U.NIYERSITE DE PARrs 1
~ANTHEON-SORBONNE
Scienc •• Economique. _ Science. Humoin.,_ SCi'rte"
JurieU"qv.'
ANALYSE DES RELATIONS
ENTRE LA CROISSANCE DE L:'"ENTREPRISE
ET LES ECONOMIES D'ECHELLE.
_application à de. branche. induitriell'I_
POUR LE OOCTORAT
Il
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M. Soul.,mon. NIANG
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"L'Uni..veJt~Ul. de PARIS 1 Pa.n:t.h~on­
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comme pJtop~e~ a teuJt~ au:t.euJt~ Il •

A tou~ ceux qu~, pa~ !eu~~
con~e~!~ et !eu~~ encou~agement~ ~an~
ce~~e ~enouve!é~, ont été un ~out~en
con~tant et p~éc~eux dan~ ce t~ava~!.

SOMMAIRE
INTRODUCTION
1ère PARTIE - ANALYSE DES CONCEPTS DE CROISSANCE DES FIR-
MES ET D'ECONOMIES D'ECHELLE.
Chapitre l : Place des concepts dans la pensée économi-
que.
Chapitre II: Formalisation nouvelle des concepts dans le
cadre de la théorie de la production.
2ème PARTIE - ANALYSE DES RELATIONS EFFECTIVES ENTRE LA
CROISSANCE ET LES,EqQNPMIES D'ECHELLE DANS
. Kf .< e .} .
CERTAINES BRANCHÉ'STRIELLES (LE CAS
DE LA CHIMIE, D~
SIDER Rd'. E
DU TEXTILE,
DU CIMENT) •
Chapitre III :La relation croissa~~~
nomies d'échelle
dans l'entreprise mo~erne.
Chapitre IV: La nature et l'ampleur des relations crois-
sance-économies d'échelle.
3ème PARTIE - L'ETAT, LA CROISSANCE DES FIRMES ET LES ECO-
NOMIES D'ECHELLE
Chapitre V
Stimulation de la croissance et des écono-
mies d'échelle au moyen des taxes et subven-
tions
Chapitre VI: L'intervention de l'Etat dans l'êconomie
moderne.
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION GENERALE

- 3 -
L'expansion de la firme est devenue, depuis
quelque temps, un problème fondamental qui se pose aussi
bien aux dil'igeants d'entreprise qu'aux Pouvoirs publics.
La complexité du phénomène est telle qu'une audience par-
ticulière est accordée à la relation croissance de l'en-
treprise-économies d'échelle.
En effet, le monde économique moderne évolue si
rapidement que certaines entreprises industrielles pri-
vées et publiques éprouvent des difficultés d'adaptation
à l'environnement économique.
Les moyens d'information sur l'activité indus-
trielle (revues spécialisées, rapports des assemblées
générales, voire la presse) nous fournissent des exemples
probants de firmes en "perte de vitesse". Une capacité
de production insuffisante, des coûts élevés, une renta-
bilité faible constituent autant d'éléments qui pèsent
sur la vie de la firme.
L'inquiètude des dirigeants d'entreprise reste
cependant variable et se traduit plus ou moins par une
série de mesures. A côté des politiques de restructura-
tion industrielle (1) décidées par certains Etats, notam-
ment ceux d'Europe occidentale, nous assistons aux
micro-décisions des firmes pour une fusion, une absorp-
tion, une concentration,
La situation est d'autant plus aiguë que l'en-
treprise produit des biens et services en vue de satis-
faire les besoins de l'homme. Cette fonction sociale de
la firme, considérée comme une organisation complexe,
est la résultante d'un dynamisme, d'une volonté de lutte
(1) La restructuration industrielle n'est pas la concen-
tration. Elle peut exiger certes un regroupement,
mais elle doit aller au-delà et sous-entendre réor-
ganisation et meilleure gestion.

- 4 -
pour la survie, d'une recherche de la croissance pour se
maintenir dans la compétition internationale. La crois-
sance de l'entreprise, définie comme un processus d'aug-
mentation à long terme de la taille de l'unité de produc-
tion, tend à bouleverser les contraintes technico-écono-
miques liées aux facteurs, aux produits, aux connaissan-
ces, aux marchés, et à modifier les fonctions des agents
ainsi que les relations interpersonnelles. Quant aux
économies d'échelle que permet cette croissance (nous y
reviendrons), elles se manifestent par des réductions de
coûts.
Mais cet élément de la stratégie qu'est le
dynamisme industriel ne s'effectue pas sans heurts:
l'opposition des intérêts à l'intérieur de l'entreprise
comme les pressions externes engendrent des coûts con-
flictuels dont l'évaluation n'est pas toujours facile.
D'autre part, outre les problèmes de mesure et de durée
que font surgir les concepts, les gains
attendus ici
peuvent ne pas compenser les pertes subies ailleurs. On
comprend dès lors le tlmalaise" qu'éprouvent les diri-
geants d'entreprise devant l'incertitude lors de l'ex-
pansion de leurs firmes. Par suite, la croissance n'est
pas une
action spontanée, mais provient d'une série de
décisions réfléchies et rationnelles.
A l'échelle nationale, la croissance devient
une politique des gouvernements pour caractériser le
développement dans ses aspects économiques et sociaux. Il
n'est pas un pays, quel que soit son degré d'industriali-
sation, qui ne participe au marathon du taux de croissan-
ce. Pour beaucoup, la "règle d'or" se résume à l'atteinte
d'un taux fort ou du moins relativement satisfaisant. Si
au niveau de la firm2, les managers surveillent d'un oeil
attentif les critères d'appréciation de la dimension de
leur organisation et comparent les performances, sur le
plan macro-économique~ les Pouvoirs publics regardent

- 5 -
plutôt du côté des grandeurs comptables : produit natio-
nal brut, revenu per capita, etc ... Cela ne manque pas
de faire naître des tensions entre les différents agents
économiques, comme nous l'avons souligné plus haut.
Cependant les bienfaits de la croissance sont
en partie masquées par les inconvénients supportés par
des groupes (entreprises, collectivités). Aussi la crois-
sance ne saurait se limiter aux seuls aspects économi-
ques. Elle a des répercussions sur l'environnement, la
vie sociale, qui entraînent des coûts externes.
En se plaçant dans le cadre de l'analyse micro-
économique, fondement de notre sujet, la croissance de
la firme présente des avantages certains dont les mieux
perçus mais aussi les plus réels sont les économies
d'échelle. Naturellement on rencontre des "externalités",
c'est-à-dire des désavantages (pollution de l'air, de
l'eau, encombrement, bruit, etc ... ) liés au problème des
dimensions des installations industrielles. Néanmoins,
les économies de dimension des entreprises, surtout dans
les industries à cycle continu (industries chimiques,
métallurgiques, pétrolières, industries du ciment par
exemple), et moins dans les industries de montage ou à
cycle non continu, constituent un facteur essentiel du
développement économique(l). L'intérêt qu'elles procurent
se trouve dans l'abaissement du coût unitaire avec l'au~
mentation du volume de la production, pour une combinai-
son constante des inputs.
Quelle serait donc la nature de ces économies
d'échelle? La polémique engagée à ce propos par les
(1) BRUNI Luigi : "Les économies de dimension dans un
processus de développement et l'influence de l'inte~
sité de la demande lt , Revue d'économie politique,
mars-avril 1965, PP. 385-404

- 6 -
économistes les plus éminents, depuis plus d 1 un siècle,
nous permet de distinguer les économies internes et les
économies externes.
La croissance se justifie-t-elle pour autant,
sous prétexte qu'elle fournit des gains à la firme, aug-
mente la richesse nationale, permet de soutenir une con-
currence de plus en plus vive ? Faut-il une "croissance
eoncertée" pour limiter les l'dép;ats il ,
supprimer la guerre
des firmes pour le bien-être de tous ? Certains accords
entre des entreprises de même nationalité au de nationa-
lité différente pourraient peut-être nous fournir des
éléments de réponse.
Faire le procès de la croissance industrielle
revient à chercher à humaniser 11 entreprise, à mettre son
action en accord avec les aspirations de la société. L'é-
conomiste qui délimiterait les frontières de son domaine
dans un souci de raisonnement rigoureux, voire de déter-
minisme, devra jeter les ponts et recourir aux autres
sciences sociales. Les concepts de îl cro issance" des fir-
mes et dl"~conomies d'échelle" revêtent-ils une si grande
importance et seraient-ils des instruments d'analyse effi-
caces pour constituer une charnière entre les diverses
disciplines s un déterminant de l'équilibre entre intérêts
privés et avantage collectif ?
L'étude du couple croissance~économies d'échel-
le a soulevé dans l'histoire de l'analyse économique, des
discussions tant en ce qui ooncerne le fond qu'à ce qui a
trait à la mesure de ces éléments d'analyse.
Néanmoins
ces concepts semblent n'avoir pas reçu toute l'attention
qu'ils méritent. Il convient cependant de nuancer cette
constatation générale et de mener une analyse qui dégage-
rait a postériori les dissemblances dans les thèses sou-
tenues. Un point important toutefois est que l'unanimité
est faite sur la question. Mais pour les Auteurs classi-

- 7 -
ques seule la croissance de l'ensemble de l'industrie est
prise en considération en vue de l'augmentation de la
richesse nationale, tandis que la micro-analyse fait de
la croissance de l'entreprise un des objectifs à attein-
dre, et des économies d'échelle un aspect particulier
des fconomies internes et externes.
En remontant le cours de l'histoire de l'Europe
occidentale, jadis la région du monde la plus avancée
économiquement, nous constatons, Avec R. GOETZ-GIREy(l).•
qu'il ne serait pas raisonnable d'attribuer à la révolu-
tion industrielle anglaise le début de la croissance
économique. En effet trois périodes de cette croissance
peuvent être observées avant celle de la fin du XVlllème
siècle.
La première correspond à la croissance écono-
mique du monde romain qui se caractérise par une augmen-
tation de la production, un élargissement de l'espace
économique, une accumulation des capitaux. L'activité
économique, tournée essentiellement vers l'agriculture,
impliquait peu d'innovations techniques pour son expan-
sion.
La période de croissance suivante, celle de la
chrétienté médiévale du Xlème au XIVème siècle,
a vu
l'industrie artisanale faire des progrès dans le textile.
Des innovations techniques sont introduites dans les
mines et dans la fabrication des métaux. Les villes se
sont développées et ont favorisé la prospGrité de l'agri-
culture qui reste le secteur prédominant. Cependant les
unités économiques sont demeurés de faible dimension et
l'accumulation du capital n'est pas importante.
(1) Cf. Robert GOETZ-GIREY, "Croissance et Erogrès à
l'origine des sociétés industrielles", éditions Mont-
chrestien, Paris, 1966, PP. 33-34

- 8 -
La troisième période a trait à l'essor commer-
cial et financier du XVlème siècle. C'est l'époque des
grandes découvertes maritimes, de l'afflux de métaux
précieux (or et argent), de la création de centres com-
merciaux internationaux comme Anvers, Amsterdém
Londre~
.Lyon. Des sociétés par actions, des manufactures d'Etat,
des banques, des bourses se créent et se développent
parallèlement à la multiplication des moyens de paiement
(billets de banque, lettres de changes).
Cet essor, et celui du XVllème siècle, vont
ainsi préparer la révolution industrielle.
Ce bref regard sur l'histoire économique suffit
à faire comprendre que la croissance qui était liée au
développement de l'industrie nationale, n'est pas un
phénomène récent. Ses origines datent d'époques éloignéffi
et d'espaces différents. L'évolution subie depuis par
l'industrie confère aujourd'hui à l'entreprise une dimen-
sion et des fonctions nouvelles.
Les notions de croissance et d'économies d'é-
chelle se sont sans nul doute élargies depuis leur pre-
mière utilisation. Le commerce avec l'extérieur était
considéré comme le moteur de la croissance économique
car les tenants de cette politique y voyaient un moyen
d'accroître la production, de créer de nouvelles indus-
tries, d'augmenter l'emploi de main-d'oeuvre, de relever
le niveau de vie des citoyens. Cette vision large de
l'expansion leur faisait perdre de vue le rôle important
que pouvaient jouer les économies d'échelle, à savoir de
diminuer les coûts. Une telle ignorance se justifiait par
la structure "banale ll de l'industrie que caractérisaient
une technique très simple et une dimension faible.
Les concepts de croissance et d'économies
d'échelle étaient donc vagues.

- 9 -
Il s'agissait avant tout d'une croissance globale de l'indus-
tl'"'ie. Pour des classiq'les comme A. StIJI""H, T.R. NALT'"tIDS, D
RICAROO, la croissance s'obtient par l' accumula.tion du capi-
tal et le progrès économique. Pour Karl MARX qui entreprend
l'étude du système capitaliste, les lois de son évolution,
la capacité de production est aussi fonction de l'accumu-
lation du capital. Toutefois chez MARX, les capitalistes
essaient d'accumuler et d'étendre l'échelle de leur pro-
duction pour soutenir la concurrence qu'ils se font. La
concentration du capital entre leurs mains~ résultat de ce
processus d'accumulation, augmente la capacité de produc-
tion de leurs entreprises industrielles, leur puissance et
leur richesse. Cette concentration n'est pas sans entrai-
ner une centralisation qui a comme effet de rassembler en
un nombre réduit les centres d i accumu13.tion et de les rendre
encore plus puissants. liLe capital pourra grossir lCl par
grandes masses, en une seule main, parce que là il s'échap-
pera d'un grand nombre P (l). Les conditions semblent alors
réunies pour une évolution des techniques et l'introduc-
tion de procédés nouveaux. A. ~lARSHALL quant à lui, après
avoir un instant adopté le point de vue de RICARDO sur
les rendements décroissants, expliquera finalement la
croissance par les économies d'échelle qui donnent à la
firme un avantage concurrentiel en réduisant ses coûts de
production. Il faut reconnaitre que c'est à partir de
~ffiRSHALL et surtout après la révolution keynésienne que
les notions commenceront à avoir un sens et à prendre de
l'extension à la~suite des nombreuses querelles qu'elles
ont soulevées. Cela montre qu'en économie plus que dans
d'autres sciences, les concepts possèdent une certaine
flexibilité et s'adaptent au contexte. Selon les époques
et la structure industrielle; plusieurs acceptions furent
avancées par les théoriciens. A. SMITH, abordant le pro-
blème de la croissance au niveau macro-économique, définit
(1) K. MARX, "Le Capital", livre l, t.III, chap.XXV, Paris,
éd.sociales, 1973, p.68

- 10 -
celle-ci comme une résultante de l'espace économique, de
la division du travail, de la libert~ économique. Il ajou-
te que: lIl'industrie ne peut augmenter qu'autant que son
capital augmente, et ce capital ne peut augmenter qu'à
proportion de ce qui peut être épargné peu à peu sur les
.,.,.
,,(1)
revenus de la soclete. ....
.
L'analyse ricardienne rejoint celle de son pré-
décesseur mais sans être aussi profonde car RICARDO justi-
fie tout simplement la croissance par l'accroissement du
nombre de travailleurs, 11 amélioration des connaissances
pratiques et les perfectionnements mécaniques. Avec A.
MARSHALL apparaît le phénomène d'économies d'échelle étu-
dié dans le cadre de l'entreprise et de l'industrie. L'au-
teur des ilPrinciples of Econoroi9~r\\'.!:~s-~,4€pompose en écono-
mies internes et en économies /~~ J'nes,' d~b dernières étant
les plus importantes. Voici le~ ~~}i
~~qu'il en don-
ne : "nous po\\1vons diviser en ~ ~x c~ r~~s les écono-
mies résultant d'une augmentat~o~ e
~~~duction dans
une branche quelconque : premièr;~les qui tiennent
au développement général de l'industrie; et secondement~
celles qui tiennent aux ressources des entreprises indivi-
duelles s'occupant de cette branche de proctuction~ à leur
organisation et à IVexcellence de leur direction. Nous
pouvons appeler les premleres, économies externes, et les
secondes, économies internes n (2).
En dépit d'un raisonnement mené tantôt en cour-
te période où les éléments (population, technique, équipe-
ment, localisation industrielle, etc ... ) sont fixes, tan-
tôt en longue période où ils varient, d'une distinction
entre rendements croissants et décroissants, entre écono-
(1) Adam srll1TH, !lRecherches sur la Nature et les causes de la ftiches-
se des Nations", tl"'~3.d. française Gerrrain Garnier, Paris s Guillau-
min Librairie, 18": ~ titre II) P. 37
(2) A.MARSHAIL, "Principles of EconomicsH , An introductory volume,
8th ed,London,Macmillan and Co, 1961 s -'P. 221 et 262

- 11 -
mies internes et externes, entre l'entreprise, l'indus-
trie et les autres in~ustries, MARSHhLL aboutit â une
relation croissance de l'industrie"-économies d'échelle
qui comporte quelques ambiguïtés.
C'est alors que A.C.PIGOU tentera d'apporter
son concours à l'oeuvre de son maître pour donner une
réponse au problème sur lequel portaient les critiques, à
savoir le dilemme concurrence parfaite"rendements crois-
sants. La discussion fut centrée autour du rôle des écono-
mies externes. La suggestion avancée par PIGOU consiste à
retenir une taille optimale de la firme pour laquelle les
coûts de longue période sont minima. Raisonnant dans le
cadre d'une économie de bien-être, il utilise les écono-
mies externes ou, suivant son expression, les économies
d'échelle de l'industrie, pour introduire les rendements
croissants.
La question n'en est pas résolue pour autant
compte tenu de la difficulté de comptabiliser les écono-
mies externes
de l'absence de rémunération de l'unité
j
créatrice. Comme le souligne C.JESSUA~ ,lIe propre des
économies externes est de ne pas donner lieu à la forma-
tion d'un prix n (1). Aussi "constituent-elles un impres-
sionnant "angle mort li pour le système des prix et ... un
échec du marché:;(2). Cette caractéristique ne peut-être
infirmée~ même si lion se reporte a la célèbre classifi-
cation du professeur J.VINER qui distingue les économies
externes techniques, c 1 est-à-dire celles qui se tradui-
sent par une réduction des coefficients techniques de
production, des économies externes pécuniaires qui résul-
(1) C.JESSUA, "Coûts sociaux et Coûts privés!!, raris,
P.U.F,1968, P. 34
(2) C.JESSUA, ibid; P. 36
....

- 12 -
tent de transfert de profit par baisse des prix des fac-
teurs. Plus généralement, M.SHUBIK écrit: "l'entreprise
n'est pas maître de sa propre destinée. L'action d'un
agent extérieur a influencé son bien-être économique" (1).
L'interdépendance entre la dimension de l'industrie et
les économies externes trouve sa source, selon Allyn
YOUNG dans les progrès de l'industrie qui passent par la
dimension qui "rend économiques les méthodes qui ne le
seraient pas si leurs bénéfices ne pouvaient être diffu-
sés sur une importante production finale li (2).
Les débats, loin d'être clos, ont reçu d'autres
contributions parmi lesquelles celles de KNIGHT, de Mrs
J.ROBINSON~
... et, encore plus près de nous, Luigi BRUNI
qui affecte l'origine des effets externes aux économies
de dimension réalisées dans d'autres unités de production
ou même chez des groupes sociaux considérés comme un fac-
teur essentiel de développement et de croissance, de dif-
férenciation sectorielle.
Sans prétendre avoir fait une analyse exhausti-
ve de la pensée des théoriciens intéressés par les pro-
blèmes de croissance industrielle et d'économies d'échel-
le, nous avons cependant situé ces notions dans un cadre
qui nous permet de mieux en appréhender la nature et les
éléments, ne niant pas pour autant les difficultés de
définition et de méthode perçues à travers les nombreuses
facettes qu'elles revêtent.
L'unanimité sur la reconnaissance de l'existen-
(1) M.SHUBIK, npecuniary Extpl':'nalities : aGame ':Pheoritic
Analysisii A.E.R., Vol. L XI, nO 4, sept. 1971, PP.
713-718
(2) Allyn YOUNG, "Increased returns and Economie progress
Economie journal, 1928
P. 539

- 13 -
ce des phénomènes est faite malgré t~ut chez les penseurs.
Mais certains esprits n'hésitent pas à poser la question
de savoir à quelle intensité la croissance et les écono~
mies d'échelle corrélées au sein d'entreprises qui crois-
sent à des rythmes inégaux modifient-elles la structure
industrielle. Il s'avère que les disparités de croissance
entre les firmes bouleversent l'environnement économique
dans un sens monopolistique, oligopolistique ou de con-
currence. Aussi l'important est de déterminer les firmes
qui évoluent plus vite que les autres, de voir leur im-
pact sur 11économie dans son ensemble, sur l'intérêt gé-
néral.
Un début de réponse nous est fourni par la
liaison taille-croissance de l'entreprise qui a fait
l'objet de nombreuses études théoriques et empiriques.
Les études théoriques remettent en cause une
partie des conceptions classiques de la croissance de
l'entreprise. La maximisation du profit ne suffit plus à
expliquer pourquoi et comment une firme atteint telle
dimension. L'objectif synthétique àe la rentabilité, de
la croissance, de la sécurité,
.. ,' constitue un trait
essentiel de la stratégie et implique la prise en compte
de sous-objectifs de vente, de part de marchÉ, de pro-
duction, de stock, etc ... , compatibles ou non. La dimen-
sion de l'entreprise devient ainsi un sous-produit de
l'objectif visé et, par conséquent, du processus de croi~
sance.
Pour ce qui est des études emp1r1ques, la plu~
part d'entre elles sont consacrés à une vérification de
l'absence de lien entre la taille et le taux de croissan-
ce. Ces études trouvent leur origine dans les travaux de
R.GIBRAT. Celui-ci~ en cherchant à concilier la disparité
des taux de croissance des firmes avec la stabilité ou
l'ouverture de l'éventail des dimensions relatives, énon-

- 14 -
ce une loi qui porte Bon nom ou loi de ~'effet proportlo~
nel : "une variable soumise 1 un processus de variation
obéit 1 un effet proportionnel si toute variation de cette
variable, à chaque étape du processus, est une proportion
aléatoire de la valeur initiale de cette variab1e,,(1).
Le taux de croissance obéit~ par cette loi
à
J
une distribution normale pour toutes les firmes quelle que
soit leur taille, c'est-â-dire que pour les plus grandes
entreprises comme pour It,s plus pet i tes t)ar classe de
taille, la distribution des taux de croissance est iden-
tique comme le sor.t les probabilités que les entreprises
ont de croltre i un taux do~n~ et les probabi1it~s de
changement de classe, La loi de l'effet proportionnel
tradait, nous le voyons~ l'ind§pendance entre le taux de
croissance et la dimension de la firme.
Les tests récents sur l'hypcth~se de validité
de la loi de GIBRAT sont nOMbreux(2) et aboutissent à des
résultats variés qui peuvent être rdssemblés autour de
de~x types de conclusion. Le premier type tend à montrer
qu'il n'existe pas de liaison linéaire permettant d'éta-
blir une dépendance entre le ~aux de croissance et la
dimension atteinte ; 10 sEcond) à faire ressortir que les
entreprises n'ont pas toutes les mêmes chances de cr61tre
à un taux donné, q~el que soit le taux et quelle que goit
la dimension des entreprises,
La loi de GIBRAT» il faut le rappeler. exige
(1) R. GIBRAT. "Les inégalit6s économiques~, Paris, 3irey,
1931
(2) Nous pouvons citer en particulier les travaux de E.
MANSFIELD,
SIMON et BONI1H aux Etats-Unis, ceux de
SINGE et WHITTINGTON, de SAHUELS et de W.r.tENNEL en
Angleterre t de J.C.MORAND en France.

- 15 -
pour sa vérification deux conditions :
1
liégalité des taux moyens de croissance,
2 -
l'égalité de la variance des taux de crois-
sance.
Ajoutons pour terminer que, dans un environne-
ment dynamique où les économies d'échelle se réfèrent à
un processus de réduction des coûts et la croissance à
une augmentation du produit à long terme, on peut conce-
voir pour la firme une tendance aux rendementsfcroissants
plus fréquents que les rendements décroissants ou cons-
tants. Cependant la croissance et les économies d'échelle
ne constituent pas pour la firme des phénomènes à carac-
tère illimité. Les limites de la dimension de l'entrepri-
se, donc de sa croissance, sont sensiblement affectées par
les coûts et profits relatifs aux décisions des diri-
geants, d'autant plus qu'avec l'augmentation de la taille
de l'entreprise les économies d'échelle sont soumises à
la loi des rendements décroissants. La firme atteindra-
t-elle alors lioptimum technique, c'est-à-dire la taille
pour laquel12 les coûts de production sont les plus bas ?
Cet optimum semble lui être inaccessible, et le progrès
technique ne fait qu'en reculer les limites. Parmi les
obstacles que rencontre la firme pour parvenir à cet
optimum, citons en particulier la rareté des facteurs de
production (matières premières, main-dioeuvre qualifiée,
par exemple) 9 l'insuffisance des débouchés, la concurren-
ce. Les deux derniers freins tendent à disparaître avec
l'ouverture des frontières et l'abaissement des barrières
douanières, la structure du marché qui devient de plus en
plus oligopolistique. La grande entreprise pourrait alors
généralement se contenter d!un optimum de position en
occupant une part importante d'un marché déterminé, ce
qui lui procure ainsi un maximum de profit. J.S.BAIN
évalue l'optimum de position en mesurant le lien entre la
taille de llentreprise (exprimée en pourcentage de la
capacité de production du secteur) ct les coûts de pro-

- 16 -
duction, dans un petit nombre d'industries. Il en conclut
que lorsque la taille optimale de l'établissement est
faible, la courbe des coûts tend vers l'horizontale, tan-
dis que lorsqu'elle est élevée> les économies d'échelle
sont assez sensibles. BAIN affirme en outre que l'obten-
tion de coûts plus bas n'est pas le seul motif qui pousse
les entreprises vers la grande dimension~ des critères
extra-économiques existent. Les firmes cherchent à avoir
une certaine puissance afin d'exercer un pouvoir pollti-
que et sont amenées
de ce fait
à supporter des coûts
3
3
plus élévés que ceux des concurrentes ou à se satisfaire
de marges bénéficiaires plus faibles.
En réalité, la croissance est indépendante de
la dimension de l'entreprise, mais la grande firme demeu-
re la principale bénéficiaire des économies d'échelle en
raison de sa plus grande capacité financière et de sa
part de marché plus importante. Un autre avantage de la
grande dimension est ce que E.A.G.ROBINSON appelle "the
economics of massed reserves li (1).
Une entreprise qui
désire une production continue doit tenir des équipements
en réserve pour pallier aux défaillances de ceux en ser-
vice. Le nombre de machines en réserve varie inversement
à la taille de la firme. Plus la firme est grande, plus
la proportion de machines en réserve par rapport à l'en-
semble de l'outillage est petite.
Tant qu'on se limitait aux lois de la formation
de prix et de 11équilibre général du marché
la théorie
3
classique et néo-classique pouvait suffire à expliquer la
croissance de 11 entreprise et celle de l'industrie. Mais
l'un des reproches fait à la théorie orthodoxe de l'en-
treprise est d8 voir en celle-ci un point sans dimension
ni structure
interne,
évoluant dans un univers sans
(1) E.A.G. ROBINSON, "The structure of competitive indus-
try", rev.ed.Chicago, University of Chicago Press,
1958, PP. 26-27

- 17 -
histoire ni incertitude. Dans le monde économique moder-
ne, l'entreprise s'est métamorphosée en devenant une or-
ganisation complexe, structurée, au sein de laquelle
naissent des conflits entre les membres de la coalition
pour l'atteinte des opjectifs. Sa croissance s'effectue
parallèlement aux modifications de l'environnement avec
des barrières à IYentrée, des disparitions, des concen-
trations, qui peuvent engendrer les coûts les plus élevés
ou les plus faibles. La Puissance publique, lorsqu'elle
le juge nécessaire, protège les faibles, encourage les
forts ou s'érige en entrepreneur pour le bien-être de la
collectivité.
L'objet de notre étude portera sur la micro-éc~
nomie. Dans un premier temps, nous serons amenés à faire
état d'instruments d'analyse que sont la croissance et
les économies d'échelle en situant d'abord ces concepts
dans la pensée économique avant de passer à une formula-
tion nouvelle des notions dans une théorie de la produc-
tion. Cette approche théorique, résul:at parfois de faits
observés à un moment donné par des économistes, nous inc~
te à un diagnostic personnel de la corrélation entre
croissance de la firme et économies d'échelle dans certai-
nes branches industrielles. En troisième lieu, nous inté-
grerons l'Etat dans notre circuit pour montrer son action
économique par transcendance de son pouvoir strictement
politique pour la sauvegarde de l'avantage collectif.

PREMIERE PARTIE
ANALYSE DES CONCEPTS DE CROISSANCE DES FIRMES
ET D'ËCONOMIES D'ËCHl~LE

- 19 -
CHAPITRE l
PLACE DES CONCEPTS DE CROISSANCE DE L'ENTREPRISE ET
D'ECONOMIES D'ECHELLE DANS LA PENSEE ECONOMIQUE
La liaison croissance de l'entreprise-économies
d'échelle est intéressante à plusieurs égards et l'évolu-
tion de son histoire s'observe à travers les différents
courants de la pensée économique. L'analyse de cette
croissance et les gains qu'elle peut susciter se fait
dans un environnement qui dépasse généralement celui de
la branche ou du secteur(1), c'est-à-dire dans un cadre
macro-économique. C'est dire que la croissance de l'en-
treprise est celle-là même qui engendre en grande partie
la croissance globale de l'économie.
Dès lors~ on voit pourquoi, dans les premières
études sur la croissance, la plupart des théoriciens
abordent un raisonnement au niveau micro-économique pour
expliquer l'accroissement de la production nationale.
L'évolution de l'histoire économique~ parallèle à celle
de l'entreprise, a permis de saisir plus nettement et
d'une manière plus instructive les phénomènes économiques
en distinguant deux niveaux d'analyse qui ont chacun leur
domaine propre et qui sont complémentaires : la micro et
(1) Les concepts de branche et de secteur traduisent deux
réalités distinctes :
la branche regroupe les entreprises qui fabriquent
une même catégorie de biens ou de services.
- le secteur regroupe les entreprises qui ont la
même activité principale à côté de leurs activités
secondaires.

-
20 -
la macro-économie. Cette manière de p~océder, plus réa-
liste, appréhende mieux, dans leur contexte, le comporte-
ment et le rôle des unités de production que constituent
les firmes. Dans cette perspective, l'évolution histori-
que et théorique des concepts de croissance et d'écono-
mies d'échelle paraît liée à deux phases de la pensée
économique. La première phase correspond à la théorie
classique. Les tenants de cette théorie ne distinguaient
pas au fond l'approche micro-économique de l'analyse ma-
cro-économique. Ils passaient sans complexe de l'une à
l'autre. Témoin l'analyse de A.SMITH sur la division du
travail illustrée par la
.~c~
ription de la manu-
($>'
facture d'épingles dans
le 1
~
mine le morcelle-
v
:r'
ment du métier, l'atomis t'~C~~
tâ b's et l'affectation
o
l:
1>
à chaque ouvrier d'un tr ~a'l rép
.. ' ~
réduit à un geste
<'"'
,
constamment reproduit. C' ~
~v au de l'industrie
9 f ) e a \\ \\
que A. SMITH dégagera les é
d'échelle dûes aux
avantages de la division du travail, à la supériorité des
grandes unités d'équipement productif qui permettent res-
pectivement une spécialisation efficace, une économie
d'espace, de matières premières, etc ...
La seconde phase naît avec le XXème siècle où
l'approche moderne êtudie l'entreprise comme une organi-
sation en perpétuelle mutation. La firme, réalité multidi-
mensionnelle, n'agit plus en fonction d'un seul but, mais
suivant plusieurs critères qui entretiennent des rapports
entre eux et qui s'intègrent à la fonction d'utilité des
dirigeants.
Les concepts connaissent alors un intérêt nou-
veau avec la grande entreprise moderne et le législateur
doit édicter des formes juridiques à propos.

- 21 -
Section l
ORIGINES ET DEVELOPPEMENT DES CONCEPTS
Lorsque les concepts de croissance de l'entre-
prise et d 9 économies ct 'échelle furent abordés pour la premiè-
re fois, implicitement ou explicitement, leur intégration
dans la théorie économique ne posa ~uère de problème.
En mettant l'accent sur la notion d'étendue du
marché ou espace économique~ Adam SMITH ne manquait pas d'y
voir en même temps une limitation à la division du travail,
facteur primordial de la croissance et du progrès. La "main
invisible Il qui guide li indi vidu à servir li avantage collec-
tif lorsqu'il recherche son intérêt personnel~ n'empêche
pas la liberté d~action de celui-ci de rencontrer des
limites. En effet~ l'Etat intervient~ par exemple, pour
éviter un monopole au profit d~une industrie lorsqu'il y
a une restriction des importations. Les auteurs classi-
ques, notamment~ affectent encore d'autres tâches aux
Pouvoirs
publics à propos
des biens et services collec-
tifs. RICARDO
s'oppose cependant à la conception sml-
thienne de
l'effet du progrès et affirme que "l r augrnen-
tation
de la
richesse de
quelques
individus
ne cor-
respond pas nécessairement
à l 'auf,:'Tlentation
de la
richesse nationale. Une personne peut se procurer plus
de denrées alors que le fonds ~énéral de la richesse peut
se trouver diminué pour les au;res personnes 11 (1). Sa
conception de l'effet du progrès économique est basée sur
la constatation de IVaur,mentation des richesse et la
diminution de la v~leur-(2~ Le théoricien de la spécia-
( 1) D. RICARDO, IlPrincipes de l' économie politique et de l' inp3t" ,
trad. Deyser, Costes~ 1933~ t.II, P. 79
( 2) Pour RICAROO, conme pour d'autres auteurs classiques ~ 'jla valeur
d'une marchandise ou la quantité de toute autre marchandise con-
tre laquelle elle s\\cichan8e dépend de la quantité relative de
tmvail nécessaire pour la produire ..• "

-
22 -
lisation internationa~e ne nous fourl.it pas une véritable
théorie de la production et une analyse des éléments fa-
vorisant la croissance de l'industrie. Malgré tout) il
peut passer pour le promoteur de la croissance "non
balancée" caractérisée par des déséquilibres en chaine et
que l'on trouve dans sa théorie des coûts comparatifs.
C'est bien plus tard
qU'Alfred MARSHALL nous
familialisera avec la notion d'''économies d'échelle" pour
expliquer la croissance de la firme ou de l'industrie.
Son point de départ est que la production à grande échel-
le de certains biens en abaisse le coût. La firme réalise
alors des "économies d'échelle" qui comprennent des "éco-
nomies externes" qui sont les plus importantes et des
"économies internes".
Il est assez surprenant de voir que c'est sur-
tout au niveau macro-économique que les classiques ont
mené leur analyse de la croissance de l'entreprise en
négligeant la taille optimale de celle-ci. A. MARSHALL)
lui-même, n'a pas échappé à ce défaut. Ce fut A.C.PIGOU,
plus audacieux peut-être, qui introduira l'idée de désé-
conomies pour expliquer la taille de la firme et celle
d'économies pour se référer à la spécialisation.
§ 1 - Adam SMITH et David RICARDO
1 - A. SMITH
Les avantages de la division du travail dans
l'activité économique ont conduit aux premières études
d'économies d'échelle et soulevé le problème de l'indus-
trialisation. Le désir de bénéficier de ces économies de
dimension) c'est-à-dire de l'amélioration du rendement
des combinaisons des facteurs productifs dûe au dévelop-
pement de l'échelle d'activité des entreprises, est une
des causes qui amène les firmes à chercher à s'accroîtra
--~- - - - , - - - - -- ---- - - - - -

- 23 -
Bien que l~ rôle de la division du travail soit
soulevé avant lui par d'autres auteurs, notamment Becca-
ria en 1769, A. SMITH peut être considéré comme le pre-
mier à avoir élaboré une véritable doctrine de la spécia-
lisation pour expliquer la croissance industrielle. La
sectorialisation de l'économie sous l'action de l'indus-
trialisation sera limitée par l'étendue du marché que
favorise le développement du commerce extérieur qui peut
pallier l'insuffisance du marché intérieur. C'est là an-
noncé ce que A. MARSHALL appellera les économies externes.
L'analyse de la répartition des tâches au niveau
de l'entreprise comme à celui de l'industrie est chez A.
SMITH le résultat d'observations de l'économie anglaise
de l'époque et non d'une suite de déductions à l'instar
de RICARDO.
L'auteur de la "Richesse des Nations" aime
d'ailleurs le souligner par un "j'ai vu" avant de montrer
l'importance de la division du travail, source d'augmen-
tation de la puissance productive du travail, donc de
l'accroissement du produit. Son exemple de la manufacture
d'épingles est la meilleure illustration de cette divi-
sion du travail: " ... un homme qui ne serait pas façon-
né à ce genre d'ouvrage, dont la division du travail a
fait un métier particulier, ni accoutumé à se servir des
instruments qui y sont en usage, dont l'invention est pro-
bablement dûe encore à la division du travail, cet ouvrier
quelque adroit qu'il fût, pourrait peut-être à peine faire
une épingle dans toute sa journée, et certainement il n'en
ferait pas une vingtaine. Mais de la manière dont cette
industrie est maintenant conduite, non seulement l'ouvra-
ge entier y forme un métier particulier, mais même cet
ouvrage est divisé en un grand nombre de branches, dont

- 24 -
la plupart constituent autant de mét:2rs particuliers" (1).
Ce passage montre que pour A. SMITH, la divi-
sion du travail avec les avantages qu'elle procure, ~lue
sur la croissance de trois manières: d'abord par l'ac-
croissement de l'habileté et de la dextérité des travail-
leurs grâce à leur spécialisation; ensuite par l'écono-
mie de temps obtenue grâce à l'absence de mobilité de
l'ouvrier dYun emploi à un autre; pour terminer, c'est
la division du travail qui favorise l'utilisation des
machines et leur invention. L'innovation est souvent le
fait de simples ouvriers, tel, dans les premières machi-
nes à feu, "ce petit garçon continuellement occupé à
ouvrir et à fermer alternativement la communication entre
la chaudière et le cylindre suivant que le piston montait
ou descendait ... , en mettant un cordon au manche de la
soupape qui ouvrait cette communication, et en attachant
ce cordon à une autre partie de la machine, cette soupape
s'ouvrait et se fermait sans lui, et qu'il aurait la li-
t ...
,
,
' " (2)
F 't ...
t
t
.
ber e de Jouer a son alse
.
al
emouvan
cer es malS
combien enrichissant pour l'entreprise anglaise de l'épo-
que.
Toutefois nous ne suivons plus A. SMITH qui
semble donner dans une contradiction lorsqu'il nous parle
du capital. En effet, sa théorie du capital est à nos
yeux en opposition avec ce qu'il nous dit du travail.
Lorsqu'il écrit : "l'industrie de la société ne peut aug-
menter qu'autant que son capital augmente ... ", il fait
dépendre la croissance industrielle
du seul accroisse-
(1) A. SMITH,
"Recherches sur la nature et les causes de
la richesse des nations", trad. Germain Garnier,
Paris, Guillaumin Librairie, 1843, t.I, P. 7
(2) A. SMITH, ibid, P. 13

- 25 -
ment du capital et néblige celui du LJmbre de travailleurn
productifs ou l'amélioration de la division du travail.
C'est là un grave inconvénient. Les jugements portés sur
sa théorie du capital ne lui sont pas tous défavorables
mais il faut reconnaître que, dans son idée, A. SMITH
accorde au capital une place prépondérante sinon unique
dans le mécanisme de la croissance.
Cette thèse présente, par conséquent une cer-
taine incohérence avec son éloge du travail; l'auteur
s'en est, sans nul doute, aperçu.
Pour résoudre la contradiction et attribuer la
croissance au seul fait du facteur travail, A. SMITH nous
définit la notion de capital comme étant cette portion du
capital circulant qui "fournit la matière et les salaires
du travail et met l'industrie en activité" (1~ Le capital
serait alors une sorte de fonds de salaires maximisé qui
nous fait retrouver tout l'intérêt donné à la théorie de
la valeur-travail.
Pour combiner les deux facteurs, travail et
capital, dans le processus de croissance, A. SMITH affec-
te à chacun d'eux un rôle précis et tranche plus nette-
ment la question en annonçant que : "le travail ne pourra
recevoir de subdivisions ultérieures qu'en proportion de
l'accumulation du capital. De même le travail ne peut
acquérir cette grande extension de puissance productive
sans une accumulation préalable
de capitaux, de même
l'accumulation des capitaux amène naturellement cette
extension" (2)
Si lion prend le capital dans l'acception ci-
dessus, il n'y a pas de contradiction dans la pensée de
(1) A. SMITH~ op.cit., t.II, P. 37
(2) A. SMITH, op. cit., t.I, P. 334

- 26 -
A. SMITH. C'est â not~e sens la posiLion â adopter. le
travail reçoit le concours du capital qui permet de le
diviser, d'accroître le nombre d'ouvriers, d'utiliser des
machines nouvelles, en d'autres termes le capital accroit
la productivité du travail" (1)
Faire de la division du travail le facteur es-
sentiel de la croissance et du capital le déterminant de
l'industrie dans la mesure où il fixe le nombre d'ouvriers
est un compromis tout à fait valable si l'on sait que la
simple combinaison des facteurs, travail et capital, dé-
bouche sur une fonction de production. Il s'ensuit que
cette délimitation initiale de son analyse, Adam SMITH en
ajoute une seconde qui restreint d'une manière encore
plus marquante sa théorie. Il s'agit de l'explication de
la croissance de l'industrie par le développement des ex-
portations de produits manufacturés. La division du tra-
vail, prenant sa source dans la désintégration de l'unité
agricole, est limitée dans l'agriculture qui constitue le
marché national tandis qu'elle serait illimitée dans
l'industrie, secteur à fort progrès technique. C'est
pourquoi l'échange international devra intervenir pour
absorber l'excédent agricole, contribuant ainsi â amélio-
rer la division sociale du travail, facteur de développe-
ment et d'enrichissement de la nation.
2 - D. RICARDO
S'il ne vient pas à l'esprit de penser à une cer-
taine influence d'Adam SMITH sur David RICARDO, il n'en
(1) Lord Lauderdale, quant à lui, voit le capital renplacer le tra-
vail plutôt que de coopérer avec lui ou le soutenir pendant la
période de production, c'est-à-dire la période pendant laquelle
on attend le revenu produit par les résultats de ce travail, in
"An irx:.l,uiry into the Nature and origins of Public Wealth" (Edim-
bourg Constable, 1804)

- 27 -
demeure pas moins que ce dernier a l~ l'auteur des Riche~
ses de la Nation avant d'écrire ses "Principes d'économie
politique et de l'impôt". On pourrait dire sur ce point
qu'il poursuit l'oeuvre de son prédécesseur et, comme
celui-ci, se propose d'étudier les problèmes de la crois-
sance économique. Leur convergence de vues sur certains
points ne diminue en rien leur divergence de pensées
quant aux fondements de base du développement économique.
Ceci est d'autant plus probant qu'il existe entre les
deux théoriciens une différence de milieu comme de pensée
qui n'atténue pas, loin s'en faut, l'influence de J.B.
SAY sur RICARDO.
L'apport de RICARDO à la théorie de la crois-
sance économique est certainement plus significatif que
celui de bon nombre d'auteurs classiques, de A. SMITH en
particulier. Son approche, plus rigoureuse, reflète mieux
le comportement de l'homme d'affaires qu'il fut et qu'il
cherche à mouler dans des activités industrielles. L'ana-
lyse prend un aspect anti-rétrograde pour retracer l'éco-
nomie dans son ensemble; ce que l'auteur fait comprendre
en disant, sans transition, que "l'on est en période de
prospéri té croissante Il (1). Cette affirmation brutale pro-
vient, on s'en doute, d'une déduction de la situation
économique de llAngleterre du début du XIXè siècle d'où
prit naissance la révolution industrielle.
Avec RICARDO, l'antagonisme secteur agricole-
secteur industriel se précise davantage pour donner la
priorité au secteur le plus favorable à la croissance
économique. L'alternative, selon lui, est de mettre l'ac-
cent sur l'industrie, facteur de progrès technique, plu-
tôt que sur l'agriculture, domaine des rendements décrois-
(1) D. RICARDO, op.cit., t. l, P. 94

- 28 -
s_nts. Dans la théorir ricardienne~ rontrairement à ~a
pensée de A. SMITH, seule l'industrie serait capable de
provoquer un élargissement des débouchés pour l'absorp-
tion du surplus industriel. Outre cette constatation fon-
damentale, il se pose) pour RICARDO, un problème d'impor-
tance: l'équilibre entre une économie en croissance et
une population également croissante dans laquelle l'agri-
culture et l'industrie évoluent suivant des taux de pro-
ductivité différents (1~ Les lignes ci-àessus annoncent
donc l'échange international, suite d'une "loi de la
croissance" déterminée par un taux d'accroissement du
capital plus élevé que celui de la population.
Il serait plus juste de dire que l'auteur des
"Principes" se préoccupait surtout de llphotographier"
l'économie anglaise florissante de l'époque et de préco-
niser des solutions en vue de conserver ou d'améliorer
les avantages acquis que d'élaborer) en pur théoricien
un modèle de croissance économique. Ainsi, RICARDO ne
nous fournit pas une véritable théorie de la production.
Cependant les notions de progrès économique, de capital
peuvent nous permettre de saisir sa pensée "optimiste"
et la dynamique de sa théorie. Ceci est important dans
la mesure où il nous explique la croissance industrielle
et les économies susceptibles d'en résulter.
RICARDO co~~ence par une définition très gene-
raIe du capital : "le capital est cette partie de la
richesse d'une nation qui est employée à la production.
Il se compose des matières alimentaires, des vêtements,
des instruments et ustensiles, des machines, des matièrœ
premières, etc ... nécessaires pour rendre le travail
productif" (2).
(1) Nous ne reprendrons pas ici la démoLstration de
RICARDO, elle est familière.
(2) D. RICARDO, op.cit. t.I, P.
79

- 29 -
Cette conception large du capital, avec absence de fron-
tière entre capital f~xe et capital ~irculant, ne gêLe
nullement l'auteur qui ne voit en ce facteur de produc-
tion qu'un moyen utilisé pour parvenir à l'objectif final,
c'est-à-dire la production. Ce qui importe dont c'est la
production obtenue par le "sacrifice" partiel ou total du
capital national. Il y a des variations de même sens du
capital et de la production. A une diminution du capital
correspond une diminution de la production et à une aug-
mentation du capital) une augmentation de la production.
"A mesure que le capital d'un pays diminue, ses produc-
tions diminuent parallèlement et, par conséquent, si le
Gouvernement et la Nation continuent à faire les mêmes
dépenses pendant que la production annuelle décroît, les
ressources du peuple et de l'Etat déclineront avec une
rapidité croissante et la misère, la ruine en seront les
suites inévitables" (1)
L'influence de J.B.SAY se fait déjà sentir; le
passage ci-dessous qui montre que le capital trouve tou-
jours à s'employer en donne la confirmation: 'icependant
M.SAY a prouvé de la manière la plus satisfaisante~ qu'il
n'y a point de capital, quelque consid~rable qu'il soit,
qui ne puisse être employé dans un pays, parce que la de-
mande des produits n'est bornée que par la production~~~
Dans ces conditions, le capital ne peut être
surabondant puisque la demande n'est limitée que par la
production. Par ailleurs
"la baisse ou la hausse de pro-
j
fits que cet accroissement de production et la demande
qui en est la suite pourront occasionner) dépend unique-
ment de la hausse des salaires ; et la hausse des salai-
res, excepté pendant un temps limité, tient à la facilité
(1) D. RICARDO, op.cit., t.I: P. 147
(2) D. RICARDO, op.cit.; t.II, P. 89

- 30 -
de produire les subsistances et les choses nécessaires à
l'ouvrier H (1)
Une modification, dans un sens ou dans l'autre~
des profits qui poussent les industriels à accumuler ne
serait donc pas l'effet d'une accumulation excessive de
capital mais du comportenent des salaires. Cette relation
inverse entre salaires et profit ressort de la théorie de
la valeur-travail de RICARDO qui fait du travail incorpo-
ré la source de toute valeur et de sa quantité la mesure
de la valeur des marchandises.
Quel serait l'effet d'un accroissement de la
production industrielle sur les coûts de fabrication? Il
faut se référer au progrès technique pour en avoir une
idée.
f
l
Chaque progrès dans les machines ~ les outils ~ les
bâtiments, la production des matières premières épar~ne
du travail, permet de créer une marchandise avec plus de
facili té, et tend, par conséquent à en réduire la valeuril (2).
La citation
est claire;
il Y aurait simultanément,
avec le progrès technique~ un accroissement de la riches-
se nationale et une diminution de la valeur des produits.
Cette baisse de la valeur des marchandises correspond à
une utilisation moindre du facteur travail, c'est-à-dire
à une diminution des salaires consêcutives à une au~men­
tation des profits. L'effet du machinisme conduit donc à
une économie de main-~!oeuvre en même temps qu'il réduit
le prix des march~ndises ré~lé par les frais de produc-
tion. Le progrès technique qui modifie l'environnement
pour instaurer un cadre dynamique ne touche pas toutes
les industries. Celles atteintes par l'innovation bénéfi-
cient d'une réduction de coût~ d'une meilleure producti-
(1) D. RICARDO,op.cit., t.II, PP. 92-93
(2) D. RICARDO~
l'Des principes de l'économie politique et
~~__ ~.'Jmp'ô~iI, trad. française de P. Constancio et
A. Fonteyraud, Paris, Flammarion~ 1971, P. 45

- 31 -
vité du travail et, d'une amélioraticî de la rentabil~té.
Mais un changement de structure industrielle appelle né-
cessairement une adaptation de l'organisation de l'acti-
vité économique pour éviter toute divergence entre les
structures de la production et de la consommation. RICAR-
DO, dans sa "loi des coUts comparatifs'?, propose une
théorie : celle de la croissance non balancée ou concen-
trée.
D'après cette théorie, chaque pays doit concen-
trer ses ressources sur ses industries les plus efficaces
et recourir au commerce extérieur pour convertir la pro-
duction non balancée de ses industries en une offre de
marchandises plus adaptées aux préférences des consomma-
teurs et aux besoins des producteurs. Le commerce inter-
national ne jouerait pas le rôle de simple exutoire mais
interviendrait pour annuler le divorce entre structure de
la production et celle de la demande lorsque la croissan-
ce n'est pas balancée.
Cette forme de croissance était peut-être via-
ble à l'époque de RICARDO mais ne saurait convenir à une
économie moderne comme celle que nous vivons actuellement.
Le monde évolue consécutivement aux idées et aux intérêts
des hommes. L'incertitude politique, les problèmes de la
balance des paiements, la concurrence internationale sur
les principaux marchés sont autant d'obstacles réels à
surmonter. Le marché international n'est pas "le marché
colonial" mais un lieu où on enregistre les performances
pour sanctionner les faibles, encourager les audacieux
et couronner les succès.
b)
~~_Qggr§_r§§~r!Q~!f_g§_1~gDg1Yê~_r!Qgrg!~gD~_g~ê
2Q~2~2~ê
Malgré certaines prises de position qui l'amè-
nent à se contredire, RICARDO a, sur la croissance écono-

- 32 -
mique, des vues dont la portée parait de nos jours encore
três grande. L'Angleterre industrialisée devait, à ses
yeux, sortir de la situation dans laquelle son développe-
ment la précipitait. En effet, il était devenu nécessai-
re, en vertu de l'ampleur que prenait son activité écono-
mique tournée vers l'industrialisation, d'assurer la sub-
sistance des nombreux ouvriers employés dans les manufac-
tures. L'agriculture anglaise dont les rendements décrois-
saient avec la mise en exploitation de terres de moins
en moins fertiles ne pouvait subvenir à ce besoin. C'est
alors que, suivant la loi des coûts comparatifs, le com-
merce international a la charge de fournir les avantages
inhérents à l'importation de produits primaires, à savoir
la diminution des coûts sociaux, en particulier le coût
de la force de travail. Cette restriction de la fonction
de l'échange international a surpris un auteur comme T.R.
MALTHUS qui souligne que : "M. RICARDO ne voit dans le
commerce étranger qu'un moyen d'obtenir des produits à
meilleur marché. Mais c'est ne faire attention qu'à la
moiti~ des avantages de ce commerce" (1). La remarque est
pertinente et vient du fait que MALTHUS donne à la notion
de valeur une signification différente de celle avancée
par RICARDO. Ainsi distingue-t-il valeur échangeable ra-
menée au prix et mesure de la valeur liée au travail.
Lorsque l'échange intervient, les produits exportés, par-
ce que l'on en a moins besoin, augmente de valeur pour
permettre l'acquisition de produits dont on a le plus
grand besoin. Le commerce extérieur conduit finalement à
l'élevation de la valeur des produits étrangers sans pour
autant provoquer une réduction du prix des produits na-
tionaux. L'avantage ne saurait, dans ces conditions, ré-
sulter des prix d'articles importés que l'on ne produit
pas.
(1) Thomas-Robert MALTHUS~ "Principes d'économie politi-
que", 2ème éd. Londres 1836, (Trad. française, Paris
Guillaumin s 1846), P. 353

- 33 -
D'un autre côté, l'adoption de la "loi des dé-
bouchés" de SAY est ingénieuse pour expliquer la crois-
sance sans perturbation ni crise, mais demeure sans fon-
dement pratique. La croissance de la production d'une
industrie ne s'amplifie nullement en se généralisant aux
autres industries, au contraire elle aurait tendance à
s'amortir par l'effet d'une diminution de la demande à
chaque phase de production. Le processus de croissance
n'est pas auto-entretenu pas plus qu'il n'est cumulatif.
La croissance repose sur des motivations con-
crètes des dirigeants des entreprises non sur une loi
naturelle adaptant les productions des diverses branches
pour un équilibre parfait. Elle est inséparable du déve-
loppement des investissements compte tenu du facteur temps
et de la distinction entre épargne et investissement.
§ 2 - Alfred MARSHALL
S'il est logique de louer et de saluer à la
fois la pensée d'A. MARSHALL, notamment sa vision de la
croissance des firmes, c'est parce qu'il est l'un de ceux
qui ont essayé de cerner véritablement les causes et
avantages du développement général de l'industrie que
soulignaient, avant lui mais d'une manière moins profon-
de, A. SMITH et D. RICARDO ou, que formulaient implicite-
ment sinon qu'ignoraient certains de ses contemporains
tels que Ch. GIDE et Cl. COLSON (1~
( 1) C'est à partir de la théorie riCardierme de la rente que furent
développés les rendements décroissants ; du principe fondamental
d'A.SMTTH de la division du travail limitée par l'étendue du
marché que le furent les rendements croissants. Par la suite,
Ch. GIDE ne devait pas voir dans la "localisation géographique
des industries" l'émergence d'économies externes et au même IJD-
ment, Cl. carsON niait l'existence de cette notion tout en fai-
sant état de "bénéfices indirects" dûs par exemple à l'at:a.isse-
ment du prix des transports.

- 34 -
Dês lors, approfondissant les idées de ceux-l§
même qui furent ses devanciers, il se laissait emporter
par leur préoccupation, à savoir l'explication d'un phé-
nomêne historique: la croissance économique de l'Angle-
terre et des autres pays industrialisés et la poursuite
de celle-ci dans des conditions d'équilibre satisfaisan-
tes. La croissance industrielle, moteur d'évolution des
potentialités et de l'augmentation de la production natio-
nale ne pouvait manquer de faire naît!'e dans l'esprit de
MARSHALL les ';fameuses" économies d'échelle dont tant
d'auteurs ont eu à controverser le sens ou à discuter la
portée.
L'idée de MARSHALL ressort du principe selon
lequel les économies d'échelle se subdivisent en deux ca-
tégories distinctes : la première, les économies internes,
dépend des ressources des firmes individuelles, de leur
or0anisation et de l'efficacité de leur sestion ; la se-
conde, les économies externes. résulte du développement
général de l'industrie(l~
Cette distinction devait lever une contradiction
évidente héritée des auteurs classiques, contradiction
entre la loi des rendements décroissants et la croissance
de l'économie. Aussi à partir de la notion d'économies
internes qui tiennent à la situation individuelle des en-
treprises~ MARSHALL pensait trouver la solution du problè-·
me des rendements décroissants. Malheureusement cela ne
suffisait pas pour freiner cette décroissance, au contrai-
re. D'une part J cornrne le montre son exemple des "arbres
de la forêt t1 (l! analop-ie ne semble pas touj ours vérifiée
avec l'avênement des grandes sociétés, multinationales,
conglomérats), la firme décline et rencontre des difficul-
tés de gestion parce qu ~avec
l'augmentation de sa taille
(1) A.MARSHALL, ~Î~Tincip'le.s_S?:Ç ~con?_m_ic ..~ll, stJ1 ed.London
Macmillan and C~, 1920, P.266,ss.

- '5 -
pendant sa vie, l'énergie et la cr~ativit~ de ses diri-
geants s'émoussent aU.fur et à mesur~ qu'elle vieillit.
D'autre part, aes économies internes qui provoquent une
baisse du août moyen de longue période consécutive à'un
accroissement de la productio~, .donnent en m3me temps un
coût marginal inférieur au coût moyen par suite de rende-
ments mar~inaux croissanta. L'illustration graphique ci-
dessous montre que tant que la courbe de août moyen d6crolt,
la courbe de coût ma.rginal lui reste inférieur jusqu'au
mo~ent où la loi des rendements décroissants élève la cou~'
he de coOt moyen.
Cette aonstatation serait le pendant, cA.I'.~UI le
cas des rendements croissants dOs aux économies externes,
d'une courbe d'offre de longue période décroissante, his-
torique et irréversible qui intersecte, en passant par-
dessous, la courbe de demande.

- 36 -
,ct
- --- -_.,
1
,
1
,.
1
1
1
s'
o
Sur le graphique de droite, les points d'inter-
section entre la courbe d'offre décroissante SS' et les
courbes de demande Dl) D
2 de longue période, sont des
points d'équilibre stable marshallieL. En deça de ces
points, les coûts marginaux sont plus bas que les prix
et les coûts moyens; au-delâ des points d'équilibre, les
coûts marginaux sont plus élevés (les rendements crois-
sants, reflet des économies externes, se traduisent par
conséquent par un déplacement vers le bas de la courbe de
longue période). Mais en toute logique~ il n'y a aucune
raison qu'une firme se maintienne ~ ces niveaux d'équili-
bre ; les entre~rises cherchant toujours à augmenter leur
profit en accroissant leur production, l'équilibre ne
pourra ~tre établi à long terme que si une firme instaure
un monopole du marché, ce qui est incompatible avec l'hy-
pothèse de concurrence parfaite.
C'est pour essayer de sortir de cette situation
créée par les économies internes
et. justifier son opti-
misme sur l'évolution générale de l'économie en dépit de

- 37 -
la réduction constante de la croissance de chaque firme
que MARSHALL recourt aux économies externes et, précise
que : "Ces économies internes que chaque établissement
doit réaliser lui-même sont souvent très faibles, compa-
rées à ces économies externes qui résultent du progrès
général de l'environnement industriel,,(1?
... et, "
notamment celles qui sont liées à l'accroissement des
connaissances et du progrès technique dépendent principa-
lement du volume global de la production dans l'ensemble
du monde civilisé" (2).
L'argument de MARSHALL, aussi astucieux et im-
portant qu'il peut paraître, reste malgré tout imprécis
dans sa formulation. Cette ambiguité ressort surtcut d'une
explication incomplète des économies internes et du do-
maine insaisissable qu'embrassent les économies externes.
Aussi, quelques difficultés apparaissent dans la délimi-
tation entre économies internes et économies externes, et
ceci tant que la théorie de la firme n'englobera pas celle
de son comportement qui figure les actions indépendantes
de la taille de l'entreprise ou de l'industrie. La firme
"représentative" dans chaque industrie, modèle de compor-
tement pour MARSHALL, ne saurait trouver sa justification
puisque des inégalités existent au sein des industries ou
groupes(3) et s'expliquent par les différences dans l'or-
(1) MARSHALL, op.cit., P. 266
(2)
Il
fi
"
(3) L'orthodoxie marshallienne assimile l'industrie au groupe qu'elle
définit COrntœ l'ensemble des entreprises produisant des biens
qui sont des substituts étroits. Pour sa part, CHAMBERLIN conçoit
le groupe conme l'ensemble d'entreprises qui corrposent un mrché
de concurrence irrparfaite. Ce qu'ignorent ces auteurs malgroé tOtt
c'est que le 87'0upe ne trouve pas son essence dans la simple réu-
nion d'entreprises sur un rrarché ma.is dans les débouchés limités
par la saturation de la demande.

- 38 -
g~nisation du management, dans la recherche et l'innova-
tion, dans le système de traitement de l'information,
susceptibles d'inciter la croissance aussi bien que l'ap-
titude à créer et à utiliser des économies externes. Cha-
que firme possède donc ses caractéristiques et reçoit
différemment aux autres l'effet des économies externes
qui modifient ses coûts. Nous abordons ici une question
qui fut, jusqu'à nos jours, la source d'interminables
débats autour des éléments particuliers des économies
d'échelle et par voie de conséquence de la croissance des
firmes. La ligne de démarcation entre ces notions d'éco-
nomies d'échelle et de croissance s'avère, il faut le
souligner, délicate à tracer dans la mesure où l'une et
l'autre sont cause et effet: la croissance étant un ac-
croissement de la production à long terme, les économies
d'échelle ou de dimension indiquent le meilleur rendement
obtenu des combinaisons des facteurs et se manifestent
par une réduction des coûts. Qui plus est~ l'analyse par-
tielle dans laquelle MARSHALL confine sa pensée et qui
serait trop étroite pour contenir son développement sur
le processus d'évolution industrielle. C'est dire que,
sans le vouloir, il a fallu franchir les frontières de la
micro-économie pour donner dans un cadre général afin de
maintenir la validité de son raisonnement ou du moins de
l'équilibre partiel. L'optique partielle ne se détache
pas de l'optique générale mais se situe dans celle-ci et,
se définit par rapport à elle jusqu'à un point au-delà
duquel le phénomène d'interdépendance des industries, à
partir des firmes composantes, crée une confusion des
deux formes d'analyse. MARSHALL s'en est bien rendu compte
et semble l'admettre implicitement. D'une manière généra-
le, les économies externes l'amènent à m~nquer de clarté
et, comme pour convaincre de la précision de ses idées et
justifier la cohérence de son analyse menée ~lternative­
ment au niveau statique et à celui dynamique, il écrit ;
"la théorie de l'équilibre stable de l'offre et de la
demande normales nous aide incontestablement à préciser

- 39 -
nos idées : et cette théorie, dans sa partie élémentaire,
ne s'écarte pas beaucoup des faits réels de la vie, cet
écart n'est pas assez grand pour l'empêcher de donner un
tableau très véridique des principaux modes d'action des
groupes les plus puissants et les plus persistants des
forces économiques"
(1~ Ce passage ouvre une porte à
MARSHALL pour introduire le raisonnement statique basé
sur l'amélioration des méthodes de production par suite
d'adaptations d'idées existantes et non d'introduction de
nouvelles techniques. Cette méthode statique méconnait,
en fait, les problèmes liés aux taux de croissance des
entreprises, à l'évolution dans le temps de celles-ci, au
développement de leur organisation.
L'affinement de l'analyse pour une interpréta-
tion rigoureuse qui reflète mieux le comportement des
groupes d'industries en vue d'un résultat d'ensemble,
montre que : "les problèmes économiques sont imparfaite-
ment présentés lorsqu'ils sont traités comme des problèmes
d'équilibre statique et non comme des problèmes de crois-
sance organique" (2~ De ce point de vue
le cadre dynami-
3
que s'impose compte tenu du développement des connaissan-
ces, du progrès technique et de la formation profession-
nelle.
Conscient des limites analytiques des méthodes
qu'il utilise, MARSHALL n'en a pas été pour autant plus
clair dans le choix et l'exposé des concepts, laissant
ainsi un vaste champ de subjectivité à leur formulation.
Dans le même ordre d'idées, on peut lui reprocher encore
de se situer tantôt dans le court terme, tantôt dans le
long terme.
(1) MARSHALL, op.cit., PP. 460-461
(2)
"
"
"

- 40 -
Les période3 ne correspond)nt à aucune dim~nsion
temporelle si ce n'est qu'elles sont délimitées par le
niveau de la demande à un instant donné. L'offre s'adapte
à la demande par le biais des anticipations qut font va-
rier la capacité productive, ce qui signifie en d'autres
termes, que la longue période, succession de courtes pé-
riodes qui traduisent un certain état des affaires, est
un équilibre auquel tend l'économie sans jamais l'attein-
dre.
Une telle vision des variations de la capacité
de production a pour conséquence de rendre inversement
proportionnels rendements croissants et rendements décrois-
sants, deux phénomènes qui expriment des lois différentes.
Alors que les rendements décroissants proviennent de
"l'action de la nature dans la production", les rendements
croissants seraient le fait de "l'action de l' homme 11. Ce
sont ces derniers que MARSHALL privilégie car, en rapport
avec la croissance de l'entreprise, ils contrebalancent
l'effet de décélération engendré par la loi de décrois-
sance.
C'est cette importance accordée aux rendement~
croissants en contradiction avec le régime de concurrence
parfaite que nous allons maintenant voir.
Les points abordés jusqu'ici font apparaître
quelques signes d'inconfort dans l'exposé de MARSHALL.
L'une des difficultés et non la moindre réside dans l'in-
compatibilité des rendements croissants et de la concur-
rence. Ce dilemme donne une mesure de l'incohérence de la
théorie marshallienne et de son irréalisme. Comment dès
lors concilier les deux termes sans détruire le régime
concurrentiel qui permet à chaque firme d'évoluer sans à-
coups au sein de l'industrie dont elle fait partie?

- 41 -
MARSHALL pa~t de l'analyse partielle qui s'a-
vère trop restrictive pour aboutir à des résultats glo-
baux à partir de phénomènes d'interdépendance. La firme
II repr ésentative"
choisie dans chaque industrie niest,
ainsi que le souligne J.,,\\ . SCHurvrPETER, "ni une firme moyen-
ne, marginale ou leader mais une firme dans une position
et avec une structure pour lesquelles les conditions de
l'industrie sont à tout moment reflétées de telle sorte
que certaines propositions restent valides par rapport à
elle, qui ne le sont pas par rapport à toute firme réel-
lement existantes, ou par rapport à toute industrie dans
son ensemble". (1). Cette entreprise-type va bénéficier à
la fois d'économies internes et externes comme ses com-
pagnes et croître en même temps qu1elles. Mais le fait
insolite est qu'elle n'existè en réalité que dans l'es-
prit de l'auteur.
Pourquoi avoir imaginé une telle unité de pro-
duction avec une croissance qui est supposée concorder à
celle, de l'environnement industriel? La réponse qui
vient aussitôt à l'esprit est Qu'elle peut rendre plausi-
c:
ble la liaison entre rendements croissants résultant du
développement d'industries interdépendantes; ensuite,
qu'elle permet d'observer une translation univoque de la
croissance de l'industrie à la firme.
En fait, nous sommes amenés à penser que la
nature intrinsèque de cette maison-type la sin~ularise au
point de lui donner, à la limite, une supériorité ou une
plus grande aptitude par rapport à ses rivales qu'elle
serait tentée de les éliminer.
C'est alors que so~ caractère représentatif n'a
pas plus de signification qu'on ne peut lui appliquer le
(1) J. A SCHUMPETER,
"History of Economie Analysis" ~ Lon-
dres-Allen et Unwin, 1954, PP. 994-998.

- 42 -
comportement observé au niveau de l'~ndustrie, de mêrr-e
qu'on ne saurait attendre d'elle quelque information sur
le fonctionnement dichotomique de la firme et de l'indus-
trie.
Les critiques à l'encontre de l'oeuvre de MAR-
SHALL ne peuvent empêcher de lui accorder le crédit d'a-
voir formulé~ plus que ceux qui l'ont précédé dans cette
voie, une théorie de la croissance générale de l'indus-
trie en se situant au niveau de l'entreprise. Ce fut une
tâche ardue qui, pour éviter de tomber dans certains tra-
vers, nécessite une analyse concrète du comportement de
la firme et de son environnement, excluant ainsi toutes
hypothèses et décisions a priori. MARSHALL n'a manifeste-
ment pas été jusqu'au fo~d de sa pensée~ ce qui laisse en
suspens des points cruciaux de sa théorie qui fait appa-
raître des obscurités.
Ses continuateurs sauront-ils, en la personne
de PIGOU, faire montre de plus de réalisme et de clair-
voyance? Toujours est-il que PIGOU a appuyé son apport
par des éléments de justification de la vision marshal-
lienne.
§ 3 - A.C. PIGOU
La subtilité d'esprit d'A.MARSHALL n'était pas
suffisante pour effacer les zones d'ombre de sa pensée.
Il appartenait à PIGOU, son héritier, de tenter d'éclair-
cir et, au besoin, de compléter certaines de ses affirma-
tions. Celui-ci n'aurait-il pas déclaré dans sa leçon
inaugurale du 30 octobre 1908 : "mon but est de dévelop-
per en cette Université, lloeuvre entreprise par MAR-
SHALL" (1).
(1) cf G.H.BOUSQUET,"A.C.PIGOU " , traduction, introduction
et notes, Paris, Dalloz,1958, P. 52

- 43 -
Pour PIGOU~ la diffic~~lté majeure qUl présentait pareil
travail consistait à demeurer original sans trahir les
vues de MARSHALL (1). Il Y parvient en saisissant l'idée
essentielle du maître de Cambridge, les économies d'échel-
le, en l'occurence les économies externes que privilégie
celui-ci.
Alors qu'avant lui il n'était question que d'é-
conomies externes
PIGOU oppose à cette notion marshal-
J
lienne celle de déséconomies externes et use en outre
d'instruments ignorés jusqu'ici par ses prédécesseurs,
revenu social, rendements marginaux prlve et social, qu'il
semble d'ailleurs tenir de MARSHALL comme bien d'autres
choses.
Nous sommes loin des économies externes de MAR-
SHALL développées et explicitées de manière à pouvoir
être moulées dans une économie de bien-être qui en modi-
fie la nature dans un sens communément appelé "tradition
pigouvienne li • Le principe de cette tradition réside dans
le fait qu'il y a non-concordance entre produit (ou coOt)
marginal social et produit (ou coût) marginal privé. On
peut observer les divergences entre ces deux rendements
(ou coOts) marginaux au niveau des différentes branchel
mais la divergence la plus saillante provient de ce qu'-
une "part du produit d'une unité de ressources consiste
en un quelque chose qui} au lieu d'être immédiatement at-
(1) Ne reproche-t-on pas à PlooU de ne citer les auteurs auxquels i l
emprunte les idées, surtout lorsqu'ils sont étrangers? C'est
par la manière et la clarté de son exposé qu'il s'octroie la pa-
ternité de ses emprunts. Avec MARSHALL pour qui il a beaucoup
d'admiration, il en est autrerœnt et l'on sait qu'il n'utilise
nulle part dans le corps de son "Economies of Welfare" le con-
cept d'économies externes sinon en appendice III pour développer
la pensée de llauteur.

- 44 -
tribué à la personne ~ui investit ce~te unité, est attri-
bué au contraire~ en premier lieu (c'est-à-dire antérieu-
rement à la vente, si la vente a lieu), à titre de poste,
positif ou négatif, à d'autres gens. Ces autres personnes
peuvent être réparties en trois groupes principaux :
1 - les propriétaires d'instruments durables de
la production dont ceux qui inreetissent ne
sont que les locataires
2 - les personnes qui ne sont pas des produc-
teurs du bien pour lequel un autre fait des
investissements ;
3 - celles qui, au contraire, produisent ce
bien (1).
Aussi notre première démarche sera de voir com-
ment PIGOU tente d'expliquer et d'approfondir les phéno-
mènès externes puis, dans un second temps, cherche à ré-
concilier complètement MARSHALL avec ses détracteurs en
postulant une taille optimale de la firme qui marierait
concurrence parfaite et coûts décroissants.
a) ~~~~21!~~~!Q~_9§~_Eb~D2~~D~ê_~~~~rD~ê_9~Dê_~D~_~~oE9illi~
9~_~!~D:~~r~
"Economics of Welfare" transcende la notion
d'économies externes pour constituer une analyse plus dy-
namique du phénomène au niveau de la société dans son en-
semble avec insertion d'outils institutionnels comme les
taxes, les subventions, les subsides, les normes, les
actions juridiques. Ceci est peut-être aussi une manière
d'''internaliser" les effets externes mais reste cependant
limité dans la mesure où l'environnement qui est totalité
(1) A.C.PIGOU, "The economics of Welfare"
(1920), Londres
Macmillan, 4 éd. XXXI, P. 174

- 45 -
n'a pas reçu une définition preClse permettant une meil-
leure gestion des ressources. Des divergences entre pro-
duit marginal privé et produit marginal social se mani-
festent aussi bien dans les industries où les rendements
sont décroissants que dans celles où ils sont croissants,
ceci quel que soit le marché sur lequel opèrent ces fir-
mes: concurrence pure, monopole ... Ces déséquilibres
trouvent leur corollaire dans une mauvaise allocation des
ressources productives.
PIGOU analyse la situation à travers plusieurs
exemples et ajoute que lorsque les rendements sont crois-
sants, le produit marginal privé est inférieur au produit
marginal social puisque les coûts auxquels les acheteurs
sont confrontés diminuent; le rétablissement de l'équi-
libre nécessite alors l'intervention des Pouvoirs Publics
qui doivent user de subvention en faveur de l'action pri-
vée. Au contraire, l'instauration d'une taxe s'impose aux
industries produisant à rendements décroissants car avec
l'augmentation des coûts pour les clients de ces indus-
tries, le produit marginal privé est supérieur au produit
marginal social. Finalement, toute répartition optimale
des ressources de la société appelle une compensation ou
un paiement pour les "services" ou "déservices" rendus.
Certains penseurs n'ont pas souscrit entièrement à ces
prises de position de PIGOU ~ il s'agit notarmnent de A.
YOUNG (1) suivi de F.R.KNIGHT (1924), D.H.ROBERTSON (1924),
R.S.ELLIS et W.FELLNER (1943) qui estiment le cas des
industries à coûts décroissants raisonnablement formulé
parce que des économies sont obtenues dans l'utilisation
des ressources évitant ainsi un gaspillage et, qu'il
n'est que juste d'encourager. Par contre, ils n'acceptent
pas la solution qui veut que les rendements décroissants
fassent l'objet d'une imposition car ici il n'y a pas
(1) Allyn YOUNG~ "Pigou's Welfare", Quarterly Journal of
Economics, août 1913

- 46 -
divergence entre les deux produits marginaux mais équili-
bre. Leur argument repose sur le fait que l'augmentation
des coûts des industries concernées directement ou indi-
rectement ressort plutôt d'un renchérissement des prix
des facteurs de production devenus rares. Les firmes ne
font alors qu'adapter leurs prix aux coûts de ces fac-
teurs pour recevoir une sorte de rente de rareté récom-
pensant leur habileté d'avoir su dêvier les "erreurs de
distribution" qui conduiraient à une affectation anarchi-
que des inputs disponibles.
PIGOU se ralliera à ce point de vue sur les
rendements décroissants à partir de 1920, date du premier
remaniement (il y en aura d'autres dans les éditions sui-
vantes) de son f!Wealth and Welfare" plus connu sous le
nom d'"Economics of Welfare".
Abandonnant donc son raisonnement initial basé
sur une fausse symétrie entre rendements croissants et
rendements décroissants, il annonce que les variations du
prix des facteurs de production sont peu fréquentes dans
une situation de coûts décroissants mais seraient inhé-
rentes aux modifications du revenu social, du bien-être
qui correspondent soit à des économies soit à des consom-
mations supplémentaires de ressources.
Ces variations du revenu de la société restent
inexistantes dans le cas des coûts croissants ; ce sont,
de ce fait, elles seules qui justifient une intervention
étatique pour adapter la production à la demande. On re-
connaît là une idée déjà rencontrée que PIGOU exprime en
termes d'économies ou de déséconomies externes et, que
J.VINER (1931), T.SCITOVSKY (1954) diviserons (nous le
verrons plus loin dans le détail) en économies technolo-
giques et économies pécuniaires. Le concept marshallien
d'économies externes aura subi jusqu'à nos jours une
extension émaillée parfois de faits empiriques pour être

- 47 -
p~us saisissant et mlLUX intégré à l:analyse économique.
Toutefois
une question qui dépasse la simple définition
j
est de savoir maintenant dans quelle mesure les économies
externes dont les tentatives de détermination présentent
les inconvénients d'une théorie, rendent-elles concilia-
bles concurrence et rendements croissants ? Problème que
MARSHALL
par ignorance, laissera aussi en héritage a
j
Plaou.
b) 1~_g~~2~2~!Q~_E!gQ~Y!~DD~_g:~2QD~Œ!~ê_g:~gh~11~_~~_1~
E~~~~1~~_g~_~~!11g_Q2~!ill~1§_gg_1~_f!r~g
MARSHALL avait tracé sa courbe décroissante
d'offre de l'industrie dans les conditions de concurrence
parfaite sans faire attention à la contradiction qu'une
telle construction pouvait soulever. Les économies de
dimension qui tendent à faire baisser le coût moyen, fa-
vorisent le monopole lorsque s'instaure l'équilibre de
longue période. Comme il fallait poursuivre l'analyse
marshallienne sur des bases assez solides, PlaOU fut ame-
né à entrevoir une solution à ce délicat problème qui
remettait en cause tout l'échafaudage. L'idée d'introdui-
re dans le modèle une taille optimale de la firme(l) lui
vint à l'esprit. L'entreprise possède une dimension opti-
male, c'est-à-dire celle pour laquelle les coûts moyens
de longue période sont minima, si la direction est adap-
tée à sa taille qui est proportionnelle à l'aire économi-
que d'exploitation ou marché qu'elle satisfait.
Le management, considéré comme facteur de pro-
duction au même titre que le travail et le capital, est,
(1) PlaOU utilise indifféremment les termes de firme et
d'industrie erâce à la complicité de ce qu'il appelle
la "firme d'équilibre"
qui n'est autre que la 'firme
représentative" de MARSHALL.

- 48 -
comme ces derniers, s~jet à des gain~ ou à des pertes
d'échelle. En effet, la division du travail de direction
peut être une source d'économies si la spécialisation
rend les dirigeants plus efficaces dans une industrie ou
une fonction déterminée.
Cette perspective donne con-
fiance aux firmes qui vont chercher à croître pour attei~
dre la dimension qui permet le plein-emploi de cet actif
humain(il est certain qu'une firme tire avantage de l'u-
tilisation à temps complet de ses dirigeants que s'ils
étaient employés à temps partiel). Toutefois, au-delà
d'une certaine taille, appelée taille optimale, petite
par hypothèse et puisque l'expansion du produit total
résulte d'une augmentation du nombre des firmes plutôt
que d'un accroissement de leur produit moyen, la direc-
tion générale est soumise à des rendements décroissants
lorsqu'elle est utilisée avec des quantités croissantes
des autres inputs. L'unité économique s'alourdit et s'a-
vère difficile à diriger et à coordonner ; des difficul-
tés pour modifier la combinaison et l'orientation des
autres ressources se présentent, élevant ainsi les coûts
de direction. Ces déséconomies d'échelle de direction qui
conduisent simultanément à une diminution de l'expansion,
de la souplesse et du contrôle de l'entrepris~altèrent
en définitive l'énergie des cadres dont "le dynamisme et
l'initiative se perdent dans une bureaucratie paralysan-
te"
(1~
PIGOU suggère qu'une partie des ressources dans
les industries à rendements décroissants émigrent vers
celles à rendements croissants pour réduire les pertes
d'économies qui proviennent des premières. En usant de
taxes et de subventions, on maintiendrait alors le niveau
des prix relatifs des marchandises, ce qui tendrait à
améliorer la richesse nationale. Ce système de compensa-
(1) W.F.WHYTE, "The or~anization Man", New-York,1956
N.PARKINSON, "Parklnson's Law", London, 1956

- 49 -
tion correspond, nous l'avons vu prél2demment, à une :aus-
se symétrie des deux rendements comme le reconnaît par
la suite PIGOU lui n'même après que cela lui fût signalé.
Si la présence de déséconomies de management
est un fait incontestable, les études empiriques n'ont pu
prouver jusqu'ici, du moins à notre connaissance, l'appa-
rition de ces déséconomies une fois le seuil de dimension
optimale franchi. Au contraire, les observations invali-
dent la théorie orthodoxe traditionnelle basée sur l'en-
treprise individuelle dotée d'un équipement car ce que
l'on rencontre dans la réalité c'est la firme composée de
plusieurs entreprises avec leurs équipements, liées éco-
nomiquement et financièrement. Certaines firmes possèdent
même une dimension internationale attribuée à des écono-
mies d'une autre nature que celles émanant de la qualité
du groupe de direction; ce sont les économies d'échelle
dont l'origine se trouve dans la production~ la distribu-
tion, la recherche et l'innovation ou le monopole, et qui
ont la caractéristique d'être compatibles avec la crois-
sance des coûts du management pour l'emporter sur les
pertes de l'administration devenue plus grande et moins
efficace.
Section II
LE RENOUVEAU DES CONCEPTS DE CROISSANCE DE LA FIRME ET
D'ECONOMIES D'ECHELLE
Les fondements des doctrines classiquE
et néo-
classique reposaient sur une conception très particulière
de la croissance de la firme et des effets qu'elle déga-
ge pour fournir une explication de l'évolution de l'éco-
nomie nationale.
Ces théories élaborées à partir des hypothèses

-
--
- - - - - - - - -
- 50 -
d _~ marché de concurre:'ce parfaite, é~ ,lient plus soue: euses
d'appréhender la réalité à travers l'entreprise, instru-
ment d'analyse passif,
que de voir en cette dernière,
comme le fait la théorie moderne~ un organisme vivant,
doué de comportement perçu à travers ses réactions à un
environnement qu'elle cherche sans cesse à modifier à son
avantage.
L'entreprise "robot li , évoluant dans un monde de
certitude où son or~anisation, l'état de la technique et
les prix sont donnés, nIa pour objectif que la maximation
de son profit. Cette unique motivation pourrait aussi
être un déterminant de sa taille lorsque l'on sait que,
dans ce régime, le maximum de profit coincide avec le mi-
nimum. L'entrepreneur ne prend aucune décision et ne fait
pas de prévisions ; seul importe le comportement global
des industries pour la détermination du niveau général
des prix.
L'analyse était donc statique en ce sens que les
conditions d'équilibre pour chaque industrie s'observaient
dans la stabilité du produit de chacune de leurs entre-
prises, du nombre de celles-ci dans la branche, du produit
total de la branche. Il y avait certes une croissance de
lléconomie dans son ensemble, mais non des firmes qui
n'évoluent qu'en passant d'un équilibre à un autre. L'ap-
parente faiblesse de cette approche ne pouvait laisser
indifférent certains esprits désireux de dépasser pareil
formalisme pour arriver à une théorie de la croissance
qui donnerait à la firme une structure nouvelle dans le
processus de production et de vente.
§ 1 - Les économies d'échelle et la théorie de la
croissance de l'entreprise
Des économistes de ces cinquantes dernières
années ont témoi~né un regain d'intérêt aux économies

- 51 -
d'échelle et ~ la croissance pour expliquer le dêveloppe-
ment êconomique. Les rêsultats auxquels ils sont parvenus
donnent une preuve de la nêcessitê d'êlargir, pour les
rendre actuels, des concepts longtemps enserrés dans le
carcan êtroit de l'êquilibre statique et partiel.
Le but principal de leur recherche est de dêter-
miner l'êvolution génêrale de l'économie en dêpassant
l'aspect micro-analytique pour atteindre un niveau global
à partir de l'investissement d'une firme ou d'une indus-
trie dynamique qui se diffuse aux firmes ou aux industries§
situêcs en amont et/ou en ~val.
Sans nous êtendre sur le rôle propagateur de
l'investissement dans une ~conomie développée ou en voie
de l'être, reconnaissons que ceux qui ont cherché ~ en
déceler les incidences bénéfiques sur l'économie considé-
rée, nous apportent des éléments qui nous semblent avoir
étê trop nêgligés dans le passé.
Partant des disparités constatées dans l'évolu-
tion des différentes branches d'activitê, ils actualisent
un principe de développement antérieurement formulê par
SMITH et RICARDO qui, abordant respectivement le rôle de
la dimension du marché et la spécialisation internationa-
le, devaient ouvrir la voie à deux formes de croissance
la croissance équilibrée (ou balancée),c'est-à-dire la
croissance simultanêe d'un grand nombre de secteurs inter-
dépendants verticalement et horizontalement ~ la crois-
sance déséquilibrêe (concentrée ou non balancée) définie
comme une expansion limitée à quelques secteurs moteurs
qui entra1neraient les autres.
Parmi les tenants de ces arguments, on trouve
A.YOUNG qui, en 1928, a montrê que les interdépendances
des firmes dans la croissance sortent du champ de l'ana-
lyse classique pour celui couvrant l'ensemble des activi-

- 52 -
tés économiques qui sent liées les Ul es aux autres et où
les économies externes se manifestent comme facteur es-
sentiel de croissance. L'investissement qui procure un
gain à une unité économique peut, par le pro~rès et l'ef-
ficacité de celle-ci mais aussi par les économies exter-
nes suscitées, devenir un avantage pour la collectivité.
Les économies d'échelle ont par conséquent une
fonction primordiale à jouer dans la croissance générale
à condition qutune politique d'industrialisation initia-
lement menée à partir d'industries progressives et entraî-
nantes soit mise en oeuvre.
C'est encore la croissance équilibrée que re-
tient Ragnar NURSKE qui pense qu'il faut développer plu-
sieurs secteurs à la fois pour créer la demande favorable
à une croissance; chacun contribue, par les salaires
qu'il distribue et par ses autres dépenses, à fournir un
débouché à tous les autre~. Il est évident que la crois-
sance ne saurait être l'émanation d'une idéologie incarnée
dans une structure donnée sinon un phénomène complexe
qu'accompagne une diversificqtion des activités dont les
éléments technico-économiques sont mis ensemble en mouve-
ment pour une production plus grande. Des mécanismes de
transmission inhérents au système relient les diverses
unités économiques individuelles pour asseoir l'expansion
générale. De la sorte, une transmission verticale des éco-
nomies externes que Marcus FLEMING oppose à la transmis-
sion horizontale se réalise lorsque la production d'unf
industrie s'accroît grâce au progrès technique et induit
une augmentation du produit des autres industries. C'est
ce type de propagation dont découle la croissance déséqui-
librée que FLEMING suggère en préconisant d'investir dans
une industrie de biens de consommation de grande dimension.
Quant à la transmission horizontale à laquelle
A.YOUNG avait déjà souscrit, elle se traduit par un ac-

- 53 -
croissement, à coûts décroissants, de la production de la
firme, ce qui avanta~e celles qui lui sont liées techni-
quement comme celles qui bénéficieront du surcroît de re-
venu qu'elle engendre. En effet, une diminution des coûts,
donc des prix, donne un effet revenu, c'est-à-dire une
augmentation du revenu réel des consommateurs dont la de-
mande incite les industries de biens de consommation à
accroître leur offre. L'effet multiplicateur créé par
l'investissement supplémentaire est de nature à favoriser
ou à accentuer l'industrialisation, surtout dans les pays
sous-développés.
La principale observation à la propagation hori-
zontale est qu'une insuffisance d'un ou plusieurs facteurs
de production provoque un goulot d'étranglement qui réduit
les effets positifs.
Il est à remarquer que toutes ces liaisons di-
rectes ou indirectes, sources d'économies pour les firmes
ou groupes, se réfèrent aux complémentarités techniques
ou d'approvisionnement des unités de production.
Comme beaucoup mais avec des vues nuancées, ce
sont les nécessités d'une reconstruction après guerre qui
ont amené Rosenstein-Rodan à mettre au-devant l'industria-
lisation. Pour ce faire, un ensemble coordonné d'investis-
sements développerait le pays par la sécrétion d'économies
externes bénéfiques qui ne sauraient porter des fruits
dans le cas d'investissement isolé. La coordination des
investissements abaisse les coûts privés en procurant
spontanément d'importants marchés aux investisseurs et
tend à équilibrer coûts privés et coûts sociaux, tandis
que les investissements solitaires se diluent rapidement
dans l'incertitude d'un débouché. L'indivisibilité et la
complémentarité renforcent cet effort de coordination que
justifie une productivité plus grande. C'est encore la
position de T.SCITOVSKY lorsqu'il s'appuie sur les indiv~

- 54 -
sibilités et, A.O.HIRSGHMANN sur les ~omplémentarités,
pour insister sur les liaisons entre producteurs. Selon
SCITOVSKY, la production d'une firme dépend non seulement
de ses inputs mais aussi de l'activité d'autres entrepri-
ses.
Les économies d'échelle, en l'occurrence celles
externes obtenues par le biais des interdépendances, re-
çoivent une acception plus large que la définition origi-
nelle donnée par MARSHALL. L'élargissement du concept
d'économies externes dévalorise son action en même temps
qu'il perd sa consistance dans l'économie qu'il est sensé
stimuler. A la limite, tout est économies externes si
l'on en croit SCITOVSKY.
§ 2 - L'insuffisance du renouveau
En dépit de leur prise de conscience de l'acti-
vité individuelle incapable d'aiguillonner la croissance
et le développement progressif que seule l'initiative d'un
groupe ou d'un ensemble structuré autorise, les auteurs
qui se sont penchés sur le processus évolutif de l'écono-
mie de différents pays ont malheureusement fait preuve
d'un manque de réalisme et de rigueur scientifique. Par-
tant de l'interdépendance des firmes pour spécifier la
croissance, ils mettaient en relief, par conviction, les
relations entre prix et celles entre quantités d'indus-
tries complémentaires. Cette complémentarité mécanique est
une hypothèse restrictive de la théorie normative plutôt
que l'émanation d'une théorie explicative propre à pro-
longer le modèle concurrentiel.
Les rapports inter-firmes qui se nouent au sein
de l'industrie par l'intermédiaire des prix, familiers aux
théoriciens de l'équilibre du marché, sont la conséquence
d'économies internes; celles-ci se traduisent par des
baisses de coûts de certaines firmes, baisses qui se

- 55 -
répercutent sur les prix et se propa~~nt aux autres entre-
prises sous forme d'économies externes. Il y a là une sor-
te de complicité pour parvenir à un équilibre qui, tout
en menant à la recherche d'une maximisation du profit des
entreprises et à la satisfaction des consommateurs, s'ap-
parente au schéma d'équilibre parétien dans lequel des
firmes au rôle unitaire, donc indifférenciées, adaptent
leur production à la dem~nde.
Le paradoxe de cette règle réside non point dans
le fonctionnement des mécanismes du marché, mais dans le
principe des décisions des agents, c'est-à-dire le méca-
nisme même des prix. Une politique d'investissement faite
par une unité (entreprise ou industrie) préconçue, sans
personnalité, ne peut donner les résultats tangibles
escomptés ; il faut une organisation concrète dont la
réalité multidimensionnelle confère une structure hiérar-
chisée et une expérience susceptibles d'étendre davantage
son pouvoir d'action.
Le jeu réel des économies d'échelle s'effectue
dans un ensemble où interviennent des macro-unités. L'éeo-
nomie se trouve alors structurée par ces nouvelles unités
de production favorables à l'existence de monopole, à la
dépendance à l'égard de celles de ces industries qui sont
motrices. Une imperfection du marché s'amorce pour l'em-
porter sur le marché parfaitement concurrentiel.
L'hypothèse de séparabilité renforce l'interdé-
pendance dans cet environnement imparfait. La séparabilité
implique que le coût marginal de chaque firme soit donné
en fonction de son propre output déterminé par l'égalisa-
tion du prix et du coût marginal. L'effet externe qui se
dégage agit sur la fonction de coût d'une façon additive
et non multiplicative comme dans le cas de la non-s~para­
bilité.

- 56 -
L'étendue des recherches s~~ le développemeDt
économique a abouti chez certains à l'utilisation de ta-
bleaux d'échange inter-industriel. Ces derniers voient
toutefois leur portée limitée puisqu'ils montrent unique-
ment les liaisons quantitatives alors que la connaissance
de l'agrégation des décisions d'investissements présentent
autant d'intérêt.
L'inter-relation, avancée par la théorie du
développement, assure l'élargissement du marché en même
temps qu'elle prive toute autonomie d'action B.UX centres
de décision et force ceux-ci à l'expansion. Or l'inter-
dépe~dance qui ne passe pas par l'ajustement des décisions
individuelles prive de sa substance toute complémentarité
ou toute substitution. La théorie de l'investissement,
processus dynamique, tient compte de facteurs aussi impor-
tants que la profitabilité~ les moyens de financement~ le
taux d'intérêt. La firme doit établir un programme d'in-
vestissements relatif ~ divers produits et étalé dans le
temps. Ce plan permet de comparer les rendements marginaux
pour pouvoir évaluer celui de l'investissement finalement
choisi.
La croissance, moyen du développement, est indis-
pensable à celui-ci mais ne lui est pas identique. Alors
que la croissance est quantitative, matérielle, le dévelop-
pement qui implique des actions en profondeur, est quali-
tatif. Ce sont de ces problèmes que les théoriciens du
développement semblent ne pas trop se soucier.

- 57 -
CHAPITRE II
FORMALISATION NOUVELLE DES CONCEPTS DANS LE CADRE DE LA
THEORIE DE LA PRODUCTION
La tradition économique léguée par les classiques
et néo-classiques établissait une fonction de production
stable. Rejetant tout facteur de déséquilibre pour ne
retenir que les facteurs d'équilibre, le modèle trouvait
sa justification dans la recherche d'une situation d'é-
quilibre et de stabilité. Le cadre de libre concurrence
qu'il définit et qui décrivait naguère le monde tel qu'il
était, cessa vite de se préoccuper de retracer la réalité
pour bâtir une société économique telle qu'elle devrait
être. Cette nouvelle mission du système lui confère un
rôle régulateur assurant un environnement social et politique
approprié à une croissance s'entretenant d'elle-même. Le
pnradoxe est le caractère éminemment théorique du modèle
qui ne laisse aucune place à l'observation réelle, c'est-
à-dire aux facteurs générateurs de la croissance des f~s
comme aux motivations de leurs dirigeants. Ces éléments
(évolution de la technique, des ressources naturelles, du
travail, du capital et des préférences) favorables au dé-
veloppement industriel, sont considérés comme des variables
exogènes qui ne doivent en ~ucun moment intervenir dans
le modèle. Or, en fait, l'expansion durable de la firme
appelle des techniques de plus en plus élaborées exigeant
modification des procédés de fabrication chaque fois que
l'on adopte une technique meilleure. La fonction de pro-
duction ne peut plus rester figée, elle subit l'effet du
progrès technique et du temps. Analyser les concepts d'é-
conomies d'échelle et de croissance dans le cadre de la
théorie de la production revient à rendre compte des ren-
dements d'échelle à partir de la combinaison des facteurs.
Curieusement l'instrument rrathématique fréquerrment utilisé dans
ce but, est la fonction de production de COBB-DOUGLAS qui
représente la production globale y en fonction du capital
Ket de la main-d'oeu~re L :

- 58 -
('\\ et \\~' sont respectivement les élasticités de la produc-
tion par rapport au capital et au travail et k un coeffi-
cient de dimension qui correspond au passage des unités
de grandeur du capital ou du travail aux unités du pro-
duit). Ce type de fonction est appliqué à la théorie de
la firme par les néo-classiques à cause de sa cohérence
avec le postulat Walrasien de l'absence de profit, autre-
ment dit l'équilibre en concurrence parfaite du niveau
de production et la répartition du produit. La fonction
repose sur un certain nombre d'hypothèses parmi lesquel-
les la linéarité et l'homogénéité décrivent les variations
de la production entraînées par le changement de dimension
de la firme avec des productivités marginales constantes
et des rendements d'échelle également constants.
Ces hypothèses simplificatrices donnent à la
fonction une portée économique limitée pour l'entreprise
confrontée aux réalités quotidiennes des unités de produc-
tion qui évoluent dans un univers où chacune cherche à
survivre avant de penser à s'étendre en réalisant d'autres
objectifs.
Le princip~ de non-homogénéité de la fonction
est certainement plus réaliste que celui d'homogénéité
car l'hétérog~té.de8facteurs,fait naturel, signifie
que ces derniers se modifient différemment dans un sens
plutôt favorable à une intensité capitalistique pour
une production qui varie avec la taille de la firme.
L'intensité de capital exprimée par le rapport KIL carac-
térise une seule technique engendrant une seule producti-

- 59 -
vité, ce qui est une façon d'admettr0 l'homogénéité du
travail. Cette position des théories néo-classique et
contemporaine n'a pas manqué de susciter des vues oppo-
sées chez les marxistes (M. DORB, ch. BETTELHEIM) et
l'école de l'ISEA (F. PERROU~ ~.~DULY, De BERNIS) qui
avancent au contraire l'existence de plusieurs techniques
po~r chaque intensité de capital, favorisant ainsi un
choix sur celle qui permet d'obtenir la productivité maxi-
male VIL mesure du progrès.
De plus en plus, les secteurs de l'économie
se tournent vers ce marché intermédiaire entre la concur-
rence parfaite et le monopole qu'es~ l'oligopole. Ce type
de marché qui domine actuellement, réunit dans chaque
branche un petit nombre d'entreprises souvent de grande
taille, présentes dans plusieurs pays et fabriquant une
multitude de produits. L'interdépendance conjoncturelle
entre elles fait que toute politique, en particulier une
modification de prix, menée par l'une d'elles pour ac-
croître sa part de marché, rencontre la réaction des au-
tres. Le prix, variable traditionnelle de maximisation
du profit, ne devient pas sur le marché oligopolistique
l'élément principal utilisé pour augmenter sa demande
dans le secteur, mais une arme parmi d'autres plus sou-
ples comme la publicit~, l'implantation commerciale, la
différenciation des produits existants, la fabrication de
produits nouveaux. L'idée de Chamberlin de concurrence
hors prix (non price competition) trouve ici son appli-
cation. Il faut ajouter que cet ensemble de variables,
y compris le prix, détermine finalement l'organisation
et l'évolution de l'oligopole, donc du secteur.

- 60 -
Section l
FORMULATION DES RELATIONS CROISSANCE-ECONOMIES D'ECHELLE
DANS L'ENTREPRISE
Par sa structure complexe, sa méthode de direc-
tion décentralisée, l'entreprise moderne permet à ses
dir.igeants de mettre en vue leur connaissance en matière
de gestion, justifiant ainsi la place qu'ils occupent au
sein de l'entreprise. Toutefois, il ne suffit pas d'être
à la tête d'une organisation industrielle dans le système
économique actuel, encore faut-il pouvoir s'y maintenir
en surmontant les conflits aigus entre les diverses caté-
gories d'agents liés à l'entreprise. Ces tensions trou-
vent leurs origines dans les intérêts, les préférences
qui ne sont pas les mêmes pour tous les employés. Le
groupe dirigeant devra alors localiser les motifs de di-
vergence qu'il fait fondre dans la préservation de la vie
de l'organisation par une continuité dans l'activité tout
en garantissant un taux de croissanc~ sous contrainte d'un
minimum de profit. La réalisation des autres objectifs,
fonction de l'objectif taux de croissance, tend à conser-
ver ou à consolider la poursuite de celui-ci.
§ 1 - Les rendements croissants
Les rendements croissants qui constituent un élé-
ment des rendements d'échelle, sont ceux qui intéressent
notre sujet puisqu'en rapport avec la croissance et la di-
minution des coûts. Ils sont dits croissants parce que
l'augmentation de la production est plus que proportionnel-
le à l'a.ugmentation des quantités de facteurs employés par
la firme. Ceci mérite d'être complété par la question de
savoir quelle est la limite des économies (ou des déséco-
nomies) dégagées et sans cesse croissantes permettant de
déterminer un équilibre.

- 61 -
Nombre d'au L;eurs ont mené "es études sur IL
croissance de l'entreprise; ils aboutissent en définitive
à plusieurs types d'économies, bases de5rendements crois-
sants que connaît l'unité de production qui, théoriquemen~
parvient à un équilibre .
L'expression ,., "ünomies de grande échelle"
(economies of large scale) fut lancée par J.S.BAIN pour
traduire la dimension de l'établisse~ent ou de l'entreprise
qui procure des baisses de coûts relevant de la technologie
utilisée ou d'une gestion efficace. Les travaux de Bain con-
tribueront par suite à fournir des précisions supplémentai-
res sur l'origine des économies réalisées par les unités
de production, voire sur leur croissance. En augmentant
de taille, celles-ci parviennent à accroître leur output
pour arriver R une production de masse qui permet la spéci-
lisation de l'équipement comme de la main-d'oeuvre et la
division du travail si chère à A. SMITH . Une production
élevée, grâce à une mise en place de technique de produc-
tion de masse, réduit, d'une manière appréciab'le, le coût
unitaire.
L'étude menée par Bain dans vingt industries
manufactur:!.€res
am6ricaines fait la distinction entre éta-
blissement et firme à partir desquels se dégagent des éco-
nomies substantielles. Ces avantages se subdivisent en éco-
cornies technologiques et en économies de gestion internes
aux centres de production .
Ce type d'économies apparaît au niveau de l'éta-
blissement ou de l'usine lorsque la taille minimale opti-
male est atteinte, c'est-à-dire la dimension la plus petite

- 62 -
qui permèt de profiter des coûts minimaux de production.
L'entreprise ou la firme formée par plusieurs établisse-
ments peut certes provoquer pareilles économies, mais
c'est surtout dans l~établissement, centre de production
spécialisé, que les effets techniques se manifestent réel-
lement sous forme d'économies factorielles. En effet, pour
juger l'efficacité d'un équipement, l'établissement qui
n'utilise qu'une seule technique pour fabriquer une seule
catégorie de bien convient mieux que la firme multiproduits,
saisie en bloc, dont les usines sont parfois interdépen-
dantes en même temps qu'elles ont des tailles et des fonc-
tions différentes.
Comme pour compenser le fait àe ne pouvoir fournir
des réductions de coûts int~tcs à la technique adoptée, la
grande entreprise avec ses usines implantées parfois dans
des régions très éloignées les unes les autres et différen-
tes de nature et/ou dE système politi~ue et économiqu~, se
montre plus apte à susciter des économies organisationnelles.
Ceci semble surprenant à premipre vue lorsqu'il s'agit d'un
"puzzle l' pareil constitué d'éléments humains et matériels.
Ce ne serait qu'une surprise feinte et non fondée car les
comportements observés qui caractérisent ce genre de firme
comme une organisation vivante, montrent bien l'existence
dlavantages dûs à une gestion rationnelle.
C'est à partir de sa stratégie de croissance que
la grande firme atteint une di~ension telle qu'une évolu-
tion parallèle de ses structures et de sa direction devient
nécessaire. La politique couramment pratiquée pour satis-
faire cette exigence consiste alors à diversifier la pro-
duction et à décentraliser la gestion. Une telle procédure
aboutit à déléguer une partie de la direction aux unités
de production qui jouissent ainsi d'une autonomie dans la

- 63 -
gestion que justifie :3 caractère di\\lsionnel de la s~ruc­
ture d'ensemble. Cette division géographique ou par pro-
duit décharee fortement la direction générale qui voit ses
fonctions réduitos à l'essentiel pour ne plus s'embarras-
ser de tâches secondaires. C'est pourquoi elle se consacre
aux fonctions spécifiques de la direction générale, c!est-
à-dire fixer les objectifs de l'entreprise, coordonner ses
activités diversifiées, contrôler les résultats de chaque
unité autonome (1) . Diri~er un ensemble d'activités ne si-
gnifie donc pas exercer ces dites activités . Il peut arri-
ver toutefois qu!une des fonctions d'achat, de vente, de
production, de recherche, de finance, de personnel, etc ...
qui est, en f~it, du ressort de l'unité autonome soit cen-
tralisée, mais cela uniquement dans le but de profiter des
avantages de la grande dimension.C~-i se justifie d'autant
plus que l'organisation est planifiée pour mieux exploiter
les possibilités d'économies liées à un environnement aussi
composite, vaste et instable.
Le processus de modification de l'échelle d'ac-
tivité dans lequel se lance la firme qui recherche la crois-
-,
sance recèle des économies de coD~s _ Les gains créés ont
pour origine selon Mrs. E.T. PtN~OS~ des ressources produc-
tives indivisibles et hétérogènes, inutilisées jusqu'ici,
qui n'attendaient qu'une occasion pour servir une expan-
sion qui se ferait alors sans nouvelles dépenses. Les pro-
duits fabriqués ~ llaide de ces facteurs sont susceptibles
d'être vendus à un prix inférieur à celui des concurrents,
(1) H. FAYOL énonce comme suit les cinq tâches de la direc-
tion : prévoir, organiser, coordonner, commander, contrôler.

- 64 -
toutes choses égales par ailleurs, accroissant ainsi la
part de marché de la firme. Ce type de réduction de
coûts, avantageux pour le consommar.eur comme pour le pro-
ducteur, est dénommé par E.T.
PENROSE "~~onomies de crois-
sance". Ce sont des économies internes qui, comme celles-
ci, sont le lot d'entreprises dynamiques avec en plus,
pour certaines d'entre elles comme le souligne Y. MORVAN,
cette particularité d'être réservées aux entreprises à
taux de croissance élevé.
Les économies internes dont il est question ici
ont été, comme les économies externes, étudiées infra dans
leur généralité. Il est logique dans ce cas de les présen-
ter à nouveau avec plus de détails dans cette section consa-
crée aux rendements croissants qu'elles favorisent et qui
sont liés à la croissance de la firme. Ces économies inter-
nes, nous l'avons dit, dépendent des ressources des entre-
prises, de leur organ~sation et de l'efficacité de leur
direction. Pour plus de clarté, il nous faut montrer l'es-
sence de ces ressources. Elle semble émaner d'abord d'en-
treprises possédant des capitaux importants et cherchant
à se prémunir d'éventuelles fluctuations de prix en stoc-
kant des matières premières ou des marchandises pour leur
approvisionnement. Le stockage ayant un coût élevé, seules
les entreprises qui ont une surface financière très grande
peuvent se le permettre. Ensuite, l'émergence du progrès
technique est de nature à s'accompagner d'une augmentation
réelle du capital fixe ainsi que d'une meilleure combinai-
son des facteurs productifs et de leur orientation,c'est-à
dire d'une synergie. A ceci s'adjoignent une décomposition
des tâches et une spécialisation du travail. Les économies
internes peuvent encore survenir du fait de la fabrication
et de la vente de sous-produits en grande série. La pro-
duction de masse permettant une répartition des frais gé-

- 65 -
néraux et des coûts fixes sur une phs grande quanti té,
abaisse le coût de production unitaire.
Tels sont les avantages que se crée la firme
qui, de surcroît, bénéficie, du fait de l'importance de
sa production, de tarifs de transport favorables en plus
des gains obtenus dans l'acquisition de produits intermé-
diaires.
Ces acquis incitent d'autres entreprises à venir
s'implanter dans les endroits où ils existent pour pouvoir
en bénéficier, créant en même temps une concentration des
activités économiques. Nous quittons alors le domaine des
économies internes d'échelle pour celui des économies ex-
ternes.
Les économies externes ont été évoquées par
A. rffiRSHALL, ensuite par PIGOU, avant de connaître depuis
plus de vingt
ans un regain de développement. C'est,
croyons nous, SCITOVSKY qui a apporté les précisions con-
temporaines
les plus marquantes en reprenant les idées
de J. VINER et de J.E. MEADE. Les travaux de MISHAN, COASE,
BUCHMTM~, STUBBLEBINE et de bien d'autres ont considéra-
blement participé à une meilleure compréhension du concept.
En suivant, simultanément la pensée de VINER et
de T. SCITOVSKY, on distingue les économies externes tech-
niques et les économies externes pécuniaires. Pour ce qui
est des économies externes techniques nous dirons qu'elles
existent si le produit YA d'unp. firme A dépend non seule-
ment des facteurs de production qu'elle utilise mais éga-
lement du produit YB et de l'utilisation de facteurs d'une
firme B. Cette définition est celle donnée par MEADE. Ce-
pendant la firme étant confrontée aussi à un vecteur prix,

- 66 -
il convient d'être plus precls dans notre définition en
donnant la formulation heureuse de G. BORDES à savoir
qu'"une entreprise A, de vecteur de production Y , confron-
A
tée à un vecteur prix PA' reçoit des économies externes
technologiques d'une entreprise B, de vecteur de produc-
tion YB' si, et seulement si, il existe des composantes
de YB dont certaines variations entraînent, même en l'ab-
sence de toute variation de PA' la variation de au moins
une composante de YA'I .
La conclusion à tirer de l'existence des écono-
mies externes techniques est qu'elles traduisent l'inter-
dépendance , en dehors des règles normales du jeu économi-
que, d'entreprises dont certaines consomment ou produisent
des biens à prix nul ou pseudo-libres; c'est une confirma-
tion de la complémentarité de certaines activités. Parall~­
lement, on dit qu'il y a économies externes pécuniaires,
toujours d'après G. BORDES, lorsqu'Uune entreprise A, de
vecteur de production YA, confrontée au vecteur prix PA'
reçoit des économies ~ ~~~~ d'une entreprise
B, de vecteur de production YB' si et seulement si, même
en l'absence de toute variation de Y , une certaine varia-
A
tion de certaines composantes de YB entraîne une variation
de certaines composantes de PA" .
Ces économies externes pécunlalres résultent
donc de l'incidence des modifications de l'offre ou de la
demande d'une entreprise sur l'offre 0U la demande d'une
autre entreprise dans un
environnement où règne l'incer-
titude et par conséquent qui ne reflète aucunement le mar-
ché de concurrence parfaite .
Les deux types d'économies externes que nous
venons de voir ne s'excluent pas l'ur.
l'autre comme nous
pouvons le constater, ne serait-ce que parce qu' 11e
réunis-
sent chacun
d'un côté des entreprises passives demandeurs
et de l'autre un nombre réduit d'entreprises actives

- 67 -
offreurs, évoluant toutes en dehors de tout marché.
§ 2 - La croissance de l'entreprise en structure oligo-
polistique
Les économistes ont toujours développé leur théo-
rie en s~ situant dans un environnement plus ou moins par-
fait. Or ce que l'on observe depuis un certain nombre d'an-
nées c'est une totale imperfection de l'environnement éco-
nomique, réseau de relations humaines, culturelles, techni-
ques, d'échanges et d'information, qu'incarne le marché
oligopolistique. L'oligopole est cette forme de marché qui
comprend un nombre si réduit de producteurs que leur inter-
dépendance manifeste se perçoit dans la fixation des prix
et de leurs offres, dans la publicité, l'investissement,
le financement, etc ... Ce petit nombre, difficile à chif-
frer, semble s'identifier à la grande taille.
Les modèles élaborés présentent l'oligopole sous
différents aspects, sans vouloir dire par là qu'ils cher-
chent, chacun à sa manière, à montrer réellement l'évolu-
tion des faits. Il suffit, pour s'en rendre compte, de je-
ter un regard sur les principaux développements théoriques
et d'essayer d'y trouver une interdépendance de fait et
d'anticipation des décisions des firmes. Traditionnelle-
ment, les économistes considéraient le prix comme seul
paramètre d'action. Avec l'av~nement de la théorie moderne
de l'entreprise, ils intègrent non seulement le prix et
d'autres variables d'action économiques (différenciation,
publicité, implantation commerciale, ... ), mais prêtent
également une attention de plus en plus grande aux éléments
sociologiques et psychologiques.
Outre les raisonnements sur la dépendance mutuel-
le et ceux de type conjectural, l'interdépendance des fir-
mes et leurs prévisions reposent aussi sur la théorie des

- 68 -
jeux et la courbe de demande coudée pour une meilleure
compréhension de la structure du marché et du comporte-
ment concurrentiel de la firme.
Il Y a plus d'un si~cle que A.COURNOT (1) a
élaboré une théorie de l'oligopole en prenant le cas par-
ticulier du duopole homogène symétrique. Chaque vendeur
estime que l'offre de son concurrent est donnée et cons-
tante, ce qui signifie que les variations conjecturales
ou coefficients de réaction, variations des offres du con-
current lorsque l'on modifie son propre offre, sont
égaux à zéro :
= 0 et,
z: 0
dX
dX
2
1
.: xl et x2 étant les quanti tés produites et offertes par
les firmes 1 et 2). A l'inverse de la théorie de COURNOT,
(2)
E.H.CHAMBERLIN
abordp. le cas d'un duopole hétérogène
où les producteurs utilisent leurs prix comme variable
d'action} sans qu'il soit nécessaire d'avoir un prix uni-
que sur le marché .
Il suppose que les prix Pi et P2 des firmes 1
et 2 donnent des coefficients de réaction égale à l'uni-

---= 1 et,
---= 1
(1) A.COURNOT, "Recherches sur les principes mathémati-
ques de la théorie des richesses", Paris, 1838.
(2) E.H.CHA~ffiERLIN, i T~e theory of mpnopolistic compe-
tition"} London, 1948

- 69 -
Toute modirication du prix du producteur 1 est une réac-
tion à la modification du prix du producteur 2 et inverse-
ment. D'après CHA~ffiERLIN, c'est une autre hypothèse, ces
modifications seraient égales, donc leur rapport est équi-
valent à un .
Cependant, c'est après la fin de la deuxième
guerre mondiale que prit naissance une analyse plus origi-
nale de l'olieopole suivant trois directions:
- Celle tracée par FELLNER (1) qui suppose que les duopo-
leurs réalisent le profit maximum collectif, c'est-à-dire
celui du secteur, qu'ils se partagent ensuite. La difficul-
té repose non seulement sur les modalités d'un partage équi-
table, mais aussi et surtout sur la réalité de l'interdépen-
dance des entreprises qui forment le secte!.lr.
- La seconde direction est celle de la théorie des jeux
conçue par Von Neumann et O. MORGENSTERN (2) , d~veloppée et
illustrée ensuite
par
beaucoup d'autres dont M. SHUBIK (3~
Son application à l'oligopole est difficile sinon impossi-
ble du fait de la structure et des hypothèses sur le com-
portement de celui-ci. Si l'on voulait effectivement inté-
grp.r la théorie, on rencontrerait un nombre trop élevé de
joueurS , des sommes non nulles, des variables stratégiques
trop nombreuses, des règles du jeu diverses et complexes.
(1) W.FELLNER, "Competition among the few", New-York,
Knopf, 1949
(2) Von Neumann et O. ~mRGENSTERN,
"Theory of games and
Economie behavior", 2eme édition,Princeton, 1947.
(3) M. SHUBIK, "Strategy and market structure", John
Wileys and Sons, New-York,
~959, traduit en français chez
Dunod, Paris, 1964.

- 70 -
Dans le cas le plus simple de deux joueurs,
un jeu est dit ~. "somme nulle f' si le montant du gain
d'un joueur est égal au montant de la perte de l'autre;
autrement dit :
G
(i,j) = - G
(i,j)
1
2
G1 (i,j) >0 , G2(i,j)0
représentent des gains pour
les joueurs 1 et 2 lorsqu'ils choisissent les stratégies
i et j
; G1 (i,j) ZO , G2(i,j) <:'0
figurent des pertes.
Pour le joueur 1, i est une variable sur laquelle il peut
agir et j un paramètre. De même, le joueur 2 a comme va-
riable stratégique j et comme paramètre i
.
La constatation que l'on est amenée à faire sur
ce genre de jeu est qu'il montre clairement un conflit
d'intérêts entre les deux joueurs. La situation économi-
que constatée est plus nuancée et n'est presque jamais
saisie à travers un jeu à somme nulle.
Pour être plus proche de la réalité, il nous
faut raisonner A contrario.
Un "jeu A somme non nulle" ou "jeu à somme va-
riable" est celui où la somme des gains n'est pas égale
à zéro, c'est-à-dire dans lequel les gains ne sont pas
égaux aux pertes.
Sans reprendre dans le détail la distinction
faite par V.NEUMANN et O.f.1üRGENSTERN entre jeu "essentiel"
et jeu "inessentiel", nous pouvons dire qu'il va de l'in-
térêt général que tout jeu entre différentes parties soit
essentiel.
Un jeu est dit "essentiel" si le résultat obtenu
par tous les joueurs agissant en accord est plus grand

-
71 -
que la somme des résultats qu'ils peuvent obtenir par
des actions individuelles. La coopération ou la coalition
serait par conséquent plus avantageux que l'agissement
isolé.
Appelons G(1) et G(2) les résultats que les
joueurs 1 et 2 obtiennent par eux-mêmes avec leurs pro-
pres ressources sans coopération, et G(1,2) le gain qu'ils
peuvent se garantir par coalition ; les conditions de
l'essentialité s'expriment alors ainsi
G(1,2»G(1) + G(2)
La dernière voie est celle de la ca4rçe brisée
de la demande" ou l'courbe de demande coudée,,(l). La théo-
rie de la courbe coudée affecte à une firme du groupe cons-
tituant l'oligopole un comportement découlant d'une pro-
cédure conjecturale (le terme est de Ragnar Frisch).Par
cette procédure, la firme anticipe les modifications des
paramètres des concurrentes en fonction des modifications
de ses propres paramètres. L'action conjecturale se trou-
ve donc à la base de la théorie de la courbe coudée de de-
mande dont le principe fondamental se situe au niveau des
anticipations d'une entreprise du groupe et aux réactions
des concurrentes. En effet l'~ligopole prévoit une réac-
tion différente de la part de ses rivaux, selon qu'il dimi-
nue ou élève son prix.
(1) Les bases de la théorie de la courbe de demande comée ont été
jetées par R.L.HAlL et C.J.HITŒI, "Pricl" 'Iheory aIle'! Business Behaviar"
Oxford Economic
Papers Mai 1939; Paul M. swrnzy, "Demand under Condi-
tions of oligopoly", Journal of Political Econonw, Août 1939. D'autres
auteurs eurent ensuite à l'utiliser dans leur théorie des prix d' oli-
pogale, on peut citer parmi eux G. J .STIGlER "llie kinky oligopoly derœnd
curves and rigid prices ii , Journal of Political Economy, octobre 1947:
C.EFFROYlVSON, "The kinky Oligopoly Curve reconsidered", Quaterq jOj.1I'-
na! of Economies, 1955

- 12
L'entreprise, en bais'sant son prix par rapport
au prix initial du march~, s'attend à un accroissement de
ses ventes. Cette réduction de prix est aussitôt suivie
p~ les rivales dans la même proportion, car elles imagi-
nent que malgré la perte de bénéfice dûe il la baisse de
,
,
prix, elles perdraient leur part de marché 'si elles ne
suivaient pas. Inversement, toute baisse des ventes r~sul­
tant 'd'une augmentation de prix sera torte puisque les
concurren~~s ne suivront certainement pas cette hausse
mais maintiendront leurs prix au même niveau, car elles
pensent q'u'un,prix plus élevé conduit à un niveau de ven-
tes trop faible.
Comme le montre le graphique sur lequel la li-
gne trac~e en trait" plein représente la courbe de demande
coud~e des ventes en fonction des prix ou courbe de recet-
te'moyenne, au prix initial stable P les entreprises ont
une po1~tique de maximisation conjointe de leur profit
avec le minimum de risques.
Si une firme établit un prix plus ~levé que le
prix P, la partie supérieure de la courbe de demande, cou-
dée Di D2 devient tr~s élastique parce qu'il n'y a qu'une

- 73 -
seule firme qui augmente son prix. P2r contre, si elle
abaisse son prix, les firmes concurrentes agiront de mê-
me et, la partie infêrieure de la courbe de demande D D
1 2
sera inélastique.
En termes marginaux, la théorie de la courbe de
demande coudée a pour conséquence un saut ou écart d'in-
détermination dans la courbe de recette marginale, écart
dont l'importance dépend de la différence d'élasticité
entre les deux segments de la courbe de .demande coudée
D D
et qui se trouve au-dessous du point C (coude) puis-
1 2
qu'à ce point la courbe de demande n'a pas une élasticité
bien définie. L'élasticité fait un saut au point où la
courbe de demande fait un coude. C'est cette discontinui-
té, ce saut dans la courbe de recette marginale, qui expli-
que la relative stabilité des prix en oligopole. En effet,
les recettes marginales étant positives et élevées lorsque
les prix sont supérieurs aux prix P et nêgatives et fai-
bles lorsqu'ils sont inférieurs à P, nous pouvons dire
qu'aussi longtemps que l'intersection des courbes de coût
marginal et de recette marginale se situe à l'intérieur
de l'écart d'indétermination, aucune variation du coût mar-
ginal ne modifiera le prix dréquilibre P ; d'où sa rigi-
dité.
Une telle politique de fixation de prix en oli-
gopole ne pourrait être prise que dans une conjoncture où
l'activité économique traverse une phase de récession. En
période d'expansion, il sera possible, avec la même courbe
légèrement retouchée, de faire une analyse du même ordre;
mais dans ces conditions, les réactions des concurrents
deviennent le contraire de ce qu'elles étaient en situa-
tion récessive.
L'utilisation de la courbe coudée en oligopole
s'inscrit dans le but de fournir à ce type de marché une
théorie des prix adéquate à sa structure et à son dévelop-

- 74 -
pement. ~~alheureusement la théorie re"3te entachée d' i~1suf­
fisances : lorsque F.PERROUX écrit que
"la place du cou-
de et la valeur de l'angle ne sont pas précisées~ cela re-
vient à dire que la théorie n'explique pas la façon dont
le niveau des prix est déterminé; les paramètres d'action
se réduisent au seul prix,laissant de côté les autres armes
de lutte ; le modèle est statique puisque l'évolution des
courbes de demande aux firmes n'y apparaît pas et, par
conséquent, celle des secteurs, alors que la grande parti-
cularité de l'oligopole est son dynamisme incessant pour
au moins le maintien de sa part de marché qui, à force de
diminuer, risque d'entraîner son élimination totale.
Finalement, l'analyse de l'oligopole par les mé-
thodes théoriques, de COUF~OT à la théorie des jeux et à
la courbe coudée, ne nous donne aucune explication sur sa
croissance encore moins sur celle de son secteur. Ces quel-
ques constatations incitent à se tourner, en dernier res-
sort, vers une étude plus réaliste de la croissance de
l'entreprise en structure oligopolistique en faisant fi
de toute analyse à priori fondée sur aes archétypes de
comportement qu'illustrent des modèles mathématiques.
L'évolution â long terme de la firme oligopolis-
tique sera, de ce fait,analysée à l'aide d'éléments spéci-
fiques. L'observateur averti est donc amené à dégager de
la dialectique environnement-entreprise les points nodaux~
entreliés, sur lesquels repose la stratégie de croissance
de la firme.
L'expérience montre d'ailleurs que parmi les
facteurs de croissance, la recherche scientifique et le
développement technique, l'innovation et la diversifica-
tion, la décentralisation et le développement de la direc-
tion, le pouvoir économique et la politique sociale forment
l'ossature du programme politique de la firme.

- 75 -
Les entreprises sont donc contraintes à utili-
ser à la place du prix, ces modes d'action qui semblent
plus pratiques et plus significatifs parce que non seule-
ment plus souples avec des résultats probants, mais aussi
parce que moins lourds de conséquences en cas d'échec.
C'est pourquoi depuis une époque relativement
récente, on assiste, avec l'avénement de la grande entre-
prise, à des transformations profondes dans les structures
industrielles sous l'impulsion de découvertes et d'innova-
tions. Les procédés de fabrication sont améliorés, les
produits nouveaux se multiplient, des produits de plus en
plus élaborés, de plus en plus sophistiqués inondent les
marchés, s'adaptent aux besoins des utilisateurs et des
consommateurs finals s'ils ne les manipulent pas ou les
créent purement et simplement .
Par conséquent, pour un grand nombre de firmes,
la recherche scientifique est devenue synonyme de progrès
technique et de croissance dans la mesure où les résultats
&ur lesquels elle débouche permetteùc d'atteindre l'un des
objectifs fondamentaux de la firme : amélioration ou main-
tien de la rentabilité, de la croissance, de la position
sur le marché, de la sécurité de l'actif, du prestige de
la firme, de la valeur boursière des actions, ...
L'activité de recherche
prend alors une impor-
tance telle pour l'entreprise qu'elle devient une de ses
principale~ fonctions et s'érige en département au même
titre que la production, la vente, l'achat, le finance-
ment, etc
L'effort dans ce sens serait surtout consenti
par les grandes firmes évoluant dans des secteurs comme
l'électronucléaire, l'industrie aéronautique, l'industrie
électronique, l'industrie chimique, l'industrie mécanique,
qui affectent un pourcentage appréciable et variable de

- 76 -
de leur chiffre d' aff8.ires à la recht'lrche, tandis qUI
la petite entreprise confond presque toujours son acti-
vité de recherche à ses autres activités. Même si les do-
maines dans lesquels s'effectue d'une manière significa-
tive la recherche-développement sont des secteurs de pointe
qui, de surcroît, exportent le plus, le service de recher-
che devra s'intégrer aux autres fonctions de la firme pour
éviter toute disharmonie et tout manque de coordination
dans la poursuite de ses objectifs.
Il n'y a rien d'étonnant que le montant investi
annuellement dans la recherche par la petite entreprise
soit trop modeste pour atteindre le seuil d'efficacité. Il
sierait mieux d'ailleurs de parler à propos de la petite
unité de production de recherche de spécialisation, contrai-
rement à la grande firme qui, elle, a la possibilité d'o-
rienter ses ressources en connaissance vers les applica-
tions les plus diver'ses. La recher'che-développement est un
investissement à long terme Qui n'est pas à la portée de
toutes les entreprises, ce qui signifie qu'elle n'est pas
mie activité normale. Elle exige des sommes énormes pour
un résultat
aléatoire qui montre la spécificité de sa ren-
tabilité. Les grandes entreprises à surface financière
large peuvent seu~3 supporter pareil risque à coût élevé,
ce qui explique ainsi la concentration de cette activité
de recherche à leur niveau. Sur le plan de la recherche
fondamentale, le risque couru est du reste souvent compen-
sé par le fait que ce type d'investissement a des chances
de déboucher sur un résultat autre que celui visé mais dif-
ficile sinon impossible à atteindre. Ceci ressort du carac-
tère polyvalent de la recherche.
Toutefois, avoir une aisance financière ne de-
vrait pas faire supporter par la firme la totalité des ris-
ques . Nous connaissons l'incertitude qui plane sur l'ac-
tivité de recherche, nous n'ignorons pas non plus le côté
national du problème qui ne concerne pas seulement la fir-

- 77 -
me mais aussi les pouvoirs publics qu~ se préoccupent du
niveau de la production nationale et prennent des déci-
sions économiques. C'est pourquoi dans certains pays in-
dustrialisés, l'Etat qui cherche à protéger l'économie
nationale à l'intérieur et à la rendre concurrentielle
sur le plan international, supporte une part importante
du financement de la recherche. Parmi ces pays, citons
en premier lieu la France où en 1975, l'Etat a pris en
charge la plus grosse part du financement de la recherche
avec 60 %, les Etats-Unis viennent juste derrière avec
59,2 % suivis du Royaume-Uni (52,3%), de la République fé-
dérale d'Allemagne (43,7 %-), de l'Italie(41,2%), des Pays-
Bas (40,9%) et du Japon (33,1%). La morale économique dont
. le soubassement est constitué par une industrie puissante
et compétitive repose sur l'abondance et l'indépendance.
Or qui dit abondance dit croissance, qui dit indépendance
dit progrès scientifique et technique. La recherche-déve-
loppement mène à ces buts et devient dès lors, par la
création et le renouvellement des ressources, l'un des dé-
terminants de l'expansion et du progrès.
La connaissance scientifique et technique ne
peut avoir de rendement que si la recherche appliquée et
le développement qui lui est associé prennent le relais
de la recherche fondamentale. En suivant cet.te séquence:
recherche fondamentale-recherche appliquée-dé-,eloppëtœnt ,
il est alors plus que juste de souligner que la recherche
doit être payante.
Sans pour autant verser dans des contradictions
à la suite de ce que nous avons dit plus haut concernant
l'aptitude à mener des opérations de recherche, disons
que, dans la mesure o~ la recherche industrielle est une
fonction primordiale de l'entreprise, une condition de sa
survie, la dimension n'est plus un élément déterminant et,
par cons~quent, toute firme)quelle que soit sa taille ,est ame-
née à faire des découvertes ou des améliorations sous peine

- 78 -
de disparaître.
L'innovation et la diversification, les deux fi-
nalités de la recherche, sont génératrices de changement
dans la productivité grâce au progrès technique mis en
oeuvre et dans la croissance économique grâce à une poly-
valence étendue dans la fabrication des produits. C'est
pourquoi elles (l'innovation et la diversification) for-
ment des ressources qui constituent une seconde stratégie
d'expansion ~ long terme apte à procurer des économies
tant internes qu'externes. Une définition simple mais
lumineuse de l'innovation nous est donnée par J.A. MORTON:
"innovation signifie amélioration des techniques anciennes
ou développement de nouvelles techniques industrielles,
de produits ou de services ... L'innovation technologique
est un processus qui tend à lier au mieux les résultats
d'une recherche à des buts industriels. C'est évidemment
un processus complexe mais bien structuré de recherches
spécialisées liées en vue d'un obj ectif commun •.• " (1)

Cet éclaircissement montre combien le concept
d'innovation déborde la seule préoccupation néo-classique
du marché d'un J. SCHUMPETER et s'insère dans un cadre or-
ganisationnel plus sienificatif qui traduit la problèma-
tique moderne. A partir de ce moment, l'innovation devient
une politique fondamentale, consciemment organisée et tou-
jours renouvelée en vue bien sûr d'alimenter en produits
nouveaux ou améliorés des marchés de plus en plus exigeants
ou pour conquérir de nouveaux marchés. L'innovation, aspect
important de la concurrence industrielle, est pour beaucoup
à l'origine des transformations profondes intervenues, de-
(1) Jack A. MORTON) "The innovation process", Bell Telephone
Magazine, automne 1966,

- 79
p~is l'après seconde guerre mondiale, au sein d'entrepri-
ses soucieuses d'assurer un avenir meilleur à leurs acti-
vités, c'est-à-dire de maintenir étroitement lé lien entre
l'augmentation de leur part de marché et la réduction de
leurs coûts de production.
Le changement par innovation se manifeste à l'in-
térieur de la firme par un progrès et une croissance quali-
tatifs que reflète sa position relative sur le marché.
L'exemple de firmœcomme Dupont de Nemours, Ford,
G~neral Motors, etc •.. ou même d'entreprises de moindre en-
vergti~e , confirme le fait que l'évolution des unités de pro-
duction dans une compétition réelle ne peut dépendre du ha-
sard, mais serait, au contraire, le produit de l'esprit
créateur de chercheurs qui tentent de matérialiser des be-
soins socio-économiques à partir de facteurs politiques,
~conomiques et techniques. Rien d'insolite dans ce cas que
des entreprises ramiliales hier aient subi une mutation-
qui les a fait passer aujourd'hui au rar.g de sociétés ano-
nymes multiproductrices et, que cert~ins produits farriqués
(produits pharmaceutiques, produits chimiques, produits
manufacturiers, ..• ) soient fortement liés au progrès tech-
nique qui accélère leur rythme de rotation en réduisant
leur phase de croissance .
Ce progrès que nous constatons actuellement se
présente sous forme de diversification de la production
qui est un type de stratégie au moyen duquel se réalise
la croissance ou parfois la survie de l'entreprise. Cette
diversification s'identifie à une extension de la gamme de
produits que la firme met sur des marchés différenciés.
Mais qu'est-ce qui amène les entreprises de certaines bran-
ches industrielles à diversifier leur production ? Toute
entreprise qui prétend à une vocation internationale doit,
premièrement, avoir la dimension requise et, deuxièmement,

- 80 -
procéder tôt ou tard à des investissements importants
pour la fabrication de produits nouveaux afin de pré-
venir toutes difficultés qui la rendraient vulnérable.
C'est ce que nous observons chez les entreprises moder-
nes dont les dirigeants évoquent plusieurs arguments
parmi lesquels quelques-uns reviennent souvent et sem-
blent assez convaincants. A Saint-Gobain-Pont-à-Mousson~
ce grand du verre français, où il s'agit d'assurer avant
tout l'équilibre du groupe, la diversification par pro-
duits (vitrage, tuyaux en fonte et tubes d'acier, papier,
flacons, amiante, ciment, produits réfractaires, etc ... )
et surtout par pays (pays d'Europe, Etats-Unis et Améri-
que du Sud) en s'appuyant sur plusieurs technologies et
en s'adressant à de nombreux marchés dont la construction,
l'automobile, les biens collectifs, a permis de maintenir
les résultats consolidés malgré la crise économique mon-
diale de 1974-1975 qui a tout bouleversé.
(
)
(
Ventes et résultats consolidés de Saint-Gobain-Pont-à
)
(
Mousson
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
)
(
)
~ En ~~l~~ons : 1972: 1973 : 1974 : 1975 : 1976 ~
~==============:=======:========:========:========:====:===~
~ Ventes ou
~
.
.
:
.
~
( C.A
: 13.063
15.741..
20.881
21.164
28.539)
( Augmentation des:
r
:
)
( ventes en % ••• :
+ 24
+ 21
+ 33
+ 1
+ 35
)
~ Résultats d' ex- :
~
( ploitation .... .
925
834
1.025
219
1.396)
( Résultat net ..
441
(,13
704
120
~71)
(
)
(
)
(
)
Source: Rapports du Conseil d'Administration
Le résultat net a subi une perte de près de 300
millions de francs provenant de la conversion en franc des
bilans des sociétés étrangères du groupe. Il s'agit donc

- 81 -
dE.. pertes purement con )tables qui den )urent sans effe 0;
sur l'exploitation ou sur la trésorerie et non le résul-
tat de transactions commerciales ou financières.
Siemens, quatrième grand de l'électroteohnique
mondiale derrière International Businnss Machines (IBM),
General Electric et Philips, est aussi l'une des premières
en Europe avec l'assortiment le plus large qui va de la
centrale nucléaire au composant électronique micro-minia-
turisé. Il y a là un sérieux effort d'innovation car la
firme veut être offensive sur tous les grands marchés du
monde avec des matériels et produits à technologie de poin-
te ; 75 % des fabrications ont moins de 10 ans et 50 %
moins de 5 ans .
Pour s'implanter solidement sur l'important mar-
ché des Etats-Unis, Siemens, en plus de ses rachats de so-
ciétés regroupées ~ans la Siemens Corporation qui constitue
un petit empire industriel avec 3.000 employés et un chif-
fre d'affaires de 600 millions de marks dont 300 en élec-
tronique médicale, s'est allié avec le groupe américain
Allis-Chalmers qui a diversifié avec succès sa spécialisa-
tion dans la fabrication de machines agricoles (550 mil-
lions de dollars de chiffre d'affaires en 1976) en y ajou-
tant des divisions techniques automatisées de manutention-
traitement (600 millions en 1976), des équipements électri-
ques (204 millions)
.
Un autre motif de diversification nous est four-
ni par B~!. Cette firme alle~ande d'automobile qui tire sa
force dans la technique des moteurs, trouve dans cette for-
me d'expansion une garantie de son image de marque en même
temps qu'un optimum financier. En effet, contrairement à
ce que l'on constate souvent à propos de la diversifica-
tion qui implique généralement un changement profond de
l'activité ou du produit dans le but d'accroitre la ren-
tabilité globale de la société, BMW procède simplement

- 82 -
par adjonction (diverbification par adjonction)
• La fir-
me ne veut se disperser que dans l'automobile et non en
dehors d'elle. Même dans ce secteur elle penche pour une
certaine clientèle, c'est-à-dire produire des voitures
pour jeunes cadres et des voitures de fonction. Elle ne
cherche pas, à fortiori, à s'aventurer dans les poids-
lourds. A la limite, elle pourrait, dans les années à ve-
nir, fabriquer des moteurs industriels, des moteurs marins
et, peut-être s'essayer dans les bâteaux de plaisance. Au-
jourd'hui la seule affaire qu'on lui connait (à l'excep-
tion des gammes de voitures particulières, notamment la
320i (1)
modèle économique dont la filiale BMW aux Etats-
Unis n'arrive pas à satisfaire la demande locale en un
temps record) c'est la moto qui fait 5 % du chiffre d'af-
faires totale de la société, mais qui ne lui procure pas
plus de gros ~ains qu'elle ne lui occasionne dœpertes.
Ces quelques exemples concrets montrent combien
sont nombreuses les raisons qui poussent les grandes so-
ciétés indus trielles à une diversifie' '3.tion très r -. -!-.c;
de leur production. "Ces firmes multinationales à marchés
multiples et à gestion unifiée" selon les propres termes
d'Harold GENEEN, ancien président d'International Télépho-
ne & Télégraph Corporation (I.T.T.) :'un des conglomérats
américains les plus connus avec Gulf and Western Industries,
Litton Industries, Textron, Ling Temco Vaught Corporation
(L.T.V.) etc ... , et aussi le plus puissant (plus de 200
filiales réparties dans près de 70 pays), incarnent ce phé-
( 1) La 320i et la 520i ne figurent plus sur le catalogue de BMW qui
vient de cOIl"llrercialiser trois nouveaux modèles, les 320, 520 et 528i
en attendant la sortie prochaine de la 323i, prototype d'une gamœ
exceptionnelle de six cylindres de 2,3 . ;13cv) à injection, sur la-
quelle la firrre allemande repose des espoirs.

- 83 -
nomène du conglomérat Lilade U.S. né ju...;te après la seconde
guerre mondiale. Ces sociétés industrielles d'une autre
nature que celles classiques, que nous connaissons habi-
tuellement, fabriquent des milliers de produits, sont éta-
blies dans les cinq continents de notre planète, possèdent
des filiales dans presque tous les principaux pays du glo-
be et, réunissent sous une seule direction des activités
peu voisines et peu complémentaires comme l'industrie élec-
tronique et la fabrication de produits de beauté, les la-
boratoires pharmaceutiques et l'industrie du petit matériel
de bureau, l'industrie aéronautique, la construction navale
et l'industrie textile, la fabrication de jouets, le cinéma,
l'édition ... Il s'avère difficile de penser, dans ces con-
ditions, qu'avec une telle constellation d'industries dont
le motif est plus financier qu'économique l'objectif est la
recherche d'économies d'échelle comme pour la simple entre-
prise. Il s'agira plutôt de faire de superprofits en assu-
rant la croissance globale après avoir marié des entreprises
prospères dans des secteurs variés et absorbé d'autres dont
le taux de croissance et la rentabilité sont plus élevée
que la moyenne de leurs secteurs.
A partir des années 1960, la contagion gagne l'Eu-
rope et le Japon où l'on trouve Saint-Gobain-Pont-à-Mousson,
BSN, ... en France, Salzgitter, Thyssen-Hütte, Siemens, ...
en Allemagne, Montedison, Fiat, ... en Italie, Mi~subishi,
Mitsui, ... au Japon, etc ... Grâce à cette stratégie, les
entreprises très diversifiées croissent en général plus vite
que celles qui le sont moins. Mais ce qu'il faut surtout
retenir en dehors des avantages subjectifs aux firmes qui
pratiquent cette diversification à outrance, c'est que
celle-ci a néanmoins un côté positif pour l'ensemble de l'é-
conomie puisqu'elle stabilise à un niveau la part de marché
de la firme dans son secteur de base, limitant ainsi sa
croissance dans ce secteur comme ensuite dans les autres
et, empêchant finalement toute tentative de monopoliser ou

- 84 -
même de dominer un secteur de l'écon 1mie.
La stratégie de diversification menée tambour
battant par la firme l'amène à s'adapter à cette nouvelle
forme de croissance en adoptant une structure plus souple
et en développant sa direction. Pour que la mutation soit
effective, la firme devra décentraliser le pouvoir de di-
rection et utiliser un nombre p~~L3 é..L. ~ ,·é de '-<.lriso·.. nts
mieux forme~.
La politique d'innovation et de diversification
des produits accroît non seulement le nombre des unités de
production appartenant à des branches différentes mais aus-
si les ressources de l'entreprise et les services centraux.
La structure centralisée ne peut plus convenir à ce type
d'organisation fortement diversifiée qui doit nécessaire-
ment décentraliser le pouvoir directorial pour être flexi-
ble et plus dynamique. C'est dire, in fine, que décentra-
lisation et diversification sont deux revers d'une même
médaille et, que l'une conditionne l'autre dans un envi-
ronnement
économico-politique toujours incertain.
La décentralisation entraîne, nous l'avons vu ,
un changement profond des structures de l'organisation car
la multiplicité des produits ne peut aller de pair avec la
réunion des décisions dans un centre unique comm6 si les
différentes productions de la firme étaient homogènes. La
direction générale se départit alors de certaines opéra-
tion en laissant à chaque groupe de produits l'autonomie
de sa gestion. Elle se vouerait ainsi mieux à l'entreprise
en se consacrant aux fonctions véritables d'un~ adminis-
tration supérieure. Elle n'aura plus qu'à coordonner, ar-
bi trer, planifier les acti vi tés des filiales ou ereore des
divisions autonomes, centres de profit par excellence, et
à fixer la politique d'ensemble pour assurer l'avenir et
l'expansion de la société. C'est cette structure du type
staff and line qui confère des pouvoirs étendus aux res-

- 85 -
ponsables des di visio 1S et qui est d tée d'un état-m,.j or
qui crée les connaissances nouvelles, conseille la direc-
tion générale et les unités autonomes, trouve et répartit
les moyens de financement, détermine les objectifs et con-
trôle les résultats, assume des fonctions de relations pu-
bliques comme de recherche, que la majorité des grandes
entreprises modernes a adopté. La décentralisation est,
pour sûr, une nécessité pour l'entreprise qui a atteint
la "masse critique" (1), c'est-~-dire la taille à partir
de laquelle la rentabilité est satisfaisante donc l'entrée
sur le marché réussie, puisque outre les avantages liés à
la division du travail, l'organisation dans l'exécution de
celui-ci permet une meilleure combinaison et une utilisa-
tion efficace du potentiel matériel et humain. Ce n'est
pas, par conséquent, par une simple décentralisation que
l'on aperçoit le bout du tunnel. Il faut aller au-delà
pour obtenir une plus grande efficience de l'organisation
de l'entreprise érigée en système adapté à ses objectifs.
L'entreprise n'est plus un centre de production dirigé
par un petit groupe d'hommes qui auraient la magie de la
gestion. Elle est plus que cela, c'est-à-dire une réalité
multi-dimensionnelle, multi-fonctionnelle et multi-produit
dans laquelle les décisions finales sont prises par une
équipe de dirigeants entourés d'experts et de spécialistes,
avec pour chaque groupe un rôle précis conformément au
plan de la fiI'me. Il Y a donc une évolution d'ordre plu-
tôt qualitatif que quantitatif du capital humain directo-
tial. Cela semble être d'ailleurs en ce moment un souci
constant de l'entreprise que de développer les ressources
de direction, facteur important de production qui sauve-
garde autant que tout autre input la vie, la croissance et
(1) Cette nasse critique ne se mesure pas seulement en teI'I'TEs finan-
ciers, elle peut être aussi évaluée en capacité de recherche et déve-
loppement, en disponibilité de main-d'oeuvre hauterœnt spécialisée ou
en investissement.

- 86 -
les intérêts de la firme. Preuve en est, dans les pays
à degré d'industrialisation élevé, la prolifération des
business schools, des écoles de commerce, de gestion des
entreprises ou les formations post-universitaires dans
les entreprises mêmes ou autres établissements privés ou
publics. Ces filières utilisées dans les pays développés
pour former des dirigeants de haut niveau peuvent avoir
un accent national, mais il n'en reste pas moins que l'ob-
jectif visé est le même pour les entreprises de ces pays :
assurer la relève de ceux atteints par l'âge par des cadres
de valeur plus jeunes.
En agissant ainsi sur cet actif particulier, la
firme valorise par interposition les facteurs de croissance
et d'économies mis en oeuvre par les dirigeants.
Les éléments d'expansion qui viennent d'être pas-
sés en revue (politique de recherche scientifique et tech-
nique, stratégie d'innovation et de diversification, décen-
tralisation et changement de structures) ne reçoivent leur
pleine signification que si la firme possède le pouvoir
d'action requis pour leur manipulation et leur émulation
qui~ par un effet feed-back renforcent ce même pouvoir.
Cette interférence entre facteurs de croissance
et puissance de l'entreprise apporte une note suppl@mentai-
re à la dynamique de croissance de la firme.
Malgré tout, et bien que ménageant plus facile-
ment à l'entréprise l'initiative du progrès, le phénomène
pouvoir crée un "champ d'indétermination dans le processus
économique" (1)
puisqu'il augmente la puissance d'action
(1) 0 .MORGENS'IERN, "rrhe limits of Economies" eité par J. IHC»1E dans
son article intitulé "Considérations sur le pouvoir économique et sa
naturel!, paru dans la Revue économique n06, Noverrbre 1958, p.875 .

- 87 -
de l'unité productive
mais grâce simul tan€ment
à des causes
internes et externes au jeu économique. Ces dernières, de
caractère extra-économique, sont parfois plus importantes,
ce qui soulève dans les esprits le problème de la posses-
sion du pouvoir, donc de sa légitimité et de ses limites.
Si la question est devenue aigüe en ces instants, c'est
que la firme ne cesse de gagner en puissance en termes aus-
si bien de pouvoir économique que de pouvoir politique
et social. L'augmentation de la taille de l'entreprise
entraînant parallèlement un développement de sa capacité
de changer en sa faveur les conditions ou les résultats
éconemiques de ses diverses activités, la dimension se-
rait par conséquent un élément réel d'appréciation de la
puissance._. Ce n'est peut-être pas l'avis de W.EUCKEN(l)
qui n'accorde aucun avantage économique particulier â la
dimension et impute le pouvoir à la situation sur un mar-
ché autre que celui de concurrence parfaite. Le point de
vue de EUCKEN est d'autant plus réfutable qu'il oublie
que la stabilité ou le développement de la situation sur
un marché est un objectif spécifique qui passe par des
moyens parmi lesquels la dimension.
Peu après, le voilà qui se ressaisit pour nuan-
cer sa position en reconnaissant à l'entreprise de grande
taille une Il ch;nce" de s'octroyer un pouvoir économique.
Plusieurs variables vont permettre alors de me-
surer la dimension de ce centre de décision économique à
partir duquel se manifeste le pouvoir. Leur utilisation
dépendant de la nature de l'étude rnenée, l'évolution du
chiffre d'affaires, par exemple~ est un indicateur auquel
il est fait généralement appel pour déterminer le pouvoir
détenu par l'entreprise dans l'emploi des ressources maté-
rielles et immatérielles du pays. Elle fait apparaître ce
pouvoir particulièrement au niveau de l'approvisionnement,
de la production et de la distribution,reflétant ainsi la
(1) cf. Jean Lhomme, "considérations sur le pouvoir écono-
mique et sa nature" Revue économique, n0 6, nov.1958.
p. 868,69,70 .
.-----.----.------

- 88 -
transformation d'une force en acte localisé à l'utilisa-
tion des ressources économiques.
L'expression de l'autorité est encore perçue à
travers l'autofinancement des investissements qu'autorise
un accroissement substantiel des profits réalisés. Cette
politique de réinvestissement des bénéfices nets est, du
fait de son importance, une manière d'orienter les ressour-
ces.
En comparant le chiffre d'affaires et les pro-
fits obtenus, par exemple~ en 1973 et en 1976 par quel-
ques grandes entreprises appartenant R des secteurs diffé-
rents, on constate, en dehors de quelques exceptions, une
progression qui pourrait signifier une extension du pou-
voir.
Evolution du chiffre d'affaires et des profits
(en millions de dollars)
(
)
(
1973
1976
)
(
)
(
~iffres
)
d'af-:
profits
: chiffres
.
profits
(
.
faires
. d'affaires .
)
(
:
:
)
(
)
Exxon
· ............
25.724
2.443,3
48.630,8:
2.640,9
(
)
( General Motors . . . . . .
35.798
2.398,1
47.181
2.902,8 )
(
:
)
r.B.M.
·............. 10.993
1.575,5
16.304,3:
2.398
(
)
( Unilever ....... . .. ..
11. 010
423,3
15.762,2:
517,6 )
(
:
)
r.T.T. ·.............
10.183
527,8
11.764,1:
494,4
(
)
.
( Philips
8.108
323,1
11.521,5:
212,9 )
·............
( Renault ·...........
4.656
112,9
9 . 352 , 8 ron
(
diSPonibl~
( BASF
5.384
19L~,1
9.202,5:
241,1 )

0

0
• • • • • • • • • • • •
(
:
)
Siemens
5.523
161,9
8.060,4:
221,9
(




a
,







)
( ICI
5.309
449,5
7.465,4:
442,3 )







~
G








(
:
Hitachi
5.972
292,1
6.680,4:
)
200,"3 )
(

• •
III
0
• • • • • • • •
4.658
4.075
0,5
(1)~
80 4(1,
( Fiat
J
)

0

~
• • • • • • • • • • • •
(
)
(1 ) Société-mère seulement
Source
''Fortune''

- 89 -
La baisse de rentabilité cnnstatée ohez I.T.T.,
Philips, I.C.I., Hitachi, intervient juste après la réces-
sion de 1974-1975 dans un climat économique, social et po-
litique européen où règne l'inflation, les grèves, la pous-
sée de la gauche dans certains pays. Il faut ajouter encore
un certain relâchement des mesures de contrôle des coûts
de la part des firmes. Autant d'obstacles à une exploita-
tion saine etàla libre entreprise.
Cependant, le critère du chiffre d'affaires n'est
pas aussi satisfaisant qu'on pourrait le croire puisqu'il
ne fait pas ressortir réellement le "poids" de l'unité éco-
nomique sur le marché concerné. Nous n'en voulons pour preu-
ve que le cas des petites entreprises telles qu'on en ren-
contre dans l'industrie d'appareils optiques, d'appareils
photos de haute précision, dans la bijouterie, ou autres
établissements de sous-traitance qui peuvent faire de gros
chiffres d'affaires sans pour autant immobiliser d'impor-
tantes ressources productives.
Le comportement des firmes, lié parfois à leur
degré d'autorité, conduit souvent à la recherche d'un ren-
forcement de leur pouvoir économique par un pouvoir poli-
tique. Elles y parviennent d'autant plus facilement qu'el-
les sont grandes et occupent sur le plan national et in-
ternational une position leur conférant une part apprécia-
ble de marché. Presque toutes les firmes multinationales,
pour ne pas dire conglomérales, ont des liaisons étroites
avec des hommes politiques de leur pays ou des pays d'ac-
cueil, si ce ne sont pas leurs dirigeants mêmes qui occu-
pent des postes politiques ou cherchent à les avoir.
Siemens s'enorgueillit aujourd'hui de lancer ses oadres
supérieurs dans la politique et de les prendre en charge
matériellement pendant la durée de leur mandat s'ils sont
élus. Résultat: Siemens compte 363 conseillers munici-
paux, 19 maires, 11 conseillers généraux, 5 députés aux
Landër et 3 députés à la Diète fédérale. Tout ceci est-il

- 90 -
aussi utile pour assurer une bonne marche de la société ?
Il ne semble pas lorsque l'on sait que la firme a connu
récemment des problèmes sociaux qui se sont soldés par
la suppression de milliers d'emplois (10.500 exactement)
sous forme de licenciements, de retraites anticipés, de
démissions. On est loin de la sérénité et des bons résul-
tats que l'on obtient grâce plutôt à des performances
techniques et économiques qu'à des appuis éphèmères. Cela
doit être compris aussi bien par Siemens que par les au-
tres grands du monde des affaires. Les soandales autour
d'I.T.T., cet "Etat souverain", â la suite de ses agisse-
ments au Chili, au Brésil, en Argentine, aux Etats-Unis,
de United Fruit au Guatemala, comme l'affaire "Lockheed"
de corruption de fonctionnaires dans plusieurs pays, don-
nent des conséquences économiques et politiques aux coûts
très élevés.
Consciente de sa qualité de dépositaire d'auto-
rité, l'entreprise moderne comprend plus que par le passé
que son pouvoir s'intègre dans un contexte socio-économi-
que propre à faire ressortir assez nettement ses responsa-
bilités publiques. Elle ne nie plus son appartenance à un
système social qui lui dicte ses valeurs et ses exigences.
Certes les fondements moraux du capitalisme classique régi
par la concurrence parfaite constituent toujours une base
théorique, mais ils ne sont plus déterminants pour assurer
les biens et services nécessaires à la société. Les raisons
naguère avancées sur le bien-fondé de ce régime capitaliste
ont été remises en question . La maximisation du profit est,
désormais remplacée par d'autres variables, la forme de la
concurrence a changé pour devenir oligopolistique dans cer-
tains secteurs (chimie, sidérurgie, automobile, construc-
tions mécaniques, boissons et alimentation, etc ... ) ou se
traduire en marché organisé ou planifié à long terme dans
d'autres (transports, pétrole, etc ... ) .
Le nouveL
élan de l'entreprise capitaliste mo-

-, 91 -
derne la conduit à inclure des besoins communautaires
dans sa panoplie d'objectifs en menant, soit par contrain-
te de la puissance publique, des travailleurs et de leurs
organisations représentatives,soit par ses propres initia-
tives, des actions qui n'entraient guère dans son domaine
d'intervention. Aussi rencontre-t-on à présent dans la
plupart des grandes entreprises, à côté des services de
relations avec le personnel, une direction des relations
extérieures dont le rôle est de prospecter et de négocier
auprès des pouvoirs sociaux situés hors de l'entreprise.
Celle-ci redore son im~ge de marque par cet engagement so-
cial que l'on observe à deux niveaux: à celui des objec-
tifs sociaux internes et à celui des objectifs sociaux ex-
ternes. Les premiers ont trait à la valorisation et à
l'humanisation des tâches, notamment celles qui sont les
plus pénibles et les plus dégradantes physiquement, tandis
que les seconds touchent plutôt la prévoyance collective
(retraites complémentaires, caisse de chômage, etc ... ), le
plein-emploi, l'environnement (lutte contre la pollution,
les nuisances).
L'Etat étant aussi concerné que n'importe quel
autre agent économique par le mieux-être des citoyens, la
firme, pourvue de rationalité technique mais point de ra-
tionalité sociale, aur~ bien fait de mener ses actions en
collaboration avec lui. Cela lui serait même bénéfique
puisqu'elle se verrait octroy~r, à coup sûr, des avanta-
ges ou subventions pour accomplir pleinement et efficace-
ment les fonctions nouvelles dont elle a la charge. Dans
un cas pareil, la finalité de l'entreprise ne s'apprécie
plus en termes de profit mais de services rendus à la so-
ciété qui la regardera d'un meilleur oeil sans manquer
l'occasion de lui rappeler ses devoirs envers la nation.
L'entreprise trouvant sa base d'expansion dans
le secteur, il nous faut alors nous interroger sur la
croissance de celui-ci.

- 92 -
§ 3 - La croissance sectorielle
Certains 3ecteurs croissent non seulement plus
vite que d'autres mais encore aussi rapidement que le pro-
duit national brut. Pourquoi en est-il ainsi? La crois-
sance de l'oligopole abordée dans le paragraphe précédent
nous aidera à expliquer la croissance sectorielle puis-
qu'il existe entre elles une relation causale. Cela
ne
doit pas faire croire à une translation unilatérale de
l'entreprise au secteur. Il s'agit plutôt de déterminer
les changements structurels qui sont à l'origine de l'é-
volution de ce dernier. De telles transformations touchent
la demande finale et les techniques de production des en-
trepriBes.
La distinction entre les industries, faite par
F. PERROUX
(1) ,renforce l'étude et l'intérêt de la crois-
sance du secteur. En examinant la structure de celui-ci,
les effets de liaison et d'entraînement des centres de pro-
duction qui le composent, PERROUX donne en même temps une
justifiaation de l'inégalité structurelle des économies na-
tionales. Il distingue
les industries modernes, c'est-à-
dire celles qui se sont affirmées dès le début du siècle
(électricité, chimie, automobile, pétrole, mécanique à
base d'acier) des industries entièrement nouvelles, c'est-
à-dire celles qui, depuis une quinzaine ou une vingtaine
d'années, donnent des ensembles de produits inconnus jus-
qu'ici (industrie atomique, industrie électronique, indus-
tries plastiques, industrie spatiale) .
(1) F.PERROUX, "Les industries motrices et la planifica-
tion de la croissance d'une économie nationale" dansOn
political Econom~_?-nd Econometrics, Essays in honour of
Oscar Lange, Lendon Pergamon Press, Polish Scientific
Publishers, 2ème éd. 1969, pp. 463-486 .

- 93 -
De ces deux types d'industries, émergent cE~tai­
nes encore dénommées lIindustries de croissance" car d'une
part le taux de croissance de leur produit et celui de
leur productivit6 sont supérieurs aux taux moyens d'accrois-
sement du produit et de la productivité de l'ensemble in-
dustriel, d'autre part, leur valeur ajoutée dans le produit
total de l'industrie est croissante.
La disparité des firmes donc des secteurs est,
en dernière analyse, fonction des procédés de production
adopt6s et des utilisations finales des produits. Il im-
porte par conséquent de savoir corr~ent et dans quel sens
se sont opérées les modifications de ces techniques, de ces
emplois finals et, au niveau de quels secteurs ?
En ce qui concerne les techniques, leur change-
ment a eu ces dernières années malgré la crise de 1974-1975,
des effets différents suivant les secteurs et les pays.
Tout en ralentissant la croissance des charbonnages et des
textiles en Europe
occidentale surtout, il a favorisé un
peu partout dans le monde cr:le de la construction électri-
que, de l'industrie pétrolière, de l'industrie chimique,
des mécaniques, mais n'a pas eu de répercussion notable
sur celle des matériaux de construction, du bois et papier.
Quant à la modification de la demande finale, la différence
des taux de croissance des divers types de demande est as-
sez faible en général dans tous les pays. Cet état de cho-
se est le reflet, depuis 1976, du comportement des agents
économiques après la crise qui a secoué les pays industria-
lisés en particulier.
Les ménages, ayant changé la structure de leur
consommation, ont contritué à freiner la croissance de
l'agriculture) des industries agricoles et alimentaires
(diminution de la part des dépenses d'alimentation) et
des charbonnagès (utilisation du fuel). A l'inverse, ce
changement dans les emplois a accentué l'expansion des in-

- 94 -
d~stries pétroli~res) chimiques) méc[~iques, celles d3s
métaux non-ferreux (acquisition d'appareils électroména-
gers), du bois et papier. Côté Administrations, la struc-
ture de la consommation et celle de la formation brute de
capital fixe ont toujours montré la modestie de ces deux
postes.
Plus intéressante est l'analyse que l'on peut
faire des différents secteurs et qui nous 1. :,rnet
de cons-
tater qu'au niveau du secteur énergétique, l'écart entre
le taux de croissance de ce secteur et celûi de l'économie
serait dû à l'évolution technologique qui 8€. ~rad~it par
.
ut1.1~sat~on
une substitution du fuel au charbon et une/intense de l'é-
lectricité consécutive au développement de la mécanisation.
Cependant i
'..<;mentation
régulièredu prix du pétrole et
de ses dérivés) observée auj ourd 'hui
c ondui t à une mise en
valeur de nouvelles mines de charbon, notamment en Angle-
terre et aux Etats-Unis.
Dans le domaine des métaux non-ferreux, l'accrois-
sement des achats d'appareils ménagers et les exportations
de machines ont permis, dans une large mesure, une crois-
sance plus rapide du secteur que celle de l'économie.
Les nouvelles technologies ont
encore profité
à la sidérurgie malgré la crise mondiale de l'acier qui
sévit depuis 1975. Cette crise proviendrait de la crois-
sance du volume des exportations japonaises qui aurait
provoqué un déséquilibre en Europe, aux Etats-Unis et
dans les pays producteurs du Tiers-Monde en même temps
qu'elle aurait déclenché une guerre des prix. A ce phéno-
m~ne marquant s'ajoute ia réduction sensible du poids de
divers produits fabriqués en acier, ce composé de fer, de
carbone et, d'autres éléments qui) selon les usages, ren-
contre une forte concurrence du béton, des plastiques et,
l'abaissement de leurs coûts de production.

- 95 -
Les industries mécaniques nt électriques qui
ont connu une période de flottement avec la crise, ont vu
leurs ventes diminuer avant que l'évolution technologique
recommence, à partir de 1976, à jouer un rôle appréciable
mais moindre que celui de la modification des emplois
finals stimulés par une croissance des investissements et
un accroissement de la consommation des ménages dû à l'a-
chat de matériel domestique.
Dans le secteur de la chimie où l'innovation ap-
paraît comme le moteur de l'activité des entreprises qui
le composent, le progrès technique aura permis une crois-
sance des produits chimiques de synthèse et des engrais.
Toutefois cette croissance serait la suite d'une surcapa-
cité de production et d'un prix trop bas des fibres, des
plastiques et des engrais que connaissent les groupes chi-
miques européens sur leur marché contrairement aux nord-
américains Du Pont de Nemours, Union Carbide, Dow Chemical,
... , moins tributaires de leurs ventes à l'étranger, donc
moins secoués et plus optimistes. Cet état d'esprit incite
certaines entreprises européennes qui veulent écouler leur
excédent à aller Outre-Atlantique comme c'est le cas du
groupe ouest-allemand Hoescht qui cherche depuis 1977 à
y diriger le quart de ses investissements, du britannique
Imperial Chemical Industries (I.C.I.) qui a mis en chan-
tier un vapo-craqueur dans le golfe du Mexique.
Le secteur textile, lui, a cru aussi vite que
l'économie sans pour autant être suivi en cela par la de-
mande finale puisque la consommation des ménages a oonnu
une baisse dans l'industrie des fibres synthétiques qui
éprouve des difficultés depuis 1970 avec le retour à la
mode de la laine et du coton (les toiles de jeans en par-
ticulier) et l'augmentation de leurs coûts de fabrication.
Les exportations n'ont pu combler l'écart créé par cette
situation car tous les pays, surtout les moins industria-
lisés, ont développé leur production de fibres.

- 96 -
L'approche sectorielle qui vient d'être faite
nous aura permis de faire la différence entre secteurs
industriels en plein essor et secteurs industriels en cri-
se, entre secteurs industriels entraînants et secteurs
industriels entraînés qui forment la trame de la croissan-
ce économique du pays donc de sa valeur ajoutée, cette
production nette qu'il faut répartir entre les membres de
la collectivité nationale.
§ 4 - La dissociation de la c-~issance et de l~rêpartition
Le monde économique contemporain fait de la crois-
sance son leitmotiv que toute perturbation remet en cause
du fait même des difficultés d'ordre matériel et social
qu!elle provoque et que supportent, à des degrés divers,
les a~ents économiques. Le produit net
ou somme des valeurs
ajoutées, fruit de cette croissance, est distribué aux
agents sous forme de revenus, principalement de salaires
et de profit.
Au niveau de l'entreprise et"afin de parvenir
à une mesure de l'évolution de ses perrormances avant d'en
montrer les modalités de partage, l'approche par la métho-
de du surplus de productivité globale des facteurs semble
être admise de nos jours malgré les difficultés d'applica-
tion qu'elle pose.
Le terme de "surplus" introduit en 1960 par
P.MASSE et distinct du surplus au sens traditionnel de
rente, exprime les variations nettes de volume (variat~~ns
du volume des biens produits - variations du volume des
facteurs utilisés) comme une mesure de la création de ri-
chesse dûe aux performances et les variations de prix com-
me un moyen de répartir cette richesse entre les partenai-
res sociaux de l'entreprise (trav8.illeurs, apporteurs de

- 97 -
capitaux, fournisseurs, clients, •.. ). Pour ce qui est de
la notion de "productivitê globale des facteurs" que nous
devons à Andrê L.A.VINCENT, notons que le concept même de
"productivité" a vu ses premières précisions apparaître
avec les travaux de QUESNAY (1766) et de l'école des phy-
siocrates. Mais c'est K.MARX qui, après avoir longuement
rêfléchi sur ce problème de la productivité dans le "Capi-
tal", laissera un acquis à la postêrité dans ce domaine.
Sa définition de la productivité du travail renferme notam-
ment la notion de réduction des coûts de production :
"Par augmentation de la force productive ou de la producti-
vitê du travail, nous entendons en général un changement
dans ses procêdês, abrégeant le temps socialement nêcessai-
re à la production d'une marchandise, de telle sorte qu'une
quantitê moindre de travail acqulere la force de produire
plus de valeur d'usage"
(1) •
L.A.VINCENT ressortira dans son ouvrage de 1944:
" Le progrès technique en France depuis cent ans" des vues
propres à inspirer les travaux qui seront publiés après et
qui constateront que le travail direct n'est pas le seul
moyen de production, qu'il en existe d'autres dont il faut
tenir compte : le capital et les importations (sur le plan
National) (2)
ou les consommations intermédiaires (au ni-
veau des branches ou des firmes). Ces prêoccupations ont
(1) K. MARX, "Le Capi taIt! , Livre premier, tome II,chap XII,
Pa~is) ed. Sociales, 1973, p.9.
(2) L'inclusion des :i.rrportations dans les facteurs è-e production
pour> le calcul de la productivité nationale introduit une double
conptabilisatian. En effet, une partie des inportatians concemant
les biens d'êquiperœnt participe à la reconstitution du capital dé-
truit. Elle a donc étê prise en coopte au titre des amartissenents.

- 98 -
été celles des auteurs soviétiques et amer1cains, tel
John W.KENDRICK dont la formule de productivité globale
des facteurs est différente de celle de A. VINCENT. Le
problème ~tait de trouver une unité de mesure commune pour
agréger ces divers moyens de p~oduction exprimés en unités
différentes. La solution choisie par A.VINCENT sera de
pondérer ceux-ci en fonction de leurs coûts.
Définir le surplus de productivité globale re-
vient finalement à exposer la méthode en montrant que l'a-
mélioration des conditions de la production est dûe à une
augmentation en volume des différents produits supérieure à
l'augmentation en volume des facteurs utilisés.
On part des comptes d'exploitation de la firme
corr1ges des variations de stocks de produits et de fourni-
tures pour ensuite dissocier chaque valeur en quantité et
prix avant d'établir un tableau des variations des quanti-
tés de l'année initiale à l'année finale.
Désignons par Pl' P2, ... Pi , ... pn les quanti-
tés respectivement produites de n catégories de biens dif-
férents numérotés 1,2, ..• i, ... n, F , F , ... F
1
2
S les quan-
tités respectivement utilisées des S catégories de facteurs
différents.
D'une période à l'autre, les mêmes catégories
de biens sont produites en quantités différentes, ce qui
signifie des variations de quantité" des produits 1,2, ...
.
,. P
P
,\\ P
"P
i\\
A "1" t
..
f .
1
1, ... n,G 1';~ 2,···0 i " " - n·
annee
1na e, on
aura alors pour le produit i, par exemple, ~ne quantité
produite égale à p.+~p ..
1
1
Il en est de même pour les facteurs utilisés
qui ont aussi varié entre les deux périOdes.

- 99 -
Le surplus de productivité apparaît par suite
en comparant la variation des quantités produites à la
variation des quantités de facteurs consommés, permettant
ainsi de voir s'il y a économies relatives de facteurs. Le
calcul de la valeur des suppléments de biens produits et
des suppléments de facteurs utilisés s'effectue en prenant
comme unité de mesure commune les prix de la rériode ini-
tiale. Nous pouvons donc appeler Pl' P2'
Pi'
Pn les
prix des produits 1, 2,..... i, ... n et, f 1»
f 3'
f 5
ceux des facteurs consommés.
La croissance de la production de l'entreprise,
c'est-à-dire la valeur du supplément de produits fabriqués
au prix de la période initiale est
n
'~
"
=,,--pi·,~Pi
1
Celle du supplément de facteurs consommés sera
5
f
'F
f ' F
f
." F
_." f -~ c
1 . 1-
1 +... 3· ~~ 3 +... 5· !....>, 5 - ------ 3'- 'j 3
1
, Le surplus de productivité globale est la diffé-
,
rence entre ces deux valeurs :
S
S - ..9-
P - .....--
1\\
f
l' F
/
- f- Pi· L' i "1' 3· '.- - 3
Ce ~urplus)' c'est-à-dire les gains de productivité,
donne lieu, en définitive, à une répartition, c'est-à-dire
~ une évolution des prix et des revenus, qui peut être
avantageuse à certains, désavantageuse à d'autres liés à
l'entreprise.
-Pour appréhender ce partage, il suffit de déter-
miner les suppléments de rémunérations liés aux variations
de prix survenues entre }&année initiale et l'année finale.
Sillf est la variation de la rémunération unitaire du
3
facteur 3, on a : F + l1F = F
3
3
3 quantités utilisées du facteur 3 pen-
dant la période- finale, alors F:3 . ~ f 3 sera l'avantage obtenu par
le facteur 3 entre la période initiale et la période finale.

- 100 -
Dans l'évaluation des suppléments (positifs ou
négatifs) de rémunérations, bénéficient ou perdent les
agents en relation avec l'unité de production et qui sont
les apporteurs de facteurs et de services, les fournisseurs
de matières premières, de produits semi-finis, etc ... ,
mais aussi la clientèle qui peut profiter d'une diminution
de prix ( -~ p.) lui procurant un avantage total P! (- Û Pi),
.
~ "
1 .
avec p! = p. + Up ..
1 1 1
L'avantage global acquis par les facteurs de
production et par la clientèle sera alors de :
n
5
~ Pi<-6.Pi) +:?F3• Ô f3
La relation de la méthode du surplus s'écrit
finalement en tenant compte aussi du résultat positif (b~
néfice) ou négatif (perte) du compte d'exploitation:
n
5
n
5
S = ~ (Pi,t.Pi)-~ <f3,!\\F3) =~Pi<-L\\Pi)+~F3·t.f3+liB
_____
.
--v-
----
'-..
_..---/....
surplus de productivité globale
surplus réparti
~B exprimant la variation du solde bénéficiaire entre
les périodes initiale et finale.
Si
,
sont des coefficients de pondération situant la place oc-
cupée en pourcentage par la valeur du produit i, Po: • p. ,
1
1
n
dans la valeur totale de la production, ~PiPi' la rela-
tion ci-dessus de la méthode du surplus peut s'écrire sous forme de
taux pour mieux comparer les performances d'entreprises de taille
différente
~
L k . ~Pi
_ _-
1
1
p.1

-
101 -
Les variations 08 cC)ûts et de rémunérations des
agent8 liés ~ l'activité productive de l'entreprise in-
fluencent la politiqu8 de cette dernière et, par consé-
quent, la constitution du surplus de productivité. Ces ré-
munérations et coûts sont eux-mêmes affectés èans leur
montant par le pouvoir de né~ociation des acteurs économi-
ques en présence, parfois par l'intervention de l'Etat ou
encore par les anticipations des dirigeants de l'entrepri-
se.
Aussi, par souci de réalisme, on peut admettre
la possibilité d'une rppartition d'un surplus de produc-
tivité ~lobale non plus positif mais né~atif si l'accrois-
sement des quantités produites est moins fort que celui
des facteurs utilisés. Ce désir de mieux saisir la réali-
té conduit à l'établissement d'un compte de surplus comme
le montre le schéma ci-dessous :
Surplus de 1 <-
1productivité glo~~
surplus positi
;r surplus né~ptif
~/
r--------1l'7V"\\i'ns rémunérér=1
baisse des
AIront :
._-'I>~
Compte de
rix de ve~e r
Aval:
- Fournisseurs
1
- Prêteurs
Surrpl s
~ -------, lclientèle
u
)
hausse des
- Etat et colle
~
tiv:ités loca-:'
.,
., ~ .
""l?rix de vente
~e~J1...;.)___
eux rermme:res '-.
/ '
',-."
~/., ~ - ,\\-., .,
J11lI1era-
- '
~ern.mera-
9n du tra= / '
"{;ion du ca-
/
vall
/
\\ pital
aug'lœntée 1.::./
/ /diminuée diminuée \\
- ugpentée
r - - - - - - - - ' ' - /- -
- - - - '" - - - - - - - -
IL._::rrava~~le~~____
Apporteurs de caPi~J
Source
lX!curœnts du Centre d'étude des re-
venus et des coûts (C.E.R.C.) n01,
1969
(1)
L'Et~t et les eollectivités locales
sont situés en amont de l'entreprise
car les services qu'ils fournissent
sont considérés comme des facteurs de
production de celle-ci.

- 102 -
Formation du surplus et affectations se font en
même temps et se trouvent en constante relation d'équili-
bre :
Surplus de productivité globale + Apports de surplus (ou Hé-
ritages) (l)~_.~parts respectives des agents.
Il découle de tout ceci qu'une valeur positive
du surplus peut ne pas signifier croissance de l'entreprise
mais, au contraire, diminution de sa taille si~Pi' ~Pi<o
dans l'équation du surplus.
1
Abordons à présent la phase pratique de· la méthode.
A ce stade, des essais d'application ont eu lieu tant aux
Etats-Unis qu'en France. Mais c'est chez cette dernière que
des résultats probants ont été enregistrés avec les travaux
du CDE,R.C. appliqués à des entreprises publiques ( E.D.Fç
flaD.F., S.N.C.F, Charbonnages de France) et les études de
Philippe Templé portant sur plusieurs branches (2);
En nous arrêtant aux travaux de Templé, nous cons-
tatons que l'auteur a tenté d'évaluer le surplus et sa dis-
tribution pour la période 1959-1967 dans le cadre de quel-
ques branches de l'économie française. Les tableaux ci-après
( 1) En plus de ses gains de productivité, l'entreprise peut recevoir
des apports de surplus ou héritages, c'est-à-dire des ressources ob-
tenues grâce aux baisses de prix des facteurs ou aux hausses de prix
des ventes.
(2)
Pour notre part, les données sur les entreprises dont nous dispo-
sons et les difficultés d'accès aux comptes de ces sociétés nous em:
pêchent de tester nous-rnêrœs, de façon significative, la méthode du
surplus de productivité globale des facteurs.

- 103 -
qu'il nous présente font
état de taux de croissance de
la production de ces branches d'une part, des surplus to-
taux et leurs répartitions d'autre part.
Tableau l - Taux de croissance de la production
(taux annuels moyens)
%
(
)
(
1959 - 1967
)
)
(------------------'-~------
(
)
Agricul ture
.
4,1
(
)
(
I.A.A
.
4,1
)
(
)
Energie
.
7,7
(
)
(
Industrie
.
6,7
)
(
)
g.l.P
.
8,7
(
)
(
Services
.
6,2
)
(
)
Commerces
.
5,7
(
)
(
)
(
)
Ensemble
6,3
(
)
)
(-------------------~------
Source
Ph.
Templé (1)
Ce tableau l
donne des indications sur les taux
annuels moyens de croissance de la production de sept
branches. On peut le comparer à celui des taux de surplus
(tableau II, pagel~) sans vouloir dire qu'il y a une cor-
rélation positive entre les deux taux. Cependant l'absence
de lien corrélatif n'exclut pas une relation de cause à
effet entre eux.
Dans le tableau II il ressort que le taux de
surplus le plus élevé (2,96) provient de l'agriculture qui
(1) Ph. Templé, "La m§thode des surplus: un essai d'application aux
comptes des entreprises (1959-1967)", Economie et statistique, n029,
décembre 1971, p.39 .

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rh nt' $Pit' 1# Nf'&iW'$"'
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TABLEAU II
-
Répartition du surplus
total pour
la période
1959-1967
(compte
central)
% de la production
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.
.
.
.
.
.
:
:
)
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(
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(
:Agricultu~
I.A.A.: Energie
: Industrie :
B.T.P.
:Services
:Commerces:
Ensemble
~
(
:
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:
:
:
:
:
.
:
1
:

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:
:
: - - - - - )
(
(
: Ori -:
Ré-: Ori-:
Ré-: Ori-:
Ré-: Ori-:
Ré-: Ori-:
Ré-:
Ori~ Ré-: Ori"": Ré- : Ori-': Ré- )
(
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. parti-.
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·parti~.
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)
(
.....~..
:
.
( Productivité (surplus) .•. :2,96:
:0,83:
:2,31:
:2,78:
:2,35:
: 1,92:
:2,09:
:2,23:
)
(
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
. :
: . )
( Clientèle (production)
;
~,58 ;O,O~
;
: 2,89;
: 0,89;0,52:
; 1,01 ~
:
~ 0,86:
: 0,31 )
(
Travail salarié
:
:0,45:
: 0,65:
: 1,25:
: 2,13:
:1,83:
:1,74:
: 1,12:
: 1,51)
(
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
. .
" )
Travailnonsalarié ...... :
:1,87:
:0,18:
:0,03:
:0~12:
:0,29:
:0,47:
:0,42:
:0,40)
(


t

,

.
:
.
(Fournisseurs ............• :0,26:
:0.04:
:0,44:
:0,25:
0,10:
:0,20:
:0,12:
:0,19:
)
• •
..







1 ) .
. . )
(
DétenteursduCaoital .... "
:
.
:
.
:
. • . . . . .
:
:
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)
(
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.
.
.
.
.
.
.
(
1. Amortissement .• " ... ;0,03 :
; O.O~
~,07:
;0,03:
; 0,02:
; 0,04:
;0,02 ~
;0,03:
)
(
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
. .
.
)
(
2. Solde
:
: 0,26;
: 0.25 ;0,34:
;
: 0,05;
:0,76;
:1,29;
: 0,28;
; 0,43)
( Etat
:
:0.01:0,14
:1,08:
:0,16:
:
:0,08:0,15:
:028:
:018:
)
.
.
.
.
.
. , .
,
)
( p ...
(
,f
)
: . : . : . : . : . : . :
1
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:
(
reteurs
I.F.L
:
: 0,04: 0,01:
:
: 0,08:
: 0,04;
:0,02: 0,24:
:0,11.
:0,04:
)
l!"\\
..::;t
( Divers
:
: 0,04:
: 0,02 :0,01:
:0,01:
:
:0,01:
:0,06:0,01;
:
: 0,02»
. . .
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~
·
nibles et distribués .. ;3,25:~3,25; 1,10 1,10;4,25: 4,25;3,23: 3,23;2,99:2,99; 3,56:3,56;2,99: 2,99;2,67: 2,67)
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.
.
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:
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"
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100,1
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.
)
(
. . . .
. . .
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(
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)
il>
8
(
1. La différence entre le surplus de la clientèle et l'indice de prix de la production provient de ce que ~
·
~
If
le premier est la moyenne arithmétique des indices de prix annuels pondérés par la part de la production
)
,.....
~
(
de chaque Année dans la production totale de la période et que le second est la moyenne géométique des in-)
' - '
(
dices annuels de la période.
)
Source:
Ph.
Templé(l)

- 105 -
distribue la plus grande partie aux travailleurs non sa-
lariés, c'est-à-dire aux exploitants agricoles. L'indus-
trie suit de peu avec un taux de 2,78 affecté ainsi :
travail salarié (2,13), clientèle (0,89), travail non sa-
larié (0,12),
.... Dans l'énergie~ l'Etat a mené une po-
litique des prix pendant la période considérée, ce qui a
conduit à une distribution d'un surplus à la clientèle
(2,89) supérieur aux gains de productivité (2,31) auxquels
s'ajoutent les héritages provenant principalement de
l'Etat et des fournisseurs. Les bâtiments et les travaux
publics ont connu un accroissement de productivité globa-
le élevé et des prix réels de production qui ont favorisé
des hausses de salaires. Le taux de surplus des services
(1,92) demeure faible. Il sera réçF~ti néanmoins au profit
de la branche, des salariés et, au détriment de la clien-
tèle dont l'apport de surplus est nettement plus important
que celui des agents situés en amont. Le commerce se trouve
dans la même situation, à cette différence près qu'il a
un taux de surplus plus grand et que les acheteurs bénéfi-
cient du partage. Quant aux I.A.A. (industries agricoles
et alimentaires), elles forment la branche qui distribue
le moins de surplus relativement à un taux de gains de
productivité très faible. Cela reflète bien le manque de
vigueur des industries agricoles et alimentaires françai-
ses qui, de surcroît, n'ont pas reçu d'héritages plus
substantiels en compensation de la baisse des prix des
produits agricoles.
L'analyse qui vient d'être faite, incite à es-
sayer de saisir l'intérêt de la méthode du surplus en la
situant dans son domaine d'application délimité par l'en-
vironnement de l'entreprise. Celui-ci, complexe et multi-
forme puisque non seulement économique, social et psycho-
logique, mais encore juridique et politique, diffère fon-
damentalement de la vision qu'en avaient les classiques.
La firme traditionnelle, centre de production stéréotypé
par la concurrence parfaite, adapte son comportement et

-
106 -
ses objectifs aux postulats établis par ce régime. Ces
derniers reposent sur les principes
selon lesquels toute
entreprise qui veut rester dans sa branche doit se trou-
ver au minimum de la courbe de coût moyen de longue pério-
de où les rendements d'échelle sont constants. Cette zone
ou plutôt ce point précis ne peut être atteint qu'avec
une technique de production dont le degré d'homogénéité
est égal à l'unité. A ce point, les entreprises ont la
même taille optimale, leur nombre dans la branche est
optimum, leur coût minimum, et leur profit normal (ou éco-
nomique)(l). L'existence de ce profit normal signifie que
le profit pur est nul, donc que reoette totale et coût to-
tal sont égaux. Dans ce cas, il y a épuisement du produit
réparti car le profit pur ayant disparu, ce produit est
juste suffisant pour rémunérer les facteurs à leur produc-
tivité marginale. C'est ce qui explique d'ailleurs l'inté-
rêt que portent les néo-classiques à la fonction de pro-
duction de Cobb-Douglas qui est homogène de degré 1 .
Pareille thèse ne corresp~dévidemment pas à la
réalité que cherche à toucher la théorie du surplus qui
constitue un progrès certain dans la détermination des
gains réalisés par l'entreprise et sa répartition entre
les parties prenantes. L'unité économique moderne ne se
laisse pas mettre une camisole de force. Elle est maîtres-
se de sa destinée ; aussi réagit-elle à toute action du
milieu et ne doit sa survie qu'à son dynamisme.
(1) Le profit normal ~st un coût d'opportunité inclus dans
la courbe de coût moyen. Il correspond aux intérêts
que percevrait l'entrepreneur s'il prêtait son capital
à une autre firme et aU salaire qu'il obtiendrait s'il
travaillait ailleurs. Ce ~rofit est dit normal parce
que juste suffisant pour as~urer le maintien de l'en-
treprise dans l'industrie.

- 107 -
Ce que nous observons dans, la méthode, c'est
tout d'abord la naissance d'un surplus qui ne reste pas
entre les mains des auteurs mais affecté aux agents selon
leur contribution à l'activité de l'entreprise ou leurs
rapports avec elle. En second lieu, le taux de surplus,
expression de la croissance et de l'efficacité de la fir-
me, permet de distinguer les performances économiques de
celle-ci de ses héritages sans pour autant expliquer les
causes réelles de leur apparition. La méthode s'avère
être, en troisième lieu, un instrument trop théorique qui
pèse sensiblement sur le fonctionnement de l'entreprise
et son organisation. La firme doit s'adapter et respecter
l'égalité comptable qui ne peut souffrir aucun écart. Le
surplus est donc un indicateur de l'effort d'adaptation
de l'entreprise plus que de son effort de progrès. Il
n'est pas surprenant dès lors que les relations surplus-
gestion, surplus-taille soient passées sous silence et,
qu'il arrive qu'une entreprise ait un surplus positif et
une mauvaise gestion ou, à
l'inverse, une bonne gestion
et un surplus négatif.
L'ultime grief à faire au surplus de producti-
vité globale tient à sa portée générale car on l'observe
aussi bien au niveau de la firme de grande que de petite
taille, au niveau de la branche industrielle que commer-
ciale ou des services, au niveau du secteur privé que du
secteur public.
Précisons, avant de clore ce paragraphe, que mê-
me en l'absence de toute critique à l'encontre de la mé-
thode du surplus, sa mise en oeuvre seule ne suffit pas
pour obtenir une mesure exacte de l'efficacité de la fir-
me. Il faut lui adjoindre une analyse en termes de norme
intrasectorielle qui saisit les performances relatives des
diverses branches du secteur les unes par rapport aux au-
tres et par rapport à la moyenne. Ceci montre, pour une
entreprise du groupe qui dégage un surplus, s'il y a ou

- 108 -
non détérioration de sa position par rapport à la norme
de l'ensemble dont elle fait partie.
Ces observations faites, la méthode des comptes
de surplus constitue à notre avis, un pas dans la recher-
che de firmes en croissance et des avantages que procure
cette évolution.
Section II
LES FONDEMENTS ANALYTIQUES DU PHENOMENE DE CROISSANCE DE
LA FIRME
Parlant de la croissance, il est naturel que nous
consacrions cette section à la théorie du patrimoine de la
firme pour montrer son existence et son expansion.
Le patrimoine ou "situation nette'! comprend tous
les actifs, réels et financiers, de la firme, déduction
faite de son passif patrimonial (Dettes). Il est donc défi-
ni comme la différence entre ce que possède celle-ci et ce
qu'elle doit.
L'égalité à l'instant t fourni par le bilan en
donne la représentation suivante
ou encore
on appellera
Pt' le patrimoine ou la situation nette à l'ins-
tant t.
à l'instant t;
Kpt,les actifs réels ou Physi:ues
ils comprennent les terralns, les immobili-
sations
les stocks.
3

- 109 -
Ktt , les actifs financiers à l'instant t ;
ils comprennent les autres valeurs immo-
bilisées, c'est-à-dire les participations
dans les sociétés contrôlées par la fir-
me, les créances, les disponibilités
en banque, aux chèques~Btaux et,~~se
Kt'
le total des actifs à l'instant t.
Dt'
les dettes ou le passif exigible à l'ins-
tant t.
Or, dans l'analyse économique traditionnelle au-
cune distinction n'est faite entre l'entrepreneur et l'en-
treprise, et les capitaux mis à la disposition de cette
dernière sont illimités. L'entreprise, alors à l'abri de
tout problème de financement, assure sa croissance avec
le maximum de profit en investissant jusqu'à ce que l'ef-
ficacité marginale du capital soit égale au taux d'inté-
rêt du marché.
Dans cet ordre d'idées, l'approche classique, à
l'opposé de la théorie contemporaine, était peu soucieuse
d'une analyse patrimoniale et assimilait le patrimoine de
l'entreprise à la propriété de l'entrepreneur. Cette con-
fusion faisait du volume d'investissement qui procède du
capital technique auquel s'attache l'orthodoxie classique,
un élément essentiel de la croissance de l'entreprise.
Pareille méconnaissance du patrimoine met en cau-
se le financement de la croissance et l'évaluation de l'u-
nité de production inhérente à sa structure patrimoniale
comme à son équilibre.
& 1 - Structure du patrimoine et croissance de la firme
c'est tout récemment que l'analyse du patrimoi-

- 110 -
ne a pris une importance réelle avec le développement de
l'entreprise moderne. Théorie patrimoniale et théorie de
la croissance se trouvent, de ce fait, étroitement liées
dans ce champ de complémentarités qu'est la firme ou, com-
me disent certains auteurs, l'or~anisation, c'est-à-dire
la coalition de groupes d'individus ayant des intérêts
différents, mais entretenant entre eux des rapports plus
ou moins stables.
Plus exhaustive est la définition de l'organisa-
tion donnée par C.I. BARNARD(1)qui la considère comme un
I!système d'activités consciemment coordonnées de deux ou
plusieurs personnes" au sein duquel existent des fonctions
de direction et des fonctions d'exécution.
Cette entité, il faut le signaler, a reçu des
dénominations plus technocratiques. Après la "modern cor-
poration lt de A. BERLE et G.MEANS, elle devient avec R.MARRIS
le "manageria1 capita1ism" et, avec J.K.GALBRAITH, père de
la technostructure, la "mature corporation".
Le couple patrimoine-croissance, vital pour la
firme, renseigne sur les motivations de ses décisions en
matière de financement dont les principales sources sont
les actifs, l'endettement, l'autofinancement, les émissions
d'actions. Malgré tout sa finalité reste la valorisation
de la firme qui permet de mesurer sa progression et d'orien-
ter sa gestion.
Dans l'équation patrimoniale, Pt = Kt - Dt,
(1) C.I. BARNARD, "Functions of the Executive", Cambridge
Harvard University Press.1938

-
111 -
seul le premier membre de droite nous intéresse ici pour
voir l'impact de la structure de l'actif ~t de son change-
d1 la r~latlon
ment sur la croissance. A partip Kt = Kpt + K , nous pou-
ft
vons calculer des r~tios de structure patrimoniale en fai-
sant le rapport de chaque composante de l'actif total à
ce dernier. Nous obtenons
=~
(p~rt relative de l'actif physi-
que dans l'ensemble des actifs à
l'instant t)
(part relative de l'actif finan-
cier dans l'ensemble des actifs
à l'instant t)
Toutefois pour pouvoir concilier les deux types
d'actifs (physiques et financiers) et les comparer, il im-
porte de les ramener à une expression commune en établis-
sant le prix de K en unité monétaire de K. Les substitu-
p
f
tions réciproques du capital physique et du capital finan-
cier qui s'ensuivent du fait des variations de prix de ces
actifs, engendrent une croissance de l'entreprise et en-
a.
traînent une modification du niveau des ratioso(et
"
Il Y a à terme, dans cette évolution, une transmutation
des inputs en outputs dans l'espoir de dégager, après
vente, un certain montant de valeur ajoutée.
Cette forrœ de croissance rencontre rapidement des li-
mites car la transformation mutuelle des différents actifs
ne peut. jamais être totale dans la réalité, l'environne-
ment de l'entreprise ne garantissant pas à celle-ci un
écoulement de ses actifs réels à un prix rémunérateur.
Aussi la firme ne convertira pas tout son capital finan-
cier en capital physique. Elle sera plutôt amenée à s~a­
dapter aux vicissitudes de la conjoncture et aux aléas

- 112 -
du marché. Dans cet esprit, elle préfGrera vraisernbùWlenmt
conserver une quantité minimale de liquidités égale à
J3K = Kr. où ~ = ~r constitue un ratio minimum. pour ho-
norer des transactions fréquentes sinon par rœsure de précaution.
De même ~ elle préviendra d' éventuelles ruptures de stocks ou voudra
maintenir une capacité de production correspondant à une quantité
minimale de· capitaux fixes et de capitaux circulants 6gale à
-
K
0< K = I<p, où ex. =-.:.:E... •. De telles prévoyances roontrent l'attitude
K
rationnelle (1) de la firme qui intègre i' incertitude dans ses déci-
sions quaro. bien même cette prudence dans l'utilisation des actifs
rédu i t
à court tenne son taux de croissance. Cette dimimtion de
taux trouve une corrpensation dans.la meilleure gestion des ressour-
ces, politique des dirigeants qui contribue, à long terme, à la
croissance de la. firme aidée à cela principalement par l'emploi d'un
type ct f actifs dén01'1tl}§s "actifs critiques" que sont les brevets,
les licences, l' €:.qùipe
de chercheurs, etc .•.
Cet t e co ndui te est généralement celle de toutes les
entreprises quelle que soit leur taille et, les calculs effectués
à partir de leur bilan (2) renseigne sur leur situation à un rrD-
ment.donné.
Le bilan consolidé de la f:inœ japonaise Hitachi. Ltd,
par exemple, indique qu'en 1975 le capital physique et le èapital
financier de la société étaient respectivement de 898.221 et
1.203.395 millions de yens, soit un actif total de 2.101.616 md1-
lions de yens et un patrimoine de 654.058 millions de yens.
(1) Cette rationalité dans le canportement de la finœ n'est pas to-
talement parfaite quarrl nous savons qu'elle doit constanrœnt no-
difier ses décisions devant des situations intervenant dans un
milieu sans cesse incertain ; les proc("dures mises en place par
la firme nt ayant pas le temps de jouer pleinement leur rôle, du
lTPins à court terme.
( 2) Bilan
obtenu groce au rapport du Conseil dt Administration,
et aussi à l'Annuaire Desfossés, S. E.F ., 1977, t. 2
---::; ~'-'.----
,"_'"'t'!!
,.• -_.,----

- 113 -
-,--
(
Les ratios X= 0,42,
F = 0)57 permettent d'avoir successi-
vement des quantités minimales d'actifs physiques
:~K = 882.678,72 millions de yens et d'actifs financiers
t~K = 1.197.921,1 millions de yens.
(~
J
Le bilan consolidé de l'américaine r.T.T. Corpo-
ration fait ressortir ~ la même période un act}f physique et
un actif~rinancier égalent tour à tour à 5.89Q.000 et
4.509.000 milliersde dO~, soit un actif total de 10.804.000
milliers de dollars et un patrimoine de 5.222.000 milliers de
dollars. 1" et h étant respectivement équivalents à 0,56 et
0,43, les quantités minimales d'actifs physiques et d'actifs
financiers deviennent: ": K= 5.828.480 milliers de dollars,
.~ K= 4.475.440 milliers de dollars.
Les résultats, en 1975, fournis par le bilan non
consolidé de la firme française Automobiles Peugeot se pré-
sentent comMe suit: capital physique: 3.557.366.887 francs~
capital financier: 1.76F.527.922 francs, ce qui donne un
actif total de 5.323.894.80Q francs; le patrimoine attei-
gnant 2.094.078.502 francs. Les ratios r.:Z et b étant, dans
cet ordre, é~aux à 0,66
et 0,33, les quantités minimales
d'actifs physiques et d'actifs financiers sont:
--,--
~ K = 3.513.770.573,94 francs, 0K = 1.756.885.286,97 francs.
Comme cela apparaît dans ce qui précède, la fir-
me a" pris des dispositions pour parer ~ toute situation
susceptible de porter atteinte au bon déroulement de ses
activités. De la sorte, elle en vient à adopter une poli-
tique de minimum d'actifs réels et financiers qui garanti-
rait sa continuité et sa croissance. Elle pouvait de même
se ménager tout simplement une marge de sécurité en calcu-
lant son fonds de raulement net compte-tenu des risques
de perte totale ou partielle de certains éléments d'actif
ou de ralentissement de leur rotation. Le fonds de roule-

- 114 -
ment est déterminé soit par la différence entre les capi-
taux circulants et les dettes à court terme, soit par la
différence entre les capitaux permanents et les valeurs
immobilisées nettes. Il s'avère un indicateur de crois-
sance qui augmente avec l'endettement de la firme, lequel
influe, en retour, sur la croissance. Mais l'expansion
de la firme n'est pas financ~e seulement par des emprunts,
elle peut l'être encore par d'autres moyens externes tel-
les que les émissions d'actions nouvelles ou internes tel
que l'autofinancement.
l°)L'endettement
L'entreprise qui cherche à croître doit trouver
des sources de financement de ses projets d'investissements.
C'est généralement en empruntant qu'elle y parvient. Pour-
tant avec l'émergence de la grande entreprise moderne, ce
type de financement prend de moins en moins d'importance
dans la stratégie de l'entreprise qui essaie d'éviter une
dépendance trop forte vis-à-vis surtout du système bancaire.
L'endettement serait considéré comme un phénomène d'accrois-
sement du risque mesuré par la variance relative des profits
ou par le ratio capitaux propres/Actifs totaux. Si certains
auteurs utilisent ce second indicateur pour évaluer effec-
tivement le risque, d'autres, par contre, s'en servent pour
mes'urer la sécurité, c'est-à-dire l'opposé du risque(l).
(1) I.e concept de risque, variable de décision de l'entreprise en ave-
nir incertain, a fait l' obj et de l1OJTi)reuses études théoriques et
empiriques en" écomnie industrielle. Panni ces travaux, rotons seu-
leIœnt ceux de :'
- M. KAIEÇ}<I, "Principle of increasing riskl!, Economica, 1937.
L' aute~retrace le "principe du risque croissant" qui est en
fait ~théorie de l'i~Jestissernent. C'est le risque qui dé-
termine ·la taille de l 'lUl.$ij~t.M,t .
- M. HAf.L et L.WF.ISS, "Firm size and profitability", The Re-
view d"f Economies and Statistics, Août 1967.
-
"
,
... / ...

- 115 -
D~s lors, le taux d'endettement, déterminé par ~e rapport
. :... '
du total des capitaux empruntés aux capitaux propres (ou
patrimoine), tendra à se situer à un niveau relativement
modeste. Le montant plus ou moins élevé des emprunts sera
fonction du mode de croissance (croissance ~ travers des
investissements internes ou croissance par des acquisitions
externes), et les firmes à croissance externe auraient
une structure financière moins endetté~ que celles à crois-
sance interne. Les dettes à lon~, moyen et court terme
sont liées D la structure du capital et aux conditions d'ex-
ploitation
pour renforcer ou compléter le financement in-
terne.
L'appel aux capitaux extérieurs revêt donc quel-
que intérêt, et serait normal tant que les sommes deman-
dées restent l 19intérieur de certaines limites et ne trou-
blent pas l'équilibre financier de la firme. Le rôle joué
par l'endettement dans le développement de celle-ci devient
finalement positif s'il aup,mente la rentabilité de son pa-
trimoine (ou capitaux propres) par le jeu d'un effet de
levier formulé comme suit
Le taux de rentabilité s'écrit
0;. = r t + (r t - i) Dt
Pt
••• 1 •••
Ils déterminent le risque en s'appuyant sur le ratio capitaux
propres/Actifs totaux que confinre l'émission dtactions nouvelles.
- E.F. Fana et M.H. Miller, 1''Ihe theory of finance;:, Chicago, Holt,
Rinehart, T,linston, 1972.
!.es deux auteurs m:mtrent la relation qui existe entre le risque et
le remell'ent des actifs.
• •• 1 •••

- 116 -

Lt = effet de levier à l'instant t
Dt = dettes ....El. l'instant t
Pt = patrimoine (ou fonds propres) à l'instant t
::-.t = taux de rentabilité du patrimoine (ou fonds
propres) à l'instant t
r
= taux de rendement net du capital à l'instant t
t
i
= taux de llintérêt .
Lorsque la firme accroît son taux de croissance,
elle élève en même temps le montant de ses emprunts et par
voie de conséquence la rentabilité de son patrimoine. Mais
cette évolution ne se poursuit pas indéfiniment, il arrive
un moment où la rentabilité décroît, entraînant une baisse
de la demande de capitaux extérieurs et une hausse du taux
de l'intérêt.
2°) L'émission d'actions. nouvelles
Pour la firme cotée en Bourse, l'émission d'ac-
tions nouvelles est un autre mode de financement externe
et, constitue, comme l'endettement, une alternative ou un
complément à l'autofinancement. Cependant, à l'inverse de
celui-ci qui exige un remboursement du principal auquel
s'ajoutent les intérêts,elle participe à l'accroissement
des fonds propres bien que son
importance dans le total
du financement extérieur soit assez li~itée. Le recours
... / ...
- B. T. Gale, ilMarket share and Rate of returnl/ The Review
of Economies statistics, novembre 1972.
L'intérêt des travaux de Gale réside dans la distinc-
tion entre deux catégories de risques :
- le risque d'activité qui a trait à la variabilité de l'en-
dettement dans la structure financière de l'entreprise. C'est
un risque de 1y emprunteur.
- Le risque financier qui est un risque d'insolvabilité que
supporte le prêteur. Il survient lorsque l'entreprise s' en-
dette plus qu'il ne faut, c'est-à-dire au-delà de l'opti-
num d' endetterœnt .

- 117 -
aux capitaux externes par émission d'actions augmente aus-
si le profit total de la société et, les actionnaires, an-
ciens comme nouveaux, ont les mêmes droits sur ce profit
et sur les dividendes que les dirigeants cherchent à main-
tenir à un taux constant par action. Une différence entre
les actionnaires proviendrait de la détention par certains
d'entre-eux d'actions privilégiées.
La mise sur le marché de milliers d'actions nou-
velles traduit une politique de croissance, objectif ma-
jeur des dirigeants, qui laisse percevoir d'autres buts
plus immédiats. En effet~ la vente de nouveaux titres de
propriété fournit des fonds permettant de diminuer la part
de l'autofinancement consacrée au remboursement des dettes.
Les managers peuvent encore désirer, par l'émission de ces
titres, faire mieux connaître leurs firmes et, tester leur
valeur sur le marché.
3°) L'autofinancement--
Ce mode de financement interne ne fait pas appel
l des actionnaires ~ouveaux. Les tonds proviennent essen-
tiellement de la rétention partielle ou totale des bénéfi-
ces et de l'amortissement~ accessoirement des provisions,
après impôt.
Dans la mesureoù la théorie contemporaine étu-
die d'une manière plus approfondie le phénomène de crois-
sance qu'illustre la politique des firnes dont les activi-
tés prennent de plus en plus de l'extension, le finance-
ment des investissements devient un souci majeur des di-
rigeants . C1 e st alors que contrairement à la théorie
classique de l'équilibre et à la théorie keynésienne où
les problèmes de l'autofinancement n'interviennent pas(l)
Ces m:xlèles théoriquEs ne voient aucun rapport entre autofinan-
cement et investisserœnt. Dans la théorie traditiomellE' :.1e"eix
soot des prix parfaits déterminés par les conditions du ~
tandis que
.../ ...

- 118 -
l'approche moderne n'ignore pas le principe d 1 autofinance-
ment avec l'importance prise par la croissance, bien sûr,
mais aussi par la concurrence p.tran~ère et le resserrement
des possibilités de financement externe. L'analyse actuel-
le se trouve ainsi incitÉe & donner une influence au
finance-
ment interne des investissements en particulier à l'une de
ses D~incipales sources~ l'autofinancement (ou·cash-flow).
A l'égard de celui-ci~ Pattitude norn:ale sinon rationnel-
le des dirigeants consiste en une action sur sa composante
qui réduit le plus les char~es de leurs entreprises. Cet
élément favorable à l'amélioration de la structure finan-
ci~re des firmes serait l'a~ortissement qui revêt dès lors
un intérêt et un sens nouveaux dans un univers économique
transformé.
L'amortissement, effectué naguère dans un milieu
industriel stationnaire qui l'assimilait ft un simple rem-
placement de l'équip~ment existant, s'avère de nos jours un
mode de financement de l'expansion que les dirigeants uti-
~sy...t.,111W'
lisent comMe une variablevcomparable à ltinvestissement.
De ce point de vue, l'amortissement caractérise
la structure de l'autofinancement et. son niveau varie
suivant les entreprises en fonction de leur secteur, des
r§sultats obtenus et du r€gime
fiscal auquel elles sont
assujetties. Mais il arrive parfois que, pour financer
leurs investissements) des entreprises optent pour les
... / ...
les investisserœnts le sont par des considérationa
ptn'enF-nt tech-
niques, d'où une dichotomie entre flux réels et flux financiers.
O1ez Keynes nous trouvons un raisomement à court terme et, mêlœ
si les entreprises sont arrenées ~ investir, l'offre et la derrarrle
de capitaux s'équilibrent autonatiquerœnt grâce à la flexibilit6
parfaite du taux de l'intérêt.

- 119 ~
b6n~rices non distribués ou même pour les émissions d'ac-
tions au pair plutôt que pour l'amortissement.
De toutes manleres, quel que soit le facteur
qui prédomine, c'est l'autofinancement qui assure aujour-
d'hui la plus ~rande partie des investissements des fir-
mes. Preuve en est~ entre autres, l'iMportante société
chimique américaine, Dow Chemical, qui donne la priorité
à l'investissement. Selon le président du ~roupe , 5,5
milliards de dollars seront investis de 1975 à 1979, dont
40 % hors des Etats-Unis. La mar~e brute d'autofinancement
qui, en 1977, excède le milliard de dollars, offre la ca-
pacité financière permettant de soutenir cet effort.
§ 2 - L'équilibre de l'entreprise en croissance
Cet équilibre s'identifie à l'équilibre finan-
cier de l'entreprise dans la longue période et, peut être
abordé selon le point de vue classique ou selon la vision
moderne.
Notre cho~x, dicté par le souci du réalisme,
nous affranchit de l'optique traditionnelle de l'équili-
bre fondée sur l'idée simpliste de l'égalité du prix du
marché qui est une donnée et du coût moyen de production.
Il se tourne de ce fait du côté des penseurs modernes
qui cherchent eux à connaître la structure financière de
l'entreprise et les manifestations de sa
vulnérabilité.
Option d'autant plus séduisante qu'elle touche la ques-
tion essentielle de politique de l'entreprise, notamment
en matière de financement des investissements. C'est di-
re que le problème de la structure financière~ relié à
celui-ci, apparaît déterminant à l'entreprise confrontée
à un risque technico-éconornique qui conduit lui-même à
un autre type de risque, le risque financier. Alors que
ce dernier, défini par liinsolvabilité de la firme,est
déterminé par la décision de financement des responsables

- 120 -
de celle-ci, le risque technico-économique afférent à l'ac-
t;vité correspond ~ une dispersion du résultat d'exploita-
tion et, est déter~iné par une décision d'investissement
avec un profit attendu aléatoire.
Un rapide coup d:oeil sur ce qui a été dit dans
le paragraphe 1 de cette section montre clairement qu'une
structure financière favorable permet de mobiliser les som-
mes nécessaires à l'investissement, renseigne sur les déci-
sions tant de production que financières des dirigeants,
des actionnaires et des créanciers face aux risques qui
influencent le remboursement des emprunts et le paiement
des dividendes.
L'entreprise qui parvient, dan~ ce cadre specl-
fique, à hono~er ses dettes à l'échéance et à rémunérer
les actions, a vraisemblablement équilibré ses fonds pro-
pres et ses emprunts, pris des décisions en particulier
financières en s'appuyant sur une rationalité du risque
global (ensemble de risque technico-économique et de ris-
que financier).
Un choix de la structure du capital financier
se pose donc à la firme qui penchera pour la structure
qui accroit sa valeur ou ~ui englobe le minimum de risque.
Si toute décision d'investis~ement est fonction
de sa rentabilité évaluée au niveau du résultat brut d'ex-
ploitation, la valeur de l'entreprise quant à elle est per-
çue différemment par les actionnaires et par l'entreprise
en tant qu 1 organisation. Pour les actionnaires, ce Qui
compte c'est le montant des dividendes distribués, tandis
que pour l'entreprise représentée par les managers, le
cash-flow a plus d'intérêt dans la mesure où il autorise
la croissance par autofinancement. Mais que tel ou tel
critère d'appréciation soit retenu pour évaluer la firme,
il y a toujours influence du bénéfice net sur les princi-

- 121 -
paux indicateurs.
Nous savons qu1à l'entreprise est associé tout
risque causé par l'alé~ du rendement. L'unité de produc-
tion n'est dons pas invulnérable puisque, recherchant la
croissance par augmentation de sa taille, elle effectue
des investissements qui sont, ~ n1en pas douter, déposi-
taires de risques qui la rendent perméable. Cette vulné-
rabilité, mettant en cause la survivance de la firme, a
été étudiée par ~1. SHURIK qui en distingue trois sortes
à lonr:; terme
1) la vulnérabilité commerciale qui dépend de
la structure des frais généraux, des possibilités de dif-
férenciation du produit, et de la demande à long terme ,
2) la vulnérabilité financière qui dépend du
total des capitaux d'une entreprise et du crédit qu'elle
peut se procurer pour une lutte de survie
3) la vulnérabilité du contrôle qui dépend de la
façon dont les actions sont réparties, de l'importance
des émissions et de la structure de la dette(l).
Arrivés au terme de notre analyse de l'équili-
bre financier de la firme, nous allons inférer en disant
que la théorie financipre moderne essaie de saisir la
structure financière de l'entreprise, sa politique de di-
videndes, ses choix d'investissement qui sont des éléments
de mesure de sa valeur. Cette théorie tend à l'équilibre
(1) M. SHUBIK S ii Stra tér-;ie et Structure des Marchés!1
traduction française de P. Pascal~ Dunod, Paris,
1964, pp. 254-255 .

- 122 -
financier et s'insère dans le modèle de croissance de la
firme dont l'évolution se fait dans l'incertitude d'un
contexte qui s'identifie au marché olieopolistique.
Nous examinerons~ dans la section qui suit, les
relations d'échan~es interindustriels que nouent les fir-
mes entre elles. En nous reportant au tableau input-output
(entrées et sorties) de Léontief, nous trouvons là un é-
clairage nouveau de la croissance et des économies d'échel-
le.
Section III
L'ANALYSE DES RELATIONS PJNCTIONNELLES
Cette section a pour but de mettre en évidence
les liaisons technico-économiques existant entre les fir-
mes ou branches industrielles. De tels rapports contribuent
à la connaissance de la croissance des firmes en cause et
à une allocation efficace des ressources. C'est pourquoi,
dans le cadre de leur programme économique et de la pla-
nification, les responsables nationaux recourent R la mé-
thode input-output. En effet, ils utilisent le tableau
de Léontief pour calculer des ooefficients techniques de
production qui expriment, comme le note le professeur
J. f'JI.ARCHAL~ l'en pourcentage, les quantités de chaque ma-
tière première que les entreprises d'une branche doivent~
en moyenne, dépenser pour obtenir une unité de produit.
Ils mesurent l'efficacité de la branche, compte tenu des
procédés de fabrication utilisés, de l'habileté de la
main-d'oeuvre, du volume et du genre de l'outilla~e,
de l'importance relative des différentes entreprises:l (1) •
(1) J. MARCHAL, liCours d'économie politique générale?), la Cité du
Droit, Paris, 1967-1968, p. 1.(,5

~ 123 -,
Dans le même temps} ils évaluent, pour chaque bien, une
demande finale avec la production correspondante.
~ 1 - Les relations d/échange entre branches industrielles
Au niveau des différentes branches industriel-
les, il s'établit des relations ryar l'intermédiaire de
leurs achats et de leurs ventes. Ces relations sont réca-
pitulées dans un 1 tableau dféchanges interindustriels 'l où
apparaît ce qui sort de chaque branche (ventes ou outputs)
et, ce qui y entre (achats ou inputs). L1 0u tput d/une
branche étant nécessairement l'input d'une autre.
Nous ménerons notre raisonnement à partir du
système statique ouvert de Léontief, système où les varia-
bles non déterminées deviennent des variables indépendan-
tes, exo~ènes au modèle. Tel est le cas des demandes fi-
nales de biens et de services qui sont fixées en dehors
du syst~m~ par une action des pouvoirs publics par exem-
ple. En outre~ notre attention se portera sur les bran-
ches plutôt que sur les secteurs car la notion de branche
qui regroupe des unités de production se consacrant à la
fabrication d'un seul et Même produit est préférable à
celle de secteur pour l'analyse des nhénomènes techniques,
c'est-à-dire des phénomènes liés au procédé de fabrication
utilisé qui exige la conso~~ation d'une quantité de matiè-
res premières pour obtenir une quantité de produit.
L'instrument que constitue le tableau d/échan-
ges interindustriels ou d 1 entr6es et de 80rties donne une
image du système productif national et de sa structure
à une période déterminée qui est l'année. Schématique-
ment, nous avons une matrice à n biens et
services, et
n branches dont chacune produit une et une seule catégo-
rie de bien ou de service. Cette matrice est exprimée en
valeur en évaluant les quantités aux prix d'une année

-, 124 -
choisie
comme année de base. Son utilisation fournit des
volumes d'emplois finals en rapport avec les productions
des tranches considérées.
Pour mieux comprendre le modèle interindustriel,
nous allons en donner une représentation générale et sim-
plitiée en construisant ci-après un tableau qui rassemble
les consommations intermédiaires, les facteurs productifs
ou facteurs primaires (trav~il, capital, ressources natu-
relles), les demandes finales et les productions totales
des branches. Le fait de ne pas décomposer les emplois fi-
nals en consommation, formation brute de capital rixe,
exportations et variations de stocks comme celui de négli-
ger l'Extérieur, n'empêche nullement de dé~ager les gran-
des lignes de la mét~ode.
(
:
.
.
)
(
:Coneommations intermé- :Dernande
:
)
(
diaires
finale
Ei'rploi :Productie+
(
0
(
:Branches
:'Ibtal des:
total ; tot91e )
: 1 ... i ... n
Col.
0
(
0
Y
(
%
h
Zh
\\
)
)
~
:
Branche
1 ~ X11 .. ·Xti .• ,X1n :
C
Y
1
1
Z1
~ Xt=
( productive.
Zt~
· .
)
(Xm
. 0o .
)
(
:
0
~
)
(
h ~ ~1 . o. Xm···Xtm :
Ch
Yh
Zh
Xn= Zh )
.
(

0
)
(
0
· .
:
)
.
(
:
n
(
: Xn1 · ..
o
>;U···Xnn:.
Cn
Yn
Zn ; Xn= Zn~)
( total
(
~ ~
)
(des C.I.
B1
B·J.
Bn
)
(
)
(
:
)
( Valeur aj ou-' :
)
(tée (facteurs : V

)
V
Vy
V
V
)
(primaires) V1: 1
J.
n
~
~PrOduction :
... )
(
totale Xi; X1
~
Xn
y
Z
; X= L )
(
)

- 125 -
La transcription horizontale permet de lire pour
chaque branche, dans la colonne Emploi final total, sa part
dans la production nationale. La transcription verticale,
elle, montre les rémunérations (salaires, intérêts, etc.)
des facteurs primaires consomnés par chaque branche. L'en-
semble de ces rémunérations constitue le coût des facteurs
primaires ~ il correspond aussi à la valeur ajoutée par
une branche. Toutefois cette lecture verticale du tableau
n'informe pas sur la quantité de travail inclus dans les
produits fabriqués p2r d'autres branches et utilisés comme
biens intermédiaires.
En mettant ainsi en évidence les relations tech-
nico-économiques existant entre les branches, nous faisons
ressortir des coefficients de transformation de produits
intermédiaires en produits semi-ouvrés ou finis. Le mode
de calcul de ces coefficients techniques de production
est assez si~ple.
Désignons par X~ la production de la branche
, - '
1
1 J.
1
i
à l annee 1 et C1i ' C2i ' ..• eni les consommations in-
termédiaires de la branche dans la même période . Ces der-
nières sont donc fonction de la production ; nous pouvons
alors écrire
1
1
1
1
C +
(1)
1i
C2'+"'~'
' J
l
l
= Xi
ou
S~ =
~.
xi
h
Le coefficient
technique de production qui se dé-
finit comme le rapport de la consommation intermédiaire
du produit h de la branche i par la production de la bran-
che i est
=rtt
(2 )
'"

- 126 -
La constante a
que l'on app~lle coefficient
hi
technique indique en pourcenta~e les quantités de matières
premières h requises, en moyenne, par les entreprises de
la branche i pour fabriquer une unité mon~taire du produit
X. dans l'année 1 .
'1
a
est inférieur à l'unité.
hi
En remplaçant dans l'équation (l') C~ipar sa va-
leur tirée de l'équation (2), nous obtenons
x~
~.--
1
= /<.--- ah·1 X·
.l.
1
h
ou, en développant la somme
( 3 ' )
En généralisant cAci à toutes les branches, nous
aurons les coefficients techniques de chaque consommation
intermédiaire pour chaque branche. La réunion de cesroef-
fjoients dans un tableau carré donne ce que l'on appelle
la matrice des coefficients techniques ou matrice A qu1
se présente COMme suit :
~~
)
1
2
3 .. .
h
i
n
)
(Produit
.
)
(
~
)
(
1
a
a
)
ll
12 a 13 · .. a 1h
a li · .. a ln
(
)
(
2
a
a
)
21
22 a 23 ···a2h
a
(
2i ···a 2n
)
(
)
3
a
a
a · ... a
(
31
32 a 33 •· .a3h
31
3n
)
(
:
.
)
(
)
(
h
a
a
hl
h2 a h3 ···ahh
ah· ... ah
)
(
1
.n
)
i

a
a ..... a .
(
.1 l
i2 a·1 3 ·· .a·1 hl
11
ln
)
(
(
(
n
a
a
j
n1
n2 a 3··· a h
a .... an
n
nl
nl
n
(
)

- 127 ..
Si nous considérons par exemple .le produit h
A la période 1, nous voyons que son emploi total est cons-
titué par "la somme de son e:mnloi intermédiaire par toutes
.le3 branches et de son emploi final.
+
yl
(4)
h
En appliquant cette égalité à l'ensemble des
produits et en utilisant l'écriture matricielle, nous
avons :
<4 i )
<Xl ~ t
t l
t
-
l
,,1
Y1
A l ·
d
e an
e vec eur co onne ."'1 ••• I~n"
a matrlce
es
coefficients techniques et, yl le vecteur-colonne Yî ... y~)
D'où l'on tire
· 1 1
ou encore
<1- A) X= Y,dana laquelle, l
est une matrice-unité.
Le problème consiste 2 déterminer la production
1
X nécessaire pour répondre à une demande finale donnée,
ce que nous traduisons par l'expression
( 1 -A) est appelée matrice de Léontief et, c'est à par-
tir de son inverse que nous pouvons trouver une solution
au problème de la détermination de la production Xl qu'il
faut pour satisfaire une unité monêtaire de demande fina-
le.
Le caloul de la matrice inverse étant très long,
nous le supposons connu et résolu.

- 128 -
Ce qui importe surtout crest de savoir quelle
est, au niveau de l'économie industrielle, de la croIs-
sance des firmes en particulier, la signification écono-
mique de la méthode d'inversion des matrices?
Nous avons ~ontré l'existence d'une matrice de
coefficients technologiques du type a
qui mesure la
li
quantité du bien h utilisé pour obteL~r une unité de pro-
duction Xi' A l'opposé, il nous faut parler rapidement
de l'inverse de la matrice Cl -A) qui fournit des ooeffi-
cients du type b
qui mesure la quantité totale de l'im-
hi
put h nécessaire pour avoir une unité de la demande finale
",~.
A partir de la nouvelle matrice obtenue, nous
pouvons calculer la production totale X~ de la branche i
~
à l'année 1 qui doit satisfaire la demande finale y~ ,
~
Pour cela nous devons multiplier les vi par les coeffi-
cients techniques b
dont les valeurs sont données par
hi
la matrice inverse et faire ensuite une sommation.
Dans le but de compléter les calculs pour les
rendre plus précis,il convient de tenir compte des res-
sources naturelles, des services rendus par les facteurs
travail et capital achetés à des agents extérieurs au
système et qui sont autant de sources de coûts pouvant
influencer les éventuelles économies d'échelle,
Si au cours de notre exposé du tableau d'entrées
et de sorties nous n'avons pas fait mention de réduction
de coûts dûe à un accroissement de la production ou d'é-
conomies d'échelle, c'est eimplement par souci de fidélité
au modèle fondé sur des postulats telle la stabilité des
coefficients techniques.
Il est évident cependant, nous le verrons dans
le para~raphe 3 consacré aux limites du tableau d'échanges

.- 129 ~
interindustriels, que ces coefficients se modifient bien
d-'ns le temps, du moir!s en lono;ue période. Cette varia-
tion leur donne plus de sens et d'intérêt, incitant alors
à calculer des coeffi.cients techniques pour ces facteurs
primaires acquis hors du système, c'est-à-dire n'ayant pas
fait l'objet de transactions entre les entreprises du ta-
bleau. L'insertion de ces nouveaux éléments dans la matri-
ce technolo~ique initiale donne une seconde matrice sensi-
blement différente puisque rectangulaire elle est inversi-
ble.
L'illustration est fournie pas le schéma ci-des-
sous simplifié à trois branches et trois facteurs primai-
res que nous faisons figurer en bas du tableau •
Ces coefficients ont-ils vraiment un sens éco-
nomique ? En d'autres termes permettent-ils d'appréhender,
toutes choses égales par ailleurs, les économies dûes à
la mise en oeuvre d'une meilleure technologie?
Répondre à cette question équivaut à souligner
les avantages du système de Léontief, à montrer son utili-

- 130 -
sation.
C'est ce que nous allons tenter de faire.
§ 2 -
les qvarrtages de l'an~lY3e interindustrielle
Souli~ner les avanta~es du modèle de Léontief
dans le cadre d'une analyse de la croissance de branches
industrielles accompagnée d'une réduction des coûts de
production, revient à montrer l'accroissement de la pro-
duction des firmes avec les économies qui s'y dégagent.
Quien est-il exactement avec le système? Permet-il d'ar-
river ~ pareil résultat ? Il ne le semble pas, bien que
le tableau d'échanges interindustriels indique approximati-
vement la valeur des biens et services ainsi que les coûts
des facteurs.
Les informations sur les structures technico-
économiques et les interdépsndances des différentes bran-
ehes obtenues grâce à une analyse rétrospective des coef-
ficients de Léontief permettent de comparer les structures
éconoœiques de ces branches et les modifications techni-
ques apportées. Cette comparaison a l'avantage de faire
ressortir les performances relatives des branches ou
leurs niveaux rel~tifs d'efficacité dans l'utilisation des
ressources. Les interdépendances fonctionnelles constatées
ne sont pas seulement d'ordre technolo~ique, elles revê-
tent encore un aspect économique dès lors que
des varia-
tions de prix relatifs peuvent conduire à des substitutions
dans les quantités, suivant la nature des produits ou des
facteurs employés. Les liaisons technico-économiques des
entreprises ont fait l'objet, depuis un certain nombre
d'années, d'études approfondies dont les résultats ont a-
bouti à la construction de tableaux retraçant la hiérarchie
des industries. Parmi ces travaux arrêtons-nous à ceux de
M. H. AUJAC qui éta~lissent un classement des branches se-
lon le critère du "meilleur client 1i d'après les achats.

~. 131 -
V1Soient deux industries i et k dont nous voulons analyser
les relations réci~~oques. L 1 industrie i est meilleure
cliente" de k et k ne l'est de i, si le
pourcentage des
achats de i dans la production de k est superleur au pour-
centage des achats de k dans la production de i,,(l). Nous
avons là un critère qui rend compte de l'effet de domina-
tion et qui traduit mieux l'or~anisation des économies
industrielles lorsque le tableau carré des consommations
intermédiaires est triangulable, lI c 'est-à-dire chaque fois
qu'il est possible, par simple chan~ement de l'ordre d'é-
numération des industries, de faire passer toutes les con-
sommations intermédiaires au~dessous de la diagonale prin-
cipale, la partie du tableau situé au-dessus de cette dia-
gonale étant vidii (2). A titre d'illustpation, nous em-
pruntons à Aujac l'exemple ci-après.
Soit une société composée de n branches, on dé-
termine pour chacune d'elles le nombre de ses relations
d'achats avec les n-l branches restantes. On classe ensui-
te les bpanches d'après le nombre décroissant des relations
d'achats.
En retenant cinq branches A, B, C, D, E, (n = 5)
nous avons les tableaux suivants :
(1) H. AUJAC, "La hiérarchie des industries dans un tableau
des échanges interindustriels et ses conséquences sur
la mise en oeuvre d'un plan national décentralisé~ Revue
économique, n8 2, mars 1960, p. 186 .
(2) ibid., p. 187

- 132 -
Tableau de départ :
De!M.n:ie
Production
A
B
C
D
E
finale
totale
ft.
1111
12
(,
0
0
112
130
B
0
1111 ;
8
0
0
92
100
C
0
0
1111
0
0
50
50
D
2
5
8
: 1111: 5
60
80
E
14
6
10
0
: 1111.
40
70
Tableau ordonné :
Demande
Production
C
B
A
E
D
finale
totale
C
:11111
0
0
0
0
: 50 :
50
:
B
8
:1111: 0
0
0
: 92 :
:100
A
6
12 :1111: 0
0
:112
:130
E
10
6
14 :1111:
0
40
70
D
8
5
2
5
:111/:
60
80
quelle que soit la branche choisie dans le tableau ordon-
né, les branches situées en amont dominent celles qui sont
situées en aval puisqu'elles leur achètent sans rien leur
vendre. Aussi, un accroissement de la production des bran-
ches dominantes donc de leurs achats intermédiaires aux
branches dominées entraîne une augmentation plus forte de
la production de ces dernières et par conséquent de leurs
consommations intermédiaires.

.- 133 -
Les structures technico=éconoBiques de l'acti-
vité industrielle saisies du point èe vue de la techno-
logie et de la hi~rarchie des branches, n'ont pas pour
unique but de favoriser les comparaisons entre unités
productives et d 1 en tirer les conclusions qui s'imposent.
Elles sont encore d'une ~rande utilité pour le planifi-
cateur qui doit faire des prévisions, c'est-à-dire des
estimations des activités économiques futures sous cer-
taines conditions. Informé des préférences et des déci-
sions des agents, il va s'efforcer, avec les ressources
disponibles et les chan~ements imprévus des variables,
d'atteindre les objectifs fixés tout en masimisant les
satisfactions. Il lui faudra établir la demande finale
et déterminer la production totale.
D'une manière générale, le tableau interindus-
triel constitue un instrument d'analyse qui facilite la
coordin~tion des objectifs dans la société. Toutefois
des hypothèses simplificatrices créent des difficultés
d'application qui en restreignent la portée.
§ 3 - .
Les limites de l'analyse
L'analyse du tableau des entrées et sorties a
montré les services que nous pouvions en attendre. Les
avantages rencontrés tant dans l'étude des structures
techniques que dans le domaine de la prévision des acti-
vités et de la planification seraient affectés par des
hypothèses simplificatrices qui oonstituent un obstacle
pour une meilleure utilisation du système .
Le rappel de ces hypothèses met à jour les im-
perfections de la méthode et es Gaie de pousser en fin de
compte à une analyse des interdépendances structurelles
plus proche de la réalité, donc plus appropriée aux o~jec­
tifs recherchés. Les contraintes théoriques imposées au

,
-,
. 134 -
/
système par Léontief lui-ffiême sont
- la constance dès coefficients techniques. Cette
constance implique une stabilitê des conditions technolo-
giques valable en courte période
mais non en longue pério-
J
de. C'est qu'à un moment, le progrès technique peut entrai-
ner une combinaison de facteurs de production économique-
ment optimale, provoquant alors une évolution des coeffi-
cients techniques. De même la concentration qui mène à la
disparition des entreprises les plus vulnérables technique-
ment et financièrement, modifie la combinaison productive
de la branche et p~r suite les coefficients de transforma-
tion. Dans toute société industrielle, la croissance demeu-
re une priorité qui assure survie et maintien de la firme
sur le marché. La technologie, partie intégrante de la po-
litique de croissance, contribue à une meilleure allocation
des ressources et des facteurs.
Si la difficulté principale du modèle semble être
le caractère stable des coefficients, il en est une autre
constituée par les rapports entre branches qui sont plutôt
des relations existant entre des ~roupes de produits qu'en-
tre des produits seuls.
~ l'homo~énéité des branches. Celle-ci appelle des
produits identiques fabriqués par des ehtreprises ayant
la
même dimension. On espère atteindre cette homogénêité
en augmentant le nombre des branches. Cependant rien ne
dit qu'à force de les multiplier, on parviendra, pour la
fabrication d'un même
bien, à des fonctions de production
semblables pour toutes les entreprises. Au contraire, en
voulant trop décomposer les branches, il risque de se mani-
fester des effets de substitution.
- l'absence de substitution. Cette hypothèse rejoint
l'idée selon laquelle les facteurs de production sont com-
plémentaires. Or ceux-ci sont plus ou moins concurrents et,

- 135 -
les variations de leurs prix relatifs les rendent substi-
tuables. Par implication
la structure des consommations
J
intermédiaires changent, entraînant modification des coef-
ficients techniques. Les produits à l'intérieur des bran-
ches deviennentdes substituts parfaits.
- enfin, avec l~ stabilité des coefficients a
, il
hi
est admis implicitement que les consommations intermédiai-
res varient proportionnellement à la production. Les ren-
dements sont constants, aussi il n'y a ni économies ni dé-
séconomies d'échelle. Les firmes d'une branche ont les mê-
mes caractéristiques et se comportent pareillement.
La réalité est~ bien sar, différente. Les firmes
les plus dynamiques vont chercher à accroître leur produc-
tion en créant de nouvelles entreprises ou encore, le pro-
grès technique aidant, à étendre celles.dèjà existantes.
Der; économies de consommations intermédiaires apparaissent
surtout dans le cas d'extension des unités productives.
En définitive~
vue sous l'an~le de la croissance
ct des économies dïé~helle, la théorie de la firme est-elle
scientifique? Nous ~ e l'affirmerons que si nous arrivons
à la vérifier. C'est pourquoi nous abordons dans une secon-
de partie l'étude empirique des relations croissance-écono-
mies d\\échelle dans le monde industriel contemporain.

DEUXIEME PARTIE
ANALYSE DES RELATIONS EFFECTIVES ENTRE
LA CROISSANCF ET LES ÉCONOMIES D'ËCHELLE
DANS CERTAINES BRANCHES INDUSTRIELLES
( LE CAS DE LA CHIMIE, DE LA SIDtRURGIE,
DU TEXTILE, DU CIMENT)

- 137 -
Dans la première partie
nous avons procédé à
j
un développement méthodologique des économies d'échelle
et de croissance des firmes tout en essayant de concilier
la théorie et la réalité.
La deuxièQe partie aura pour but de compléter
plus parfaitement la précédente par une approche réelle
des faits. Sa subdivision se fera en deux chapitres.
Le premier sera consacré à la présentation pra-
tique du problème, ce qui permettra de dégager des résul-
tats fondamentaux du cadre partiel de la branche. Ce con-
texte particulier présente encore l'avantage de conduire
à une analyse précise d'où nous pourrons saisir les lignes
d'action politique des entreprises.
Le second chaDitre porter0, par conséquent, sur
les objectifs et les st""'atégi<è:s des firmes. Comme pour
toute poli tique dans un système libéral de illaissez-fairéi ,
il exist~ des mesures pour adapter celle des firmes aux
ressources du pays et à la structure industrielle désirée
par la Puissance publique.

- 138 -
CHAPITRE III
LA RELATION CROISSANCE-ECONOMIES D'ECHELLE
DANS L'ENTREPRISE MODERNE
L'examen de la croissance de l'entreprise et de
certains de ces avantages) en l'occurrence les gains d'é-
chelle) nécessite une vérification dans les faits.
Une analyse de cette nature qui ne découle donc
pas de l'observation s'identifie à une théorie non scien~
tifique qui s'enlise immanquablem~nt dans l'abstrait.
Dès lors et à partir de cas concrets de branches
à activités et nationalités différentes~ nous allons tenter
dE; si tuer les rapports croissance-économies de dimension. Pour se
faire) nous devons s'=1voir pourquoi les éntreprises d'une même
branche croissent à des rythmes inég::lUx et se distinguent par
leurs performances. Un exposé empiriquE; du comportement des
firmes fournira la réponse. Il met effectivement en évidence
les relations entre la rentabilité des firmes, leur coût~
leur taille et leur croissance. Aussi considérons-nous
l'évolution des firmes comme un objectif pr~occupant de la
politique des dirigeants.
Section l
LA SITUATION DE BRAl~CHES INDUSTRIELLES DANS CERTAINS PAYS
(l'exemple de la chimie, de la sid2rurgie ... du textile, du ciment)
L'analyse de la liaison entre la rentabilité et
lIa taille des firmes a déjà eu des promoteurs. Parmi ceux~
ci~ HALL et WEISS ont le plus retenu notre attention(1).
(1) M. Hall et L. Weiss.~ iiFirm size and profitabilityll~
Review of economics and StQtistics ~ août 1967, P. 317

- 139 -
Ces deux auteurs ont men§ leurs tr~vaux dans un esprit de
modèle économétrique en eX2minant un échantillon de 341
entreprises américaines sur une période de six années
(1957-1962). L1intérêt de leur d~couverte réside dans
l'existence d1une corrélation positive et significative
au seuil de 5 % entre la taille des entreprises et leurs
taux de profit. D'autres études(l) lient la rentabilité
des firmes à leur croissance en observant l'impact des
taux de profit sur la dimension. Certaines encore(2) con-
cernent la relation coût-taille des firmes.
Ces trois types d'analyse qu'il est inutile de
détailler ou de résumer ici, ne sont pas indépendants, au
contraire ils s'interpénètrent puisque toute modification
du profit qui permet le financement d'investissements en
vue de la croissance se répercute automatiquement sur les
~elations entre l~ r2ntabilité et la taille, entre les
coûts et la taille, soit en dernier lieu sur les perspec-
tives même de croissance.
En ce qui nous concerne nous n'avons pas l'am-
bition de ces travaux, encore moins la prétention de four-
nir des preuves économétriques. 3i c'était le cas~ nous
intitulerions notre sujet autrement et y adapterions notre
raisonnement. Aussi, avec les renseignements àont nous
disposons, nous nous bornerons à retracer simçlement la
(1) - T. Barna, 11 Investment and growth policy in Bri tiS'l
industrial firm", Cambridge University Press, 1962.
- W.T. Jones, "3ize, growth and profitability", Natio-
nal Economie Development Office, London, 1969.
- A. 3ingh et G. Vlhittington, l!Growth, profitability
and valuation ll , Cambridge University Press, Carrbridge, 1968.
(2) 3. Hymer et P. Pashigian, HFirm size and rate of growthll ~
Journal of political economy, déc., 1962, PP. 556-569.

- 140 -
situation de quelques branches industrielles eu égard à la
dimension des firmes qui les composent, aux taux de pro-
fit, etc ...
§ 1 - La liaison taille-rentabilité des firmes
Ressortir le lien entre la taille et la rentabi-
lité revient à poser la question de savoir
~'il existe
une dimension optimale
de l'entreprise en deça ou au-delà
de laquelle elle serait dévavantagée. Pour y répondre nous
allons examiner, dans chaque branche, les résultats obte-
nus par des firmes originaires surtout de pays développés,
en retenant comme taux de profit, pour mesurer la rentabi-
lité, le rapport Bénéfice net/Actif total et, co~me crit~e
de taille, le chiffre d'affaires ou ventes. Nous sommes
ainsi conduits à parler de l'évolution de ces entreprises.
Prenons d'abord la chimie. Cette profession
souffre d'une surcapéLcité de production et du prix trop
bas des fibres, des plastiques, des engrais. Comme dans la
plupart des branches, elle a subi le contrecoup de la cri~
se. Les taux de profit y ont commencé à croître avec la
taille avant de se stabiliser et de décroître ensuite à
partir d'une dimension correspondant à la taille de ren-
tabilité optimale. Le tableau suivant (voir page 141)
donne des résultats d'entreprises (chiffres d'affaires~
taux de profit)(1) en 1976, 1977 et 1978.
Si les firmes retenues voient leurs chiffres
d'affaires s'accroître régulièrement, ,à l'exception de
Sumitomo Chemical, toutes par contre sauf Du Pont deNemours
(1) Les chiffres d'affaires ainsi que les données (bénéfi-
ces nets, Actifs) qui ont permis de calculer les taux
de profit sont tirés de la revue "Fortune" des mois de
mai et août des années 19 7 7, 1978 et 1979.

PUt
tfU""§"j' "''1 W"
')
'+'
t"»
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-rl
1 9 7 6
1 9 7 7
1 9 7 8
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Chiffre d'af
taux de pro-
Chiffre d' af- taux de pro-
Chiffre d'af- taux de pro-
faires
fit (%)
faires
fit (%)
faires
fit (%)
EHTRf..:PR1SES
(en $)
(bénéfice net (en ~)
tbénéfice net
(en ~)
(bénéfice net
IActifs)
IActifs)
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.
-
.,.. - - -. - - - - - - - ...-. -., ~-
------------- -------------- ------------- ------------- ------------- -----------_.....
p
- j oe ctlS t
9.332.979.000
2,14
10.0!l1.671.00C
0,9 4
~2.068.207.00C
0,93
L .1.
Du Pcnt de
p emours
8.361. 000.000
6,53
9.434.800.00C
7,1
10.584.200.00C
9}75
l . c . I.
7.465.412.000
5,69
8.139 .1~'7 .OOC
4,35
8.701.4U.ooc
5,48
1
1 0
H
:1ône-Pot..~el1c
4.554.127.0001
1,54
4.804.839.00C
0,31
5.655.495.00C
0,84
sumitomo C"hemical 2.056.681.000
0,56
1. 838.992.000
0,22
2.285.309.00C
0,69
1
1
L

- 142 -
n'observent pas parallèlement une auz,mentation continue de
leur taux de profit. Cette irrégularité du taux peut être
imputée à la croissance de l'intensité du capital des fi~
mes. La chimie ét~nt une industrie qui fabrique des mil-
liers de produits en employant une main-d/oeuvre peu nom-
breuse, mais très qualifiée, 13 recherche et l'investisse-
ment y occupent une place de choix malgré l'importance de
leurs coûts. L'obtention du plus grand profit dans la
branche dépend alors de l'innovation, moteur de l'activité
des firmes chimiques, qui rend performantes les plus dyna-
miques et renforce leur position vis-à-vis des concurren-
tes. Toutefois, la poursuite du développement sur le mar-
ché d'un produit nouveau, d'une technique nouvelle, accen-
tue l'intensité capitalistique. L'excès de capacité qui
s'ensuit est générateur de baiss~ du taux de profit pré-
senté encore comme le rapport Marge bénéficiaire/Intensité
du capital ; en effet nous pouvons écrire :
Bénéfice net
Chiffre d'affaires
Bénéfice net
taux de profit
= -----~,.------ = - - - - - - - -
Actifs
Actifs
Chiffre d'affaires
Si à partir d'une certaine taille, l'accroissement de la
b ~ ~f· ..
(Bénéfice net
)
marge
ene lClalre
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d' ff .
ne compense pas
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u capl a
'Ch· ff
o'
d' f f ·
,
l
re
a
2lres
le taux de profit des firmes en croissance tend à diminuer.
Pour conclure, disons que dans l'industrie chi-
mique le taux de profit des entreprises en croissance est
positif, mais qu'à partir d'une certaine taille, il dé-
croît proportionnellement à l'augmentation de la dimension
Cette situation est sensiblement la même dans
les autres brancnes depuis que l'inflation perturbe les
économies nationales.

- 143 -
Dans la sid§rurgie 00 les aciers courants (tôles
de différentes épaisseurs, fer blanc, rails, profilés,
poutrelles, ronds à béton,
... ) constituent la forme de
production la plus importante, la crise a port§ un coup
sévère aux grands groupes, surtout occidentaux. Les gros-
ses pertes subies, les bas niveaux de profit enregistrés,
poussent les entreprises à arrêter leurs projets d'inves-
tissements ou à les réviser en baisse, ce qui provoque des
remous dans les syndicats. Compte tenu des conditions ac-
tuelles du march§ (contraction de la demande, augmentation
des coûts de production, expansion des capacités des pays
du Tiers Monde dotés d'industries sidérurgiques compétiti-
ves,
... ), les entreprises ne peuvent supporter des sur-
capacités de production qui deviennent de plus en plus
coûteuses. Aussi, dans la mesure où investissement et pr~
ductivité sont étroitement liés, les groupes sidérurgiques
limitent ou réduisent leur emploi d'équipements nouveaux
en vue d1améliorer la productivité.
Le tableau (voir page 144) montre la faiblesse
des taux de profit qui contribue à restreindre l'effort
d'investissement.
Nippon Steel et D.S.Steel ont majoré de près de
10 %, début 1977, le prix de leur acier afin de renforcer
leurs bénéfices grignotés par les coûts croissants du mi-
nerai importé, la progression des salaires et la réduction
forcée de leur production. British Steel fut contrainte,
elle aussi, d'élever les prix de certains de ses produits
(a~iers inoxydables, aciers ordinaires). Cette hausse est
en partie imputable à l'augmentation du coût du nikel et
du chrome importés, du fait de la faiblesse de la livre
sterling. La firme qui assure 90 % de la production de
l'acier britannique, a souffert notamment du fléchissement
de la demande
et de la série de grèves dans ses aciéries
galloises.

1 9, 7 6
1 9 7 7
1 9 7 8
"-----0"
._"--
1
1
1
-
n
1
-
Chiffre dl af-I taux de pro-
Chiffre diaf-j taux de pro-
Chiffre dl af- taux de pro-
.:::r
fit (%)
.:::r
faires
.
fit (%)
fit (%)
f alres
.,-l
faires
EWCREPR ISES
(bénéfice
(bénéfice
(bénéfice
(en ~)
,
(en #)
(en
r:et/Actifs)
$)
net/Actifs)
net/Actifs)
---~~-----~------~-~~-------~~-----------~-----------I-------
I
~
1--
--
t:J S.Steel
18.604.200 . 000 1
4,47
1 9.609.900. 0001
1,40
11
1
. 049 .500.00q
2,19
1
Nippon Ste~l
OO~
18.089.530.000 1
0,33
18.910.800.
0,74
1
9.521.847.00~
0,36
1
1
1
Thyssen
17.947. 640.0)0 1
1,86
1 8.3?5. 059 . 0001
1,14
1
9.182.135 ooq
0.1 8 7
)
1
British Steel
15.003.793.000 1
8,66
15.304.908 . 0001
2,25
1 5.673. 29a ooq
8,74
1
Schneider
13.040.785.000 1
0,15
3.719.314.001
0,10
4.704.937.00
0,08
1

- 145 -
De telles circonstances ne peuvent inciter les
entreprises à poursuivre leur investissement dans la sidé-
rurgie où la croissanc~~ modérée et heurtée
ralentit à
j
la longue le taux moyen d'expansion. Certaines
comme
j
Pont-à-Mousson~
essaient même de se dégager de l'acier
tandis que d'autres cherchent par la concentration, l'ac-
croissement de la productivité, la modernisation de l'é-
quipement, à lutter contre la détérioration des taux de
profit.
Le textile est confronté lui aussi
depuis un
j
temps, à des difficultés. Ces dernières proviennent de la
crise des fibres synthétiques aggravée par un déferlement
en Occident des articles des pays à bas salaires. Elles
ont été atténuées cependant par le nouvel accord multifi-
bre passé en décembre 1977 qui attribue des contingents à
chaque pays pour cha nue produit.
Les chiffres d'affaires des entreprises de la
branche,
variant entre 0,2 et 3 milliaràs de dollars, sont
à la mesure de la taille des unités de production où les
grandes sont moins fréquentes. Les effectifs allant de
moins de 250 à 150.000 personnes. En fait, l'investisse-
ment dans le textile ne progresse pratiquement pas à cause
de la mauvaise rentabilité des entreprises et lorsque de
nouvelles techniques sont mises en place, la qualité des
produits n'est pas toujours améliorée.
Face à la récession mondiale, à la concurrence
internationale, les firmes réduisent leurs capacités de
production. Actuellem8nt, l'industrie des fibres textiles
tourne à moins de 70 % de sa capacité dans l'ensemble des
économies développées.
L'industrie du ciment, utilisant plus d'énergie
(combustibles, électricité) que de main-d'oeuvre, est très
~apitalistique. Ses )roduits trouve~t des débouchés dans

.- 146 -
le bâtiment, le genle civil et les travaux publics dont
l'évolution entraîne celle de l'appareil de production de
la branche. Mais le développement de la cimenterie exige
des investissements importants que, faute d'argent~ l'en-
treprise ne peut faire qu1en recourant à la concentration.
Le regroupement lui confère finalement une taille qui ex-
cède les besoins du marché national pour opérer sur une
zône plus vaste. Ce processus d'extension est dictée éga-
lement, depuis 1974, par les récessions constantes, les
hausses de coûts, un niveau d'endettement élevé et un
vieillissement du matériel qui donnent à l'entreprise des
résultats décevants. La capacité normale d'une installa-
tion correspondant à une rentabilité passe ainsi en quel-
ques années de moins de 500.000 à plus d'un million de
tonnes par an.
~ 2 - La liaison rentabil~té-croissancedes firmes
Ce type de relation peut être la suite logique
de celui abordé dans le paragraphe ci-dessus. Il prend son
vrai sens dans un univers économique oG les méthodes mo-
dernes de gestion, la qualité des dirigeants, l'évolution
de la demande à la branche et la concurrence jouent un
rôle important. Ce sont des facteurs qui, dans leur ensem-
ble, s'avèrent décisifs pour une compréhension du compor-
tement des entreprises, de leurs objectifs et, une con-
naissance àe la dispersion des taux de croissance dans
chaque classe d'une branche.
En nous appuyant sur les r&sultats précédemment
observés des firmes, nous admettons l'existence d'une
liaison positive mais non linéaire entre la croissance et
la rentabilité. Dans la mesure où la rentabilité est Dro-
pre aux firmes en croissance, elle facilite leur finance-
ment interne ainsi que leur appel aux capitaux extérieurs.
Aussi, plus le taux de croissance est élevé, plus la ren-
tabilité tend à êtr~ forte si aucun~ perturbation ne sur-

- 147 -
vient pour enrayer le processus. Les entreprises qui sont
dans cette situation jouissent encore d'avantages inhérents
au rapport entre les deux variables. En effet~ lorsque des
firmes sont en croissance, il se crée une ambiance de tra-
vail, une atmosphè~e stimulante
favorable aux rel~tions
j
interpersonnelles. Les employ&s travaillent plus efficace-
ment ou pour une rémunération moindre quand ils sont payés
d'un autre côté par l"espoir~ le prestige et la sécurité
de l'emploi. Les fournisseurs deviennent plus tolérants à
llégard de ces entrepris2s en croissance et leur accordent
plus de facilités.
En regardant les résultats des firmes retenues,
il ressort effectivement que dans chaque branche, il y a
une relation non proportionnelle entre la rentabilité de
ces firmes et leur croissance. Dans le domaine de la chi-
mie, l'augmentation de la taill~ des unités n'est pas tou-
jours suivie d'une ~volution correspond~ntê du taux de
profit. Sauf Du Pont de Nemours et Sumitomo Chemical, les
autres entreprises (Hoechst, I.C.I., Rhône-Poulenc) ont vu
fléchir en 1978 leur taux de profit respectif par rapport
à celui de 1976.
Il en est de même dans la sidérurgie où Nippon Steel et
British Steel bénéficient d'un faible accroissement de taux.
Si dans ces différentes branches les entreprises
sont généralement de grande taille, dans le textile, ce
sont au contraire de petites unités de production que lion
rencontre. Cependant, malgré leur modeste dimension et
leur faible rentabilité, les entreprises textiles (Cour-
taulds, Kanebo, ... ) voient leur taux de profit s'accroî-
tre timidement depuis qu'il a été signé en 1977, l'accord
multifibre portant sur le contingentement des produits.
Au niveau de l'industrie du ciment, la situation
n'est pas aussi meilleure et les e~treprises cherchent à

- 148 -
se regrouper pour pallier la déficience de leur rentabi-
lité.
§ 3 - La liaison coûts-taille des firmes
Nous avons tenté jusqu'ici de dégager les avan-
tages économiques et technologiques que procure la c~ois-'
sance. Celle-ci confère en définitive à l'entreprise une
supériorité sur les concurrentes de même dimension quant
à ses coûts de production (coût en capital, coûts de la
main-d'oeuvre, des matières premières,
... ) influencés par
le progrès technique. Cet acquis de l'entreprise en crois-
sance conduit à une taille qui augmente avec l'outillage
conçu à partir d'une technique requérant moins de quantité
de travail et de matières premières. Cet équipement coûte
alors moins en capital par unité de capacité de production.
Etant plus perfectionné, il est aussi plus ren~able.
Les entreprises dynamiques recherchent en perma-
nence une plus grande efficacité dans l'emploi des facteurs
de production, notamment du facteur travail. Un fait à
noter toutefois est que les unités de grande taille utili-
sent assez souvent une main-d 1 oeuvre peu qualifiée, ce qui
leur donne des avantages économiques plus que technologi-
ques. A l'opposé, chaque invention qui débouche sur un
produit ou un procédé nouveaux accroît la productivité du
travail et procure des avantages d'ordre technologique.
Cependant, quelle que soit la nature des gains
attendus, la politique de l'entreprise reste l'adaptation
des coûts à la taille
c'est-à-dire l'établissement d'une
J
liaison inversement proportionnelle entre ses coûts et sa
dimension.
Dans une branche comme la chimie qui est une
industrie d'investissements élevés> les entreprises sont
de grande dimension L~ supportent d~3 coûts considérables.
1

- 149 -
L'invention qui caractérise la branche contribue à la
hausse des coûts avant que n'apparaisse 1 1 innovation.
La sidérurgie comprend de même de grandes unités
et les investissements y ont une durée de vie assez lon-
gue. Lorsque les usines sont anciennes comme aux Etats-
Unis, leur productivité est faible et leurs coûts impor-
tants. La recherche d'une meilleure productivité accroît
certes la capacité de production des entreprises, mais
compte tenu des difficultés actuelles de la branche, cet
accroissement s'assimile à une surcapacité, donc à des
charges supplémentaires.
Le textile et le ciment réunissent en général
de petites ou moyennes unités qui peuvent être dynamiques.
Elles adoptent une stratégie de productions à technologie
évoluée, à faible utilisation de main-d'oeuvre pour avoir
une souplesse plus grande dans l'ajustement de leurs fabri-
cations à la demande.

- 150 -
CHAPITRE IV
LA NATURE ET L'AMPLEUR DES RELATIONS CROISSANCE-ECONOMIES
D'ECHELLE
La nature et l'intensité des économies engen-
drées par la croissance reposent sur la politique des fir-
mes. Par politique, nous entendons l'ensemble des déci-
sions prises en avenir aléatoire dans l'espoir de parvenir
aux buts que l'on s'est fixés. Toutes les entreprises
définissent des objectifs avec, pour les atteindre, les
moyens techniques, financiers et commerciaux dont dispose
la direction générale. La dimension de la firme joue, com-
me les informations, les préférences ou les ambitions des
dirigeants, un rôle prépondérant dans l'élaboration de la
politique de l'entreprise et, la plupart des objectifs
sont exprimés soit en termes de rentabilité, de croissance,
de part de marché, de bien-être collectif, soit en termes
de sécurité, de prestige, ne pouvoir,
...
Section l
LE CONTENU DES POLITIQUES DES FIRMES
Actuellement, c'est d'une manière aigüe que le
choix d'une politique se pose ~ l'entreprise confrontée à
des problèmes qu'ignorait le déterminisme de la théorie
néo-classique qui lui assignait pour seul objectif la maxi-
misation du profit. Les économistes modernes, faisant preu~
de plus de réalisme, reconnaissent à l'entreprise la pour-
suite d'une pluralité de buts interdépendants avec pour
chacun une pondération. Le poids le plus fort revenant à
la cible principale constituée généralement par le couple
croissance des ventes-rentabilité, deux variables qui ne
vont pas l'une sans l'autre. Si la rentabilité requiert le

- 151 -
concours de la crcissance, c'est que les décisions, prises
d'une façon rationnel~e et optimale maximisent la crois-
sance pour un niveau de rentabilité donns ou inversement,
maximisent la rentabilité pour un niveau de croissance
donné.
Pour étayer notre raisonnement, voyons ~ présent
les décisions adopt0es un moment p~r les chefs d'entrepri-
se. Cela revient à examiner les éléments constitutifs de
la politique des firmes.
§ 1 - Les éléments constitutifs de la politique des
firmes
A l'intérieur d'une branche, les entreprises ne
poursuivent pas nécessairement les mêmes objectifs auxquels
de surcroît, elles n'accordent pas la même importance. Cela
explique vraisemblablement la différence de taille des
firmes et leur croissance à des taux inégaux.
Les élément- constitutifs f~ la politique des
sociétés industrielles se rapportent aux objectifs qu'el-
les ont définis et l~issent prévoir une croissance au
moindre coût en même temps que des bénéfices substantiels.
Mais dans l~ sidérurgie, la vulnérabilité des unités éco-
nomiques a amené les dirigeants à choisir une stratégie
pour résoudre les difficultés de leurs entreprises. Etant
une industrie lourde, cette branche nécessite d'importants
investissements qui ne permettent pas cependant de réali-
ser des marges bénéficiaires élevées. Elle doit supporter
des frais fixes et financiers qui ne cessent de se gonfler,
des coûts d'énergie et de matières premières toujours en
augmentation. Une surcapacité, des installations vétustes,
des prix élevés par rapport à ceux des concurrents étran-
gers, japonais en particulier, accablent les sidérurgistes
qui sont endettés. US Steel, le leader américain de l'acier
doit fermer son haut-fourneau de Homestead en Pennsylvanie

- 152 -
et, peut-être celui de Chicago où il emploie 6.500 person-
nes. Bethlehem Steel Corporaticn, un autre américain, qui
aura perdu environ 75 milliGns de dollars rien que dans le
nremier semestre de 1977, compte réduire ses capacités de
10 % (soit 2,6 millions de tonnes) et licencier 7.500 ger-
sonnes.
Ces déboires de la sidérurgie am~ricaine qui
sont aussi ceux de la sidérurgie d'autres pays industria-
lisés comme l'Allemagne, l'Angleterre, la France, etc . .. ,
ont fait réfléchir les managers d'outre-Atlantique qui,
désirant rester maîtres du marché américnin
préconisent
j
un freinage du flux des importations à meilleur marché et
une aide financière du gouvernement à l'instar de ce qu'on
voit en Eurnpe et au Japon. Une telle arientation straté-
gique se trouve renforcée par la faible productivité de la
sidérurgie américaine comparée surtout à la productivité
de la main-d'oeuvre japonaise qui est de 50 % sUDérieure(l~
Dans la chimie, les préoccupations sont à peu
près les mêmes que ce-les rencontréef dans la sidérurgie.
Partout les industries chimiques se débattent pour suppor-
ter une surcapacité qu'elles ont Dro~ra~~ée sur plusieurs
années. Du Pont de Nemours, Dow Chemical) Hoechst, I.C.I.,
Rhône-Poulenc,
~ •. sont des exemples édifiants. Dans cette
branche où le progrès technique joue un rôle primordial et
où les entreprises sont de taille internationale, les DO-
litiques ainsi que les stratégies se ressemblent. Il s'agit,
en passant par l'innovation, par des rachats d'entreprises,
voire par des regroupements entre unités nationales, de
mener une politique de diversification en dehors ou dans
(1) Un dirigeant sidérurgiste de Pittsburg.l1 ne déclarait-il pas que
les ouvriers étrangers travaillent plus dur. "Même si vos frais
de mqin-d'oeuvre sont les mêmes" se plaint-il, "cormnent arri.verez-
vous à rivaliser avec des ouvriers japonais qui chantent les hym-
nes de l'entreprise et font de la gymnastique pendant la pause du
déj eunel:' pour être en meilleure forme pendant le travail" ?

- 153 -
la branche. Hoechst a acquis tout derni}rement 95 % des
actions de ln soci6tê amêricaine FJster Grani, important
fabricant de films plastiques en polystyrènes et un des
premiers producteurs de lunettes de soleil Outre-Atlanti-
que.
La diversification, facteur de croissance aussi
bien interne qu'externe, implique un engagement dans des
domaines nouveaux de fabrication pour assurer l'équilibre
du groupe, pour maintenir sinon pour obtenir de bons ré-
sultats. Créer des nouveautés est encore une façon de
lutter contre la concurrence en enlevant par la même occa-
sion toute velléité d'être partout et sur tout dans
l'es-
poir de détenir la puissance et la suprématie. Dans cette
perspective, la recherche de la rentabilité et de l'effi-
cacité est plus significative.
S'il Y a aujourd'hui une branche en péril c'est
bien le textile. Ses problèmes trouvent leur origine dans
l'existence de nombreuses petites entreprises à producti-
v~té relativement faile par rapport au reste de l'indus-
trie et, dans les importations de textiles massives en
provenance notamment du Tiers-Monde et principalement de
l'Asie. Il s'ensuit une surproduction qui aboutit à des
licenciements et des fermetures d'usines. Rhône-Fouleno
doit renvoyer 6.000 personnes avec arrêt de cinq de ses
usines d'ici 2 à 4 ans. Bayer cesse sa fabrication de fi-
laments de nylon et réduit sa production de polyester.
Monsanto ferme son usine en Allemagne fédérale et diminue
de 25 % sa main-d'oeuvre au Luxembourg. I.C.I. la réduit
de 30 % après avoir fermé deux de ses usines.
La politique recherchée par les entreprises de
la branche est de limiter, dans les pays développés, la
croissance des importations à meilleur marché provenant
des pays en voie de développement avant de réorganiser, de
reconvertir les unités de production.

- 154 -
§ 2 - L'influence de ces politiques sur les taux de
croissanco
Rappelons que la croissance est l~accroisse~ent
de la production, du chiffre d'affaires ou diune autre va-
riable, donc de la t~ille, sur une période relativement
éloignée et, que son taux s'apprécie sur un intervalle de
temps déterminé.
Les politiques d'entreprise sont certes influen-
cées par le domaine d'activité de celle-ci, mais le sont
davantage par la motivation et l'information des dirigeants
dont les décisions, pour le "bien-être" de l'entreprise,
accentuent les disparités des taux de croissance. Ces
inégalités de taux se manifestaient déjà par l'inadapta-
tion des politiques aux dimensions car les premières s'a-
véraient soit trop ambitieuses pour la taille, soit insuf-
fisamment complexes pour la dimension actuelle. En effet,
il arrive que de grandes unités qui ont la faculté de mo-
deler leur stratégie à leur structure réelle, s'en tien-
nent toujours à un sc' éma décisionne~ conçu du temps oü
elles étaient moins développées. Cette politique de con-
servation se traduit généralement par une centralisation
excessive des décisions, une spécialisation trop marquée
des activités, un manque d'initiative dans l'acquisition
et l'accumulation de ressources qualitatives, c'est-à-dire
de ressources en connaissances, en direction et en rela-
tions. Par ailleurs, la petite ou moyenne entreprise peut
perdre de vue les avantages que lui procure sa taille et
se comporter d'une manière irrationnelle en suivant une
politique qui convient plutôt à une grande firme. Elle se
diversifie par exemple alors qu'elle a intérêt à se spécia-
liser à un type d'activité ou à trouver un créneau. Elle
fait des investissements coûteux, se lance dans des études
qui sont le lot des grandes firmes et, qui ne font que la
précipiter dans une dépendance financière dangereuse sans
obtenir le résultat escompté. La distribution des taux de

- 155 -
c~oissance des firmes étant en partie déterminée par les
politiques adoptées, celles-ci varient diune entreprise à
l'autre puisque chacune perçoit l'environnement à sa fa-
çon. C'est par conséquent dans des contextes particuliers
que se définissent les politiques propres à chaque firme
qui influencent leur croissance.
Parmi ces politiques, l'innovation et la commer-
cialisation jouent un rôle non négligeable dans le change-
ment du rythme d'expansion des entreprises, c'est-à-dire
en dernière analyse dans leur performance.
L'élément stratégique qu'est l'innovation étend
la base technologique des entreprises de grande dimension
en même temps qu'il accroît leur polyvalence, c'est-à-
dire leur capacité de fabriquer des produits nouveau. Cette
mobilité des firmes montre que les ressources scientifi-
ques dont elles disposent leur fournissent des possibili-
tés d'investissement et de croissance
les conduisent à
j
orienter leurs activités dans le sens qui leur semble le
plus profitable. Mal~~é tout, l'élab~ration technique du
produit ne reçoit sa consécration que lorsque, mis en vente
sur le marché, le bien en question donne satisfaction aux
clients. Nous concevons par suite la création d'un produit
nouveau ou l'amélioration de la qualité de celui déjà exis-
tant comme une politique technologique de lutte contre la
concurrence pour la survie de l'entreprise, l'amélioration
de sa part de marché. Ces finalités lient incontestable-
ment les décisions d'innovation à la politique commerciale
qui consiste à lancer le produit en engageant la réputa-
tion de la société. Faire accepter le bien par les utili-
sateurs est un but ultime qui nécessite la mise en oeuvre
d'un ensemble de moyens avec un budget assurant entre au-
tres le financement du personnel des ventes et celui des
circuits de distribution. Devant cette situation, la firme
recourt généralement aux armes que sont les techniques
publicitaires et la promotion commerciale.

- 156 -
Il résulte de ce qui précède que les firmes sont
en mesure d'élever leur taux de croissance grâce aux
efforts qu'elles déploient pour réaliser, sous certaines
contraintes, une performance.
Section II
LES CONTRAINTES
Le développement des entreprises repose non
seulement sur l'utilisation de ressources matérielles,
humaines et compte tenu de la technique en place sur une
meilleure combinaison de ces éléments pour dégager une
synergie, mais aussi sur les décisions objectives et ra-
tionnelles des dirigeants. Quoiqu'il en soit, les entre-
prises, surtout lorsqu'il s'agit de firmes multinationa-
les, se trouvent confrontées aux législations des pays,
aux obstacles structurels qui tendent à freiner ou tout
au moins à ralentir leur croissance démesurée.
§ 1 - Les obstacles juridiques
A la suite de tout ce que nous avons dit sur le
comportement des entreprises quant à leur extension, il
serait bon de voir et de situer les mesures juridiques qui
empêchent toute poursuite effrénée et perturbatrice de la
croissance. Dans la plupart des cas, c'est dans les pays
industrialisés qu'ont été instituées une politique de con-
currence et une politique de concentration selon les con-
ditions de l'évolution des marchés. Ces pays à économie
libérale ont élaboré des législations anti-trusts en
s'inspirant des lois américaines comme le Sherman Act (1890)
et le Clay ton Act (1914). Ce libéralisme surveillé parce
que n'excluant ni une réglementation ni une intervention
de l'Etat dans la vie économique s'étend aux échanges
internationaux qu'accompagnent des investissements, c'est-

- 157 -
à-dire des implantations industrielles ou des prises de
participations étrangères. La loi suisse, par exemple j
réglemente les é~issions de titres des sociétés étrangères
au-delà d'un certain montant et impose que dans toute
société la majorité des administrateurs soient de natio-
nalité suisse. Aux Etats-Unis
des secteurs comme la
j
construction aéronautique et la radio sont interdits aux
capitaux étrangers.
A côté de ces mesures sélectives, il en existe
d'autres à caractère plus général en vigueur aux Etats-
Unis, en Allemagne fédérale, aux Pays-Bas, etc, applica-
bles à toutes les entreprises nationales et étrangères.
Il s'agit de politiques anti-trusts qui tournent autour de
trois points principaux
1 - les pratiques restrictives concertées (sec-
tion 1 du Sherman Act et article 85 du traité de Rome) ;
2 - les positions de monopole et les pratiques
restrictives unilatérales qui en découlent (section 2 du
Sherman Act et article 86 du traité de Rome)
3 - les opérations de fusion et de concentration
susceptibles de restreindre la concurrence. Elles touchent
surtout les firmes multinationales et, aux Etats-Unis,
sont régies, en plus des dispositions ci-dessus, par un
texte particulier, section
7 du Clayton Act.
En fait des deux côtés de l'Atlantique, les exi-
gences ont un sens différent. Alors qu'aux Etats-Unis, les
législations interdisent toute concentration qui risque
de porter atteinte à la concurrence, en Europe la régle-
mentation s'applique aux pratiques restrictives des fUsions.
La politique des autorités européennes se comprend d'autant
plus qu'elles cherchent à promouvoir des groupes indus-
triels de taille mondiale entre membres de la Communauté

- 158 -
Economique Européenne. A ce propos, l'article 85 du traité
de Rome ne concerne ni les accords de coopération ni ceux
de spécialisation ayant pour objet de préparer une concen-
tration industrielle. Cependant, pour maintenir un minimum
de contrôle, il est stipulé depuis 1971 par la Commission
européenne qu'une prise de participation pouvait consti-
tuer, â partir d'un certain seuil, un abus de position
dominante.
En règle générale, presque tous les pays soumet-
tent â autorisation les projets d'investissements directs
étrangers. L'administration de ces pays négocie, dans la
majeure partie des cas, avec les firmes concernées pour
qu'elles modifient leurs projets en coopérant avec les
entreprises locales, en créant des activités nouvelles et
des emplois, en introduisant des méthodes et des produits
nouveaux, en favorisant le développement industriel des
régions.
§ 2 - Les obstacles fiscaux
Les mesures juridiques délimitent non seulement
l'espace d'évolution des firmes, mais aussi l'intensité de
leurs rapports. En outre les entreprises rencontrent, se-
lon elles, des problèmes d'ordre fiscal qui arrêtent leur
croissance. L'argument contraire aurait étonné, le souci
premier des entreprises étant de dégager un bénéfice net
pour financer leurs investissements. Or ce bénéfice net,
égal à la différence entre le bénéfice brut et l'impôt sur
ce revenu des sociétés, rend les entreprises sensibles au
niveau des charges fiscales qu'elles doivent supporter.
Une diminution de ces charges se justifie-t-elle alors
pour permettre le développement des entreprises ? Stimuler
les investissements uniquement pour une réduction de la
fiscalité est une gageure, surtout lorsqu'ils s'avèrent
non rentables et sans intérêt. Il serait plus logique
d'amener les entreprises à accroître leur bénéfice par une

- 159 -
augmentation de leurs ventes tout en maintenant le taux
d'imposition à un juste niveau.
Notre sentiment est que les Etats, loin de dres-
ser des barrières au développement des unités de produc-
tion avec leurs législations fiscales, essaient plutôt de
soutenir les firmes nationales et parfois étrangères quand
cela est nécessaire pour les rendre viables, concurentiel-
les, enfin pour créer les conditions favorables à une amé-
lioration de la balance commerciale. L'administration des
Etats-Unis, celle de la France et de bien d'autres pays
dérogent, en période de mauvaise conjoncture, aux règles
fondamentales du commerce international en prenant des
mesures tendant à réduire les importations de produits
comme l'acier et le textile récemment, pour protéger leurs
industries en difficulté.
En réalité, ce sont les mesures d'application
fiscale qui soulèvent les plaintes des entreprises. Les
méthodes de contrôle se sont en effet améliorées et sont
devenues plus rigoure~ses afin de prévenir les dissimula-
tions et omissions de recettes ou de bénéfices, les amor-
tissements et provisions excessifs, les minorations d'ac-
croissement d'actifs dont se rendent coupables tant de
firmes. Il faut ajouter à la liste les fraudes et les éva-
sions fiscales internationales. Par ailleurs, la plupart
des législations nationales renforcent leur dispositif en
octroyant plus de pouvoir aux services fiscaux pour qu'ils
s'occupent de la légitimité des prix de transfert pour les
échanges internationaux entre les filiales d'une société
multinationale dont certaines sont implantées dans des
pays où la fiscalité est relativement faible. L'incidence
de ces rapports entre unités d'une même firme sur les ter-
mes de l'échange est aussi, pour les Pouvoirs publics, une
raison pour recourir au contrôle des changes dans le but
de sauvegarder leur économie des effets déséquilibrants
des prix de transfert ainsi que des spéculations sur les

- 160 -
marchés des chanGes, notamment en pé~iode dp- crise moné-
taire.
§ 3 - Les obstacles humains
L'entreprise est un ensemble de moyens humains
et matériels orientés vers des objectifs déterminés. L'hom-
me
agent du progrès économique, doit alors pouvoir, dans
j
son travail, s'épanouir en développant ses qualités per-
sonnelles, et vivre mieux dans et hors de l'entreprise. Il
incombe alors à celle-ci de ne pas se figer dans une posi-
tion seulement économique, mais de jouer aussi un rôle
dans le domaine humain. Bien que cette fonction lui semble
difficile à tenir car ne pouvant être assumée qu'au prix
d'un sacrifice, c'est-à-dire dans une perspective de gains
privés inférieurs aux gains sociaux, l'entreprise a avan-
tage à instituer un climat social susceptible de stimuler
le personnel qui donnerait le meilleur de lui-même. La
firme n'a pas toujours songé à se socialiser dans les
faits. En accélérant les cadences de travail, en organi-
sant celui-ci jusqu'à dégrader la notion même de travail,
elle ne pouvait que rencontrer finalement la résistance de
ceux surtout qui font les tâches les plus pénibles, les
plus ennuyeuses et, qui se sentent les plus exploités. -Il
a fallu une poussée de leur mécontentement pour faire pren-
dre conscience aux dirigeants de la nécessité d'humaniser
leur entreprise. L'attitude des travailleurs, sujet d'in-
quiétude de la plupart des entreprises américaines et euro-
péennes, se manifeste par une baisse de la productivité
des ouvriers, une aggravation de l'absentéisme, une multi-
plication des gr9ves sauvages. Ces obstacles remettent en
cause les buts de l'entreprise et lui enlèvent l'idée
d'une production à meilleur prix.
Des employés qui affichent un absentéisme assez
inquiétant et un moral en baisse, montrent là un manque
d'intérêt envers leurs entreprises, ne veulent pas s'iden-

- 161 -
tifier à elles. A qui la faute sinon à la mécanisation
accrue et à l'automation destinée à économiser du travail
et à ne laisser aucune place à l'initiative personnelle.
Développer la qualification et l~ formation
technique pour pratiquer efficacement la promotion à tou-
tes les catégories du personnel, maintenir l'emploi, amé-
liorer les conditions de travail, sont des politiques
appropriées aux problèmes actuels de l'entreprise.
§ 4 - Les obstacles économiques
Le bon fonctionnement de la firme témoigne de
son dynamisme qui lui permet d'être performante. Toutefois
ce phénomène est altéré par des obstacles dont ceux à
caractère économique ne sont pas les moindres. Ces derniers
résultent plus que les autres encore de la conjoncture
difficile que nous connaissons depuis quelque temps, et
provoquent un ralentissement de l'expansion des firmes.
L'inflation qui en est le signe le plus marquant perturbe
partout les économies en mettant en difficulté les indus-
tries. Elle est devenue un fait international puisque tou-
chant tous les pays industrialisés et leurs partenaires
moins développés, un fait global car affectant tous les
secteurs économiques. Dans les industries que nous consi-
dérons comme donnant une mesure de la puissance nationale,
industries sidérurgiques, chimiques, etc ... , nous observons
une surcapacité de production qui traduit une faiblesse de
la demande intérieure. Paradoxalement, les autorités publi-
ques maintiennent les quotas d'importations. Comment dans
ce cas expliquer les augmentations de prix si ce n'est par
un effet psychologique de relèvement des prix par anticipa-
tion des entreprises. Comme l'a dit Herbert SIMON, prési-
dent du Conseil des conseillers économiques sous l'adminis-
tration NIXON, "la raison fondamentale, c'est que l'infla-
tion est si importante depuis dix ans que nous avons acquis
la certitude qu'elle va encore s'accélérer. Un grand nombre

- 162 -
d!accords salariaux r~posent sur ce ~ostulat. Et les in-
dustriels ne réduisent pas leurs prix quanrt la demande est
molle parce qu'ils pensent que le processus inflationniste
va reprendre et ne veulent pas avoir à augmenter les prix
à nouveau", Cet aspect conjectural est accentué par la
hausse des coûts de.production (coûts salariaux; coûts des
matiêres premiêres industrielles, prix du pétrole,
... ).
Dans ce cadre économique troublant où les socié-
tés constatent un écrasement de leurs mar~es bénéficiaire~
toute augmentation des prix de leurs produits se heurte le
plus souvent à l'opposition des gouvernements.
On ne peut lutter contre l'inflation et tolérer
en même temps des hausses de prix. C'est pourquoi les
Etats en sont amenés à prendre soit des mesures énergiques
de contrôle ou de blocage des prix, soit des mesures sou-
ples d'encadrement ou de liberté surveillée des prix. Cette
lutte anti-inflationniste suffit-elle réellement à enrayer
l'inflation et à éliminer les anticipations défensives de
hausse? Nous ne le p_nsons pas, bien que les illusions
soient permises. Mais toujours est-il que la politique
choisie est destinée ~ assainir la situation en brisant la
spirale prix-salaire afin de diminuer l'endettement des
entreprises, d'accroître leurs ventes, de les inciter au
besoin à investir; en fin de compte, de leur permettre de
dégager de leurs activités des résultats qui en assurent
la continuité.

TROISIEME PARTIE
L'ËTAT~ LA CROISSANCE DES FIRMES
ET LES ËCONOMIES D'ÉCHELLE

- 164 -
Jusqu'au si?cle dernier) le~ entrepreneurs ne
se souciaient pas de l'intrusion de l'Etat dans les méca-
nismes du marché. L'action de celui-ci, bien que mineure
dans ce domaine, variait en importance selon les pays et
les écoles. Mais elJ.e consistait généralement ~ aménager
et A préserver le cadre d'€volution
des activités commer-
ciales et industrielles de tous ceux qui désiraient créer,
innover, s'épanouir. Parfois auand l'Etat ne pouvait en-
treprendre certaines activités d'intérêt général, il en
laissait le soin aux entreprises privées et se bornait à
leur faciliter la tâche. Cependant les mercantilistes,
pour parvenir à leurs fins, reconnaissaient au gouverne-
ment la nécessité d'une intervention économique accrue.
En plus des prêts et des subventions qu'il accorde, des
impôts et taxes qu'il prélève, de la formation technique
qu'il assure aux pauvres et aux enfants, l'Etat pouvait
s'ériger en commerçant et en entrepreneur dans certains
cas: lorsqu'il faut vendre Dar exemple à l'étranger des
"espèces d'ouvrages et de manufactures" pour avoir une
balance commerciale favorable et un afflux de métal pré-
cieux' lorsqu'il existe un produit dont l'Etat est l'u-
nique utilisateur. Ces différentes fonctions font du pou-
voir central un a~ent économique indispensable pour aider
au développement des industries et des exportations, fer-
ment de la croissance.Dans les systèmes économiques
actuels, système socialiste et systèm~ caoitaliste,
l'Etat participe d'une mani~re décisive au fonctionnement
de l'économie. En usant de son pouvoir, et avec sa poli-
tique industrielle, il oriente, fournit, arbitre, décide.
Dans ses principaux attributs il aura ~ définir les buts
sociaux des activités collectives et à agencer les fonc-
tions économiques à ces buts. L'action politique et
l'action économique se rejoignant ainsi, l'efficacité de
l'entreprise et l'éthique que l'Etat cherche à inculquer
à la société doivent être en harmonie pour la satisfac-
tion de tous.

- 165 -
Les Pouvoirs publics disposeraient de moyens
pour mener leur action d'entraine~ent et de stimulation
de la c~oissance. Ces moyens vont de la production de
biens et de services publics aux dp~rèvements fiscaux en
faveur d'une branche, à la modification des tarifs des
transports pour des produits déterminés. Les économies
dégagées de la sorte se diffusent dans tout le processus
de production et améliorent le bien-être dp la collf-cti-
vite.

- 166 -
CHAPITRE V
STIMULATION DE LA CROISSANCE ET DES ECONOMIES D;ECHELLE
AU MOYEN DES TAXES ET SUBVENTIONS
Comme nous le savons ~ les entreprises ne ces·-
sent de préconiser la stimulation de leur croissance au
moyen de la fiscalité et des subventions. L'expansion à
long terme leur procure des économies en même temps
qu'elle fournit à la collectivité des avantages (emploi,
baisse du prix des produits, balance commerciale positi-
ve,
.. ,). Il est, par conséquent) du devoir de l'Etat et
dans son intérêt de pousser au développement des entre-
prises. Ces dernières doivent utiliser au mieux les fac-
teurs de production (capital, main-d'oeuvre, énergie~
environnement économique, etc ... ) afin d'obtenir un
abaissement de leurs coûts et de devenir compétitives.
La conjoncture internationale y incite d'ailleurs et
accélère encore les mesures structurelles contenues dans
les politiques indust2ielles ou les programmes des gou-
vernements. Ces mesures sont destinées à sauver, à
restructurer, à réorienter les industries menacées, à
soutenir les industries de pointe. Les moyens employés
à cet effet consistent à accorder aux entreprises des
réductions fiscales, des subventions, à signer parfois
des contrats de croissance avec elles. Ce sont là des
types d'actions qui semblent jouer efficacement un r61e
d 1 impulsion pour les entreprises.
Section l
LA SOLUTION PIGOUVIENNE : L'INTERVENTION DANS LES
MECANISME~ DU MARCHE
Il existe une tradition pigouvienne qui tend à

- 167 -
expliquer les situations économiques par les phénomènes
externes en montrant les interactions entre agents éco-
nomiques sans que ces phénomènes soient intégrés au méca-
nisme du marché. Toute atteinte à l~environnement (pollu-
tions, nuisances, etc.,.) provoque un do~~age qui doit
~tre compensé. Toute entreprise dont la production occa-
sionne un préjuàice doit s'acquitter d'une taxe égale à
la valeur du dommage social causé.
Le principe des taxes et subventions retenu par
Pigou est une solution optimale pour protéger les entre-
prises afin de leur permettre de se développer et d'ac-
croître le montant des salaires~ pour augmenter le bien-
être social. Devant une divergence entre produits (ou
coûts) nets privé et collectif, Pigou propose donc une
compensation par le moyen des taxes et d~s subventions
pour rétablir l'équilibre ou du moins pour rapprocher le
plus possible les produits (ou coûts) marginaux privé et
social.
§ 1 - Le principe des taxes et des subventions
Pour saisir l'idée de Pigou sur les taxes et
les subventions, la meilleure façon d'y parvenir est de
se tourner vers les nombreux exemples qu'il donne plutôt
que vers une quelconque théorie sur la question. En
effet, l'auteur consacre dans son ouvrage, "The Economies
of Welfare", plusieurs passages au principe de compensa-
tion lorsque subsiste un écart entre coûts (ou produits)
sociaux et coûts (ou produits) privés. C'est ainsi que
le chapitre IX de la deuxième partie mentionne qu'''une
personne en rendant service à une autre et étant rémuné-
rée à cet effet~ se trouve rendre également mais incidem-
ment, des services ou des déservices à des tiers, et de
telle nature qu'on ne peut exiger de ces tiers un paie-
ment pour en avoir bénéficié, ou qu'on ne peut leur

- 168 -
accorder une co~pensation pour le domrna~e qu 1 ils ont su··
bi [; ~ 1 ). Plus loin;; PIGOU aj oute : HIl est clair que les
divergences entre ~roduits mar~inaux priv0 et social de
cette natures ne peuvent pas~ contrairement aux divergen-
ces dûes aux lois sur les locations~ être atténuées par
une modification des relations contractuelles entre deux
parties contractantes;; puisque les diver~er.ces proviennent
de services ou de déservices rendus ~ des personnes autres
que des personnes contractant,:s. Néanmoins, il est lJossi-
ble pour l'Etat, s;il sly décide~ d 1 écarter la diverq,ence
dans n~importe quel domaine, en anportant des I~ncourage­
ments extraordinaires"J ou des "restrictions extraordi-
naires n aux investissements dans ce domaine. Les formes les
plus évidentes que peuvent prendre ces encouragements et
restrictions sont celles de primes et impôts".
Mais la formulation ln plus édifiante se trouve
dans le chapitre XI : nDans les conditions de simple con-
currence, pour chaque industrie dans laquelle la valeur du
produit marginal social net est plus élevée que celle du
produit marginal privé net, il y aura des taux de subven-
tion par le ~oyen desquels llEtat pourrait modifier le mOfr
tant de la production de telle sorte que la valeur du pro-
duit marginal social net se rarnroche de la valeur du pro-
duit marginal social des ressources en général~ accroissant
de cette façon le montant du dividende national et l'en-
semble du bien-être économioue
pourvu que le financement
j
de la subvention nuisse
s'effectuer par un simple trans-
fert sans inflirr,er de dom!!la~e indire~t 2. la pr~ductionn(2).
(1) A.C. PIGOU, iiThe Economies of ~Jelfare': (1920), Londres
Macmillan, 4ême €dition.
XXXI, chapitre IX, P.1S3
(2) ibid, chapitre XI. P. 224

- 169 -
Au contraire; il faudra réduire par un impôt le
montant de la production dans une industrie où la valeur
du produit marginal social net des ressources employées
est moins élevée que celle de 11économie.
Taxes et subventions sont bien les mesures de
politique économique suggérées par Pigou pour éliminer
l'influence des phénomènes externes(l)
dont la présence
perturbe les mécanismes du marché. L'intervention de
l'Etat, outre qu'elle conduit à une meilleure répartition
des ressources entre les divers emplois, tend à augmenter
simultanément la production industrielle, le revenu
national et, avec eux, le bien-être économique.
Figou s'exprime cependant en termes très géné-
raux et tente de la même manière, avec le même système
de taxation et de subvention, d'aborder la question des
rendements croissants et décroissants. Les industries
dont les rendements sont croissants pourraient bénéficier
de subventions dès lors que le prix des produits offerts
baisse avec la production et que le revenu social l'eu-
porte sur l'avantage privé. Dans le cas des rendements
décroissants où le prix augmente, les industries se
verraient imposer, par contre, des taxes. La politique
fiscale ainsi élaborée cherche à accroître l'efficacité
de l'économie pour améliorer le bien-être.
I l faut néanmoins admettre que, d'une manière
générale, le système de compensation (taxes et subven-
(1) Dans un esprit de clarté et afin d'éviter toute con-
fusion, nous distinguerons dans les phénomènes ex-
ternes, les effets externes dont les récepteurs sont
des consommateurs et les économies ou déséconomies
externes dont les récepteurs sont les entreprises.
La nature du phénomène externe est donc déterminée
par celle des agents qui le reçoivent.

- 170 -
tions) n'est pas fondé sur des motifs strictement écono~
miques. Il siagit le plus souvent de mesures obéissant à
des considérations d'ordre politique ou social, et non à
des préoccupations d'efficacité économique que Pigou
voyait comme but des taxes et subventions. L'intervention
marquée de l'Etat dans le domaine de l'économie (prélê-
vements croissants sur le produit national~ rôle impor-
tant dans l'allocation des ressources~ .. 0), permet de
s'interroger sérieusement sur l'orientation et l'effica-
cité économique de ses actions.
La proposition de Pigou d 1 instituer des taxes
et subventions en cas de divergence entre les produits
marginaux social et privé~ énoncé en termes généraux, est
fort imprécise. Elle ne permet pas de cerner avec netteté
les contours d'une politique économique et sociale.
§ 2 - L'imprécision de la proposition de Pigou
L'établissement de taxes et de subventions en
cas de phénomênes ext~rnes est une tentative de restaurer
l'équilibre en même temps qu'il constitue une correction
dans les mécanisnes du marché. En effet~ un revenu
national élevé qui accroît le bien-être économique ne
peut s'accompagner d'une divergence entre produit margi-
nal social et produit marginal privé. Un tel déséquili-
bre résulte, il va sien dire, du jeu des phénomênes ex-
ternes dont les conséquences positives ou négatives ne
sont ni évaluées ni imputées par le marché.
L'esprit de justice de Pigou va alors le pous-
ser à faire quelques réserves et à rechercher une compen-
sation reposant sur un systême de financement conçu de
maniêre à éviter une distorsion dans l'allocation des
ressources. C'est pourquoi, tout en reconnaissant aux
taxes et subventions un rôle équilibrant~ il suggère de
n'y recourir toutefois qu'en derniêre analyse lorsque

- 171 -
les autres possibilités d'actions en particulier techni-
ques, sur les phénomènes externes ont ft~ minutieusement
étudiées et, au besoin, mises en application. Cela est
vrai s'agissant d'activités industrielles avec les équi-
pements en place. Dans ce domaine~ llexemple le plus
frappant est fourni par la fumée des cheminées d'usines
qui pollue l'air et cause des dommages non compensés a.
la collectivité, Avant d'instaurer le paiement de taxes
ou l'octroi de subventions, il faut voir d'abord dans
quelle me3ure il est possible de procéder à des amélio-
rations techniques du système Productif : construire des
cheminées plus hautes, installer des dispositifs de fil-
trage destinés à prévenir l'émission de poussières et de
particules solides, déplacer certaines industries en
dehors des villes, etc ... Alors} comme pour élargir sa
proposition, Pigou signale que : IIpar fois, quand les
relations entre les différentes personnes privées en
cause sont très complexes, l'Etat peut juger nécessaire
d'employer des moyens d'intervention autoritaire en plus
de l'attribution d'une subvention l1 (l).
Cette attitude, quelque peu confuse, s'explique
par le fait de vouloir prendre en considération certains
coûts, notamment ceux d'organisation, de gestion et
d'information.
Depuis plusieurs années, avec l'avènement de
l'économie moderne, la proposition pigouvienne semble
faire école. L'accélération de l'industrialisation dUe au
progrès technique rapide, les nuisances qu'elle engendre,
lui ont redonné tout son intérêt.
Cependant dans la pratique, la suggestion de
Pigou ne peut trouver une application concrète car elle
est trop générale et incomplète. Au contraire, le prin-
(1) Pigou (1932), P.194

-
172 -
cipe paraIt amplement suffisant pour une approche th§o-
rique valable.
Section II
LES DIFFICULTES D'APPLICATION DE LA SOLUTION
1iPIGOTJVIENNE" A DES BRANCHES INDUSTRIELLES
Il découle finalement des raisonnements précé-
dents que l'application d'un système de taxes et de sub-
ventions
aux entreprises pose des problèmes tant en ce
qui concerne leurs conditions de fixation qu'à ce qui a
trait à l'évaluation de leur montant et à leur finance~
ment.
§ 1 - Les modalités de fixation des taxes et subventions
Le paiement d'une taxe ou le versement d'une
subvention se heurte à une double difficulté. La première
tient à la base sur laquelle doit être fixée la taxe ou
la subvention, c'est-à-dire à l'assiette de celle-ci; la
deuxième, à la forme que revêt la compensation.
- Pour ce qui est d'abord de la base de calcul
des taxes et subventions, sa détermination se fait de
façon arbitraire puisque laissée à la d~scrétion de ceux
qui décident en l'absence d'un marché des phénomènes
externes.
Pigou propose alors de lever une taxe sur l'activité
génératrice du phénomène externe qui serait égale à la
valeur du dommage social causé ou d'attribuer une sub-
vention d'un montant équivalent à la valeur des externa-
lités. La solution pigouvienne consiste en fait à dimi-
nuer (ou à augmenter) l'émission des phénomènes externes
en diminuant (ou en augmentant) le niveau de l'activité
créatrice. La question ne se trouve pas résolue pour

- 173 -
autant car~ en plus ds difficultês d'appréciation du
phênomène externe, se posent les problèmes de son affec-
tation ou de son appropriation. En effet, l'identifica-
tion et l'estimation du phênomène externe s'effectuent
dans un cadre où de nombreux ag0nts économiques sont
impliqués et plusieurs domaines concernés. Dans le cas
d'activités liées, par exemple
quelle est la fonction
3
principale q'ü motive une intervention? Quel est le
degré d'engagement des agents en prêsence ? Qui possède
le droit à disposer ou à user d'un bien ou d'un service?
C'est là tout un ensemble d'éléments qui met en cause
l'équilibre et qui appelle un examen correct, pratique,
des situations réelles avant toute proposition de taxes
ou de subventions,
Ces constatations sont en étroite relation avec
la forme qlie doit prendre la compensation.
- Cela conduit à la deuxième difficulté, celle
de savoir si la taxe ou la subvention doit
être forfai-
taire ou proportionne~le à la production de biens ou de
services, Sur ce point, la position de Pigou apparaît
clairement. Elle repose sur l'êtablissement de taxes et
de subventions proportionnelles. Résoudre le problème de
la sorte tend cependant à le minimiser et à le réduire à
sa plus simple expression en y excluant certains facteurs
déterminants comme ceux soulignés plus haut. En réalité~
les phénomènes externes ne varient pas toujours propor-
tionnellement aux activités émettrices. Ils peuvent
croître avec l'accroissement des activités et ne pas
décroître lorsque celles-ci diminuent. C'est le cas
lorsqu'il y a destruction du paysage d'un quartier d'ha-
bitation par la construction d'une usine qui, parallèle-
ment, porte atteinte à la santé des familles. La décision
à prendre peut consister soit à recourir à une pénalisa-
tion (ou à une prime) forfaitaire, soit à imposer à
l'entreprise des normes fixant les caractéristiques du

- 174 -
produit fabriqué et d6finissant la quantit€
de polluants
à rejeter. IJ'Autorit€
publique p~ut encore interdire
purement et simplement la construction de l'usine
cou-
3
pant court à la naissance d'effets externes positifs ou
n€gatifs.
Pour rester fidèle à la pensée pigouvienne 3
d'après laquelle les phénomènes externes varient propor'-
tionnellement aux activités, il faut admettre que taxes
ou subventions évoluent finalement à un taux variable
selon le niveau des activités concernées. Ceci complique
davantage la forme Que doivent revêtir les taxes ou les
subventions, rendant ainsi problématique leur évaluation.
§ 2 - L'évaluation des taxes et des subventions
Une évaluation correcte des taxes et des sub-
ventions requiert une connaissance parfaite des inciden-
ces de la production. Tâche difficile sinon impossible
quand on sait que les moyens perffiettant de saisir avec
précision les conséqu _nces des phéno:'"ènes externes se
heurtent aux problèmes de révélation des préférences Jes
agents, de répartition des revenus. Ces obstacles prati-
ques peuvent être surmontés dans 10 cas de phénomènes
externes connus entre un émetteur (ou un groupe d'émet-
teurs) et un récepteur (ou un groupe de récepteurs). Les
agents sont alors incités à évaluer les avantages ou les
inconvénients des phénomènes externes. ~1ais il arrive que
là aussi chacun essaie de "tirer son épingle du jeun en
faisant une estimation qui puisse lui être favorable dans
le rapport coûts-avantages. Le prix auquel le récepteur
évalue le préjudice qu'il a subi aurait une signification
différente de celle du coût correspondant aux charges que
l'émetteur doit supporter pour compenser les dommages
causés. Le caractère individuel du phénomène externe
facilite ce genre de comportement. S'agissant, au con-
traire~ de phénomènes externes collectifs, la nature de

- 175 -
ceux-ci soulêve un pr~blême social qui conduit les agents
à adopter une décision commune aprês une évaluation tech"
nique et économique. ~ais ici, IVaspect strictement
social l'emporte sur toute alltre considération et, la
communauté de vue est renforcée par la gratuité ou la
quasi-gratuité du bien au du service. Cependant~ deux
types de biens ou de services collectifs sont à distin·
guer : les indivisibles d'une part, les divisibles d'au-
tre part. Les biens ou services indivisibles reposent
sur un processus de production liée, une impossibilité
d'exclure des agents, et enfin sur les avantages attachés
à l'usage de ces biens ou services. Les biens ou services
divisibles, quant à eux, sont à l'origine de deux sortes
d'avantages
la premiêre est formée d'avantages indivi-
duels puisque chaque consommateur choisit la quantité
qu'il désire. Le prix y joue alors un rôle (le péage par
exemple)
; la seconde renferme des avantages ou des
inconvénients collectifs perçus à travers la qualité du
bien ou du service.
L j identification des phénolènes externes et
l'évaluation optimale des taxes et subventions permettent
sur le plan du financement de ces dernières, de détermi-
ner une répartition des charges fiscales.
§ 3 - Le financement des taxes et d~s subventions
Les taxes et subventions ne sont pas de simples
transferts effectués seulement dans un but de dédommage-
ment ou pour obtenir un accroissement du bien-être géné-
ral ou de la production. Elles constituent davantage
encore une correction fiscale, une solution pour parvenir
à l'équilibre. C'est dans ce sens que se pose le problème
de leur financement qui peut s'effectuer de plusieurs
façons. L'essentiel toutefois est que les rêgles qui
l'édictent ne créent pas en retour des déformations dans
les fonctions de préférence qui ont donné un contenu à

- 176 -
ce système de taxes et de subventions,
Mais satisfaire â l'optimum nêcessite encore de
la part de la Puissance Publique une adj onction de sorr;Ines
forfaitaires aux taxes etsubventions pour indemniser ceux
dont la situation s'est dégradée après application de la
compensation dOe à la présence de phénomènes externes.
Ce versement marginal
àestiné à maintenir constant l'é-
j
quilibre, ne doit pas par conséquent remettre en cause
celui-ci. Malheureusement il ne peut en être autrement
car les agents économiques ne se comportent pas de la
même manière et ne prennent pas les mêmes décisions pour
atteindre leurs objectifs. Les relations qu'ils nouent
entre eux et les discussions qu'ils engagent pour arriver
à un accord ne sont pas pour établir lléquilibre que l'on
cherche à instaurer par les taxes et les subventions en
tenant compte des préférences contradictoires.
L'Etat ne pouvait rester insensible à cette
distorsion. Son intervention se situe en dehors du marché
de concurrence parfai~e où les compoI cements sont iden-
tiques et où les actions individuelles n'ont aucune
influence. A l'opposé, dans le régime du l'laissez-faire",
les règles du jeu sont souvent contournées au profit d'un
égoisme économique. Illême si les agents négocient entre
eux et intègrent le3 phénomènes externes dans leur cal-
cul, l'Etat devra néanmoins intervenir dans le sens jugé
souhaitable pour le bien de la collectivité.

- 177 -
CHAPITRE VI
L'INTERVENTION DE L'ETAT DANS L'ECONOMIE MODERNE
Le rôle économique de l'Etat ne fut jamais com-
plètement effacé, même du temps des classiques où il se
limitait essentiellement à la perception d'impôts. Dans
l'économie contemporaine, l'ouverture des échanges inter-
nationaux, le nombre d'agents en présence avec leurs ob-
jectifs divergents font que l'Etat intervient de plus en
plus dans la vie économique. Son influence sur la crois-
sance des firmes se manifeste par ses actions dans le
domaine industriel en tant que pourvoyeur de subventions
et autres formes d'aide~ percepteur d'impôts et de taxes,
ou arbitre et auteur de ré~lementations. Mais la seule
politique d'aide et de protection des entreprises de leurs
secteurs ne suffit pas à provoquer leur expansion et 3 les
rendre concurrentiels sur le plan international. Elle doit
être intégrée dans une politique dynamique tendant à amé-
liorer leur compétitivité, à encouragJr leurs efforts de
regroupement et d'implantation à l'étranger, à favoriser
leur puissance d'innovation et leur dynamisme technologi-
que. Ce sont là des éléments d'une politique industrielle
qui débouche sur des actions conduisant à une politique
économique générale soutenue par une politique fiscale et
de subvention.
Section l
LA POLITIQUE INDUSTRIELLE DES ETATS
La politique industrielle suivie par chaque gou-
vernement cherche à modifier la structure industrielle de
l'économie en vue d'accroître la productivité et le taux
de croissance de la production de l'industrie. C'est ainsi

- 178 -
quià des degrés divers, les Etats définissent des orienta-
tions, arrêtent des stratégies qui reryosent sur l'adapta-
tion de l'activité écono8i~ue au développement industriel
envisagé.
§ 1 - Les orientations générales des politiques
industrielles
La relance de la production industrielle cons-
tatée à partir du milieu de l'année 1975 dans la plupart
des pays industrialisés ù économie de marché~ ne s'est pas
poursuivie ou a vu son rythme se ralentir dès les premiers
mois de 1977. Cette situation reflète la faiblesse struc-
turelle de la demande intérieure et extérieure dont les
composantes sont la conso~~ation privée, l'investissement
resté médiocre partout sauf en Grande-Breta~ne et aux
Etats-Unis, les exportations. Seuls les Etats-Unis avaient
réussi à conserver durant toute l'année 1977 un taux de
croissance relativement élevé d'environ 6 % avant de la
voir fléchir par la suite.
La politique industrielle, faite pour conduire
à l'expansion économique, s'appuie sur une restructuration
et un redéploie~e~t du secteur industriel. Elle s'efforce
généralement de développer des groupes d 1 industries de ni-
veau international. L'influence de cette mutation est per-
çue à la fois dans l'économie nationale et dans les écono-
mies étrangères qui
s'interpénètrent par le biais des
échanges extérieurs. Elle joue spécialement sur le prix
des matières premières, la demande, l'emploi, la compéti-
tion internationale, l'équilibre de la balance commercia-
le. Les effets bénéfiques dans ces domaines sont les résul-
tats d'actions favorables à l'amélioration de la balance
des paiements, à la stimulation des investissements.

- 179 -
§ 2 - Les stratégies du développement industriel
Toute Dolitique industrielle sous~tend une poli-
tique économique générale et fait prendre conscience aux
Etats que la concentration est l'aboutissement d1une stra~
tégie de croissance externe en même temps qu l elle est un
moyen d'orienter les ressources vers des emplois plus pro-
ductifs. La croissance externe qui consiste Dour une en-
treprise dans l'acquisition djun potentiel de production
existant dans d'autres entreprises, correspond à un trans-
fert d'actifs. Elle fournit, du moins théoriquement, des
avantages que ne procure pas la croissance interne. En
effet, elle permet de franchir des seuils dimensionnels
liés à l'indivisibilité des équipements ou des biens capi-
taux, favorise
11 acc élération des rythmes de croissance
dans les activités de base, fait bénéficier de facilité de
financement dans les opérations d'absorption ~râce D des
remises de titres (actions ou obli~ations) au lieu de
paiement sous forme de monnaie, faisant éviter ainsi une
sortie de liquidités et le risque de transformation immé-
diate d'actifs réels en actifs financiers et vice versa.
Dans la pratiaue) la croissance externe demeure
une exception. Elle est adoptée par les firmes qui, dépour-
vues de moyens s recherchent une expansion rapide par la
diversification ou encore par celles Gui ont des difficul-
tés de pénétrer sur un marché. Ce type de croissance an-
nonce souvent la croissance interne qui reste le mode cou-
rant, surtout lorsque les firmes intéressées disposent
d'une avance technologique. Cette croissance interne con-
siste dans la création par la firme dYune capacité de pro-
duction nouvelle, de recherche~ etc ... , en vue de l'élabo-
ration d'un produit nouveau.
Quelques comportements et politiques d'entrepri-
ses et de groupes observés sous l'angle de la croissance
ont été présentés. Il convient seulement d'ajouter ici que

- 180 -
la modificatio~ de la structure industrielle àes nays,
les travaux de modernisation et de r~tionalisation dans
certains domaines d)a~tivit0 nenacés tels la machine-outil,
le papier-carton, le textjle
la sidérurp,ie
ont pour fi-
j
j
nalité de susciter des augmentations ne productivité.
Réorpaniser la production industrielle dans les secteurs
en déclin et conforter les secteurs notentiellernent forts
sont aujourd:hui un i"imp(;ratif industriel F pour qui veut
une industrie puissante et comp§titive qui fournit abon--
dance et indépendance. Mais cette politique suppose, tout
au moins au niveau national, des actions coordonnées de
l'Etat vis-à-vis des entreprises, mais aussi des travail-
leurs. Enfin, elle exige l'harmonisation des actions col-
lectives pouvant améliorer les méthodes de gestion des
entreprises, la formation du personnel, l'information,
l'installation de nouveaux équipements, etc ...
Section II
LES PRINCIPALES METHODES D'INTERVENTION
Lfinfluence de l'Etat sur le secteur privé de
l'économie au~mente avec l'importance des moyens d'inter-
vention qu'il utilise. Cela ne veut pas dire que le pays
concerné est en train de virer à l'Etat-patron ou au so-
cialisme intégral. Seulement, suivant la conjoncture inter-
nationale, la place de l'industrie locale dans le monde et
la menace qui pèse sur elle, le ~ouvernement intervient et
continue d'intervenir de deux manières: en jouant sur la
fiscalité, en subventionnant les entreprises.
§ 1 - La politique fiscale
Les mesures prises dans les pays industrialisés
montrent une similitude des politiques fiscales appliquées
aux sociétés. Cette ressemblance tient aux rapports étroits
- - - - - - ~- - - ~
..
-----.-_._--

- 181 -
qui existent entre le financement des investissements des
entreprises et la fiscalité. Elle se manifeste principale-
ment en matière d'amortissement où l'on observe dans la
plupart des pays une diminution des annuités et une aug-
mentation des dotations dans les premières annôes. Au
Danemark~ par exemple~ le taux d'amortissement courant est
fixé à 30 % et la moitié de la valeur de 11§quipemBnt est
amortie en deux ans. Lorsou'il s'agit d'investissements
lourds, l'amortissement peut être anticiné A concurrence
de 30 % du montant de ces investissements.
Parfois] une certaine latitude dans le choix du
régime d'amortissement est laissée aux entreprises. C'est
le cas en Grande-Bretagne où) depuis l' ilIndustry Act~' et
la loi de finances 1972-1973~ l'amortissement accéléré a
cédé la place à un ré~ime de liberté d'amortissement des
équipements avec un désrèvement de 40 % pour les investis-
sements en constructions industrielles. Aux Etats-Unis,
les durées d'amortissement des équipements
fixées à 19
J
ans depuis 1942, ont été réduites de 15 à 20 %. En fait~
l'entreprise américaine choisit, comme sor. homologue an-
glaise, la durée de l'amortissement. Une disposition datant
de 1962 intervient encore avec la création par le iiRevenue
Act r1 d'un crédit d'impôt pour investissement ér;al a 7 "/, du
coût de certaines machines. Cela n'est pas S2ns rappeler
les déductions fiscales pour investissement de 10 : prati-
quées en France en 1968 notamment.
Pour ce qui est du taux de l'impôt sur les so··
ciétés (IS) proprement dit) il est de 50 % du bénéfice
fiscal ou varie autour de ce pourcentase avec parfois une
modification en baisse comme cela est déjn arrivé aux
Etats-Unis et en Norvège. En Grande-Bretagne~
l'établisse-
ment d'un taux modulaire amène à 52 % l'impôt sur le béné-
fice des grandes sociétés et à 40 % celui sur le bénéfice
des petites.

- 182 -
Des atténuations en matiêres d!imp5t existent
encore un peu partout qui ont pour but d'allêrer les char-
ees des entreprises afin de les aider dans leur réduction
de coOt pour les rendre plus comp~titives. C'est ainsi
qu'en Allemar,ne Fédérale des amortissements spéciaux de
50 % ont été am6na~és en faveur de la Recherche-DGveloppe-
ment pour les actifs mobiliers et )0 ~ pour les hâtiments.
Au Danemark, il est constitué un fonds d'investissement
par prélêvement de 20 % sur les b~n8fices déclarés. Les
entreprises japonaises de leur côté bénéficient d 1 exemp-
tions fiscales lorsqu'elles sont exportatrices. En Bel~i­
que, celles qui concourent au développement régional ont
droit à un doublement de leurs amortissements d'investis-
sements. Avantages fiscaux aussi en France pour les en-
treprises qui interviennent dans l'aménagement du terri-
toire et l'urbanisme.
Toujours dans le cadre d'une politique fiscale
favorable aux entreprises, il arrive qu'aux Rtats-Unis,
des sociétés américaines versent au fisc une part woins
importante de leurs recettes qu'auparavant et que d'autres
payent un impôt inférieur à 10 ~ de ieurs bénéfices mon-
diaux. Ces avantages particuliers sont pour les firmes
américaines imp18~~ées 8 l'étranGer auxquelles la législa-
tion autorise ~ déduire de leurs impôts payables aux Etats-
Unis les taxes versées à l'étranger.
D'autres mesures fiscales peuvent encore être
prises par les Etats pour favoriser les opérations de
restructurations-concentrations. En A1IGma~ne F6d2rale,
pour ne citer que ce pays; la loi du 26 juin 1969 comporte
plusieurs avanta~es pour restructurations, notamment dans
les cas de fusions d'entreprises appartenant à des person-
nes ou la transformation de telles entreprises en sociétés.
La conclusion à tirer de ces incitations fisca-
les porte sur leurs effets qui ne sont pas mécaniques.

- 183 -
Ceux-ci dépendent, en ~rande nartie s des motivations des
dirigeants d'entrepri3e qui d6cident de la politique à
mener en mati~re diinvestissement, de production et de
répartition des fruits de celle-ci.
§ 2 - La politique de subvention
La politi0ue de subvention s'inscrit dans le
cadre ~§néral de la politique d'aides directes des Etats
aux entreprises. Ces aides revêtent un caractère varié,
aussi bien en ce qui concerne les objectifs poursuivis
(investissement) aménagement du territoires recherche,
exportations) qu ~.3. ce qui a trait aux méthodes employées
(subventions, prêts~ ~aranties).
Nous ne parlerons ici que des subventions car
ce type de transfert lie les bénéficiaires au respect de
certaines rè~les et~ constitue le moyen d'intervention
publique le plus répandus voire le nlus important. Ces
subventions concernent, dans la majorité des cas~ les po-
litiques de développement régional qui mettent l'accent
sur la création d'emylois dans les Z0nes moins développées
ou sur la modernisation. Leur montant correspond 8 un cer-
tain pourcentagp '~'l coût de l' investissePlent effectué.
Cette forme d 7 aide semble plus systématique et plus subs-
tantielle en Grande-Bretagne o~ le taux de subvention a
beaucoup évolué depuis 1963, passant de 10 % du coût des
investissements à 45 1 en 1967-1968, pour monter aujour-
d'hui jusqu'à 80 % lorsqu'une entreprise se déplace en
créant des emplois nouveaux.
Dans les autres pays cette importance est moin-
dre, mais le niveau des taux reste appréciable. Au DaneMrk~
les taux des primes peuvent s'élever jusqu'à 25 % des
coûts. Aux Etats-Unis, le gouvernement fédéral attribue
aux Etats des dotations importantes. Celles-ci le sont en-
core davantage en Italie où les Pouvoirs publics, par

.. 184 -
l'intermédiaire de la "Cassa H , prennent des mesures en
faveur du ~ezzo~iorno. Ils y créent des infrastructures
pour dégar,er des économies externes et encouragent, dans
le cadre de ';contrats de proe;rammes fl sip'nés avec des in·-
dustriels (Fiat, Pirelli, etc ... ), les implantations
productives. Une aide ne 7 à 12 % est accordée aux projets
industriels dépassant 5 milliards de lires~ pourcenta~e
qui aUGmente pour les projets d'enverr-,ure plus modeste.
D'autres préoccupations justifient encore l'oc-
troi de subventions. En effet) la crise des industries de
constructions navales qulaccompa~ne un déponflement des
carnets de commandes a conduit les Etats à financer ce
secteur, sous forme de subventions. Les programmes de for-'
mation professionnelle, de reconversion, bénéficient aussi
de dotations budgétaires quand il est concédé ailleurs des
subventions ou autres aides ~ssimi16es pour lutter contre
les nuisances liées à certains investissements.
§ 3 - La portée de ces mesures de politique économique
L'interventlon croissante de l'Etat dans la vie
de l'entreprise ne peut avoir de résultat positif que si
elle rencontre l'~cthésion des dirigeants de celle-ci. Cet-
te approbation ruise sa force dans la communication d'in-
formations entre les Autorités publiques et les ~roupe­
ments d'entreprises, ainsi que dans la détermination, en-
semble, des orientations souhaitables pour parvenir aux
objectifs définis. Mais l'attitude de l'Etat à l'égard de
l'industrie prête souvent 2 équivoque car parta~éé entre
l'incitation et l'intervention, au ~ré des circonstances
et des rapports de force.
C'est justement au moment où les mesures de po-
litique économique auraient da trouver leur pleine si~ni­
fication, qu'elles ont montré leur limite. Certains ~ou­
vernements, proclamant leur refus de venir en aide à des
,

- 185 -
firmes agonisantes (British Leyland en Grande~Bretagne),
ou adoptant un style ~laide ~ une nrofession malade (sec-
teur sidérur~ique en France), n'ont pas hésité à changer
de ton pour les subventionner ou les contrôler. Ces ac-
tions, limitées à quelques domaines, ne modifient pas la
structure industrielle dans le sens ~e la politique fixée.
Ce ne sont là que des interventions ponctuelles destinées
~ oallier les effets sociaux ou ré~ionaux des difficultés
que rencontrent les entreprises. Une solution ser~it alors
de mettre en pratique, au sein d'un plnn ou d 1 un projet
auquel serait associés tous les travailleurs, des mesures
et des interventions globales oui procéderaient d'analyses
sectorielles .


CONCLUSION

- 187 -
L'analyse que nous avons faite avait pour souci
majeur de connaître l'origine et l'intensité des rapports
croissance-économies d'échelle, de déterminer le coût so-
cial et le coût privé de l'acte de production. Nous nous
sommes efforcés de localiser ces éléments et de voir com-
ment il était possible d'évaluer correctement les diffé-
rents coûts.
Nous ne reprendrons pas les points abordés dans
cette étude : naissance et développement des concepts de
croissance et d'économies d'échelle, relation entre ces
deux notions, incitations fiscales et subventions, straté-
gie des firmes et politique industrielle, etc .•.
I l est cependant difficile de ne pas revenir sur
certains points soulevés dans l'introduction. Nous avons
vu que les concepts de croissance et d'économies d'échel-
le étaient liés, qu'ils constituaient bien une réalité,
et que le désir de les intégrer dans un modèle théorique
ajoutait à leur importance. Mais les problèmes posés par
leur mesure permettent-ils de trouver en eux des instru-
ments d'analyse propres à mener efficacement des actions
de politique industrielle insérée dans un plan plus géné-
ral de politique économique et sociale ? Cette question
touche particulièrement les phénomènes externes sur les-
quels des précisions ont été apportées, et appelle une
réponse qui doit être formulée avec précaution et nuance
car, située au coeur de notre sujet, elle présente un in-
térêt capital. Nous pouvons dès lors faire tourner autour
d'elle l'essentiel de notre jugement.
L'examen des concepts de croissance de l'entre-
prise et d'économies d'échelle nous amène alors aux con-
clusions suivantes :
- l'apparition de ces phénomènes dépend de llexisten-
ce de branches industrielles dynamiques, et les relations

- 188 -
ent~e firmes sont des rapports de groupes dans un régime
d'oligopole. La cor.c~rrence, c'est-~-dire celle de
Erou-
pes, peut s'exprimer en termes de baisse d~ coûts avec
pour objectif final la croissance. Les économies qui en
découlent sont internes aux groupes intégrés. Lorsque
l'intégration n'~st pas parfaite, les comportements con-
flictuels des entreprises se manifestent et il en résulte
des économies e~ernes ;
• le problème primordial est de localiser les entre-
prises qui émettent ou reçoivent des économies positives
ou ~ga~ives, et d'évaluer celles-ci. Si les économies
1
s~t positives, elles favorisent et consolident la cons-
tituti~p de groupes d'entrepris~s qui obtiennent ainsi un
avanta~ sur les concurrents et sur la collectivité dans
la mesure où les coûts privés des groupes considérés sont
infér!eurs aux coûts privés des concurrents et aux coûts
sociaux.
Repérer les unités économiques concernées et
connaître la nature è~ leurs actes pour les sanctionner
ou les dédommager niest pas chose facile. Nous savons
cependant que ces agents évoluent dans un univers qui ren-
ferment des groupes industriels intervenant dans plusieurs
domaines. L'identification exacte des firmes émettrices ou
réceptrices ne saurait se faire sans la coopération sincère
des auteurs.
Pour ce qui est de l'estimation des phénomènes
externes (ce sont surtout eux qui sont visés), les diffi-
cultés nous sont assez connues. Leur évaluation procède
d'arrangement ou de compromis avec ce que cela comporte
d'arbitraire. En effet, les négociations reposent sur des
informations biaisées par des dissimulations et autres
problèmes de révélation des préférences qui rendent impos-
sible toute fixation appréciable de prix.

- 189 -
Nous avons observé à la lumière d'une formula-
tion nouvelle des concepts de croissance et d'économies
d'échelle, une tentative d'intégration de ces notions d~
la théorie de la production pour les rendre conciliables
et mesurables. Les arguments théoriques avancées font ainsi
figure d'application pratique qui traduit la réalité des
phénomènes et leur maîtrise.
L'intérêt de plus en plus grand que prennent ces
concepts dans la vie de l'entreprise comme dans celle de
l'économie tout entière, permet de les situer dans un
plan qui dépasse celui de l'unité de production classique
pour atteindre avec la firme oligopolistique et le secteur
des ensembles économiques et sociaux structurés en amont
comme en aval.
L'étude que nous avons menée trouve en fin de
compte sa finalité dans l'avantage collectif, reflet de
la satisfaction des individus et des groupes. Toutefois,
la théorie néo-classique de l'optimum n'a pas su intégrer
les phénomènes extern~s dans sa rech~rche de situation
optimale au sens de PARETO. L'optimum parétien postule
que l'on ne peut pas améliorer en même temps la position
de deux partis en présence. En d'autres termes, tout dé-
placement de cette position ne peut amener un accroisse-
ment du bien-être de certains individus qu'en provoquant
corrélativement une diminution de celui d'au moins un in-
dividu. Dans l'économie capitaliste, les décisions décen-
tralisées donnent un fondement au mécanisme des prix, et
les conditions de l'équilibre optimum passent par des mo-
difications de la politique des prix, de la politique
fiscale et de subvention. A cet égard, toute attitude nor-
mative porte atteinte au principe de maximisation du bien-
être social. Le comportement des agents, leurs rapports
de coopération, les conflits entre eux, sont des éléments
importants de détermination de l'équilibre général. Le
cadre strictement économique devient alors trop étroit

- 190 -
pour appréhender concrètement les concepts. Son élargisse-
ment aux autres disciplines sociales (sociologie, psycho-
logie, ... ) s'impose dès lors comme une nécessité. Sous
cet aspect, l'optimum établi sera de second rang.
L'importance des cas de coopération, de conflit,
ayant été ignorée et mise en marge du modèle traditionnel~
il a fallu attendre l'avènement de la théorie des jeux
pour trouver une tentative d'intégration de ces paramètres
dans un schéma général. Malheureusement et bien que s'ap-
puyant sur quelques motifs d'action des agents, les au-
teurs qui ont utilisé cette méthodologie étaient plus sou-
cieux de faire des démonstrations mathématiques que d'ob-
server les implications de la théorie dans les interactions
sociales entre individus et entre groupes. La vraisembla~
ce économique était sacrifiée au profit de l'élégance ma-
thématique. Il n'en reste pas moins que la théorie des
jeux a largement contrihué à expliquer l'oligopole, à
fournir des modèles et des solutions dans la recherche du
gain maximum, la réduction des risques, le partage du mar-
ché dans l'entente ou la lutte.
La croissance et les économies d'échelle, objet
de notre étude, présentent, nous l'avons montré, un inté-
rêt certain pour l'entreprise et la collectivité. Leur
importance grandit au fur et à mesure que nous pénétrons
la réalité des faits. De leur interdépendance, il ressort
que les économies d'échelle, surtout externes, sont une
condition de la croissance et expliquent les disparité~
sectorielles, régionales et enfin nationales.

,.
BIBL 1OGR.4PH 1E

- 192 -
Avant de présenter notre liste bibliographique,
il nous faut apporter une précision â son sujet. Cette
liste n'est pas exhaustive. Des ouvrages
revues, etc ...
j
que nous avons consultés n'y figurent pas. La raison en
est que les points qu'ils abordent ont été
selon nous,
j
traités d'une maniêre plus adapt~e à notrs propos dans
ceux que nous citons. C'est le cas, en lioccurrencec des
travaux portant sur la théorie de la croissance de l'en-
treprise, sur les économies d'échelle et le développement
économique ou encore sur la théorie de l'économie de bien-
être.
Les abréviations utilisées pour désigner les
périodiques sont les suivantes :
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American Economie Review
E.A.
Economie Appliquée
Eca
Economica
Etrica
Econometrica
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2conomic Journal
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J.L.E.
Journal of Law and Economics
J.P.E.
Journal of Political Economy
Q.J.E.
Quaterly Journal of Economies
R.E.
Revue Economique
R.E.P.
Revue d'Economie Politique
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TABLE DES ~ATIERES

- 214 -
Pages
SOMMAIRE
1





























0













INTRODUCTION
.
2
PREMIERE PARTIE
ANALYSE DES CONCEPTS DE CROISSANCE
DES FIRMES ET D'ECONOMIES D'ECHELLE
CHAPITRE l
PLACE DES CONCEPTS DANS LA PENSEE
ECONOMIQUE
19
Section l
ORIGINE ET DEVELOPPEMENT DES CONCEPTS ...
21
§ 1 -
Adam SMITH et David RICARDO
22
1 -
A. SM ITH
22
a) L'explication de la croissance de l'en-
treprise et des économies d'échelle ....
23
b) Le cad~e restrictif dr l'analyse des
concepts
.
24
2 -
D. RICARDO
26
a) L'explication de la croissance et des
économies d'échelle
27
b) Le cadre restrictif de l'analyse ricar-
dienne des concepts
31
§ 2 -
Alfred MARSHALL
33
a) Le caractère imprécis des concepts de
croissance et d'économies d'échelle
37
b) Le dilemme "marshallien"
40
§ 3 -
Arthur Cecil PIGOU
42
a) L'explication des phénomènes externes
dans une économie do bien-être
44
b) La conception "pip;ouvienne!l d'économies
d'échelle et le postulat de taille opti-
mal e
47
Section II :LE RENOUVEAU DES CONCEPTS DE CROISSANCE
DE LA FIR~E E~ D'ECONOMIES D'ECHELLE ...
49
§ 1 -
Les économies d'échelle et la théorie de
IR croissance de l'entreprise
50
~ 2 -
L'insuffisance du renouveau
54

,.-~ -
CHAPITRE II
FORMALISATION NOUVELLE DES CONCEPTS
D~NS LE CADRE DE LA THEORIE DE LA
PRODUCTION
57
Section l
FORMULATION DES BELATIONS CROISSANCE-ECO-
NOMIES D'ECHELLE DANS L'ENTREPRISE ....
60
§ 1 -
Les rendements croissants
60
a)
Les économies de grande échelle
61
. économies technologiques
61
. économies de gestion
,
62
b)
Les économies de croissance ..... , .....
63
c)
Les économies internes
64
d)
Les économies externes
65
§ 2 -
La croissance en structure oligopolis-
tique
67
§ 3 -
La crnissance sectorjelle
, ..
92
§ LI -
La dissociation de la croissance et de
la répartition
,........
96
Section II
~ES FONDEMENTS ANALYTIQUES DU PHENOMENE
DE CROISSANCE DE LA FIRME
108
§ 1 -
Structure du patrimoine et croissance
de la firme
109
a)
Les actifs
110
b)
L'endettement et les autres sources de
financ ernent
113
§ 2 -
L'équilibre de l'entreprise en crois-
sance
,
119
Section III: L'ANALYSE DES RELATIONS FONCTIONNELLES. 122
§ 1 -
Les relations d'échange entre branches
industrielles
123
§ 2 -
Les avantages de l'analyse inter-indus-
trielle
,....... 130
§ 3 -
Les limites de l'analyse
133

- 216 -
DEUXIEME P1\\RTIE
tNALYSF DES RELATIONS EFFECTIVES ENTRE LA CROISSAN-
CE ET LES ECONOMIES D'ECHELLE DANS CERTAINES BRANCHES
INDUSTRIELLES (LE CAS DE LA CHIMIE, DE LA SIDERURGIE,
DU TEXTILE, DU CIMENT)
CHAPITRE III
LA RELATION CROISSANCE-ECONOMIES D'E-
CHELLE DANS L'ENTREPRISE MODERNE ..... 138
Section l
LA SITUATION DE BRANCHES INDUSTRIEL-
LES DANS CERTAINS PAYS (L'EXEMPLE DE
LA CHIMIE, DE LA SIDERURGIE, DU TEX-
TILE
DU CP·lliNT)
138
9
§ 1 -
La liaison taille-rentabilité des fir-
mes
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . • . . . . . . . . 140
§ 2 -
La liaison rentabilité-croissance des
firme s
146
~ 3 -
La l:aison coûts-taille des firmes ... 148
CHAPITRE IV
LA NATURE ET L'AMPLEUR DES RELATIONS
CROISSANCE-ECONOMIES D'ECHELLE
150
Section l
LE CONTENU DES POLITIQUES DE LA FIR-
ME
.15 a
§ 1 -
Les éléments constitutifs des politi-
que s des fi rm es. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .151
§ 2 -
L'influence de ces politiques sur les
taux de croissance
154
Section II
LES CONTRAINTES
156
§ 1 -
Les obstacles juridiques
156
§ 2 -
fiscaux
158
§ 3 -
humains
160
§ 4 -
économiques
161

- 217 '""
TROISIEME PARTIE
L'ETAT, LA CROISSANCE DES FIRMES ET LES
ECONOMIES D'ECHELLE
CHAPITRE V
STIMULATION DE LA CROISSANCE ET DES ECO-
NOMIES D'ECHELLE AU MOYEN DES TAXES ET
SUBVENTIONS
166
Section l
ENNE"
: L' INTERVEN-
~l_~MES DU MARCHE
166
§ 1 -
subventions .... 167
§ 2 -
170
Section II:
172
§ 1 -
Les mod .lités de fixat~ on des taxes et
subventions
172
§ 2 -
L'évaluation des taxes et subventions ... 174
§ 3 -
L~ financement des taxes et subventions. 175
CHAPITRE VI: L'INTERVENTION DE L'ETAT DANS L'ECONOMIE
MODERNE
177
0



















• •
Section l
LA POLITIQUE INDUSTRIELLE DES ETATS .... 177
§ l
-
Les orientations générales des politi-
ques industrielles
0.
178
§ 2 -
Les stratégies du développement indus-
triel
179
Section II: LES PRlNCIPALES MEI'HODES D'INTERVENTION
180
§ 1 -
La politique fiscale
180
§ 2 -
La politique de subvention
183
§ 3 -
La portée de ces mesures de politique
économique
184
CONCLUSION
186
0





















• •
BIBLIOGRAPHIE
191
TABLE DES MATIERES
o.
213
~------~-
~ ~ - - - -
---_.~---
- -
---~
-.-
.,-~-------
--- -

VU : LE PRËSIDENT
VU : LES SUPFRAGANTS
M.
MM.
VU ET PERMIS D'IMPRIMER:
LE PRËSIDENT DE L'UNIVERSITË DE
PARIS 1 - PANTHËON-SORBONNE