"..·.\\,>NlyER§.lr(',
,1 ,' ...
./~~~4;-~~ \\
\\.'~~:!Ydl) i
'" ·q~!~ii;Ü.~·/
FACULTE DES LETTRES ET SCIENCES HUMAINES
INSrrrUT D'ETHNO SOCIOLOGIE
,~
.
THEBE
pour
le Doctora t
de
f!
..
'Ie«"--~""'''-'-''''~--'''\\
: CONSEil AFR!CAIN ET MALGACHE!
\\ POUR l'ENSEIGNEMENT SU?E\\'m:un ;
i.
C. A. M. E. S. -
OUAGADOUGOU "
\\~~:::;:tr~!~~~~~~,:!Ë~',~~:0!
L IMPACT SOCIO-ECONOMTaUE DE LA
{
Il
SODESUCRE SUR LE DEPARTEMENT DE
ZUENOULA AU CENTRE DE LA COTE DFIVOIRE
recteur de Thèse:
Présentée par:
le P rofesseur
)UAKOU NFGUESSAN Fiançais
BAHA BI VOUZAN

A mon épouse et mes deux enfants
rizié Jean Daniel et rrazié
Eric Paul pour tous les
sacrifices et privations dont
ils ont été l'objet à cause
de cette thèse.
f 10
A tous les travailleurs de
èote d'Ivoire pour une
véritable libération
par le trevail.

._"~-~";'-'-
"
~li
._-tt:'._ .
. ,.
1
1
1
ABIDJAN, le
2
MAI
1975
1
1
j
1
1
1
11,
r
Le programme sucz-ie r dont le Gouvernement a
récemment défini les grandes lignes, constituera, pour les années
à venir, l'une de nos actions de développement les plus décisives.
Soucieux de répondre à la satisfaction de nos
besoi~s intérieurs comme aux possibilités d'exportation sur Ie s
marchés extérieur s, il entend témoigner, avec éclat, de notre
volonté de diversifier nos productions agricoles et d'assurer, sur
notre sol, la valorisation de nos richesses.
Ce programme a également l'ambition. et ceci
me parart plus essentiel encore, de contribuer à faire na.îtz e, au
profit de régions jusqu'ici défavorisées, les équilibres nouveaux
qu'appellent une plus juste répartition des fruits de notre croissance
et une politique d'aménagement du territoire à la mesure de la i,
complexité grandissante d'W1e économie sachant ne jamais ouhlier
qu'elle est d'abord au service de l'homme.
L'ensemble agro-industriel de Ferkessédougou,
premier maillon de cette nouvelle chafne de progrès et d'espérance,
illustre, très concrètement, <:ette volonté et je suis heureux que
cette brochure et les photographies qui l'accompagnent manifestent,
de la manière la plus claire, la réalité de ce premier auccë a.ç
,..
..;.
,~.,. t"
• _.Ii,.... ' ........ ~

4 -
AVANT-PROPOS' 1
le complexe de Zuénoula a produit ses premiers carreauX
de sucre en 1980. A cette époque nous préparions un mémoire de
ma1trise sur le thème :
"les obstacles au développement des petites et moyennes entreprises
(PME) ,en Cote d'Ivoire". En 1982 ce thème qui a été repris et appro-
fondi pour le mémoire de DEA constitua ainsi le sujet de notre thèse
de doctorat de 3e cycle dont la méthodologie et le plan avaient été
,
approuvés par notre Directeur. Nous avons cependant abandonné tout
ce travail entrepris au profit de la présente Etude. Ce faisant notre
nouveau choix a été motivé par les échos persistants relatifs au
refus des populations autochtones face aux emplois salariés offerts
par la Sodesucre. Nous avons en effet estimé qu'il n'était pas normal
d'admettre pour cette région relativement pauvre que les habitants
demeurent indifférents aux vertus sociales d'une entreprise considérée
comme le moyen d'un nouvel équilibre socio-économique régional.
la pénurie de main-d'oeuvre subalterne locale devenant ainsi de plus
en plus cruciale, .La Sodesucre s'est vue obligée de s'adresser à la
régiorl pu Nord, voire auX étrangers pour recruter ses manoeuvres.
C'est au regard de cette situation qui nous a semblé paradoxale que
nous avons décidé d'étudier les raisons de ce comportement et partant
l'impact du complexe sur la région. Sans toutefois omettre d'examiner
la situation de l'ensemble du personnel au cours de cette étude, nous
nous sommes intéressé surtout au cas des manoeuvres' temp:ot.aires' dont .1es
coupeurs de canne constituent unepar-ticularité d an s.Ia a\\8SUJ8 :9ù toutes les
J
difficultés de main-d'oeuvre à la Sodesucre se situent au niveau de
. . .1. · ·

-
5 -
cette tranche de travailleurs.
Mais avant d'exposer les résultats de nos recherches nous
tenons à remercier très sincèrement tous ceux, dont les nanbreux
concours combien appréciables ont permis la réalisation de ce travail.
- En particulier potre Directeur de thèse le Professeur
Kouakou N' Guessan François dont les encouragements, la disponibilité et
les conseils ont été indispensables à l'aboutissement de ces travaux.
- Monsieur Raymond Deniel pour sa grande disponibilité et
son concours effectif qui ne nous ont jamais fait défaut.
- r'lonsieur Ogni Kangah Benoit qui a été pour nous à la fois
un guide et un compagnon de terrain.
- Monsieur Koby Assa qui nous a toujours offert son concours
chaque 'fois que nous le sollicitons.
- La Direction Générale de la Sodesucre notamment MM Sakanoko
Alkaly et Soro Roger dont les bureaux nous ont toujours été ouverts.
- Le Directeur Général Adjoint, Directeur du complexe de
Zuénoula et 'tous ses collaborateurs pour leur ouverture, leur dis-
ponibilité et l'accueil dont nous avons été l'objet au cours de nos
recherches.
-Enfin les Chefs et les habitants des villages enquêtés
sans omettre Monsieur Tah bi Sahié Albert notre compagnon de terrain
et toutes les bonnes volontés que nous n'avons pu citer.
Que tous trouvent ici l'expression de notre infinie recon-
naissance.

-
6 -
, .
1 INTRODUCTION
L'étude de l'impact socio-économigue de la Sodesucre sur
le département de Zuénoula cherche à analyser la portée de la politi-
que nationale de l'agro-industrie sucrière.
En effet, l'importante croissance économique enregistrée
par la Cote d'Ivoire depuis son accession à l'indépendance politique
(1960) est liée en grande partie aux progrès réalisés dans le domaine
agricole. Cette agriculture longtemps dominée par le "bin~e café-
cacao" constitue la base du relatif développement de la Cote d'Ivoire
que certains observateurs n'hésitent pas à qualifier de "miracle
,.:
ivoirien~
Ne disposant d'aucun autre moyen dès le départ, pour lutter
contre le sous-développement, l'objectif des gouvernants a été donc
de partir de l'agriculture pour assurer l'aménàgement harmonieux du
territoire et réaliser l'industrialisation progressive, en même temps
que la prçmotion du monde rural par la création des emplois et la
maximisation des revenus des paysans.
Conscients du danger qui menaçait cette économie encore
fragile, basée sur une agriculture à la fois subordonnée auX lois du
marché,"international et vouée aux aléas climatiques, ces gouvernants
ont procédé à une diversification intense des cultures commerciales.
C'était ppur eux la façon la plus réaliste de se prémunir contre les
abus des spéculateurs, du moins une manière d'atténuer les effets de
la dépendance vis-à-vis de l'extérieur.
C'est dans ce vaste programme de diversification entamé
dans les années 1970 que s'inscrit le plan sucrier. Celui-ci prévoyait
jusqu'en 1985 l'entrée en service de douze unités d'une capacité de
.. .1

-
8 -
J. P. Benoist.
"Partout, on se réjouit de l'implantation de ce complexe
sucrier" (1). On pense que nombre de jeunes gens resteront sur place
et trouveront du travail. De ce fait, certains reviennent d'Abidjan
pour y travailler. Et le père Benoist de poursuivre :
'''On pense à un salaire régulier". Tous espèrent les améliora-
tions qui seront apportées à Zuénoula et sa région, route goudronnée,
installations sanitaires plus modernes, agrandissement de la ville.
Cette affluence massive a entra1né d'énormes difficultés
de logement, de nourriture et d'infrastructures routières, sanitaires
etc ••• , en un mot des problèmes sociaux d'équipement.
Aussi l'introduction de la canne à sucre a-t-elle nécessité
la transformation de multiples champs de céréales, de manioc et
d'igname en plantation de canne. Cela a posé sans doute. u.n problème
de production agricole dans la mesure où le nombre de bouches à .
nourrir a augmenté par la présence des travailleurs alors que les
hommes valides désertent les villages pour le complexe.
En réalité, cet état de chose, cette période d'euphorie
n'a duré que le temps "d'un feu de paille". L'enthousiasme du début
s'est transformé en une méfiance spontanée, voire en une indifférence
généralisée de la part de la population au point que l'on a parlé
de "bras croisés". Déjà en ~vril 1980 J.P. Ayé écrivait ceci:
"Les bras croisés"
(1)
(J.P.) Benoist, Lettre au pays gouro, dans le village piégé,
cahiers de l'I.U.E.D., Genève 197a
Page 13.
. . .1· . ·

-
9 -
"On serait tenté de croire que les facilités d'existence
d'hier qui nous poussaient à manger le pain de l'oisiveté étant
en régressio~, tout un chacun accepterait l'emploi qui lui permet-
trait de ~ivre de lui-même. Et d'échapper de la sorte ~ une dépen-
dance malheureuse. On pense volontiers aussi que la création d'emplois
dans l'arrière-pays est la meilleure mesure de freiner l'exode rural
de manière à ne plus abandonner nos villages auX seuls vieux. Et
puis on se laisse aussi aller à l'idée que par simple orgueil un
homme bien portant ne peut se laisser vivre à coté d'un emploi qu'on
lui offre 1 La vérité, c'est qu'on croit beaucoup de choses qui
dans~~a réalité ne traduisent que des illusions. Nous avons vu sur
le complexe de Zuénoula des jeunes, sans qualification aucune refuser
un emploi "sale" de coupeur, de manoeuvre, restant attachés à leur
rêve de 'décrocher un emploi de bureau. r'1ais tous ces emplois "propres"
étaient déjà occupés par des hommes qualifiés. Alors ils ont choisi
de rester au chOmage en attendant de partir pour la "ville promise".
Et si les responsables du complexe ne devaient compter que sur
l'humilité" d'une partie assez importante des jeunes de la région
pour faire: tourner l'usine, elle tournerait bien au ralenti. Et
comme i l fallait qu'elle tourne, alors on a envoyé un message,
véritable S.O.S. sur les complexes ferké l et ferké II pour demander
500 "travailleurs" n'ayant pas peur de se "salir". Il en est arrivé
350 ••• Et l'usine a tourné avec d'autres bras que ceux qu'on atten-
dait pour faire de l'usine de Zuénoula un autre pOle de développe-
men t ••• " ( l ) •
Cet article est assez clair. Il évoque l'opportunité de
(1)
J. P. Ayé
Fraternité matin nO 4640 du mardi 15 Avril 1980
P.9
"Les Bras croisés"
. . .1. · ·

- 1D -
la politique du plan sucrier et confirme nos inquiétudes et nos
interrogations, car nous n'avons jamais cessé de nous interroger
sur les changements sociaux entra1nés par la p+ésence de cette unité
agro-industrielle.
Ainsi ce revirement inattendu de la situation dans la
région suscite une première interrogation, à savoir si le plan
sucrier pourra atteindre ses objectifs, du reste clairement définis
par le plan quinquennal de développement économique, social et
culturel 1971-1975 :
- l'augmentation du revenu national et des revenus des
paysans,
- l'augmentation et la diversification des exploitations,
- la réduction des disparités régionales et la mise en
valeur des potentialités
"Par l'accroissement de productivité et d
qu'elle permettra, la modernisation est, par aille
auX jeunes des conditions de vie et
statut socialxevalorisé, à freiner
tion ptioritaire de ce programme sera la zone de savane dont les
spéculations sont propices à la modernisation et au les problèmes
de disparités de revenus et de faibles productivités se posent avec
le plus d'acuité. La solution pourrait consister en une f.rmule,
s'inspirant des avantages respectifs des plantations industrielles
et des plantations villageoises".
Comme on le voit, le plan sucrier accorde en principe un
grand intér~t à l'aspect social de l'entreprise.
En ce qui concerne le complexe de Zuénoula, les chiffres
.../ ...

-
11
prévisionnels escomptent une production annuelle de 50.600 tonnes
de sucre brut ainsi que 18.500 tonnes de mélasse. L'implantation
du complexe couvre une superficie de 6.500 ha pour la partie in-
dustrielle. On prévoit l'implantation d'une agglomération construite
pour les ~mployés et la mise en place des services ndcessaires. Sur
le plan social, le projet du ccmplexe mentionne la création d'envi-
ron 5.500 emplois dont 3.500 permanents. Une population de 35.000

personnes doit tirer ses ressources de l'activité du complexe sucrier,
sans tenir compte des activités diverses commerciales, artisanales
induites (1).
En partant donc de ces objectifs et plus particulièrement de
ceux du complexe de Zuénoula, l'on est tenté de se demander si la
présence de ce dernier peut favoriser un v8ritable développement
d'abord au niveau des hommes (supposés en ~tre les bénéficiaires) et
des villages, ensuite au niveau du département considéra comme base
"régionale" du dévelopfJement national, et quels int8r~ts ces hommes
peuvent-ils en tirer concrètement ?
A la faveur de la suppression de deux des six complexes en
activité, le gouvernement a décidé en 1984 l'agrandissement de celui
de Zuénoula considéré comllle relativement "bien portant" malgré la
crise économique actuelle (2).
Etant donné que ce relatif progrès qui se poursuit a été
accompli"grace aux travailleurs "importés" d'ailleurs, il importe
encore de se demander si les intér~ts de la population du département
et ceux de l'Etat convergent en réalité.
Lorsqu'on se réfère aux objectifs du plan sucrier, ce complexe
(1)
Etude de préfactibilité du complexe de Zuénoula 1976.
(2")
La cortstruction d'une agglomérerie y était prévue en perspective •
. . .1...

-
12 -
devrait susciter des initiatives, des vocations et des forces à
même de procurer des bénéfices et avantages divers aux populations,
soit au moyen des salaires, soit par le biais des plantations
villageoises. Ce but a-t-il été atteint ?
La réalité actuelle est que la population refuse de tra-
vailler sur ce complexe qui lui était destiné. Il importe là aussi
de se demander si cette population a été préparée à l'accueillir,
autrement dit, la canne à sucre constitue-t-elle réellement ce dont
ellee besoin pour son développement?
Doit-on expliquer cette résistance seulement par le poids
des mentalités ?
A l'allure où vont les choses, si la population locale
reste sur sa position de "bras croisés" d'une part et que d'autre
pa~le complexe sucrier continue à prospérer entre les mains des
travailleurs venus "d'ailleurs", comment pourra-t-on envisager le
développement de cette région sans une nécessaire et indispensable
participation de ses fils ?
Autant de questions dont les réponses et l'analyse nous
permettront à la fois de faire la lumière sur l'attitude et le com-
portement des populations concernées par le programme sucrier, et
de saisir les causes réelles du blocage et de l'inefficacité dé la
politique sucrière en COte d'Ivoire. Les unités industrielles s'im-
plantent généralement dans des sociétés qui se situent à cheval sur
deux mondes différents à savoir le monde modern~ et le monde tradi-
tionnel. Aussi oublie-t-on souvent que ces sociétés ont leur dynamique
interne propre qui conditionne tout changement qui pourrait intervenir
en leur sein.
Bien qu'elles restent encore profondement attachées à leur
tradition, elles aspirent surtout à gooter auX délices du modernisme
../...

-
14 -
2 - JUSTIFICATION DU CHOIX ET LIMITE DU SUJET
Au cours de cette étude nous nous.attacherons à faire
ressortir essentiellement l'intér~t sociologique de notre sujet.
C'est pourquoi, au-delà des données techniques qui relèvent d'autres
domaines, au-delà des analyses purement macro éccnomâques, nous nous
intéressons surtout au changement social engendré du fait de la
création et du fonctionnement de ce complexe. Il reste bien entendu
que la dimension économique et la dimension sociale demeurent in-
dissociables. Comme nous le disions plus haut, la présence de la
Sodesucre. qui était considérée comme un événement exceptionnel,
comme une source d'espoir et de soulagement peut constituer un fac-
teur de changement dans la manière de vivre et d'~tre du peuple (gou-
ro) de iuénoula. Cette implantation a fait surgir des difficultés
de cohabitation et d'adaptation, une nouvelle organisation de l'espace
et de la production liée aux mouvements des populations etc ••• en
un mot un changement que nous étudions. La question qui se pose
ici e~t celle de savoir pourquoi Zuénoula et non pas un autre, étant
donné que cinq complexes existaient déjà avant lui.
L'idéal aurait été que nous fassions une étude comparative
de deux bu trois unités. Mais nous sommes très limité par les moyens
financiers et matériels et surtout par le temps qui nous est accordé.
Par conséquent, notre choix a été dicté par trois critères.
Le premier est que nous sommes fils de la région et, en
tant que tel, nous avons suivi le début des travaux de construction de
ce complexe. Nous y allons souvent pendant les congés et vacances
scolaires' chaque fois que ncus en avons l'occasion. Cela constitue
un précieux avantage dans la mesure où nous connaissons bien notre
champ d'étude. Il va sans dire que les difficultés de communication
et d'intégration sont atténuées d'avance aussi bien au niveau des
. . ·1. · ·

CARTE
ADI",If'lJISTRATIVE
DE
COTE
C'OTE
D'IVUIRE:
-
15 -
LOCALISATILN
DU
DE~ARTEMENT
DE
ZUENOULA
--.._-_.__ --._ _-------._-_.-.__ --..------;..
t·"
• . . . .~

\\
Mali
'~
~
:
\\ ,
l
..
,
.. -\\
- ' \\
""'."
. ~......" - '\\
Haute Volta
,....
;'-:.l'~-
;"
-,
.
,
r:
Od~enne
.'
--'. ,,'
-.
\\
.. '.
../
1-,
f .::.
"1
\\
1
,
\\
~

\\,.
... "
\\'.-

Ferkessédou
1
1
gou
inée
Souna
'..
• /,
1
'- ..
1
\\
\\
1
1
,- - -\\. '\\ l
1

...

,•
...
,-
1
{
r- '
1
1
ç
1
1
Ghana
"
t

) ' f ~ '\\
Guiglo
.
\\
\\
,,
\\
•\\1
'.
\\
L,- ",
Abidjan
.. \\.
.
f
Ab o i s s o >
1
\\
1
.
(Sassanura
'.
1
." ~ ..,
1

............-----=-~----------------:--------
._--.- ...
- -
Dérl'ârt~ment de luénOl:fla
Limites ces front~~rei•.•.••
Limites cie ob;.artement
_

-
16 -
villages où se déroulent les enqu~tes qu'à celui des structures
du complexe. Les problèmes de nourriture et d'hébergement sont
aussi résolus en partie dans la mesure où nous comptons de nombreux
amis à la Sodesucre. Aussi cette unique réalisation industrielle...
ne constitue-t-elle pas un important facteur de changement social
susceptible d'intéresser le sociologue que nous sommes?
Le second critère est qu'en tant qu'enseignant, d'abord
au centre de préparation aux techniques commerciales (CPTEC), et
ensuite à l'Institut National Supérieur de l'Enseignement (INSET),
nous avons eu le privilège de suivre et d'encadrer certains de nos
étudiants stagiaires sur ce complexe successivement de juin 1980
à aoct
1980 et de juin à septembre 1981. Ces travauX ont été ef-
fectués dans le cadre de leur rapport de stage au Brevet de Technicien
Supérieur. Cela nous a permis de c~toyer les travailleurs et le
personnel administratif, de les conna1tre et de nous intéresser à
leur vie.
Le troisième critère est un souci d'intér~t scientifique.
En ef~et, le département de Zuénoula en tant que tel n'a fait l'objet
d'aucune étude systématique dans ce domaine, du moins à notre con-
naissance. En dehors des travauX de Claude Meillassoux, travaux
relatifs à l'anthropologie économigue des gouro de CtJte d'Ivoire, il n'y a
'pas eu d'études dans ce, donairie depuis plus de vingt ans
(1964_1986).
L'étude de Meillassoux concernait toutes les r~gions goura de Cote
d'Ivoire et non celle spécifique de Zuénoula. Aussi, convient-il de
rappeler que beaucoup de choses ont changé en vingt ans.
Enfin, les seuls travaux récents consacrés à la Sodesucre
de Zuénoula sont des études de prospection, des études d'architec-
tures(1976) réalisées avant le démarrage de la construction du
complexe. Il s'agissait d'étudier et de concevoir les types d'habita-
. . .1. . ·
._-~--------- -
-
-
-
- - - - - ---~-----------------

-
17 -
tion qui conviennent aux travailleurs. C'est pourquoi nous gardons
l'espoir que cette étude, aussi modeste soit-elle, comportera
une certaine originalité et que les propositions dégagées seront
d'un intér~t certain en matière de prise de décision et pour d'éven-
tuels travaux de recherche pour l'avenir.
3 -
NOTES METHODOLOGIQUES
Pour cette étude nous avons choisi la méthode qualitative.
Les techniques de recherche ci-dessous s'inscrivent dans cette voie.
En effet l'histoire du complexe de Zuénoula est récente. Vouloir
saisir son impact socio-économique 9uppose que le chercheur fasse
un grand effort pour recourir à tous les moyens et techniques
susceptibles de lui procurer les informations qu'il désire. C'est
ce que nous avons tenté de faire au cours de ces recherches. Avant
de les exposer dans les détails, nous allons expliquer ici en quel-
ques mots ce que nous entendons par Impact dans cette étude.
3.1 -
La notion d'impact
L'impact est défini par la plupart des dictionnaires de
la ~angue française comme étant d'abord une collusion, un heurt
entre deux objets
ensuite c'est l'aspect de point d'impact qui
est mis en relief
ce point d'impact est l'endroit où un projectile
vient f~apper. Par extension, c'est de la trace laissée par ce
projectile qu'il s'agit. Ces diff8rents aspects auxquels renvoie
le terme impact, font penser auX noti~s de chocs, de traumatisme~,
de marques qu'entra1ne une action violente la plupart du temps.
Dans le domaine socio-économique, le terme impact se réfère
auX notions de retombées, d'influence, d'effets induits et de

-
18 -
conséquences. Ces effets induits ou conséquences peuvent être
positifs ou négatifs, voire nuisibles pour les sociétés dites
bénéficiaires. Mais en ce qui concerne les projets de déve~oppement
économique et social, ce sont généralement les effets positifs
(donc souhaitables) qui motivent ou justifient leur réalisation.
A titre d'exemple, les objectifs et études de rentabilité du complexe
de Zuénoula prévoyaient comme impact ou effets induits la construc-
tion des écoles, des dispensaires, le lotissement des villages, le
bitumage et l'ouverture des rues, l'éclairage des villages, le
développement du petit commerce etc ••• Autant de promesses qui ont
suscité un grand engouement. Sur le plan concret, plus de 100 mil-
lions F CFA sont distribués annuellement à plus de 2 000 travailleurs
au titre de salaires. Dans le m~me temps à 8orotou ou à Sérébou, la
présence du complexe a contribué à développer la prostitution et
l'alcoolisme. Ces exemples parmi tant d'autres constituent ce que
nous désignons par le terme impact. Qu'ils soient positifs ou
négatifs, nous nous attacherons à analyser les deux types d'impacts
afin de les comparer et voir si les effets négatifs ne l'emportent
pas sur les effets positifs.
3.2 -
La documentation
Comme nous le disions, le plan sucrier ivoirien n'a pas
encore fait l'objet d'étude spécifiquement scientifique. Cela cons-
titue une difficulté énorme pour le chercheur qui ne trouve pas de
documents dans ce domaine. C'est pourquoi notre analyse de contenu
a porté essentiellement sur deux types de documents :
- d'une part', les documents techniques et articles de
journBux relatifs auX études de préfactibilité, de rentabilité, de
. . .1· · ·

-
19 -
prospection, de strat~gie de march~ ou de bilan, ce qui nous a
permis de faire une analyse d~ductive à partir des réalisations
concrètes par rapport aux objectifs d'ensemble du plan sucrier.
- D'autre part, les documents scientifiques, c'est à
dire les articles et les ouvrages d'un certain nombre d'auteurs
sur les projets de développement rural en Cote d'Ivoire et, princi~
paIement les thèses et mémoires de sociologie rurale et de sociologie
du travail. L'exploitation munitieuse de tous ces documents nous
a permis de relever l'écart entre ce qui est quotidiennement et
officiellement raconté (souvent d~formé) et ce qui a ~té fait en
réalité. Uutre cette première étape de la collecte des informations
livresques, la technique d'observation directe a été l'un des princi-
paux moyens de recherche.
3.3 -
L'observation
Grace à la grande ouverture des responsables de la
Sodesucre, nous avons eu le privilège d'accéder directement à
toutes les structures du complexe. Ce qui nous a valu de participer
aux activités de l'établissement pendant la campagne et en inter-
campagne. Nous avons à cet effet passé des journées sur les fermes
(avec les manoeuvres), à l'usine, au garage, au magasin, dans les
services sanitaires etc •••
Nous nous sommes rendu également (très souvent) pendant
et en dehors des heures de travail ( parfois tard dans la nuit) dans
les villages et lieux de résidence des travailleurs. Nous en avons
tiré beaucoup d'informations qu'il était dangereux de rapporter
comme telles car, l'enthousiasme
et la passion qui caractérisaient
les débats nous conviaiént à la prudence. C'est pourquoi nous
sommes constamment revenu auprès de la Direction et de certains

-
20 -
responsables pour y vérifier ce qui a été dit et, faire la part
des choses en conséquence. Ce fut l'occasion de conna1tre leurs
problèmes et leurs souhaits, ce qui nous a permis d'infirmer ou
de confirmer certains faits et idées qui nous habitaient auparavant.
Tout cela s'est accompagné d'une série d'entretiens.
3.4. -
Les entretiens
Les entretiens permettent aux enqu~teurs et enqu~tés de
discuter directement et Il f'r anchement", Nous avons ainsi discuté
avec deux catégories de personnes :
- Toutes celles qui sont concernées directement par les
problèmes de la Sodesucre.
- Toutes celles qui sont indirectem~~~gr
II-P:'
\\'Iv

La première catégorie renferme
du
ministère de l'agriculture, les responsa
et/ou les
autre
en chOmage).
Etant ou ayant été de la société, leurs témoign.ages nous ont véritable-
ment éclairé sur la vie de l'entreprise, les conditions de travail
et les difficultés qu'on y rencontre, les reproches et les souhaits
à son endroit.
La seconde catégorie regroupe les responsables politiques
et administratifs, les chefs de village et de canton, les villageois,
les commerçants de la ville, les chefs de services et certaines
personnes que nous avons considérées comme neutres (les religieux
par exemple). En tant que témoins "intéressés" par l'existence ou
les activités du complexe, leurs avis et jugements ont confirmé
(c'est souvent le cas) ou infirmé les conflits internes et externes
.../ ...

-
21
-
de l'établissement. Dans le souci de mieux apprécier l'impact de
la Sodesucre dans le département, nous nous sommes intéressé à
la fois à des villages proches et à des villages éloignés du complexe.
Pour ce faire nous avons eu recours à deux types d'entretiens à
savoir un entretien collectif (particulièrement avec les manoeuvres
et les villageois) et un entretien individuel.
3.4.1 -
L'entretien collectif
Avec un guide d'entretien semi directif, l'entretien
collectif (des questions ouvertes pour la plupart) a porté sur des
questions d'intérêt général entre autres les conditions de travail,
les relations entre travailleurs, les apports de la Sodesucre dans
le département, les nouveauX types de rapports entre parents et
enfants etc ••• L'anlyse des diverses opinions a fait ressortir des
problèm~s spécifiques à chaque catégorie de travailleurs telle
l'inexistence de relations ou de contact entre les manoeuvres et
les autres. Encore une fois la passiOM qui a caractérisé l'entretien
collectif en général nous a conduit à l'entretien individuel.
3.4.2. -
L'entretien individuel
Ce dernier qui s'est déroulé généralement à l'abri de la
censure du groupe a permis aux personnes concernées de s'exprimer
librement aussi bien sur les questions d'intérêt général que sur
les problèmes particuliers de la Sodesucre, du département ou de
leur vie personnelle. Son principal avantage est non seulement de
compléter les informations recueillies en entretien collectif, mais
surtout de relever toutes les contradictions dues à une passion
excessive de certains intervenants du groupe. Tous les entretiens
.·.1...

-
22 -
(collectifs et individuels) se sont déroulés soit sur les lieux de
travail (au bureau ou sur les fermes) soit à domicile (pour les
villageois, certains manoeuvres, employés et ouvriers). Pour y par-
venir nous avons utilisé principalement le magnétophone et la prise
de notes. Ainsi, nous avons transcrit comme tels certains entretiens.
Les enquêtés se sont exprimés parfois avec enthousiasme devant le
magnétophone. Ici l'exploitation des données est plus facile et plus
sOre dans<la mesure où nous avons pu corriger les notes prises (généra-
lement pleines d'incohérences et de fautes).
Il convient enfin de dire que contrairement à leurs attitu-
des face au magnétophone, les enquêtés ont parfois hésité, du moins
au début des entretiens, à livrer les informations dès que nous
nous mettions à prendre notes. Ce fut le cas des expatriés ou
assistants- techniques du complexe dont aucun n'a accepté de répondre
à nos questions. Aussi bien les entretiens que l'observation, le
questionnaire a été un outil précieux pour cette étude.
3.5. -
Le guestionnaire
A propos du questionnaire nous pouvons dire ici que" la
méthode fait la science et la science en se faisant découvre sa
propre méthode" (1). Cela est d'autant plus vrai que nous avons eu
recours à diverses techniques de recherche (aussi complémentaires
les unes que les autres) imposées par les difficultés du terrain dont
(1)
Cissé Abdoul Karim, le comportement électoral en Cote d'Ivoire,
thèse pour le doctorat de 3e cycle, Abidjan
I.E.S.
1983
P. 35.
. . .1...

-
23 -
le questionnaire n'est pas le moindre. En effet aU début de ce
travail nous comptions administrer un questionnaire comportant
80 questions à une population cible de 500 personnes choisies parmi
les travailleurs du complexe en fonction d'un certain nombre de
variables. Mais au regard des difficultés rencontrées au cours de
la préenqu~te effectuée en juillet (du 19 au 27) 1984 et surtout
pour tenir compte des conseils reçus de nos encadreurs et amis,
nous avons dQ remanier entièrement le questionnaire initial pour
aboutir à un autre (composé de 45 questions) que nous avons adminis-
tré à 100 personnes au lieu de 500, ce qui n'est pas statistiquement
représentatif du personnel 50desucre (2.660 travailleurs au moment
de l'enqu~te).
Cette réduction obéit à plusieurs raisons
- D'abord le questionnaire initial s'est avéré à la fois
assez ~ong et fastidieux pour les enqu~tés qui semblaient visible-
ment fuir certaines questions.
- Ensuite, il est apparu que certaines questions n'étaient
pas véritablement révélatrices d'informations adéquates et sem-
blaient à la limite inutiles. C'est ainsi par exemple que nous
avons dO supprimer quelques variables tel que le niveau d'instruc-
tion dans la mesure où certains manoeuvres et ouvriers sont agents
de maftris8 avec le niveau de la clas2e de C.E. ou C.M. alors qu'il
existe parmi les manoeuvres des gens du niveau de la classe de 3e
ou 1ère. Il convient d'ajouter à cela des difficultés d'ordre matériel
et pratique. Compte tenu du fait que nous envisagions un dépouille-
ment manuel du questionnaire faute de moyens, nous ne pouvions que
choisir un échantillon raisonnablement réduit.
- Enfin et surtout, bien que très utile, le questionnaire
ne pouvait pas nous fournir toutos les données qua noua cherchions
. . .1. . .

-
24 -
pour cette étude, parce qu'il est limité par la nature meme de l'in-
formation qu'il permet d'obtenir. C'est ce qui nous a valu de descen-
dre dans les villages du département avec un guide d'entretien
(comme mentionné plus haut) et d'opter pour une recherche véritable-
ment qualitative au détriment d'un travail quantitatif. C'est ainsi
que nous donnons ici quelques caractéristiques essentielles de cet
échantillon de 100 personnes en fonction des critères retenus.
Tableau nO l
Répartition selon le critère ~ge
(
: : )
!- - -
.
.
..
~
,
- - - - - -~ = :~ - - - - - - - - ~- -~~~ -~ - ~- - _:_- - -~
15 à 25 ans • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • . . :
23
:
23
26 à 3~ ans •••••••••••.••••••••••••••
62
62
36 à 45 ans ••••••••••••••••••••••••••
15
15
46 ans et plus .......................
00
00
~
Tot al . . . . . . . . . • . . . . . • . . . • . . . . . . . . . . . .
100
100
f
~
Dans ce tableau, la répartition selon l'~ge n'a pas tenù
compte du sexe. On remarque cependant une extreme jeunesse des
travailleurs 85 ~ se situent entre 15 et 35 ans. Cela signifie que
le travail de la Sodesucre qui exige une grande débauche d'énergie
n'est pas è la portée des personnes ~gées. Il n'emp~che que celles-
ci ont émis des avis utiles à la compréhension de nos travaux •
. . .1. . ·

-
25 -
Tableau nO 2
Répartition selon la situation matrimoniale
'
.
.
.. )
!'---------------~~::~~~-----------------:---~~:~~~---:------~------j
célibataire .•..••••..•••••••••••••••• :
57
57
~
Mar ié
.
40
40
..
Divorcé ••••.••.••.••.•••••.••.•••••••
3
3
Total
.
100
100
Le pourcentage de célibataires est plus important que celui
des mariés. Cela confirme la prédominance des jeunes et le degré de
responsabilité qui est lié aux personnes ~gées dans le monde rural.
Les célibataires s'engagent beaucoup plus facilement sur le chemin
de l'aventure que les mariés qui doivent accomplir leur devoir de
père de famille avant toute autre chose.
Tableau nO 3
Répartition selon le nombre d'enfants
(
)
Critère
:
Nombre:
%
)
--------~------------------------------:------------:------ -- -- -- )
:
:
)
Sans enfants •••..••••••••...••.••••••• :
6
6
~
!l à 2 enfants........................
48
48
2 à 3 enfants •••••.••••••••••••••••••
15
15
!3 à 4 enfants........................ 13
13
4 enfants et plus ....................
18
18
~
!Total................................ 100
100
~
)
Comme on le constate, 94 %ont au moins un enfant. Cela
constitue un élément important d'explication de l'instabilité de la
main d'oeuvre dans la mesure Où les conditions de travail ne permet-
tent pas aux parents de vivre aisément avec leurs enfants. La res-
. . .1. . .

-
26 -
ponsabilité familiale en milieu rural est un important facteur de
stabilité et d'équilibre social. Abandonner sa famille pour un
travail salarié loin des siens est mal perçu par la communauté
villageoise.
Tableau nO 4
Répartition selon la catégori~ socio-professionnelle
(
: :
~
~--------------_:~:::~~----------------~---~~~~:~---~----_:_-----~
~ Manoeuvres..........................
18
18
~
1 Ouvriers d·usine....................
20
20
l
~ Employés bureau.....................
49
49
~
~ Cadres et ma1trise..................
13
13
~
~ Total...............................
100
100
~
Ici le choix du critsre n'est pas très rigoureux car nous
avons de changer plusieurs fois d'enqu~tés (eu égard à leur programme
chargé). Nos guides nous ont constamment confié à des personnes autres
que celles que nous devions interroger. Cela n'a pas changé grand
chose aux informations recueillies dans la mesure où il s'est agi
des personnes de
m~mes catégories professionnelles. Nous n'avons
donc pas pu faire une répartition rigoureuse dans ce sens. Cependant
notre souci était de recueillir des informations issues des représen-
tants de chaque catégorie professionnelle; c'est ce qui fut fait.
Il en résulte que les difficultés varient selon les catégories pro-
fessionnelles des travailleurs et que chacun a sa manière de voir
les problèmes et de les juger.
Le lecteur doit retenir que, bien que le questionnaire
permette d'obtenir des données chiffrées précises, les informations
reçues ont une valeur indicative que l'on doit interpréter avec
. . .1· ··

-
27 -
réserve en raison même de la non représentativité de l'échantillon.
Notre so~ci ôtant d'obtenir des informations utiles à la saisie du
problème étudié, nous avons essayé de corriger cette faiblesse
qualitativement en revoyant plusieurs fois les enquêtés en vue de
vérifier constammEnt le contenu de leurs propos. Il en résulte que
les données recueillies ne s'écartent pas fondamentalement de celles
du questionnaire, bien au contraire. Il s'en suit que pour une meil-
loure commod.i té de l'étude, nous avons ad ophi un schéma thé or Lque
global.
3.6. -
l'a~proche
.globalisante
Elle permet d'expliquer un fait comme faisant partie d'un
tout en :\\-e situant dans son environnement. liCe faisant, on substitue
au réductionnisme le globalisme, à l'approche microscopique la vision
macroscopique, à la linéarité des causes-effets rendant compte d'une
partie infine de la réalité, une dérncr che globalisante prenant en
considération la pluralité des f ac t aur s'", Nous estimons ainsi que
pour comprendre la résistance de la société gouro face au complexe
sucrier,~'on doit saisir la structure organisationnelle et le fonctionne-
ment global de ses composantes. En effet la société gouro, à l'instar
des autres sociét6s traditionnelles en mutation renferme sa dynamique
qui lui confère son pouvoir d'auto régulation et en fait un monde vi-
vant. Comme ledit bien Kouarné l'J'guessan : "Le monde rural, le monde
de la tradition et de l'immobilisme comme l'ont perçu ceux qui n'ont
pas compris que dans toute société il existe une dynamique interne
qui fait qu'il y a un renouvellement perpétuel de l'ensemble des
structures et que toute s~ci~té dispose d'une capacité d'invention,
de création, d'adoption et d'adaptation.,. est peu à peu secoué de sa
torpeur par de nombreuses actions de duveloppement menées par l'Etat
ou à initiative privée. Toutes ces actions visent ~ lui donner
. . .1. . ·

-
28 -
une nouvelle physionomi~'(l). Dans le m~me sens, G. Balandier écrit
qu'il faut "pour toute étude d'un seul élément, se référer à l'ensem-
ble" (2). Il s'agit donc d'une entité vivante, avec ses lois et
règles d'organisation et de fonctionnement, dans laquelle la Sodesucre
est venue s'insérer. Pour déterminer le degré d'assimilation ou de
rejet de ce nouveau corps, nous analysons la société gouro sur le
double plan socio-économique et culturel. Cela nous permet de saisir
et de comprendre à la fois globalement et en détail les raisons des
difficultés d'intégration de la Sodesucre en tant qu'entité, ce qui
met face à face deux sociétés à savoir le monde traditionnel gouro et
une société moderne industrielle avec son organisation rigide évoluant
selon un schéma typique. Aussi l'étude détaillée
de la structure et
du fonctionnement de cette dernière fait-elle appel à la fois, à une
démarche comparative qui permet de mettre en rapport les réalisations
faites'et les objectifs visés par le plan sucrier, et une démarche
dialectique qui met en lumière ses contradictions pour en faire
comprendre les raisons des nouvelles orientations prises par l'Etat
et la Sodesucre.
Nous disons en définitive que cette étude est une analyse
ethno-sociologique qui a nécessité la combinaison de plusieurs mé-
thodes complémentaires.
, 4
L'exploitation des données
Entreprendre actuellement des recherches dans le département
de Zuénoula n'est pas chose aisée. Les oppositions issues des dif-
férentes consultations électorales de 1985 ont par moment gêné
(1)
Kouamé N'guessan. La mutation de l'habitat en milieu rural baoulé,
Thèse pour le Doctorat 3e cycle
lES 1979
p.9
(2 )
G. Balandier, sociologie actuelle de l'Afrique Noire, Paris,
pur 1955, p. Il
. . .1. . ·

-
29 -
nos travaux, alors que tout s'est passé, normalement jusque-là. Grace
à l'aide et à la compréhension de certaines bonnes volontés, nous
avons pu obtenir l'essentiel des informations qui intéressent notre
sujet. Qu'il s'agisse du questionnaire ou du guide d'entretien (dont
nous nous sommes servi), l'ensemble des questions abordées et leurs
réponses se répartissent en cinq rubriques dont l'essentiel s'articule
autour :
~ .des questions d'une nouvelle organisation de l'espace et
les problèmes socio-économiques qui y sont liés (comme étant des
facteurs de déstabilisation des structures anciennes).
- des conditions de travail et la politique sociale de la
Sodesucre pour apprécier leur influence sur le rendement des travail-
..
leurs, et voir leur portée concrète dans la région en tant que facteur
de développement.
- des activités du complexe, ce qui permet de voir et de
situer la complémentarité entre elles et les activités traditionnelles
doo paysans en vue d'une meilleure assistance du monde rural.
- enfin des nouveaux systèmes de valeur dominés par l'ar-
gent qui "libère" les enfants de la tutelle des parents et, engendre
des tensions caractéristiques des changements introduits par le complexe.
Tout cela a été développé en trois grandes parties essentielles dans
la t.hè se ,
- La première partie présente les objectifs des complexes
sucriers et les raisons qui ont motivé le choix du sujet, ce qu'il
vise, la méthode, les moyens d'y parvenir et le cadre
de la recherche.
- La seconde partie situe le plan sucrier dans l'économie
nationale<du point de vue des résultats escomptés et des perspectives
d'avenir dans une analyse critique.
. . .1. · ·

-
30 -
- La troisième étudié enf~n les difficultés d'intégration
du complexe dans la société gouro en vue de suggérer si possible
quelques solutions utiles à sa vé~itab~ insertion. C'est ainsi que
pour permettre au lecteur de ~ieux comprendre ce qui va suivre,
nous commençons par présenter les objectifs généraux des complexes
et les critères qui ont milité en faveur du choix du département de
Zuénoula.

-
31 -
T-ableau nO 6
Liste des villages engu~tés
1.
Zuénoul.a
10.
Gohitafla
2.
8ézieka
11.
Maminigui
3.
Zanz r a
12.
Manfla
4.
Kawaka
13.
8rodoufla
5.
Douanouf'La
14.
Zrabiseifla
6.
Duérrefla
15.
8ongofle
7.
Ganzra
16.
Grazra
8.
8inzre
17.
Dorifle
9.
Goaboifla
18.
Diabouéfle (Fleye)
En plus de ces villages où les enqu~tes se sont déroulées,
nous avons visité une quinzaine de villages au cours de cette étude.
Cela!a donné lieu à de nombreux entretiens informels qui nous ont
permis d'obtenir beaucoup d'informations utiles et complémentaires.



/ .
P '

32
Localisation de le zone d'enquéte et des villages enqu~tés
CARTE DE STRUCTURATION DU MILIEU RURAL
DEPARTBMENT DE ZUENOULA
, Sous - Préfecfures de Zuénoula. Gohïtafla
LEGENOE
- .
CHEF-LIEU ET LIMITE
DE OEPARTEMENT
. . . .
\\(ILLAGE CENTRE ET LIMITE OE SOUS-PRECTURE

VILLAGE
RATTACHE
ROUTE
A
ROUTE C
Chef-Ueu de 'S,ou'--Pr4!fec:ture
Source
Ministère du développement rural
,
.
Service de document2tion

-
33 -
PREMIERE PARTIE
LES OBJECTIFS GENERAUX DES COMPLEXES ET LES
CRITERES FAVORABLES AU CHOIX DU DEPARTEMENT
DE ZUENOULA
Dans cette première partie il s'agit essentiellement de
présenter les grands objectifs du plan sucrier d'une part et
d'autre part de montrer le champ d'étude et les critères qui ont
milité en faveur du choix de Zuénoula.
Chapitre premier
LES OBJECTIFS GENERAUX DES COMPLEXES SUCRIERS
La réalisation des objectifs du programme sucrier ivoirien
a été confiée à la SODESUCRE. Il est tout à fait logique que celle-ci
soit brièvement présentée pour la bonne intelligibilité du sujet.
A - Bref historique de la SODESUCRE
l - La naissance
"L'aventure de la canne à sucre industrielle" dans laquelle
la Cote d'Ivoire s'est engagée lui imposait dès le départ de se
trouver des partenaires financiers et techniques. C'est pour cette
raison que le gouvernement a créé en 1970 une société d'économie mixte,
la Société Sucrière de Cote d'Ivoire (SOSUCI), au capital de 50 millions
dé F: CFA, avec deux groupes français, la Société Industrielle et Agri-
cole du Niari (SIAN) et la Société des Sucreries de Saint Louis. N'ayant
pas répondu à_l'attente du pays, la SOSUCI fut dissoute et remplacée
par une société d'Etat (en 1971), la Société pour le Développement
des plantations de canne à sucre, l'industrialisation et la commer-
cialisation du sucre (SODESUCRE). La SODESUCRE a été créée le 27 octobre
. . .1. . .

-
34 -
UNE SOCI ÉTÉ DE
DÉVELOPPEMENT

DES COMPLEXES
AGRO-INDUSTRIELS

-
FERKE 1 (1974)
-
FERKÉ Il (1979)
-
BOROTOU-KORO (19791
-
ZUÉNOULA (1980)
Pour une Production de
200.000 tonnes.
UNE MISSION
~} .
/ ~
"
, ,
; .~
,..:, ... ....
POLITIQUE
-
Réduire les disparités régionales
UNE MISSION
ÉCONOMIQUE

-
Freiner l'exode rural
-
Créer des emplois nouveaux
-
Développer de nouvelles activités
UN BUT SOCIAL
.-
Construire des Écoles, des Centres
Médicaux.
; - Fournir l'Eau et l'Électricité.

-
35 -
1971 par le décret nO 71-562 dans les conditions prévues par la loi
nO 70-633 fixant le régime des sociétés à participation financière
publique (1).
2 - statuts et r~les de la SODESUCRE
La SODESUCRE dont le siège se trouve à ABIDJAN est placée
sous la tutelle technique du Ministre de l'Agriculture et des Eaux et
For~ts et"sous la tutelle financière du Ministre de l'Economie et des
Finances. Elle est administrée par un conseil d'Administration composé
des représentants :
- du Ministre de l'Agriculture et des Eaux et Forêts
- du 1\\1inistre de l'Economie et des Finances
- du Ministre du Plan et de l'Industrie
du Ministre du Commerce
- de l'Assemblée Nationale
- du Conseil Economique et Social
- de la Chambre d'Agriculture
- de la Chambre d'Industrie
- des agriculteurs et
- du Commissaire du Gouvernement.
La SODESUCRE a notamment pour objet :
- d'étudier et de proposer au Gouvernement toutes mesures
tendant à assurer l'exécution de la politique de développement de la
culture de la canne à sucre, l'industrialisation du sucre et de ses
produits dérivés.
(1)
J.O. RCI nO 50 du 11-11-1970
P.P 1694-1696 •
. . .1. . .

-
36 -
- de procéder à l'exécution de ces mesures soit par interven-
tion directe, soit en coordonnant et en dirigeant l'action des diffé-
rents organismes intéressés.
- de participer à l'organisation du commerce et à la commer-
cialisationdu sucre et de ses produits dérivés, sur le marché intérieur
et à l'exportation.
Son capital, originellement de 100 millions de F CFA a été
porté à 12 milliards de F CFA en Mai 1977, puis 67 milliards en Janvier
1980.
3 - Organisation
la direction génÉ:['ale et les autres directions
La SODESUCRE qui a eu la responsabilité de lancer le programme
sucrier composé au départ de six complexes est chargée aujourd'hui de
gérer les quatre restants à savoir Ferké l et Ferké II, 8orotou et
Zuénoula. Depuis 1978, elle a opté pour une gestion décentralisée. Son
organisation se présente comme suit
La Direction Générale
Son rOle consiste à
- Elaborer les règles de gestion et la stratégie d'ensemble
de la Société,
Etablir des plans à moyen terme en liaison avec le Ministre
de tutelle,
- Arrêter les objectifs de chaque complexe,
- Concevoir et harmoniser les techniques et les structures
de production,
- Assurer la gestion financière (et
procéder aux contrOles),
- r~ettre en place et gérer les services communs à tous les
complexes.
.../ ...

LA STRUCTURE DU SIEGE
------~--------------
-
37 -
DIRECTION
GENËRALE
SECRE-
AUDIT
TARIAT
INTERNE
GENERAL
CENTRE
INFORMA-
CONSEILLERS
TIQUE
~
- -
l
1
Î
l
DIRECTION
DIR. AD.
DIRECTION
DIRECTION
DIRECTION
[ DIRECTION
FINANC. s
& DES
CONTROLE
DISTRIBU-
TECHNIQUE
APPROS.
COMPTABLE
R. H.
GESTION
TION
• La Direction Administrative et des Ressources Humaines
(D.A.R.H.)
Elle est chargée
- de la gestion administrative et· des services généraux
du siège,
- de la définition du plan de recrutement, de formation et
d'ivoirisation du personnel en harmonie avec les Directions des complexes,
- de la gestion Drévisionnelle des carrières des cadres et
ma1trise supérieurs pour la SODESUCRE et enfin
- de la gestion des assurances.
.../ ...

-
38 -
La Direction Financière, comptable et Informatigue
Elle a pour mission
- la mise en oeuvre de la politique financi~re de la SODESUCRE,
- la consolidation des résultats comptables, la conception et
la mise en place du plan informatique de la SODESUCRE.
La Direction Technigue
Elle est chargée
- 'd'harmoniser les équipements (normalisation), les techniques
de production et d'entretien,
- de suivre les réalisations du point de vue agrièole et
industriel,
de centraliser et d'étudier toutes données agronomiques et
industrielles,
-'de participer à la définition des politiques de recherche
et à la coordination de leur mise en oeuvre.
La Direction des Approvisionnements
Elles a pour fonction essentielle d'assurer à partir d'Abidjan
et de l'extérieur, l'apiJrovisionnement régulier des complexes en pièces
de rechange et autres consommables. En relation avec la Direction
Technique du siège et les Directions Techniques des complexes, elle a
pour mission également de planifier les besoins futurs de la Société.
La Direction du Contr~le de Gestion
Les activités de Ce dopartement comprennent :
- la consolidation des plans annuels d'action,
...1...

-
39 -
- la traduction de ces ~lans en budgets annuels,
- la réalisation des standards,
- le contr~le permanent des réalisations des budgets,
- l'élaboration des tableaux de bords consolidés,
- l'assistance au contr~le de gestion des complexes, et
le contr~le de gestion du siège.
La Direction Distribution
Elle a pour attribution principale
- la définition et la mise en oeuvre de la politique d'écou-
lement de tous les produits finis ou semi-finis de la SODESUCRE. Elle
est aussi en relation avec la Caisse de Stabilisation pour le sucre
d'exportation, la Caisse de Péréquation du Minist~re du Commerce
pour le sucre vendu localement et les acheteurs éventuels de mélasse
tant sur le marché local que sur le marché extérieur.
Toutes ces directions se présentent sous la forme de l'or-
ganigramme ci-dessus
Rappelons enfin que la SODESUCRE ne dispose pas de moyens
d'action propres. Ses ressources sont constituées du moins jusqu'à
maintenant par
- le revenu de son capital
- des dotations ouvertes au Budget Spécial d'Investissement
et d'Equipement et les subventions d'organismes publics.
A cela s'ajoutent les ressources extérieures prévues pour
l'exécution des programmes de financement et les redevances pour
services rendus et les recettes d'exploitation. Telles sont les
missions des différentes directions de la SODESUCRE. Quels
sont
donc ses objectifs proprement dits?
.../ ...

-
40--
B - Les objectifs proorement dits
Le Président de la République présentait le programme
sucrier ivoirien le 2 mai 1975 en ces termes :
"La programrne sucrier dont le Gouvernement a récemment
défini les grandes lignes, constituera pour les années à venir,
l'une de nos actions de d~veloppement les plus décisives.
Soucieux de répondre à la satisfaction de nos besoins
intérieurs ComMe aux possibilités d'exportation sur les marchés
extérieurs, il entend témoiQner, avec éclat, de notre volonté de
diversifier nos productions agricoles et d'assurer, sur notre sol,
la valorisation de nos richesses.
Ce programme a également fait l'ambition, et ceci me para1t
plus essentiel encore, de contribuer à faire na1tre, au profit des
régions jusqu'ici défavorisées, les équilibres nouveauX qu'appelle
une plus juste répartition des fruits de notre croissance et une
politique d'aménagement du territoire à la mesure de la complexité
grandissante d'une économie sachant ne jamais oublier qu'elle est
d'abord au service de l'hommell (1).
De cette déclaration, on retient sept points principaux
considérés comme critères de la décision publique en ce qui concerne
le plan sucrier Et le développement du Nord par l'agro-industrie.
- Une action de développement décisive par son caractère
volontairement "moderne"; par l'ampleur des moyens mis en oeuvre et
de la population concernée.
- La satisfaction des besoins intérieurs.
- Les possibilités d'exportation.
(1)
Plaquette de présentation du complexe sucrier de Ferké l
1975 •
.../ ...

-
41
-
- La diversification des productions agricoles.
- La valorisation des richesses nationales.
- Les équilibres nouveauX (la région d'Abidjan et la
région du Centre représentant les 3/4 des productions régionales
industrielles en valeur).
- Une politique d'aménagement du territoire.
Ces points justificatifs p~vent être regroupés et analysés
sur le triple plan politique, social ou socio-culturel et économique.
1 - OBJECTIFS POLITIQUES
, Réduire les disparités régionales à défaut de les enrayer
totalement par la cr8ation des p~les de développement, tel est l'ob-
jectif principal des pouvoirs publics. Ce déséquilibre économique
traditionnellement observé entre le Nord et le Sud du pays correspond
grosso modo à la différence qui existe entre les régions de savane
naturellement défavorisées et les zones de forêt qui sont le domaine
du "bin~me café-cacao" et des cultures d'exportation, base de l'éco-
nomie nationale.
1.1. - Le Sud, p~le de développement ou raison d'une
d' une im~Ügration massive
Comme le dit SArlIR Ai-lm, "les modes de vie traditionnels
ont été bousculés par l'extension à une très large échelle des cul~
tures d'exportation: café et cacao" (1).
Le Sème parallèle constitue ù peu près la limite nord du
domaine de ces deux plantations arbustives.
(1)
S~ ~~IN ; le développement du capitélisme en COte d·Ivo~~e.
'Paris, Minuit 1971
P. ,22.
. ..1...

-
42 -
Le café s'est répandu très largement dans presque tout le
sud du pays, à l'exception de la région de Tabou à l'extrême Sud-
ouest de la C~te d'Ivoire.
La vieille zone forestière orientale, la première région du
pays desservie par le chemin de fer et la route, fournissait 38 %de
la production (région d'Agboville, Abengourou, Aboisso, lisière fores-
ti~re en bordure de la savane de Dimbokro et de Bondoukou).
Ensuite vient la zone ferestière occidentale, mise en valeur
depuis longtemps entre le Bandama et le Sassandra qui fournissait à
peine 28 %de 12 récolte (Cagnoa, Daloa, Divo et Bouaflé) et qui est
en train de dépasser la région de l'Est en raison du vieillissement des
plantat~ons de cette dernière.
Enfin la zone forestière extr~me occidentale au-delà de
Sas sandr a, concentrée autour de r~an, le long de la route Cagnoa-
Sassandra, en fournit pr~s de 20 %.
Le demaine du cacao est plus réduit. A l'heure actuelle, plus
de 62 %de la production proviennent des zones forestières orientales
et 20 %de la savane baoulé avoisinante.
De Dimbokro à Bocanda par Bongcuanou et Ouéllé, une route
en demi-cercle, branchée sur le chemin de fer, constitue ce que l'on
a appelé "la boucle du cacao", qui fournissait la majeur partie de la
récolte(l).
L'ananas s'est développé dans la région d'Abidjan, de Tiassalé
à Aboisso. Enfin cette zone forestière du Sud et du Sud-est constitue
le domaine traditionnel du palmier à huile, du verger cocotier et de
plus en plus de l'hévéa.
(1)
La sécheresse des dix dernières années a considérablement réduit
leur production.
. . ·1. . .

-
43 -
L'exploitation du bois, qui a pris un essor considérable
au cours des quinze dernières années, a commencé par la zone voisine
du littoral et des rivières flottables du Sud-est, les mieux desservies
par un réseau de voies de pénétration. Peu à peu, les meilleurs sites
de ces régions ayant été épuisés, l'exploitation a dO se déplacer vers
l'Ouest et le Nord. Ainsi le quart Sud-est a-t-il reçu la plus grande
masse d'immigrés et emploie-t-il relativement le plus grand nombre de
salariés agricoles, d'autant plus que c'est dans ce même Sud-est que
se sont installées les plantations industrielles de banane et d'ananas
dont pratiquement toute la main d'oeuvre est constituée de manoeuvres
immigrés.
Sur le plan industriel, la région d'Abidjan et celle du
Centre (Bouaké) représentent les 3/4
des productions régionales in-
dustrielle en valeur. "L'évolution du pourcentage de la part des in-
dustries abidjanaises dans le chiffre d'affaires de la C~te d'Ivoire
est toujours positive: les indu,tries abidjanaises représentent
64,2 %du. total en 1974, elles en représentent 68,7 %en 1978"
(
t b.l.aai
0
7 et 8 ,
cf
a
eaux n •••••.••• -/.
Même en ce qui concerne les petites et moyennes entreprises
(P.M.E.), la seule région du Sud (Abidjan) représente 89 %contre Il %
pour le reste du pays. Il va sans dire que le Sud est devenu depuis
l'indépendance le domaine des gros investissements.
Cette polarisation des riches~es nationales et des emplois
s'expliqub ~n grande partie par la position strat~gique d'Abidjan en
tant que seul grand port, l'unique ouverture du pays sur le monde
extdrieur depuis longtemps (le port de San-Péd~o est de création ré-
cente) •
t
.../ ...

-
44 -
Tableau n? 7
Evolution du chiffre d'affaires des industries régionales
en pourcentage par rapport au chiffre d'affaires national
:.-
~
- - - - t .
(
:
:
:
Reste
~
~
Année
~
Abidjan
~
Bouaké
~ Cote d'Ivoire )
~
(- - - - ~- - - - ~..- - - - ~- - - - ~.- - - - ~- - - -~.- - - -~- - - - l
! ~:::
::::
:::
:::: l
( 1 9 7 4
64,2
8,3
27,5
~
! 1975
64,8
7,8
27,4
l
1975-76.
65,6
8,4
26,0
1976-77
67,1
8,7
24,2
~j
1977 -78
68,7
8,7
22,6
\\_-------=-----_----::_-----=~-----)
Tableau nO 8
Répartition des trsvailleurs en pourcentage
!
~~~~~ire 'j
Année
,
Abidjan
:
Uou aké
'; COte
~-----------------~--------~-------:--------~--------~-------~---------l
( .
1975
49,5
10,9
3 9 , 3 )
~1976
49,5
10,7
39,8
~
! 1977
51,2
10,8
38
J
~
1978
5<,9
Il,1
36
j
Source
L'Industrie Ivoirienne en 1978.
Chambre d'Industrie de Cote d'Ivoire, mai 1979 •
.../ ...

-
45 -
Tcut es ces conditions n~unies ont ccnstitué un véritable
app t pour les populations du r~ord Dt du Centre à la recherche d'un
ê
emploi rémunéré. Ce mouvement massif des travailleurs en provenance
des autres régions du pays vers le Sud 6tait devenu inquiétant pour
les gouvernants et les planificateurs de l'économie nationale. D'abord
parce que le Sud (et plus particulièrement la région d'Abidjan) est
saturée par la présence de ce grand monde (A. DUfJRESSON disait en 1981
qUe chaque individu supplGmentaire a Abidjan coOtait 35.000 F CFA par
an à l'Etat), ensuite perce que le fait que les autres régions se
vident de leurs bras valides devient politiquement dangereux dans la
mesure où les intéressés s'imaginent être les laissés-pour-compte du
miracle ivoirien. C'est pourquoi le souci de régionalisation des ac-
tivit~s industrielles issu du constat du désGquilibre entre Abidjan et
le reste de la Cnt e d'Ivoire est devenu le "leit motiv" de la politique
agro-industriellR du gnuvprnemont depuis 1970 (plan quinquennal 1971-
1975) •
Le programme du textile a Agboville (cotonnière ivoirienne
ou COTIUO) et à Dimbokro (Union Textile de Ctlte d'Ivoire ou UTEXCI~,
le programme manioc à Toumodi et le programme sucrier ouvrent une
nouvelle ère pour l'agro-industrie-nationale comme le précise si bien
Alain DUBRESSCN ne parlant du textile :
Il
Avec la mise en oouvre des filières agro-industrielles
dans 18 sillage des grandes plantations contrtllées par les sociétés
d'Etat ou à l'aval de la petite production marchande de café-cacao,
la deuxième décennie de l'Indépendance est caractérisée, en Ctlte
d'Ivoire par des tentatives de régionalisation de l'activité indus-
trielle manufacturière, fondées on pertie sur la cr6ation de
.'
.../ ...

-
46 -
mammouths t ex t Ll.as à l' intér ieur du pays" (1). Il s ' agit donc d'une
industrialisation régionale volontariste, une action de développement
décisive par son caractère volontairement "moderne", par l'ampleur
des moyens mis en oeuvre et de la population concernée (le programme
sucrier implique un investissement de 260 milliards, en moyenne
44 milliards par complexe et 30 000 eup Lo.is },
1.2. - La régionalisation de l'économie
Cette volonté politique de passer d'une économie de crois-
sance à une société de promotion à la fois individuelle et collective
s'est traduite par une réelle politique d'aménagement du territoire
décidée par le 6~me congrès du PDCI-RDA et exposée par le plan
quinquennal de dévelop~ement (1976-1980).
"Il ne s'agit plus de croissance à tout prix, ou de politi-
que d'import-substitution, il s'agit désormais de développer harmo-
nieusement le pays et de ruduire les inégalités". C'est le but du
programme
du Nord et du programme sucrier.
Avouons que le souci de rogionalisation date du premier
plan de développement (1967-1970).
Déjà la loi-plan du 10 juillet 1967 (art. 7) avait créé
deux institutions susceptibles d'agir com!lle collecteurs d' informa-
tions et commaEr ansme t t eur s de décisions : les commissions régionales
de développement et les délégués régionaux du plan. Il existe une
Com~ission Régionale de Développement (CRD) dans chacun des six
départements (2). Avec un statut particulier pour la région d'Abidjan
(1) A. DUBRESSON : Régionalisation urbaine, le Mammouth COTIVO à
Agboville (Cote d'Ivoire)
Cahiers Orstom,
Série Sc Humaines, vol XVIII nO l
1981-1982.
(2) Avant 1970 la C~te d'Ivoire était découpée en 6 départements
Abidjan, Abengourou, Bouaké , Daloa, [(orhogo, Man.
. . .1. . .

-
47 -
CARTE
DE. SITUATION
DES
COMPLEXES
SUCRIERS
HTE - VOLTA
NOR 0
'orU·1.
BO UND 1......
OOIENI«:

• KORHOGO.
w
z

TOUBA
~~A~O~ S:G~ e0U:KE
\\J
1
OA.NAHE. "AN
cMTRE~/'.!
C EN T R E
1
\\
~
0 UEST
Z .....0 .. 10
1
)
90UArlE
fi
:::
o U EST
OALOA
~\\
.,0>;

l/"\\)r
GUIGLO

z
«
A T l A N T I O
u
E

Ch.f-Ii.u d.
dapar'.m.n'
Lhnit •. d.
r,',::'cr.

-
48 -
où les compétences sont dévolues à la Commission Interministérielle
pour le développement de la Région d'Abidjan (CIDRA) créée par
décret 66-15 du 26 avril 1966. Les CRD devraient ~tre pour les res-
ponsables régionaux un cadre où ils pourraient s'exprimer et donner
leur avis sur les décisions à incidences locales.Quant aux délégués
régionaux, ils assurent la liaison entre les services centraux du
Ministre du Plan et les différentes autorités régionales.
En tant que
conseillers techniques des Préfets, ils contribuent à l'élaboration
et à l'exécution du plan par leurs activités trùs diverses de coor-
dination, d'impulsion et d'étude au plan local.
Au niveau du Minist~re du Plan, la Direction de l'Aménage-
ment du territoire et de l'Action Régionale (DATAR) a été créée par
décret 73-72 du 13 février 1973, regrcupant l'ancienne sous-direction
de l'Aménagement du Territoire de la Direction des Etudes de Dévelop-
pement (DED) et le service autonome de l'action régionale qui dépen-
dait directement du Ministre. La DATAR, assume la tutelle d'un certain
nombre d'actions régionales intégrées telles que l'Autorité pour
l'Am~nagement de la vallée du Bandama (AVB) et l'Autorité pour
l'Amunagement de la région du Sud-ouest (ARSO).
En pratique, l'utilité des délégations régionales est apparue
avec la mise en oeuvre des programmes des Fonds Régionaux d'Aménage-
ment Rural (FRAR), dont la DATAR a été le ma1tre d'oeuvre.
Les Fonds Régionaux d'Aménagement Rural (FRAR) doivent
permettre aux régions l'établissement et la réalisation de programme
d'équipements collectifs d'intér~t local, afin d'améliorer rapidement
les conditions de vie en milieu rural.
Enfin cette politique d'aménagement du territoire s'est
surtout matérialisée par la mise en place d'un grand nombre de
. . .1. . ·

-
49 -
structure d'encadrement (C!DT, DNPR, SAH1ACI, etc ••• ) (1) et par
la cr~ation de plusieurs sociétés agro-industrielles dont le défi
sucrier constitue l'une des dernières nées. Comme pour la confirmer,
Abdoula"ye SAt·J ADDGD écrit ceci : "les considérations d'équilibre
régional, qui ont conduit le planificateur à prévoir des efforts
accrus dans le Sud-ouest (avec la réalisation d'un port en eau
profonde), le Centre (avec un barrage hydro-électrique), font pencher
la balance en faveur du r'Jord" (2).
L'on doit cependant reconna1tre que la régionalisation
vo.l ont ai r e des activités économiques fondées sur les agro-industries
n'est pas exempte de difficultés dans son application du moins en ce
qui concerne le secteur sucrier.
Ces difficultés sont à la fois d'ordre climatique (dcnc
naturel), sociologique et finencier.
On ne le dira jamais asseZ l'agriculture du Tiers
Honde est subordonnée aux aléas climatiques. A en juger par les con-
séquences néfastes des deux années de sécheresse (1983 et 1984) sur
la totalité de l'agriculture ivoirienne.
La production sucri~re en a ~té particulièrement affectée
par exemple le complexe de Zuénoula est passé de 26.517 tonnes de
sucre (1982_1983) à 11.481 tonnes (en 1983-1984), ce qui correspond
à une chute allant de 353.935 tonnes de cannes à 160.654 tonnes.
Bien que la tendance soit aujourd'hui à l'irrigation l'on ne doit
pas oublier qu'il faut d'abord suffisamment d'eau pour alimenter le
barrage et donc beaucoup de pluies.
(1)
ClOT: Compagnie Ivoirienne pour le Développement des Fibres Textiles
ONPR : Office National de Promotion Rurale
SATMACI: Société d'Assistance Technique pour la Modernisation de
l'Agriculture en C~te d'Ivoire.
(2)
A. S,A\\~AD['GO
l'agriculture en Cete d'Ivoire,
Paris pur 1977
p. 158.
. . .1. . .

-
50 -
A cela s'ajoute l'attitude parfois passive des populations
concernées qui ne voient pas toujours leurs intér~ts dans les projets
qui leur sont destinés et dont elles sont considérées comme les béné-
ficiaires. A défaut d'un refus catégorique de participer aux activités
du complexe, c'est par une indifférence notoire qu'elles réagissent.
Il n'est pas rare aujourd'hui de voir les responsables de la SODE SUCRE
lancer des appels rép~tÉs aux populations locales pour leur concours
effectif.
L'on doit savoir enfin que l'un des gros problèmes des pro-
grammes d'aménagement du territoire dans les pays sous développés est
celui du financement. Les conditions imposées par les fournisseurs
de capitaux ne correspondent pas toujours auX directives et aspira-
tions des planificateurs et les délais de remboursement des pr~ts
avec intér~ts rendent davantage dépendants les pays pauvres, toutes
choses qui limitent et conditionnent la portée des réalisations. Tout
cela fait que l'action régionale aboutit le plus souvent à un échec.
Comme l'a dit Jacqueline Dutheil de la Rochère, au-delà du
verbe, souvent abondant, les auteurs du deuxième plan, n'ont apporté
que peu d'éléments de régionalisation effective, faute de connaissance
suffisante des potentialités locales, faute également de volonté politi-
que de faire du niveau régional autre chose qu'un rouage de la planifica-
tion, celle-ci demeure purement sectorielle. Certes dans le but de ré-
duire les inégalités excessives entre les rugions et de mettre en valeur
l'ensemble du territoire, l'accent est mis sur les implications ré-
gionales des options sectorielles; "mais en fait la projection spatiale
des investissements dans le plan (1971-1975) aété réalisée sans aucune
participation des cadres locaux" (1) ; r eu l e la prÉsentation formelle'
(1) J. Uutheil de la Rochère, "L'Etat et le Développement écbnomiquè
de la C~te d'Ivoire". Paris, Pedone 1975.
.../ ...

. -
51-
II - LES OBJECTIFS ECONOMIQUES
Les objectifs socio-écono~iques ne 5ûnt pas fondamentalement
différents des objectifs politiques dans la mesure où toute politique
de développement doit ~tre soutenue et mat8rialisée par. une application
sccio-économique adéquate. Co~me nous le disinns plus haut, l'un des
objectifs essentiels du Gouvernem8nt Ivoirien était de réduire sinon
de supprimer l'importation du sucre.
(1) Fraternité Matin Spécial Industrie 1981
pp. 26_27 •
. . .1· · ·

-
52 -
2.1. - La satisfaction des besoins intérieurs
La C~te d'Ivoire a consom~é, sn 1972, 67.900 tonnes de sucre,
entièrement importés. De 19.500 tonnes en 1960, les besoins nationaux
sont passés à 32.000 tonnes en 1965 et devraient atteindre 78.000 tonnes
et 110.000 tonnes respectivement en 1975 et en 1980.
Par t~te d'habitant et par an, la consommation s'est élevée
en douze ans de 4,500 kg à 15 kg et compte tenu de l'évolution des
habitudes alimentaires, de l'essor démographique et le développement
des industries locales de besoins (conserves et confiseries), elle
pourrait atteindre 19 kg à l'horizon 2000.
Jusqu'en 1970, la valeur des importations de sucre était
inférieure à 2 milliards de F CFA. Avec la hausse spectaculaire des
cours de cette denrée, le seuil de 3 milliards a été franchi en 1972
et celui de 4 milliards en 1973 (cf tableaux ITo •• ~.~.I~).
Il était donc temps pour lE
gouvernement
de chercher à
limiter cette ponction financière qui n'arrangeait personne. Le dévelop-
pement d'une industrie nationale, outre la sécuritu des approvisionne-
ments, contribue sensiblement à l'amélioration de la balance des paie-
ments. L'argent ainsi économisé peut ~tre investi dans d'autres secteurs
de développement. De plus, l'activité sucrière crée de nombreux emplois.
Le nombre d'emplois par complexe varie entre 3.000 et 4.000. C'est
donc environ 24.0QO emplois qui sont ainsi créés dont la moitié est
constituée d'emplois qualifiés nécessitant une formation. Si on compte
par tr~Jailleur, 5 personnes entretenues, soit directement, soit par
une activité induite, ce sont près de 100.000 personnes qui sont con-
cernées directement par le programme (1). Cela correspond à une masse
(1) Sondage
A.V.S. 1976, service documentation Sodesucre.
···1 ...

a
-
53 -
TabLccu n 9,
' LI évolution de 10 dern and a ql.obal.e en tonnes
(
:'
: .
:
)
Année
:Importotion de
:
Réexportation: Utilisation en ~
----------------~-~~~~~-~~~~:~~--~----------------~_:~:~-~~=~~:~~--~
1
·
. . .
·
.
.
~
1961
:
26 5C3
2 218
24 285
~
1962
27 963
'.2 294
25 663
j
1963
25 316
1 937
23 379
1964
22 710
181
23 529
l
1965
31 004
225
30 859
··
·
·
1966
35 715
300
35 335
·
1967
32 100
50
32 730
·
·
j
1~68
·
·
36 837
46
36 791
·
1969
37 905
157
37 748
·
~
- - - - - - - ' - - - - - - - . . - ; . - - - - - _ - - : - _ - - - - - )
Source
le marché ivoirien de sucre 1960-1969.
Tableau n~lO Consommation et Importations de sucre (1966-1972)
(tonnes de sucre brut)
~ \\ AnnÉe
~ Consonmati.on ~ Importation ?
~-~---------------~----------------~----------------~
1966
36 614
39 106
~
1967
36 957
36 106
·
~
1968
40 338
·
40 304
··
1969
42 350
·
40 775
·
1970
51 579
·
54 785
·
··
1971
56 387
·
54 788
··
1972
67·995
·
72 343
(
·
~)
Source
Organisa tian In terllatianale du Sucre.

-
54 -
Tableau nOll
Les importations de sucre raffiné en Cote d'Ivoire
J
(
.
~
1
(
:
en millions de F. CFA courants, en tonnes
)
~
Année
~---Q~~~tité-~--~-----ë~;t;-----~----p~i;-~~;;~----~
: (1) : (2) : unitaire du kilo)
!
:
:
:
(1)
(2)
)
---------------~---------------~---------------~------------------j
~
1 9 7 3 :
:
3 915
:
( 1 9 7 4
52 647
5 769
109
1975
29 397
6 057
206
~ 1976
16 619
1 945
117
~
1977
16 982
1 577
93
~
~
19713
30 406
65
1979
4 973
345
69
!__~______"___~
l
Source
Statistiques du commerce ext8rieur.
Tableau n? 12
Evolution des consommations industrielles en tonnes
1963
1 361
865
2 226
1964
1 969
1 193
2 862
1965
1 690
1 430
3 120
19E6
2 040,5
2 085
4 125
La consommation de sucre par les industries a plus que
triplé, croissant en moyenne de 16 %par an~
5,CllJlP§. 1 le merché ivoi.risn dQ 1960 Ù 196B.
. . .1· ..

-
55 -
salariale de 125 millions F CFA en moyenne par mois et 200 millions F
CFA en période de czmpagne (par complexe) (1). Le programme sucrier
doit contribuer par cet apport à freiner l'exode rural et à susciter
la participation des populations locales aux activités économiques
de leurs régions respectives.
2.2. - La congu~te du marché extérieur
Au-delà du souci de la satisfaction des besoins intérieurs,
le Gouvernement entendait exporter le sucre ivoirien à l'extérieur.
C'est pourquoi l'ambitieux programme sucrier voulait profiter du
déficit de la production mendiale pour faire de la C~te d'Ivoire le
premier exportateur Ouest-afric~in de sucre de canne en 1980
"produire 600.000 tonnes de sucre dans les meilleurs délais" (2).
En 1981 les plus grands producteurs Ouest-africains (moins la C~te
d'Ivoire).qui étaient le Sénégal et le Nigeria se présentaient res-
pectivement avec 37.000 tonnes et 25.000 tonnes de sucre, le Ghana,
la Guinée, le Mali et la Haute-Volte (actuel Burkina Fasso) n'ont
produit que 7.000, 22.000, 9.000 et 3.000 tonnes. C'est dire
que la
C~te d'Ivoire avait certainement les raisons de ses ambi t i ons ,
Elle aurait dO cependant agir avec prudence compte tenu de
l'étroitesse du marché mondial du sucre, marché réservé où la plupart
des transactions se font en termes d'accords préférentiels. Sur le
marché libre où s'échangent en 1978 12 %du sucre exporté, le cours
pratiqué peut ~tre jugé extr~mement bas pour un produit industriel.
"La flambée des prix enregistrée fin 1974 a vite cessé, pour retomber
au quor t du cours record 6 mois après" (3).
(1)
Source: les archives du complexe sucrier de Zuénoula.
(2)
Abdoulaye SAWADCGQ
CPCIT
p.164.
(3)
Source: Organisation Internationale du Sucre
Londres. .../ ...

-
56 -
Aux dires des experts de la Banque Hono.ial e , les prix
jusqu'en 1985 seraient stabilisés autour de 80 F CFA. Il Y avait donc
beaucoup de risque à vouloir fonder un grand espoir sur l'exportation
du sucre.
2.3. - La diversiFication des sources de revenu
Néanmoins cette nécessité de chercher à conquérir le marché
extérieur se situait aussi dans le cadre de la·diversification des
produits agricoles d'exportation étant donné que l'agriculture demeure
la pierre angulaire du développement de la Cote d'Ivoire.
Le Gouvernement a volontairement favorisé les cultures in-
dustrielles et d'exportation en créant des entreprises publiques, ayant
la forme juridique de la société d'Etat, pour en gérer l'exportation
et la commercialisation. Il en résulte que le développement et l'équili-
bre de la balance commerciale des dernières années ont été assurés par
l' agricul ture •. La Caisse de Stabilisation et de Soutien du Prix des
Produits Agricoles est intervenue pour 5~ %dans les dépenses d'inves-.
tissement public (BSIE - 1978) (1).
Enfin le programme s'inscrit dans la ligne de la politique
industrielle dela Cote d'Ivoire. Par l'ampleur des investissements
(1er rang dans le classement national) la SODESUCRE est· le premier
employeur industriel.du pays (plus de 24.000 salariés). Elle fait
partie de la nouvelle g3nération d'industries qui ont eu pour mission
de (dépasser le simple stade d' ir:l~rr_substitutlon) "valoriser les ma-
. tières pre~ibres ivoiriennes, et qui seraient capables d'exporter sur
les marchés extérieurs tels celui de la C.E.E." (A. VALETTE, Jean
Chevassu, 1977).
(1)
soit directement par le verssment de 86 milliards et par un aouticn
au BSIE
Trésor de 59 ~illiards.
1
..-/ ...

-
57 -
On sait que la production du sucre intervient en amont de
nombreuses industries nationales en expansion :. boissons gazeuses
et jus de fruits locaux, confiseries, chocolateries, conserveries de
fruits, et tout le secteur élevage qui pourrait absorber au moins la
moitié de la production de mélasse. Elle est susceptible d'accélérer
l'intégration et l'allongement des cha1nes de production agro-alimen-
taires industrielles, et la mise en valeur maximale des productions
locales. Il était aussi prévu pour la campagne 1982_1983 l'exporta-
tion ~e 188.000 tonnes de sucre et dans la m~me perspective Itexpor-
tatioh, de 2,3 millions de tonnes pour une production t otal a
de 5,2 mil-,
lions de tonnes à l'horizon 2000. Pour ce faire deux des 6 complexes
(Sérébou et Katiola) avaient été conçus uniquement pour l'exportation
du sucre.
Une telle sur-estimation était trop prétentieuse pour ~tre
réaliste. Non seulement l'exportation du sucre sur les marchés ,exté-
rieurs n'a pu ~tre réalisée comme il le fallait, mais les deux
complexes dont la production était destinée à l'exportation ont dis-
paru. Les prévisions de production n'ont pas été atteintes ces der-
nières années. Le cours du sucre est soumis à des nombreuses 'variations
peu prévisibles et généralement sans rapport avec l'état réel des
disponibilités du produit. La vente à l'exportation met le sucre·
ivoirien sur un marché de concurrence internationale où, avec un prix
de revient moyen de 200 F CFA/kg, il est fortement handicapé. Le cours
du marché mondial' ne dépasse pas 80 F CFA/kg. Pour écouler la produc-
tion le Gouvernement doit subventionner le sucre. L'Etat a da par
exemple subventionner la SODESUCRE (en 1981-82) pour plus de 5 milliards
de francs CFA au niveau de l'exportation et de 35 milli~rds au titre
du re~boursement des emprunts contractés (1).
(1)
Document SCùESUCRE ; le plan sucrier et son onvironnement
international, nove~bre 1982, Secrétariat g6n8ral. P. 61
. . .1· · ·

. - ·58 -
Compte tenu de ID persistDnce de la crise économique actuelle,
l'Etat ~'a pas subventionné la SODESUCRE depuis 1983. Les difficult~s
issues de cet~e situation ont amené le Gcuvernement et la SODESUCRE
~ prendre des mesures d'ajustement afin de r6duire le prix de revient
et surtout<de faire face à ces difficultés du moment. Cela s'est d~jà
sold~ par une série de compressions du personnel (plus ~e 2.000 em--
ployés) sur tous les complexes et d'autres licenciements pourraient
certainement intervenir avec les mesures de restructuration prévues
par la Banque ~'londiale. Comme on le voit bien "l'aventure de la canne
à sucre Indus t r Le.lLa'' n'est pas encore au bout de ses peines.
III - LES OBJECTIFS SOCIAUX
" La COte d'Ivoire n'est pas un pays socialiste, mais elle
fait du social le plus hardill • Cette affirmation du Président de la
République plusieu~s fois reprisE par le quotidien Fraternit~ Matin
(com~e pensée du jour) semble ~tre le fendement de la politique de
développement économi~ue et social du pays. Il l'a clairement précisé
lors du 6ème congrès du PDCI-RDA :
"A travers ses heureuses comme ses ma~vaises fortunes, la
COte d'Ivoire ne doit jamais oublier l'idéal où elle puise sa force
l'idéal d'un développement qui ne doit pas.perdre de vue qu'il est
d'abord un mode de vie, qu'il participe à un .type de aoc.i.é té et de
civilisation et qu'il n'est jamais aussi grand que lorsqu'il sait se
mettre à l'écoute et au service d'hommes, de femmes et d'enfants, dont
le bonheur et la joie d'exister nous importent avant et plus que
tout" (1).
(1)
VI Congrès du PDCI-RDA, 15-16-17 octobre 1975
p. 122
. . .1. . ·

-
59 -
~~a multiplication d'organismes étatiques de promotion sociale
illustre parfaitement ce souci du bien ~tre de l'Ivoirien. Le pro-
gramme sucrier, qui est l'un des moyens d'y parvenir, était à l'origine
un programme essentiellement social" : créer des écoles, des routes s .
des centres médicaux, des logements et donner du travail aux populations
rurales (1).
3.1. - Créer des emplois salariés dans les régions concernées
Donner du travail aux gens dans leur région d'origine est un
important moyen de rétention des jeunes souvent gagnés par l'exode rural.
Dès sa~réation la SODESUCRE s'était fixé de répondre à cette préoccupa-
tion imminente des pouvoirs publics. LB programme sucrier fournit plus
de 20.000 emplois.
Cela correspond à une masse salariale de plus de 13 milliards
CfA par an. Par cette possibilité
de revenus monétaires réguliers, les
paysans peuvent améliorer leur niveau de vie. L'argent ainsi gagné
peut être réinjecté sur place grace à une consommation directe des den-
rées alimentaires locales, ou grace à des réalisations sociales indivi-
duelles. 'C'est aussi un puissant moyen direct d'ivoiriser les emplois
industriels et agricoles "restés longtemps entre les mains des étr~n­
gers" (2). (80 %du personnel SODESUCRE sont ivoirie~s).
1
Mais au-delà des l salaires et donc de l'emploi, on pense auX
multiples activités complémentaires qui peuvent se développer grace à
r
la présence du complexe et qui permettraient aux populations avoisi-
nantes d'en tirer profit et de vivre décemment. En ce qui concerne par
exemple l'entretien et la réparation des véhicules, ou l'amélioration
(1)
fraternité Matin, Spécial Industrie 1981
p. 70.
(2)
M. OUPIRE : Planteurs autochtones et étrangers en basse C~te
d'Ivoire orientale: Etudes éburnéennes 1960
Abidjan • ...1·..

-
61
-
Outre les activités directes de production et de transforma-
tion qu'elles assument (parfois) comme des sociétés commerciales, les
sociétés d'Etat servent de relais entre le Gouvernement et les paysans.
Elles ont une action capitale de vulgarisation apportant aux planteurs
ivoiriens un encadrement technique et une assistance financière (la
BNDA) (1) qui permettent à ces derniers d'améliorer considérablement
et de développer les superficies plantées: c'est le cas de la SATMACI
auprès des planteurs de café et cacao, de la SODERIZ, de la SODEPALM
avec les plantations:vil~ageoises.
En matière de formation par exemple, le CENAPEC et l'ONPR
ont joué dans le passé un r~le déterminant pour la maximisation du revenu
des paysans. L'action du Centre National de Promotion de l'Entreprise
Coopérative (CENAPEC) s'inscrivait dans le cadre d'une promotion de
l'entreprise coopérative. C'est d'abord un r~le éducatif qui consiste
à fournir .aux planteurs déjà coopérateurs ou qui désirent le devenir,
une formation adaptée aux besoins du groupe. Ainsi en plus des stages
organisés gratuitement à l'intention des dirigeants de GVC à Bingerville,
les agents de CENAPEC organisaient également des stages décentralisés,
ainsi que des séances d'éducation de base dans les villages. Le CENAPEC
intervonait aussi comme conseiller économique des GVC aidant ces der-
niers à t~avers des acheteurs pour leurs produits, à réinvestir utile-
ment la ristourne épargnée, comme conseiller de gestion, et m~me comme
conseiller technique pour les problèmes particuliers de production ou
de stockage d'un produit. Il en est de rnërne pour l' O~IPR qui menait des
actions de formation, d'information et de sensibilisation de l'opinion
publique aux problèmes de la promotion rurale en utilisant la radio,
la télévision et tous les mass-media. C'est à travers toutes ces actions·
de production et d'encadrement que les sociétés d'Etat deviennent un
(1) B, N~D. A. ; Benque nationale pour le développement agricole •
. . .1. . .

- 62 -
instrument de modernisation des structures sociales, d'apprentissage
de la "Solidarité voulue et ec t Lva'".
En ce qui ccncerne plus particulièrement le plan
sucrier, un important programme de plantations villageoises avait été
envisagé. Les études techniques relatives à ce projet ont été faites
(sur les sites de Ferké l et de Borotou). Il s'agissait pour la SODESUCRE
de s'inspirer des actions et du modèle des sociétés d'Etat déjà citées
pour introduire et développer la culture de canne en milieu villageois.
Des essais de cannes dans des projets pilotes de 50 à 100 ha (durant
3 ou 4 ans) devaient préc8der une vaste campagne d'information et de
formation confiée (principalement) à l'ONPR. Le CENAPEC devait pour
sa part se charger d'organiser les coopératives~ Ce programme recouvrait
également les cultures vivrières.
Dans le ces d'espèce, il était question de "rechercher les
formes d'aide les plus adaptées sur des points précis permettant de
débloquer les situations difficiles, de conseiller les paysans, de
répérer et signaler les cas de blocage" (1).
Cela signifie qu'il faut tout d'abors exécuter au profit des
paysans les travaux de prépararion des sols nouveauX et apporter toute
autre aide qui pourrait alléger les gros travaux; qu'il faut ensuite
les aider à l'adoption de la culture attelée, à l'utilisation sur les
cultures vivrières, notamment céréalières et à long terme, de la culture
motorisée (lorsque la coopérative serait suffisamment assurée pour que
puisse ~tre envisagé l'achat des tracteurs). Cela pourrait ainsi créer
des effets d'entra1nement à leur égard (autour de l'activité sucrière
proprement di te) en faisant d'eux des agriculteurs modernes. .Ca qui fait
N.B.
Le CENAPEC et l'ONPR ont été dissous en 1980 au cours de la
"
réforme des sociétés d'Etat.
(1)
Etud'e technique relative à un qr oj e t de "Plantations villageoises
sur les s~tes sucriers de Ferkésse~ougou.
+ Nous employons les temps du passé perce que oe projet nIe toujours
pas vu le jour.
.../...

-
63 -
dire A. HAUHOUOT que "la prévision des blocs pay,sans, dans le cadre du
complexe sucrier de 80rotou nous para1t ~tre une situation nouvelle
capable de favoriser la coopération entre les collectivités rurales
et les plantations industrielles (1).
Il convient donc de suivre l'exemple de la plupart des sociétés
d'Etat telle que la CIDT qui s'est orientée vers l'intégration des
cultures vivrières dans l'assolement du coton pour implanter les techni-
ques de cultures attelées et motorisées. Il ne s'agit pas cependant de
faire des <cadeaux en argent aux villages, mais de leur fournir par
exemple une aide en matériaux ou bien en travaux effectués par les
engins du complexe ou encore de crédits ouverts à des coopératives,
directement ou indirectement (sous forme de caution d'emprunts par
exemple). C'est par ce genre d'interventions concrètes et pratiques que
la SODESUCRE entendait contribuer à la création du "bonheur des paysans".
En plus de'cela elle projetait de mettre en place d'importantes infras-
tructures sociales.
3.3. - La création des infrastructures sociales
Un complexe sucrier, ce n'est pas seulement un lieu où emplois
et salaires sont distribu~s, encore moins une simple assistance techni-
que ou maiérielle apportée auX paysans, mais un cadre de vie, un lieu
d'épanouissement et d'accomplissement des hommes, et en tant qu'entre-
prise, c'est d'abord et surtout "un ensemble structuré de groupes et
d'individus, dont les interactions dynami~es conditionnent le fonctionne-
ment"(2) •
(1) A. HAUHOUOT
Une première aprroche géographique de l'insertion des
complexes sucriers de Cote d'Ivoire,: l'exemple de
Ferké l et de Borotou la 80a. Annales de l'Université
d'Abidjan 1979, série G tome VII, gépgraphie. P. 26
(2) P. AL8.0U
Problèmes humains dans l'entreprise, collection Dunod,
entreprise "Série gestion" 3e édition Bordas
Paris 1977 •
. . .1. . .

Son succès est le fait des hommes qui le composent et qui
l'animent à condition que ceux-ci y trouvent leur raison d'être, une
condition adéquate d'existence. Cela signifie en clair que le succès
de toute entreprise humaine dépend de la qualité et de la bonne santé
de ceux qui la composent. C'est pour cette raison que la création des
infrastructures sociales constitue un préalable à sa réussite •.
Cette idée a été exprimée dans presque toutes les études de
préfactibilité des complexes et dans les discours officiélsdes responsa-
bles gouvernementaux. Ce souci concorde parfaitement avec les besoins
réels du monde rural qui aspire au bien-être apporté par le progrès de
la science. Il a longtemps été démontré que les régions concernées par
le programme sucrier sont réputées défavorisées et donc totalement
démunies.d'infrastructures sociales. Il s'agit par conséquent et de
manière concrète (dans ce cas) de concevoir et appliquer une politique
de promotion rurale visant à améliorer les conditions matérielles
d'existence du paysan, "à détruire le complexe d'infériorité qu'il
nourrit à l'égard des milieux urbains plus favorisés, à lui redonner
goot à vivre à la campagne en faisant parvenir le progrès moderne
jusqu'à lui".
Sur le plan pratique il s'agit par exemple du lotissement des
villages, de l'ouverture et de l'entretien des pistes villageoises, de
la construction des centres de santé et des écoles, de l'électrification
des villages et de l'adduction d'eau, de la création des loisirs etc •••
Pour répondre à ce souci, plusieurs organismes étatiques ont
été créés dans la première décennie de l'Indépendance. C'est ainsi
qu'en mat~ère de l'habitat rural par exemple, l'Etat avait créé la
(SOGEFIHA en 1963) ,Société de Gestion Financière de l'Habitat pour venir
en aide au logement rural et un programffie de modernisation des villages
a été aussit~t lancé. Dès 1971 le Chef de l'Etat insistait sur la
. . .1· . ·

-
6 6 -
~Aux maladies habituelles dans la région (notamment trypano-
somiase, bilharziose, parasitoses intestinales et maladies de l'appa-
rail respiratoire etc ••• ) s'ajoute ici un fort impact de l'onchocercose".
Des traitements de g1tes larvaires sur le Bandama et ses
affluents y ont commencé depuis février 1975 dans le cadre du programme
O.M.S •• Pour ces derniers cas notamment, et, pour tous les cas ayant
des chances' raisonn8bles de guérison, des traitements systématiques
et suivis (relativement peu cooteux) avaient été souhaités. Pour ce
faire le centre médico social du complexe de Ferk8 reste ouvert auX
villages environnants. Dans le cadre de l'opération "plantations villa-
geoises" il était prévu également des visites périodiques sur place par
une équipe itinérante.
Enfin sur le plan de L' éducat.Lon , l'apport des compl exas est
très appréciable. Les écoles construites par la SCDESUCRE peuvent 8C-
cueillir eus~i bien les enf2nts des travailleurs de la SCDESUCRE que
ceux de la région. Déjà en 1975 le complexe de Ferké comptait vingt
quatre classes réparties entre six écoles. L'objectif poursuivi était
d'arrive~à 60 classes d'une capacité d'accueil d'environ 2.400 élèves.
Cette importante contribution doit permettre de corriger en partie
l'insuffisance des infrastructures scolaires dans ces rsgions déshéritées.
L'on se demande cependant aujourd'hui (dix ans après) si la
SODESUCRE a pu réaliser ses objectifs. Cn peut néanmoins faire remarquer
que la réalisation des objectifs sociaux semble constituer un point de
rupture entre l'Etat (qui est l'initiateur et le promoteur des projets
de développement du pays) et la SCDESUCRE (qui n'a qu'un rOle de gestion-
naire administratif). D'une part l'Etat voulait atteindre des objectifs
sociaux et de l'autre la SCDESUCRE s'exprimait et continue à s'exprimer
en te1me de rentabilité économique. L'Etat ayant p~r ailleurs cessé de
BtliItavehle4:erll1fili' liE! Sr'DE8UCRE,
celle ..ci Ba tl'E1WVQ liJcn-EIi'EllÎil1ts dia ffiJ,tre f aca
, , '/' ~ 0,

-
fi ~ -
auX dépenses de fonctionnement. Il en résulte que la SCDESUCRE renonce
désormais à toute politique sociale. Tous les responsables de la
SODESUCRE affirment unanimement qu'il n'est plus question de parler de
réalisation sociale qui ne soit rentable.
Enfin au niveau des réalisations, il convient de souligner·
qu'en dehors des premiers complexes (Ferké et Borotou) qui ont béndficié
d'impo~tentes infrastructures sociales, les effets induits restent
encore à vérifier au niveau du département de Zuénoula. C'est pourquoi
nous allons pr8senter notre champ d'étude et le complexe sucrier de
Zuénoul a,

-
68 -
Chapitre II
LES CRITERES FAVORABLES AU CHOIX DU DEPARTEMENT
DE ZUENOULA
Le département de Zuénoula se trouve au pays gouro (dans le
centre) qui s'étend le long de la bordure forestière tropicale, à
cheval sur la branche Ouest du V. baoulé.
A l'Ouest, le limite entre la population gouro et la popula-
tion bété passe au milieu de la forêt selon une orientation Nord-Ouest,
Sud-Est, indépendamment de tout accident géographique.
Au Nord-Ouest, la for~t inhabitée sépare les villages gouro
des premiers établissements malinké du Sud de Séguéla. Ils se rejoi-
gnent plus à l'Est, là où la savane pénètre plus profondement vers le
Sud.
En allant d'Est en Ouest la limite entre peuplements malinké
et gouro s'incurve vers le Sud, traverse la r'larahoué et remonte légère-
ment vers le Nord-Est, soulevée par une zone de peuplement gouro de
forte densité. Le contact entre les deux populations est étroit et se
prolonge à l'Est jusqu'au pays baoulé. La limite entre Gouro et Baoulé
s'établit à l'Ouest du Bandama blanc, et non sur le fleuve lui-même
dont la rive droite est peuplée de populations minoritaires:Ayahou et
Yaoure. La frontière descend ainsi, selon une orientation presque
Nord-Sud parallèlement au Bandama, jusqu'à ce qu'elle rencontre au
Sud de Bouaflé, la l'1arahrué. Dès lors, c'est le fleuve qui matérialise
cette limite. Au point de confluence avec le Bandama elle penètre à
nouveau dans la forêt dense, et c'est encore au milieu de celle-ci
que l'on doit tracer la séparation entre Gouro et Gagou, à peu. près ~e
long du parallèle 6° 30 de latitude nord.
. .
. . .1. . .
~.

haute -volta
REPARTITION ETHNIQUE
'~im{ L'ethnie Gouro situêe au
centre ouest du pays
fait
partie du
groùpe des Mandé
du
Sud et
se trouve à
cheval
entre
la zone de savane et
la
zone de
forêt.
C"I
u::I
"
voltaïque-
.......
.
~
j~~ ~~~~~i:~~:;:~I;::~::::
liberia·
.............
krou
.............
.
:
.
~".
r
akan
~ mandé
nard
.! ~4
d .

. . .
OC E AN
ATLANTIOUE
't,~.t:t:.t~~r: 'm a n
e
sud (qov.n»)

-
70 -
, .Cas limites définissent ainsi une aire orientée Nord-Ouest-
Est, de plus de 16 000 kilomètres carrés comprise entre 60 30 et
7 0 50 de latitude Nord et 50 25 et 7 0 de longitude Ouest.
Le pays gouro comprenait donc traditionnellement les secteurs
de Bouaflé, Oumé, Sinfra, Vavoua et Zuénoula (avec Gohitafla).
Au point de vue administratif, le pays gouro a connu plu-
sieurs aménagements du moins en ce qui concerne son statut.
En effet"avec la dissolution de l'ancien cercle du Haut-
Sassandra en 1911, les secteurs de Zuénoula, Bouaflé et Sinfra qui lui
appartenaient sont regroupés avec ceux de Lobo (aujourd'hui Vavoua) et
Oumé dans le cercle de Oaloa, où se trouvent ainsi rassemblées des
populations gouro, bété, gagou. En 1913, on crée pour la premiè~e fois
le "cercle gouro" qui comprend les quatre subdivisions d'Oumé, Sinfra,
Bouaflé et Zuénoula, mais qui exclut Vavoua dont une partie de la popula-
tion est dite gouro.
Çe cercle "gouro" reste inchangé pendant près de vingt ans.
Mais en 1936, il est à nouveau demantelé : Oumé est rattaché
au cercle de Gagnoa en pays bété, tandis que les trois autres subdivi-
sions passent sous l'autorité de Osloa (également en pays ~été). En
1943, la subdivision de Zuénoula est détachée du cercle de Oaloa et
rattachée à celui de Bouaké (en pays baoulé).
Enfin c'est seulement le 1er janvier 1957 que fut créé le
cercle de Bouaflé composé des subdivisions de Bouaflé, de Sinfra et
de Zuénoula. Depuis mars 1979 Zuénoula est devenu un département qui
comprend la sous-préfecture de Zuénoula et celle de Gohitafla (située
à 20 km).<C'est cet ensemble qui constitue le champ de nos investiga-
tians.
Limité au Sud par la sous-préfecture centrale de Oaloa, au
Sud-Est par la sous-préfecture centrale de Bouaflé, au Nord par la
...1...

Le pays gouro
- 71 -
Carte nO 5
..
,) • 10
lO
40km
i
. i
nfiD1l~~d9
.i.
~'
"
,
.
.,' . i" 1.,
...
\\ •
" .
';: 1
~ ~
."1
0• •
. . . . . 1 ,
.
-
AMOUMOUKAO
,
,,'.
_
'
.
. .
. .0- ,
/
!'
.'
.' : ,.
" ~, .'
. ". -,' .,,-
,
~nvœTIV~~œllQD~
D~vll~nn~llQDUm~ .
,
,
' , '
.

n~ull~' Q~D~QDQ~nRJ~nDllnDQDUm~
"
"
:..r
,
,
Source 1 Atlas
Cote d'Ivoire

-
72 -
sous-préfecture de Mankono, au Nord-Ouest et à l'Ouest par la sous-préfec-
ture de Vavoua et enfin à l'Est par la sous-préfecture de Béoumi, le dé-
partement de Zuénoula cnuvre une superficie de 2830 km 2 • Il se caractéri-
se de plus en plus par une dégradation sensible du milieu physique.
A - LES CARACTERISTIQUES DU MILIEU PHYSIQUE
Les caractéristiques du milieu physique ont constitué un critère
déterminant"pour l'implantation de la Sodesucre à Zuénoula. En effet la
rentabilité des plantations de canne exige la mécanisation d'un certain
nombre d'opér8tions (surtout en matière d'irrigation, des soins phyto-
sanitaires, du tracé des sillons, de la coupe mécanique etc ••• ). Ces
"
opérations ne sont facilitées que sur de grandes superficies d'une seul
tenant présentant un relief plat (tout accident de terrain leur éta~t
défavorabl~)~ La région de Zuénoula réunit en grande partie toutes ces
conditions adéquates. Le département se caractérise dans l'ensemble par
un relief monotone, où les accidents sont rares et de dimensions modestes.
C'est une vaste plaine qui descend progressivement du Sud-Ouest vers le
Nord-Est. Les quelques accidents de terrain qui rompent la monotonie du
relief sont constitués par des dOmes et des pitons granitiques. Les plus
hauts sommets qui varient entre 300 et 500 mètres se rencontrent à l'Ouest
dans le canton Mangourou. Disons grosso modo que la région de Zuénoula
est peu accidentée et dominée par un paysage de plaine.
Sur le plan climatique, l'existence de deux grandes saisons
(une saison sèche de novembre à avril et une saison des pluies d'avril
à juillet) est un grand atout pour le succès de cette culture. La canne
à sucre a besoin à la fois d'eau et de soleil et, l'alternance d'une
saison humide et d'une saison sèche est à même de fournir à la plante,
l'eau ~ndispensable à la pousse, et le soleil nécessaire au mQrissement
et à l'augmentation de la teneur en sucre.
.../ ...

-
73 -
Outre cette périodicité bien marquée d'une saison humide et
d'uno saison sache, le couvert v.Jgutol dominu en grande portie par la
savane permet une bonne insolation des cannes pour une meilleure con-
centration du sucre dans les plantes. Il faut ajouter à cela la pré-
sence de la Marahou é , affluent du 8anda~a et principal cours d'eau et
celle de no~breux cours d'eau d'importance secondaire (la Lobo, la Dyare,
la Zoure, la Vouro etc ••• ) qui constituent une condition extr~mement
importante pour le développement et l'exploitation de la canne à sucre.
Ces cours d'eau permettent de creuser des retenues d'eau pour le système
d'irrigation par aspersion afin d'arroser les plantes en cas de sécheresse.
Enfi~ sans ~tre particulièrement riches, mais offrant un modèle
largement ondulé favorable auX grandes cultures, les sols ferralitiques
issus des schistes rouges et argileux des sommets des collines jaunes
sablo-argileux des pentes, permettent à la canne à sucre de remplacer
la savan~ arbustive, caractéristique des régions sub-soudanaises. Les
conditions physiques favorables étaient donc réunies dès le départ.
8 - LES ASPECTS HUMAINS
LA POPULATIDN DU DEPARTEMENT
Le travail de la canne exige une main-d'oeuvre importante.
A cet effet 'les études de préfactibilité du complexe avaient' estimé le
personnel à 5.364 travailleurs. Le département da Zuénoula qui compte·
actuellement 104.100 habitants répond à ce souci (1). Avec une densité
moyenne de 20,5 habitants au km2, cette population était évaluée à
98.714 habitants en 1975 (2).
(1) Ministère de l'agriculture et des ea~x et forêts, Direction des
Statistiques Rurales et des Enqu~tes Agricoles. Population calculée
à partir des persfJectivEs de pop. 1975, 1980, 1985, 1990.
Direction de la Statistique 1900.
(2) riinistàre de l'Economie et des Finances, Direction de la Statistique
démorjr apn.i que ,
. . .1. . ·

- 74 -
Depuis l'ouverture du complexe sucrier ,la densité a augmenté
2
et atteint aujourd'hui 70 habitants au km
dans les environs de
Zuénoula. La population du département se compose de plusieurs groupes
ethniques
- d'abord les Gouro, ethnie dominante dont les membres se
reconnaissent des droits sur le patrimoine foncier et à ce titre, accom-
plissent certains cultes traditionnels à la "Deesse terre et aux divini-
tés qui la' peuplent".
- ensuite viennent les Dioula : descendants d'anciens captifs
de Samory, ils se regroupent principalement dans la ville de Zuénoula
où ils forment le quartier de Sokoura ou Djamorou. Ils ont pour activité
dominante le commerce de détail des divers produits provenant de l'ar-
tisanat local, (cordonnerie, forge etc ••• ), de l'agriculture et de l'im-
portation •.
- puis il faut citer les Baoulé attirés très tot dans la région
par la culture du café ; on les rencontre surtout dans les campements
ayant parfois une allure de véritable village et qui se localisent non
loin des plantations.
Il faut aussi ajouter à tout ce monde une forte colonie
~'1ossi venue de la Haute-Volta (actuel Burkina Fasso) depuis 1935 {l)
et qui se r<egroupe auj ourd' hui en deux villages portant les dénomina-
tions de leur région d'origine: Koudougou et Yatenga.
Enfin on rencontre p~le-m~le un certain nombre de populations
allogènes venues des pays limitrophes de la Cote d'Ivoire, notamment du
Ghana, de la Guinée, du Mali etc •••
A l'instar de celle de toute la Cote d'Ivoire, la popula-
tion du département de Zuénoula se caractérise par une forte proportion
de jeunes dont l'agriculture constitue la principale activité économique.
(1) Les archives de la sous-préfecture de Zuénoula.
.../ ...

-
75 -
C'est sur cette jeunesse qu'a reposé jusqu'à ces dernières années la
mise en valeur des terres. Elle devrait constituer par conséquent
une main-d'oeuvre potentielle importante pour la Sodesucre.
Tableau nO 13
Population du département de Zuunoula en 1975
(
.
.
..
:
..
(
Sous-prétecture
:Superficie :Pays ruraux:Villages: Population 75
l
~-------.-------------:-----------:----------_:--------:----------------
.
.
.
.
. .
)
.
.
.
.
Zuénoula •••••••••• : 2 030 km2:
13
:
9 4 :
64 294
)
de l'Economie, Direction du département Région FRAR, struc-
turation du milieu rural, RCI page 10.
C"- LES ACTIVITES ECONO~IQUES
Les activités économiques sont essentiellement agricoles et
se répartissent entre les cultures vivrières et les cultures d'exporta-
tion. Il convient ici de rappeler qu'il s'agit d'une agriculture de type
'traditionnel. Toutes les opérations sont effectuées avec des outils
manuels qui sont d'un faible rendement. Pour le défrichement et les
travaux de culture, les principaux outils sont la hache, la machette
et surtout la houe. La main-d'oeuvre est en général familiale ; chaque
père ne dispose que de ses femmes et ses enfants pour ses travaux
champ~tres.
La pénurie de main-d'oeuvre fait que les paysans adoptent
un système d'entraide asseZ efficace mais qui ne peut réussir (toujours)
à ccmb Ler le retard pris pour effectuer les travaux • .../...

-
76 -
Lns 8ctivit63 agricoles vivriDres propre~ont dites portent
en grande "partio sur la culture du r~z, de l'igname, du manioc, du maïs
et de la banane plantain. La production est destinée à l'auto-consomma-
tion. C'est surtout une agriculture itinérante sur brûlis oD la jachère
permet la reconstitution des él~~ents du sol. Cette aQriculture associe
et fait succéder dans le mê~e champ et sur les m~mes parcelles plu-
sieurs cultures qui cèdent progrescivemont la place les unes aux autres
à mesure dé leur maturité.
Le cycle cultural se calque sur le rythme des saisons et
est fonction des deux principales périodes de précipitations. C'est
ce qui explique principalement les mauvaises récoltes en cas de seche-
resse prolongée.
Quant auX cultures d'exportation, elles se composent essen--
tiellement du café, du cacao et du coton.
L'introduction du café et du cacao dans la région se situe
au tour de 1926. ;-:ais c' est surtout l'année 1939 qui voit leur expansion.
C'estgr~ce à des travailleurs revenus ues plantations européennes du
sud ovec les premiers plants que tout le mon~e s'est mis à cultiver
ces plant~s nouvelles.
Il convient cependant de rappeler que de ces trois cultures
d'exportation, le cacao n'a jamais constitué ~jritablement une source
de revenu substantiel pour les paysans. Cela est d'autant plus vrai
que pour les autorités du Ministère de l'Agriculture et des Eaux et
FDr~ts, la zone de Zuénoula n'est pas pro~iro ~ la production de Cacao •
. Quant au café, il a 10ngtE~ps constituD une importante source
de reV2nus pour la plupart des paysans. Son influence est tellement
grande que ma~gré la baisse catastrophique
de la production de ces
dernières 8nn~es, les paysans gouro pensent encore que seul le café
constitue pour eux une importante source de gain.
. . .1· ,.

- 77 -
La plupart des plantations ont vieilli et leur rendement
est devenu m~diocre. Elles datent de plus de l~ ans et on ne note
pas de rajeunissement.
" La SATi·IACr s' y est installée il n' y a que 3 ans et a
entrepris une reconversion en matériel végétal sélectionné ; depuis
1975 elle n'a pu réaliser que 28 ha sur les 39 fixés comme objec-
tif~(l). Cette situation, aggravée par les irrégularités pluviométri-
ques qui affectent terriblement les productions, aurait dO amener les
jeunes.f:1 s'orienter davantage vers la Sodesucre où un salaire "régulier"
leur serait attribué.
-C'est dans ces conditions que le coton s'annonce comme une
solution de rechange. Cette derni8re culture est enccuragée par la
crOT qui assure la vulgarisation des techniques culturales et l'encadre-
ment des paysans producteurs. Plante à cycle vjgétatif court, le coton
appara1t comGe une plante adaptée à la région surtout à sa partie des
savanes où il se cultive conne culture de deuxième cycle sur des par-
celles libérées par l'arachide et le maIs qui servent d'avant cultures
pour entretenir et maintenir l'humidité du sol. Mais les soins répétés
et la discipline qu'exige le calend~ier de culture du coton (épandage
d'engrais et de pesticides, sarclages successifs au moins trois fois
avant ~la récolte) en font une activité contraignante. Néanmoinsi les
responsables du secteur CrOT de Zuénoula espèrent venir à bout de
certains de ces obstacles en procédant par une campagne d'explication
où ils mettront l1accent sur la nécessité pour les paysans à se re-
prouper en'groupements à vocation coopé~ative (G.V.C.). Le succès de
cette dernière pratique peut à long terme'g~ner l'épanouissement du
comp Lexe cie Zuénoula.
(1) Minist8re du ~lan et Nini5t~re de l'Agriculture. Comité interminis-
tdriel peur .le sucre. Etude des activités a~ricoles r6gionales,
pour l'imi11antation d'un complexe sucrier, purimètt:8 de Gohitafla
Gr,JETO . 1978.
. . ·1· ··

-
78
- D
LE COMPLEXE DE ZUENOULA
PRESENTATION
I - GENESE
La Cete d'Ivoire nia pas de tradition sucrière. Sa vocation
actuelle de produire et d'exporter le sucre a été dictée par l'évolu-
tion de la consommation locale.
Comme l'indique le plan quinquennal 1971-1975 la motivation
déterminante est l'existence d'un marché intérieur important et crois-
sant couvert (avant 1974) en totalité par des importations. Cette
croissance régulière de la consommation a conduit le pays à dépenser
5.769 'millions francs CFA (en 1974) pour importer 52.647 tonnes de
sucre afin de satisfaire ses besoins. "Produire son propre sucre de-
vait permettre de rGaliser des économies en devises sur un poste en
constante auqment at i on" (1).
èe serait aussi l'occasion d'introduire dans les régions
relativement défavorisées du pays, un ou deux foyers de production
intensive pouvant jouer un rele de pele de développement. Il convient
d'indiquer ici que toutes ces considérations avaient été perçues
avant l'indépendance de la C6te d'Ivoire (1960).
En effet, les premières études de recherche de sites propices
à cette culture avaient 8té confiées à l'Institut de Recherche Agrono-
mique Tropicale (IRAT) en 1959 pour initier des essais un peu partout
et principalement dans les marais de l'Agneby et sur le Bandama dans
la région de Niakaramadougou. Après l'échec de ces essais par suite
de maladie de rabougrissement, d'autres tentatives eurent lieu à partir
(1)
C. Aubertin: le programme sucrier, une industrialisation
volontariste
Paris DRSTDr·,
1983 p. 13.
. . .1. . .

-
79
de 1960 à Oumé, Houaf'Lé , Bouaké et Ferksssédougou avec de nouvelles
variétés végétales. A l'issue de ces dernières recherches, deux ré-
gionséfurent retenues pour l'implantation de la première unité indus-
trielle :
- l'une en bordure du Bandama à une dizaine de kilomètres au
sud de Ferkessédougou.
- l'autre sur la vallée de la Marahoué à proximité de Bouaflé.
Sur chacun de ces périmètres ont été entrepris des essais de
production industrielle de canne afin d'établir un coat prévisionnel
de production de sucre. Il se dégage des études techniques et économi-
ques que le site de Ferkessédougou est de loin le plus avantageux, ce
qui a cond~it à le retenir pour l'implantation du premier complexe
sucrier. La capacité de production du complexe devait ~tre fonction
des besoins du marché intérieur. L'exportation du sucre n'avait pas
été envisagée car, bien que satisfaisantes, les conditions de produc-
tion en C~te d'Ivoire n'étaient pas exceptionnelles.
Il y avait en outre surproduction de sucre dans le monde et
dans les pays de l'Organisation Commune Africaine et Malgache (OCAM)
qui, avec la Fr-ance constituaient un marché protégé. Selon le programme
envisagé, les premiers travaux devaient débuter fin 1970 et la sucrerie
devait entrer en service pour la campagne 1972-1973.
Pour la réalisation du projet, une société d'économie mixte,
la société sucrière de C~te d'Ivoire (SOSUCI) fut créée en avril 1968
avec deux partenaires français :
- la société industrielle et agricole de Niani (SIAN)
- la société des sucreries de Saint-Louis.
~a société sucrière de Cote d'Ivoire (SOSUCI) n'ayant pas
répondu aux aspirations du gouvernement et auX intér~ts de la Nation,
elle a été dissoute en 1970. Le 27 octobre 1971, par décret nO 71-563
. . .1. . .

-
80 -
le conseil 'des Ministres crée la SODESUCRE (société pour le développe-
ment des plantations de canne à sucre, l'industrialisation et le
commerce du sucre) qui est une société d'Etat. Depuis cette date,
c'est la Sodesucre qui est chargée d'appliquer la politique du plan
sucrier ivpirien dont le premier morceau de sucre est sorti de l'usine
de Ferké l en 1974 (1).
Quant au complexe sucrier qui était prévu à Bouaflé (actuel
complexe de Zuénoula), il s'est glissé vers le département de Zuénoula
pour deux raisons principales
- D'abord, Zuénoula était considéré comme défavorisé par
rapport à 80uaflé du point de vue des investissements.
- Ensuite et surtout les dernières études d'identification
de sites entreprises en 1974 par l'IRAT, le Bureau National d'Etudes
Techniques et de Développement (BNETD), les Ministères du Plan et de
l'Agriculture en relation avec la Sodesucre ont montré que Zuénoula
présentait plus de critères adéquats que Bouaflé.
Au niveau du département de Zuénoula, les premières études
de factibilité se sont déroulées à Maminigui dans la sous-préfecture
,
'
de Gohitafla à 25 km de la ville de Zuénoula soit à 50 km de l'actuel
complexe. Il ressort de ces études que les conditions climatiques,
pédologiques et agronomiques étaient concluantes. QUant aux populations
de la région de Maminigui et des villages environnants, elles étaient
plus què favorables à ce projet. Mais la proximité du lac de Kossou a
constitué un obstacle à sa réalisation, comme le disait la conclusion
de ces études: "L'implantation d'un périmètre sucrier dans la Zone de
Gohitafla pose non seulement un problème de main-d'oeuvre comme cela
est principalement le cas pour les autres périmètres, mais aussi et
(1) Contrairement à ce qui est écrit, la Sodesucre s'occupe effective-
ment de la commercialisation du sucre seulement depuis ~985 •
.../ ....

-
81
-
surtout un problème d'espace. Les terroirs ont déjà été réduits du
fait de la montée des eaux du lac Kossou et il est pratiquement im-
possible .de les amputer encore de 13· 000 ha"(l).
Déjà en 1972, l'ouverture du lac Kossou avait soulevé de
nombreux problèmes entre autres celui du déplacement des populations,
celui du dédommagement et surtout le refus d'intégrer les nouveaux
villages en' vue de reloger les populations envahies par les eaux. Tout
cela ayant coCté très cher à l'Etat, l'expérience ne valait plus la
peine d'être recommencée.
C'est pour cette raison que la région de Zuénoula (la zone
du périmètre actuel) qui présente des critères semblables à ceux de
Maminigui a été retenue Comme lieu d'implantation de ce complexe sucrier.
o , II:- LOCALISATION ET CARACTERISTIqUES DU COMPLEXE
Le complexe est situé sur la rive Ouest de la Marahoué entre
deux axes routiers partant de Zuénoula et allant vers l'ouest à Vavoua
,et vers le nord à Mankono. Il est limité à l'ouest par la rivière
Marahoué. Au nord par un parallèle passant au nord de Kawaka, au sud
par la route reliant Dezra II à Bagozra, et à l'ouest, toujours lon-
geant la Marahoué par la route Zidiou-Geziaka-Zanzra, Du~noufla. Un
méridien partant de Duénoufla va rËjoindre la limite nord. Le choix
de ce site' a été dicté par les critères que nous avons mentionnés
plus haut.
En effet, compte tenu de certaines contraintes naturelles et
humaines rencontrées à l'issue des études de fact~bilité réalisées en
(1)
Comité interministériel pour le sucre.
Etude morphopédologique de reconnaissance pour l'implantation
d'un c~mplexe agro-industriel sucrier. Aoot 1975
GNETD •
... j ...

-
82 -
/
'
COMPLEXE SUCRI ER DE ZUENOULA - KAVAKA
r
t
1
1
!
Benouila l

-GOuélifloi
1
!
1
L
-_. __ . _ - - - - -
• Tyéiflo
.Gohidourou
• Kolouflo
.Zonzro
vers
~ ~
vov~
~.
..
~
SJzioka
. .
o
IO"'m
b
r--,
L _...J
Périmètre sucrier
lIers
Bouoflé
Si te sucrier en expiai totion
=
Route non bitumee
Source : documentation Sodesucre siègeï•.

- 83
1974 par le 8NETO sur le périmètre de Gùnitafla (Maminigui), une autre
étude de prospection fut aussitOt entreprise à Zuénoula. Le 3 octobre
1975, le gouvernement de la République de Cote d'Ivoire représenté par
le r~inistre de l'Agriculture a signé une convention pour la réalisa-
tion d'un~ étude de factibilité d'un projet sucrier sur le site de
Zuénoula avec l'association d'un projet Belge SOCFFINCo H.V.A.
Cette étude fait suite aux conclusions du rapport intitulé :
"Etude comparative préliminaire de trois sites sucriers
l\\Jiakaramandougou, Katiola (r'1arabadiassa), Zuénoul.a , Elle concerne le
projet défini comme Zuénoula II dans l'étude comparative. Selon lès
termes de références en annexes de la convention, l'étude devrait por-
ter sur :
- une plantation de 6.800 hectares environ,
- une production annuelle de sucre d'environ 60.000 tonnes,
- une usine produisant du sucre brut.
Ces études portaient donc principalement sur les caractéristi-
ques physiques de la zone étudiée. Elles concernaient entre autres :
2.1. - Les asoects aoricoles
- caractéristiques pédologiques
- caractéristiques climatiques
- caractéristiques hydrologiques
caractéristiques agronomiques, (la production)
- l'inventaire des sites de barrages
- aménagement des infrastructures.
22. - Les aspects industriels
- Organisation
- gestion
. . .1. . ·

-
84 -
- personnel
- formation
- analyse économique et financière et cartographie etc •••
Au terme de ces recherches, les objectifs définitifs se
présentent comme suit
une superficie de 6.700 ha pour le complexe sucrier dont
- 6.500 ha pour la partie sgricole
. -
200 ha pour la partie industrielle, l'infrastructure
de services et les villages.
Un volume de production de :
- 50.600 tonnes de sucre brut par an et
- 16.850 tonnes de mélasse par an, comme sous produit.
Du point de vue pédologique et morphologique, la profondeur
utile du-sol, la texture d'ensemble du profil et la faible pente du
terrain constituent une condition très favorable à la culture de la
canne à. sucre.
Sur le plan climatique, on a pu ainsi déterminer que la saison
sèche à Zuénoula (16 novembre au 15 avril) co~portait 151 journées
théoriques d'usinage, mais qu'il fallait en déduire 15 jours d'arrêt
du fait des pluies. Compte tenu de 13 autres journées d'arrêt pour
l'entreti~n de. l'usine, on ne peut donc tabler que sur les 123 jours
effectifs ~'usinage.
La production de cannes davant atteindre annuellement, en
régime de croisière un tonnage de 505.800 tonnes (1). La capacité de
traitement de la sucrerie doit être dé 4.200 tonnes de cannes par jour.
Sur le plan démographique, l'existence de la main-d'oeuvre
(1) Document de synthèse de l'ùtude de factibilité du projet sucrier
de Zuénoula Aoot 1976.
. . .1. . ·

-
85 -
abondante ne devrait constituer en aucun cas un problème majeur dans
la mesure où la prévision était de 5.364 emplois dont :
- 3.543 emplois permanents et
~ 1.821 emplois saisonniers (1.680 coupeurs de cannes),
car une étude socio-démographique de l'Institut de Géographie Tropicale
(1. G. T.) affirmait en 1974 que le vo.Lurna démographique "peut permettre
de disposer d'une force de travail masculine de 12.500 actifs. Th~pri-
quement donc il est possible d'envisager la création d'un complexe
\\
sucrier dans le secteur avec optimisme (1).
Enfin comme nous le disions plus haut, la proximité de la
Marahoué et de certains cours d'eau tels que la Koua et la Dyare avec
la possibilité de construire un ou deux barrages nécessaires à l'irri-
gation constitue pour les besoins en eau un complément très important
<
(à apporter) à la pluviométrie naturelle.
Comme on le voit bien, les conditions physiques et humaines
étaient globalement favorables à l'implantation du complexe sucrier
à Zuénoula. C'est ce que confirme la conclusion de ce rapport du comité
interministériel pour le sucre :
- Le site prospecté pourl'jnsta~lation éventuelle d'un périmètre
agro-industrielsucrier est situé sur la rive droite de la Marahoué à
la hauteur de la sous-préfecture de Zuénoula. La prospection de re-
connaissance s'est appuyée avant tout sur l'étude des facteurs du
milieu naturel et a fait l'objet d'une mission sur le terrain et d'un
eXamen de la couverture photo aérienne de la région. La zone permet
la réalisation, dans de bonnes conditions, d'un périmètre sucrier
(1) République de C~te d'Ivoire, Ministère de l'Agriculture, Etude
socio-démographique en vue de la création d'un complexe en COte
d'Ivoire
IGT 1974.
. . .1· · ·

-
86 _
agro-industriel d'environ 5.000 hectares, bien groupés proches de la
Maraho~é et dont l'altitude reste toujours inférieure à 50 mètres.
A cette surface, peuvent s'ajouter environ 7.000 hectares supplémen-
taires dans des conditions toutefois moins favorables (1). Après les
critères de choix de Zuénoula, il convient maintenant de montrer
comment ce"complexe se présente concrètement, quelle est son organisa-
tion structurelle et comment il a été réalisé.
III - STRUCTURE ORGANIQUE
3.1. - Organisation
- Le complexe de Zuénoula est une unité industrielle clefs en
main qui a coQté 53 milliards F CFA. Il comprend essentiellement :
Une plantation de cannes de 5.200 hectares dont 4.200 hec-
tares de cannes irriguées et 1.000 ha de cannes pluviales. Les 4.200 ha
irriguées se répartissent en trois secteurs :
- secteur A = 1.575 ha
- secteur 8 =
585 ha
- secteur C = 2.040 ha.
L'irrigation se fait à partir de trois stations de pompage
Ces stations sont implantées soit sur la Marahoué, soit sur les rivières
et cours d'eau secondaires. A cet effet un barrage d'une capacité de
17.000 m3 a été construit sur la Koua à 25 km de l'usine. La capacité
de production de toute la plantation est de 500.000 tonnes de cannes
en régime de croisière qui fourniront 50.600 tonnes de sucre blanc
(1) République de Cote d'Ivoire: Comité interministériel pour le sucre.
Etude morphologique de reconnaissance pour l'implantation d'un
complexe agro-industriel sucrier à Zuénoula
Avril 1975 BNETD.
, ../ , ..

-
87 -
par an. Cette plantation vient de conna1tre une extension supp1émen-
taire de 1.480 ha de cannes pluviales en 1984 (1).
- Une zone industrielle comportant :
- les ateliers d'entretien et les garages
- les abris pour le matériel
- les b~timents administratifs, bureaux et laboratoires
- les fermes, les magasins de stockage, d'engrms et
d'approvisionnement.
- Un réseau de routes et de pistes comprenant
- une route d'acc8s de 26 kilomètres
- des pistes d'exploitation de 101 km et des ouvrages de
génie civil (franchissement de marigots) et enfin une usine d'une
capacité normale de 4.000 tonnes de cannes par jour. Elle a été spéciale-
ment étudiée pour produire du sucre blanc ou du brun pour la consomma-
tion locale. Comme les autres complexes, celui de Zuénoula est dirigé
par un Directeur Général Adjoint (2). Il faut rappeler que tous les
complexes ont à peu près le m~me organigramme. Ainsi la structure
interne est caractérisée par l'existence de cinq départements rattachés
à la Direction du complexe :
- Département des plantations
Département usine
- Département financier et comptable
- Département Technique
- Département Administratif et des Ressources Humaines (DARH).
Tous ces départements sont très spécialisés dans leurs
fonctions et comprennent à leur tour plusieurs divisions internes.
(1) Extension des complexes sucriers ; études morphologiques de
reconna~ssance - BETPA 1984.
(2) La Direçtion G8nérale a son siège à ~bidjan.
. . .1. . .

ORGAN IGRAMf'1E SCHEr·1ATIQUE DU COMPLEXE
1
D.G.
r
1
D.G. A.
~ ,
.
ContrOle de Gestion
1
etl
etl
1
Direction des
Direction de
D.A.G.R.H.
Direction fi-
Direction (3 di-
plantations
l 1 us in e (4 di-
(2 divisions
nancière
visions : Bureaux
(4 divisions
visions
Administration
(2 divisions
d'études
Agro
Fabrication
Générale
Comptabilité
Approvisionnement
Production
Energie
Ressources
Analytique)
Aménagement agri-
[-'lot or isation
Entretien
Humaines)
,
cales)
1
Irrigation)
-Lab oratoire)
J
_ 0
L
1
Source
D.A.G.R.H. du complexe
Tout ce complexe a été rdalisé par la Société 8elge A.B.R.H.V.A. en collaboration
avec d'autres sociétés 8trangères et ivoiriennes pour la sous-traitance.

-
89 -
Ex.
la direction des plantations en comprend quatre
études agronomiques
- production agricole
- irrigation
- motorisation et garage.
A cette même direction est rattaché le service récolte, com-
posé de trois sections : coupe mécanique, coupe manuelle et transport.
3~2. - Réalisation
le contrat de réalisation
Le contrat principal relatif à la réalisation du complexe
sucrier de Zuénoula a été signé le 5 avril 1977 en tre :
- d'une part, le gouvernement de la République de Cote
d'Ivoire, ma1tre d'ouvrage, et la Sodesucre, ma1tre d'ouvrage délégué
agissant conjointement et solidairement,
. ~ et d'autre part, HVA/ENCO/BV, société de droit hollandais,
ayant son siège à Amsterdam et les ateliers belges réunis, (ASR)
société anonyme de droit belge ayant son siège en Belgique, agissant
conjointement et solidairement en tant qu'entrepreneur.
Dans le cadre de ce contrat, il a été ccnfié à l'entrepreneur
général, l'association HVA/ENCO/SV/ABR, des prestations de deux types
différents :
a. '- La fourniture "clés en main"
D'une usine, d'une capacité nominale de 4.000 tonnes de
cannes par jour, avec toutes les installations annexes et une zone
industrie~le périphérique.
- Des installations nucessaires à un réseau d'irrigation pour
4.200 hectares nets de plantation.
.../ ...

-
90 -
b. - La ma1trise d'oeuvre
- L'aménagement de 5.200 hectares de plantation de cannes
à sucre,
- la création d'un réseau de routes et piste,
- L'exécution d'un programme de construction de l'infrastruc-
ture nécessaire à l'exploitation du complexe, à son administration et
à la vie du personnel,
- La passation des marchés relatifs à la fourniture de maté-
riel agricole et d'habitation.
Le contrat de r~alisation du complexe prévoyait la mise en
route de l'usine le 1er décembre 1979.
Contrat de gestion et de formation
Ces contrats furent signés entre Sodesucre et HVA interna-
tional/BV, respectivement le 5 avril 1977 et le 23 juin 1978. Ils
furent dénoncés par la Cote d'Ivoire et resiliés.
c. - Les principaux partenaires
Clés en main
Association HVA/ENCO/ABR·
Sous-traitants
- Génie-civil: Dragage & travaux publics R.C.I.
- Montage : DENETD
KENYA
- Réseaux électriques : SIDELAF
R.C.I.
- Réseaux en terres d'irrigation
SOCEA
R. C. r.
...l' .. .

-
91
-
ct)
Les fournisseurs
Ceux-ci ont été choisis compte tenu des contraintes finan~
cières et en fonction de la nécessité d'une standardisation sur l'en-
semble des complexes.
Usine-zone industrielle
Moulins
BUCKAU-\\"JDLF
R.F.A.
Turbines
\\rJORTH rNGTor~
France
Chaudières
DENAEYER
Belgique
Turbo-alternateur
ACEcrs rEr;IEr~S
Gelgique/R.F .A.
Electricité
ETE
Belgique
Régulation
SCH LUI"1B ERGE R
France
onc FrSCHER
Appareils de pesage
TELEDO
Belgique
Clarification et
Filtres
NOBEL5 HUBERT
Belgique
Centrifugeuses à sucre
F.C.B.
France
Réseau en terre
pmn A ~'lOU SSOIIJ
France
Réseau de surface
DUNLOP
Royaume-Uni
Pompes
STORK
Pays-Bas
Diesels
DYNAF
Pays-Bas
Equipement électrique
HEEr'1AF
Pays-Bas
Ma1trise d'oeuvre
- Ma1trise d'oeuvre
Association HVA-ENCO/ABR
.../ ...

-
92 -
- Entrepreneur :
Préparation des terres
DRAGAGE & TRAVAUX PUBLICS
Routes et pistes
DRAGAGE &.TRAVAUX PUBLICS
Habitat/Hébergement/VR
NON ENCORE ATTRIBUES.
d. - Les fournisseurs
59
Tracteurs 70/75 CV
r·1ASSEY FERGUSSON
France
40
Tracteurs 90/95 CV
FORD
Angleterre
16
Tracteurs 165 CV
CAr'1ECO
U.S.A.
·14
Récol teuses
CL AAS
R.F.A.
66
Remorques
r~/EDA
Hollande
2
Chargeuses
CA~1ECO
U.S.A.
Engins lourds
CATERPILLAR
U.S.A.
e. - Financement
Les établissements bancaires ci-dessous d'une part, et la
Cote d'Ivoire d'autre part, ont siQné des accords de financement des
travaux du complexe le 4 avril 1977 : ce sont :
Etablissements bancaires
r~ontant du financement
- Banque.européenne de crédit (BEC)
= 15 millions d'eurodollards
- Aldemène bank nederland
(ABN)
= 180 millions de florins
- Société générale de banque (SGB-SA) = 2 milliards de francs belges
- Société générale de banque (C. 1.)
=
2,5 milliards de francs CFA
.../ ...

-
93 -
PROGRAMME DE REALISATION
Tableau nO 14 : Le planning de mise en oeuvre du projet se présente
comme suit :
(
·
)
\\
(
'.·
Surface totale'(ha)
)
.:-------------~------------------~-----------------------)
Année
·
.
.
)
~
: Superficie
Surface :
)
(
: plantée e t :
usine,
:
Total
)
calendaire
: pr~te à
:
villages,
:
1
: plantée
: de service
: par année
:
cumul
l
: ~tre
: infrastructures
:
:
-------------:-------------":------------------:------------:----------
·
.
.
.
1977
28
22
50
50
~
1978
941
109
1.050
1.100)
1979
2.010
40
t
j
1980
L.167
13
5.330
1981
896
9
905
6.235
~(
l
1982
458
7
465
6.700
)
TOTAL
6.500
200
~
~
(------'--------"-------~-----'-----)
Compte tenu d'un cycle de 4 coupes (cannes vierges et 3 re-
pousses successives) et d'une superficie nette plantée de 5.800
ha,
la superficie à replanter annuellement, en régime de croisière, sera
de 1.450' ha.
Source
Etude de préfactibilité.

-
94 -
BESOINS EN PERSONNEL
Il est prévu que l'aménagement préalabre du terrain sera
sous-traité à des entrepreneurs de la place. Les emplois induits, à
l'occasion de ces travaux, ne seront donc pas pris en compte.
Le projet se traduira en définitive, par la création de
5.364 emplois
dont
3.543
emplois permanents
et
1.821
emplois saisonniers
L'effectif du personnel d'encadrement et de la main-d'oeuvre
évoluera somme suit :
(
: :
~
'l,Campagne : Personnel : Personnel: Total j
:
permanent
:
saisonnier:
-------------:-------------:-------------:-------------
1977-78
260
260
l
1978-79
1.017
1.017
)
1979-80
2.550
1.604
4.154
j
1980-81
3.270
1.437
4.707
)
~ " 1981-82
3.543
1.821
j
~ et suivantes
----~----~---_--:._----)
La structure des emplois créés sera la suivante
- cadres sup~rleurs
(catég. Pl, P2, P3)
32
Il
moyens (catég. 1'11, r~2, t'13 et employés)
97
Il
d,'exécution (catég'. L, 2, 3)
596
- Main-d'oeuvre d'exécution
2.818
Il
Il
saisonnière
i. (32 J,
Total
5.364

-
95 -
CONCLUSION PARTIELLE
Comme mentionné plus haut, la décision pour la Cote d'Ivoire
de produire du sucre visait à satisfaire l'autoconsommation. Depuis
1980, la Cote d'Ivoire s'est lancée dans le commerce du sucre vers
l'extdrieur. en doit par cons~quent distinguer trois phases dans
l'histoire du plan sucrier ivoirien, car ce changement de situation
est lié à un certain nombre de facteurs.
En effet, dans les années 1970, l'éccnomie ivoirienne était
en pleine croissance et cette croissance avait donné lieu à l'appella-
tian "~1iracle Ivoirien" de la part de certains observateurs. Nul ne
pouvait encor.e imaginer dans l'immédiat les effets de la crise écono-
mique actuelle (1985) (1).
Dans le m~me temps sur le marché mondial, il y avait affole-
ment et spéculation sur le cours du sucre. De 50 F CFA/kg en décembre
1973, il a atteint le cours record de 300 F CFA fin 1974.
Et comme par enchantement en 1974, le Président de la Républi-
que effectua, pour la premi8re fois depuis 1969, une tournée dans les
régions Nord et Ouest de la Cote d'Ivoire, régions "défavorisées" en
comparaison au développement du reste du pays. Aussi et surtout pour
les dirigèants, "les inégalités Nord-Sud devenaient politiquement
insupportables. Parallèlement on comnence à chercher, en dehors de
l'économie de plantation du sud, d'autres axes de développement" (2).
C'est dans ce contexte politique et économique qu'en
décembre 1974, à Séguéla, le Chef de l'Etat annonça la réalisation
immédiate d'un gigantesque programme sucrier de plus de 10 complexes
p our la Cote d'Ivoire. Et c'est dans cette nouvelle foulée que les·',
(1) Il semble que la crise soit passée depuis fin 1985, d.'e'près le
messa~e du Prusident de la République à l'occasion de la f~te
du nouvel an.
(2) C. Aubertin CP CIT p. 37.
.../ ...

-
9 6 -
études de prospection et d'identification de site des complexes de
Fer ké II, de Ke t Lo.l a-itar ab ad Laaso , Dorotou, Zuénou l a , Sérébou et
bien d'autres régions susceptibles d'~tre les lieux d'implantation
furent entreprises.
Ainsi donc de 1974 à 1980 six complexes sucriers fonction-
naient déjà sur les douze prévus pour l'horizon 19850 C'est également
de cette décision du Président que naquit l'idée d'exporter le sucre
ivoirien. Le second fait marquant de ce plan sucrier est qu'en 1978,
l'Etat prend la décision de limiter le nombre des complexes à six,
et cela suite à une ~tude révélant la surfacturation des coûts de
construction des complexes.
Enfin et surtout nous assistons maintenant à la réduction
du nombre de crs cornp Lexes (doux sont déjà dissous et deux autres
pourraient subir le m~me sort si l'on s'en tient au r~cent rapport
des experts de la banque mondiale).
En ce qui concerne lE complexe de Zuénoula, il ressort des
études techniques que la zone est globalement propice à la culture
de la canne.
La preuve en es t que des aménagements y sont entrepris ou
prévus. Il s'agit notamment de l'agrandissement du périmètre existant
et de la.rjcente création de l'agGlomérerie pour la fabrication du
sucre en carreaux. Mais son impact socio-économique reste à prouver
au niveau du département au vu des objectifs généraux du plan sucrier.

-
97 -
DEUXIEr-'IE PARTIE
LES EFFETS INDUITS DU COMPLEXE DE ZUENOULA
ET LES PERSPECTIVES D'AVENIR DE LA SODESUCRE
A entendre et à écouter les ressortissants du département
de Zuénoula et plus particuli8rement la population qui a fait l'objet
de nos enqu~tes, on est tenté de conclure que le complexe n'a pas
produit d'effets notoires sur la région. Les autorités politiques et
administratives de la région, les responsables de la Sodesucre et du
complexe ne disént pas non plus le contraire.
Il ne serait cependant pas réaliste de s'en tenir uniquement
à ces affirmations (qui ont besoin d'~tre vérifiées concrètement sur
le terrain) mais plut~t d'aller au-delà des humeurs et inquiétudes,
des plaintes et souhaits des uns et des autres pour scruter la vérité.
C'est pour cette raison que nous estimons que l'apprécia-
tion des effets induits doit se faire en tenant compte à la fois des
zones d'influence prochesdu périmètre sucrier et au-delà d'un rayon
de 10 km de la ville de Zuénoul a, Cette partie s'articule donc autour
des réalisations sociales faites (à l'occasion de la création du
complexe), de la campagne sucrière, de l'analyse des effets induits
et des perspectives d'avenir de la Sodesucre.
Chapitre lU
LES EFFETS INDUITS DU CCMPLEXE
A - LES REALISATIQNS SQCIALES DU CCMPLEXE
Comme nous le disions plus haut, la création du complexe
a nécessité la mise en place d'un certain nombre d'infrastructures
nocessaïres à son fonctionnement et à son progrès dans la région.
Le complexe étant situé à 25 km de la ville, une piste d'une
. . .1. . .

.1
-
98 -
excellente qualité le relie à cette dernière. Elle constitue l'unique
voie de pénétration contr~lée par une barrière située à une dizaine
de kilomètres de l'usine (1).
Sur le site, le dispensaire du complexe dirigé par un
médecin chef accueille, en plus des travailleurs et leurs familles,
les autorités administratives locales (dans la mesure où la Sodesucre
est mi~ux équipée que l'h~pital du département). En plus du dispensaire,
la maternité du complexe dotée de huit lits enregistre régulièrement
en moyenne dix naissances par mois. Il s'agit surtout des épouses de
travailleurs (employés et ouvriers) qui y viennent pour accoucher (2).
La Sodesucre a également construit deux cantines (l'une
pour les cadres et agents de ma1trise et l'autre pour les employés et
ouvriers) pour les travailleurs permanents. Ces cantines sont appro-
visionnées (parfois) en légumes, poulets et viande de mouton de
ses champs et fermes personnels (3).
Les enfants du personnel fréquentent une école primaire de
treize classes et un jardin de quatre classes. Parmi les réalisations
existant sur le site, l'habitat constitue l'un des points faibles de
la sucrerie de Zuénoul a. Plus de la moitié du personnel vit en ville.
Quelques responsables résident à Rolandfla (4), un cadre
paisible (de 12 villas et de 22 studios) doté d'une magnifique piscine
(1)
Il n'~xiste pas d'autres voies d'accès parce que selon les res-
ponsables du complexe, cela exposerait la Sodesucre à des risques
de vols et incendies.
(2)
La plupart des épouses des cadres accouchent dans les grands
centres urbains (Bouaké, Abidjan, Daloa).
(3)
La Sodesucre fait un petit élevage de poulets et de moutons et
dispose
d'un jardin mara1cher.
(4)
Rolandfla: village de Roland, l'ancien D.G.A. (Yves Roland)
du complexe.
.../ ...

-
99 -
malheu~eusement peu fréqu~nt6e. Les employ~s et ouvriers qui bénfi-
cient d'~n.logement de la part du complexe sont répartis respective-
ment entre le camp mauricien (22 studios) et le camp qragage (165
chambres), et le camp saty (32 chambres) et le village Gohfla (636
studios).
Dans le domaine de l'animation et des loisirs, la Sodesucre
dispose d'un orchestre, d'une chorale, d'une équipe de foot-baIl et
d'une équipe mobile de projection de films. Elle organise et participe
ainsi aux activités culturelles, sportives et distractives de la région.
pa~s le souci de briser le poids de l'isolement par des ren-
contres fréquentes, la direction du complexe a initié et "encouragé
la création de trois amicales du personnel de la Sodesucre. C'est ainsi
qu'on note l'existence de l'Amicale des Cadres (AC.SO.lU.), l'Associa-
tion des Fgmmes (A.S.l.) 'et l'Amicale des Agents de Ma1trise (A.M.l.U.).
Le siège de ces amicales est le foyer de Rolandfla doté d'un salon
meublé et équipé d'un poste téléviseur couleur et d'un équipement
vidéo-cassette, d'un night-club et des jeux (demës, awalé, ludo, bil~
lard etc ••• ) •
. Notons enfin qu'à l'attention des travailleurs, la direction
a fait construire une bibliothèque qui dispose de 1.168 ouvrages (dont
171 ouvrages techniques pour les besoins de la formation interne et
997 ouvrages de loisirs). Elle est peu frég~entée. Même ceux qui con-
tractent des pr~ts à domicile ne terminent pas ou ne rendent pas les
livres dans le délai prévu. Tous affirment ng pas avoir le temps.
matériel de lire.
Au titre des avantages accordés aux travailleurs, la Sodesucre
fait beaucoup pour le personnel dans le cadre de la formation et du
perfectionnement. La quasi totalité des agents, du moins ceux qui
occupen~ des po~~~s techniques ou exercent des' techee de gestion

-
100 -
nécessitant une formation, bénéficient gratuitement d'un stage ou
d'une formation soit hors du pays, soit au Centre Professionnel de
Technologie Sucrière de Bouaké (C~P.T.S.) ou dans toute
autre
structure
"appropriée
existant en Ctlte d'Ivoire. Ces actions de
formation unanimement appréciées par les responsables du complexe
et par tous les employés et ouvriers que nous avons intérrogés
s'adressent uniquement au personnel permanent. Dans le m~me sens du
social, tous les cadres et un bon nombre d'agents de ma1trise dispo-
sent d'une 'voiture de service. Les autres travailleurs sont transpor-
tés par les cars du complexe dans la mesure où aucun vuhicule étranger
ou de transport en commun n'a le droit de pénétrer sur le complexe.
L'impressionnant parc automobile du complexe a été récemment "étoffé"
par des véhicules en provenance des complexes dissous (Katiola et
Sérébou) •
Tel est donc l'essentiel des actions sociales de la Sodesucre
à Zuénoula en dehors de la période de campagne sucrière.
B - LA CAMPAGNE SUCRIERE 1984-1985
La camapagne constitue le moment d'intenses activités de
tous les complexes. Tout le personnel et toutes les machines sont
mis en alerte et l'usine tourne 24 heures sur 24 heures. L'effectif
des travailleurs passe du simple aU double pour certaines sucreries.
C'est le te~ps de la transformation de la canne en sucre. A Zuénoula,
la campagne démarre généralement au mois de novembre pour finir vers
fin février ou début mars selon l'importance des superficies de cannes
à récolter (seule la première campagne s'est déroulée du 14 janvier
au 15 mars 1980). Avant chaque campagne la direction du complexe et
les autorités administratives et politiques procèdent à une vaste
. . .1· ..

-
101
-
campagne d'information, de sensibilisation et de recrutement dans
presque.tous les villages du département afin de recruter des cou-
peurs de canne • Ce sont le Secrutaire Gén8ral de la Sous-Section
.
du PDCI-RDA, le responsable chargé de recruter les temporaires et
,
quelques chefs d'équipe qui sillonnent la région pour effectuer
cette mission auprès des chefs de village
chefs de canton et chefs
de tribu. Cette anné a elle '8 commencé le 11 octobre 1984. Toutes les
campagnes se déroulent selon ce m~me schJma classique conformément
auX instructions et notes de service élaborées par la direction.
Dans le cadr-a d'une étude de cas, nous étudions l'organisation et le
déroulement d'une campagne type, celle de 1984-1985 à laquelle nous
avons participé en tant qu'observateur. Elle s'est effectuée du
19-1l~1904 au 24-02-1985 selon les dispositions et modalités pratiques
envisagées par la direction du complexe.
1. -Les objectifs de la campaone 1984-1985
La sixième campagne sucrière de Zuénoula (1984-1985) a
démarré avec un léger retard le 19 novembré 1984 au lieu du premier
novembre Comme initialement prévu par ,le calendrier.
En dépit de la campagne de sensibilisation et de rècrute-
ment efPectuée dans le département, seule 287 coupeurs de canne sur
1.000 program~és sé sont présentés à la date du 1er novembre 1984.
La direction du complexe a aussitOt dépêché des cars à Ferké et à
Korhogo àla recherche des 700 autres coupeu~s. Là aussi le nomb~e
n' a t ouj our s pas été at.t aLnt et la
campagne a . demarré
avec un
effectif de 600 coupeurs (1), plus une- centaine de glaneurs bien que
(1)
Il est difficile de dé t armLner avec précision le n crnb r e de,
coupeurs par jour surtout vers les fins de mois où le chiffre
tornlHl fcncilOlI1Gnt En dlJGSOUS de la moitié.
. . .1.· ·

-
102 -
Tableau nO 15:
ETAT DU PERSONNEL TEMPORAIRE
RECAPITULATIF - CAMPAGNE 1984/1985
DU
18/11/84
DU
01/12L84
DU 01/01/85
DU
01/02/85
Sces
AU
30/11/84
AU
31/12/84
AU 3l/01/0~
AU
25'02/85
,
H
F
H
F
H
F
H
F
D.C
02
D.F.C
35
-
38
-
38
-
38
-
D.U
230
03
252
03
252
03
253
Il
D.A.R.H
32
01
30
01
33
01
33
01
D.P.
885
107
1207
141
2044
289
1857
163
.
1184
III
1527
145
2367
293
2181
175
. TOTAL
1 295
1 672
2 660
2 356
H = 91 %
H = 91 %
H = 89 %
H = 93 %
%
f =
9 %
F = 9 %
f = 11 %
f =
7 %
..
Source : Document Sodesucre (D.A.R.H. du complexe)
On remarque sur ce tableau qu'en début de campagne il y 8 peu
de travailleurs (1.295 temporaires). Au fur et à mesure qu'on avance dans
le temps, ce nombre évolue jusqu'à atteindre 2.660 en janvier et 2.356
en février. Cela signifie que l'intensité des activités de la campagne et
l'adaptation des manoeuvres se situent à cette périDde de traite où les
paysans marquen.t une relative pause. La baisse légère des effectifs en
février annonce la fin de la campagne.

'1
COURBE D'EVOLUTION DE L'EFFECTIF
-
103
DU PERSONNEL TEMPORAIRE CAMPAGNE 1984/1985
2 660
2 600
2 356
2 300
r
1 672
1 500
l-
l 295
1 00 0
187
0
10
~
Octobre 84.
Novembre 84
Décembre 84
Janvier 85
février 85
. ..

-
104 -
ce nombre ait évolué vers la fin de la campagne (on pouvait compter
750 à 800 coupeurs en février 1985)(1).
La surface de canne à récolter était de 4.560 hectares. Le
rendement a été évalué à 50 tonnes de cannes à l'hectare (TC/HA)
pour une production globale de 227.COO tonnes de cannes dont 181.600
tonnes de cannes à couper manuellement.
Le rendement moyen d'un cou~eur est de trois tonnes de cannes
par jour pour un apport journalier moyen de 3.000 tonnes à l'usine.
Théoriquement donc, le nombre de coupeurs est estimé à 1.000 personnes
par jour. Leur encadrement est assuré par des chefs d'équipe à raison
de 30 coupeurs par équipe (2 ).
2. - les conditions de travail
A la différence des travailleurs permanents qui passent
avec la Sodesucre un contrat à durée indéterminée, les coupeurs de
cannes et les chefs d'équipe sont des agents journaliers recrutés
pour la durée de la campagne. Cela est valable pour les travailleurs
des travaux· généraux.
2.1. - Le logement
Les coupeurs et chefs d'équipe recrutés sont logés en priori-
té dans les villages construits à cet effet. Les villages en question
sont des groupes de dix batiments comportant 8 pièces chacun sans le
moindre confort et où s'entassent 5 à 6 personnes par chambre. Il
s'alJit essentiellement de villages-dortoir perdus dans les fermes et
dépourvus de toute distraction et de losirs. L'isolement, le calme
relatif et .l'obscurité qui les caractérisent font que la plupart des
(1)
Cette affluence s'ex~lique ~ar le fait qu'à cette période les
paysans sont moins occupés par les travaux champêtres.
(2)
Ce nonbr c neut atteinrlrp rnrfpi.r; ,~!j \\foirr sr CnUIHlUl'!S f]élL1 êClUil3ih
.../ ...

-
1D5 -
travailleurs se couchent au plus tard à 19 heures 30 mn. Cela a
constitué un gros handicap dans la mesure où il nous était impossible
de nous entretenir avec eux au-delà de 19 h30 mn dans leur lieu de
résidence.
2.2. -
Le transport
Il n'existe pas de transport de coupeurs de canne de la
ville de Zuénoula vers les champs. Ceux qui sont transportés sur les
fermes sont ceux dont les lieux d'habitation sdnt éloignés des
champs de canne. On les ramène dans les villages à la fin des tra-
vaux. Dans la plupart des cas, la grande majorité des travailleurs
rentrent à"pied au village. Soit parce que le car qui les transporte
rentre plus t~t, soit parce que les travailleurs terminent leur tache
très tard. Dans tous les cas tous les coupeurs ne finissent pas leur
tache en m~me temps et le car ne ramène que ceux qui sont pr~ts à
rentrer~ Il n'est pas rare de renconter des groupes de coupeurs (à
19 heures) soit en train de rentrer au village à pied, soit en train
d'attendre le dernier car qui doit venir les chercher.
2~3. - Horaire de travail
LB système pratiqué est la journée continue (7 h à 16 h).
Mais pour les manoeuvres coupeurs, l'heure de démarrage de la coupe
est fixée à 6 heures du matin. De 5 heures à 6 heures, tous les
encadreurs et coupeurs doivent ~tre sur les lieux de travail. Le
travail de coupe est à la t~che. Ces heures sont valables aussi bien
pour les coupeurs que pour les glaneurs, conducteurs d'engins et les
chauffeurs chargés de les transporter. Dès 4 heures du matin tous les
travaiileurs attendent regroupés aux lieux de ramassage où certains
d'entre eux somnolent débout, écrasés par la fatigue et le sommeil •
. . .1. . .

-
107 -
O
.
J..'
d'
f
rg8nlsa~lon
une
er~e
ChEf d8 Production
·1
1
Service
Chef de Ferme
Service
r'1otori sation
Irrigation
r-
Assistant
Chef Chentier
Chef Chantier
cultere
irri ation
Chefs
environ
environ 200 manoeuvres
. 1'-----
-
Source
document Sodesucre siàge~
Le maximum de travaux d'entretien s'effectue dans les six mois qui
suivent la coupe des cannes. La récolte s'étalant de novembre à avril, c'est
dire que les travauX culturaux s'étendent tout le long de l'année. l'irriga-
tion est conduite de façon permane~te d'octobre à juin. Elle fait place pen-
dant la saison des pluies à des tr~vaux de drainage. QUant à la récolte, elle
est précédée par le brOlis des canQes qui élimine les feuilles et améliore
les rendmnents de 18 coupe. Celle-~i Dst effDctu~e en partie manuellement
,
par plus de l.OOO coupeurs, et ausii par des r~colteuses mécaniques, impres-
!
sionnants engins automoteurs qui a$surent à la fois la coupe, l'élimination
. . .1. . .

Une équipe d'andainage au trav~il
108
Evacuation parcane-loader et remorque

-
109 -
des feuilles et des extrémités des tiges et le char~~ment des cannes
tronçonnées dans ses remorques à déchargement latéral. Les ppérations
de coupe et de transport doivent se faire dans les moindres délais
car la teneur en sucre se dégrade au-delà de 24 heures.
2.6. - T~ches et rémunération
Contrairement auX années passées où la t~che était au rende-
ment et, dans le souci d'éviter des incompréhensions, la direction du
complexe ~ fixé la têche de la campagne (1984-1985) à deux lignes (1)
par coupeur, à raison de 900 f CfA. Une prime de 100 f est attribuée
aux coupeurs qui terminent lEur t~che, étêtent correctement la canne,
font une coupe rase (à même le sol) et font un andainage discontinu
correct. To~te t~che non terminée est considérée comme nu11è. La re-
prise n'est pas autorisée le lendemain. Le chef d'équipe est rémunéré
à 1.500 F ,CFA par jour, mais ne peut ~tre point' (2) que si 25 coupeurs
sur 30 terminent leur t~che dans son équipe. La présence des 30 cou-
peurs par équipe est obligatoire jrurnellement. Rares sont cependant
les chefs qui parviennent à aligner quotidiennement 30 coupeurs dans
une semaine. Tout coupeur qui ne termine pas sa t~che trois jours
successifs voit son contrat r8silié pour incompétence. Enfin deux
absences consécutives par semaine sans justification valable entraine
le licEnciement automatique du coupeur.Dans la plupart des cas, les
licenciés ne réclament pas leurs droits. La Sodesucre ne les leur rend
pas n on plus.
(1) Une ligne de cannes équivaut à 300 mètres de cannes à couper
soit 6CO mètre au total par jour.
(2) Pointer signifie marquEr une croix en face du nOm du coupeur indi-
quant que celui-ci a accompli sa t~che dans les conditions éxigées •
. . .1. . .

-
110 -
2.7. - La qualité de 12 coupe
La qualit~ de la ccupe est de rigueur
tous les coupeurs
sont tenus de respecter strictement les consignes relatives à la
qualité de la coupe et de l'andainage à savoir:
Couper les cannes au ras du sol, étêter celles-ci en ne lais-
sant pas d'entrenoeud sur le bout blanc. Cette t~che fait l'objet d'une
double v0Fification ; d'abord de la part de l'encadreur et ensuite de
la part du chef de chantier. Elle constitue souvent l'objet de vives
tensions dans la mesure où elle conditionne le pointage. Elle fut à
l'prigine d'une altercation qui a opposé le chef de chantier et les
coupeurs le 29 décembre 1984 sur la ferme B8.
3. - LES MOYENS DE TRAVAIL
La Sodesucre met à la disposition des coupeurs et des enca-
dreurs des machettes et des limes n,ui sont récupérées en fin de cam-
pagne. En cas de perte le prix du matériel est retenu à la source sur
le salaire du coupeur (~.OOO francs par matériel). En cas de démission,
le matériel (machetteset limes) reçu doit être rendu, dans le cas
échéant, le prix de ce matériel est retenu sur le salaire du mois à
la source.
G~néralement, c'est la totalité du salaire qui est retenue
étant donné que ceux qui sont licenciés ou d8missionnaires partent
avec le matériel et ne r~clament pas leur salaire.
3.1. - La procédure de pointage
Le pointage se fait théoriquement sur des cartes individuelles
de pointage. Dès la t~che terminée, le chef d'équipe contrOle la qualité
du travail et fait 18 pointage en conséquence. En rualité il s'agit
/
... ...
/

-
111
d'un cahier de présence Qui porte les noms des travailleurs et la date
du jour.
- Bonne coupe + andainage
900 F + 100
= 1.000 F
- CoUpe médiocre + andain age
900 F
=
900 F
Le pointage fait par le chef d'équipe peut être refait par le chef de
chantier s'il estime que la t~che n'est pas correctement exécutée.
Ce deuxième contrOle ne se fait jamais sans heurts. Il se déroule le
plus souvent en l'absence des coupeurs qui découvrert leur zéro le
lendemain matin alors Qu'ils avaient été pointés jU8t~ la veille.
3.2. - La paie
La paie constitue un point de tension et de rupture entre
la Sodesucre et ses travailleurs saisonniers. Les seconds accusent
la première d'opérer abusivement des retenues sur leurs salaires.
,
A la différence des permanents qui perçoivent un salaire régulier, les
saisonniers sont payés en fonction de leur prestation et de leur ren-
dement. Officiellement le salaire mensuel du plus petit employé varie
de lS.OOO à 2S.000 F, celui des agents de ma1trise de 60.000 à lSO.OOO F
et celui des plus hauts cadres de 2S0.000 à SOO.OOO F (1). La paie se
fait en général à la fin de chaque mois, mais elle peut ~tre reportée
du 1er au S du mois en fonction de la trésorerie. Ce retard est sou-
vent mal perçu par les saisonniers et il n'est pas rare d'entendre
"je veux mon argent, nous avons faim".
Les informations relatives à la paie sont données au personnel
avant la fin de chaque mois. La paie est un domaine assez sensible où
les trèvailleurs n'hésitent m~me pas à exhiber leur bulletin de paie
au moindre visiteur (dès qu'on aborde le problème de salaira) soit
pour annoncer qu'ils sont abusés et dupés, soit pour manifester leur
(1) Cette grille de salaire appliqué sur tous les complexes date de 1980 •
. . .1· ··

-
112 -
mécontentement ou leur désapprobation. Tout visiteur de la Sodesucre
qui s'intéresse aux travailleurs en période de paie est considéré
comme un porte-parole ou un messager. C'est la grande période de
plainte, de révolte et de résignation.
3.3. - Le ravitaillement en eau
Il avait été demandé à chaque travailleur de se munir d'un·
bidon de quatre litres pour sa consommation personnelle en eau sur le
chantier. Cètte demande n'a pas abouti pour la simple raison qu'il est
difficile de trouver des bidons en nombre suffisant. Deux citernes
assurent néanmoins le ravitaillement en eau. Elles passent une fois
sur chaque chantier et, tour à tour chacun s'agenouille devant le
robinet pour boire dans le creux de sa main. Les villages de coupeurs
ne disposant pas de puits sont également ravitaillés par les citernes.
Pour permettre aux coupeurs de s'approvisionner en vivres,
une sortie est organ1sée à Zuénoula par le service de transport une
fois tous les quinze jours. Elle a lieu en ~énéral le samedi à partir
de 15 heures. L'heure de retour est fixée à 22 heures.
4. - LES SOINS MEDICAUX
Les coupeurs malades ou blessés reçoivent les soins médicaux.
Pendant le repos médical ordonné par le médecin chef du complexe, le
coupeur ne perçoit pas de salaire compensatoire. La société assure
une permanence médicale sur les chantiers de coupe pendant toute la
durée dè,la campagne.
Ces dispositions sont très mal perçues aussi bien par les
.... ,...
travailleurs que dans les villages. Ils ne comprennent pas pourquoi
celui qui se blesse pendant le travail ne perçoit rien en compensation.
Le plus souvent ceux qui se blessent rentrent chez eux sans argent.
· ..1...

-
113 -
Pour les coupeurs, la seule solution, c'est de rentrer chez soi en
cas de blessure dans la mesure où l'intéressé n'a pas d'argent pour
se nourrir et qu'on ne lui donne rien. Tous ceuX qui retournent chez
eux dans ces conditions en gardent un souvenir douloureux qu'ils
répandent au niveau de leur région •
. "Non seulement il n' y a pas d'argent à la Sodesucre, mais
elle refuse de soigner les blessés" (1).
5. - LA NOURRITURE
Tous les travailleurs temporaires sont chargés de se nourrir
eux-mêmes. La société ne prévoit aucune disposition dans ce cas. Mais
au début de la sixième camapagne 1984-1985, et surtout face aux plaintes
et revendications des travailleurs, la direction leur a fourni du riz
pour le mois de novembre (un sac de 60 kg pour six personnes). Le prix
de ce riz est prélevé sur les premiers salaires à la source.
Le riz est fini deux semaines après la livraison. L'expérience
n'a pas été renouvelée malgré de nouvelles réclamations. Tous les tra-
vailleurs saisonniers souhaitent unanimement que cela soit institué
afin de leur donner l'occasion de se nourrir en attendant la paie.
Telles sont en gros l'essentiel des conditions dans les-
quelles s'est effectuée la sixième campagne sucrière de Zuénoula,
Elle s'est soldée par une production globale de 17.191,50 tonnes de
sucre soit l'équivalent de 211.050 tonnes de cannes. Elle nous a donné
l'occasion de découvrir davantage les autres effets directs ou iodi-
rects du complexe au niveau du département.
(1)
Cette phrase est de Mr Jean Brovou, chef de canton de Manfla,
à l'occasion de l'entretien du 30 d8cembre à son domicile de
j'.1aminigui.
. . .1. . .

-
114 -
C - L'IMPACT DU COr~PLEXE EN DEHORS DE LA CAMPAGNE
Les autres effets concernent essentiellement tout ce qui
à l'occasion de la présence du complexe dans la région, affecte
directement ou indi~ectement l'existence quotidienne de la population.
La ville de Zuénoula conna1t en effet une certaine anima-
tion depuis la création de la Sodesucre. Sa population est passée,
d'emblûe de 7.000 en 1976 à 14.000 habitants en 1980 et ne cesse de
cro1trè, (1).
Le petit commerce s'est installé un p~u partout dans la
ville, plus particulièrement auX abords immédiats du marché et du
cinéma. Déjà au début des travaux de construction, la Sodesucre avait
préfinancé ou m~me contribué à achever certaines maisons de particu-
liers afin de pouvoir loger provisoirement ses cadres. Ce fut le cas
de l'hOtel Marahoué et quinze villas du quartier résidentiel qu'elle
a entièrement financés (et dont deux sont encore occupées par des
assistants techniques).
Cette augmentation de la population a entra1né l'augmentation
du coat de la vie. D'après la population enqu~tée, ce sont surtout les
denrées alimentaires qui coOtent cher en période de soudure. Le prix
de trois tubercules d'igname varie entre 1.000 et 1.500 F CFA. Le
moindre régime de banane est passé désormais de 800 à 1.200 F voire
1.500 F CFA. Il en est ainsi du riz local dont le kilogramme coote
200 F, ce qui est excessif par rapport auX prix officiels appliqués
par le Ministère du Commerce (160 F). Cette cherté des denrées aurait
dO être compensée par l'abondance relative du poisson frais en pro-
venance du lac de Kossou et la viande de gibier appelée "viande de
(1) Ra8port de mission des experts de la coopération du Ministère
F'rança î.s de la Coopération : les complexes sucriers, pOIes de
développement pour la zone des savanes
juin 1980, p. 36 •
. . .1· · ·

-
115 -
brousse" qui approvisionnent les maquis et restaurants de la ville) ,
si le marché était bien organisé. Il convient enfin d'ajouter à cela
la hausse du prix des effets vestimentaires et du logement. La moindre
pièce africamment appelée "entrée-coucher" (1) varie deS.OOO à 10.000 F.
Ce sont surtout les employés et les ouvriers qui sont con-
frontés à ce problème dans la mesure où leur indemnité de logement
demeure inférieure au prix du loyer (2). Quant aux cadres, ils peuvent
s'offrir de. luxueuses villas à 40 ou 60.000 F.
Aux alentours de l'usine, les activités se limitent à une
dizaine de restaurants africains détenus par les épouses de travail-
leurs et quelques kiosques à café ou à boisson. Bien qu'une importante
population tire son revenu de ces activités, il est difficile voire
impossible d'évaluer leur gain en valeur absolue faute de comptabilité.
D'une manière générale, les effets induits du complexe ne canblent pas
pour le moment les espoirs qu'on y avait placés. Cela semble se vérifier
sur les autres complexes. C'es pourquoi nous allons tenter de les
analyser brièvement dans les pages qui suivent.
D - ANALYSE DES EFFETS INDUITS
En fait d'analyse, il s'agit d'étaolir une relation entre
les objectifs du plan sucrier et leur application effective, c'est-à-
dire que l'on doit aller au-delà d'un simple constat afin de mieux
apprécier de manière objective à partir de ce qui existe, ce qui a été
fait concrètement par rapport à ce qui doit ~tre fait.
(1) Pour R. Deniel, il s'agit d'un logement d'une pièce, d'une surface
d'environ 10 m2 , sans le moindre confort. Le loyer est eu minimum
de 2.500 F par mois.
R. Deniel, La Sodesucre de Sérébou Comoé l' histoire de quelques
malentendus
INADES 1980.
(2) Les primes de logement varie de 5.000 à 20.000 F pour les employés
de,bureau et ouvriers qu~lifiés, de 20 à 60.000 r pour lee egents
d8~ettr~pe et de gD ~ l~D~OPO f peur lai Cicrus.
···1 ...

·'
-
116 -
On sait en effet que ce programme sucrier est un acte polit1-
que dont le but est d'apaiser les esprits pour mieux justifier le
choix des projets de développement. Il doit jouer de ce fait un rOle
de récupération à l'égard des ressortissants des régions concernées.
Les discours officiels et la presse s'emploient activement à démon-
trer les bienfaits du plan sucrier (1). Ces complexes, généralement
considérés comme un cadeau royal accomplissent bien leur tache de
catalyseurs. Aucune région bénéficiaire ne peut réclamer dans l'im-
médiat une quelconque assistance de l'Etat sans être renvoyée à son
complexe. L'on se soucie peu des problèmes que cet établissement in-
dustriel pose à son environnement scoial. L'essentiel est qu'il existe
en tant que "messie". On ne peut que l'accepter et l'adopter. On doit
par conséquent déterminer sa place dans l'6conomie ivoirienne en
tenant compte de cet aspect politique.
En effet "le programme sucrier a permis au gouvernement
ivoirien de resserrer autour de lui des notables du Nord et une cou-
che de jeunes cadres employés dans les sociétés d'Etat. Ce qui appa-
rait comme "gaspillage" doit être considéré comme une forme de redis-
tribution qui trouve sa justification dans l'équilibre politique
ivoirien. Il est difficile de conclure à une catastrophe économique
lorsqu'apparemment on se trouve devant une réussite politique (et
réciproquement 7)" (2). C'est ainsi que l'on peut dresser ce premier
bilan qui suit
Un bilan encore négatif dans l'ensemble
De tous les objectifs fixés au départ, le désir d'annuler
(1) "Les objectifs sociaux et de production réalisés".
Ministre de l'agriculture et des eaux et forêts dans Fraternits
Matin du mercredi 12 juin 1985
p. 8.
(2)
C. Aubertin
OP CIT p. 129.
. . .1· ...

-
117 -
le déficit sucrier intérieur a été apparemment atteint pour l'ins-
tant (1), les autres étant "r em i s
plus tard". Le complexe sucrier ne
à
constitue pas pour le moment une véritable source de revenu de l'Eta~.
On peut en juger par la masse d'argent qui sort de la caisse de l'Etat
pour subventionner la Sodesucre. Depuis la mise en service de tous
les complexes, la COte d'Ivoire vend aQn sucre à perte. La non compé-
titivité du sucre ivoirien sur le marché international
a rendu son
exportation illusoire.
L'augmentation brutale de son prix sur le marché national
(50 F le kg en 1973 à 300 F le kg en 1974) a entra1né une baisse de
la consommation locale. On peut cependant noter que l'ivoirisation
des emplois se poursuit activement à la Sodesucre. Plus de 80 %des
travailleurs permanents sont nationaux. Néanmoins cette création
d'emplois n'a pu véritablement fixer les jeunes et empècher l'exode
rural. Bien plus, la Sodesucre donne auX jeunes l'occasion et les
moyens de tenter leur première aventure. Elle constitue une étape
importante d'un départ pour la terre promise. Ils ne viennent pas
au complexe pour y rester. La plupart viennent tout juste chercher
leur transport ou une petite somme nécessaire à une dépense ponctuelle.
"Le seul moyen de les retenir est de bloquer leur salaire jusqu'à la
fin du mois" (2) •
. Cette situation est d'autant plus regrettable qu'elle se
verifie sur presque tous les complexes. Cathérine Aubertin fit ce
mème constat à Borotou en 1980. Elle fait remarquer qu'il s'agit d'un
(1) D'après le Ministre de l'agriculture, les importations sont encore
de 6 à 7.000 tonnes pour approvisionner quelques industries devant
utiliser un sucre de qualité export : IDe anniversaire du complexe
de Ferké l - Fraternité-Matin du mercredi 12 juin 1985
page,9.
(2) Cette phrase est du D.G.A. : entretien du Il avril 1985 à 16 heures •
. . .1· . ·

-
118 -
mouvement migratoire de type classique en Cote d'Ivoire : "mouvement
de jeunes sans qualification, attachés à la terre et à la recherche
d'un premier emploi et pour lesquels Borotou ne sera peut ~tre qu'une
étape dans un mouvement du ~ord vers le Sud qui accentue peut-~tre
plus qu'il ne freine l'exode rural" (1).
Dans le m~me sens, remarquons que l'encadrement des paysans
tantsouhait~ est resté lettre morte, du moins pour l'instant. Les
plantations de canne
villageoises demeurent encore à l'Etat de projet.
L'agric~lture vivrière n'a pas non plus été associée à la culture de
canne. L'objectif prioritaire étant désormais de produire du sucre,
le reste peut encore attendre. Il est à noter néanmoins qu'en ce qui
ccncerne Zu~noula, les cadres et travailleurs qui résident sur le site
cultivent 'du vivrier pour leur auto-consommation. Il s'agit surtout
des champs d'igname, de manioc, de maïs et des l~gumes. Aussi, a~t~on
souvent estim~ que les salaires distribu~s permettraient aux popula-
tions locales de faire des· réalisations. Cette réinjection des salaires
n'est pas effective dans la mesure où plus de 70 %des travailleurs
proviennent d'autres r~gions du pays, voire de l'extérieur du pays
(Mali, Burkina Fasso, Guinée). A titre d'exemple, nous avons dépouill~
le fichier central du complexe de Zuénoula en Avril 1985 et en voici
les résultats (2)
(1) C. Aubertin
OP CIT p. 80 •
(2) Pour réaliser ce dépouillement, nous avons pris en compte 4 él~­
ments à savoir :
- le lieu de naissance, l'adresse ~rsonnelle en dehors du complexe,
- la personne à toucher en cas d'urgence et le lieu de résidence
des parents. Ici, nous n'avons pas chercher à les classer en fonc-
tion des différents lieux de provenance, mais nous avons regroupé
dans une même colonne tous ceux qui ne sont pas du département de
Zuénoula et dans l'autre colonne les ressortissants du département.
Néanmoins, le lieu de provenance des travailleurs du complexe fait
l'objet d'une étude très prochaine que,nous avons intitulée:
"Complexe de Zuénoula et mouvement migratoire saisonnier".
Enfin,' ce dépouillement exclut les cadres et agents de ma1trise •
. . .1. . .

-
119 -
- Travailleurs permanents du 01-10-1977 au 01-03-1985
Total ••••••••••••••••••.••.••.•...•.•••••••••••••••.••••••• = 2.016
Rssortissants du département de Zuénoula •••.••.........•••• =
296
1)
296 X 100
2 016
=
15----->7~
Travailleurs temporaires dans la même période (moins les
saisonniers coupeurs, glaneurs et encadreurs).
Total . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . • . . . . . . . . . . =
700
Ressortissants du département de Zuénoula •••••••••••••••••• =
288
2)
288 X 100
700
=
41 ----:>~
Ces résultats prouvent combien le complexe de Zuénoula est
encore' loin de jouer le r~le de fixation, de rétention des populations
jeunes dans la région. Sur le plan des réalisations sociales, beau-
coup de choses restent encore à faire.
Dès le début de son implantation, la Sodesucre mettait de
temps en temps ses camions benne· et SQS machines à la disposition
de la sous-préfecture pour le ramassage des ordures, le nettoyage et
l'entretien des rues de la ville. Cette action s'est arrêtée depuis
1981. La direction du complexe reproche au Sous-Préfet de ne pouvoir
trouver des travailleurs pour le faire. Dans l'ensemble, les rues et
pistes du département demeurent dans leur état d'avant la Sodesucre
et, deviennent plus défectueuses en saison des pluies. Il va sans
dire que l'évacuation des produits agricoles pose chaque année beau-
coup de problèmes aux paysans. "L'état des pistes ne nous permet
malheureusement pas d'aider les paysans à évacuer leurs produits" (1).
(1) Mr Kouassi Patrice, Responsable de la SATMACI à Zuénoula,
entretien du 7 aoot 1985.
.../ ...

-
12D -
L'ouverture des pistes en intercampagne leur rendrait un
grand service. Face au refus manifeste de la part de la 50desucre
d'interve~ir dans ce sens, le chef du village de Zanzra a invité
les siens à ne plus aller travailler sur le complexe (1). Cette
attitude de la direction du complexe se justifie par des raisons de
sécurité. En effet ouvrir une piste entre le complexe et Zanzra ou
d'autres villages pourrait exposer la Sodesucre à des risques de vol
et surtout d'incendie des plantations de canne. Aussi les responsables
estiment que la Sodesucre n'a pas intér~t à se substituer au ministère
des travaux pu~lics dont le rOle est d'ouvrir et entretenir les pistes.
Il en résulte que le complexe est coupé de tout contact extérieur.
Sur le plan scolaire, la région compte parmi les mieux
scolarisées du centre avec un taux de 50 %dans le primaire bien qu'en
état de stagnation préoccupant depuis 1975. Chacun des villages de la
région veu~ avoir son école primaire. On assiste ainsi chaque année à
des constructions d'écoles dans de nombreux villages. Cela pose des
problèmes d'enseignants à Monsieur l'Inspecteur primaire. Ce mouvement
n'est pas suivi au niveau du secondaire. La sous-préfecture de Gohitafla
ne dis~ose pas d'établissement secondaire. Le collège d'enseignement
général (C.E.G.) de Zuénoula est saturé. L'effectif moyen d'une classe
varie entre 65 et 70 élèves. On comprend dès lors pourquoi l'encadre-
ment des élèves laisse à désirer. Tous les rejetons issus de cette
situation viennent aggraver l'exode rural dont souffre la région depuis
plusieurs années.
(1)
En 1983, les villageois ont formulé une demande auprès de la
direction (en vue de l'ouverture d'une piste) par l'interm~diaire
du député. Après le refus de la direction, les paysans ont demandé
à leurs enfants de ne plus se rendre sur le complexe. Cette mé-
fiance est encore très vive.
... / ...

-
121 -
T~bleau nO 16
Situation scolaire du département
.-----------------------------------t-----------:-----------t------- ---------
·
Nombre d'élèves
- Garçons •••••••
8 299
634
:12 491
13 560
- Filles
.
4 194
408
: 1 069
~-----------------------------------:-----------:-----------~-------
---------
-~~~~:~-~~-~:~::~:::::::::::::::::-~----:~~----:-----~~----:------:4~--------l
2
:-
.
Personnel
- Instituteurs
Enseignant
ordinaires •••••••• :
158
11
169
- Instituteurs
354
Adjoints •••••••••• :
171
14
185
-----------------------------------:-----------:-----------:------- ---------
.
·.
=
Conseillers Pédagogiques ••••.••••• :.
8
o
8
.
Source
Inspection primaire de Zuénoula 1984-1985.
(Si l'on tient compte du regroupement des villages, on peut affir-
mer que le dépprtement est couvert à 85 %dans le domaine scolaire (pour
le primaire). Par exemple, les 8 villages de Manfla disposent de deux écoles,
les 5 villages de Gnanfla nord en ont deux également. La tendance actuelle
étant pour chaque village d'avoir sa propre école, i l ne fait aucun doute
que le département est l'une des régions ayant le taux de scolarisàtion
le plus élevé du pays. Le seul problème que rencontre J'.1onsieur l'Inspecteur
est celui du,p~rsonnel enseignant pouvant lui permettre de faire face à la
prolifération des écoles).
... / ....

-
122 -
A chaque rentr6e scolaire, le probl~me de place dans le
secondaire se pose avec la même acuité aussi bien chez les enfants
des paysans que chez les cadres et travailleurs de la Sodesucre.
La présence du complexe aurait pu contribuer à agrandir le C.E.G.
actuel ou à construire un second collège, ce qui arrangerait tout
le monde.
Dans le domaine de la santé, le dispensaire du complexe
soigne uniquement les travailleurs de la Sodesucre et leurs "familles".
L'h~pital de Zuénoula n'est plus qu'un gros b~timent doté d'une dizaine
de lits sans matelas ni draps. Les malades dorment à même le sol~ Bien
plus, il n'échappe pas à la pénurie de médicaments qui caractérise la
plupart des centres de santé du pays. Désormais, on y va pour se faire
consulter et obtenir une ordonnance. Etant donné qu'il n'existait pas
encore de pharmacie dans le département jusqu'en 1984 la situation
n'était gu~re agréable (1). Le centre de santé de Gohitafla en construc-
tion dep~is plus de dix ans est envahi par la brousse. La recherche et
la sauvegarde de la santé sont une affaire individuelle et personnelle
à Zuénoula. Certains villages ont construit ou tentent de construire
leur dispensaire. Là aussi se pose le problème de personnel et de
médicaments. A titre d'exemple, le centre de santé du village de
Paoufla (à 14 km de Zuénoula) construit depuis 1956 n'a eu un infirmier
qu'en 1984. C'est dire que la situation d'ensemble du département
sans être véritablement dramatique demeure cependant préoccupante.
"La région de Zuénoula est réellement sous-développée dans le domaine de
la santé. La seule maternité du département qui se trouve à Zuénoula
n'existe plus que de nOOl" (2). Or, dans l'état actuel des choses, la
(1) Au moment où nous étions sur le terrain, il était prévu l'ouverture
d'une pharmacie. C'est chose faite depuis l'été 1985.
(2) Interview du Ministre de la santé lors de la journée des lépreux
le dimanche 26 janvier 1986.
. . .1· · ·

-
123 -
Sodesucre n'est pas disposée à faire face à tous ces problèmes. Que
dire donc des effets induits?
Il importE tout d'abord de reconna1tre que le programme sucrier
ivoirien n'a pas échappé auX erreurs d'appréciation qui caractérisent
généralement les grands projets de développement dans les pays du
Tiers Honde , La surestimation dont il a été l'objet l'a enfoncé dans
l'irréalisme à tel point qu'il a ét6 menacé par moments de dissolution.
A défaut du pire, les responsables ont de faire appel aux magiciens de
la sucrerie pour un nouveau départ : la Banque Mondiale au secours
pour le renouveau (1). La gestion doit à nouveau retourner entre les
mains des spécialistes (2). C'est dans ce contexte que lIon doit si-
tuer le plan sucrier dans l'économie nationale.
En effet, entre produire du sucre en vue de diversifier les
:i
sources de revenu de l'Etat et créer des infrastructures sociales pour
les populations rurales, il y a une marge. Le premier a pris le pas
sur le second qui risque d'~tre définitivement enterré. Rentabiliser
les moyens de production grêce au travail des populations est fonda-
mentalement différent d'un programme essentiellement social· .COO1me le
voulait l'Etat. Là encore, ne faut-il pas se poser la question de
savoir qui est effectivement concerné ou bénéficiaire des infrastruc-
tures sociales en question ?
Les opérations indispensables au fonctionnement des cooplexes
(qui demeu~ent en~ore insuffisantes) n'ont-elles pas confiné les popula-
tions rurales en marge des prétendues réalisations sociales ? La Cote
(1) Fraternité matin du 12 juin 1985
OP CIT. Déclaration du Ministre
de l'agriculture et des eaux et for~ts lors de la f~te du IDe
anniversaire de Ferké 1.
(2 ) D'après le D.G.A., cette éventualité est encore incertaine, car les
pluies abondantes de 1984-1985 redonnent un grand espoir à telle
enseigne que la Sodesucre voudrait tenter l'expérience de voler
de ses propres ailes.
.../ ...

-
124 -
d'Ivoire peut certes se vanter aujourd'hui de ne plus importer du
sucre en~grande quantité comme par le passé et, de se classer dans
le m~me temps en t~te des producteurs de la sous-région. "Ainsi,. la
C~te d'Ivoire a développé en moins de 10 ans une industrie de sucre
qui est devenue aujourd'hui la première en Afrique de l'Ouest" (1).
Elle peut également se targuer d'avoir conEtruit six complexes
en un temps record. Mais elle doit par la m~me occasion savoir que la
création de la Sodesucre n'a pas engendré seulement des satisfactions.
Ce fut m~me parfois le contraire.
Dans le cas de Zuénoula, les villages environnants du complexe
baignent plus ou moins dans l'ambiance Sodesucre. Nous avons vu par
exemp~e à Kavaka, à Beziaka, à Zanzra et à Duénoufla des jeunes gens
et jeunes filles aller travailler sur le complexe pendant la campagne.
Nous en avons également rencontrGs dans la ville de Zuénoula qui étaient
disposés à s'y rendre. Mais la situation est autre quand on s'éloigne de
Zuénoula. La direction du complexe se demande bien si les villages de la
sous-préfecture de Gohitafla sont informés de l'existence de la Sode-
sucre à Zuénoul a, Qu'il s'agisse de r.Jiaminigui, de Zanfla, .da Iriéfla
ou de Bohidianfla, le complexe est considéré comme l'affaire des
"étrangers".
~ ç'est dire que son impact reste encore peu sensible en dehors
de Zuénoula. Il est vrai qu'au début des travaux de construction les
jeunes sont venus de partout y compris des villages précités. Mais
aujourd' hui, ils y vont rarement ou presque pas. "M~me ceux qui y
vont d'ici, on peut les compter sur les doigts d·' une main et ils ne
font pas plus de deux semaines là-bas" (2). Il n'est donc pas étonnant
(1) Fraternité matin du mercredi 12 juin OP Clr p. 8.
(2) Entretien avec Monsieur Boué bi Iriéti, chef du village de
80hidianfla le 12 avril 1985, sous-préfecture de Gohitafla (à 21 km
de Zuénou l a},
.../ ...

-
125 -
de voir la Sodesucre s'engager dans de nouvelles perspectives d'avenir
qu'il est intéressant de suivre ici.
Chapitre IV
LES PERSPECTIVES D'AVENIR DE LA SODESUCRE
·A - LES NOUVELLES UTILISATIONS DU SUCRE
Depuis ~960, l'utilisation du sucre comme aliment (et c'est
quand m~me sa principale utilisation) est dépassée. Le sucre fait
l'objet d'études en tant que ressource naturelle permettant de répon-
dre à un grand nombre de besoins nouveauX de l'humanité.
Le 3ritish Sugar Bureau de Londres a établi une liste de
nouvelles utilisations du sucre se répartissant entre les utilisations
classiques "et les nouveaux do~aines. La C~te d'Ivoire veut s'engager
désormais dans cette voie.
1. - Les utilisations classigues du sucre en chimie organique
Récemment encore, la fabrication de détergents, de matières
plastiques et de produits chimiques, reposait presque exclusivement
sur le pétrole brut, mais la hausse du prix du pétrole a rendu ce
I~
produit moins intéressant en tant que mati8re première et, dans cer-
tains domaines Comme par exemple la fabrication des détergents, il
fait l'objet de vives critiques d'un point de vue écologique. En effet,
les détergents pétrochimiques ne sont pas biodégradables, ce qui
signifie qu'ils ne se décomposent pas après utilisation et lorsqu'ils
sont dévers~s dans un cours d'eau ou d8ns la mer ils portent atteinte
à la vie aquatique. Un détergent fabriqué à partir de sucre ou de
mélasse est entièrement biodégradable et ne présente donc pas ce type
d'inconvénient.
. Le coat de cette matière première se rapproche maintenant
de celui du pétrole. Aussi l'industrie des matières plastiques est-
. . .1· · ·

-
126 -
elle largGment tributaire du phénol. Les prix du pétrole l'ont rendu
rare et cooteux. Comme le phénol, le saccharose contient du carbone,
de l'hydrogène et de l'oxygène, encore qu'en proportions différentes,
et peut donc constituer un produit de substitution. L'oxyde d'éthylène,
très ut i Li sé dans l'industrie chimique, peut é qal.ensnt ~tre tiré du
saccharose et, bien que la rentabilité de cette technique ne soit
pas encore demontrée, elle offre des perspectives d'avenir. Au cours
des dix dernières années, la chimie de la molécule de saccharose a
fait l'objet d'études très poussées et l'on peut prévoir de nombreuses
possibilités d'utilisation. La Cote d'Ivoire n'entend pas demeurer
en reste dans ce domaine.
2. - Les nouveauX domaines
. La microbiologie a été appliquée au saccharose et à ses
sous produits et déchets ouvrant ainsi un certain nombre de nouveaux
domaines. En particulier, certains micro-organismes peuvent transfor~
mer les déchets de légumes, la bagasse et les mélasses en aliments
pour bétail riches en protéines dans les pays en voie de développement
qui ne disposent pas de fourrage pour le bétail. Des expériences
récentes (1976) faites dans l'alimentation des porcs au moyen de sucre
,
liquide. avant l'abattage ont permis de constater une amélioration
spectaculaire de la qualité de la viande (nous y reviendrons plus
loin) •
Le sucre et les mélasses sont également très utilisés dans
les fermentations pour produire non seulement de l'alcool mais aussi
des produits chimiques tels que l'acide citrique, l'acide lactique
et les ,glutamates de sodium. En ce qui concerne l'alcool, une mission
brésilienne a séjourné récemment (avril 1985) à Katiola dans le but
de r6veillEr l'ancien complexe dissou. Les négociations sont en cours
. . .1. . .

-
127 -
T.b1eau nO 17
Ces nouvelles utilisations peuvent être résumées par
"l'arbre"
figuré ci-dessous:
UTILISATIONS NON ALIMENTAIRES
UTILISATIONS COMMERCIALES
ALIMENTAIRES.
J
~I
~
~
~
t
J
~
Tannerie
Métal-
Electro-
Pharma-
P r oëuit s
Conser-
Sirops
Corûi-
lurgie
lyse
cie
laitiers
veries
serie
UTILISATIONS CHIMIQUES
UTILISATIONS
DOMESTIQUES
~
J
'1'
'J,
~
Ji'
'J,
Pharma-
Acides
Médecine
Explo -
Pâtisse-
Cuisine
Edulcorant
cie
sifs
rie
BAGASSE
ACIDE ITACONIQUE
-t=
~
'At
.Jï
~
~
Papier
Combus- Isolation
Matières plastiques
Feuilles de
tibles
plastique
CI RE
MELASSE
~
.~
Aliment du bétail
Carburants
Source:
British Sugar Bureau, Londres.

-
128 -
et l' op.ération pourrait démarrer d'ici 1987. L'acide i taconique, qui
est un composant de cFrtaines ~atières premi~res plastiques, est pro-
duit par ·fermentation, tandis que des médicaments tels que la pénicil~
line et la céphalosporine sont des sous-produits métaboliques de micro-
organismes produits à partir de solutions de sucre.
Plusieurs centaines de milliers de tonnes de sucre sont utili-
sées çhaque année dans les processus de fermentation, outre la vinifica-
tion et la fabrication de la bière. Le sucre est donc, sous toutes ses
formes, une matière première polyvalente et importante infiniment èx-
ploitable en Cote d'Ivoire (voir schéma d'utilisation du sucre page.J.2J )
dans les années
à venir.
B - L'AMELIORATION DES RESULTATS DU POTENTIEL EXISTANT
Avant d'envisager les applications nouvelles qu'ouvre le
sucre au plan sucrier ivoirien, la Sodesucre se propose de tirer totale-
ment parti de l'outil dont elle dispose.
Cette optimisation des équipements s'inscrit tout à fait
dans le contexte économique et financier mondial qu'implique une plus
grande rigueur dans la gestion quotidienne, les ressources de toutes
natures devenant plus chères. A ce titre, les perspectives de la
Sodesucre sont nombreuses et visent des domaines aussi différents que
l'étude d'un projet de raffineries et d'aggloméreries de sucre ou la
mise en oeuvre d'un plan de formation à moyen terme.
1. L'étude du projet de raffineries et d'aggloméreries de
sucre
Sur la base des cours mondiaux du sucre tels qu'il ont été
décrits au début, la Cote d'Ivoire vend son produit à des prix qui ne
rdmunèrent pas l'effort consenti par l'industrie sucrière et:l'Etat
. . .1.. .

-
129 -
ivoirien. Pour lutter contre cette tend2nce f~cheuse qui obère l'équili-
bre du Plan Sucrier Ivoirien, les pouvoirs publics ont demandé à la
Sodesucre d'étudier un projet de construction de raffineries et d'ag-
gloméreries supplémentaires (1). Ce projet permettrait de disposer
de sucie blanc de première qualité, en morceauX, à écouler:
- d'abord sur le marché national où la demande pour ce type
de produit n'est pas encore totalement satisfaisante;
- Ensuite à l'exportation, dans les pays limitrophes de la
COte d'Ivoire, membres de la C.E.A.O. et/ou de la C.E.D.E.A.O. (2),
fort demandeurs de ce type de produit.
Compte tenu de la barrière dcuanière dressée contre les
produits issus des pays non membres de la Communauté Economique
Régionale et la proximité géographique du sucre blanc ivoirien en
morceauX par rapport à son ccncurrent venu d'Europe, le sucre ivoi-
rien devient compétitif.
L'étude de ce projet de raffineries et d'aggloméreries de
sucre se double d'un volet(commercialisation)destiné à étudier les
différents marchés des produits du Plan Sucrier Ivoirien. Cela doit
se solder~u niveau national par:
- la promotion du sucre roux,
- l'augmentation des quantités disponibles de sucre blanc
en morceaux,
- l'étude du fonctionnement, du conditionnement et de la
présentation des produits ;
(1) La dernière agglomererie a été mise en service à Zuénoula en 1985.
(2) C.E.A.o. : Commun2uté des Etats de l'Afrique de l'Ouest
C.E.D.E.A.O. : Communauté Economique des Etats de l'Afrique de
l'Ouest.
. . .1. . .

-
13D -
Pour ce qui est de l'exportation, ce projet devrait s'étendre
- à l'étude quantitative et qualitative des marchés de la
C.E.A.O. et de la C.E.D.E.A.r.
- à la recherche de créneaux porteurs pour certains types
de produits (le sucre roux par exemple à distribuer par des cha1nes
de produits diététiques en Europe),
- à la création éventuelle de "produits nouveaux", à forte
valeur ajoutée, avec des partenaires techniques suceptibles d'~tre
intéressés par une telle coop 8ration.
Pour le cas particulier lie la sous-rugion de l'Afrique de
l'Ouest constituée par la C.E.A.O. et la C.E.D.E.A.O., ce projet de
raffineries et d'agglomereries de sucre devrait conduire la Ctlte
d'Ivoire à construire effectivement, par des r6alisations tangible~,
la coopération interafricaine.
2 _ L'étude d'un projet d'atelier central
Depuis la création de la Sodesucre, les pièces d'usine qui
doivent ~tre réparées pendant l'intercampagne sont envoyées en Europe,
aux U.S.A. ou à l'Ile Maurice, faute d'infrastructures adéquates sur
place. Outre le prix de réparation qui est élevé, le coot d'expédition
et de réacheminement vient grever le prix de revient glob81 de l'opéra-
tion.C'es~pourquoi, à la demande des autorités de tutelle, la Sode-
sucre est en train d'étudier la possibilité d'installer en Cote
d'Ivoire, au "centre de gravité" de l'activité du Plan Sucrier, un
atelier central de reconditionnement des pièces d'usine. Les avantages
d'un tel investissement, tant au niveau de la Sodesucre qu'au niveau
économique national sont importants :
- tout d'abord cela se traduit pour la Sodesucre, par une
économie au ~iveau du fr~t aller et retour et au niveau du délai .
. . .1. . .

-
131
-
d'immobiLisation des pièces concernées
~ ensuite, au plan notional, un tel atelier économise des
devises puisque les dépenses sont réalisées localement ;
- enfin, cet atelier fournirait du travail et une formation
à de nombreux jeunes techniciens et contribuer8it ainsi à l'action
de développement régional .du plon sucrier.
3. - La formation
Avec les problèmes de financement, la formation est le
principal handicap à un développement h2rmonieux et plus rapide de
la Sodesucre.
En effet, la formation, préalable à toute ivoirisation
efficace, est un moyen sOr pour réduire les frais de personnel.
"Depuis quatre ans, faute d'evoir pu rnettre le financement en place,
le programme de formation n'a pu être lancé" (1). Pour résoudre ce
problème, la Sodesucre se propose de procéder en trois étapes :
- tout d'abord, mettre en oeuvre un plan d'urgence de forma-
tion afin de former, à terme d'un an ou de deux ans, les agents de
ma1tris8.ivoiriens destinés à remplacer les agents de ma1trise expatriés
essentiellement mauriciens, égyptiens et français ;
- ensuite, concevoir et lancer un plan de formation à moyen
terme, destiné aux cadres de 12 société, afin de compléter le plan
précédent, et devant s'appuyer sur une gestion prévisionnelle du per-
sonnel efficace : ce programme de formation , complet et régulière-
ment pla~ifié devrait être réalisé en Cote d'Ivoire et à l'étranger
- enfin, étudier la mise en oeuvre effective du Centre
Professionnel de Technologie Sucrière (C.P.T.S.) qui est l'instru-
ment privilégié
de la form2tion sucrière au sein de la Sodesucre ;
(1) Le Plan Sucrier Ivoirien et son Environnement International
op ci t p. 75.

-
132 -
cette réactivation du C.~.T.S. devrait prendre deux directions à
savoir :
- la définition d'une infrastructure d'accueil conforme
auX besoins de ce centre de form2tion, tant au niveàu de sa localisa-
tion géogra~hique que des b~timents nécessaires et des équipements
indispensables à la fourniture d'une formation de qualité.
- la dotation du centre de formateurs permanents et tempo-
raires, nationaux et étrangers, afin de dispenser, tout le long de
l'année, ies éléments de formotion néces~aires à un meilleur fonctionne-
ment de l'outil de production.
Dans tous ces do~aines, la Sodesucre a noué des contrats
et entamé des négociations qui devraient aboutir dans un proche avenir.
C - LA VALQRISATION DES SeUS-PRODUITS
Afin d'améliorer la structure 0conomique et financière du
;::llan Sucrier Ivoirien, la Sodesucre a commencé 2 étudier les valorisa-
tions possibles de ses sous-produits, essentiellement les excédents
éventuels de bagasse et la mélasse (1).
. 1. - Les excédents de bagasse
Une fois les complexes installés dans leur phase de croi-
sière, on peutim8giier que certains d'entre eux disposent d'un excé-
dent de bagasse. La bagasse en l'utat se conservant mal, pendant peu
de temps et occupant beaucoup de place, la Sodesucre est en train
(1) - La. bagasse : partie ligneuse de la canne à sucre, restant dans
les moulins après l'extraction du jus sucré. Elle sert à produire
de l'énergie électrique qui alimente le complexe pendant la
campagne.
- La mélasse
liquide sirupeux contenant de 40 à 50 %de sucre,
r6~idu non cristallisable de la fabrication du sucre •
.../ ...

-
133 -
d'étudier un procédé de pelletisation de celle-ci pour produire un
conbustible performant, facile à stocker et économique. Dans ces
périodes de charbon de bois cher et de lutte contre la déforesta-
tion anarchique, ces pellets de bagasse pourraient compenser la
rareté relative du charbon de bois dans l'économie domestique tra-
ditionnelle si possible.
Sur le plan purement ~conomique, Catherine Aubertin avait
calculé (en 1982) l'équivalent du fuel en bagasse et a obtenu le ré-
sultat suivant:
- 5,5 kg de bagasse représentent le pouvoir calorifique
d' l kg de fuel.
- Une tonne de cannes donne 330 kg de bagasse, soit l'équi-
valent calorifique de 60 kg de fuel.
La bagasse, estimée au prix du fuel (t 62 F/kg) peut ~tre valorisée
à Il,4 F/kg.
- Une tonne de cannes fournirait alors 3.760 francs de ba-
gasse (en équivalent fuel).
- Les ressources d'énergie tirées de la combustion de la
bagasse, pour~ne campagne de 450.000 tonnes de cannes, se chiffre-
raient alors à 1.690 millions. Cette énergie qui serait plus que
suffisante pour l'activité du complexe réduit donc considérablement
le recours à l'utilisation du fuel. Ce qui est vrai dans la plupart
des cas en période de campagne, c'est que l'énergie fournie par la
bagasse est excessive pour l'alimentation des seuls complexes. Il
est souhaitable de procéder à son branchement ~ur un réseau électri-
que distributeur. Il semble que l'E.E.C.1. envisage depuis quelques
années de connecter tous les complexes à son réseau, ce qui rendrait
beaucoup de services aux régions bénéficiaires des complexes (1).
(1) En 1984, pendant que la Cote d'Ivoire tout entière souffrait d'un
cruel delestage, la Sodesucre b2ignait dans l'excès de sa produc-
tion énergétique.
.../ ...

-
134 -
2. - La valorisation de la mélasse
La mélasse, qui Fst le principal sous-produit de l'industrie
sucrière, peut-être valorisée de multiples façons mais la Sodesucre
à retenu trois voies principales de recherche :
- l'alimentation du bétail: en 1980, les importations de
viande bovine ayant représenté au total 18 milliards F CFA, la filière
élevage pour l'utilisation de la mélasse para1t intéressante pour le
développement de la production animale ; le kg de mélasse permettant
en effet de "produire" 2cO qr ammas de viande vive, avec 120.000 tonnes
de mUlasse, la Ctlte d'Ivoire pourrait "produire" 6.000 tonnes de
viande pour une valeur de 3,6 milliards F CFA. Rappelons qu'en période
de croisière, les complexes sucriers devraient produire 108.000 tonnes
de mélasse et que par conséquent la production de viande et d'abats
serait en 1985 le triple de la production de 1977 (1). Ces prévisions
n'ont pas été atteintes malgré les efforts faits dans ce sens. On
parle à cet effet d'important déficit à éponger (voir Spécial Fraterni-
té matin mai 1985).
,- La levurerie : en 1981, la C~te d'Ivoire a importé 1.550
tonnes de levure de panification pour un montant de 570 millions F CFA
et 150.000 tonnes de farine, pour une cons omnat.Lon de pain par habi-
tant de l'ordre de 13 kg/an en zone rurale et 33 kg/an en zone urbaine,
la moyenne en France étant de 66 kg/an
(1) Eri'1977 la situation était la suivante pour toute la Cote d'Ivoiro
- Production bovine: 7.700 tonnes
- Production porcine: 5.960 tonnes'
Production ovins-caprins: 3.500 tonnes
- Production avicole: 15.000 tonnes
Source : SrOEPRA 1979.
/
... ...
/

-
135 -
On peut estimer, à l'horizon 1990 les besoins de la Ctte d'Ivoire
à 1.288 tonnes de levure s~che, et, compte tenu des besoins de pays
de la C~E.A.O. et de la C.E.D.E.A.O., la Cete d'Ivoire pourrait pro-
duire de la levure à raison de 300 kg de levure sèche pour 1,2 tonnes
de mélasse~ soit 8.000 tonnes de m61asse pour un marché (local + ex-
i
portation) estimé à 2.000 tonnes de levure sèche.
- La fermentation alcoolique industrielle : elle peut con-
cerner deux types de produits finis ou intermédiaires :
, D'abord l'alcool pharmaceutique et industriel à l'exclusion de tout
alcool de consommation courante, qui pourrait aussi servir de base
,
.
à la chimie organique : éthylène, chlorures et polychlorures de vinyle,
poluéthylène basse densité, triacétates de cellulose. Cette nouvelle
orientation est conforme à la politique de recherche scientifique
instituée par l'Etat. A cet effet 18 Japon a récemment offert à la
Cote d!Ivoire un laboratoire et une unité pilote de production d'al-
cool pharmaceutique en vue d'équiper le Centre Ivoirien de Recherche
Technologique (C.I.R.T.) (1).
Ensuite, l'alcool carburant qui, s'il ne doit pas ~tre
envisagé à une échelle nationale dans l'im~~diat, pourrait rendre les
complexes quasiment autonomes en énergie, notamment au niveau de leurs
parcs de tracteurs, engins et autres m2tériels roulants utilisés sur
p12ce. Comme nous l'avons dit plus haut, les négociations dans ce
domaine semblent ~tre en bonne voie entre le Brésil et la Cote
d'Ivoire (2). Il existe enfin d'autres valorisations possibles pour
la mélasse (de l'industrie sucrière), dans l'industrie pharmaceutique
(1) Fraternité matin du .rer cr eo i 3 juillet 1985 p. 7
"De l'alcool à pertir de nos sous-produits agricoles ll •
(2) Nous avons eu le privilège de séj~urner en m~me temps qu'une
mission brésilienne sur 18 complexe de Zuénoula en Avril 1985 •
.../ ...

-
136 -
ou dans l'industrie m6tallurgique, en p~ss8nt p8r la production de
furfurol, mais toutes ces applications nécessitunt une technologie
cOotcuSB ct pas toujcurs facilo Q ~cttre en ocuv~o, la Scdesucre 8
préfé~6 se li~itor du ~oins pour l'instcnt à l'étude de pro~uits
finis ou intermédiaires, dont l'utilisation immédiate par elle-même
ou par le CDte d'Ivoire permet tout à la fois:
la valorisation sur place de produits nationaux,
~ la création d'autres emplois et la distribution de revenus
etc ••. Au fil du développement de la Sodesucre, d'5utres voies pour-
ront ~tre explorées puis ouvertes dans la valorisation des sous-produits
de l'industrie sucrière en Cote d'Ivoire. Telles sont donc los perspec-
tives d'avenir de la Sodesucre à court et moyen termes.
i
Il faut dire cependant que ces nouvelles orientations envisa-
gées depuis 1982 n'ont p2.S encore connu un v6ritable démarrage dans
leur Ensenble. La persistance ~e la crise économique mondiale actuelle
y est pour quelque chose. Mène si elles étaient effectivement appli-
qu6es, il n'est pas ti~s'~vident qu'elles puissent constituer
r ée Ll ernerrt une solution ad8quate 2UX nombreux p r obLèrnes que connait
la Sodesucr~~ D'abord parce qu'elles sont li~it6es dans lour poncep-
tion. Il s'agit surtout ici de résoudre les difficultés du monlent.
Aucune place n'est faite au social. Cet aspect constitue de moins
en moins un souci pour lES responsables de la Sodesucre. "les impéra-
tifs des débuts du ~lan Sucrier Ivoirien qui consistaient à atteindre
avant tout des objectifs quantitatifs sont maintonant relayés par des
pr8occup2tions de ren tabili té et de productivité" (1). Cette prise de
position justifie le pesEi~isne qu'afri~hEnt les responsables de la
(1) Le Plan Sucrier Ivoirien et son Environne~ent International
op ci t p. 61.
.../ ...

-
137 -
Sodesucre vis-à-vis de la cr6ation des plantations villageoises de
canne à sucre. Les premi~res tentatives de cultures villageoises à
Zuénoula avaient (1980-1981) enregistré une grande affluence de la
part de la population. Cette volonté massive n'a pas convaincu la
Direction de la Sodesucre qui pense que les populations rurales ivoi-
riennes ne sont pas encore capables d'entretenir une plantation villa-
geoise de canne. Elle estime que le trav8il de la canne à sucre est
si difficilo qu'il serait illusoire actuellement de vouloir en faire
l'affaire des gens qui ne s'y connaissent pas. "Ce serait envisager
une perte an période de crise" dit-on.
Nous disons en réalité que ce pes~imisme peut être dissipé
\\
si les responsables le veulent bien. Les exemples des plantations
villageoises de la Sodepalm et de l'héveaculture sont là. La direction
générale de la société des plantations d'hévéas de Grand Béréby (50GB)
vise à long terme la pratique des plantations villageoises à.lOO %(1).
Pour ell~1 le succès d'une telle pratique ne souffre aujourd'hui
d'aucun doute en dép Lt des difficul t~s du début. "Le plus important
est de sensibiliser les paysans, de les éduquer et de les responsa-
biliser. Ils ne crdient réellement en quelque chose
que lorsqu'ils
ont le fruit de leur travail entre les mains. Nous continuerons à les
encadrer davantage dans ce sens" (2) •
. Ensuite, le second constat est que les perspectives d'avenir
de la Sodesucre ne font aucune allusion à l'important problème de
main d'oeuvre subalterne. En ce qui concerne
par exemple les conditions
de travail et plus particulièrement la coupe manuelle des cannes, les
(1) Emission radiodiffusée coupe nationale du progrès
interview du Directeur Général de la 50GB, le mercredi 28 aoct
1985 à 6 heures 30 mn.
(2) id ern , ~
.../ ...

-
138 -
perspectives restent muettes. Enfin elles n'envisagent nullement
résoudre lRs difficultés d'insertion des complexes sucriers dans
leur lieu d'implantation (ceci fera l'objet de la 3e partie de la
thèse). C'est pour toutes ces raisons que nous soumettons le complexe
de Zuénoula à quelques réflexions critiques.
D - QUELOUES REFLEXIONS CRITIQUES
1. - Beaucoup de promesses, peu de satisfaction
La création de la Sodesucre avait en son temps suscité
beaucoup d'espoirs au sein de la population de Zuonoula comme l'a
écrit la Père J.P. Benoist. "On pcnse à un salaire plus r équ.l i.ar ,
D'autres font des cultures vivriores plus importantes pensant, à
juste titre, vendre au personnel salarié du complexe. Tous espèrent
les améliorations qui seront apportées à Zuénoula et sa région, routes
goudronnées, installations sanitaires plus modernes, agrandissement
de la ville". De toutes 18s aspirations exprimées, nous déduisons que
les objectifs visés au départ par la Sodesucre ne pouvaient que
trouver un climat favorable, un terrain conquiien quelque sort~, Mais
la plupart des espoirs et des promes~es sont devenus des réalités énig-
matiques. C'est pourquoi ncus osons dire que la 50desucre a contribué
à s8creter les germes de sa propre destruction. En voici des exemples
Si l'on voulait vraiment notre participation, le complexe ne serait
pas doplacé d'ici à Zuénoula.
Nous savons que les premi~res ~tudes de prospection ont eu
lieu à Maminigui (S/P Gohitafla). Mais l'implantation actuelle a été
choisie pour les raisons que nous avons déjQ exposées (cf historique
du complexe). Le problème qui se pose aujourd'hui est celui de savoir
pourquoi ce dopart s'est Effectuo à l'insu de la population; pourquoi
. . .1. . .

139
une telle rupture unilatérale dans la mesure où les habitants de
la région avaient été préalablement bien informés, bien assurés de
la promesse du complexe au 80ment des études de prospection (1).
Pourquoi n'a t-on pas pris le soin d'expliquer auX populations de
la sous-~réfecture de Gohitafla et plus particuli~rement de Manfla
(Maminigui) que ce démenagement se faisait dans leurs intér~ts ?
C'est un coup qui a été durement ressenti. M~me les cadres ressortis-
sants continuent ~ s'interroger sur les raisons profondes de ce d~part.
Tout chercheur dans ce domaine doit ~tre pr~t ~ répondre ~ la question
de savoir pourquoi ZU:3noula et non pas Gohitafla (Maminigui). La consé-
quence en ~st immédiate. Les ressortisrants da Gohitafla et en particu-
lier ceux de Hanf La restent indifférents à tout ce qui touche la Sode-
sucre. "Si l'on voulait vraiment que nous travaillions sur le complexe,
on ne. l'aurait pas envoyé à Zuénoula" (2). M~me-r8frain à,Flaya, Siafla,
Zanfla "etc •••
La Sodesucre B ainsi fait un marché de dupes pr~ts à affirmer
qu'il s' aq Lt d'une trahison. Coume quoi un problème apparemment bénin
peut constituer un facteur explir.atif du comportement d'une population.
C'est par exemple le cas du projet de création d'un centre urbain à
Kawaka.
Kawaka ou la cité de la canne à sucre
Le village de Kawaka avait Gté pressenti par les constructèurs
co-une étant le lieu qui abriterait le personnel Sodesucre. Les études
furent faites pour ériger ce village en un centre urbain moderne.
N'est-ce pas là un débouché pour les produits en provenance des villages
(1) Des essais de canne ont m~fT1e eu lieu à r·1aminigui.
(2) Le Prc'lsident du Comité POCI
ilaminigui, entretien du 4 avril 1985 •
. . .1· . ·

-
140 -
environnants. L'idée a fait son chemin dans le mileu paysan. Le projet
a été confirmé et renforcé par lE rapport de mission de Mr Jean reger,
expert au r'1inistère français de la coopération en 1980. KaUJaka et les
villages voisins ne pouvaient que se r0jouir de cette arrivée du pro-
grès (électricité, eau courante, dispensaire, magasin etc ••• ). Il
était également prévu par la m~me occasion l~ construction d'un pont
(ouvrage) sur le Bandama qui relierait le complexe à KaUJaka. Tous
ces projets expliquent amplement, du moins au début, l'enthousiasme
des jeunes·de Kawaka à vouloir travailler massivement à la Sodesucre.
Pour flr le D.C.A., I<awaka est le seul village avec lequel la S.odesucre
s'entend le mieux. Mais depuis, l'on ne p2rle plus de créer un centre
urbain."D'ailleurs la Sodesucre n'a plus intér~t à le faire en cette
période de crise" (Catherine Aubertin 1980). A l'exception de KaUJaka,
les autres villages commencent à y croire de moins en moins car désor-
mais la Sodesucre entend loger son personnel dans l'enceinte du com-
plexe: Mais à Kawaka, on se demEnde toujours à quand la nouvelle cité.
Rocemment (198(~-85) il a été question de mettre un bac entre Kawaka
et le complexe. Pour la Direction, il est actuellement inutile de
prendre un tel risque, car non seulement cela pose des problèmes de
sécurité, mais aussi engendre des dépenses supplémentaires pour la
Sodesucre. Et pourtant cette dernière' promesse est encore très vive-
ment attendue. Lorsqu'on se réfère à l'intensité des relations qui
existent entre le complexe et Kawaka, on est aussitOt tenté de se
demander si la Sodesucre n'est pas en train de créer un second marché
de dupes. 6éjà dans Ips villages voisins de Kawaka, on parle de moins
en moins de travailler eu complexe COmr;' 8 p ar le passé. Il va sans dire
que la longue attente des pror:1es!:'es finira f12r engendrer un divorce
sans doute au détriment de la Sodesucre.
. . ·1. . ~

-141 -
2. _ Le compl~xe de Zuénoula, source de plusieurs tensions
L'insuffisance des moyens de travail a souvent été à l' ori-
j"-
gine des tènsions internes nuisibles au bon fonctionnement du complexe.
Parmi les causes, l'inégalité et l'irrégularité des salaires occupent
une grande place. Les coupeurs de cannes reprochent aux ouvriers d'usine
de trayailler moins pour un salaire,régulier et plus élevé. Ces der-
niers n' ont d 'yeux que pour les chefs d ' équipe. ou de sectioo qui en
perçoivent le double pour un simple pointage (ceux là marne qui distri-
buent des zéros sous la pression de leurs supérieurs hiérarchiques
dans le souci de sauver leurs intér~ts). Il en résulte que les jours
de paie, les attaques verbales,r les ~rixèsi:et les injures ne sont pas
rares ,et parfois difficiles à ma1triser. Cette situation qui n'est pas
unique ici s'y présente cependant avec une certaine singularité commé
le souli9ne le rapport du service études économiques et recherche
..,
opératibnnelle (S.E.E.R.O.)."A Zuénoula, la particularité est que
certaines entreprises sous-traitantes, telle que Dragage, pratiquent
une discrimination de la politique des salaires ; deux manoeuvres
faisant le ',m~me travail et dans les m~mes conditions, perçoivent
des sélaires différents. Cette différence relève du fait que tout
manoeauvre ayant déjà trav~illé avec Dragage est privilégé par rapport
, .
à celui qui n'a jamais travaillé avec la même entreprise" Cl).
A l'inégalité s'ajoute l'insuffisance m~e du salaire. En
décembré 1985 par exemple, après que la direction eut déduit du sa-
laire des travailleurs le prix des sacs de riz que la société leur a
distriP~és au début de la campagne, les manoeuvres de certaines équipes
(1)
S.E.E.R.O., "L'amélioration du cadre de vie"
S.E.E.R.O. Sodesucre siège, mai 1978 p. 17 •
. ..1. . .

- 142 -
ont décidé de marquer un arrêt de travail. Beaucoup ont même menacé de
rentrer chez eux car la plupart affirment avoir perçu moins de 5.000 (2).
C'es~ un problème qui fait à la fois des révoltés, des résignés et des
jaloux aussi bien parmi les manoeuvres que chez les ouvriers tempo-
raires et permanents. L'insuffisance et l'inégalité des salaires ne
sont pas un fait nouveau à la Sodesucre. En 1977, Jean Paul Benoist
l'avait mentionné dans la lettre au pays gouro lorsqu'il a écrit
qu' "enfin de mois, quand on a sorti l'argent du loyer, des dettes,
il ne reste pas grand chose pour vivre".
"Et puis on voit du monde autour de soi 'avec des salaires
bien plus importants, des cadres expatriés ou non qui ént de belles
,
.
maisons, des voitures. On sent davantage sa condition médiocre. Autre-
fois dans les villages c'était l'égalité dans la maniàre de vivre.
L'inégalité qui va ~dgner de plus en plus peut être source de progrès
,
par un effet de stimulation mais aussi de conflits".
Ci
Ce problème 's'est aujourd' hui doublé d'un autre qui est la
supression des a~des et prêts préalablement accordés aux travailleurs
en cas de difficultés financières. A l'exception des prats scolaires
.
(qui sont m~intenus), la direction générale a d~cidé de ne plus agir
dans ce sens. Le D~G.A. est étonné de voir que chaque fois qu'un
agent a des problèmes financiers ou matériels, quelle qu'e!"i .,~~t,

"
,:;:,!?,~, 'f;:
l'ampleur, la première réaction est de recourir, fJlItQ1l~t~q~e~,Fn~~.~..
un prêt financier aupràs de l'établissemnt. Pour lui, cette décision
est donc bienvenue dans la mesure où jusqu'en 1984, plus de 24.000.000 F
~
CFA ont ~té accordés au personnel au titre des prêts et aides aux tra-
vailleurs. La société ne peut plus admettre de telles sorties d'argent
(1) Par politesse, nous avons volontairement refusé de touch~r'àleurs
bulletins de paie qu'ils sont prêts à brandir à tout moment.
1
.../ ...

-
143 -
en "période de crise". Pour la majorité des travailleurs (61 %),
quand bien même cette possibilité existe, les seuls bénéficiaires
sont la minorité formée de cadres et agents de ma1trise (cf tableau
Comme le souhaitent les travailleurs, seule
l'ouverture d'une caisse de solidarité au sein du complexe peut ré-
soudr~ce problème surtout en cas de décès d'un parent. Ces mesures
... l
de supprœsion jugées trop draconDiennes ont suscité des tentatives
de regroupement ethnique et régional entre les travailleurs de toutes
catégories socio-professionnelles. Il s'agit pour les membres de venir
en aide financièrement ou matériellement à ceuX qui sont en difficulté
(maladie, décès etc ••• ) gr~ce à des cotisations ponct~elles aU cas aD
la trésorerie de l'association n'est pas en mesure de faire face à la
situation créée. Cette solution semble de moins en moins efficace dans
la mesune où les cotisations mensuelles ou m~me ponctuelles ne sont
plus régJlièrement versées par tous les adhérents. Il existe cependant
une dernière possibilité offerte par la direction du complexe qui con-
siste à faire des avances sur salaire (accordées uniquement au per-
sonnel permanent). Tout employé en difficulté peut-~tre autorisé à
solliciter une avance sur son salaire du mois en cours (l'équivalent
du tiers de son traitement mensuel). Les travailleurs estiment que
, .
l'avance sur salaire ne peut pas véritablement remplacer l'aide et
les prêts financiers qui sont asseZ substantiels. 'Ehnrevanche leur
...
souhait serait de réinstituer l'ancien système qui les arrange mieux.
En at7endant, la grogne continue. Cependant l'on ne doit pas minimiser
l'éter~elle palabre des manoeuvres autour du transport•
. Si la direction (du complexe) pouvait affecter un car auX
hommes et un autre aux femmes, il n'y aurait pas de palabre •
. . .1· · ·

-
144 -
Tableau nO 18
Question nO 12
La Sodes~cre vous apporte t-elle une
l
,
1
aide en cas de décès d'un parent ou en cas de difficultés
financières ou de tout autre ordre ?
Catégdrie socio-~rofessionnalle
Réponse
Manoeu-
Ouvriers
Employés
cadres et
Total
%'
vres
d'usine
de bureau
maftrise
Total: % Total: % Total: % Total: %
·
·
·
:
·
·
·
Oui
1
:5,55
5
: 2,5
19 : 38,Ti
7
:53,84
32
32 %
.
"
·
:
:
:
Non
16
:88,8
13
:65
26 : 53,06
6
: 46,15
61
61 %
}
....'
·
:
·
·
Autres
1
:5,55
2
:10
4 : 8,16
0
· 0
7
7 %
·
·
·
·
:
)
·
·
·
Total
18
:100
20
:100
49 :100
13
:100
100
100
, )
(
)
Source
Enquête personnelle.
Il est évident~ue tous les manoeuvres (en particuler les coupeurs) ne
terminent pas leur tache en m~me temps (à 14 heures généralement). Il
1
arrive que certains le font tOt et d'autres très tard. "Or les premiers
devront attendr~ lès seconds, puisque le m~me véhicule les ramènera au
village. C',est une source de conflits que le chef d'équipe a pour mission
de résoudre" (1). Le problème devient parfois canplexe lorsque les chauf-
feurs qui les conduisent s'y mèlent. Ces derniers s'estiment souvent épui-
sés et eXigent de rentrer vite. Dans les équipes mixtes (glanage, épandage
d'engrais par exemple) où les hanmes finissent généralement avant les fem-
mes, le conflit est plus fréquent et plus ouvert. Les hanmes qui sont im-

(1) R. Deniel
op cit
page 15.
.·.1. . .

-
145 -
,;;-
patients deviennent si agressifs à l'égard des jeunes filles qu'on
n'hésite pas à les qualifier de phallocrates et de méchantB~ Cela a
fait dire à la cheftaine d'équipe (Zan lou Gounan) que seule la sépara-
tion des moyens de transport peut résoudre le probl~me. C'est un fait
qui décourage souvent les femmes qui sont pourtant les plus fidèles,
les plus régulières et les plus sérieuses au travail (1). On assiste
ainsi à de véritabl~attaquesentre groupes de femmes et hommes sur
les fermes ou à bord des véhicules les transportant. Oans ces conflits
entre travailleurs, le cas de coupeurs de canne rev~t une forme asseZ
singulière.
Les coupeurs sont aussi des gens sales
On se demande parfois sans trop comprendre pourqùo! certaines
t~ches sont reprouvées et d'autres convoitées (cf tableau nO ••~q .page.1..63. ).
A la Sodesucre, c'est généralement le samedi que les travailleurs ou
,
leurs épousés se rendent en ville pour s'approvisionner en vivres. A cet
effet deux ou trois véhicules sont mis à leur disposition pour a~surer
le transp9rt des intéressés. Les cars passent dans les différents
villages ou aUX lieux de ramassage pour leur embarquement. Le samedi
29 décembre 1984 à 15 heures 30 mn le car en provenance de Gohfla
était à moitié vide. Au niveau du poste de contrOle ettendaient un
groupe de (manoeuvres) coupeurs. Les passagers du véhicule ont opposé
~
un refus' catégorique et pour cause les coupeurs sont sal~s. Aux dires
des inform~teurs et surtout des contrOleurs du barrage, il s'agit d'un
vieux problème qui se renouvelle chaque samedi. C'est parfois au prix
d'une véritable lutte qu'ils réussissent à monter avec les autres
travailleurs. Sur les fermes ceux qui ratsnt leur véhicule après le
(1) Rapport d'ac~ivités campagne 1983-1984
OARH •
...1...

-
146 -
travail rentrent à pied, car les autres n'admettent pas de les trans-
porter.av~c eux. Les chauffeurs jouent parfois le jeu. Il suffit que.
certains travailleurs leur demandent de ne point s'arr~ter et ils
.
trouvent normal d'abandonner les coureurs en plein chemin.1
"
Comme par hasard nous avons assisté à une situation semblable
au même poste dé co~trOle un an après (le samedi 28 décembre 1985).
C'est un fait bien connu que pour les autres travailleurs de la Sode-
sucre, les coupeurs sont des gens sales. De ce fait, il en découle
un grand sentiment de frustr~tion et de révolte. On a désormais honte
çe revêtit·; le statut de coupeur de canne ou de manoeucre. "Lescoupeurs
sont traités ici comme des animaux"(l). Il semble que cette présomption
justifie l'interdiction qui est faite auX (coupeurs) manoeuvres d'ac-
céder eux cantines et eux infrastructures de loisirs du canplexe •. Ils
n'hésitent pas à l'affirmer eux-n~mes. Mais en réalité, mame s'ils
étaient/officiellement autorisés à y accéder, le manque de temps dis-
ponible et l'insuffisance des moyens matériels 'et financiers don~ ils
sont victi~es constitUEnt naturellement des obstacles infranchissables.
Cette façon de frustrer les manoeuvres ne milite pas en faveur de la
Sodesucre qui a réellement besoin de l~~ entretenir pour les maintenir.
déscolarisés
,'.;
(1) Zan bi Kalou, entretien du 26 d8c'mbre 1984.
(2) Le Prûsiclcnt du 'comite POCl de Duonoufla,entret.i.en du 4 avril 1905,
...1...

-
147 -
le gré de l~ famille pour certains. Ce qui n'6tait pas le cas pour la
grando majorit~ de jeunes encouraQ~s par leurs familles. La situation
a jC8uco~p'chonQé 8ujcurd'hui.
En effet au pcys gouro, la décision d'un homme d'émigrer
peut dérendre de lui-n~me ou d'un consensus fanilial. Dans ce cas,
l'autorité traditionnelle est toute puissante. De m~me, l'homme qui
désire émigrer dpmende l'autorisation au chef dé famille~' Il reste
- dens le systeme, ce qu'il fait est bon pour la communauté.
Un villageois émigré à la ville cépend du chef de famille traditionnel,
y peie sa carte PDCI et rentre à chaque manifestation importante. En
,revanche, il arrive rarement, que l'autorisation'soit refusée; si à
ce moment l'homme s'snfuit, il récuse l'autoritâ du chef et est banni
presque obligatoire~ent de lB communaut6 villaQeoise. Et si la fortune
lui sourit à la ville, il reviendra dens son village natal en homme
respecté, moins pour sa valeur que pour sen ergont qui pourrait se
révéler utile au villego. Il peut ainsi se racheter vis-à-vis de la
sociuté.
Dans le cas précis de la Sodesucre, plusieurs familles ont
unanimement et volontairement de~2ndé Ù leurs enf8nts d'y aller faire
fortune. :eux qui en revenaient avec beaucoup d'argent ont constitué
un véritable stimulant pour les 8utres. Bien sOr tout le monde n'a pas
connu de suécds. Parmi ceux-là, certains sont revenus au village,
d'autres sont partis ailleurs. Cn raconte parfoio que même parmi ceux
qui se sont évadés malgré l'opposition de le famil~ il y avait des
jeunes filles et des femmes. i-lais leur aventure a tourné court. La
plupart ont aussitClt .imp l.or é le pardon pour Leur r0inti5gration c:u:.o3i.n
de la famille. "Auj our d ' hui tou té' est ar r anqé ct ils n' y vont pr ecque
plus" (1). "La Sodesucre est devenue pr e sque le rendoz-vous des par os-,
(1) et (2) Le chef rJu villcge de sr;Fï;s:P" de Gohitafla, ent;;t'h:n"'--'-
du 24 j2nvi8r l~~G.
1
.../ ...

-
148 -
I1 C8UX qui
ont fait les Dancs" trouvent les travauX des champs dégra-
d an t s (Coulibaly ['1êdjorno 1980). Dans le meilleur des cas, le jeune
entretenu par la famille
ac~~de ~ un nouveau type de savoir qui
le valorise et lui ouvre plus vite lRs portes de "l'honorabilité".
Tout l'encourage donc à trainer dans le village ou à opter pour l'exode
rural. Il n'est pas é t onnrn t auj our d ! hui de trouver parmi les manoeu-
vres des ~l~ves du nivD8u do 12 3è, vriro de 18 Ibre. La plupart des
jeunes qui s'évadent de cette façon ne retournent plus au village.
Cela cause aujourd'hui beaucoup de peine aUX parents qui estiment
désormais qus c'est la Sodesucre qui donne le goot de l'aventure à
leurs enfants.
3. - Le Plan Sucrier Ivoirien, un exemple de pari manqué
Les difficultés que connait le Plan Sucrier à pr~sent sont
le r~sultat d'un certain ent~tement des autorités et non l'effet d'une
surprise quelconque car, il s'est agi d'une "industrialisation ré-
gionale volontari~te" en dépit des dures réalités du marché interna-
tional que nul n'ignorait auparavant.
3.1. - Le narch6 international de sucre, un monde fermé
Il est sans doute important de rappeler que le sucre est
l'un des principaux produits d'échanges internationaux dans le do-
maine alimentaire : pr~s du tiers de la production mondiale de sucre
fait l'objet d'exportation. Mais si le commerce international du
sucre a connu une expansion considérable depuis le début du si~cle,
cela ne s'est pas fait sans difficultés de tous ordres. Il met en
pr aerrce des par t.r.na
é
i r-e s iné!J2ux. Par exemple des pays en voie de
développement qui pratiquent la monoculture de la canne à sucre et
tirent 10 rlOjf'Ure par t i.e do leurs r ese our-ce s de l'économie sucrière
1
.../ ...

-
149 -
se trouvent face à des pays dont l'économie est diversifiée. Le
commerce du sucre a dO aànsi s'organiser. Les échanges internationaux
se sont faits alors non seulement entre pays producteurs et pays non
producteurs mais encore entre pays gros producteurs dont la consomma-
tion intérieure n'absorbe qu'une partie de leur production et, pays
gros consommateurs dont la production ne peut couvrir la consommation
nationale. Actuellement les transactions internationales se font sur
deux catégories de marché :
- le marché "libre", régi par l'Accord International Sucrier
de 1968 et. ratifié par 34 pays exportateurs et 15 pays importateurs.
Ce marché ne commercialise en fait qu'une partie relativement mineure
(1 2 %) des exportations mondiales pour un to~al de 20.000.000 de tonnes
de sucre centrifugé (soit moins dù tiers de la production mondiale).
Il s'aQit d'un marché résiduel, caractérisé par une instabilité per-
manente qui lui confère un pouvoir amplificateur des aléas de l' équili-
bre mondi~l dont il convient d'~tre conscient.
- Les marchés préférentiels résultent d'accords passés entre
quelques gros exportateurs-consommateurs (les USA, l'URSSS, le Royaume
Uni, le Japon, le Canada) et certains pays exportateurs de sucre (le
Î'.
Cuba, ,l'Australie, les Philippines, la France, Taiwan etc ••• ). Les
échanges se font ici pour 80 %environ dans le cadre de marchés pro-
tégés Qù·les transactions se réalisent à des cond~tions géQéralement
stables et favorables de prix négociés gr~ce à des accords particuliers,
ce qui constitue une garantie de prix et d'écoulement (Ou d'approvi-
sionnement pour les importateurs quelle que soit la conjoncture écono-
miquet. Les accords les plus importants sont
J i
le U.S Sugar Act, qui réglemente les importations des
Etats Unis,
le commonweath Sugar Agreement, qui organise les échanges
.. .1. · •

-
150 -
entre .La Grande Bretagne et les pays producteurs du Canmonweath,
_ l'accord Cuba-Comecon pour les transactions entre Cuba,
l'Union "Soviétique et les pays de l'Est,
- l'accord entre les pays du Marché Commun conclu en 1966
pour une durée de 7 ans,
- l'accord sucrier africain et malgache qui règle les achets
des ~fricains à Madagascar et au Congo essentiellement.
Ce dernier accord sucrier OCAM avait pour objectif de coordonner les
politiques de production et de canmercialisation des pays signataires.
Parmi ceux-ci, les deux pays exportateurs (Madagascar et Congo Brazza-
ville)-se voyaient accorder chaque année des contingents d'exportations
à des prix garantis tandis que les pays importateurs s'engageaient à
s'apPfovisionner à concurrence de 70 %de leurs importations dans ces
<,
f
deux pays.
En liaison avec les avatars que conna1t l'OCAM depuis plu-
sieurs années (départ du Zaire, de la République populaire du Congo,
du Cameroun, du Tchad et de Madagascar), l'accord sucrier n'a en fait
fonctionné de façon satisfaisante.
/
.
'
Or, Andras November ava1t annoncé, selon les derniàres donn8es,
la production mondiale du sucre brut à environ 92,6 millions de tonnes
pandant , la campagne 1977-1978 (1). La prpgression moyenne depuis 1974
est envipon de 5 %par an. Cette production a atteint aujourd'hui plus
de 100 millions de tonnes. La consanmation mondiale est estimée à 86 mil-
lions de tonnes~ La quantité résiduelle du sucre non consanmé en stock
qui était éV8luée à 30 millions de tonnes en 1978 dépasse aujourd'hui
le tiers de de la production mondiale. Et canme le sucre est un
pro-
duit de zone temp~e ou tropicale, il peut être produit pratiquement
partout ~ partir de la canne à sucre ou des betteraves. "Il n'y a
(1) Vi11ege piégl!
op cit
p . ; ' .
.../ ...

-
151 -
qu'unp quinzaine de P2YS au monde seulement qui ne produisent pas
de sucre" (1). Il en résulte que le marché du sucre est un marché
très restreint. Quant au prix du sucre, il est des plus instables
peur une "matière première.
En effet, particulièrement bas pendant la période 1965-1968
(1,8à 2,1 cents), le prix s'est sensiblement redressé par la suite.
"
Cette hausse était due à une pénurie d'approvisionnement. Puis au
mois de novembre 1974, le prix du sucre "grève le plafond" et atteint
un record historique de 57 cents la livre qui est six fois supérieur
au prix.tlu m~me mois de l'année précédente. Depuis lors, la chute des
co~rs mo~ux a été vertigineuse et le prix est tombé au-dessous de
10 cents. Mutant d'éléments concrets pour affirmer que "les perspec-
tives d'avenir du marché du sucre sont plutot sombres". Il faut dire
enfin que la consommation mondiale du sucre a atteint un palier au-
delà duquel la croissance ne peut ~tre que tr8s lente. Dlaute~plus que
,
dans les pays industrialisés, gros consommateurs de sucre, les signes
de saturation apparaissent et on prévoit la stagnation ou un léger
déclin de la consommation de celui-ci. Aussi convient-il d'ajouter que
la p~ssibilité de substituer le mais au sucre ne milite pas du tout
, ~ ~
en fav8Lr des pays exportateurs. Depuis 1978 les Etats Unis ont mis
au podrrt un édulcorant à base de mais qui peut rempla cer le sucr-e
dans les pràcudés de fabrication des boissons. Cr, l'industrie des , '
boissons sucrées (limonades, boissons à base de fruits et de cola)
est l'un des plus importants acheteurs du sucre à usage industriel.
Si cette ~ventualité s'étendait dans le monde, elle ne ferait qu'écra-
ser les "petits" exportateurs corme la Cote dl Ivoire.
(1) Village'pi6g8
op cit
p. 3.
. . .1. · ·

.,"'~.
650
605
V,-
. - -
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
- . -
-
600
1
1
~ .
1
t .
"
1
,
,~'
i · - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
.
550
1
.~.
li
f ~
1
1
1
_L
.L;
; - , . . - - - - - - - - - - - - . - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
C.
,
500
1
4 0
1
1
1
. "1
.- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
450
1
,
1
1
'\\
1
l
,
1 .
,:-~- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - --
400
-- -- - - -,-
1
1
1
,
1
1
1
1
1
, 1
1
'1
,
,.....,:. - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - --
350
-- - - - - -,--
1
1
"
1
1
1
"

.
l '
1
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
L
, __ 300
.
1
1
1
1
,
260
1
• 1
1
····1
- - - - - - - - - - - - - - - - - L -
250
I
1
:
1
1
1
1
,.
1
1
1
1
1
-,------1 - - - - - -
_ _ _
_ _ _
_ _ ~
l_
200
I
1
1
1
1
1
1
1
1
. ~
1
1
J
1
1
1
_ _ _ _ _ _
_ __L
_
(
1
- - - - - - - - -
- - -1- - - - - - - 150
1
sucre bru
1
1
1
1
1
CA F'
1
1
J
f i L ! .
1
1
1
1
1
1
t
1
1
1
100
2') Juin
Z, 1
0

-
153 -
Evolution du prix du sucre en 1975.
CAF LO!1dres
~/t.l.
r - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - , 500
480
!

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
450
t
.
- - - - -~;..---------------- - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
400
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
350
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
300
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
250
- :-- - - .-- - - ,- - -
':'-,- - - - - - - - - -- --
200
'\\
,
\\
150
100
31D
28J
25f.
2Av
29Av
3Jn
11Jt
29Jt
2S
30S
280
2D
30D
24Jn
- - - sucre brut
-----sucre raffiné

-
154 -
ÉVOLlI10N DE LA PRODUCTION MONDIALE DEPUIS 1965-1966
E~ MILLIONS DE TONNES DE SUCRE BRUT
.. (années de campagne 10 • septembre· 31 aoùt)
en MT
(v, bruI)
101.5
100
95
90
85
80
1"
1
75
1
1
1
70
1
1
1
1
65
1
1
auaiss&.1b1t - - mayen :
1
60
r1+-------"...2,4%-----....,~~'+4----... :l.S%
~I.
0,2 % ~
1
1
1
,
1
i
1
1
h
1965166
67168
69no
rurz
73174
75176
rrae
79180
81182
83184
85186
87
So,erce : F.I.R.S.• cltiffrca: F.O. Licltt
(
Depuis
le
début du siècle,
les besoins
en
sucre de l'humanité se sont multipliés par plus de 12 passant d'à
peine plus de 8 millions de tonnes en 1900 à plus de 101 millions
de tonnes en 1986.
L'augmentation
de la
consommation
mondiale
s'est faite sur un rythme supérieur à celui de la population,
il
en est résulté un accroissement per capita.
Son évolution depuis les années 1900 a été la
suivante :
- de 1900
à 1930,
la consommation
per
capita
est
passée de 5 kg par an à 12 kg par
an,
soit
140
%
d'augmentation.
de
1930
à
1950,
elle
est
restée
stationnaire.,
.
- de
1950 à 1970,
elle a repris
de
près de 12 kg en 1950, elle est passée à 20 kg en 1970, soit 66,5
7. d'augmentation' en 20 ans.

-
155 -
ÉVOLUTION DE LA CONSO~IMATION MONDIALE DEPUIS 1965-1966
(en millions de tonnes de sucre brut)
(années de campagne 1·' septembre· 31 août)
en MT
(v. brut)
101,4
100
95
90
85
80
75
1
70
1
1
1
65
1
1
aa:roissem!lT\\ ~ moyen :
1
60
~
+ 2,5% ------------.~t'IlI4~+ 2,6 %-..
1
1
1
1
1
1
1
1
1
i · 1
1965166
67/68
69no
73174
75176
rrrre
79/80
81/82
83184
85186
SUI,ree: F.I.R.S.• chi.jJ'ns F.O. Licht
Pendant cette période,
et jusqu'en 1974,
la
consommation mondiale a subi une progression continue qui
s'éta-
blissait autour de 3,3 7. par an.
Pendant cette même période,
la
population
s'étant
élevée à un rythme moyen de 2 7. par
an,
la
consommation
individuelle
s'est
progressivement
développée,
surtout celle des pays pauvres.
Mais la pénurie de 1974, déclen-
chant une hausse des cours sans précédent,
a provoqué un
ralen-
tissement de cette progression. La reprise qui s'est annoncée dès
les campagnes suivantes a permis un accroissement moyen annuel de
4,2 7..
Après
une quasi-stagnation,
due à
la
très
forte
hausse des cours de 1979 à 1981,
la consommation a repris
sa
progression,
mais
à un rythme nettement
inférieur
et
qui
semble décroître progressivement.
Ce
ralentissement
est

d'une
part
aux
difficultés . économiques
et financières croissantes des pays
en
voie
de développement,
les importateurs notamment,
et
d'autre
part
à la baisse de la consommation des pays développés du
fait
du
remplacement
du
saccharose
comme
nous
l'avons
déjà
précédemment signalé.

- 156 -
Les autorités politiqu~s et administratives n'ignorent pas
cela. Des études de marché, de rentabilité, de prospection et de fac-
tibilité avaient précédé la naissance du plan sucrier. Toutes ces dif-
ficultés leur avaient été signalées. A titre d'exemple, l'une des
conclusions des études de contribution à la définition d'une stratégie
sucri8re enCt:lte d'Ivoire disait ceci: "Compte tenu des conditions
propres à la Ct:lte d'Ivoire (pays sans expérience ni infrastructure
sucrière, éloignement de la cote des zones de production possibles,
nécessité d'une irrigation au moins partielle, coot élevé de la main
d'oeuvra, par rapport à d'autres pays sucuiers), il semble peu vraisembla-
ble d'imaginer que le prix de revient du sucre ivoirien puisse être com-
pétitif aV~c des prix moyens 6,5 cts (de 1974) F.O.B. port des Caraïbes
(ceci reste néanmoins à démontrer)".' Une telle mise en garde aurait dO
entra1ner une prise de conscience au point d'éviter cette grande naïveté.
3~2. - Le Plan Sucrier Ivoirien, victime d'une certaine naïveté
L'étude de stratégie sucrière de la Ct:lte d'Ivoire (1974)
avait indiqué que la tendance générale des pays en voie de développe-
ment à assurer eux-mêmes une grande partie, si ce n'est la totalité,
de la satisfaction de leurs besoins sucriers ne s'est pas trouvée
démentie par les projets en cours sur le continent africain dans son
ensembl~ et chez les pays membres de l'OCAM en par~iculier. Le souci de
~ i
développer leurs économies et de soulager leurs balances commmerciales,
l'augmentation rapide de la demande de sucre liée à l'essor démographi-
que et à l'~lévation du niveau de vie, les hauts niveaux atteints par
les cours mondiaux ainsi que les vicissitudes qu'a connues l'accord
sucrier de l' OCAr1 ne sont en effet pas ét.rangers à la multiplication·
des projets sucriers qui est intervenue au cours des dernières années
ou des derniers mois. On peut en citer quelques exemples (voir le
nombre de pays africains producteurs tableau nO .IJ." c:i;"d~ssou's) •
. . ·1· ·,.

'\\
- 157 -
Tablsê:<u n° 19
Les paye africains producteur. exportateur. de sucre

Production en milliers de tonnee
Produc-
~ Produc-
P a y
s
tion
P
a
y s ·
1
tion
f-----------+--------\\
-
--------1
A19érie
12
t·10 z a mbig u E:
214
Angola
36
Nigéria
35
Cameroun
50
Réunion
262

Tchad
20
Sén~gal
35
Congo
15
Sierra
Leone
o
Egypte
685
Somalie
35
Ethiopie
183
Afrique du Sud
2.244
Ghana
6
s o u d an
;1 4 1
Côte d'Ivoire
109
sv a a Lï a nd
", 253
Kenya
414
Tanzanie
1 1 B
Li by e
t
"
o
Tunisi.e
7
,L
Haùélgascar
1 1 7
Ouganda
5
Nalawi
114
Zaïre
55
Mali
16
Zambie
102-
Ile Haurice
730
z Lmb a bw e
,: .31 4
Mùroc
367
Autres pays
50
ur icai ns
'---------,---'-----'----1
Source 1 Le plan sucrier et .on environnement international
Seor~terist Général de la Sodssucre
Ce tableau re1.tif eux pays efriceine exportateurs da .ucre exclut
ceuX qui le produisent pour leur ~toconeommation. C'est encore la preuve
que le merch' de sucre est re.treint mIme au niveau de la eou. r'gion.

- 158-
- Au Sénégal, la réalisation de la sucrerie de la Compagnie
Sucrière Sénégalaise a débuté en 1972. La production prévue était de
100.00otonnes, pour une consommation actuelle de 80.000 tonnes, et
.
devrait pèrmettredcnc de satisfaire la demande intérieure lorsque la
pleine capacité serait atteinte. Le Mali, la Haute Volta (actuel
Burkina), le Bénin, le Tchad, le Ghana et bien d'autres étaient tous
producteurs pour l'auto-consommation à cette époque. Madagascar et l'Ile
Mauric~, enfin, qui étaient déjà des pays exportateurs de sucre ont égale~
ment envisagé une extension de leurs capacités de production (Madagascar
200.000 ,tonnes en 1980, contre 110.000 tonnes en 1972). C'est dans cette
atmosphère que la Cote d'Ivoire a lancé le programme sucrier. Pour la
plupart oes pays africains de la sous région la tendance du début s'étant
maintenue et renforcée, la CEAO et la CEDEAO ne constituent plus à pro-
premenr,parler des débouchés très sOrs comme l'espèrent les perspectives
ivoiriennes. Comme par le passé où la Cote d'Ivoire s'est heurtée aux
lois du marché, l'avenir n'est pas davantage souriant~ Le second point
de la naïveté concerne l'objectif politique du plan sucrier (cf les
objectifs) ~ Eviter de faire des jaloux malgré tout. Bien que l'on
n'ignorait pas les difficultés du marché du sucre, les autorités ivoi-
riennes n'ont pas hésité à multiplier les complexes. Cette volonté a
été encouragée par les marchands d'équipements qui se sont aussitOt
offerts à réaliser les complexes en apportant les financements. Améri-
1
cains, ~~~~iens, Européens se sont bousculés pqur vendre leurs services •••
à prix fort aux Ivoiriens, novices en la matière et peu au fait des
subtilités d'une industrie très concentrée au niveau mondial •. De plus,
constructeurs étrangers et intermédiaires ivoiriens voyaient dans ces
énormes investissements des possibilités de réaliser, chacun de leur
.../ ...

- 159 -
c~té, de J~teuses affaires (1). Ce qui donne pour un coCt global du
plan sucrier, réduit à six unités, plus de 300 milliards de F CFA (le
coot des complexes variant entre 35 à 50 milliards F CFA pour une
cap~cité encore théorique de 45.000 ~ 60.000 tonnes par an). A titre
de comparaison, le complexe de la CAMSUCO, au Cameroun a cooté un peu
plus de 15 milliards pour une capacité de 50.000 tonnes par an ; la
sucrerie de Banfora en Haute Volta (Burkina Fasso) produisant 35.000
tonnes par an n'a cooté que 11 milliards. Les coots ont donc largement
dépassé les prévisions initiales, ce qui entra1ne une ponction financière
énorme de la caisse de l'Etat au titre de remboursement, sane compter
les intérêts qui se chiffrent au moins à 60 milliards fi, CFA. C'est que
l~r~le de la plupart des opérateurs a constitué en fait, un des plus
gros scandales de cette affaire. Comme le dit Jeune Afrique, "l es Ivoi-
riens se sont vulgairement fait rouler plus dtune fois" (2)~ Dans la
procédure tout d'abord: les financiers ont presque toujours imposé
l'origine q~ matériel sans que l'acheteur ait son mot à dire. Les marchés
de gré, à gré.ont d'autre part empêché la concurrence de jouer et les
Ivoiriens de marchander le prix de leurs complexes. Enfin, les opéra-
teurs, èurop~ens en particulier, "vieux routiers en matière de sucre,
'savaient tous fort bien que la C~te d'Ivoire aurait d'énormes difficultés
de commercialisation et que le coot de réalisation rendrait son sucre
invendable au cours mondial. Mais ils n'en ont guère soufflé mot, trop
heureu~ide réaliser des investissements inespérés dans un contexte de
crise économique".
(1) Le 20 juillet 1977, les ministres Henri Konan Bédié, Abdoulaye
Sawadogo et Mohamed Diawarra qui dirigent la politique économique
sont évincés du gouvernement pour les erreurs et les malversations
qui ont·entouré la réalisation du Plan Su~rier.
(2) Jeune Afrique nO 1013 du 14 janvier 1980.
Sucre, cacao, la C~te d'Ivoire victime de ses amis
p. 58 •
...1...

- 160 -
Tout cela a fait que le rêve des Ivoiriens a été vite brisé
au point que "le projet du siècle est devenu un cauchemar (4 complexes
au .1 ieu "de 12).
/
r~ais tout comme AtllDRA5 ~IOVEM8ER qui se demandait (en 1978),
après avoi~ dress~ le bilan du march8 mondial du sucre, où se situera
1
.
la production sucrière de la Cote d'Ivoire dans la jungle du marché
international, nous posons égale~ent la question de savoir : la Cote
d'Ivoire a t-elle encore sa chance dans cette compétition?
Certes "la décision de réaliser dix complexes fut politique.
Quar.d il fallut rEvenir à plus de réalisme, on s'aperçut qu'on aurait
, "
jamais dO en program::ler plus de six en un si court laps de temps" (1).
La 'précipitation dans laquelle le plan fut r8alisé pour pouvoir exister
internationalement en 1980 fut fatale. La Cote d'Ivoire a surestimé ses
capacités de na1triser un programme aussi vastè dans un domaine qui lui
était Inconnu et qui est de l'avis général "un monde pourri". C'est
pourquoi il convient d'attendre encore avant de répondre à ces interro-
gations car seul l'avenir déterminera l'issue pour le sucre ivoirien.
Pour l'heure l'incertitude demeure en dépit du grand optimisme qui
habite les res~onsables de la Sodesucre.
3~3. - La coupe manuelle des cannes, une nécessité qui s'imoose
Il est vrai que dans les objectifs du plan sucrier, la coupe
manuelle dep cannes a été définie comme étant une mesure surtout sociale.
Elle se présente davantege de nos jours Comme un fait économique. En
effet selon le D.G.A., la coupe manuelle est souhaitable voire préférable
à la coupe mécanique pour plusieurs raisons :
- d'abord perce qu'elle rGrmet de procurer du travail à plus
de 1. [00 rcrso~1nes qui peuvent en t.irer "d'importants
revenus".
(1) Jeune Afrique
op cit p. h2.
. . .1. . .

- 161 -
- Ensuite, elle est généralement.d'une bonne qualité par
rapport à la coupe mécanique. L'andainage soigneusement fait par les
manoeuvres facilite le glanage et évite les pertes de cannes. En revanche
la coupe mécanique entraine d'énormes pertes de cannes. Le reglage de la
machine qui se fait en fonction de la longueur d'une Canne standard ne
tient pas compte de -petites ou de graneles cannes. Il en résulte beaucoup
de déchtts dans le traitement au niveau de l'usine. Il y a également
les nombreuses cannes qui écchappent ou qui sont rejetées hors de la
. cabine et qui ne sont donc pas recupérées au moment de la coupe.
- Enfin compte tenu de l'état du terrain, le niveau de la coupe
au ras du soi n'est pas uniforme, ce qui ne favorise pas une bonne re~- .
pousse. Il est évident qu'en cas d'abondance de cannes, ces pertes sont
mineures par rapport à la quantité exploitable.
Ce qui n'est pas le
cas en temps de vaches maigres (année 1983-1984) où toute perte si
mineure soit elle a son importance. Il existe aussi beaucoup d'autres
risques qu'ii convient de signaler ici.
En effet dans le rapport de t'lonsieur Jean ferger (mai-juin
1980), repris par Hr SORO Roger, responsable de la planification, des
études et de l'information, à l'occasion du séminaire de fin de campagne
à 80rotou Koro (5 au 12 juin 1982) tous les souhaits militent en faveur
de la coupe manuelle (1). Au siège de la Sodesucre, c'est le m~me langage.
On estime ainsi que sur le plan des retombées économiques, il est plus
intéressant de fqurnir des emplois et des salaires mêmes temporaires
que d'importer des machines consommatrices dénergie et qui apparemment
ont un taux d'usure rapide. Sur presque tous les complexes mis à part
~- ~
-.
80rotou situé sur un plateau homogène, des accidents de terrains sont
défavorable~ à la coupe mécanique et les sols siliceux accélèrent l'usure
(1) Rapport de mission
coopération et aménagement
op cit
p. 11 •
...1...

- 162 -
du métériel. Et comme le coüt des machines et des pièces indexé sur
l'inflation mondiale, augmente de 15 à 20 %par an et celui de l'énergie
au moins autant, la différence entre le prix de revient de la coupe
mécanique et la coupe manuelle, déjà de 20 %à 50 %en faveur de celle-ci
ne fera qu'augmenter à l'avenir d'autant plus que le rendement des
coupeurs augmente avec le temps. Il serait souhaitable d'arriver à long
terme à 70 %de coupe manuelle, le reste étant assuré mécaniquement
par sécurité. Mais ceci n'est possible que s'il y a une politique de
peuplement fixe à proximité des complexes, ce qui n'est pas le cas pour
..
le moment.
Affirmer cependant que l'absence de coupe manuelle constitue
fondamentalement un handicap pour la 50desucre serait trop toto La
nouvelle o~ientation qu'elle a choisie doit nous convier à la prudence à
long terme. Les responsables envisagent désormais de prendre toutes les
dispositions nécessaires afin d'assurer normalement la coupe au cas où
les coupeurs locaux feraient défaut bien que cela soit plus coOteux.
Deux heures de coupe mécanique équivalent à plus d'une journée de coupë
.:
manuelle (tous les coupeurs réunis). En ce qui concerne Zuénoula, la
solution q~i consiste à récourir auX manoeuvres en provenance du Nord
est tout de même cooteuse. Plusieurs semaines de campagne dans le Nord,
plusieurs jours de transport de personnes engagent d'énormes frais de
carburant et d'entretien de véhicule (plus de dix vùhicules chaque année)
\\~
sans compter les risques d'accidents et de fatigue physique. Cette
solution de substitution ne semble pas très adéquate. Si les traitements
actuels pes coupeurs ne s'améliorent pas dans un proche avenir, c'est
une solution qui conna1tra des limites. Déjà le complexe souffre d'une
grande i~stabilité de main-d'oeuvre. Chaque année, moins de 20 %des
anciens coupeurs reviennent. On assiste aussi à une régression du
nombre de travailleurs en provenance du Nord au fil des ans. A la ve!lle
. . .1· · ·

- 163 -
de la campagne 1985-1986 par exemple, moins de 500 per$onnes ~taient
inscrites. Il n'est donc pas évident qu'à la longue, le complexe de
Zuénoula puisse compter sur une coupe manuelle (valable même pour les
coupeurs en provenance du Nord) bien que celle-ci s'avère absolument
plus rentable pour la Sodesucre à tous les points de vue. Chercher à
résoudre. ~es fJru;;l~tlll::1s, c'est envisager les voies et moyens dl une
v~r~taDle ~ntégration du complexe de Zuénoula.

-
164 -
TROISIEMENT PARTIE
LA PROBLEMATIQUE DE L'INTEGRATION DE LA
SODESUCRE DANS LA SOCIETE GOURO.
CHAPITRE V
LES FACTEURS DE RESISTANCE
A - LE TEMOIGNAGE DE JEAN-PAUL BENOIST
(MISSION CATHOLIQUE DE ZUENOULA)
(ENTRETIEN DU 31-12-1984)
Nous
Il Y a quelques années, vous avez écrit une lettre au pays Goura et qui se
trouve dans ce livre (1). Vous y avez évoqué beaucoup de choses. Pensez-vous
que ces choses sont aujourd'hui vérifiées?
Et si vous aviez à refaire cette lettre, que diriez-vous après quatre années
de fonctionnement du complexe de Zuénoula.
J.P. BENOIST:
Si j'avais à réécrire cette lettre, je redirais ce que
j'ai déjà dit. Vous savez, la SODESUCRE n'Lqrior-e pe s les problèmes qu'elle
rencdntre à présent. Tout était prévu à l'avance et elle pouvait prendre les
dispositions nécessaires pour les éviter. Je l'ai déjà dit à plusieurs repri-
ses à Honsieur le Directeur Général Adjoint à chaque fois 'que j'en ai l'occa-
sion. I l le sait lui-même. On dit aujourd'hui que le Goura ne travaille pas,
qu'il est paresseux, je dis non. I l n'y a pas un peuple aussi travailleur
que le Goura. Ce r t e s depuis des années, i l ne pleut pas et les jeunes sont
obligés d'abandonner les villages. Pourquoi voulez-vous qu'ils aillent tra-
vailler à la SODESUCRE ? Pour rien? On ne leur donne rien. Il n'y a rien
qui puisse les encourager à rester là-bas. Il y en a quand ils sont blessés,
on ne s'occupe même pas d'eux. Vous ver~ez, ils vous le diront eux-mêmes.
Il son~ dupés pas les petits chefs qui abusent d'eux à tout moment. Comment
pensez-vous qu'ils accepteront de travailler dans ces conditions. Avec les
pluies de cette année tous ceux qui sont restés au village ne le regrettent
pas. Ils ont cultivé le coton qui leur a rapporté énormement. Si cela conti-
nue,vous verrez qu'ils n'iront même plus chercher du travail à la SODE5UCRE.
D'ailleurs tous ceux qui sont allés cette année sont pour la plupart des
déscolarisés ; il Y en a qui ont le niveau de la classe de 3è ou de 1ère
qui veulent avoir un peu d'argent. C'est tout.
Ici au pays Goura le travail est un fait communautaire. J'avais
dit dans la lettre dont vous parlez qu'il fallait éviter la rupture entre
le milieu familial communautaire et ce travail qui ressemble à celui du
(1) Il ~'agit du village piégé djj~ cité.
Page,3.

-
165 -
temps colonial, au travail forcé. Vous savez que les Gouro ont longtemps
résisté ~ la colonisation et ils sont toujours prits à s'opposer à tout ce
qui s'en apparente. Je me demande bien si à l'avenir il y aura des coupeurs
parmi les Gouro.
Enfin! Demandez-vous s'ils sont traités de la mime manière que les tra-
vailleurs venus du Nord et essayez de voir comment ceux-ci réagissent aussi. Tout
ce que je peux vous dire, c'est que la SODESUCRE sait très bien, elle n'ignore pas
du tout ce qui va lui arriver. Tous les Gouro qui sont recrutés sont en majorité
des manœuvr es'.
Parmi eux, il y en a qui sont saisonniers depuis 5 à 6 ans ; Comment
voulez-vous qu'ils vivent continuellement dans cette atmosphère d'insécurité? Et
puis vous verrez aussi que mime ceux qui sont embauchés de façon permanente n'accè-
dent pas facilement à une promotion. Depuis que le complexe a été construit, il
n'y a même pas un seul cadre Gouro ! C'est tout cela qui les décourage.L'autre
jour un jeune employé est venu ici me dire qu'on a avancé (en grade) son col-
lègue qui est arrivé bien après lui à la SODESUCRE. Il m'a mime dit que certaines
tâches sont réservées aux parents des patrons. Voyez par exemple au niveau des
services q énér aux ,vous ne trouverez aucun Gouro si ce n'est dans les plantations.
"Au produit fini il. n'y a aucun Goure
(1).
Quoiqu'il en soit je l'ai déjà dit
dans la lettre, on peut toujours espérer, si la SODESUCRE le veut bien.
Nous
A vous entendre et à vous voir parler, on a comme. l'impression que vous
prenez parti, vous avez une position passionnée à ce ql.E je pense?
J.P. BENOIST: si vous voulez. Ce n'est pas de la passion, mais ce que je vois cha-
que jour, ce que j'entends toujours. J'ai beaucoup de jeunes ici qui sont venus
de là-bas et,· depuis 2 ou 3 ans ilsn'y vont plus. Moi-mime j'y vais parfois quand
l'occasion m'est donnée. Je parle donc en connaissance de cause. Je suis au pays
Gouro depuis plus de trente ans i je sais comment est le Gouro et comment il vit.
Nous : Mon père, avant la construction du complexe, vous disiez dans la même lettre
que la SODESUCRE allait apporter des améliorations dans la région en parlant de
beaucoup de choses à la fois.
Qu'en est-il exactement?
J.P. BENOIST: Mais c'est ce que j'ai dit, je pense vous avoir répondu. On ne peut
pas dire que la SODESUCRE n'a rien apporté ici. Vous savez que tous les travailleurs
permanents dorment en ville. Ils louent donc les maisons, ça c'est quelque chose!
(1)
VLO Félix, Représentant U.G.T.C.I.,(entretien du 01-01-1985) lIe confirmé.
\\

-
166 -
Ils achètent du vivrier, ça aussi c'est quelque chose!
Mais en réalité il n'y a pas grand-chose. La SODESUCRE a son dispensaire sur le
complexe, c'est uniquement pour soigner ses travailleurs. En tout cas je ne vois
rien d'autre. Vous êtes de la région, visitez la ville et vous verrez s'il y a un
changement notable même au niveau de la structure.
Ce témoignage clairement exposé a été confirmé par les propos de certains
ttavailleurs, de certains chefs d'équipe et par ceux de quelques responsables de
la Sodesucre dans les pages qui suivent.
B - LES fACTEURS INTERNES DU COMPLEXE
1. - Le système administratif, une hiérarchie repressive
1.1. - La procédure d'exercice du pouvoir
Dans la hiérarchie du pouvoir du complexe (cf schéma page160)~ les ou-
vriers et les manœuvres occupent le bas de l'échelle. C'est sur eux que repose le
fonctionnement du complexe. Leurs tâches sont très variées (coupe de canne, sarcla-
ge, glanage, planting etc ••• ). A leur tête se trouvent des chefs d'équipe également
ouvriers ou man~uvresdésignés parmi les plus anciens pour leur sérieux et leur
assiduité au travail. Ils sont chargés principalement de transmettre les directives
et instructions de la Direction aux ouvriers et manœuvres qu'ils encadrent, contrô-
lent et surveillent.
En plus de l'organisation du travail de leurs équipes respectives, ils
sont dotés d'un pouvait disciplinaire par le fait même qu'ils notent les absences,
apprécient la qualité du travail et effectuent parfois le recrutement des membres
de leurs groupes. Ils jouent le rôle d'intermédiaires entre les manœuvres et les
chefs de chantier à qui ils rendent compte de leurs activités quotidiennes et,
avec lesquel~ ils apprécient la prestation des travailleurs. De par leur position
sur le chantier et/ou à l'usine, ils sont les premières personnes à faire face aux
plaintes et revendications des ouvriers et manœuvres.
Ils sont par ce fait exposés
aux colères, haines et mécontentements des coupeurs et autres. C'est pourquoi ils
. doivent jouer le rOle de véritables meneurs d'hom~es et de catalyseurs.
Cela est si évident que la plupart des manœuvres ne connaissent généralement pour
seuls chefs que les chefs d'équipes avec lesquels ils entretiennent des relations
purement professionnelles de chefs aux subordonnés.
Au-dessus des chefs d'équipe viennent les chefs de chantier. Les seconds
sont chargés d'encadrer les premiers, de leur indiquer les tâches à faire et de
veiller au bon déroulement des travaux. Ce sont eux qui notent les chefs ~'équipe
en fonction de la prestation et du rendement des groupes que ceux-ci dirigent. Ils
.../ ...

_.r
-
167 -
jouent le rôle de gendarmes sur les chantiers et rendent compte aux chefs de ferme.
Ce sont ces derniers Cresponsables· des fermes) qui supervisent le travail des au-
tres et coordonnent l'ensemble des activités de la ferme. Ils rendent compte à leur
tour au chef de production qui se réfère au directeur de plantation ou d'usine. Il
ressort de cette présentation que la structure du complexe est très hiérarchisée
(schéma ci-dessous) et que le pouvoir y est assez rigide.
La hiérarchie du pouvoir
D. G.
A.
autres"dir~CtiOns
Les
Les Chefs de
lservice (Chefs de ferme)
l
Chefs de chantier
~
Chefs diéquipe
Les ouvriers et manœuvres agricoles
Cette hiérarchie en cascade pose de nombreux problèmes de responsabilité,
de communication, d'appréciation des prestations des différentes catégories de tra-
vailleurs et de relations entre eux.
En effet, de toutes les interviews et rencontres que nous avons eues et
surtout de l'important entretien-débat que nous avons organisé à la ferme A 27 le
jeudi 3 janvier 1985 de 10 heures à 12 heures jo -e~tre 8 chefs d'équipe, 3 chefs
de chantier et une trentaine de manœuvres (au départ)
(1), il ressort que l'une des
raisons principales qui opposent sans cesse les chefs de chantier à leurs subordon-
nés, c'est bien l'abus d'autorité matérialisé par une intransigeance (jamais claire-
justifiée) et où chacun se borne à accuser et à mettre en cause l'autorité supérieu~
re. Par exemple à la question de savoir :
Vos camarades (les manoeuvres) viennent de dire que vous êtes méchants,
durs avec eux, que vous leur donnez des zéros même quand ils ont terminé leurs
tâches. pourquoi faites-vous cela?
(1)
L'entretien a commencé avec une trentaine de manoeuvres, mais vers 12 h,ils
étaient plus de 100. Nous ne pouvions plus contrôler le débat, ni même maîtri-
ser tout ce qui se disait. Nous avons fini par le suspendre.
.../ ...

-
168
Voici quelques réprnlses utiles à la compréhension des attitudes et comporte-
ments des travailleurs subalternes du complexe.
1.2. - Les propos de quelques témoins intéressée
- Les chefs d'équipe (leur porte-parole) :
Ce sont les chefs de chantier qui nous obligent
à leur donner zéro.
Ils nous ~enacent de nous pointer zéro si nous refusons d'obéir. Quand ils
arrivent ~ur la ferme, ils nous demandent de vérifier les travaux avec eux
(au vu du cahier de pointage). Ils ne sont jc~ais d'accord avec le pointage
que nous effectuons. Ils ne nous font ja88is confiance. Ils nous accusent
de couvrir, de protéger les ~anoeuvres. Dàs qu'ils constatent une petite
ano~alie, ils exigent le zéro, sinon c'est ncus qui perdons notre argent.
Qn est o~~igé de donner le zéroc Parfois, nous n~~es on est convaincu que
le "gars" 3 bien t erru i.né son travail, ils nous obligent. Devant vous-même
tout 3 l'heure, il m'obligeait à ~ointer zéro 310rs que le travail est bien
fait.Vou~ voyez? ";Jar exemple pour ceux qui ne terminent pas leur t~che,
c'e~~, zéro 'il~'l1e<~'il reste un ;JEU" (1).
- Les chefs de chantier (leur porte parole) :
Vous savez ~lonsieur, ici nous avons des contraintes, des impératifs
à at~eind~e et nous recevons des consignes, des inEtruction~ en conséquence.
::rus s ornrne s donc ob l i rjé s d' ~tre dur s eve c eux afin r;ue le travail soit bien
fait. Si le travail est mal fait les patrons nous menacent de renvoi. On
nous demande dl? ne f12S jouer avec eux. Et puis nos frères africains, quand
tu es doux avec eux, ils exagèrent, ils jouent 2vec leur travail. Ils tri-
chsn t ,
ils font parfois' des p oi.n tages f an t a i s i s t.e s . CO;;JrJent peut-on se fJer-
mettre de pointer des ~ens qui ne tprninent ~~~e paS leur t~che. C'est donc
la seule façon de les faire travaill~r • S'ils cessent de tricher, nous serons
doux avec eux. La Sodesucre ne nous 8p~2rtient pas. Elle appartient à l'Etat.
i~ous s omnes payés pour le travail que nous faisons.' C'n doit donc bien tra-
vailler si on vèut avoir beaucoup d'argent. De toutes les façons nous fai-
sons ce eue les patrons nous de~andent de faire pour 12 bonne marche du travail.
Concernant cette ouestion, voici un extrait des entretiens que nrus
ê.vons eus avec Monsieur le Direc~eur Général Adjoint (le 11 avril 1985) et
avec Mon~ieur nATY, Directeur des resscurces ilu~aines par intérin,.Ü.e 5 aoùt lSE5)..
- Le Direc:-eur Général Ad joint : Vous saveZ nous avons des impératifs à atteindre.
;'Jous avons reçu l'ordre de gérer la Sodesucre Comme ,un e société privée • La rentahi.Li-
(1) : SANCGO 80u rahima, porte parole des chefs d'équioe. Tous applaudl'
t
C'C"


ssen
ces 8' 1 z.rme t Lone en siJne ci' app r ob a t Lon,
.../ ...

-
169 -
té est au 1er plan. Pour la campagne, nous avons reçu un budget. Tout dépassement
de budget est interdit. Il nous appartient de faire en sorte que les objectifs de
la campagne se réalisent dans le temps avec les moyens mis à notre disposition. Nous
ne devons donc pas jouer à la base, sinon tout le système sera bloqué et, c'est une
perte énorme. Notre souci quotidien est de faire vite afin d'achever la campagne
dans les m~illeurs délais à peu de frais. Vous savez, la canne a ses exigences. Une
fois b rü l.é e , elle ne doit pas rester sur pied plus de 24 ·heures. Nrus devons fuire
vite pour éviter les pertes. Ce sont ces conditions qui guident notre conduite.
Nous reconnaissons que nos manoeuvres sont des hommes comme nous. Ils ont
raison de se plaindre du rythme de travail. Nous sommes conscients que le travail
est difficile. Mais comme je vous le dis, nous avons nos contraintes. Nous n'igno-
rons pas aussi que le comportement de cert2jnschefs d'équipe révolte les coupeurs.
Ils ne savent pas conduire leurs groupes. Les échos nous parviennent régulièrement.
Nous envisageons de prendre des dispositions pour l'avenir~ Une fiche mensuelle de
suivi par équipe (1) sera mise à jour afin de contrôler efficacement le pourcentage
de présence. Elle nous permettra d'apprécier le comportement des chefs qui sont
aptes à condui~e les équipes en fonction de la stabilité et la régularité des mem-
bres des différents groupes. Le choix des chefs ne se fera plus par hasard étant
donné que le maintien des coupeurs dépend aussi de la bonne ambiance qui règne Qans
le groupe. Bien sGr le travail de canne est difficile en lui-m~me, mais il faut
mettre un peu de baume dans le groupe.
- Le D.A.R.H.
: Nous savons que le travail est difficile, nous savons aussi que cer-
tains chefs d'équipe ou de chantier exagèrent. Nous avons les échos de leur compor-
tement. Il faut dire sincèrement qu'il y a des chefs d'équipe qui ne savent pas
tenir leurs groupes. C'est m~me la cause d'un grand nombre de départs. Ils abusent
de leur situation de chefs pour terroriser leurs camarades au moment où nous avons
besoin d'un grand nombre de coupeurs. Nous en tiendrons compte à l'avenir pour la
désignation des chefs de groupe. Il n'est pas donné à n'importe qui d'encadrer des
gens qui ont faim ou qui son fatigués au travail et qui sont déjà sur les nerfs. Il
faut surtout savoir les prendre pour éviter qu'ils abandonnent le travail. Nous fai-
sons cependant en sorte qu'il n'y ait pas de sabotage ni de tricherie dans·le tra-
vail. C'est pourquoi nous donnons des instructions fermes aux chefs de chantier
et aux chefs de ferme afin que nous puissions atteindre les objectifs de la campagne.
Nous faisons de temps en temps quelques apparitions sur les fermes en vue d'effec-
tuer des sondages. Mais ce qui est un peu gênant ici, c'est que chacun a son
(1) Cett~ fiche existe déjà et a été eXpéri~8ntée en juillet 1985 au niveau
de 5 équipes. Il semble que le résultat est concluant •
.. . .1. · ·

- 17D -
travail, chacun a sa tâche bien précise et nous faisons beaucoup plus de l'adminis-
tration
que de la gestion des ressources humaines proprement dite.
1.3. - Produire du sucre dans les meilleurs délais à peu de frais
Nous re~enons de ces différents déclarations trois situations essentielles
à savoir
- un grand abus d'autorité des chefs lié à la sauvegarde des intérêts respectifs de
chacun d'eux;
- une forte pression exercréeduhaut vers le bas justifiée par un souci constant de
rentabiliser l'entreprise sucrière à moindre frais et~
- le rythme élevé du travail entraînant une certaine inadaptation du travailleur,
source de révolte ou d'abandon.
Ces situations ont été évoquées par tous ceux que nous avons interrogés. Le
souci de produire "beaucoup de sucre dans les meilleurs délais à peu de frais" suffit
à lui seul pour expliquer et comprendre l'attitude et le comportement des producteurs
directs. Vouloir exploiter au maximum la force de travail des manoeuvres sans compen-
sations a pour conséquence la fuite des bras et la réduction de la production. Cela
se confirme par la distance qui sépare les différentes ~atégories de travailleurs et
l'atmosphère d'isolement, d'abandon et de sévices dans laquelle travaillent les
manoeuvres. Il s'agit d'une situation d'autant plus dramatique que les manoeuvres
ignorent totalement leurs propres droits. Leur seule réaction face aux abus se borne
soit à une révolte spontanée ou à une résignation, soit à l'abandon de leur poste
de travail sans jamais réclamer leur dû. A l'instar des ouvriers d'usine et des au-
tres travailleurs qui peuvent saisir les délégués du personnel en cas de litige,
les manoeuvres ne peuvent se faire entendre par les responsables. Leur vie se dérou-
le entre les plantations et les villages de coupeurs~ La vérité est qu'ils n'ont
ni le temps, ni la possibilité de s'informer, et de connaître les délégués du per-
sonnel. Aucun des 30 coupeurs de l'équipe II de la ferme A 27 ne connaît l'existence
des délégués du personnel. Les seules personnes auxquelles les manoeuvres auraient
pu s'adresser en.cas de litige (avec leurs chefs) sont les chefs de chantier. Or
ceux-ci sont considérés comme les "chiens méchants" dE;! l'établissement, car c'est
sous leur pression que les zéros sont distribués.
La méconnaissance de leurs droits et la cloison qui les sépare de leurs
chefs hiérarchiques et de la Direction sont caractéristiques des grandes entreprises
industrielles des pays sous-développés où la division des tâches et la spécialisa-
tion très poussée peuvent constituer une entrave à leur bon fonctionnement. Seuls
13 coupeurs sur 62 (des équipes l et II de la ferme A 27) connaissent le D.G.A
. . . 1 . . .

-
171
-
"On les voit toujours passer l~ en voiture, mais on ne sait pas qui est le
.patr on'' (1).
Pour la Direction, ce sont les chefs d'équipe et de chantier qui ne font
pas leur travail d'information.
En réalité le système d'information par tableau d'affichage pratiqué ~ la
SODESUCRE marginalise davantage les manoeuvres en général et les illettrés en parti-
culier, car non seulement ils ne disposent pas de temps libre~ mais ils ne savent
ni lire, ni écrire. Même si au niveau de la Direction on pense que les informations
relatives ~ la vie et au fonctionnement du complexe arrivent jusqu'aux manoeuvres,
la situation inverse est pratiquement impossible, dans la mesure où la base ne sait
comment atteindre le sommet. C'est pour cette raison que pour la plupart des manoeu-
vres, il n'est ni nécessaire, ni indispensable qu'il y ait des délégués du personnel
~ la SODESUCRE de Zuénoula. Pour les travailleurs permanents les délégués sont im-
puissants. A l'usine comme dans les plantations, on les accable de tous les maux
(sans fournir véritablement de preuves concrètes). "Ils sont incompétents et corrom-
pus". Selon l'ëxpression consacrée ~ la SODESUCRE, "ils cherchent leurs places",
c'est-~-dire qu'ils suivent la voie de leurs propres intérêts. Aux dires des enquê-
tés les délégués n'ont jamais pu résoudre un seul problème de licenciement ou de
retenue sur les salaires.
A toutes ces qéclarations, le représentant des délégués répond qu'un délé-
gué du personnel est aussi un employé comme tous les autres travailleurs. "Il ne
peut ni se substituer ~ la Direction,ni lui imposer quoi que ce soit"
(2).
Il convient cependant de dire que le problème de la distance entre le
sommet et la base d'une part et entre les chefs et les manoeuvres ou ouvriers d'autre
part est réel. A ce niveau, informer et former les délégués du personnel constituent
une nécessité absolue pour un meilleur encadrement de tous les travailleurs. Cela
est d'autant plus important qu'ils le souhaitent tous vivement~ car la plupart affir-
ment n'avoir, jamais bénéficié d'une simple initiation des pratiques syndicales. Ils
entendent ainsi dissiper toute méfiance qui caractérise leurs collègues vis-~-vis
del'administration et des responsables du complexe.
(1)
KOFFI Faustin deI 'équipe r , entretien du -3" janvier 1985
11 heures.
à
(2)
DJEHIFE BI VRO Félix, responsable de recrutement du petit personnel et des tem-
poraires, représentant local de l'UGTCI et délégué du personnel.
Entretien du 26 décembre 1984.
.' ../ ...

-
172 -
Il appara1t en effet que les apparitions sporadiques du D.G.A.
et les visites spontanées des autres responsables sur les fermes sont
considérées comme des mesures policières dans la mesure où elles se
terminent souvent par des sanctions ~ l'égard des chefs ou des membres
de leurs équipes (1). Cela a engendré une certaine psychose et un cli-
mat de peur "du gendarmell dès qu'un responsable appara1t sur les lieux
de travail. Il en résulte que le développe~ent et l'exploitation d'un
canal d'in~ormation des travailleurs digne de conviction peut rétablir
une certaine confiance en soi, dissiper la néfiance, les rassurer et
les motiver davantage au travail.
Tous ces faits expliquent en partie, à notre avis la résistance
au recrutement et les nombreuses déser:'ions des travailleurs temporaires.
Hai,s ce ne sont pas les seuls. Il y a aussi et surtout les conditions
de travail à revoir.
2. - L'·INADEQUATION DES CCiNDITIONS ET CADRE DE VIE DES TRAVAILLEURS
2.1. - Le logement, cadre de vie ou simple dortoir
Parmi les problèmes qui se ~osent généralement avec acuité
aux e~ployés de la Sodesucre, celui du logenent révèle un caractère
particulièrement ,préoccupant dans la r.2sure où le logement constitue
un important facteur de fixation et dE ~aintien des travailleurs. La
situation actuelle de la Sodesucre fait ressortir que le logement est
en effet un simple lieu où l'on viEnt unique~ent pour dormir et non
un véritable cadre de vie pour les occu~2nts. A Zuénoula, le problème
est singulièrement crucial. Le Directeur Gén2ral Adjoint est le pre-
mier à le reconna1tre puisqu'il ne jis~ose pas non plus lui~~ême de
logement de fonction approprié. Les b~néficiaires des logements Sode-
sucre expriment sans cesse unanime::tent l' insatis faction dont ils scnt
victimes dans ce dona.ine (cf tableaux n? 21 et 22, 8. 174st.·179).L[à village
ouvrier Gohfla (636 studios) qui cons:itue l'unique rGalisation en
matière d'habitation est un ense~ble de logements de célibataires à
une seule pièce où vivent générale~ent en fait de nombreuses familles.
(1) Le 28-12-1984, l'équipe d'ensacheuses dirigée par-une jeune demoiselle
attendait (à 6 h) la machine 2 couper les Cannes. Dans cette attente
chacune des travailleuses avait étalé son sac pour se reposer lors-
.'
qu'arriva le Directeur des ùlantations qui a aussit~t li~encié la
cheftaine qu'il qualifie de' paresseuse. Les 'nembres de son équipe
ont m2rqué un arrêt de travail en signe de pr ot es t at Lon, Nous avons
été sollicité par l'intéressée pour sa réintégration. Là n'était
malheureusement pas notre r~le.
.. ·1··· -

I~~~~~!:!_~O
GRANDIUR DES LOGIME~TS PA~ RAPPORT A LA TAILLE DES FAMILLES
-
//
H A R I E
S
?
CEL 1 R lÎ. TAI TI. E S
; .
.~
110
l11
M2
H3
1
Hl!
1!5
M6 +
CO
1
CI
C2
C3
C4
CS
C6 .;-
lOT A L
l'.
/
,
/
Ncnbre ~iEnqugt~s
24
72
60
:7
12
] 1
18
65
28
18
12
1
7
4
2
360
i
/
1
1
1
l'
1
Pourcentages
f,56%
20%
]6,67-
7,57.3,33%
37.
5%
/
18%
87
5%
b,
1
33%
/
l" 947. , , , 1% C,551-
100 %
1
'--
1
1/
,ltutr:.os
Fe r s o n n e s
,
37
115
128
61
23
34
39
/
65
67
39
12
8
hébergées
8
/
5
641
1
/
-'. ~---
--l
~11O'
1
1
Pource.ntages
5~80% 17. 94, ] 9, 96~ 9,5%
3,61:
5,37 6,087::
10,45~
141
6 , 0""
lJ /
1,877, 11,247 l ,24i. o.sœ
100 %
j
;;;
SOURCE
S.F.E.R.O.
SODESUCRE-SIEGE
~
~
\\"oj

-
174 -
D'après le rapport Sodesucre 1978, ces IGgements ne donnent pas satis-
faction parce qu'ils ont été insuffisamment étudi~s. Il se caract~ri­
sent surtout par la taille trop petite des pièce et le manque de pla-
fond isolant sous les toits en tOle insupportable en temps de soleil.
Cette insatisfaction g~nérale qui.en d~cpule a été mise en évidence
par l'étude ( de la direction en 1978 ) relative à l'amélioration
des conditiuns de travail. Il ressort de cette étude portant
sur un échantillon de 360 travailleurs enqu~tés que 50,83 %sont in-
satisfaits de leurs logements (cf tableau. nO: '21 :).
Cela a été
conf irmé par notre enqu~te personnelle (cf t ab Leau
n~ 22: ,) ~ ,
t
Tableau nO 21
Appréciation des conditions de travail
~:
:
:
indé-:
sans
:
to-
:
)
1
.
:satisfaits :
%

J..
cf
arrs a t ,
:
p
cis
:
%
op Ln i on
% taux : % )
CONDITI(1N
:
:
:
:
:
:
)
---------------:-----------:----- -------:----- -----:----- --------:----- -----:----
.
)
:
:
:
:
.
:
)
Salaires
:
37
:10,25
29(1
:80,55
7
:1,94
26
: 7,20
360 :100
---------------:-----------:----- -------:----- -----:----- --------:----- -----:---- ~
:
:
:
:
:
:
)
Logements
:
. 139
: 3 8,61
183
: 50,83
3
:0,84
35
: 9,72
360 :100 )
:
:
:
:
:
:
)
Source
SEERO Sodesucre siège 1978.
Les cuisines qui auraient do ~tre séparées de 12 chambre se trouvent
à l'intérieur de 12 maison, restreignant ainsi davant2ge la surface
habitable. A cela s'ajoute le ~anque d'espaces et de lieux de ren-
contre tels que ap at am , préau et/ou anbre d'arbre
etc •••
En pratique, cela se traduit par une prolifé~ation plus ou
moins anarchique d'appentis précaires sur l'habitat initial, ce qui
le dénature très souvent. Dans des plans de masse, sans idée urbaine,
les rues n'apparaissent pas clairement et il se crée un réseau de
substitution souvent érodé et impraticable en temps de pluie. Le camp
draga]e qui constitue le second village ouvrier est un héritage des
const~uct~Jrs du complexe. Simple lieu de stockage des matériaux de
constiuction à l'origine, il est devenu aujou=d'hui le lieu d'habita-
tion des ouvriers par la force des choses. Ce n'est vraiment rien
. . ·1· . ·

-
175 -
d'autre qu'un véritable ghetto formé d'associations de bois, de bri-
ques,de cim.ent, de contreplaqués, de banco et de tOle où s'entasEent
plusieurs familles dans une sorte d'insalubrité déconcertante. Le:
Directeur Général Adjoint est conscient qu'il s'agit du provisoire
à court terme. Les conditions de vie y sont en réalité très précaires.
Cette situation ne manque pas de conséquence psychologique
dans 18"mesure où 18 plupart des ouvriers et manoeuvres sont issus
d'origines variées. KOBY ASSA avait déjà fait cette remarque en 1977
dans une étude consacrée aux effets du canplexe de F'arké lorsqu'il
avançait qUE les attributaires des cases rondes construites dans l'un
des villages ont eu l'impression d'~tre quelque peu bloqués sur le
social, surtout pour les "sudistes" : "On ne peut pas quitter une
maison rectangulaire avec un toit en tOle pour habiter une case ronde
au toit de ·chaume" (1). Il ne s'agit certes pas de cases rondes ici,
mais l'atmosphère qui y règne est fondamentalenent pire que dans les
Cêses.
En ce qui concerne particulièreGent les ~anoeuvres du complexe
de Zuénoula,il est surtout question de dortoir et non de logement dans
la mesure où ces derniers sont obligés de libérer les chambres dès la
fin de chaque cam"pagne, encore que les con~iticns
de vie n'y sont pas
meilleures que dans les villages ouvriers comme l'a fait remarquer
le rapport SEE~O 78.
"Si à F'er ké I la taille de la f2i.üllE par extension rend les
pièces trop exiguës, ~t si à l'enclave de 30rotou la précarité de quel-
ques logements ne permet pas une politique d'em~2uche constente par
rapport auX bEsoins futurs et l'Exiguité rEndant extr~mement difficile
l'établissement fonctionnel d'une administration et gestion du personnel,
à Zuénoula, proposer cinq travailleurs par pièce signifie proposer des
constructions jugées généralement inférieu~es ~ celles des lieux de
cr-ovenance" (2). Cette situation a été constatée sur tous les complexes
et confirmée dêns la m~me étude du siège ce la Sodesucre (cf tableau nO.'D)
(1)
K08Y ASSA
op cit
page B2.
(2 )
Rapport SEERD
78
op cit
page 5.
,
1
.. -, ...

-
176 -
Il ressort donc de ce constat qu'à l'insuffisance du nombre
de logements s'ajoutent l'exiguité des pièces et l'insalubrité de
l'habitation. Cette situation n'est ni nouvelle ni spécifique à la
Sodesucre de Zuénoula bien qu'elle révèlë une certaine singularité
ici. Déjà en 1979, A. HAUHOUOT l'avait clairement souligné en parlant
des villages SODEPAU1 en ces termes : "Les demeures sont trop étroites
parce que leur conception n'observe pas la moyenne démographique des
ménages". Il ajoute un peu plus loin "si les maisons offertes sont
acceptées par la main-d'oeuvre, c'est perce qu'elles sont destinées à
des travailleurs étrengers et particulièrement auX c61ibataires peu
exigeants". Ici les données ne sont pas les rnëmes dans la mesure où
la Sodesucre (dans ses objectifs sociaux) n'était destinée ni à des
étrangers, ni particulièrement aux célibataires. La preuve en est qUe
A. HAUHCUOT a noté dans le m~me temps à Ferkességougou que les travail-
leurs de la Sodesucre en majorité c~posés d'Ivoiriens ont refusé de
prendre possesssion des villages construits pour eux (1). Convient-il
aussi de noter que le 80t célibataire qui guide lES concepteurs et
promoteu=s des loge~ents ouvriers est un non sens dans le contexte
africain et plus particulièrement au pays gouro où les frères et soeurs,
les enfants des frères et soeurs, les tantes et oncles et/ou leurs
enfants font partie de la famille élargie. CQ~me l'a fait remarquer le
rapport SEERO, "ia situation de célibataire in'troduit ici une donnée
dénuée 'de tout sens anql.o-aaxon"
célibat2ire
= single = seul a •• qui vit seul.
Il est par conséquent clairement adn.i s que la famille comprend
général~ent non seulement un nombre élevé d'enfants mais aussi des
co l Laté r aux (cf tableau nO""ZO)
• ,~u8nC: en se i t encore que la
polygamie est de nos jours très fortement enracinée dans le mileu tra-
ditionnEl gouro, on comprend aisément dès lors les raisons de l'inadé-
quation des logements Sodesucre à la taille des méneqas (cf tableau nO .20)
. A titre d'exemple, 4C %de nos enqu~tés sont mariés contre
57 %de ~élibataires et 94 %ont au ~oins un enfant. K08Y ASSA évaiue
la taille moyenne du ménage à Ferké entre 5 et 6 personnes.
(1) A. HAUHOUOT
op cit
fJeJe 27.
i
... ...
/

-
177 -
Enfin en se référant au tableau nO.20., on constate par
exempl~ que 16,6 %des familles vivant avec 2 enfants hébergent
19,96 %de collatéraux, que les 18 %des célibataires sans enfants
hébergent 10,14 %des personnes (cousin~neveux, frères etc ••• ) et que
les 5 %des célibataires avec 2 enfants abritent 6,08 %des membres
de la grande famille. Cela montre qu'il y a inadéqu3tion entre la
grandeur des lo~ements et la taille de la fa~ille africaine. Il va
sans dire que l'incompatibilité des dimensions du logement avec les
exigences de la vie co~munautaire en ~ilieu rural africain est un
grand facteur d'éclatement de la cellule f2~iliale. L'ouvrier ou le
manoeuvre en situation de demandeur d'e~ploi ou de travailleur du
complexe est donc obligé d'opérer un choix 8ntre vivre avec sa famille
au village et/ou abandonner les siens, c'est-à-dire renoncer à une vie
familiale pour r.ieux se consacrer cU travêil s2larié dans les condi-
tions détermin;~es et imposées par les lois du 8srché de l'emploi sur
le complexe. On comprend dans ce cas que les ~cysans préfèrent, 'le
plus souvent par solidarité naturelle et ~er devoir vis-à-vis de la
communauté vil~ageoise, se rat~acher à leur famille, à leur origine
au détriment du travail salarié qui ~ourrait diluer l'intensité des
relations familiales. Telle est donc la rÉalité à laquelle sont con-
frontés les travailleurs et demandeurs d'e~ploi du complexe de Zuénoula
en matière de logement. Com8e pour p8ra~hraser 3AgASSCNA Hilaire,
nous disons que d'une façon générale, 12 Sodesucre ne prend jamais
soin de la force de travail, ce qui contraste avec les incessantes
plaintes de pénurie de main-d'oeuvre. A cela s'ajoute le problème de
salaire et de surtraveil.

-
178 -
2.2. - Le salaire et l'extorsion du surtravail
Dès ~u~ l'on aborde le problème du salaire d'une manière
générale avec les travailleurs du complexe,
leur première réaction
est de brandir le bulletin de paie soit pour indiquer l'insuffisance
du traitement par rapport à la quantité du travail fait,
soit pour se
plaindre des retenues qu'ils estiment abusives sur leur dû,
soit
enfin pour exprimer les difficultés qu'ils éprouvent à l'obtenir. Or
ce qu'on peut dire en fait,
c'est que la juste application d'un
salaire rémunérateur et l'extorsion du sur-travail sont rarement
compatibles dan~ le monde du travail. C'est cette incompatibilité qui
oppose très souvent les détenteurs des capitaux et les vendeurs de la
force de travail. Selon Hilaire BABASSANA en effet,
l'analyste
marxiste défini t
le salaire comme "l'expression monétaire de la valeur"
de la force de travail(l).
Ce concept est ainsi défini comme étant la valeur des moyens
indispensables à l'existence du travailleur salarié et sa famille.
Parmi les éléments-constitutifs de cette catégorie économique,
on peut
citer principalement la valeur des moyens de subsistance destinés à
satisfaire les besoins physiologiques (nourriture, habillement,
logement etc ... ).
LQrsque ce salaire vient à subir une diminution
sensible ou lorsqu'il stagne par rapport à l'évolution du coût de.la
vie,
l'ouvrier ou l'employé exige une compensation. A la SODESUCRE,
le salaire représente la contrepartie financière
(soit journalière,
soit mensuelle) de la prestation du travailleur,
ce qui s'écarte en
partie de la définition marxiste du salaire.
Le payement ou les
modalités de payement de cette contrepartie financière et la volonté
ou le souci de maximiser le profit sans compensation adéquate
expliquent amplement la résistance des travailleurs de Zuénoula.
Ils
évoquent unanimement l'insuffisance du salaire par rapport aux
conditions dures dans lesquelles ils opèrent (cf tableaux n? 21 et 22).
Cette situat~on a déjà fait l'objet de nombreuses plaintes auprès du
Ministère du Travail et des Affaires Sociales et,
l'envoi des
inspecteurs du travail et des missions d'enquête à Zuénoula(2) ..
( 1 )
H.
BABASSANA
op ci t
P.
114.
(2)
Nous n'avons malheureusement pas eu accès aux rapports de ces
différentes .missions d'enquête, mais Monsieur le Directeur Général
Adjoint affirme que ces différentes missions ont démenti les plain-
tes et rumeurs des travailleurs.
. •. 1 ...

-
179 -
Tableau n0 22
Appréciation du salaire
~RAVAILLEURS CATEGORIE SOCIO-PROFESSIONNELLE DES TRAVAILLEURS
TOTAL
. .
. .
~
Ouvrier
Employé de i-'adre et Agent Valeur Valeur
Manoeuvre
d'usine
bureau
de maîtrise
abso-
relati-
lue
ve
Total
%
Total . %
Tota
%
Tota
%
:uffisant
0
00
3
15
8
16,32
8
61,53
19
19 %
-
:nsuffisant
16
88,88
17
85
40
81,63
5
38,46
78
78 %
ians réponse
2
11;11
0
00
1
2
0
00
3
3 %
TOTAL
18 ~OO
20
100
49
100
13 100
100
100
%
1
Source
résultat de l'enquête personnelle.
Les résultats de l'enquête confirment les plaintes des
travailleurs . .78 % trouvent en effet leur salaire insuffisant.
Le problème est plus préoccupant chez les manoeuvres, ouvriers et
agents de bureau où 'Le pourcentage d'insatisfaits monte jusqu'à
85 % au moins.
Le cas particulier des manoeuvres est assez révélateur.
Aucun des 18 interrogés n'est satisfait de son salaire et 16 le
trouvent insuffisant soit 88,88 %. Une remarque semblable avait déjà
été faite en 1978 par le rapport SEERO (cf tableau nO 21 ). Même
constat chez A. HAUHOUOT qui écrivait (1979),
~n parlant des causes
de l'instabi~ité ouvrière, que les salaires proposés par le complexe
de Ferké l
et qui sont calculés sur la base du SMAG,
c'est-à-dire
7.000 F par mois,
avaient peu de chance d'attirer irrésistiblement
les fou les ( 1 ) .
Ce qu'on peut dire et qui est évident, c'est qu'au début de
l'implantation de la SODESUCRE,
le paysan y venait sans savoir.très
exactement ce qui l'attendait et,
sa plainte pouvait être facilement
justifiée.,Mais actuellement lorsqu'il accepte volontiers de se faire
engager comme travailleur à
la SODESUCRE, il sait d'avance, grâce aux
campagnes de sensibilisation et de recrutement organisées,
le salaire
qui lui sera versé en fonction de son rendement et il s'attend à le
percevoir effectivement.
(1)
A. HAUHOUOT
op cit.
P.
12.

-
18[) -
Si tel est donc le cas, on se demande alors pourquoi et de quoi se
plaint-il. Etant donné que les principes,
les modalités de paiement
des salaires et les conditions de travail sont les mêmes sur tous
les complexes sucriers du pays comme l'affirment les responsables
locaux, pourquoi Zuénoula constitue-t-il un cas particulier de
résistance, voire de refus de participer au fonctionnement de cet
établissement agro-industriel ? Comme réponse à ces interrogations,
il convient de présenter brièvement mais concrètement la situation
du travail sur les autres complexes(l), celle de Zuénoula ayant été
déjà exposée dans l'étude de la campagne 1984-85 (cf campagne sucrière
page 96).
La première remarque à faire ici est que la population du
département n'est pas habituée au travail salarié de type industriel.
Cela se vérifie dans presque tous les villages que nous avons visités.
Cette évidence a été également démontrée en 1974 par l'étude de
l'I.G.T. déjà citée (cf tableau ci-dessous). C'est un fait qui peut
être considéré. comme un premier facteur d'explication de ce
phénomène. On peut'ensuite examiner la nature et les conditions
concrètes de travail.
Tableau n ? 23
Rép~rtition des enquêtés selon leur passé salarial.
S/P Zuénoula Juillet 1974.
Ayant déjà
N'ayant jamais
-
exercé une
exercé une
Non déclarés
Total
activité
acti vi té sala-
salariée
riée
Nombre
d'enquêtés
10
199
10
219
%
4,5
91
4,5
100
1
Source
Ministère de l'Agriculture, études socio-démographiques
en vue de la création d'un complexe sucrier en Côte d'Ivoire
Septembre 1974 .
..
(1) Compte tenu de la diversité des tâches et de leur nature nous
présentons la coupe manuelle de canne qui est assez significative .
. . . / ...

-
181
-
En effet,
comparativement à ce qui se fait à Zuénoula,
R.
Deniel a noté
(en 1981) qu'à Sérébou,
200 mètres de cannes à
couper représentent fictivement 8 heures de travail, même si le
coupeur réalise sa tâche en moins de temps, ce qui est généralement
le cas. S'il dépasse en revanche ses 200 mètres,
il reçoit une prime
de 100 F et pour sa tâche supplémentaire son salaire est augmenté de
25 %,
toute p~atique à encourager les coupeurs à redoubler d'efforts.
Des mesures identiques d'encouragement se rencontrent également sur
les complexes de Ferké l
et II où diverses primes sont instituées et
distribuées à
tous les travailleurs (temporaires et permanents) en
période de campagne.
D'après le compte rendu de mission (du·~4
Septembre 1984) de Monsieur DJEHIFE BI VLO Félix,
les rémunérations
des temporaires sur les complexes de Ferké l et II sont les suivantes·:
-1)- Tâche normale plus bonne qualité 332 mètres
linéaires de canne:1.000 F,
2)- Tâche normale 332 mètres
linéaires de canne=780 F ,
3)- 1/2 tâche plus bonne qualité 166 mètres;500-F
Une équipe de coupe au travail
... / ...

-
182 -
4)- 1/2 tâche normale
166 mètres
435 F
5)- 1/4 tâche
83 mètres
250 F
En ce qui concerne les primes, on peut noter par exemple
pour les tractoristes 150 F par rotation(l) et 190 F pour une
rotation supplémentaire et 240 F pour les tractoristes avec deux
remorques.
Les chefs de chantier perçoivent une prime de 350 F par
jour et les chefs d'équipe 300 F.
Enfin dans une récente étude post-évaluative du complexe
de Borotou, R.
Deniel fait remarquer que la tâche journalière est
de 280 mètres à 1.000 F dans les mêmes conditions de coupe qu'à
Ferké.
On peut retenir de cette brève présentation qu'il existe
effectivement une marge entre ce qui se fait à Zuénoula et l'organi-
sation de la-coupe sur les autres complexes. Pour le même salaire
(1.000 F la tâche)
ou parfois même moins,
le travail à Zuénoula est
le double voire le triple de ce qui se fait ailleurs (600 mètres de
canne à couper contre 200 ou 332 mètres). Ensuite toute tâche non
terminée à Zuénoula""est considérée nulle et,
la reprise le lendemain
n'est pas non plus autorisée.
Cela exclut d'avance toute possibilité
de demi-tâche
caume
on
en voi t à Fe r'ké , Sérébou ou Borotou.
Il
va sans dire que même s ' i l était prévu des primes de rendement (pour
les saisonniers),
leur attribution effective serait incertaine dans
la mesure où les difficultés pratiques des tâches empêchent les
coupeurs d'y accéder facilement.
Ce qui renforce davantage l'indiffé-
rence et le désenchantement des travailleurs locaux. La situation est
d'autant plus préoccupante que la plupart des saisonniers en
provenance du Nord sont des habitués des autres complexes où ils ont
bénéficié 'de certains avantages et primes qu'ils ne retrouvent pas
ici.
Ils n'hésitent d'ailleurs pas à établi~ la comparaison entre ce
qu'ils perçoivent habituellement au Nord et ce qu'on leur donne à
Zuénoula. Ces différents échos ne font que galvaniser les autres
temporaires dans leur refus de libérer toutes leurs forces de travail
au profit de la SODESUCRE.
(1) Rotation: nombre de voyages de canne transportée par tractoriste.
Ce nombre est arrêté par la Direction des plantations pendant la
campagne.
• .• 1• , ,

-
183 -
Tout cela se traduit par un nombre important d'abandons de postes
et d'absences
(cf tableautf). Convient-il aussi de rappeler que
ces difficultés pratiques et psychologiques nées de l'inadéquation
entre la quantité des tâches à exécuter et le salaire correspondant
ont contribué à créer une aspiration générale vers le travail d'usine
où les conditions semblent moins pénibles (cf tableau24).
Pour vérifier tous ces faits nous avons procédé au
dépouillement de 14 cahiers de pointage correspondant à 419 coupeurs
de canne
soi t
une moyenne de 30 personnes par c ah ier, et au
dépouilleme~t de 200 fiches de pointage pour les travailleurs perma-
nents au niveau de l'usine et du magasin.
Le dépouillement des 14
cahiers s'étend du 01 au 31 décembre 1984 et celui des fiches sur
toute la durée de la campagne.
Tableau 24
Emplois auxquels aspirent plus particulièrement les
travai Il eurs.
LES DIFFERENTES TACHES CHOISIES
TOTJ..~
%
00 coupe de canne
9
9 %
01 travail d'usine
42
42 %
02 travail de bureau
16
16 %
03 au tres à préciser
12
12 %
01 - 02
12
12 %
00 - 01 - 02
5
5 %
00 - 01
4
4 %
TOTAL
100
100 %
Source
Résultat d'enquête personnelle.
... / ...

-
184 -
. Tableau 25 :' La régularité du pointage des coupeurs du 01 au
31 Décembre 1984
LIBELLE
NOMBRE
%
1
N'ont pas obtenu un seul zé ro - - -- -:~.. 101
24,10 %
2
Ont obtenu au moins un zéro
318
75,89 %
3
Ont obtenu jusqu'
5 zéro au plus _
_ --~ 112
26,73 %
4
Ont obtenu entre 5 et 10 zéro plus __ ~109
26,01 %
5
Ont obtenu au-délà de 10 zéro au
moins _
- - - - - - '-- - - - - - -- __~ 97
23,15 %
318 ont au moins un zéro dont 112 jusqu'à 5 zéro,
109 ont entre
5 et 10 zéro et 97 plus de 10
zéro.
Source
dépouillement de 14 cahiers de pointage = 419 coupeurs.
Tableau 26 : Capacité d'exécution des tâches des coupeurs du 01 au
31 Décembre 1984
LIBELLE
NOMBRE PERS.
%
1 - Terminent régul ièrement toutes
leurs tâches plus tâches sup-
plémentaires - - - - - -
- - - - -~ 85
20,28 %
2 -'- Terminent régulièrement toutes
leurs tâches mais pas de tâches
supplémentaires - -
- - - - --- - - ~ 122
29,11 %
3 - Ne terminent jamais régul ière-
ment toutes leurs tâches plus
abandon -
-
- - - - - - - - - __ ~212
50,59 %
TOTAL -
- - -
- ~ - ... 419
100
%
Source
dépouillement. de 14 cahiers de pointage soit 419 coupeurs.
... / ...

-
185 -
Obtenir lm zéro = p o i n t e r- zéro = s'absenter = nb an d orm e r- =
ne pas terminer sa tâche ou la terminer mais jugée mauvaise au moins
une fois.
Nous avons constaté généralement qu'au-délà de 10 zéro il
y
a beaucoup d'abandons,
ce qui n'exclut pas ceux qui abandonnent
même après un zéro.
Tableau 27.:
taux d'abandon du 01 au 31 Décembre 1984
NOMBRE DE
LIBELLE
%
PERSONNES
Ont abandonné dans la 1ère semaine
42
10,02 %
Ont abandonné dans la 2ème semaine
97
23,15 %
Ont abandonné dans la 3ème semaine
119
28,40 %
Ont abandonné dans la 4ème semaine
34
8,02 %
Ont terminé correctement le mois
127
30,31 %
TOTAL
419
100
%
Source
dépouillement de 14 cahiers de pointage = 419 coupeurs
Tableau 28
Taux d'absentéisme des travailleurs permanents au
garage,
à l'usine,
au magasin pendant la campagne
.1984 -
1985.
NOMBRE DE
MOTIFS
%
PERSONNES
Absence prolongée injustifiée
5
2,5 %
~
Abandon non signalé
~
01
%
Démission signalée
0
0
%
Licenciés pour moti fs divers
3
1,5 %
Permissionnaires et absence pour maladie
16
8
%
Présents pendant la campagne
174
87
%
TOTAL
200
100
%
- .

-
186 -
Abandon,
démission et absence sont parfois confondus dans
les cahiers de pointage.
Aussi parmi les abandons,
certains revien-
nent pour terminer le mois.
Nous en avons tenu compte pour le calcul
des pourcentages.
L'observation du
tableau n024 nous conduit à conclure que
la coupe manuelle de canne n'attire pas beaucoup les travailleurs.
Seules 9 personnes interrogées sur 100 sont favorables à
la coupe.
Ce caractère répulsif s'explique par les conditions difficiles
d'ensemble dans lesquelles se déroule le travail.
Outre les difficultés
pratiques de la coupe constamment évoquées par les enquêtés,
il y a
notamment l'immensité de la tâche à accomplir par rapport au salaire
et la mauvaise appréciation des efforts des coupeurs par les chefs
directs. Or,
comme nous l'avons dit plus haut,
les coupeurs ou
journaliers quittent leurs villages ou leurs activités principales
exercées en tant que travailleurs "indépendants" pour se mettre
temporaireme~t pendant quelques jours ou quelques semaines au service
de la SODESUCRE comme travailleurs salariés.
Du point de vue du
déroulement de la journée de travail,
le journalier travaille d'une manière aussi régulière que le permanent,
c'est-à-dire qu'il
travaille à
temps complet,
ce qui le différencie
ici d'un travail partiel. Nous avons vu également que le travailleur
journalier ~'est pas embauché sur la base du contrat de travail
réglementaire. De ye fait,
il ne bénéficie pas de droi~ ou avantages
stipulés par la légisfation du travail.
De même le taux de rotation très élevé des recrues ne permet
pas aux travailleurs journaliers d'acquérir une qualification,
ce qui
justifie naturellement le paiement de très bas salaires
(il n'est pas
nécessaire d'être qualifié pour couper la canne, dit-on).
Compte tenu de l'instabilité générale et constante de la main-
d'oeuvre en rapport avec la mauvaise tenue des cahiers de pointage,
nous rappelons aux lecteurs que ces tableaux ont une valeur indicative
bien qu'ils confirment la plupart des déclarations des enquêtes .
. . . 1...

-
187 -
Enfin pendant le laps de temps passé à la SODESUCRE,
le
salarié journalier travaille sur le même lieu de production que le
permanent,
c'est-à-dire qu'il côtoie souvent ce dernier qui s'exerce
dans des conditions relativement plus aisées que lui.
Il s'en suit
une réaction psychologique pour le coupeur journalier qui considère
que l'ouvrier d'usine et le mécanicien du garage ou d'atelier gagnent
plus d'argent que lui pour un travail moins pénible que la coupe
manuelle. Nous avons vu que la tendance générale actuelle est une
forte aspiration pour le travail d'usine.
D'une manière concrète et
pratique,
le caractère repulsif et particulièrement pénible de la
coupe a été clairement et nettement révélé par le dépouillement des
14 cahiers de pointage (cf tableau nO 26).
Il r~ssort en effet de ce dépouillement que sur 419 coupeurs
212 n'ont jamais terminé régUlièrement leur tâche(l)
soit 50,59 %.
Comparativement à ce taux,
les 85 coupeurs soit 20,28 % seulement qui
parviennent à accomplir des tâches supplémentaires sont dans leur
majorité des étrangers (par rapport aux ressortissants du département
de Zuénoula). Cela confirme davantage dans le même temps le manque
d'enthousiasme et l'indifférence relative qui caractérisent les
populations locales. On explique la tenacité,
la volonté et le courage
des étrangers au travail par le fait qu'ils sont venus faire fortune,
économiser beaucoup d'argent pour retourner faire des réalisations
dans leur pays ou dans leur région d'origine.
Il y a aussi le fait
qu'ils sont éloignés de chez eux et débarrassés en partie des charges
familiales.
En poussant le raisonnement un peu plus loin,
on constate
que le taux d'abandon est même dramatique
(cf tableau 27). Seuls 127
coupeurs sur 419 inscrits ont terminé le mois soit 30,31 %. Cette
moyenne est cependant considérée comme bonne (par les responsables du
complexe) par rapport à certaines périodes où l'on peut enregistrer
facilement moins de 20 % dans le mois. Dans ce cas d'espèce,
la chute
est relativement moins importante au début et à la fin du mois.
Cela
peut s'expliquer par l'enthousiasme du départ et le retour de certains
coupeurs et/ou' leur adaptation progressive à la tâche.
Il semble en
revanche que les nombreux abandons au milieu du mois sont engendrés
et renforcés par le nombre sans cesse croissant de zéro qui sont
distribués a~x temporaires,
toute pratique tendant à décourager nombre
de travailleurs.
(1)
La chu te aurai t
pu être plus ou moins importante si le
dépouillement avait concerné une période assez longue.

- 1BB -
Sur les 419 coupeurs 318 ont obtenu au moins un zéro dans le mois
soit 75,89 % dont 109 se situent entre 5 et 10 zéro et 97 au-délà
de 10 zéro (cf tableau nO 25). Or l'on sait généralement qu'au-délà
de 10 zéro,
les journaliers perdent tout espoir de continuer à
travailler.
Il s'en suit un important mouvement d'abandons ou
d'absences prolongées.
On comprend clairement dès lors que l'organisation du travail
journalier et le fonctionnement même du complexe sont l'une des causes
essentielles ,de la fui te des bras.
Il en résul te que tout jugement
relatif au salaire pris comme facteur explicatif de la résistance des
travailleurs doit être nuancé.
Tel qu'on le voit,
les plaintes dans
leur majorité ne se dressent pas fondamentalement contre le montant
du salaire.
La modicité des salaires à la SODESUCRE est un fait bien
connu(l); Ce qui révolte le plus,
ce sont les abus,
l'intransigeance
des chefs et la non application effective des clauses du contrat si
verbal soit-il.
Le fait que seuls 101 coupeurs de canne sur 419
(soit 24,10"%) ont pu obtenir la totalité de leur salaire s'avère
inconcevable par la p Lup art d'entre eux (cf tableau 25 ). A l' insuffi-
sance du salaire donc s'ajoute le non respect des intérêts du'
travailleur.
L'un dans l'autre,
le non paiement du prix de l'effort
fourni,
la modicité· de ce prix et le surtravail expliquent éloquemment
les difficultes d'intégration du complexe de Zuénoula.
L'on ne doit
cependant pas négliger l'insuffisance d'équipements socio-récréatifs
indispensables à l'épanouissement des travailleurs.
(1) Le salaire journalier des ouvriers agricoles
(198 F jour en 1971)
était passé à 270 F/jour en 1974 et s'est accru aujourd'hui
635 FI jour.

-
189 -
2.3. - L'absence des loisirs comme frein à l'épanouissement
des travailleurs
1
L'animation des hommes en dehors des heures et lieux de
travail est une nécessité absolument vitale et une condition
indispensable au bon rendement du travailleur.
Les responsables de
la SODESUCRE l'ont compris depuis la création des complexes, bien
qu'à Zuénoulâ,
les infrastructures de loisirs soient encore limitées.
Le Directeur Général Adjoint disait en Avril 1985 à cet sujet que
malgré la modicité de ses moyens,
le complexe de Zuénoula est mieux
loti dans ce domaine que les autres. Déjà en 1978 le rapport SEERO
faisait remarquer en effet qu'il était indispensable et urgent de
doter les villages SODESUCRE d'une infrastructure de loisirs,
car
disait-il,
l'intérêt d'une telle installation consiste à détourner
l'attention des travailleurs des problèmes inhérents à l'entreprise
afin de tirer d'eux le meilleur des rendements.
Il ajouta à cet effet
"qu'il faut occuper entièrement l'esprit du travailleur par des
commentaires libres au tres que ceux qui relèvent du cadre de travail".
Cela signifie en clair que la création des structures de
loisirs e~t aussi importante pour le travailleur que l'octroi d'un
bon logement ou
l'~ttribution d'un salaire élevé. A la question de
savoir si les travailleurs disposent des complexes sportifs et autres
lieux de loisirs,
55 % répondent non
contre 45 oui. Dans le second
cas,
la plupqrt hésitent à affirmer spontanément leur conviction,
cherchant toujours à apporter des précisions à leurs réponses,
ceci
pour souligner l'insuffisance de ce qui existe par rapport au nombre de
travailleurs.
Ce que l'on peut retenir en fait,
c'est que la
participation des manoeuvres aux activités sportives et aux loisirs est
difficilement envisageable pour plusieurs raisons :
-
Tout d'abord,il convient de rappeler que les villages,
dortoi~des [manoeuvres se trouvent à plus de 25 km
de la ville et
donc totalement coupés de toutes les activités récréatives(1).
Perdus
dans les fermes,
ils se caractérisent singulièrement par un isolement
et une angoissante monotonie qui
inspirent la résignation et le
désespoir dans les yeux et les voix des habitants.
(1) Zuénoula n'est pas une grande ville (comme Bouaké ou Daloa) et
l'essentiel des liœux de distraction se résume à la salle de
cinéma et à quelques maquis et débits de boisson.
... / ...

-
19D -
Ensuite le rythme très élevé du tràvail en période de
campagne ne leur permet pas de se livrer à quelque activité
distractiVe, que ce soit en dehors du travail.
Enfin l'insuffisance des équipements socio-récréatifs et
leur emplacement par rapport aux lieux de résidence des travailleurs(l)
empêchent le personnel subalterne d'y pénétrer. Cela est d'autant plus
vrai que durant tous nos séjours à la SODESUCRE, nous n'avons jamais
eu l'occasion de rencontrer un seul man~uvre ou ouvrier d'usine à
Rolandfla
du moins jusqu'à ce jour. On peut sans doute en déduire
véritablement que le personnel subalterne vient uniquement au complexe
pour travailler et rien d'autre. Nul n'ignore cependant que cette
privation contrast~ dangereusement avec l'âge" et l'ardent désir
d'évasion des travailleurs du complexe (85 % ont entre 15 et 35 ans).
Cette envie de' "s'amuser" et de rattraper ce qu'ils considèrent comme
du
temps perdu se vérifie à chacune des sorties d'approvisionnement
organisées à leur attention une fois tous les quinze jours.
La plupart
des chefs affirment de façon unanime qu'il est souvent difficile de
faire revenir leurs protégés au village dès qu'ils arrivent en ville.
"lIsse dispersent dans les maquis,
les débits de boisson ou
au cinéma".
D'après le Directeur Général Adjoint, si la sortie coIncide
avec la fin du mois,
plus de la moitié des effectifs restent en ville.
"Ils ne reviennent à la plantation que l'orsqu'ils ont fini de dépenser
tout leur argent en ville". Cela porte parfois un coup dur à la
SODESUCRE qui est obligée dans ce cas d'utiliser les machines (pour la
coupe) afin d'éviter de faire des pertes. On peut par conséquent avancer
que l'inexistence des structures de loisirs est un facteur de déstabi-
lisation de la main-d'oeuvre en général et des saisonniers en particu-
lier. Ailleurs où les employés ne scnt pas totalement séparés de
certains centres de loisirs,
la satisfaction du désir de se distraire
et de retrouver cet équilibre indispensable se matérialise par un
développement excessif du taux d'alcoolisme (R. Deniel à Sérébou en
1981) ou de prostitution (Cathérine Auchertin à Borotou 1982) voire
d'adultère
(Rapport SEERO 1978 à
Ferké).
(1) Toutes 'les installations se trouvent à Rolandfla,
résidence des
Cadres dont l'accès n'est pas autorisé à
tous.
... / ...

-
191 -
Face à la mobilisation et à la pression des ouvriers, la Sodesucre
a créé un stage de foot-baIl à Gohfla en 1983. Aujourd'hui ce sont un dan-
cing, un centre,commercial et des salles de jeux qu'ils réclament. On peut
donc dire que l'absence des loisirs est à la fois un frein à l'épanouisse-
ment du travailleur et la cause de l'instabilité de la main-d 1oeuvre, Comme
quoi le travail et les loisirs sont liés.
2.4. - La faim, une entrave a~ bon déroulement du travail
La faim (comme la santé) ne devrait en principe pas constituer
une véritable difficulté pour les travailleurs dans la mesure Où la Sode-
sucre pense 11 avoi r résolue dès le départ. En effet les manoeuvres sont
préalable~ent informés que leur alimentation n'est pas prise en compte par
la société. "Le coupeur est chargé de se nourrir lui-même". La société ne
prévoit aucune disposition dans ce sens. On peut se demander pourquoi ils
s'agitent t~nt, étant donné qu'ils savent dès le dé~8rt ce qui les attend.
En tout cas notre surprise a été grande d'entendre le même refrain sur
toutes les plantations. Les plus anciens évoquent avec nostalgie le bon
souvenir du début des travaux de construction du complexe. A cette période
(1977-1979) les constructeurs s'étaient préoccupés de nourrir leurs ma-
noeuvres pour tenir compte des difficultés de ravitaillement du moment. En
effet le temps de campagne sucrière correspond généralement avec la saison
sèche et au temps de préparation des terrains nouveeuX de cultures (défri-
chement, brOlis et feux de brousse).
C'est aussi souvent le teiilps des "jours maigres" en cas de séche-
resse précode"riu prolongée. C'est par conséquent b cette é~oque que les
produits
vivriers deviennent de plus en plus rares et donc de plus en plus
chers pour une bourse moyenne. C'est ainsi que les entreprises sous-traitantes
recrutaient des menagères chargées de vendre la nourriture sur le complexe.
Celles-ci percevaient un certain pourcentage provenant de la vente des
rations alimentaires. Cette pratique avait pour avantage de nourrir le per-
sonnel subalterne à moindre frais. Sa supression est de nos jours à la fois
regrettée et durement critiquée. Comme par ricochet la plupart des voeux·
convergent vers la nourriture (le petit déjeuner en particulier). Cela con-
traste avec l'existence de deux cantines sur le complexe: 11 une pour assurer
.../ ...

-
192 -
l'alimentation des cadres et agents de ma1trise et l'autre réservée aux
ouvriers et empoyés de bureau. Les tarifs des repas varient entre 1.300 F
et 1.800 F pour les premiers et entre 500 F et 800 F pour les seconds.
La localisation des cantines dans l'enceinte de l'usine et la cherté
des metsçonstituent le premier frein è l'accès des manoeuvres au dé-
jeuner. Ce sont ce ccot élevé des repas et l'habitude alimentaire qui
conduisent une grande partie des ouvriers et employés de bureau à se
rabattre su~ les maquis et restaurants africains du camp ~ra9age ( à une
centaine de mètres de l'usine) o~ les prix se situent entre 150 F et 200 F.
Ensuite l'accès du complexe étant interdit à toute personne
étrangère à la société, la di~tribution ou la vente de nourriture auX
abords des villages, des chantiers et des plantations est exclu~. Enfin
les heures de rassemblement et de départ des villages pour les lieux de
travail (4 heu~es 3e mn à 5 heures) et celles du début du travail (6
heures) nè favDri~ent pas non n1us la possibilité ~our les manoeuvres de
se restaurer. C'est encore le lieu de. ra:Jpeler ici qu'aucune disposi tian
n'a été rrévue par la direction à cet effet.
Il s'en est suivi un développement excessif de la consommation
de la canne à l'état brut dcns les plantations.D'~près nos infor~ateurs
les prem'ières plaintes (1980-15'81) qui ont fait l'objet d'envoi de mis-
sion d' enqu~te du ~"inistère du Travail et des Affaires Sociales avaient
pour causes la faim et la sc~f sur les chantiers (1). Depuis ce te~ps
deux citernes font la rotation sur les lieux de t.r2vail pour ravitailler
les travailleurs en eau :J2 boisson. :·12is le pr-obLèrne de la faim demeure
encore entie~ du moins pour les manoeuvres. Les conséquences de cette
situation sont ~ la fois immédiztes et cooteuses pour l'entreprise bien
qu'aucun res~onsable n'en ait p8rlé ouvertement. Le Directeur des plan~
tations déclare tcut de ~~~e que les employés sabotent le traveil quand
ils ont faim ou lorsqu'ils sont f2tigués. Ce qui est évident, c'est que
le rendement des ~anoeuvres et la qualité du travail diminuent trss
souvent entre Il heures et 14 heures.
(1) Entretien du 29 déce~jre 1~84 avec les ouvriers de Gohfla et le chef
du village Za:nbi Kal.ou (lui-m~me chef d'équipe et délégué du personnel) •
.../ ...

-
193
Les chefs d'équipe sont unanimes à le reconnaître." Est-ce la fatigue
ou la faim? Les deux sont néanmoins liées. Selon le chef du village
Zambi Kalou et les chefs d'équipe de Gohfla, les manoeuvres deviennent
désobéissants et plus agressifs lorsqu'ils ont faim.
"On ne peut rien
contre eux lorsqu'ils refusent de travailler".
L'ex-Secrétaire Général
du PDCI RDA Monsi~ur GAN BI TIAN a dû intervenir plusièurs fois sur
les chantiers pour calmer les révoltés pour cause de la faim.
Il convient aussi de faire remarquer qu'il n'est pas rar.e
de voir des sacs d'engrais abandonnés dans les broussailles au moment
du planting(l).
Les engrais sont souvent déposés dans les allées et/ou
hors des sillons au lieu d'être épandus sur les Jeunes pousses de
canne. On raconte même qu'à partir de 11 heures,
les boutures ne sont
plus correctement enfouies dans le sol et parfois pas du tout
enterrées comme. il faut.
Bien plus,la coupe manuelle de canne
s'effectue à plusieurs centimètres du sol et l'endainage pêle-mêle.
Tout cela entraîne inévitablement une baisse à la fois qualitative et
quantitative de la production.
Pareil phénomène a été observé à
Ferké II en 1978 où l'insuffisance ou
l'absence d'épandage d'engrais
sur les parcelles a engendré une baisse de teneur en sucre et donc du
tonnage de sucre. Au niveau interne la faim est une source de tensions
et d'altercations entre les chefs et leurs protégés dans la mesure où
le mauvais travail est aussitôt sanctionné par un zéro.
Il va sans
dire que résoudre ce problème du minimum vital arrange aussi bien les
travailleurs que la SODESUCRE.
De l'avis des intéressés
Zuénoula peut pourtant le
résoudre en prenant l'exemple de Ferké II où la main-d'oeuvre jouit
d'une prime de nourriture investie dans l'achat des produits vivriers.
Le complexe de Ferké II dispose de deux cantines et d'un restaurant(2).
Les cantines alimentent la main-d'oeuvre subalterne.
Le restaurant est
réservé au personnel expatrié et local qualifié (Cadres, Agents de
maîtrise).
Les premiers prennent leurs repas à 10 heures parce qu'on
estime qu'ils n'ont pas eu le temps de le faire avant de se rendre aux
lieux de travail
(entre 5 heures et 6 heures).
(1)
Il semble que les responsables aient pris des mesures fermes contre
cette oratiQue qui est devenue rare actuellement.
(2) Rapport SEERO 78 confirmé par le représentant de LIU.G.T.CI,
délégué du personnel et responsable du· recrutement des manoeuvres
temporaires.
. .. / ...

-
194 -
Pour les seconds, l'horaire du restaurant est fixé à 12 heures.
L'organisation matérielle et la gestion sont telles que la
SODESUCRE ne peut qu'en tirer satisfaction à tous les niveaux.
Etendre cette expérience à Zuénoula peut attirer et fixer les
manoeuvres dont la plupart abandonnent le travail dans les premières
semaines de campagne à cause des conditions difficiles dont la faim
est un facteur assez déterminant.
3. - L'absence de cadre goura, simple prétexte ou raison d'un
refus massif
Les objectifs visés par la SODESUCRE lui imposaient dès le
départ de se· doter des ressources humaines suffisamment qualifiées
et très performantes. C'est ce souci d'efficacité qui détermine les
critères de recrutement du personnel. Comme dans toutes les entreprises
capitalistes,
la qualification est donc de rigueur pour une meilleure
rentabilité et une bonne qualité du produit.
Il existe à cet effet
deux catégories de travailleurs à la SODESUCRE à savoir les temporaires
et les permanents.
3.1. - La procédure de recrutement du personnel
3.1.1. - Le cas des travailleurs temporaires
Comme nous l'avons dit plus haut,
le temporaire est celui
qui quitte 'son village ou son activité principale exercée en tant que
travailleur 'iindépendant", pour se mettre temporairement, pendant
quelques jours ou quelques semaines voire quelques mois au service
;
du capitaliste comme travailleur salarié. Cette définition recouvre
deux notions:
celles de saisonniers et des journaliers.
La notion
de saisonniers comprend les mécaniciens,
conducteurs d'engins,
chauffeurs, Agent de fabrication.
Selon R. Deniel,
il s'agit des
salariés muhis· d'un certain bagage technique.
Ils sont engagés par
contrat à durée déterminée allant de quelques semaines à quelques
mois.
Ils interviennent sur le complexe une ou deux fois dans l'année
selon l'impo~tance des tâches et des besoins de l'entreprise.
Parmi
eux,
certains travaillent à la SODESUCRE depuis ~a création du
complexe.
... / ...

195 -
Bien qu'ils soient temporaires,
ils détiennent des cartes permanentes
qui les rendent prioritaires en période de recrutement et, facilitent
leur intégratibn à un poste permanent en cas de vacance, ce qui est
surtout rare(l).
Leur embauche se fait en principe par test. Mais
c'est surtout leur ancienneté qui prévaut.
Ils perçoivent leur salaire
à la fin de chaque mois comme tous les autres travailleurs de
l'établissement et sont libérés dès que le travail pour lequel ils ont
été recruté p est achevé, d'où le caractère temporaire ou saisonnier de
leur présence sur le complexe.
Le second groupe de temporaires ou
saisonniers est celui des coupeurs et glaneurs. Ceux-ci n'ont aucun
contrat avec la SODESUCRE bien que certains y soient depuis le début
de la première campagne sucrière de Zuénoula.
Leur recrutement n'est
soumis à aucun critère technique.
Ils deviennent coupeurs ou glaneurs
sur simple présentation d'une pièce d'identité ou d'un extrait d'acte
de naissance ou de jugement supplétif.
Ils viennent uniquement au débu:
de chaque campagne et retournent chez eux dès la fin de celle-ci. Ce
sont des journaliers car ils sont payés par jour à la tâche(2).
Dans le souci de les retenir pendant tout le mois et donc
d'éviter une désertion totale,
on leur verse le salaire à la fin.
En ce qüi concerne leur embauche,
la priorité est donnée aux
ressortissants de Zuénoula et en particulier aux plus anciens bien que
35 % seulement des personnes interrogées reconnaissent ce principe.
Pour ce faire DJEHIFE Bi Vlo Félix a été désigné comme (étant le)
responsable'chargé de les recruter(3) en période de campagne.
L'ambiguïté de leur statut a conduit R.
Deniel à dire que le terme de
journalier n'étant malheureusement pas utilisé,
on parle d'eux comme
des temporaires, ce qui prête à confusion. "Il est vrai qu'il ne sont
pas payés à la journée, mais au mois, à la mesure de la tâche".
Selon H.
BABASSANA,
la notion de travailleur journalier ou
temporaire n'a pas un contenu précis et, de ce fait,
se prête à
différentes interprétations. Si au premier abord,
l'unanimité peu~
être fai te pour considérer que la durée d' empl'oi du travailleur
temporaire est plus réduite que celle du travailleur permanent, ce
caractère temporaire, par contre, n'est pas clairement déterminé.
"
(1) En Août 1985,
118 manoeuvres permanents on~ été recrutés parmi ces
saisonniers anciens.
(2) Contrairement à ce q~i est dit, ils perçoivent leur traitèmen~ à
la fin de chaque mois.
(3) Vlo Félix est un fils de la région, mais que de plaintes n'avons-
nous pA. enregi.tr~es oontre lui par les trAvAilleurs.

-
196 -
Le fait même que le salarié journalier travaille d'une manière aussi
régulière ou même plus parfois que le permanent, c'est-à-dire à temps
complet, écar~e le procès de production comme critère de différencia-
tion entre eux. Aussi l'examen des conditions concrètes d'application
du contrat de travail révèle-t-il une certaine complexité qui ne permet
pas de saisir nettement le critère distinctif. Dans la pratique en
effet,
il est difficile de s'appuyer principalement sur la notion du
mode de paiement (à la journée, au mois etc) ou sur celle de la durée
du t r-av a i L,
Il n'est pas normal de considérer tous les travailleurs
recrutés à titre de journaliers ou saisonniers comme des travailleurs
temporaires é~ant donné que la majorité d'entre eux reste en place
dans le procès de production durant plusieurs mois et cela depuis la
création du complexe. De même en ce qui concerne le mode de paiement,
tous les temporaires sont.payés mensuellement et non journalièrement
comme préalablement défini. Qu'il s'agisse des journaliers cu des
saisonniers,
le statut de temporaire institué ~ la SODESUCRE arrange
la société et non pas les producteurs àirects.
Le fait de n'avoir
conclu aucun contrat de travail avec eux dans les formes réglementaires
libère d'emblé~ la SODESUCRE de toutes les charges prévues par le
droit du travail.
Le temporaire est exposÉ à des abus de toute nature
(retenue sur salaire,
résiliation unilatérale et licenciement abusif
etc ... ) .
Les nombreux abandons de postes et démissions constituent en
principe pour l'emplo~eur autant de moyens importants d'économiser de
l'argent dans la mesure où ceux qui partent ignorent totalement leurs
droits. De plus du fait de leur caractère temporaire,
les journaliers
ou saisonniers abandonnent leurs familles dans leurs villages ou régions
d'origine, ce gui restreint ou annule les exigences d'entretien de
la main-d'oeuvre du point de vue de son
existence vitale (nourriture,
logement,
soins médicaux, éducation etc.). Cela interdit au temporaire
toute p os s tb I Lt t.é de revendiquer le minimum vital. C'est aussi tout
cala qui conduit les éternels temporaires à réprouver avec véhémence
leur statut et à protester contre l'insécurité de l'emploi qui les
carac té ri se .
. .. / ...

-
197 -
Il s'agit d'une situation d'autant plus complexe que
l'institution ou le maintien du statut de temporaire se justifie
par la naturè même des travaux dits généraux à la SODESUCRE.
En effet,
le travail à la SODESUCRE se répartit sur deux
périodes dans l'année à savoir la campagne et l'intercampagne.
Pendant la campagne l'intensité des activités exige une main-d'oeuvre
abondante (cf tableau 15). En intercampagne,
il y a moins de travail
et par conséquent peu de travailleurs. Selon le Directeur Général
Adjoint, ceux qui se plaignent de l'insécurité de l'emploi ont
entièrement raison de le faire,
mais le travail de la canne à sucre
est ainsi fat t , "La SODESUCRE ne peu t
pas se permettre de payer des
salaires à des gens qui ne sont pas au travail".
"On suppose qu'en
intercampagne ils vaquent à leurs occupations personnelles au village ll •
Une telle vérité ne peut que conduire bon nombre de temporaires au
découragement dans la mesure où la plupart souhaitent occuper un
emploi permanent.
Il en résulte d'importantes fuites de la main-d'oeu-
vre temporaire vers d'autres lieux (notamment le Sud) où l'.on espère
trouver un bon travail définitivement.
3.1.2. - Le cas des permanents
Le terme permanent recouvre les Cadres,
les Agents de
maîtrise,_ les techniciens,
les employés de bureau,
les ouvriers et ,
une partie"des manoeuvres.
Ils passent avec la SODESUCRE un contrat
réglementaire de travail à durée indéterminée.
La procédure est fort
simple.
La SDDESUCRE lance un appel d'offre soit par le biais de la
Direction Générale,
soit par l'intermédiaire de l'OMOCI sous le couvert
du Ministère de l'Agriculture.
Toutes les candidatures sont donc
enregistrées selon le profil des postulants et en fonction des postes
vacants. Dès lors les intéressés subissent un test à l'issue duquel
les candidats-retenus font un essai dont la du~ée varie selon la
catégorie professionnelle
: 8 jours pour les manoeuvres, un mois pour
les ouvriers et employés de bureau et 3 à 6 moiE pour les Cadres et
Agents de m~îtrise. En ce qui concerne les emplois subalternes ou
tout autre travail qui peut être satisfait surplace,
la priorité est
donnée aux ressortissants du département.
Il
C'est seulement en cas
d'insatisfacticn que la damande est adressée au-delà de la région de
Zuéncula.
OMOCI : L'office de la mein d'oeuvre de Cote d'Ivoire.
. . .1fi • fi

-
198 -
Selon la Dir~ction des ressources humaines, les offres d'emploi ne
visent pas particulièrement tel ou tel individu, mais toute personne
ayant la compétence requise pour le travail concerné et en fonction
des besoins du complexe.
La SODESUCRE n'est donc ni une affaire familiale,
ni
régionale, mais bien nationale voire internationale. Elle obéit par
conséquent au principe d'objectivité et de neutralité pour le recru-
,r
tement de son.personnel dont le profil doit correspondre aux besoins
de la production et aux condition~ de rentabilité telles que exigées
par les entreprises capitalistes.
3.2. Un Cadre de la région comme stimùlant pour les travailleurs locaux
Nommer un
Cadre ressortissant de Zuénoula à la tête du
complexe constitue-t-il réellement une solution au problème de pénurie
de main-d'oeuvre et de désertion constante auquel la SODESUCRE est
confrontée chaque année? De tout. ce qui ~récède, nous avons vu que
la gestion de cette société n'est pas une affaire de sentiment et de
famille,
mais plutôt une question de rentabilité économique.
Le
programme sucrier ayant coûté très cher à l'Etat,
il est absolument
nécessaire de'privi~égier la production quantitative et qualitative de
sucre dans l'immédiat. Cette mission ne pouvant être réalisée que par
des spécialistes,
l'Etat nomme par conséquent "les hommes qu'il faut
aux postes. qu'il faut".
Le nombre de postes de travail et de Cadres
supérieurs fait l'objet d'une attention particulière (de l'Etat) et
d'études muni tieuses qui convergen t vers le seul souci d' efficaci té et
de productivité en fonction des besoins internes de chaque unité
industrielle SODESUCRE. Depuis la construction du complexe de Zuénoula,
le nombre de ses Cadres tourne auteur de 40 personnes(l). Le nombre
limité det:postes supérieurs conditionne le rythme et la possibilité de
promotion des Cadres moyens et des Agents de maîtrise.
Il existe
cependant un système de rotation interne ou intercomplexe qui consiste
à faire de certains anciens manoeuvres et ouvriers des Agents de
maîtrise en tenant compte de leur efficacité et de leur performance.
Le nombre des Agents de maîtrise (dont une trentaine sont des ressor-
tissants de la région) varie entre 100 .e.t 120 .Agen t s .
(1)
Il n~y a pas un seul ~essortissant du département de Zuéncula
parm1 eux.
.

-
199 -
Tout comme le recrutement,
l'accession à un grade
(ou avancement) ou l'acquisition d'une promotion quelconque fait
l'objet de vives critiques à l'endroit de la Direction, à savoir le
favoritis~e (le couloir), les connaissances et les relations
personnelles d'amitié ou de parenté qui valent mieux que le savoir
et le savoir faire.
Les crititques les plus acerbes proviennent de
l'usine, du garage et du magasin. A tort ou à raison,
la teneur et
la fréquence des propos méritent qu'on accorde beaucoup d'attention
et de réflexion à cette situation(1). C'est a travers les critiques
Gue l'unanimité se fait autour de la nécessité d'une présence
effective de Cadre Gouro sur le complexe commeétan't celui qui doit
créer et défendre les intérêts des ressortissants de la région. Selon
le professeur Jear--Pierre DECONCHY,
il s'agit d'un problème colonial
de confiance et de protection. Ce sentiment d'être des dépossédés et
frustrés à été ouvertement et très sérieusement exprimé parfois avec
emphase dans les villages.
Pour les paysans, comment concevoir. en
effet que ce complexe qui a été donné au pays et au peuple Gouro est
géré et dirigé par des "étrangers" sans la moindre participation d'un
cadre de la région ?
Bien mieux,
aucun Cadre de la région n'est à l'abri des
critiques et du mécontentement des paysans.
Ils sont considérés
comme étant des complices, comme ceux qui ont vendu ou donné le com-
plexe aux
étrangers par le simple fait qu'ils n'y viennent pas
travailler.
P~re, on se sent moins concerné par l'avènement SODESUCRE
au fur et à mesure qu'on s'éloigne de ZUénoula et de la SODESUCRE. On
pense là-bas qu'il s'agi t d'une affaire de l "Etat ou de l' Administra-
tion ou encore des étrangers.
"Vanou léfè", (chose
des étrangers).
Cela renforce davantage l'indifférence relative constatée
jusque-là. Et pourtant ce problème n'est pas fondamentalement spécifi-
que à la région de Zuénoula. En effet l'absence ou l'insuffisance de
Cadres n'a pas empêché les Ano de venir travailler massivement sur le
complexe de Sérébou
(R. Deniel et le Directeur Général Adjoint), ni
les Abè à s'engager nombreux à
la COTIVO d'Agboville (A. DUBRESSON).
Même son de cloche à Borotou Koro(C. AUBERTIN) et à FerkéI et 8orotou~
(HAUHOUOT, A. ) .
-.___ ___
(1) P~us de ~O% des e~ployés des services généraux (cantines,bars,
dlSpenSal.res, entretien etc . . . ) affinnent être venus à la SODESUCRE
grâce à l'intervention ou aux conseils de quelqu'un.
. .. / ...

-
200 -
Bien qu'une l~action semblable ait êtê constatêe dans ces rêgions
elle n'a pas, ê té vêritablement un frein au fonctionnement des unitês
industriellesconcernêes. Pourquoi Zuênoula doit-il donc constituer
un cas particulier de rêsistance ?
D'une manière gê né raie,
l'on pense touj ours qu'on -n'est jamais
mieux servi que par les siens. Cette assertion maintes fois vêrifiêe
illustre admirablement l'attitude et le comportement des Ivoiriens.
Le constat en a êtê fait
(1978) par COULIBALY Fatou à l'occasion de
la grève des ouvriers de l'UTEXI de Dimbokro(l). CISSE Abdoul Karim a
aussi fait remarquer (dans sa thèse de doctorat de 3è cycle 1983)que
la majoritê de· ses informateurs affirment que pour être servi,
il est
indispensable d'avoir un reprêsentant ou quelqu'un de sa rêgion ou de
son ethnie au Gouvernement ou au Parlement.. Enfin le même constat a
êtê fait par nous(2) en 1979.
On sait par consêquent que le sentiment communautaire est
très fort dans le monde rural où l'on fait plus confiance à l'homme
de sa région ou de son ethnie qu'à sa compêtence technique et
scientifique. -Dan s
le cas d'espèce, cela s'est traduit à Zuênoula
par deux évènements qui sont apparemment sans grande importance, mais
qui circulent curieusement dans la rêgion comme êtant des manifestations
et des rêactions contre l'injustice des respcnsables du complexe. 'En
1981 en effet, des travailleurs locaux ont contesté l'autorité des
chefs d'équipe "étrangers" et ont refusé que la paie se fasse par
l'intermédiaire de ces derniers.
Des altercations les ont opposés et
au lendemain de la paie,
les manoeuvres ont mis le feu à la canne.
Les manifestants (leurs chefs) ont été arrêtés et jetés en prison~ Pour
la Direction,
il s'agit d'incident mineur provoqué par quelques
individus égarés. Mais pour la population c'est une réaction logique
et normale contre la présence massive des "étrangers" dans la gestion
du complexe de la région.
(1) COULIBALY Fatou:
op cit.
page 73.
(2) BAHA Bi Vouzan,
Attitude et comportement des Ivoiriens face à
l'école.
Mémoire de licence I.E.S.
1979.
. .. / ...

201
-
Le second évènement important est l'opposition exprimée par
les travailleurs locaux contre la muta t t on, de Monsieur Vanié
(l'ex-Adjoint au Directeur de l'usine) au complexe de Ferké. Dès
l'annonce de la décision (1983) de mutation,
les travailleurs Gouro
sans exception se sont catégoriquement opposés en marquant un arrêt de
travail. Une délégation s'est aussitôt rendue au Ministère du Travail
pour protester contre ce départ.
Le Député d'alors fut saisi par eux
pour intervenir~
A dire vrai, Vanié représentait beaucoup de choses pour les
travailleurs.
Plus qu'un simplE conseiller,
il était à la fois un
rassembleur d'hommes, un catalyseur des tensions,
le défenseur des
intérêts et leur représentant au complexe(l). L'intéressé en était-il
. réellement conscient? Ce qui est évident, c'est que Vanié a observé
un silence coupable au moment des agitations. Pour la Direction du
complexe,
la mutation s'est opérée dans l'intérêt de Vanié.
La SODESUCRE
a minimisé par ce fait l'importance que revêtait la présence de Vanié.
Il s'agissait, selon le Directeur Général Adjoint, de lui attribuer une
promotion qu'il n'aurait pu acquérir s ' i l était resté à Zuénoula.
L'intéressé en était-il vraiment convaincu? Si oui pourquoi a-t-il
hésité au départ? Sa promotion actuelle est-elle un fait du hasard,
une simple colncidence heureuse? Là aussi l'intéressé garde un silence
total.
Il avoue cependant n'avoir jamais résolu concrètement un
problème pour ses frères travailleurs de la région. Certes,
il a dû
intervenir parfois pour leur donner des conseils et les apaiser
lorsqu'ils est~ment être abusés. C'est tout. Cela suffit-il comme
condition ,détenninante à expliquer l'indifférence des populations de
Zuénoula face à la SODESUCRE. Tout ccmpte fait,
il faut avouer qu'il
'jouissait d'une grande confiance de ses compatriotes.
Quan.taux cadres de la région du moins ceux que nous avons
interrogés (une quarantaine au total y compris les autorités politiques)
ils sont aussi choqués par l'indifférence et la résistance de la
population plusieurs fois répétées par la pres~e locale.
(1) Même ~i officiellement il ne jouait pas ces rôles, les travailleurs
locaux les lui attribuaient.
. .. / ...

- 202
-
.~
Tous s'intertogent également sur l'absence d'un Cadre Gouro au sein
du complexe.'Mais à la question de savoir s'ils accepteraient d'y
aller travailler,
la plupart affirment n'y trouver aucun inconvénient
si l'occasion leur était offerte. Mais de quelle occasion s'agit-il?
Combien parmi eux ont-ils réellement sollicité leur intégration à la
SODESUCRE et quel a été leur sort? Chacun se contente d'accuser la
SODESUCRE de refuser les Cadres Gouro à partir de quelques exemples
vagues,
imprécis et pas très fondés.
Une étude un peu plus approfondie avec un grand échantillon
nous aurait'peut-être permis de rencontrer ceux qui ont été refusés
par la SODESUCRE. Chacun exprime plus o~ moins timidement le désir d'y
travailler. En ce qui ccncerne la SODESUCRE les responsables affirment
n'avoir jamais enregistré une candidature"valable", un profil corres-
pondant aux exigences de la Société au niveau des Cadres. Rien ne nous
permet non plus de vérifier ou de ccntredire cette affirmation.
Quoi qu'on dise,
ce qui est cependant vrai,
la présence d'un ou de
plusieurs Cadres Gouro est indispensable au bon fonctionnement du
complexe. Cela confirme ce que disait cinq ans plus tôt R.
Deniel en
parlant des Ano.
"Quand il Y aura sur le complexe un Cadre Ano,
le Climat sera,
je crois, plus sain.
Il convient de tentEr l'expérience".
Cette proposition doit être accompagnée d'une campagne
d'information et d'éducation de la masse paysanne rurale qui doit
comprendre, qu'une unité industrielle comme le complexe est un, fait
national. Ce sont surtout les retombées économiques et sociales qui
appartiennent à la région de Zuénoula. Tant que cela n'est pas compris,
le problème de main-d'oeuvre subaltErne se posera toujours avec acuité
dans cette région Gouro encore marquée par la tradition .
...1...

_
2[)3 _
Chapitre VI
LA SOCIETE GOURD, UN MONDE ENCORE A L'ABRI DES
GRANDES INNOVATIONS
Parmi les éléments qui ont conduit le complexe à un dys-
fonctionnement, il y a, en plus des facteurs internes que nous venons
d'exposer, des facteurs externes liés à l'organisation m~me et au
fonctionnement de la Société Gouro prise comme une entité globale
dans laquelle la Sodesucre tente de s'insérer. En effet au début des
travaux de construction du complexe, les travailleurs locaux sont
venus des quatre coins du pays gouro. La plupart d'entre eux ont fait
le dépalcement avec l'accord et les encouragements des familles. Par
contre certains y sont venus de leur propre volonté. Ceux-là pnt eu
des difficultés Dour réintégrer la com~unauté villageoise après leur
aventure. Cela signifie que malgré l'importance relative de l'exode
rural dans la région, le respect des a1nGs et la force du pouvoir
traditionnel demeurent encore réeis. En période de camapgne sucrière
par exemple, c'est avec l'accord des chefs de g6uniwuo (cellule de
production et de con sorn.uat i on ) et de dogi (la descendance) que s'opère
le recrutement des travailleurs dans les villages. C'est d'eux que
dépend en'9rande partie l'adhésion m2ssiv8 ou la non participation
des jeunes (leurs dépendants) auX travaux de la Sodesucre. Hier ils
encourageaient leurs enfants à opter massivement pour les emplois
rémunérés du complexe. Aujourd'hui ils s'opposent à tout départ vers
cet endroit ou vers d'autres lieux d'aventure. C'est pourquoi nous
allons essayer d' appréhensder les trcii ts caractéristiques de cette
société gouro à travers son organisation socio-culturelle et économi-
que en nous basant sur notre expdrience personnelle, et ensuite en
nous réf~rant p8rticuli~rement auX travaux de Claude Meillassoux,
. . .1. . .

_
21J4-
de Bah Bi Irié J.P, de l'I.G.T. (1) et des cahiers de l'I.U~E.U.
(dans ,le village piégé).
1 - LES STRUCTURES SQCIALES DE BASE
1. - Les cellules familiales de production et de
consommation : le ~niwuo et le Dogi
Les cellulps de production et de consommation sont le
gouniwuo et le dogi. Le gouniwuo est issu de la communauté lignagère
l'ancêtre, l'a1né, les frères, les fils de l'a1né, les fils des
frères,ainsi que les dépendants de chacun des hommes mariés et pères;
épouses, vieilles mères, enfants en bas ~ge. Traditionnellement, cette
communauté était la cellule de consom~ation et était formée de plu-
sieurs groupes de production p8rmanente veillant de façon continue
t ant.nt collectivement, tant~t individuellement sur des champs communs,
à l'ensemble des travaux agricoles.
Les membres du gouniwuo, remplissent une fonction presta-
taire à l'égard du gouniwuozan, qui assure la fonction redistributive
des biens vivriers. Mais ce modèle théorique de gouniwuo-lignage
n'existe plus à proprement parler. C'est dans le travail que se
nouent les rapports d'autorité, la composition des groupes de produc-
tian ne coincide pas toujours avec le schéma guné~lu~ique. A la
famille biologique, se substituent des familles fonctionnelles dont
les membres sont associés par ues obligations économiques plus que
par des rapports de consanguinité (cas d'adoption).
)'autre part, l'apparition
de cultures commerciales provoque
une individualisation de leur exploitation. Le gouniwuozan, aujourd'hui,
est chargé de récolter les participations exigibles auprès de ses
-
(1) I.G.T.
: Institut de Gdoarephie Tropicale.
•••1. i •

- :ws -
membres lors de co~lectes, paiement des cartes PDeI (sur le plan
social la notion de groupe est encore très rÉelle). Enfin, dans
le temps, 'ces lignages font appara1tre des familles plus restreintes,
des segments de lignage auxquels peuvent se rattacher des individus
extérieurs au groupe.
Quant aU dogi (la descendance, la cour ) il est actuelle-
ment la cellule économique et sociale déterminante qui est rassemblée
dans la "cour" autour du kone z an (kone : domicile, concession ; z~n
celui de) ou du gouniz~n (gouni : foyer). Elie comprend généralement
un chef de foyer, un ou plusieurs frères, ses enfants, les enfants de
ses frères, son ou ses épouses, la ou les épQuses de ses frères, éven-
tuellement la mère, les tantes (également appelées mères), ou des élé-
ments exogènes, l'épouse et les orphelins d'un "frère" faisant partie
du gouni~uo-lignage.
Tous les dépendants actifs de l'a1né participent à la produc-
tion de la cellule économique. L'a1nG procède ensuite à la redistribu-
tion des biens au groupe entier (pas de possibilité de revendiquer
le fruit d)un travail exclusif : la p2rt du travail de chacun est
confondue non,mesur2ble).
Ce système assure la sécurité metérielle à tous les membres
du groupe y compris les inactifs et ceux qui n'entrent pas directe-
ment dans le groupe de production agricole : première épouse par
exemple; il permet d'assurer sa perpétuation. Les "hommes" dépendants
à l'intérieur du dogi peuvent constituer parallèlement leur propre
Qroupe 'de production formé de leurs propres dépendants. Cependant,
ils doivent en référer à l'autorité de l'ainé : le 'vieux". ils ne
disposent pas librement du produit de leur t r ava.i L et font acte, de
soumission à l'autorité. L'ainé généralement leur·remet les revenus
de lEur production.
.../ ...

_ 206
_
Au stade ultérieur, le dépendant devenant adulte (gone)
peut as~umer en plus du cycle de production, le cycle de consomma-
tion (redistribution des biens de production). Cette passation de
pouvoirs économiques s'accanpagne surtout du droit d'exercer son
autorité sur ses propres dépendants. Le nouveau kona zan peut tou-
jours en référer cl l'ainé ; par exemple, lors d'événements dépassant
ses compétences (manque d'expérience) en matière sociale ou économique.
Mais en principe, le kone z~n a la charQe de gûrer les cycles de pro-
duction et de consommation.
2. - L'autorité politigue
2.1. - Au niveau de la famille
La société gouro est très hiérarchisée. En effet chaque
membre de la communauté f8miliale distingue ceux qui sont nés avant
lui et dont il dépend (àvlizan) et ceux qui sont nés après lui
(azuoz~n) et, celui qui ne dépend d'aucun ainé est donc un adulte
(gone) tandis que celui qui dépend d'un ainé sans que personne
dépende de lui, est un enfant (pénin). L'autorité se transmet par
ordre de ~rimo_géniture entre frères ou à défaut de père en fils.
Tout individu sait ainsi qu'il passera immcnquablement par toutes
les étapes de l'autorité, le sexe l'est encore davantage. Les fem~es
obéissent aux hommes dès que ceux-ci sont considérés comme adultes.
Chaque famille est dirigée par un chef : le chef de famille. Toute
intervention d'un membre de la famille au niveau du village devra se
faire suiv2pt la voie hiérarchique: la fanme s'en refère à l'homme
qui à son tour- s'en remet au chef de famille; de même, le jeune
s'en refère aux vieux. Le chef de famille est le médiateur entre
le village et lr fsmille.
. . .1. . ·

207
En ce qui concerne la structure d'autorité villageoise,
deux types de ràglements permettent de le mettre en évidence
aujourd'hui. Une affaire personnelle par eX~mple ne nécessite pas
l'intervention de tout le village, mais seule~ent de l'autorité
immodiatement supérieure ainsi de suite jusqu'~ sa résolution. On
a al or s le cheminement suivant :
Ind.i.v.Ldu-c-e-Chef de--.Chef de~Chef de --+ Chef de ---..Chef de
famille
quartier
gouniwuo
village
tribu
_ -... Autorité adm.In i s t r at i va
-Dans un cas concernant le village, le chef de village réunit
soit le conseil des anciens (les chefs de dogi ou de lignage) soit
en parallèle le conseil moderne composé du chef du village et des
représentants du comité PDCI-RDA s'il s'agit d'une affaire ayant
trait auX rapports du village avec l'administration ou d'une affaire
avec des allogènes.
quant à l'autorité religieuse, elle comprend, pour ne men-
tionnar que les personnes jouant un r~le significatif, le féticheur,
représentant terrestre du masque qui fixe les modalités du culte
d'adoration des masques, les règles à respecter et les interdits
les accompagnant ; le monedoz~n (de mone : souri) devin consultant
la terre par le truchement de souris et de coquillages qui participe à
toutes les décisions importantes ; le responsable du m8sque, qui
exécute les danses dont le pouvoir est limité par lies règles très
strictes et décide de la sortie d'un masque en cas de deuil ou
d'initiation. Nous y reviendrons au prochain chepitre.
2.2. - Les commun8utus villa"eoises
Les communautés villagEoises sont dirig6es par des chefs
de village qui ont pour principaux col18~orateurs los repr~sentants
f
..-/ ...

_
208-
des comités POCT qui sont choisis au niveau des différentes communautés
lignagàres de base.
Le conseil se chErue de rég~er les problèmes intéressant
les ~apports du village avec l'administration, notamment les pro-
blèmes de placement des cartes du POCT, ou d'autres occasions nécessi-
tant le.recouDs à cette s~ructure de base de la part de l'administra-
tion. Dans le même temps, quand un probl~me interne au village sur-
vient, par exemple (problème d'adultère, litiges entre inviviuus ou
groupes) le conseil qui a charge de rûgler est le conseil des anciens
et, très souvent, il suit le principe de la palabre af~icaine et les
règles de justice traditionnelle pour départager les différentes
Composé du chef du village et d~s chefs de dogi, ce conseil
a compétence pour régler tous les problèmes qui pourraient perturber
la vie et l'harmonie du village. Les struotures d'autorité villageoise
apparaissent comme deux structures qui fonctionnent parallèlement en
fonction des problèmes qu'elles peuvent tr8ncher.
Ou point de vue de son fondement, le conseil des anciens,
repose sur le droit de la terre, terre 2vec laquelle les premiers
occupants auraient établi des liens magico-religieux, liens qui
motivent et légitiment l'autorité et l~droit de leurs descendants
~ exercer le pouvoir. Les manifestations de ce pouvoir sont générale-
ment le droit de rendre un culte à la terre, mais aussi, de rendre
la justice afin d'harmoniser
et perpétuer les rapports entre les
différents groupes qui doivent vivre à l'image de l'harmonie qui·
est sensée règner dans la communauté de l'au~delà, celle des anc~tres
morts.
quant au conseil "moderrta'", il app ar af t comme une instance
de derru.cr r.ccour s quand toutes les voies t r ad Lt Lonne l Les pour régler
.../ ...

-
209 -
les I~tiges (souvent entre individus de groupes différents) n'ont
pu déboucher sur une solution souhaitable. Il n'existe en fait que
comme courroie de transmission des mots d'ordre du parti et du
gouvernement. Comme on le voit, la vie communautaire est assez hié-
rarchisée; et reste fortement marquée par le sceau de la tradition.
On peut ainsi retenir avec Claude Meillassoux que malgré la présence.
et le développement de cultures commerciales, le pays gouro présente
encore beaucoup de caractéristiques propres à une économie d'auto-
subsistance. Le travail ne s'est pas encore individualisé: une part
de la production est communautaire, et l'organisation du travail
collective.
Comme mentionné plus haut, ce système a l'avantage d'assurer
socialement et matériellement la sécurité des membres du groupe et
de les repponsabiliser. Dans la mesure où chacun des membres passe à
tour de rOle par toutes les étapes de l'autorité, l'individu n'a
jamais l'impression de travailler gratuitement pour autrui, mais
bien au contraire pour lui même. Les rapports de soumission et les
possibilités d'accession à la richesse sont égaux pour tous les
individus puisque ceux-ci acquièrent f or cemen t au cours de leur vie
le statut d'ainé. Tout cela contraste avec les emplois salariés de
la Sodequcre où l'on n'est pas propiétaire du fruit de son labeur et
où règne un individualisme caractéritique des entreprises capitalistes.
Ici on travaille dur pour des gens qu'on ne connait pas. De plUs
l'emploi est proposé à l'indivipu et non à son groupe d'origine. Il
,
1
est par ccinséquent conditionné ~ar le lieu et le typ~ de travail. Il
doit ainsi abandonnEr la structUre traditionnelle. De là son isolement
s'accentue. Que les employés soient célibataires ou mariés et pères
,
.
de familles, les logements qu'on leur propose sont les mêmes po~r
.../ ...

21 (] -
tous (d'une seule pièce généralement). Dans ces conditions les risques
d'éclatement de la cellule familiale sont évidents.
Certes à première vue, on peut penser que "la sécurit~ et
la stabilité d'un salaire qui tombe toutes les fins de mois peuvent
satisfaire économiquement le gouro habitué à une rentrée annuelle et
aléatoire d'argent" (récolte) (1). Ha.i.s "le salaire ne remplace pas
la sécurité apportée par l'ensemble communautaire et les lois de
l'entraidell· (2). On peut donc dire que la solidité du tissu communau-
taire traditionnel n'est pas très favorable à l'insertion du complexe
dans la mesure où les difficultés d'adptation de l'individu (aux exigences
du travail industriel) finissent par l'obliger à se replier sur lui-
m~me ou'sur son groupe d'origine. C'est sur cette solidarité sociale que
repose la philosophie de l'organisation socio-êconomique du monde rural.
Ainsi par exemple, les produits vivriers sont encore en partie redistri-
bués à l'ensemble des membres de la communauté sous forme de repas
collectifs, à l'issue du processus de collaboration agricole et dans
les formes traditionnelles de coopération.
II - LES FORijES TRADITImJNELLES DE CflOPERATION AGRICOLE
Les formes de coopération traditionnelles sont généralement
des structures de collaboration entre les individus ou les groupes
aux différentes étapes et phases de la production économique. Ce sont
donc des cadres d'éxécution collective du travail qu'impose la nécessité
~I
(1)
P. Gurner.U.Lang et r~. Voillat, "Terres Noires
OMBRE.BLANCHE, projet de développement agro~industriel en Cote
d'Ivoire
Cahiers de l'IUED
op cit page 39.
(2)
Idem.
.
.../ ...

_ 211
_
de pourvoir auX besoins de la collectivité. Elles se constituent en
fonction des normos ct des hierarchi8s qui tiennent lieu de valeurs
dans une société. De nos jours ces formes élargies de coopération
agricole;se pratiquent surtout au niveau des jeunes.
Formules institutionalisées de participation collective
de la tranche active de la population villageoise au processus de
la production économique et sociale, les fo;mes de coop~ration tra-
ditionnelles sont pour l'ensemble social qui les pratique, le lieu
d'expression de la solidarité des groupes entre eux OU des groupes
avec d~s individus impliqués directement ou indirectement dans la
production et la consommation des produits qui en découlent. C'est
pourquoi elles sont le plus souvent auréolées de l'idéologie de la
solidarité parentale proclamée toujours par les couches bénéficiaires
pour conforter et perpétuer leurs privilèges. Ces institutions se
transmettent et s'imposent de façon inconsciente auX jeunes membres
de la société qui y voient l'occasion d'accomplir leurs devoirs
envers les a1n és et toute la communauté. Les formes de coopération
traditionnelle s'intègrent donc à une tradition et constituent la
matérialisation d'une vision du monde,-~ien qu'el~es ne soient pas
enseignées dans des structures spécialisées. On peut ainsi distinguer
trois formules principales de coopération en fonction du recrutement
des participants et de la classification des bénéficiaires destra-
vauX accpmplis :
- d'abord, une formule qui profite auX chefs de lignage,
de village o~ tribu, c'est-à-dire à ceuX dont le statut social et
le pouvoir économique le permettent : le "Bo'",
La deuxième formule, le "Klala" fonctionne de façon plus
démocratique au bénéfice mutuel des participants au groupe •
.../ ...

-
212 -
- Enfin la "société des jeunes" est uns formule qui conbine
les caractéristiques des deux premières et le "tré-clé" qui est aussi
un mode de salariat agricole en pays goura.
2.1.
Le 80
Le bO est une forme occasionnelle d'organisation collective
du travail qui rassemble des équipes non régulièrement constituées
présentant un caractère prestataire et fonctionnant à l'égard d'in-
dividus vis-à-vis desquels les membres du bO ont des obligations.
Le bO doit être convoqué par celui qui veut en bénéficier. Il s'étend
aux obligés et alliés et même auX co-villageois et habitants de villa-
ges voisins. Il a la propriété de pouvoir rassembler des effectifs plus
nomb~eux (la à 20 voire 30 personnes) que n'im?orte quelle autre
forme de coopération. On distingue grosso ~odo le 00 familial et le
bO canmunal.
Le bO familial s'étendant à un seul gouniwuo (soit auX
alliés par le mariage) se fait au profit des autorités lignagères
traditionnelles. Un rang social élevé dans le lignage est une con-
dition nécessaire pour bdnéficier du bO, de même que la possession
des biens àfin de pouvoir offrir un festin à la fin des travaux.
L~ bO can~unal, recruté parmi tous les habitants (les
jeunes en général)du village, opère aU profit des honmes les plus
éminents - chefs du village, gouniwuoz~n ou a1né d'une communauté.
Il est mobilisé pour des travaux agricoles importants (sur planta-
tians vivrières ou commerciales) ou pour la construction d'une case,
l'exécution de travauX de terrassement, la confection d'une toiture,
la collecte de chaume. Qu'il s'agisse du bO fa~ilial ou communal, la
réalité est que n'importe qui ne peut se payer les services du bO
/
... ...
.'

213 -
autrement dit le bénéficiaire doit être bien assis socialement et
économiquement. Bah Bi Irié a fait remarquer à ce sujet qu'utilisant
à leur profit le principe de l'obligation de respect ou du devoir des
jeunes à l'égard des a1nés, des dépendants vis-à-vis de leur chef
d'une part, et jouant d'autre part, sur la défense de l'honneur per-
sonnel, les personnes influentes ont eu recours au "bb" pour renforcer
leur autorité, leur pouvoir et soigner leur image de marque dans la
société en même temps qu'elles augmentaient leur pouvoir économique.
Cette forme de coopération est aujourd'hui de moins en moins
utilisée d'abord du fait de la cherté des produits de consommation
(repas copieux avec viande de boeuf, mouton ou volaille) et cadeaux
à offrir auX participants. Ensuite il est devenu de plus en plus dif-
ficle de réunir un nombre important de jeunes qui puissent accepter de
travailler, ne serait-ce que pendant une journée, sans exiger de contre-
partie financière. Le nouveau me1tre est l'''àrgent'' que les jeunes
peuvent 9agner gr~ce à l'introduction et au dévelOppement des cultures
commerciales. La présence de la Sodosucre dans le dép2rtemont n'a fait
qu'amplifie~ cette tendance gr~ce auX salaires qu'elle propose auX
jeunes. Il va sans dire que l~s jeunes r~ussissent davantage à échapper
à l'influence et à l'autorité des anciens qui ont du mal à asseoir et
faire admettre leur pouvoir désormais.
Enfin comme nous le disions plus haut, l'irrégularité des
pluies de ces dernières années contraint la plupart des jeunes à
émigrer vers les régions de forêt où ils espèrent créer des plantations
de café et cacao pour leur propre compte.
Tout cela a conduit le bO à une crise, à un déclin à tel
point que d'aucuns pensent que le 00 en tant que mode de coopération
tend à dispara1tre 3U profit d'une 2utre forme plus adaptée à l'évolu-
tion du tomps : le klala.
.../ ...

21/+ _
2.2. - Le "Klala"
Contrairement au "bO" le "klala" est une forme de coopéra-
tionrestreinte ; il a généralement un effectif réduit (5 à 6 per-
sonnes maximum). Les membres se recrutent exclusivement dans le m~me
village~ parfois dans le m~me quartier. LE choix des participants se
fait souvent sur la base de l'~ge (puisque ce sont des personnes de
~~me gén 8ration qui peuvent collaborer ensemble) et par des affinités
diverses. Le klala peut ~tre pratiqué par tous les éléments de la
tranche active au niveau d'un village (les enfants, les femmes et les
hom~es entre eux bien sOr). Les équipes de travail constituées fonc-
tionnent au bénéfice mutuel des particip8nts qui peuvent être proprié-
taires des champs qu'ils mettent en valeur ou ~tre dépendants d'un
ainé à qui profitent leurs services. A la différence du bO, les membres
du groupe klala n'exigent pas un repas copieux de celui qui les re-
çoit. L'essentiel est que chacun mange à sa faim pour le bon déroule-
ment des travaux.
Dans un m~me village il est possible de rencontrer plusieurs
de ces groupes d'entraide. Regroupés (ensemble) pour partager les mërnas
"peines et les m~mes joies", il se crée entre les membres du klala
des liens étroits d'amitié qui dépassen~ parfois le cadre familial
et, c'est sur la base de ces relations que se reconstituent et se
renouvellent les grou~es chaque saison. Il a souvent servi de cadre
à la naissance et à la consolid~tion de la solidarité entre les in-
dividus et les groupes. Groupe d'entraide efficace par la volonté
commune d'exécution des t~ches (au profit de tous et de chacun), le
klala permet d'accomplir très souvent à temps, la plupart des tra-
vaux à mesure que se déroule le calendrier agricole. C'est pourquoi,
il Cl la préférence des peysans dont certains affirment que le "klala" les
.../ ...

-
215 -
libère des travaux et des dettes des manoeuvres" par rapport au "b o"
qui exige des démarches préliminaires, des moyens matériels et un
nombre important d'hommes qu'il nlest toujours pas facile de réunir
à temps et facilement dans une société où tout le monde est avant
tout agriculteur (cf tableau nO.30•• page. 2)1). Pour toutes ces
raisons le klala demeure aujourd'hui encore la f9rme de coopération
la plus en vigueur au pays gouro.
Il existe en plus d'elle la société des jeunes qui permet
à ses membres de se procurer de llargent pour leurs besoins personnels
et le tré-clé qui est un mode de salariat agricole.
2.3. - LE MODE TRADITIONNEL DE SALARIAT AGRICOLE
Les formes traditionnelles de coopération agricole que nous
venons,de décrire constituent les bases du système d'entraide q4i crée
et renforce la solidarité du monde paysan. Ces formules anciennes de
coop 8ration connaissent quelques entorses de nos jours.
En effet la mutation rapide que connait la Cote d'Ivoire
depuis l'indépendance a fait naitre une mult~tude
de nouveauX besoins
dont les jeunes raffolent. Le désir d'acquérir ces b~ens introduits
par l~ société de consommation a engendré la monétarisation des rap-
ports de production (gr~ce au développement des cultures de rente).
Alfred ,SCHWARTZ a souligné ce phénrmèrie lorsqu 1il disait que "11 intro-
duction de l'agriculture commerciale a en fait, profondément perturbé
l'univers économique traditionnel" (1).
(1) A~ ,SCH~'JARTZ, La vie quotidienne dans un village qué ré
Abidjan
INADES
1975
page 60•
... j ..•

216 _
Et il ajoute plus loin :
"La moné t.ar Lsat Lon de l'économie n'a fait, en réalité, que substituer
un bien nouveau, l'argent, ~1 un ensemble de biens traditionnels".
C'est donc.la rBcherche de cet arQent, que les parents ne peuvent
pas toujours et facilement mettre à la disposition de leurs enfants,
qui conduit les jeunes rurauX ~ recourir à des formules de coopéra-
tian qui, tout en leur permettant de travailler aù profit de tous,
leur procurent le pscule. Au pays goura, il en existe deux principale-
ment qui sont le tré-clé et la "société des jeunes".
2.3.1.
"Le tré-clé"
Le "tré-clé" signifie littéralement en malinké une journée
de travail (tré = soleil, clé = un
un soleil
= une journée). Dans
la réalité concrète, il s'agit d'une demi-journée de travail, car elle
dure généralement de 8 heures ~ 12 heures au cas où le bénéficiaire
de la prestation n'est soumis à aucune obligation de nourrir son ou
ses co-contractants. En rev8nche elle dure de 8 heures à 14 heures
(avec une pause de 30 minutes à 12 houres) s'il· procure de la nourriture
au (x) travailleur (s). Cette forme de salariat tr~s connue au pays
"
goura a été introduit vers la fin des années 1950 par coux qui étaient
(considdrés cœlme aventuriers) revenus de la basse ~ote. D'après nos
informateurs ellES s'est r0pandue surtout au début des années 1960
avec l'avènement de l'indépendance de la Cote d'Ivoire. A, cetté époque
la journée de travail était payée à 25 F CFA avant d'atteindre 75 F
.~.',
vers 1970 et 150 F vers 1975. De nos jours elle est de 500 F CFAo
A la différence du "klala" et du "bü'' qui regroupent un
certain nombre de jeunes, le "tré-clé" se caractérise singulièrement
par son aspect individualiste. Sa formule est'simple et se fait de
deux manières. Dans le premier cas en effet, si-un jeune sent le
.../ ...

besoin'd'argent soit pour rembourser une dette, soit pour faire une
dépense quelconque, il s'adresse à toute personne (le plus souvent à
un gouniWuozan) qui sèLait intéressé par son offre pendant une journée.
Il peut toutefois revenir une ou deux fois travailler pour le même
bénéficiaire à condition que cC'lui-ci eo exprime le besoin. La deuxième
possibilité est que le gouniwuozan peut solliciter les services d'un
ou de plusieurs jeunes volontaires (soucieux d'avoir de l'argent) pour
exécuter une tache déterminée. Il leur verse dans ce cas le salaire
journelier à titre individuel.
Cependant un jeune qui appartient à un groupe de "k.I al a"
reut, quand c'est son tour do b~n~ficier de la prestation du groupe,
en offrir les services à une personne nécessiteuse. Il empoche alors
l'argent ainsi gagné. Là aussi l'obligation de nourrir les travailleurs
n'est pas très formelle. C'est au niveau de ce dernier cas que le
"tré-clé" revêt une forme collective pr-oche de la société des jeunes.
De nos jours le "tré-clé" se pratique de moins en moins par rapport
à cette dernière.
La société des jeunos
La société des jeunes est la synthèse du "btl" et du "klala".
Elle est· dirigée gén6ralefiient 'par un président choisi parmi les membres
dont le nombre peut varier entre 10 et 20 personnes. Le choix des
participants se fait par affinités diverses et l'adhosion est libre.
C'est un groupe prestataire qui travaille pour ceux qui en font la
demande. Tant qu'il n'y a pas encore de demand~ émanant
d'un villageois
ou d'un ressortissant du village voisin, le groupe fonctionne comme le
"klala" et le travail s'effectue au bénéfice réciproque de ses membres.
Chacun assure son repas et son eau de boisson. C~nme dans le cas du
"klala", il n' y a ni repeS collectif, ni atmrne d'argent.
.1. . .

0

-
218_
si une personne extérieure au groupe désire bénéficier des services
de la "société", elle s'adresse au président avec une semme de 300 F
prA plus un paquet de cigarettes si elle est au village, ou 500 F CFA
plus un paquet de cigarettes si elle vient d'un village voisin. Une
fois les modalités de pai~ent convenues, le président informe les
membres de la date des prestations. Généralenent la rémunération varie
entre 5.000 F et 6.000 F paya~le à la fin de la récolte du café et
cacao (décembre - janvier). La même équipe peut ~tre sollicitée plusieurs
fois par la même personne. Tout mem'or e
de l'équipe empëché le jour de
travail peut se faire remplacer par un membre de sa famille. Com~e pour
le "btlll , le bGnéficiaire d'une prestation dcit assurer le repc:s dans
les mêmes conditions.
Cette formule de 12 société des jeunes a pris de l'ampleur
quand la main-d'oeuvre aal.ar i.ée a corm.iencé à se f a.i r a rare. Les paysans
y ont recours à la fois camille solution d'entraide et comme moyen de
se faire de l'argent et surtout comne moyen de renforcer les liens
d'amitié et de solidarité entre les membres de 12. communauté villageoise
ou fa~iliale. C'est ainsi que des jeunes gens ont pu s'acheter d~s
habits, des radio-casssettes ou des mobilettes ou bicyclettes avec
cet argent. Aussi, à l'occasion des fêtes de fin d'année (nouvel an
surtout), il n'est pas rare de voir des 9rou~es de sociétés de jeunes
acheter des b~tes (moutons, boeufs) pour c2.1ébrer leur réussite. Tou~
les membres se retrouvent à cet effet au domicile du président pour
se partager les repas et le reste de l'argent gagné pendant l'année.
Eonme telle, la société des jeunes fonctionne à la fois à
la satisfaction générale de ses membres et des bénéficiaires des pres-
tations. Elle se ~résente ainsi Comme la forme de coopération tradi-
tionnelle d'avenir dens la zone de Zuénoula. Elle constitue une SOUDC€
. . .1. . .

-
219 -
de main-d'oeuvre relativement bon marché pour los poysans de toutes
conditions et permet dans 10 m~me temps auX jeunes de se constituer
des ressources financières importantes. Elle est la matérialisation
de l'adaptation des institutions coop~rBtives traditionnelles auX
nécessités de l'économie moderne.
Son handicap actuel est le départ des jeunes vers les centres
urbains, conséquence des incertitudes de récoltes suite
auX perturba-
tions climatiques, toute chose pouvant gêner son plein épanouissement.
Qu'il s'agisse de la société des jeunes, du "klala" ou du
"btJl, toutes ces formes traditionnelles de coopi5ration agricoles
constituent l'occasion de manifester et/ou de renforcer les liens de
solidarité entre les membres des communautés villageoises. Cette vision
solidaire des réalités sociales qui fait la force du monde rural con-
court naturellement à rattacher l'individu aU groupe et le à son terroir.
Ici le travail est une occasion de rencontre entre amis ou entre camara-
des, l'expression de la manifestation d'une assistance du groupe à
l'individu. Certes, on travaille dur, m~me très dur parfois, mais on
travaille pour soi, en groupe et souvent lien société, on fait en sorte
que le travail soit une fête. On chante
on se rem8rcie, on s'encourage
L
de la voix, on hoit ensemble un canari de bangui. Aussi on est libre
de son travail. Si l'on veut rentrer des champs plus ttJt ou si l'on
s'2bsente parce qu'on est fatigué ou qu'un étranger est venu, on est
libre de son temps" (1).
En revanche, pour travailler au chantier, il faut se lever
très ttJt le matin (à 4 heures parfois), courir aU lieu du rendez-vous
au petit jour sous les ordres d'un chef d'équipe exigeant qui ne
cherche pas toujours à vous comprendre, et qui ne s'adresse ù vous que
pour vru s T a.ir e des remarques, pour contrtJler votre travail ou pour
vous p uint or ,
(1) J.P. Benoist
op cit pale 16.
• • •1/•••

-
220-
A la fin du travail, il faut attendre les camions pour le
retour dU' rentrer à pied au village après une journée de labeur où
l'on n'a pu rien manger. "Ces attentes pénibles sous le soleil de
plomb peuvent excéder deux heures" (1). C'est le même refrain chanque
jour.
Et puis on travaille avec des personnes qu'on ne connait pas
DU qUi ne sont pas toujours des amis.
Personne ne s'occupe de ce que
fait son prochain. L'on est seul face à sa t~che quelles qu'en soient
la densité, la longueur et les difficultés d'exécution. On se sent
ainsi davantage isolé, abandonné à soi. Pourtant il faut tenir, il faut
s'adapter à cela malgré tout si on ne veut pas retourner au village les
mains vides. C'est ça la rualito du travail salarié dont on n'a pas
encore l'habitude, un travail jugé parfois d~shumanisant où le vieil
adage "chacun pour soi, Dieu pour tous" semble se vérifier à merveilleo
·Ll n'est donc pas étonnant de constater dans ces conditions
que le succès des formes de coopération traditionnelles constitue
une entrave auX possibilités d'intégration du complexe sucrier à cette
société et à l'économie rugionale. Cela peut être valable pour toute
innovation tec~nique, toute méthode de travail qui s'écarte d'emblée
du schéma classique et de la souplesse comeumautai r-e habituelle, . ou qui
tent~ d'isoler l'individu loin du groupe. l'échec de la culture atte16e
dans le village de Vieproye (rap~ort AVB 1976), de l'implantation des
G.V.C. dans la zone de Zuénoula (mémoire de maitrise de Bah bi Irié
1980) et celui de la régén~ration caféière à Manfla (rapport annuel
5ATMACr de Zuénbula 1979) l'illustruent parfeitement.
Il faut dire enfin que ces liens séculaires de solidarité se
retouvent dans le comportement quotidien du paysan gouro et plus parti-
culièrement dans la plupart des cér~moniAs rituelles et, au cours des
adorations des cultes religieux o~communi8nt les vivants et les morts.
(1) A. Hauhouob
op cit page 13.
. . .1. . ·

_ 221
_
III _ L'UNIVERS RELIGIEUX DU PAYSAN GOURD
Le pays gouro est essentiellement animiste et la très grande
diversité des cultes religieux ~raditionnels explique sa résistance
auX influences des religions importées, notamQent le christianisme
et l'islam qui sont dominées par un animisme encore très dynamique
dans cett~ région. La suprématie de l'ani~isme a été constatée et
confirmée par une étude de l'I.G. T effectuée en 1974 pour le compte
du ministère de l'agriculture. Sur un échantillon de 219 personnes
enqu~tées, 125 étaient animistes soit 57 %(cf tableau ci-dessous).
L'islam vient en seconde position avec 17,5 %,. soit 38 musulmans.
Tableau nO 29
Structure religieuse des engu~tés
s/p de Zuénoula,juillet 1974
:
Gatho-: Protes~ : i'1usul~
: Animl.s- :
: Non dé- :
)
: • liques : t~nts
: mans
: tes
: Autres
: clarés
:
Total
)
~~!~~;;;~;~1~~_:~_-~~~~~~~;~~~~j~~~~;~~~~j~~~;;~~~~~~~~;~~~~~~~~~;;~~~~~~~;;~~~~~j
~
%
~,5
3,7
17,4
57
7,8
5,4
100
j
Source
Ministère de l'agriculture, étude socio-démographique en
vue de la création d'un complexe sucrier en Cote d'Ivoire 1974.
Outre leur dimension religieuse, les cultes jouent un rOle
identificatoire des groupements humains qui composent une famille, un
village voire une tribu. AppartiEnnent en effet à la m~me famille, au
même clan ou lignage, tous ceux qui procèdent à des offrandes auX
rnërne s dix/ini tés, tous ceux qui accomplissent les m~mes cul tes. "A ce
titre, les cultes traditionnels peuvent ~tre considérés comme
des
.../...

-
223
-
c'est donc En tant que membre d'une famille ou d'un lignage que l'on
a le droit de mettre en valeur une portion de terrain. Le patrimoine
foncier se compose par ailleurs non seule~ent de la terre proprement
dite, ~ais aussi des palmiers, des colatiers et cours d'eau qui s'y
trouvent. Chaquefois qu'on exploite ses ressouces, les produits doi-
vent ~tre rjpartis entre tous CEUX qui exercent des droits sur ce do-
maine. Quiconque transgresse ces règlos s'expose à des sanctions.
3.3.- Les morts (les ancêtres)
3ien qu'ayant disparu physiquement, les anc~~res continuent
à réglementer la vie sur la terre.
Ils surveillent et protègent les
viVants des mauvais sorts. Ceux-ci dcivGnt les adorer en faisant des
offrandes à la terre afin de perpétuer les liens sacrés qui existent
entre eux. Ils sont à la base de l'organisation sociale de la vie com-
rnunau t a i r e , Ils font tomber la ;J1uie en vue de procurer une moisson
abondante auX hom~es. Ils sont les garants de la fécondité et de la re-
production de leurs descendance à laquelle ils envoient des enfants
qui matjrialisent leur ~résence parmi les vivants. Ils se révèlent
2lUX hommes par la voix du devin c co su I tant la ·;:erre ou le "r~onedozan".
Ils sont enfin les gardiens des moeurs et préservent la communauté des
risques ,de disparition. On les représente qéné r al emerrt sous plusieurs
aspects dont les ~lus caractéristiques sent les 82sques et les autres
formes d'adoration et interdits divers.
3.4. - Les masques
Ils sont nombreux et se répartissent en deux groupes, à savoir
les masques de réjouissance et les masques sacrés qui nous intéressent
ici. Ces derniers ont pour r nl e de préserver tant le groupe que l'individu
de tout ce qui pourrait constituer une entrave ù une existence harmonieuse •
. ..
. . .1. . .

-
224
-
Ils logent tous dans les uois sacr8s et leur sortie donne lieu à des
adorations de toutes sortes de la part de ceux qui ont transgréss~ ou
enfroint des interdits los concernant. C'est ~galement l'occasion pour
eux de débarrasser la sociétu des souillures engendrées par les méfaits

de certaines personnes. C'est ainsi qu'on les ~nime de temps en temps
lors des curémonies organisées en leur honneur. Ce sont des masques
m~les.Parmi eux on peut ci ter les plus connus et les plus importants
tels que,le Dj~ ou la conmunauté des Dj~, le Doho, le Vlo, le Djin,
la trilogie IIZ amblé, Zaouly-gou ll etc ••• Leur caractère hautement sacré
interdit tout accès auX fem~es et en fait par conséquent une affaire
exclusivement d'hommes, ce qui n'est pas le cas pour les canaris sacrés
et autres interdits divers.
3.5. - Les canaris sacrés
L'adoration des canaris sacrés est l'occasion de s'adresser
aux dieux et auX anc~tres à qui l'on fait des offrandes· Il en existe
deux principalement qui sent le IIYr i b~' (ou canari de sol eil), pe t i t
vase de terre au-dessus d'une fourche, placé devant la maison du chef
de famille; et le "Zriuhou b o" qu'on t.r cuve aux abords des villages,
des sentiers ou le long des murs servant d'autels ou s'accomplissent
les sacrifices en honneur des anc~tres. Parfois à defaut de ces objets
matériels, c'est sur un sentier, une route, une colline ou au pied d'un
arbre que se font les offrandes aux esprits et auX m~nes des morts.
Ainsi par exemple la direction du complexe a dO se faire violence (en
1904) pour fournir des boeufs et moutons afin de demander pardon auX
dieux de la fOr~t sacrée, représentés par un iroco abattu à l'endroit
oD se tro~ve le conplexe sucrier. Cette offense était considurée comme
la cause de la sécheresse de 1984 et de la mauvaise qualité des cannes •
.../ ...

225 -
L'animal ou les animaux ainsi sacrifiés scrvent ù racheter le ou les
coupables qui en principe aur~ient dO conna1tre un sort bien pire que
celui dont ils sont l'objet.
Enfin, il n'existe parfois aucune forme matérielle pour sym-
boliser 'l'esprit auquel on demande gr~cc, dans ce cas, le culte se rend
ù l'endroit sensé ~tre sa résidence. C'est de cette façon que le pays
gouro est profondément marqué par un animisme très ancré dont l'une
des manifestations les plus significatives parmi tant d'autres est le
jour sacré du vendredi : le Plamblè.
3.6. - Le Plamblè
Chez le gou~o, le vendredi (plamblè) est l'égal du dimanche
pour les chrétiens. Les paysans s'abstiennent d'aller au champ le
vendredi. Chaque gouniwuozan invite les membres de son lignage pour
adorer le fétiche familial. Des sacrifices sont offerts aux principaux
dieux du panthéon gouro et aux mtnes des ancêtres. C'est égalem~nt le
jour où les litiges sont tranchés. Selon Jean 8rovou, si nos parents
travaillaient le vendredi pendant les travauX forcés, c'est parce qu'ils
n t ava.i en t pas d'autre choix. "Ha.In t enan t quo nous sommes indépendants
le vendredi reste un .j our sacré pour nous". "Tout acc i.den t de travail
le vendredi est mortel parce qu'il constitue une offense contre les
morts". C'est le vendredi qu'il f2ut se reposor et donner à manger auX
"anc~tres morts". "C'est également le vendredi que les dieux et les
morts rendent visite aux vivants". Il est par conséquent formellement
interdit {I() travailler ce jour-là au champ. Voyons à titre indicatif
la répartition des jours interdits de travail en pays gouro sur la base
des réponses tirées de l'étude réalisée par Sinali Coulibaly,
Koby Assa
et Hauhouot Assepo en 1975 pour le compte du ministère du plan et de
.../ ...

-
226 -
l'industrie (1).
- 1,38 %des personnes intcrrog6es s'~bstisnnent d'aller BU
travail le lundi
-- 0,69 %le mercredi
-18,75 %le jeudi;
- 8, 33 %le dimanche et
-70,85 %le vendredi.
Le tableau révèle l'importance du "plamblè ll en tant qu'interdit,
relevant du système des interdits dont le "but est de préserver tant le
groupe que l'individu de tout ce qui pourrait constituer une entrave à
une existence harmon i cuse" (2). Ces interdits sont, "un ensemble de
prescriptions, édict6es au fil des g6nérations,au gr6 de circonstances
ou d'événements généralement malheureux, dont on cherche à éviter le
renouvellement par l'adoption des mesures préventivesll (3).
Leur respect met tant la collectivité qUe l'individu à l'abri
du malheur sous toutes ses formes
cataclysmes n8turels, anéantisse-
ment du village, discorde, accident, mort etc. En revanche leur trans-
gression donne prise aux forces du mal, et plus particulièrement ·auX
interventions des sorciers.
De tout cela i l découle qu'il n'est pas possible de "d Lsaoc Ler
l'individu de ces déterminismes sociaux. 1111 se situe donc dans un
système de références etdans un contexte qui agit sur lui à travers son
système de 'valeurs, sa conception de la vie. Les autres forces agis-
santes sont celles liées à l'appartenance
aux groupes et créent les'
(1) KOBY ASSA, COULIBALY Sinali, HAUHOUOT A. , Etude s ocf.n-démoqr aph i.que
en vue de la création d'un complexe sucrier en C~te d'Ivoire.
I.G.T. septembre 1974.
(2) Alfred SCHUARTZ
op cit
p. 120.
(3) idem
.../ ...

,227
rressionsallant de l'appartenance à l'ethnie, à l'appartenance
b i.oLcrji.que et Q l' app ar t ennrice au Groupe de descendance lignagère".
L'individu dans la soci~té traditionnelle, qui présente toujours los
caractères de l'économie d'auto-subsistance.
Cet attachement à l'appartenance lignegère, à l'ethnie et
aux phénomènes religieux (en un mot aux valeurs tr8ditionnelles) a
conditionné et conditionne encore la vie de la soci~t6 gouro. Or
travaillpr à la Sodesucre et plus particulièrement en période de
campagne sucrière dans sa formule actuelle (cf c8mragne 1984-1985)
suppose que l'individu doit renoncer à tous ces principes, à toutes
ces rèQles d'existence. Dans ces conditions, il n'est donc pas étonnant
de voir le paysan se consacrer en rriorité à l'agriculture vivrière
et/ou commerciale dont le calendrier souvent trl3S chargé ne lui permet
pas toujours d'aller travailler à la Sodesucre.
,
.
IV - LE CALENDRIER AGRICOLE DU PAYSAN, UN HANDICAP SERIEUX
POUR LE COMPLEXE DE ZUENOULA
La campagne sucrière se déroule généralement de novembre à
f~vrier. Cette période est consid~r~e par les opûrateurs des complexes
comme morte p our les paysans. On pense qu'iJ.spuuvent profiter de ce
temps lirrre pour se faire beaucoup d'argent à la Sodesucre. Cela n'est
pas très (vident au regard du calendrier agricole du paysan
gouro par-
ticulièrement chergé (cf calendrier aQricole rage.22B).- C'est le temps
de la récolte des ignames, du coton, du café. C'est aussi celui de
l'entretien du coton et du café. Le seul mois de mars qui semble ap-
paremment libre pour la nlupart d'entre eux vient après la campagne
sucr Lèr e; 'C' est donc un mauvais sort qui est réservé au complexe •
. . .1. . .

CALENDRIER AGRICOLE·
GDHITAFLA
J
F
M
A
M
J
J
A
s
o
N

aJ
C\\I
C\\I
1
IGNAME
MAïs
RIZ
COTON
;:;::::::.:::::::::::::;:;::':' ::'.::': ,::
CAFE
LE6ENDE
P,ep.r.tian du sol
Entretien
SourCE : Minis~~rc ~u P1En
:irJETD 1S'74.
_
Semis
Recalte

- 229
-
En effet le déroulement des travauX champêtres se fait en
fonction des phénomènes de la nature et 8U rythme des saisons. Le
1
régime des pluies qui règle le déroulement des travaux, regit égale-
ment l'é'volution de la nature. Cette évolution est pour le paysan un
guide précieux.
Il trouve ainsi ses r0pères dans'la~anifestation des
phénomènes naturels telles que la floraison de certaines plantes, l'ap-
parition massive de certains animaux ou oiseaux (chau~e-souris par
exemple), criquets, chenilles et autres insects etc ••• qui annoncent
le début de6~trav8ux. C'est ainsi que la floraison ou la chute des
fruits ou fleurs du from2ger annonce le début du sarclage et la récolte
de l'igname.
Le même phénomène se remarque chez le peysan baoulé voisin
du centre où la tradition raDPorte que lE buttage pour l'igname doit
commencer avec la r.Jaturité du fruit de la liane "anani" (Landolphia)
ou l'apparition des pre~iers vols d'un petit pç~illcn dont on dit qu'il
va acheter les houe s ; Les senis de riz pluvial drivent o.bu t.ar lorsque
les fruits du Tr-o-na tombent à terre (1). [es repères auxquels s'ajoute
entre autre l'observation de la constellation des pléiades pour les
défrichemehts ne semblent pas strictement respectés. Les décalages
sont souvent importants d'une exploitation ~ l'autre, d'un m~me village,
quelquefois de "tribu
3. tribu".
Touj ours est-il que le calendrier agri-
cole est guidé par
la transfor8ation des phénomènes de la nature.
Cette pratique ancestrale qui n'a connu aucune Jïlodification sensible,
aucune innovation cacbn Lque est nocive pour les cul tures dans la mesure
où les perturbations climatiques sont de plus en plus fréquentes depuis
plusieurs années. Il en découle que les rendements sont gér.éra lem e nt
très bas. Aussi ccnvient-il de 3~uligner que l'économie traditionnelle
(1) Minist~re de l'Agriculture, étude régionale de Bouaké
1962~19,4
reQe 94,
.'
.../ ...

-
230
-
du paysan gouro est d'abord une économie de besoin malgré l'importance
relative des cultures commerciales. Le système de production qui
l'alimente cherche avant tout à satisfaire, par des activités et des
techniques précises, les exigences les plus fondamentales de "l'homme".
Dans cette optique le paysan gouro n'est pas fondamentalement spéciali-
sé dans la cul.ture d'un seul produit vivrier et/ou commercial, mais
il cultive dans le même champ, où sur des parcelles différentes plu-
sieurs cultures associées ou alternées. C'est ainsi que l'on trouve
par exemple· dans le même champ le riz, le manioc, le maïs voir le café
ou encore dans un autre l'ign~e, le manioc, le maIs, le taro, le coton
etc .•• rn peut distinguer dans cette associatiOn les cultures princi;Ja-
les ou prioritaires parmi lesquelles l'igname, le riz, le café et le
coton semblent s' Lnposer nabur e Ll.ensn t et les èul tures secondzires
(cf tableawn°.3.0-.:tlpage ..231). 3ien que le riz demeure encore l'ali-
~ent noble et riche par excellence du gouro, l'igname est le produit
le plus, cultivé (1). Sa culture exige un cycle 2.ssez long qui occu~=
le paysan )endant plus de 12. ~oitié de l'année (cf calendrier agricole) •
.4.1. - Le cycle de l'igname et les cultures associées
"Tant en savane qu'en forêt, le dernier et les six pr emi er s
mois de l'année sont d~inés par l'igna~e, qui aCCapare 40 à 80 %de
l'activité pr oduct.r i cn, avec un maxi.num en avril-juin". "Les déf r Lche-
ments débutent en décembre au sud, en février au nord, ~uttage et s5~is
en mars-avril" (2).
(1) En raison de la sécheresse prolongée depuis plusieurs années, le
riz est moins cultiv3 que l'ignane et les êutres plantes plus
résistantes (manioc, taro, patate, etc .•• ).
(2) Etude régionale de Bouaké
op c i t
page 95 •
.../ ...

1
-
231
-
Tableaux nO JO èt J1
Répartition de la population selon les activit~s
pratiquées
s/p Zuénoula juillet 1974
:
ACT l VIT E 5
P R l N C l PAL E 5
.~
-----------:-----------------------------------------------------------------~
l
.
. .
.
.
.
.
. .
)
:::::~:--~-~:::~~-~-~~:-1-~:::-~-:::-1-:~:~~~::::--1-::::~-1-::-1-~~~:::--~
----~----_:---::~:-'--:~::--::~~~--::-:_-::---:--::--'----:~::::~::-----:~~-~
:
)l
:
ACT l VIT E 5
5 ECO 14 DAI RES
._----------:-------------------------------------------------------------
..
.
. ..
.
.
.
. .
..
...
...
PRCDUITS
: igname: mil: maïs: riz: coton: café : cacao: Autres
)
._---------:--------:-----:------:-----:-------:------:-------:----------)
..
.
.
.
.
..
..
..
..
)
..
. . .
..
..
..
..
.
l
Nor~BRE
:
3B
:
0
:
23
:
30:
2
:
0
:
0 :
43
\\----------:---~~---:-----:------:----_:-------:------:-------:----------
..
..
.
..
..
..
..
..
...
...
%
~
2 0
~. 0 ~ 12 ~ 15, 7 ~
l
~ 0
~
0
~
22, 6
~
Scurce
Ministère de l'Agriculture, étude socio-démographique en
vue de la création d'un complexe sucrier en C~te d'Ivoire
I.G. T., septembre 1974.
Ce sont d'abord les variétés semi
~récoces, puis les
variétés précoces qui S8nt mises en place. Enfin les variétés tar-
dives. C'est de préférence sur les savanes que l'on entame le cycle
de l'igname tardive (Wane), encore que l'igname précoce (yagonene)
s'accommoderait mieux du sol forestier. Le rendement de l'igname
précoce est de toute façon inférieur mais le première récolte con-
tribue à f8ire la soudure entre mr.rs et mai, la savane est nettoyée
à la houe et les herbes brQlées. Le buttage et le plantage des ignames
. .. .1· . ·

-
232---
entrepris vers juin-juillet. rn y associe le coton de variété locale,
les cucurbites, les b2nancs,le piment et parfois aussi le mals et le
coton sont plantés apr~s l'apparition des premi~res pousses d'igname,
mais avant le développement des feuilles. "Il faut remarquer que cette
seule culture couvre plus d'une année: de décembre-janvier à mars de
l'année ,suivante". "Alors qu'il récolte son igname, le cultivateur doit
commencer le défrichement de son nouveau champ".
Après les récoltes de janvier-février, on plante sur la terre
appelée vumbo, du mais, s'il n'yen a pas eu précédemment (ce qui est
le plus souvent le cas) du riz t2rdif (savoda) et du café. Les grains de
mais sont enfuuis dans les trous à la houe et en sui te recouverts :
garçons et filles se partagent parfois respectivement les opérations.
Le riz tardif est semé dès qu'appara1t le mals, c'est-à-dire environ
soixante jours plus tard. On peut alors entreprendre une nouvelle cul-
ture du mais, mais le plus souvent la t~e est abandonnée aux caféiers
et aux bananiers qui continueront à protéger ces derniers pendant quel-
ques années. Un cycle exclusivement vivrier exclurait le café à la
première saison. Sur le vumbo on plante de l'arachide, soit après la
récolte de, l'igname précoce en juillet-septembre, soit après celle de
l'igname tardive en janvier-février. Enfin l'arachide est suivie de
l'urahurene que l'on cultive seul (étant donné son abondant feuillage)
ou parfois le "fonio" (1), semé en juin-juillet. Les graines de fonio,
melangées de terre, sont semées à la volée. Le fonio qui pousse très
dru, ne permet pas de sarclage. La récolte se fait vers septembre. Ces
mêmes associations et combinaisons de cultures se font également dans le
cas du riz dont le cycle est plus court que celui de l'igname.
En effet, la culture du riz se fait encore selon les méthodes
t r ad I tionnelles malgré l'intervention timide de la SATr1ACI en matière
---------------------
(t ) Le" gouro n'est p2S grand consormat.eur du fonio : c'est une cul tura
secondBire8ujou~d'huide moins ~n MQins cultivée •
. ..1.. 0

-
233 -
d'encadrement des paysans. Les riz pluviaux sont sem~s de fin juin à
septembre et r~colt6s d'octobre à d6cembre. Le poste surveillance
(oiseaux et con~truction de cl~tures 2nti-rongeurs) des semis et des
récoltes, appara1t particulièrement lourd.
Les pépinières de riz marais sont faites à partir de juillet
et permettent des repiquages de septembre à fin novembre. La récolte
se place alors en pleine saison sèche. En terre de bas fond humide, le
riz peut ~tre semé en février, pousser dans 18 boue plus ou moins
inondée en· début de saison des pluies, puis ~tre récolté au cburs de
la petite saison s~che (juillet-aoOt). Ce cycle relativement court
"libère" le paysan et lui permet de se consacrer davantage aux travaux
de café dont le débroussement des plantations commence généralement
en juin, le récolte des "kouilou" en aoOt, de 'robusta" en septembre.
Ces récoltes s'étirent jusqu'à la fin du mois de janvier, prolongées
p2r les ppérations de décorticage ou pilage et de triage. Tous ces
travauX préoccupent le paysan pratiquement de novembre à janvier voire
parfois d'octobre à février ( cf c~lonclrier agricole
) et se. dé-
roulent en même temps que les travaux de coton. Cette dernière culture
se développe régulièrement dans la région depuis quelques années, ce
!~.
qui ne laisse presque plus as~eZ de temps au paysan de se rendre sur
le complexe sucrier.
4.2. - le coton, une g~ne pour la canne à sucre
L'expension du coton dans le ~artement est une gêne énorme
pour les campagnes sucrières. En effet, malgré le peu d'affection des
autochtones dans les années 1970, le coton cannait de nos jours une
véritable exnlosion à Zuénoula. Les plus ~randes surfaces cultivées
appar t Lennen t aux Sé3noufo qui en ont l' habitude. Néarunoins, selon
•. 0/•••

-
:,234-
Monsieur Soro '(le responsable adjoint de la C.I.D.T. à Zuénoula) presque
tous les villages de département le cultivent (1). "Seuls les villages
situés près du complexe négligent leur récolte en période de campagne
sucrière". Sur 121 villages recensés dans le département, 93 cultivent
le coton (cf tableau no •.J2..page.23~ ). Cela est d'autant plus vrai que le
département s'est classé cette année parmi les plus grandes régions pro-
ductrices de coton du pays (27.016 tonnes sur 212.000 tonnes soit
12,743 %de la production nationale) (2).
Toujours selon Monsieur Soro,cet engauenent est dO au fait qu'à
la fin de la campagne cotonnière, les !'evenus moyens par planteur se
présentent respectivement comme suit :
226 841 F en culture manuelle
816 482 F en culture attelée
- 2 692 194 F en culture motorisée, ce que la paysan ne peut
gagner durant toute une campagne sucrière. Cette année par exemple
3.090.047.275.F ont été distribués aux planteurs des départements de
80uaflé et Zuénoula ce qui équivp.ut è un revenu moyen brut de 234.841 F
par planteur (cf tableau nO.J3 .• p2ge.235.). Outre l'argent qu'ilsretirent
de la vente du coton, les paysans sont propriétaires de leurs champs. Ils
peuvent multiplier ou réduire à volonté les surfaces cultivables, ce qui
exclut toutes contraintes liées aux exigencEs d'un travail industriel.
La crDT assure également l'encadrement technique des planteurs et leur
donne des ,conseils bien que cet encadr-ement ne soit pas aussi "efficace
qu'on l'aurait souhaité". Deux personnes seulement encadrent les Il villa- ..
ges de Manfla. Néanmoins plus de 300 paysans du département en ont béné-
f Lci é ,
Par la même occasion, les planteurs reçoivent "gratuitement les
engrais".
(1) Entretien du 05/08/1985 au bur aau C!DT Zuénoula
(2) Voir Fraternité matin nO 6201 du jeudi 13 juin 1935,
"Le coton, l'or blanc ivoirien" page 27.
.../ ...

Tableau n ? 32 : Résul t e t de la camp2gne cotonnière 1~84-1985
_ 235
_
Sl.,Jrface
Production
Rende-:len t
RAPPEL CAJVIPAGNE PRECEDENTE
ZONES
(ha )
en tonne
en kg/ha
Surface
Production
Rende-
ment
Houaf'Lé
2530
t~857, 847
19~O
2272,5
2.282,060
1004
Gcihita-
3571
6613,393
1852
2287
1. 841, 689
638
fla
Zuénou1a
3305
6200 072
1875
1927
1. 632,752
847
'---'
-
Vavoua
5607,5
93t~4,790
16[16
t~362
5.962.201
1366
-
TOTAL
5013,5
27076,102
1799
Ilt~48, 5
11. 718.702
1023
SECTEUR
Source
Rapport annuel campagne 1984-1985
CrOT
F/i
Zuénou La , secteur Bouaflé.
Tableau n O, 33
Résultats financiers : sommes distribuées auX planteurs
par secteur et par node de culture
ZOI~ES
Culture
Cul ture
Hot.or LaatLon
r'1otoI' Laati on
Total
manuelle
attelée
intermédiaire
convention
sebtetJr
...... ..
.-.......
-
~
_
-~_ ....
Bouaflé
53ÜJ72185
3082 680
19985750
2911800
557052415
Gohitaf1a
720603165
24030280
12473330
-
7571(16775
--
Zuénoul.a
645381495
53214515
7923835
-
706519845
i
-
,...,
.. -
. . .
.iI
Vavoua
1053350810
16017430
-
-
106936824(
"'-_.
. .
TOTAL
2950407655
96344905
t~03 82915
2911800
3090047275
,- -
-_.
Source
Rapport annuel campagne 1984-1985
F/2 Zuénoula secteur Bouaf1é.
Enfin la CIDT s'efforce depuis 1980 à dévé l opper un important
programme de ciultu~es vivrères dans la région. Dans ce domaine, l'encadie-
ment porte notamnent sur les cultures suivantes : riz pluvial et inondé,
riz irrigué, mais, arachide, soja et récemment l'igname. Là aussi, la CrOT
fournit les semences, l~s engrais et les insecticides. Cette politique
agricole est tr~s appréciée par les paysans en dépit de quelques divergences
relatives à la commercialisation du coton (1).
(1) Les paysans estiment qu' ils eon t dupé s par les acheteurs intermédiaires
de coton et dms cultures vivri~ros.
.../ ...

-
236
-
Pour les resronsables locaux de la CIDT, le seul handicap actuel est lié
auX difficultés d'évacuation aussi bien du coton qUe des produits de
consommation courante. "L'exporience a rovélé que, du fait des goulots
d'r}tranglement constitués par le t r ai t ement insecticide et par la ré-
col te du coton, les programmes de mcderrrd sat Lon des exploitations (cul-
ture. atte1 6e, motorisation ••• ) ont surtout profité au développement
des vivriers" (1).
C'est dire que ces rapports et pratiques connaissent un
grand succ~s aupr~s dee ~aysans. Dn parle de plus en plus d'amplifier
la mécanisation ou la motorisation agricole dans le département. Une
telleassistemce ne peut que rencontrer l' adhé s i.on du paysan dont la
philosophie est fondée sur le devoir prioritaire de se nourrir et
nourrir Sa famille quand "on sait que dans l'idéologie des populations
rurales, la dignité d'un homme réside entre autres, done sa capacité
de subvenir aux besoins des familles. L'aQriculture alimentaire est
l'un des moyens d'atteindre ce but. Le séjour permanent des paysans sur
les complexes les conduit à abendonner les cultures vivrières et à ~tre
à la charge des autres producteurs. C'est une perspective qui n'est
pas fac,ilement acceptée" (2). Cela est ass-ez suffisant pour conpr endre
aisément le succ~s que conna1t le coton dans la région. Monsieur SarD
affirme. qu'il n'existe pas un seul village de la BDUS préfecture. de
Gohitafla qui ne le cultive pas.
(1) Fr~ternité Hebdo, le livre vert de l'auto-suffisance alimentaire P. 6
(2) A. HAUHDUOT
op cit p. 21
Nous n'avons pu obtenir de données chiffrées afin d'évaluer la
production agricole vivrière. Il suffit cependant d'écouter les
intérp.ss8s ou de faire un tour des marchés et des villages pour le
constater.
. . .1· . ·

-
237 ..&
"Pourvu qu'il pleuve abondamment chaque année comme ce fut
le cas en 1984-1985, la majorité des paysans s'orienteront vers la
cul ture du coton". Cette adhésion massive est nuisible au complexe
sucrier qui souffre depuis quelques temps d'un manque crucial de
main' d'oeuvre.
Tel est l'essentiel des difficultés auxquelles est confronté
le complexe sucrier de Zuénou18. De tout cela on peut retenir deux
types de facteurs qui ~~nent son intégration dans CE
milieu à savoir
- des facteurs liés ~ son organisation et à son fonctionne-
ment et des facteurs externes propres ~ l'organisation socio-économique
et culture~le de la société guuro. L'étude et l'analyse de ces deux
types de facteurs nous conduisent à tirer la conclusion générale que
voici.

- 238 -
CONCLUSION CENERALE
Il est difficile de conc Lur s un travail qui ne fait que
commencer. La sucrerie de Zu6noula qui est rentr~e
dans la deuxi~me
phase de son existence en janvier 1~06 ne ~eut véritablement faire
l'objet d'une étude efficiente en si peu de t enps , car "un complexe
sucrier ne peut atteindre sa vitesse de croisière qu'après dix ans
d'existence effective" (1).
Cela ne nous a ~as e~pêché de nous intéresser à cette
étude (que nous souhaitons voir se poursuivre soit par n r u sj s od t par
d'autres personnes). C'est ainsi qUe pour mieux nous faire comprendre,
IIOUS
avons cons t anment fait une mise GlU point à la fin de chaque
grande partie sous forme d'analyse. En conclusion générale de ces
travaux, nous noterons ici quelques points saillants, en étant convaincu
d'avoir.dit l'essentiel tout au long de la thèse.
En effet, la croissance éconanique qu'a connue la Cote
d'Ivoire depuis 1960 a créé une disparité entre le Sud assez prospère
et les autres régions du pays (notamment la Zone de savane dont les
populations émigrent vers le Sud) dont le revenu est des plus faibles.
Les complexes sucriers font donc partie de la seconde décennie du dé-
veloppement qui a pour mission d'assurer cet équilibre indispensable
Ù un dév~loppement harmonieux.
Cela s'inscrit également dans le cadre
de l'autosuffisance face au rythme élevé du taux de consommation du
sucre dont l'importation grévait le b~Qet de l'Etat. Pour Zuénoula,
les études de prospection ~taient favorables.
(1)
Mr Cyril Pointu, de nationalité meurlclenne, chef de Quart
Fabrication au complexe de Zuénoula. Echo du Goh 15 décembre 1982 •
.../ ...

239 _
Conditions cl imat.Lques et pédologiques adéqliates,me!n-
d'oeuvre relativempnt abondante (1 7 . 500 actifs), prix assez rému-
né r at eur sur le marché mondial etc ••• Clref, les candi tions d'une
bonne opération sucrière se~blaient apparemment réunies et le jeu
en valait la chandelle.
r1ais cette aventure a tourné court pour les Ivoiriens, car
de tous 'les objectifs visés, seule l'autoconsommation est atteinte.
La crise économique et les lois du marché du sucre ont contraint le
pays à une vente ~ perte, ce qui a empêché la Sodesucre d'honorer
ses engagements (impossibilité de r6aliser les programmes sociaux).
Le nombre de complexes est réduit ù quatre. La surestimation dont le
'~'
plan sucrier a été l'objet l'a trahi. Les mesures d'austérité qui
ont suivi n'ont pas manqué de conséquences pour les populations con-
cernées qui en attendaient beaucoup de choses. En premier lieu, c'est
le consommateùr ivoirien qui prend les pots cassés en payant 300 F le
kilo de sucre, vendu à moins de 100 Fsur le marché international
"soit le taux le plus élevé de toute l'Afrique francophone". A cela
s'ajoutent des probl~mes spécifiques à chaque complexe sucrier.
A Zuénoula par exemple, le problème de coupeurs de canne
est cruoial. La population demeure indifférente auX appels des res-
ponsables de la Sodesucre. C'est qu'en rualité elle n'y trouve pas
son intérêt. Le Sodesucre ~nplifie cette conviction en vivant repliée·
sur elle-même, ce qui en a fait "un l'londe dans le monde". Cette situa-
tion est particulièrement reprouvée p8r les transporteurs de la région
qui pensaient y trouver une source intarissable de revenus. Aucun
véhicule ·de t r an sp or t en commun n'accède au comp l.oxe sucrier. Aussi
la diversité relative des SDurces de revenus (produits vivriers,
café, cacao et surtout le coton) et la situation carrefour du dépar-
te~ent de Zuénbula militent-elles en faveur d'un emploi rémunéré qui
. . ·1. . ·

-
24[) -
impose une multitude do cont~2int8s, étant donn~ que la population
ignore on grande p8rtie le nction de salariat agricole. Il va sans
dire que l'impact s cc.i o-é conorai.que reste insignifiant. Sur le plan
socio-culture1, la popu12tion du département profondement enracinée
dans la t'radition, rnC'lgré le "remue-ménage" du début des travaux
du complexe, est restée imperturbable .I'n pour r ai.t dire à la limite
que sa cohésion interne s'est renforcée face au complexe. On se
trouve alors face à deux sociétés, fermées l'une à l'autre, qui vi-
vent parallèlement sans être en~ernb1e en r~alité et dont les intérêts
,
divergent fondamentalement. Le comploxe demeure ainsi désintégré(à
l'économie r 8gionale)et, ZuÉnoula n'est pas aujourd'hui plus déve-
loppé qu'tl ne l'était avant la Sodesucreo Il faut cependant espèrer.
"La catastrophe aurait eu lieu si l'on avait persévéré dans la pour-
suite du plan initial, mais on s'est arrêté au bord du précipice".
La voie du salut fJour le sucre ivoirien doit passer par le développe-
ment du marché intérieur, les perspectives [1our l'exportation étant
sombres. Une équipe d'experts avait (1978) à cet effet évalué la
consommat'Lon locale à 140.000 tonnes jusqu'en 1990, ce que les .quat r e
comrlexes atteindront ~ peine d'ici là. Aussi le nombre d'industries
utilisatrices de sucre en augmentation régulière constitue-t-il un
indice d'espoir à l'horizon 2000 : boissons sucrées, confiture, con-
fiserie, patisserie, chocolaterie, l'alimentation du bétail etc •••
sont les débouchés certains pour la Sodesucre. Cela ne signifie pas
que tous les problèmes de la Sodesucre seront pour autant résolus,
les plus importants étant ceux de la main-d'oeuvre subalterne (les
coupeurs) et l'intégration des complexes dans leur milieu environ-
nernenta1. Cela passera nécessairement par l'éducation, l'information
ct la ~ensibi1isation de 12 masse raysanne. Pour le comfJloxe de
ZuénoulC', rien ne 12rantit 1", nortc'ir nu 10 ouccè s immédiat d'une
.../...

_
241_
telle solution dans un monde oD il existe déjà une idée arr~tée et
une position bien définie à l'égard du complexe. Ce ~era un travail
patient, de longue h810ine, rr6 81 abre ~ tout projet de développemerit
qui veut acquér Lr l'adhésion et 12 participation du monde (rural)
paysan. C'est ce qui a f2it le succès du sucre dans les pays dits
de tradition sucrière tels que le lr~sil,Cuba, l'Ile Maurice,
la Norv~g8j Madagascar etc. o • ~~ les plantations de cannes à sucre
sont une affaire individuelle avant d'~trB une affaire de l'Etat.
L'on nous dira qu'il s'agit de leur tradition. A cela nous répondons
que toute histoire a un début et que la Sodesurire doit avoir son
histoire comme le café et le cacao ivoiriens en ont eue.
En attEndant, la complexe sucrier et la Société gouro con-
..
tinuent de cultiver chacun leur jardin. N'est-ce ras la preuve que
ni le dép-artement de Zuénoula ni la C~te d'Ivoire n'ont été réelle-
,
'
ment préparés à recevoir les conp l.exes sucriers ?

- 242 ~
B l B.L lOG R A PHI E
*************************
AKA ( Akmel)
L'insertion du complexe sucrier de Marabadiassa
dans son milieu.
Abidjan I.G.T. 1981.
ALBOU ( Paul) : Les Problèmes Humains dans l'entreprise.
Collection Dunod Série Gestion 3ème édition
Bordas, Paris, 1977.
AMIN (Samir) : Le Développement du capitalisme en COte d'Ivoire
Paris, édition de Minuit, 1975. 336 pages.
ASSIE (T H) : Economie de Plantation et Changement socio-
économigu8 en pays baoulé
Université de LyonII, 1976.
UER de psychologie et sciences sociales •
...1...

- 243 -
AUBERTIN ( Catherine) : Origine g~ographique et caract~ristiques
des travailleurs employ~s par la Sodesucre
sur le complexe
de Borotou.
Centre ORSTOM de Petit Bassam,Abidjan
1978
"
" .."
Il
: Le Programme Sucrier Ivoirien. Une undu~tj_
alisation R~gionale volontariste.
Travaux et Documents ORSTOM n D169
Paris, 1983.
BABASSANA ( h)
: Travail forcé, expropriation et formation du
salariat en Afrique noire.
Presse universitaire de Grenoble, 1978.
BADOUIN (R)
: Les cultures de subsistance
et le développement
~conomigue. Paris Pedone 1975, 104 pages.
Il
n
"
:
Economie Rurale
Paris, Armand Colin, 1971. 598 pages •
.../ ...

- 244 -
BAH BI IRIE ( J.P.) : L'impact environnemental de l'expansion
de l'agro-industrie sucrière en ce te
d'Ivoire.
Abidjan, I.E.S. 1983, 44 pages.
"
"
"
"
: formes traditionnelles de coopération
agricole et difficultés d'implantation des
G.V.C. dans la zone de. Zuénoula.
Abidjan, I.E.S. 1980. 178 pages.
BALANDIER ( Georges)
; Sociologie actuelle de l'Afrique noire
Changements sociaux au Gabon et au Congo.
Paris,PUf,
1955.
510 pages.
"
"
"
Sens et Puissance. Les dynamiques sociales
Paris Seuil, 1979.358 pages.
BEAUJOLIN (G)
: L'avenir de l'industrie sucrière
Thèse pour le Doctorat. Alger le 15 novembre, 1911 •
... / ...

- 245 -
BELLDNeLE (g) : Quel ddveloppement pour l'Afrique noire?
N E A, 1979. 210 pages.
"
"
"
Le chemin des villages : formation des hommes
et développement rural en Afrique.
Paris, l'harmattan, ACeT. 1979.
BOUDON (R)
: Les Mdthodes en Sociologie
Que Sais - Je N° 1334, Paris
pur, 1976.
BRUNE (P. 'DE) HERMAN (J) et SHOUTHEE (MD) :
Dynamique de la recherche en sciences sociales
Pàris,PUr,1974.
CAHIERS DE L'I.U.E.D. Collectif: Le village piégd
Urbanisation et agro-industrie
sucrière en COte d'Ivoire
Paris pur I.U.E.D. Genève 1978.
CALVEZ (J.Y) : Aspects politiques et sociaux des pays en voie de
ddveloppement, Paris Dalloz,
1971
... 1...

- 246 -
CAPLOW (T H) :L'snguête sociologique, Paris ,A. Colin, 1970.
CHARNY (F')
Le sucre
Que -Sais - Je . N° 417 Paris pur, 1975.
CHEVASSU (Jean) : L'industrialisation et Croissance r~gionale en
COte d'Ivoire: Bouak~ et la r~gion du Centr~.
Abidjan, ORSTOM S-H, 1972, 19 pages. 5 communications
au colloque de Yaound~, octobre 1972.
n
"
"
••
Effets d'un investissement massif dans une r~gion
sous-d~velopp~e, San Pedro.
Abidjan Sci Hum, ORSTOM Petit Bassam 1971, 109 p.
Vol l V N° 4, 1971 •
"
"
"
: Les modalit~s et le contenu de la croissance
industrielle de la COte d'Ivoire
Cahiers ORSTOM, Série
Sc Hum, Vol XIV n06 PP 27-57 •
"
n
"
. : Industrie den la COte d'Ivoire, Qui et Pourquoi?
ORSTOM, Petit Bassam, 1975.
"
"
"
: Caractéristiques structurelles de la croissance de
industrielle de la COte d'Ivoire.
Abidjan, ORSTOM, 1975.
.../ ...

- 247 -
CISSE ( A.K) : <Les domaines industriels de l'O.P.E.I.,R~alisation
. et Perspectives. I.E.S Abidjan, 1980,120 pages.
COULIBALY (A) : La participation féminine au dévelQp~ement
économique. I.ES. 1976~ 53 pages.
COULIBALY (MédJomo)
: L'assistance de l'Etat et le développement
régional : le cas du nord-ouest ivoirien.
I. E• S 1980.
COULIBALY( S),~AUHOUOT (A),KDBY(A.T), :
Etude socio-démographique en vue de la création
d'un complexe sucrier en Cete d'Ivoire.
I.G.T, septembre 1974.
COULIBALY (S).:
La dynamique du salariat en milieu rural S~noufo
Publication N°49, I.G.T. novembre 1982.
DELUZ CHIVA (A) : Mariage et ~conomie monétaire chez les goura
de Cete d'Ivoire. Afrique et
Asie N°7D,Paris 1965 •
.••1. •.

- 248-
DELUZ CHIVA (A)
Villages et lignages chez les gouro de C~te d'IVoire
Cahiers d'Etudes Africaines, Paris n019,
P.P. 388-452.
DENIEL (R) :Une société paysanne de Côte d'Ivoire: les
AND
Abidjan,
INADE5, 1'76. 225 pages.
"
"
:
La sodesucre de 5érebou-Comoé,~'histoire de quelques
malentendus, Abidjan 1NADE5, 1980.
"
"
De la savane ~ la ville, Collection Tiers Monde et
développement, Paris, Aubier Montaigne, 1968.
DETH1NE (p)
·Aspects économiques et sociaux .de l'industrialisation
en Afrique, Bruxelles, CEDES, 1961.
D1ABATE (M)
Opinions et attitudes des paysans ivoiriens face
au développement.
I.E.5; Abidjan 1972 •
.../ ...

-249 -
DIABATE (M): Le modèle ivoirien de développement, Abidjan lES 1973.
DIABATE (T)
Action socio-économique des sociétés d'Etat en Cete
d'Ivoire: Ex de la Caisse de stabilisation et de la
Soderiz. Mémoire de Maîtrise, lES, Abidjan 1976, 77p.
DIAN BONI
L'économie de Plantation en Cete d'Ivoire forestière.
Thèse de Doctorat d'Etat 8S lettres, Abidjan 1982, 781 p.
DUBRESSDN (A'
Régionalisation de l ' industrie" et croissance urbaine:
"le MAMMOUTH" CDTlva à Agboville (Cete d'Ivoire)
Cahiers ORSTOM, série Sciences Hum,vol~VIII, ND1
1981-1982. PI) 149-164.
DUMONT (R)
Paysans écrasés, Terres massacrées
Paris seuil, 1979, 358 pages.
.
"
Il
L'Afrique noire est mal partie.
Paris Seuil, 1973, 256 pages

- 250 -
DUPIRE (M)
Planteurs autochtones et étrangers en basse Côte
d'Ivoire orientale.
Etudes éburnéennes IFAN T.8, 1960.
DUTHEIL DE LA ROEHERE (J) : L'Etat et le Développement économique
en C~ta d'Ivoire, Paris, Pedone 1975~ 279 pages.
DUVIGNEAU (R) : Introduction ~ la sociologie •.
Paris, Gallimard, 1966. 186 pages.
FRIEDMANN (G)
: Où va le travail humain ?
Paris gallimard, 1967.
FRIEDMANN (G) etNAVILLE{P) : Traité de sociologie du travail
Paris,A Colin, 1972.
GARDINIER (JP) : Le pari industriel de l'Afrique
Paris, éditions France empire, 1977.
GOUSSAULT (V)
: L'Etat et
le développement de l'agriculture
Revue Tiers Monde,T XIV n058, pp 165-634 .
.../ ...

-251 -
GOSSElIN (G)
Développement et tradition dans les sociétés rurales
africaines, B.I.T. Genève 1970,343 pages.
GRAWITZ (M):
Méthodes en sciences sociales, Paris Dalloz, 1976.
GUIllAUME (M)
Rapports d'une mission d'études du développement
de la production sucrière en COte d'Ivoire.
Ministère de l'Agriculture et de la Coopération 1980.
GUY (R):
Introduction à la sociologie généraIs, T1 T2 T3
Paris, les éditions H.M.H. ltée, 1968.
HAUHOUOT (A)
: Une p~emière approche géographique de l'intégration des
complexes sucriers de COte d'Ivoire: l'exemple de
rerké1
et de 8orotou la 80a
Annales de l'Université d'Abidjan, série G TB
1978
HOlAS (B) : Chàngements sociaux en COte d'Ivoire
Paris, pur 1961.
125 pages.
.../ ...

- 252 -
HOlAS (B)
: le paysannat africain devant les problèmes des cultures
industrielles
Bruxelles, Revue de l'Institut de sociologie,
.Solvay, 64 pages.
INADES : Des paysans prennent en main
leur développement
Abidjan INADES rormation, 1974 ,(rédération des groupements
villageois de la région de Bouaké République de ce te d'Ivoire)
72 pages.
"
"
: le dévelopeement
rural, Abidjan,
INADES rormation, 1977
Cours d'initiation au développement
N°13, 69 pages.
.'.,
KOBY ( A.T)
: Effets d'un investissement massif sur les déplacements
de populations en Cete d'Ivoire: exemple du complexe
agro-industriel de rerkessédougou
Annales de l'Université d'Abidjan,1~77, série G, TB •
.../ ...

- 253 -
KONE DAHIRI '(Armand)
Le complexe sucrier de Katiola Marabadiassa
Mémoire de Mattrise, lES, 1982.
KOUAKOU N'GUESSAN (r) : Développement rural, opération Kossou.
KA5A
BYA KASA, N°12, 1977, pp 5-9.
MEILLASSOUX (t)
Anthropologie économique des gouro de Cete d'Ivoire.
Paris Mouton, 1970, 383 pages.
MEMEL rOTE (H)
Opinions et attitudes des paysans et ouvriers ivoiriens
face au développement. Abidjan lES, 1980.
MENDRAS (H)
: La fin des paysans, changements et innovations dans la
société rurale française, SEDEIS, A. Colin, 1970.
NIGUESSAN (KDUAME':
La mutation de llhabitat en milieurural baoulé
Thèse de Doctorat 3ème, lES. 1979.
NIANGORAN BOUAH (G)
Problème de la recherche en milieu de tradition
orale
Annales de l'Université d1Abidjan,
série F vol VI 1977 pp 45-68.
... / ...

- 254 -
OGNI KANGAH (b~:La femme dans l'Economie de Plantation: le cas de la
société Abey au Sud de la C~te d'Ivoire .
..,.
Thèse pour le Doctorat de 3èmecycle, Aix en
.Provence 1984.
OUEDRAOGO (Paul) : Aspects socio-économigues de l'intro~uction de la
canne à sucre dans la région de Banfora-Bérégadougou
Mémoire de Maîtrise,
lES 1980.
PAILLET (M) :
Etudes sur le développement régional en Cete d'Ivoire
Bordeaux,CEAN,
1976, 256 pages.
PILLET SCHWARTZ (A.M.) : Une tentative de vulgarisation avortée:
l'hévéaculture villageoise en Cete d'Ivoire,
Cahiers d'Etudes
Africaines, Vol XX, N°77/78
1980, PP 63-82.
"
"
"
"
: Capitalisme d'Etat et développement rurai en
Côte d'Ivoire. Paris Hachette, 1976.
RADCLIFF BROWN (A.R) : Structure
et fonction dans la
société primitive
Paris,
édition.' de Minuit, 1968 •
.../ ...

- 255
REPUBLIQUE
DE COTE D'IVOIRE: Ministère du Plan, Ministère de
l'Agriculture.
Etudes de l'aménagement des
villages
de
la
zone concernée
par le complexe
sucrier de ferkessédougou
Enquête sociologique AURA-BNETD, 1974.
"
"
"
"
Il
: Opération Promovillage : Séguéla, Touba
Biankouma, ONPR, Ministère de l'Agriculture
1979,211 pages.
"
Il
"
"
Etudes des effets induits du complexe
agro-industriel de ferké. Le nord ivoirien
en mutation.
Abidjan, SIGES, 1972. 1972, pp 29-35.
ROSNAY (JOEL DE) : Le macroscope, vers une vision globale.
Paris, édition du Seuil, 1977, 363 pages.
SAWADOGD (A) : L'Agriculture en COte d'Ivoire
Paris, PUF, 1977, 367 pages.
SCHWARTZ (A) : Système de Production et univers. économique traditionnel
Cahiers DRSTOM Vol III, 1971
PP 256-270 •
.../ ...

256 -
SCHWARTZ (A)
: La vie guotidienne dans un village guéré
Abidjan INADES, 1975.
TECHNISUCRE : République française, République de Cete d'Ivoire
Complexe sucrier de Borotou la Boa. Identification
des problèmes humains. Abidjan 1978.
TOURAINE
(A)
:Ouvriers d'origine agricole par Ala1n TOURAINE et
Oriette
RAGAZZI: Paris ,seuil 1961, 126 pages.
TOURE (1)
Le travail en Cete d'Ivoire: du collectivisme de fait
à la participation provoguée.
Thèse
de Doctorat de 3ème cycle, lES, Abidjan 1978.
TRAORE (A.D.) : Ministère de la Recherche Scientifique, Ministère de
la condition féminine.
Le travail féminin au complexe sucrier de ferké
Abidjan 1977.
.../ ...

- 257 -
REVUES ET ARTICLES DE JOURNAUX
******************************
Revue de sociologie du travail :
SAINSAULIEU (R) : Les relations de travail à l'usine
Paris, les éditions d~organisation, 1972.
" .
"
: Le chamage ; Politique d'emploi et
action collective.
Numéro Spécial de Avril-Juin 1981
aux éditions Seuil.
"
"
: Numéro Spécial: Les cadres, places et
destins, publié avec le concours du CNRS
4/82 octobre, novembre, décembre Dunod.
Jeune Afrique: Hebdomadaire africain d'information ND1013 du 14/01/80
Sucre, cacao, la Cate d'Ivoire,victime de ses amis.
JEUNE AFR I QUE ECO NOM I QUE N°14 de. I\\J 0 ve mbr e 19 82 _ :
Sucre, la baisse continue, retombées socio-
économiques des complexes.
.../ ...

-258-
FRATERNITE
MATIN
Spécial Agri
1979- 1980 -
1982-
1983-1984
Spécial
Industrie
N°1983
et
1984.
N°4550 du samedi
29
décembre 1979.
Les
Numéros des 15,
16, 17, 18
et 19 avril 1980.
Les Numéros des 12,13 et 15 Juin 1975.

"
-
259 -
QUESTIONNAIRE 50DESUCRE
---------------------,--
-----------------------
I - IDENTIfICATION DE l 'P.)QUETE _
1 - SEXE
00
H
01
F
· .. i ..

260 _
4 - NOl-1BRE D'ENFANTS A CHARGE
00
1 à 2 enfants
c=1
01
2 à 3 enfants
CJ·
02
3 à 4 enfants
c=J
03
Plus de 4 enfants c==J
·5 - CATEGORIE SOCIO-pnOFESSIONNELLE
00
Hanoeuvre
c=J
01
Ouvrier (d'usinc)c==J
02
Employé de bureau c==J
03
Cadre
II - MIGRATION & INTEGRATIO~ SOCIALE
. 6 -
AVI\\NT DE VOUR ICI, TRAVAILLEZ-VOUS AILLEURS ?
00
'Iu.i
c=J
01
Non
r
1
7 -
SI OUI, POU~qUOI L'AVEZ-VOUS ABANDONNE poun LA SODESUCRE ?
00
Bonnes conditions de travail ici
c===J
01
S,lairc élGv{;
c==J
02
~utrcs raisons (à précisar)
.../ ....

-
261-
1 II
-
CON DIT ION S DE
TRI.VI'.I LET POL1 T1 (l UE SOC li' LE
e - ETES-VOUS SATISF~IT DE v0TRE TP~VAIL ?
or;
Oui
01
Non
CJ
02
Ne sais p88
1
1
9 - SI OUI, POUR~UOI ?
00
Ben aa l a i r e
1
1
;----,
01
Avnntaocs
.,
m8tériels
' - - '
02
Logem8nt décent
03
Mutrcs (à préciser)
. 1(1 - LA SODE t.- T-ELLE CO~'STRlJIT OU PREVOIT -ELLE DE CONSTRUI RE
DES CENTRES [lE S!~~HE ET DES ECOLES POUR LES TR,WAILLEURS
ET LEUR FNHLLE ?
00
Oui
I l
01
Non
CJ
02
Nü sais pns
CJ
11 - LES TR,'WAILLEUr;S CC L\\ SODESUCRE DISPOSENT -ILS DES
COMPLEXES SPORTIFS ET ~UTRES LIEUX DE LOISIRS?
00
Oui
CJ
01
Non
c:=J
02
Autres à préciser
,
1
...,..

'.
-
262 -
12 - L;\\ SODE VOUS APpOnTE-T-ELL~UNE AIDE EN CAS DE DECES D'UN
PARENT OU EN CAS DE DIFFICULTES FINANCIERE5 OU DE TOUT
AUTRE ORDRE?
00
Oui
Cl
01
Non
0
02
AutrGs (:, préciser)
0
13 - SI OUI, ~UE FAIT-ELLE CONCRETEMENT ?
00
Pr~t d'argent
Cl
01
Dons en argent
Cl
02
Apports matériels
o
03
Autres (à préciser)
11
14 - ALLEZ-VOUS SOUVENT O'::.NS VOTR.E VILLAGE OU D";~!5
VOTRE REGION D'ORIGINE?
00 : Oui
01 - Non
02 + Ne sais pns
15 - 51 NON POURQUOI?
00
Manque de temps
r=J
01
ivianque de moyens financiers CJ
02
Aut.res (r~isons à préciser)
d
.../ ...

16 - r~URIEZ-VOUS L1 It'~~NTION DE CHt.NGER DE TRAVAIL OU DE
POSTE DE TR~VAIL UN Jour ?
00
Oui
CJ
01
Non
Cl
02
Ne s~is
p'Js
CJ
17 - SI OU!' POU~QUOI ?
00
Pour ncquéri r une pr omoti on
(..=J
01
PRrce que le trnvnil actuel est
pénible
02
Putres à préciser
o
18 - SI NON, POURGUUI ?
00
JE 9~gnc mieux ici
E::]
01
Je ne sais vr~iment où ~ller r==l
02
Autres
C1
19 - SINCEREMENT, ~VEZ-VOUS L'INTENTION DE DEVENIR
PROPRIETAIRE D'UNE PL;.\\rJT:,TION VILLAGEOISE SE CANNÈ A SUCRE?
00
Oui
I=I
01
Non
C~J
02
NE: sais p::-s
0
.../ ...'"

-
264 -
20 - Ot\\l\\JS LE 1ER cr,s, L!, SODE i;IDE-T-ELLE LES TRi\\V,';lLLEURS QUI
OESInENT C~EER DES pu\\~nr.TIONS VILU'IGEOISES PERSONNELLES
OU QUI DESIRENT SlINST~LLER A LEURS PROPRES cn~PTES ?
00
Oui
0
01
Non
0
02
Ne sa i s p2S
1 J
21 - SI OUI, QUE F~IT-ELLE CONCRETEMENT ?
00
DMrichGfl'lCnt des pnrco Ll os
c:=I
01
Prats fin3nciers
t r
02
AutrGG (~ préciser)
1V -
5 0 DES UCRE ETC ROI SSMl CEE con mu 0 LI E
a)
EHPLOI
22 - POUR RECRUTE~, LA SODE SUCRE PREFERE-T-ELLE LES TRAVAIL-
LEURS RESSOnTISSr~TS DE LA REGION DE ZUENOULA OU CEUX VENUS
00
Prioritë aux rcssortisssnts de Zuénoul~
r::J
01
Priorité nux étr3ngers
~l
02
Autres à préciser
1 1
23 - QUELS SONT LES EMPLCIS AUXQUELS ASPIRENT PLUS P~RTICU­
LIEREMENT LES TRAVAILLEU~S ?
00
Coupe de canne
rJ
01
Travail de l'Usin0
p
02
Travail de bureau
0
03
Outres (~ pr éci sor )
.../ ...

-
265 -
'24 - LA PRESENCE DE LA SODESUCRE DANS CE DEPARTEMENT A-T-ELLE
CONTRIBUE A LA CREATION OU AU DEVELOPPEMENT D'AUTRES
1
SECTEURS D'~CTIVITES ECONOMIQUES?
00
Oui
01
Non
02
Ne sais pas
25 - SI 0YI, LESQUELS?
00
~griculture vivrière
D
01
Transport
Cl
02
Commerce
CI
03
Autres à préciser
a)
SALAIRE ET COUT DE LA VIE
26 - VOTRE SALAIRE VOUS PERMET-IL DE MENER UNE VIE NORMALE?
00
Oui
Cl
01
Non
c.:J
02
Ne sais pas
Ct
27 ~ SI NON, POURQUOI ?
00
Coat de vie cher
o
01
Fami He nombreuse
o
02
hutres (à préciser)
28 - PENSEZ-VOUS QUE LA VIE COUTE PLUS CHER ICI QUE DANS LE
RESTE DU p;\\YS ?
00
Oui
Cl
01
Non
Cl
02
Ne sais pas
r::J:
.1.
f
. .

-
?66-
29 -,!:tU'E5J....C.E.JI.UI CgUTE LE PLU5 CHER ICI?
00 1 La nourriture
CJ
01 t Le déplacement
CJ
02
Autres à préciser
. V - 50DE5UCRE ET DEVELOPPEMENT
===============~==========
a) ~~~QI~§ ALIMENTAIRE5
30 - R~.~~PN50MMEl-VOU5 4E PLU5 tOMME NOURRITURE DE BA5E ?
00
Le riz
LJ
01 t La bahane
CJ
02
LI!ghame
CJ
03 t Autres à précIser
31 - !LU. y_btJ5dlAV"ITAl,LLEV.VgU5 1
db t 5Ur le complexe (sur place)
01 t A Zuéhoula ville
02 t Dans les villages environnants
03
Ailleurs (à préciser)
32 - P.EJJ.S.EZ-VOU 5 QU E LA REGION PRODUIT MOIN5 DE NDLIRR !TURE OU
r~~~pE NOURRITURE MAINTENANT
7
00
Moins de nourriture
0
01 1 Plus de nourriture
0
02
Ne sais pas
c:=J
33·~ ?~~p~ VOU5. E5T CE QUE LA 50DE5UCRE E5T POUR QUELQUE
~J~O?~ DAN5 CETTE 5ITUATION ?
00
Oui
CJ
01
Non
CJ
02
Ne sais pas
CJ
.../ ...

-
267 -
b)
BESOIN
lliJ
SAHTE
34 - LA PRE3iztlCE DE ;LA SODESUCRE A-T-JLLE APPORTE p.~ lIMELIOHA'rIONS DAIJS
LIL 00llflJlJFiE SAlHTAffiE ?
00
Oui
1:! • 1
01
Non
C:J
C=_J
02
He sais pas
35 - SI OUIi. COrIIT.lENT y CONTRIDUE-T'-ELLE COHCR-!,"rEllEl.JT ?
00 : Par la construction d'autres dispensaires
drolS dertains villages centre de la région
01
Par l'apport des médicaments dans les dispen-
saires existants
02
Par i1amélioration de la qualité des soins
donnés aux populations
[_:_ _
'03
Autres (à préciser)
c )
I3ESODJ
IDl
EDUCA'rrON
36 - LES TIlAVAILIEURS PARVLENHli:llT-ILS ft. SCOLARISElL2~_OJIS L.f..Qllii
ENFANTS D1Ù1S LES ECOLES DU
~~...o:;";..._=-.;;;=-o;;.";",;,;~;;,,,,,;;:_ _ DSPART
",-,-

:.LEUT
--....;;.......;...,;;;.
?
00
Oui
c..J
01
Non
o
02
Autres à préciser
37 - .ê.ll!..ol!..z...1:0OR0,UOI ?
00
Insuffisance d'établissements scolaires
CJ
01
Refus de la part des populations
c:J
02
Autres raisons (à préciser)
313 - EN CE QUI CONCER1TE LES TRAVAILLEURS DE LA SODE.'SUCRE, BENllF'ICIENT-ILS
D'UNEFOHl'\\ATION APPROPRIEE A L'H:PLOI QU'ILS EFFEC_~ ?
00
Oùi
1
1
01
Non
C---:J
02
Ve sais pas
1
1

...
_ 268
-
39 - _~J<.I~SJJ_-_Tr:.I!- A CET EFFET UNE STRUCTURE D'ENCADREMENT 7
,
00
Oui
0
01 : Non
0
oz
Ne sais pas
CJ
40 - f~~.~EJ~YP~? PERSONNELLEMENT QUE LA SoDESUCRE DOIT REALISER DES
.gf~_f'l...'\\.T.r_O.rts_. SOCIALES DANS U\\ REGION SI CE N'EST ilEJA FAIT 7
DO
Oui
o
01: Non
CJ
oz
Ne sais pas
LJ
41 - .SL..9.U)J_ .o..~s: DOIT-ELLE FAI RE CONCRETEMENT 7
00 z Construire beaucoup d'écoles
o
01
Construire beaucoup de dispensaires
et hôpitaux
CJ
oz
Construire beaucoup de routes
o
03
Autres à préciser
43 - .E!~f.I!~,_J\\..v.9TRE AVIS, L' ETAT DOIT-IL CONTINUER OU ARRETER
DE CREER D'AUTRES COMPLEXES SUCRIERS ICI ET DANS D'AUTRES
"REG-rON~S'D'U PAYS 7
. - ... _.. - .."-- ---
pO : Continuer à créer d'autres complexes
01: Arriter de créer d'autres
02 : Autres à préciser

GUIDE D'ENTRETIEfJ
SEMI-DIRECTIF
-
269
-
(pour les villages)
A. - EXPROPfUATION ET ORG,'~\\mSATION AGR,'UnE
.1
- L'introduction de la SODESUCRE VQUS a-t~alle créé des problèmes de terrain?
- Av~z-vouspbtenu d'autres terrep.en remplacement des terrains occupés?
- Comment cet accord a-t-il été,çonclu ?
- Vous a-t-on aidé à les mettre an valeur?
- Comment jugez-vous ces nouveaux terrains ?
- Tertiles
- EloiCJnés
- Superficie réduite.
- Le tracé des' pistes et le défrichement ont-ils détruit vos récoltes ët vos cul-
tures ?
- Comment ce dommage a-t-il été réparé ?
- Des problèmes de terrain ou de cultures vous opposent-ils encore à la SODESUCRE?
- Y-a-t-il des travailleurs de la SODESUCRE qui vous ont demandé dos terrains pour
cultiver?
- Comment avez-vous réagi à leur demande?
J
:.
~ i .
B. - HI\\IN DI ŒUVRE, PRODUCTION ET NOUVEAU TYPE DE RAPPORTS SOCIAUX
- Y-a-t-il des gens qui ont abandonné leur famille pour aller travailler à la
SODESUCRE ?
I\\vez-vous des parents (ou des membres de votre famiLle ) parmi eux ? Lesquels?
- Votre fils ou fille.'
- Votreifrère ou s~ur
-Votre père ou mère
.1.,
i.
.~ Votre mari ou épouse.
- Que pensez-vous de ceux qui O"t quitt6 l1e vill~ge dans ces conditions?
- Sont-ils partis avec votre accQrd\\'~u malgré'votre opp'6sition ?
- I\\vez-vous regretté leur absenée ?
Pourquoi ? ..,
Ce d6part massif a-t-il cu des répercutions au niveau du village?
Sur quel plan ?
Manque de bras (Production agricole)
Organisation familiale
- Organisation du!travail
(Helations) Rapports sociaux
Dislocstion de certains foyers.
.../ ...

270 _
Parmi ceux qui sont ?artis, en existe-t-il qui sont revenus au village pour culti-
ver la terre 7
Quelles sont les (causes) raisons de ce retour 7
- Que pensez-vous de cette nouvelle situation ainsi créée 7
- Y-at-il des gens qui ont pris·la SODESUCRE comme prétexte pour aller ailleurs 7
- Ceux qui sont partis, reviennent-ils souvent 3U village 7
- Font-ils certaines r~Qlisûtions HU village avec leur nrJent 7
- Vous viennent-ils souvent en aide en C3S de difficultés 7
- Auriez-vous l'intèntio~ d'olIer un jnur trav3iller'~ la 50DESUC~E ou bion'd'y en-
voyer un membre de la famille 7
C. - SODESUCRE ET ACTIVITES (AGRICOLES) TR4DITIONNELLES
: .
- y a-t-il des produits que vous culti vez cavantaqe maintenant que par le passé 7
Lesquels et Pourquoi 7
..
- Grâce à la SODESUCRE, Y-A~t-il de'nouvelles vari6tés de produits quevou6 ~ulti­
vez maintenant 7'
- Cela vous rapporte-t-il davantage 7
La SODESUCRE constitue-t-elle un ']rand débouché pour vos produits 7
- nuels sont les produits que vous vendez le plus ?
- Y-a-t-il des cultures qui vousr3pportàient .d~ll.!arlJent'·Jnns);lbpassa et que vous
avez abandonnées maintenant 7 ; ;
- Lesquels et Pourquoi 7
- La région produi t-e Lle beaucoup de cultures vi vrières mal.ntcnant J
- La SODE SUCRE vous aide-t-elle dans ce sens ?
Avcz~v:.',ys P~r:f9is des l?roblèmç~dc ma in 'i'œuvre en, ce qui concerne les produits
•. ' ..
,
, , 1 . ,
.r .
' . • .
t
'
_\\.
r • • •
vivriers?
,
1
1 .
- Comment les résolvez-vous ?
- Outre les, cul~~res, la pr6s~nce de la SODESUCRE a-t-elle été f~vorDble au dévelor-
pement d'autres activités ~conomiques qui vous rapportent?
D. - S[)I)ESUCRE ET NOUVELLE ORGANISATION SOCIO-ECONDMIQUE DES VILLAGES
- Ln SODE SUCRE a-t-elle fait des r6alisations pour vous et pour la r6gion ?
Lesquelles?
.../ ...

-
-2'71 -
- Pensez-vous qu'elle peut en faire davantage
- Q~lattendez~vous d'elle-concrètement?
(exactement) ?
- Lorsque vous avez des problèmes (sécheresse, manque d'eau) dans la rogion, cst-
cc que la SODE SUCRE vous aide à les résoudre ?
- Comment ?
- Pensez-vous qu'il est de son devcir de vous aider?
La présence de la SODEsUCRE a-t-elle attiré des "étr~ngers" qui sont venus s'ins-
~ l ' :
.
. _. taller dons la' région?
- A quel type d'activités se livrent~ils ?
''"
- Q' cn pensez-vous?
- Voust qèncnt-d l s dons vos-ec t.ivi tés éconoeuques ?
v.
l
'! Il j:
E. - SODEsUCRE - ASPECTS SOCIO-CULTURELS ET NOUVEAU SYSTEME DE,VALEUR
- -
. . . . . .
!
1
.: ~
,.
- Tous ceux qui reviennent de la SODESUCRE r espec tant-dIsr'toujour-s léS1CQU.t~!"~s ?
Sinon, cela changc-t-il quelque'êhosè au ni veau du village ? ." : . 1 ,
- Ce comportement vous oppose-t-il purfois à eux '?
- Comment tranchez-vous cos litiges?
- Depuis l'installation de la SODESUCRE, quelque chose a-t-il réellement ç~ang~
,
' " ,
dans le comportement des gens (et ~lus particulièrement des jeunes) vis-b-vis
des parents ?
- Comment ?
- Qu'en pensez-vous?
- Avec la présence de la SODESUCRE , les gens du village s'entr'aident-ils de plus
en plus f'acdIement en cas de difficultés fimncièrcs ct autres?
- Cela permet-i~ de rendre plus soli dos les lients d'amiti~ ct dG parenté que par
le passa ?
- De nos jours qu'est-ce qui compte le plus pour les villageois?
- Beaucoup d'argent
Construction d'habitat moderne
~ Creation de grandes plantations
- Une plus grande solidarité
- Autres à préci~er.
.../ ...

_ 272 _
l
'\\'J
Est-co que maIritenant , les gens 'dû 'village veulent vivre comme des "blancs" (les
gens de la ville) ?
' '
r.. r' ,'.. !
.. !
- Comment le font-ils ? i
- [st-cc que cela vous encouroge davantage à mO~,erniser le v~1~ag;8 ?
,
\\ ";~,,,
~imeriez-vousde nos jours que l'Etat construise un autre co~lcxe sucrier plus
grGnd que le premier dans le département ?
- Pensez-vous qu'il est (encore) bon qUèl'Etat construise d'autres complexes
sucriers dans tout le pays ?
, i
. ~ -~ ,
Enfin, entre ln plantation de canne à sucre, la plantation de café ou cacao et un
. ~
C"
i '
champ de culture vivrière, que préférez-vous?
'
'
:
1
Pourquo~ ?
-,-\\'
• :
1 ~
' r
!
.r ,

-
273
-
T A 8 LED E S
MAT 1ER E S
Pages
AVANT-PROPOS
4
INTRODUCTION
6
1.
Problématique et hypothèse de travail
7
2.
Justification du choix et limite du sujet
14
3.
Nbtes méthodologiques
17
3.1.
La notion d'Impact
17
3.2.
La documentation
18
3.3.
L'observation
19
3.4.
Les entretiens
20
3.4.l~ L'entretien collectif
21
3.4.2. L'entretien individuel
21
3.5.
Le questionnaire
22
3.6 •.
L'approche
globalisante
27
4.
L'exploitation des données
28
PREMIERE PARTIE
LES OBJECTIFS GENERAUX DES COMPLEXES ET LES
CRITERES FAVORABLES AU CHOIX DU DEPARTEMENT
DE ZUENOULA
33
Chapitre premier
LES OBJECTIFS GENERAUX DES COMPLEXES SUCRIERS
A - Bref historique de la SODESUCRE
33
. . .1. . .

-
274-
Pages
1.
La naissance
33
2.
Statuts et rOle
35
3.
Organisation: la direction générale et les autres
directions
36
B -Les objectifs proprement dits
40
l -
Objectifs politigues
41
1.1.
Le Sud, pOle de développement ou raison d'une
immigration massive
41
1.2.
La régionalisation de l'économie
46
II - Objectifs économiques
51
2.1.
La satisfaction des besoins intérieurs
52
2.2.
La conquate du marché extérieur
55
2.3.
La diversification des sources de revenu
56
III
Les objectifs sociaux
58
3.1.
Créer des emplois salariés dans les régions
concernées
59..
3.2.
Encadrer les paysans pour une meilleure
maximisation de la production agricole
60
3.3.
La création des infrastructures sociales
63
Chap Lt.r a II
LES CRITERES FAVORABLES AU CHOIX DU DEPARTEMENT
DE ZUENOULA
68
A ~ Les caractéristiques du milieu physique
72
B - Les aspects humains : la population du département
73
C - Les activités économiques
75
. . .1.· ·

-
275-
Pages
D
LE COMPLEXE DE ZUENOULA
PRESENTATION
7B
1 - Genèse
78
II _ Localisation et caractéristiques du complexe
81
. 2·1.
Les aspects agricoles
83
2.2.
Les aspects industriels
83
1Î 1 - Structure organique
86
Organisation (organigramme) •
86
Réalisation : le contrat de réalisation
B9
a.
La fourniture "clés en main"
89
b.
La ma1trise d'oeuvre
90
c.
Les principaux partenaires
90
d.
Fournisseurs
91
e.
Financement
92
Conclusion partielle
95
IErv1E PARTIE
LES EFFETS INDUITS DU COMPLEXE DE ZUENOULA
ET LES PERSPECTIVES D'AVENIR DE LA SODESUCRE
97
Chapitre Ill: LES EFFETS INDUITS DU COMPLEXE
97
A - Les réalisations sociales
97
8 - La campagne sucrière 1984-1985
100
1.
LES OBJECTIFS DE LA CA~lPAGNE
101
2.
LES CONDITIONS DE TRAVAIL
104
. . .1. . .

-
"276-
Pages
2.1.
Le logement
104
2.2.
Le transport
105
2.3.
Horaire de travail
105
2.4.
Le repos hebdomadaire: dimache et jours fériés
106
2.5.
Nature des travaux généraux f
106
2.6.
Têches et rémunérations
109
2.7.
La qualité de la coupe
110
3.
LES MOYENS DE TRAVAIL
110
r.i.
La procédure de pointage
110
3.2.
La paie
111
3.3.
Ravitaillement en eau
112
4.
LES SOINS MEDICAUX
112
5.
LA NOURRITURE
113
C : L'impact du complexe en dehors de la campagne
114
o - Analyse des effets induits
115
Chapitre IV: LES PERSPECTIVES D'AVENIR DE LA SODESUCRE
125
A - Les nouvelles utilisations du sucre
125
1.
Les utilisations classiques du sucre en chimie
organique
125
2.
Les nouveauX domaines
126
B - L'AMELIORATION DES RESULTATS DU POTENTIEL EXISTANT
128
1.
L'étude du projet de raffineries et d'agglomereries
de sucre
128
2.
L'étude d'un projet d'atelier central
128
3.
La formation
131
. . .1. ..

_
277 _
Pages
C - La valorisation des sous-produits
132
1.
Les excédents de bagasse
132
La valorisation de la mélasse
132
D - QUELQUES REFLEXIONS CRITIQUES
138
1.
Beaucoup de promesses, peu de satisfaction
138
2.
Le complexe de Zuénoula, source de plusieurs
tensions
141
. .
Le plan sucrier, un exemple de pari manqué
148 .
3.1. Le marché international de sucre, un monde fermé
148
3.2. Le Plan Sucrier Ivoirien, victime d'une certaine
naiveté
156
3.3. La coupe manuelle de canne, une nécessité qui
s'impose.
160
TROISIEME PARTIE:
LA PROBLEMATIQUE DE L'INTEGRATION DE LA
SODESUCRE DANS LA SOCIETE GOURO
164
Chapitre V : LES FACTEURS DE RESISTANCE
164
A - LE TEMOIGNAGE DE JEAN PAUL BENOIST .(Mission catholique
de Zuénoula)
B< - LES FACTEURS INTERNES AU COMPLEXE
166
1.
LE SYSTEr"IE ADMINISTRATIF, UNE HIERARCHIE
REPRESSIVE
-
-
166
1.1.
La procédure d'exercice du pouvoir
166
1.2.
Les propos de quelques témoins intéressés
168
. . ·1· ..

-
"278-
Pages
1.3.
Produire du sucre dans les meilleurs délais
à peu de frais
170
2i
L'INADEQUATION DES CONDITIONS ET CADRE DE VIE
DES TRAVAILLEURS
172
2.1.
Le logement, cadre de vie ou simple dortoir
172
2.2.
Le salaire et l'extorsion du surtravail
178
2.3.
L'absence des loisirs comme frein à l'épanouisse-
ment des travailleurs
189
2.4.
La faim, une entrave au bon déroulement du
travail
191
3.
L'ABSENCE DE CADRE GOURD, SIMPLE PRETEXTE OU
LA RAISON D'UN REFUS MASSIF
194
3.1.
La procédure de recrutement du personnel
194
3.1.1.
Le cas des travailleurs temporaires
194
3.1.2.
Le cas des permanents
194
3.2.
UN CADRE DE LA REGION C[MME STIMULANT POUR LES
TRAVAILLEURS LOCAUX
198
Chapitre VI
: LA SOCIETE GOURD, UN MONDE ENCORE A L'ABRI DES
GRANDES INNOVATIONS
20·3
l
- LES STRUCTURES SOCIALES DE BASE
204
1.
Les cellules familiales de production et de
consommation : le gouniwuo et le Dogi
204
2.
L'autorité politigue
206
2.1.
Au niveau de la famille
206
2.2.
Les communautés villageoises
201
II
- LES FORr~ES TRAD!TIC'NNELLES DE CO(lPERATION AGRICOLES
210
."/.,,

-
279 -
Pages
2.1-
"Le 80"
212
2.2.
"Le Klala"
214
2.3.
Le mode traditionnel de salariat agricole
215
2.3.1-
Le tré-clé
216
2.3.2
La société des jeunes
217
III
- L'UNIVERS RELIGIEUX DU PAYSAN GOURD
221
~\\."'~
3.1-
Le Dieu Supr~me ou "Kazan ~~;_~'
J;'7~.~\\~~\\
222
3.2.
222
La terre
f:j :' CAM E .,
1
~~
~,.,.,•
3.3.
Les morts (les anc~tres)
' \\
/ ·i
.Y.
223
·(F
"~.
. d2)
3.4.
Les masques
'... ', nE''tI''''~)'<'
223
."",-".. _,/,
Les canaris sacrés
224
3.6.
Le Plamblè
225
IV
- LE CALENDRIER AGRICOLE DU PAYSAN, UN HANDICAP SERIEUX
POUR LE COMPLEXE DE ZUENOULA
227
4.1.
Le cycle de l'igname et les cultures
associées
230
Le coton, une g~ne pour la canne à sucre
233
CQNCLUSION GENERALE
238
8 IBL IOGRAPHIE
242
,
QUESTIONNAIRE
259
,
TABLE DES MATIERES -
273