment par le BIT,
et la FAO.
Voir BIT,
trente-neuvième session,
déjà cité et C.W.
CHANG,
déjà cité.
(2)
Dans le cadre d'une convention portant sur le café (type
arabusta)
entre la société d'assistance technique
(SATMACI)
et des agriculteurs les obligations de celle-là était de
:
- mettre en place à son compte toutes
les infrastructures
(pistes, plateformes et en cas de besoin forages)
-
fournir gratuitement aux planteurs
les sachets et les bou-
tures racinés pour l'établissement de
leurs pépinières.
- dispenser son assistance technique au moment de la planta-
tion et du suivi.
En retour,
l'encadré s'engage à "préparer le terrain" réali-
ser et entretenir la culture pratiquée sur les conseils et
directives des agents encadreu~s.
(3)
Voir J.
DUTHEIL de la ROCHF~E :
"L'Etat et le développement
économique de la C6te d'Ivoire";
Edition P~done, 1976.
(4)
La difficulté d'accéder au crédit bancaire ajoutée à la faible
l'émunértttion
des produits agricoles conduisent trés souvent les
paysans à se mettre sous la tutelle d'une structure d'encadre-
ment afin de bénéficier des avantages pré-cités.

185
Il s'agit en effet moins de formation que du dirigisme d'une
structure étatique dans le but de développer la production
d'une culture donnée (1) . Cette approche n'est pas de nature à
donner aux jeunes, selon les cas, une instruction générale et
(ou) agricole susceptible de leur permettre d'utiliser plus effi-
cacement la terre et de contribuer à l'indépendance alimentaire
du pays.
C'est pourquoi la formation professionnelle agricole des jeunes,
telle qu'elle a été conduite jusqu'à ce jour sous l'égide du
Ministère de l'Agriculture ne donne pas une entière satisfaction.
Sans doute ce Ministère aurait-il pu développer des ateliers dits
de formation, relever en fonction de la cible
le niveau de la
formation et mettre en place des centres professionnels (2) uni-
quement réservés aux jeunes d'un certain niveau scolaire et se
destinant à l'agriculture. Il convient donc après avoir apprécié
l'oeuvre du secteur publ ic d'orienter l'analyse sur la prise en
charge de la formation des jeunes par le secteur privé.
B) La formation professionnelle agricole des jeunes par le
secteur privé
La contribution du secteur privé au développement rural dans son
ensemble est ancienne; elle est l'oeuvre des associations et
groupements bénévoles app~lés improprement organisations non
(1)
Cet encadrement -
formation ne peut être apprécié que dans
le cadre global de la politique agricole iVo~r~enne qui pri-
vilégie toujours la productivité par rapport à la promotion
sociale et économique des producteurs.
Ce capitalisme d'Etat
(voir Y. A.
FAURE et J. F.
MEDARD "Etat et Bourgeoisie en Côte
d'Ivoire" op.
cit.) a conduit le pays à avoir une agriculture
prospère mais des agriculteurs pauvres.
Voir également CISSE
Bakary
:
"Fiscalité agricole et développement économique en
Côte d'Ivoire",
Thèse,
Paris,
1986.
(2)
Déjà,
en 1969, le Niger,
pays sahelien,
comptait deux centres
d'Etat pour la formation des jeunes agriculteurs.

186
gouvernementales (1) et concerne aussi bien l'aménagement
rural que l'agriculture. Si ces associations de développement
s'occupent trés peu de formation agricole des jeunes, cela
tient moins à leur inorganisation (2) qu'à l'insuffisance des
moyens financiers dont ils disposent (3). C'est pourquoi nous
les excluons du champ de l'analyse.
En revanche, l'oeuvre des organisation internationales non-gou-
vernementales et de l'église catholique semblent dignes d'inté-
rêt.
Pourtant, l'action des premiers en faveur de la formation
des jeunes exploitants agricoles telle que nous l 'avons définie
dans le cadre de la présente étude (4) est encore inexistante~
pour que nous lui accordions quelques développements (5).
(1)
En droit international~ l'organisation non gouvernementale
désigne~ par opposition à l'organisation inter gouvernemen-
tale un groupement de personnes privées ne relevant pas d'un
même Etat.
(2)
Depuis 1984 existe un conseil Ivoirien des organisations non
gouvernementales pour le développement rural régi
par la
loi du ~1 septembre 1960 sur les associations et dont le but
est de "regrouper toutes
les organisations bénévoles et vo-
lontaires ivoiriennes dont les activités sont orientées
vers le développement rural".
(3)
Les ressources de ces associations sont essentiellement
constituées par les cotisations des membres.
(4)
Voir supra.
(5)
Le gouvernement de Côte d'Ivoire a signé un protocole
d'accord avec l'opportunities Industrialization Centers In-
ternational
(OIC international~ institution privée américai-
ne)
"définissant les rôles des parties contractantes en ce quo
qui concerne les objectifs et la mise en oeuvre d'un projet
de formation et de développement rural de l'OIC en Côte
d'Ivoire" projet qui vise~ entre autres~ à "promouvoir les
compétences techniques des
jeunes desaolarisés en vue d'amé-
liorer les infrastructures rurales et les pratiques agricoles
Ce programme qui dans sa phase expérimental s'étend sur une
période de trois ans

(1986 à 1988) est le premier du genre
en Côte d'Ivoire et devrait pouvoir contribuer à la forma-
tion agricole des jeunes même s ' i l

"s'adresse principalement
à des déscolarisés" et que le gouvernement ivoirien n'y voit
qu'un moyen de '1utter

contre le chomage ... et
(d'améliorer)
les conditions de vi~ dans les zones rurales".

187
La formation agricole des jeunes par l'église catholique bien
que parcellaire et sporadique (1) peut être appréciée à travers
une école de formation, le Centre Rural et Artisanal de
Guibéroua (CRAG) (2).
Le CRAG est un établissement de formation professionnelle rurale
relevant du diocèse de GAGNOA (3) et réservé aux jeunes ruraux
du Centre Ouest de la C6te d'Ivoire, âgés de dix huit ans au
moins et ayant achevé le cycle d'études primaires (4).
L'objectif du centre n'est pas de former des agriculteurs mais
"des artisans polyvalents pour le milieu rural". C'est sans
doute ce qui explique qu'il ait été recommandé puis reconnu par
le Ministère de l'Enseignement Technique et de la Formation
Professionnelle dont il dépend même s'il a été un peu plus tard
reconnu par le Ministère de l'Agriculture.
(1)
L'église catholique présente dans
les campagnes
les plus
reculées oeuvre pour la promotion socio-économique des
communautés rurales et contribue,
entre autres,
par des
cours d'alphabétisation à les exhumer d'un obscurantisme
incompatible avec le progrès.
En outre,
elle organise
parfois avec
l'aide des
"volontaires du progrès" des cours
destinés aux dirigeants des coopératives agricoles.
(2)
Ce centre n'est pas
le seul que dirige
l'Eglise catholique;
Il constitue cependant un exemple suffisant dans
la mesure
où, à notre connaissance, aucune institution privée ne dispose d'un
établissement qui a vocation à former de jeunes agriculteurs modernes.
Notons que Guiberoua est une petite ville située dans
le
Centre Ouest ivoirien.
(3)
GAGNOA,
chef-lieu d'un département du Centre Ouest.
(4)
Le Centre est également ouvert à des adolescents issus des
Etablissements d'enseignement général
(classes de 6ème,
5ème) .

188
Bien que le CRAG niait pas une vocation uniquement agricole,
1 e contenu et la qual ité des cours dispensés, ainsi que l'orga-
nisation de la formation peuvent donner au futur agriculteur
le profil indispensable qui lui permettra de diriger une exploi-
tation agricole.
1. L'organisation de la formation
L'enseignement s'articule autour de quatre disciplines: la
menuiserie, la maçonnerie, la mécanique et l'agriculture. La
formation se compose de trois cycles ainsi répartis:
Le premier cycle, d'une durée de cinq mois, constitue ce qu'il
convient d'appeler une phase d'orientatïon où les élèves avec
l'aide des encadreurs devront choisir entre la paire menuiserie-
maçonnerie ou mécanique-agriculture étant entendu qu'aucune
autre possibilité ne s'offre à eux.
Le deuxième cycle qui
dure
dix mois permet aux stagiaires
d'apprendre deux métiers. Ainsi, le futur agriculteur sera
initié à la mécanique et disposera de connaissances qui lui
permettront p'entretenir le matériel agricole
rapide-
ment atteint par "ûbsolescence.(l).
Enfin, le troisième et dernier cycle, le plus long puisqu'il
dure quinze mois
constitue la phase de spécialisation où le
jeune se destinant à 1 'activité ~gricole bénéficiera d'un ensei-
gnement en relation étroite avec la profession.
Cette organisation de la formation telle que présentée, augure
d'un enseignement de qualité.
2. L'appréciation qualitative de la formation
L'enseignement théorique est, selon les matières, renforçé par
des "travaux pratiques".Les élèves orientés en agriculture
apprennent pendant environ quinze mois des notions relatives à
(1)
L'un des obstacles à la mécanisation de l'agriculture ivoi-
rienne réside dans la difficulté de maintenir les machines
en bon état
les paysans ne ma~trisant pas ces techniques
3
nouvelles.

189
l'étude de la plante, aux climats, semis et différentes opérations
d'entretien d'une exploitation a9rico1e. Ces cours recoivent une
application pratique dans un espace géographique aménagé à cet
~ffet. Le dernier cycle de la formation qui n'est pas exempt de
toute critique porte sur quatre cultures: le riz, le cocotier,
le cacaoyer et le cafétier (1). L'originalité - au demeurant heu-
reuse (2) - de l'enseignement dispensé par le CRAG
est dlêtre non
seulement pluridisciplinaire, mais, de surcroît, fort étoffé. En
effet, les futurs agriculteurs, outre l'apprentissage de diffé-
rentes techniques culturales
reçoivent des cours les initiant ou
approfondissant leurs connaissances, en grammaire, en orthographe,
en littérature
africaine ainsi qu'à la législation du travail,
aux sciences naturelles, aux mathématiques et à la gestion ...
La formation agricole des jeunes n'est donc pas marginale et
correspond au
voeu
de 1 lorgani~ation internationale du travail
dans la mesure où elle est "équivalente, en qualité générale
sinon dans le détai1~ (à la formation) dont bénéficie la popula-
tion urbaine" (3).
L'oeuvre du centre rural et artisanal
de Guibéroua, qualitative-
ment satisfaisante, touche cependant un nombre
limité
de
jeunes dans la mesure où chaque année, ce sont vint à vingt
quatre artisans toutes spécialités confondues qui sortent du
centre. La contribution à la formation de jeunes agriculteurs est
don c i nsig nif i .a ntee t de vrai t ê t r e v i vif i é e par 1es. pou v0 i r s pu -
b1ics.
Mais au-delà de ces résultats quantitativement peu satisfaisants,
se pose la question de l'importance réelle que revêt èn Côte
dl Ivoire la formation professionnelle des jeunes agriculteurs.
Théoriquement affirmée par les pouvoirs publics, elle nia pas
encore pri s corps avec 1a réal ité. Pourtant l'une des attri bu-
tions du Ministère du Développement Rural
institué pour la première
(1)
Parmi les quatre cultures citées~ seule la première est desti-
née à la con;;ommation locale à une période ou l'autosuffisance
alimentaire du pays reste un pa~i à gagner.
(2)
Trés souvent~ la formation professionnelle~agricoleou non~ ne
tient pas compte de la nécessité de dispenser un enseignement
équivalent à celui des collèges et lycées d'enseignement géné-
ral. '
(3)
Tren~e-neuvième session de la conférence internationale du
Travail~ op. cit.

190
fois par le décret du 7 mars 1984 est de favoriser l'installation
des jeunes en mil ieu rural en assurant III 'éducation, , l a formation
et l'encadrement (des jeunes) afin de les initier au métier de la
terre et de les familiariser avec les techniques modernes de pro-
duction ll (1). De quels moyens dispose ce r'.inistère pour accomplir
sa mission? Observe-t-il une stratégie différente de celle naguère
adoptée par le Ministère de l'Agriculture? La section qui suit
sera consacrée à l'examen de ces deux questions.
SECTION 2 : L'ENSEIGNEMENT ET LA FORMATION PROFESSIONNELLE DES
JEUNES AGRICULTEURS SOUS l'EGIDE DU MINISTERE DU DEVELOPPEMENT
RURAL
Les développements précédents ont mis en exergue l'incapacité du
ft j n i s t ère del 'A gr i cul tu r e e t
l 1 i nc uri e du secteur privé à dis pen -
ser aux'futurs agriculteurs un.enseignement de qualité dans des
écoles générales ou techniques d'agriculture. Le Ministère du
Développement Rural qui a la responsabilité de remedier à ces
insuffisances dispose-t-il de
structures adéquates? Nous nous
proposons dans' un premier temps d'apporter des éléments de réponse
à cette question
(paragraphe 1) ; le paragraphe 2 sera consacré à
une étude critique des méthodes de formation choisies et appliquées
par le M.D.R.
PARAGRAPHE 1 : DE L'ADAPTATION DES STRUCTURES DU ~lINISTERE DU
DEVELOPPEMENT RURAL A L'ENSEIGNEMENT ET A LA FORMATION PROFESSION-
NELLE AGRICOLE DES JEUNES
A~l~ différence du.Ministère de l'Agriculture, le Ministère du
Développement Rural ne dispose pas d'une Direction de l'Enseigne-
(1) Article 11 du décret nO 84-127 du 7 mars 1984 portant organisa-
tion du Ministère du Développement Rural.

191
ment et la formation professionnelle agricoles bien qu'il ait
pour mission de former les jeunes se destinant au métier de la
terre (1). C'est la Direction de la promotion rurale, de l'ins-
tallation des jeunes et des équipements qui est investie de
cette prérogative et dispose à cet effet des sous-directions
de l'installation des jeunes (A) et de la promotion rurale (B).
A) De la compét'ence de la Sous-Direction de l'installation des
jeunes en matière de formation agricole.
Si le Ministère du Développement Rural
par le biais d'un service
déconcentré, la Sous-Direction de l'Installation, a pour mission
d'installer les jeunes en milieu rural aussi bien dans les sec-
teurs agricoles que non agricoles,il ne partage pas avec le
Min i st ère de l' Ag r i cul tu rel a tut e 1 l e des éc ole s d' a gr i cul tu r e ,
en conséquence de quoi l'organisation actuelle de l'enseigne-
ment et de la formation professionnelle agricole lui échappe.
Or, cette organisation n'est pas conçue de façon à former des
adolescents appelés à diriger personnellement et directement
une exploitation agricole (2). Pourtant, outre les services de
vulgarisation qui restent à parfaire (3), l'enseignement demeure
le moyen à privilégier pour contribuer efficacement à la forma-
tion des futurs agriculteurs.
LaS 0 us - Di r. e c t ion d e l 1 i ns ta l 1a t ion des jeu nes, ·à d é f au t d e gé r e r
avec les organismes du Ministère de l'agriculture, les établis-
,
(1)
Paradoxalement,
"la promotion,
la planification,
l'animation
et le contrôle du système d'enseignement et de formation
professionnelle agricoles" relèvent, aux termes de l'arti-
cle 1er C.
du d~cret de Avril 1984 des attributions du
Ministère de l'Agriculture
(c'est ce texte qui fixe les
attributions du Ministre dé l'Agriculture et organise son
ministère) .
(2)
Voir supra,
la ,~ormati?n~ professionnelle sous l'~gide du
Ministère de l'Agriculture.
(3)
La vulgarisation qui vise non seulement à am~liorer l'acti-
vit~ agricole y compris la production,. l'exploitation, la
conservation et la commercialisation sur le double plan de
la culture et de l~~Zevage" suppose une bonne formation des
vulgarisateurs qui doivent "avoir de la maturit~, une exp~­
rience pratique de l'agriculture et savoir c~mment entrer
..,
_
_
_
_ _ . _e _ _ • "1 ..L. __ • _ _ Il
"r.7
" U A l'"
.... tif· ~

192
sements d'enseignement agricole, dispose d'un service dit
II ce ll u l e
de formation ll dont les attributions en matière de
formation méritent d'être connues; ce service doit, notam-
ment
(l)
:
-
Identifier les besoins en formation.
Participer à l'élaboration des
programmes de formation
en
liaison avec les structures d'intervention.
-
Par tic i pe r a u sui v i e tau con t r 61 e d e l ' ex écu t ion d u pro gr a m-
me de formation.
Cependant, ces attri bu tions sembl ent
pl us formell es que réell es
car un certain nombre d'obstacles font
écran à la contribution
effective du
service pré-cité à la
formation des jeunes agri-
culteurs.
Le premier est lié à l'imprécision de la nature de la formation
visée.
En toute
hypothèse, cette dernière ne saurait se limiter
au seul
domaine agricole dans
la mesure où la Sous-Direction de
l'installation des jeunes a vocation à encourager toutes
les
activités susceptibles d'être
pratiquées en milieu rural.
Or,
le métier d'agriculteur, faut-il
le rappeler, exige des connais-
sances éconômiques et agronomiques
que des
programmes d'études
et méthodes d'enseignement doivent
pouvoir diffuser.
Mais l'élaboration de ces modules de formation agricole néces-
site un
personnel
qual ifié en nombre suffisant et de discipl ines
d ~ f f é r e n tes que l a Il cel l u l e d e "f 0 r mat ion Il d e laS 0 u s - Dire c t ion
de l'Installation des jeunes est loin de réunir.
Ce· deuxième
obstacle entrave
indubitablement la mission du service de forma-
tion qui
en fait est dessaisi d'une
partie de ses compétences
au
profit des structures d'intervention.
En effet, ces dernières, théoriquement appelées à élaborer les
programmes de formation conjointement avec l'administration du
Ministère du Développement Rural
se retrouvent dans la
pratique
discrétionnairement investies de cette prérogative dans la
mesure où l'autorité administrative est techniquement incompé-
tente. Or, et c'est en là que réside la troisième difficulté,
la diversité des organismes
publ ics
intervenant en mil ieu rural,
!
!
(1) Document in~dit du Ministèpe du D~veloppement Rupal.

193
l'absence entre
eux
d'une courroie de transmission, les
conduit à concevoir des méthodes de formation dissemblables et
bi en sou ven tin a da pt ées a ux 0 bje ct ifs de l a for mat ion pro f es s ion-
nelle agricole.
Ainsi donc, IIl a cellule formation ll de la Sous-Direction de l'ins-
tallation des jeunes. juridiquement compétente pour définir et
contrôler les programmes de formation quels qu'ils soient. est
en fait incapable de remplir cette mission pour ce qui concerne
le secteur agricole. C'est sans doute cette incapacité qui explique
l'intervention d'un autre service de la Direction de la promo-
tion rurale: la sous-direction de la promotion rurale.
B) De la compétence de la Sous-Direction de la Promotion Rurale
en .matière de formation agricole des jeunes
Au plan institutionnel, la Sous-Direction de la Promotion Rurale
est chargée d'animer le milieu rural en aidant les communautés
villageoises à s'auto-gérer. Elle dispose. pour exécuter sa
mission, de trois services dont la présentation permettra cer-
tainement de mieux apprécier les compétences juridique
et techni
que
de cette Sous-Direction.
Le service de IIParticipation et Soutien ll est principalement char-
gé de promouvoir au niveau des villages des structures dirigées
par les populations aut~chtones dont le but serait d'organiser
le milieu rural, de l'animer, d'y améliorer le cadre de vie (1).
Le service des 1I0 rgan isations économiques rurales ll a pour mission
d'animer et de développer les structures villageoises de pro-
duction. de commercialisation, d'épargne et doit éviter de se
substituer aux intéressés (2).
Le troisième service dit de IIformation et communication ll sensi-
bilise, éduque les groupements villageo+s dans le cadre des
différentes activités pré-citées.
(1)
Parmi ces structures encore inexistantes, on peut citer les
Comités de pays rural; voir supra.
(2) A titre d'exemple,
les Caisses Rurales d'Epargne
(CREP)
relèvent de ce service.
Sur les CREP, voir supra.

194
La Sous-Direction de la Promotion Rurale a, eu
égard aux attri-
butions de ses différents services, vocation à animer le milieu
rural, à l'organiser et se fixe comme objectif de responsabil i-
ser une communauté qui doit être l'artisanede son propre dévelop-
pement. A ce titre, les activités de promotion rurale peuvent
utilement compléter la formation des jeunes agriculteurs mais ne
saurait s'y substituer. En effet,les actions de sensibil isation et
d'information touchant des domaines aussi divers que l'épargne,
les groupements professionnels ou la commercialisation des pro-
duits agricoles malgré leur intérêt, demeurent insuffisantes
car incomplètes; c'est pourquoi elles ne peuvent fournir au
futur exploitant agricole les connaissances qui lui sont indis-
pensables pour gérer son activité.
Le Ministère du Développement Rural
peut-il, dans les conditions,
structurelles examinées, dispenser aux jeunes un enseignement
et une formation professionnelle agricoles adéquats? Nous
pouvons en douter car, outre
l'inadaptation de ses structures
aux objectifs d'une formation agricole véritable, les méthodes
utilisées rappellent étrangement celles du Ministère de l'Agri-
culture dont' l'inefficacité à déjà été démontrée (1). C'est à
une étude critique de ces méthodes de formation que nous allons
maintenant nous consacrer.
~ ~ ~~§~ ~ E~ ~ _? _~ _~ ~/~ _~ ~I~~~ ~ ~ ~ ~ _"f Q~ ~ ~ _TI Q~ _~ §~ !f Q~ E,.. Q~ ~ _~~ ~ ~ ~ ?
~ I~g ~_f~!.I! g~ ~
Bien que la formation agricole puisse s'effectuer selon plusieurs
méthodes, les stratégies que peut adopter le Ministère du Dé-
ve l 0 pp em en t Ru r a l son t l i mit é e s dan s l a mes ure 0 Ù, ra pp e l 0 ns le,
le système d'enseignement et de ~ormation professionnelle lui
échappent. La vulgarisation est donc le seul
procédé dont il
peut user pour former les futurs agriculteurs. Or l'une des
spécificités de ce système éducatif est qu'il est destiné à des
exploitants agricoles déjà en activité et qui ont, par voie de
,
,
!
'
{
(1)
Voir supra
la formation_professionnelle sous l'égide du
3
Minist~re de l'Agriculture.

195
conséquence une certaine expérience des travaux de la terre.
La vulgarisation vise donc à les éduquer de manière à adapter
leur comportement au progrès agricole et aux nécessités de
l'économie rurale. Mais outre les problèmes traditionnels liés
à cette entreprise (1) on peut se demander si le modèle de vul-
garisation adopté par le Ministère du Développement rural rompt
avec la pratique antérieure (2) et est susceptible, à partir de
là, de donner naissance à des agriculteurs compétents, ouverts
sur le monde et capables de diriger seuls une exploitation agri-
cole. L'exemple du "projet pilote d'aide à l'insertion des
jeunes en milieu rural"
(3) nous permettra sans aucun doute une
meilleure appréciation de la situation dans la mesure où
il
constitue la seule et la plus importante opération d'installa-
tion dans le secteur agricole conduite dès ses origines par
l'administration du développement rural
(4).
La formation des jeunes, aux termes du projet est "technique"(A),
relative à "la gestion de l'exploitation" (B) et enfin vise à
les initier à "l'organisation pré-coopérative" (C).
A) La formation techni~
Elle a pour objet "d'amener les jeunes à maftriser les techniques
modernes de production ...
(dans le but) d'augmenter leur pro-
ductivité gr~ce à la vu~garisation de thèmes techniques (semis
en ligne, respect des dates de semis, emploi d'engrais, pesti-
cides ... ) (4).
Ce programme, de par son contenu, trahit l'imprécision de l'objec·
tif à atteindre. Comment peut-il s'agir d'augmenter la producti-
vité alors même que la formation s'adresse à des néophytes - ou
(1)
Le vulgarisateur s'adressant généralement à un groupe hété-
rogène -
notamment niveau d'instruation -
la définition des
thèmes est une oeuvre fort déliaate.
C.W.
CHANG,
op.
ait.
(2)
Voir supra.
(J)
Voir supra.
(4)
En effet,
le Ministère du Développement Rural a en 1984
(date
de sa aréation)
hérité de toutes les opérations d'installa-
tion des jeunes initiées par le Ministère de l'Agriaulture!
(4)
Projet pilote d'aide à l'insertion des jeunes en milieu rural
doaument inédit du Ministère du Développement Rural
, op.
ait

196
à des jeunes censés llêtre - auxquels on inculquera des
notions
élémentaires indispensables à toute entreprise agricole même
embryonnaire? La vulgarisation gagnera certainement en effi-
cacité si la formation des jeunes est préalablement assurée,
par exemple dans des autres spécialités, car "mettre au point
les thèmes à vulgariser et les moyens pour y parvenir dès le
dép art de l ' 0 pérat ion" (1) par a ît ha s a rd eux
e t
contraire à la volonté maintes fois affirmée
par le Ministère
du Développement Rural
de rompre avec les stratégies anté-
rieures qui ont donné des résultats dont personne n'oserait
mettre en doute l' éc hec.
De surcr01t, cette formation dite technique est assurée par
les organismes publ ics intervenant en mil ieu rural qui, il faut
le rappeler, font de la vulgarisation de façon incidente. En
effet, si quelques uns d'entre eux sont depuis peu sous la
tutelle du Ministère du Développement Rural, leurs attributions
nlont guère été modifiées (2) et les méthodes de travail sont
restées les mêmes.
Il semble dans ces conditions difficile que
ces structures
assurent efficacement la
formation d~s jeunes exploitants agricoles dans la mesure où
leurs agents n'ont pas le profil de vulgarisateurs (3). Bien
plus, chacune de ces structures a une approche du milieu rural
qui lui est particulière (4) et on peut craindre que la cohé-
rence ne soit pas la caractéri~tique première de la méthode de
formation adoptée par le Ministère du Développement Rural. Sans
doute faudrait-il
que les pouvoirs publics créent et organisent
des services de vulgarisation dont les activités seraient coor-
données par une structure unique car la vulgarisation, pour être
(1)
Projet pilote . . . op.
cit.
(2)
Voir supra
(3)
Voir supra
(4)
Notre enquête effectuée auprès de la SODEPALM a relevé que
cette structure n'entretient par exemple aucun rapport avec
la Sous-Direction de l'Installation des Jeunes bien qu'elle
dispose en son sein d'un bureau dit de l'installation des
jeunes.

197
un vé rit a bl e levai n de l ' a gr i cul tu r e, do i t êt r e pla nif i ée et
assurée par un
personnel formé à cet effet.
Le projet pilote d'installation, outre cette formation technique,
prévoit une initiation à la gestion.
B) La formation à la gestion
Elle vise à inculquer aux jeunes les principes et méthodes de
gestion des exploitations agricoles notamment "les coOts de pro-
duction, la tenue de documents comptables" de façon à les amener
à pouvoir prendre les "décisions ...
(susceptibles) d'accroftre
leurs revenus". Le tableau ci-après nous indique les objectifs
et la durée des cours.
OBJECTIFS DE LA FORMATION
DUREE
Savoir tenir un cahier de compte
Compte journal ier
1 mois
Compte mensuel
3 mois
- Autres comptes
Biens de production
3 mois
. Dépenses po ur la famill e
3 mois
Emprunts
3 mois
Prêts
3 mo i s .
Compte annuel
6 mois
Savoir
Estimer ses prix de revient
3 mois
- Fa ire un budget prévisionnel
1 an
Faire une trésorerie prévisionnelle
3 mois
- Analyser les résultats annuels d'exploitation
1 an
Teni r un compte d'épargne et un compte courant
6 mois
- Lire un échéancier de remboursement et un
relevé de com pt e
1 an
- Calculer l'amortissement et co nna ftr e son
util ité
1 an
Faire un inventaire
6 mois
Source: Projet Pilote d'aide à l'installation des jeunes en
milieu rural, Document inédit du Ministère du Déve-
10 ppement Rura l .

198
Ce programme, apparemment étoffé, n'est cependant pas à l'abri
de toute critique dès lors que l'analyse va au-delà de la cou-
che corticale ainsi présentée. En effet, si les objectifs a
atteindre semblent être clairement définis, il n'en est pas de
même pour les méthodes devant guider la formation,
points sur
lesquels le Ministère du Développement Rural est étrangement
muet.
Car à la différence de la formation technique (1), l'initiation
à
la gestion et à l'économie rurale exige l'emploi de techniques
spéciales et un matériel d'enseignement adapté dont le projet
ne fait nullement cas.
Cette omission s'accompagne d'uneautre, non moins importante,
et qui est relative au personnel enseignant. En tout état de
cause, la tâche ne saurait être confiée aux agents des organis-
mes publics à vocation agricole dont l'oeuvre de vulgarisation
dite technique ne constitue pas un modèle à suivre et encore
moins aux fonctionnaires du Ministère du Développement Rural
qui n'ont ni le temps nécessaire, ni le profil
requis.
En fait, tout se passe comme si l'on avait voulu élaborer, à la
hâte, un sché~a théorique de formation professionnelle agricole
dans le seul
but de convaincre le gouvernement ivoirien de la
pertinence
du projet et conséquemment de recevoir, au plus tôt,
sa participation financière (2). Sinon comment expliquer ces
balbutiements qui par moments, .frisent l'incohérence?
L'organisation pré-coopérative. dernier volet du orOQramme
de formation souffre-t-elle des mêmes insuffisances?
(1)
Ce qui ne signifie pas qu'un matériel d'enseignement n'est
pas utile à la vulgarisation.
Il demeure cependant que l'en-
seignement peut être donné oralement dans une exploitation
agricole type,
méthode qu'on ne saurait appliquer lorsqu'il
s'agit de comptabilité,
gestion ou économie rurale.
(2) Rappelons que le projet pilote a démarré avec la subvention
du Fonds d'Aide et de Coopération
(voir supra)
tandis que
Za participation financière de l'Etat ivoirien se fait atten-
dre
(au moment o~ nous rédigeons ce travail).

199
C} La formation à l'organisati"on pré-coopérative (1)
Elle doit permettre aux jeunes de "ma îtriser l'environnement
socio-économique" (2) bien qu'on ait une fois de plus passé
sous silence les méthodes de formation et les moyens à déployer.
Pourtan~, le mouvement coopératif est l'un des secteurs le plus
désorganisé "de l'activité agricole. Tandis que "l a promotion et
le développement du mouvement coopératif et mutualiste ... "
relèvent des attributions du Ministère de l'Agriculture (3), le
Ministère du Développement Rural est parallèlement compétent
pour " susc iter l'organisation et l a création de groupements à
vocation coopérative ou de coopératives de production de collecte
ou d'échanges de biens de services" (4).
Il s'en suit, outre un conflit de compétences, une dispersion
des efforts consentis par ces deux administrations qui bien que
poursuivant des politiques différentes,ont en commun
une cer-
taine rigidité dans l'intervention défavorable à l'autonomie de
la coopération agricole.
C'est pourquoi il eut été utile que le Ministère du Développement
Rural
précisât les méthodes qu'il compte utiliser pour enseigner
aux jeunes les principes de l'organisation coopérative tout en
leur laissant l'initiative de constituer des groupements profes-
sionnels.
(1)
Aux termes de l'article 5 de la loi du 1er "juin 1977 abrogeant
et remplaçant la loi du 5 août 1966 portant statut de la coo-
pération,
telle que modifiée par la loi du 21 décembre 1972
"les coopératives d caract.re civil sont d'abord constituées
sous la forme de groupements d vocation coopérative". Le
décret du 12 avril 1974 relatif aux groupements d vocation
coopérative vient préciser que
"les groupements d vocation
coopérative sont des organisations pré-coopératives d carac-
t~re obligatoire, transitoire et évolutif constituées dans le
but de per.mettre la création de coopératives socialement et
é~onomiquement viables. Ils sont, comme les coopératives, des
sociétés civiles.
(2)
Projet pilote ...
op.
cit
(3) Article 1er D du dé~ret du 7 avril 1984 fixant les attributio~s
du Minist.re de
l'Agriculture et organisant son minist.re.
(4)
Article 11 du décret du 7 mars 1984 portant organisation du
Minist.re du Développement Rural.

200
Mais il est douteux que la Direction de la Promotion Rurale,
organe chargé au sein du Ministère du Développement Rural,
d'organiser le mouvement coopératif, puisse dispenser aux
futurs exploitants agricoles, un enseignement de qual ité
eu
égard à la faiblesse de ses capacités financières et humaines.
En effet,elle dispose pour accomplir sa mission d'une "cellule
coopération" aux moyens limités et animée seulement par deux
fonctionnaires. On peut craindre dans ces conditions que cette
formation à l'organisation pré-coopérative soit confiée aux
organismes publics à vocation agricole qui poursuivent des
politiques de développement coopératif dissemblables déterminées
selon des objectifs de production alors qu'une coopérative est
avant tout un groupement cré~ pour améliorer les conditions de
vie de ses membres.
En définitive, malgré les attributions que lui confèrent les
textes, le Ministère du Développement Rural ne dispose pas de
structures adéquates pouvant lui permettre "d'assurer la forma-
tion et 11 encadrement des jeunes", en conséquence de quoi, les
agriculteurs qu'il
installe ou encadre
nlont pas les qualifi-
c a t ion set l e·s con nais san ces né ces sai r e s pou r l' ex e r c i c e de
leur profession. En outre, les établissements publics a partir
desquels le Ministère du Développement Rural peut fonder une
stratégie globale et cohérente semblent échapper à son contrôle (1),
Or comment peut-on combiner efficacement les différents facteurs
de la production agricole si l'on ne possède pas les qual ifica-
tions requises?
(1)
Il est curieux de constater que les organismes qui sont sous
la Tutelle du Ministère du Développement Rural élaborent et
appliquent chacune à son niveau une politique autonome en
matière de coopération et de formation professionnelle.
La
tutelle qu'exerce l'administration relève davantage de la
théorie que de la pratique et nous rappelerons volontiers
l'exemple de la Sous-Direction de l'Installation des jeunes
qui n'e~tretient pratiquement aucune relation avec ces
structures d'intervention présentés sur tout le Territoire.
Comment peuvent-elles dans ces conditions appliquer la poli-
tique élaborée par l'administration centrale si bien· sûr
une
telle politique existe.

201
CONCLUSION AU CHAPITRE 3
La réponse à la précédente question réside dans la redéfinition
des objectifs de l'enseignement et de la formation professionnel-
le agricoles ainsi que dans la clarification des compétences
des ministères à vocation agricole.
A la politique de formation des agents et cadres de l'Agricul-
ture dans les écoles et centres spécialisés devrait s'ajouter
celle des futurs agriculteurs de façon "à inculquer à (ces der-
niers) les techniques et méthodes de travail, à leur apprendre
la planification des opérations agricoles ainsi que les méthodes
de gestion des exploitations agricoles" (1), car la formation
du personnel de l'administration agricole n'est pas incompatible
avec celle des jeunes gens et jeunes filles qui se destinent
au métier de la terre. Aux attributions formelles du Ministère
du Développement Rural devraient se substituer des attributions
réelles qui lui permettraient d'e~écuter effectivement sa mis-
sion d'encadrement et de formation des jeunes. Une responsabilité
conjointe des Ministères de l'Agriculture et du Développement
Rural en ce qui concerne l'enseignement et la formation profes-
sionnelle est souhaitable à condition que se tisse une collabo-
ration étroite et que la coordination dans l'exécution des dif-
férents programmes soit assurée. Les deux ministères devraient
partager la tutelle des écoles d'agriculture au même titre qu'ils
partagent celle de la Banque Nationale de Développement Agricole.
Mais la formation des jeunes n'est pas indépendante du finance-
ment du capital d'exploitation. En effet, si la viabilité de
l'entreprise agri.cole est subordonnée au savoir faire de l'agri-
culteur, il demeure que la seule capacité professionnelle de ce
dernier n'est pas suffisante: l'un et l'autre entretiennent
des relations dialectiques dont toute politique devrait tenir
compte.
(1)
Conférenae O.I.T.
op.
ait.

202
CONCLUSION A LA DEUXIEME PARTIE
Les difficultés que rencontrent les jeunes pour créer une exploi-
tation agricole et la diriger selon des techniques modernes résul-
tent moins du mauvais fonctionnement des structures existantes
que des objectifs qui leur sont assignés par les pouvoirs publics.
La présence d'un établissement bancaire spécialisé et de plusieur~
écoles d'agriculture est la preuve que le secteur primaire a,
d'une façon générale, fait toujours partie intégrante de la
politique des gouvernants. Mais les règles juridiques qui régis-
sent le premier ainsi que le mode d'organisation des deuxièmes
font obstacle au renouveau du paysage agricole ivoirien, refonte
structurelle pourtant maintes fois affirmée par le pouvoir poli-
tique. L'absence d'associations véritables d'agriculteurs, la
mauvaise réprésentation des intérêts agricoles auprès des pou-
voirs publics sont autant de facteurs qui ralentissent le pro-
cessus reformiste.
Favoriser l ',installation des jeunes dans le secteur agricole
représente, au-delà des aspects économiques et sociaux, un
enjeu politique certain en ce qu'il remet en cause les fonde-
ments d'une politique agricole qui a contribué naguère au
"miracle ivoirien"
(1). C'e.st pourquoi il appartient aux pou-
voirs publics de créer l'environnement institutionnel suscepti-
ble de contribuer à la mutàtion de l'exploitation agricole et
donc de l'exploitant.
(1)
Le boom économique des années 1970 dû à l.'afflux des capi-
taux étpangeps et à une politique agpicole opientée veps
les cultupes d'expoptation dans un contexte de haute ppo-
ductivité
(voip suppa) a conduit plus d'un obsepvateup à
louep
les mépites des gouvepnants.
Mais aujoupd 'hui,
le
mipacle est devenu mipage . . .

203
CON~LUSION GENERALE
- - - - - - - - - - -
La réflexion qui
nous a mené au terme de cette étude appelle
deux observations:
la
première qui
se veut être une synthèse
est relative du droit
positif existant;
la deuxième concerne
l'ensemble des
propositions que nous avons formulées tout le
long de ce travail.
Au par a van t,
i l
no u spa r a ft
i ndis pen s a b l e d 1 i n sis ter sur 1er 61 e
de la volonté pol itique dans l'élaboration des règles juridiques.
Alors
que la mutation de l'agriculture ivoirienne commande que
des objectifs nouveaux soient assignés à l'exploitation agricole,
ni
le droit foncier,
ni
celui des successions et encore moins le
droit du crédit agricole ne permettentauxjeunes d'accéder aux dif-
férents facteurs de la
production agricole.
Cértes, des résistances sociales existent mais ne sauraient
constituer une barrière infranchissable; l'absence de structures
adéquates pour la formation agricole, en tout état de cause,
dépend moins de l'environnement social
que de la volonté des
pouvoirs
publics.
Or l'élaboration du droit positif est, dans un système mono-
partisan,
plus qu'ailleurs,
intimement
subordonnée à la volonté
politique car la
séparation classique, consacrée par la Consti-
tution~ entre le pouvoir exécutif et le pou~oir législatif est
plus théorique que pratique, dans la mesure où
l'ensemble des
députés siégeant à l'Assemblée Nationale appartiennent tous au
parti au
pouvoir.
Il
no use s t a p pa ru, en l' es pè ce, que l a volon té pol i t i que de
moderniser l'agriculture en installant des jeunes dans ce sec-
teur s'est essentiellement manifestée par la création d'un dé-
partement ministériel
que les textes ont expressement investi
de cette mission.
r~ais, aussi paradoxal que cela puisse paraftre, le droit positif
jus qu' à
pré sen t
env i gue ur, bfe n que fa i san t
é c r a n à t 0 u t r a jeu -
nissement de la
population agricole, n'a
pas été fondamentale-
ment modifié.
Excipant du mauvais accueil
dont une telle refonte
aurait fait
l'objet auprès d 'une frange de la
population, le
pouvoir politique préfère maintenir le statu quo.

204
Mais alors,
pourrait-on se demand,er,
pourquoi a-t-il
été créé
une structure dont l'une des attributions, d'ailleurs la plus
connue du grand
public, est d'installer "les jeunes en milieu
rural", si, en réalité, elle ne
peut accomplir cette mission?
Quelle que soit la réponse qui
peut être apportée à cette ques-
tion, notre sentiment est qu'il
eût été préférable de créer
les conditions favorables à l'édification d'un cadre institution-
nel
nouveau
pour une intégration réelle des jeunes dans le sec-
teur primaire, notamment agricole.
C'est pourquoi
les différen-
tes
propositions que nous avons eu l'occasion de formuler de-
vraient être reçues moins comme la solution parfaite que comme
un schéma théorique, susceptible d'être utilisé.
Mais, devons nous le rappeler, les problèmes liés à l'installa-
tion des jeunes agriculteurs en Côte d'Ivoire ne sont pas néces-
sairement homogénes
: des dissemblances régionales existent dont
il
serait dangereux de ne pas tenir compte.
Il
est donc
indispensable de procéder, par région, à des
inves-
tigations économiques et sociologiques minutieuses avant d'éla-
borer un cadre juridique général
susceptible' de recevoir une
appl ication régionale.
C'est l'ampleur de ce projet qui
nous a
conduit à orienter la réflexion sur les règles relatives à
l'accès à la terre ainsi
qu'à l'accès à l'exploitation agricole.
Cette limite, du moins le croyons nous, n'en est pas réellement
une.
Car notre étude, et c'est là notre espoir, aura
peut-être
permis,
par son objet, de mieux comprendre le droit rural
ivoi-
rien en formation.
Et, au-!delà des thèmes abordés, se dessinent
le droit agricole du travail, la réglementation sur les cumuls ...
en un mot tout un ensemble de règles qui,
il
faut le souhaiter,
permettra aux agriculteurs de demain d'obtenir la
place qu'ils
méritent dans la société.

205
A N N E X E S
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206
ANNEXE 1
SIlUATION FONCIERE

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208
ANNEXE 2
DECRET DU 15 NOVEMBRE 19]5 PORTANT REGLEHENTAT ION
DES TERRES DOMANIALES EN AFRIQUE OCCIDENTALE FRANCAISE

Décret du J:' /lol'embre J935 abrogeant le décret du 23 octobre J904 sur le Domaine, et pOrlanI réglementaI ion des
terres doma/liales ell Afrique occidentale française (promulgué par arréIé 2903 AP du J6 décembre J935).
Article premier. - En Afrique occidentale française, les terres vacantes et sans maître appartiennent à l'Etat.
Il en est de même des terres qui, ne faisant pas l'objet d'un titre régulier de propriété ou de jouissance par appli-
cation, soit des dispositions du Code civil, soit des décrets du 8 octobre 1925 et du 26 juillet 1932, sont inexploitées
ou inoccupées depuis plus de dix ans.
Les terres SUr lesquelles les collectivités indigènes ou les chefs qui les représentent exercent un droit de jouissance
collective ne peuvent être cédées ou louées qu'après approbation par arrêté du Lieutenant-Gouverneur en conseil.
L'occupation de la partie de ces terres qui serait nécessaire à l'Administration pour la création ou l'agrandissement
de centres urbains ou pour des constructions et aménagements d'intérêt général est prononcée, jusqu'à 100 hectares, par
le Lieutenant-Gouverneur en conseil, qui statue sur les compensations que peut comporter cette occupation.
Les occupations de plus de 100 hectares doivent être approuvées par le Gouverneur général en commission per-
manente.
Art. 2. - Les ~ctions des sociétés constituées en vue de l'obtention ou de la reprise des concessions régies par le
présent décret doivent statutairement, soit rester nominatives, soit demeurer attachées à la souche pendant un délai
d'au moins deux ans après l'obtention de la concession et la constitution de la société. Cette restriction ne s'applique
aux augmentations de capital que pendant le délai précité. Les parts bénéficiaires ou de fondateur, s'il en est créé dans
ces mêmes sociétés, doivent rester nominatives pendant un délai de deux ans à partir de l'obtention de la concession et
de la constitution de.1a société.
En cas de violation des prescriptions ci-dessus, la déchéance de la concession est prononcée sans mise .en demeure,
dès constatation de l'infraction et sa notification au concessionnaire.
l Art. 3. - Des concessions ne peuvent être accordées qu'aux personnes ou sociétes justifiant qu'elles disposent
effectivement des ressources financières qui sont jugées nécessaires pour garantir leur mise en valeur.
Par exception, les demandeurs de concessions de moins de 200 hectares prévues à l'article 4 peuvent être dis-
pensés de ces justifications en ce qui concerne les terrains de faible étendue susceptibles d'être mis en valeur par un
effort individuel ou familial. Il ne peut être accordé qu'une seule concession de cette nature à un même titulaire.
Art. 4. - L'aliénation, r~fQo4J~ljon et l'exploitation des terrains domaniaux, ainsi que leur affectation à des ser-
vices publics, sont soumises aux règles suivantes:
1 - les lots de terrains urbains compris dans un plan de lotissement arrêté par le Lieutenant-Gouverneur en con-
seil et les concessions rurales de moins de 200 hectares sont accordés par le Ueutenant-Gouvemeur en conseil aux con-
diti. déterminées tant par l'acte de concession que par la réglementation locale édictée en la matière.
.
Les concessions rurales de moins de 200 hectares pourront exceptionnellement étre accordées à titre gratuit dans
les conditions prévues par la réglementation locale.
.
.
2 - Les concessions portant sur une étendue comprise entre 200 et 2.000 hectares sont accordées par le Gouver-
neur général en commission permanente, après avis du Lieutenant-Gouverneur en conseil, et sous réserve des disposi-
tions de la réglementation locale.
.
3 . Les concessions portant sur une étendue supérieure à 2.000 hectares sont accordées, après avis de la commis-
sion des Concessions coloniales et du Domaine, par décret rendu sur le rapport du ministre des Colonies, sur la propo-
sition du Gouverneur général et après avis du Ueutenant-Gouverneur de la colonie intéressée, pris en conseil, sous ré·
serve des dispositions de la réglementation locale.
Dans ces deux derniers cas et pour les lots de terrains urbains, il est obligatoirement établi un cahier des charges
qui fIXe les conditions de la concession.
. Les concessions rurales sont accordées, à titre provisoire, aux clauses et conditions imposées pour leur mise en
. valeur; ces conditions remplies, la concession est attribuée à titre définitif.
\\
Art. 5. - Les cahiers des charges devront indiquer avec précision quelles sont, dans les périmètres concédés,les
terres exclues de la concession et réservées pour l'habitation, les cultures ou Je droit d'usage des habitants instalJés dans
1
ces périmètres ou résidant à proximité. Les superficies à réServer au profit des indigènes dont les cultures habituelles

1
1
étaient comprises dans le périmètre concédé seront fLXées par l'Administration, en tenant compte des besoins réels, des
1
mises en valeur effectivement faites et en respectant de façon absolue les droits de propriété acquis.
Pour les indigènes installés hors de la concession ou à l'intérieur près de ses limites, les réserves de cultures pour-
ront être désignées hors de la concession, s'il se trouve à proximité des terres de conditions suffisantes. Elles engloberan
toujours les terrains mis en valeur par les indigènes. La suppression pure et simple des cultures et des habitations moyen
nant indemnité ne pourra être imposée. Les tractations avec les indigènes devront être effectuées devant l'administrateu
chef de cercle, avec son approbation, et feront l'objet d'un procès-verbal certifié par lui.
Les cahiers des charges et les plans devront indiquer exactement, les premiers par leurs abornements, les seconds
par leur figuration graphique, les réserves indigènes existant à l'intérieur des concessions limitrophes desdites ~,mces­
sions.
...
..
-
~
Art. 6. - Les cahiers des charges devront prescrire, compte tenu de l'importance de la concession demandée. du
nombre de travailleurs prévus et, conformément à la réglementation locale, les diverses mesures d'hygiène et de pro-
phylaxie à appliquer tant aux individus qu'aux ~i1lages qui pourraient être créés.
Ils pourront, en outre, fixer, le cas échéant, le nombre.et l'emplacement des installations sanitaires, ainsi que la
nature et l'importance du personnel m~dical à affecter à la concession.
Art. 7. - Le cahier des charges doit, pour les concessions rurales supérieures à 2.000 hectares et pour les conces-
sions urbaines, lorsque la nature et ('importance de l'exploitation projetée le justifient, prévoir des avantages spêciaux
faisant participer la colonie aux bénéfices de l'exploitation.
-../... Art. 8. - L'Administration se réserve le droit de reprendre, à toute époque, les terrains concédés à titre provi-
soire ou définitif qui seraient nécessaires aux services de l'Etat ou de la colonie et à l'exécution des travaux publics.
La reprise a lieu aux conditions suivantes:
1 - Si les terrains ne sont pas mis en valeur, l'indemnité ne pourra dépasser la restitution de la partie du prix af-
férente à la superficie reprise.
2 - S'il s'agit de terrains bàtis ou mis en valeur moyennant une indemnité à fIXer à l'amiable avec le concession-
naire; en cas de désaccord, il est statué par le tribunal compétent; l'expertise est obligatoire si elle est demandée par
l'une des parties.
Art. 9. - Les concessions de terrains urbains et les concessions provisoires de terrains ruraux ne pourront être
accordées que deux mois après la publication au Journal officiel de la colonie d'un avis faisant connaître la situation
des lieux et, pour les terrains ruraux, le nom des demandeurs.
Le Lieutenant·Gougerneur détenninera, par arrêté en conseil d'administration, les régions où, soit par suite
des conditions de cultures favorables, soit par suite de l'exécution, réalisée ou prévue, de grands travaux d'aménage-
ment économique, les concessions ne pourront être accordées qu'après adjudication.
Art. 10. - La déchéance de~ concessionnaires de droits domaniaux et la révocation des affectations prononcées
en faveur de services pùblics sont réservées àl'autorité concédante, sauf recours au conseil du contentieux adminis·
. tratif de la colonie ou du Gouvernement général ou au Conseil d'Etat, suivant le cas.
Art. Il. - Les produits domaniaux des biens de l'Etat non affectés à un service public détenniné restent attri-
bués aux budgets locaux.
.
fArt. 12. - Sont soumises à la juridiction administrative toutes les contestations relatives à l'acte de concession.
Art. 13. - Les Lieutenants·Gouverneurs détennineront pa.. arrêté en conseil d'administration (en conseil privé
pour le Sénégal) les conditions d'application du présent décret. Ces arrêtés seront soumis à l'approbation du Gouver·
neur général en commission permanente du Conseil de Gouvernement.
. Art. 14. - Sont !Ù'rogées toutes dispositions antérieures contraires au présent décret et notamment les décrets
des ~O juillet 1900, 5 aoû t 1900 et 24 mars 1901 sur le domaine public et le régime des terres domaniales dans les
colonies du Sénégal, de la Côte d'Ivoire, du Dahomey, de la Guinée, ainsi que le décret du 23 octobre 1904 sur le
Domaine en Afrique occidentale française.

211
ANNEXE
3
ARR ETE
DU 9 JU 1L L ET 1936 REG LEM ENTA N T LIA LI ENA TI 0 N
DES TERRAINS
DOMANIAUX

TEXTE 2
2164 A.G. - Arrêté du 9 juillet 1936 réglementant l'aliénotion des terrains domaniaux, modifié par l'arrêté No 83 D du

31 janvier 1938.

Article premier. - L'aliénation des terres domaniales, telle qu'elle est réglée par le décret du 15 novembre 1935,
a lieu dans les formes ci-après déterminées.
CONCESSIONS RURALES
Art. 2. - Sont désignés sous le nom de concessions rurales les terrains situés en dehors des centres urbains et uti-
lisés en principe pour des entreprises agricoles ou industrielles.
Les terrains ruraux sont attribués à titre onéreux à des clauses et conditions spéciales insérées à un cahier des char-
ges annexé à l'arrêté d'octroi. Toutefois, et afin de favoriser la petite colonisation française et indigène, des concessions
gratuites peuvent être attribuées.
La mise en adjudication publique est de règle lorsque l'Administration est saisie de deux ou plusieurs demandes
concurrentes concernant une même parcelle, sous réserve que ces demandes concurrentes soient faites avant l'expiration
du délai de deux mois prévu à l'article 7 ci-après. L'adjudication est également de règle d.ans les régions de la colonie où
les conditions de cultures sont particulièrement favorables, et dans celles où sont réalisés où sont prévus de grands tra-
vaux d'aménagement économique. Ces régions seront détenninées par arrêté du Lieutenant-Gouvemeur, pris en conseil
d'administration, qui fIXera en même temps les conditions d'attribution dans ces régions de concessions susceptibles
d'être mises en valeur par. un effort individuel ou familial.
FORME DES DEMANDES
Art. 3. - Quiconque veut obtenir la concession provisoire d'un terrain doit, par l'intermédiaire et sous couvert de
l'administrateur du cercle de la situation des biens, adresser au Lieutenant-Gouvemeur une demande timbrée, énonçant:
1 - les noms, prénoms, qualités, r~girne matrimonial, s'il y a lieu, nationalité et domicile ordinaire du demandeur
ou, s'il s'agit d'une société, sa dénomination, son capital et son siège social.
S'il s'agit d'une société, le demandeur devra justifier qu'il est dûment habilité et que la société est régulièrement
constituée.
Le mandataire d'une tierce personne devra justifier d'une procuration régulière.
Tout demandeur d'une concession devra faire élection de domicile à la colonie.
A défaut de domicile élu, les significations seront valablement faites dans les bureaux de l'administrateur du cer-
cle où sont situés les biens.
En outre, tout changement de domicile élu devra faire l'objet d'une déclaration tant aux bureaux de l'adminis-
trateur du cercle de la situation des biens qu'à cc:lui du receveur des Domaines;
2 -'l'objet précis de l'entreprise pour la création de laquelle la concession est demandée;
3 - la superficie et les limites des terrains demandés.
Les terrains répartis entre des cercles différents doivent faire l'objet de demandes distinctes pour la partie com-
prise dans chaque cercle.
Chaque demande devra être accompagnée:
a) d'un plan à l'échelle, en triple, signé, indiquant d'une manière exacte, par rapport à des points fIXes et remar-
quables dans la régio~ tlt"arttulier bornes des titres fonciers déj~ existants, la position des terrains demandés;
b) de toutes pièces justificatives de la nationalité et de tous renseignemênts relatifs àla capacité fmàncière du
demandeur.
Aucune concession provisoire nouvelle ne pourra être accordée avant que les concessions antérieurement octroyées
n'aient été entièrement mises en valeur ~t n'aient fait l'objet d'un titre de propriété ou d'un bail emphytéotique.
INSTRUCTION DES DEMANDES
Art. 4. - Toute demande de concession parvenue à l'Administration est portée à la connaissance du public par
les mesures de publicité suivantes:
Apposition et maintien, pendant un délai de quinze jours en suite à leur lecture àla population réunie en palabre,
d'affiches faisant connaitre le nom des demandeurs, la nature de l'installation ou le mode d'exploitation projeté, et
contenant la désignation du terrain choisi, avec indication de la situation et de ses limites, au chef·lieù du cercle, au
poste lé plus rapproché et dans les différents villages situés dans le voisinage immédiat du terrain choisi.
Art. S. - Les oppositions fonnulées par les indigènes ou par d'autres ayants droit sont mentionnées sur un registre
spécial.
\\
Les terrains mis en culture par les indigènes sont réservés. Les concessionnaires ont toutefois la faculté de s'affran-
chir de cette réserve au moyen du versement entre les mains des occupants d'une juste etpréalabkindemnité.

L'administrateur, après enquête sur les lieux, a qualité pour régler à l'amiable les oppositions, et constater admi-
nistrativement l'accord des parties au cas de versement d'indemnité. Procès·verbal de l'accord sera joint au dossier.
En aucun cas, la suppression pure et simple des cultures et habitations moyennant indemnité ne pourra être im-
posée aux indigènes.
Au cas où, postérieurement à l'attribution de la I.:oncession provisoire, il viendrait à être constaté la présence de
cultures ou d'établissements créés par les habitants antérieurement à la demande de concession, le concessionnaire ne
pourra évincer ces occupants et devra leur consentir l'abandon du terrain qu'ils occupent uu les désintéresser après
accord, dans les mêmes conditions que ci-dessus.
Art. 6. - A l'expiration du délai d'affichage, l'administrateur intéressé transmet au chef de la colonie le dossier
complet de l'affaire, comprenant:
1 . la demande avec toutes les pièces y annexées;
2 - trois plans des lieux;
3 - un certificat d'affichage;
4 - un extrait du registre des oppositions, accompagné de tous documents fournis par les opposants;
5 - un rapport faisant connaître l'exposé des renseignements en sa possession relativement au terrain demandé,
ainsi que son avis motivé tant sur la demande que sur les oppositions, s'il en a été déclaré;
6 - un état des frais avancés par l'Administration à charge de remboursement par le demandeur;
7 . une déclaration faisant connaître et justifiant les possibilités fmancières du demandeur;
8 - ses propositions en ce qui concerne les conditions spéciales de mise en valeur.
Art. 7. - A la réception du dossier au chef-lieu, un avis est inséré au Journal officiel de la colonie et est reproduit
au numéro suivant dans la même fonne.
Après expiration du délai de deux mois à partir de la première insertion, le Lieutenant-Gouverneur communique
1
le dossier au receveur des Domaines, après avis des autres services techniques, pour qu'il fonnule son avis et dresse un
projet de cahier des charges à soumettre préalablement à la signature du futur concessiormaire.
.
L'administrateur du cercle de la situation des biens immatriculés sollicités en concession provis~!re devra trans-
.nettre au che~ de la colonie, avec avis motivé, les demandes dont il sera saisi.
Ainsi constitué, le dossier sera transmis, si besoin est, par le chef de la colonie, au receveur des Domaines chargé
de la préparation de l'adjudication.
Article 7 bis. - Toute demande qui ne répond pas aux conditions exigées à l'article 3 qui précède est écartée d'of·
fice.
Art. 8. - Les concessions sont accordées à titre provisoire par arrêté pris par le Lieutenant-Gouverneur en conseil
d'administration, aux clauses et conditions du cahier des charges visé au paragraphe in fme de l'article 7 ci-deSsus.
Elles donnent lieu à la perception d'une redevance annuelle par hectare aux conditions fIXées au cahier des char-
ges. ~~êté de concession provisoire fait mention de la publicité qui a été faite et est inséré au Journal officiel de la
colonie.
.
Pendant toute la durée de la concession provisoire, aucune opération commerciale autre que la vente des produits
de son exploitation ou de son industrie ne pourra être faite sur le terrain concédé.
. '
Art. 9. - Lorsque les concessionnaires de terrains ruraux ont satisfait aux conditions du titre de concession
" '{'rovisoire, la propriété définitive du terrain, dûment immatriculé confÇlrrn~mel1t~ux text~s sur le régime foncier,
l~ur est attribuée sur leur demande par arrêté du Lieutenant-Gouverneur en conseil'd"àd.ministration. Au cours de la
'J~périOde provisoire, le concessionnaire pourra, sur sa demande uniquement motivée en vue d'un prêt hypothécaire
.
destiné à faciliter la mise en valeur obtenir, après immatriculation, l'attribution définitive de la partie valorisée, dans
.L
les conditions stipulées au cahier des charges, le reste de la concession continuant à être soumis aux clauses de l'arrêté
d'octroi et du cahier des charges.
.
1
L'attribution à titre définitif a lieu sous la condition résolutoire du paiement par le concessionnaire, à la caisse
'du receveur des Domaines, à première réquisition et au plus tard dans le mois qui suivra la notification de l'arrêté des
prix, droits, frais et salaires de conservation tels qu'ils sont liquidés par ce fonctionnaire.
L'interdiction de commercer, édictée par l'article 8, durera trente années à compter de la délivrance du titre dé-
finitif. Mention en sera faite au titre foncier correspondant.
Art. 10. - La mise en v.alwr des lerrains doit être constatée, soit d'office aux échéances et dans les conditions
prévues au cahier'des c'harges, soit SûrÏa demande du concessionnaire, avant même ces échéances, par une commis-
sion comprenant deux membres désignés respectivement, l'un par le chef de la colonie et l'autre par le concessionnaire
et un troisième désigné par les deux autres d'un commun accord.
Si le concessionnaire, dans le délai d'un mois, après en avoir été requis par lettre recommandée, n'a pas désigné
un expert, la désignation est faite par le président du tribunal de première instance de Grand-Bassam; le même magis·
trat dé~igne en outre le truisième expert d'accord entre les deux premiers.
Art. 10 bis. - A l'expir:ltion du délai imparti pour la mise en valeur, le terrain conc~dé devra. sauf le cas de pro-
"'llgJlil lll, sortir du stade pruvisoire pour ~tre attribué, soit en pleine propriété, soit à bail emphytc:utique ou pour f:lIr<'
i' retuur au domaine.
.

Art. 1I. - Si, à l'expiration des délais impartis, les concessionnaires n'ont point rempli les conditions du titre de
concession provisoire, celui-ci peut leur étre retiré.
II peut toutefois être accordé aux concessionnaires, dans le cas où les retards constatés ne leur seraient pas uni·
quement et absolument imputables, des délais complémentaires soit pour commencer les travaux, soit pour achever
la mise en valeur.
Le retrait du titre de concession provisoire est prononcé si, après une mise en demeure régulièrement notifiée, le
concessionnaire ne s'est pas conformé dans le nouveau délai qui lui est imparti aux injonctions de l'Administration
et n'a pas exécuté son contrat.
-
Art. 12. - Tout concessionnaire est en outre passible de déchéance s'il n'a pas acquitté, après mise en demeure,
Je montant de la redevance exigible.
,.
Art. 13. - Dans tous les cas où une concession fait retour au Domaine, il n'est dû au concessionnaire aucune
(\\ indemnité ayant le caractère de dommages-intérêts, pour les installations existantes. Cependant, lorsqu'en cas de dé·
chéance il est constaté une valorisation effective par construction ou culture témoignant d'un effort réel, l'ancien
concessionnaire pourra à son choix dans les 12 mois de sa déchéance, soit procéder à l'enlèvement des biens représen-
tant la contre-valeur de ses impenses, soit présenter à l'Administration un acquéreur de ses droits susceptibles de pren·
dre sa suite dans l'exploitation de la concession. L'Administration pourra, sans avoir à donner des raisons de son refus,
ne pas agréer cet acquéreur. Passé le délai de 12 mois et à défaut d'acquéreur agréé ou faute par la colonie d'avoir usé
des droits qu'elle tient de l'article 555 du Code civil, il sera procédé à l'évaluation contradictoire des impenses. Sur
nouvelle mise en adjudication, l'acquéreur du terrain considéré sera tenu de payer aux mains de J'ancien concession·
naire le montant desdites impenses.
LOTS DE TERRAINS URBAINS
Art. J4. - Les centres urbains sont lotis suivant des plans dressés par la Section topographique et comprenant:
1 . des quartiers susceptibles d'être vendus;
2 . des quartiers réservés exclusivement à l'habitation des indigènes.
.
Art. JS. - Les avant-projets de plan de lotissement sont établis sur les indications de l'administrateur intéressé
et du Conservateur de la propriété foncière, en tenant compte autant que possible de l'état des lieux et des construc-
tions en dur édifiées sur les terrains à lotir.
Dès leur établissement, ils sont adressés au Lieutenant-Gouverneu~ pour être communiqués aux divers services
techniques.
Art. J6. - L'avant-projet est ensuite retourné au chef-lieu du cercle intéressé pour enquête de commodo et in·
commodo dont la durée doit être d'un mois au moins et de trois mois au plus.
A l'issue de cette enquête, l'avant-projet est examiné par une commission mixte de lotissement, composée de
l'administrateur, commandant le cercle, président, du médecin de la ~OD ou à défaut d'un fonctionnaire et d'un
commerçant désigné par la Chambre de Commerce ou à dUaut par le Lieutenant-Gouvemeur.
La commission mixte de lotissement est nommée par le Lieutenant-Gouvemeur, elle dresse procès-verbal de ses
travaux.
Art. J7. - Après clôture de l'enquête, le dossier, composé de l'avant-projet, du procès-verbal d'enquête de com-
modo et incommodo, du procès·verbal de la commission mixte, est transmis Sans retard au Lieutenant-Gouverneur par
l'administrateur commandant le cercle.
.
Art. 18. - Ce dossier est ensuite adressé au chef du Service des Travaux Publics de la colonie pour établissement
du plan défInitif qui est soumis à l'approbation du Lieutenant-Gouverneur en conseil d'administration.
Art. 19. - L'arrêté d'approbation déclare le plan d'utilité publique et stipule qu'il vaudra alignement.
Art. 20. - Le plan de lotissement est appliqué sur le terrain et chaque lot est déterminé par des bornes du type
réglementaire.
.
-
.-


L'immatriculation au nom de l'Etat des terrains ainsi allotis, situés tant dans la partie commerciale que dans la
partie indigène du centre urbain, est ensuite requise à la diligence du receveur des Domaines ayant la régie des biens de
l'Etat.
Toutefois, les indigènes installés dans la partie européenne du centre urbain et régulièrement détenteurs des droits
coutumiers d'occupation peuvent, par application des articles 83 et 90 du décret du 26 juillet 1932, obtenir des certifi·
cats administratifs leur permettant de provoquer en leur nom la procédure ~'irnmatriculation.
Ceux de ces indigènes qui ne justiflent pas de pareils droits peuvent recevoir un lot déterminé de la partie indigèn
de la ville et ce, gratuitement, sauf à satisfaire aux obligations de la législation devant intervenir ultérieurement en cette
matière.
.
Art. 21. - En règle générale, l'aliénation de la concession provisoire de terrains urbains a lieu par voie d'adjudica-
tion publique, aux clauses et conditions d'un cahier des charges type préparé par le Service des Domaines et approuvé
par le Lieutenant-Gouverneur en conseil d'administration.
La mise en adjudication publique est de droit lorsque l'Administration est saisie de deux ou plusieurs demandes
concurrentes concernant une même parcelle.

En cas d'adjudication publique, cette dernière est pratiquée dans les bureaux du receveur des Domaines et est pr1
sidée par l'administrateur commandant le cercle de la résidence dudit fonctionnaire ou son délégué.
L'adjudication publique de la concession provisoire de terrains urbains sis dans les cercles de Bobo-Dioulasso,
Ouagadougou, Koudougou, Kaya, Tenkodogo et Gaoua sera pratiquée dans les bureaux de la résidence de Bobo-Diou-
lasso et sera présidée par l'administrateur·maire commandant le cercle ou son délégué.
Un fonctionnaire du cercle, en résidence à Bobo-Dioulasso, sera habilité en qualité de receveur des Domaines ad
hoc par décision de l'administrateur-maire, président de l'adjudication.
Les résultats de l'adjudication seront consignés dans un procès·verbal qui devra être transmis au receveur des -
Domaines chargé du recouvrement des prix et taxes, accompagné d'un rapport faisant ressortir la physionomie des en-
chères et relatant éver tueUement les incidents qui ont pu se produire.
Art. 22. - Les adjudications de la concession provisoire de terrains urbains peuvent être pratiquées d'office par là
colonie. Pratiquement, eUes seront provoquées par les commerçants planteurs et sociétés.
Dans ce dernier cas, les demandes seront faites et instruites dans les formes admises pour les terrains ruraux tra-
cées aux articles 3, 4, 5, 6 et 7 ci-dessus.
Les demandeurs sont cependant dispensés de fournir un plan du terrain sollicité, l'indication du numéro étant suf
fisante.
Art. 23. - Avis de l'adjudication est publié au Journal officiel de la colonie, deux mois au moins avant la date
fixée pour la vente, le plan de lotissement et le cahier des charges type sont déposés au bureau des Domaines et dans les
bureaux de l'administrateur de la situation des biens où ils peuvent être consultés.
Art. 24. - Le prix de base de l'adjudication, ainsi que le montant de la mise en valeur à effectuer sont proposés
par un comité se réunissant chaque année au chef-lieu, sous la présidence du Lieutenant-Gouverneur ou son délégué
et comprenant :
- le chef du 3e bureau;
- le chef du Service des Travaux Publics;
- le receveur des Domaines.
- deux commerçants désignés par la Chambre de Commerce ou à défaut par le Lieutenant-Gouverneur.
Le comité propose les mises à prix et charges de mise en valeur après examen des propositions des administrateurs
commandant les cercles intéressés, le Lieutenant-Gouverneur décide après avoir recueilli les avis exprimés.
Art. 25. - Aux jour et heure fixés pour l'adjudication et avant l'ouverture des enchères, il est donné connaissance
au public du cahier des charges type et des décisions spéciales.
Art. 26. - Le procès-verbal d'adjudication est établi séance tenante en deux expéditions et adressé au Lieutenant-
Gouverneur pour approbation en conseil d'administration.
Postérieurement, une de ces expéditions est retournée au receveur des Domaines, l'autre étant conservée au chef·
lieu.
Dès réception de ce document, le receveur des Domaines fait établir et transmet aux administrateurs-de cercles de
la situation des biens des extraits dudit procès-verbal.
De même, pour compléter la publicité,le receveur des Domaines fait toute diligence pour assurer J'insertion des
résultats de l'adjudication au plus prochain numéro du Journal officiel.
Art. 27. - Dans les centres lotis non immatriculés, si la demande émane d'un commerçant ou industriel payant
patente, sollicitant l'attribution immédiate d'un lot, en vue d'une installation commerciale provisoire, il peut être déli-
vré par le gouverneur à titre personnel et précaire un permis d'occuper autorisant la prise de possession immédiate du
terrain par le demandeur, à ses risques et périls, sous réserve des droits des tiers.
La recherche de ces droits sera effectuée par apposition et maintien, pendant huit jours au chef-lieu du cercle et
dans les villages les plus voisins de l'emplacement choisi, d'affiches faisant connaître l'objet de la demande considérée.
Art. 28. - Les permis d'occuper n'autorisant que des installations temporaires en matériaux provisoires ou en
éléments démontables.
Leur délivrance est subordonnée à l'acceptation par le bénéficiaire d'une redevance annuelle et à la renoncia-
tion formelle par avance à toute indemnité pour le redressement éventuel des limites du terrain lors de l'application
du plan de lotissement, voire même de déguerpissement. La redevance est exigible d'avance.
Art. 29. - Chaque permissionnaire possède sur le terrain qu'il détient conformément aux règles posées aux arti-
cles précédents un droit de priorité lorsque le lot qui aura été créé sera mis en adjudication.
A cet effet, le permissionnaire est tenu, à peine de forclusion, dans le'mois suivant la publication au Journal
officiel de la colonie de l'arrêté portant approbation du procès-verbal dressé à l'occasion de la mise en adjudication du
lot qu'il détient, d'adresser au Lieutenant-Gouverneur une lettre par laquelle il déclare vouloir préempter ce lot au prix
atteint lors de la mise en adjudication ou moyennant le montant de la mise à prix s'il n'y a pas eu d'enchères.
Art. 30. - 11 ne peut être u.:!ivré j un même wrnmerçant ou industriel patenté qu'un seul permis dans chaque
centre loti.
"J:t,
Art. j 1. - Toul tllu\\JlrC Je permis d'occuper est Jé..:hu Je >c:; Jrt'Ils u'offi.:e sur le rapport:
': -'" ~
' ....

a) de l'administratcur commandant le cercle:
1· s'illlc s'est pas instalJé dans le délai d'une an liée franche, à compter de la date de délivrance du pennis;
2 . s'il édifie une construction en matériaux nc répondant pas aux conditions prévues à l'article 28;
3 . si le terrain est occupé en vue d'un but autre que commercial ou industriel;
b) du receveur des Domaines, s'iJ n'acquitte pas la redevance prévue.
Art. 32. - Dans les centres non lotis, toute demande émanant d'un commerçant ou-industriel payant patente,
llJicitant l'attribution immédiate d'une portion de terrain de superficie inférieure à 2.500 mètres carrés, en vue de
instaJIation d'un poste d'achat de produits, sera solutionnée par l'administrateur commandant le cercle qui délivrera
ne autorisation équivalant à location précaire.
Cette autorisation de prise de possession immédiate, emportant pour le bénéficiaire le droit d'installer un postt:
'achat de produits, ne deviendra effective qu'après sanction par le Lieutçnant-Gouvemeur, sanction qui pourra être
:Jnnée par simple lettre.
Les constructions de toute nature que le locataire peurrait édifier sont faites à ses risques et périJs et l'occupant
~ pourra se prévaloir de cette occupation pour prétendre à un droit quelconque sur le terrain qui lui est attribué.
Ladite autorisation sera accordée sans frais et redevance et durera tout le temps que le bénéficiaire paiera paten·
'. ne sera pas renonçant ou ne sera pas déchu pour besoins éventuels du terrain occupé par l'Administration ou pour
iexécution des obligations qui lui incombent.
DISPOSITIONS GENERALES
Art. 33. - Outre les dispositions qui précèdent, l'Administration conserve la faculté de louer et donner à bail,
IX conditions spéciales arrêtées pour chaque cas particulier, tous immeubles domaniaux urbains ou ruraux, après ac·
>mplissement des fonnalités de publicité prévues aux articles 4 et 5 du présent arrêté.
Art. 34. - Le concessionnaire provisoire doit subir, le cas échéant, toutes modifications ou évictions totales ou
lrtielles qui pourraient se produire pendant la durée de J~ concession dans les droits de l'Administration par suite
instance ou de tout autre motif, sans pouvoir prétendre à aucune indemnité.
Art. 35. - JI doit subir également, sans avoir droit à indemnité, toute réduction dans la contenance de la pro-
iété concédée, motivée par la reprise des terrains nécessaires aux besoins des services publics ou l'exécution des tra·
.ux d'intérêt généraL
Art. 36. - Toutefois, dans les cas visés aux deux articles précédents, si la réduction ou l'éviction devait porter
r des parties déjà mises en valeur et susceptibles d;être acquises au concessionnaire, il serait alloué à celui-ci une in·
:mnité représentative des dépenses faites, à fIxer par expert, dans les formes réglées par l'article 8 du décret du 15 no·
mbre 1935.
Art. 37. - Toute substitution de pe'rsonne ou de société, tous transferts de droits relatifs aux terrains concédés à
re provisoire ne pourront avoir lieu, à peine de déchéance, que sur autorisation du Lieutenant-Gouvemeur qui déci·
'fa après production de tous les éléments d'information nécessaires, notamment en ce qui concerne les impenses faites
rie cédant, les conditions de la cession et la capacité financière du nouveau concessionnaire.
En cas de déc'ès, il est réservé aux héritiers düment qualifiés la faculté de prendre la suite de l'occupation provi· \\
ire sous les conditions imposées au précédent concessionnaire, à charge par eux de notifier leur acceptation au Lieu-
nant-Gouverneur dans le. délai d'un an à partir de la date du décès.
La même faculté est accordée à l'associé auql,lel un acte de partage a attribué l'immeuble occupé à titre provi·
ire.
Art. 38. - Toutes les concessions délivrées antérieurement au présent arrêté restent soumises aux dispositions des
Ktes qui leur sont propres.
Toutefois...à l'expiration des délais qui leur sont impartis les concessionnaires obtiennent une prorogation de
s délais, cettê prorogation ne pourra être accordée qu'aux clauses et conditions de la présente réglementation.

217
ANNEXE 4
DECRET DU 16 FEVRIER 1971 RELATIF
AUX PROCEDURES DOMANIALES ET FONCIERES

JOl:P.:'-1AI. OFFICIEL DE LA JŒJ'lJIlLlQn; [JI<; COTE J)·IVOIr.r,;
1~
<1 mars
-1
,',
.....
, 743 FP. D. 2 du 12-2-71. -
Est constaté2, pour compter des
. Yu la loi n° 62·253 du 31 juillet 1962, relative aux plans d'urba:
ortées en regard de let'" no..... l'interruption d2s services des 1 lIIsme ;
de. Douanes ei-après désignés:
'
Yu la loi n° 63 ..526 du 26 déc~mbre 1963, relative aux peine"
baka Tchétché Ernest, brigadier de 1"
classe 1"' échelon
applicables en matière de contravention de simple poliee ;
(mIe 23 784-K), p.c. du 10-11-70;
Yu le décret nO' 64 .. ](j4 dn Hi :lYriJ 1964. portant interdiction
;ry Gnago Théodore, agent de Constatati!:''l des Douan~s de
d'act,-:·s sous seings privés en matière immob!l:ère ;
2" elasse 2" échelon (mIe oC 051-K), p.c. du 1-12-70.
'"'1 1e décret n" 67-18 du 11 janvier 1967, relatif aux lotissement,'
cette pos:tion, les intéressés auront droit à la totalité de,;
privés;
~ns familiales.
Yu le décret n° 68-77 du 9 fé\\'Tier 19fi8, portant créat;on d'une
zone
d'aménagement
différé
au
pourtour
de
l'agglomératiOJ:
, 750 FP. D. 2 du 12·2·71. -
Les anciens militaires ci-dessous
d'Abidjan;
1,
classés sur la liste et l'additif à la liste d:'!~ emplois
Yu l'arrêté 11° 2164 du 9 juillet 1936, rég!emE:ltant l'aliénation dl','
1 de
la catégorie 3, session du 21 no\\'embre 1968, sont
t':rr~::ls domaniaux;
: dans le corps des cadres des Administrations financières
It, en qualité de préposés de 2' classe l" échelon stagiaires
Le Conseil des ministres entendu,
18nes (indice 130, groupe IV) :
ana Coulibaly (mIe 65 740) ;
DÉCRÈTE:
~é Justin (mie 34518) ;
i'amo Doh l\\lareellin (mIe 01-00148)
.-\\.rticle premier, -
Toutes transactions immobilières,
robi Nékalo Gaston (mie 53898) ;
tOU3
loti~semcnts, tellS mcrcellements de terrains et en
aaga Amani Robert (mie 74 351) ;
règle générale, toutes conventions relatives à des droits
!nan Kouakou (mIe 5(335) ;
imrr:obiliers, de:neurent soumis à une procédure doma-
Idi Mamadou J aeque. (mIe 34 758) ;
léi Ernest (mIe. 42-(0137) ;
nia!e ou foncière obligatoire.
liIé Djiéo Justin (mIe 5(556) ;
Toute occupation de terrain pour être légale doit être
léblo Zanahin Benoit (mIe 96 702) ;
justifiée :
Dafana Soro (mle 25 459) ;
tIIDOU KonaD Robert (mIe 01-60225) ;
-
Pour les terrains ruraux, par la po::session d'un titre
amleé Jaeqaes (mle 12124) ;
de concession provisoire ou définitive délivré par le
Ioa Koffi Léon (mle 66 457) ;
via Keman Benott (mIe 54 262) ;
mini~tre de l'Agriculture cu par une autorisation d'occu-
aIü Boba AIldré (mle 44-612093) ;
pation à titre précaire et révocable, délivrée par le ministre
up10 Mango (mIe 74 790) ;
de l'Intérieur ou son représentant. Cette autorisation peut
Qaeuan Zouou Il. (mIe 54 4(9) ;
donner lieu à une concession définitive ou à un bail emphy-
ltir.:bi-TrQ6 Pierre (mIe 28 871) ;
"
J)jeada
téotique ;
G~ (Jille' 107) ;
. . ,Kartbi (mie 16 746) ;
-
Pour les terrains urbains, par la possession d'un titre
lIIouaou .Jean (mie "898) ;
aIibalt -otiemW (mle 74 471).
de concession provisoire ou définitive délivré par le
ministre de la Construction et de ITrbanisme qui peut
"'POBéa stagiaires de. Douanes ci-dessus désignés, nouvelle-
mmés, sont mi. à la disposition du ministre de l'Economie
déléguer ses pouvoirs aux préfets.
~nces (administrations des Douanes).
(} Art. 2. -
Les droits portant sur l'usage du sol, dits
filent arrêU prendra e1l'et pour compter du jour de la mise
! ou' de la prise de service des intéressés.
droits coutumiers, sont personnels à ceux qui les exercent
et ne peuvent être cédés à quelque titre que ce soit.
667 J'P. D. 2 du 9-2-71. -
Un congé de longue durée de
(1ft tranche) se eomposant comme suit :
Nul ne peut se porter cessionnaire desdits droits sur
_
l plein traitement;
l'ensemble du Territoire de la République.
iloia 'i; demi traitément,
idé-l compter du 30 juillet 1970, à M. Amadou Maïga,
' " Art. 8. -
Toute attribution d'un terrain rural est subor-
J'e. jardinier de la 4· catégorie C,l>" échelon (mIe 22 799-Z),
donnée aux formalités ci-après :
Ile' l,~la BOWI-direetion des Domaines et de la Conservation
l Abidjan.
.
1° Demande adre~sée à l'autorité aàministrative terri-
torialement compétente ;
ft' de son congé, l'intéressé se présentera à nouveau devant
il de San~ qui statuera sur son aptitude ou inaptitude
2° Enquête administrative prévue par la réglementation
cire le 8erVÏce.
en vigueur;
3° Octroi d'une autorisation d'occupation à titre pré-
caire et révocable, ou octroi d'une concession provisoire;
i:··· ....:.:. _.:~
'. .
.
:-;::.MINISTERI DE LA CONSTRÙCTION
4· Immatriculation du terrain au nom de l'Etat pour le
purger de tous droits des tiers et garantir l'origine de la
~ ·\\..'?'~':.-"'ET DE L'URBANISME
;;:::.~~:o~....
,-
".
_
propriété ;
iF~.;~'{.:"~ :, ,;' "
.
5· Constat de mise en valeur ;
~. 71~74 du 16 f~vrier 1971, relatif aux procédures
-\\. 6· Octroi de concession définitive, soit sous forr~e de
~, '. :: ....:::~domanialu et f~e8"
transfert .. de propriété, soit sous fonne de bail emphytéo-
.... .' "':''''
,
tique.
fl.WDh·1tz LA. "RtpUBLIQÙE,
~rt"'mimltres'de l'Agrieulture et de la Construction
Art. 4. -
Toute attribution d'un terrain urbain est
~~ ..
.
'
subordonnée aux formalités ci-après :
~!atioD~.on article 41 ;
1- Demande adressée à l'autorité administrative terri-
I6Cr8t·~ 26 Juillet 1932, portant réorganisation du régime
torialement compétente ;
Ijtri6té fon,.ïère ; .
Ct6eret :du 16 novembre 1935, portant réglementation des
2- Vérification des titres par le service de la Conser-
....JI,••.;..
..
..
vation fcnciêre et bornage du terrain ;
16cret"du'23 février 1949, portant règlement du statut de
S- Immatriculation du terrain au nom de l'Etat pour
iii~, dei immeubles diviséll par appartements ;
le purger de tous droits des tiers et garantir l'origine de
iil'i.,:eo.aei'du·14 DOftIIlbre 1960, portant institution d'un
~~,ltél)&~... 'tota,puDeD.t en 80n article 28;
la propriété ;
"'.ifBt;;'''·;':-ir+f1i+r;'~,b'-':~>~r~;.,
"'_lI!!:
. . :;g;;y;;;~~~!'~"';":,: .. -,".. ;' "
____

~, 19T1
-
Octroi de concession provisoire;
j
Le chef du sen;ce des Recettes domaniales est autori
Constat de mise en valeur ;
à annuler tou~es les consignations afférentes à l'arr€
1 susvisé à l'exception de celles échues antérieurement;
Octroi de conce~sion définitive, ~oit sous forme de ; 14 novembre 1970.
.
~fert de propriété, soit sous forme de bail emPhytë<>-1
Il Est concédé à titre. définitif et moyennant le prix
payer de 299.500 francs sur la base de 500 francs le mèt
t 5. - ' Tous faits, conventions ou sentences aYP.~t 1 carré, aux ci-après nommés, la pleine propriété d',
objet de constituer, transmettre, déclarer, modifier i terrain non loti d'une superficie· de 599 mètres carrl
eindre un droit réel immobi1i:,r. d'en changer le titu-I immatriculé au nom de l'Etat sous le n° 323 de la cireoI
on les conditions d'existenre, tous transferts d'im-
cription foncière de Dabou :
~S, tous baux d'une durée supérieure à trois ans, tous :
renouvelables par tacite reconduction, de même qu~ 1
10 :'orme .Jea!1ne-Gabrielle Julhïan, veuve de M. Nardo
baux renouvelés au profit du même bénéficiaire! Alphonse-Antoine. commerçante, demeurant à Tiassa
,nt le droit d'occupation au-delà de trois ::'.ns. tontes ! B.P. 82. usufruiti€r~ en vertu de l'article 767 du code ch
[rations y relatives, toutes quittances ou cessions d'une; du quart des biens, composant la 3uccession de son mar
le équivalant à plus d'une année de loyers ou fer- 1
s non édtus, tous actes sujets à publicité foncière, !
2° ~Ime Nadia Reine Nardone, épouse de 'M. Pien
ad:es établis en vue de la constitution, de la modifi- 1 Claude Besson, demeurant à Miribel (Ain), 1, avenue è
Balmes;
,
Il, de la dissolution et de la liquidation des sociétés
s de construction ainsi que toutes cessions de parts
-
Mme Eliane-losette Nardone, épouse de M. Antoir
ives auxditea sociétés, doivent être conclus et passés
Louis Pires, demeurant à Marseille, 24, Square nation
[lt notaire.

seules héritières de M. Nardone Alphonse-Antoine, c(
t. 6. -'-' TI est interdit aux agents d'affaires. et en
jointement entre elles pour le tout ou divisément ehacu
eulier aux agents immobiliers, de rédiger des actes 1 pour
moitié
sous
réserve
des
droits
revenant
atant les opération3 visées à l'article précédent, même
Mme Nardone susnommée_
~ de projet signé des parties.
Pour obtenir la délivrance de la copie dudit titre,
Il acles .~ peuvent être authentifiés par notaire.
concessionnaires seront tenus ~
.
l
t. r:" '<f'Les infractions aux dispositions du présent
1° Dans le délai de quinze jours, à compter de la ne
!t et des décrets n° 64-164 du 16 avril 1964. portant
fication du présent arrêté au remboursement des fr:
diction d'actes SOlj3 3eings privés, n°
68-77 du 1 d'immatriculation et au payement du prix d'aequisiti
mer 1968, relatif aux autorisations de mutation et
des droits de mutation foncière; il est précisé que
mstruction, n° 67-18 du 11 janvier 1967, relatü au."t 1 frais de délimitation ont été supportés p~ .les intéressé
lements- priyés constituent des contraventions de 1
2° A première réquisition, au règlement des droits d'!
lSSe passibles comme: teIles d'une amende de 2.000 à 1 registrement et de timbre e."tigibles.
tO francs et d'un emprisonnement de dix jours à
mois ou de l'une de ces peines seulement. sans préfu- 1
A défâut de paiement dans le délai ci-dessus impa
des sanctions administratives qui pourront être prises i de toute somme due, le présent arrêté sera rapporté
[lcontre des contrevenants.
les concessionnaires replacés sous le régime proviso
avec teutes ses. obligations et conséquences.
t." 8. -
Les agents assennenté3 des ministères inté-
;S .pourront être habilités, par arrêté, à constater les
En permanence, à compter- de l'inscription du présf
~etions visées à l'article précédent.
.
arrêté :
. --
'" ,'
:t 9. -
Les dispositions du présent décret ne sont
1° Li! terrain concédé devra, à peine de déchéa,
applicables- aux actes dans le~que1s l'Etat est partie.
immédiate servir à usage exclusif de salle de spectac
actes· restent soumis aux dispositions particulières qui
et accessoirement d'habitation ;
- '
:oneement.
2° Dans le cas de travaux d'intérêt général ou pul
rt: 10. -'- 'Sont abrogées touteS dispositions anté-
reconnu la reprise amiable ou forcée de tout ou partie
res, contraire au présent décret, et notamment l'ar-
terrain concédé sera opérée sur la base du prix d'alié
~ alinéa premier du décret n° 64-164 du 16 avril 1964
tien ci~essus stipulé.
isé.
Ces clauses restrictives au droit de propriété seri
rt. 11. - .. Le ministre de l'Agriculture, le ministre
inscriks au tableau B de la section III~ tant du ti
l Construction et de l'Urbanisme, le ministre de l'In-
foncier que de l~ copie dudit titre.
~ur; le. ministre de l'Economie et des Finances sont
'gés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du
ent décret .qui sera· publié au Journal officiel de la
llblique de Côte d'Ivoire.
ARRtTÉ n° 22 Metr. CAB. DOM. du 12 janvier 1971.
L'arrêté n~ 304 }leu. CAB. DOM. du 29 juillet 1968. ac<:
!Ût à. Abidjan, le 16 février 1971.
dant à M. et Mme Boa Jean-Baptiste, la concession pre
Félix HOUPHOUET~BOIGNY.
soire du lot n° 123 de Danga-Nord (titre foncier n- 12
de BingerviIlê), e3t modifié comme suit
RRtTÉ n- 17MCU. CAB. DOM. du 8 janvier 1971. -
Est
Au lieu de :
)Crté l'arrêté n° 1058 FAEP. SEF. DOM. du 14 novem-
1960, accordant à M. Nardone Alphonse-Antoir.e, la
Il Est concédé à titre provisoire à M. et Mme Boa J
tion précaire d'un terrain non loti de 600 mètres
Baptiste, médecin et sage-femme, B.P. 1394 R.A..:.
~és, Si3 à N'Douci (sous-préfecture de Tiassalé).
Abidjan.

220
ANNEXE 5
~ ') 1 DJ 1 2
,JJ 1LLET 1 97 1 REL AT l 'i E PI L'E XPL CI 1 TA TI 0 rJ
=~S
-ERRAINS DETENUS EN PLEI~E
PROPRI~TE

pourra entreprendre toutes études et toutes ~ctions
b)
Les.-12.!!!~çeJl~s isolées delllelll:ées_ en _friC-he_ peli
jugera utiles pour la réalisation de son objet.
dix années consécutives et nont la sunerficie totale ex
t. 3. -
Les ressources de l'office sont constituées
la superficie habituellement en jachère dans le srs.
d'assolement en usage sur l'exploitation et dan~ la ré.'
Des subventions de l'Etat;
Art. 5. -
Sont réputées en mauvais état de produc
Des fonds provenant d'aides extérieures;
les entreprises agricoles ou les parcelles isolées por
Des produits des ventes des objets de l'artisanat;
des cultures pérennes qui depuis dix années consécut
n'ont pas reçu les façons culturales appropriées l
Des dons, legs et libéralités de toute nature qu'il est
assurer un entretien normal et dont les rendements
appelé à recueillir.
inférieurs aux rendements habituellement ohtenus (
;. 4. -
Les charges de l'office sont constituées par :
la région pour des terres de même fertilité exp!()Î
normalement.
Les dépenses d'investissement et de fonctionnement
;aires à la réalisation de son programme et à l'assis-
Art. 6. -
La nériode de dix almées de non mise en ':;\\
qu'il apporte aux artisans;
visée aux articies 4 et 5 ci-dessus, sera calculée rétn
Toutes autres dépenses nécessaires à la réalisation
tivement au jour de l'ouverture de la procédure c!'IO':
Il projet.
priation.
~ 5. -
L'office est administré par un conseil d'admi-
Art. 7. -
A défaut d'accord amiable pouvant interVe
,tion, composé de 14 membres au plus, représentant
à tout moment au cours de la procédure, le transfert d(»)
lSemblées constitutionnelles, le Gouvernement et des
5eulement droit au remboursement du prix "ersé lo!',;
Itions et organis~ticn5 économiques.
l'accession à la propriété du terrain en cause et des [1
composition et les pouvoirs du conseil d'administra-
d'immatriculati on.
le mode de désignation des administrateurs, les
ités d'organisation et de fonctionnement de l'office,
Si cette accession résulte d'une concession octroyét
modalités de préparation, d'approbation et d'exécu-
titre gratuit, le transfert du terrain ne donne ciroit qu
es budgets, les conditions de l'exercice des tutelles
remboursement des frais d'immatriculation é"entuellemf
que et financière, sont fixées par décret en Conseil
exposés.
inistres.
Si la terre a fait ultérieurement l'objet d'une aliénati
, 6. -
-La présente loi sera publiée au Journal
l'acquéreur reçoit le prix versé par lni pour l'acquisiti
1 de la République de Côte d'Ivoire et exécutée
du terrain majoré des frais d'acquisition à condition q
cette acquisition ait date certaine au 28 fév rie
! loi de l'Etat.
t' 1957.
; l Abidjan, le 12 juillet 1971.
Toutefois, pour les améliorations non somptuaires CI
Félix HOUPHOUET-BOIGNY.
auront été apportées et éventuellement abandonnées dem'
dix ans, le transfert donnera droit à une indemnité suppl,
mentaire égale à la valeur des améliorations estimée" ,1
. 71-338 du 12 juillet 1971, relative à l'exploitation
jour du transfert.
'&eUe des terrains ruraux détenus en pleine propriété.
Art. 8. -
Les remhoursements visés aux trois premiel
:MBLtE NATIONALE A ADOPTÉ,
alinéas de l'article précédent sont affectés d'tm coefficier
~IDENT DE LA RÉPUBLIQUE PROMULGUE LA LOI DONT
de majoration correspondant aux variations moyennes nE
EURSUIT:
prix constatées par décret.
eJe premier. -
Tout propriétaire de terrains ruraux
Art. 9. -
Dans l'hypothèse où un incapable. :m absen
.u de mettre en culture et de maintenir en bon état
ou une personne ne résidant pas en Côte d'I voÏ!'e et n'
duetion l'intégralité des terres qu'il exploite cette
ayant ni mandataire ni représentant .~onnu ser~ titnlair
n valeur s'appliquant à l'exploitation des produits
sur le terrain d'un droit susceptible d'être indemnisé ct
es, à l'élevage ou à un usage industriel.
fait de l'expropriation pour non mise en valeur, U
2. -
Les terrains ruraux acquis en pleine propriété
curateur ad koè sera chargé de ses intérêts.
lue titre que ce soit et dont la mise en valeur n'a
~ assurée dans les conditions fixées aux articles
Art. 10. -
Les dispositions ci-dessus sont immédiate
;s, peuvent faire retour en totalité ou en partie au
ment applicables aux terrains non mis en valeur depui
le de l'Etat en vue de leur utilisation à des fins
plus de dix ans à la date de publication de la présente loi
iques et sociales.
3. -
Le défaut de mise en valeur visé à l'article
Art. 11. -
Les modalités d'application de la présentl
t' résulte, soit d'un défaut de mise en culture, soit
loi, notamment le mode de transfert de propriétés al
Iluvais état de production, soit encore de l'abandon
Domaine de l'Etat, seront déterminées par décret.
çloitation industrielle installée sur ces terrains.
Art. 12. -
Sont abrogées la loi n° 46-896 du 3 mai 194E
4;. -
Le défaut de mise en culture consiste en
~ de tout entretien et de tolite production qu'il
ainsi que toutes dispositions contraires à la présente loi
de cultures ou des produits de l'élevage, durant
iode de dix années.
Art. 13. -
La présente loi sera publiée au Jrmrna.
réputées non mises en culture :
officiel de la République de Côte d'Ivoire et exécutéE
comme loi de l'Etat.
!s' concessions accordées à titre définitif en vue
lise en valeur agricole lorsque les conditions impo-
Fait à Abidjan, le 12 juillet 1971.
r le cahier des Charges annexé à l'arrêté d~_octroi
pas remplies;
Félix HOUPHOUET-BOIGNY.
~;.:... _._-
~.._.. -.

222
ANNEXE 6
LOI DU 25
JUIN 1902 REGLEMENTANT LE BAIL EMPHY ~OTIQUE

ril emphytéotique (L. 25 juin J902).
1 - te bail emphytéotique de biens immeubles confère au preneur un droit réel susceptible d'hypothèque; ce droit
ut être cédé et saisi dansies fonnes prescrites pour la saisie immobilière. Ce bail doit être consenti pour plus de
I(·huit années et ne peut dépasser quatre-vingt-dix·neuf. ans; il ne peut se prolonger par tacite reconduction.
2 - Le bail emphytéotique ne peut être valablement consenti que par ceux qu~t le droit d'aliéner, et sous les
:mes conditions, comme dans les mêmes fonnes. Les immeubles appartenant aux mineurs ou interdits pourront être
nnés à bail emphytéotique en vertu d'une délibération du conseil de famille homologuée par le tribunal. Le mari
urra aussi donner à bail emphytéotique les immeubles dotaux avec le consentement de la femme et l'autorisation de
,tice.
3 - La preuve du contrat d'emphytéose s'établira confonnément aux règles du Code civil en matière de baux.
défaut de conventions contraires, il sera régi par les dispositions suivantes.
4 - Le preneur ne peut 4emander la réduction de la redevance pour cause de perte partielle du fonds, ni pour
Ilse de stérilité ou de privation de toute récolte à la suite de cas fortuits.
5 • A défaut de paiement de deux années cO,nsécutives, le bailleur est autorisé, après une sommation restée sans
'et, à faire prononcer en justice la résolution de l'emphytéose. La résolution peut égaIement être demandée par le
illeur en cas d'inexécution des conditions du contrat ou si le preneur a commis sur le fonds des détériorations graves.
anrnoins les tribunaux peuvent accorder un délai suivant les circonstances.
6 • Le preneur ne peut se hbérer de la redevance ni se soustraire à l'exécution des conditions du bail emphytéo-
ue en délaissant le fonds.
7· Le preneur ne peut opérer dans le fonds aucun changement qui en diminue la valeur. Si le preneur a fait des
léliorations ou des constructions qui augmentent la valeur du fonds il ne peut les détruire ni réclamer à cet égard
cune indemnité.
8· Le preneur est tenu de toutes les contnbutions et charges de l'héritage. En ce qui concerne les constructions
istant au moment du bail et celles qui auront été élevées en exécution de la convention, il est tenu des réparations de
Ite nature; mais il n'est pas obligé de reconstruire les bâtiments s'il prouve qu'ils ont été détruits par cas forfuit, par
'ce majeure, ou qu'ils ont péri par le vice de la construction antérieure au bail.
li répond de l'incendie, confonnément à l'article 1733 du Code civil.
9 • L'emphytéote peut acquérir au profit du fonds des servitudes actives et le grever, par titre, de servitudes pas-
es pour un temps qui n'excédera pas la durée du bail et à charge d'avertir le propriétaire.
10 - L'emphytéote profite du droit d'accession pendant la durée de l'emphytéose.
Il . En casd'~_xJ.!122..riation pour cause d'utilité publique, le bailleur devra faire connaître le droit de l'emphy-
)te, confonnément aux dispositions de l'article 21 de la loi du 3 mai 1844. Des indemnités distinctes sont accordées
bailleur ou au preneur.
12 - Le preneur a seulles droits de chasse et de pêche et exerce à l'égard des mines, minières, carrières et tourbières
lS les droits de l'usufruitier.
13 - Les articles 1er, 9, Il, sont applicables aux emphytéoses antérieurement établies si le contrat ne contient pas
stipulations contraires.
14· L'acte constitutif de l'emphytéose n'est assujetti qu'aux droits d'enregistrement et de transcription établis
ur les baux à fenne ou à loyer d'une durée limitée. Les mutations de toute nature ayant pour objet soit le droit du
iUeur, soit le droit du preneur, sont soumises aux dispositions de la loi du 22 Frimaire an VII et des lois subséquentes
Ilcernant les transmissions de propriété d'immeubles. Le droit est liquidé sur la valeur vénale détenninée par une dé-
ration estimative des parties.

224
VU
Le Président de la thèse
Vu et permis d'imprimer.
"bulouse, le
LE PRESI~ENT DE L'UNIVERSITE DES SCIENCES
SOCIALES DE TOULOUSE

225
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BNDA
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86.

235
TA,B,l EDE S ~1 ATI ER ES
AVANT-PROPOS
9
1 NTR 0 0 UCTI 0 N GENER ALE
12
1ERE PARTIE: L'ACCES A LA TERRE
25
CHAPITRE PRELIMINAIRE: DU DECRET DU 16 FEVRIER 1971
28
INSTITUANT LES REGIMES
JJRIDIQUES D'EXPLOITATiON DU SOL
I. SES FONDEMEN TS
28
1. Le décret du 26 juillet 1932
28
2. Le décret du 15 novembre 1935
29
3. L'arrêté du 9 juillet 1936.
30
II. LE CONTENU ET LES EFFETS DU DECRET DU 16 FEVRIER 1971
30
CHAPITRE 1 : LES ATTRIBUTIONS EN DROIT POSITIF DES IMMEUBLES
RURAUX S'EFFECTUANT A L'EXCLUSION DE TOUTE DEVOLUTION SUCES-
SORALE, ET LEUR INFLUENCE SUR L'INSTALLATION DES JEUNES.
34
SECTION 1 : LES ATTRIBUTIONS S'EFFECTUANT SELON DES REGLES
34
DE DROI T PUBLIC
PARAGRAPHE 1 : LA CONCESSION PROVISOIRE
35
A - Les conditions générales d'accès
35
1.
~~~_~~~~!~!~~~_~~9~!~~~_q~_~~~~!~~~
35
a) La nationalité
35
b) L"âge
35
c) Capacité financière
36

236
36
B - La procédure
37
1. Au niveau du Sous-Préfet
38
C - De la nature juridique de la concession provisoire
38
D - Sécurité et liberté de l'exploitant dans la concession
provisoire
40
1. Q~_l!_!~~~!!!~_~~_~~~~~!!!~~~!!~~
41
a) Durée de la concession provisoire
41
b) L'interruption-sanction
41
c) Droit de reprise
43
L'éviction totale ou partielle pour d'autres motifs
44
PARAGRAPHE 2
LA CONCESSION DEFINITIVE
47
A - Conditions et modal ités d'accès à la concession
48
définitive
1. Définition
48
2. ~~_e~!~_~~_!!_e!~~~!!~
49
3. Les autres frais
49
49

237
B - Les restrictions au droit de propriété et ses
conséquences
50
1. Les fondements de l'interdiction
51
---------------~----------------
2.
~~~_~~~~~g~~~~~~
52
a) Sur la nature juridique de la concession définitive
52
b) Sur la sécurité et la
liberté de llexploitant
52
CONCLUSION SUR LA CONCESSION DEFINI TIVE
CONCLUSION SUR LE REGIME DES CONCESSIONS
54
PARAGRAPHE 3 : LE PERMIS D'OCCUPER
55
A - Champ d'application
55
1. Qr!~!~~~_~!_f~~~~~~~~_~~_~~r~!~_~~~~~~~~r.
55
2. ~~~~!!!~~_~~~pp!!~~!!~~
56
B - Lep e rm i s d' 0 cc u pe r, fa c t e ur d ' i n s ta l lat ion ?
57
1. ~~_P~~~!~_~~~~~~p~r~_~~!~_~~~!~!§!~~!!f_p~~~~!!~~!
57
d'attribuer des terrains
issus de forêts déclassées.
SECTION 2
LES ATTRIBUTIONS S'EFFECTUANT SELON DES REGLES 59
DE DROIT PRIVE
PARAGRAPHE 2 : LES OBLIGATIONS DU PRENEUR DANS LE CONTRAT
61
D' EMPHY TEOSE

238
A - Les conditions d'accès
61
61
2. ~~~_~~~~1~1~~~_~~!~~1Y~~_~_!~_~~~~~f1si~_~~
61
terrain concédé
B - Les obl igations du preneur
62
1. ~PP~~~1~~j~~__ ~~_!~_~~~~~1~~_~~_!:~9~1~~!~~~~_~~~~_!~
63
~~P~l'~~~~1g~~
a) Durée du bail
63
b) Résolution du bàil
64
c) Droit de renouvellement
64
2. ~pp~~~!~~2~~_~~_!~_!!~~~!~_~~_!~~~p!~!~~~~_~~~~_!~
65
~~!!_~~p~~~~~~!9~~
CON CL US ION AU REG l' ME 0U BAI LEP HYTE a TI QUE
CONCLUSION AU CHAPITRE l
66
CHAPITRE II
: LES ATIRIBUTIONS S'EFFECTUANT EN MARGE
68
DU DROIT POSITIF
68
SECTION 1 :
EN ORal T COUTUMIER
~~~~§~~~~~_!_: ~~_Q~Q!!_EQ~~!~~~~Q~I~~!~~!_Q~~!~~~~_~
68
LA ~1U 11\\ TI aND ES EXP LOI TAN TS AG RICa LES ?
A - La nature du droit foncier coutumier et "
installation
69
des jeunes

239
70
71
72
PARAGRAPHE 2 : LE STATUT DU
JEUNE DANS LE DROIT FONCIER
73
CO UTUM l ER
A - L'Accès à la terre dans le cadre des immeubles appar-
73
,
tenant à la famille
B - Dans le cadre des immeubles n'appartenant pas à la
75
fam ill e
SECTION 2
LA DENATURATION DU DROIT PAR L'ALrrORITE
77
AD MIN l STR A TI VE
PARAGRAPHE 1
DE LI APPL ICA TIaN AL' EGARD DES
JEUNES DU
78
A - La convention de IIBozi ll
78
B - Le cahier des charges des jeunes ruraux bénéficiant
79
d'une aide de l'Etat pour leur installation
PARAGRAPHE 2 : DES EFFETS DE LA DENATURA lION DU ORal T
81
POSITIF SUR LA SECURITE ET LA LIBERTE DU
JEUNE EXPLOITAN T
A - Une sécurité précaire
81
B - Une liberté limitée
82
CONCLUSION AU CHAPITRE II
82

240
CHAPl"lRE III : LA TRANSMISSION DE L'EXPLOITATION
84
AGRICOLE, OBSTACLE AL' INSTALLAT ION DES JEUNES··
AGR 1CUL TEURS ?
SECTION 1
LI INSTALLA TION DES JEUNES AGRICUL TEURS
85
ET LAT RA NSrH SSION DES DR 0 1 1S D' EXP LOI TA-
TION AGRICOLE EN DROIT POSITIF
PARAGRAPHE 1
LE PROBLEME DE LA REPRISE PAR LE JEUNE
85
DU CONTRA T D'EXPLOITATION
A - Des notions d'exploitation agricole et de transmission
85
B - La transmission de l'exploitation agricole dans le
87
droit de l'exploitation des terrains ruraux
88
90
PARAGRAPHE 2
~~_~~Q~~~~~_Q~_~~_~~~~~?~_E~~_~~_~~~~~
DEL 1 EXP L0 IT AT ION AG RI COL E
92
A - De' la reprise de l'exploiftation agricole par le
descendant de l'exploitant
94
1. ~~~_~~~9i~i~~~_r~9~i~~~_~~_9~~~~~~~r_
94
a)
La
participation à l'entreprise
94
b) Le paiement d'une soulte
95
2. ~~_~~~~!!!2~_!~!~!!y~_à_l~~~P!2j!~!i2~
96
B - Salaire différé et maintien du jeune sur l'exploitation 97
parentale

241
SECTION 2
INSTALLA TION DES
JEUNES ET TRANSMISSION
100
DE L'EXPLOITATION AGRICOLE EN MARGE DU
DROI T POSITIF
PARAGRAPHE 1 : LA VIOLATION PAR L'ADMINISTRATION DU
100
DROIT SUCCESSORAL
A -De la nature des relations entre l'administration et les
10
les c and i d a t s à l' i ns t a ln a t ion
B - La dénaturation par l'autorité administrative du
d roi t
suc ces sor a l
e't ses
i ncid e nces sur l' i n s ta l lat ion
1 0 .
des jeunes agriculteurs
1. ~~_~l~!~~1~~_P~!_!~_~!~1~!~r~_~~_1~~~~!~~!!~~~_~~
10·
droit successoral
2.
L'attitude du M.D.R.
face au droit successoral
10:
PARAGRAPHE 2
LA RESISTANCE DE LA COUTUME AU DROIT
1 Di
-------7 ---------------------------
SUCCESSORAL
- ~ -- -- - -- - -
CONCLUSION AU CHAPI1RE III
ID!
CONCLUSION A LA PREMIERE PARTIE
101

242
2EME PARTIE
L'ACCES A L'EXPLOITATION AGRICOLE
109
CHAPIlRE 1 : LA BANQUE NATIONALE DU DEVELOPPEMENT
112
AGRICOLE ET LE." FINANCEMENT crE L' INS TALLA lION DES
J"EUN ES
SECTION 1
REGLES D'ORGANISATION ET DE FONCTIONNEMENT
112
ET LEURS CONSEQUENCES SUR LE CREDIT EN
FAVEUR DES JEUNES
PARAGRAPHE 1 : REGLES D'ORGANISATION
-~----------
---------------------
112
A - Nature juridigue
112
1. La diversite des actionnaires
114
115
3. Mission de la B.N.D.A.
116
B - 0 e l ' a da pt at ion de 1,', b bjet et de l a ré par t i t ion du
~ita1
social
au financement (de l ' installation' des
117
jeunes.
PARAGRAPHE 2
~ ~§ !~~_!~? Il _~ I!Q~~~~1_~ ~§~~~_g~ _EQ ~~.n Q~- 119
NEMENT ET FINANCEMEN T DE L' INSTALLAT ION
---------------7-----------------------
A - De l'!adaptation du régime institutionnel
à la mission
119
de la bangue
1. La BNDA et l a loi d u 4 août 1 96 5
1 20
2. La BNDA et la loi du 5 ao~ 1975
122
------------------------7-~-----
B - Les règles de fonctionnement gui
font obstacle au
124
financement de l'installation
1) h~~_~~gl~~_.9~!1~~~1~~_~~_~~~~1!
124

243
125
SECTION 2
LE NOUVEL ENGAGEMENT FINANCIER DE L'ETAT
127
PARAGRAPHE 1
PRE SEN TA TI aND ES FON DS DE GA RANT 1E
127
--7-------------------------------
AG R1COL E E T DE BON 1FIC AT ION
D' 1NT ER ET S
- - - - - - - - - - - - - -j- - - - - - - - - - - - -
- - - - - - - - - -
A - Règles générales d'organisation
127
1. Ressources
128
2. Administration des fonds
128
B - Le fonds de garantie agricole
129
C - Le f 0 nd s d e bon i fic a t ion d tin t é r êt s
129
PARAGRAPHE 2
DEL
129
1 un LIS AT ION
PO URL tIN STA L L AT ION DES
JEU NES DES FON DS DE GA RAN TI E AG R1COL E E T
DE BON 1 FIC ATI aND lIN TE RETS
A - Règl es de fonctionnement des fonds
130
B - Les conditions d'éligibilité des jeunes aux fonds
131
C - De l'util isation agricole des fonds de garantie
agricole et de b~nification d'intérêts aux jeunes
agriculteurs:
réalités et contraintes.
131
~ECTION 3
LES CAISSES RURALES D'EPARGNE ET DE PRET
(CREP)
ET LE FINANCEMEN T DE L'INSTALLA TIaN
132
DES
JEUNES
PAR AGRA PH E l a RGAN 1SAT ION E T FON CT ION NEMEN T
133

244
A - Origine et évolution de 11 institution
133
133
B - L a v i 0 lat ion paIr lia ut 0 r i t é ad min i st rat ive du
134
droit applicable
PARAGRAPHE 2
LA CREP,
INSTRUMENT DE CREDIT AU SERVICE
136
----------7-----------------------------
DES
"lE LI NES
?
A - Des relations juridiques entre les CREP et la BNDA
136
B - Pour une r.'éorientation des CREP
138
CONCL'lIS ION AU CHAPI lR E 1
138
CHAPllREl1
VER SUN E NO UVEL LEST RA TE G1E DU FIN AN CEMEN T 139
DE L'INSTALLATION?
SECTI.ON 1
LAD EFIN 1 TI 0 N DES 0 B JE CT 1FSET LES MO DES DEI 39
FINANCEMEN T
PAR AGRAPHEl
: LES 0B ~IE CTI FS
139
A - Les objectifs généraux
139
B - Les conditions d'inte'rv.'ention de la puissance politique
140

245
PARAGRAPHE 2
LES MOYENS DE
FINANCER L'INSTALLATION
141
A - Les
prêt s san s i n té r ê t s
142
B - Les
prêt sas sor t i s d' uni nt ér êt
144
PARAGRAPHE 3
PLAN
ET FINANCEMENT DE L'INSTALLATION
DAN S LAN 0 UVEL LEST RA TE Gl E DU M. D • R •
145
A - Le choix de la
stratégie
146
B - De la
planification du
projet
147
SECTION
2
:
LA MISE
EN
PLACE DES STRUCTURES
150
PARAGRAPHE 1
:
LES STRUCTURES ACTU ELLES
150
A - L'aide étrangère
151
B - La
contribution
financière de l'Etat
152
C - Le
problème de la gestion
financière du
projet
153
D - L'intervention
des autres
organismes
155
2. ~~!~!~~~~~!!~~_~~~_~~g~~!~~~~_p~~~!~~_~_~~~~!!~~
~~~!~~l~
157
A - De la cr.'éation de services a'dministratifs déconcentrés
158
1. ~~~_~!!~1~~!!~~~_~~~_~~11~1~~_~~9!2~~1~~_~2~!:~11~~_~~159
......
nature à favoriser l'installation?
a)
Le choix
de la cible
159

246
b) La participation ~ l'élaboration des études prévision-
nelles
160
161
B - Les structures villageoises
162
CONCLUSION AU CHAPI1RE II
164
CHAPITRE III
: L'ENSEIGNEt4ENT AGRICOLE, CONDITION SINE
166
QUA NON DEL lIN S TA L LAT ION ?
SEC lION 1 : LI ENSEIGNEMENT ET
LA FORMATION AGRICOLES SOUS
167
LA TU TE LLED U MIN 1S TE RED EL' AG R1CULT LI RE
PARAGRAPHE 1
DEL A CON TR 1BUT ION DEL 1 ENS El GNEMEN T AG R1COL E
1 68
---------7-----------------------7-----------
A LA FORMATION DES JEUNES AGRICULTEURS
A - La phi los 0 phi e de lie n sei ngem e n t
pub l i c a g<r i col e
168
B - L'organisation de l'enseignement agricole publ ic
171
1. ~~~~~~i9~~~~~!_~~p~ri~~~
171
a) l'E.N.S.A.
171
b) l'LA.B.
171
2. ~~~~~~ig~~~~~!_i~~~r~~~i~i~~
173
a) Le lycée agricole de Bingerville (L.A.B.)
173
b) Le centre de formation rurale d'Abengourou
173
c) Les con dit ion s d' a cc è s à ces d eux é t a blis s em ent s
174
d) Le contenu de la formation et ses conséquences.
177

247
PARAGRAPHE 2
LA FORMATION PROFESSIONNELLE DES JEUNES
---------7-----------------------------
180
AGRICULT EURS
A - La f 0 rm a t ion pro f e s s ion ne l l e des jeu ne s sou s lié g ide
du Ministère de llAgriculture
180
1. ~~_!2~~~!!2~_E~2f~~~!2~~~!!~_~_!~2~~~~!2~_~~~~_E~2j~!
182
d'installation
a) La formation "à-priori"
182
b) La formation concomitante à 11 installation
183
184
B - La formation professionnelle agricole des jeunes par le
185
secteur privé
1. ~~~~~~~i~2!j2~_~~_!~_!2~~~!j2~
188
2. ~~2Pp~~~!2!j2~_9~~!!!~!iv~_~~_!~_!2~~~!!2~
188
SECTION 2
LI ENSEIGNEMEN T ET LA FORMA TION PROFESSIONNELLE
DES ,HUNES AG'RICULT EURS SOUS LI EGIDE DU MINISTERE
190
DU DEVELOPPEMEN T RURAL
PARAGRAPHE 1
g~_ ~~ ~g~rTAI1Q~-fl~? 2!~,!Cl ~E/~? _g~_~! ~! ST ~ ~_ g~ 190
DU DEVELOPPEMENT RURAL A LIENSEIGNEMENT ET A
LA FORMATION PROFESSIONNELLE AGRICOLES DES
JEUNES
A - De la compétence de la Sous-Direction de 11 installation des 191
jeunes en matière de formation agricole
B - De la compétence de la Sous-Direction de la promotion
193
rurale en matière de formation agricole des jeunes.

248
PARAGRAPHE 2
~ ~ ?_~ ~! ~ QQ~?_Q~ _f Q~ ~ ~}1 Q~ _.~ §~! çQk~ _Q~~
194
~~~~~~_2~I~Q~_f~!!!9~~
A - La formation technique
195
B - La formation à la gestion
197
C - La formation à l'organisation pré-coopérative
199
CONCLUSION AU CHAPITRE 3
201
CONCLUSION A LA 2EME PARTIE
202
CONCLUSION GENERALE
203
ANNEXES
ANNEXE 1
Situation foncière
206
ANNEXE 2
Décret du 15 novembre 1935
208
des terres domaniales en
française
ANNEXE 3
Arrêté du 9 juillet 1936
des terrains domaniaux
ANNEXE 4
Décret du 16 février 1971 relatif aux procédures
217
domaniales et foncières
ANNEXE 5
Loi du 12 juillet 1971 relative à l'exploitation
220
des terrains détenus en pleine propriété
ANNEXE 6
Loi du 25 juin 1902 réglementant le bail
.222
emphytéotique
225
BIBLIOGRAPHIE