, université de Nancy Il
uer des sciences sociales
lES 1015 DE lA
GUERRE R ROmE
,
1
1THESE pOur le DOCTORAT lIE Cycle
AF1IICA//.i"=~ ",
presentèe par SALIOU NDIA YE rcO'NsEfL
1
POliR L'ENSEIGNEM ET MALGACHEl
C. A. M. E. S. _
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prOfesseur
RAOUL lONIS
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CEUX {~!U l Pi\\[TErmelH 1GNORER LE rf',SSE
SE CONDA~1i~ENT A LE REV1VRE
A. t-i~\\LRf\\UX

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====================================
La guerre peut être définie comme une lutte armée
entre Etats ou entre groupes sociaux? C'est une véritable
science humaine en ce sens qu'elle est inséparable de
l'histoire de l'humanité. Son importance relève du'fait
qu'elle est une sorte de révélateur de la nature humaine,
puisqu'elle s'exprime hors de toute barrière morale.
Mais au
fil des temps,
la brutalité franche a progressive-
ment cédé la place à des conventions.
Les belligérants furent
amenés à suivre certaines procédures,
à respecter certaines
formes,
en d'autres termes à instituer un droit de guerre.
Rome nous offre à cet égard un champ d'étude privilégié,
puisqu'elle a vécu en constant état de guerre.
Notre sujet
s'intéresse aux "loi~ de la guekke a Rome de la pkemilke
guekke punique a la campagne de CESAR en Gaule". Ce sujet nous
a été proposé par Monsieur le professeur RAOUL
LONIS
; nous
l'avons tout de suite accepté, car nous avions là une occasion
exceptionnelle d'approfondir nos connaissances dans un domaine
tout nouveau: celui de la polémologie.
Pendant les années au cours desquelles,
nous eOmes le
privilège de travailler sous sa direction,
nous avons pu
apprécier la pénétration et la largeur de vue du professeur
ainsi que la bonté et
la simplicité de l'homme.
Il aura joué
un rôle essentiel dans notre formation et l'orientation de
notre carrière en nous initiant à l'étude des civilisations
de l'antiquité; et en guidant nos premières rerherches à
l'Université.

Ses encouragements,
ses conseils et sa généreuse
attention ont été pour nous un précieux concours. Qu'il
veuille bien trouver ici l'expression de notre profonde
reconnaissance.
Nos remerciements vont également'à tous
les Conservateurs des B.U.
de PARIS l
PANTHEON-SORBONNE,
NANCY II,
et ceux de la B.N.
de PARIS; à Mme SOW Mauna
pour l'assistance technique qu'elle a bien voulu apporter
dans la réalisation de cette thèse.
A tous nous exprimons ici notre profonde
gratitude.

-
1 -
1 .1 T !) ~ J L C
"Enlever à l'ennemi et détruire des places, des ports, des
villes, d~s hom~es, des vaisseaux, des récoltes et tout~s choses
semblables, pour affaiblir l'adversaire et renforcer sa propre
situation et son action, c'est ce que les lois de la guerre et ses
droits nous contraignent de faire
(1)".
Mais l'achéen s'oppose aux
déprédations ne présentant
aucun avantage à leur auteur, te~que
la destruction des édifices religieux ou les dOmmages durables
infliges aux cultures.
Dfja, dans l'Antiquité, des penseurs esti~aient
donc
souhaitable
que des barrières fussent dress~es pour empêchtr
les excès des violences propres à toutes les guerres.
L'objectif de ce travail est d'apporter une contribution à la
connaissance "des lois de la guerre à Rome".
Notre étude semble
essentiellement relever du domaine juridique. Le lecteur aura donc
compris que nous ne nous intér~sons pas ici aux problèmes de stra-
tégie ou de tactique, mais à tout ce qui touche aux règles ou con-
ventions établies qui devaient être observées dans les rapports
internationaux en temps de guerre.
Ces règles,
à Rome, relev~ient
du JU8 gentium, "le droit des gens" qui était opposé au droit civil,
"JU8 civile"
qui ne s'appliquait qu'aux citoyens romains. Les rè-
gles du JU8 gentiu~.de portée plus vaste, concernaient donc l'ensem-
ble de l'humanité.
Certaines de nos sources, en y faisant allusion,
parlent de "lois commune" au gl:nre humain.
(2)"
A notre connai~sance, aucun travail, n'a été enti~rement consa-
cré aux questions specifiques E~X lois de la guerre à Rome. Peu
nombreux sont aussi les
historiens qui ont abordé ce prob~e (3).
( 1 )
POL., V,
1 1,
3, et XXIII,
15.
(2) POL.,
II, 10, 6 ; IV, 61,
4 i
II, 5t3, 6 ; Diod. ,xxx,
18,2.
(3)
COLEMAN PHILIPSON, The international Law and oU8tom of Ancient
Gr~6itand Rome, 2 vol., Londres, 1911 ; G. DUMEZIL, Remarquee eur Le
iU8 fetiaLe.
R.EL.,
1965, p. 93-110
; p.
BOYANCE, diverses études sur
fidBB rassemblées dans Etudee .~~ la religion romaine. 1912, p.91-

- 2 -
Sans nourrlr l'illusion de combler cette lacune,
ni d'épuiser un
su;et aux perspectives très vastes, nous nous proposons d'énoncer
les problèmes qu'il pose pour la periode allant de la premi~re guer-
re punique à la campagne de CESAR en Gaule.
Nos limites chronologi-
ques ne sont pas fortuites.
La première guerre punique, par sa
durée ininterrompue de vingt-qu~tre ans, et par la gravité de ses
consêquences, est l'une des crises essentielles du monde antique.
Ji
C'est, du reste, le premier veritable conflit armé qui oppose Rome
à un adversaire de grande envergure.
La guerre des Gaules met un
nous
terme à notre investigation ; nouSyefrorcerons de voir si ln manière
dont CESAR a mené
son action dans les Gaules et en Germa/nie ft~it
conforme au droit
international de l'époque,en pnrticulier aux lois
de la guerre.
Parmi les
s~urces auxquelles nous avons eu recours, la place
prépondérante revient d'une part à TITE LIVE, d'autre part à POLYBE.
Pour le premier, le titre Ab Urbe condita Libri~ indique l'am-
pleur de son ouvrage. Cent quarante-deux livres embra.saient le cours
.
-.
-
des évènements jusqu'en l'an 9 après J. C. Par la suite, pour la ---
commodité, on prit l'habitude de grouper dix livres pour editer
l'oeuvre par "décade".
Mais cette oeuvre a ètê perdue.
On n'en a
conserve, pour notre periode,
que la troisième, la ~u.trième et la
moitié de l~inquième décade)de la deuxième guerre punique à l'an
167 av.
J.
C.'. Des resumés, periocllae, attributs a FLORUS,
sauf
pour les livres
136 et
137, nous permettent d'avoir une idée des
portions qui ne nous ;sont IjM--l
parvenues. Son oeuvrt: est avant tout
une histoire nationaliste :un seul sujet Fortuna Populi Romani;
un seul acteur: Populus Senatusque Romanus. Son natioDalisme imper-
tinent fait la part belle aux Romains au détriment des nations
étrangères. Pour les guerres puniques et macédoniennes,
i l s'en
152, A. PIGAIIOL,
VENIRE in Fidem, SCRIPTA VARIA, II,
192-199
P. )IERZANEK,
sur les origines du droit de
la guerre et de la paix
et les articles rassembles dans J. BRISSON, Probl~mes de la guerre
d Rome~ PARIS, 1969.

- 3 -
tient à un récit extérieur :description de bataille et discours
sans contenu historique. Pour la seconde guerre punique,
il depend
de POLYBE mais
a eu aussi l~ mérite d'utiliser les annalistes
ro~ains immfdiatcment
Postérieurs aux évènements.
Mais son récit
de la première guerre de Macédoine,
réparti dans les livres 23-29,
est très d~cevant.
\\ '
\\
\\
Le plus précieux de nos informateurs demeure POLYBE,~nene
comme otage à Rome en 167, il s'y lia avec la famille des SCIPIO~,
fit de nombreux voyages, nota~m~nt en Afrique, où il rencontra
MASINISSA, et participa,
en compagnie de son ami SCIPION . EMILIE!.,
au siège et à la destruction de Carthage en
146 avec J.C.
Outre son récit sur la première guerre punique, nous disposons
de celui de DIODORE de SICILE (XXIII-XXIV)
qui dérive de l'histo-
rien PHILINOS d'AGRIGENTE, utilisé aussi par l'ach~en qui le critique
(POL.,III,26).
La deuxièDe guerre punique ainsi que les affaires
d'Espagne, de' G~ule, l'Illyrie sont essentiellement connues par
POLYBE (fragmentaire à partir de la bataille de Cannes). Son ~érite
aura été d'avoir su interroger les survivants et surtout d'avoir
.
consulté les archives romaines. Pour la troisième guerre punique et
ses précédents,
POLYBE et TITE LIVE sont presque entièrement perdus
Pour l'essentiel nous dépendons d'APPIEN Lybica ou punica,
(10-136).
~
Pour l'Orient aussi POLYBE demeure notre
Source fondanentale
pour les évènements qui vont des guerrps d'Illyrie à celle d'Achai~
(229-146).
Ainsi son ténoignage est de première importance, mais il
ne faudrait pas oublier qu'il fut toujours l'ami des Romains,
fer-
mement persuadé de leur supêriorite.
Bien qu'il s'efforce d'~tre
objectif dans l'estimation des faits,
i l ne peut éviter, quand il
s'agit de 'puniques, d'être partial.
On ne saurait trop souligner co~bien les sources l~têraires
deviennent insuffisantes à partir de
16 7)et réellement pauvres )après
145.
Pour la guerre des Gaules, notre source demeure CESAR qui a
èe~it deux recueils de notes (commentapii) relatant en sept livres
,

- 4 -
la campagne des Gaules. Trop intelligent pour n~ pas porter son
aventure personnelle sur le plan de l'hist~ire nationale, le narra-
teur s'efface derrière l'exposition des faits sans juger, tout eD
parlant constamment de lui. En parcourant"le BeLLum gaLLicum, le
lecteur est d'abord frappé par un mot qui revi~nt av~c une fréqu~nce
singulière
:
CESAR

L. A.
CONSTANS note que ce mot apparaît quelque
quatre cent cinquante fois dans cet ouvrage soit en moyenne cin~uan­
te six fois ~our chacun des huit livres qui le constituent.
(1)
Ainsi l'ouvrage apparatt-il à première vue, comme un panégyrique
composé par CESAR et dfdié à
sa propre gloire.
Le Romain s'attache
à faire croire qu'il a entrepris la guerre des Gaules pour libérer
le~'populations menacées par les invasions g~~maines et POUr assurer
aux Romains, une couverture contre le péril tout menaçant des
Germains.
Pour clore ces consid~rations préliminaires, nous terminerons
par quelques remarques
sur~ démarche que nous avons suivie. Nous
traiterons dos lois de la guerre, c'est-à-dire de l'ensemble d~s
règles qui, en cas de guerre, définissent la conduite à observer
par les parties en conflit, depuis .la déclaration de guerre et
l'ouverture des hostilités,
jusqu'à la conclusion de celles-ci et à
l'accord d'amitié.
Telles sont les de~y. lignes maîtresses de travail.
Après les avoir définies, il reste à
dégager l'architecture des
lignes secondaires. Or une difficulté d'ordre pratique se pose:
est-
ce pendant ou après les h03tilités qu'il faut
évoquer l
problène
des prisonniers et de leur traitement,
du partage du butin, des
otages? De m@me,
à quel moment convient-il le mieux de traiter des
ambassadeurs? Ceux-ci, en effet interviennent à toutes les phases
décisives de la guerre - de l'ouverture des hostilites à la soumis-
sion de l'ennemi en passant par les nfgociations en faveur d'une
tr@ve ou celle en vue de la paix.
R.
SCHMITTL~IN l'a~avant nous/cons-
taté
: les questions politiques ne sont jamais tout à fait exactement
(1)
L. A. CONSTANS, Guerre des GauLes, T.II(index) p.
331.

- 5 -
délimitées, mais au contraire,
fortement
imbriqu~es l'une dans
l'nutre, elles se 1ai"fls~nt ra.rement trû.iter en les isolant (1)".
On ne s'étonnera pas dès lors, de retrouver ici et 11 d~ns
cette étude, un
thème déjà ebord~ ailleurs. Notre plan s'inspir~r8
largement de la chronologie d'une guerre:
la déclaration de auerre
et l'ouverture des hostilités, le dê r ou1eoent de la guerre, la sus-
pension des opérations et le retour à la paix.
Ces trois repères
correspondent respectivement aux première,
deuxi~me et troisi~ne
parties.
La preeiêre s'ouvre 8~r un chapitre dans lequel nous non-
trerons que la guerre est avant tout une affaire civile.
Le cb~pitre
,
deux est consacré à l'étude des notions de Bellum i~BtUrr: et iniustum.Le
XtroiSiême est relatif à ln déclaration de guerre et à son e 101ution.
Le chapitre quatre traite de l'intervention romaine de 264 à 50.
Nous y exa~inons en pnrticu1ier si les motifs de guerre invoques
durant cette période sont conforees ou non,
à ceux d'une guerre jus-
te.
La deuxi~e partie quant à elle, comprend également quatre
chapitres qui traitent successivement
: de ln Prise des villes
; de
la question des profits de guerre
; des otages, et enfin du rôle des
ambassadeurs.
C'est ln partie ess~ntiel1e de notre travail.
Enfin la troisiême partie s'int~resse plus spécialement à
l'arr@t des hostilitfs.
Le premier chapitre examine les diff~rentes
forMes d'accords
se rnPP~rtant soit à la suspension plus ou moins
durables des ar~es (tr@ves et traités de paix)
;
soit à la conclu-
sion de l'accord d'alliance.
Le chapitre deux traite de la. problé-
matique de la garantie des accords internationaux notamnent de la
fidee et du sernent. Enfin dans le troisiême chapitre nous no~s
interrogerons
sur la Crédibilité internationale de ROme auprès de
• "J'" i •• u~
ses alliés ou adversaires et des jugements que
portêrent, les
uns et les autres.
(1)
R.
SCH :MITTLEIN,
la premi~re campagne de CESAR contre les
Germain8~P.U.F., PARIS, 1955, p.15.

- 6 -
Nous dégagerons une conclusion
à
la fin de chaque partie,
et nous terminerons ce travail,
en essaY~Dt de mettre en évidence
le fait que ces lois de ln guerre.
rnalgre les
siècles et les
moeUrS changeantes,
conservent.
malgr~ tout, le même fond •
-
.
b

PREI"I~RE
PAR T 1 E
DE LA DECLARATION DE GUERRE A L'OUVERTURE
DES HOSTILITES
l
1.
GUERRE ET CITOYEN
II.
BELLUM IUSTUM ET BELLUM INIUSTUM
III.
LA DECLARATION DE GUERRE
IV.
L'INTERVENTION ROMAINE EXTRA-ITALIQUE.

- 7 -
CHA PIT RE PRE M1 [ R
GUERRf ET CITOYEN
INTRODUCTION
La guerre à Rome. est avant tout une affaire civile qui
intéresse le citoyen à deux niveaux:
d'abord l'opinion publique
c'est à elle d'apprécier le bien-fondé d'une guerre
;ensuite les soldats
et touS ceux qui portent les armes pour combattre l'ennemi du moment et
défendre la patrie menacee. Dans les deux cas c'est le populus Romanus
qui est concerne.
Il faut avant tout être citoyen pour servir. même com-
me simple soldat dans les légions
; pour obtenir un grade ou accéder
aux grands commandements militaires. Est citoyen civie Roman~8. tout
homme libre né d'un père citoyen.
En dehors du corps civique. Rome fit
.
.,.
(1)
1 · "
'·1
.
t
d
auss~ appel aux troupes all~ees
• Ces a l~es s
~
s ne paya~en
pas
e
tribut.
etaient tenus de fournir un contingent dont l'effectif "propor-
tionne aux ressources des diverses cités était fixé pour les colonies
latines, par la charte de fondation
(
lez colonia J. et pour les autres
cites par le traité conclu avec chacune d'elles(2)~ Ainsi au cours de
notre periode la citoyenneté fut restreinte jusqu'en 90. annee o~ les
leges Iulia et Plautia Papiria de 89. donnèrent en bloc la citoyenneté
aux Italiens,
au sortir d'une guerre Sanglante(3).
Les germes de ce con'·
flit
sont à rechercher dans l'évolution de la situation militaire. con-
sécutive
à la fréquence des guerres extra italiques entre 264 et 50.
1)
L'Italie n'~ jamais été un état unifié. C'était une confederation
où deux catégories distinctes de confédérés. les latins (socii nominis
latiniJ et les simples alliés (sociiJ gravitaient dans l'orbite de Rome
2) J. Q\\R(QfiND. histoire Romaine~ T.II des Gracques d Sylla"P.U.F -
1950-52, p.
149
; p.
131-1.
3) Cic., Pro Balbo. VIII. 21 • App •• ~ I. VI. 49. Les Romains ont toujours réagi
avec orgueil chaque fois qu'il s'est agi d'ouvrir plus largement la citoyenneté. La
réponse donnée en 216 après Cannes, aux CapoU8Ds qui réclamaient le partage du
Consulat', est assez significative:
T.L.
XXIII. 6, 6 -
1; en 125. le Con-
sul M. FULVIUS FLACCUS avait proposé de donner le droit de cité aux Italiens(Val.Max.
IX.5.1) Le projet fUt repoussé sur intervention du consul C.FANNIUS. En 123. CAlUS

- 8 -
Déjà la seconde
guerre punique. ne manquai t
pas de pc.rter
atteinte à la solidité du bloc romano-latin. certaines colonies.
se re-
fusèrent à soutenir plus longtemps l'effort militaire qu'on leur deman-
dait. Les alliés sentaient déjà que l~ privation
des droits complets
1-
...
, ( 1}.-/S
.
de citoyens les frustrai.
des avantages de la conquete~__ ous le tr1-
bunat de T.
GRACCHUS. s'ouvrait l'ère des grandes distributions agraires
ou frumentaires.
Les principaux béneficiaires étaient les citoyens. En
90. c'est contre cette orgueilleuse barrière (que Rome voulut élever en-
tre elle et ses1fédérés) que l'Italie presque entière se rua lors de la
guerre sociale.
En dehors du corps civique. Rome fit appel aux esclaves
et affranchis
; mais cela eut lieu dans des circonstances exceptionnel-
les. Il faut reconnaître que les guerre. de conquête furent les plus im-
portantes sources de ravitaillement en esclaves. Certains modernes même
insistent sur le "caractère principalement esclavagiste" du mode de pro-
duction romain. les besoins d'une agriculture latifundiaire fondée sur
la ~ain d'oeuvre servile des masses expliquent les guerres pourvoyeuses
de captit"s(2).
GRACCHUS. eut l'idée d'accorder les droits de cita,yen à tous les alliés (PLUT ••
C. ~ach, 5. Le projet fut aussi rejeté. Pour r~soudre ce problème. il fallut que l'I-
talie s'insurge en 90-89. J. HARMAND, l'~e et le
soldat d Rome, de 107 d
50 avant notre ~re~Paris, 1967, p.19, note que ces leges firent disparaître la diffé-
renciation entre légions des citoyens et, ailes des socii, tout en augmentant de fa~on
considérable le nombre des individus aptes pour le service militaire.
1)
D'autant plus qu'ils supportaient l'essentiel des charges militaires. L'expédition
de Carthage en 204, était alimentée par des volontaires en majorité italiens , en ma-
tériel par les Italiens à peu près exclusivement cf. : T.L.XXXVIII, 45./A la fin de la
2ème guerre punique, les alliés furent maintenus sous les drapeaux alors que les cito-
yens f'urent licenciés. Les quatre armées pour la Gaule, le Brutti, ,um"
la Sicile, la
Sardaigne sont exclusivement composées d'Italiens ; et trois d'entre elles de latins~
cf.T.L.,XXXI,8. En 198,
""
FLAMINIUS emmène en Macédoine :3 300 Romains et 5 500 latins,
alors que les armées de Marcellus en Sicile, de CATON en Sardaigne, sont exclusivement
composé~je latins: cf.T.L.XXXII,8. En 197, les deux armées d'Espagne reçoivent un
renfort de 8 000 alliés. T.L. XXXII, 28.
2) cf. actes du colloque 1972 sur l'esclavage (Be6ançon)~Paris, Belles Lettres, 1974.

- 9 -
Au conrs de cette r('riode. les ef;cl~p'es servirent les armées
ronaines ~our la première fojs.
~n 217 au cours d~ la secon~e
cuerre punique. En effet l'iI'r~s Trasimène. 0n :pr0c(;dC'. è des lev6es
d'esclaves. ft
en creire TITE LIVF. cette innnvation en nati~rE:
de recr'...1tement
s'explique par "le -::anq'...1€'
è 'homnes libres
et ln
n~cesEitG". ~insi ~8.n00 jeunes esclaves valides. après qu'on eut
de~and6 ~ chacun s'il veulait servir. furent achet6s par l'~tflt
et arm~s(l). "Certains cartif~ étaient ",êne vr.lontaires COT"'"lle ceux
de!: arr.léer cO:1sulnires de 2r7.
qui fu!"ent
enr~lés dans le:; 190!:e et
20è~es lÉ:ei0ns (2). Les escla..... es ont surt ott. servj dans la fl~tte
i:. l' imn3e de ceux de 217. dont les T'leins d~ 35 ans furent e:'lbarqufs
alors que lES autres restèrent l'our ln défense de n~mc(~
Outre ces familiae.
p.o"!€:
er. des circonstances exce!'tionnelles. eut
aussJ. recours aux affranchi8(~) peur af'surer sa défense. En ISI.
rour équiper une flotte contre les pirat~s ligures et ceux de la mer
d'Ionie. ordre fut donné aux co~suls de no~~er deux amiraux char;~s
de mettre è. la. mer "vingt vaissel3.ux. dont ils for'!leraient les équipages
avec des citoyens sortis d'esclavl3.ge. Seuls. les c0~mandant~ de batiments
devaient être d'origine libre(5).
1) T.L •• XXII.
57.11.
2) idec .• XXVII.39.10.
3)
idem •• XXII.ll. 8.
4) L'affranchi dans le vocaèulaire servile. est d€signé
s~us le ter~~
de libertus.
Zibertinus.Leur ~lace dans ll'i sociêtê ro~aine est ~ssez
floue.
puisqu'ils ne se S::lnt janais ~~nifestés en tant que groupe
eooial constitué. mais
ils grftvit€:nt
autour de le sphère de leur ancien
maître e.uc;:,uel ils denu;urent fcrte!'1ent li&5; réEerve faite de la guerre
sociale. pendant laquelle ils eurent. aux côtes des libres è défendre
jalousement la citoyenneté rOTIBine contre les insurgês. Citoyennet&
dont ils cCl1roençe.ier.t fra.îchement de jnuir. ,'Ijoutons aussi Q.u'esclaves
et afranchis interviennent d~ns les ~uerres civiles qui n'intéressent
pe.s notre étude.
5) T.L •• XL.18.7. Le. m~~e chose s'est prcduite en

:-."
l'
Jd •• JBID .• XLII.\\'
.--
.
. \\
27.3.
r
.
1

-
10 -
1
l,
C'est dans ces conditicn~. particuli~re~ent au 40urs de la guerre
sociale.
Q.U '"n re~arouc ~.ussi "l'introduction p1ut être de pé:r<'grins.
certaine~ent d'affranchis" dans l~ l~~ion 8trie~o 8en8u~ ou dans
les uni.tl:s d'infanterie lourde(l).
~utant de ftl~ts qui attertE:nt
la participation dE' n~n citoyenj, en ce ~ui c0nc~rne ces cas parti-
culiers. Ce chapitre Il0'Jr la péricde qui nous
i~téresse. se rapporte
E:ssentielle.,ent au ccr;-s civique. Qu€'ls
sent
la Ipart
et le r~le
de 1'c,l'lilniIJo P'Ublique da.ns le. [!uerJ'e?
Quelle c~ilncidence y a-t-il
ent~e le métier de solda.t et ~e~ui de cit~yen? Q~elles serent les
consé~u€nces du recrute~cnt clvl~ue s~r le c~n~orte~ent du scldat?
l
GTJE1PF FT OPINI0N PUBLIQUE
1
vi) rUI DECLARE LA GUERRE ".. 'q')~(E ?
Rcme est une cité dans luquf'lle les afcisicns
publituement avant d'être prises. Ce
du plus grand
nc.,bre fit que le c':'lrps civiQ.ue
dépourvu de resl'onsabilité surtcut en ce qui
extérieure(2) .
1) J .HAR~1AND. op .eit • • page 19 TITE LIVE fcrit "l bertini tune prinum
militarc eoepQ,1'unt."
,.... utre:lent dit cette interve ticn des affranctis
constituait une ncuve~uté: il convient de ne pas tror abcnder daos
ce
sens. puisque la r~forme ~arienne avait certainement pernis à
des affranchis de s'enrager con~e s~ldatF.
2)
Nous ne reprendrons pas en détail l'étude cons~itutionnelle
des comp~tenccs rfcipro~ues du peuple et du sénatl dan~ les dc~aines
touchant 1" guerre cf.C.NICOLET. ~oJ'le et la concu~te du monde méditer-
ranéen~ Vol. I. P.U.F. Paris. 1970. P.236:269 e; ~75-377.380.406.
1
1
i
1

- 11 -
c'est à l'opinion publique d'apprécter le bien-fondé d'une
guerre.
Le peuple en armes réuni dans les comice~ centuriates comita
centuriata vote les déclar~tions de guerre(lex d6 bello indicendoJ.On
connaît entre 264 et
111, huit ou neuf déclarations de guerres majeures,
comme la première et la deuxième guerre puniques, la première guerre il-
lyrienne en 229,
la seconde Macédonienne, en 200~ la guerre d'ANTIOCHOS
en 191, la troi si ème guerre de Ms.cédoi ne en 171,· la guerre de JUGURTHA
en
111~usqu'à cette date, ce sont des lois centuriates proposées, sur
1
l'ordre du Sénat, par des Magistrats à imperium.
Le caractère militaire
de ces assemblées n'exclunit cependant ni
les débats, ni les résistances
En 264, elle ne décide de ln guerre contre Carthage, que parce qu'on lui
1
fait miroiter l'espoir de profits(1).
En 200, elle commence par refuser
la Buerre contre la Macédoine.
La proposition fut
"repoussée par presque
toutes lea centuries".
Il fAudra un discours du consul P.
SULPICIUS,
avant un second vote, pour retourner non sans mal l'opinion.
Celui-ci
dans un discours blama "l'indolence du peuple, et lui epprit quel domm~-
t
l
d ,
• .
l
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,
(2)
ge, e
que
eshonneur entra~neralt
e retard apporte a cette guerre
.
A t
'
;(Lf ri
d
d
'
ravers ce debnt transpara~) deu~ ten ances
ont lune
est favorable 6 une intervention en Orient. On r~marque aussi que, c'est
1
sous l'angle des profits de guerre, quand onn~nvoquait pas les tradi-
tions ou la grandeur de l'état, que les Magistrats exposaie::t au peuple
les problèmes de guerre.
Les refus de l'assemblée ne s'expliquaient pas
par le fait que,le peuple ignorait tout des ~vantages économiques que
lui procurait la victoire; mais p~ ;tôt dans le fait qu'à cette époque,
les électèurs romains sont encore des soldats, le seront ou l'ont ét~.
TITE LIVE ne justifie-t-il pas le refus du peuple en 200 par le fait qu~
les citoyens étaient "fatigu~s par la longuetir e~ le poids de la guerr~
l
\\.,
~
précédente".
Cette présenc,;; massive de citoyens
-i.k.... -.) ,~(..(~... l,"'\\~
expli-
que la part de responsabilit~ importante de ces assembl~es.
De telles oppositions et de tels débats existaient aussi
au sein de la classe dirigeante romaine.
Il est certain qu'au cours de
1
notre période, les problêmos essentiels touchant i
la guerre se posent
d'abord nu Sénat.
S'il apparaît comme un champ relativement clos, .
1 )
POL.,
1,
2.
2) T. L.,
XXXI,
4 - 6.

-
12 -
i: 'l1otons que rares furent ses séances tout ii fait secrè-
tes(1). Les portes rest~nt ouvertes et les tribuns se tiennent dans le
vestib le, y représentant en quelque sorte le peuple. Nul doute que les
discussions et les grands débats qUl s'y dfroulaient touchaient une opi-
nion plus importante. Les Patres etaient souvent divisés sur les ques-
tions d~ déclaration de guerre
en 264, sur la réponse à donner à la
demnnde des Mamertins
en 167 pour la décision de faire ou non la guer-
re aux Rhodiens(2).
A Rome donc, Sl c'est à l'opinion publique d'apprécier le
bien-fonde d'une guerre, ou de conclure la paix, il faut dire que c'est
~
le Sénat qui est d'abord saisi de la question, en discute avant d'intEr-
1
roger le peuple(3). Mais à partir de 167, après la victoire de Pydfta,
c1....
les comices se pron6èrent volontiers pour les guerres. Grâce à l'é-
normit~ du butin macédonien le peuple est déchargé du tributum ; l'état
remet de l'ordre dans ses finances.
Le peuple était désormais très sen-
sible aux avantages qu'il pouvait directement tirer de la conquête. Dé-
)
j~ l'ann6e qui suivit la prise de Carthage, les terres de l'Italie m'-
ridionale valèrent très peu, fi cause des dévastations et de la mort de
certains propriétaires. Beaucoup de petits possédants, en obtinrent fa-
cilement un petit morceau qu'ils ajoutèrent à leurs propres champs et
qu'ils mirent en culture nprès avoir acheté quelques esclaves sur leurs
économies de guerre.
D'autres citoyens s'adonnèrent à l'~levage qui de-
vint très vite source de profits du fait que les armées consommaient
beaucoup de viande de porc eelé et
" "
(3)
employalent du CUlr pour les tentes
.
Avec l'utilisation du tré sor d'ATTALE
f "
l
1 ·
.
(4)
pour
lna!' er
a
01
agralre
)
1) PoUr un étranger selon les mots de POLYBE même "le gouvernement en l'absence des
consuls semble aristocratique, c'est l'opinion de beaucoup de Grecs et de bien des
rois parce que leurs affaires avec ln république sont pour la plupart réglées par le
sénat" POL., VI, 13, 8. Le Sénat est saisi par les consuls ou en leur absence, par le
prêteUr, des ambassades étrangères, des nouvelles renseignant sur ce qui se passe hors
des frOntières~C'est une assemblée, malgré la description qu'en donne POLYBE où dès
le IIIème siècle. Romains et étrangers parlent et discutent librement. Sa seule séance
secrète fut la réception offerte en 172 à EUMENE de Pergadttcf.T.L.XL, III, 14,1.
2) Sur la demande des MamertiDS: POL., 1,2,1; sur Rhodes: T.L.XLV,27,2.
3) POL., II, 15.
4) PLUT., T. CRACH. ~ 14 •

-
13 -
T.GRACCHUS d'abord,
C~IUS et les popul~ree frAnchirent un pas de plUE
avec la thforie
selon la~uelle les t~néfices deE con~U(te6 dcvqicnt
profiter individuellement
~ chaQuE citoyen(l). rette constantE accertaticn
de la guerre par le peuple RU courr. de notre péri~de, n'~st donc ~as
fortuite.
Certes,
il
supporte l ',-,ssentiel
des difficult(s militaires
mais i l espère toujours tirer b~n~fice de l'inr[ri~lis~e, et ceci dès
le début
du
second
si~cle. Il orienne nc~ seulencnt les guerres, mais
i l intervient aussi dans la d[sifn~ticn ~e CEUX qui doivent les conduire.
b)
~..1 CONDfI!12 rF L/l CUEPPE
C'~tait au ~euple èe ~~si~~er, par les élections c~nsulaires,
ceux
qui,
l'ann~e suivante, auraient ]8 respcnsabilité de la conduite
des opiraticns militaires.
f ' i l
n'6t~it pas satisfait, il ?ouvait "~~e
exiger un cbanp,ement de co~~anjenent. L'6lection en 216 ~u consul~t de
C. TETIENTIUS VAP.~ON, en est un exerple. Il ét~it considfré COD~e le ch~~pio
d'une stratégie offensive. F~BIUS son prédécesseur et les nobles étaient
accusés de fa~rc durer volontaire~ent cette seconde guerrE puniquc(2).
1) JI. r r è s I e sac de l a. Co r è cee t
d. E l ' . si €,
les 'l d j u d i c a t ion s des t r a vaux
publics et des fournitures nilit~i~es furent de plus en plus frf~uentes.
Beaucoup de ceux
~ui avaie~t r~~portf un petit capital des guerres d'Orient
ct d'Occjdent,
en scllicitèrent et
en obtinrent f'lcile~ent, tantêt seuls,
tantôt associés t. dcs a::lis, tantôt en se f~isant !,rêter des ca.pitaux
par un honMe riche. cf. le c(lèhre ~asEaee de POLY~E(VI,17.) ~ui est un des
documents les rlus i!"l.portents sur
l'histoire de l'iY'1.T)frialis~e ro~ain.
A le croire,
i l y avait ~ ~one, un si ~r~nd nn~bre d'adjudicataire~
moyens et de petites sociCtfs adjudicatrices qu'~n pouvait dire que presque
tous les citoyens roneins particiraier.t
L. CE'~ e.ff~ires.
2) T.L., XXII.
34.

-
14 -
Cependant.
si le peuple conférait
l'imr~ri"m des gr~njs co~~ande~ents
dans la pratique.
c '€st
le f~nat ~ui attritunit. ~ sa ruise les ~rovinces
que les consuls.
pr~alatlet!lent d~si~nfs. s€
r<:T"artissaient
ensuitc(l)"
Ha.is dès le
second
siècle de notre r[ricde diverses leis et p10bi"sêites
marquEront
ln comp~tition grandissante du peuple dan~ la conduite de l~
guerre.
En 121. la le~ Sempronia de provinaiis de CAlUS G~ACCHUf.(2)
exigeait d~sormais du fénnt la dési~nation des rrovinces consulaires av~n
la ~enue des co~ices.
Celle-ci une fois faite.
les oa~istratG tiraient au sert. ~UL
"s:ils le
pr~f~raient. choi5isseient de ~ré è gré la province eù ils dev~ient aller.
Les Patres ne reuvaient plus f~ire dépendre leurs d~finitions yrovincialcs
de leurs
s~rathier. peur les nouveaux élus. Folle a~p~rait con~e un ho~~a~e
ù la souveraineté des électeurs. en réelité elle sera le pr~lude de l'int~
rêt croissant que
le peuple re~eir. perte fi la conduite des guerr~s extrn-
italiques. En 108.
après le désastre de Suthul.
le peuple d~cide au rrsnd
enthousiasI:le de
la plèbe et !"alr.r~ l'hostilité de le. nol,lesse. d'élire
~IARIUS consul et de lui attribuer ln prollince de !'u~idie avec un imperium
de dur~e illinit€e~
1)
La notion de province
provinaia a d's'tord sir-nifié la !:lissicn de
conduire.
sur un th6~tre dfter~iné. ur.e fuerre ertreprise ,ar le peuple
romain:
BermiJ.i provincia:" pl'ovincia urbana cf. 'l'.L.~ VII.l0.11.
C'était au Sénat deI
les délimiter avant de le~ assianer. Il faisait une
distinction entre les prétoriennes et
les consulaires plus ioportantes
qui exi~eaient une ar~ée plus r.o~breuse. Il fixait ~ussi les ressources
budg~taires et les effectifs h cha~ue prowince .

2)
Sur la l e:c SEMPRor;jA de prov1:nci1:!J
: S ~ LI... IUC.. XXV 1 I. 3; C ic .
De Provo
cons. II. 3; iro Ralbo~ XYVII. 61.

- 15 -
Dans la foule qui ncclamait le nouvel élu, outre les "cheva-
liers". se m~laient "artisans de la ville et travailleurs des champs(l).
Entre 66.et 59. interviennent deux décisions majeures
: D'abord en 66.
grâce nu tribun MANILIUS. POMPEE outre les pouvoirs qui lui etaient con-
férés(2),
se voit ettribucr le gouvernement d'Asie. de la Bythinie. de
la Cilicie. le commandement de la guerre contre MITHRIDATE et contre
TIGBANE,
le droit de déclarer la guerre et de conclure des alliances
au nom du peuple romnin avec qui bon lui semblerait(3).
Quelques années
plus tard, une loi de m~me nnture
:
~a ~ex Vatinia l contrecarrait la
décision du Sénat à propos des provinces déclarées consulaires pour
l'année 58. VATINIUS demanda au peuple non seulement d'abroger le dé-
cret senatorial, mais il lui proposa une loi par laquelle il sera at-
tribué à CESAR, pour une durée de cinq ans consécutifs. le gouvernement
de la Gaule Cisalpine et de l'I~~yricum(4).
Certes, ces diff~rentes décisions ressuscitaient les ~e­
ges HORTENSIAE de 286, qui donnaient force de lois auX décisions du peu-
ple. Elles lui donnaient aussi l'occasion dans la désignation des géné-
raux,
de récompenser ses protégée. Elles permettaient de m~me à la di-
rection des armées, de ne plus souffrir du renouvellement annuel de lelp·
chef.
Mais elles ont. pour une grande part, déterminé l'orientation des
conqu~tes. dans la mesure où elles furent un moyen commode, pour des
ambitieux, d'obtenir des pouvoirs exceptionnels.
Dès le second siècle de notre période, parallèlement à
l'expansionisme militaire~ on nssiste à Rome même, à une recherche par
tous les moyens
deehonneurs militaires.
Le m~me homme. SCIPION EMILIEN»
sera à la fois
le destructeur de Carthage et de Numance.
Le proconsul~+
de POMPEE était une véritable vice royauté.
Toutefois cette recherche
de Bloire s'explique aussi par l'organisation même de la cit~. La so-
ciété romaine repose sur des hiérarchies qui sont celles du pouvoir
militaire
(5)
1)10., IBID' I LXXIII 6.
- ~
2) Sur ces pouvoirs qui lui ont étf conférés pnr les ~eges du tribun A. GABINIUS. cf.
Saliou NDIAYE. Les popu~aresl ~eur
prograrrme de l'abdication de Sylla d la venue au
Pouvoir de Clsar. Mémoire de Maîtrise d'Histoire.
. Lettres U n . , 1)
••
p. 42 - 45.

E
3) ID.,~BI!2.'1 p.45.
4) ID~L_!BtD_._, p. 45 - 46.
5) C.NICOLET, Rome et ~a oonquête '.'1 Il OP. CIT.IP. 395.

- 16 -
La consEcration suprême fut celle du com~andenent victorieux, donc
du triompbe(l). C'est l'ideolo~ie dominante a laquelle eurent recours
tous les a~bitieux d'une classe dirigeante conste~~ent renouvel~e et
Elargie dans son recrutement. Cette volonté de puissance, nous aurons
L 7 revenir, explique en r,rande partie l'agressivité en-vers l'exterieur.
s ' i l revenait aux citoyens, le soin d'appr6cier le bien-fond~ d'une
guerre, de d~signer ceux qui devaient la conduire, il leur appartenait
aussi de d~fendre la patrie par les arnes.
II -
DEVOIP !.1ILITI.IRE : DEVOIR CIVIOUE
a) Le devoir militaire, une chr:rge du citoyen (~)
~'obligation de servir aux arMées militia~et de payer jusqu'en 167
av. J.C. le tribut
tributum,constituent les charges munera du citoyen.
Etre soldat, c'est ~tre avant tout citoyen; tout ~âle à dix sept ans-
lorsqu'il devient un Juvenip,est inscrit sur la liste des ~obilisables.
Jusqu' à ~!J.!HUS, le service nilitf'.ire englabait. tous les citofens,
prolétaires exceptEs. Ils etaient r€p~rtis sur deux listes: celle des
Juniores âgés de dix sept è quarante six ans; et celle des
seninres
de quarante six ans t
soixante ans. Au delè de cet â~e. le citoyen est
libEre de toute obligetion civique, par ~onsEquent nilitaire. Curieusenent.
i l n'existe aucune loi faisant obligaticn du service ~ilitaire ou de Ip
conscription Obligatoire, mê~e en cas de désastre national C. NICOLET note
qu"e. : cette charge cilitaire doit êtrE' considéree com~e\\'consubstancielle
a la c it é ell e !!1êce" en ce sens qu'elle fp.i t parti e intégrante de c ett e
coutume des ancêtres antérieure
a toute loi (3).
1) voir
2) ct. C.NICOLET, Le m~tiBr de citoyen dans la Rom. r~publicaine,
Edition Oalliaard 1976 pp. 126. 133.
3) ID.,
IBID.,
p.
1.26.

- 11 -
Le
principe de ne faire appel qu'aux riches, découlait
du fait que, dans la mentalité romaine, les riches seuls pouvaient
s'intéresser au 8~lut de la patrie, ou prendre les décisions politique~
dont pouvaient d~pendre la paix ou la guerre.
Des guerres puniques jusqu'à MARIUS, l'armee est non per-
manente,
L'appel diZectus n'a lieu qu'en cas de guerre; mais en tait
l'armfe est organis~e chaque printemps au mois de Mars, pour être li-
cenciée en automne. Lors de l'incorporation age~e diZectus, tous les
citoyens d'âge militaire d~filent dans l'ordre des tribus en déclinant
leur no~. Le continsent n(cessaire, sauf en cas de tumuZtus, est levé
,
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1
(1)
C
d
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1
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par tIraBe au sort parmI les mobl lsab es
.
eux
on
e cens e al
inférieur à 400 deniers etaient embarqués sur les flottes
i
alors que
ceux inscrits sur l'album equitum ~taient versés avec leurs chevaux et
leurs valets dans la cavalerie. Avec les guerres de plus en plus nom-
breuses, le recrutement ne pouvait être exempt d'irrégularité. Dès la
fin du second siècle, des lois entreprirent de réglementer certaines
pratiques arbitraires. En 123, une loi de C.GRACCHU5 précisait que les
soldats en campagne seraient équipés par l'~tat sans que leur solde fut
t
dim'n~~e pour cela, et qu'on n'enrôlerait pas d'homme au dessous de d;-
sept ans (2).
Cet enrôlement en deça de la limite d'âge s'expliquait d '\\me part par
un manque de combattant lié à la frGquence des guerres, d'autre part par le refus
d'enguser les non possédants.
E
108
MARIU
'
d l '
,
't
,(3)
L'
n
,
S va eten re
a conscrIptIon aux capz. e cens1.

Br"
mée romaine désormais accepte léS proZetarii. Les engagements volontaires conquisi-
tiones se multiplient. Les pauvres firent de l'état militaire un métier, en Sp ren-
gageant régulièrement. Cette armée sere celle d'une ère nouvelle.
1) J.CARCOPINO, Histoire l'omaine" T.II, Des Gracques d SyZZa,Coll. Glotz, r.U.F., 19~r
52 p. 77. cf. également POL., VI, 21, AULU Gelle., XVI, 10.
2) PLUT., C. GRACCH, 5. La loi visait à adoucir la
conscription i effectivement on
enrôlait en dessous de 17 ans,par exemple en 212 cf., T.L.,XXV,5,8. La loi traitait
de la discivline qu'elle cherchait a adoucir. Diod.,XXXIV, XXXV, 25, 1.
3) Sur la rétorme Marienne cf.PLUT., MAR. ,IX, 1 ; SALL.lUG. ,LXXXVl.2 ; Florua,I,lOCXX\\'!.
-
-
.
3,1. Selon ce dernier, Marius aurait acit de la s0rte pro ob8curitat~ generi8 sui.
Dans Salluste, ~G.LXXXVI,3, sont données les diverses explications de l'emploi des
capite censi qui auraient fté envisnBées à l'~poque par l'opinion: absence d'autres
disponibilités en hommes ou désir de s'entourer de fidèles. Mais l'oeuvre de Salluô\\
est muette sur les origines urbaines et rurales des capite censi La terminologie

- 18 -
L'armfe censitaire était non permanente. Les fantassins
recevaient leur
congé définitif hon~sta mi86io~ après seize ou vingt
campacnes. Même s'ils étaient inscrits sur la liste des .Tuniore8~ ils
pouvaient se consiàÉrer comme quittes envers l'état. Pour les membres
de l'ordre équestre, le nombre de c~s campagnes obligatoires était ra-
,
'" d"
(1)
R
l
f "
' " l ' "
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mene g
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appe cns toute 015 qu 1
s ag1ssa1t de campagnes annue'
les se déroulant en Italie même.
Le soldat rentre chez lui en hiver, et
repart nU printemps. La ~er~anence jes guerres extra-italiques, ne per-
me~tra plus d'envoyer et de remobiliser tous les ans. les soldats. Aus-
si au fur et à mesure que se développe l'expansionisme romain, le ser-
vice militaire tendra à devenir continu. Sous Marius, l'armée devient
permanent~ ; c'est une arlli~e nouvelle à recrutement prolétarien. Cette
permanence annulait de facto 13 diminution de la durée du service mili-
taire instituée en 152.
D'autre généraux allaient suivre l'exemple de MARIUS.Ain-
si en 88, pendant la guerre du PONT, les armées étaient composées d'C':
ments pauvres, ruinées par la guerre sociale(2). Les m~mes recrues, d:~­
rigin~ humble, se retrouvent dans les levées effectuées par Pomp~e en
67, ~cur la guerre contre les pirates; dans celles de MURENA en 64
en Ombrie en 58 dans celles de Cesar face à la menace helvete(3).
p'Lebi~ rIOlgi plerosque peint seulement l'ardeur des plébeiens.cf. aussi P.A.BRUNT,
the CJJ"mY and the land in the roman revolution~ Journal of roman studies 1962,p.69,
72 - 74. Il a surtout insistf sur le caractère rural du recrutemc:nt" ... fex Roman le-
gionaries were .•• recruited from the urban proletariate". Enfin J. HARMAND,op.cit.
pp. 12 - , ).
1) CL.NICOLET, le Métier ... op.cit.~p.134. La durée du service militaire sera abré3~e
dans ln première moitié du second siècle à partir de 152. Les Rom~ins mobilisables le
seront après seulement six années de service effectif. cf.POL.,VI,19,2. Cette mesure
est certainement consécutive aux révoltes de plus en plus fr~~uentes des soldnts de-
vant ln longueur et la fréquence des euerres. En 200 par exemple, le consul P.VILLIUS
à qui échut la Mac~doine, rut accueilli par une terrible r~volte militaire :T.L.,
XXXII, 3,1-7 qui 6crit que "plus de 2 000 soldats turent transportés d'Afrique apr~s
la défeite d'HANNIBAL. en Sicile; de ~à, près d'une ann~e après, en Macédoine co~c
volontaires, cela disaient-ils contre leur volonté; malgré leur refUs".cf.aussi la
révolte de l'armée d'Espagne quelques enn~es aup8rav~t en 206 cf.T.L.,XXXIII,24.POL.
XI,25.
2) PLUT., SILLA~ XII, 9.
3} Levée de: POMPEE: App.Mithr.94, Celles de MURENA :Cic.,PRO. Mur. ,XX, 42.Habiut

- 19 -
Il va sans di re que ces pauvre s s'enrôlai ent dans l ' e spoi r
de s'enrichir dans ces lointaines expéditions. Nous ne manquerons pas
de revenir sur leur comportement face à l'ennemi et au cours des pilla-
ges effectués durant la prise des villes. Quelles seront les conséquen-
ces de ce recru~ement à caractère prolétarien sur le comportement du
soldat? Pour mieux les appréhender, nous nous pencherons d'abord sur
sa condition économique.
b}Condition Economique du SoLdat.
A l'origine, la République ne distribue ni armes, ni vêtements, cha-
cun s' èquipant selon sa fortune. Les campagnes se multipliant et se prolongeant, le.
solde stipendium devient une nécessité. Elle aurait été instituée par Camille en 406
pour les fantassins ; en 403 pour les cavaliers. Au second siècle, au cours de notre
période, elle est de 3 as par jour pour le soldat ; 6 pour le centurion.
Sur cette paye que recevait le soldat, le questeur retirait jusqu'en
123 le pr1x des distributions en vivres, en vêtement et en armes. POLYBE écrit que
les soldats n'avaient que peu de ressources en dehors d'elle et qu'elle ne pouvait
""
. , . . . . , .
(1)
Le
...
guere exceder la marge restre1nte qu elle ouvra1t li. leur eqU1pement

caractere
dérisoire de la solde, du fait surtout des retenues pour les fournitures, exclut pour
le légionnaire de pourvoir aux besoins d'une famille i cela, à moins qu'il ne possède
des bienspersonnels. Ce qui, si l'on se refère à P.A.BRUNT, paraît avoir été l'excep--
-tion "So far as the legionary depended on stipendium, he could expect only mere sub-
sistance, with nothing for his fare.ily or future(2)/! Alors que le rendement maximum de
la journée d'un travailleur menuel était de 12 asses, reconnaissons tout de même que
la rétribution du légionnair~ est très faible(3). La différence entre les bons salai-
res urbains et ceux de l'ar:.:'e eXplique le désintéressement des ma.sses urbaines pour
le service. Elles ne pouvaient être tentées par la solde allouée au soldat. Ajoutons
aussi qu'au cours de notre période, les guerre extérieures principalement la seconde
guerre punique ont eu leur effet essentiellement sur le niveau de Tie des ruraux.
pl'Oficiscens del.ectum in Urnbroia ; dedit ei facuZtatem respubZica ZiberaZitatis~ qua
UBUB muZtas sibi tribus~ quae munia"~piis Umbiae conficiuntur adiunscit ••• ; Levées de
César B.G. 1, 7,2 FTovinciae toti quam maximum potest miLitum numerum imperat.
1} POL., VI, 39, 15.
2) P.A. BRUNT~ op. cit., p.77 cf. aussi J.HAm4AND, op. cit. p. 263 - 265.
3) Cie. Pro Ros~'o
......
com. " X 28 ; l' crat eur y• d't
1
d' un escl ave .••
i lla mertÙJ1'a memere p l '
t
t d
de .
.
el" se non amp 'LUS po eran
ua
cm
a6r~•••.

- 20 -
Elles ont ruiné beaucoup de propriétaires dont les dome.ines,
mal cultivés en l'absence d~ leurs maîtres mobilisés, ont été dévastés
par l'ennemi. Progressivement, se forme une classe d'hommes vivant es-
sentiellement par la guerre. A l'image du mercenaire, avec la seule di~­
rence qu~ celui-ci sert une armée qui lui est étrangère, le légionnnirc
assure par l'exercice de la guerre, son existence matérielle. C'est un
soldat de métier qui combat pour le butin et qui sera plus dévou~ à ses
généraux, qu'à sa patrie.
A cette f~ible rétribution s'ajoute l'irrégularité
des versements P.A.BRUNT ajoute
des soldes,
qu 'clIcs étaient " .•. sometimes
totale incoropré-
nons les propos de P.A.BRUNT sur la
blic the optimates had been apt to meet
the
" improbi et egenteB" vith tbe cry that
afford
( 2 )/1
. . . .
1
d .
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·Z
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them
• Ce mepr1s
atent des
1r1geants pour le m~ 66 et
ensem
e
0
ce qui le concerne, s'explique
par le fai t
qu'il appartient è. un milieu
humble. Nous verrons qu'au cours de notre periode, les sentiments de
classe paraissent se rencontrer entre les centurions et leurs chefs
Oligarques(3) .
.

1) P.A.BRUNT, op. ait.p. 77. Sur l'~gularité des salaires en 215 cf.T.L.XXIII,48,5.
Dans la lettre relatant les operctions heureuses qu'il mène en Espagne. Scipion se
plaint cer il manquait "d'argent pour la solde, de vêtement, et de vivres pour l'arroGe,
et, pour les matelots toutes sortes de choses. "Pour la solde disait-il, il pouvait la
préle'"er sur les Espagnols, ,mais le resL devait lui être envoyé de Rome. A en croire
TITE LIVE, la lettre lue, "il n'y eut personne qui ne reconnut qu'elle disait la véri-
té et que ces demandes étaient justes". Ces irrégularités étaient souvent dues à des
sabotages, nes des querelles et des haines du monde politique.D'après Cicfron, ad.f(~
VIII, 14,4 le veto du tribun CURION, bloqua
pendant un an, le réglement de la solde
des forces pompé~nl~d'Espagne. Sur ces problèmes voir aussi J .HARMAND, op. cit.p.265.
Dote 154 ct p.267 note 162 et P.A. BRUNT,op. cit. p. 84.
2) id. ibid. p. 84.
----==:. cm.'>
3) Selon PLUTARQUE, luc.XV, 5 - 7, LU(~ refuse de traiter en hommes ses troup1ers
P.A. BRUNT Buppûse que tu'uH~ " ... lacked personal magnetism•.• " La. réaction de
CABlRA permet de comprendre qu'il n'en possédait point.

1
1
-
22 -
C H 11 PIT f) E D t. U X
BELLUM IUSTUr1 ET
. BElLUn 1NI USTlJ1·
Il n'est ~as s~ns intérêt d'ex~~iner. av~nt de nous pencher sur
lE'S notions de "e,uerre juste et de p:uerre injuste".
le contenu et
l'~volut~on du mat h08ti~ qui a d'abcrd d~sien( a ~o~e. l'~tran~er.
av~nt de siemifier enne~i.Ltâuteur de~conquête romaine~proposant
une dGfiniticn de l'êtat de guerre ~critU t'est ln relaticn nor,ale
entre les peu~les que ne lie aucun accord: tout Gtran~er est donc
un enneni(hostis) (1,). Or L'hostis cO'll"'ençA.it Ù la porte de la cité
elle mê~e. none est en contact très trt avec l'~t~~n~er culturel.
étraneer"~u'elle subit. ~u 'elle co~bat et 3.uc:uel '!:lle enprunte
beaucoul'(2)". Ce Q.ui fr!ll'!,e un moderne da.ns l'histoire de Rooe
1) A. PIGANIOL.
la conqu~te Romaine. P.1J.F •• Paris,1967 p.168-l69.
Peur une co~~araison avecl'étran~er dans les cités F.'rec~ues. cf.
A .AY!iA~D. Les Etrangers daDs Lee cités grecques aux temps cLassiques
(VO et IVo si~cLe av.J.C.) in: Et. d'hîst. ~~c .,p.u.r., Paris 1967,
rp.300-3l3.
Il
note: :'qu'aux siècles classiQ.ues.
le. r~alité
psycholosique et, dans une certaine Mesure ~ussi. juridi~ue. dédouble
l'our un Grec. la noti~n d'~tranrer. Il existe ~our lui des étrnngert
d~riniB. autant que faire se peut, rn~ un critère culturel. et d'autr€~
par un critère qu'on pourrait dire politi~ue a~ sens [t~oloeiQ.ut
(poLis)du !'let.
2) PH;GAUTHIER.
L'étranger et L'hospitaLit~ en Gr~oe et à Rome~
Ancient
Society,
IV. 19l3.pp.1-2l. Avec pertinence.
i l rejette les
conclusions de E.PENVENISTE sur le sens oririnel d'hostis.cf.r.l,
note nOl. Selon PH. GAUTRIEP, les conclusions de E.BENVENIS~E
Le vooabuLaire des Institutions inao-européennes~ Paris. 1969.
To~e l, p.92 ~euvent se r~suner ainsi: "un hostis nlest pas un
êtran~er en gén€ral.
A la différence du peregrinus ~ui habite hors
des lir;:ites du territoire(.Jzostis est "l'étranD'er.
en tant 'lu 'on lui
reconnait des droits ~r:aux ~ ceux des citr:>yens romains".

- 23 -
& ses débuts, c'est le no~bre dE guerres aux~uelles ~taient
contraints les Ro~ains t la feis contre
les
Zatins,
les
y~tsques et les Equee è l'Est, les Sabins cu nord. les FaZisques
et les Etrusques au Nord Fst. Ainsi le vaulait la poeition centrale
de Rome, au coeur d'une larpe plaine facilement
accessible de touteE
part s .
Co~~ent ~tait perçu eet étran~er à ~?me au IV et III o siècles?
Pour~uoi la notion d'hostie a t- elle fini l'er ne s'l'1~k>liquer qu'il
l'étranger politic;,ue? Quel contenu dnnneit-on dans le droit dC6
Anciens. a.x notiens de beZZum iustum et de bellum iniustum?
Telles sont les questions auxt:,uelles nou~ nous efforcerons d'appcrtcr
une réponse dans ce chapitre.
l
DE L'ETRANGE'R A L'ENNEHI
PH. GAUTEIER remarque Q.ue Ca!DMe "nn nanque cruellement de textes
archaïques.
qui puisse~t nous rcnsei~ner sur les liens juridiques
qui existaient entre les cités latines. lec reconstructions qu'on
peut faire c'::lmportent une large rart d 'arbitraire(l)".
ComMent hostie a t - i l en ~u en venir à signifier "enneni", selon
E.BE~VEN!STE"•.• Quand l'ancienne société devient nation, les relations
d'homme à homme,
de clan à clan,
s'abolissent; seule subsiste la dis-
tinction de ce qui est intérieur eu extérieur à la civitas .••
le Dot
hcstis~a prisuRBception -hostile" et désor~ais ne s'applique
qu't:. l'ennel!.i .•. ;'
hospes E'e serait alors substitué à. l'enneci pour
désigner l'hôte.1route cette argumentation se fonde sur la définition
de FESTUS: "eiue em:m generis ab antiquis hostee appelZabantur quod
erant pari iure oum populo romano~ atque hostire por.ebatur pro aequare".
"On les appelait hoetes parce qu'ils étaient de aême droit que le
peuple ronain,' et on disait hostire l'our aequare".
1) PH.GAUTHIER, op.cit .• p. 19.

1
Il ne n8us sel:ltle p~s, q11e l'étude seule des "lienE: juridiques" • .
puisse' l
nous pernf:ttre
de ~ieux cerner la rée.lité de l'étro.np'er
culturel et le~ rapports qui p~uvaient s"tatlir entrE lui et les
citoyens r'")'!1ain~. Celle-k et ceux-A, doivent être a.nalysés plutryt
sous l'angle des "lienE' religieux". L' hostie ~ l'origine, désirne
l'étranger culturel c'est
D. iire celui l'lui n'a plUI 9.ccès au cultf:.
celui Ç.ue les dieux rie l'Ur't1s ne prot~gent pas ~t ~ui n'a pas le droit
de les invo~uer. L'entr~e dps te~ples lui est interditE; et sa présence
pend"l.nt les cérfn,.,nies est un sacrilèp:e. Un t~ncirne.e:e de cet antic:u('
sentir.ent de rÉpulsion nous est resté d~ns un des princi~aux rites
du culte romain(l). Hêrne un objet sacrf qui t'::m'tait !%1')T'H:ntp.nenent
aux mains d'un étraneer devenait aussitôt prof~ne; il ne pouvait
recouvrer
S('ln caractère reli~iemc que par' 'Une cérénor.ie expiatoire.
Si l'enneni s'était em,nr( d'une ville et ~ue les citoyens vins~ent
ù la reI,rendre,
il f'\\llait avant toute ch("'se que les te~ples fussent
purifiés. car le contact avec l'étrnr.ger les avait
souillés(2).
A l'origine, c'est d0nc la reli~ion ~ui ét9.rlissait cette distinction
\\
~\\
profonde entr~ le citcyen f:t l'étranger qui eet privl non eeule~ent
de la protection des dieux. nais dont l'~cc€s au culte EE:t interdit
de mêoe Ç.ue l'octroi d'une Ilartie du sol nati('lnal. Aussi le don
du droit de cité 0. un étranf,er.
était
cODsi::léré con"'e ur.e violation
des principes fondamentaux du culte national.
Il ne p~uvait non plus
itre propriétaire,
ni
se ~arier; du moins s~n mariage n'était-il p~s
reconnu; les €nfa.nts
nés de l'uni~n d'un cit<ïyen avec ur.e ~trangère
étaient considlrés b~tards(3). La loi lui défendeit d'hérit~r d'ur.
citoyen,
et mêr-e à un citoyen d'hériter de lui(J.). I l se~tle donc,
1) Le p~ntife. lors~u'il sacrifie en ~lein air. doit avoir la tête
v:lilée. "parce c:u' il ne faut pas t'lue devant les feux
sacrés.
dans
l'acte religieux qui est nffert
aux d5eux
nationaux. le visaGe d'un
étranger (hostis faaies)
se %!!cntre aux yeux du pontife; les auspices
en sc·raient troul'lés" Virr,ile. !!2..• IJI. 406.
2) Digeste, XI.
6. 36. cf. aussi T.L., V. 50. 2. qui écrit qu'an 390.
8pr~s la dflivrance de q'Î~e du pfril ~aul~is, un sénetus conE:ulte
ord'Îtnll.it que "tous les teM7:'les, dar"s le r.lesu!"e 0\\1 ils ont été
au pcuvcir de l'enne1"J.i.
Sf:!"('nt renis en état.
les enceintes rétablies
(les tâtiments purifiés)": Fana omnia~ qu.oaâ ea hostie pos8cdi88ct~
re sti tu erentur tcrminarenturqu. e (ex piar enturQue) .
a) T.L.,XXXVIII, 36, et 43.
4) CIC., p~o Archia~5. Dans l~ ~entalité rOMnlne de l'époque, toute
transMission de biens.
entraînait la trans~isEion d'un culte.

qu'on prit
~ tnche d'étatlir un système de vexation contre l'étranger.
Pourtant
il n'en était rien. On lui faisait bor. accueil(l) et on veillait
sur lui quand i l était hôte d'une famille ou d'un individu hoepes.
Hostie et HospeB év~qucnt 10nc deux aspects diffGrents de la situation
de l'~tranger"suivant que cc dernier eFt e~ rapport ~vec une communaut'
DU
avec un particulier(2)". L'hospce il l'c·rigine désigne l'étranger
rattaché a la cite par un intermédi~ire. C'est donc ti cette coniition
seulement,
qu'il pouv~it repr~senter ~uelque chose ~ux yeux de la loi.
On ~cuvait accueiJlir l'ho8pes~veiller sur lui ~ais on ne pcuvait pas
lui donner part è. la religion(3). '~~.is il !,articirait
alors i: quelques-Iln
des bénéfices du droit civil
et l~ protection des lois lui €tait
acquise.
C'est dans ce sens qu'il faudrait
interpr~ter l~ for~ule de TESTNS1
qui est un com~entaire de la loi ~es XII tables "Eius enim generi~ ab
antiquis hostes arpellabantur quoi! erant pari iure eum popu lo romano~
a tque ho stil'e ponebatur pro aequal'e" (4) •
1) La tradition mêMe sur les orirines de ~~e montre. dès le départ. une
cité accueillante aux
étran~ers et de la fusion avec les Jabins de
TITUS TATIUS, une cit6 dans laquelle des liens mRtri~oniaux unissent deux
clans. dont la fusion
seule conBtitue une vraie eivitas.
2)Ph.GAUTHIEn.Op.eit.,P.17~Toutefois ajout~ns qu~&U IV'sièçle
au sortir
du péril Gaulois.
Ro~e accorde l'hoepitium publieum ~ CAERE:
eum Caeretièus hos;-itium publiee fiel'et~ quod sacra populi Romani ae
saeerdotes recepissent èeneficioquc eius populi non intermissus honos
deum immol'talium eS8€t
: T.L •• V. 50.3.
3)
L'esclave ù certains égards était ~ieux traité que lui. CRr il était
membre d'une famille dont
il ~arta~eait le culte et était rattaché
à la cité par l'inter~édiaire de son msître. Les 1ieux le ~rotép,eaient.
Aussi la relipion ro~aine disait-elle ~ue le to~beau de l'esclave etait
sacr~. mais ~ue celui
de l'étranger ne l'etait pas
DIGESTE.XI.7.2;
XLVII,
12.4.
4) Citt: pa.r Ph.G.AUTIIII:l. Op.cit.
P.l et 5.
1

c'est donc dans la religion.
ant€rieu'
, :;, toute loi et 6C'urce d'oL
découlaient les droits civils et pclitiques.
qu ' i l f~.udrait recherch€r
la sisnificatiC'n oriç-inelle de r.ostie .!\\joutons ~r a1lssi.
le !:1orcelle-
ment de l'Italie '\\v~nt la conquête. qui "l. pouss~ ~ l'4cès
l'esprit
d'isolement des villes latines Pot étruf;t:lues: chaque cite ayant.
autour de son territoire.
une liene de bornes sacrees qui constuait
l'horizon de 61>. reli~ion natione.le et de ses dieux. 'têr.e eprès la
conquête de l'It"l.lie. les Italiens seront désignés sous le noo de togat1
c'est il dire "RoMains par les !:1ellurs".
et deneursient "allies ou
latins": con~une.uté
juridique et cornnunaut€
de race sont parallèle-
nent affir~ées. ~ais la première ~uerre punique.
la conquête des îles,
la première conquête de l~ Cis!lrine dans les années qui précèdèrent
la guerre d'Hft.NNIE~L. !!lirent les ~OI"a.in5 au c')ntact du monde extérieur.
L'hostis ne désigne plus l'etranger ~ulturel. proche de la cité;
mais. l'étran~er polit:'q,ue. En 216. le sacrifice de deux Gallo-Grecs
ne montrait-il ras.dan.s le r'é8ur~eQCe de ce vieux rite atroce. que les v
vrais étrangers ne se trouv~ient plus en Italie. ~ais sur les rivages
adriatique et ionien: r.'étaient les Gaulois ~t les Grecs(l) .Cette
évolution n'a pas éch"l.ppé è CICERON; l'auteur du De officiis note
que "fut appelé hostie chez nos aieux celui que I!1aintenant nous
nommons peregrinus.
étranger
••• " Pour l'orateur. e' est le tet:1ps qui
a fait "ce mot plus dur: il
s'est éloi,né en effet de peregrinus
.
(étranger) et s'est attaché L celui çui prrte les ar!!les contre nous(2).
Le p.ra~mairien VA~~ON i i t ù peu près la mê~e chose. !!lais en caracteri-
sant davantage l'hostie: multa verba aliud nunc obstendunt. aZiud ante
significabant. ut hostis: nam tu~ eo verbo dicebant perdueZZe~."
"Beaucoup de ~ots désirnent aujour1'hui telle chose. qui autrefois
servaient à no"!~er telle autre cr,')se. C('l"lne par exe!!lple le mot hostis
(ennemi); jadis.en effet.
on entendait p~r cc ~ot l'étranger de passace
'lIlpartenant ft un pays indeI'end~nt de lcr.lc. nl",rs Q.ue.de nos jours.
on sJ:pelle ainsi
celui qui port1\\it. ancienr:ener..t.
le no~ de
p.~duettis (3). Ce pass~ge du DIGESTE(4) est encore plus précis: Hostes
1)
T.L •• XXII.
57.5 ..
2) Cic ••
De off.~I~3? quaquam id nomen durius effecit iam vestustas
a peregrino enim reaessit et prop~iein eo qui arma aontra ferr.t r~mansi
"Il est vrai ç,ue le temps déjà. a
fait ce mot plus dur; i l s'est éloi-
gné en effet de per.,rinus(etranger) et s'est atta.ch~ ~ celui qui porte
les armes contre nous.
3) VAR~ON. DeZinga Zatina~v.J.
4) .Dig~.t.~XXX~16.24~

eunt quibus D€LLum
~ublia~ poruZus Romanue d~a~evit veZ 1rS~ ~opuZo
Roma no •Il Les en neT!ll s da n s 1 e sen s 1 é ~ a 1 d e c t. In ct, é t aie nt ceux
auxquels rn00e 'lvait déclaré la ~uerre cu ceux qui avaient dec1arf
1 a gu er r e à ~ om e •
Hostis. avec l'évolution, a pris une accepti~n hostile et dés~rm~iB.
ne s'app1i~ue çu'~ l'enn~~i. c'est è dire celui à
qUl n~~e ~ décler&
la guerre oa. ce1u~ ~ai 1R. lui déclare.
Dans le 1b're I I de son éritome consncr~ ~ "1'!\\do1escence" du reuple
rOl!lain. FL02US indiClue c:ue tcutes les ~uerres entreprises c0ntrc
l'enne!!1i sent "juste!' et 1egitimBolI •
'\\lors ~ue les luttes intE:stines
c:ui déchirent la cité sant cr-i!=ine11.es • • • • Prius .•• Iuc:ta il,La et
pia oum exte~is gentibue beLlr. memorab~u~••• ~ tum
ad illa ai~ium
8oeLera~ turresq:le et inpiae pugn:1S ~eve~temu~{l). P le croire.
seules les guerres arrosa.nt entre elles des nati'Jns,
s0nt justifiées
aux yeux des hn~mes. et ~(\\ur 'linsi dire.
des dieux. 1appe1ons que
c'est de cette ce.t€(!'crie
de puerres qu'il est c:.uest.i~n dans cette
étude. P"ur FLORUS dnnc. les flnciens ne consid~raiel"t
COI:l~e "justes"
que les guerres entrerrises contre aes étrangers. Si l'on ne s'en
tient qu'à la lettre de l'expression "belZum iustum"
une p~rei11e
~tfirmation neus conduit ~ su~p~ser que la seule justice. a ins~irÉ
ROl!le dans les divers conflits ar~és qui l'opposèrent à tant de nations
Hais l'histoire de la conquête romaine au cours de netre période,
ne nous permet ras de confirner d'e~b1ée de tels propcs. Aussi nous
faudrait-il aller au èe1è de l'ar~arence afin de mieux ~~prendre
cette notion de "beLlum iustum"
et la distinguer de ce11tNilbel.Zum
iniustum" •
II BELLUU IUSTlI'1 ET BELLU~1 INIUSTU~1
1) Be Hum iu stum
Dans son livre l
consacré aux devoirs, Clr.E'q'JN note que "les condi-
tiens de la Guerre juste ont été cndififes de facw~n Iibso1ument sacrée
dans le droit fécial
du reur1e rcmain(2)" . Le iUB fetiaLe
~uprose bien
entendu,
des ra?~crts juridiques ~ri~ine1s avec t~ute c~11ectivité
étrang~re. Il subsiste encl)re au début du 11 0 siècle, notat'!lI!lent en 191
(3). C'est far
son application ~ue RI)~e s'assure la protection des
dieux, dans ses rapports avec
les ~eu~les étrangers.
1) FLORUS.II,19.3-5.
2) Cic •• De off.~ !.36.
~.
3) T.L •• XXXVI,3.7.Les Feciaux.c~11~ges de 20 nembres. auraient 't~

- 28 -
Au début de cette période, Romé' comme toutes les sociétés
archaiques ne connaît pas encore un droit laic.
Ce sont les prêtres-
Magistrats, qui décident de la b~Zlum iustum. Or le iU8 fetiaZe stipu-
l a i t " qu'il n'est
de guerre juste que celle, ou bien qu'on fait après
,
.
" '
. f· ,
t
d'
l
'
(1)
P
reclamat1ons, ou b1en qu on u aup~r8vant not1 1ee e
cc aree
.
our
être juste, au sens formaliste du mot, la déclaration de guerre devait
être précédée de solennit:s d'ueag~. Parmi celles-ci, figure l'examen
par le collège des féciaux. d~s griefs ~llégués par le peuple romain.
Les féciaux président ensuite aux c€rémonies
r~ligi~uses précédant 1$
décl~ration de guerre.Ainsi,une guerre serait-elle la plus inique, est
juste si le fetiaZe a prononcé la formule consacrée" Leur accord éteit
donc prédominant, sans celui-ci la guerre doit être refusée car les
dieux seraient alors hostiles 3 Rcme(2). Avant de déclarer une guerre,
Rome se devait d'abord de s'assurer la bienveillance des dieux au cours
des combats, le destin de la cité étant entre leurs mains. JUPITER et
QUIRINUS protègent Rome en dehors du combat; MARS, dieu guerrier, com-
~at sur le champ de bataille et décide de l'issue de l'affrontement.
"Il suffisait d'une déclaration"de guerre et d'une simple démonstration
militaire: le destin et les dieux se chargeraient du reste(3)."
Quant aux motifs gui pouvaient lég~timer une guerre JUS-
te, ils peuvent se situer à quatre niveaux:
Si le peuple , en voie de devenir un ennemi, e. rompu un traité passé avec Rome,
Rome lleut lui déclarer la guerre suivant la justice feciale(4). Le peuple parjure, au-
rait alors détruit un traité ét~bli au nom de JUPITER, et aurait ainsi offensé les
dieux qui deviendraient favorables à Rcme. Les auteurs de cette déloyauté sont déjà
connus à.es dieux et entrent "moins en lutte contre un ennemi (ROHE) ~tf.t,0 contre
institués par NUMA " pour veiller sur la paix et pour déterminer et garantir les mo--
tifs qui permettent de garantir une guerre juste". PLUT., CAMILLE, XVIII, 1, Sur NUMA
cf. T.L., l, 7 - 8 ; 9-21. Ces prêtres-magistrats ont la charge d'assurer le respect
d'un droit international appelé ius fetiaZe. Cie.De of.~ï
"f
îu t
.t
- ~
)
\\,-
1) Cie., De off. l, 36.
'
2) cf. DAREMBERG et 5/i.GLIO, Dict. des Ant.~ s.v. Fetiale.
3) T.L., II, 2.
4) ct. la guerre m~née contre les Eques en 463 av. J.C.
T.L., III, 2,1

1
1
-
29 -
1
"
.
,,(1)
le courroux des dleux
.
2 -
Aux yeux des Anciens~ une guerre entreprise pour défendre un a1-
1
li~ est juste. Les raisons cn eont donn~e8 par CICERON "dans le caB
où ce ne sont pas nos propres intérêts. mais ceux de nos alliés, la
!
fides qui nous lie 8 eux nous force à intervenir en leur faveur, au
besoin militairement
: nuZlum b€ZZum
8uscipi a civitate optima nisi
aut pro fide aut pro saZute(2)".
3 - L'inviolabilite bafou€e
du fetiaZe
(et plus tord d'un ambassadeur
p~r un étranger, pouvait être considéree comme un motif de beZ~um
iustum. Ce fut la cause d€
la première guerre d'Illyrie en 229-228.
Le S~nnt s'était décide à envoyer des ambassadeurs à TEUTA, régente
du rcyaume d'Illyrie. après les multiples actes de piraterie. commis
par ses sujets contre les marchands italiens.
La reine répondit qu'il
ne s'agissait pas d'une offense publique et que les lois illyriennes
permettaient la piraterie aux particuliers
;
à quoi le plus jeune des
ambassadeurs rétorqua vivement que l'Etat romain avait l'habitude de
venger les offenses priv[es et pourrait apprendre à la reine, pour l~
plus grand bien des Illyriens,
à changer leurs lois.
Comme l'ambassa-
r~venait vers l'Italie, TEUTA fit assassiner plusieurs des envoyés
.
( 3)
roma~ns
.
1)
T.L.,
III, 2,
1-
2) Cie. De Bep.,
III, 34.
3) Sur l'inviolabilité bafoué du fetiale cf.
L'épisode relatif aux
fourches Caudines en 321, lors de la guerre contre les Samnites.T.L.
IV. 8.9.Sur la première guerre d'Illyrie.
:cf.
POL.II;9
; PLINE,
N.H., XXXIV.
24 parle de~ statues qui furent élevées sur le forum à
P.JUNIUS et T.
CORUNCANIUS qui
8
Teuta IZ~yriorum regina interfecti
erant" •
..~

-
30 -
4 - Lorsque le droit è'asylie était violé, une guerr~ pouvait être
entreprise contre les coupables.
L'asylie n'ét~it pas seulem~nt la
reconnaissance univêrselle de l'inviolabilit~ d'un lieu sacré et des
terrains attenants. Elle englobait toute atteinte portée aux biens
d'un dieu, sanctuaires, statues, troupeaux, et BUX personnes qui t~o~­
vaient refuge aupr~' de l~ divinité"
J. En 192, des soldats romains
furent attaqués et tués dans le temple d'APOLLON à Delium~ en face de
l'Eubée.
Rome prit prétexte de l'incident pour déclarer la guerre
cer ~tenait un casus belli~\\Ln notion de guerre juste à l'nrigine,
reposait d'une part sur le respect des formes rituelles
d'autre
~art, elle supposait une injustice commise envers Rome, suivie d'une
deœnnde de réparation avant tout acte belliquQux.
Comme l'a note R.
LOHI3,
"la notion de bellum iustum avait la signification ambivalente
de guerre déclarée selon lEs normes, et de guerre mQnée pour une jus-
te cause(3J~ Autrement, la guerre devenait injuste.
1 Idem., XXXV, 51, 2 -
4.
2~ id., Ibid. POL.~ XX,
- 3. Nous savons que cette guerre fut l'is-
sue longuement différée d'un conflit qui .'était exprim~ pour la pre-
mière feis en
193. Etrange fut aussi l'alternative que posera en 193
T. QU1NCTUS aux ambassadeurs du roi presents à Rome (T.L. XXXIV, 58,
2-3). En
192, à une assemblée tenue à Aegium ou assistaient des
ambassadeurs d'ANTIOCHUS et des Etoliens, TITUS avait décidé de dé-
clarer la guerre à ANT10ClIUS et aux Etolienl5". t.près donc quatre ans de "Guerre
froid~'. Rome tenei t le Casus belU qui lui donnait le droit d'intervention contre
ln. Syrie.
3J H.LON1S, Les usages de la guerre l.intl'e Grecs et Barbares~ Des guerres m~dique$
œ~ milieu du IV~~ Bi~cZe av. J.C.Ann. Litter. De l'Université de Besançon, vol.
104, Paris 1969 p. 115. L'auteur ajoute que contrairement aux Romains, chez les
Grecs, ·l'élément moral ne se confond pas avec le respect pontilleux d'un rituel
procédurier. Il ne suffit pas de respecter celui-ci p~ur avoir bonne conscience .•.
La conscience se satisfera à la rigueur,
d'un prétexte même fallacieux~
pourvu qu'il soit apparemmen~ inspiré par des exigences conformes à
la justice et à la morale."
1·-

-
31
-
2)
BELLUM INIUSTUM
La tradition annalistique reconnaît quelques fois le ca-
ractère injuste et arbitraire de certaines guerres romaines.
Une guer-
rp injuste n'est qu'un brigandage (latrocinium).
Dès ses premiers li-
vres, TITE LIVE distingue expressément le brigandage et la juste guer-
re. Il en est de même pour CI~ERON qui, dans son traité consacré à ln
REPUBLIQUE, d€finit
ainsi les guerres injustes
: "iniusta sunt bella
quae sine causa 8usc~pta sunt~ nam extra ulciscendi eut pulsandorum
hostium causam bellum geri iustum nullum potest(1)n. Les guerres in-
justes sont celles qui sont entreprises sans r~ison légitime ; en ce
sens, nulle guerre ne pe~t ~tr~ juste si elle n'est inspiréç par la
r~paration de torts subis ou pnr l~ d€fcnse de l'Etat~ Pourtant dans
le même traité, l'auteur disait que si ce ne sont les intfrêts propres
de Rome qui sont en jeu, mais ceux de ses alliés, la fides qui les
liait, pouvait autorisèr Rome à intervenir en leur f&veur, au besoin
même militairement. Admettons avec A. MICHEL(2) que CrCERON, en tant
qu'orateur et qu'intellectuel, a toutes les raisons de s'attscher à
la paix et à l'otium.
C'est pr€cisément
pour cela qu'il cherche à jus-
tifier l'agressivit€
de Reme, en la camouflant derrière des prétextes
fall~cieux la plupart du temps
pro fide aut pro salute. n'est-ce
p'\\s lui,
qui ~voque dans le"De Officii8~ non sans une pointe de nosta-
talaie~ l'~poque r~volue où "la domination du peuple romain se main-
tenait par des bienfaits et non par des injustices, et où les guerres
étaient entreprises en faveur de ses alli€s
ou pour assurer cette domi-
nati::ln(3) •
Quoi qu'il en soit, même si une guerre n'était pas justi-
fié~ par une justP. caUS0 ell~ pouvait cependant être juste eux yeux den
Anci er;s Ramai ns,
pourvu qu'elle fut déclarée selon un rituel particulier. Ce qUl
nous amène à examiner les moJalit[s qui presidaient à la déclaration de guerre.
1) Ci c ., De R~p., 1, 11, 36.
2) ;.., I·IICHEL,
les lois de le;; guerre et les probl~"1e8 de 1 'imp~rialisme
romain in J.P. BRISSON, PrQbt~m~s de la gu~r~e d Rome~ Paris, 196~
p.
181.
3)
Cie. D~ off. II - 26.

1
- 32 -
1
CHAF"ITRE
T R LIS
L~ I{CLARAT Im~ DE GUERRE
Une fois acceptêL. la guerre devait encore être déclarée.
L~s feciaux devaient procéder à cette déclaration, aprÈs avoir décidé
de son opportunité.
Ils la déclarent selon les formul~s consacrées ;
les portes du temples de Ja1îu$ sont alors ouvertes.
L'importance du
rôle de ces prêtres, ainsi·que le formalisme strict de la déclaration
de guerre originell~ elle-mêmé, montrent la predominance de la vie
religieuse sur la vie civile et militaire de Rome.
Mais avec l'évolu-
tion des moeurs, et l'extension des frontières, le rôle de ces faciaux
va tendre à diminuer.
~I- LA DECLARATION DE GUERRE ORIGINELLE
-
Lorsque Rome est offensée le Sénat délibère au Capitole
sur ce qu'il y a lieu de faire.
S'il décide la guerre, et si le peuple
réuni en comice51e vote, le Senat doit se reférer ~u collège des fe-
ciaux sens l'accord duquel, aucune "guerre juste" ne peut itre entre-
prise.
Leur décision a une valeur secrée et s'ils s'opposent à la
guerre, le Sénat do~ t
y rE:noncer. Leur approbation et le respect du iUI3 fetiaZc
suffisaient à légitimer un conflit au regard des dieux, même s'il ne l'était pas aux
yeux des hommes.
1) Les Solennités d'Usage de la Déclaration de Guerre
Nous les classerons en deux catégories : les fo~ules préalables et
la déclaratior. de guerre prorrement di te ; les p"rtes du temple de- Janus étant ou-
vert~.
a) Les formules préalables
Les feciaux s'adressent au peuple qui "1. insulté Rome en exigeant unE:
réparation des préjudices subis(1). Ceci constitue le premier rite de la déclaration
de guerre. Voici la première formule prononcée par le pater patratu8~, le premier
des feciaux. qui porte sur lui une touffe d'herbe sacrée du Capitole qui représen~e
la patrie. En arrivant aux frontières du pays auquel on adresse une réclamation,
1) ln 339, les sénateurs envoyèrent les feciaux demander satisfecticn aux Samnites.
et comme ceux-ci refusaient réparation, "la guerre leur fut solennellement déclarée"
T.L., VII, 7. 32.

- 33 -
1 'c;n'lOyé se couvre la têt0 du "fiZum" un voile de laine et dit
"Ecou-
te JUPITER,
~coute2 frontières de tel ou tel peuple (il le nomme) et
que le droit sacré m'éc~ute aussi, moi
je suis le repr€sent~nt offi-
ciel du peuple romain
;
j'~rrive chargf d'une mission juste et sainte
qu'on ait foi
en mes paroles".
Il expose alors
ses demandes, puis i l
prend à temoin JUPITER.
Il répète cette formule en franchissant la
frontière;
i l la répète au preoier homme qu'il rencontre;
i l la
répète en entrant dans la ville
;
i l la répète en pénétrant sur le
forum,
avec quelques légères modifications quant à l'invocation et
à ln formule du serment(1). ?ITE LIVE poursuit son récit en ces ter-
mes ll •
Si on ne lui accord.e pns
ce qu'il réclame,
i l déclare la. guerre
avec un déla.i
de trente trcis
jours."
Cette demande de réparation permettait à Rome d'avoir
bonne conscience aux yeux des dieux
;
la cité qui
refuse de réparer
le tort fait
à l'Urbs deven~it aussitôt fautive, elle encourt ln cc-
l~re 9~S dieux et c'est à elle qu'incombe la rupture de la paix(2).
1) ~ croire T.L., NUMA curait emprunté à l'antique nation des
EQUICOLES, la règle que suivent encore les féciaux pour présenter
une rfclamation.
cf.
T.L.,
l ,
23,6.
Le fécial prend soin d~ distinguer le droit de propriété du peuple
ro~~in, qu'il affirme, ct toute faute qu'il pourrait personnellement
commettre en parole ou en action,
et dont i l assume l'entière respon-
sabilitf.
Sa démarche ne peut se faire
qu~ les jours autorisés.
2)
C'est ce qui
ressort
des paroles que T.L.,
l,
32, 7 prête à TULLUS
,
HOSTILLUS qui s'adresse aux ALBAINS"Rome prend lES dieux à témoins
qu'un des deux peuples a le premier repoussé dédaigneusement la ré-
clamation des délégués,
afin qu'i~rassent retomber sur lui tous les
désastres
de la guerre'!.
Pourtant les revendications romaines ne sem-
blent pas
fondées
car de part et d'autre,
i l y avait des incursions
et que Romains et Albains envoyèrent simultanément des délégués.
La
récitation d'une
simple formule,
même si elle n'exprimait pas la réa-
lit(~ avait le pouvoir magique de contenter les di~ux.

-
34 -
Prot~~~e par cette f0rMule. ~~~e avait la li1ertG de f~ire lts ~uerres
jueées nécessaires.
~ê~e si elles n'~taient pas jU5tes au sens réel
du terne.
Le rituel était tout
ce qui (tait concédé L la justice des
dieux peur leur bienveillance.
Lcrsqu'au b~ut du dClai de tr~nte trcis j~urs. le refus pers~ste.
le pater patratus retourne sur le
s~l enne~i et prononce cette f~rMule
"Fcoute Jupiter.
et toi JC'nus Quil"ï"nll.€
vous tous dieux
du ciel et vous
dieux de
la terre.
et vous dieux
des enfers.
écoutez:
je vous prends
à te!1oir. que tel ou tel pcuple(il le nO'i~e) est injuste et n'acquitte l'es
, . .

...
• fil"

1
ce qu 11 dOlt. A ce sUlct.
nous de:l:ber')ns d!3.ns notre ps.trlc a.vec
es
anciens sur
les ~oyens d'nbtenir not~e dG ... Il rapporte ces nouvelles
...
n
' d " "
. ~ ...
(1)
f t "
....
1
t
d
d
n
;)ome pour ~u
on
e .1Lere

:'prcr.
e
CO!'1p e
ren u
e
ses r.llS!ilOnS
au
Sfna.t.
i l assul~~t celui-ci.
que
les rites reli~ieux ~ui ~arantissent
la
beZZum iustum avaient
~t€ ecco~~lis se10n les usaëes. Si la guerre
était votfe.
elle était déclarée par les fécia.ux.
b)
Lu DGcleretion èe Guerre
Pour la troisière f~is. les féciaux retournaient ~ la frontière en~enlC.
le pater ratratu8 en tenue
sacerdot~le. la tête voilée. prononçait les
.
raroles de
la dCclaration de ~uerre~ ."Pttendu que les peuples des Anciens
latins ont cornis des ~ctions et des f~utes pr[judici~bles au peuple
ronain des Quirites; Attendu ~ue le peurle ro~ain des
Quirit~s Il d(cidé
d'entrer
en guerre contre les Ahcien~ latins. ou que le S~nat du peuple
ronain des Quirites
~ a proposé. vot0. d~crfté de f~ire la guerre au
p;uple des Anciens latins et aux
citoyens; pour ces notifs. moi.
alnSl
que le peuple ronain.
je d(clare
le
l''uerre au ~eu~l(' àes Anciens le.tins
et aux citoyens latins
~t je le f!3.is. "~ ces ~ots. il lanç3it ln javeline
sur le territoire.
Ce Reste ét~it un s~1ne d'hostilitt. car lA j~veline
avait une pointe de fer.
~u encore, ~cuvait ~voir le bout ~rGlé et couleur
de sans
(2)".
Cette proc~dure qui.
sel~n les ~ots l~vier-s. nï~it cours ~ l'GpcQuP.
royale
sous le lép,endaire Hm·ft
POHPILUf.
êt':.\\it ~'lss( ~ 1':.\\ postéritt. :
r
puisqu'elle s'est poursuivie EOUS la r€rubli~ue. Au cours des ~~es elle !3.e'
'"
.
le ~~rne contenu. n~is. nous y reviendrons. elle '1 chnn~' sur le pl~n
forMel.
LE"' lancf'r du ,javelot ct l'ouverture èes portes de cTa..,us
~arque.ient le d~but deF hosti)5t~s.
1) T.L ••
I. 32.9
"'t~"., "'2l-Id
lb·; d
1, ?
;.~ __•• .
• •
_.~
4,.1

- 35 -
c)
L'Ouverture du temple de Janus
Dès que la guerre était déclarée,
les lourdes portes du
temlJle de
Janus restaient ouvertes. Ce temple construit par NUMA
au picd de l'Argil~ta au No~d Est du forums
était le symbole de la
guerre et de la paix.
"Ouverte, i l annonçait que Rome ' t a i t sous les
armes,
ferme
que la paix rég~ait tout autour d'elle" Deux fois seule-
ment,
i l a ~té fermé de;uis NUMA
tune feis
sous le consulat de
TITUS MANLIUS à la fin de le premi~re guerre puni~ue t une deuxième
fois
après Actium par l'empéreur AUGUSTE CESAR(l). Plusieurs inter-
prét~tions légendaires ent été émises pour expliquer cette coutume
archai~ue. Elle remontercit à la guerre contre les Sabins au Vlllème
siècle.
Lorsque ceux-ci voulurent entrer dans le temple de Janus,
der. torrents d'eau bouillnnte
jaillirent avec force,
et les ennemis
durent reculer.
Rome fut
ainsi miraculeusement sauvée.
D'autres es-
timaient que le gfnie de la guerre s'enfermait dans le temple
t i l
fallait
le laisser libre de s'élancer contre les ennemis de Rome.
Mais inversement, certains esprits pensent que l~
g~nie de la paix
est précisément enfermé
dans ce temple, et qu'il quitte Rome lors-
que la guerre est déclarée.
Une explication rationnelle de cette
coutume n'a pas été trouvée,
bien qu'elle ait été en vigueur jus-
qu'au IVème siècle après J.C., soit pendant onze siècles.
Mais i l est certain que son institution, remonte à une
~poque où Rome est régic, dans tous les domaines, par des règles re-
ligieuses.
L'ouverture des belli portae annonçait que la cit~ e~nit
en guerre.
Mais au fil der. guerres extra-italiques, avec l'agran-
dissement des distances et l'éloignement des
frontières romaines,
on
netera une évolution et des
changements dans la procédure de décla-
ration de la guerre.
1) PLUT., NUMA, XII.

-
36 -
II - EYOLUTION ET CHANGEMENT DANS LA PROCEDURE DE DECLAR~TION
DE LA GUERRE.
En
f~isant allusion à la procédure de déclaration d~ l~
guerre, qui avait cours S l'épeque royale. TITE LIVE ajoutait que
. . .
..
....
1
. . . . . (1)
C

t
l'ho
t
.
cet usage
etalt passe n
a posterlte
.
~ur ce pOln,
18
olre
ramuine lui
a
dans une certaine mesure donné raison, puisque la dé-
claration de guerrt a conservé au cours des
âges, 10 même contenu.
C'est Seulemènt sur le plan fernel qu'elle s'est par la suite codi-
fiée.
Le seule exception semble avoir été la déclaration de guerre
adres56~ au Sénat Cartha6in0is par une legatio conduite par Q.FABIU3.
A en croire TITE LIVE, le plus âgé des membres de la dé-
légation romaine,
le consul Q.
FABIUS aurait devant le Sénat Cartha-
glnols, en faisant
un pli
a sa toge dit: Il Nous vous apportons ici
la paix et la guerre,
ce <iui vous plaît prenez-le." A ces mots,
on
lui
crie, nen mOlns
fip.rem~nt, de dcnner ce qu'il veut, et l'ambas-
sadeur,
en effaçant le pli,
d i t " qu'il donnait le. guerre." L'histo-
rier. ajoute que cette façon que l'on adopte de poser la question et
de ùéclarer la guerre, paraissait plus conforme à la dignité du peu-
ple rocain,
qu'une dispute de mots sur la valeur des traités.
avent
et surtout après,
la chute de sagonte(2).
Pourtant cette procédure
sembJ.e avoir été unique;
la déclaration de guerre a/au cours des
âges)conservé le même contenu,
comme en témoigne celle qui fut noti-
fiee en
171 à Persée "Attendu que PERSEE .•• contrsirement
aux termes du ~raité conclu avec sen père •.•
a porté les armes con-
tre
l~s Alliés du peuple romain, dévasté leurs territoires. occupé
leurs villes
t Attendu qu'il a pris la décision de préparer la guerre
contr~ le peuple romain ct accumulé ~ cet effet des armes, des tro~j
des b~teaux,_s'il ne donne pas satisfaction sur les points précédents~
qu'on lui fasse la guerre(3). Le texte de cette rogatio fut l'oeuvre de deux plé-
béi~portés au consulat, et partisans d'une rupture définitive avec la Macédoine.
Ce chan~ement intervenu en 219, n'est que conjoncturel et s'explique par l'empres-
sement des éléments favorables à une réou,erture des hostilités avec Carthage.
1) T.L. l, 32, 13.
2) T.L •• XXI, 18, 13, 19, 1.
3) Idem) XVII, 30, 10 - 11 ~oir ci-dessus chnp.IV, première partie.
'':.:';;

- 37 -
Toutefois,
notons qu'evec l'évolution, le rôle des féciaux dE:vient
moins i~portant. Le pater r~tr~tue est re~plac' par les Zegcti ~opuli
~omani. (Z). Ce sont eux ~ui, e€sor~~is iront porter le ~€ssage de
guerre è des nations les plus t:;loignés. Nour reviendronS plus en
détail
cn teMps oppcrtun.
sur le rôle des a':Jbassadeurs; rctencns
seulement un ~spect de ce rôle :décl9.rer la guerrE' il l ' enneni.
Ce De sont ~lus des Pontifes, "ais des S~n~tcurs, choisis par le f(nat,
qui, au cours de n0tre rfricde,
diri~e la politique ext~rieurc et
reçoit les ~~bassadeurs étranRers. Pour dfclarcr la e~erre è Phili~pe
V er- 200, le consul f.ULPICIUS de~~nda si~plèI!lent aux féciaux,
s'il fallait la lui c.r.noncer ~ lui-:lêMe, ou s'il suffisait de l'ann('ln·
cer à
la prenière ~arnison de la frontièr~ de son roy~~e. L~ guerre
fut anr-oncée ù la pre~ière ~arnison de la frcnti~re de son royaun€,
et Don pas dans S!l citf et il lui-rê'1e, co;;ne l'usA.:;;e l'exigec.it(2).
Le
pater p~tratu8 ne jette plus la lance à le. frcnti~re eDne~ie,
nais derrière le tenplè de BeZZone~sur ~n coin de terre qui ~vait
été acheté rar un prisonnier. L'endroit était d'sormais considéré
conne un territoire er..ne~i.( (lger h08tiZis).
1) Sur leur rôle. voir chapitre IV,
deuxièoe partie) Pl' ..1.-;~- 1(.,9
2) T.L., XXXI,8,3.

- 38 -
c ~; :~ PIT R E OU!\\TR[
L' INTERV~X~TION Ror!J\\H~E [XTR~,- ITALIQUE
FONDEMENTS JURIDIQUES ET VIOLATIONS DE LA PROCEDURE DE LA DECLA-
RATION DE GUERRE
(264-58 av.J.C.)
Devenu~ depuis 272 mnîtrêss~ de l'Italie à la charnière
des deux bassins de la Méditerranée,
Ro~e ne peut se désintéresser
ni dt l'un,
ni
de l'autre.
D~s 264, elle y mène une expension paral-
l~lc qui aboutira a la scunission de toute la M~diterran~e. Pourt~nt,
r1en ~ priori, ne paraît justifier cette expansion extra-itelique.
Rome ne cherchera pas à impos~r pp.r la force son organisation politi-
que ou se religion,
nos
sources ne
déc~lent pas la moindre croisade
reliBieuse ou idéolocique,l'Urbo ne connaît pas
une inpérieuse pous-
sé~ dcmcgraphique qui l'aurait contrainte a éprouver ln nécessité
d'élareir son espace vital.
Elle ne connaît pas non plus un système
politiqu~ ou social donnant la prééminence à une c~ste de guerriers
.-recevant une éducation morale et physique orientée vers la guerre.
Mais i l ne s'agit pas dans
ce chapitre,
de nous interroger sur les
causes profond~s ou secondaires de .l'impérialisme romain, mais plutôt
sur 1
. . . '
'd'
~
carnctere Jur1
lque (1)
d e l '
.
act10n
'1"
m1 1ta1re de Rome.
En d' au-
tres
termes, nous allons rechercher les
causes
juridiques qui
ont lé-
gitimé les
interminables conflits que Rome engagea tout le long de
notre période.
Nous verrons
aussi
dans quelle mesure celles-ci ont
ét~ conformes aux conditions de beZlum iUBtum codifiées'ns le ius
fetiale.

1)cf.
W.SESTON,
le droit au service de l'Imp~riaZisme roma~n~ Comptes
rendus de l'Academie des inscriptions et Belles Lettres
(CRAI),
1976,
p.
637 - 647.
. ... ~..---..._--

- 39 -
Pour rnleux cerner tous ces aspects J nous distinguerons
trois phases dans l'interventien romaine:
celle qui va
de la
première punique a la troi3iè~e guerr~ de Macédoine (264-172) phase
de l'essor impérialiste, ln période qui va de
172 a la fin du second
siècl~, celle des guerres prév~ntivesJ ~ntreprises pour assurer l'hG-
gémoni~ rODaine. Enfin ln trcisième phase, qui correspond au dernier
siècle de la Révubliqu~. est caracterisée par 13 politique d'initia-
tive personnelle des gén~raux.
l
-
L'ESSCH IMrERIALISTE 264-172 av.J.C.
En 264, l~ r~~uêt~ des M~mertine, groupe de mercenaires
d'origine osque( 1). fut l'occasion du premier conflit entre Rome et
Carthage. Devant la menace de Syracuse. les Mamertins, réduits fi re-
courir à l'étranger. sOugèrent à s'appuyer les uns s~r Rome, les au-
tres sur Carthage. Carthage la première intervint et laissa une gar-
nison punique en Sicile.
C'est alors que certains des mercenaires J
sans doute d'origine italique. se tournèrent vers Rome.
Le problème de le responsabilité de la première guerre
punique (2) a donné lieu à de nombreuses controverses. Selon l'historien Sicilien
PHILINOS d'AGRIGENTE
les Romains en débarquant en Sicile pour y soutenir les Ma-
mertins. violaient ouvertement l'un des traités avec Carthage en vertu duquel.
1)
POL., 1 ; 10. Les mercenaires italiques s'étaient substitués aux mercenalres
d'origine grecque, qu'avaient apF~lés les tyrans syracusains du Vème si~cle. Parmi
eux, les campaniens qui occupèrent Rhégium et les Mam:rtins qui s'emparèrent de
Messine. Féroces et indisciplin~s. ils massacraient les d6fenseurs des villes dont
il s'ernp~raient ; ou comme ce f~t le cas peur Rhégium et Messine. se rendaient sim-
pleoent maîtres de la cité qui payait leurs sèrvices : Diod., XIV, 3. XVI ; POL.
l, 7 - 10.
2) Sur Carthage et Rome cf. J.P. BRISSON. Carthage ou Rome ?,Paris, 1973.
Sur le première punique ; R.E. MITCHELL. Roman-Carthagin~treatie8:
306 and 2791
8. B.C.~ Historia~ 1971~ p. 633-655 et P. VEYNE
y'a-t-il au un imp~riaZisme Romain?
1
in M6lnngcs d'archéologie et ùf~istoire de l'école française de Rome, 1975. p.793-
855, et C. NICOLET. Rome et l~ conquête ... op. cit., T. II, p. 595-611.

1
1
- 40 -
,..
" Les Romains devaient s'abstenir de pénCtrer en Sicile,
1
et les
. .
l
l '
(1 )/
L '
d
d
M t '
d
Carthag~n01s
en
ta ~c

~
'n~~n
e
es
amer ~ns, au
erneu-
rant:.
suscita des hésit:lt~'IJ~: 2. r'
Le SGn"lt se parta.gea, incap!lble
d'aboutir à une décision; i l est cert~in que ln cause èut paraître
mcuvcise à nombre de sén~teurs soucieux de ne pas rompre le traité de
306. Ils pouvaient être aussi gênés du fait d'accorder leur protectiGn
à ù~s pi11~rds coupables des mêmes crimes que les Campnniens de Rht-
gium que Rome venait de châtier.
Le Sénat embaNass[,s'en remit à le
décision du consul APPIUS CLAUDIUS qui soumit l'affaire aux comices
j
centuriates.
Il fit miroiter eux yeux "de la mssse ruinée par les
guerres précédentes", l'espoir d'un riche butin, capable d'enrichir le
trésor ct les particuliers.
Le peuple après un long débat accepta la thèse de l'in-
terventicn grâce au consul, Celui-ci se dirigea aussitôt vers Rhégium
et décida de faire la guerre aux Carthaginois.
Il franchit le d6troit
pour apporter, disait-il ln liberté aux Mamertins. (2) Certes Rome pou-
vait avoir de bonnes raisons de prendre en considération la demande
des Mamertins
mais une intervention en Sicile constituait une viola-
tion ouverte du traité de 306.
L'occupation de Messine par les puniques
suscita de vives inquiétudes ~ Rome même.
Les Carthaginois se seraient·
emparés du détroit et de toute la Sicile.
1) POL., 111,26,3.
Pourtant i l soutient que cette convention n'a ja-
mais existé et qu'il a eu soin de s'enquérir auprès des Romains et des
Cnrth~Ginois de tous les traités conservGs. Certains modernes l'ont
suivi sur ce point. Par contre R.E.
MITCHELL, op.
cit. ,p. 633-645 a
montr~ que la lecture attentive de la convention signée en 279 entre
les deux nations, et cité~ par POLYBE lui-même (III, 25, 3), permet
d'entrevoir, qu'une clause fa.isait référence à un traité antérieur.
elle autorisait. dans l'év~ntunlité d'une alliance contre PYRRHUS,
chacune des deux cités à op~rër sur les territoires soumis à l'&ut~e.
2) Sur ces f a i t s :
POL.
l,
10 -
11.

- 41-
L'île serait devenue, comme l~ dit POLYBE, le point
par o~ l~s puniques seraient pBSS~S pour soumettre l'Italie. Mais le
traité je 306. interdisait l'intervention cartbnsinois~ en Italie. On
peut cependant observer que les Mamertins s~ prGsentèrent en suppliant~1
propos~nt la deditio d~ leur cité. L~ forme solennelle de leur offre,
impli~~ait pour Rome une obligation morale de caractère religieux,
d'accepter ces nouveaux alliés, obligation qui a dû contribuer à lever
les scru~ules à l'égerd d'un traité déjà ancien conclu avec un peupl~,
qui n'était plus l'allié véritable d'hier. Mais Rome n'avait pas le
droit de conclure alliance avec une cité sicilienne.
En acceptRnt la requête Mamertins, ell~ a assumé la res-
ponsabilité formelle de le guerre.
La tradition annalistique romnine
qui D'cn tient:
à l'idée d'une Rome soucieuse seulement de sa défense
et respectueuse de ses engugements, s'est efforcée de masquer cette
f
responsabili té. POLYBE lui-mêne ...
;.~ l' exi stence du trai té de 306,
il semble bien que ses informateurs romains lui en aient dissimulé
l'existence.
Car i l est peu probable que Rome ait été en mesure de con-
sidérer en 264, le trait~ conclu 42 ans plus tôt, comme caduque. Il ne
paraît pns non plue que l'accord ait été prfvu pour une période limi-
tée. Il demeurait formellement valable, mais il ne correspondait
plus à le situation de Rome en 264. En 306, Rome n'avait de position
forte qu'en Italie Centrale) elle pouvait avoir des visées sur l'Itali~
du Sud, mais elle n'y avait pas encore d'intérêts à préserver.
En 264, ses intérêts se sont bien élarg~(1), la requête des ~amer­
tine aurait pu permettre à Ro~e d'obtenir un réaménagement de l'accord de 306 plus
conforme il sa puissance nouvelle.
1) Certains
modernes: J. HEURGON, Rome ét la M~ditelTan~e Occidentale jusqu'au%
guerres pZ!niques~ PoUF. 1969 et
FARNOUX, Les guelTes puniqu.es~ P.U.F., Q.S.J.
nO 888, 1962, p. 35 - 36. attribuent la responsabilité de cette guerre aux
Atilii
d'origine cRffipanienne qui occuperont le consulut entre 261 et 245. Ils cherchaient
à nffendre files intérêts cOIDI!1erciaux'i des marchands italiens. Nous pensons comme
CL NICOLET~ Rome
et la conqubte '0. op. cit.~ po 608 que ces conclusions ne sont
pas accepta.bles dans la mesure ou le traitf de Lutatius ne prévoyai t
pas de
clauses commerciales.
C'est dans les clauses de cette convention qu'il
faudrnit rechercher les mobiles veritables de l'intGrvention romaine.

- 42 -
POLYBE inspir~
snns doute par FABIUS PICTOR, a contri-
bu6 a rendre moins net le caract?re d'agres~i0n de llint€rvention
ro-
maine, en all~geant que l~s Mamertins infcr~~s de l'ecceptation ro~ain~
auraient chassé la garniscn punique(1). Rome n violé les règles d'une
guerre juste, ce qui n'a l\\~S écha~pé à l'opinion de b0n nombre de Ro-
mains, ou Sénat comm~ dans les comices. La euerre n'~vait pas été dé-
clarée è Carthage, et ne le fut peut être jamais s~lon les formes
'"
rc-
gulières.
En 219,
"1'e.ffa.ir(; de Saeonte" fut;;' l'origin~ de la
secooGc guerre punique. Mais 1~ns quelle mesure la prise de 10 ville
constituait-elle un casus belli pour Rome? Le probl~cc de nos jours
derneur~ encore obscur, embrouillé par les controvers~s infinies de
l'érudition contemporaine, et obscurci per l~s nombreux d~saccords
d'une tradition pourtant pro-romaine. Dans tous les cns, quand HANNI-
BAL attaque SAGONTE, le sénat consid~re cette action comme une viola-
tion d'un accord précédemment conclu et comme un~ attaque contre un
allié de Rome.
1)
En fait,
d'aprèsDiodore de Sicile dont les t[>moiBnnges doivent dé-
river de RhiZinoe d'Agrigente s les Romains, redoutant l'envoi dlune
flotte carthaginoise leur interdisant l'accès de Messine, auraient
char13e une avant -garde d'y prendre J..·ied en hate,. Le COIll1!l3.ndant p\\L"lique, n'ayc.nt
pas reçu d'instructions de son gouveroeUlent, surl'Û t évacue la ville, craignant d' ag--
graver la situation pcr un€
attitude feroe. Mais Carthage réalisa vite le péril;
Grâce à un accord conclu avec HIEnO~, èes dispc5itions communes fur~nt prises pour
réoccuper la ville qui sera assiégée sur terre par de5 troupes puniques et syracu-
sain~s et sur mer par une flotte carthncinoise. Quand le gros de l'armée romaine
parvint ~ Rhegium, le détroit ~tcit bloqué. De pert et d'autre on enGagea d~s négo-
ciations ; Carthage rappela les térmes du traité interdis~nt la Sicile à Rome. ~
consul essaya de forcer le blocus, mais les puniques repoussèrent le ocnvoi rom~in,
sans le détruire.
Souhait~~t ainsi garder le ~on droit pour eux, ils
, - - - - -
•...
...,......,.... .~..,~
ouvrirent les négociations mcis les Romains tentèrent de forcer à nou-
v~au le blocus. L'intransigeance romaine consacra l'ft~t de guerre.
cf.
Divd. XXXII,
1 - 2.
l.-)

1
- 43 -
Mais aux nmb~ss~dcurs venus se plaindre devBnt le S~n~t
carth~gincis, les Sén~teurs puniques rét0rquèr~nt que d'une p~rt,
SAGONTE ne figurait pas sur Ir. liste des alliés du peuple romain que
CarthcE0 s'était engag&e 8 rc~pccter lors du traité de 241, et que
d'autre part la convention de 226(1)sur lnquell~ ils se bnseient, ét~it
consid~r~e comme un engccement personnel d'HASDRUBAL, qui n'engage~it
nullement l~urs cit~s. L'ex~mc~ attentif des faits nous permet d'af-
fiTiiH~r qu~ ce casus bell-: nfét,tit qu'un prétexte pour lfgitin:er une
intcrv~ntion armée ccntr~ leur riv~le.
Comm~nçons p~r POLYBE qui att~ibue les respcnsabilit(s
d~ l'ouverture des hostilités aux puniques qui cnt vicIé le trBité d~
226. LUI, qui a tant l'habitude de détailler l~s ~actes rornano-puni-
qU~~t ne connait
de celle-ci '1utu~e clause: cellE interdisant aux
barcides de franchir
L'EBJ-:E
(2)
1) Sur ce traité cf. : G. CH. PICARD, le treaiM romano-bCIPaide de 226 av. J.C. in
l{t;langes offerts à J. Carcopino, P.~chette, 1966 p. 747 à 762 ; J. CARCOPINO, lep

~tape8 dl; l'impérialisme Romain op. oit.p. 19 - 67 ; idel'1,
le tl"ait~ d'HASDRUBAL
et la responsabilité de la deu:ri~FIe gU(~rr~ punique. Rev. et Aoc., latomufJ, 1967,
p.577 - 596., I? GAUTHIER, L'ERRE et SAGONTE: défense de POLYBE~ Rev. Phil., 196f,
p. 91 - 100. En 226, une ambassade passait en Espagne. avec HASDRUBAL, une conVGn-
tian qui feisait défense aux Carthaginois de "passer en armes le fleuve lber. " La
convention est résumé~ en quatre p~ssüges dans l'oeuvre de POLYBE: II, 13, 7
III, 27. 9, 29, 3, 30, 2 - 3 cf. ~ussi T.L. XXI, 2, 1,. Pour Rume ce traité seul
régiss~it ses rapports avec C~r~hase. Le tr~ité conclu en 241 entre LUTATIUS, n'n
eu ni l'~p~robation du SGnat, ni celle du peuple. Aussi fut-il considérC par p.~~~
comme un engagement personnel De pouvant être ~ris en consièération.
2) L'Achéen (III, 27, 9) ecrit que ce traité fut conclu avec PJ~SDRUBAL, en Espagne
et qu'il interdisait aux Carthaginois "de traverser l' ebI'(J en armes". Un peu plus
loin~ sans craindre de se rép6ter, iJ rappelle (III, 29, 3) Qu'HASDRUBAL avait
. souscrit positivemE:nt "un pacte par lequel il était interdit aux Carthaginois de trr
verser IEbre en armes", Immfdintement après, (III, 30, 3) i l définit le trait~
à 'H:'SDRUDAL comme celui "sui "-ant lequel les carthaginois avaient reçu d6fense de
trnycrser l~e ''!'n e.n:-~'"
: 1 n
"li!
. .
,-

- 44 -
D'autre part, il n 1 ~vait J.las inscrit SAGONTE au nombre de"
C 1• t r. ,',
f.'
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Ill' e" e 8
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2 4 1
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b ' t "
(
que
omë,en
aurnl
n rl ees
1) . ,.u.
( 2 )
CH.
PICi\\.HD
,
note que SACO.:TE se dr<::sse à quelques 160 k::lS au Sud
d~ l'Estuaire de l'EBRE ; il eet impossible que son indépendance ait
" ,"
t'
l ' t " d
"26 (3)
L
.
d'
etc garnn le par
e tral
~
e c
.
es pUlilques, en
lsposant de
SAGON7E semblent être dans leur droit(4).
Le Sénat Carthaginois d~vant
les exiBences romaines, à savoir la rernist è'RANNIBhL ; refusa de pren-
dr~ cn consid~ration le tl'Rit( d~ 226. L~s ambessadeurs romains n'ont-
ils p~s d~clar~s devant cette m~me assemblfe(5)que le consul C.LUTA-
TIUS nievait ~t~ en 241, ni autoris( par le S~nat ni par l~ peuple, ~
signer une convention, cella-ci n'~tait donc pas valable. Ln m~me
"
re-
pli~u~ leur fut adressée. HAS~RUBAL a conclu un pacte ù l'insu du S€n~t
en 226, celui-ci ne pouvait engae~r CarthaGe.
1) Id.,
Ibid.~ 2Zs 1 - 2. D~~s le mêoe livre III, il nous apprend que les Sagontins
s'itaient réfugiés sous la tute:ll", romaine (III, 30,1) "nombre d'années avent les
affaire ,PHM,NlBAL" et que SAGON~ a.ure.it fait appel
à Rc:ce pour résoudrE: ses dis-
senfions internes. Toujours dans le ::nême ouvrage, il cite des paroles d 'HANNIBI...L
(III, 15, 7) qui reprochait :),\\1.."< Rom!1Ïns dt; s'être ingérés 'peu dE; teJ!lps auparavant';
et cela sens droit, dans les querelles des Sagontins.
2) G. CH. FIClUID, Le trait~ ••• op. cit. ; p. 747.
3) Cctt~ version est admise a~si par P. PEDECH, op. cit. 184.
4) J. Carcopino, Zes Etapes ••• op. cit. p. 19 - 67, pense que ln limit~ imposée aux
puniq1les ne serait pas le cours actuel de l 'l!EBRE~ mais un fleuve plus méridionrü
alors d[nol!llllé HEBRB Ze JUCAR qui débouche sur la Mtcii terran~e à. 45 km au sud dE.:
SAGOnTE. Cette thèse est en parti~ acccpté~ (cf. C. NICOLET, Ro~e et Za aonqu2t~
T. II. op. cit.~
p. 61) par bon no~br~ de Moùernes. Mais elle est principalement
rejetée par F.W. WALBANK, op. cit., vol.I, p. 171. Pour l'Anglais, il semble d'une
part, étrange que POLYBE n'ait pas explicité à ses lecteurs cette dualité. D'autre
part il ajoute "This thesis, maltes nou,sense of the treat:r ri th HflSDRUBAL, wich the
Romans instituted (Pol., II, 13,6) because of the Gallic peril. What sort of ccnce~­
sion vas it to require to undert~e not to go any farther than he had alrendy gone ?
This is not ho... one bids from weakness."
5) Il s'agit de la deuxième ambassade venue d~clarer la guerr~
T.L., XXI, 18, 9-11.
t .•..••'

- 45 -
En s'adressar.t
dirf;ct~r.1ènt il HilSDRUBAL, (,.u lieu d'envoyer
ses p16nirot~ntieir~s en Afrique, le Sênat romain c~mmettait une incor·-
recti~n juridiqu~ à l'ég~rd du gouvernement punique. c'est un accord
de H~gistrat ~ Magistrat n'cbliceant pas les étnts(l). Donc les rela-
tions romano-puniques étaient régies p~r le seul traité de LUTA~IUS
qUl
ne fcisait
nulle mention Je l'Espagne.
Ln mission rom~ine d'~utre pert, ne fit aucun effert pour
aboutir ~ une entente. Dens ~'ultimaturo ar.ress~e à Carthage, les 16-
gats déclarent qu'il n'&teit plus temps de n~gccier~ m&inten~nt que 10
vill~ était tombée, et qu'il i~portait de livrer les coupables de man-
que~ent il la foi des tr&it~s pour n~ pas apparaitre comme leur~ com-
plices.
Le plus Ag' aurait fait un pli il 8~ toge, ù~clnrant qu'il ap-
portait ln palx ou la guerre. et qu'il n " t a i t plus question pour Car-
th~cle ie négocier, mais de chcioir. Le Sénateur Carthaginois qui pré-
sidnit la séance aurait pri~ If; Romain de choisir lui-même. et ce der-
nier aurait alors déclar~ fnire choix de la guerre. L'anecdote avec
ses br~ves répliques, a sens doute fté plus ou mcins ~mbellie, sincn
invcnt'è de toutes pièces, ~uisque non conforme à la déclcration d~
guerre auth~ntique, comme nous avons déjà eu à le préciser. Toujours
est-il, ~u'elle reflète bien la détermination romaine.
Quan~ le Sénat
déciùa l'envoi
èe l'AmbasEnd~~ les jeux étaient f~its, la délégation
romaine n'était pas charLGe ~'cbtenir un accomodemeut ou une satis-
faction,
ellè devait signifier ~ Carthagè la déclaraticn de guerre.
L~ tradition chcrcher~jusqu'nu bout à légitimer cette guerre en don-
nant tort a H~N~IBA~. SCIPION= ~?s qu'il débarqua en Afrique, re~ro­
cha aux ~éputés carthagincis d'être les respon~ables de ce conflit
qui pen~l~nt 11 nns, ensllnBlr.nta le mcnde méditerra.néen. A en croire FLO-
RUS
'1
1
t '
...
"
d
(2)
D
... "
l ' ....
.
PADOU Il'1 '
't(3)
, l S n euren
rlen a y repO!1 re;
.
e son cote,
hlS vorlen
J.... ecrl
1) cf. G. CH. PICARD, La vie quotidienne d Cal'thage au temps d'HANNIBAL~ Paris,
1958, p. 206 - 212.
2) rlrJrus: 1, 22 ; 11, 5.
3) T .L., XXX. 30, 4 - 5. Du reste lù-.NIilBAL confirmera devrmt l'histoire qu'il ava.it
pris les ~mes contre les Rom~ins) 8€lûn
le même auteur, T.L. XXX, 31, 5.
CUM
CEPVRIM ARMA.
Sur HANNIB~L cf. G. PICARD, HANNI8AL~ Paris, 1967 •
.';'
.~.."

- 46 -
" SCIPION po~r !eirb hcnt~ ~ HANNIBhL lui tint ces pro-
po S Il ,-< t
tu i p g e fat ar i ~ " ce è. e r ni 1: r n' eut Q. u 'è. b il i S !:i .: r 1 f1 t ê te. Se -
Ion POLYBE, SCIPIon l'Africain, au lendemain de Zf1m~, d~clara aux en-
vo]6s puni1u~s "qu'ils ne mériteient p~s d~ pitié, puisqu'ils recon-
nais@ai~~t avoir ouvert lee h08tilitGs contre Romo, lorsqu'ils avaient
. 1
' t ' d
S
t'
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d
. ,
(,)
Il
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aSSérv~
6
Cl e
es
sec~ ~~s nu n~pr~s
es traltes
.
es
onc
cert~in qu'en attaquant S~GONTE, HANNIBAL a pr~cipit~ le conflit, mais
s ' i l ~D a acc~ptg la perspecti7~, il est peu probable qu'il l'~it è.~­
lib~r~D~nt provoqu~,. Cette guerr~ finie, ~ome pour la seconde roi~.
rouvrit les hostilitês contre PBIIPPE V de Mac~doina en 200 sv. J.C.(2)
Quelques mçis ~près la paix accordGe à Ccrthage, Rome
reconmen~e la guerre contre PHILIPPE. Pour d~cle~ch€r ce conflit, le
SGnnt c dû ruser sussi avec l'o~inion heureuse d'avoir retrouvé la
paix. Nous avons dêj~ vu 1ER difficultes qu'éprouva ~ p~sser aux Comi-
ces, la lez d~ bello indiaend.o. Sans doute les Patres avaient manqué
aa8U~ beZli.
Ils commenc~rent par envoyer une legatic ~ PHILIPPE V.
La mission c()l!lposée de
: P. SEi1PRONIUS TUDITANUS, le négociateur de
ln ?aix de Phoinik~~ de C. CLAUDIUS NERO le vainqueur du MetaureJet
du jeu~e M. AEMILIUS LE?IDUS, passa en Grice au mo~ent m~me ou l'At-
tique~ etait l'objet d'une nttoque Macêdonienne. Elle chargea NIKANOR,
lieutenant de PHILIPPE V, th. transmettre au roi
l'ultimatum du sénat ~
savoir: Il ••• ne faire la gu~rre ~ cucun p~upl€ grec et soumettre è un jugement
J'crbitT:~c le différenù qui l'opposait à ATTALE s'il s'agissnit de la sorte, il
ser~it ~~ paix ~vec Rome, s'il n~~ccédait pas à ses r~qu~tes. les conséquences se-
o .
(3)
_ ,
ra~ent ~nverses
• Cette ambassad8 u du etr€
envoy~c bien avant le vote de la
décl~ration de guerre. Rome n'~ pCR encore les cotirs juri~ques pour justifier und
r~ouvcl~ur~ des hostilités avec le ~fuc~doine. Or ces motifs, elle ne pouvait les
trouver liue dnne le cadre du traité de Phoiniké. Le roi considér~:. l'ultimatum d'Athè-
nes C:)Ii!me une m':L"loeuvre d 'intiJTii.d~tion. Il continun SOD offensive et mitl~se
devant f.bydos sur la rive droite è.e 1 'Hellespont. L~ , un noU\\rel ultimatum lui tut
1) POL., XV, 17. 3.
2) Sur les erigines dt cette ~uerre cf. E. WILL, Histoire politique du monde Hellé-
nistiqu~ (323-30 av J.C.), 2~mc v.)1. Nancy, 1967, p. 116 - "9. N.G.L. HAt.1MGND
th9 cpcni~g ~ampaign. and tha b.lttle of th~ ~oi Stena in th~ .econd
Macedoni 4 1'l War~ J.R.S. '966, p. 39 - 54. E~in CL. NICOLET, Rome et
la C01'lQuate ••• op. Cit.,J p.
'135 -
743.
3) pOL.
, XVI, 27, 2
t
34, 3 -
4.

- 41 -
adr0s~ê, mp-is d~ns celui-ci, on ne feit nulle allu~ion ~ lQ paix
. . , ... (1)
C ' l
.
d
t
l o f "
ùe PhC:",).1'lÂè

ertell]'
y
est tluE:;st:;.on
e t:oume tre
e con.llt aV~c
Att~lc ? ~n arbitr~ge, m~is il n'est r~s question des Adscripti,
L ' li:;" d :r e ,: (0 net 0 u c II e r è au c ur; é t f\\ t
n eus p ~ r a î t b :i e n t r 0 P V!l gue. DIl n s
ln. r~:o,lcnsc q,u' il lour adresse., le roi cl.em~nd~ aux Rom!)ins "de ne IHtS
violer l~ traitt ~t de ne pas lui f~ire la guerre". Ne S~ s~ntait-il
par, ~~ns son droit?
Pourtent l~ tradition rom~ine n'eut aucun scrurule ~ l~­
gitimer cette guerre
~ ell~ fcrgeB un casus bc!Zi qui, tout ~u plus,
ne fut qu'unhardi mensonge. ~Çs nnna.list~s parlent de prétèndue~ vio-
lences exercêes ~ntre 203 - 202 par P~ILIPPE V contre certains "al-
liSs d~ Rome en Grèce(2). T~ut C0mme l'ordre" de ne toucher à aucun
état'; ces violences exerc~(Os contre "certains alliés de Rome", ce
caBUS belZi est bien impr~ciG car ces
"alli[6 ne sont pas iden
difi~s et, dans ~ucun des ultim~tuffis, il n'a été question des ad8cript~
TITE LIVE sachant ces accu5o.tic'ns peu 1~6ères, pour po~voir convaincre
ses l~cteurs, rajoute que liLes RODains étaient irrités contre PHIL 1PPB
à c~us~ üc sa manière perfiè~ d'observer la paix evec les Etoliens et
.
d'autr~5 alliés d~ Ro~e habit~nt l~ m€me
r~gion et surtout à cause de
son envoi r'cent en Afrique d~. renforts et d'argent ~ H~NNIBAL et 8U~
C
th
.
.
(:3)
C
. '
h
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t
.
'"
t
e.r
a.p;~ r.:Jl S

1.':
derm.er rcproc e nti: sera B aucun momen
~nvoque con re
PHILIPPE
par les ambassadeurs et De figure dans aucun des deux ultimatums.
1) id.Ibii. Sur la paix de Phc:.•. ike: cf. T.L. XXIX, 12,13 - 14. Auraient été
Adscriptî: foedf:'ri pur r.ome le roi ùttale, Spo.rte, Elis, Messène, Athènes et Illion.
Mais cn 2ù5 Rene ne prit ~ucu~ eLg~ge~ent qui la contr~ignit à interve~ir en cas
d'<'.r..;ression t-:tl.ct!donienne. Elle ce-nservp..it des
1
"IUIÙ.S ' . dont Attale. mais ses devC'irs
en.erseux l"(':levaient de S:1 seule ~Pl·r6ciation cf. C. L. RICOr.ET, Rcme lit l.a conquête •••
T. II~ op. citA ~ p. 736 - 737.
2)
~:'. L. XXX,I 26" 2. 5~ci:le urbeB e:r: Graec"!:a ; cf. 42# 10 : Socii popuZi
Rom":;zi.
3)
T.L. XXXI. 2. 9 -
10.
Ce rénseignement n'est donn~ que per T.L.,
C'est un motif invent' pour justifier l~ d€clar~tion de guerre. Cett~
version est dirf~rente d~ cell~ de POLYBE. VII, 9, cf. le comoentaire
de ~. WILL. op. cit.T.I p. 68 .- 70 qui montre que le treité entre
HANNIBAL et ?HILIPPE ne fais~it aucune allusion b une fventuelle aide
militaire punique a PHILIPPE) qui n'interviendr~ qu'en Illyrie.

- 48 -
Dans tous les cas, le rOl avait respecté la paix de 205.
Au moment du si~ge d'A~ydos) aucun Etat a11i~ n'~tait touch€
par les
" .
.
f ' ...
'"
.( 1 )
R
'
Macedonlens, exceptlon
al~e ft
L EtoIle
.
ome a recommence cette
guerre snns pouvoir la justifier ~er aucun grief valable
8an~ que
PHILIPPE ne lui fournit ni sujet, ni prétexte de plainte
Bans qu'~l-
le uit €té
pr~céd~e d'un conflit politique, ni d'une querelle di~lo­
matique. Rome l'a recommencée en l'imposant ~ l'adversaire par un
';u1ti1!latum ombrageux", calculf pour rendre impossible toute nécocia-
tion. Ce n'est pas non ~lu5 une guerre préventive, ses mob11es ~ont
à rechercher dans les difficult~s économiques et sociales que P.o~e
( 2 )
tra.'lerse

Injuste, sera aussi la guerre déclenché~ en 195 contre
NABI2
• On reproche au tyran l'occupation d'Argos.
Le Sénat, con-
1 .'
1 " ' ' ' ·
' .
(3)
l
1
su te abandonna
a questlon ~ 1 appreclatlon au consul
;
e peup e
n' est pas consulté mais l'L'U"1TIUNUS
avec une habileté déconcertante,
cherche. è montrer à ses e.lliés que le. guerre contre NABIS
n'est f'ai-
té que dans l'intérêt des Grecs. La prise d'Argos n'est paa un casue
belli sfrieux, cela pour plusieurs raisons. Rome en s'attaquant au
tyran a viol~ le pacte qui les liait ~ABIS n'a pas attaqué Argos, s~
lon ses propres mots" ce sont les Argiens qui l'ont appelé et qui lui
ont livr~ leur ville". Il l'avait reçue et non occupée.
1) On sait que leur alliance RVCC Rome était ceduque depuis 206 lors de la signa-
ture de ln paix séparée. En 202, ils furent éconduit~ lorsqu'ils vinrent se pl~iD­
drc uu sénat des menées dt: PHILIPPE. Si l,'Adscl'iptio des Atheniens avait ét~ au-
thentique, il aurait fourni à Ro~e un prétexte de guerre surtoùt quand on sait que
les Atheniens ne se sont p~s joints aux Rhodiens ni aux Pergamien~ dans la démarch~
que ceux-ci effectuèrent è. Rom~ à l'automne de 201" E. 1000LL) op. cit. T.Il., p.110
en conclut que l'~ppel d'Athènes fut terdif. Enfin l'Illyrie qui a été au centre
des nfgociations de Phoiniké ne fiE;Ure nulle part dans les griefs fcrmulés a
l;Gg~rd de PHILIPPE V.
2) Rome sort épuisée de la 2èID~ guerre punique, les c~~pagnes ont été dévastées
les deux légions qui formeront lle~ée de M~cédoine sont composees exclusivement
de volontaires d'Afrique. Il est aussi difficile d'ev~c~r des mobiles économiques.
Ceux-ci ont surtout suivi les p,~ol!.rès de l'imp[rialisrne qui lui ont fro.yf! l~ voie.
3) Sur les causes de ce conflit
T.L. XXXIII, 44, 8. C'est p~r un senatuB con-
sulte que le guerr~ fut déclarp.~.

UABlf::"
nu cours de l'entrevu,,: qu'il eut I!.vec TITUS ij,
Gythcuro(1), se d(clara pr~~ ~ retirer sa garnison d'~r6os et d'abaneon-
ner ln ville conformément ~u drsir des Rom~ins. Il ~tait mê~~ p~~t &
d'autres concessions si on les lui faisait connartr~ pur ~crit, ce que
TITUS refusa, mett~nt à nu s~s int~ntions belliqueuc0s. TITE LIVE cher-
ch~nt ~ cn~oufler cette 8u~rr~ derri~re d~s prétext~s h~norables, JUS-
tifie le position du proconsul par le fait que. l~ ~~jorité des alliés
grecs ';ét~it pour l~ p~rsév~rnnc€ dans c~tte guerre afin de supprimer
le tyran; car autrem~nt j~m~is disait-on. la liberté de l~ Grèce ne

"
ft ( 2 )
~
" ' . . ' c l '
. . .
ser~lt assuree
. ~n verlt~ ~~~e vou alt cette guerre a tout prlx.
D'abord~ ~llt lui fournir~it un prétexte pour maintenir ses garnisons
en Gr~CCt ~nsuita NABIS rerr~se~tnit
un d~nger pOUT ]\\ordr~ ro~nin :
danger politique car il n'nv&it pas renonc~ à ses projEts d'expansion
péloponnésienne, df~nger soci~l ~ussi car il n'av~it p~~ hésité ~ exror-
ter sa r~volutioD i
Argos. Aussi QUINCTUS, contrairement ~ l'opinion
favorable de faire commencer la guerre ü Argos, marcha j'~bord contre
1& capitale du tyran(3). Rome qui coœmence i
s'embourber dens l'engre-
nage des conquêtes, montr~ de plus en plus un mépris l~tent pour le
droit international. Les trait~s son: violés, les dcmand~s d~ répara-
tion de préjudices refuB~~s~ le peuple n'est plus consulte pour décln-
rer le buerre. Désor~ais il tn sere toujours ainsi, ch~que foia que
Rome, peur une ralson ou une nutre. dfcid~ de sortir de ses frontières.
Peu importe qUt les griefs form'~~s soient justes: l'irnport~nt est d~ dGclarer la
guerrlÔ:. Cè dernier acte. p€.ndant
cette :p~riode sur laquLll(: nous -:ll-ns nous pencher
sera de moins en moins res~ecté, surtout i partir d~ la troisième g~,rre de M~cédcin~
Pourt,ant POLYBE, si attentif à ùistiaguer les causes dt:s prété'xtcs, les volontt::s ca--
chées derrièr~ les belles fcr~ules, note que jusque vers les ~~n~ce 171-168, ln fr~-
~h·
t I l ' "
.
" ' . "
. , '
.
( 4 )
.. - . c lse e
D,
oyaute eV".11p.nt etë
les LlaXlmes ' des RODalnS
. Notre constat est tout
autr<:: -::n ce qui concerne cette pre;nière phase de l'expnnsionisma romain.
1) T.L., XXXIV, 30,6-7. Au Ncrd Est du golfe de Lnconie, c'~st le princip~l ars(D~1
de la L~conie. Ont assisté è l'entrèvu~ outre TITUS et son frère, l~ roi E~~NE, le
Rhodien SOSILAS ARISTI.'NE, prêteur d~s Achéens, qUf:lques tribuns militaires. Du côt~
lacedemonien, ~ABIS et ses gardes ~~ corps.
2) Id., Ibid.~ 33. 3.
2) Id.~ Ibid. 26, 8.
4) POL. XXXVI, 9.9. L& réflexion sur l~s cnuses des guerres chez POLYBE est l'objet
principal de 1& fondamentnl€
~tud~ de P.PEDECHt op. oit. ch. Il-VII; p. 54-354.

II - DE VI NfT:A SPJ)ID;~'L\\ A u.. GUERRE PRl:.\\TENTIV:; 172-14( .
.jJI:kl~
Ln guerre contre PERSEE
~ Rome un~ nouvelle con-
cepti0n de l~ guerre caractGris(L par les m~thod~s d[loyeles a ] I~gnrd
des
~dvcrsaires ; méthode
dor.t la première victime fut PERSEE et qu'on
qunlifi~ ~ Rome m~me avec m6rris, de nova sapientia(l).
A en croire POLYPE,
Rome reprochai~ i
PERSEE l'expulsioc
d'ABHOJPOLIS
(chef d'une ~cuplnd~ thrac~) du domeine o~ il exerç~it s~
souver~i~net~ de s'itre e~parC d~s mines du Pangte apr~s la mort de
PHILIP?E V.
Or. lui reprochQit aussi
l'invasion d~'la Dolopie, et l~
consi;ir~tion for~ée à Delvh~s contre l~ roi EUMENE et enfin l~ m~urtrc
des
a~b~ssadeurs de Béotie(2). Ce sont à peu près ces griefs qui figu-
rent d~ns la dEclaration d~ guerre notifi~e au roi en 172(3). Les re-
proch~z contenus dans cette rogatio témoignent bien, enccre une fois,
de l~ m~uvaise fci romain~.
1) Sur la. nova sapientia cf.
J.BRISCOE, Q.
MARCIUS PHILIPPUS ~nd noua
Sapientie J.R.S.,
1964, p.
66-77.
Sur PERSEE
:
son avènement
T.L.
XI.,
5(., 11,57, 1; 58,8. Sur 1er renouvellement du tr~it~ avec Rûrr.e
POL., XXV,
3 ; T.L., XL. 58,9. XLI, 24,6
• XL,
9.3
; Diod., XXIX,30.
Sa perzonnalit~ : FOL., XXV, 3.5,-7. Notons toutefois que le p~rsonna­
ge ~e FERSEE reste difficile è cerner à travers une tr~dition histcrio-"
grephiquG uniformément hostile.
2) POL.,
XXII.
18.
3) D~ms le texte de la: rogat'W
(T.L.,
XLII,
3D,
10-11)
ont peut lire
" At t "- n d u que P E ? S.E' E,
fil s
de PHI LI PP E roi
des
1~ .'. C :>.:. c.' nie l''.~,
con t r9. i -
rement aux termes du trnit0 conclu avec son p~re PHILI?PE et renouvelé
avec lui-mê~e après la: mort de c~lui-ci, a porté les arméS contre lèS
alliés du peuple romain, d6vastf leurs territoires)
occup~ leurs vil-
les
;
~tt0ndu qu'il a pris l~ d~cision de pr~p~rer lB guerr~ contre le
peuple romain et accumulé ù cet effet des
armes,
des
troupes, des ba-
teaux,-s'il ne donne pAS satisfaction snr les points précédents qu'on
lui
f~sse ln guerre".

-
51 -
Quels sont "les alli~s du peuple ~o.,ain" l3.ttJtqu Ls :par PE..... SrE •.\\ucun.
en dehcrs de le Thrace d'tfi0UPOLlf.
qui
ne fifurc pns dans l~
ro~ntio.
C€lui-ci
s' t:toit att!'qu€
en 179 a la '1a.cGdoine. PE'.... ftE.
en état de létiti".le
défense.
l'avait p0urctass[ et renversf. P~~e ~ ~ttendu sept an~ p~ur
d~terrer cette vieille 'lffaire. Le dellxi~.,e prier non plus ne rfsiste
pas t. une ~nE'.lyse s~ricuse: ?E-:>PBF s'est cert€"s
dcnnt: une ~uissance
militaire apprécialJle -aie il e. respecté le traitG de 197. Celui-ci ne lui
inroseit pa.s une linite dons les effectifs ,,:ilitaires.
ne l'..li
interdisait
l'as non ~lus ni de p'uerrcyer dl'l.ns le l'T~rd c')ntre les Thraces et Dard9.niens.
ni d'€'pcuser
une !,!'incesse s[lettci1c.
ni de conclure q,llience avec les
reotiens.
enco~e M~ins de rft~blir ~ l'~rdre d~ns ses rr~~res ~tats(l).
QU'int
a. l'attentat cOM,:",is contre EU~'Fl'Lr: II. il eut lieu une année avant
le déclenche~ent du c')nflit. Ro~e ~ur'lit ~u y tr')uver un prétexte de ~ue!'re
meis dit TITE LIVF"lA
Luerre è€
r.t>.cl1,if'e fut renvC'y~e L l''lnn~e suiv"l.nte(2
Cette phrase indique 't,ien Cl,ue le principe de ln guerre ~t~it alors ".lcquis
Ce rerort
s' expli~ue S!lns doute eSf:entielle""ent l''.lr le délai nécesf:9.ire
aux pr€psratifs
nilit~dres. '~ais en attenda.nt la forMalit& de la. d[claratic
il fallait lercer le r~i ~ac~donien d'illusicns. De cette tâche ~eu honor~
s'acquitta parfaitement '1.PF:ILIPFVf dans les conveTl"l'l.tions qu'il
eut
sur le
Pénée avec
PE~SEF en 172(3).
PElSEE n'a.
à e.ucun mO'!lent. ,,?r~'dd.t€ ou prfl'~r[ une f':uerre de revanche.
r~ieux. il fit tout p~ur (viter l'accrochei':'lent. OuC\\.nd il connut les intenti
'belliqueuses de no':"'e.
il vf')ulut M'f .... e !":ettre l'opinion !,u'tli~ue de son côte (4
1) E.HILL •• op.cit."
T.TI. :9.217.226.227.
2)
Eur l'attentat. cf.T.L .• XLII.15-16. Cet '\\ttent~1t reflète bien ln haine
'lue lui !,ortD.ient les ?atri~tes ~recs.
3) Feirnf'nt de ~ersu~der 'PFPfFF d'envoyer une dfrutstion a ~')~e. afin d'exl'l
quer
Ees intentions p,,"cific:ues.
C" .!!.
FFII,IPPUf cherchllit en ré",.lité ;;
obtenir des Acheens une ~'Irnifmn de "'ille h('l.... nes pour Chalcis; il pr~fits.
de sa rrésence ausni pour diss~cier la li-:ue tb€rtli~e(POL.• XXVII.4;T.L .• XLIJ
47 et Diod •• xxx.
7)
4} rOL .• XX':II. 1; T.L .• :'<LII.43.

- 52 -
C~ nouv~au changeu.ent dans la conduitE ~ observer à
l'eg&rd des ndversaires, eugure une nouvelle conception dè l~ gucrr~.
Celle"ci ne correpond en rJ.<2n eu droit internntion~l. Il s'~git d'une
nouv~118 notion: celle de 13 guerrE pr~ventive. Rome est une cit6 "qui
ne peut tol~rer d'avoir pour voisin un roi puissent et une n~tion mili-
,
f
t
,,(1)
L
d"
t
,"
co"
d
teJ.rc~ent
cr e

es prLt~xtes
ln erventJ.on. au v~nat co~me
~ns
les co~ic~s, seront désor~~i~ justifiés par la craint~ d'un ennemi
Ii me tus
hostilis" ou de voisins puissants En voü
de dev~nir des rivr:.ux.
La troisièl:i.e r;uerre punique en 146, sera décidée "pour
assurer le dominatior de la Patrie", pour 6carter une menace qui pesait
sur el1L: et pour abattre :tune cité,; qui lui avait si souvent disput0 la
. . '
' . . . , '
,
"
...
11(2)
supremat~e ~t qUl,
8
l
occaSlon pourralt la lUl dJ.sputer a nouveau

Cette dégé~ére~de la " mora li té 'i romaine trouvt: ses
fonjcments dans le fait que Rome avnit déjà conquis l'hégémonie mili-
taire en MfditerrQnn~è. Elle cherche par tous les mcyens à ln naint~­
nlr par unè politique féroce de destruction et de conquête. Toutes les
couches social~s sont favorables au maintien du statu quo. La lente
décomposition de la société romaine la crainte d'une d~cadence mili-
tair~J ont aussi pour une large part déterminé cette nouvelle politique
d'int~rvention, dont les pre::i~rs symptômes apparurent durant la guerre
de 1};ESEE.
1) 'L'.L.) XLII,
52,
16.
2) POL., XXVI,9.
Au Sénat ~e renouvel~ plua vive que jamais la discus-
sion entre partisans de CATON qui voulaient détruire la ville ennemie
et partisans de SCIPION N.\\SICl\\, qui se serai.rcontentês de la dlisarmer
T.L., XLVIII, XLIX.
Le peuplc~ qui fit l'élection illégale de SCIPION,
é,ait manifestement favorable ~ la solution extrême. Ces mêmes motifs
seront ouverte~ent donnés par CICERON pour excuser la destruction co~­
pIète de Carthage: dè leg.
agr.
II,
87. Sur cette troisième guerre pu-
nique cf.
Ci-dessus ch.IV» 3ème partie; P.G. WALSH
~ MASSINISSA. J.R.S.
1965, p.
149-160. et H.G.P. FLAUM la romanisation de l'ancien territoirp
de la Capthage punique d la lumi~re des dlcouvertes .pigraphique8~
Antiq., Afric.,
1970, p.
75 -
117.

- 53 -
Le peuple d.ch:::.rgÉ depuis
1(;7 du tl"ibutum, devint plus
soucieux dvs aventcges tir~s ~~s conqu6tes que du re6p~ct des principec
légitiLl0.Ut U:l~ {.,ellum iustur'.
7:::::11S
lioligarctit: st:llatorir.le, certnins
group~: finnnciers avaient G~jà perçu les profits que pouvai~nt leur
procur~r les interventions &rm~es extrR-itnliques. Les bellicistes non
plUE ne ;~~nquaient pRS
; 1& plupert des homines novi na r~vaient que d~
gloire r-.ilitElire
ce qui l"t'1it n:)rrr:al dans une citf où toute l'organi··
satio~ repGsait sur des hi;rnrchies q~ sont cel]~s du pouvoir reilitair.',
et n~ la ccnsGcration supr~ne fut toujours celle du com~andenent victo'-
rieux
donc du trio~rhe. Il y eut d~s lors une v0ritnble
.; exploitation
de la gU0rre " pur des arobitiuux,
ce qui entraîn~ de nombreuses viola-
tiens ~cs principes de gu~rre juste. Ainsi en 113, l~ consul M. POPILIU~
L/Œi:/,"'~~
fit de sa propre initiative, la guerre eux Sto..tiellates, peu-
plaGes ligures qui n'avaient jn~ais pris les arrn~s contre Rome. Après
une sanglente d~faite, les Statiellates se rendent i
merci; le consul
les fait tous vendre com4.€
esclaves,.
Cet homme, selon le réglernent
international devait être livr~ enchaîné aux victimes, car il av~it vi~
l~ lu droit des gens cn s;~ttaquant sans d6clar~tion de guerre ~ ce
peuple(1). En
171, le consul C.
CASSIUS LONGINUS, furieux de ne pas
avoir obtenu la Mac~doine comme province ainsi que la conduite de ln
guerr~ cCDtre PERSEE
(m~is seulement la surveillanc~ d~ la fronti~re
J
Nord Est de l'Italie,) se jette sur l'Illyrie. C'etait compromettre
l'ar~è~ eD€6eee
contre le rci de }1ac~doine, à qui il recrutait ainsi
des
[.lli<i~;. C'était aussi cOi:f'prcnettre le succès de sa propre: mission qu'il n'e.rriv.::.
pes <,:.~,.;:;lir. Une députation :l€s
h:.'.titents d'Aquilée mit le sénat au courant des
faits. Le consul, redoutant l'~n'ct qu1avait provoqué son action, ira rejoindre è la
fin de son consulat l'armée de MactJoine comme simple tribun l~gionaire.
1} ~!ais le Sfnat en décida que POPILIUS rachète les esclaves~ les rnm~ne dnns'leur
pays et leur rende ce qu'on leur nvait pris. Rentrf à Rome, le consul convoqua le
Sfnet et l'accable de reproc~es. Non content de tout cele., il infligeR une a.m~nde au
prêteur; sur la proposition de qui, ~'~anait la d~cision s2nRtoriale et récl~~ non
seul0~e~t l'ennulation du Stna~~c consulte ~ais aussi des supplications en l'honneur
de son ç'Y.ploi t. Hais, n'obtenant rierl, il retourne. dans se. province cl' où il envoY!l
une c1<:j.êcLc cnnonçant qu'il ev'üt livré bataille à ce qui restdt dt:; StatieZZates et
qu'il en a.vait massacrf dix millL (Cf. LL., XLU, 7-21. Cet hf)~e ne sera j~ais
inqui~të : treize ans après, il est élu ù la censure.

-
54 -
Mais
i l eut tort de pr~ndre peur.
Car quand les dGputés
des peuples
perfidement attaqués,
vinrent demander
justice,
on leur répondit
qu'il
fallait
ettendre l~ retour de CASSIUS,
et l'affaire en resta
là(1).
En
143,
le ccnsul APPIUS CLAUDIUS, ~écontent d'avoir
co~m0 province l'Italie et non l'Espagne, où il y avait de la gloire
à acquérir et du butin à ramasser, se rabattit, à déf~ut de mieux,
S l
'
(2)
sur la peuplade
alpestre des
a asses,
s~ns pretexte
.
A partir de la troisi~me guerre de Mac€doine,
Rome affi-
chE:: un certa.in m€pris
pour les
lois
et
réglements
régissa.nt les guer-
res.
Elle voile son appétit expansionniste par des vocables et pr&-
textes bien peu convaincants et difficilement acc~ptables. Le derni0r
si~cl~ de notre p€riode
allait correspondre aussi à un nouveau ch~n­
ger.ent dans
l'int~rvention romaine. Elle se caractérise surtout par
une politique d'initiative personnelle des G~néraux.
III
-
L'IMPERIALISME AGRESSIF AU
1° SIECLE
La politique d'initiative personnelle dont les premiers
symptômes apparurent à le fin du second si~cle, a été l'une des cau-
ses ~ssentielles d~ l'intervention romaine au 1er si~cle. Au désir
de
gloire s'ajoute celui
de
l'enrichissement.
En effet la vieille
sncift6 rocnine
a subi l~s contre-coups des conquêtes; le changement
de mC0urs
fit
croître les ocsoins
et
frais
de la nouvelle génération
rcnaine.
La richesse p0rmettait de
jouer un rôle politique et d'avoir
unE:: influenc~ considérable dans l'Urbs(3).
1) T.L.,
XLIII,
1 -
6.
2) DE:: retour à Rome i l rfclama au S~nat le triomphe, et comme cet
honneur lui
(tait refus(,
i l ~ut l'audace de l'assumer à ses frais
OrosL:,
V,
4 , 7 .
3) Sur l'hom~e politique rOIDuin au 1er si~cle cf. J.HELLEGOUARC'H,
Le Vobulaire
Latin Des Relations et des parti&-paZitiq~eB sous Za
R~pubZique, Belles lettres, Paris, 1963, p. 363 - 424.

- 55 -
La gu~rre seule pernettRit d'rbt~nir d~r, ~~1n& extra?rd5u~ires
et une
n"tnrif;tf pu't'lique de zrAr.de enver/7urc. Le directi"ln
.
.
.
l f'r
....
dE~ nrme(s allDlt offrlr ~u
.
Elecl ••
uc M~ypr cO~Mode a~x
Ii~bitieux de rf'lliser leur def;f;ein. p'l.r une p01it5.quE: indé!,er.dar>tC'
d'l
fenat.
En 03.
f-YLLf.•
A.près e.VOlr conclu 1", p~ix rIe ·DJl.~nr\\N()S avec j'~ITHRIDATi VI
EUPJT~O~ rci dll paN':'. s'e"'b'ircz.u'l I;:cur l~. '}r(;ce. IJ. l'liss", cr. ASIr:
1.LICINI1JS !~üRE~...~, et L. LUCLTI.LiJf: ils (t".Îent chf:l.rpés de purp':t.r
l'~rchipE:l dé ~e~ pirateE. de rGte.blir l 'nrdrc d'avant-puerre en
~ALATIE et d~Ds les roy~u~cs alli~~ de EITPYfIE et de CAPPA~OCE.
'!ais HUREN/~ obnubilé pR.r le désir de s'ecrichi .. et dE" f;' illustrer.
outrepa.ssa les instructions '''1''''destes de
f;YLI,;".
Il
rec"Qeuillit aurrèf:
de lui les doléancEs d ',".1CHFIJ'ns et,
pr€textel~t que le roi du PONT
vculait se ver.~er sur
zon anciec lieutecant.
r0uvrit.
de S~ rr0pre
initiativE.
lc's }-;C'stilites contr,? lui.
~ le fin de 83, il pill'l le
ter.1:ple de CON.4NA~ de l'IRIS; au printe""ps €2.
i.l
franchit
l'HALYS
et ravagea près de quatrE" cents v:ller:es p0ctiqur.:s(1).
Au courf de la III o guerre "lcnee contre tiITH~ID~.':r'F..
LUr;7JLL~S envoyé
en Asie contre l~ rci du ~ONT, e~v~hit l'AR~FNIE et ~tendit sur ce
rCY8u~e la p01itic~e ~eressive ro~a5ne(2).
.
-
...
1) Arr •• :'lit771· ... r( ..64-66 .• ~LUT •• fYLLA. XXIV.4. '\\. Iii l~re incursil)n
HITH~IDATE se cnntertPl, de se !,lE'_indre è Ponet !"ais il le. sec-:>nde,
i: repous~a les ~ss8illar.ts Et ~vipça les Ro~ainf de CPPP~DOCE.SYLLA
qui
en ce !!lo~ent est le mllîtrc i~ '1()Me n'ecccrda Ü. t~U~FNr..
ni
les rl')yens,
ni
l'aut~ris8ti~n de continuer l~ lutte. Il chargea\\. CABINIUS
d'apaiser MITllnln~TE. et d'inti"ler'~ son ~rresseur l'ordre de rentrer.
Fourt.nt
i
son retour,
MUnfNP
reçut l 'ir0niqu€
hcn~eur d'un trio~rh~
imm ér i té ( IX. 64 -66) .
2)
Sur les ori~ines de cette r;uer1\\E'. cf.J.r~~RCOPIN(I.hint.Rom
... T.II ...
p. 5~4-547. ~ RO!1e. J.! .fdT?r~,I:JS rrrr:r;'f· et T, .LTTCULLUf'. rGclaonèrcnt tous
deux l ' honr.eur de diriger' cette !luerre.
"u l'renier
échut
finnler.'.ent
la province de BITHynIE: PLUT .•
LUC .• VI ••
(lU
sec::>nd • 11'1
.. ~a'province •
...
(o.
e
"6.'l't.
.':::-':'.
j e
Cilicie ~vec ~utorit~ sur le ~ruvcr~eur d'Asie. Le Sfn~t déte~in8
~ucr-i l~ s~hèrp ~'action de chac~c de~ deux généraux. h COTTA incomber
rait ln défecse de
la nouvelle province,
à LUCULLUS.
la poursuite
de MITHRIDATE: r.ICERON.P~o Mu~ena..
XV,33

- 56 -
Il
justifia
Sêln actiçn par le refus de TIG~:\\NF de lui livrEr
le roi qui avait cherchf refu~e au~rès d~ lui, P.~is en réalité
il n'ignorait ras cor:bien cptte contréE: [ta.it riche.
et que sa
c~nquêtc allait lui rr~curer des gains c0n~idér~bles(1),
En 66. la
lex 'JANILII:
allait (')ffrir
~. POHPEr les '!loyens d€
poursuivre
cette nouvelle politi~ue ?erscnr-ellf' et ir.dér€n1~nte q,ui ne te jus-
tifiait
Q.ue par la
~.:ule lri du rlua f'nt, Aussi En 64. ~uand FO}~PEE
d€cida
d'envahir ln Pyrie.
il divisa
s~n ~r~~e en deux corps l'un
sous Ees ordres. l'autre,
s~us le C0~"Bnde~ent de L, AF?~NIUE passerait
par la. Hfs('rcta~ie p"ur le rej')indre en Syrie, Cette vicIation du
territoire des PARTHES ltait UDe rrovrcati"n pr€~éditfe d':>nt POMPEE
n'ign0rait pas la gravité(2),
Cé:sar.
en intervenant en 58 en Gaule put recourE: ii la :1~e ~('\\litique,
Se ~rernière carnpafne dar-s cette provir.ce avait débuté par le guerre
centre les Helvètes. ~uelle en fut le causp? L'~uteur des "c0omentaircs"
nous dit au détut de sen récit ~Ué l'HelvètE: ORGETORIX, le Séquane
CASTICUS et l'Héduen DTJHrrO~IX avaient échaflludf un l'Inn visa.nt ii
s'e!:!parer
de la Gaule enti~re. ~1ais a.uparavant l ' lIelv~te avait
c~nvaincu son peuple de la nécessite de chan~er de territoire.
La
situation géo~raphique de leur pays,
explique César,
"restreignait
1) La jeune capitale Tigrenncerte fut livrée eu !lillage, Chacun des
légionnaires en retira 3.200 ~este~cee: PLUT,.Luc., XXIV.~XVIII:
APP •• 1ith~.,84-85. QUB~d LUCULLUf En trj~~phateur ~al airnê. rentra
è. Rene.
ses caJ!lpaenes l'avaient
tellenent enrichit qu'il eut tr'lute
la latitude de djner chez lui""T.1~ne: PLUT"
LUC',/, XXXV-XXXVI,
2) POUPEE chercha ainsi ~ intinider):par cette dé-,.onstration t:lilitaire ~
le roi PARTHE PRRAATE III qui av~it daigné n'envoyer ~u'~ne lett~e
... ~ . . . .
,
a ~!"JISO!. ou le proconsul ~vait reuni
12 Cr'luronnes peur fixer le
nouveau
statut de 1 '.II,sie.

- 57 -
le cha':lp de leur coursF.S vagabondEs et les ;.r~r~~t peur rcrter
la guerre ctez leurs vrisinG:
sit~qticn ~ort irrit~nte iQ~r dez
bOT!l!'leE q,uj
av&ient la. passion Je le. r.'uerre(l). On re~:erçucra.
dans ce recit
c~mbi~n ("ésar s'e.ppesantit sur les disp')sitir::ns
d'esprit ho~tilel5 Q.u'il prête aux Felvètes. Ceux-ci lï.vaicnt voula
él:\\i~rer. ur.iQ.ue-:>ent p9.rce çu'ils €t~icr.t d'ur..e nat'..lre parté€'
(, la guc.-rre. '·'Air. le récit Clae n""'us f'\\it filON CASSPJ~~ dE' la puerre
contre les Helvètes n:"lUS rara.it r-luf\\ conVni;1Cc.nt";Les Helvètes é-tl'.ier.t
très nonl·reux
et n' ~v'3.ient pns 9.ssez d~ terres pC'lr nourir tant de
:"l::;nde:
cerendant ils reroulH'.èrel't l'idÉ-e d'envf')yer une ~~rtie de
la population f~nder
Rilleure: une c~ln~ie. de crainte que, une
fois divisés.
ils ne fussent mieux
eX1l0sés i: des reI=:résailles
de le. r;art des peul;les qu'ils avaientna.gu:'_'e
~utragés; au lieu
de cela.
ils d€:cidèrent
d'é1'!:igrer tous b la f"is.
avec l'intcnticn
de s'ftatlir dans un pays plus grand.
Ils brûlèrent
alors leurs
villages et leurs cités, I\\fir. que nul d'entre eux
ne r~grett~t
d'avoir
E:mir.ré(2)". !~ais César ~lla è leur rencantre, peur leur
barrer le passa~E. Ils lui envoy~rcr.t alors des députés r-our lui
demander l'autorisaticn de pasner ~er la ~rovinc€: ils
n'y causeraient
Aucun domnage. ~1ais l'If1lpel'atol' ne p')uve.it céder si facil('T1cnt
car il
se souvenait t:ue "les Helvètes avaiert tué le consul L .CASSIUS.
battu et f«j,it p"J.sser
SOUE: le jour son arI:lée" (3). Aussi de..,and"l.-t-il
aux députés de revenir une ~uinzaine de jeurs ~iu~ tard. A la date
indi~u'e. ils se virent or~os~r un ref~s c~tfrari~ae. ~, rroconsul
décla.ra <::.uc "let:: traè.iticns de la. l'r,litic:ue rOT"ll\\ine e:t les ."récéder.ts
~e lui permettaient pas d'accorder ~ ~ui ~ue ce fût le pass~~e fi
travers le province ••• ~Lcs Hrlv~t€s se rfs"lurent al~rs ~ enprunter
la route Q.ui traversait le territoire des Séquanes. Grâce ù l'action
de l'Beduen DUHNOTlIX qui
entreprit lefi pcu.rparlers f"t d€':,srcbes
n{;cessaires. César • ..,is au courant de ce :prejet.
esti-.a ~ue si celui-ci
aboutisseit.
ce serait n un grand dan;cr pour la province que d'avoir,
sur la frontière d'un pays sans drfense
~aturelle et trè~ riche
en blé. un ~euple belli~ueux, hnstile aux ROMains(4).
1) CESAR.
BG • 1 • 2 • 4 •
2) DION CASSIUS.XXXVIII.3J.
2.
3) CESf.F.. BG. 1.6.
4)
Id....
Ibid.~ I~ 10.

-
5d -
Il r~unit cinq l~gicns et se diri~e~ vers le rays des H6duecs
pour Brrcter l'avancp. ~es Eclv?tes, ces derniers ay~nt d&ju
tre.versé le territ~ir€ dC's f"·c:u~nes. C€:ttE'
attitude: constente
d'hostilité enve.rs le :peurle helvète,
sans que par ailleurs elle
soit sous-tendue. par des c"nsider'3.ticns juridiques, dév~ill: le vt-ri-
table ~otif de la guerre contre les PelvètEs: l'unir le~ descenlar,ts
des vainqueurs àe CR55iUS i'("ur une fautE, ")'.1 plut.ôt, peur un act!::
qu'ils r'~vaient pas co~~is.
Les lJIotifs pe.rs,')nrE.ls ':!E: Cfsar n~ peuvent feire de d':l'"lte e.USSl
en ce qui C0ncerr.·:, cette l':UErrr-. PLUT/.HQi.!F l'ex;lic:.uE par SP.. sl;ir
d'ancition. Il Gcrit ~ue "rlêrnc pendant t,.,ut le rer;te des CB!l'lpal"ne.l3
de Gaule,
il diEsinulait c POMPEE son jeu, Gui €t~it de soumettre
les ennenis avec les armes de s~s c~ncit~yens, ~rur e~gner ensuite
ses concitoyens eux-mê~es et les assujettir avec l'~rgent pris
aux cnnenis .•• (l). Ce s~nt les ~~~p.s intenticns ~ue DION CARSrUS
attribue au prcconsul. T~ut 'tait abS01u~ent tre.r.~uille en Gaule.
lorsque Césl!.r y vint en 58."
l'ét~t de paix cependent, ne persista pns
en effet il provnqu~ d~lirére~~ent une guerre, à laquelle une ~utr€
vint s'ajouter par la suite,
de serte Que son plus cher désir était
co~blé: faire l~ guerre et recporter des victoires' tcut le long
(de
sa megistrature)(2). Pour R.FCHIMITTLEIN
l'intervention de
César en Gaule d'abord cODtr~ les Eelvètes, puis contre les Suèves,
pese un prcblène de ~orale interneti0nale quia de t~ut ter.ps.
"'t'" ...
t

...
.
.-
a e e aIlre~en
'1.scute. La rlupttrt de~ c')nt€flpcrrnns
de Ct:sl),r
s'acc~rdent avec les e.uteurs les plus "lodernes pour préter au génerRl
r~I!lain des motifs d'ordre :personnE'l qui SUffir!li~uj::)Urd'hui b lui
faire attri~uer 1/\\ qu~lité d'e~resseur et de criMinel de ~uerre(3).
1) PLUT., CESAR. XX,2
2) DION CASSIUS} XXY.VIII,31,12.
3) R.SCHIMITTLEIN,
La premi~re campagne de César contre les 1~rmain8.
)B.Av. J.C., travaux et J'1é~~jrcs des instituts français en
A Il cm a Po: n € ( 6 ) • P .n . F ••
Par i s , 1 9 5 5. p. 5 .

- 59 -
Cesar a voulu la guerre,
i l l ' a entreprise et l ' a ~Rgnée,
si "injuste" fut-elle.
L'interv~ntion ro~aine au cours dF nntre p~riodc n'a pas t~ujnurs
été conforne au drcdt des f.:er..s(.7'lle gentilm). '.talgrG l'epparente
lègitlimité
"~la traditinn annaliste a v~il~ les entreprises
guerrièrf-s,
ces dernières,
le !,lus sr:Juvent,
t:.nt été dictées par
la seule l~i du plus fort. Or il e~t évid~nt ~ue cette raison ne
l'cuvait c,.,nvaincre ~erSr.lT1ne. Le senti'"1p.nt d'une rcsprnss.bilité
• •
certaine vis t: vis de 1 'apunOn, l~ur c0"",,,e.ndait de recr.crcber
un "casuE belli
d~rieu:.'< et accr-rtable:' ?"ur re;;>r"enère l'exrressi'Jn
de DION CASSIUf. Cc~~e le n,.,te Y.C~PLAE. chez l€~ anciens ce caaus
beUi" ne pr,uvait être que léf,iti!1e défense:
On invoc;.uait
alors la d6fcnse ou lien les intérêts des aïeux, ~u ~ien les intér€ts
de la collectivité, ou èien l~s interêt5 des allies, ce ~ui offrait
un large chacp de possibilités à ~ui vnulait vciler une agression
sous des motifs hon~ra1:les(l)·'.
. -.'.
. ..
~

- 60 -
('O~!CLlfSION Di:' LI. prF'~IERF FMiTI'
L'~ntr0ducticn de l~ déclaratirn 1e r.~€rre dRte de l'érnque rçy~le.
Cette coutume e""pruntée aux EQ.t'ICOLES. aurait ét~ instituée pf\\.r
. /
'.
.. ,
TulL.A...s HO STILLllIS (-1 ). Très t~t. b t::c!'JE'·. ln guerre a F~rrlu son
caractère s?c~t~nl pour év~luer vers u~ ~cti0n réfléchie. prépar~e
et contr~lée. C'est ce ~ui cxpli~ue l~ r51c d~ l'cpinicn et des
QUIRITES da~s l'a~~_r~ciati~n tnut co~-e dans la con1uite de la
1:
p;Utrrc.
Celle-ci est avant t--:ut une a~fairc civile. Q.ui. d l ' criginE-.
ne ccccernait - ~U€ les riche~ leaucour plus sO'lcieux de lp. défense
de la patrie. Mais si le corrs civi~ue m~ntra quel~ues r~tiC€nCCE
avant d'en~arer la rre~i~re guerre ruci~ue ou la secondE guerre d0
M~cédoine. il accepta vol?ntiers. d~s 167. ~e cautionner toutec
les interventions extfricurC's. Tc-utes les c0uches s()ciale~ ~
des derrés diver~a·'E'.iBnt des intfr~ts dar.s If'. rnursuite:: des gucrrcr..
Nêannoins. le ~aintie~ de la ~r~c(~ure dE d(claration de ~uerre
té:"'.ci~ne de son iY:l:'C'rtance tcut le lent! de notr", rériode. A l'orisic.e:
certes.
elle ~er~ettait d'une part de liciter les arbitraires Çn
matière de d6clBration de guerre.
d'~utre pRrt. elle ex~rimait une
certainE conscience pel :ti/i.ue ~'..d. J'esait Ù l~ fois lez ave.ntnr0s
et lee. risl;.ues des expéditions arT1~es. ~fin çu 'elles scient enear.ées
avec rrudence et conduites d'u~e nanière rnti0r.nelle. A~ssi. une
tra~iti~n r~~aine persistante insista-t-elle sur le caractère
juridi~ue de l'acticn nilitaire de ?o~€: justificaticns des guerres
par TI~E LIVr co~ne ,ar CICEPOC ~u ~rSAR. Mais la n~tion ~e beZlum
iU8tum telle qu'elle fut codifi~e dans le dreit fecial en viGueur
jus~u'~~ 191. est assez aMtiguë. Lrr~ de la dfter~ineticn du caractère
juste de la ~llerr€. l'accent est "!lis sur l'~ procédure et n0n fur le
fond. L'env0i d'une ~issicn a deux rerriscs en ?aJs enneMi, rr~dui6ait
aussi l'i~~res6irn ~ue t~utcs les Mesures légales ~vaient ét€
prises
peur éviter un conflit. Enfin. le pater patratu~ en rertar.t la
dêclarati~n de guerre lui dcneait le ~~r~ctère d'une cause sncr~e.
De tels procédés. avaient un i~;ect cert~ir. sur l'~pinirn. et pc~vaient
affermir
sa convicti~n sur le carnctère juste ct la nécessité
des gUE:rres conduites pe.r R:)l7'e. La notir:-n de :lguerre juste;! aVl'I.it
pl t "'t
. . . .
" . .
t
U ')
un caractere rltuel et f0:!"r.:!cl. TT~ guerre declar<:.é en ::>bserv<l.n
ces disrositicns étB~t consi~€rée c~~~e une brZZum jU8tum et pium.
1) C Tt ••
De Re"
.
è" .~
I I .17: Con8tit;..titéJl~e iue quod ;'EH"
se iue1:issime
-.,--
inventum-
~~~"':t~1;·4'tu·mlÏllqu"e
.
i.~
e8.et~
i~ iniu~tuM
,_
_.~ ""-4 .. '
...... -- ~
~:,,~m.._o_

- 61 -
Mais d~ns le f~nd. l'on s~it ~ue cette nQti~n est i~stpsrable
èe "aauPtl iurta". ~tB,nt enter.~u ('ue lep. caus"..:; justcr- &taicnt:
la ru~turE de tr~it~. B?r~ssi~n 1e ~0~~ ~u d'u~ nlJiE, vi01~ti~n
de
l'Asyli,,' ou (")ffensû 8 nu: envcy6s<fecinux ou ,~"'bE'.sstlàcu:,:,s).
~ CE niveau, r~r€s furent les inter~entirns rnotivfes par une j~st~
.ii..
r
CflUS€.
R~'e 0. surtGut ~'E:né des guerres d'B,-,:ressi::-n <lu..·• seul,



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pr ét ex t f:
lnSl.rnl. 'A.r.v
suffi S~ i t
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ju st e •
Lp.. dis=,~r"ticn
rr0t:res51V€
èu 'Z·u:'
j"èf;iaZ: s' ('xpli<:"uc dar.s une 19.rec
!:I€sure
par lA. crise reli,or,ieusc c:.ue
trs.verse FlC'lt".c au lenf-c"'ain
de
la
seconde· :runiql~€. rette rlftériorsticn ;tu cli:'lA.t r<.li[!ieux
fut agGrnvCc' :par l'55 :prl'),~r(;s du re.t:i~n"l.lis"'€ surt'Jut dnns lc;s ;nilicux
intdlectuds(l) •
f
:partir d~ 172. Ronc fit de se force 'ln usngE' 'll~th("dic;.uc.
sans chercher
(. s'enc')ï'ltrer è-es
Inis
et r6~ler:E:nts iI'lternatioriG.ux
dans
ses rA.p~crts a~ec les ~utreE natiens.
Tcutefcis.
on cherch~,
toujours a R~me,
t
j~nner un sçubasse~ent juri~iquc aux ~uerres
entreprieesJ!"!êl~~e si celles-ci étaient dictees pp..r la lei d'.1 :plus
fort.
1)
Su rIa. cri s e do e l a. r ~ li:! i c n r 001 c. i n €
a u l e nd e":1 Po i n d e
la
sec °nd e
gU~rre punio_ue YVEf LfW'f.".'·.·T,. r.~ ~EJ J
. l
' . .
,
.GIf1N R0'UINF..
O.f.J.
nO J890,
P •U •F ••
Pa ris.
1 981.
p.
C3 - ï T •
~~,,~.~~~ ...-'
" . ··7~
~.

D EUX 1 ~ M E
PAR T 1 E
DE L'OUVERTURE DES HOSTILITES JUSQU'A L'ISSUE
DE LA GUERRE.
1.
LA PRISE DES VILLES
II.
LES PROFITS DE GUERRE.
III.
LE RECOURS AUX OTAGES
A
IV.
ROLE ET STATUT DES AMBASSADEURS •
•:., '~':1.
.•
. ,-
. ~~.
..
"
[;;:~'~~~".-

- 62 -
CHkPIT~E PREMIER
L~ prIS[ DES VILLES
La prise d'une ville pouvait être obtenue de deux façons:
soit après un siège
plus ou moins long, soit après une capitulatio~.
Mais un siège présentait un risque beaucoup plus grand pour une cit~,
qu'un combat dans lequel elle n'engagerait qu'une partie de ses forces.
Sn chute entraînait de lourdes conséquences tant pour sa population.
que pour ses édifices ou ses richesses et même pour son avenir en tant
que cellule humaine.
Que stipulait le droit des anC1ens dans de p~reils
cas? Voilà ce qu'en dit POLYBE"
. . .
Enlever à l'ennemi et détruire
des pInces, des ports, des villes, des hommes, des vaisseuux, des ré-
coltes et toute chose semblable pour affaiblir l'adversaire et rerfor-
cer sa propre situation et son action,
c'est ce que les lois de la ~U~
.
.
,,(1)

...
...
l
...
re
. . . nous contralgnent de falre
.
e sont a peu pres
es memes
propos que XENOPHON attribue à CYRUS l'ancien" nous voici maîtres
d 1 un terroir vaste et fertile,
avec des gens qui, en le cultivant, no~s
nourriront.
Nous possédons aussi des maisons, et les meubles n'y man-

qucnt pas.
Que nul de vous ne croie qu'en possédant ces biens i l ~~~~-
de le bien d'autrui.
Ce.r c'es~ une règle éter'1.elle chez les hommes ~ue
dans une cité prise sur des ennemis qui combattent, les corps des habi-
tants et leurs biens appartiennent ~ ceux qui l'ont prise,,(2). C'est
ainsi que CYRUS s'adressa aux nobles Perses après la prise de la Baby-
Ionie.
La liberté nu vainqueur de disposer de ln personne et des
biens du vaincu telle qu'elle ressort de Les deux t~xt€S, découle
du
fuit même de la conquête.
Cependant d'éminents polémologues n'ont abor-
dé ce prcblème que sous son angle extrême c'est-à-dire dans l'a~pli~~­
tion intégrale du vae victis(3).
1) POL., V.
11,
3.
2}
X~ n . Cy ro p., VII, 5, 72 -
7 3 .
3) Il s'agit de
: E.
BIKERMAN, Le droit des gens dans
la Gr~ce eta1~[­
que, Rev. int. des dr. de l'Ant.,
1950, T.IV,
pp.
99 -
127.
" le
vainqueur n'a aucune obligntion envers une cité ou une arm'e captu
rée par la force ••. "
; A.
AYMARD, Le partage des profite de guerre

-
63 -
Nous admettons certes que la coutume des nnciens permet-·
tait aux vainqueurs de tuer l~s défenseurs dlune cité prise d'assaut,
de disposer de la pcpulation civile ainsi que de leurs biens privés.
Toutefuis elle comportait des exceptions. En effet, le droit des gens
exigeait qu'on épargne duns ce cas-ci les enfants en bas âge(1).
Il
prévoyait aussi comme dis~ositions principales le respect des sanctu-
aires et de ceux qui y cherchaient refuge.
L'enceinte des temples et
1
·
,
.
.
,
,
A
1
(2)
POLYBE
es terra1ns atténants etu1ent cons1deres comme
sy e s .
dans
son livre V note que les lois de la guerre n'autorisaient pas
"l~ des-
truction gratuite des temples ainsi que des statues et de tous les mo-
numents du même genre(3).
TITE LIVE aussi reconnaît que le droit hu-
main tout comme le droit divin, interdisaient la violation et la des-
truction des temples(4).
Ainsi l'inviolabilité des sanctuaires était un principe
établi pour tous et qui devait être respecté par tout le genre humA;~
Si le droit de guerre autorisait ceux qui s'emparaient d'une ville,
d'en disposer comme ils l'entendaient, i l n'en demeure pas moins que
cet usage était tempéré par quelques règles.
dans Zes trait~s d'aZliances antiques.~Et~ d'hist.Anc. ,P.U.F. p.449
512, p.
512"
inutile d'iLsister sur des vérités aussi
simples, et
si évidentes que personne n'aurait de peine à les étayer de maints exem
ples", R.LONIS,op.
cit. ,p.31 " •.. Voilà donc admis que ceux se sont em-
parés d'une ville, peuvent disposer comme ils l'entendent du sort des
hommes qui l'habitent et des biens qui
s'y trouvent.
Nul ne peut ~'é­
tonner qu'ils usent à leur grê de ce droit".
1) C'est ce qui semble ressortir des paroles que TITE LIVE attribue à
CAMILLE:
T.L. ,V,27, l, 5 -7.
2) P.
DUCREY, Le traitement des prisonniers de guerre dans
Za Gr~ce an-
tique~Paris, Ed., E. DE BOCCARD, 1968 p.295 "L'Asylie n'est ~ l'origi~~
que la reconnaissance universelle de l'inviolabilité d'un lieu sacré".
cf.
aussi note nO 2 et page 296 note nO
1.
3) POL., V,11,4
; Relatant ln destruction de Thermos par PHILIPPE V,
POLYBE reconnaît qu'en incendiant ou en pillant la contree, le roi
~_:
sait conformément aux lois de la guerre, mais" qu'il les violait en met-
tant le feux aux portiques et aux monuments votirs.ld.,Ibid.~~ 2-6.
4) T.L., XXXI, 24, 17 -
18.

1
-
64 -
1! cu ses sai e r c n s 1 e v 0 i r
d ~ n f, Cl u e .. l e "1 Po sur e ~ Cl':! e Il. U f (. d e c E' d roi t ?
Quels seront le sort r(serv( L ln po~ulaticn civile et l'attitude
des ltgicnnaires dev'lnt ] es biens
sncr(s dA.ns les villes prises j'ess('ll+
lIous verrons ensuite leur cO!'l:rorte..,ent d'ln~ les cit~s qui cnt rrt:ffré
tviter un essaut
par une reddition.
l
-
1 'F ~ "1 LL r ~ P'1 l f r ~ 1)' fi. S S1' r! T
a)
En Occident
Ces () nt sur t 0 u t
les con f l i t S li u i
o!, P"" s ère nt r:1
; . ' • les '~C~ e i n s
aux Carthaginois~
__
.t-t auXGaulcis. qui nc,us fournissent les
exe!ll~les les plus
siponificatifs. L'Esrap'ne punique tout cO".l":le l'Af"~-'
nous offrent aussi des
t..lérnents dl apprfciation pour
nntre (tude.
d'autant plus Clue. l!\\ tra.diticn E'.nnaliste d(sii"ne souvent l ' Ense::~ble
de ces peuples ~cr le ~ualificatif de èarb~res.(baZbu8~baZbutio).
En effet TITE 1-PTE.
S~LIU~'!'F. CEf~""!. l'eT'lrlcient fr(querl!1ent en parlant
des Es!arnQls~ Nunides 0U Ga.ulci~. r.epen~ant cette notion n'av~it ~a~
1 a t:! ên e rés c· n:'1. a nc e q,u e che z l e E' Gre c ~;( 1). l I n ' a t'a sun e val e ur po é cg r a ~ h i -
que et
non plus ne s'a~:lique !-~s è l'étran~er ~ui ne parle ras le latin.
DanlO la ',entalité ro~eine. il s"lus-enter..d de l~ :part de ceux Ilu'il
déti-
gne
• une certaine inf(ri0rit~ dllns la prise de conscience è la fois
ccr.~unautaire et ~0liti~ue(2). Il 6er~it donc intéressant rour notre
étude d 'ol'poser le co~~·crte""ent des :oTJ''lins face aux villes f"recques
(de Sicile et d'Italie) ou ro~aines(alli~es ~ui ~nt fait d~f~ctiO~)
~ leur cOY".~orte":1ent f"1.ce e.ux viJ.les ,euplées ~e "rar'tares" ~rises d'a,'t-:;,-,_
1) Sur le contenu de cette noti0n chez les Grecs cf.~ .LONI8.o; .,cit .•
l:.14-25.
2)
En traitant deE ~oeurs gnuloises CESfl(rG •• VI.ll.2) note qu'en GaulE
" non seule..,ent toutes les cit~f,. tous les cantons et fractions ••• n'lis
aussi toutes les f~..,i]les sont divisfes en p~rtis rivaux .•• " Ij~uteur
du hEZZum Iugurthinum:
f/),ll .• Iug ... XV:rII.
2.
notE' 'lue les ~re!"ieTr. A~""''''~
" ••• n'6t~ient pouvern(s ni ~nr la coutume. ni p~r l~ loi. ni p~r un ~G:(
(ils menaient une vie errante Et disrersée). Toutefois. ~CI!',e jusÇ.u 'en 14t
.. ne s'
t "
' ' ' '
es
1nt~ress~e ~ l' "FPJ0UF qu'en faisant ln ~uerre Ù Cartha~e.
cf. éealement T.L •• XXX.
43.
7-8.
=i _.~...
W

-
65 -
j~u dfbut de la première ~uerrE> pun:ique. lo':le jllS11'..: 'en 203. se content9.
de co~battre en Sicile. pour inroser ~ Carthage la reconnaissance de 5~n
installation a t1essine. 'lais a rllrtir de 2(2. elle résolut de conqut:rir
l'en~entle de l'île. Cette ~~e année. la ville d'!gripente 9.11ait subir
un siège de sert noise L~ citC éteit ~recque. ~eis elle entretenait
depuis 10nGtenps des relations
étroites avec Carth~~c dont elle était
l'elli&e.
Flle 6t~it rroct? dE> la ~er. ~ais n'Ct~jt ras uce cité ~aritd~e.
assifeée.
elle risquait
vite ~'être ~rivfe de r~vitaille~ent.
Le
si~ge fut tr~s dur et les 50.000 rarthB~incis ecfer~(s dBns la ville.
furent
réduits ~ la fll~ine. r'est au cours de l'hiver 261. qu'elle fut
prise et sacca~ée. Les ~~ains entr~prirent un véritaèle cann~Ge et vendiren
25.000 €sclaves(l).
Paler~e en 254 surit le ~~me sort. Aysnt arné 2eo vais-
seaux les ~o~ains se présentèrent sur la c;te nort et 5'atta~uèrent a la
cité.
Ils ronpirent les murs et
s'e~!>arèrent facile!"1ent du qUl'\\rtier ".laric..)e.(
nais
ils ne r~duisirent la cité que par la fai~; ies citoyens de la ville.
qua.torze !:lille se rachetèrent. treize ",ille furent réduits
en esclavtlpe(2).
En 250.
ÜLY:CEF.
tête de pent en Sicile et a.vant p05te de ~erth!\\s:e. est
è son tour assiégée. DIOD0~F raconte que ce siè~e dura dix ans. ~ais
i l . n'y eut ni l"aSE~Cre ni vente de populatir::n(3). La raison est que
Rone
~tait très affeiblie par la ?-uerre.
1) Diod •• XXIII.
8: pnL .•
1.17-20.
Il
Y avait dans la ville une ~arn1~OC
puni~u€ for!:lée par des "'ercenai!"C's LICU;JES. Ibères et Celtes sous les
ordres d'un certain H·~NNII·L. Le siè:e d':'~rip'ente fut
suivi de
la de.,t."1\\'"
tion de beaucoup de villes de
l'intérieur.
2)
Diod .•
XXIII.18.POL •• I.3B. La chute de Paler~e entrR1ea celles de
plusieurs villes côtières et de ~ertainE's villes de l'int~rieur COMne
P€tra.
3) Diod •• XXIv.ll.3. Si
BJF~ON ne lui ~vRit ~as cnvoy~ du ~rain en
abondance.
elle aurait levÉ le
siè~e. La durée stexpli~ue p~r le fait que
l'année 249.annus ater~ fut !'(lur 10me lq plus d(;s9.streuse de toute ln guerre.
elle n'ava.it :-lus q,ue 20 n~vjr("c €'t
ne pf'uv'\\it de lonF't~r.lrf) E'spGrcr
reconstituer une flotte faute
de rp-reurs. Le
si~~e de Lilyb~c tourna
pratiquel!lect ~ l'échec.
1.
....
S\\AIOII_lI'!'!.,._---~-
.~.----...-----~
.._- -
r"_"'~:,i

- 66 -
La prise des vill~s pendant la première guerre punique
s'accompagnait de massacre! ou de vente
des assiégés.
Toutefois ceux
qui av~ient la possibilit€
de se racheter étaient laissés en liberté.
La sévérité du châtiment qui leur fut réservé.
s'explique dans une cer--
tainc mesure par le souci ùe Roce à€
défendre
, ses inté-
(1)
~\\-.
d ' ·
d'
l
C h · ·
A
• •
rets m~rltlmes / ;
~ aUSSl par son
eSlr
expu ser les
art aglno~s
de toute la Sicile. Au cours de la seconde guerre punique. les Romains
eurent un comportement tout autre pendant la reconquête de l'Italie
èt
de la Sicile.
La longueur de ce conflit ne manque pas de porter ~ttei~·
te à lu solidité du bloc romeno-latin.
Un trait~ment
très inégal sera
réservé aux assi~gés. Il sera surtout fonction de leur degr~ de culpa-
bilité et des griefs que Rome leur reprochait.
1) Sur le problème de la Sicile cf.D.ROUSSEL, Les Siciliens entre lAS
Romains et les cartaghinois d l'époque de la première guerre punique~
Bésançon-Paris.
1970.p.97-122. Sur la politique romaine à l'égard des
Siciliens au cours des années de guerre cf.p.
127 -
131.
Cette guerre était communément désignée par les historiens anciens des
siècles suivants sous le nom de "guerre pour la Sicile" (POL. ,111,27,1)
L'annonce de l'intervention romaine. puis la nouvelle que les légions
d'no CLAUDIUS venaient de d(barquer à Messine frappa, semble-t-il, les
Siciliens de stupeur.
D.
ROUSSEL (p.100) note que"
les Romains,
quand ils arrivèrent en Sici-
le,
n'avaient selon toute apparence,
arrêté aucune politique précise
vis à vis des populations de l ' î l e .
Contre ceux qui leur resistaient, .•.
ils sevirent sans doute durem(:nt'~
Ailleurs i l ajoute qu'ils"
furent
amenés à commettre dans les villes prises d'assaut où à la suite d'~_.
long siège des violences ou des atrocit6s qui mirent la haine dans le
coeur des parents et des amis des victimes"
p.
120.
!;t, dl'" U _ ""'"'" .'- --' .".
.~:;.•~..L., .-

- 67 -
En 213, Geux arm6es consulaires, assièg~nt Capoue(1).
- - - -
M~is~ avant l'assaut, les consuls firent connnîtr~ aux Campaniens
qu~ tous ceux qui, en sortant d~ la ville, se pr~senteraient à eux
resteraient libres, en possession d~ leurs biçns, mais que les au-
tres ser~i€nt traités en enn~mis.
Cet avertissement n'eut aucun effet, lorsque les Ifgion-
nnir~s entr~rent dans la ville, ils tu~rent ou emprisonn~rent les
principnux citoyens.
La plus grande partie de la population fut ven-
-
(2)
M'
.
l
. 1 ·
f
b
u~e
.
alS nl
es murs nl
es malsons ne
ure nt u uttus
; cepen-
dant l~ ville p~rdit son eutoc0Lie et fut reduite ~ un centre agri-
cole
(sede8 aratorum) ~dministr~ par un prefet ro~ain. Les cités
nlli~es de Capoue subirent le ~ême chatiment. ATELLA fut mêoe don-
née comoe demeure aux ~idèles habitants de NUCEIRA dont HANNIBAL
av~it brûlé le ville(3). C~tte dure r~pression, dont la brutalité
allait ~veill~r plaintes et protestations, Était pourtant la réponse
léGitime aux menaces de Ccpoue, qui, appuyée par l'étranger, avait
un moment pens~ détruire l'hégémonie de Rome pour en hériter. Elle
fit surtout sentir aux peuples d'Italie, alliés ou révoltés,
1 ) T. L. , XXV, 20, 22, 16. Capoue depds la défaite de Cannes, ne cachait plus
son hostilité pour Rome, cela malgré une alliance vieille de plus d'un siècle,
appuyée par des mari~ges communs, et des fqveurs politiques assurées à l'aristo-
cratie de Capoue cf. T.L., XY-III, 4,7 ... ne extempZo deficerent ••• mi8cuerat.
P. CA4.VIUS qui fut l'instigateur de la révolte, avait épousé une fille de A.
CLAUDIUS et mari6 sa fille e.u rOf.l~,ln. M. DIVIUS : XXIII,2,6,. Mais Capoue s'ir-
ritait contre l'alliance rom~ine qui dégénernit en un véritable protectorat.
2) Les autres suivant leur dcgrr de culpabilité dans la défection, furent les
uns tr~~sportés au Nord de Volturn~, d'autres au Nord du Liris, d'autres dans
l'l'.;trurie m2ridionale ; des d\\':crt:ts particuliers réglèrent le sort de certaines
familles. Certains campaniens furent ravalés au rôle de dediticii sans droits
civils, ni politiques. M~is ces conditions furent adoucies avec le temps, TITE
LIVB parle de Campeniens recensGs à ~ome, et ùu drclt qui leur fut concédé
d'Gpouser des Romaines evec la certitudé que leurs enfants seraient léga~ement
r~ccnnus cf. idem. XXXVIII, 28. 3 ; ; 36, 5 ; cf. XXVI, 34.
3) Iden, XXVI, 12, 16, voir ~ussi POL., IX, 9.

- 6B -
qUl~ Ro:ne,
invaincue se prEparait à la revanche( 1).
Erl Sicile,
1'l vil--
le de LEONTINOI,
nssiégCe la rnêm~ ann[~ qUè C~pcue, t0~ba aux m~ins
( 2 )
~e MARCELLUS, au prern1~r nssaut
. Tous les citoyens d'~ge mili-
tc.irc
furent massacrés, ln ville aacc'9.gée
et les biens des rich~s
confisqu~s. Après les brutalités d~ l'assaut, deux cille d;'s~rteurs,
furent inexcrabl~ment ~is à mort, selon ln coutume romaine.
S~lon
f
IlhistoRte~Pndou~n, les m~rc~naires gr~cs, h~bitu~s à des m6tho~es
. .
..
. . . .
(3)
L
de guerre m01ns huma1nes, en furent atterE;s et 1rr1tcs
.
es
troupes romaines de LEONTINI marchèrent sur Syracuse.
M~is lE; Bén&-
ral
rGmnin avant d'assifger ln cité envoya "les Syracus~ins qui s~
trouv&ient dans son arm6e, invit~r, p~r des pnrol~s concilic.ntes,
les ennemis à livrer le ville.
Mais la tentativt è~ s6duction échou~,
ln ville fut prise par surprise,
de nuit.
Les Sicules traitèrent
~v~c MARCELLUS qui r€commanda
aux soldats je ne feirG violence à
aucune personne libre, mais i l ordonna le pillcge de la ville.
Celui--
ci fut Gpouvnntable, le butin immense:
aussi riche dit l'historien,
qu'on l'eût pu tirer de Carthage elle-même (4).
Le consul récolta une
e~ondante moisson de chefs-d'oeuvres dont il enrichit Rome et para le temple
qu'il éleva à Virtus et Honos. Il avait promis la vie aux habitants ; pourtant
il y eut des actes de vengennçe, d'aveugle férocité. Un soldat tua le grand
iLRCHIHEDE, penche. di sait-on sur une figure dE: géom(trie (5). Puni tian extrêDlement
srvère pour qui connaît la fidélité sans feille, qu'eut HIERON è It~gnrd de Rome)
depuis la fin de la premièr~ guerre punique, sans oublier llaide qu'il apporta
contre les Gaulois et l~s Illyriens. Peu importe, pnr tcus les moyens il fallait
récupérer l'île diEsidente ~t partout châtier les resp nsablcs d~ la félonie en
usant de la brutalité et des ra-lines.
11 Après Cannes, Arpi et d'autres cites de le grande Grèc~ : Tarente et Metnpon~e
passèrent aux Carthaginuis : POL., III, II,8 ; T.L., XXII, 6, 1. La d€fection
de 1:', Si cile devait suivre.
2) T.L. XXIV, 29. La ville d~p~ndait de Syracuse, mais celle-ci fit connaître
à l-'!{ŒCELLUS. avant le siège, que la cité n'ttait plus en son pouvoir.
3) T.L., XXIV. 1 : '~eterum lèontir~rum miZitumque aliorum nemo post captam urbe
violatus fuerat". La ville (tait d(fenduE; par HIPPOCRATES ET EPICYDES. d'()rigine
syr~cu.sai..Q!..~_~I.né d' un€ mèr.€ puni que
POL.. VII, 2, T. L., XXIV, 29.6. Ils
cO~Jandnient des troup~s de mercenaires et de dfserteurs romains : au total 4 000
hommes.
4) iderr. XXV, 28, 3 ; 30, 11 - 12.
5) i9·.Ibid. 31.9, PLUT .• MARC., XVII - XIX.

1
1
- 69 -
au besoin; ou de la séduction 31 les ccndi~ions s'y pr~taient.
1
Le c~ntrôle de la Sicile. point stratégique important, etait vi-
tal pour Rome
(1).
Ces
exem~les contrastent avec c~ux des cités d'hBPI et de
LOCRES.
Lors àe ln prise de le preoière par FABIUS, i l n'y eut ~i
rnasE~cre, nl pillage. Le oonsul s'~tonna seulement du fait que des
Romains aient 4
lfl.'e.llier à de:;
~tr",ngers,bnrbar~.s de surcroît,
. , .
. trlOurP-lr~
contre leurs vieux allles et
u rendre l'Italle/de l hfr1~ue. (2)
La cite de LOCRES ~ui
fais~it
race
6 la SICILE,
se
rallia
~lle aussi aux Cartha~j~ois. Qunnd les l~Cionn~ires s'en empar~rent,
p. 8CIPION dut mettre
"au supplice les responsables de la félonie"
et accorda leurs biens aux roma~~philes. Mais le consul y laissa
un d~tnche~ent comandê par son lieutenant PLEXINIJS. dont les
sol-
dats allaient se livrer à des abus
scandaleux •.
Ils accumulèrent
le~ cruautfs, les viols et les rapines
ils o.~rent mettre la
main sur les
trésors consacrés du temple du Perséphone
(3) rest~
intact de tout temps.
Les Locriens désespérés,
vinrent en suppliants,
dfnoncer au S~nnt. les crimes du Ifgat.
Le S~n~t pr~mit qu'il serait
fait réparation de tous les torts
subis
i
que l'on rendrait au tem-
ple en les doublant,
les
som~es qui en avaient été enlevées i la
garni son serait rempl acèe et PLf.MIU l US
arr~té. En fin une c OI:l!:li s sion
de dix sénateurs enquêtera pour déterminer' les responsabilités
d~ns cette aff~ire (4).
(1)
Ln Sicile devait encore, pendant deuxans occuper les legions
romaines.
La prise d'Agrigente en 209,
détermina la soumission de
toute la Sicile. l ' î l e d'sormais n'aura pour tâche
que de noUrr.r
les troupes ~ la pl~be de Rome. Des colonies d'esclaves prêtG
à de r[roces
soulèvements y
seront envoyés.
(2)
T.
L.,
XXIV,
46, 5. HANNIBAL avait ~aintenu dans cette ville,
une garcison de 5.000 homnes.
(3)
TITE LIVE écrit que "tout ce qui rend~i~ odieux au faible la
Wl
f~rce du puissant ne futfépargné aux habitants par le général et
ses soldats •••
"T.L •• XXIX. b. 2-9
Proaerpine est le nom latin de
Pe'l'[:ephone~ a8aimiL~e b. la vieille déesse italique Llbl.'R1A. C'était
l~ fille de DEMETER. PLUTON l'~vait enlevée. Locres
était un cen-
tre im~ortant de son culte.
(4) PLEHINIUS sera arr@tf, il mourut en prison ~ Rome: T. L •• XXIX,
21. Sur l'enqu~te ordonnée et le débat au Senat: XXIX. 16-21
et. POL ••
X,
15-17 •
.
!:.':.., '

-
70 -
Les Romains,
qui,
tout aU lon~ de ln premiere guerre s'~taient
montr~s respectueux des
sanctu~ires, se transforment en profana-
teurs.
C~
brusque
chnnr.emênt
n'est pas
sans rapport avec les
desastres militaires.
L'esprit relieieux, nous ~urons ~ y revenir,
~llajt progresscivernent s'est~mper nU cours de notre périoie( 1).
En Espar.ne punique, l~ prise de Carthag~n 210, vU p~r
POLYBE doit se lire dans
l~ perspective d'une comparaison i~plici­
te entre~Grecs et Romains. Aussit8t entres dans la ville vaincue,
leB Ro~ains égorgent teuS. les êtres animes qu'ils rencontrent.(2)
M&is ~ un signal donné, ils nrrêtent le m~ssacre pour entreprendre
un pillage systématique de lu ville.
Tout autre fut le sort rp.servé
a Or~nGis prise en 207. D'après
TI~E LIVE, "les l~eionnaires se rêpandirent dans toute la ville
cn~s ils s'nbb~inrent de piller, de tuer les perscnnes qu'ils ren-
con t r Il i e n t
s au f
c e 11 e s q uJu ET é sis t aie nt. '1.' Ou ~
les
Car th agi n ci a
furent
emprisonnés ainsi/ trois cents habitants,
qui ••• iaz;t ferme
les portes, on confia aux autres l'adninistration de leur ville~ et
0n leur rendit leurs
biens"(3).
Cette clémence peut ~arattre éton-
nante pour qui
sait qu'auparavant,
L.
SCIPION avait envoyé des
émissaires
sonder les 8~ntiments des habitants. N'obtenant aucune
r~ponSe pacifique, il se résolut à mettre le siège et la victoire
ne
fut obtenue qu'au prix d'une "lutte affreuse et incertaine".
D'autre part les richesses qu'elle conten~it, en taisait une proie
tentente pOUr le pill~ge. En effet selon TITE LIVE m~me, c'est la
plus riche des villes barbares
; Jutre ~u'clle se trouvait àans un
territ0i r e fertile,
ses habitants retiraient du sol de l'argent.
Cepenè~nt cette clémence n'êtei~pr.s désintéressée; elle obéissait
l
des mobiles précis.
(1)
En 242, à encroire DIODORE DE SICILE (Dio.,
XXIV, 8,9).
Les
Romains
s'atstinrent de p~rticiper nu pillage du somptueux sanctu-
3ire d'Eryx ~~ec les mercenaires Celtes aupdravant au_~ervice de
Carthace, mais qui s'citaient laissés cagner par les Remains.
(2) POL.,
X,
'5-17 ; cf. aussi. Liod., XXIV, 9.
"
T. L.,
XXVI,
42,
3, 46 "On massacra ça et III per toute la ville,
sans epargner eucun
. .,', .c: des homll'es ,;~~~~~ 8ue &_' on reo cont r~i t ••• Il Il in si ste sur l ' opu-
lo.nce de l,a ville remplie de" tout ce qui sert à prép6.re ~ la guer-
re
:
nrgent, armes, otages de l'Espagne toute entière.
L'atta~ue de
le ville fut prépsr~e, SUr terre et sUr mer.
( .3)
'1:.
L.,
XXVI l l ,
3,' 4- 1) •
"t..J.;,;'h
;l~~' ,.
;tf~'t,·"OJl";".~~'t_ ~

- 7' -
Büme p~r cette philantropie, cherche ~ iloiGner Cartha~e non
seulement
de
ses alliês,
mais
aussi
de .eD ressources.
Ce COrnporte-
oer.t
Cénéreux revê~ait aussi un aspect de pr0P~gande. L~s
cites
cc:p.':,'·r:.oles accueillirent fa.vorablement
le futur
Africanus Major CLUl
Der~ H~lu~ comme un roi par les Espa~nols (1). Tout COm~e en
Ita:ic méridionale et en Sicile
Rome adopte la m~me attitude.
Les
~ssiégés qui abandonnent la cause carth~ginoise sont traite. avec
clè~ence m~is ceux qui s'obstinent sont sevèrement punis. Ce fut
le cas de la cité d'Astepa situee
dans les montagnes
beti~ues.
Cette ville àemeur~~ fidèle à Carthage, vouait une haine excep-
tionnelle
aux Ro~ain5. En 206, SCIPIOH y delfgua un de~eche~ent,
S',)UG les
ordres ,d"\\.lO certain L.
MARCIU~. ~lais la population se sen-
tant en d~n~er, envoya une milice a l'encontre des légions.
~A~CIUS char~ea sa cavalerie d'arr~ter l'ennemi, voyant qu'au-
cun d'entre eux ne reculait,
ils
fUrent
m~ssacr~s jusqu'au dernier.
TITE LIVE ajoute que cette cruauté d'ennemis irrites, et surtout
en pleine action,
face à
des
adversaires
armes et qui lui
rési~
taient,
était conforme aux lois de la guerre.
(2)
Mais
i l nous
serüit difficile d'accorder un crédit
à
la l~gitimation de ce Combat
inégal de
cavaliers rooains
contre les
fantassins
d'Astapa.
Rome
avait décidé
d'a5ir sévèrement
contre
cette citê.
Les cites
üe
~~tul.;:. et Ilitarci.:. s'ituéen dans le Sud-Est Espagnol, cO::lmirent
l"~prudence de se défaire de l'alliance romaine pOUr soutenir
la Cause
carthaginoise.
Aussitôt
après la pacification de l'Espa-
gne,
SCIPION donna à
L.
MARCIUS l'ordre d'attaquer Castalo,
lui-
n~rne il vengerait le félonie d'fliturgis .. Il ~ssi~ge~ la ville
dont i l trouva les portes
fernées •.
Dans le discours qu'il
rit â
s~s.s~ld.ts, il leur demand~ de
f&ire
la guerre à
cette ~it~ evec be~ucoup plus d'acharnement qu'aux
Carthaginois.
Car,
di.ait-il,
"il f~llni~ les punir de leur perfidi~,
(1)
CL,
A.
AYMARD,
POLYBe, SCIPIO/i,
L'AFRICAI"
BT LI:-' T$E DE
" JW I" in,
Et.
d' hi st.
An c . , P. U• F l 'Y fi a. ban don ne r lac au se de
Cartha~e~ il S9 prostern~ devant SCIPION et l'appela roi
POL. ,
X,
34, 2 ;
35, 2 ;
40,3., Mais SCIPION, d~clin~ l'offre.
( 2)
'l'.
L.,
XXVI II,
22,
15
23, 1 ;
...
(
- l,Ir. ,_ .
,v'" IV..
-1.- ,
,
1
( i: t.Tt-;": ... é '" é
EDt C-l/!'-i ' ;.J,~ ,i~'~ t..-J..... ,,\\00(.. __
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1 J~ji. r, 1:"' ~ ~f - 3 'J~)
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,À'-'\\"~
~t X':.- A"Y'_'VW\\Av"vU'..."
"
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~'
~.".

-
72 -
de leur
cruaut~ et de ,ur crime". Après l'assaut final raconte
TI'I'1 1JIVE,
personne r.e pensa. nu butin.
"Or. masSQ.Crl" les gens sans
~rues,~ côté des gens armés, les femmes comme les hommes; Ou alla
jusQ.u'à tuer les petits enfants •••
Puis on mit le
feu aux maisons,
et on o.battit
ce que l'incendie ne pouv~it conSUMer (1)". Quel
contr~ste avec la g~n~rosité n~nifest~e 1uelques années aU~~ravan~
Mai~ la néces~té èe contrôle~ l'Esp~gne punique, exigeait cette
cru~uté à l'egard de ceux qui continuaient à offrir ~ Carthage.
les ~oyens de continuer la. lutte contre Rome.
Bien souvent i l fallait
user ae la terreur pOur
dé~oraliser
l'adversaire afin de l~ di~suader de poursuivre la lutte. La prise
d'Utique en 204,
obéissait h ces impérniifs.
Après un lonG siège
~e 30 jours, la ville fut prise p~r sur~rise, de nuit. SCIPION dQn-
n~ l'ordre d'incendier les ~aisons. Croya.nt è un accident, les po-
pulations,
s~ns pr~caution, se ruè~ent au dehors. Ce fut une
véritable hécatombe, plus de 40.000 hommes
furent
tués et
5.000
furent
faits prisonniers
(2).
Durant l~ premjère tout comme la deuxiè.e
guerre punique, les
Roma.ins S~ sont surtout efforcfs d'acculer les adversaires à choisir
entre la destruction totale et le ralliement.
Le traitement que
Ro~p. réserva. ~ux vaincus fu~ p~rtout le m@rne : mRss~cres, ventes,
a~strvi6sement, déportation sont en b~néral le lot des assi~g~s
vaincus.
Cependant, on peut noter que l'usage de
garantir la vie
sauve ~b habitants moycr.nnnt une rançon, était aussi une pratique
courante.
Cette pratique perpettait auX populations d'échapper au
pillage.
Au COUrs de l'hiver 211, la flotte
romaine envoyèe i
LILY-
BEE pour s'y repo~ 'r", organ~se un débhrque~ent dans l ' î l e de Kerkina,
dont les habitants
se rach~tent ~ prix d'argent pour êviter le pil-
lage et avoir la vie sauve
(3)
(1)
T.
L.,
XXVIII,
29, 5 ;
31,6-1.
(2)
POL.,
XIV,
5. L'ach~cn evec une frcide admiration, et sans un
~ot ee compas9i~n
pour les victimes
de l'incendie.
d~clare que,
Par!:li te.nt de hauts faits de SCIPION,
celui-ci lui pa· ra.iS'l!1l.it" le
plus te'lu, le plus merveilleux."
( 3) POL., III, --
9, o.
-
(~>::
~.:~:~~~~.~~
-
,,-,'
i;.4i?:~__

-
13 -
Pome, ~u cours des deux guerres ~~nlqu~s, a use modérement de
son droit
de
conquête.
Certes,
il y
eu~ des excès de brutalités,
mais
n'oublions
pas
non plus
que la guerre a
ses propres lois,
qui
suf~~ sent en dehors de toute considfration u expliquer certains co
comportements.
Souvent
dans
certaines villes,
Comme Syra~us~ ou C~rthagène,
on s'aperçoit que
la
recherche
de butin pouvait maIgre,
tout,
tem-
pérer la cruauté du vainqueur,
qui,
volontairement, met fin eUx mas-
saCres pour tirer profit
du butin.
Mais,
en r~gle génerale, d~ns
~
,1
les villes
barbares
Comm~ dnns celles de l'Italie du sud, l'attitu-
de
romaine sera fonction des
griefs
for~ulés à l'encontre du vaincu.
Tout autre
sera leur
conduite,
un siècle plus tard,
lorsqu'ils
eurent
à intervenir de nouveau contre C~rtLage en 146. La ville est
prise après trois
ans
de résistunce.
Il
fallut
de même un atroce
com~ -~ de rue de plus de
huit
jours pour l'enlever,
be~ucoup d'ha-
bitants moururent pendant le siège.
Des
30.000 femmes et 25.000
hommes
qui
s'etaient rendus,
certains périrent en prison,
à'autres
revint
furent
vendus.
L'immense butin aux soldats,
sauf les metaux pri-:
cieux et les monuments que se
réservait
le trésor.
Le sol de
Cartha-
r,e
fut
déclaré
Baaer, son territoire ager publicuB, son site
abandonné
(lJ
Cette att4u~ede Rome,
sc~ndalisa
ct
inquiéta l'opinion mon-
diale,
qui découvrait,
nvec
stupeur ln guerre
ro~~ine comme une
"guerre totale" devant aboutir non seulement i
la d~faite, mais'
l'anéantissement politique de ses
~dversaires (2).
(1)
Diod.,
XXXII,
23-25
; FOL.,
~XXVIII.19
Florus,
I,3ü,11.SCI-
PIO~ rendit aux villes d'Italie,de Si~ile, ou d'Afrique, les oeuvres
d'art que,
depuis
des
si~cles, les Carthaginois leur avaient enle-
vées.
Les
rois de Numidie héritèrent des
bibliothèques.
Sur la
destruction de
Cartha~e cf. CL. NICO~ET, Rome et la conquCte .•• op.,
ait.,
TIl,
P.623-625.
(2)
POL.,
XXVI,
9
.~

- 74 -
L'attitude romaine semble dictee par son
SOUCl
de
m~intenir
son h~g~~~nie
en N~diterran~e, ~ une p~riode 00 celle-ci est
menac0e
;
att~,u€e à la fois FQr les Espagnols révoltés, les Mac~­
doniens
et
les Ach~ens. L'irnpacca11e sacction sembl~ obéir à l~
fois
à des irnp~ratifs politiques et militalres. Aussi cette tterni-
re
guerre punique,
d~cl~r~e par les Romains nvec un cynis~e qui
r~volta le monde entier, ne fut en vfrit~ qu'une ruerre d'exterrni-
n~tion, et presque une génocide.
La recherche de
butin et l'ambition
d~mesurée
de
:::ertllines
généraux renfcrc~rent le caractère odieux de cette nouvelle forrr.e
de guerre.
Pillage ct destructions
serent d~sormais systematiques
lors de la prise des
villes,
comme en tê~oigne, le châtiment terri-
ble
infliGé en 52 aux Carnutes,
qui
eurent l'audace de ~~ssaCrer
des
citoyens
romai~s ~tablis à Cen~b~~J aujourd'hui Orleans. LOrs-
que lu ville fut
enlev~e, César fit incendier ~es portes, la livra
à ses soldats, avant d'y mettre le feu (1). Mais le massacre le plus
important auquel se livra le proconsul
fut
sans doute celui
d'AVA-
RICU~, la même annte. Personne, écrit CESAR, ne pensa nu pillage,
les soldats excitfs p~r le souvenir du carnage de CENABUM, et par
les
fatigues
du si~Be "n'Epargn~rent ni les enfants, ni les femmes,
ni les vieillards.
D'un ensemble d'environ
40.000 nommes,
d
pelne
Crls
800 p~rent s'enfuir hors de la ville aux premiers (2) ... "Le général
lui-même
éprouve un certain éfgoût,
aussi tente-t-il Jans
sa narra-
tion de
justifier
cette cruauté
sans
borne,
p~r le desir de venger
(1)
CESAR,
B.G.,
VII,3,1
11;9. PLUTARQUi I!lention::.le la prls(;:
de vive
force de
PLUS DE 800 VILLES PAR CeSAR
(PLUT.,
CESAR,
XV,3)
Mais
J. HARMhND, op.cit.~
P.
413 et notes
33-39, qualifie les données du
biograr~e de phantas~e car ~crit-il "en additionnant les captures
d'un oppidum atuatuque
an nyrne en 57,
d'un oppidum ,~tiate par
CRASSUS,
en
56, du refuge breton de Casoivellaul",
en 54,
de CenaOum
et
d'
Aval"icum en 52 et celle de.4 ou 5 caBtel~a vaiaisans,
aU plus
par SERVIUS
GALBA,
ù la fin de 57,
d'un~ dizaine d'oppida vénttes
peut-être par
CESAR,
en 56, on arrive
à une vingtaine
d'expugna-
ti "es i
i l est
douteux qu'on puisse parvenir à 25".
(2)
CESAR,
VII,
28,4.

- 75 -
les
citoyens
ro~alns qUl avaient été massacres. La destruction de
CENABUM dont
les habitants
furent
r~duits à l'e3clavaCe,aur~it ~
ln rigueur,permis
de
justifier une
telle conduite.
Cet
~pisode, tout co~me ceux relatifs à l'intervention romaine
en Orient ~ontre bien, qu'nu sortir de la deuxiérue guerre punique,
le5
Romains
usèrellt
ù
leur gré
du droit que leur
conféra.it la con-
qu~te. Ils ne s'embarr~s~~rent point de sentiments d'humanite. Que
l'ennemi soit
barbare ou non,
sor.
sort
dependra du
bon plaisir du
général At des
griefs
qUl
lui
~~nt reproch~s. Toutefois notons
qu'il y eut des
abus.
Des
enfants
et même des
vieillards
serout
r
et
~assacrfs , 1LITURGIS, comme ~ CE1AbUM. Les templ~R
bien sncr~s ne
furent
pas
épargn2s
i
co~~e en t~~oigne le sac de Toulouse en 100.
Le
consul Q.S.
CAEPIO,
envoyé pour
Soumettre les
Volques tectosages,
s'empara des trésors ~u'ils avaient ensevelis dans
leurs ~t~ngs
sacrés,
sa victoire lui
rapporta
15.000 talents
(1).
Ce peu de
re-
tenue devant
"la chose des
dieux" était lie
aux changements
interve-
nus
dans
l'armée essentiellement
formée
de légionnaires pauvres,
qui
faisaient
la guerre,
avant tout,
pour s'enrichir des depouil-
les
des
vaincus.
Avant
de
revenir
avec
beaucoup plus
de détail
Sur les châti-
ments
infligés
aux populations,
examinons le
comporterne~t des sol-
d~ts romains dans les villes prises en Orient.
b)
LA
PRISE
DES
VILLES
EN
ORIENT
La première intervention
rOmaine en Orient
contre une
struc-
ture organlsee fut
celle entreprise
contre le
jeune roi àe
Macé-
doine PHILIPPE V.
Ce fut
du reste
une véritable passe d'armes.
(1)
Entre Toulou3e et
Barseille,
un àes
convois
~ui transportaient
le butin en
Italie,
tomba entre les mains
des
bandits qu'on
accusa
d'avoir été
engagés par le Consul.
R~ ne parvint à destination.
Selon ,.' ~ LU GEL LE, "l' 0 r
de '1' 0 u l 0 use pas sa e:: pro ver b e
et nul ne
douta plus qu'il
eut été maudit,
quand le ravisseur,
en
105,
subit
l'une
des
dGfaites
les
plus
hu~iliantes de l'histoire romaine
celle d'Araua:o
AULUGELLE
III
7
L)

"
7.


-
76 -
RomE,
craignant
une
jonction des
forces
macêdoniennes
et puniques,
intervint cn
Grèce.
C'est ainsi
qu'en
212,
le cOmnaGdant
rOmaiu
en ILLYRIE M.
VALFRIUS
LAEVINUS conclut avec
la conr~deration
Etolicnne une alliance ouverte
~ SpRrte, ELIS, MES8ENL et au roi
de Pergame
(1).
En 210,
LAEVINUS,
s'empara à'Anticyre
de Locride.
Conforme-
les
ne nt
au
traitf
,
la ville fut
reuis~ aux Etoliens, habitants
furent
vendus
COmme esclaves
par léS
RomaiGs
(2).
Son 3uccess~Ur
p.
SULPICIUS GALBA et ATTALE s'eœparèrent
d'Egine.
D'apr0s
POLYBE,
la cit~ fut d'abord donnée aux Etoliens
par la suite,
c~dée au
rol pour
30 t~lents (3).
Ces exemples
nous montrent qu'il arrivait
que
Roce
rixe,
a l'avance
le sort
des villes à conquerir.
Du reste c~t usage, m~me s ' i l U'R
p~s êt~ pratiqué
en Or.ciQent
au cours de notre période, n'était
pas
inconnu des
Romains.
L'Urbs eut souvent recours à cette prtlti-
que,
nous le verrons, tien avant
5.,':1
contact avec
les
Grecs.
La
(1)
Sur ce traite cf.
R.G.' HOPITAL,
Ze trait~ l~omarlo-étoZien
de
212 av. J.C.,
Rev.
hit.
du droitet étrang.
1964, pp.1b-4b et 20~­
246 cf.
p.22-25
,
A.
AYMARD,
Le pwrtage des profits de guerre dans
Zee traités d'aZZianoe antiqueo, in Et;Hist.Anc., P.U.F., 1967,
p.499-512.cf.
ci-dessus ch~pitre Deux: Les profits de guerre
biens matérieZs et prisonniers.
ROD~ voulant ~vit~r de parattre
suspecte en Orient,
passa ~vec les Etoliens ce traité cf.
ègale-
~ent POL.,IX, 30 ; 39 ; XI,6 et T. L., XXVI,24 qui nous apprend
que
ce traité ne
fut
consacré et
rendu putlic qu'en 209,
dans
les
te~ples d'myopie et au ~~pitole a cause, dit-il de la lenteur des
diSCussions
engag~d3 d Rome avec les ambassedeurs Etoliens. Ma~s
nous pensons plutOt que sa divuleation
f~t retardée jusqu'au mo-
ment o~ le
succès définitif de Rome parut probable •
." ~)......I..J.. ..... ....AAY.I. i:.) Sur ..1.#" traitement inf+isé.<.:.a~...h~tants :POL.,
XI,
3~ qui en rejette la faute sur les Etoliens.
(3)
T.
L.,
XXVII,
29-33
;
POL.,
X,
25.
~!.

- 77 -
prise Qes villes
er. Orient sera surtout marquée par une brutalité
et une férocité particulières.
Mais, tout comme en Occident, les
popul~tions avaient 6 choisir entre le ralliement ou la destruc-
tion.
Au cours de la seconde guerre de Macédoine,
Chalci~ alliée
de bonne heure de PHILIPPE V sera sévèrement punie.
En 201
après
l'ass~'·t final, "on mit le feu aux maisons, l'inc:endie, poursuit
TI~E LIVE, brüla les greniers royaux et l'arsenal ••• Puis on fit
massacrer les
gens qui f'~~ient coome ceux qui rfsistaient. Quant
il n'y eut plus 8ucun homne en '~ge d'être soldat qui n'ait été
abattu ou mis en fuite ••• on
~pporta le butin qui fut cnargé
dans des navires
(1)" Le m@oe traitement
fut
r€serv~ è Antipatria,
la cit~ fut incendife
et tO~8
les hommes d'âge militaire m~ssa~
cr~s. En 189, pendant la premi~re guerre de Syrie, les romains
s'emparèrent àe l'1le de Céphallenie.
Toute l ' î l e s'était rendue
mais, au dernier mOment, la cité de Same ferma ses portes et résis-
ta obstinement pendant quatre ~ois. Lors.u'elle fut enlev~e, elle
fut pillée et sa population vendue
(2).
Il arrivait qu'une cité du fait de son prestige soit épargnée
de3 brutalitês consécutives à un siège plus ou moins long.
En 86, Athènes, sans aucun doute la cit~ la plus coupable en
Grèce dens le soulèvement contre Rome,
fut
trait&e avec mansuetude?
Certes la prestigieuse cité sera affamêe après un long siège.
Sylla, i~flexible, avait déjà repondu a~x dêputés venus nêgocier
la reddition de leur ville, qu'il n'etait pas venu prendre "des
le~)ns d'eloquence, m~is pour cnâtier des rebell~s". Certes ~uand
il jeta ses trou~es sur la ville, celles-ci massacrèrent et tuèrent
tout
sur leur pa3s~ee. Le proconsul avait interdit les incendies
;
l'Od~on seul fut livré aux flammes, mais par ARISTION qui voulait
empêcher les Ronains d'en utiliser les poutres
(3) •
. ~.
"
(1) o:T. L. ,
XXXI, 2 3,
4- 8 •
( 2)
id. 1
i bi d • .6
27.
(3)
PLU'!.
~, XIII, 1 j APP., MitIl1' •• 3ô •. cf. également J. CARCO-
PIiiO,
HIST.
ROM.,
op •• cit ••
p.429~
. ·!t~t:~:· .~ .. -
....
; ..
':" ,~ ,.-

- 78 -
Cependant le Pir~sera démoli, les loges des vaisseaux brnltes.
Sous
les cendres et les décombres disparurent les belles lignes
qu'avait
jadis trac~es, comme un mod~le d'urbanisme, l'art d'HIP-
POLAOS
( 1 ) . ·
Mais SYLLA "accorda aux morts, le pardon des vivants".
En 71,
au COUrS de la 2è me guerre du Pont, LUCULLUS après
avoir enlevé Amise ne reut
empêcher
ses
soldats de detruire la cité.
Lorsqu'il vit ses
soldats
se répandre
dans la ville, munis de tor-
ches, massaCrer,
v01er et mettre le feu aUx maisons,
i l S~ jeta Com~e
un forcen~ au milieu de ses troupiers. Le général essaya de le~ rame-
ner
à la discipline, leur demanda d'éteindre le feu afin de sauver
l'admirable 8ille d'Athènes, oeuvr~ remarquable de la civilisation
qu'il adorait.
Mais i l s'en fallut
de peu,
que LUCULLUS,
ne f~t
malmenG par cette soldateB~ue en furie.
Il ne put, par la suite,
qu'accorder la liberté aux survivants du carnage et rebâtir la vill~.(2)
Notons que la recherche du butin s'eot accentuée aux cours des
campagnes d'Orient, menees par des
l&gionnaires pauvres, très
souvent
ruinés par le poids et la longeur des
guerres précedentes.
De nombreux sanctuaires seront pillés et les biens des Dieux
remportés,
aU CourS de l'intervention romaine.
L'Asylie.
conqu~te du
droit
internatiollal,
fut
viGl~e aussi souvent que l'Asylie saCr~e.
En 193, TéoB avait exprimé son ardent désir des Romains, la confirme-
tion de -
l'Asylie de la cité et des lieux attenants.
LeUr désir fut
exaucê
• Les Tfiens pouvaient
s'estimer hors d'atteinte
des
coups
(1) PLUT., SYLLA., XV, APP. Mithr.39-40.
(2)
LUCULLUS a été un aristocrate
inflexible dn bon vieux temps, dans
la conception de
ses devoirs de géneral,
vis à
vis de ses .svldats. Mais
i l était Gpris de culture grecque,
et se plaisait à
jouer le rôle
de grand protecteur de l'hellenisme.
Aussi le sac d'Amise,
fut-il
pour lui, une soirie terrible.
Il dut se retirer en pleurant pendant
que cette soldatesque farouche ravageait sa jolie Athènes.
cf :
PLUT., LUC.
19 . APP
MITHR
83
- )
,
".7 - _ . ,

•.
. , "":.

- 79 -
qu'allaient se porter les
forces d'~NTIOCHOS III et de Rome. Mais
la neutralit~ de la ~it~ fut violee tout un temps et par l'un et pnr
l'autre des partis ennemis
(1).
En 73 lors de la prise de Jerusalemt POMPf E apris s'être empar~
- - ~ -
du temple de la ville décida de le visiter tout entier et jusque dans
les:s.nctuaires les plus reculés OÙ le grand prêtre seul pouvait
pénétrer (2).
Les atteinte3 a l'Asylie sacr~e furent inno~brables, particulière
ment apris
ln troisiime guerre de Macedoine.
Le butin de Paul EMILE
qui permit en
167 t de décharger le peuple du tributum provenait essen-
tiellement du pillage des sanctuaires (3).
En
145 MUMMIUS subtilisa
à ATTALF t le Dionyos d'Aristide.
En 87,
SYLLA rançonns sans vergogne les temples v~nérés d'Epidau-
re, d'Olympie,
et de Delphes.
Inutilement, les pr@tres du sanctuaire
pythique lui firent savoir que "la lyre du Dieu s't:!tait mise â réson-
ner d'elle même en signe de protestation".
Le proconsul r~pondait non
sans pointe d'ironie qu'ApOLLON "avait tressailli de joie à ln pens~e
de lui venir en aide".
Mais i l ne s'arrête pas là : THEBES dut ceder
le Dionysor. de Myron, Sa plus belle parure;
il convertit en pièces
d'or et d'argent les trépiedS, les vases, les bijoux t les objets d'art
offerts aux dieux p~r tant de générations pieuses.
(4)
C'est ainsi que
l'or des
immortels finança le double siège auquel i l s'était rfsolu.
En 73,
COTTA et lRIARIUS après avoir ~nlevé Hl raclee, pillèrent snns
merci les maisons et les temples y prirent l'or t l'argent et tous les
meubles précieux.
Ils enlevèrent même lA merveilleuse statue d'HERCULE,
célébre sur toutes les côtes de la mer noire, par sa massue hebilement
ciselée, par la peau du lion, le carquois, les flèches
qui etaient
en or massit.
(5)
(1)
T.
L. t XXXVII, 27.3; 9; 28,1-3
(2) J0seph., A. J., 29-33-34-36-
; 53-59 ;
PLUT.
POMP.,
XXXIX, 2
;
APP.,
~ITHB. 113. L'assaut final après trois mois de siège, eut lieu le jour
du SABBAT.
I~.avait que ce jour, chez ses adversaires, l'observation
d~ ~ep~s inscrit dans la loi du seigneurt Primait sur les nécessi~es
Mliltalres. Aussi en quelques heures,
12.000 Juifs courirent-ils de
leurs cadavresm la COUr du sanctuaire.
( 3) T.
L.,
XL V,
34 - 3 5.
(4) PLUT., SYLLA, XII; Diod., XXXVIII,7.
(S)
~LUT., XVIII-XX, App., MITHR., ~3., ils mirent le feu à la ville,
t andls que 1
f "
"
.
.
.
t
. t
t '
a
Umee montalt aU clel, les navlres rOmalns ava~en
qUl-
e le port, si charges de butin que
plusie"!,s sombrèrent pendant le
·YQ7a se.
'
....
Ii!~':;~j'.,~·-

-
80 -
prises
R~ree, en pillant et brnl~nt les cités~d'assaut , us~it l~giti-
~nt du d:-oit que lui conf6rait ln. couqu@te. Mais. en violant
~'Asylie, elle portait atteinte aux loi~ de ~uerre. Cependant cet-
te violation des sancut~ires trouve so~ explication dans la recher-
che continue du "butin".
Les temples,
e~~roits réput~s riches.
furent
d~s le milieu du second si~cle, des proies tentantes pour
bJn no~bre de g~n~raux et de troupiers. Elle s'explique aussi par
le fait
que la gloire du vainqueur se mesure surtout ~ l'abondance
du butin matériel et humain qu'il s'est
appropri~ et dont il fait
étalage lors
des
cérémonies de trioMphes.
La tradition romaine
m~ne que les généraux êt~18ient les chefs d'oeuvre qu'ils avaient
pillés,
uniquement par vanitf et pOUr ~uir leur clientèle (1)
Aussi usèrent-t-ils abusivement du ~roit de glaive (iU8 gladii)
qui
plaçait entre leurs mnins
les biens et le sOrt
des vaincus, et
f~is~it d'eux une loi vivante.
c)
LE TRAITEMENT DES POPULATIONS
Pour donner un tableau fidèle ùu traitement réserve aux popu-
lations des villes conquises; i l nous ~ ~aru indispensable de
faire
appel à un nombre significatif d'exenples de cités vaincues
pBr les armes.
La conqu@te,
nous l'avons déjà vu,
engendre "un
transfert de suprématie" ef~ectuê avec ou sans le consentement
des habit"nts.
La chute d'un~ cit~. entratne des lors des consé-
~uences tant pOur sa popul~tion qui, comme ses edifices et riches-
ses, to~be aux mains du vainqueur
;
que son avenir el, tant
que
cellule humaine.
Aussi ferons-nous
une nette distinction entre le
sart rfserv~ ~ux prisonniers captu~~s nu cours d'une bataille et
le traitement
subi par la population et les àèfenseurs
d'une ville
Pris'" d'cs~ut. Quatre possibilités
s'offraient fU
va.inqueur- :.. l.e
massacre,
la déportation. l'asservissement ou la vente.
Le massacre est fréquent
surtout en cas de résist&nce acbarn~
Les vainqueurs
emportés par la haine, mas~~~ra:ent les vaincus av~nt
de s'él&ncer au pillar.~. S~ns distingu~r eussi nettement ~u~ nous.
le~ c0~tattants d~s civils, nos s~Urces font une difference nette
;:- :,;~,
~l~ic;

- °81
-
er,tl'e les
dfrenseurs
ou "hOffir.:les
en ;ge de porter les armes" (') et
ln popul~tion. soit les vieillard5. les enfnDts et les femmes.
M:lis le !!las S1!1Cre affectai t
beaucoup plus ·les
combattants. m@rn€
S1
nos
sources
ne précisent pn~ toujours
5'ils trouvèrent la mort
au
cours de l~ bataille ou imoédiaternent ~pr~s. Mais il est certain
qu'upr~s une rfsist~nce opiniâtre, la bataille s'achevait p~r une
exécutinn des
défenseurs.
Cette phrase èe TITE LIV~ est assez
significative,
a cet ég!lrd"
si aditum armatiz
in urbem patefecis8et~
!uga.m inde caedemque hostium fore~ qua lis captis urbibu8 fieri
30let (2).
Mais
i l n'êteit pns rare que ces exécutions
s'étendent
:lUX
non co~battants :vieillards femme5 et enfants.
Ce fut le Cas
& Agrigente, Carthagène, Avaricum. De tels faits, en contradic-
tiGil
!lVec les
lois
et r~glernents. tradui6~ient sUrtout la volonté
d6 Rome de rendre
iopossible tout nouveau conflit qui pourrnit
nattre de l'esprit de vengeance
des
jeunes ayant perdu leurs parents,
dans l'effrondrement de leur pRtrie.
Quant aux mass~cres des com-
batter.ts.
i l obéit
à
la fois
à des impératifs militaires, p01iti-
ques
et
économiques,
en ce sens qu'ils affectent brutalement - '
l'~cGnomie des cités vnincues.
(1)
cf.
la prise de
Léontini en Sicile
d'Illiturgis
en Espagne,
d'Avericum en Gaule.
( 2) T.
L.,
XXXII,
17. 5. Au c (1 urs deI a II è gue r r e d e l>~a c éd 0 in e ,
la p~e~i~re campagne r.maine fut
f~roce~ent men~e ep Beotie. Le
~rêteur C. LUCRETIS, y ~yant pris HALI~RTE après une héroïque ré-
sistance, nassaCra toute le population et vendit
2.500 survivants
r~fugiés dans l~ mont~gnc. T.L., XLII, 63 et POL., XXX, 20. Les
At~éniecs, qui s'étaient interposés pour sauver les habit~nts
d'Haliarte,
n'en demand~rent pas moins (~t obtinrent) le territoire
de la ville.
p.
LICInIUS montra l~ même barbarie i
l'êg~~d de Corn~e et d'autres
citù~ béotiennes, (ide~ XLIII,4,11). Le pr~teur HORTENSIUS, eut
la ~~me conduite 8 l'égard des cités de la cete de Thr~c~, où l'on
revit les ctrocités dH~liarte et de Coronée : violen~es, ventes,
ffi2.SS~cres. T. L., XLIII, 4,5 • 7-10 ; Diod., XXX,6.
~.*~_. '
~~~~{~'t~-'

- 82 -
PcrallÈlenent au mûssacre, la population était enmenée en
escl~'~ge. ~près l'&smaut d'Ac~igente 25.000 esclaves furent vendus;
13.000 lors
de ln chute d~ P~lerme. CL.
M.
PREAUX évalue à
25.000,
le
nonDre d'esclaves p~r prise de guerre ~ui affluent à
ROme entre 200 et
150 (1). En
146, SCIPION EMILIEN vendit 50.00U
Cnrthsginois a l'enc~n (2). En Esp~Gne, si l'on en cr0it AULij
GELLE,
des populations enti~res pc~s~rent sub ha~ta. sub COrona.
Une ?nncnrte indiquait derritre chnque esclave ~ ven~re, ses apti~
tu~es et ses défauts. Nous const~tons un ~et accroissenent des
populations vendues
au fur
et
à ~ure que se dév~loppe l'inp~­
rinlis~~. Rome s'est tr~s vite ~en~ue con~te des uvant~ges qu'elle
pouv~it tirer d'une ?~r~ille mesure, Cnr l~ vente visait un double
objectif:
politique,
d'abord elle empêche,
ne serait-ce que te~­
p0r~irerneut , toute velleitE de revanche ~~ez le vaincu affaibli ;
Econo~ique, elle permit maintes fois &~Romains, de tirer de leurs
succès,
des avantages mntfrielg c~nsidérables. Ces ventes affec-
taient aussi brutalement, l'économi~ des pays concernEs et pouvaient
c~user leur ruine (3).
( 1)
CL.
f.f.
PREAUX, op. cit ••
TI, page
300.
(2)
FOL.,
XXXVIII,
1-6.
(3) Bien./jûr, les chiffres sont toujours sujets à caution, ma~s
ils Deus p~ouvent que la vente, ~tait chez les Romains, une prati-
~~e c~)ur~nte. Leur augnentation pouvait ~tre liee au fait, qu'au
n08bre Qes prisonniers vendus,
s'ajoutaient
ceux Pris ail cours des
rnzziüs DION C~SSIüS,
note que POMPEE,
très souvent
recourait à
cette pratique et ran~onnait les riches ~ui êt~ient cnpturé6 alors
que les pauvres ft~ient vendus:
XXXVII,
20.
APPIEN de son ceté
nous dIt que les
woldnts de LUCULLUS firent
une immense razzie
1'esclaves, capturnnt tout ce qui tombait entre leurs mains:
ho~=,!ne:3, femmes, riches, pauvres, paysans, (';t~dins,. Ceux qui pou-
vai2ut
se r~cheter en donnnnt une somme suffisante, étaient lais--
sés
en liberté App.
MIT}].'?
78, PLUT •• ~., 14.

-
ti3 -
Rome lorsqu'elle intervint en
~,èce et en Asie. vendit souvent
ses pris~s hu~aines. pour le rlus
~rand enrichissement de DELOS (1).
Enfin ces transferts de rn~in d'oeuvre finirent par affecter l'~con0­
mie romaine et mên e ,
p~r pnîvcquer des revoltes d'e~l~ves. (2)
L'~ss8~viss(~ent tcut coreme la déportation ob&iss~it à la fois
~ des i~pératifs militaires et politiques. Mais ici encore. nous
au:rrlns à:sur1Jontcr l'imprécision de nos
sources.
En
25d,
~ en croire
DI0DORE,
CAMAnINA.
une petite ville sicilienne prise par les Romains
vit la ~~jorité de ses hqbitnnts VOUES Po l~ servitude (3). POLYBE
~enti0r.ne l~ prise de ln cité ~~is n0n ll~~serivssement de ses habi-
tants (4).
En 209,
F.
MAXIMUS vou~ ~ la ~~~vitude plus de 30.00U
T~rentins (5). L'ass~rvis3~~ent des combattants obéissaait ~ des
i~,Gr&tifs politiques et éccnomigues.
Notons
aussi qu'il arrivait des
c~s OÙ la populntion était é
épargnée après l'assaut final,
comme en témoigne
la prise de
Cûrth~gène en 210. D'après TITE LIVE, sur les 10.000 personnes pri-
B~5J JCIPION relâcha ceux d'entre eux qui étaient citoyens de Cartha-
gine,
et leur rendit leur ville êt tous les biens
~ue la guerre
leur avait
laiss~s (6).
(1)
Le port franc
de Delos, petite rle de Ip- mer Egée.
a
representé
jusqu'en 88 av.J,C.
un des centres
les plus importants
de ce trafic
du tétail hu~ain S~R~EON, XIV,
660.
(2)
cf.
Diod.,
XXXIV,
2.
36 sur l~ Sicile. Sur la. guerre servile
(73-71)
qui fit
trembler ROI:le c f :
Flort:.s,
1 1 , 8 ; J.
CARCOPINO.
Z.CEGAR op.cit.,
p.42.
( 3) Dio d.
XXI l l .9 .5.
(4)
paL •• It 24, 12.
(5) La ville de Tar~nte fut effroyablement snccag~e. POL., X,,
'l'.
L.,
XXV! l ,
15.
PLUT., F 0. b.
XXI.
,
.---
( t)
'1'.
L.,
XX VI.
47. 1 •

- 84 -
Quent
aux artisans
(1),
un edit les
décl~ra propriéte du peu-
ple romain.
On leur pr~rnit la libert~, s'ils travQillaient av~c
zèle et
~rdeur, pour les besoins de l·t guerre. Bien entendu
cette
lib~ration et ces fRveurs n';taient p~s dèsinteres~es. Elles
vis~ient un objectif précis, celui de f~voriser le ralliement
rapide 6 la cause ronaine.
Une résistance entrn1nait souvent un traitement sévère de le
cité prise d'as.8ut.
On conpr~nd pourquoi cert~ines villes mell~­
cfes prif~rent 6viter un ass~ut par une reddition.
II
LA
SOUMISSION
SANS
COMBA]
Les Romains acceptaient la capitulation soun le nom de deditio
in [idem.
C'êt~it en principe, une remise solennelle par le pe~­
ple vaincu,
de la totalité de ses personnes,
de ses biens,
de
s~s
dieux,
à la bonr.e foi "du peuple ro::,'~in (2). Il en fait "don"
(deâitioJ
i l devient alors un deaitice
(dediticius). Les vaincus
reconna1s ~nt au bén~ficiare de le deditio, la faculti de disposer
de leurs personnes et de leurs biens.
Celui-ci peut les
restituer,
tout ou en pattie,
aUX conditions
qu'il lui plair~ de dicter.
Ce
principe qui
accorda au vainqueur,
le pouvoir de
disposer de la
per~~nne et des biens de son adversaire, trouve sa Source théo-
rique dans
le consentement de celui-ci,
à faire naître ce pouvoir.
(1)
Il Y avait
donc à. Carths,géne des hcn:rnes libres qui n'ét,ient
pas
citoyens.
Ce sont vraisernblable~ent les ouvriers de l'arsen~l
au nombre de 2.000
: T.
L.,
XXVI, 47,2.
(2)
cf.
'i'.
L.,
1, 3e,2.
"Le roi TARQUIIj demanda aux ambassadeurs
collatins
"Etes-vous les reprÉ:sentants
et les porte-parole man-
dat~s par le peuple collatin pOur nous livrer le peuple collatin
et vous mêmes? Oui,
le pp.up~c collatin
peut-il disposer de lui?
Oui,
Vous remettez-vous, vous
le peuple collatin,
villé, terres,
bornes,
temples, meubles,
objets
sacrés et profanes, en mon pou-
voir et en celui du peuple rollm'th!
Oal,
.- Ets moi,
je vous reçois".

- b5 -
Cela d'autant plus que dans cett~ circcn9tance, i l est encore
martre de poursuivre ou d'abandonner ue combat,
dont l~ a~noue­
roeet serait,
in&luctableroent, l~ capture dt sa personn~ physique
et la d~struction de ses ëiens.
Ln capitulation ét~lt donc le

seul moyen
pour les va.mcus,
de sauver leurs personnes et leurs
biens,
c~r elle inpli~~c poUr le vaincu la renonciation à cert&i-
neE de ces prerogatives,
a une partie de ses richesses, à l'inàé-
pendance politique.
Elle concrétise
aussi l'engagement pris par le
vainqueur de ne paS
user du vaincu à
8a. guise,
comme l'y aurait
habilité une vict~ire tatnlc. Quels usaees les Romains ont-ils
f~it de ce droit? y a-t-il eu une distinction nette entre une cit~
prise à'assaut et celle qui a capitulé?
Dp-ns le
cas d'une capitulation,
RCroé
recevait d'abord l~ sou- -
mi3sion du vaincu (in fidem recipereJ.
M&is au préalable,
un cer-
tain no~bre de conditions devaient être remplies par le déditice,
celles-ci visaient à
g~r~ntir sa bonne f~i. Notons aussi que les
r~glez qui d€terminent
les effets de la deditio doivent @tre consi-
d&rfes com~e rigides. Il aPPartient seulement aUx RomRins vain-
queurs,
d'&S~ouplir ces effets et de les modeler ~ux circonstances
telles,
qu'ils .sont mattres de les appr€cier
(1).
En 202, SCIPION,
prJse
COItme ga.rantie Il Carthage
:' le
renoncement
de
Carthage :l
l'Espagne.
le paiement de 5.000 ta.lents,
l~ ~arde de vingt navires
seulement
FLAMININUS,
après
la. capitulation de Gytbeuc., exigee.. cù
,J;jran:
l'évacuation d'Arg8s,
l'indemnisa.tion des victimes et des
pirateries
et l~ paiement de 500 t&i~~ts (3). La guerre des Groules
~ous fournit de nombreux exemples de capitulation (4). En 57, apr~s
(1) cf. la répon5. de A. GLABRIO, en 191, aux Etoliens qui acceptent
de
3e livrer .!l. la 'bonne foi de Rome 1'.
L.,
XXXVI,
28,1-G.
(2)
Après Zama,
reven~ à Utique, SCIPION, donna l'orare à CN.OCTA-
VIUS de conduire l'armée de terre vers C~rthage, tandis ~ue lui-mê-
me, avec la flotte s'en approchait par mer. Les Cdrthe..6inois,
~ff~lf~, envoY~rent à.s~ rencontre un navire demander la paix.
SCIPION èloigna ses forces
&pr~s qu'on eut fixe Tunis, comme lieu
de ntgociations T.L.,
XXX,
35,
36,8,
10-11.
(3)
T.L.,
XXXIV,
33,10-12.
(4) De~ capitulations honorables ont ét~ accordées à des oppida ou
à des ~euple3 au d~but Comme à la rin des conquetes : CESAR ~ B.G.~
II,
13,
1 •
15,1;32
,
VII~ 11-2 ; 12-J
1 3 , 2 ;
VIII, 22,2.
".1

,....~
1-:.,.: ~"_.l.....~~.,

-
b6 -
sa
victcir e sur la coalition
belGe.
CESAR décida. par ~gard aux
Héduens s"es
"~.I:'lisi'. et leur chef lJiVICIAC. de ne pa;:; châtier le
peuple bellovaque
:
"Caesar honoris Uivioiaci atque Haeauorum aausa
8ea aos in [ideM recepturuM et conaervaturum dixit
(1)
Les
I\\s"tua.tuques
btânÉ:ficier"Dt de l~ m~m€ clémenct:: (2).
Mais
C~~ f~its. qui refl~tent c~rtes la gratitude du vainqueur, ne doi-
vent pas
nous induire en erreur.
CtEAR veut soigner une certaine
imu~e de marque. oelle de sauveur ùe la Gaule auquel il s'identifie •
..-
L'acte de
capitul~tion contrain"t souvent les vaincus ~ livrer
les trfinsfu~es, ù rechercher les insti~ateurs et responsables. en
Cas
de
révolte.
En 53. le cher gaulois ACCO.
accusé d'ûvoir foussé
les S~nons
..
-
,
,
ors
,
et l es Carnutes
u
la rèvolte.
fut
condcrnne a ~ort de l
ass~mtlt::e
1
r,fnérale de la Gaule
(3).
D0UX
ans plus ta~d~GUTUATER. considére
co~me respons~ble du soulèvcme~t gf~éral de 52, subit le m~me châ-
timent.
CESAR exiGea qu'il fut
livré.
pour ~tre châtié. pa!ce que
c'et::lit le "princeps
sceleria illiuB et concitator belli'" (4).
En général toutes ces conditions imposées aux va~ncus visent
le m~me objectif. celui d'affaiblir dqvantage l'adversaire.
Les
gara.nties.
une fois
acceptées,
Rome
accompliss~it imméaiatement
une ~edditio. Celle-ci peut-~tre interprét~e COmme une restitution
en ce
sens qu'elle rétablit le déditice
dans une position juridiqu~
ment identique & celle ~u'il avait abdiquée sous l~ réserve des
modalités
impos~es b ce mOment (5). Telle a été ln position dans
laquelle,
SCIPION l'afric~in, av&it plRcê H~NNIBAL après Zama. Mais
le fait
que le deditice se
soit mis
à la discrétion (in potestate),
imp0se
au vainqueur,
de le tenir à la disposition
de la décision
du
Sénat, et du peuple
rûo~in. Ceux-ci, se prononceront sur le sort de
sa personne,
et de ses biens.
Les
dispositions ~u'arr@te le général
victorieux qui
a
reçu la capitula~ion. sont donc tr~a8it~iTes et
conditionelles.
(1)
~d., ibid., II, 15,1.
(2)
CBS,4R. B.G.,.
II,
31,
3-4
3.::,
1-~.
( 3)
id., ibid.,
VI.
44,
1- 2 •
(4)
iJ..,
ibid., VIII. 38, 3.
(5)
Cf.
l'acte de redditio
d<::s gtoliens
~u~ stipulait Q.ue "la
ti0n €tolienne
reconn&!tra Einc~rement l'empire et ln majeyti du
peu~le rcmain ; elle ne fournira pass_re à aucu~arm~e marchant
spptre ge ......lié. et Bers' ami s ; elle prendr!. les armes contre
eux,
, , -
elle leur fera 1..
Il
.... cuerr e
• POL.,
XXI.
32 et aussi
T.L.,
XXXVIII.
11 •
..";."

1
- d1 -
1
1
Ces attitudes observGes Ù l'é~ard des vaincus, constituent, si l'on peut
dire, le côte positif de la deditio. ~elle-ci établit un nouveau type
de rapport de sujetion, mais qui n'cbliterait pas chez le deditice,
l'espoir d'une prochaine d[livrance. Jus~u'~ la II~ ~uerre de Macédoine,
Roce en recevant une deditio
av~it le sentinent d'A.ssu~er des devoirs.
La neilleure d~finition de ces ntligations est donnée dans une lettre
que les SCIPIONS adress~rent a Hfracle du La~os en 188 "Puisque vous
vous '€.tes
re!'lis L notre fides,
nous exercerons en votre faveur toute
la pr~voyance possible et nous serons toujours pour vous les artisans
de quelque bien. Nous vous consentons la liberté,
conne aux autres villes
qui ~~ sont conf~tt~ill.t~'~:~~\\~l".(~dl-'\\tt:b
j
1.
.
.
.
~{als cela ne ,,'
"1."
.J'" ...... ,:Q"L~~l/JtRone qUl conSIstaIt
à laisser aux soldats la liberté de piller et de détruire la cité, de a
~assacrer les hatitants ou de les r~duire en esclavA.~e, si l~ cité se défe
dait jusqu'au bout, ou au contraire, d'éparFner la po?ulation,
si la citf
se rendait sur la denande des RC"!laindcaptGs non deditas urbes rapere)"(2)
L'histoire de la conquête ro~aine, ne nous per~et pas d'abonder dans. oe
Bens. D'aprùs AFPIEN(3) lors~u'en 204, la
ville de Locha se rendit
~
SCIPION,
celui-ci rit sonner la retraite et ordonna la rin des combats,
malS les soldats néglipe~tses ordres, se ~irent a ~Qssacrer les hebitants
et è piller la ville. Le ~énéral r.e nU~ oue confisquer le butin et ~ettre
.
• •
-i~:l
...
.
. .
'"
.
l
/t...-y>
1'"
..
& oort troIS centurIons tIres au
sort. paroI
les responsab es.~me gr e
les ordres du prêteur L.AEMILIUP,
les soldats sacca~ent la ville de Phocée
~ui s'était, auparavant, rendue. Le prêteur n'eut que le tern~s de r€unir
auprès de lui les habit~nts demeurés indeMnes. afin de leur sauver au moin
la vie (4) •
1) Citée par A.PIGANI0L.,
la conquête·Rbmainc. P.P.F., Paris 1967,p.170.
2)
p.BIEnZANECK,
Sur les origines du droit de la guerre et de la pai%~
Rev. Rist. du Dr. FR et ETR.1960,p.lOO. E.BIKE~MAN,le droit des gens dans
la Gr~ce claesique~Rev. int. des dr. de l'Ant.,1950,T.IV,!,.99-127; note ~UI
"le droit des gens rrec faisait une distinction tr~s nette entre une citG
prise d'assaut et celle qui s'est rendue . . . "' :.L0NIS,op.cit ... 'D.35-36 a
contré, par de nOMbreux
exe~ples, ~u'll convient de ne pas établir une
distinction aussi nette,
et ~ue, tes Grecs(p.35) ne se sentaient pas
nflcesBairernent tenus par les accords conclus, lors d'une capitulation.
3) Appien,
lib.~ l5.
4) T.L.~"K~YV.II~ l2.
iL))
• •; ~~"

1
-

-
t, On pourrait nous rétorquer que ces rH!"nc:ue~entssont z;. "'ettre sur
le co~r-te d'une s~ldatesque en furie,
Car la conduite des soldRts,
en
1
cas de victoire,
pouvait échapper au contrôle du pfnér~l. le plus
respectueux des lois dE' la p;uerre. !'ais nous ne saurions er. 'lire autant
du co~porte~ent de Ro~e, face à certains deditices. ~v~nt d'entreprendre
le siège de NU"'lance.
f:r.IPI0N F'IILIEN.
b Lutia fit cruelle.,ent couper
les mains dee jeunes, ~lors que la ville s'(tait rendue(l). En 135 après
la redditon
de nu.,~nc~, les nU'1antins furent tous vendus seur 50.
Qu'l~ilien se réserva pour son trion~he. Sur ordre du 8~nat, il rasa
cc
qui restait de cette pauvre et héro'ïque cité,
et divisA. son territ')ire
entre ses voisins(2).
En 107, au cours de la caT."parne de Nu!"idie, ·!'-'.!HUS assifp-ea Casra.
La cité ne rendit au ~o!'!!ain. ~aie elle "fut incendiée, et les Nu"'. ide s,
en lige de porter les e.rrnes. '!lassacrés, les
survivants furent vendus;
et le butin dif;tribué aux
s')ldats(3)".
~ en crr'dre toujours SALLU~TE,
"cet acte contraire au droit de "uerre ne fut
inspirf au consul ni ~ar
la cupidité.
ni par la cruauté, Mais
si~ple~ent ~arce que la place était
avantageuse pour JUGURTH~, et d'un accès difficile ~our les ~o~ains,,!1
"MARIUS, par cet acte i~no~le du reste. cherchait plut~t ~ terroriser les
IJumides.
et
à s'attacher son ar!'!lt:e en lui perME'ttant le r-illap;e.
L'on ne saurait
expliquer de l'la.reils cO"lpcrtemen!s'par le mépris que Rome
pouvait avoir vis t vis de ces po!,ulations"barbares". En effet de tels
faits eurent lieu nu cours de l'intervention rO"'laine contre PERSEE,
nota~nent en Frire, cou~eble de s'être ralliée au roi ~acé1onien. P~rès av
enjoint aux ta"hitants de 70 cités 1e la r(rbn.
ne déposer dA.ns la rue
tous leurs riens les plus rrécieux,
le consul dftache. des troupes sous
rrétexte de contrôler 1#1 lonne exGcution de ses ordres.
1) APl'.,
I}:>el'.~94 Lutia est il. 37 kns de !luMance.
2)
SCIPION avait froid~~ent calcul~ ~u'il ~rendrait la ville par la faiM,
car
il avait auraravant isolf 10. cit~, en pren~nt Fallnntia Ç.ui fournissai
le bl~ a l'enne!"li. NUr.1ance CE pouV".it ct:'l~:9ter que eur elle~êr.'le. Quand
ils offrir€r.t
de se rendre si on leur 'l.sSUT"l.it l~ libertt:, le /SÉ:n[rlll
refusa,
Ils se ë.'ci~èrent a cn'!'itul€r.
r'''l.is
en la.issent deux
jours Z:.
ceux Qui prfffraient la T"\\ort L lA. rente. ('eux-ci tuèrent leurE fe"l~esJ
leurs pnrents. !'lirent le feu
l~ leur ~"aison et s':" ensevelirent:
App.. Ibel'.~ 96 -SB •
.
~) Sall •• Iug.~ LX~XVIII. ct surtout XCI.3.
*ï:.~:'=-:
"!') "-.

- 89 -
Mais les soldats avaient reçu (l":ltres instrur.:ti')ns,
secrètes
....
. . . . .
, . '"
1
...
celles-1L.. A un Jour et t:. unp. heure dcterM].nt:~.•
es 'ne"les pour
toute-l'Er-ire,
il s eurert p':>ur nissicr. de
mettre les villes il sac,
d'emnener leurs habit'!r.ts en servitude.
En quelques heures,
150.000 personnes furert réduites en eoclavnee(l).
Notons que la non obsE'rvati')o des régles répissant la deditio~
s'o'tserve surtout dar.s les ccnflits que Rome ~€na eu !':ilieu
du
second et
surtout e.u pre:nier
siècle. ~orne, d'une part. cherchait
par des ,rocéd~s odieux ~ m~intBrjr son hé~éM0nie, d'autre part,
avec la Irofessi~rnalisat~on prorressive de l'arnée, les lélionnaires
faisant
surtout la ~uerre en vue de s'er.ri-:hir des di:pouilles de
leurs enne~is. Ils p("luvaient rare"1ent b€:réficier
de ces profits
immédiats dans les cités qui
capitulaient. Les s'Jldats de LUCULLUf,
ne reprocheient-ils pes,
er.tre 'lutre,
è lf'ur général, d'accepter
trop vite la reddition des villes. La. con~uêt~ de la Ga.ule est riche
en exemples qui
illustrent 'tien n0S prop') s.
En 52, les AtuatuQ.ues.
c:ui venaier.t de se rendre è:. CESAR,
furer.t
sauyae;emer.t nessacrés. lofai s selon l'auteur de beZl.tlm qal.l,icum~
ce n'était
~u'une feinte, c~r el" pleine nuit, Ils avaient rouvert
1
h
·1·...
"
. . . ,
- . . . .
. 11 II
es
oSt1 1tes.
Apres qu on en eut tue er.V1ron quatre ~1
c ,
rapporte-t-il,
"ce qui r~stait fut rE."jeté dans la place. Le lender.lair.,
nous ecfonçâ>nes les portes,
çue ne défenda.it plus' personne. n')s 6oldat~
pénétrèrent dans IR ville,
et CES~F fit tout vendre & l'encan en
un seul lot.
Il
sut,
par les acheteurs,
que le nombre de têtes
Était de 53.000(2). Les vénètes ne furent pas plus heureux t tous les
senateurs furent
mis L mort et ln population venjue a'l même titre
que ses biens. C'étnit expl:i'"]lle l~ proc~nsul "pour ~u'a. l'avenir
les barbares fu~sent plus attentifs è respecter le drait des anbas-
sadeurs" (3). Ainsi CE~;\\n, cha~ue fois ~Ul il aèopte la solution
extrêne vis ~ vis du deditic€.
ne peut
s'e~pêchcr de donner des
explic~tions plus ou moins plausihles. CO~EL si une sorte de pudeur
lui defendait de tr0p dévoiler la triste réalité. C'eFt de la ~ê~e
façon qu'il justifier~ le châti~ent, sans doute le plus odieux de
la guerre des Gaules,qui fut
ir.fli~é aux assif~és d'Uz.l.l.odunum(4).
l.; FOI,.~XXX~ 7-5; T.['.~ ,Y'I.V~ J4~ Z-7~ rLUT.~'\\E~l"
29.
2) CESAR.
B.G.~ II, 31, 3-4; 32. 1-2; 33, 6.
3) Id.,
ibid.~ 111,16,4.
4) id •• ibid.~VIII,44,l.
, .....

- 90 -
Dans le rassar.e qui
en r~nd co~~te éclate tout le cynis~e cé~~rien,
que le recours à la circonlocution dissinule m6.l: "César sav!1it que sa
bonté Etait connue de tous
et i l n'avait raB cl craindre qu'on cxpliquât~
par la cruaut~ de son caract~re~ un acte de rirueur; con~e d'autre part.
il
ne voy~it l'achève~ent de ses desseins,
si d'autres,
sur divers ~oints
de l~ Gaule,
se lançaient d~ns de senbleble~ entre~rises, i l estine qu'il
fallait les en dÉtourner per un châti.,ent
eXe""pll3.ire.
Fn consequence,
i l fit couper les rne.ins dE: tous ceux c;ui avaient porté les aT!!leS et leur
laissa la vie.peur qu'on sut mieux
com!"1ent
i l punissait les rebelles(l)/~
Devant l'horreur d'un tel
ch~timent, on peut être surpris de ce qu'il
ait été ordonné par un honne qui,
par ailleurs.
se complaît L exalter sa
propre mansuétude. ~evenons aux
faits.
En ce qui coneerne les /,tuatuques. COr.lment serait-ce :possible que ce peurle
ait rouvert les hostilités en pleine nuit? Quand on sait qu'après avoir
fait acte de soumission.
ils ont livré la ~uasi totalit€
de leurs ~r~es.
Pourquoi ont
-
ils eu subite"1ent la témérité d'affronter
à nouveau un
adversaire trop armé? La version des faits
n'est ras ~l~usible; le narrateu
a volontairement ~is quelque chose. L'hypothèse de M.~A~r~U~ nous paraît
.
bien rlus acceptable"
les Atuatuçues n'auraient repris les ar!'les ~u 'au
~ornent où CESAR prétendit; contre le iUB gentium~les réduire en esclav8ge(2,
le proconsul n'a pas su pardonner ~ ce peuple,
qui avait toujours régnS
en maîtrë-
3ur ses voisins,
il constituait une entrave potentielle ~
l'i:npérialisme romain.
Il fallait
l'anéar.tir plut~t Ciue d'accepter sa
capi tu la t i on.
1) CESAR.
VIII.
44, 1.
2) M .RAMEAND.
l ' arm~e de C{. sar p€ndan t
la conc;u ~t ~ de la Gau l e~
l ' informot ü
hi8torique~ 1968~ pp. ll- 23~ p. 17.
--,....
~.,
",,,,,-..

-
91 -
Commentant le châti"lent d'U%sZlodunum,
L./\\. CON81lARS n8te que "si la
conquête des Gaules est pleine de ch~timents qui nous révoltent,
i l faut
bien en accuser les habitudes de guerre rO!'ll\\ine l'lus ~ue CFS/l.~. En ce qui
concerne le traitement d'VxeZZodunum.il
convient d'observer qu'il était
assez approrrié aux ~oeurs des Gaulcis: le~ ~roc~dés de terreur ~ployés
par CESAn,
raprellent ceux o0nt use VEnCINGETO~I~ au détut de la rÉvolte
(V l l, 4, 10 ) (1 )" •
Ces diff~rents exenples nous !!lontrent que T'lassacres, ventes, asservîssel!Jen
ne sont pas seulenent le lot deEi villes prisl:s d'assl\\ut,
et que les
r
/Y\\.L
tMS
ennenis qui capitulentysont toujours é~er~n(s. On ne seurait non plue
s'étonner de trouver chez POLYBE, un chapitre entier,
faisant
l'~lo~e
des bonmes assez prudents p~ur rrendre toutes les précautions possi~les
avant de s'abannonner entre les nains de l ' cnne'Yli(2). Mais ces pr~cf\\.utiC'ns
ne sauraient (tre des p-arnnties for~elles. Car le deditice est un enne~i
vaincu.
qui reconnaît l'av~ir ét6 selon les lois de la guerre. Il s'en
reoet & la volonté de l'imperator. Ceiui-ci t
son r!ré l'cuvait
l'accepter
en l'épargnant,
ou au contraire, l'asservir
ou le ~~ssacrer ~.LOmIS l'a
bien noté "tout dépend en sO"!r:le de l'huceur du vainqueur.
de la nàture des
senticents qu'il porte au v~incut de la ~rofondeur der. griefs qu'il nourrit
il son endroit. Quand ceux-ci l'enportent. la vièille rè~le est alors
appliquée sans nauvaise conscience(3).
1) L.A. CON~TANS, Guel'l'e dcse Gau~e8~
B.
l,et.~ 1964, !l.313-314 note nO 1.
Mais c " t a i t aussi une habitude de puer:e ro~aine. FLO~Uf nous appre~]
qu'au cours de ses ca!!:.pagnes en Thrace, ··A~CU3,le frt;re de LUCULLUS
"faisait tre.ncher les mains à des tribus entières :pour effr9.yer les autres"
III,
IV.7.
Ncus avons vu que fCIPIOH e.t
recours fi la "!lêne pra.tique contre
les habi tant s de Luti"l.
2) L'ach~en pr~conise un exa~en attentif du passG de l"l personne avec qui
on est a~en~ 2: traiter,
et recor.l!':1andc aux parties d'exir.;er des garanties
tor~elles telles que pres*ati~n de ser~ent et remise des ota~es: POL.,VIII,
36; cf.
é eel c!:'\\ e nt".{X • 9 .11 -12; la, 7.
3) R.LONIS. op.cit •• p.36.

- 92 -
CL:'J'ITRE DEUX
LL~ PROFITS Dt GUE!.~E : EIEi~S t11ATERIELS ET PRISOi~iHERS
Le mot praeda~ dans le vocabulaire militaire latin désignait
l'ensemble des
bénéfices que procurait la guerre.
Ceux-ci consistaient
en biens matériels et en ressources humaines.
Le mot "butin" qu'en
français
on fait
correspondre au terme latin, est un peu moins précis,
donc inadéquat.
Il ne recouvre pas tout ce qui
se trouve m~s en cause,
dans la mesure où i l n'évoque pas toujours, ni
forcément,
des bénéfi-
ces autres que matériels.
Aussi convient-il d'employer une expression
plus large telle que "profits
de guerre".
Rome, à l'image de toutes les
sociétés antiques,
avait incorporé le droit de pillage à son droit in-
ternational
; le fondement de ce droit étant que les biens, comme les
personnes des vaincus, appartiennent aux vainqueurs.
Il s'agira de
voir dans ce chapitre l'usage que les Romains firent de ce droit.
Nous
nous
interrogerons d'abord sur la signification du butin;
sa composi-
tion et enfin sa destination.
l
-
LES PROFITS DE GUERRE
: DROIT DE CONQUETE
: AVANTAGE
ECONOMIQUE INDIVIDUEL OU COLLECTIF
2
De même,
tout autant qu'au nombre des ennemis tués, la gloi-
re du vainqueur se mesure à l'abondance du butin matériel et humain,
qu'il s'est approprié.
C'est en général
dans les villes vaincues que
l'on se procurait l'essentiel des profits de guerre.
Nous avons déjà
vu que la recherche de butin, pouvait tempérer la haine du vaincu et
l'empêcher de continuer les massacres.
POLYBE et TITE LIVE, plus d'une
fois relatent des scènes de pillages consécutives à la conquête des
villes.
A l'origine, la collecte du butin,
semble être une entreprise
collective.
C'est ce qui
semble apparaître dans la description du sac
,~~
de Carthagène.
L'Acheen en profite pour nous informer sur la façon dont
les Romains organisaient le pillage dans
les villes dont ils s'empa-
C
raient
,>. "Pour effectuer l'opération, ils désignent tant8t quelques
-1} POL.,
X,
15 -
17
Diod.,
XXIV,
9,1.

-
93 -
hommes dans ch~que manipule, leur nombre étant fixé d1après l'impor-
tance de la ville-, tantôt des manipules entiers, mais jamais ils n'em-
ploient à cette besogne plus de la moitié de leurs effectifs.
Les au-
tres restent à leurs postes
. . . Tous les hommes envoyés au pillage rap-
portent leurs prises à leurs légions respectives, puis après avoir fait
vendre le butin,
les tribuns
distribuent des sommes égales à chacun sans
oublier ni les hommes qui
sont restés à leurs postes pour protéger les
autres,
n1 non plus ceux qui gardent leurs tentes, les malades ni ceux
qui ont été désignés pour exécuter telle ou telle tâche.
On sait que
personne ne détourne quoi que ce soit du butin et que tous observent 10
serment
(1)
qu'ils ont prononc[ au moment où ils se sont, pour la pre-
mière fois,
réunis dans un camp, avant d'entrer en campagne
. . .
L'atten-
te du butin ne s'accompagne parmi les troupes, d'aucune méfiance et,
comme la part de ceux qui s'en vont au pillage demeure la même, personne
ne quitte les rangs,
chose qui dans certaines armées, peut avoir des
effets néfastes".
Ce passage doit se lire dans la perspective d'une com-
paraison implicite entre les Grecs et les Romains.
POLYBE ne cache pas
son admiration pour une méthode qui,
tout en assurant à chacun un lot
1)
Il s'agit du second ser~ent qui, de plus, etait exigé du soldat lors-
qu'il était réellement incorporé au camp.
Le texte nous a été transmis
par AULU GELLE,
XVI,
4 " •.. Ni dans un rayon de
la 000 pas autour, tu n0
voler~s par artifice criminel, ni seul, ni avec d'autres, un objet va-
lant plus d'une pièce d'~rgent, par jour, et autre que lance, bois de
lane, bois,
fruit,
fourrage,
outre, soufflet,
flambeau.
si tu trouves
ou prends quelque chose qui n~ soit pas à toi et vaille plus d'une pièce
d'argent,
tu iras le porter ou le déclarer dans les trois jours
. . .
Ce
qu~ tu auras trouvé ou pris sans artifice criminel, tu le rendras à ce-
lui que tu croiras le propriétaire, afin d'agir conformément à la justi-
ce".
c~ serment est aussi attesté par POLYBE: VI, 33, 1. C'est le Bacr~
mentum. Sur la cérémonie de prestation cf., X, 39, 2-10. Sur les liens
qu'il établissait entre le consul et le soldat cf.
T.L. ,II,
32
; Cic.,
De off.;XI, 36. Par ce serment, le citoyen devenait soldat et avait le
droit de tuer sans se rendre coupable d'un nefas.
Cependant le serment
connaît une évolution au cours de notre période. Avec la réforme marien-
ne, le soldat prêtera serment pour toute la durée
de son engagement.
Le
serment sera valable pour tous les généraux.

-
94 -
équitable, préserve l'aroée victorituse du désordre et, partant, d'une
.
.
...
,
" f '
(1) R '
f
.
surpr~s~,
vo~re meme d une dt
alte.
econna~ssons toute o~s que, dan3
cet épisode qui appartient à la seconde guerre punique,
l'historien gr~~
nous
donne une image un peu trop parfaite du soldat romain, démentie
par bien des passages de POLYBE lui-même.
Jusqulau sortir de la deuxi~rr.(~
guerre punique,
la recherche du butin
était une entreprise collective
bien organisée, comme en térnoign~, outre le sac de Carthagène, celui de
Syracuse.
Elle semble viser en premier lieu un affaiblissement de l'en-
nemi
:
on mettait le feu aux greniers,
aux arsenaux après avoir emporté
l'armement utile.
A partir du second siècle,
i l apparaît
comme une né-
cessit~ plus individuelle que collective. Ce sont le1 généraux eux-mêmes
qui allaient
favoriser les actes de brigandage motivés par un secret
désir d'enrichissement.
En
189, Cn.
MANLIUS VULSO,
venu pour poursuivre la guerre
en Asie, trouve conclus,
les préliminaires de paix avec ANTIOCHOS III.
De sa propre autorité,
i l se
jette sur le Pisidiens et les Galates afip.
.
.
(2)
,
,
de f n~re du but~n.
En
13', CRASSUS proroge comme proconsul,
s
attarn~
à de fructueux pillages
: Intentior Attalioae praede quam belle .. En81,
Pà~1PEE,eDvoyé en Afrique pour réduire le Marianiste DOMITIUS, aurait été dans
l'incapacité d'empêcher ses soldats après le débarquement, de s'engager
dans un~ chasse au trésor, provoquée par une découverte 10rtuite dans le
les ruines
de Carthage.
Ctllc-ci aurait semble t - i l durée plusieurs
1}
cf.
P.Lucrey, o p . t . , p.
232.
La collecte du butin chez les Grecs,
nIellait pas
s~ns inconv&nients. Pour pallier à ces derniers, une r~­
glérnent~tion relative à toute acquisition de profits de guerre, fut él~­
borée pour certaines armées
grecques.
cf.p.230-232.
2} Sur Cn.
MANLIUS VULSO, TITE LIVE transmet deux traditions opposées.
Il dit d'une part
(XXXVII,
50)
que le sénat lui avait accordé des ren-
forts pour continuer la guerre
ailleurs
(XXXVIII,
12) que MANLIUS,
pour exciter ses soldats à la guerre,
leur fit
croire que les Galates
avaient combattu les Romains à Magnesie.
Du reste,
i l ne trouva pas ses
soldats plus dociles
à son commandement qu'il ne l'avait été lui-même
aux oràres du sénat.
Il leur avait prescrit de laisser le camp ennemi
et de poursuivre les
fuyards,
mais un détachement,
resté en arrière, pro
fite de l'absence des autres pour faire main basse sur le butin.
Le pa-
dounn rend les d~mobilisés de cette armée, responsables,de l'introduction du luxe ~
~~;'i _. Rome (XXXIX",6) •
~:'c'-:.,. _

-
95 -

,
.
( 1 )
jours,
sans
que POMPEE,
flt
autre
chose qu en rIre
.
DION CASSIUS aCCUS0 LUCULLUS de prolonger volontairement la
guerr0 contre MITHRIDATE après
la bataille de Tigranocerte, uniqueMent
.
.
(2)
A t
d
f "
.
...
pour contlnuer son plllage
.
u ant
e
alts
qUl
nous ont condults
a
nous
interroger sur cette importance qui
est accordée eu butin.
L'ex-
plication que nous
fournit
ln tradition est bien peu convaincante.Selon/~)
TITE LIVE, c'est parce qu'on "aurait plus de satisfaction et de plaisir à rapporter/:
. d
. , ...
' "
• .
,
. ( 3)
l
'1
L
enne~
e sa propre maln qu a recevClr dlX f~lS plus du bon plalslr d autruI
. ~
'
vérité est que lea campagnes de Macédoine et de Grèce avnient consid(rablement ell-
richi
soldats et généraux.
Ceux-ci
revinrent en
Italie avec
des riches-
ses
non négligeables.
Dès lors la Buerre,
grâce au butin,
apparut
à bon
nombre
de citoyens et d'alliés
comme un moyen rapide d'enrichissement i
individuel. Ainsi
progressivement,
allaient se constituer à partir du
second siècle,
une classe d'hommes
vivant essentiellement de la guerre.
Cette classe d'hommes
combat essentiellement pour le butin,
dont dépen-
dait, pour une
grande part,
le pain quotidien du troupier.
La réforme
marienne allait accélérèr cet
~tat de f~it. Les chefs des armées senti-
rent l~s avantages qu'ils tireraient de la nécessit~ de s'attacher le
troupier,
en lui
fac~litant la priRe du butin.
DION CA&SIUS relate,
co~rne un fait remarquable, la marche
de POMPEE vers
la Caspienne en 65.
Son exeraitus ne
s'était livré à au-
cune dépradation,
car les indigènes
fournissaient
gratuitement la tota-
l l·te..'" d
' t i l l
(~)
F'"
f
. . .
. .
c son ravl
a
emen~
.
requemment
les che
s
mllltalres
faIsalCL
miroiter aux
troupiers un butin immense comme récompense,
lorsque
1)
PLUT., Pompée.~ XI, 3 - 4.
2)
Dion Cassius,
XXXVI,
2)
3.
cf.
aUSSl
PLUT., LUC.~ XXIX, App. Mitlzr.~
86.
3)
T.L.,
V,
20, 28.
-,
-",-,,.,._,,,
---~---
4)
Dion CASSIUS, XXXVII,
3 - 6.

-
96 -
ceux-c1,
trouvaient la campacne trop pénible.
Cette mentalité romaine était bien connue des adversaires.
Lors
d~ la prise des villes, certcins, à l'image des Numantins, n'hési-
taier.t pas
à jeter leurs biens dans les fla~mes avant de se tuer. En
169, PERSEE,
se sentent menacé,
donna l'vrd~é
de noyer ses trésors dan~
les marécages près de PELLA,
d'enlever les
statues de DIDR, et de brû-
ler son arsenal(2).
Il faut tout
feire pour ne lui
offrir ni
armem0nt,
ni Lutin.
VERCINGETORIX est m~me al16 plus loin en recourant
à la tac-
tiqup de la
terre brûlée,
qui consistait à créer le vide économique
autour de lui
"Par tous les moyens,
disait-il,
on d0vra viser à ce but
interdire aux Romains le
fourrage et les
approvisionnements . . .
Il fau-
dra aussi incendier les villes
. . .
afin qu'elles n'offrent pas aux Ro-
mains l'occasion de se procurer des quentités de vivres et de faire
du
butin(3).
DION CASSIUS montre CESAR esquiv~nt le piège que les gens des
.
.
.
~ (4)
Monts Herm1n1ens lU1 ont tendu,
avec leur troupeau comme appat
.
Ces
faits
sont assez révélateurs et permettent de comprendre l'empressement
de certains chefs,
à assouvir au 1er siècle la soif de butin de leurs
soldats, lorsque pour une raison ou pour une autre,
ce butin ne pouvait
leur être livré.
Il est fréquent que le gé~éral lui substituât u~e som-
me équivalente d'argent en compensation(5).
Une armée anin&e par un tel
1)
Sell., Iug.~ LXVIII, 3 ME7ELLUS, pour ranimer le courage de ses sol-
d&ts
fatigués
par la longueur de l'étape et qui
refusaient de mar-
cht::r"
. . .
fit miroiter <":
leurs yeux un but~n g~n~reux". cf.
égale-
ment la campagne de CESAR en 58,
contre les Hel~ètes.
2)
T.L.
XLIV,
6, 2 ; 10, 3 ~ Diod. XXX, 11.
3)
César.,
BG,
VII,
14, 2 -
9.
4)
De l'activité de CESAR comme prope~eu~
d'Espagne,
nous
ne sommes
informés que par DION CASSIUS
( XXXVII,
52,
5)
PLUTARQUE, n'en souf-
fle mot.
-_.
5)
L'auteur du "bellum Aipicum" relate comment CATON le jeune fut
amen;:
à procéder à une telle substitution pour calmer les cavaliers de
SCIPION,
qui
s'étaient précipités à l'intérieur de la ville d 'Uti~l''''
prise d'assaut CESAR.,
B.
Afr.,
87, 6 - 7.
<~~~ ....'4-.,l-_~.>4 -<#......:~......
- "-'''.<.~'>'",,:"., - •• -~t~~~, "'.....
':","'f
v..t. _
."

-
97 -
désir ne pouvait être intéressée que par des campagnes prometteuses.
Cette recherche croissante du butin explique aussi le peu
de rctenué des légionnaire
d8vant la maison des dieux, lieux où la d~­
votion des
fidèles
avait accumulf des richessEs considérables.
L'on sait
déjà que de pareils actes ftaient
condamnfs par le droit des Anciens.
POLYBE est clair à ce sujet Il
ce qui
ne doit apporter aucune espèce
d'assistance à notre cause, n1 aucun affaiblissement à l'ennemi dans
les opfrations militaires,
c'est la destruction gratuite des temples
ainsi que des
statues et d~ tous les monuments du même genre, comment
.
"
, .
.
,(1)"
L
ne pas d1re que c est l
oeuvre d espr1t et de coeur 1nsense
.
es
exemplEs de violation de lieux de culte furent
innombrables au cours
d~
notré période.
CESAR lui-même est peint sous les traits d'un maître
pillard "In gaZZia f~n~ tcmplQque daum d0nis refertr. cxpiZavtt ..• unde
f
b
d
(2)11
f I ' "
' .
actum ut aura a un aret ...
Rares
urent
es ceremon1es exp1atol-
res pour réparer ces profanations des lieux de cuIté
; les Romains se
seraient au moins allégé ln conscience d'un sacrilège.
Or les
seules
qUl
nous
sont connues eurent lieu avant la fin dé la seconde guerre pu-
niqu~. Ce mépris pour les Giens des divinités témoigne bien du recul du
sentiment religieux engendre par les défaites de Cannes et de Trasimène
ainsi
que par le contact avec la Grèce et la Macédoine(3}.
Ce qui
compt0
désormais ce sont les profits individuels et collectifs que peut procu-
rer la guerre.
Peu importe que la demeure soit celle du dieu ou d'un
particulier, pourvu seulement qu'il y ait des trésors à emporter.
1)
L'idéal de l'historien réside dans le retour aux préceptes d'une
époque révolue,
caractérisCe par le respect de coutumes et lois de
guerre
V,
11, 3. cf. aussi: XIII, 3, 5 - 8.
2)
SUETONE,
Cesar~ 54, 2.
3)
cf.
J.~ayet,
Croyances et Rites dans Za Rome aAJique~ Paris, 1971,
p.
271
-
336.

-
98 -
II - LA COMfOSITION DU BUTIn
a)
Les bi~ns mat[riel
La part du butin que constituaient les biens matériels
avaient une importance vitale pour les armées antiques, particulièremcn1
pour l'armée romaine.
Sa survie dépendait en grande partie, outre des
.
l '
, ( 1 )
1
'
1
1
tr1buts
eves en pays conqu1s
,
et
e remboursement eventue
p~r
èS
vaincus des
frais
de guerre,
des produits du pillage.
Or c'est dans les
vilJes que les Romains se procuraient le butin le plus riche.
SUETONE
note que
"Quand CESAR d(truisit des villes,
ce fut le plus souvent pour
f
·
d '
,
'11
(2)
C
' d
' t
' t
. ,
a1rc
u but1n que par represa1
es
.
e but1n
u reste e a1
var1e
et pouvait être utilisé à des fins diverses. Ainsi en 210, la prise de
Carthagène permit à SCIPIOIJ d'eugmenter sa flotte de "huit navires" et
son artillerie,
d'un important matériel de guerre" cent vingt catapult~s
de la plus grande taille,
deux cents quatre-vingt une petites, vingt
trois balistes
cinquante deux petites. et d'un nocbre i~portant de
scorpions grands et petits,
diarmes offensives et défensives
.•• "Outre
ces armes,
on apporta au g~n{;ral en chef "une grandt:: quantité d'or,
presqu~ toutes d'une livre
dix huit mille livres en ~rgent travaillé
et monnayé ainsi qu'un grand nombre d'ustensiles d'argent" TITE LIVE
ajoute qu'on trouva aussi quar~nte mille boisse~ux de b16 et deux cent
soixante dix n:.ille d'orge.
"Scixante trois navires de charge furent pris
de force dans le port,
certains avec leur cargaison:
blé, armes,
euivrc
et fer,
alfa et autre mati2riel naval propre à construire une flotte(3).t:
Tout cet ensemble pernettait non seulenent un renforcement
considGrable de l'armement, muis aussi
offrait à l'armée de la nourri-
ture pour toute la durée de la campagne.
Ces biens matériels se compo-
saient aussi de bétail et d'autres biens mobiliers divers.
Les cnmpngnc~
1)
SCIPION en Espagne laissa Ù I~DIBILIS et MAIWO.S leva ""royaumes (,t
se contenta de leur imposer un tribut de guerre qui lui servit à payer
ses troupes cf.
: T.L., XXVIII,
33.
En 68, la Gordyène,
et la Sophène,
en Asie pourvurent, sans gémir,
à toutes les réquisitionsde LUCULLUS:
PLUT., Luc.~ XXIX.
2) SUETONE, ibid.~ LIV~2.
3) T.L. XXVI.
3,
5 - 9.

1
1
,
-
99 -
1
de liquidation de la grande révolte de la Gau~
en 51,
fournirent
en
1
"
b"
b ' l '
(1)
abondcnce
: cheptel,
numeralre
et
lens mo l
lers
.
Mais d'ordinaire,
ce qu'un g~n~rnl en chef attendait surtout
d'une campagne,
c'était un butin immédiatement disponible:
tel que àc
l'argent ou des métaux précieux.
Ainsi
on r~fla en 211 à Capoue, repri-
se de haute l u t t e :
2070 livres
d'or et 31
700 livres d'argent(2).
Le
pillnge de Tarente en 209 produisit 83 000 livres d'or,
sans compter
un
monceau d'crg~nt et le vente de 10 OûO escl~ves.
En orient, au tri~re­
phe de T.Q. FLAMIiHNUS
sur PHILIPPE V,
(;n
194,
figurèrent
3113 livrés
d'or,
h3 210 d'argent(3)
et h celui de M.
ACILIUS GLABRIO sur l'Etolie
en 190 3 000 livres d'argent
la 300 tetradrachmes attiques, 249 000 Cis-'
tophores
(tetradrachmes pergnmeniens).
Le triomphe de SCIPION l'Asiati-
que sur ANTIOCHOS en 198, rapporta 14 000 pièces d'or,
545 000 tetra-
drachmes,
1 023 livres d'urgent en lingots.
Celui
de M.
FULVIUS,
sur
les Etoliens en
187,
12 422 pièces d ' o r ;
818 000 tetradrachmes,
243
livr0s
d'or,
8 000 livres d'crgent.
Celui de M.
VULSO sur les Galates
la mame annfe,
16 320 pi~ces d'or, 377 000 tetradrachues.
2 103 livres
d'or,
220 000 d'argent.
En
167. L.
ANICIUS GALLUS,
trouva le moyen
1)
SUETONE,
XXVI,
5
; B.G.,
VII, 89,
5.
Cesar disait que lors de la
prise d'Avaricuc,
les
Ifgions considérèrent comme leur affaire et
leur devoir de venger le massacre des
~uites Romani, tombés quel-
ques mois plutôt à CeLabu~ sous les coups des Carnutes (B.G. ,VIII,
3 • 1 , 28,
4 . Mais cette volontf se combine avec une autre celle de faire
du
butin,
cf.
aussi l'hypocrite mécontentement des soldats de SYLLA,
lors de la paix de Dardo.Ilos.
2)
T. L.,
XXV l,
40.
3)
Ce triomphe dura trois
jours.
Le premier,
on transporta les armures
les armes offensives,
les statues de bronze et de marbre pour la p11t·
part appartenant à Philipp0
; le second jour,
les couronnes d'or
offertes par les cités.
Il y en avait
114.
Vinrent ensuite les pri-
sonniers.
cf.
T.L.
XXXIV,
52,
4-12.

-
100 -
d'enlever des bourgades d'Illyrie:
27 000 livres d'or,
79 000 livres
d'arg~nt, 13 000 deniers
120 000 victoriats,
PAUL EMILE tira de sn
praeda macédonienne, non s~ul~ment des récompenses pour ses soldats, ùes
dons incalculables aux sanctunirts de la ville, Dais un cadeau
à
l'aviarium de 300 000 Sesterc~s(1).
Nous constatons un net accroissement je ses richesses accu-
mulées et auxquelles viennent s'ajouter les nouveaux trésors d'Asie,
acquis par la force
des armes.
LUCULLUS faisait partir à Rome~ après
chaque reddition de ville et chaque bataille.
des mulets charg6s d'or~
d'crGcnt et d'oeuvres
d'ort(2).
POMPEE,
quant à lui,
fit main bnsse
sur
les iDmcnses trésors de MITHRIDATE.
A Talau~a,
i l trouv
ses collections
merveilleuses:
2 000 tass~s d'Onys incrust€es
d'or, un nombre si
immen-
se de
fioles,
de vases,
de l i t s , de sièges,
de cuirasses dorées et or-
nées
de pierreries, qu'il f~llut un Dois pour en faire l'inventaire
SUETONE note que CESAR regorgea d'or,
grâce au fabuleux butin qu'il
avai t
reti ré des s anct uai re s et de s temple s
gaulai s
In ga llia fana te:"';
plaque deum donis refert expil~vit ... unde factum ut aura abundaret(1).
Sans doute l'administration de l'empire,
l'entretien d'armées nombreu-
ses inposcn~ aux finances des charges de plus en plus lourdes.
Car l'e-
tat entretient aussi des
f10tt~s, des machines, il doit aussi réunir
des approvisionnements,
des ùêtes et des
fournitures
diverses.
Mais lc~
1)
Sur ces
faits
cf.
le tableau page118 concernant la praeda de PAUL
EMILE,
les chiffr ~s sont div- rgents dons PLUT., Paul Emile~XXXII et
suiv., et T.L., XLV,
40,
1.
[gaIement M.
CRAWFORD.
War and finance~
J.R.S.,
1964 p.
29-32.
2)
PLUT., Pomp.~ 4b~ App. Mithr.~ llb-117.POMPéE dut plusieurs fois,
ùifférer son triomphe pour Gonner aux trésors conquis le temps d'ar-
river.
En sept.
60, tout fut prêt.
Il affirmait avoir fait porter
le revenu annuel de le R~publique de 50 à 80 Millions de drachmes.
Outre les m~lets charg~s d'argent, il y avait les chars portant cha-
cun des objets de grande valeur dont i l s'était emparé.
Il y avait
des plantes tropicales
comme l'ébénier.
3)
SUETONE, ibid.~ 54~ 2.
..
~
-~
. ;-~

-
101
-
profits
de
guerre augmentèr~nt dans une proportion considérable la for-
tune,
et,
par conséquent,
les moyens d'action de Rome.
L'état fut même
n mE'sure de
dispenser certains
citoyens de l'impôt.
Tandis que les pro-
vincl~s, surtout celles d'orient, s'appauvrissaient. Rome amassait l'or
et l'argent de tout le bassin de la méditérranée dont elle finit
par
devenir la plus grande place financière.
La guerre romaine tient donc
le plus
grand compte
du butin
dont une partie pouvait être distribuée officiellement aux soldats sur
plac,~, l~ reste versé au trésor. A Ce butin matériel divers s'ajoutait
les bienE humains.
b)
LES ~RISES HUMAINES
Les prises humaines
étaient constituées par les prisonniers
de guerre.
Le prisonnier de guerre{belli iure capta)
est un soldat pris
par l'ennemi après une bataille.
Il devient ainsi
la propriété de ceux
qui l'ont pris.
Rien n'empêche
ces derniers d'user de lui
comme bon le~r
semble~ car il est ravalé à l'état de butin. Le pouvoir de Rom~ de dis-
poser de la personne des vainc~s, s'est concrétisé de différentes muni~­
res
:
Dans le meilleur des
cas
les prisonniers étaient libérés, parfois
on les échangeait,
ou on les rendait contre une
ranço~ tantôt ils étaie~t
réduits
cn esclavag~ tantôt mis en vente.
Avant de proc éd.:r à l ' analy se de s trai t, men t s que le s Romain s
rés~rvaient à leurs ennemis capturés, une première constation s'impos,~.
Notre pério~e ne r.ous fourait pas d'exemples d'exécution de sang froid
de prisor.IÛerscapturés.
Cette rareté de massacres ne doit pas nous in-
duire en erreur,
au point d'accepter que c'est la simple logique qui
voudrait qu'on leur laissât la vie sauve.
Su~ le traitement des prisonniers de gue:-re cf. l'excellente étuJ~
d0
P.
DUCREY,
le traitement des prisonniers de guerre dans
la Grèce
Antique,
des origines à la conquête romaine
Paris,
Ed., De Broc-
J
curd,
1968, p.
51-105.

-
102 -
La vérité est qu~ HOMe s'est très vit~ rendue compte qu'ellc
avait intérêt à asservir se~ adversaires malheureux, plutôt qu'à les
massacrer.
La v i c ' i r e est un moyen aussi
d'acquérir,
à bon compte,
une
main d'oeuvre abo~Jante. Les vaincus, ainsi épargnfs, serviraient ult[-
rieurcment ~ d'nut~es fins.
:15 pouvaient être
échangés contre une rançon ou contr~ un
prisonnier adverse.
Notons
toutefois que Rome a
rarement procédé à des
échanges de prison~iers de guerre. Aux termes du traité de la première
guerre punique,
Carthage r~ndit la liberté aux prisonniers de guerre
italiques.
Les Ronnins,
de
leur côté,
rendirent clors,
sans
rançon,
léS
. ,
.
, .
.
( 1)
prlsonnlcrs punlques qu Ils
gardalent encore.
~u cours de la seconde Euerre punique également, on proc~~~
en 216~ après Trp~i:'~~c, à des [changes de prisonniers (hom~e contre
homne).
Voilà ce qu'en dit TITE LIVE "Pour l'échange de prisonniers, v~
qu'on avait
f~it ~insi eurant ln première punique, les deux g€néraux
romnin et carthaginois avaient convenu que
la partie qui
en recevrait
plus qu'elle n'en donnerait, paierait deux livres et demi
par soldat.
Le Rom~in en ayant :'eçu deux cent quarante sept, de plus que le C'lrtha-
ginois~ et la so~ne due pou~ eux, bien que le sénat (FABIUS ne l'ayant
pas cor.sulté)
eut dfbattu de
la chose,
ayant été ordonnancée trop tard,
le dictateur envoya son fils
QUIIITUS a Rome vendre la propriétG qu'nvni
respectfE
l'e~~c~i, et acquitta cet engagenent public sur sa fortune
.
"
(2)
"
prlv~e
1)
POL., l ,
83. L'on sai"'.:. aussi qu'en 250, après leur d6faitc: sous les
murs
de Pale~je, les Carthasinois avaient adjoint à leur ambassade
envoyée
à Rome, M. ATILIUS REGULUS, leur prisonnier. Celui-ci, sous
serment,
devait négocier auprès
de
se~ compatriotes, le rachat de
ces
derniers
au~ m~ins des Carthaginois. REGULUS refusera d'être r~'
cheté proposant, pour le rachat,
les hommes
forts
et
jeunes.
L'on
~ait que le Sénat refusa un pareil marché puisque le prisonnjpr
~ourn~ co~~~ escln7c à Carthage cf.Diod .• XXIV,
12 et
Cic., De off ..
l ,
XIl:I,
39.
2)
T.L.
XXII,23,6,1.
En 216,
pour
faire
face
au danger punique QUInTUS
FABIUS ~hXIMUS, surnommé le cunctator~ fut nomm€
dictateur.
c'est
lui qui
n6~oci~ avec HANNIBAL, l'~change des prisonniers.

1
Il
1.
-
10 ~
-
1
Nous savons qu'après la déroute de Cannes, les C~rthaginoi~
1 proposèrent aux Romains un échange de prisonniers, mais cette fois con-
,
. ,
.
. ,
..."
30
.
( 1)
.
tre une rançon.
Ce 11 e-cJ.
~t'::'lt fJ.xL
a
0 denlers
au quadrlg~ P01\\:
les far.tassins,
cinq cents pour les cavaliers et cent pour les escla-
( 2 ) ("
.
.
.
ves
'.D1X prlsonnJ.ers, avec comee seule garantle leur bonne foi,
fu-
,
rènt envoyés à Rome pour n~gocier leur rachat. Mais le Sénat refusn le
march~ proposé. La seconde guerre punique finie, SCIPION somma HANNIBA~~
de rendre,
sans contre-partie, les prisonniers de guerre romains.
L'oc-
1
cident est le seul domaine d'intervention des légio~naires où RomE pra-
d
" h
.
.
.
(3)
o
tlqua
cs ec anges ne prJ.sonnlars
1)
Le Denier est une pièce d'argent valant dix "as triental",
jusqu'en
217, puis
16 as unaia~is. Le denier porte le plus souvent au revers
non le quadrige de Jupiter mais les diosaures.cf.
H.
ZEHNACKER, Mo-·
neta. Reèherahes sur l'organisation et l'art des ~missions mon~-_
tairee de la r'publique romaine~Rome, 1973, p.588, Planche XIV ;7E)
et 798, planche XX, nO 935.
2)
T.L., XXII,52, 3. Au Sfno.t, si certains avaient proposé le rachat
des prisonniers au frais du trésor, d'autres s'y opposèrent, ,ne vou
l~nt pas offrir à HANNIBAL l'argent dont il avait besoin. Du restr:
les dix prisonniers refusèrent de retourner à Carthage. Pour avoir
parjure
; ils furent relégués "chacun sa vie dure.nt au nombre des
éraires .... "Cic., De off, I, XIII,
40. Un éraire est un citoyen so~~­
mlS à une captation
sans droit de vote, n'ftant las inscrit dnnf
une tribu.
AULU GELLE,IV,12.
Le nombre de prisonniers romains ~ux
llioins des Carthaginois devait être impressionnant.
3)
Les Carthaginois en avaient d(j~ vendu un nombre important en Crète. Rome dut
dfpêcher une mission dans l'île pour réclamer leur libération. Mais seuls les
Gortyniens acceptèrent de restituer les homoes qu'ils avaient en leur possessic..:
et qui n'étaient pas moins de quatre mille(T.L. XXXVII, 60, 3-5. En 194 aussi
FI~\\MININUS DEMANDA aux Grecs de rechercher et de délivrer les prisonniers rdœair
d 'HAI:NIBAL, qui servaient encore comme esclaves en Grèce .Les achéens fixèrent ri
cinq mines par homme l'inde~~~nit; que perçurent les détenteurs d'esclaves et dé-
pensèrent pour toute l'opGration 100 talents.Cf.,T.L.XXXIV,50,3-6,Diod, XXVIII,
13 Selon PLUTARQUE, Flam., 13,6-8. Leur nombre s'élevait à 1 200J. GAGE,Les ali·
entèles triomphales de la R~publique ramaine~Rev. Hist.,217,1957,pp 10-11 indi~

-
- 104 -
Rome ne conn~ît pas de défaite militaire qui l'eût contrain
te à user de tels procédés. A partir de 200 "aucun état, quelle que fût
se puissance,
n'était plus en mesure de résister aux exigences d'une
. .
(1)"
D""
.
.
.
Rome vlctorleuse
.
esorm~lS Rome dlcte aux V6lncus
ses condltions.
PHILIPPE V,
les Etoliens, ANTIOCHOS III,
furent
sommés de livrer sans
contre partie leurs prisonniers,
les transfuges et même les ennemis d0
, . l '
.
.
(2)
.
Rome qu 1
s
avalent 6ccuelllls
. Rome ne
se prononcera pas sur les prl
sonnicrs qu'elle
détenait.
Il va sans dire que leur nombre était consi-
dérabl~. FLAMININUS avait fait cinq mille prisonniers à CynoscePhales(3
.
.
...
"'.
(4)
l '
"'
trolS ~llle quatre cents 8 Magncsle
.
Les guerres
d occldent d~ 201
r
154 fournirent aussi des millicrs de prisonniers(5) tout conme les opC-
.
'"
S
.
(6) E
d
d
l
ratlons menees en
ardalgne.
n atten ant
e nous pencher sur
eur
sort définitif,
voyons comment ils étaient traités.
que les citoyens libérés dans ces circonstances constituèrent pour
FLAMININUS une clientèle "de choix",
dévouée corps et âme il son libéra-
teur.
A la betaille de Zama,
les Romcins
firent
vingt mille prisonniers
:T.L.
XXX,
35 -36. Mais SCIPION ne dit pas un mot en ce qui les concerne.
1)
P.
DUCREY,
op.
c i t . , p.
270.
2)
Senatus consulte de
197/6, cf. également POL. XVIII, 44, T.L., XXII
30. Paix entre Rome et l'Etolie, cf.
POL.,
XXI,
32, 5-6 T.L.
XXVIII
1 1 , ~ •
Paix d'ApaméePOL., XXI,
4é:,
10 ; T.L., XXXVIII, 38,7.
3)
POL.,
XVIII,
4-8 ; T.L., XXIII,
11.
4)
T.L.,
XXXVIII,
44.
5)
En
196 réduction des Gaulois Cisalpins par T.S. LONGUS et L.VALERIL
FLACCUS
: T.L., XXXIV,
46.
6)
T.L.)
XLI,
28.
En
101,
lors de la pacification de la Gaule,
après
les deux batailles:
d'Aix contre les Teutons et contrt les Cimbrcf
à Verceil, les soldats de MARIUS rapportèrent en Italie, plus de
150 000 esclaves aRaSE, v,
16,21.
~ ~ :
n"iJll·
_ _~
, , _ . _
---
~.

1
-
~
-
105
-
r
Nos
sources sont sauvent muettes à ce
sujet,
à l'exceptio~
r
des prisonniers jouissant d'unè certaine notoriété.
Mais en règle géné-
ral.:,
à l'image aussi de toutes les sociCtés antiques, nous pouvons af-
firmer qu'un traitement s~vère leur était infligé.
Ils étaient tenus
r
aux fers
et souvent dévêtus,
pr€cautions
normales pour éviter les ten-
tatives de
fuite,
ou certaines surprises de leur part.
L'on sait aussi
que le ~acédonien PERSEE, après avoir orné avec ses fils,
le triomphe ~
son vei~queur, fut
jeté, comme un traître dans
une prison hideuse.
S'il
en fut tiré par PAUL EMILE,
ce
fut
pour finir misércblcment ses jours
à Alba Fucentis où il mourut, dit-on, volontairement de faim( 1). Fn 121
DOMITIUS, après
sa victoire sur les Avernes,
captura leur roi BITIUT.
L~
malheureux figura enchainL,
dans
la pompe tricmphale de FABIUS.
Il finit
lui aussi
ses
jours avec son fils
à ALBA FUCUS(2).
En
105,
JUGURTHA "est
livré enchaîné à Sulla
. . .
"Lui et ses
fils
furent
trainés derrière l~
char de leur vainqueur
: In triumpho C.
Marii ductus ante currum iU8
.
th
d
d
f . l'
( 3)
. . . . .
.
Jugur
a cum
uo us
~~~us
. Alors que les flls
du rOl
etalent Inter-
nés en Italie, JUGURTHA,
lui-mê~e fut étranglé dans le TuZZianum. En
51
apr~s la prise d'Uxellodunum, CESAR note que le roi DRAPPES fait
prisonnier"
. . .
s'abstint de manger pendant quelques
jours et mourut
de faim".
JustifiA.nt l'acte du mort,César écrit que: C'€st
"soit parce
qu'il ne put supporter l'hu~iliation d'être dans les fers,
soit parce
"1
-
,
.
(4)"
J ' f '
.
.
qu l
redoutat les tourments d un cruel suppllce
.
ustl
lcatlon b~en
1)
POL.,
XXXVI,
.10,3
;
T.L.,
XLV,
42,
4
; PLUT., AEm.~
37,3. Selon
VCo 1 ère 1-1 a x i me
(V, 1 , 1)
l e s é n a t
1 u i
fit
des
fun é rai Il e s di g n e s d' u L
roi.
Son fils
cadet e~gn~ sa vie en s'adonnant à l'art et en eX8r-
çant une modeste chnrge àans la chancellerie romalne.
2)
Val. Max.,
IX,
6, 3 ; Florus,
, 37, 5.
3)
SalI.,
Iug. ,CXIII,
7. Salluste ne dit pas un mot sur le sort qui
sera réservé à JUGUTHA,
~t à son royaume. La disparition du princi-
pal personnage de son drame marque la fin
de celui-ci.
C'est là le
principal défaut de s~ conception de l'histoire. C'est l'individu
qui l'intéresse et su philosophie est un peu courte.
La citation
r
tirée de T.L., Epit.,
LXVII,
cf.
également PLUT., Marius,
12.
L'un
des
fils
interné à Venouse Oxyntas, reparaîtra dans le B.C.
voir
;.pp l EN,
B C • , l ,
42,
1 88 .
4) CESAR, B. G., VII l, 44) 2.
:~, .
t
»"'

-
106 -
peu convcincantes,
car le roi
avait du être privt:
Ù~ nourriture en re-
présailles,
tout comme
son peuple, parce qu'il
fut
considéré comme le
principal instigateur de la rCvolte des Atuatuques.
Ces exemples tlOntr.0nt qu'en règle générale,Rome fut peu sou'·
cieuse d'assurer aux prisonniers un traitement décent.
S'ils etaient
achemin~s ~ ROME, c'était surtout pour donner plus d'éclat au triomphe
de l~ur vainqueur.
Ce
fait passé,
s ' i l s n'~taient pas froidement ass~s­
sinés,
ils
finissaient
leurs
jours en prison.
D'autres prisonniers de guerre étaient nUSSl
gardés,
car
ils étaient de précieuses sources de renseignements.
Nul doute que ceux'·
ci leur fussent
extorqués V3r la violence.
Ainsi en 51, CESAR pour en
savoir plus sur la révolte et le soulèvement des Bellovaques,
"envoie
dans toutes les
directions
des détachements de cavaJerie pour faire
quel

• • •
"
. ( 1 )
ques ,rlsonnlers qUl pourront lUl
apprendre les desselns de
l
enneml
La même année,
c'est grâce aux prisonniers d'Uxellodunum que CESAR,
:-~
renseigna sur les mouvements des troupes de DRAPPES.
Outre ces cas p~
ticuliers,
i l arrivait sue des prisonniers de guerre fussent l'objet de
mesure de
lib~ration. César a très vite comprlS les avantages qu'il pou-
vait tirer d'une telle philanthropie en Gaule.
En 52,
i l eut l'habile'·
té d'épargner les Héduens après qu'il eût déjoué le complot qu'ils tr~­
maient contre sa personne.
Il "les arrête,
les empêche d'avancer,
m~is
fait
d~fense g t n6rale de tuer personne(2)".
Ensuite i l envûya chez eux des messagers pour leur faire
savoir que "par g~néreuse flJ.vcur,
i l avait
laiss€
la vie à d(~s hom:-aes
que le droit de la guerre lui eût permis de fairt périr".
Cette libéra-
tion n'était pas désintércsséL
: par cette générosité calculée CESAR,
espérait en retour regagner la confiance de
ces peuples.
Il arrivait
que les prisonniers de guerre,
en mesure de se racheter,
soient libérés,
1)
Cesar, B.G.~ VIII, 1, 1-
2)
id.~ ibid.~ VII, 40, 4.

-
107 -
moyennant
le paiement de leur rachat.
Ainsi
les priscnniers
d€
LUCULLU.
qui pouvaient se racheter,
étaient laissés en liberté
;
ceux qui
ne
pouvaient
le
faire,
~taient vendus i
des marchands qui
suivaient l'ar-
,
(1)
mec
.
Notre periode nt
nous
fournit pas d'exemples de libération
inconditionnelle.
Le sort qui
fut
réservé aux prisonniers de
guerre
fut
en gfnéral
l'asserviseeoc~t. Les victoires successives furent sou-
vent pour Rome un ooyeu d'ocqu6rir à bon compte une main d'oeuvre abcn'
d&ntç.
Elle Il aussi,
trè~ vite, compris que les prisonniers de guerre
rc~rés~ntaient une source d~ profits divers. Ils pouvaient être des
denrG~s négociables, une valeur d'0change ou simplement des travail-
leurs
forcfs.
L'opinion publiqu€
romaine,
se souci~ fort peu de leur
sort et de
leur traitement.
Ln seule
fois
qu'elle
s'y int~ressa, ce n~
,.
.
( 2 )
fut
que par demagog1e
.
1} Â}Jp., l1ithl' • .t
78, PLUT., Luc.,
14.
Ces
faits
eurent lieu au cours
de J.~ guerre
d~ Pont. Dans le camp romain, un prisonnier finit par
ne
coûter que quatre drachDcs.
2}
En 65. dans le feu des luttes entre populal'es et optimates,
les tr:
buns
s'en prirent à un ancien général de LUCULLUS:
COTTA,
le des-
tructeur d'Héraclee.
Ils menacèrent de porter plainte contre lui et
exigèrent la libération des prisonniers d'Héraclée.
Ils obtinrent
gain
de cause non sans avoir recouru à des procédCs
dfmagogiques.
Qu~n
ln. loi qui
libérait les prisonniers fut prCsentée aux COI:l1CeS,
ils al-
lèrent chercher dans
les maisons,
les carrefours.
les
échoppes des mnr'
chands d'esclaves,
tous les prisonniers
d'Héraclee qu'ils purent trou-
ver,
les habillèrent en deuil et les
firent venir au devant de
l'asscm-
blCe
, où l'un d'eux un certain TRASIMEDE d'Heraclée s'adressa au pu-
blic qui
fut
très
indigné.

- 108 -
La vente et l'arrivée des
prisonniers de
guerre étaient
telles qu'on dut instituer ~ Rome, la vigesima libertatis i
la premia-
r e t a xe
6 u r l ' é man c i pat ion
d':;
e s c 1 a v e s e t des p ris 0 n nie r s
de gue r r e ,
qui
alimentait
l'aerarium sanctius(1). Ainsi les prises humaines per-
mirent à la fois
des pr0fits
individuels et collectifs.
Enfin notons
qu'à Rome,
le principe de c10~ence envers les prisonniers de guerre
ne fut pas absolu.
Il
~tait"
surtout
fonction
des avantages
ou in-
convénients que le
g&néral victorieux pouvait tirer de la situation.
Aussi Rome,
suivant les
circonstances,
tire t-~lle, div~rs avantages
d~ ces détenus de guerre :militaires, politiques, économiques.
III -
LA REPARTITION DES PROFITS DE GUERRE
Il semble difficile pour quelque armée
que ce soit de don-
ner une idée exacte de l'exploitation de
la praeda.
Nous remarquons
qu'au fil
des guerres,
le butin individuel prenait de plus en plus
d'importance:
TITE LIVE signale qu'au début de
la République,
le bu-
tin était partagé équitablement entre les soldats ou simplement abo.n-
d
..
"
.(2)
M'
l '
. . .
. . .
d
..
onne a
ceUX-C1
.
a1S
Ocu1te des beso1ns
f1nanclers
u nouvel etat
se faisant
de plus en plus
sentir,
l ' é t a t naissant "finit par se r6ser-
ver une partie plus ou moins
forte
ou la totalité même du butin vendu
,)
T.L., XXVIII,
46.
partage l'~glementé du butin
...
apres
la prise
de
Fidenes en 421
L. ,
IV,
34,4.
" .. . on donna un prisonnier "a chaque centurion, par V01e de tirag~
au sort,
et deux à ceux qui
s'ftaient
distingu~s, les autres furent
vendus
à l'encan" abandon aux soldats en 418, après le succès face
aux Eques
et Labicans
: T.L.,
IV,
47,4 " ... le camp pris et pillé,
le
dictateur abandonna. le butin aux sold~ts. Enfin butin l'éservé
au trésor: T.L., IV, 49, 9, 53, 10.

-
109 -
aux enchères,
d'où la création dt questeurs rattachés aux armées(l).
A l'origine,
une partie des profits de
guerre pouvait être officielle-
ment di stri buée
sur pInce aux soldats,
le reste v rsé au trésor. Au cours de
notre période,
survinrent ùes
changements i~portants que nous essaie-
rons
d'appréhender à travers
la r~partition du butin qui, cela va sans
dire,
ne se
faisait pas sans problèmes.
a)
LA PART DU GENERAL.
c'est
au général victorieux et non pas aux soldats que reve-
nait l'ensemble des prises de guerre.
Il pouvait,
selon les circons-
tance;.,o~ bien tout réserver nu trésor ou bien l'abandonner aux soldats,
ou tout simplement faire une répartition équitable.
En
167, le vainqucu)
de PERSEE rapporta à Rome des sommes jusqu'à lors so.ns équivalent.
L'or
et l'argent seulement reprfsentaient cent vingt millions de sesterces.
C'est 6râce à ce d~pôt que ln levée du tributum fut suspendu.
Il se
montra très chiche
à l'~gard des soldats qui pretendirent même de re-
tour Q Rome, s'opposer au vote de sen triomphe. A en croire TITE LIVE,
i l avait trop rigoureusement exigé l'accomplissement des devoirs mili-
1)
Le livre V de l'historien Padouan met en scène les hésitations du
S[nat à propos du pillage de Veies, ln maladresse ou la rigueur de
CAMILLE réservant à l ' é t a t ,
en plus des trésors des temples,
au
moins
la vente des prisonniers.
Il paya d'un exil cette répartition
embigüe àe la praeda Veientana
: T.L., V, 20, 1-10
; 21,23,25,
32,
8. Un passage du livre IV mentionne, un tribun militaire, un
certain POSTIMIUS REGILLENSIS,
"coupable aux yeux des soldats exas-
péros d'avoir frustré
sn troupe des profits du pillage immédiatement
après les lui avoir promis" T.L.
IV,49 -
50.
Il fut
lapid~ snns
pitié par ses propres hommes.
Cf.
également J.
GAGE, Op.
cit.,p.24.
t')',!!:'''' '--
~.

-
110 -
taires,
imposé aux soldats plus de fatigues
qu'il ne
fallai~ et s'ftait
montré avare en récompense(l).
L'exemple de VULSO est
à l'opposé de
celui de PAULIUS.
A l'occasion de son triomphe en
187, celui-ci,
c~n­
sacra son butin à rembourser aux citoyens une partie de l'impôt pré-
cédemment vers~ par eux(2). Si LUCULLUS a pu faire partir à Rome, après
chûque bataille et reddition, des mulets chargés d'or,
c'est parce
qu'il se montra fort avare en r~compense. Son armée insatisfaite se
plaign~it de ce que le g[néral pressé, laissât à peine le temps de s~i­
sir quelque chose, et acceptât tro~ vite l~ reddition des villes avec
la promesse de respecter la propriété(3).
Dans le bellum gallicum.CESAF:
parle souvent du butin comme d'une chose tout à fait naturelle dont i l
est le propriéte.ire.
"oppidum diripit atque incendit; praedam militibus
d
t
.
l '
' t
d '
B ' t '
f'
. (4)
ona ~ exerc~tum
~ger~m
ra uc~t atque
~ ur~gum
~ne8 perven~t
.
Après
la reddition de VERCINGETORIX,
i l met" à part les prisonniers
héduens et avernes, pensant se servir d'eux pour regagner ces peuples
' l '
'b
1
...
'
d
. . . . '
,
-
(5)
et l
dlstrl
ue
es autres a tltre
e butln a ralson d un par tete
.
1)
T.L., XLV,
37.
2)
idem,
XXXIX,
7,
1 1 •
3)
PLUT. ,
Luc.
37 Sur les plaintes de ses soldats id.ibid. , 14.
4 )
César, B. G. , VII,
11, 9.
5 )
Cés (c.r,
B. G. , VII,
89, 5.

-
111
-
Dans un autre passag~ du livre huit, il promet à ses soldats comme gra-
tificaticn tenant lieu de butin,
deux cents
sesterces par tête, mille
.
( 1 ) "
pour les centurlons

1

Au second siècle encore,
le contrôle ùes
sommes tirées de
la praeda appartenait au Sfnnt.
Mais
très
souvent ùes
conflits appa-
raissaient entre les suggestions de
certains
chefs militaires et l'as--
semblée,
par exemple, en
187, à propos de la destination des soomes
ramences par MANLIUS VULSO(2).
Dans
le
jeu complexe des
rapports poli··
tiques entre les imperatorec,les soldats,
les
citoyens électeurs et
les merebres de
la classe politique,
le problème des profits
de guerre
et sa destination devinrent dès le second siècle, des questions essen-
tielles
comme en témoigne le dfbat autour du triomphe de PAUL EMILE
en 167(3).
Les
ressources que procuraient la guerre ne pouvaient qu'~c­
croître la puissance financière et politique des bén~ficicires. PLU-
TARQUE n'écrivait-t-il pas à propos de CESAR que son jeu consistait :~
soumettre les ennemis avec les armes de
ses concitoyens pour gagner
ensuite ces derniers et les assujettir avec
l'argent pris aux enne-
.
(4)
.
.
.
.
mls
• Sl neus
comprenons blen cet auteur,
cela voudrfllt dlre que
le
butin rapporté
de Gaule~ servait surtout à accroître la puissance po-
litique de CESAR,
notamDe~t en lui attirant une clientèle aussi dévouG,
qu'intéressée par ces largesses.
1)
César,
B. G. ,
VIII,
4 , 2.
2)
T. L. ,
XXXIX,
7.
3)
idem,
XLV,
37 - 40.
4)
PLUT. ,
C~8ar, XX, 2.
/
\\

-
1 12
-
C'est surtout lors des triomphes que les imperatores(l).
étalaient leur profits de guerre.
Inaugurée à la fin
de la seconde
guerre punique, cette pratiqu~ connut un grand développement et prit)
au ~remier siècle, des proportions gigantesques avec les triomphes de
1) Cette appellation jusqu'à SCIPION l'Africain,
ne
sortait pas du
cha~~ de bataille. Imperator ne d~signait pas normalement d'une mani~­
re officielle le titulaire de
l'imperium. Il est "un épithète de Jupi-
ter att~st~ depuis le IV~me siècle" R.COMBES, Imperator s
Paris,
1966,
p.
51.
Les soldats,
en donnant cet ~pithète a leur chef vainqueur, l~i
faisaient un grand honneur en l'assimilant à JUPITER.
SCIPION en of-
ficialisant
ce surnom et en l'inscrivant à côté du sien,
voulait que
chacun sût qu'il était
protégé par Jupiter, qu'il avait un charis~e.
Le geste de l'Africain sera suivi par PAUL EMILE qui
inscrivit le ti-
tre à la suite de son nom sur la colonne qui célébra sa victoire sur
PERSEE. Puis à l'~poque de SYLLA, ce titre va figurer sur les monnaies
de Provinces à côté du nom du chef d'armée victorieux.
CESAR fit
ins-
crire ce titre d'imperator a côté de son nom sur les monnaies émises
à Rom~ même. Grâce aux monnaies, le titre, donné par les soldats à leur
chef victorieux, ne pourra ~tre i~noré de personne.
La personnalité du
vainqueur,
est glorifiée, i l devient un h~mme plus pr~s des dieux que
des hocmes.
D~sormais les chefs d'armées ne s'effacent plus devent la
cit6,
certes ils combattent peur elle, mais également peur leur prcpr0
gloire et veulent paraître ccume les protéeés des dieux,
les posses-
seurs du charisme,
d'un pouvoir divin,
cédC par les di~ux, qui leur d.
~ent
la victoire.
Ils veulent ~tre en somme un peu dieux eux-mêmes .
...
-
r"",.
,
~;...
. . . .~
)ji...c, ~':_,
. . .
r ' , V'"

-
113 -
PO I·li' ELet de
CES AR.
En e f f et,
s 1. à l ' 0 ri gin e, 1 a vic t Cl ire Gt a. i t
con 5: -
dér~e comrn~ un don de diéu qu'il fallait célébrer par l'érection d'un
..
(1)
l '
. .
. ,
d
b"
,
,
truphce
,
explo1.tat1.on de cette vIctolre par
es am Itleux, a
flnl
1)
Sur les troph~es cf. G.CH.
PICARD,
"Les trophles Romains", Paris
1951, pp.
16 -
34
; p.
41
-
42
;
137 -
208.
Pour PICARD,
le trophée
av~it à l'origine une valeur magique, en ~ême temps qu'elle était un:
satisfaction dcnnfe
aux esprits mêchants d6chain~s par le combat.
L'5
rection du troph~e permettait de les rendre inoffensifs
"en fnis!J.nt
appel aux dieux supérieurs bi€nveillants"
p.
34. A c€
rôle originel
est venu s'ajouter au Vème
siècle,
un
"rôle rationnel".
Le trcpht;e
"de-
vient ln marqu~ juridique de la victoire "matérialisant ainsi le suc-
c~s d'un des camps. Mais dès la fin du Vème siècle, sous l'influence
di:.'
l'idée
de
charisme du chef,
"le trophée devient un porte-bonheur;
sur le champ de bataille,
on ne le construisait
jadis qu'en matériaux
pfrissables, pour que sn disparition entrainât en même temps l'atté-
nuati0n du principe dangereux qu'il enfermait.
On s'efforcera au con-
traire maintenant de le rendre
aussi durable,
aussi monumental que r~~­
sible p.
41
-
42".
R.
LONIS,
Guerre et Religion en Grèce à l'Ipoque
classique,
annales littéraires de l'université de Besançon, 238, Les
Belles Lettres, Paris,
1979, p.
129 - ,42 a fait un examen critique de
cette thèse qui
a
forcé notre adhésion.
Il a montré que l'on ne saurci:
ranger ATE tout comme NIKE~ encore moins les armes des morts, parmi les
forc~s malfaisantes et hostiles qu'apaisait le troph~e cf. p.
131 -133,
L'historien poursuit en disant qu~ deux autres considérations l'ont
aussi
conduit
è écarter cette interprétation, la première étant que"
"les
curémonies qui
accompagnent parfois
l'érection du trophée
(péan,
lib~tions) ne peuvent avoir la valeur cathardique que leur donne G. CM
PICARD." La raison est que dans la religion grecque "aucune idée de
souillure ne s'attache au snng versé dans un combat opposant des guer-

1\\
rlers . . .
La seconde est que
"les Grecs ne
croyaient à l'errance des
âmes Jes défunts que
si
ces derniers
n'avaient pas de
sépulture".
R.
LONrs en conclut qu~ le troph(e n'était rien d'autre qu'une statue
o.rm~e <.le
ZEUS,
mais i l n ' é t a i t " ni
un rite propitiatoire, ni un rit".
d'action de grâces,
mais,
si l'on peut s'exprimer ainsi,
un rite d'ar-
1
bitrage."
p.
142.
l
~ .- ..•._'
l'l.... :, .'

-
1 14
-
par faire
revêtir au trophée un caractère personnel.
La victoire de
PydLa,
avec
le consul PAUL EMILE est le premier événe~ent histori~ue
dont le trophée est tracé
sur les monnaies.
Sans doute,
l'usage vi,-t-j_
-'1
...
"

(1)
l ' "
l
.
ye Greee,
durant la guerre de Macedolne
.
~vec
evo utlon,
au ~re-
mier siècle,
i l devient un momument dédié
& la gloire du vainqueur. On
n'attend plus que l'arbitrage du dieu se manifeste,
on décide
soi-mê~e
que l'on a emporté la victoire.
Mais le général ,ictorieux ne pouv~it
s 1 t:~,tirr.er tout à fai t
vainqueur,
qUtè
lorsqu' i lavai t
obtenu les 1'C'nn('~"J'--
(2)
-
réservés
aux chefs de gucrre heureu-x
.Ces honneurs
avt..ient un
caractè!'~
1)
Le
deuxième
trophée
connu ~st celui de DOMITIUS et de FABIUS, flev6 e~
121
a~rès leur victoire sur les Allobroges. Ce trophée était composé de
tours
en pierres ornées de dépouilles ennemies. Mais
jusqu'& SYLLA,
note
PICARD,
"nous n'avons plus de; témoignage direct
sur les
trophée::; ror-aif's,
construits
sur les champs de bataille,
entre le terrps de FABIUS et ceJui
de SYLLA. Mais
l'usage s'en conserva certainement,
assure PICARD.
M~i~ 51
les premiers trophées ne
furent
que des
souvenirs,
élevés sur le ch~~~ de
bataill~ en l'honneur de MARS, ceux du pre~ie!' siècle évoluèrent. J'U~
souvenir commémoratif,
d'une bataille dédiée aux dieux,
l,e trophéi: è.u~'oA.-i~
le symbol~ du charisme, de l'appui accordé par les dieux au chef dRn~ la
bataille cf.
G.
CH.
PICARD,
op.
cit.
p.
206 -
208.
2)
Les supplications d'action de
gr~ces, faites le plus souvent av Cup~­
tole,
étaient des prières de reconnaissance
,adressées
aux dieux, pour u~~
victoire,
au nom du chef d'armée
vainqueur.
Le rite principal dt:
l"
cér8°-
monie d1action
de
grâce était la gratulatio,
c'est-à--dire
"la récit?tio!l
de IR formule
officielle de le prière par laquelle le peuple romai~ r~­
merciai t
les dieux de
la victoire qu'ils
venaient d' a.ccorder
c..u:;
légion,'
L.
HALKI;~ J tes supplications d'action
de grâces chez les romaills~ L-."
Belles L(:ttres,
Pa.ris,
1953, p.
102 cf.
ég9.lement POL.,
XI,
35.
Seul le
Sénat pouvait les
accorder et
fixer leur durée.
Dès qu'il
avait connais-
sance de la victoire par un rapport des
consul~ (litterae laureatae) , il
"
- )-
se reunissait
dans
le temple
de Bellone,
d'Apollon ou au Capitole.
Lp ~~-
d'obtenir le vote
des
supplications gratulatoires,
seul,
permettait d'0b-
tenir plus
facilement,
l e t '
rlomp h e
f
c .L
.
HALKIN , op. C '1. t ., p. °4
u
-
87 ,
T • L., XXX,
40, 1 .

-
115 -
religieux c'étaient ln supplication grutulatoirc
C~ le triomphe. A 1'0-
rigin~, donc, seuls les di~~x pouvaient officiellement sanctionner l~
victoire.
,
Le
consul victorieux deoandait
ensui~~ le triomphe, la plus
,.
,.
,.
(1)
f "
haute
r~compense accordc8 au
chef des armees
.
Autre
OlS
c est par
cette c6remonie que Rome
et le vainqueur manif~staient leur reconnais-
sance à l'égard de Jupite2'.
Au milieu du second 0t
surtout au dernier
siècle de la République,
elle
revêtit un
car~ctè~c personnel. C'Ét~it
l'occasion pour le
triomrhr.tl=ur d'expo"ci
son butir.,
i l
fut
surtout un
1)
Lr; triomphe possédait à la fois
un
caractèr~ militaire et religieux
Du point de
vue religieux,
"c!~st le plus ~cl~t~ntc manifest~tion de
1 ' en t e nt e
du die u et du peu pIc" exp l i que G.
DUr·m Zl L qui [:. j 0 u t e <l u :~ "p 0 u r
quelques
heures,
letricmphatcur
est
le doubh:
hunain de Jupite!'
Il
s'avance en char,
couronné de laurier,
dans
l'appareil du dieu
Le
visage passé au rouge comme celui
de la statue ~ui l'at~end dans le
sanctuaire
:
i l tient dans
Sn main droite
un rumonu de laurier et dans
la eauche un spectre d'ivoire que
sur~onte l'imece d'un aiele. ro~~~~~
derrière le Sénat,
un cortège coloré,
les
aniQJux blancs destinfs
~u
sacrifice,
le butin,
les prisonniers de mar<lue,
les précédent et ses
soldats le suivent,
m~l&nt dans leurs chants, en toute liberté, l~
louange et la satire.
Au bas
du Capitole,
i l met pied à terre, puis mon-
te la pente et,
dans
le tcmpl~, remet au dieu IQ laurier q'~'il a appo~­
tél! G.
DUMEZIL,
~a religion romaine ar'c 1.:aique., ? ,-:1"': F-~
c,
1S·6C, ~'p.
r
285 - 286. Pendant ces quelques heures, il est rev~tu de la robe de
pourpre brodée du dieu,
qui
était
conserv~e dans le trésor du Capito10.
Le spectre qu'il portait étnit l'ins~gne de la puissance divine.
cf.
égal\\2m.ent
:
G.
CH.
PICARD"
op.
c i t . ,
p.
139 et DAREr.1BERG et SAGLIO,
Dict.
des Ant.~ S.V. Triumphus p. 488 qui précise que le laurier est
l'~rbre qui a le pouvoir de purifier et d'éloigner le mauvais sort qui
guette les hommes
heureux.
Le laurier est l'arbre d'APOLLON.
Le blanc
étant la couleur préfér6e dé JUPITEfl,
le
ch~~ d~ triomphe est tiré par
~~ des cbevaux blancs. C'est ainsi qu'à l'origine, ROffie manifestait sa re-
connaissance après
une victoire & JUPITER.
Le triomphe,
à partir ùe ce-
lui
de PAUL EMILE
(PLUT., PAUL EMILE,
32 -
34)
subira une
évoluti,..."
.-'1---

-
116 -
prétexte pour servir la gloire du vainqueur et sa popularité.
C'est la
personnalité du vainqueur qui
est mis
au premier plan effaçant
JUPITER. Ainsi le butin conquis servit, pour une bonne part les ambi-
tions
des imperatores qui en distribuèrent
à nouveau à leurs soldats
le jour même de
leur triomphe.
b}
LA PART DES SOLDATS
Outre la part du général,
une partie du butin revenait aux
cadres et soldats de
l'armée.
Les premiers
étaient en général de
jeunes
aristocrates,
fils
de sénateurs et de
chevaliers.
Le contingent qu'il
recevait,
leur permettrait d'être à l'abri des besoins financiers.
Car
i l
faut
le remarquer aussi,
l'absence de
solde des
cadres
semble avoir
réaei
sur l'attitude des troupes en matière de butin.
Les cadres ~:~
vaient de l'argent,
en r~mplacement des fournitures en nature et, de
..
..
. . .

(1)

la part du general,
des grat~f~cat~ons en
~n de campagne
.
a~s
que~ que fussent les profits tirés par l'officier des défrayements et
des récompenses,
un tel système,
sans régularité,
ne pouvait que les
inciter à favoriser,
dans leur propre inté~êt les exactions et les pil-
lages.
Sa durée
(trois
jours)
alors qu'au premier siècle de la république,
un
seul
jour était nécessaire
eutrio::.phateur
pour expos€-r
son butin.
L'ovatio est un triomphe de moindre importance (PLUT., Marcellus~22,1)
et AULU GELLE,
V,
6. Les Grecs ont eux aussi connu ur.'''? cérémonie an"'lo"
gue uu triomphe que célébraient à Rome les Généraux vainqueurs.
cf.R.
LOUIS,
Guerre et Religion ... op. cit., p. 299 - 307.
1} Sur l'absence
de soldes des officiers de
la République cf.
J.HARMAnD.
op. cit.~ p. 396 et note 562. 110 percevaient aussi un défrayement as-
suré pc.r les populations
(Cie., Ad Att., V.
16, 3
; 17, 2 et des ciba-
ria praefecti dus par les gouverneurs et commandants en chef (id. ,ibi~
VI,
3, 6.

-117-
Les soldats recevaient aussi leur part. Mais ce qui a sur-
tout frappé notre attention, c'est l'importance que le troupier accor-
dait au butin lors de la prise des villes. Nombre de pillages ont été
essentiellement motivés par la recherche du butin.
L'armee jusqu'à la
réforme marienne(l) a trois caractéristiques: elle est nationale, cen-
sitaire et non permanente.
Le soldat est un rationnaire qui reçoit au
moins l'alimentation de base, les céréales, mais contre remboursement.
Ell~ reçoit une solde mais qui n'est en rien un salaire, si l'on con-
sidère que le soldat est supposé motivé par autre chose que l'appât du
gain, puisqu'il demeure citoyen. Ce serait alors une simple indemnité
payée à l'origine, par l'ensemble des mobilisables et des mobilisés
(qui sont à la fois contribuables et soldats) au profit des seuls mo-
bilisés(2). A cette indemnité qu'ils recevaient officiellement à la fin
des campagnes, s'ajoutait leur part du butin. Celle-ci consistait en
des distributions d'argent qui avaient lieu lors de la célebration des
triomphes.
Le tableau que nous empruntons à P.A. BRUNT(3) sur les dis-
tributions d'argent (en deniers) aux soldats, entre 201 et 167, montre
un net accroissement des sommes qui revenaient aux troupiers, lors des
triomphes successifs d'Orient et d'Occident.
1)
Sur l~ réforme marienne cf. J. HARMAND, le ppolétariat dans la lé-·
gion de MARIUS d la veille du second bellum civile#in Recherche sur
les structures sociales de l'antiquité classique Colloque de Caen,1969,
Paris, C.N.R.S.,
1970, p.61 -
74 et C. NICOLET, le Metier .•• op.cit.
p.
122 -
199.
2
C. NICOLET. ,Rome et la conqu~te ... op. cit.~T.I. p.326- note qu'une
légion coûterait à l'epoque de la deuxième guerre punique, environ
250 000 deniers par an,
1 000 000 de sesterces.
3)
P.A. BRUNT, Italian Manpower, Oxford,
1971 p.
394. Dès le temps de
CATON, eut lieu l'habitude de distribuer aux soldats des gratification~
en espèces prélevees sur les biens pris à l'ennemi. AULU GELLE, XI,18
cite une oratio de CATON de praeda militibus dividunda.
Il y avait eu
des précédents dans les guerres du Samnium : T.
L. VIII, 36 ; IX, 23,
31, 37, 42, X,
44 -
46.

-118 A -
(
Date
Somme distribuées
(deniers)
(
SOURCES ET REMARQUES
)
)
(
(
: Fantassins: Centurions: Cavaliers:
~
( - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - )
~ 201
40
+
+
:T.L. ,xxx,45, 3 Triomphe de
~
(
:de BCIPION sur l'Afrique.
)
(
)
(
)
(200
12
+
+
:T.L.,XXXI,20, 7.
OVATIO sur
)
(
l'Afrique
)
(
)
(
)
( 1 97
7
14
21
;T.L.,XXXIII, 23, 7 Triomphe
)
(
sur la Gaule
)
(
\\
(
(196
8
24
24
:T.L. ,XXXIII,37, 11 Triompbe
1
(
sur la Gaule
)
(---~-----=-------=---_--.:=-------------)
(
)
(
)
(194
27
54
81
:T.L., xXxlv,46,2.Triomphe de
)
(
CATON sur l'Espagne
)
(
)
(
25
50
75
:T.L., XXXIV,52,4.Triomphe de
)
(
TITUS (Grèce Macédoine)
}
(
)
(
)
~ 191
12,5
25
37,5
:T.L.,XXXVI,40,12.Triomphe sur ~
(
la Gaule
)
(
J
(189
25
50
75
:T.L.,XXXVII,59, 3.Triomphe de
)
(
L.SCIPION sur l'Asie.
)
(
)
(
.
)
(187
25
50
75
:T.L.,XXXIX,5,14.Triompbe de F.)
(
NOBILOR en Grèce.
)
~
42
84
126
:T.L.,XXXIX,7,l.Triomphe de M.
~
(
:VULSO sur l'Asie (plus une dou,
~
~
~:..-
:....
--=-
b_l_e_p_a_i_e_p_o_u_r_t_o_u_s
)
(
181
)
(
30
+
+
:T.L.,XL,43,5.Triomphe d'A.
)
(
PAULLU6 sur la Ligurie.
~
C
.",.,
~~,,,,
~":"~- .

-118 B -
(suite)
(
(
180
50
100
150
:T.L.XL,43.5.Triomphe de Q.F.
(
FLACCUS sur l'Egypte.
(
,
(
J
,
(
179
30
60
90
:T.L .• XL,59,2.Triomphe de Q.F.
J,
(
:FLACCUS sur la Ligurie.
i
(
1
)
(
1
1
(
1
178
25
50
75
: T. L. , XLI, 7 , 1 . sur les deux E5pc,:",
(
gnes.
1
(
J
(
(
177
15
30
45
: T. L. , XLI, 13,6 sur la Liguri..::.
(
(
(
167
100
200
300
:T.L. ,XLV,40,1 .Pg,ul EMILE
(
(Macédoine)
(
:
(
45
90
135
:T.L. ,xLv,43,4 ANICIUS sur
(
l'Illyrie.
P.A. BRUNT, ItaZian
opo cit.#p.
3940
0 0 .

- 11"9-
A ces donativa en fin de campagne s'ajoutait,
comme en
181
et 181, l'octroi d'une double solde.
Mais ces sommes sont loin d'at-
teindre le montant que l'on rencontra dans les armées du premier siè-
cle.
D'après les inscriptions du triomphe de LUCULLUS en 63, chacun de
ses soldats reçut de lui 950 drachmes(1).
L'on sait déjà qu'après la
prise de Triganocerte, les troupiers avaient touché une partie des
8 000 talents qu'il trouve dans le trésor royal.
Des seize
autres nil-
lions qu'il tira de la vente des objets saisis, chaque soldat reçut
Boo drachmes(2).
D'après les écriteaux de celui de POMPEE en 61, les moins
bie~s pourvus de ses hommes avaient touché 1 500 drachmes(3).
Gr~ce a oes distributions, un "dialogue ~conomique, 51 p~ll
chaleureux soit-il,
s'institue entre le commandant en chef et le subcr-
donné ( 4)~, En effet le che f pouvai t attendre de ces don s monétaire s, u~,(;
reconnaissance automatique.
Aussi pouvait-il ajouter à son prestige,
cette reconnaissance pour services rendus de tous ses compagnons d'e~:­
pédition officiers ou soldats.
Les premiers des jeunes aristocrates
pouvaient,
après leur campagne,
former un personnel politique pour lel'~
ancien général,
ou bien pouvaient favoriser l'alliance de leur clier-
tèle ou famille
avec
celui-ci.
1}
PLUT. ,
Luc. , XXXVII, 4.
2)
id. , ibid. , XXIX.
3)
idem, Pompée~ XLV, 3.
4)
J. HARMAND, op. ci t. , p. 469.

-
120 -
Quant aux soldcts,
si leur efficacité est moindre, du fait
de leur niveau de
fortune,
ils n'en constituaient pas moins des clien-
,
. "
t
11
f '
.
1"
( 1)
telcs,
qUl,
even ue
ement~
eral€nt
presslon sur sa po ltlque
.
A
ces gains officiels et légauy-,
s'ajoutaient d'ailleurs,
depuis la fin
de la deuxième guerre punique,
les trafics individuels de toutes sortes
qUl s'offraient aux soldats.
Au
cours de la guerre de Syrie, pendant
que l'armée passait ses premiers quartiers d'hiver
en Bfotie, ~n 19G,
" L€:s
soldats en congé,
avaient presque toujours de l'argent dans leur
ceinture pour trafiquer(2)".
TITE LIVE attribue formellement aux rl-
chesses ramenées par les vétérans de la deuxième guerre de Macedoine
et de la guerre d'ANTIOCHOS,
l'enthousiasme des volontaires pour la
troisiè!Ile guerre contre PERSEE en 111.
" LICINIUS enrôlait les vété-
rans,
les centurions et beaucoup venaient s'offrir d'eux-mêmes parce
qu'ils voyaient riches ceux qui avaient servi dans la première guerre
de MacGdoine ou contre ANTIOCHOS en Asie.(3)." La fr€quence
des guerres
extra~taliques accrut rapidement la richesse en Italie en même temps
1)
Par exemple à Ephèse, chacun des soldats de SYLLA avait reçu un
billet de logement qui comportai t
le
,r'tes.le repas et une solde
de
16 deniers par jour: PLUT., SYLLA, XXV,
4. Par cette mesure,
i l s'enchaînait définitivement ses soldats.
C'est du reste avec
ses mêmes troupes qu'il se rembarqua pour la Grèce.
C'est aussi
une armée ng~rrie p~r huit années de campagnes, fanatisée de re-
connaissance et d'admiration pour son chef que CESAR fit
la guerrt
à POMPEE et aux Patres
(CESAR, B.G.~ VIII, 4, 2).
1
2)
T.L .• XXXIII, 29.
cf.
également l'armée d'Espagne en
134. Appien
l
Iber.~ 84 - 85. et celle de Numidie en "1 Sall .• Iug .• XLIV.
1 3) 1.L., XLII, 32. 6.
1
1
1
1-'

-
121
-
qu'elle accélérait le renouvellement des moeurs,
des classes et des
fortunes.
Les
soldats d'origine sociale pauvre et de condition éconc-
miquz modeste virent dans la guerre,
un moyen d'enrichissement indivi-
duel rapide.
Les guerres, peur eux,
sont avant tout lucratives.
La re-
forme marienne en acceptant les capite censi,allait davantage trans-
former la structure de l'arcéc.
Sa réalisation entraîna de
facto sa
professionnalisation.
Dès lors les pillages de sanctuaires, des dédi-
ticcs,
se multiplièrent.
Les révoltes ouvertes contre les chefs, accu-
sés de vouloi r
détourner, le butin furent fréquentes et nombreuses: En -81, les
sold~ts de SYLLA furent mécontents de la paix de Dardanos. Cette hypo-
crisie cachait surtout leur dfception d'avoir été privés d'un butin
riche et varié.
En 11,
LUCULLUS,
en proie au démon de la richesse, ne voyait
pas combien i l était contrudictoire de vouloir refréner l'avidité f~­
roce ùe ses troupes. Aussi la prise d'Amise fut pour le général une
soiré~ terrible, le soldat, m~content, avait perdu patience, alors
qu'il allait enfin se
dédommager à sa manière de ses longues fatigues,
ce général trouvait là encore le moyen de
lui demander une absurde mo-
dération.
La vieille s€v~rité personnifiée par LUCULLUS, dut céder à
cette rév01te de soldats exal~és par la soif du pillage(l).
1)
PLUT., Luc."XIX, App., Uithr.,
83. DION CASSIUS) XXXVI, 16,3 a
résumé ainsi
l'hist ire du soldat lucillien
: aussi
longtemps
qu'il collecta du butin au cours des campagnes heureuses,
i l obeit
à son chef, lorsque vinrent les difficultés, i l l'abandonna.

-
, 22 -
Il va sans dire qu'avec un recrutement pareil, la discipline
. '
ff
.
(1)
D'
militalre allalt grandement en sou
rlr
.
autre part tout un mon~c
.
. .
..
(2)
.
.
d
d
de tr~flcants SUlvalt les armees
.
AUSSl
au sortlr
es guerres
e
Grèc~~ l'activité militaire se doubla d'une activité commerçante. L'im-
,
p~rialisme romain présentait une double face. Toute expédition militai--
.
.
b "
f '
. .
t
f '
.
( 3)
P' 11
re visalt touJours un
ut a la
OlS polltlque e
lnanCler
.
l
ag0
et négoce
furent deux activités complémentaires pour le soldat du pre-
. ..
( 4 )
mier slecle
.
Une telle import~nce accordée au butin s'explique par le
fait que le pain quotidien du troupier en dépendait pour une grande
part. Nous avons déjà vu que la solde était insignifiante.
La conquête
du butin
tout en mettant le soldat sur le chemin d'autres activités
t
non lifes
à la guerre,
lui permettait d'obtenir des gains plus fruc-
tueux que ceux àe la solde(5).
1)
Les officiers n'osaient plus punir les citoyens qui
se seraient
vengés dans les comices.
Ils les laissaient emmener au camp des
esclaves
des maîtresses s'fnivrer, prendre leur bain chaud, com-
t
mettre des cruautfs et des
rapines.
Dans les petites villes et cam-
pagnes d'Italie,
les
soldats de SYLLA étaient des exemples vivantr
des vices et du luxe appris en Orient, de l'ivresse, de la débau-
che, de la fastueuse
ostentation des métaux précieux.
Sall.,Cat' t
XI.
2)
Comme l'arm~e d'Espar,ne de SCIPION en 134, App. lbsrica, 84 - 85 ;
celle de METELLUS en Numidie Sall., lug.,
XLIV,de LUCULLUS, PLUT.,
Luc.,
14.
3)
cf.
CL.
NICOLET,Armée et Soci~t~ d Rome BOUS la R~publique, d pro-
pos de l'ordre ~questre in J.P. BRISSON, Problèmes de la guerre op.
cit., p.
153 -
156.
4)
D'anciens soldats devinrent nesotiatores et se mirent au service de
César, pendant la conquête de la Gaule,
soit comme informateurs ou
interprètes, soit même comme officiers.
cf.
le cas de C.
FUFIUS CIT
CESAR, B.G.,
VII,
3.
5)
Au premier siècle se posa une question connexe, d'importance socio-

-
123 -
C)
LA PART DES DIEUX
En action de grâces, le vainqueur consacrait aussi une part
du butin aux Dieux.
Cette offrande correspond à un voeu fait avant ou
pendant un combat à l'issue presque incertaine.
Ce don sera prélevé sur
le produit de la vente du butin.
Il se présentait, par exemple, sous
la forme d'un cadeau en or ou d'un temple qui serait construit à la
gloire du dieu qui avait favorisé Rome au cours du combat(1).
En 222, FLAMININUS consacra au Capitole un trophée fait avec
l'or des torques, enlevé aux soldats Cenomans(2).
Il fit fondre
leurs
colliers pour confectionner son trophée.
En 196, après
sa victoire su~
les Gaulois, MARCELLUS fit comme présent au Capitole, un collier en or.
Relatant la victoire du consul, TITE LIVE écrit que l'on "tua plus d~
40 000 hcmmes, on prit 81 drapeaux, 132 chariots et beaucoup de colliers
d'or dont l'un d'un grand poids,
fut
..•
dépos~ au Capitole, comme of-
frande à Jupiter dans son temPle(3)".
L'or pris sur les ennemis devient un souven~r ; le butin en
m~tal précieux est un pr~sent digne du cnpi{ole et de Jupiter. En gfnf-
politique croissante
: celle de la distribution officielle de terres
aux vétérans cf.
S. NDIAYE, op.cit., p.
85 -
88.
1) Outre cette part du butin, les dépouilles ennemies sont aussi
cons~­
crees eux dieux.
Alors qu'une partie est brûlfe sur le champ de batail-
le, celles des chefs ennemis sont ramenés à Rome dans le temple de Ju-
piter FERETIEN et constituent les spolia opime. Mais au cours de l'his-
toire romaine i l n'y eut que trois fois des spolia opime :
le premier
qui le fit fut le légendaire ROMULUS (PLUT., Romulu6~16, 6). Le deuxi~­
me en 431 fut
COSSUS (T.L.,IV, 20 cf. aussi idem 1,10, 6 -
7).
La seule
dépouille opime qui eut lieu au cours de notre période fut celle du roi
Gaulois INSUBRE tué par MARCELLUS en 222 (PLUT • marcelZu8~8. 5). Sur le
____question des dépouilles opimes cf.G.DUMEZIL. op.cit.~p. 112 -
113.
2)
Florus,
l,20,
5.
3)
T.L., XXXIII,
31.
13.

- 124 -
,
" .
.
....
.
(1)
D
rel ce present representalt un dlxleme du butln

es temples pou-
vaient être construits ~vcc l'arp,ent du butin. En 197. à en croire TIT~
LIVE,
on consacra plusieurs temples.
"un sur le marché aux légumes à
Junon Matuta(2) vou~ et adjuge quatre ans avant. pendant la guerre con-
tre les Gaulois par le consul C.
CORNELIUS; un temple à Fortuna Primi~'
genia fut aussi consacré. Il nvait été voué dix ans auparavant, pendent
la deuxième guerre punique .•. Enfin on consacra un temple à Jupiter~
il avait été voué six ans avant, pendant la guerre contre les Gaulois
par le
prêteur L.F.
PURPURIO(3)
Par ces actions de grâces. le Consul prouvait sa reconnais-
sance, envers le dieu qui lui avait donne la victoire.
Cette pratique
connut une remarquable continuité au cours de notre période.
Cette fi-
délité au mos mayorum a-t-elle toujours été dictée per la ferveur?
Nous ne le pensons pas, car si la victoire est considerœ
comme un don
des Dieux. dans les offrandes faites à ceux-ci, c'est normalement sur
l'ensemble des combattants que devraient jaillir alors l'honneur et l~
gloire de la victoire. Mais à Rome, le général les confisqua à son seul
profit.
1)
T. L., 7, 23 Il on se mit à parler du present dû
à APOLON,
ensui te
de la promesse d'un dixi~me de butin que CAMILLE déclarait lui avoir
faite
"
2)
Junon Matuta semble être une confusion de Mater Matuta déesse de la
lumière du matin et de l'enfantement, avec Junon Lucina, qui avait à
peu près les mêmes caractères.
3)
idem, XXXIV,
53.
1-7. Le dernier, ainsi qu'un autre dedié à Jupiter
par le même homme. mais cette fois,
comme consul. furent construits en
192.

-
125 -
d) La part des alliés
Le pr~ncipe d'un partage des profits de guerre entre
les différents belligérants a longtemps été considéré comme tl un usage
plus grec que romain".
A AYMARD a démontr~ avec l'exactitude qui le ca-
racterise,
que Rome ne l'ignorait pas et l'avait toujours incorporé
dans son droit international(1).
Le traité romano-Etolien de 212, sti-
.
,
. .
l '
.
d
'1
(2)
D'
'
pulalt avec preclslon
a reglementatlon
u plIage
.
apr~s nos
sources, notamment TITE LIVE,
les dispositions du traité allouaient aux
Etoliens
: sols maisons, murs et plat-pays des cités conquises, et aux
Romains tout le reste du butin
: Urbium soZum tectaque et muri cum
.
Z


d
" R
.
t(3)
D'
' 1
agr~8 Aeto orum~ a ~a omn~s prae a popu~~
oman~ e8se.
.
apres
CE
principales clauses de l'inscription, en cas de prise de vive force
d'une ville, que ce fût à l'issue d'un assaut mené conjointement ou
1)
A.AYMARD, Le partage ..• op.
cit.~ note 3 ; p. 500 - 512.
2)
Le traité nous a été transmis par POLYBE, IX,39,2-3; XI,5,4-5
XVIII, 38, 7
48, 7
XXII, 8, 9 -
la. par TITE LIVE, XXVI, 24,8-
13 ; 26,3 et aussi par la publication du texte original gravé Bur
pierre,en 1954. Ce texte a été commenté par R.G.HOPITAL, le traité
romano-etolien ..• op.
cit.~p. 18 - 48 ; 204 - 246. Celui-ci présente
une mise au point, historique et juridique, remarquable par la richesse
et la logique de ses discussions.
3)
T.L., XXVI, 24,
11.
La distinction nettement marquée entre biens
meubles et immeubles a servi d'argument probant pour l'origine de la
coutume. C'est notamment le point de vue défendu par R.TAUBLER, Impe-
rium romanum~ LEIPZIG, 1913, p. 430 - 432. Sa thèse est résumée et ~om­
mentêc par R.G.
HOPITAL op.
cit.~p. 235-236 et particulièrement p.234,
note 3.
La publication et le texte de l'inscription ont permis de met-
tre en doute le bien fondé de cette argumentation, car dans certains
cas~ les Etoliens reçurent des biens mobiliers. Ainsi que l'a demontré
A. AYHARD, op.
cit.~ p. 512 " l'usage n'était ni oriental, ni grec, ni
Carthaginois, ni romain:
tout bonnement humain si l'on veut, ou plutôt,
corollaire inséparable de cc que toute l'.nti~uité a;ê~~é et connu des
hommes et des rapports établis entre eux par l'emploi de la force".

-
126 -
d'un siège mené unilatéralement par les Romains. la cité, les murs et
le territoire conquis reviendraient aux Etoliens.
Mais en ce qui con-
cernait les biens meubles,
i l en allait autrement.
Les Romains rece-
vraient au moins la moitié du butin rfcolté lors des opérations commu-
nes et prendraient toutes les prises dans les actions qu'ils auraient
menées seuls(1).
Deux cas ont été clairement définis.
Le premier con-
cerne les actions conjugué~s des Romains et des Etoliens. le deuxiè~e
les légionnaires combattant isolément. D'autre part aussi.
en cas de
ralliement volontaire d'une cité aux deux alliées.celle-ci serait rat-
tachée à le communauté des Grecs.
Le traité dans son application connut
plusieurs variantes.
Le siègp. d'Anticyra, en 210, fut mené coujointe-
ment par les deux alliés, mais les Etoliens ne reçurent que les murs ct
.
. .
l '
l b ·
(2)
les mn~sons. pendant que les Roma~ns emporta~ent
ensemb e
du
utln
.
En 197 après Cynocéphales, les Etoliens réclamèrent à
FLAMININUS, qua-
tre villes thessaliennes tombées au pouvoir des Romains.
Conformément
au traité de 212,
ces cités devaient leur revenir,
les Romains étant
libres de s'emparer des biens mobiliers.
Le consul se contenta d'invo-
quer la paix séparée des Etoliens en 206 avec le roi antigonide, qui
de fait,
rendait caduc le truité de 212.
Le consul recourut aussi
à une
arGumentation juridique serree pour débouter les Etoliens.
Pour lui ln
convention de 212 ne concerneit que les villes prises par la force et
non celles qui
s'étaient rendues volontairement.
Or parmi
les quatre
villes concernées,
seule Thèbes phthiotides avait été prise d'assaut,
1)
Sur la divergence entre le texte de l'inscription et le récit de
TITE LIVE,
XXVI,
24,
11 cf. R.G.
HOPITAL., op.
ait.p.43 - 44 et P.
PEDECH,
Za m~thode historique de POLYBE~ Pari., 1964,p. 383 - 385.
2)
T.L. XXVI, 26, 3 et POL.,
IX,
39. 2
;
3 -~.

-
127 -
par consequent i l la laisserait aux Etoliens(l).
Rome a-t-elle formel-
lement respectée son engagement? R.G.
HOPITAL observe tout d'abord
qU2 PHAINEAS,
le otratège des Etoliens, n'appuya pas les rev~ndication5
de la ligue sur la seconde partie du traite, celle prevoyant que les
Etoliens recevraient dans leur
conféderation
les cités ralliées.
Celù
parce qU~ les villes th~ssaliennes. après Cynocephales étaient des vil-
les vaincues dont le ralliement n'avait plus de sens.
car la défaite
macédonienne etait consommee.
LEur position juridique était celle de
villes soumises "deditices,,(2). Toutefois,
si seules les cités prises
par les armes devaient devenir étolienne~, la requête de PHAINEAS ~t~it
"radicalement inféodée".
Ne s'~tant pas ralliées en temps opportun. et
n'ayant pas succombé à un assaut, elles relevaient uniquement du bon
,
,
,
.
é
t
1
E
l'
(3)
voulo1r du general. Cette argumentat10n d concer a
cs
te 1ens
.tout
en
,
mettant à nu la mauvaise foi du Consul.
Les Romains ont trahi à cet-
te occasion leurs engagements pourtant formels.
D'abord parce que le
traite concédait aux Etoliens une partie des biens mobiliers saisis à
l'ennemi en cas de victoire commune. i l privait ainsi les Romains de
tout b~néfice territorial. Nous ne pensons pas comme A. AYMARD que "ln
proximité ou l'éloignement geographiques suffisent à rendre compte de
contreste(4) . . . ".
Certes la renonciation solennelle à toute conquête
1)
L'argumentation exposée par les deux parties est donnée par POL.,
XVIII,
38.
2)
R.G.
HOPITAL. op.
ait.p.
204 -
233.
3)
POL., XVIII.
39. 1.
4)
A.
AYMARD, Le partage •••
op.
cit.,p.
507.

-
128 -
comportait "un aspect dE propagande dont les Romains comptaient bien
profiter,
car elles m~ttaicnt en évidence le caractère désintéresse
.
.
.... d
...
.
.
( 1)
"S'
LAEVINUS
. t
qU\\lls tenalent a
onner a leur lnterventlon
.
l
aval
promis de livrer à ses alliés les villes prises d'assaut et même la
moitié du butin,
c'était simplement pour engager les Etoliens à lui
prêter m~in forte.
La volont2 d~ ne pns s'acharner sur les villes dis-
posées à c~pituler visait à ne pas durcir la résistance de leurs adv~r­
saires.
Or FLAMININUS en 197, n'avait plus les mêmes raisons qu'avaient
eu son compatriote
,
lors de la signntur~ de la convention. Dès lors
que PHILIPPE était battu. i l n'était plus question de ménager les Eto-
liens, quitte à "dénaturer la convention" et à recourir à une argumen··
tation supplémentaire.
Car ln th~se selon laquelle le trnitéede 212
avait été frapp~ de nullité en 206, ne résiste pas à une analyse sé-
.
(2)
. . .
1
d
d l ' "
rleuse
.
Le partage du butln, me me dans
e ca re
e causes precl-
ses, n'allait pas sans problèmes.
Car outre le litige évoquE entre
Etoliens et Romains,
i l y eut d'autres manquements,
notamment dans 1a
convention très proche par sa ferme,
que P.SULPICIUS GALBA passa avec
ATTALE en 208.
Ce dernier se vit remettre par les Romains la cité des
Opontiens avec tous ses biens mobiliers et cela en compensation de cc
qU'Oréos avait été pillé quelques
jours auparavant par les seuls sol-
dats romains.
On peut déduire
de ce fait que les Romains avaient garan-
ti à ATTALE la moitié du butin ou, au minimum, une participation aux
prises mObilières(3).
Toutefois notons qu'en 199, lorsque Ga1Jrion capi-
1)
P. DUCREY, op.
cit."p. 262 et aussi R.G.HOPITAL, op. cit. ,p. 43.
2)
cf.
ci-après Chap.
III"
3ème partie"> pp ..t;..;J- ---b·1 b
3)
T.L., XXVIII,
7,4 cf. également R.G. HOPITAL op. cit., p. 44 et
note 23.

-
129 -
tula, elle fut pillée par les seuls légionnaires et la ville laissée
aux Pergnméniens. à l'exclusion des personnes et des richesses.
Il en
_
, .
. . . ,
(1)
fut de meme pour Oreos, conqu1se pour la seconde f01s
a cette epoque
.
Outre les profits de gUêrre, les otag0s constituaient une
mcrchandise qui,
assurément
n'Gtait pas moins prisée.
1) T.L. XXXI,
45, 7
46, 16
u~b. regi, captiva corpora Romanis cee-
Bere.

-
130 -
LE RECOLRS. {tUX DïnGES-.
De nos
jours l'ot'~e, suivant la définition du petit ROBERT,
est "une personne livrée ou reçue COmme garantie de l'exêcution
d'une prome§se, d'un traité (militaire ou politique)".
FréquenDe~t
les journaux dans les faits divers, tout comme dans leurs rubriques
politiques, consaCrent quelques lignes à cette pratique que l'on
croyait à jamais révolue; d'autant plus que l&konvention de Genève
depuis
1949 a formellement interdit le recours aux otages. Pourtant,
exieer des otages, ou en donner, afin de garantir des engage~ents
reçus ou pris, était un fait courant pendant toute l'Antiquité.
Mais à la différence de ce qui se passe aujourâ'hui, il n'y avait
pas prise mais remise d'otages. Ainsi il n' y a rien~u plus normal
ni de mieux admis dans la pratique des rapports internationaux, que
le recours 3UX otages
(1).
ROme naturellement, ainsi que tous ceux
que les basards de la diplomatie ou de la guerre plaçaient sur son
cet
chemin, a fréquemment applique usage. Elle a reçu des otages de

grands états organisés tout Comme de peuples jugés turbulents.
C~r-
thage (2) après Zama avait dû en livrer, ainsi PHILIPPE V après
Cynocéphales (3).
(1) La question des otages dans l'Antiqui~é n'a pas encore f~it l'ob-
jet d'étude spéciale.
Le premier à attirer l'attention des nodernes
sur cette question fut le regretté A.
AYMARD à qui nous jevons trois
articles
sur les otages, réunis dans les Et, d'hist. Anc.
:+PHILIPPE
de Mac~doine~ otage à Thèbes~ pp. 418-435
; +Lec otages carthagin r / ~ à
2a fin de La deuzi~me guerre puniquep.~37-450 ; +Les otages aU d.
de L'empire p.451-460 R. LON18 s'est aussi intéressé au statut des
otages. mais en Grèce. Il y consacre quelques pages dans son livre
Les usages ••• op. cit., p.133-139 ; et un article: Les otages dan .... ,_
reLations internationaLes en Gr~ce cLassique in Mélanges offerts u
Léopold 8édar Senghor. Dakar,
1977 P. 215-234.
(2) POL. XV,
17.3-18 ;
1 • T. L •• XXX, 37,
1-6
38,1-3; App.,
Lib., 53-54.59. Les passages de ces trois auteurs ~e sont pas toujours

-
131 -
Rome en eX~gea aussi d'Antiochos III après Magnési~ du Sipyle (1)
;
du lacédernonien NABIS (2)
;
et al.si des Etoliens
(3).
CESAR pen-
dant ses campagnes en Gaule recourv
syst~m~tiquement à cc proc0-
de (4).
Ainsi l'on s'aperçoit que d'un bout à l'autre de notre
période, i l n'y avait point d'accord ou de soumission sans livrQi-
son d'otages(5).
Une pratique si Courante et frëqu~nte, s'accorde
dans une certaine mesure, avec la grandeur et la fierté ~9~e de
Rome (6). Car si elle a toujours exigé des otages, ell~ n'en a jamais
concordants. Si APPIEN parle d~ 150 otages, TITE LIVE et POLYBE ne
font état que de 100. Si APPIEN mentionne la livraison d'otages paroi
les conditions de l'armistice, les deux autres la placent par~i les
conditions de la paix future cf. les pertinentes réflexions et sug-
gestions de A. AY~ARD, Les otages carthaginois ••• ~p.438-445
POL., XVIII,
39,5 i
T. L., XXXIII,
13-14
(1)
POL., XII, 43,22; T.L.,
XXXVIII, 38,15
App. ,S1lr. ,
39
(2)
T.L., XXXIV, 35,"
(3) POL., XXI,
32,10 ; T.L.
1
XXXVIII,1', 6-7
(4) CESAR, B.G., l,
14,6 i
27, 3 ; 28,2 li titre d'exemp!'ès
(5) T. L.,
XXXVIII, 34,7, not~ que "C'était ~n ancien usage che. les
Romains, envers un adversaire avec qui ni pacte, ni convention garan-
tissant des droits égaux ne les
liaient d'amitié, de ne pas l~
traiter comme pacifié sans qu'il eOt, aUlaravant, livré tous
ses
biens 'ucr~s et profanes, fait recevoir ses otages ••• "
(6) Elle s'accorde l'idée qu'elle veut donner de la grandeur, avec
le rôle qu'elle s'alsi8ne. La réponse certes orgueilleuse du chef
Helvète DIVICO à CESAR est ass~z éloquente ."~ H~~ tU.-/~;bus
bU:W ~~tdU,te.) t,~,~/, ~ ~.le6 ~Lp~ 'Y\\C\\v d.alW,Cd"nh~n.-t
~.G., 1,14,7. Ce n'est point sans une ironie calcul~e que CESAR plnc~
ces propos dans la bouche de ceux qu'il va vainCre et plier à ses
conditions.

-
132 -
livré (1) au CoUrS de notre pêriode, elle avait cesse de subir l~
loi du plus fort,
et dictait la sienne,
servie surtout par sa
supériorité militaire.
L'otage est avant tout un gage, un garant que l'on exiGeait
d'un adversaire SOUMis par l~ force des armes tout Comme d'un allié.
Il va de soi qu'en tant que garantie,
son choix devra obéir à des
critères rigoureux. Ce sera l'objet de notre prenière interrogatioL,
il s'agira de voir Comnent ROme s'est appliqu~e d3ns ce domaine
aussi bien du point de vue de la qualité que du nombre.
La deuxi~me
question a laquelle nous aurons à répondre concerne la garde des
otages.
Quelles étaient les conditions et la durée de leur déte~tion?
Enfin nous traiterons de l'utilité de l"otage, en d'autres termes,
des insuffisances et ambiguités de cette garantie.
l
-
QUALITES ET CHOIX DES OTAGES
En exigeant des otages, l'auteur d'une victoire enlève en
principe au vaincu toute velléité de reprendre les armes puisque ce
faisant la vie de ces derniers serait compromise. L'otage était ~insi
un gage, une garagtie, au m~me titre que le serment. On ne 'l'exigeai~
pas ~eulenent de l'adversaire (Vaincu ou qui a capitulé), 'mais aussi
(1) Exception faite des lents débuts de Rowe où deux fameux ~pisodes
attestent la livraison d'otages par ROme
:celui de Clélia
T.L.,
II,13,4-11 et celui des fourches caudines:
idem IX, 5,5. La rin
de la phrase pr@t€e
par CESAR a DIVICO (note 6) "~i~s r~i popuZum
Romanum esse testem" postule l'intention chez CESAR, d'affiroer
que l'arm'e de L.C.
LONGINUS a dQ en 107, comme celle de S. POSTI~I~S
en 321, à la fois passer sous le joug (8.G., 1.7,4 ;
12,5) et livrer
des otages~ outre ces CaS excepiionnels, ~as une seule fois,
ROMe
ne renit d'otages.
Certes, trahi par la fOrce des armes, un civis
romanue peut tomber aux mains de l'ennemi et subir l'esclavage, ~ais
jamais il ne sera livré comme otage. Y consentir serait d'une part
S
reconnattre un éBal et d'autre part contredire m@me l'id~oloeir
du peuple-Roi
: Tu regere imperio pOpUZ08~ Romane~ memento.
i
1
1

de l ' a l l i f . Ainsi i l constituait "une fOrce de dissuasion".
un
moyen de presSion,
que l'on peut faire intervenir, chaque fois qu'il
s'agira de restreindre les moyens d'action de ses concitoyens,
afin de les contraindre à respecter t~l ou tel éDgagement ~ris. Il
faudra donc les choisir à partir de critères rigoureux.
Le choix naturellenent incombe à Rome, car s ' i l en allait
autreDent, l'ennemi lui fournirait tout ceux dont i l est pr~t à se
désintéresser. Or Rome,
ignorant les ramifications et r~~ports
familiaux,
a toujours préférf Iorter son premi~r choix sur les
,
proches parents du souverain ou chef defait, ou parmi les menbrcs
des familles influentes. Ainsi en 219, après l'anéantissement ùe
la puissance illyrienne, DEMETRIOS et
ses familiers furent dépor-
tés à Rooe où ils de~eurèrent COmme otages (1). En 213 au Cours de
la seconde guerre punique, les SCIPIONS envoyèrent en Italie
plus
de trois cents otages de haute noblesse, afin de provoquer la déser-
tion de leurs
COC 'atriotes auxilliaires dans l'armée d'rlANNIBAL(?'
En 210, après la chute de Carthagène, TITE LIVE classe dans
le butin du Général romain "les otag~s des peuples espagnols dont on
prit soin comme s'ils étaient les enfants d'Alliés". Ici, dira
SCIPION, "se trouvent les otages de tous les princes, de tous peuplp~
connus; aussitôt qu'ils 'seront en votre pouvo~r, tout ce qui, ~ain­
tenant, est soumis aux Carthginois, ces otages le feront
passer sous
vos ordres.
(3)
C'est en vertu de ln clause du droit des Anciens
qui stipulait que l~ totalité des biens du vaincu devrait
appar-
tenir au vainqueur, que ces otages reviennent de droit aux Rom~ins.
Nul doute qu'ils obtinrent la Soumission des royaumes et peuples
(1) POL., VII, 9,
14.
(2) T.L.,
XXIV,49,8
(3) T.L.,
XXVI,47,4.
Il est incapable de se prononcer avec certitude
sur leur nombre exact, Car ècrit-il, "je trouve ici qu'ils ~taieDt
environ trois cents, là trois mille sept cent vingt quatre "POLYRC
III, 98-99, confirme le chiffre vraisemblable de trois cents environ.

-
134 -
auxquels appartenaient ces otages
; peut ~tre m@me parvinrent-ils
i
~loiSner ceux-ci de leur a~cienne alli~e ~ Carthage.
En 202, SCIPION, vainqueur
à
Zar-a, accepte de n~gocier avec
les punlques. Mais i l exigea la livraison d'otages parmi les condi-
tions prealables à tout armistice (1). En
197, au cours de leur
deuxième entrevue à Tempe, PHILIPPE V et QUINCTIUS décident d'un~
trêve de quatre mois. Celle-ci est garantie par la remise, p~r l~
roi, d'otages dont "son fils
et quelques uns de ses amis
(2).
ANTIOCHOS III livra aussi vinGt otages parmi lesquels son fils,
lE
futur ANTIOCHOS
IVet quelques uns de ses conseillers (3).
En
161, POLYBE et
1.000 de ses compatriotes furent transférés
i
Rome en qualité ~'otages. Dans le livre II des commentaipesl
C~SAR
note qu'en recevan~ la soumission des Suessions, il avait ordonné
qu'ils lui livrent comme otaees les premiers personnages de la
citE ainsi que deux fils de GALBA, leur roi(4).
Cette derni~re pré-
cision a son importance, quand on sait que,
selon le romain, c'était
à GALBA, parcequ'il ~tait juste et avisé, qu'on remettait, d'un
commun accord~ la direction surp@me de la guerre (5). Nou~ pourrions
continuer de citer, d'autres circonstances c~ la remise d'otaGes
s'est opêrée ~galement selon des Critères de qualité (6). Nous nous
bornerons néanmoins à souligner un dernier exemple spectaculaire eu
égard aU grand nombre de nations que cette mesure a frappé.
Désireux
de porter la guerre en Bretagne SUIIS avoir
j
craindrè, en son absence,
(1) Malgré les divergences dans nos sources, nous avons la certitude
que le traité de paix a confirmé ou impos~ la livraison d'otages
Par Carthage.
(2) T.
L.,
XXXIII,13,14-15
; POL., XVIII,39,5.
(3) POL.,XXI,16- 11
; T. L.,XXXVII,
45,
4-21.
(4) César, II,
13,1
(5)
id., ibid. ,11,4.1. Il s'agit du soulèvement que les peuples de
la Belgique préparaient en COmnun en 57 av. J.C.
(6) En 208, Ile guerre punique, otage reçus d'Arretini
: T.L.,XXVTT
24,1 • otages Etoliens
: POL.,
XXI,
32,
10 • otages livrés par NAbIS

-
135 -
un ~uelconque soulèveMent, CESAR réunit les chefs de toutes les
nations "prinaipss ex omnibu6 civitatibus n "il avait rèsolu de
n'en laisser en Gaule qu'un tout petit nombre, ceux dont il était
Sûr et d'emmener les autres comme otages (1)".
Dans tous ces cas, les otages a~puraissent comme étant plus
que des gages. Certains exemples prouvent bien que R~I!le, profitant
de sa supériorité militaire, cherche en exigeant les membres les
plus influents des cités v~incues, à les priver d'une p~rtie de leurs
moyens.
L'objectif était de désarmer politiquement et écononique~ent
la nation dominêe~ en la privant d'une partie de !:n intellisentsia.
Cette cat~gorie d'otages est aussi celle gue la force procure.
Souvent lorsque César reçoit la soumission d'un peuple, celle-ci
intervient le plus souvent à la suite d'une victoire militaire.
Cependant i l existe de rares cas où des otage~.~ont livrés sans
qu'il y ait eu une pression directe du plus f~-t, autrement dit, de
Rome.
Ainsi lorsque,
en 56, CRASSUS avait réussi à soumettre les
Sotiates, peuples d'Aquitaine puis à briser une dernière rfsistance
soutenue par des renforts espagnols:
"A la nouvelle de ce combat"~
nous apprend CESAR
plus ~rande partie de l'Aquitaine se renu~t.
i
CRASSUS et, en outre (uLtro),
envoya des otages (
)".
C'est i
juste titre que L.
A. CONSTA~S, dans sa traductioo, souligne un
sens secondaire du mot uLtro: la spontanéit~. Auparavant, à la fin
de son second livre, César raconte qu'après la soumis~ion des peuple~
côtiers, COmme i l avait réussi à pacifier toute la Gaule, la renOm-
mée qui en parvint aUx barbares fut telle qu'il reçut des nations
habitant au-delt du Rhin des députés qui venaient promettre la
livraison d'otages et l'obéissance (3). C'est le même langage que
tient Cesar dans son livre IV. Avant qu'il ne s'embarque pour la
T.
L.,
XXXIV,
35,
11
;
César B.G.I,
3 1 ,8 ; II, 5,
1 ;
II, 5,
;
l I T
13, 1. Les oteges dont il s'agit sont soit des fils de chefs, soit des
chefs eux-m@mes.
(1) CESAR; V, 5,3-4
(2) César, B.G.
111,27,1
(3) id., ibid.~ II,35,
1

1
1
-
1 y: -
la Bretagne, "maints peuples de l ' t l e lui envoient des dêput~s
pour offrir de livrer des otages et de fairl.
8r)umission à Rome
(1 ~ Il
Les remises d'otages ne furent donc pas toujours effectu~es sous la
contrainte des armes.
De fait elles eurent parfois lieu sans que
le bénfficiaire,
si on peut s'exprimer ainsi, les eût exigees.
Cepen-
dant, il ne faudrait point s'y tro~per. S'il y a absence de con-
trainte,
cette absence n'est qu'apparente.
Il est évident que la
crainte de l'adversaire, sa sup~riorit€ patente, l'.ont surtout
inspirée.
Nul doute que l'appréhension d'un châtiment terrible l~s
ont poussé à agir de le sorte.
Mais dans un CaS Comme ùans l'Rutre,
il n' y a pas prise mais remise d'otages.
Naturellement, l'initia-
tive du choix revient au receveur,
COmI:le l'écrit, A. AY~4ARD "le
chf ~x des otages doit @tre toujours directement opèré, du moins
toujours approuvé par celui qui le reçoit
(2).
La raison est simple,
il faut procéder à un choix judicieux, faire en sorte que celui qu~
les livre soit censé ne pas pouvoir s'en désintéresser. Cette pré-
caution est aussi dictee par le bon sens, Car Rome cherche aussi à SC
premunir contre la remise éventuelle de personnages indésirables,
dont le sort laisserait indiferent
ceux qui les ont livrés. En
opérant le choix dans l'aristocratie influente, Rome visait à priver
la cite vaincue de ceux qui contrôlaient l'essentiel des richep~r
qui étaient les plus influents. Enfin en choisissant les princes,
Rome pouvait disposer de personnages parmi lesquels elle pourrait, à
l'occasion, trouver un prétendant au trene.
(3)
Le soin du choix revient au gên~ral victorieux, non pas à tit-~
pereonnel, mais en tant que représentEnt de ROme.
Les otages cartha-
(1)
id., ibid •• IV, 21.5. Il est du reste douteux que cette soumis-
sion ait reellement eu lieu
(2) A • AYMARD, PhiZippe de Macédoine otage à Th~beB op.cit. P.421.
I
(3) Nous reviendrons en fin de chapitre SUr les immenses possihi';+~~
qu'offraient ces otages princiers. Sigralons
seulement le Cas de
DEMITRIOS. fils de PHILIPPE V qui fut utilisé pour jeter le trouble
dans la cour antigonide. Les anciens otages qu'avaient été les .:;~J ""1-
cides ANTIOCHOS IV EPIPHANES et DEMETRIOS
1er SOTER avaient ~té
profondémén't' marquésffJ'ur v i e ' Rome.

-
137 -
Binois
sont choisis par SCI~ION; Vous nous renettrez
150 jeunes
"que je choisirai moi-même ••• " aurait-il di~ à ses interlocuteurs.
Des
prescriptions analo3ues
se rencontrent dans les traités sirnés
avec NABIS
;
avec les Etoliens, PHILIPPE V de Macedoine et ANTIOChOS
III
(1).
CESAR ne manqua paS à plusieurs reprise dans ses
commen-
tair~6 de signaler les otages qu'il réclama personnellement.(2)
Mais Rome ne s'est paS uniquement satisfaite de recevoir des
otages de haut rang social;
à la qualité, elle allia aussi le nom-
bre.
Les chiffres des personnes souvent r~clam~es à titre de Garrr~:­
sont élevés.
Les otages carthaginois furent au nombre de
150 selon
APPIEN, de
100 selon POLYBE et TITE LIVE.~e~t l'on sait qu'en
198,
à une a.mbassade carthaginoise venue
,
"on rendit
cent otages; pour les autres on leur donna. de l'espoir,
si
Car~~-­
ge oontinuait à tenir s~ -engagements. Aux mêmes ambassadeurs de~an­
dant que les otages qui n'avaient pas été rendus •••
(3)
"En
181
aussi l'historien romain parle de nouveau de cent otages rendus
(4)
Carthaginiensibus Eodem anno centUm obsides redditi.Il se pourrait,
comme l ' a souligné A. AYMARD,
que le nombre fixé par SCIPION en 202
ait étê augment~ en 201 par le Sfnat ou ses d~lfgués (5). En ~~fet
si nous suivons TITE LIVE, nous aboutirons à une augmentation nini-
Dale de deux cents otages, chiffre qui nous parait excessif.
Ca~
(1)
Tr- ité avec )1ABIS
: T.
L.,
XXXIV,
35,
11
;
avec les Etoliens
:
POL.,
XXXI,
32,10, avec PHILIPPE V de Macédoine:
POL., XVIII,
39,
5 ; T. L.,
XXIII,
13,
14. AVEC ANTIOCHOS III
: App., Syr>.,
39.
(2)
César B.G.,
II,
15,
1 ;
V,
4,
1 ;
V, 20,
4 ; VI, 4, 4, VII.
1 "
2.
Il s'agit là,
comme l ' a fait
remarquer L.
A.
CONSTANS,
des seu-
les fois
OÙ CESAR nous
renseigne,
avec précision, sUr le nombre oes
otages remis entre ses mains par l'enDemi cf. L. A.
CONSTANS, op.
ci t. P.,
1 78 n. 2 •
(3) T. L., XXXII, 2, 3, 4. Petentibus deinde ut~ si ia. videretur
senatius~ obsides sibi reddarent~r~ centum reddiû obsides ; de
ceteris,
si in fide permanerent,
spes facta.
Petentibus iisdp-
non reddebantur obsides ut •••
(4) id., ibid., XL,
34,
14.
(5) A. AYMARD, Les otagee carthaginois ••• op.,cit.,p.445.

-
13l:S -
Carthage affaiblie ne représentait plus en 201, le m~me danger
qu'en 20~. Certainement la question du nombre secble li~e à celle
du renouvellement qui se~ble obscurci. par les affirmations de
l'historien roamin.
Il ne pouvait s'agir ni en
198, ni en 1l:S1, de
restitutions, mais plutSt d'&change. On se borna â proc~der ~ des
échanges,
cent nouveaux otages venus de Carthage remplaçant chaque
fois cn Italie cent anciens otages liberés.
(1) M~me si nous igncrons
le nombre exact, nous pouvons affirmer qu'a ces deux dates, les
échanges touchèrent soit la totalit~ soit simplement une partie
des otages.
(2)
A l'exception des mille otages achéens, les nombres les plus
élevés exigés par un B~n~ral victorieu~ sont ceux que CESAR deman-
da aux peuples de Gaule. APrès la défaite des Trevires,
il exigea
de leur chef INDUTOMAROS deux cents otages (3). Des Bellovaques, i l
exigea six cents, enfin des Sénons, cent une première, puis six cents
une seconde fois L. A CONSTANS remarque qu'il s'agit 19 des Seules
(1)
cf.
A.
AYMARD,op.cit."p.
446
(2)
La version d'APPIEN (Lib."
53-54 et 59) considérant la livraison
d'otages ComMe une condition préalable aux négociations de l'armis-
tice nous parait plus plausible que celle
de POL.,
XV,
11,
3-18 ;
et de T. L.,
XXX,37,
1-6 et aussi 38,
1-3. "Surtout qu'on sait que
les Cart hagi:. ai savaient déj à,
au cour s d'un autre armi st i ce atta-
qué un convoi romain (T.
L.,
XXX,
24, 5-12 ; APp., Lib.,
34. On la
rappela même à l'occasion du nouvel armistice (POL., XV,
11, 3,
18,
3 ; T.
L., XXX, 37,
1-6.
Ce qui ?rouve bien q~e lesotcBcS ~e­
vaient ~lutSt carantir.l'armistice.
(3) INDITIOMAR03 et CINGENTORIX, â la t!te de deux fonctions rivales,
se diBPutaie~ le Pa.lWOir, au sein de la nation trevire ,La trahison
du second favorisa quelque temps, la Soumission du premier:
CESAR,
B.G., V,3 et 4. Les Trevires livrèrent â CESAR le fils d'INDITIOMA-
ROS ainsi que tous les proches de ce dernier réclamés nommément
(nominatiumJ par le proconsul id., ibid., 4,2.

-
139 -
fois où le général nous renseigne sUr le nombre des otages remis
entre se~ mains (1). Mais ces ~r~cisions numériques ne sont pas
l'effet du has~rd. Car si CESAR avait r~clame de ces peuples
des
otages aussi nombreux,
c'est à CaUse de la grave menace politique
qu'ils représentaient pOUr Rome.
Des Bellovaque
qui en livrerent
six cent~, le ~omain nous dit que parmi les peuples belges. ils
étaient "les plus puissants par le Coura~e, l'influence et le nom-
bre" P2.11l'imum inter eos Be2.2.ovacoB et virtute et auctoriatate et
hominum numepo va2.6re .(2)
Des Tr~vires il ne dit absolument rien,
mais bien des passages des commentaires font allusion à ce peuple
qui
exer~ait une influence consid~r~ble SUr tous ses voisins
irnnédiats
(3).
Rome a donc
tr~s souvent exi~~ de ses adversaires, un nombre
très élevé d'otages.
Cela est dn certainement à des abus. Toutefois,
remarquons que, malgré l'enormitê des chiffres, leur nombre deMeu-
rait toujours peu élevé pOUr que leur absence pût affaiblir militai-
rement l'état qui devait les livrer. Tout au plus. ce recOUrs à un
nombre élevé,
ôtait au vaincu la possibilite de disposer de ses
membres les plus influents et les plus riches.
Le critère~d'âg~'aussi intervenait dans le éhoix. POLYBE tout
comme TITE LIVE precisent que les otages carthaginois devaient avoir
"au moins quatroze ans et au plus trente ans".
L'achéen insiste sur
l'&Be dec Etoliens
~ livrer. "Ils devraient avoir au moins douze ans
et au ~lus quarante ans (4)." Ceux ;u'on exigea d'ANTIOCHOS devaient
av~ir "au moins dix huit ans et au plus quarante cinq ans. (5) "Ainsi
des enfants pouvaient être donnes conme garantie
; bien que ~our
certains leur âge semble trop bas pour qu'ils puissent, tout au reins
(1)
L. /'.. CONSTANS, op.cit •
• p. 178 note 2.
(2)
César, B.G., I I , 4 , 5
( 3)
id., i bi d ., III,
1 1, 1.
(4) POL.,
XXI.
32,10.
(5) id., ibid ., XXI, 43, 22 et T. L., XXXVIII, 38,
15.

-
140 -
dans l'immédiat. servir comme soldats.
Ce qui nous po~sse à écarter
dans leu~
choix. l'hypothèse d'une préoccupation militaire. et è
supposer qu'il ob~issait & des imp~ratifs politiques. Il f~llait
receuillir ces
jeunes otages, les éduquer afin d'en faire
des
rornanophiles rompus.
Cela pouvait être ~lausible pour les jeunes
princes, mais point pour les autres.
La remarque de A. AYMARD (1)
non.plus ne nous donne satisfaction que dans une certaine
~esUre.
Certes en cherchant à s'assurer des otages dans la force de
l'âge, demeurant en bonne sante et ayant chance par consequent dé
s'adapter plus aisément sur une terre étrang~re, on diminuait les
risques de mortalité. Mais surtout,
conme nous l~ pensons, Rome se
ménageait de cette façon, un moyen qui lui permettrait à tous mo-
ments, de faire pression Sur leurs parents singulièrenent. en Cas
de non respect des engagements pris.
Ainsi en 208, craignant ln
défection de la ville alli~e d'Arretium, les Patres y dep~chèrent
une légion conmandée par HOSTILUS. Celui-ci convoqua aU forUm. les
aénateurs de la cité et exi~ea des otages. Ils tournirent
cent vingt otages "leurs propres enfants", précise le padou3n.(2)
Le choix des otages devait donc obéir d de nombreux critères
car i l fallait
"tenir compte des liens existant entre les otaees et
ceux dont ils garantissaient l~ parole et de l'intér@t que ces der-
niers y attachaient,
faute de quoi l'institution perdrait toute
efficacité.
(3)
"Ronc a tOc.jours cherchf ri operer une choix judicieux
afin de disposer d'un moyen de pression efficace.
C'est ainsi que
pour garantir les clauses du traité conclu entre NABIS et FLAMININUS,
le romain exigea cinq otages dont le fils du tyran.
(4). En 189.
aux préliminaires de paix à Sardes,
Rome exigea d'ANTIOCHOS III
vingt otar,es. Parmi ceux-ci devaient figurer le futur ANTIOCHOS IV
(1) A.
AYMARD,
Les otages ~a~thaginoi8 op.cit.~ p. 446.
( 2) T. L.,
XXVI l , 24,
5.
(3) Ri LONIS. Les usag~s de la guerre ••• op.cit.~p.137.
(4) T. L.,
XXXIV. 35,
11.
Il s'agit d'ARMENES qui. avec DEMETRIOS,
le fils
de PHILIPPE V, ornèrent le triomphede TITUS.

-
141
-
et les conseillers royaux hostiles
a la République (1). Le choix
des
Romains pouvait donc por~er aussi bien sur les citoyens infl~ents
OU
leurs enfants,
que sur des princes h~ritiers. Tout ependait seu-
lement "de la nature des engaBements P
s par le donneur,
du dc[rl::
de confiance que l'on pouvait lui accorder, de la puissance OU al::
la faiblesse
du receveur (2)." Toutefois rerr.arquons
qUl:: Rome n'~xi­
p.;ea pas d'otages féminins au cours de notre pèriod.e.
Les
"seules"
dont elle entra en possession sont "celles" qui
figuraient parmi les
otages espagnols
Bardés à Carthagène.
Elles
se plaignirent mêne
auprès
de SCIPION,
des exactions dont
elles étaient victimes.
A cn
croire TITE LIVE,
une femme âgé:e
(3)
aurait d~rnand~ au g3néral "ue
recommander avec plus d'enercie
a leurs gardl::s. les soins et les
êgards dus
~ leur rang."
Une fois
les otages remis,
qu'en faisait-on?
Cela revient
à poser
le problème de leur garde.
II -
LA
GARDE
DES
OTAGES
L'otage est un garant des
engagements pris ou reçus
;
i l va de
so~ qu'il devait ~tre m~nage, d'autant plus que sa disparition.
privait Rome du moyen de pression dont elle disposait.
D'autre part
i l semble bien que l~ droit des Anciens conférait à l'otage, l'i~­
munité diplomatique.
Bien des passages de la tradition romaine le
(1)
POL.,
XXI,16-17
; T.
L.,
XXXVII.
45,
4-21
;
Diod.,
XXI,
10.
(2)
R.
LONIS, Les otages dans
les r~ations int ••• op.cit.~ P. 220
(3)
Il s'agit de l'fpouse de MANDOUNIUS,
roitelet Des IlerBètes
:
"tout autour d'elle,
ajoute TITE LIVE,
i l Y avait" •••
florissantes.
de
jeunesses et de beaut~, les filles d'INDIBILLIS. et d'autres
d'une éRale noblesse •••
"Elles furent
sans nul doute l'objet de
viels.
Ce qui poussa leur doyenne à
se plaindre auprès du général.
Celui-ci se décida alors à les confier "à un ho~me d'une moralité
éprouvée,
en lui ordonnant de veiller Sur elles avec
autant de
respect et de discrétion ..• "
'1'.
L.,
XXVI,
49.
11-15,
16.

1
1
-
142 -
1
confirment.
APrès aV01r fcouté les
plaintes de la femme de MANDOhIuS,
aCIPION lui
jura sur son houneur et
sur celui du peuple romain,
qu'il empêcherait tout acte qui
violerait
"ce qui est partout sBcr0
(1)
Dans le livre V du bellum gallicum,
le discours que
CE8AR
pr~te à AMBIORIX, senble se référer à cette im~unité. Dans c~tte
ProBOPOpee,
le eaulois reconna1t que
c'est [.râce au romain qu'il
reçut "son fils et
celui de
son
frère,
qui, etant au nombre des
Co
otaf,es envoyés
aux Atup-tuques,
avaient été traites par eux en
prisonniers et ·charfés de
cha1:nes
(2)".
Autrement dit,
l'esclavncl:'
et les
fers
sont le lot des guerriers vaincus et ramen~s Comne
butin de euerre,
alors que les
ot~Ges doiveut ~tre trait~s avec
,
. . . . ~ .
.
d
tous les eeards dus a
leur
~. Le drolt de guerre mettalt
one
les otages à l'abri des mauvais traitements.
Mieux,
ils avaient la
possibilité de
se plaindre de leur
condition de detention.
En
19b,
les ambassadeurs
CArthaginois
sollicitèrent un chaneement de
rfsi-
dence pour les otaees
de Norba,
en invoquant l'inconmodité de la
ville
(3). On leur donna, du reste, satisfaction.
C'était au Sénat de choisir le lieu de résidence des otnces.
Ceux de Carthage furent
d'une façon
e~nérale, r~partis dans les
vi Iles
:u nomen
latinum (4) c ert ains qui r t= s idaient a S eti a avnie nt
de nombreux esclaves à
leur
service.
(5) Nul doute qu'ils menaieLt
un train de vie luxueUJ Qui
contraste avec celui des otages ~aren­
tins qui,
en 212,
"i;:taient gardés dans le vestibule du temple de la
(1)
T.
L.,
XXVI,
49,14
(2) César, V, 27,2.
C'est la mê~e indienation qui habite l'héduen
DIVICIAC, dénonçant
devant
CESAR les crimes du chef germain ARIOVIS-
TE Qui
: . . .
exige comme otaces les enfants des plus grandes
famil-
les et les
livre,
pOUr l'exemple,
aux pires tortures,
si on
n'obéit paS au pre~ier siene ou si seulement sont désir est contra-
rié .•. "
idem, B.G.,
I,
31,
12 et
15.
(3)
T.
L.,
XXXII,
2 , 4 .
Ils habitaient chez des particuliers.
(4) id., ibid ., 26,
15 Princip~lement
à Fregelles,
Narba, Siênio,
Setia,
Ferentinum,
Cercei.
(5) id., ibid.~26 ~ 5 : CUm ii8~ ut ppincipum libepiB. magna vis
BepvOPum el'at.

-
143 -
liberté avec peu de
soin .•• · Ces faits
nous incitent a croire ~~
la suite de A.
AYMARD.
que l'~tat ro~ain, ne pourvoyait pas a
leurs dépenses pas plus que les
bud~ets locaux des villes où ils
résidaient.
Issus de milieux familiaux ais~s, leurs parents leur
envoyaient l'arcent n~cessaire a leurs besoins.
Ces fonds pouvaient
leur ~tre adressés par le biais dee ambassadeurs de leurs pays.
Ceux-ci avaient accès à
leur lieux de résidence, donc pouv~ient
écouter leurS plaintes,
recueillir leurs doleances et mieux, êtr~
leurs int~rprêtes auprès des autorités romaines
(1).
Nul doute
aussi,
qu'ils
jouissaient d'une relative liberté de ~ouvement et
d'une surveillance discrète,
qui,
du reste se reuforçeit à la moin-
dre menace.
C'est quand on
apprit la d~fection de Tarente, que
leurs otages furent enfer~és dans le vestibule du temple de la
liberté à Tarracina.
En
198, ceux de Carthaee furent enferώs dans
leurs maisons
quand on déCouvrit qu'ils forment aient un complot
avec des esclaves puniques.
(2)
Même soumis à une certnine surveillance, les otages
sont
considérés Comme des hommes libres.
En règle géoerale.
ils semb-
,
lent avoir été bien traités
1.
Rome aU COUrs de notre periode.
Le
seul exenple de massaCre d'otages
eut lie~ en 212 aU cours de la
se~onde guerre punique. D'apr~s TITE LIVE, PHILEAS, après avoir ache-
té les deux eardiens du temple, profita de l'obscurit~ pour conduire
les otages hors de priso:
et
s'enfuir avec eux.
Mais
ils fUrent
rattrapés et ramenês "On les
conduisit nU comitium et.
apr~s les
avoir battus de verges,
avec l'approbation du peuple, on les
jeta
du haut de la rochE;: Tarpéienne
(3)".
L'atrocite de ce châtiment
1
(1) T. L., XXV, 7,
11 i
propos des otages de Tarente "PHILEtS de
1 Tarente, qui depuis longtecps, sous le prétexte d'une ambassad~, se
trouvait d Rome ••• trouva acc0s
aupr~s des otages ••• " cf. l'amb8ss~­
1 de carthaginoise de 19t1. idel'l. XXXII, ",4"••• les mêmes deputl:s
demandant que les otages qu'on ne rendait paS fussent
r~tir~s de
1 l~rba~ o~ ils étaient mal. on leur accorda qu'oo les enverrait à
Si~niB et • Ferrentinum."
1 (2) T. L., XXV, 7. 12 pour les otages Tarentins et XXXII. 26,4-1d.


-
144 -
révolta même certaines cités grecques d'Itali~. L'accord du peu-
ple était un préalable contr~ toute répression dirigée vers des
otages.
Celle-ci. légitimee par la tentative de fuite
avortée,
semble plutet avoir été motivee par la défection de leur ville.
Quant
à la durée àe la détention de l'otage.
elle dépendra
simplement de la nature de l'engagement pris.
selon R.
LONIS,
"lorsqu'il s'agit de garantir la fidélité
à une alliance que l'on
espère aussi durable que possible, d'obtenir une soumission que
lion souhaite sans
soubressauts ou de maintenir une paix que l'on
ne veut pas précaire,
il va de
soi que l'on ne saurait fixer
de
limite à la détention des otages( 1).
L'otage pouvait donc être livré sans limite de temps
quand,
par exemple,
i l devait garantir le respect des clauses d'un traité
de paix.
Ce fut le cas des otages carthaginois et seleucides.
Mais
là réside un risque.
La longue détention entra1nait du même coup
de vieillissementde certains,
qui dépassaient ainsi l'âge limite
fixé par le traité
i
et, aussi,
la déperdition de cette valeur.
La
solutipn résidait alors dans leur renouvellement.
Celui-ci.
comme
l ' a souligné A.
AYMARD,
en m~me temps qu'il répartissait entre un
plus grand nombre d'individus le sacrifice que constituait le
séjour en pays étranger,
remédiait aussi au vieillisement des ota-
ges
(2).
D'ailleurs,
certains traités prévoient ou réglementent
rn~me le renouvellement des
·,tages.
l.,e traité d'Apamée imposa JiU
Seleucide, une périodicité triennale dans
le renouvellement des
otages
(3).
Dans un autre de ses articles. !.
AYMARD notait qu'en
174,
à la mort de SELEUCOS IV PHILOPATOR son fils DEMERTRIOS
1er SOTER
Pour ceux de Carthage.
T.
L.,
XXV,7.
13-14
(1)
R.
LONIS,
Les otages dans
~es ••• op.cit • • p.22d
(2) A. AYMARD, Les ota[Jes carth •••
op. cit •• p. 446-447.
(3) POL.,
XXI,
43.22 et T.
L.,
XXXVIII.
38.
15.

-
145 -
se trouvait
à Rome, où
i l avait depuis
remplacé comme otage son on-
cle paterLel le futur
A~TIOCHrS IV EPIPHANES. (1) Mais le renouvel-
lement,
s ' i l remédiait
au vieillissement
entraînait une déperdition
aU f i l
des échanges de la véritable valeur des otages.
Leur choix,
nc~s l'avons déjà vu, ne pouvait @tre fait que par le géneral vic-
torieux qui
en exigeait la remise.
Celui-ci, en tant qu'étranger
ignorant les ramifications
familiales
de l'ennemi, portaut naturel-
lement son premier choix sur les proches parents du chef vaincu et
sur les membres des familles
influentes.
Il pouvait avoir tou~ les
renseignem~n+5 les concernant en interrogeant les prisonniers.
Mais dans
le cas
de renouvellement,
i l
sera difficile de dres-
ser la liste des otages
de remplacement.
Sans doute
cette tâche ert
confiée ~ des magistrats designés à cet effet par le Sénat. Or avec
le temps,
i l leur
sera difficile de bien connaître les ramifications
familiales des dirigeants
et même mieux les
intrigues
internes chez
celui auq~el ils doivent
imposer le choix de Rome.
Pour resoudre ces
difficultés,
l'Urbs fit très souvent appel à ses alliés. C'est ce ~ui
semble ressortir de ce passage de TITE LIVE qui parle d'un fils de
~~SINISSA qui, en 168, demandait au nom de son père, que tel carthn-
.
ginois
soit réclame en remplacement
de tel autre
(2).
Mais mêrn~ par
(1)
A.
AYMARD,
Au1ol..t7> de l'avènement d'AdTIOCHOS IV, in Et. d'hist.
An c.,
p.
U •
F.,
19 67 ,p. 2 40 - 2 6c'.
p • 240.
Not 0 n s
que la p é rio die i t é t r i e n -
nale ne fut
paS appliquée aU renouvelleoent des otages carthaginois
detenus depuis 201,
renouvelés en
l~cl et 1Gl. Il Y avait donc une
nrythmie des échanges
q·... e confirme la phrase de TITE LIVE "AUX ambas-
sadeurs carthaginois demandant
que,
s ' i l plaisait
au Sénat, les
otages
1 leur fuss~nt rendus, on rendit cent otages i pour les autres on leur
donna de l'espoir,
si Carthage continuait à tenir ses enga.gements"
1 cela implique que l'initiative de l'~change vient des ambassadeurs,
le S~nat n'est pas obligé d'y consentir.
1 (2) Petenti Masgabae, ut Hanno, Hamilcaris filius, obses in locum•••
exigeret.Il y a là une lacune
évidente entre les deux mots,
qui nous
1 interdit de- conna!tre l'issue de cette demande '1'. L., XIV, 14, 5.
1


-
146 -
ce biais le problème ne sera ~ue partiellement résrlu. et il arrive-
ra un mom~nt OÙ Rome se contel tera simplement d'entériner les pro-
positions et suggestions de celui
qui les remet.
La succession des
choix,
finit
donc
par altfrer la qualité affective ainsi
~ue la
représentativité des otages.
La détention à long terme lésait néces-
saireMent le détenteur.
Cet aspect n'a pas êchappè é
R.
LONIS qui
y
voit "la curieuse inadéquation d'une garantie
(')".
Il nous para1t maintenant loisible de r~pondre a une question soule-
vée plus haut,
conce·nant l'efficacitê de cette institution,
ses
insuffis~nces et ambiguités.
III
-
A
QUOI
SERT
L'OTAGE?
Rome,
au courS de notre période,
a exige des
otages pour s'as-
surer la soumission d'ennemis vaincus
(2)
; pour garantir la fidélité
d'alliés
(3) ou prévenir leur défection (4), pour préparer une en-
trevue
(5) ou négocier une trève (6) ou garantir des clauses d'un
traité de paix;
en règle gen~rale là OÙ la confiance n'existe pas
(1)
R.
LONIS,
Les Otages •••
op.cit.,p.230
(2)
En
196,
traite de paix avec PHILIPPE,
T.
L.,
XXXIII,
30.
1-9
;
10 "Pour garantir ces conditions,
Ol!
reçut vingt otages •••
"En
195
traité de Paix avec NABIS,
id.,
ibid.,
XXXIV,
35,
'1
"Pour garantir
ces
claus'Cs,
i l donnerait
cinq (
'iges ••• "
(3) Otages Ubiens (peuplades de G~rmanie) remIs a CESAR, B.G.
,
1V,
16
;
5. En 55, les Ubiens "qui .•.
avai~nt lit: aMitié avec lui, lui
. avaient donné des otages••."
1\\
...
"'1
• •
:

&
_
s
bruits d'une défection'
~
étalent chaque Jour plus sérIeux on ecrlvlt à C.
HOSTILIUS de Prendre
sans différer des
otages chez les Arretini.
(5) id. ibid., XXVIII, 35, 4. En 206, MAE!NISSA, sollicitant de
SCIPION une e~trevue l'invita a garder "comme otages deux des
trois chefs
Numides"
qu'il lui
avait
envoyfs pour fixer
la date et
le lieu de leur entrevue.
(6) En 197, PHILIPPE V livra "son fils et certains de ses anis Cornt!e
otages" pour garantir la trève de quatre mois qui
lui fut accordée.

Il n'est pas rare aussi,
en parcourant le bellum gallicum~ d~
trouver des
otages livrés
sans
qu'il y ait eu pression de CESAR.
C~s
nombreux exemples et rn@~e "1'extraordin3ire longévité de cett~ for~~
conventicnnelle" aurait pu nous forcer à croire que l'otage consti-
tuait
une garantie réellement efficace.
A tout cela s'ajoute nussi
le soin méticule~x avec lequel ils étaient choisis SUr le double
plan de la qualité et du nombre.
Un examen attentif ~es faits nous a ~Menés à douter de l'effi-
cacit~ de l'institution. Les nOMbreux exemples de remises d'otages
s'expliquent surtout par les victoires
romaines
si nombreuses.
Très
souvent elles vi~~ient un souci ~lccentaire : celui de mieux asseoir
la domination romaine ou forcer l'allie à respecter sa parole don-
née.
Mais elles répondaient aussi a un souci de publicitf visant à
convaincre l'opinion de la toute puissance de l'Upbs.
Par exemple les
quarante
otages que CESAR exigea des Trinovantes
(1)
~taient cer-
tainement destinés
à jeter la poudre aux yeux de ses compatriotes,
d leur donner l'illusion d'une conquête;
effective et perm~nen~p
Pourquoi le proconsul s'est-il contenté de n'exiger que quarante
otages de ce peuple qui vivait "au dela de l'océan"~ Ùous savons que
le gêneraI ronain a enduré des difficultfs de t Jutes
sortes 10r3 de
ses deux premieres exp~ditions en Bretagne en 56 et 51. Comment
aurait-il pu m~me e~rnener avec lui un si grand nombre d'otages dans
ce qui restait de sn flotte.
(?)1 Ce chiffre relativement
"modeste"
ne pourrait qu'accr~diter une fois de plus sa prêtendue cl~mence.
Chel le v~incu, la remise d'otages parait moins hUmiliante e~
surtout plus pratique que l'installation de garnisons.
Mais cette
(1)
cf.
L.
A.
CONSTANS, op.cit.~p.
147 note
1.
(2) Au lendemain de cette seconde expfdition en Bretagne,
CESAR avait
~
perdu quarante navires dans une temp@te B.G••
V,
11 J
2.
Le retour
,-en Gaule fut difficile : après avoir attentdu en valn les navir:~
d'un premier convoi, voulant éviter que la saison lui interdit la
~er "car on approchait de l'èquinoxe", le g~n~ral romain dut se r'si-
gner Il embarquer ses troupes "plus li l'étroit", angistius
(V,23)

-
1 L 6 -
re~ise d'otages ne l'a pas toujours enp~ch~, ~ ch~qu~ fois q~e l'oc-
casion sc .t>résc~~t~it, JL :.o",!.,l.t;L·c (;:1 cause Il; diKtat de Rome. En
212,
Tarente, ~~lgré les otages qu'elle ~vait remis, fit dêfection
pendant la deuxième guerré puni~ue. La Grèce, maIgre les mill~
otages achéens dftenus depuis
167 a Ro~e,
se revolte~a quelqucs
vingt annés plus tard.
CESAR dans
S(;3
conmentaires nous confie souvent que telle op~­
ration entreprise par lui,
avait pour objectif de maintenir llenr~_
dans le devoir ou dans la paix
(continere in amicitia ou in pace).
Le vaincu,
dans la plupart des cas,
reprenait quelque temps après
les armes.
En Gaule, malgré les six cents otages
exigés des Bello-
vaqueS, les deux cents autres livrês par INDUTIOMAR, les
s~x cents
des S-~ons, les exp~ditions romaines ~taient toujours en butte u
àes
soulèvements,
constamment r~prines et constamnent renaissants.
Autant de faits qui Prouvent que les otages vraisemblableruent n'en-
couraient pas de représailles directes.
En quoi d'ailleurs,
la tor-
ture,
voire l'exécution des otages,
auraient-elles pu ramener ù de
meilleurs
senti~ents? Une pareille attitude aurait au contrairE
.1-
guis~ la hargne du vaincu d'hier, vU que le moindre moyen dc p~~-_!­
n'existai_ plus.
TITE LIV~ notait que l'atro. itc du c~âtimen~ in-
fligé
aux otages tarentins "rfveilla, àans deux des
cités grecques •..
non seulement les
sentiments nationaux, mais aussi
ceux des particu-
lier s
(1)".
Ces réactions prouvent
bien que l'on trouvait ridicule,
de
~~:.
re payer par des
innocents,
les
fautes
commises pRr leur ét~t. Cet-
te raretê d'exécution d'otages,
m@me en caS d'indéfidelité flar,~~t~

.
.. _
1
dêmontre aussi la falole efficacite dc
cette institution.
L ~~punilG
de fait des contrevenants, ôtait à cette garantie,
son esrence
m~me. Rome s'en rendit conpte assez tôt, aussi très s~uvent se ~êsi-
t
Il
...
pas.
d
"
6
. . . .
gna
-e
e a ne,exlger
es otages.
AlnSl
en 20
,
SCIPION,
apres avolr
( 1)
T.
L.,
XXV,
8,
1-2.

-
149 -
pacifié l'Espa.gne et défait lechef barbare MANDOUIUS et ses troupés,"
n'exigea pas d'otages"
CAr le..ir dira t - i l "ce n'est pa.s contre des
otages innocents mais contre eux-mêmes qu'il sévira, s'ils font
défection;
ce n'est pas un ennemi sans armes, mais un cnneni arné
qu'il punira •••
(1).
Même en rourant
à ce gage, Rome savait a l'avanc~ à quoi elle
. ,
.
, .
.
po. s
.
I l
devalt s
attendre.
Mals elle n 19noralt ~le par cette pratlque, e
e
opérait une véritable ponction dAns les
forces vives du donneur.
Ainsi, en choisissant les futurs
dftenus dans la couche influente
qui';contrêlnit l'essentiel des richesses,
ROme cherchait à priver
l'ennemi,
ne serait-ce que teoporairenent d'une partie de ses res-
sources.
Car très souvent, nous l'avons déjà souli~né, le nombre des
otages demeurait toujours peu élevé pOur que leur absence pût mili-
tairement affaiblir l'etat qui devait les livrer.
A cela s'ajoute
l'âge mini~um fixé trop bas po~r que certains puissent servir comme
soldats.
Cette préoccupation d'ordre stratégique explique le nombre
parfois très
élevé des otages prélev~s chez l'ennemi vaincu. Du
reste l'utilisation abusive de
ce procédé a fini par entrainer une
dépréciation de cette garantie.
Le déliCat problème du choix a aussi dans une certaine mesure,
contribué au d~clin de cette institution. Aussi meticuleux que pui~se
être leur choix, leur "force de dissuasion" allait en se détériorant,
au fur et à mesure que de nouveaux cadres politiques, de nouve~ux
chefs militaires prenaient la place des personnalités dont les hasards
de la guerre avaient fait
des fils ou proches, des otages. Le seul
aspect positif résidait dans le choix d'otages princiers.
Les Romains
n'ignoraient pas que ceux-ci, après avoir vécu au milieu d'eux et
fait
l'apprenti.sage direct de leurs moeurs et civilisation pourraient
devenir, une fois
libérés,
consciemment ou non,
des propagandistes,
par l'exem~le, de la culture et de l'esprit de Rome.
(1)
T.
L.,
XXVIII,
3 4 ,
9-10.

-
150 -
Mais cet aspect,
n'échp.ppqit Sans doute pas, aux valncus.
l
si le renouvellement leur permettait-il, d'abr~ger la duree de le
séjour,
car ln pespective d'tissimilation culturelle de leurs re~­
sortissants ne pouvait leur pl~ire. (1)
A toutes
ces interrogations relatives à l'efficacité de cet
te institution, s'en ajoute une autre non moins fondamentale.
L'o
est-il réellement utile pour le receveur quand on sait qu'il est
avant tout en gage? Comme le constate R.
LONIS,
le gage doit perm
tre "nu cr€ancier
d'être dfdommagè en totalit~ ou en partie, si s
d€biteur
vient à être insolvable.
L'otage de la même façon,
cons-
tituait une sorte de gage sur lequel le receveur pouvait se dêdom
ger du prfjudice subi en Cas de violation des engsgements pris pa
le donneur
(2)".
Ces précisions
importantes appellent une autre
question celle de savoir quelle forme pouvait revéler ce dédommage
ment? Malheureusecent,
nos
sources so~t muettes sur ce poin~. Il
nous a ét€
imp~ssible, en dehors de l'exemple connu des otages tar
tins,
de nous faire une idée exacte sur le sort qui
fut réservé au
otages,
quand un contractant déloyal violait sa parole donnée.
On
sait rien de ce qui est adv~nu aux otages carthnginois au moment 0
éclate la troisième guerre pu:lique, car i l n'est plus question dIe
après
168. Les
Ubiens,
après leur soumission ponctuee par la remis
d'otates,
violèrent leur engagement en se soulevant à nouveau.
Qua
CESAR,
parvint à les
so~mettre une seconde fois, ils le supplièr~n
de les épargner et .;'il veut plus d'otages
(ampliuB obBidum)~ "on
(1)
Ces
aspects importants du renouvellement des otages
semblent a'
échapp~ à R. LOUIS, Les otages ••• op.cit.~ p. 229. Il s'est conte,
en citant A.
AYMARD d'i~sister
SUr
le fait que le renouvellement,
en plus qu'il remédiait
au vieilli~sement permettait "de répartir
entre un plus grand nombre d'individus,
le sacrifice que constitua
le s~jour en pays étranger
"
(2) R.
LONIS,
Les
otages ••• ,
p.234.

-
15 t -
en donnera".
Ce qUl prouve bien que l~s otages Ubiens n'avaient
pas été tués.
Q~'advennit-il alors de l'otage, en caS d'engagements non
tenus? Nous ne pouvons, faute d~ documents, que fonder notre répon~~
sur des hypothèses.
Celle qui nous parntt la plus plausible est qU0
l'otage était alors réduit à un prizonnier de guerre.
Dès lors, i l
perdait l'immunitf que lui
conférait sa première situation et
s'exposait aux conditions qui pouvaient frapper un prisonnier de
guerre:
asservissement,
vente ou liL~r~tion. Rarement il ~tait
exécuté, parce que Rome y
p~rdrait une possibilité d'obtenir une
compeusation.
Cet aspect n'échappait pas aux vaincus,
c'est la raison pOUr
laquelle,
sachant que leurs compatriotes détenus ne risquaient
absolument rien,
ils rouvraient les hostilités d'où naturellenent
ils· espEraient sortir vainqueurs.

-
152 -
C li {I PIT n E Q U ,'\\ T 0 '.:
,.
l ,
~
ROLE [T STf\\TUT DéS
.~'1BASS!\\DEURS
Ce sont les véritables agents de la vie internationale en raison
des multiples aspects de leur rôle. En effet c'êtait à eux que l'on
recourait à tous les stades décisifs de la guerre. Dans le chapitre
relatif à la déclaration de guerre, nous nous sommes efforcés de
mettre en lumière leur rôle quand i l s'agissait de déclarer ouverte-
ment la guerre à l'ennemi. IL s'agira de voir dans ce chapitre lest
prevoyaJ.en
qualités que l'on requiert d'eux. ce que les lois de la guerre en ce
qui les concernait. Comment ils s'acquitta~ent de leur mission. En
d'autres termes quels étaient leur domaine d'intervention. Enfin quel
aura été le comportement de Rome face aux ambassades étrangères.
Avant de répondre à ces interrogations, i l n'est pas inutile, nous
semble t - i l , d'évoquer brièvement les traits par lesquels ils diffe-
raient des legats "envoyés O'W
d$légués lieutenants de l'imperator i
mais aussi d'une autre catégorie d'envoyés aussi
les nuntii.
I
-
LEGATI
ET
NUNTII
Les ~6g4ti désignaient les représentants et les lieutenants du
général en chef tout comme les ambassadeurs, délégués et envoyés auprès
des nations étrangèeres. Mais si le vocabulaire latin admet les deux
sens. lieutenan~et ambassadeurs n'ont pas les mêmes fonctions. Les
légats-lieutenants n'existent dans l ' ,rmée romaine qu'à
partir du
second siècle, et de façon encore mouvante. J. CARCOPINO, note que
l'on ne retrouve pas de légats dans la liste des pertes de lannes.
(1)
CL. NICOLET ajoute que ce n'est qU'apr~I~' réforme marienne que
le titre et la présence des légats deviennent tout à tait réguliers
dans l'armée. En
191. le Sénat en même temps qu'il prorogeait les pou-
voirs de FLAMININUS lui fait adjoindre Comme légats : P. SULPICIUS et
P. VILLIUS (2). En 190, BCIPION l'Africain, treize ans après sa victoi-
(1) J. CARCOPINO, Rist.
Rom •• op. cit •• p. 44 cf également C. NICOLET,
Rome et lQ conqulte ••• op. cit. T. 1. p. 320-321
(2) T.L., XXXII, 28.

- 153 -
re sur Carthage, partait pour la Grèce comme légat de son frère
(1).
En 109, à la veille de sa réforme, MARIUS est légat de METELLUS en
Afrique. (2) En principe, ils sont nommés par le sénat, peut-être
sur proposition du général en chef. Certaines nominations interviennent
à la suite d'une carrière militaire ce tut plus OU Doius le cas de
SCIPION par exemple. Ce sont tous des sénateurs, donc d'anciens msSis-
trats, souvent m~me de rang élévé. C'est certainement en raison de
leur expérience (3) qu'ils sont adjoints à t'imperator. Quoi de plus
normal de les retrouver au sommet de la hiérarchie
militaire. Officiel-
lement, ils sont donc les délégués du général auprès de ses troupes.
POLYBE en ~aisant la description du camp romain donnait à ces col-
laborateurs du général en che~, un double nom de délégués et de conseil-
lers (4). O~~iciellement, ils étaient sûrement des agents de
~
surveillance des armées.
Comme nous aurons à le voir, leur rôle diffère
totalement de celui de cette autre catégorie de legati(5) tout comme
celui, du reste, assigné aux K~ntii.
La notion de messagers n'est employfequ'à propos d'une espèce
.
bien définie d'envoyés
:CeUX quivont transmettre des ordres ou des
consignes à des cités qui sont déjà sous la dépen4ance politique de
Rome. IL en est ainsi, par exemple, des Lingons, peuple voisin des
Héduens et des Séquanes, auquel vers la fin de la guerre contre les
Helvètes, l'imperator interdit ~ormellement d'assister ces derniers,
Caesar ad lingonas litteras nuntiosque misit ne eos frumento neoe alia
re iuoarent :qui si iuoissent~ se oedem loco quo heloetios
(1) id. ibtd.XXXVII, 1,9
(2) Sall.,Iug., XLVI,7.
(3) SALL., Cat.,LIX,6. SALLUSTE après avoir cerné la réalité sociale et
professionnelle de M. PETREIUS par les termes d'homo militaris, décrit
ainsi sa carrière" •••
tribunus~ aut praefectus aut l~gatus aut p~aetor
in ezercitu fuerat.
(4) POL., VI, 35, 4 et XXXV, 4-5
(5) Leur étude est encore à ~aire malgré les pages que leur consacre
J. HARMAND, op.cit.~
p. 369 note 346 ; p. 370 note 350.

- 154 -
habit~pum.(l) Leur rôle est donc très limité et pourrait même être
comparé à celui des hérauts en Grèce. Ces précisions faites, il nous
est maintenant loisible de répondre à notre première interrogation
quelles étaient les personnes remplissant les fonctions d'agents diplo-
matiques? Comment les choisissait-on?
II -
CHOIX
ET
QCALITES
DES
AMBASSADEURS.
A Rome, les ambassadeurs étaient désignés sous le nom de légations
(Zegationes) et les ambassadeurs portaient le titre de legats (Zeqati).
N'importe qui, de même qu'aujourd'hui d'ailleurs, n'était pas~~t~rfro~­
ter les écrasantes et délicates fonctions d'ambassadeur. L'importance
de la fonction donnait au cheix,de ceux qui devaient l'assurer une
particulière gravité. Leur nomination était débattue au Sénat et fai-
sait l'objet d'une ordonnance sp~ciale (senatuB consuZtum)."A t-on
jamais entendu dire que des ambassadeurs fussent nommes à Rome sans
un senatus -
consulte?" demande CICERON dans un de ses discours (2).
Mais le
senatus consuZtum n'établissait que les principes qui devaient
servir de base à la constitution de l'ambassade. En toutes circonstan-
.
ces, l'ambassadeur devait agir suivant "la dignité et l'utilité du
peuple romain". Le choix des ambassadeurs était alors r~servé au pr~­
sident du s~nat, nul doute qu'ils fussent choisis parmi les hommes
politiques les plus en vue. En 219, l'ambassade envoyée auprès d'HAN-
NIBAL au lendemain du siège de Sagonte, était composée par P. VALERIUS
FLACCUS et Q. BAEBIUS TAMPHILLUS (3). Le premier appartient à la gens
aristocratique des VALERII (4). Les ambassadeurs devraient aussi être
d'un certain age et assez expérimentés dans le domaine de la politique
extérieure, pour avoir déjà fait preuve de leur compétence. La Zegatio
(1) CESAR,B.G., l, 26, 6. Ces Lingons que des liensd~\\\\\\\\~\\ à Rome,
étaient astreints à des fournitures de blé (B.G.,
I,~O, 10) et devaient
en outre héberger deux légions romaines
(VI, 44, 3 et VII, 9,4).
(2)Cic., In Vati"iun~15,36 cf aussi Ppo Sestio~
14~ 33.
(3) T.L., XXI, 7,8.
(4) G; CH. PICARD, Le tpait~ pomano-bapcide ••• op.cit.~p. 752 note 3.

-
155 -
envo~~een 205 a ATTALE 'tait formée par "M. V. LAEVINUS qui avait ~t~
deux fois consul et avait fait campagne en Grèce ;
de M. C. ~ETELLUS
ancien prêteur, S. S. CALBA, ancien édile.
et deux anciens questeurs
C. T. FLACCUS et M. V. FALTO (1). Tout comme l'ambassade envoy~e a
PHILIPPE V en 201 avant le déclenchement des hostilités. qui compre-
nait "P.S. TUfITANUS, le n~gociateur de la paix de Phoenik~ ; C.
CLAUDIUS NERO, le vai.nqueur du Metaure et le ~ une M. A. LEPIDUS.
SALLUSTE note que la deuxième ambassade envoyée en Afrique auprès de
JUGUERTHA, comprenait "des personnes d'Ige et de naissance. ayant rem-
pli les plus hautes charges f2).
"Mais i l arrivait aussi que le choix
portât
sur d~s hommes à la moralit~ éprouvée. Ainsi SCIPION NASICA
l'un des meurtriers de T. GRACCHUS. fut compris dans la Zegatio de
cinq membres dépêché€
en Asie pour r'gler la succession d'ATTALE ;
récompense ~clatante des ses services affirme VEILLEIUS, exil doré
r~torque PLUTARQUE. (3)
L'initiative du Choix pouvait revenir en cas de guerre aux con-
suls.
Mais l'on ne saurait donner à ces ambassades le nom de Zegationes
ce sont plutôt de simples messagers que les gén~raux envoient a~près
des alli~s de Rome •
En 213, les SCIPIONS (PUBLIUS et C. CORNELIUS) envoyèrent d'Espagne
une legatio au . '.. ' Numide SCYPHAX.Celle-ci étai t
form~e de trois cen-
turions.
(4) CESAR, lui-même n'indique pas toujours dans ses commen-
taires les personnes qui remplissaient la qualité d'agents diplomatiques.
Cependant certains évènements permettent d'entrevoir leurs qualités
en r~alité ce sont surtout des messagers bien que, souvent, le bellum
Gallicum donne abusivement le nom de legati l de si~pl~s souo-offi-
(1)
T.L., XXIX,
11,3
(2) Sall., Iug.,
XXV, 4.
(3) C'est lui qui, dans la mêlée, porta le coup de grâce à le tempe du
Gracque cf. Diod., XXXIV, 30 ; PLUT., T.
Grach.~ XX~ 3~ qjoute qu'il
n'osait plus se montrer dans la rue sans se heurter d des démonstra-
tions malveillantes. Les passants le pers4cutaient de menaces et aris
injurieux. Sur sa nomination Cf. Vcll.~ II~ 3; 1 ; PLUT.~ T. CRACH XXT ~
(4) T. L., XXIV, 48, 3.

-
156 -
ciers.
(1)
Il semble bien qu'il n'y ait p~ cu de proféssionnels dans le choix
choix des Zegati. La fonction était même compatible aveC une autre
charge. SCIPION NASICA était pontife au moment où il fut choisi comme
legatU~:L'ambassade ne pouvait être confiée à un seul personnage. Les
dél~gations Se composaient de deux, trois, quatre ou dix
membres.
Toute Zagatio avait un président ou chef d'une ambassade (prinaipeB
Zegationis). généralement un sénateur appartenant au rang le plus éle-
vé. Le chef de la Z~gatio de dix
membres chargée de partager l'ancien
royaume de MICIPSA, était L. OPIMIUS. A en croire SALLCUSTE c'était
un "personnage cél~bre et influent au S~nat (2)". Il n'y avait non plus
pas de limite d'âge dans l'exercice de cette fonction. On peut très
souvent remarquer la présence de jeunes personnages dans la composi-
tion des ambassadeurs comme celle envoyée à TEUTA en 229. Celle dépê-
chée en 113 de JUGURTHA. est uniquement formée de trois jeunes legats(3}.
La qualité principale que l'on exigeait d'eux.ét~it sans aueun
doute celle d'être bon orateur (4};car ils intervenaient devant des
.
assemblée •• ou au cours de conférences internationales. En général s ' i l
n'était pas bon orateur, il se faisait accompagner par un spécialiste.
Aussi en 198. adjoint-on à l'ambassade romaine qui négocia la paix
avec PHILIPPE. le consul FLAMININIUS. qui était selon les mots de
POLYBE un esprit ouvert et cUltivé, qui aimait et parla~t le grec cou-
ramment (5). Une fois nommé.l'ambassadeur portait comme insigne ex-
t "
.
d"
.
d
. ~i~K
.
er1eur, un anneau
or qU1 lU1
onna1tvgratu1tement aux transports et
mention
(1) Cesar, 111,7, 2,
4 ; 9.
Il/est tait seulement de préfets (praefea-
ti) et de tribuns militaires (tribuni miZitum) que son lieutenant
GRASSUS avait envoy~s chercher du ravitaillement chez divers peuples
dont les Vén~tes.
(2) Sall.,Iug ., XVI, 2-3
(3) id., ibid •• XXI, 4.
(4) SalI., Iug., XXV, 11.
(5) POL.. XVI I, 3, 1.

-
157 -
à l'entretien complet. Parfois aussi pour relever le prestige de la
legatio. on la faisait escorter par des quinquea'~is ; les IGgats
recevaient des frais de route (viaticum) et tout ce qui leur était
n~cessaire :vaisselle, vêtement linge et jusqu'au lit de camp (1).
III
POUVOIRS ET DOMAINES D'INTERVENTION DES LEGATI
Le but des ambassades pouvait être fort divers
:d6claration de
guerre et conclusioh de paix. signature des traitGs, organisation des
provinces soumises, arbitrages de conflits internationaux et des
missions religieuses. Nous nous proposons de rendre compte de façon
sommaire. de quelques aspects bien de leur mission. Dans ce dessein
nous considérons d'abord celui qui consiste à obtenir de l'ennemi
r~paration des dommages causés par lui. Nous avons déjà VU que seule
était juste. aux yeux des Anciens. la guerre entreprise après réclama-
tion (non satisfaites) ou après déclaration expresse. Nous ne mention-
nons ce genre de démarche qu'à titre indicatif. VU qu'i~ fe!t d~jà
l'objet de deux chapitres. NOus pouvons porter notre attention vers
d'autres aspects.
Certaines missions pouvaient avoir un caractèere pureoent reli-
gieux. En 205. M.P.AMTHO et Q.ÇATIUS furent envoy~s à Dephes "pour
y porter l'offrande tirée du butin sur HASDRUBAL. Ils y portèrent une
couronne d'or de deux livres, et des reproductions en argent des dG-
pouilles pesant mille livres.
(2)" Une autre fut envoyGe la même ann~e
en Asie a auprès d'ATTALE aveC pour mission de ramener en Italie. la
Mère de l'Ida. Les ambassadeurs devaient aussi passer à Delphes pour
y recueillir l'oracle.
(3) Ces ambassades qui eurent lieu pendant la
(1) T.L •• XXXIV. 58.0. Un d~cret décida d'attribuer aux cinq ambassa-
deurs envoy~s pr~s d'ATTALE "cinq quin~uérè.e.
afin qu'ils abordent
d'une façon conforme à la dignité du peuple romain sur ces terres où
il
fallait donner du prestige au nom romain."
(2) T.L •• XIV;10.4-6. Sur le sanctuaire de Delphes cf. R. LONIS.
Guerre et REligion ••• op. cit.~ p. 70-81.
(3) T.L. XXIX.
10, 5. La Mère de l'Ida. ou mère des dieux ou Cybèle est
une très ancienne divinité d'origine cr~toise. A Pessimonte qui était le
centre de son culte. on l'adorait sous la forme d'une pierre noire.

-
15tl -
deuxième guerre punique, revêtaient la même importance que celles à
caractère diplomatique d'autant que la cité en guerre était pleine
de scrupules.
En 210, M.
ATILIUS et M. ACILIUS furent députés à Alexandrie
auprès du roi PToLEMEE. D'après POLYBB leur mission consistait à ob-
tenir de PHILOPATOR, qu'il auto~ise, en Italie, l'expéditi~li de con-
vois de blé
1). Une mêm .. legatio pouvai t mener .. plusieurs Dissions
différentes.
En 200, aU sortir de la seconde guerre punique, le sénat
"décida d'envoyer des ambassadeurs en Atrique les mêmes iraient
d'abord à carthage puis en Numidie chez MASINISSA. A Carthage elle
devait entre. p.utres exiger la livraison d'HAMILCAR; en Numidie par
contre, elle était chargee de féliciter
le roi et d'anncncer la pro-
Chaine guerre qui sera entreprise Contre "PHILIPPE le déloyal et enfin
de solliciter pour cette guerre, l'envoi de cavaliers auxiliaires
numide ••
(2) Les instructions qui leur sont données sont br~ves et
simples et les legati ne peuvent les outrepasser.
Ils n'ont pas de
pouvoir decisionnaire et doivent se référer régulièrement au Sénat,
tout comme d'ailleurs les agents de la diplomatie grecque rarement
investis de pouvoirs plénipotentiaires.
(3) En 201, les ambassadeurs
adjoints à SCIPION pour le réglement de la paix aveC Carthage, deman-
dèrent au Sénat avant de partir "la facultG de racheter CeuX des pri-
sonniers qu'ils voudraient. On les invita à donner des noms et comme
ils en proposèrent près de deux cents, un lenatus cons~lte décida que
l'ambassade romaine emmènerait deux cents des prisonni0rs, au choix
des Carthaginois (4)". Si une ambassade n'obtenait pas satisfaction,
(1)
POL., IX,
11
(2) T.L., XXXI, 11,4-8. Sur la réponse carthaginoise id., ibid.~
19,1-2; celle du Numide, 19,3-4
(3) cf.
Y; GARLAN,op.oit.~P.
27 qui note que ceux-ci" pouvaient souvent
se trouver contraints d'effectuer de nombreuses allées et venues avant
d'~tre en me.Ure de conclure"
(4) T.L., XXX, 43. 1-8.

-
15~ -
elle pouvait se voir confier à nouveau la même mission. Le Senat, en
193, d~cida "d'envoyer à PHILIPPE les mêmes ambassadeurs qui s'ftaient
déjà rendus aupr~es de lui a Lysimachia. Ils reçurent l'ordr0 de voir
d'abord EUMENE (~). N'étant donc pns investi de pleins pouvoirs, ils
ne pouvaient en conséquence prendre d'initiatives personnellèS. Au
ils renùaient compte de leur activité au
retour de chaque~miss~on
deslgnes,
diplomatique,
sous les termes de legatione
sénat, rapport, en langage
referre ou renuntiare.
C'était aussi aUX ambassdeurs de mener les nf~ociations de paix.
engag~es
.
NOus entendons par là toutes les
négociations aveC l'enne~i et Vlsant
à aboutir à un accord de quelque nature qu'il fOt
:trèves, paix,
accords d'amitié OU d'alliance.
Pour l'étude de ces diff~rents points,
nous renvoyons à la troisièeme partie de notre étude. En revanche,
nous alloms mettre l'accènt sur l'immunité que conférait la qualité
d'ambassadeur et de voir si le comportement de Rome face auX ambassa-
deurs étr&ngers a toujours été conforme aux lois de la guerre.
IV -
L'IMMUNITE
DES
AGENTS
DIPLOMATIQUES
Ce n'est point sans raison que nous avons insi.té sur les dif-
férents
domaines d'intervention
des
Z.gati. En temps de guerre, comme
en temps de paix, ils devaient faire de fréquents déplacements qui
les exposaient à des dangers permanents. Quoi de plus natur~l alors
que l'iLviolabilité propres aUX biens religieux s'étende
aussi aUX
ambassadeurs.
Rome, Comme toutes les cités antiques a assez tôt pris
en considération l'immunité des envoyés considérée comme un principe

du droit des gens
(. ltUh gentium~.
Il ne nous semble certai~
que les origines de l'immunité remontent
aUX premiers temps de la royauté.
Faire violence à des ambcssadeurs
apparaissait comme un sacrilège. C'est ainsi que l'on pourrait expli-
(1) ib., ibid., XXXIV, II, 4.

-
160 -
quer l'indignation de beaucoup d'historiens lorsqu'ils rapportent des
exemples de violation de l'immunité diplomatique. L'emploi, dans ce
passage de TITE LIVE du verbe vioZarc suggère que le droit de la guer-
re comme la simple morale protégeaient les ambassadeurs
:"Haac dicta
adeo nihiZ movel'unt quemquam ut Zegati p.,..... e vioZati sint (1)".
Ces paroles eurent si peu d'effet, que les a~bassadeurs faillirent
être maltraités. A l'origine, les r~sultats pratiques les plus sûrs
du point de vue de la sécurité étaient obtenus par l'envoi des feciaux,
ce qui donnait i
leurs fonctions le c~rnct~~. d'une cfrGmonie religieu-
se. Il est aussi probable que les Romains aient envoyé parfois les
feciaux aveC d'autres envoyés, de manière i
augmenter la sécurité de
ces derniers.
(2)
Cette clause du droit des gens devait être admis par
tous étant donné que "même dans la période des luttes les plus san-
glantes et de l'hostilité ouverte, i l fallait envoyer et recevoir des
émissaires étrangers et que, sans leur intermédiaire, ùes traités
de paix, d'armistice et autres n'auraient pu être concl~s (3). Bien
que nous ne puissions partager l'idée d'un "défaut de confirmation par
les sources", nous reconnaissons aveC P.
BIERZANEK que, dans l'antiqui-
té, "l'immunité est Correlative l
l'attitude, A l"gard des Gtrangers~
L'envoyé est bien un étranger. mais ce n'est pas un étranger ordinaire
c'est un étranger qualifié qui se trouve deva~t une situation particu-
lière, exceptionnelle en comparaison avec la situation de l'ensemble
des étrangers(~). Autrement dit, les ambassadeurs n'étaient considErE.
comme tels et n'étaient respectés que sous certaines conditions.
Il
(1) T.L., III, 2, 6 cf. égale~ent IV, 17,5,
(2) Le texte de TITE LIVE, IV, 58, 1 Concernant la guerre aveC la cité
de Véies le prouve "Pel'Zegatos fetiaZesque l'es l'epeti coapta-"
(3) P. BIERZANEK, op.cit., p~ 116 qui ajoute "il y a lieu de se deman-
der s ' i l ne faut pas admettre, malgré un d~faut de confirmation par les
sources, la thèse de l'existence de règles oblige~t les Etats A assurer
la sécurit~ des envoy€s."
SUr les principes de l'immunité diplomatique
cf également R. LONIS, les u8agfs
••• op. cit ... p. 66-70 et P. DUCREY,
op~ .. cit. p. 301-304
(~) p.
BII~RZANEK, op. cit ... p. 105.

-
161 -
t~llait qu'ils vinssent soit pour déclarer la guerre. soit pour engager
des pourparlers de paix. soit même pour réclamer une trêve. Ils
étaient garants de la loyauté de leurs chefs et apparaissaient dans
ces cas-là Comme de véritables dépositaires de la fides
tant venérees
d&B anciens.
Aussi pour être concrète. l'immunité avait-elle besoin
de la confiance de l'ennemi. Confiance, i l est vrai, tout~ r~l.tive.
Les députés carthaginois accusés d'être espions
furent si~plem~nt
éConduits de Rome. Ordre leur fut donne de quitter le sol ital:en
dans les plus bre~ délais. Nous avons déjà parlé de PHILEAS ùe TARENTE
qui, sous prétexte d'une ambassade, organisa la fuite des otages.
Il
fut rattrapé et tué en m~me temps ~ue ces derniers.
CES~R, en 51.
retint Comme prisonnier les ambassadeurs que les Germains lui envo-
yêrent.
(1) A en croire CESAR.
"ils voulaient s'excuser de ce qu'ils
avaient, de la veille. engagé le combat contrairement aux conventions
et à leurs propres demandes
; mais en même temps ils se proposaient
d'obtenir,
s'ils le pouvaient. en nous trompant (fallendo), quelque
prolongeI!1ent de la trêve".
Comme on le voit, si la mission est dictée
par de sombres desseins. si l'aobassade ne vise qu'à surprendre l'en-
nemi par la ruse et par le trahison, les envoyés pouvaient être, dans
le meilleur des Cas
éconduits OU retenus Comme prisonniers de
guerre.
Qu'adevenait-il si cette iI!1munité était prof~née par des étran-
gers? En 230, l'ass&sainat du jeune légat romain L.
CORUNCIANUS par
des corsaires illyriens, passe pour la cause directe de la premiere
guerre d'Illyrie;
(2) D'aprês POLYBE, TEUTA "méprisant les rêgles
établies, dépêcha. aU moment où les envoyés rembarquaient, àes hommes
(1) César. VI.13,
4-6. Il s'agit jes ambassadeurs Usipètes et des
Tencthêres.
(2) POL., 8,6-13. Aussitôt informé du meurtre "les Romains dans leur
colêre activêrent leurs préparatifs, enrOlêrent des troupes et assem-
blêrent une flotte".
'C

-
162 -
pour tuer l'audacieux".Selon FLORUS. la guerre d'Achaie. qui devait
aboutir en
146 à la destruction de Corinthe aurait ~té déclenchée par
le mauvais traite~ent réservé à une ambassade romaine. "CRITOLAUS fut
la cause de cette guerre :ayant reçu de Rome la liberté. il s'en servit
contre elle, et outragea ses ambassadeurs par des paroles. peut-être
par des violences" l'historien ajoute".
C'est pourquoi METELLUS •••
fut chargé de nous venger
et ainsi Commença la guerre d'Achaie (1).
En 55, la guerre contre les vénètes naquit d'une violation de l'immuni-
té d'envoyés.
A en croire CESAR, ils s'€taient
eux-m~mes rendu compte
de la gravité de leur Crime.
"N'avaient-ils pas retenu et chargé
de
fers des ambassadeurs. ti·re que toutes les nations ont tounours regar-
dé comme sacré et
inviolable?
•• " (2) Cette accusation du Proconsul.
appelle une sérieuse réserve. Nous avons déjà signalé que le Bettum
CaZZicum donnait abusivement le nom de Legati à des simples sous-of-
ficiers.
que son lieutenant P.
CRASSUS avait envoyés chercher du ravi-
taillement chez divers p.uples. dont les Vénètes récemoent soumis
(3).
En représaille CESAR massacra tous les sénateurs Vénètes afin, dit-il,
"qu'à l'avenir les barbares fussent plus attentifs à respecter le
droi t
des ambas s adeurs • (. )" Dans le même ordre d'idées. on peut cons i-
dérer que l'Atrébnte COMMIUS. que le général avait chargé, en 55. de
.2 rendre en Br~tagne auprès des peuples nouvellement soumis était un
nuntius" (5). COu~e il venait de débarquer et faisait connaître aux
(1) FLORUS. II,
16, Cette argumentation très légère ne peut en aucune
façon
justifier et légitimer la guerre et la destruction de Corinthe.
(2) CESAR.B.G ••• III. 9.3.
(3) id.,ibid., II, 34.p. CRASSUS envoya un bon nombre de préfets et de
tribuus militaires
(praefectos tribunosque miLitum conpLures) dont Q.
VELANIUS et T. SILLIUS. envoyés chez les Vénètes
(CESAR~.G.~
III. 1.
2-4).
Ils
furent enchainés et emprisonnés.
(4) CESAR.B •••• III. 16.
(5) L.A. CONSTANS,op.cit •• p. 116, note 1 écrit que si CESAR n'emploie
pas le mot de legatu8. c'est parce que "r~~~IUS n'était pas chargé
d'une ambassade rfgulière. ,t

-
163 -
Bretons, en porte-parole de CESAR, ses instructions
(ca~saris mandata),
"ils s'étaient empar~s de lui et l'avaient charg~ de chaines (1). Son
statut n'est pas toutà fait assimilable à une violation de l'immunité.
Qu'on en juge :le proconsul reprochait auX Bretons de lui avoir fait
la guerre sans moti·, alors qu'ils lui avaient spontr~~ment envoyé
des députés, sUr le continent ••• pour faire la paix". Mais il ne sem-
ble pas du tout que les Bretons aient été unanimes à se soumettre, com-
me l'écrit auparavant l'auteur des Commentaires, "un grand nombre de
peuples de l ' î l e lui avait envoyé des d~putés pour offriT ••• àe faire
soumission à Rome."D'ailleurs nous ne sommes pas convaincus de ces
prétendus soumissions car CESAR lui-même, reconnatt l'impossibilité
avant son expédition, "de rien apprendre ni sur l'étendue de l ' î l e , nl
sur le caractère et l'importance des peuples qui l'habitent, ni sur
leur manière de faire la guerre OU de vivre ••• (4)" L'hypothèse d'une
soumission préalable est donc écart~e. Dans ces conditions, les Bretons
peuvent-ils sc montrer bienveillants à l'égard d'un personnage qui
se présentait Comme le porte-parole d'un ennemi déclaré? Toutes ces
raisons nous ont poussé à considérer l'arrestation de COMMIUS, non
comme une violation de l'immunité diplomatique, mai~ plutôt comme une
réaction de légitime défense de la part des insulaires.
Il Y a aussi lieu de se demander si, d'après les opinions romai-
nes, la violation de l'immunité des envoyés par une partie donnait
le droit d'agi r de la même façon à titre de re,ranche? Lai s sons d'abord
POLYBE nous décrire l'action de SCIPloN' lorsqu'il eut
appris la viola
tion de l'immunité des envoyés romains par les Carthaginois
(5).
21
(1) CESAR, E~ G, IV, 27. 3 et Iv.~8 "CESAR lui ordonna de visiter le
plus de peuples possibles, de les exhorter à rester fidèles au peuple
romain, et d'annoncer son arrivée imminente.
(2)
id.,ibid ., VI, 27, 5 •
(3)
id. ,ibid ., VI, 21 , 5.
( 4 ) id. , i bi.d. ,IV , 20, 4.
( 5 ) POL. , XV, 3

-
164 -
Le romain "donna l'ordre, ~ BAEBIUS de ne rien faire aux envoy6s car-
thaginois qui violent les principes de l'immunit~ et de les renvoyer
chez eux." L'achéen, s ' i l ne dit pas si cette attitude ètait confor-
me ou non aUX lois en vigueur, apprécie par con~re le comportement de
SCIPION qu'il qualifie de "beau, prudent et raisonnable, car i l pre-
nait en considération le fait que sa patrie devait placer le respect
des engagemen t s envers les
~
"
envoyes au-dessus de tout...
Ces paroles,
bien entendu, peuvent susciter des conclusions divergentes, pour qui
sait aussi ~ue les romains pardonnèrent une atteinte port~e à leur
amtassade par les Tarentins, ~ l'époque OÙ Rome était intéressée pen-
dant la guerre avec PYRRHUS, à ce que T rente gardât sa neutralit~.
Mais nous pensons que Rome appliqua dans ce domaine la loi du Talion.
La victoire de CN.
FULVIUS sur TEUTA, fut suivie de la décapitation
des chefs illyriens en représailles
(1)
; la guerre d'Achaie se ter-
mina par la destruction de Corinthe
; et la guerre contre les Vénètes
par le massacre de tous les sénateurs de ce peuple.
Mais moins que la
profanation de l'immunité, ces actes d'une brutalité si féroce était
dicté_ par la seule loi du plus fort.
Si Rome se montra si ferme en
ce qui concernait le respect de l'inviolabilité de ses représentants(2),
voyons maintenant ses attitudes vis à vis des ambassadeurs étrangers.
v -
LES
!I.\\1BASSADES ETRANGEFES. A ROME
Le Sénat, non seulement envoyait
des ambassades, mais i l en rece-
vait. Les ambassades étrangères venues à Rome
se divisaient ~n deux
catégories
:celles qui venaient d'un territoire ennemi et celle~ qui
étaient déléguées par des peuples a~is. Les premiers n'étaient jamais
-
(1) FLORUS, l , 21.
(2) L'etat ro~ain faisait dresser aUX envoyés tués leurs statues
aUX Rostres cf.
T.
L., l, 3,2-6.

1
1
-
165 -
1
1
admises à l'intérieur de la ville i
l'hospitalité leur était donnée
aU champ de M~rs. dans une villa publiaa où elles attendaient l'in-
vitation du Sénat pour as.~ster à l'audience qui avait l'eu dans L.
temple de tellone (1) voisin de la viZla publiaa. Les ambassadeurs que
PHILIPPE V dép@cha à Rome. en 197 • au cours de la trève furent
"conduits hors de Rome, à la Villa Public~. oa on leur offrit loge-
ment et entretien" et ajoute TITE LIVE "à ccté du temple de BeZlone~
le Sénat leur ordonna audience.
(2) Parfois tout entretien leur était
refusé
i
elles devaient alors quitter l'Italie dans un dél~i fixé.
avec défense d'y revenir sans une autorisation formelle.
En 203. les
envoyes carthaginois accusés d'être des espions furent dfclurés 'person-
na non grata". Ordre leur fut donné de quitter l'Italie. Mais
'ils
furent renvoyés sous bonne garde jue~u'à leur navire (3)". En.'Oi. le
Sénat décréta de ne recevoir les ambassadeurs de JUGURTHA. que s'ils
venaient remettre leur royaume et leur rois à la discrétion du peuple
romain. Le Cas échéant. ils devaient quitter l'Italie dans les dix
jours (4). Il arrivaait aussi. qu'en Cas d'échec
de négociations
entamees. les Patres décident de l'expulsion imminente d'envoyés étran-
gers. Quand les délé6ués campaniens proposèrent la nomination d'un
consul campanien en échange de l'aide de Capoue. le sénat en fut
indigné. A en croire le Padogan. "on ordonna de faire sortir les d~­
putés de la curie. ordre fut donne à un licteur de les conduire hors
de la ville et de ne s'arrêter qu'au delà du terriroir(.
romain (5)".
(1) Le temple de Bellone se trouvait à l'ext~êmité opposée du Circus
Pl'aminius, en dehors du Pomoerium.
(2) T. L •• XXXIII. 24. 5
(3) T. L•• XXX. 23.5
(l.' Sall •• IUG •• XXVIII. 2
(5 ) T. L•• XXIII. 5.7.

- 166 -
Les envoyés d'un pays en gUerr~ bénéficiaient d'une protecticn certai-
ne tant qu'ils étaient dans les limites de l'Urbs.
En nous réservant
de revenir sur les chitiments inflig€s
auX citoyens romains ayant
porté atteinte à l'immunité diplomatique, voyons d'abord l'attitude
rocaine à l'égard des envoyés des p~uple5 amis.
Ceux-ci Gtaient accueillis par le questeur et logés à Rome dans
les meilleurs édifices de la ville (grecoata sis). Lors de leur séjour
on leur faisait partout bon accueil.
Ils étaient in~ités aux fêtes
publiques, aux représentations théâtrales et aux jeux de cirques,

des p:.ces d'honneur leur étaient r~servées. En 205 on offrit aux
députés Sagontins un '~ogement et tout le nfcessaire ••• on leur donna
des guides pour visiter l'Italie et on écrivit aux villes qu'ils tra-
versaient de bien recevoir ces Espagnols
(1): Quand aux ambassadeurs
de MASINISSA. on leur offrit "une maison inoccupée. des logements
i
les objets nécessaires à leur entretien leur furent accord~s par un
décret (2)".
Il était aussi d'usage de leur faire des dons à leur
retour. Aux envoyés numides, on remit comme cadeau à faire porter à leur
1
leur roi
:"deux -~nteauX de pourp~c. deux chevaux, deux ar~ures de
cavaliers, deux tentes aveC leurs mobiliers de campagne. Aux ambassa-
deurs on donna cinq mille as et des vêtements 13)". Toujours selon
TITE LIVE, on aurait offert aussi aUx ambassadeurs sagontins dix
Mille as
(4)
Les missions étrangè~es faisaient connaître le but de leurs dGlé-
gations au
magistrat romain
(consul au prêteur) en latin ou par l'in-
(1~ T. L., XXVIII, 39. 19-21
(2) T. L•• XXX. 17. 14.
(3) T. L•• XXX, 17, 13.
(4) De même les ambassadea étranglr~s
prirent aussi l'habitude d'of-
frir au trGsor roa··in des objets en or ou argent.
On connait par exem-
ple " le modeste pr~sent de C~rthage" ; la couronne d'or pesant
vingt cinq livres offerts par le Seleucide ANTIOCHOS.

1
1
-
167 -
1
1
médiaire d'un interprète.
Le magistrat en saisissait le Sénat.
Ce
dernier, à son tour, donnait sa réponse soit aUx délégués eux-mêD~3
dans le vestibule de la curie OU dans la salle même des s~ances, soit
au magistrat qui la leur transmettoit.
(1) Si les questions des
députés étaiept ~rop complexes OU difficlles à résoudre, une commis-
.
....
etalt ...
slon speclale nommce et chaque demande était examinée séparément.
Mais
avant que les Patpes ne se prononcent sur l'objet de telle ou telle
ambassade
on faisait sortir les concernés. Conformément à ln tradi-
tion romain
,
le prêteur permettait à ceux .las Sénateurs qui le vou-
laient, d'interroger les ambassadeurs étrangers
(2).
Après avoir analysé les traits généraux de la diplocatie romai-
ne, il serait temps que nous essayons de voir quels étaient les châ-
timents réservés aUX Ronains qui portaient atteinte à l'inviolabilité
des Ambassadeurs? Les citoyens ayant porté atteinte à l'iomunité
étaient livres à l'état qui les avait envoyés, pour expiation.
Un passage du digeste signale que "celui aui a chassé un envoyé
doit ~tre livré auX ennemis dont faisaient partie ces envoyés (3)".
Bien avant notre période, Rome eut déjà à extrader des Romains Coupa-
bles de tels méfaits. En 26G, deux AEDILICII, Q.
FABIUS et GN. APRO-
NIUS, furent livrés par les feciaux sur ordre du sénat pour avoir
outragé les ambassadeurs appolloniates, a~ Cours d'un .. discussion(4)
TITE LIVE raconte que pour ce crime, on livra à Carthage MINUCIUS MYR-
TILUS et LQCIUS MUNLIUS (5).
(1) Salle , Jug. , XXVIII, 2.
(2 ) T. L. , XXX, 22, 5.
( 3 ) Digeste, 50, 7, 1a, 17.
( 4 ) valère
Maxime, VI, 5
( 5 ) T. L. XXXVIII, 42.

- 165 -
En 266. le questeur aCCompagna les d~ux crimiD~ls jusqu'~ Brindes.
de crainte. qu'ils ne fussent
uélivrés par leurs p~rent6.
Dans certains traités.
Rome chercha même i
accrortre la secu
rité des ambassadeurs. Le traité conclu entre Rome et les Isralélites
en 128. prévoyait la délivrance de sauf conduit aux envoyés
(1).
Mais ce principe d'inviolabilité sera de moins en moins respecté
au dernier siècle de la République.
En
103. DIODORE parle de sévices
auxquels SATURNINUS s'était livré sur les ambassadeurs du Pont
MITHRIDATE IV demandera en vain son extradition (2).
Ce refus. bien
entendu. met à nu la nouvelle politique de ROme. Les peuples dominés
doivent respecter sa volonté incarnée par ses représentants. l'enfrein-
dr entratnait immédiatement la réaction.
L'acha~ie et la Gaule sont
à cet égard des exemples asse~ si~.ificatifs. La considération que
les peuples vaincus ou domines doivent porter aux envoyés romains
était dès lors. un témoignage de respect envers la cité dominante. En
revanche. ROme. au dernier siècle de notre période. 3'a pas eu la
m@me scrupule, COmme en témoignage l'envoi de simples messagers au
lieu d'ambassadeurs aux peuples dominés de Gaule.
C'est ce qui arriva

notamment lors du siège de Gergovie.
"Caesar nuntis ad ciuitatem
haeduorum r.liss i s. qui suo bene fi cio
con seruatos
doceren t~ quos i'llre
belli interficere potuisset •••
(3)
Il reste que la qualité des en-
voyés. qu'ils eu;sent rang d'a~bassaàeurs ou celui de simples sol~ats
était le ~eflet fidèle des rapports de fOrces entre ceux qui les
envoyaient et ceux qui les recevaient.
(l)
FL. Josephe. A.J••
XIII. 9. 2
(2) DIOD •• XXXVI.
15.
(3) CESAR. B.G. VII. 41,1. Les diplomates envoyés a CESAR étaient
toujours choisis parmi l'~lite de leur cité. En 56. l'ambassade Hel-
vète était condute par un officier supérieur. DIVICO, "qui avait
commandé aux Helvètes dans la guerre contre CASSIUS.
(id., ibid ••
I.
12). Vers la fin de 52. c'est une délégation de nobles héduens
(l.egati ad eum principes JJaeduorum Veniunt) qui vint trouver CESAR
(id •• ibid ••
VII.
32.)

-
169 -
Nous avons t~nté tout au long de cette deuxième partie consa-
crée à l'ouverture des hostilités de mettre eu relief la conduite de
Rome dans la guerre.
Celle-ci, bien entendu n'a pas toujours ~té
conforme aux lois et réglements du droit international.
Dans le chapitre relatif à la prise des villes, nous avons insis-
té à la fois sur l'usage que Rome fit du droit que lui conferait la
victoire, mais aussi sur les violations des lois de guerre.
Dans les
exemples de cités sur lesquelles nous avons porté notre attention,
nous constatons que la prise des villes tout comme la capitualation,
pouvait être suivie de massacres, d'asservissement ou de libfration
avec aussi des conséquences diverses
:remises d'otages, introduction
de garnisons, destruction de la ville. Les Romains n'eurent pas à se
conformer strictement aux lois établies.L~ur attitude dépendait des
griefs qu'ils nourrissaient à l'encontre de leurs adversaires.
Il est
à remarquer que Rome a beaucoup plus songé à piller les villes qu'à
les détruir~. Les cités livrees aux flammes ne sauraient être inter-
prétées Comme des actes de brutalité OU de férocité gratuite.
Rome,
en adoptant de telles attitud~s, a surtout cherché à assouvir la hai-
ne qu'elle nourrissait à l'égard de ceux qui tentèrent de s'opposer
à sa suprêmatie OU à la lui di~uter. Nous avons déjà parlé de Ilutur-
gis, de Chalcis, de Numance, de
~arthage. La destruction de Corinthe(1)
doit aussi être interprétée dans le même sens. Le Sénat qui redoutait
l'esprit démocratique de la grande ville ouvri2re
• ordonna qu'on la
livre aux flammes et qu'on consaCre son sol aux dieux infernaux.
Rome
a choisi de frapper de terreur par un châtiment exemplaire. Son com-
portement dans les cités, conquises ou non, était fonction des impéra-
tifs militaires, économiques, politiques. Aussi tantôt fit-elle preuve
de bienveillance, tantôt de lR brutalité la plus extrême. La conduite
(1) POL., XXXVIII, 9-18 cf.
2galement C. NICOLET, Rome et Za conqu4te
••• T. II~ op.cit.~ p. 168-110 et A. FUKS, the BelZum Achaicum and
itB Social ABpeot~, J~S., 1910, p.18-82 -y'.q;r particulièrement p.
1
86-89.

1
~
-
170 -
1
romaine dans la guerre ne manqUa pas de provoquer de vives inqui~tu­
des chez les grecs
(1). mieux elle bouleversa leur habitud2 séculaire
P.
DUCREY note
"De même que les Romains s'~taient efforcfs, aU
début de la guerre de Macédoine, d'aoculer leurs adversaires è choisir
entre la destruction totale et le
ralliement, ou plutôt la soumission,
PHILIPPE V dévasta certaines cit~s afin de rendre les autres plus
dociles
(2)". On attribua aussi ~ l'influence du T rentin ITERACLEIDiS
et, ~ travers lui, à l'exemple romain, le. r~duction en escl(l vage par
PHILIPPE V, en ple ine paix, des hsb i te.n t F de Cios, pui s ceux de
Thaso s
(3). Leur attitude fut souvent déconcertante SU ?oint qu'elle
ne manqua pas d'~tonner les ,recs. Après la prise d'Egine, ceux des
Eginêtes qui n'avaient pas ~t~ faits prisonniers, demandérent aU
proconsul P. SULPICIUS GALBA la persmission d'envoyer des délégués
à leUr compatriotes, afin de r~unir la rançon nécessaire au rachat
des captifs.
Quelle ne fut pas leur surprise d'entendre le Romain leUr
opposer un refus et leur dire que les Eginêtes
de l'extérieur eussent
~té plus avis~s de venir aU SeCours de leurs concitoyens alors qu'il
en était encore temps,
avant qu'ils ne fussent réduits en esclavage.
N~anmoins
le lendemain, le proconsul revint sur sa décision et auto-
risa le départ des envoyis "puisque telle était la coutu~e en Grêce"(4)
Les prises humaines ~taient constitu~es par les habitants d'une
ville conquise ou non (hommes,
femmes,
enfants). Bien que le droit
de guerre interdît que les enfants
fussent l'objet de repr~sailles,
Rome, três souvent, n'en a pas toujours tenu compte. Elle considérait
l'ensemble des habitants Comme butin.
Ceux-ci ne risqu~:".'-L.t qu'excep-
tionnellement la mort pour les raisons que nous avons déj~ ~vc~u~es.
(1)
Cf. Chapitre trois
:Cr~dibiLit~ de Rome ••• également dans POLYBE
(IX,
39, 3-
; XI, 5, 6-1.)
(2) P.
DUCREY, or.cit., p.
329.
(3)
POL., XV, 22
;
XVIII,3 12 ; 4, 7
(4) POL., IX, 42, 5-8
.
.- ...... ,.., ~,.~..-.......~ ~~~ ~')t ~• .__""'~-,.>
..•.. ,. ..
"
..;..;,.,. "".....',. , '.'"

-
17 1 -
Toujours est-il
que la pr1se ou la destruction de leur ville par
Rome, les privait de la cellul~ politique à l~quelle ils Be ratta-
chaient.
Par conséquent, ils devenaient apatrides co~plètenent d
dépendants des
d~cisions romaines. Celles-ci sont toujours fonction
de l'intérêt politique,
financier, et militaire de l'Urbs. Les exem-
ples de viols
~u coUrs de la conquête sont rares. Toutefois de tels
faits eurent lieu aU dernier siècle de notre période. D'après APnE~,
SERTORIUS aurait fait exécuter, en ~otalité, une cohorte composée
de Romains, parce qu'elle était soupçonnée de s'être livrée à des
viols ( 1) •
Quant aUX prisonniers de guerre, soldats tombés aux ma1ns du plus
fort,
ils n'échappaient à la mort que pour tomber dans la servitude.
Une telle attitude, nous l'avons déjà vu, obéissait à des impératifs
militaires, économiques et politiques. Si Rome a pratiqué au début
de notre période l'échange de prisonniers, l'application de cette
procédure disparut dès que Rome s'engag~ dans la Méditerrannée orien-
tale. Ses vaincus furent sommés de livrer, sans contrepartie, leurs
prisonniers, ainsi que les transfuges ct même, les ennemis de Rome.
Ce fut aussi un autre bouleversement qu'apporta l'intervention romaine
dans le monde grec.
Nous
avons vU aussi que la recherche du butin pouvait, par moment,
tc~pérer la haine des légionnaires. L'importance que ceux-ci accordaie
daient aU butin était due au fait que, pour la plupart, leur survie
en dépendait.
Tout chef militaire qui détourna (ou était accusé d'avoir
dét
lapraeda!)
s'exposait à l'hostilité de ses soldat~, mieux à
des plainetes devant l'autorité supérieure,
si cela était possible.
Dans une situation révolutionnaire, i l pouvait courir à sa perte (2).
(1)
PLUT., Sertorius.
X, 3; cf.
également la tentative malheureuse
de CESAR en Gergovie aU cOUrs de l'an 52.
(2) cf. VALERIUS PLACCUS en Macédoine et Thrace en 86 (DIGN CASSIUS,
XXXI,
104,2 P.
STRABO et l'affaire du butin d'Asculum, cn 89 (OROSE,V,
18, 26) PLUTARQUE (POMPEE. III 3 ) fait état de la haine des troupiers
à l'~gardde STRABC ~ il est permis de se de~ander si l'affaire
d'Asculum, ou d'autres semblables, ne l'ont pas determinée.
1

- 172 -
Aucun chef au premier siècle ne parviendra à dociner l~ pro-
blème du butin.
DION CASSIUS relate Comme un fait ramarquable, que
lors de ln marche de POMPEE vers l ' ABAS, en 65, son ,,~':l,,<~t.;D ne se
soit livré à aucun~ déprédation, c~r les indigènes
fourmissaient la
totalité du ravitaillement à titre gratuit.
(1) Si l'on song~ à la
condition économique du soldat, on peut comprendre que les rustiques
sous les arces, aient consid~ré comme une justification de le vi~l~~ce
toute obligation d'achat.
Certains commandants en chef, bien avant
SYLLA, comprirent très vite les avant~ges qu'ils gagnaieut, en faci-
litant le butin au l~gionnaire. Les armées ofrirent à laur chef :pres-
tige, clientèle et influence.
Mieux, le reerutement post ~urien fournit
à ces généraux, des soldats prêts à se dévouer à la causc du chef.
Celui-ci devait disposer de ressources suffisantes pour les caintenir
sous sa dépendance et assurer leur subsistanceen leur facilitant le
pillage.
De telles obligations le poussaient naturelleoent i
tirer
le profit maximal de ses campagnes.
Pour s'assurer la soumission du vaincu ou pour garantir une paro-
le donnée; Rome eut aussi recours aux otages. Nous avons contré que
les lois de la guerre accordaient l'i~munité auX otages, et qu'en
vertu de ces mêmes lois, leur détenteur devait les mGnager,
au moins
physiquecent.
Cependant force nous est de reconnattre que cette insti-
tution politico-militaire,ne constituait pas une garantie contre
d'éenteulles trattrises.
Le vaincu reprenait les armes quelqu~s temps
après. Aussi Rome l'a t-elle corroboré par une autre garantie
:le
serment (2); L'institution s'est avérée inefficace e~ raison même des
insuffisances qu'elle renfermai~. L'otage, loin d'Itre une v~ritable
(1) DION CASSIUS,
XXXVII, 3-6
(2) En 321, TITE LIVE jugeait inutile d'exiger des otages pour garantir
une parole donnée (T.
L.
IX, 5) "Quel bes oin aurai t-on en e ffe t, de
garantie ou d'otages, pour une traitê conclu sous le voeu "que le
peuple par la faute de qui on ne se tiendra aux conditions édictées,
Jupii.r le frappe comme les féciaux frappent le por cft se deI:landai t-il
au sujet de la paix caudine.

-
113 -
garantie, n'eut
qu'une valeur coopensatDi~e en ce sens· qu'il dédom-
mage plus qu'il ne prémunit (1).
Rome, dens bien des cas, a prêfére
l'installation de garnisons à une remise d'otages.
Rous avons parl~ du rôle pr€pondêrant
que les ambassadeurs jouê-
rent dans les guerres.
La fonction apparatt en dernière
analyse
comme tout à fait à l'opposé d'une sinécure. Outre le cas exception-
nel que nous avons déjà signalé, Rome,
en règle générale, semble
avoir respecté l'immunit~ des envoyés étrangers. Mais il arrivait
que des ambassades fussent l'objet d'arrestations ou de mise à mort
sur le chemin du retour de
Rome.
Dans
tous les cas, l'Urbs interve-
nait pour obtenir leur libération, ou même punir les coupables. En
189, des envoyés ~toli~ns à Rome furent appréhendés par des pirates
et détenus en Epire. Deux d'entre eux furent libérés contre le paye-
ment d'une rançon; alors que le troisième fut libéré
sous la pres-
sion romaine. A la même péricde, trois
ambassadeurs ~;lphiens furent
égorgés sur le chemin du retour de Rome.
C~ triple meurtre est porté
à notre connaissance par une lettre du Consul
C. LIVIUS SALINATOR,
qui nous apprend, en outre, les mesures prises
par Rome pour éviter
que de pereils faits ne sc reproduisent. Ordre fut donn& ~ H. FULVIUS
NOBILIOR,.
commandant des
force3
romaines assiègeant SAm:, de recher-
cher et de punir les coupables dès qu'il aurait obtenu la reddition
de la ville (3). Les missions diplomatiques, malgre l'immunité qui
les protégeait, n'étaient pas du te .t à l'abri des périls.
Malgré tout, les hommes auxq~els on confiait cette tâche, marquè-
rent par leurs interventions tous lesto~ 'nants décisifs des guerres.
Par eux venaient la haine, la destruction et 1 .. misère;
grâce à eux
auss,
s'êtàblissait la paix.
(1) Pour reprendre l'expression de R.
LONIS,
les otages ••• op.cit.~p '1~
(2) POL.
XXI, 26, 7-9 cf.
~galement POL, XXIII,6 qui parlent de l'as-
sassinat d'envoyés des spartiates en exil, à la euite d'une attaque en
mer dans une région non précisee.
Deux furent tuês mais les eutres
parvinrent à Rome, leur destination
(3) T. L., XXXVII, 13, 2 et POL., XXI, 26, 7.
...~~

T ROI 5 1 ~ M E
PAR T 1 E
L'ARRET DES HOSTILITES ET LE
RETABLISSEMENT
DE LA PAIX
1.
TREVES, TRAITES DE PAIX ET D'ALLlf~CE
II.
LA GARANTIE DES ACCORDS INTERNATIONAUX
III.
CREDIBILITE DE ROME DANS LES RELATIONS INTERNATIONALES.
. . ~

- 174 -
C H
PIT P l·
r
t> D t. '.~ 1 l i·~
Tout Comme l'ouverture des hostilités, tout armistice (entendons
par là toute suspens i on des hos t i l i tés)" étai t
précéd~ de né goci ati ons.
Celles-ci étaient entamées par l'une des deux parties dans le cas
d'une tr~ve ou d'une capitulation; mais elles l'étaient conjointement
lorsqu'il s'agissait de conclure un accord de paix ou d'alliance.
Mais, comme le note Y.
GARLAN, les Anciens "ne concevaient pas de
véritable guerre qui ne fût limitée dans le temps par des déclarations
de guerre, des accords et des actes:symboliques revêtant souvent un
aspect religieux ••• Le temps de guerre et le temps de paix étant,
pour ainsi dire,
d'essence différente
tout passage de l'un à l'au-
tre ne pouvait se faire sans précaution
et sans garantie (1)".
Avant de nous pencher sur l'aspect religieux de ces accords dans un
autre chapitre, notre attention portera d'abord sur les trêves,
la
façon dont elles étaient conclues et les oonditions exigées p&r une
Rome toujours victorieuse. Notre attention sera ensuite portée sur
la conclusion et l'~laboration des traités de paix. Enfin nous trai-
terons des accords conclus en temps de paix, en particulier de l'ac-
cord d'alliance. A la différence des ~ccords préce~ents, celui-ci
était en général mené conjointement.
Rome en établissait avec
s peu-
ples avec lesquels elle etait toujours restée en bon terme,
tout com-
me avec des peuples qui avaient cspitulé devant sa toute puissancé.
Nous essayerons à travers notre analyse de V01r le contenu de ces
accords, leur ambiguité et les obligations réciproques qui en dfcou-
laient.

-
115 -
1\\
l
-
LA TREVE, PREMIER PAS VERS LA PAIX
La tr~ve marque un arrêt des hostilités pendant un temps plus
OU moins long.
(1)
Cette suspension des combats entre belligérants,
requiert n~cessairement l'intervention des ambassadeurs et pouvait
intervenir pour divers motifs.
Comme toute autre forme
d'engaéement
international, elle était soumise à certaines conditions préalables.
Y. CARLAN en retient quatre. Une trêve pouvait être r~clamée "pour
c~lébrer une f~te locale, ou pour ensevelir les morts, OU pour échan-
ger des prisonniers, et sUrtout afin d'ouvrir les pourparlers de
paix (2)."
Nous n'insisterons par sur les tr~ves sacrées demandfes en vue
de célébrer une fête religieuse. Notre période ne nous fournit pas
d'exemples de cette nature.
Certes i l existait à Rome des
jours con-
sacr~s, nu Cours desque18, la coutume des Anciens interdisait de
livrer bataille. A en croire MACROBE,
"lorsque le Z.atiar~ c'est à
dire la solennité des feries
latines était annoncée, de même pendant
les Saturnales et aussi lorsque le Mundusest ouvert, la ~oi religieu-
se défendait de combattre.(3) De même i l était également interdit de
combattre le lendemain des fêtes religieuses.
Toujours selon MACROBE,
les Pontifes avaient d~cidé que "le lendemain des calendes, des nones
et des i~., devait être jour considéré comme jour de deuil et qu'on
(1) T.
L., IV, 35, 2 signale par exemple une trêve de vingt ans, con-
clue par Rome avec les Veiens au début du Ve siècle avant notre ère
et
une autre,
de trois ans seulement, avec les Eques alors que
ces derniers "la voulaient plus longue".
Mais au cours de notre
période, leur durée s'est considér'~lement reduite jusqu'à couvrir
~eulement quelques jours cf. CESAR, B.G.IV,
11.
(2)
Y.
GARLAN, op. ci t. p.
31
( 3) MA CROB E , S â tu rn ale s,
l,
16,
16- 11 •

-
176 -
ne pouvait ni combattre. ni sacrifier. ni tenir des cOBices
(1)".
Mais l'on ne saurait donner le noo de trêves sacrees à ces
fêtes loc
locales. qui s'accompagnaient dans la cité elle-même d'une trêve civi-
le et judiciaire de durée fixe.
Ce sont tout nU plus des
jours f~ri~s
au cours desquels. la célébration de la fête religieuse nécessitait,
pour son bon dér~ule~entf l'oblig~tion de surseoir à toute op~raticn
militaire.
On pourrait les comparer aux hiercménies grecques CommE
les Karneia doriennes,
ou ~ Demetria d'Athènes (2). Ce qui les dif-
férencie des trêves sacrées. c'est que celles-ci sont "des
fêtes
fré~uent~es non seulement par des citoyens, mais aussi par des ~tran­
gers".
Il était donc necessaire. grâce à une convention "teoporaire
d'asylie et d'Asphaleie" d'assurer la sécuritf des
fidèles venus de
loin et de leurs biens
(3).D'autre, part ces trêves sacr~es interna-
tionales étaient acceptées par toutes les cités qui
faisaient usage
du sancutaire concernf. Or à Rome.
i l s'agit de decisions unilatérales
qui devaient permettre à la cité de célébrer en toute quiGtude ses
fêtes religieuses.
L'auteur des Saturnales~ s'appuyant sur VARRON.
précise même que Ces indic~ionsn'étaient valables que lorsque les
Romains pouvaient choisir le jour où ils voulaient coobattre. Si le
cocbat leur est imposé par l'adversaire. ils doivent dêfendre la
patrie
(4). Il s'agit donc d'~ne interdiction nationale qui s'effaçait
lorsque le salut de la Patrie était en jeu, dons le mesUre OÙ l'ennemi
n'était pas tenu de respecter cet arrêt unilatéral.
Tout autre est
la trêve des morts qui était obtenue à partir d'un ~ccord entre les
Belligérants.
( 1) MACROBE, SâtwrnaZes. 1.
16. 22.
(2) cf.
l'i~~re8sante mise au point de GEORGES ROUGEMONT, La Hiérom~­
nie des PYTHIA at les tr:ves eacl'ées" d'ELEU :SIS~ de DELPHES et d'O-
LYMPIE~ B.C.H •• XCVII, 1973, p. 75-106, cf. p. 81-86
(3)
id •• ibid •• p.
96-97.
Il existait quatre conventions de trêves
sacrées en Grèce
:les trêves pythique, Olympique, isthmique et
néméenne
; ~-i·~trêve des Mystères d'ELhUSIS qui durait cinquante
cinq jours cf.
id •• ibid.~p. 86-88.
(4)
MACROBE. Sâturnales, 1.
16, 20.

- 177 -
a)
La Trêve Des Morts
Une simple suspension d'arm~s pouvuit être décidée d'un Comnun
accord, pour ensevelir les ~orts. Le droit des Anciens voulnit qu'une
fois
la guerre arrêtée, l'on rendît à l'adversaire ses morts, afin
qu'ils soient inhumés.
Cet usage n'était pus inconnu des
Romains.
Au
cours de la première gU~rre, la résistance punique ainim~ par AMILCAR
BARCA fut très
vi~e en Scicile, notanm~nt à Eryx aU cours des ann~es
234-241.
DIODORL rapporte l'acharnement des campagnes de cett~ p~rio­
de,
au cours
de l'une d'elles, le consul FUNDANIUS,
ay~nt refusé à
AMILC~R les cadavres de ses morts, fut puni de son impi~té par une
grande défaite
(1).
TITE LIVE rapporte aussi le bataille de NOla, cn
215 qui aurait fait cinq mille morts du côtt carthaginois, mille morts
du côté roo6in. Le lendemain,
ajoute t - i l ,
"une trêve tacite fut emplo-
yée des deux côtés, à ensevelir les morts •••
MARCBLLUS suivant un
voeu fait à Vulcain les br1Ha (2)".
Le mot "tacite" du padouan est
aSsez révélateur, en ce e~ns qu'il nous conduit à penser qu'aucun des
belligérants n'a voulu demander le premier l'arr~t des combats. Ce qui
sous-entendait que demander le premier ses morts à l'adversaire,
était
une sorte d'aveu de faiblesse et qu'aussi,
le seul fait
de les rendre,
. "VI)
pouvai t
être interprété comme une ,Je.d",..,..tté. Lu trêve des morts étai t
sollicitée et obtenue par l'entremise d'un héraut.
En 197, après la
bataille de Gonni,
au cours de la seconde guerre de Macédoine,
c'est
1..::.
héra.ut du roi qui vint trouver QUINCTIUS,
"afin d'obtenir une trê-
ve,
le temps voulu pour relever,
en vue de leur sipulture, les hommes
tombés dans la bataille ••• (3)" TIT~ LIVE ajoute qu'en r~alité "c'était
pour demander la permission d'envoyer des ambassadeurs." Ce q"lÏ nous
parait bien peu probable, dans la mesure où la trêve des morts est une
coutume grecque bien établie.
Rien d'étonnant à ce que PHILIPPE l ' a i t
sollicitée. Elle était aussi en vigueur à Rome.
Il est certain qu'un
(1)
Diod., XXIV,
9, 2
(2) T. L.,
XXIII,
46, 4.
( 3) T. L. , XXXII 1,
11, 3.

-
17d
-
adversaire en position de faiblesse,
pouvait obtenir par cett~ faveur
quelque cornent de répit.
Car le vainqueur ne doit poser aucun~
condition en rendant les corts à l'adversaire.
Du reste, le consul
romain accepta les deux propositions du roi,
puisqu'il donna son
accord pour l'une et l'autre.
Nul doute que lors
de la première guer-
re punique, le consul FUNDANIUS
ait violé un règlement bien Éta-
bli
• C'est le seul manquement observé aü cours de notre pcricde, Car
Rome semble avoir eu le même scrupuleux respect pour ses propres
morts.
PLUTARQUE n'affirme t - i l ~as que LUCULLUS aurait en 61,
accrut l'hostilité de l'armée à son égard, en negligeant de rendre
les
devoirs
funèbres
dus aux Romains tombés a la bataille de Zéla (1).
,
b)
La Tr~ve Proprement dite
~ne suspension d'armes pouvait être aussi décid~e d'un Commun
accord, et pour une période d~teruinêe, afin de faciliter l'envoi
d'ambassadeurs en vue de négociations
de p~ix. Cette inter~uption
des hostilités ne pouvait êtr~ accordée par Rome, sans que certaines
garanties aient été.
au préalable,
fournies par le demandeur.
Celles-
ci lui étaient notifiées par le géneral victorieux après que celui-
ci ~ consulté son état major (2). Il s'agissait avant tout de fixer
la durée de la trêve.
Ce temps, naturellement, était determiné par
Rome, puisqu'elle était toujours en position de
force.
En
191, lors
de Sa première entrevue avec Philippe V à Nicw h,
QUINCTIUS accorda
(1) PLUT., Pompée, XXXIX,
1.
C'est POMP~E qui rendrtce pieux devoir
aux soldats de TRIARIUS qui, trois ans
auparavant,
avaient péri à
Zéla.
Il fit inhumer les restes de ces t!lalheureux qui "jonchaient
toujours le sol".
(2) SCIPION,
après Zama accepta de négocier avec les Carthaginois
après avoir pris conseil avec son ttat wajor.
(T.L.,XXX,36,
10-11).
C'est aussi,
après avoir convoqu~ ses légats et tribuns, que QUIN-
TI US rédigea les conditions auxquelles on accorderait à H~BIS, l'armis-
tice de
195.
(id.,ibid
., XXXIV, 35,1). MARIUS fit de LJême en
105,
aVant d'aCCorder une tr~ve à BOCCHUS (Snll.,Iug ., CIl, crv.)

-
179 -
une trêve
de deux mois
au rol 0alS
celui-ci refusa les conùitions
q~l lui étaient imposfes. (1) Ce L'est que lors d'une deuxième entre-
vue que le Macédonien accepta les propositions romaines assorties
cette fois d'une trêve de quatre mois
(2).
Celle qui
fut impos~e
à NABIS était d'une durée de six mois
(3).
In arrivait que la duree
de la trêve ne soit pas
fixée,
c'est le cas de celle qui
fut accor-
dée en 202, après Zama,
aux Carthaginois
(4).
Le temps de trêve devait permettre aux ambassadeurs
~nnemis,
munis de sauf conduits de traverser en toute quiétude le territoire
ro~ain où ils devaient negocier les conditions d'une paix dureble.
Quant aux conditions exigées du deoandeur ~lles visaient toutes un
même objectif :affaiblir davantage le vaincu.
Il fallait d'abord
le désarmer militairement, rendre impossible toute tentative de réou-
verture des hostilités, et aussi l'affaiblir sur le plan ~conomique.
La trêve,
conclue avec Carthage,
fut garantie par la livraison de
cent cinquante otages,
et par le p~iement d'une indemnit0 de guerre
de mille talents.
En
197, PHILIPPE dut livrer son fils
DEMETRIOS et
certains de ses amis Comme otages et payer d~ux cents talents. Il
devait aussi céder "toute la côte d'Illyrie,
remettre tous les d~­
serteurs et prisonniers.
A Attale il rendit ses navires et les équi-
pages pris avec eux
i
aux Rhodiens la région dénommée le peraea
aUx Etoliens,
Pharsale et LARISSA, aux Achéens, Argos et Corinthe.(5)"
D'après TITE LIVE, on cjouta au pacte la clause suivante "que les
troupes royales devaient êtr~ aussitôt retirées de Phocide et de
Locride".
(1) T. L., XXXII, 35.
(2) id., ib~~, XXXIII,
13,
14.
(3)
id., ibid., XXXIV,
35,1
(4) id., ibid., XXX,
36, 10-11 ; App. , l i b . , 53
(5)T.
L., XXXIII,
13;
14. On aùmit à cette rfunion les Jüli~s de
Rome

1
1
-
1 eu
-
1
1
Une trêve conclue entre Rome et un adversBir~ engageait tgale-
ment les
alli~s. La convention intervenue en 197 conc~rL~it non
seulement PHILIPPE, nais aussi Per~~m€, les Rhodiens, les itoliens
et achéens.
Il en fut de même,
pour cell~ conclue en
195, entre
"NnBIS d'une part, de l'autre,
l~s Romains, le rciEUMENE
et les
Rhodiens.
La tr@ve commençait le jour o~ les conditions de paix
~tnient notifi~es i
l'int~ress€. Mais c~lles~ci nE sauraient ~tre
d~finitives. le S&nat pouvait les nllGger ou les augmenter. Ainsi
un général en chef pouvait en droit strict conclure un arœistice,
mais ne saurait s'engager à g~rantir l'obtention d'une paix dLfini-
tive,
auX seules
conditions qu'il aura exigées.
Aussi était-il tenu de
restituer les garanties exigées auX vaincus,
si aUcun accord ~~finitif
n'était intervenu.
Cela est confirmé par la réponse de QUINCTIUS à
PHILIPPE "si le roi n'obtenait pas la paix su Sénat~ on lui restitue-
r:~it otages et argent."
Au bout du délai imparti,
si a~cun accord n'~tait conclu. la
guerre reprenait
de plus belle.
La guerre contre l'Etolic fut ponc-
tuée d'abord par une trêve en
190. Mais les envoyés grecs à Ro~e
ne parvinrent pas à s'entendre avec le Sénat, et les opérations repri-
rent au printemps.
Elles aboutirent au siège d'Ambracie par F.
NOBILOR en
189. Quand les Etoliens demandèrent à traiter, cette fois
le consul exiBea une capibllation sans condition: AetoZos niBi ine~­
Mes de p~ce agentes non auditu~um se.
Ainsi au lieu de néBociations
bilatérales,
Rome préfèra, non pas négocier des
armistices, mais en
dicter les clauses.
Cette guerre marqua donc un tournant d~ci8if, les
états devraient choisir entre la reconnaissance de la toute puissan-
ce romaine, en se soumettant ~ ses conditions, ou continuer une guerre
qui aboutirait à leur destruction totale.
'~~f~n une autre condition validant la tr~ve. était que l'une oU
l'autre des
deux parties,
ne s'en ser,ft pas pour attaquer inopinement

1
1
-
1b 1 -
1
1
l'armfe 4!verse, manquant ainsi à la loyauté la ~lus 2lém~ntaire.
Dans un pareil cas, plus rien ne
justifiait un quelconque prolon-
1
gement de la tr€ve,
et les déput2s
complic~s d'une telle machina
tion, perdaient ipso factolcur immunité pour avo~r repr~senté, non
1
pas des chefs vertueux, nais
un
enne~~ fourbe ~~ sacrilège. C'est
ainsi qu'en 202,
Rome aCCUS2 les Ca:thaginois d'avoir viol~ une
trêve conclue quelque temps au;o~avant. Les puniques auraient pill~
1
un convoi de
vivr~escorté par trente navires de guerre, que la ten-
pête avait rejetés
sur la côte ~fricaine. Usant du droit d'aubaine,
les Puniques pillèrent l'épave
(1).
SCIPION
envoya à
CarthaL~ trois
ambassadeurs pour se plaindre.
Ceux-ci,
aU Sénat d'abord, puis devant
l'assemblée du P~UfZQ
protestèrent hautement.
Leur rUde
franchise
déplut,
elle n'obtint nulle reponse.
ProtéGés contre la fUreur de la
foule par HANNON le grand et HASDRUBAL "le bouc", ils durent deman-
der, pour assurer leur retour,
l'escorte de deux triè mes puniques.
Malgré tout,
la quinquerème romaine sera assaillie à la staticn nava-
le de Rucsumo, par trois navires carthaginois, mais elle s'fchappe
.grâce à sa vitess~. Ces faits rouvrirent les hostilit~s (2).
Dans le livre IV DE son .Belluin Gallicum,
CESAR rend co~pte d'une
trêve qui aurait été rompue
~ l'improviste par l'ennemi. Selon lui
après avoir conclu une trêve avec les
GErmains,
ces derniers lui
auraient li~ré bataille. Aussi estima t-il après ce combat "qu'il
ne devait plus donner audienc
aux déput&s ni accueillir les ~roposi­
tions
de gens
qui auraient
COl'lmencé par un coup de traîtrise: et par
(1 )T.
L., XXX,
20.
(2) POL. J
XV,
1
et 2. XXX,
25, 2.
Sur l'intervention d'Hc..r.non
et
d'Hasdrubal,
chef du p'l.rti pro-tol:.o.in
:App.,lib
",
34.
Les rorr-ains
durent rappeler ces faits
à l'occasion du nouvel armistice :POL
XV,17,
3 ;
1 8 , 3 ; T.L., XXX,
37,
1 i
6
i
'1-12;
App.,lib., 53.

-
162 -
ambassades
per doLum atque insidiae)
; à la faveur d'une demande dL
paix
(1)". Mais il est douteux qu'il s'agisse d'une véritable trêve.
Car CESAR avait d'abord lancé un ulti~atum aUX députes
:Usipètes et
Tencthères qui ne constituent pus l'ensemble, mais une
f~ction des
Germains.
"Il n'y avait pas d'amitif possible d'eux à lui, s'ils
restaient en Gaule".
Les dfputfs, en attendant d~ revenir au bout de
trois
jours,
avaient demandé au Romain de ne pas avancer davantage.
Ce dernier avait refusé,
pensant que
ce délai de trois
jours aurait
permis
eu gros de la cavalerie ennemie de venir en renf0rt
(2).
~
ce moment-là,
CESAR se trouvait a quelques journées de barche" seule-
ment de l'ennemi.
Lors~ue les amb~ssadeurs étrangers r~vinrent au
bout du délai
fixé,
le proconsul était déjà à quelques
douze ~illes
de leur champ,
c'est à dire moins d'une
journée de marche.
Sa cavale-
et
rie,
qui le précédait, devait donc en être tout proche pouvait, n'a-
yant encore reçu aucune instruction, prendre l'initiative d'une
attaque.
C'est ce qui pourrait expliquer le fait que les
amb~ssadeurs
"se mirent à supplier CESAR de ne pas aller plus avant, leurs prières
étant vaines, ils essayèrent d'obtenir qu'il fît porter
~ux cavaliers
qui étaient en avant garde, l'ordre de ne pas engager xe combat".(3)
Ils réclamaient en outre trois
autres
jours,
afin de négocier avec
lesubien~, leur installation sur le territoire de ce peuple. CESAR
promit de n'avancer ce jour que de quatre milles.
Son avant sarde
fit-elle
de même? Le général ne l'inàique p~s, se bornant ~ demander
aUX àéputés
germains de venir le trouver le lendemain "en aussi
grand nombre possible, afin qu'il ~~t se prononcer en conr.aissance
de cause sur leurs demandes.
(4)" Or d'ici là la cavalerie rOITluine
avait largement le temps d'atteindre le camp des autres tribus
ger-
(1)
CESAR, B.G., IV,
13,1.
(2)
CESAR,B.G. ,1\\
,9.
(3)
id., ibid.,
IV,8.
(4)
CESAR,B.G.,
IV,
11, 5.

-
1b3 -
ma1nes
et de
l'attaquer.
C'est ce qui
arriva,
en effet,
mU1G
le
proconsul rejeta sUr l~ cavalerie adverse l'initiative de
combat
qui
s'engase3 alors
:
"M~is les ennemis, dès qu'ils aperçurent ncs
cavaliers, qui
étaient au nombre d'environ cinq mille,
tandis
qU'eux-
mêmes
n'en avaient pas plus de huit cents ••• ,
char~èrent les n~tres,
qui ne se méfiaient de rien
(1)11.
Dev~nt un rapport de force qui leur
était lourdement
défavorable,
i l peut paraître surprenant, que les
Germains aient pris
l'initiative de
ce combat.
Ils
n'avaient dcnc
pris les armes
que pour se défendre,
oLéissant ainsi aU principe
~u~
leurs députés
avaient énoncé
lors
de
leur première ll.mba.n::;f\\de
:"les
Germains ne prennent pas l'initiative de faire
la guerr~ au peuple
romain,
mais
si
on les attaque,
ils ne refusent pas le lutte
(2)".
CESAR n'a en fait
cherché,
avec les
Germains,
qu'ù gaGner
du
temps pOUr se placer en position de
force,
enfin provoquer l'ennemi,
pour ensuite l'accuser à la moindre occasion d'avoir rompu une trêve
illusoire
(3). Son stratagame ne manq~a pas de susciter l'indignation
de certains de
ses contemporains.
PLUTARQUE rapporte le
témoign~se
d'un
certain TANUSIUS GERMANUS,
un Ami de CICLRON
selon lequel
CATON aurait,
au cours d'une séance du Sfnat,
"émis l'avis de livrer
CESAR aux barbares ppor se purifier de la violation de la trêve
com-
mise par lui, et
faire
retomber la malédiction sur le coupable
(4)."
La violation de
cette
trêve, ne doit pas être imputée aUx "barbares",
Comme le veulent
les
~nmeDtaires, mais bien à CESAR, leur auteur.
C'est bien le
général romain qu'il aurait
fall~ accuser de dêloyauté,
en promettant de
n'avancer que àe
quatre mille en direction de
l'enne-
mi,
mais Sans préciser si dans
le même temps sa
cavalerie en ferait
autant.
(1)
id.,ibid.,
IV,
12,
(2)
id., ibid.,
IV,
7, 3.
(3)
cf.
sur ces
faits
l'intfressant point de vue de M.
RAM3AUD,
op.cit.
p.
118-122.
(4)
PLUT.,
Cesal'~ XXII,3.

1L4
-
Il ressort de tous
ces exemples
~ue si Rome aU début de notr:
période négociait d'ur-
commun accord les
tr&vos,
i l ressortait àe
leurs
conclusions,
son dfsir
de profiter
de
ces
arrats
mom~ntanês,
pour affaiblir davantage ses adversaires.
Certes l'on pourr~it mett~e
sUr le compte d'une méfiarc~ naturelle, les garanties exigées
de l'ennemi.
Mais
à les analyser de plus pr~s, on se rend compt~
que Rome cherchait plus
~ disarm2r militairement ses enn2Mi3 flfin
de les
contraindre à conclure la paix à ses conditions.
En exi~c~r.t
le paiement d'indemintés de
guerre,
elle Itur
imposait un état d0
fait
le prise en charge des
d~penses de l'arm~e. Cette prise e~
charge des
frais
de l'armée
victorieuse les
soustrayait mO~éntan~­
ment.
Les inévitables
exactions que le droit de
guerre
aU~ait
l~gitim~es. A partir de la guerre d'Etolie, Rome dicte ,:'Iv:> cOIldit;io ....
conditions de trêve
qui ressembleie!1t. plut3t à ~l_c.&) r::<li:<n':"~~Lr)
de pajx.
. "
.
Aucun etat,
quelle
que
fnt
sa pu~ssance, n'eta~t en mesure de se
sOUStraire eux txigences
d'une Rome toujours
victorieuse.
Cela ap-
parait du reste clairecent,
à travers le discours plein de morgue :'l'C~
CESAR attribue
aU chef germain ARIOVISTE qui lui
aurait ~épli~u6
que
"les lois
de
la guerre voulaient que les vainqueurs
impOSaS, -.t
leur autorité aUX vaincus
COmme bon leur se~blait. C'est ainsi qu'iJ
~tRit dans les traditions de RJme de dicter s •. loi aux vaincus ~o~
point d'après
les
ordres d'un tierJ'
mais selon son propre grt ••.
si les Séduens
etaient
ses
tributaires,
c'était parce qu'ils
avsier-t
t~ntf la fortune dl _ arœes, parce qu'ils avaient livr~ bntcillc et
avaient eu le dessous ••. (l)".
II -
LES
TRAITES
DE
PAIX
Les
tra.i"t~s de paix marquent, de façon plus ou ~Olns durél"J'_~
l'arrêt des hostilit~s. CO~Qe pour la déclaration de guerre à l'o~i­
gine,
l'intervention des
feciaux,
garants du ius
fetiaZc, (tcit
<-.
' , - -
(1)
CESAR,
B.G.,
' , 3 6 ,
, et 3

-
1bs
indispensable à leur conclusion,
ainsi que
l'approbatio~ du ?~uple
ronaln.
Nous retrouvons
ceci
indiq~C dans TITE LIVE, au sujet de
la paix demandée par les Samnites,
/lUX
Romains, après
la clësc.stre
des
fourches
Caudines,
en 321 avec J.C.
"les
consuls
0tant allfs
auprès de PON~IUS pour les pourparlers, comme le vainqueur parlait
d'un traité,
ils
déclarèrent que sans
décision du peuple, on ne
pouvait conclure un traitf,
nl snns
intervention des
fèciaux et au-
tres cérGmonies solennelles
(1).
Le rôle des
feciaux
ser~ supplantf
plus
t~rd p~r celui des ambassadeurs.
Au début de notre p~riode, les conditions de palX ~taient d'a-
bord édictées par le fénat
;
@@ n'est
qu'après l'approbation du
peuple qu'elles Etaient ratifiées.
Le premier traité,
qui
concerne
notre étude,
nous est co~nu sous le nOm de traité je LUT~TIUS (2).
Signe en 241, i l comportait des
clauses
financières,
uilitaires et
diplomatiques.
Rome profita de sa victoire pour évincer Carthage
de la Sicile et lui
faire
supporter les
dommages de guerre,
qui
devaient être payés
en dix annuités de deux cent vingt t~lents
euboiques.
Si l'on en croit POLYBE,
le'p~uple ne ratifia pas cette
convention mals
en aggrava les seules
conditions
financi~r~s (3).
Rome exiGea aussi que les prisonniers
romains lui soient rendus sans
rançon.
L'on sait que
l'Urb8 violera cc traité, en rouvrant les
hostilités contre Carthage
; et que le traité de 226,
sur lequel ses
ambassadeurs
fondèrent leur revendication
juridique était P!
tiquernen T
nul
• L~ raison, nous l'avons évoquêe, c'~tait un engaGement
personnel n'obligeant pns les
états.
(1)
T.
L.,
IX,
5,
1
(2)
POL.,
l, 62, 7-9
; 63,
; III, 27
(3)
id.,i~id., 62,9 sur ces problèmes cf. ln mise au point dt M.
SZNYCER in Rom~ et
la conqutte •••
op.cit.~p. 609.

Quand nu trnit€
de pn1x qui mit
fin i
la deuxiême guerre puni-
que,
aucune de nos
sources
n'~n fait mentio.,. Cependant TIT~ LIVE
note qu'après
qu'on eut entendu It:s aMbassadeurs
carthaf,iilois, les
tribus se prononc~rent pour la paix et d&signaient "pour l~ conclu-
re SCIPION.
(1)
Ici apparait encore une
fois
la mauvaise fci romaine.
Les Pat~es n'étant pas à même d'apprfcier la situation, renvoyèrent
les d€putés
carthp.ginois sans
conclure, et
chargèrent SCIPIüN
adjoint de
dix
ambassadeurs,
de
d~cider de cette paix, au roioux
des int€~êts romains. Si Rome ne profitu pas de sa victl;ir~ pOUr
s'insteller,
ellt
d~sarma sa rivale, qui devait rendre auX Romains,
prisonniers ct déserteurs,
remettre tous les vaisseaux sauf dix,
ainsi que
ses éléphants.
Ordre lui
fut
donné dé
"ne faire le. guerre
ni en ~frique, ni hors d'AFrique sans la permission du peuple
Romain
(2)
"Rome usant de sa sup&rioritf militaire cherche d tenir
Carthage i
jamais "confinée" en
·f~ique. Mieux, par ce traitG elle
sonnait le glas de sa rivale,
réduite au rang d'une ~ité vessele.
Certes elle conservait un territoire africain, mais le tr~ité susci-
ta contre ell~ un rival, en Afrique même
:
MASINISSA à qui Carthage
devait rendre ses territoires et c~ux qui avaient appert~nu i
ses
ancêtres.
Ainsi pour éprouver la docilité de Carthage,
Rome pouvait
i
son gr;, appuyer ou réfr~ner les prétentions que le liunide ~tait
en droit d'élever,
en vertu même du traité,
sur les territoires
autrefois
occupés par sa famille.
Elle pouvait,
si l'occasion d'in-
tervenir à nouveaU contre La Vaincue devenai t
à nouveau ':~cessaire,
y trouver les
fondements
juridiques d'une intervention arn0c.
En Orient, les mêmes
ambiguitfs peuvent être décelées,
Uans les
conventions qui ponctuèrent les divers
conflits entre ROQe ct les
(1)
T.
L.,
XXX,
43,
2-4.
Lors de
la conclusion de l'armistice, le con-
sul avait demandé auX puniques de rendre leurs prisonniers, les
déserteurs
et les esclaves
fugitifs,
de retirer leurs ar~ées d'Italie
et de Gaule,
d'abandonner toutes les
îles entre l'Italie et l'Afri-
que;
de livrer tous
leurs
vaisseaux,
sauf vingt,
et de payer cinq
mille talents.
SCIPION doublera les indemnités de guerre reparties
en cinquante annuités.
(2)
T.
L.,
XXX,
37, 3-5.

états grecs.
LE: traité de Phoiniké apparait.
comme
ur.
cO:.jpro~is.
C'est du reste la seule convention que Rome slgna grâc~ ~ 0CS
médiateurs.
(1)
L'on sait d~jà que c8tte paix ne fu~ j~muis sincère
du c6t6 romain.
A la différence d0S pr~c6dcntes. cette convention
pose un délicat problème celui des
foedari
adsoripti.
Même si les
modernes
sont tr~s partagfs
sUr
cette question
(2). nous Sommes
certair
que les Athéniens ne furent
pas
nssoci;?s.
sincn. l,ot:s l'a-
vons déj3 fvoquf.
ils auraient
fourni3 un prétexte de
g'..1erre en 200,
lorsque Rone rouvrit. pour la seconde
fois.
les hostilit~s contre
le roi mac~donien. Les Romains occupés en Occident. épargL~rent
la Mac~doine en acceptant ce comprOMis. en 205.
A partir du second siècle. ROl:1e ne négociera plus de traités.
elle les
imposa pour résoudre les
guerres dans lesquelles elle
était impliquée.
P.
DUCREY note que
"l'équilibre que supposait l'ap-
plication de procedures telles
que l'échange de prisonniers.
fut
d~finitivement rompu.dès que Ro~e s'engagea dans la M~diterrnnée
Oientale
(3).
Nous l'avons
déjà évoqué. PHILIPPE V.
les Etoliens
ou ANTIOCHOS III,
furent
contraints de
se soumettre auX volcntés
signifiées par Rome.
dans des
traités
inegaux qu'ils avaient da
accepter.
Ils
furent sommés Je livrer sans
constrepartic leurs pri-
sonniers.
les
transfuges. et même les
ennemis de
Rome
qu'ils
avaient
accueillis
auprès d'eux (4).
Une autre
innovation.
importante, appa-
( 1) si l'on en croit TITE LIVE. le proconsul P. SEMPRONIUS aurait
demandé auX Epirotes de dire à PHILIPPE V.
qu'il était pr~t ù le
rencontrer afin de faire la paix avec lui. au nom de R~me. Cela
ressort nettement dans
ce passage du padouan
: Epirota3
temptata
prius Romanorum voluntate legatos de paoe oommuni ad philippum misere
satis oonfidere oonventuram eam ad firmantes~ Bi ad oonZoquium oum
P.
Sempronio veniBset :T. L.~
(2)
cf.
J.
L.
FERRARY.in Rome et
la oonqu~te••• T.
II.
p.
136-731-
(3)
p.
DUCREY. op.oit.~P. 270
(4) cf. Senatus-consulte de 197/( :POL •• XVIII. 44
; T. L. XXXIII.
30.
Paix avec l'Etolie
:POL.,
XXI,
32.5-6
;
T.
L ••
XXXVIII.
11.4
Paix d'APAMEE POL ••
XXI,
42.
10
;
T.
L ••
XXXVIII.
38. 1 Nf,BIS d;.lt
aussi remettre
aux ROr!!·~in6 et i1 leurs alliés prisonniers et déser-
teurs.

1
-
lob
-
rait po~r la première fois dans le traitf qui
fut
lmpJs~ aU~ Etoli0ns
cn
189.
La confederation fut
tenue dans
un ftat de sujétion totale,
les
Etolieno devant
reconna!trc
flZ'im?crium maiestatemq~( Populus
Romanus". Leur nation "ne fournira passaCe à liucune armée n:l.rchant
contre les
alliés
et
amis de
Rome
;
elle ne lui
fournira aucun
secours,
elle aura pour enne~is les ennemis du peuple romain, elle
prendra les
armes contre eux,
elle leur
fera la guerr~ (1)". Dans
ce traité
apparaît pour la première
fois
"la
clause de
~.1~jestC'
car
~téristique des traités inegaux qui donnait en quelque sorte
"une
for::::le légale aU statut d'Et'at-client
(2)".
En effet
ce:ttt: clac;.-
se
i~plique la reconnaissance d'une inégalité fondamentale entre les
parties
contractantes, dont
l'une devait
toujours
cÉder à l'autre.
Il s'agit la d'un
instrument d'une pure domination.
Ro~C: a, non
seulement un droit de regard sur les
relations
diplomatiques
que
nouent la confédération étolienne, mai~ elle la prive d~ sa liberté
en matière
de politique exterieur~.
Dans
la convention signée avec
ANTIOCHOS
connue sous le nom de
traité d'Apamée
(3). Rome u~nnt de sa toute puissance, i~pose aU
vaincu les
conditions
au~quelles il doit se soumettre :EU:~ErE
les
Rhodiens
et
les
autres alli~3 romains.
C'est Rome
qui n~G0cie à leur
place
sans
avoir même,
auparavant,
discuté avec
eux des
clauses
qui
les
concernent et du détail
de leur application.
Elle exerçait
ainsi sur eux "une domination
impériale"
(4).
(1)
POL.,
XXI,
32
; T.
L.,
XXXVIII,
11.
(2)
CL.
NICOLET.
Rome et la conqu~te••• T.II op.ait.p. 750
(3)
cf.
T.
L.,
XXXVIII,
38 sur les différentes
clauses de ce traité,
sur
le r6glement
cf.
l'étude très
détaillfe de
E.
WILL., op.cit.,
T.
II,
p.
181-192 et J. L. FERRRhRY, in Rome et la conqutte •••
op. cit., T.
II,
p.
747-749.
(4) Pour reprendre l'expression heureuse de M. C. PR~~UY.. op.cit.
T.II,
p.
351.

-
189 -
La clause d'amitié stipulait "qu'il y
aura amiti'; 2ternelle
entre les Romains et ANTIOCHOS d~ns ln mesure oQ celui-ci observera
l~s clauses du traite." Les clauses de l'anitié ne sont pas bilat&-
ro.les
car ln non observallce s' ..lntrn.1nai t
ln. rupture de l ' allicnce
que pour ANTIOCHOS.
Tout co~ne en Cas de contestation d'un~ ~es
clauses par l'une des ~arties contractantes, celle-ci "fer~ appel
a un arbitrage (1)". L'arbitruge ~t~it une pratique cour~nte dans
l'antiquit~. Mais Comme le souligne l'achéen, l'arbitre doit toujours
être plus
fort
que la plus
forte des ùeux parties
(2). Or neUs ne
connaissons au COUrs de notre périouc, d'arbitre plus
fort
que Rome.
A partir de la signature du traite d'Apamée, L'Urbs eut la nême
conduite à l'égard des vaincus et nê~e de ses alliés.
Les conventions
siGnées privaient les
uns et les autres de toute initiative d'ordre
international qui n'aurait pas
son ~gr~ment. (3) Citons en regard
c~s paroles d'ISOCRATE, pour mieux illustr~r la véritable nûture
des
conventions que Rome impose à ses adversaires
vaincus
:"Qui igno-
re
qu'il y
a
traité quand les
clauses sont égales
et impo.rtiales pour
les deux po.~tis, ordre quand elles pIncent l'un d'eux en €t~t d'in-
férioritŒ
contrair~nent à la justice. (4)
(1)
POL.,
x~r., 46 et 'T. L., XXXViII, 38, 17 qui coDtr::,.irç:~e~t à,:'OLY-
BE Dote 'lue "toute contestation entre les parties sera rt:'Glée ccnfor-
rnfm~nt aU droit par procfdure judiciaire ou si toutes les deux
consentent par les armes".
Le romain, encore un fois,
tente
de
donner
une
justification rétrospectiv~ de la reprise des hostilités.
( 2) PO L.,
V,
67.
(3)
Rome
9
peu tenu compte des
dolGances des populations
dont elle
disposait, par exemple en
189,
les Lyci~ns et Cariens furent donnés
auX Rhodiens,
en récompense de
leur
d~vouement (POL., XXII,5). Les
premiers protestèrent en vain auprès
des
commissaires
du Sénat.
(4)
Isocrate, Panég.,
IV,
176.
(traè..
G.
MATHIEU-E.BRE~10IJD-)

-
190 -
Bien que
rédigés
et conçus
conformément à leurs
i~térêts, ces
trait~s seront viol&s chaque fois
~ue Rome sentira le besoin de
sevir ~ nouveau contre tel ou tel vaincu.
Nous
avons
déjà constcté
quelques manquements
concernant
ces accords
conclus
:à fro?os
des
cieux premières
guerres :--lniques. de la sccondt.:
et troisième
guerre de Mac€doine,
et du conflit qUl opposa Sparte i
Rome. ~ùus
reviendrons
sur d'autres
cas de violations de traités dan5
le dernier
chapitre de
cette €tude.
retenons
que la seule loi
qui présidait
i
la sign~ture de ces
tr~itês, €taiL
celle du plus
fort,
et que le
respect du formalisme
juridique dé
ces
conventions ne
fut
qu'aparent.
III -
L'ACCORD
D'AMITIE
En temps
de palx, d'autres accords
Comme les
tr~itcs d'amitié
oU d'alliance pouvaient être conclus.
Un peuple pouvait se "lier
d'amiti€"
avec Rome,
oU recevoir d'elle le titre
"d'Amiti~". ~ais
i l importe d'ores
et déjà de souligner que
ces mots n'ont pas le
même contenu et ont eu des
significations distinctes quoique proches.
Dans cette perspecti~e, la qualité d'ami peut être favorable oU dé-
favorable
au peuple oU souverain qui en bénéficie.
Le traité
signé
en 212 avec la conf€dération
Etolienne stipulait
clairement
rÔles
conditions dans
lesquelles
les Etoliens deviendraient les amis et
les alliés du peuple romain".
Ils étaient tenus
de faire laguerre
sur terre à j>HILIPPE,
et sur mer avec l ' aj ne f:l,U molns de vingt cinq
quinquérèmes
romaines.
Dans ce cas, nous
l'avons déjà évoqué.
une
partie du butin leur reviend~ait. Les peuples qui s'associeraient ~
eux contre PHILIPPE dey
draient ~ leur tour, les alliés de Rome
et auraient part à
l'amicitia romaine.
(1)
Quand TIGFANE d'Arménie se rendit seul,
à pied, au camp romain
pour se livrer à POMPEE, celui-ci lui
rit bon accueil, le rassura
(1)
T.
L.,
XXVI,
24, 8,
10.

-
191
-
en lui rendant tous les do~aines héréditaires de sa famille. Le
proconsul lui donna le titre d'allié et d'ami du peuple romain,
mais exigea qu'il lui pay~t "six mille talents, cinquante drachmes
~ chaque soldat, mille a chaque centurion et dix mille ~ chaque
tribun militaire".
(1)". L'amicitia établie
entre un roi étranger
est, en général, conclu ~ar le chef d'une armée conquérante ou le
représentant du peuple ro~ain sur un territoire conquis. Ainsi
lorsque SALLUSTE nous parle de MASINISSA~ rex Numidarum~ in ami ci-
tiam receptu6 a P. Scipione (2) nous ne pouvons nous rendre compte
avec certitude qu'il s'agit de L'amicitia officielle 4ue parce qu'il
déclare quelques lignes plus bas
:
nIgitur amicitia Masinissae bona
atque honesta no bis permansit.(3)
CESAR, lui aussi, ne contentait pas de faire entrer les peuples
gaulois dans l'amitié de Rome, mais il s'était attaché par les liens
de
Z'amicitia priuataun certain nombre de chefs qui lui ap~ortèrent
ensuite leur appui lors de laguerre civile (4). Cet aspect
de
Z'amicitia n'est donc pas autre chose que la fOrme prise par la
cZienteZa~ lorsqu'elle s'applique ~ des étrangers d'un certain rang.
L'emploi du terme amicitia ménage simplement leur susceptibilité
en même tem~s qu'il Correspond à la considération plus grande que
l'on devait pour des gens Conme eux. qui occupent les degrés les
plus élévés de l'échelle sociale.
(1) App., M1,thr.~ 104.
(2) Sall.,Iug., V, 4.
(3)ttg. ibid., V,5. pourtant SALLUSTE emploi pour parler de Z'amici-
personnelle l'expression priuata amicitiv
(XIV, 20). Il s'agit des
relations personnelles qu~ JUGUURTHA a €tablies~ dans son intér(t
,
avec un certain nombre d'hommes politiques influents à Rome.
(4)
CESAR,B.e
, I I I , 59,
1-3.
,
1
1

-
192 -
Lorsque le peuple rooain. par le biais de son représentant.
conclut un traité d'amitié avec un souveraiL étranger. ce traité
n'était pas perpétuel et devenait m~ne caduc à la mort du souverain
avec lequel i l avait fté conclu.
Aussi était-il de règle constante.
qu'il soit
confirmé par chacun de ses successeurs.
Quand un change-
ment de rè@Pe
survenait dans une dynastie amie de Borne. le prince
héritier. ne ~anquait pas à son avènement ou peu après.
de renouveler
l'amitifi ou l'alliance
:"renovare amicitiam,
soaietatem", qui unis-
sait au peuple romain le ou les rois dont il était l'h~ritier. Notre
période abonde d'exe~les de cette nature :PERSEE renouvela le
traité conclu avec PHILIPPE (1). tout comme ANTIOCHOS IV. le fera
pour celui signé par son père ANTIOCHOS III
t
certainement. son frè-
re SELEUKΠ1 V. le renouvel a lui aus s i
(2).
Quant à l'ace~rd d'amitié conclu avec un peuple étranger, il
découlait naturellement de l'accord de capitulation et en était com-
me le prolongement.
Il consistait, après les hostilités, en une
"construction positive de type pacifique,
chargée d'obligstions
réciproques
:le mot latin pax et peut-être aussi le mot grec 8i~ne
évoquent, du ~oint de vue étymologique~'établissementd'un nouvel
état de
chose
(3~ CESAR emploie les expressions amiaiatiam faaere
et venire in amiaitiam pour rendre Compte de ce genre de rapports
internationaux.
Faisant allusion aux Ubiens,
CESAR écrit qu'ils
"avaient lié amitié avec lui, lui avaient donné des otages,
(et)
le priaient très
instamment de le~ porter secours, parce que les
Suèves menaça.ient leur existence."
:Ubii ••• amioitiam fecel'ant,
obside 8 dederan t, magnopere o-aban t u t Bibi auxi l.ium fel're t, quod
graviter ab Suebis premerentur (4).
Dans un autre passase, l'auteur
des Commentaires note égalem8Dt que l'Eburon AMBIORIX s'était lie par
(1)
POL.,
XXV,
3,1, Diod •• XXIX,
30, T.
L., XL.,
58,1
XLI, 24.6.
(2) T.
L.,
XLII, 6, 8,
10.
(3)
y.
CARLAN, op.
ait.,p. 36.
(4)
CESAR,
B.G.,
IV,
16, 5.

1
1
-
193 -
1
1
un trait6 d'amitifi aux "Germains", devenant ainsi leur client:
CESAR "savait ••• que par l'entremine des Trévires il s'~tait l i '
d'amitié avec les Germains".
per TreveroB venisse germanis in amici-
1
tiam oognoverat (1).
1
L'amicitia~ telle qu'elle était conçue à Rome, sous-entendait
naturellement une idfie de dépendance politique, un rapport de sujé-
tion que Rome entendait établir avec les nations qui la sollicitaient
En 193, les ambassadeurs d'ANTIOCH~s, envoyés à Rome pour y con-
clure au nom de leur roi,
un foedu8 amicitiam~ furent étonnés du
fait que leur demande soit soumise à certaines conditions. Aussi
le chef de l'ambassade MENIPPOS fut très ferme dans sa réponse.
Après avoir én.méré les différents traités que pouvaient conclure
les peuples et souverains
selon les circonstances i l en déduisit
que son maître, n'ayant ja~ais été en guerre contre Rome, ne saurait
par conséquent, contracter avec elle un traité, que sur la base
d'une parfaite égalité.
(2)
En 58, lorsque des députés romains vinrent trouverARIOVISTE,
pour la deuxième fois,
ils étaient porteurs d'un message de CESAR
qui mettait l'accent sur l'amitié romano-germaine.
Le proconsul lui
reprochai t
notamment de ne pas se conformer i
cette ami tié, en se
refusant à un "échange de vues sur les affaires qui leur étaient
communes.
(3) "Le romain présente cette amiti~ comme un "grand
(1) id.ibid., IV, 5,4.
(2) T. L., XXXIV, 57, 7-9
esse autem tria genera foederum- :unum~
cum bello victis dieerentur leges- J alterum~ eum pares bello aequo
foeder e in paeem atque amiaitiam venirent- ;
tertium esse genU8~ cum~
qui numquam hostes fuerint~ ad amicitiam Bociali foedere inter se
iu~,~ndam coeant ; eos neque diaere nec aecipere leges ; id enim
vietoris et victi esse.

e~ eo genere cum Antiochus esset~ mirari,
se~ quod romani aequum censeant leges ei dieere eqs.
(3)CESAR
B.G., I, 35, 2

-
194 -
bienfait", dont ARIOVISTE aU~ait dû être reconnaissant à Rome;
et de lancer auchef germain un ultimatum en bonne et due forme.
Seulement, celui-cin'avait pas la même conception de l'amitié que
le proconsul, et il le fit
conna!tre. Pour lui, une amitié de bon
aloi consistait, pour sa part,
"à s'abstenir de prescrire auX
RODains l'usage qu'ils devaient faire de leur droit" et pour ces
derniers à ne pas entraver l'exercice du sien
: "CESAR lui faisait
un tort grave en provoquant, par son arrivée,
une dinri :ution de ses
revenus. ••
(1)"
Les positions de MENIPPOS et d'ARIOVISTE sont donc sans équi-
voque :une véritable amitié suppose,
au delà de lacoexistence paci-
fique, une réelle égalité politique et un mutuel respect. Elle
suppose
aUss~ la non ingérence de l'une des parties dans la politi-
que intérieure de l'autre.
C'est aussi la même signification, 0"
les ambassadeurs Usipètes et tencthères donnent au mot "amitié",
lorsqu'ils s'adresB~rent ~ CESAR. " ••• Si les Romains acceptent leur
amitié, ils peuvent être d'utiles amis
:qu'ils leur assignent des
terres,
ou qu'ils les laissent conserver celles qu'ils ont conol1j·
ses •••
(2)".
Mais l'amicitia telle que la concevait Rome, établissait des
rapports de sujétion,
aussi bien avec les peuples amis qu'avec les
anciens ennemis, vaincus p~r la force des armes. Dane les deux cas
c'est le peuple le plus puissant qui commandait ct celui qui etait
faible,
obéissait. Toujours est-il que ces liens de dépendance p~_
trainait des obligations bilatérales qui permettaient d'entreten~l·
et de con~olider ces relations "amicales".
Ainsi il ne suffisait pas de nouer des relations anicales de
peuple à peuple; il fallait aussi les entretenir et les consolid~r-
(1)
CESAR,B.G
. , l .
36, 4
(2) id.,i.bid ., IV, 7, 4.
...~.-

-
195 -
L'accord d'amitié obligeait les parties qu'il liait à se porter
mutuellement assistance et à partager le même sort,
quelles que
fussent les circonstances. Les devoirs du peuple protecteur, en
l'occurence Rome, consistaient à défendre, au besoin par les armes,
les intérêts de "ses amis"
de moindre condition. En 218, Rome
décida d'intervenir contre Carthage,
afin de protéger ses alliés
Sagontins. En 212 la convention passee avec la confédération Eto-
lienne, stipulait que Rome se garderait, en signant un traité avec
PHILIPPE V, de lui laisser "le droit d'attaquer les Etoliens et
leurs alli6s." (1). CESAR, tout au long de ses campagnes en Gaule,
s'ingénia à défendre ses amis de moindre condition.
Un sénateur
consulte de 61, disposait que "tout gouverneur de la province de
Gaule devrait autant que le permettrait le bien de l'état, protéger
les Héduens et les autres amis de Rome".
(2) Rome avait des devoirs
envers ces peuples, devoirs auxquels elle devait se conformer, sous
peine de perdre le respect et la considération de ses Partenaires.
Ceux-ci en revanche, avaient à supporter des charges qui pesaient
bien lourd sur la balance de
Z'amicitia. Ces charges étaient aussi
nombreuses que variees.
Avant tout,
ils doivent 'se garder d'appor-
ter toute assistance aux ennemis de Rome.
Le beZZum GaZZicum recèle
de nombreux passages, où César envoya des utlimatums à ses alliés.
Il les mettait en garde contre toute forme d'assistance à ses
ennemis.
(3)
L'amicitia astreignait les peuples assujettis à Rome, à lui
venir en aide en lui livrant tantôt du ravitaillement, tantôt du
matériel militaire et des troupes.
MICIPSA, roi de Numidie mit tout
son zèle afin de venir en aide auxRomains.
Il leur envoya du blé,
des éléphants qui ont frayé la marche des légions d'Espagne ~n 141,
(1) T~, XXVI, 24, 8-13.
(2) CESAR, B.G., l,
35, 4 cf. ~galement VIII, 49,1 et VII, 5, 1-3.
(3) CESAR, B.G., l , 26,6 ; 28,
1 ; VIII, 44, 3-4.

-
196 -
et de Gaule en 121 (1). SCIPION, pour chasser les Punique~ ü'Espa-
gne, se servit des frondeurs baléares et des cavaliers ibères (2).
En
131, l'expédition contre ARISTONICOS dirigée par CRASSU~, était
composée par les troupes des rois alliés:
MITHRIDATE
III, NICOME-
DE II de Bythinie et ARIARATHE V de Cappadoce (3)~ Quant aux alliés,
anciens ennemis viancus, ils étaient en plus tenus de verser à Rome
une redevance,
signe de leur état,
fruit de la victoire et châti-
ment de la guerre
:Qua8i viato~iae praemium aa poena belli (q).
C'est le 8tipendium, ainsi nommé parce qu'il a d'abord servi à la
solde des
troupes.
Suivant les pays, il s'acquitte en espèces comme
en Macédoine, ou en nature Comme en Espagne en SArdaigne, en AFRI-
QUE : Stipendia~ium veatigal(5)
; ou bien, il varie d'annGe en
année en fonction des récoltes COmme en Sicile les deaumae. Enfin
une autre obligation qui incombait égelement
le peuple client,
c'était la garde des otages. En 53, avant que CESAR ent vaincu les
Sénons, i l reçut d'eux des otages dont i l confia la garde à ses
"amis" héduens(6).
Comme nous le constatons, les obligations découlant de l'accord
d'amitié sont aussi nombreuses que draconiennes, pour le peuple
client, comme pour le farouche résistant de naguère
i
oblige de coo-
pérer, à son corps défendant,
avec plus puissant que lui. Cette for-
me de traité n'est pas, somme toute,
sans faire penser è certains
"accords d'amitif et de coopération" de notre époque qui,
sous des
dehors anondins, perpétuent, avec des structures nouvelles, les rap-
ports de domination des grandes puissances sur les anciennes colonie~
Une fois de plus, l'histoire s'est répétée.
(1)
APp.,Lib., 67 et 89 i SALL.,
., VII, 2, Florus, l, 35, 5
(2) T. L., XXIV, 30.J. CARCO p. 202 n04
(3)
J.
CARCO P.
202 0°4
(4)
Cie.,
Ver~." II,, III" 6" 12.
·5) C~c., p~o Balbo" XVIII, 81
:Quod 8i Af~i8" Bi Sardi8" Si .
Hi8pani8 ••• Stipendio multati8 •••
(6) CESAR, VI,
4. cf. également VI, 6, 4.

1
1
1
-
1~1 -
1
CH~ rIT RED EUX
1
r
Dans son
ouvrage consacré à la guerrB dan8
Z'antiquite~ Y.
GARLAN notait que "le temps de guerre et le temps de paix ftant,
!
pour ainsi dire, d'essence diffêrente. to~t passage de l'un à l'au-
tre ne pouv,it ~e faire sans prêcaution et sanS garantie. (1)" En
l'occurence
les Anciens trouvaient dans le serment l'expression
la plus achevée de la sempiternelle Fide8~ une des plus saGes pré-
cautions.
C'est pourquoi après avoir étudié les différen~
types
d'accords conclus, nous avons juge utile de nous pencher sur une
notion fondamentale
de la diplomatie romaine antique
:Fides. Nous
analyserons aussi bien son aspect juridique que son aspect religieux
à travers le rôle qu'elle joua dans les relations internationales
à l'Gpoque qui nous concerne.
1 -
ASPECTS
JURIDIgUES
DE
'LA FIDES
Le mot s'applique avant tout aux villes ou pays étrangers as-
sociés directement aU peuple romain.
Chez SALLUSTE, nous voyons
Rome accorder sa fides
aux peuples avec lesquels elle institue une
80cietas OU une amicitia : per fidem amicitiae.(2)
Le sens le plus général de fides est celui de
confiance et
particulièrement celui de confiance ~éciproque entre deux parties.
Sous cet aspect juridique, elle désignait la garantie ou la protec-
tion que Rome accordait aux peuples qu'elle recevait dans sa rides.
Car,
Comme le fait observer Y. GARLAN, c'est à la fides romana que
(1) Y.
GARLAN. op.ci~ p. 25.
(2) SaIl •• Iug.,
XIV.5 et XXIV.
10. La.fides
est aussi le fonde-
ment de
l'amicitia entre Romains. SALLUSTE déclare qu'elle lui est
indispensable : Iug~~ x.4 "(amici) officio et fide pariuntur.

-
19fj -
le d~ditice faisait particuli~rement appel. En ~change d'ulle SOUm1S-
sion totale, il en retirerait une double assurance •••
:il posait
par avance une limite au pouvoir de disposition du vainqueur, en mê-
me temps qu'il
assurait sa protection." (1)
Le recours ~ le [ides,
se pr~sente, en effet, sous deux aspects tout diff~rents. C'est
d'abord une deditio par laquelle le faible
se place avec tous les
siens, avec tout ce qU1 lui
appartient, entre les mains du puissant.
POLYBE est clair à ce sujet
; i l note que
ceux qui recourent à la
protection de Ro~e doivent livrer d'abord leur pays et leurs villes,
et aussi les fleuves,
ports, temples, tombeaux; puis les homoes et
les
femmes de ce pays.
(2)
En proposant de recevoir dans sa fides le vaincu, Rome
attend
de celui-ci un siDple acte de foi dans la justice et la cl~mence de
Rome.
Mais
cela devait supposer que cet acte de foi présentât de
sérieux avantages,
capables même de balancer ceux d'un accord bila-
téral. Au troisi~me et d~but du second siècle, ROme en recevant
des peuples dans sa fides,
"avait conscience d'assumer envers eux
des devoirs." (3)
C'est en se remettant à la foi de Rome que les Illyriens, au
trisi~me siècle, entr~rent dans la Communauté romaine, les Corcyriens
furent d'accord pour se livrer, et les Romains les reçurent dans
leur amitie.
Pareillement la ville dtApollonie se remit à la tutelle
de Rome.
Enfin les Romains reçurent Issa dans leur [ides
(4). La
réponse que les SCIPIONS adress~rent en 188, à H~raclée de Latmos,
(1)
Y.
CARLJI.N, op.ait.p.
35.
(2) POL., XXXVI, 4, 2. L'indication de Itach~en est pleinement con-
firm~ par TITE LIVE -: VI, 34,7 et surtout VII, 31, 4 passage où il
relate les conditions auxquelles Capoue
fut reçue dans la fides
de
Rome.
(3) cf. A.
PIGANIOL, "Venire in [idem,
in Scripta varia, II, p.
192-199. cf.
195-196.
(4) POL., II, 11-12.

se termina d'a~rès A. PIGNANIOL par l'annonce de "l'envoi de L.
ORBIUS qui veillera à la sécurité de la ville et du pays".
(1) Ces
plus anciens renseignements prouvent que le recours à la fides
était
la for~e normale des relations int~rnationales et, qu'elle excluait
toute idée d'humiliation ou d'infamie.
Rome garantissait la liberté
de ceux qui recouraient à sa fides
• Mais cette interpétatiûn géné-
reuse du recours à la foi romaine au troisième siècle, contraste
avec l'interprttation atroce qu'en rirent les généraux romains dès
le second siècle.
La condition du deditus
fut alors presqu'identique
à celle du prisonnier de guerre.
Quand en 191. la stratège PHAINEAS vint trouver le consul
M'ACILIUS GLABRIO. déclarant s'en remettre à la bonne foi de Rome (2).
le romain éleva aussitôt des prétentions inaeceptables.
Il préten-
dit même qu'il avait le droit de garrotter et de mettre aux fers les
magistrats étoliens.
Les négociations, on le sait,
furent rompues
(3).
En
190, à la faveur d'une trêve,
ils envoyèrent des députes au Sénat
à Rome. Mais l'assemblée offrit aux Etoliens l'alternative suivante
ou bien se remettre à la fides de Rome,
ou bien payer mille talents
et conclure alliance avec l'Urbs.
Les Etoliens demandèrent "quarum
rerum in se arbitrium permitterent"~ miis n'obtinrent pas de réponse
réponse
(4). Les négociations échouèrent pour reprendre à la faveur
d'une nouvelle suspension d'armes,
suivie de l'envoi au Sênat d'une
nouvelle ambassade etolienne.
Un s~nateur
demanda aux d~put~s s'ils
se remettaient à la bonne foi de Rome "permitterentur arbitrium de Be
populo romano" et un autre, s'ils s'engageaient à avoir les mêmes
amis et mêmes
ennemis que Rome.
Cette fois
encore,~la négociation
échoua (5). Tout au long de ces négociations, une seule alternative
fut offerte aux Etoliensm ou recourir à la bonne foi de Rome ou
bien signer une foedus.
(1) A.
PIGANIOL,
Venire in fidem.~ op.cit.p. 195.
(2) POL.,
XX,9,
10.
(3) T.
L., XXXVI,
27-28.
(4) id.ibid.,
XXXVII,
1
(5) id.ibid ., XXXVII, 49.

-
200 -
En recourant en
141 à la fides
Romana, les Carthaginois furent
aussi cruellement détro~pés. Ne s'imaBinaient-ils pas qqu'ils pou-
vaient ainsi, obtenir de meilleure garantie de salut? Pourt~nt Rome
osa affirmer qu'elle respectait la liberté des puniques, et que
c'était dans l'intérêt m~ne de caux-ci qu'elle leur enjoignait de
se transporter loin de la mer
(1).
Ainsi, dès le second siècle, le recours à la fides
romaine "ca-
cha désormais un piège, le symbole de la deditio
fut interpret€
co
COmme l'acceptation de la servitude.
(2)" Le recours à la fides
fut
place sur le même plan que le foedus
qui fixait aUX parties con-
tractantes des obligations prec~ses. Dès lors, l'on cooprend que
ceux qui voulaient s'en remettre à la bonne foi e~~~yaient de
de mettre des conditions, en demandant à Rome d'user sans méchal.c~
de l'. utorité qui lui serait reconnue.
En 190, les Etoliens deman-
dèrent de mettre les
citoyens et leurs femmes
en dehors de la dedi-
tio. En 146, les Carthaginois comptèrent garder leur liberté, leurs
lois et leur territoire. En
133, les Numantins offrirent de se re~~~t
si on leur assurait la liberté.
Mais toutes ces précautions furent
vaines,
car étrangères à la définition même de l'institution, Rome
ne les
a jamais acceptées.
II -
ASPECTS
RELIGIEUX
DE
LA FIDBS.
Dan~ un article consacrf à la fides Romana~ J. HEURGON estime
que" •••
Fides,
ce n'est pas seulement la bonne foi,
notion toute
la!que, mais la foi religieusement engagée
par le serment.
(3)"
(1)
POL., XXXVI,1.
(2) A. PIGANIOL, venire ••.
op.cit.,p.199.
(3) J.
HEURGON,
La guerre rOmaine au
IV'-IIIo8i~cLes et la Fides
Romana~in J. P. BRISSON,op.cit.~p.21.

1
1
- 201 -
1
1
"Cet article:: 'n,Ju'S
introduit ainsi dans une nouvelle dimcnsioL de la
fides et en souligne le caractère divin.
Compte tenu du rôle très
important que les dieux jouaient dans la vie privée et publiQue des
1
Anciens, il n'était pas étonnant qu'ils influençassent êc~lement les
relations internationales, et en p~rticulier les relations entre
états belligérants. Le culte de la déesse Fides
, dont on ne voit
pas de traces chez les Grecs, semble être apparu très anciennement
à Rome. D'après DENYS D'HALICARNASSE, c'est NUMh qui l'introduisit
et construisit un temple à fides PubZiCQ
(1).
La divinisation de
Fidas
en tant que ~idélité, loyauté, concept pUre~ent romain, ex~ri­
me d'une façon originale les rapports entre les dieux et les hommes.
Le pacte conclu se présente sous la forme d'une parole donnGe de part
et d'autre par les deux intéressés.
C'est dans
ce sens qu'il faut
entendre l'expression "dare [idem" qui correspond au français
" don -
ncrs\\~arolelt? L'engagement de la fides se faisait généraleI!lent sous
la forme d'un serment,
il est compréhensible que nous rencontrions
le groupe [ides iusiurandum (2).
C'est ainsi que pour être valides, les accords intcrnativnaux
devaient ~tre garantis par un serI!lent. Celui qui le prononçait encou-
rait, en cas de manquement à la roi jurée, non seulement la colère
des hommes, mais aussi la calédiction des dieux. TITE LIVE note
que tous les traitfs sont conclus aU nom des dieux qui en seront
les arbitres
(3). Bien que chaque traité ait res clauses pnrticuliè-
res. le padcuan dans son livre premier informe son lecteur que tous
se concluent de la mê~e façon, à l'époque royale comme po~r la p~rio­
de qui nous occupe.
Le plus ancien des traités connu fut celui
(1)
DEN.
HAL., I I , 1 5 ; V, 68 cf. T. L., 1,21.4 et PLUT •• NIIMA
.16.
(2)
CESAR, B.G.
l ,
3, 8
:Hac oratione adducti inter se [idem et
insiul"andum dant...
"Cf.
V.
6. 6.
(3) T. L., XXI,
10.
3. 5 ; 40,
11.

-
202 -
conclu entre
Albains et Romains
en 641
(1).
Dans la circonstance,
voici
comment on procèda :le fecial posa au roi TULLUs cette ques-
ti.')n
:"Roi o'ordonnes-tu de
conclure
un traité
avec le père patrat
d'Al b e ? é -
" 0 u i ", dit 1er 0 i
-
" Roi,
j e
r e qui ers de toi l ' he r b e '
sacrée."
"Pre::.ds de l'herbe pure",
dit le roi.
Le
fecial
alla
cueillir à
la citadelle Ilherbe pure.
Après
quoi
i l posa au roi
cette question
:"Roi,
me
désignes-tu comme plénipotentiaire royal
du peuple ro~ain des Quirites?
connais-tu ce caractère officiel
à mes assistants ct à m~S ustensiles sacrés?" -
'I."\\ui", répondit
le roi,
"sans pr~judice de mon droit
et de
celui du peuple romain
des Qui~ites" .•• Le serment constitue la conclusion du traité.
Il
(fecial)
récite à cet effet un texte
compliqué,
une longue
formule litureique ~u'il est inutile de reproduire.
Il donne ensui-
te lecture è.cs
clauses du traité et
ajoute
:"Ecoute, Jupiter;
écou-
te père pat~at d'Albe, écoute aussi, peuple albain.
Ces clauses
telles
qu'elles
ont été lues
à
haute voix,
d'un bon à l'autre,
d'après ces
tablettes de
cirp. sans mauvaise
foi,
et telles qu'en
ce lieu et en ce jour elles
sont clairement comprises,
le peu~le
romain ne
ser~ ja~~is le premier à s'en écarter. s'il s'en écarte
le premier per une décision officielle et par mauvaise foi,
alors,
ce
jour-là,
toi,
Jupiter,
frappe
le peuple romain Comme moi
je vais
frapper
ce porc
en ce lieu et en
ce
jour,
et que le coup soit d'au-
tant plus violent que tu as plus de
force et de puissance.
"A ces
mots,
i l assom~a un porc d'un coup de pierre."
Le ser~ent valide donc l'engagement pr~s. Aussi, comme pour la
déclaration de
fuerre,
la pr~sence des feciaux était indispensable.
En 201,
ils
furent
invités à
aller
consacrer en Afrique,
le traité
signé avec
Carthage.
On rendit
sur leur propre demande
un sen(1Xus
consulte en ces
ter!!les
:"ils emporteraient chacun un silex,
chacun
UtP.
touffe de verveine
le prêteur romain leur donnerait l'ordre
de ~?rysacrer les traités
;
eux demanderaient
au prêteur les herbes
sacrées"
(2). Le rôle du pater patratus est d'assurer, par formule
(1)
id.,
ibid.~ l, 24,4-8
( 2)
T.
L.,
XXX,
li 3, 9.

-
203 -
correcte, l'inpbranlable valeur religieuse du traité
(patrare =
sanoireJ.Le geste de Jupiter
ainsi évoqué COmme dieu de la fidé-
lité au serment et de la punition du coupable (fidius et uttor)
est déterminé par le geste sacrificiel
même.
Jupiter .&tdonc ga-
rant des pactes cc
~lus tout comme il est le dieu de la fidélité
au serment.
Il représente le ciel et la toute puissance
;
ses
attributs sont
l'aigle, le spectre et la foudre.
Son choix
s'explique par le fait que les dieux du serment doivent être ~n
général,
des dieux lumineux, capables de tout apercevoir du haut
de la vonte céleste.
D'autre part i l est tout puissant, d~tenteur
de la foudre,
i l a les moyens de punir les coupables de parjure
et de perfidie. En Cas de rupture par la faute du peuple romain,
la prière qui lui est adressée est celle de
frapper le peuple ro-
main Comme l'avait été la victime sacrifiée.
C'est donc par ce
dernier rite que la divinité était engagée.
L'on comprend dés
lors pourquoi "Le pater patratus~
en prononçant le serment
tenait le septrum
et qu'en sacrifiant, i l maniait le tapi8, pris
l'un et l'autre dans le temple de Jupiter; ~retrius (1)".
La prestation de serm~nt consiste d'abord en une formule d'en-
gagement qui reprend les clauses du traité
;
ensuite par une prise
à témoin de Jupiter, du pater patratu8
de la partie adverse
(2),
du peuple adverse lui-même,
~~fin par l'affirmation que le peuple
romain respectera le traité.
Cependant nous notons une certaine évolution du serment à Bome,
bien avant m~me notre période. La formule relative à ln convention
établie
en 219 entre Borne et Carthage, que nous livre POLYBi, est
(1)
P.
BOYANCE, op.cit.
, p. 97. F~retl'ius Pf'ut être mis en rapport
avec Ferire
et avec la foudre
(2)
La partie adverse prétait serment selon la formule eo cours
dans sa patrie,
et au nom des Dieux qu'elle vénère.

-
204 -
en bien des points différente de celle de ~ITE LIV~. Voici, nous
dit l'ach~en "par quels serments ces traités etaient confirmes;
pour le premier,
les carthaginois
jurèrent par les dieux de lçurs
pères et les
Romains,
suivant une coutune antique, par Jupiter Lapis;
pour le dernier
;
ils ajoutèrent une
invocation à Mars
et à 1n:-a-
lios
(le belli~ueux). Le serment par Jupiter Lapw se fait ainsi
le prêtre chargé de sanctionner le traité prend une pierre à la
main, et
a~rès avoir juré par la foi publique, prononce ces paroles
"Si
e dis
vrai,
qu'il m'arrive bonheur;
si
je pense autr~ment
que
je ne parle, que tous les autres
gardent tranquillement dcns
leur patrie et
sous leurs lois,
leurs biens,
leurs pénates et leurs
tombeaux ; que mOl seul je sois rejeté COn~e je rejette cette pier-
re." En disant ces mots,
il lance la pierre loin de lui.
(1)" Dans
cette évolution,
l'on constate que Mare
et Quirinus sont à côté
de Jupiter,
comme garants du serment.
La présence du dieu de la
guerre s'explique par le fait que le traite comportait une clause
relative à une collaboration militeire entre Rome et Carthage. Par
ailleurs, le fecial ne demande plus à Jupiter de frapper le peuple
romain en Cas de parjure, mais i l appelle la vengeance sur lui .tout
seul.
Il s'offrait ainsi à en'osser,
en ce lieu et place de la
collectivité, toutes les conséquences du parjure,
et mettait du
coup même à l'abri l'ensemble de ses concitoyens.
De même, le porc,
représentant le peuple infidèle, n'est plus tué avec la pierre
sacrée qui,
ici,
est jetée loin du fecinl.
Malheureusement, uotre période ne nOUfi fo~rnit
pas d'autres
exemples de prestations qui, sans doute, nous
auraient mieux permis
d'appréhender cette évolution.
Tout au plus nous savons que la
pratique du serment se perp~tua. Nous la retrouvons en 188, lors
de la guerre de S~rie. POLYBE dit seulement qu'après la ratification
(1)
POL.,
III,
25,
69. Le plus important de cette triade est bien
entendu Jupiter qui
est témoin et g~rnnt du serment.

- 205 -
de la. p8.l.X,
"les serments d'usage
furent
échangés.
(1)"
Ne.is
i l
semble bien que les feciaux n'aient pas présid~ la cerémonie, puis-
que l'achéen ne fait
aucune allusion dans
ce sens.
Ce qui nous
conduit i
penser qu'elle ètnit m~me d~venue lalque.
Le serment était un engagement contracte à la fois devant
les hommes et dev~nt les àieux qu~ le validaient et le certifiaient,
par leur présence.
Dans ces conditions,
i l était censé constituer
la garantie la plus sûre, puisque
c'&tait un accord contracté
sous la protection des dieux.
Mais l~s exemples de conventioLs
transgressées,
de promesses viol~es au cours de notre période, nous
interdisent ~'affir~er
que les Romains
ont mêrité le beau nom
de "peuple de le Fides "(2). Si le serment n'a pas v~ritablernent
été une garantie internationale (3)
sûre, cela est dû,
à
notr~ avis,
à deux faits fondamentaux. D'une part, nous l'avons évoqué, il
n'était pas juré par la collectivité dans sa totalité, par consé-
quent "la formule prononcée par le jurant ne pouvait concerner que
lui et, par extension, sa propre maison ou sa propre descendance,
mais c'est tout
(4). Or un engagement internation~ pour être vali-
de,
suppose le principe d'une responsabilité collective. D'autre
.,
.,
no n
part,
la validite
des
accords de cette nature a dependu de la pié-
té ou de l'iDpi~té des contractants, mais pour l'essentiel des rap-
ports des forces.
Dans bien des Cas,
au cours de notre étude,
Rome
l ' a montre.
A chaque fois qu'elle a eu b rompre un engageoent inter-
national,
elle a trouvé toujo~rs les moyens juridiques n~cessnires
pour le contourner,
afin de donner l'impression de lui deMeurer
fidèle.
Elle alla jusqu'i jouer une alliance contre une autre,
c'est à dire un serment contre un autre
(5) pour se donner bonne
conscience.
Bien d'autres ~xemples, que nous évoquons dans le
dernier chapitre de cette étude n~ nous déoentirons pas.
(1)
POL.,
XX,
24
(2) P. BOYANCE, Les Romains, peuple de
la Fides, in Etudes sur la
religion romaine p.
136-152 et POL., VI,
56,
14
(3) Sur l'~chec ùe cette gara.ntie cf. R. LONIS, la valeur du 8e~ment
dans les acco~ds internationaux en Gr~ce classique in Dialogues
,
.
6
8
'
d hlst.
anc.,
,19 0, Ann. litt. de la fac.
de BESANCON,
251,
P • 267 - 2 86 cf. p.
27 2
;
278- 2 86
(4)
id.
ibid •• p. 280
(5)
cf.
les causes de la seconde guerre punique ou la seconde guerre
de Macédoine à titre d'exemples.

-
206
-
,
.~
\\
LA CREDIBILITE DE ROME DANS LES RELATIONS INTERJATIOdALES
Il nous
a semblé utile, pour cette étude traitant des lois
de la guerre,
d'essayer d'appr~hender le cr~dit dont jouissait
Rome aussi bien auprès de ses alliés que de ses adversaires.
En
d'autres ter~es, il s'agira de trouver dans nos sources, des
renseignements sur les courants qui anim~rent l'opinion mondiale,
Sur les problèmes touchant au respect,
ou à la violation d~s lois
de la guerre, et sur les jugements qu'elle portait à l'encontrt
de Rome.
Notre tâche, bien entendu, ne sera paS chose aisée pour
des raisons multiples. D'abord nos sources,
très souvent, ne font
que de brèves allusions sur l'atttidue ~u'adoptèrent les citoyens
à propos
des
affaires touchant la conduite de la guerre. Nos indi-
ces sont parfois des discours ou des lettres transmises, qui seront
donc les seuls éléments sur lesquels nous allons fonder nos obser-
vations.
Un second moyen de ~econstituer le jugement porté par des
contemporains sur un fait de guerre,
consiste à utiliser des ren-
seigneMents que fournissent les oeuvres sur l'opinion de leurs
auteurs eux-mêmes;
Cependant, nous nous garderons de prendre TITE
LIVE, POLYBE ou CESAR, pour miroir de l'opinion publique, leurs
jugements très souvent sont suspects de partis-pris.
Enfin de
l ' histoire
anti-romaine, i l ne reste de traces que celles qu'ont
bien voulu nous laisser TITE LIVE ou CESAR en donnant la parole
aux vaiDcus.
Néanmoins, nous essaierons d~ deg~ger, des textes dont
nous disposons,
quelques données sur les sentiments que manifes-
tent divers groupes de citoyens d'Orient ou d'Occident
face aUX
méthodes de guerre romaine,
ainsi que le comportement de Rome en
face de ses alliés ou de ses adversaires.
1 -
DE LA PREMIERE GUERRE PUUIQUE A LA BATAILLE DE PYDM~
Cette période est celle des plus v~ves résistances à la con-
quête romaine.
Cette opposition ~ Rome, a co~~~ncé en Italie même
bien avant la guerre des Bocci,que VELLEIUS,
en porte parole des

-
20'{ -
rancoeurs
italiennes,
justifie par le
fuit que "le peuple de loups
avait ravi sa liberté fi l'Italie
(1)".
En effet, en dehors des
latins.
les conditions les plus
inégales régissaient le sort d~s
différents peuples d'Italie
(2)
:traités divers,
qui. pa.rfois,
respectaient l'autono~ie et la souveraineté monétaire des cit~s
ce fut le
Cas de Na~les. Héraclee, Rhégion
;
création ùe munici-
pes,
gouvernés par un Prêteur romain OU par des préfets délégufs
par lui
:réductions enfin des plus obstinés au rôle de dediticci.
Cette diversitf de traitenents, explique,
en partie, l'attaChement
fi Rome ou la défection de tel ou tel peuple d'Italie pendant la
seconde guerre punique.
Si en 217 ap~ès Trasimène, Spolète ferna au chef carthaginois,
l'accès a.u latium par la vallée du Tibre, en 209, douze des tren-
te colonies latines les plus proches de Rome,
se refusèrent fi
soutenir ,lus longtemps l'effort de guerre qu'on leur demandait.
Lorsque les
troup~s romaines se mutinèrent en ~spagne, au te~ps
où SCIPION était malade, nous trouvons
à la tête des rêvolt~s
,C. ALBIUS.
un latin de Calès
(3).
Ces oppcsitionsdans ces milieux fédérés hostiles à Rome; te-
naient aussi
au fait qu'après la casta.trophe de CAnnes, le Sénat
n'avait pas voulu appeler des latins pour sièger à la curie romaine,
en remplacement des sfnateurs tombfs dans les derniere~batailles.
La proposition soutenue par le plGbfien SP.
CARYILLIUS,
avait éte
co~battue par Q.
FAbIUS MhXIMUS, et
cent soixante nouveaux patre8
( 1)
yEll . ,
II,
27.
(2) Après les guerres Samnites
; Rone
avait dû assumer l'organisa-
tion juri~ique d'un ensemble territorial complexe, où voisinaient:
les cités foederatae et dediticiae;
les citoyens optimo jure et
sine
8uffragio cf :T. L .• YIII.
14,
5 ; 20,9 ; YII,
31,
IX.
43, 23.
La forme de traité la plus avantageuse était le foedus
aequu~ où
la cité contractante renonçait à son indépendance diplomatique et
s'engageait à favoriser la. politique romaine
: majestatem~ populi
Romani comiter conservare
(Cic., Pro Balbo,
16,
35).
(3) T.
L.,
XXYIII,
24,
13.

-
205 -
oon8o~ipti, furent exclusivement élus parmi les citoye~s romains.
On pr~f~ra aux latins m~mes des hommes qui n'avaient jaenis r~vêtu
aucune magistrature.curule (1).
Enfin ces défections s'expliquent aUSSl par le fait qu'HANNI-
BAL,
en se présentant comme un libérateur,
a pu soulever toute
l'Italie contre Rome.
En 216 immédiatement après Can~es, il fit
un discours aux prisonniers romains affirmant qu'il ne
faisait pas
aux Romains,
une tlguerr~ d'extermination" et qu'il ne combo.tte.it
pas non plus
tl pour la dignitas et
l 'impe~ium (2)". Sa tactique
consista aussi à renvoyer, libres et sans rançon,
les prisonniers
latins et alliés après Trebie,
Trasimène et Cannes.
Il signa. des
trait~s avec Capoue, Locres et Tarente qui garf~tis8aient l'ind~­
pendance et l'autonomie des cités.
Dans ces conventions, on notait
l'absence de garnisons carthaginoises, de tributs ou de mobilisa-
tions
forcées
(3). Ainsi partout n0tnit le padouan, les masses
populaires
"avides de r'volution" furent favorables
au barcide.
TITE LIVE ajouta que cette r'action anti-romaine,
était coruparable
~ une maladie commune à toute l'Italie. (4)"
Ces faits
expliquent, a~DS une certaine mesure, qu'il ait refusf de
marcher sur ROme après Cannes et qu'il n'ait jamais envisagé la
destruction de l'Urbs
(5). Certes, il e tenté de mettre un terme
(1) T.
L.,
XXIII,
23.
(2) Dès son arrivée dans la plaine ùu Po,
i l proclama qu'il était
venu apporter la liberté aux Italiens, en faisant la guerre auxRo-
mains
:POL.,
III,
71, 3-1 ; 85. cf. Sur la grandeur et faiblesse
d'HANNIBAL,
J.
CARCOPINO, P~ofiZs de oonquerants, Paris,
1961, p.
109-231. Sur 80n caractère, ses qualités et ees défauts cf avec une
approche prudente
:T. L.,
XXI,
4, XXII, 56 ; 3 ; POL., X, 15, XI,
20
;
XXIV,
9.
( 3) T. L. , XXII, 58, 2
XXII, 1, 6.
( 4)
T. L. , XXIV, l,
13 ; POL. ,
VIII,
27,
1-2
( 5 )
...
cf.
a ce 6uj et
: C. NICOLET
;
Rome et la oonqu~te•• T.II.,
op.
oit.p.
619-620.

-
20Y
aux situations humiliantes cons~cutives aux traités de 241 et de
226, mais i l chercha aussi ~ mettre fin à l'hégémonie romaine en
Italie,
au grand profit de Carthag~. ~près Zama, ingratement chas-
sé de sa patrie, i l chercha refuge aurpès d'ANTIOChOS d~ Syrit où
i l continua la lutte contre Rome par les armes et la diplo~atie.
Vieux et sans espoir, i l pr~féra s'empoisonner plutôt que d'être
livré aux Romains.
Nous
savons co~bien fut inégal le traitement réserv~ par
Ro~e aux Italiens qui lui avaient ~t~ dévoufs ou infidèles. LEs
Bruttiens,
qui s'étaient rendus avant 213, furent assez douce~ent
t r a i t é s ; mais à ceux qui s'ftaient obstinément attachés à la
fortune d'HANNIBAL, on interdit de servir dans les légions,
on les
relégua dans les offices
les plus hu~bles de l'armée (1), une
bonne partie de leur territoire fut
confisquée.
Les Lucaniens qui
avaient constitué le gros de l'infanterie de l'ennemi reçurent un
traite~ent analogue. A en croire TITE LIVE. des masistrats co~me
le consul S.
CAEPIO, parcoururent en 203 toute l'Italie, pour
enquêter et punir les "alliés" qui avaient manqu& à leur foi
(2).
En Grèce aussi,
ce n'était point de
gaîté de coeur que les
patriotes
grecs, pleins d'idéalisme et d'un noble orgueil national,
voyaient approcher la date fatale où interviendraient les affaires
helleniques,
" le· barbares" d'occident.
Si en 228,
date de la
première intervention romaine en Illyrie, les
succès des latins
ne produisirent pas une forte impression en Grèce
;
i l en fut
autrement au lendemain du trait~ romano-Etolien de 212. Durant la
première guerre de Macédoine. les mfthodes de guerre romaines se
dévoilÈrent petit à petit aux Grecs. non sans provoquer de vives
inquiètudes.
( 1) App..
Hann. ~
61.
(2) T.
L.,
XXX,
24.

-
210 -
Ces
craintes étaient d~jà d~celables dans les discours de
LYSISCOS, porte parole des Acarnaniens à Sparte. et dans celui
du Rhodien THRASYCRATES.
Le pre~ier orateur insiste sur le sort
pitoyable des habitants d'Anticyra,
emmenés en esclavage par les
Romains,
alors que les Etoliens,
conform~ment aux traités. faisaient
main basse sur les immeubles
(1).
Son discours sous-entendait que
dans
la prise d'une cité,
l'atteinte port~e à des hommes libres, Its
destructions et l'incendie, constituaient en eux-mêmes des
actes
cruels et barbares.
Le Rhodien,
lui,
d~nonça non seulement l'ac-
cord. mais
aussi son principe et ses
termes
qui sont causes de
déshonneur p~ur les Etoliens.
Car il est inadmissible, que les
itoliens
aient accepté de livrer des
grecs,
leurs compatriotes,
aux viclences et outrages de "barbares" (2)
~l'interprétation des
discours de LYCICSOS et de TEFASYCRATES pose divers problèmes,
dûs en particulier à la question de leur relation avec les paroles
effectivement prononcées par les orateurs.
Un excellent connais-
seur de POLYBE écrit que presque chaque ligne du discours de
THRASYCRATES trahit la penst:e et le style de l'historien
:"Hais
POLYBE a pu Composer ce discours,
co~me ceux de CHLAINEAS et
LYCISCOS.
à partir d'un texte authentique diffus~ à travers la Grè-
ce po~r favoriser le rétablissement de la paix" (3).
Il est en
tout
cas probable que les reproches
adresséa
eux Etoliens, d'ap-
puyer l'intervention romaine,
témoignent d'un sentiment fort ré-
pandu en Grèce.
L'opinion dut s'émouvoir de
ce que des
Grecs
furent
(1) POL.,
IX,
39, 3-4.
(2)
POL.,
XI,5,
6-1. La ligne achéenne. à la veille de la secvnde
guerre de Macédoine,
tourmentée par de sembàlles préoccupations,
avait envoyé une ambassade
aux Rhodiens pour les exhorter à con-
clure la paix avec PHILIPPE,
avant que leur discorde ne fournît
un prétexte à l'intrusion des étrangers dans le monde grec :POL.,
XVI,
35
~ Diod., XXVIII, 6. Mais l'indignation causée par les évè-
nements d'ABYDOS,
rendit vaine cette démarche.
(3) p.
PEDECH, La Méthode
historique de POLYBE. Paris,
1964, p.
268-269.

-
21 1 -
exposés, du fait de grecs,
à l'asservissement par des nOh gr0cs.
Les Hellens accusaient les latins surtout de
cruauté envers les
vaincus.
L'on sait que l'opinion hellenique a toujours condamné
une stratégie
fond~ Sur le principe de représailles ou de sanctions
collectives. POLYBE ne dénonce t - i l pas l'injustice d'une punition
frappant des
innocents au même titre que les
coupables
(1).
L~s
craintes décelables dans ces discours se verront confirmé~s dans
les années à venir, par l'extension croissante que prendront les
méthodes ro~sines, non du seul fait des Romains eux-mê~es, Euis
aussi en raison de l'adoption par les belligérants helleniques
de procès analogues.
Du reste Rome,
après 212, manquera plusieurs
fois
à ses engagements conclus avec l'Etolie. En effet, il s'agis-
sait d'une alliance qui n'était pas limitée dans le temps, puis-
qu'elle avait la foroe d'une amicitia
; de par sa nature elle
était donc perpétuelle.
Elle stipulait clairement que si Rome
ac-
cordait la paix à PHILIPPE,
elle aurait soin de"lui interdire de ne
jamais s'attaquer aux Etoliens ou à leurs alliès.
(2)" Cela sous-
entendait que même si les hostilités étaient closes, le peuple
Romain continuerait d'étendre sa protection Sur les membres
de la
confédération, et ceux des
grecs qui étaient de leur parti.
Il
convient même de dire que ROme n'aurait pas le droit, mais le
devoir de les secourir,
si PHILIPPE manquait auX conventions jurées.
3i, de 212 à 208, les Romain8 prirent à coeur les intérêts
étoliens en livrant Zakynthos, Oiniadai et Nasos, dans les années
qUl suivir~nt, ils relâchèrent leurs efforts. En dépit des promes-
ses consignées dans le pacte, ils n'ont nullement aidé les Etoli6ns
à envahir l'Akarnanie, d'OÙ le piteux avortement de leur expédi-
tion
(3). En 209, ils subissent deux revers :près de Lamia, et à
Thermophyles en 208.
Au cours de ces
années,
Rome a montr€
peu de
POL.,
V,
1 1.
5.
T.
L.,
XXVI,
24,
12.
T.
L.,
XXVI,
25,
16-17.

./
~
;
-
212
-
1
1
zèle pour offrir son secours à ses/~lliéS
;
et, en 201,
les
affaires
de
Grèce, selon les mots pe TITt: LIVE, furent négligée6
de Rom~ins "neglectae eo bienni~01-206) res in graeaia erant.(l)
1
Dès
208,
Rome donna aux EtolijPs de nombreux exemples d'infidélités.
C'est elle qui,
en les délai~ant, a permis à PHILIPPE victorieux
de les
acculer à la paix.
Il est même notable que TITE LIVE,
n'essaie point d'excuser la conduite romp-ine à l'égard de l'Etolie.
Aussi, note t - i l ,
"PhiZippus-Aetolos de 8ertos ab Ro~ano, cui uni
fidebant,
auzilio, quibus voluit conditionibus, ab petendan et
paciscendam subegit pacem (2)".
En
198, Roce refusa de donner satisfaction auX Etoliens qui appar-
tenaient
au camp victorieux.
Cette mesure ne pouvait leur poraitr~
qu'injuste, malgré les
justific&tions, peu convaincantes,
du pro-
consul FLAMININUS.
Pourta.nt Rome, bien que
"b!S.rbare" aUX yeux de bea.ucoup de
Grecs,
se présenta en philhellène dès le début de la seconde guer-
re de
Macédoine,
faite
au nom de la "liberté" de la Grèce.
Dès
les
conférences de Nicée en
198-197 (3),
FLAMININUS
fit connaître
des opinions.
En présence d'AMINANDROS,
le représentant d'ATTALE,
de l'amiral Rhodien et des chefs des ligues
achéenne et étolienne,
i l proclama l'indissolubilité des alliances conclues par le Sénat.
A le
croire,
Rome
intervenait
au nom des Alliés; par conséquent,
elle ne pouvait rien conclure sans l~Jr avis et elle àeveit se
conformer à cette p~litique. Aux conditions exigées de PliILIPFL,
i l ajouta. celle de Rome ~ savoir
:le re~rait des garnisons royales
de toutes
les villes grec~ues.
L. ,
XXIY,
12,
T. L. ,
XXIX,
12,
La source
fonda~enta.le pour les confërences de aicee est :
POL
:XVII,
1-10; T.
L.,
XXXII,
32-36 reproduit généralement le
récit de POLYBE.
Les
autres
textes
:PLU'I'., FLam.,5
et App., MaC.,
6 sont brefs et Bans importance.

-
213
-
Pourtant lors de
ces conffre~~~s, ce ùerni~r avait volont~ire­
ment cherché à prolonger les négocistions,
son désir était de IDontr~r
au Sénat, ~oin6 porté que lui-même à l'offensiv~, que la paix ~teit
im~ossible. Cette entrevue était un moyen de le lui prouver. D'~utre
part,
désirant une prorogation de
commandement, i l savait qUe l'échec
des
négociations et la nécessite d'une guerre à outrance,
détermi-
neraient le Sénat; la lui accorder.
Les
intérêts g~nfraux de Rome
et
ceux des alliés sont mêlés aux intérêts personnels du consul.
L'on sait déjà qu'après leur troisiè~e entrevue, le roi avuit rejet~
la condition des
alliés à savoir
:l'&vacuntion tot~le de le Grèce.
Dès lors deux solutions s'offrirent à FLAMININUS :ou rompre les n~go­
ciations COmme le souhaitaient l~s alliés d~ Rome
;
ou bien renvcyer
l'affaire devant le Sénat.
Il opta pour la deuxième alternative.
PHILIPPE dut,
comme les
alliés
~u reste, envoyer à Rome une a~bassade
pour y négocier une paix.
Ainsi
cette guerre faite
au nom d'alliés
imaginaires, sur le
base d'un ultimatum ombrageux se termina par un traité de paix n~go­
cié, en d~finitive, par le proconsul et le seul S~nat Romain. Les
Grecs
ne Burent à quoi s'en tenir sur leur propre compte, qu'eux
jeux ithmiques de Corinthe en
196. L'anxi~té y fut g~nfrale :les
Romnins tiendraient-ils leurs promesses ou substitueraient-ils plus ou
moins ouvertement leur domination à celle des Macédoniens?
Quand,
avant le début des
jeux,
le hfraut proclama le d~cret du S~nat
à s~voir que :tout ceux qui ét~~ent assujettis à PHILIPPE étaient
déclarés libres,
exempts de garnisons et maitres de leur propre bOU-
vernement, les
spectateurs,
à en croire la tradition gréco-ro~eine,
tous ftourdis
et doutant d'eux-mêmes, demandèrent une seconde lectu-
re
;
et,
quand ils
furent bien Sûrs du bienfait auquel ils n~ s'atten-
daient pas,
ils
faillirent
~touffer le proconsul au milieu de l~urs
ma~"stations dflirantes de joie et d'enthousiasme( 1).
(1) POL., XVIII, 29
T.
L.,
XXXIII,
33.

-
214
-
Muis
~tait-il possible que, d'outre mer, fut venu un peupl~
lointain,
avec tant de d~penses et tant de risques, pour libérer
la Grèce,
qui
ne lui était rien? ~ou~ pensons plutôt,
COm~e l'a si
justement remarqut: C. NICOLET que,
"1['. déclaration de Corintne ne
doit p~s prêter à contresens. Elle signifiait que Rome renonçait solen-
nellement à to~te souverainet~ sur la Grèce, et s'engageait à
retirer
Ses
troupes,
nais non que les peuples,
ainsi libérés, devenaient
rna!tres de leur
sort.
(1)"
ANTIOCHOS III et les Etoliens, pr~ten­
dirent Même
substituer une véritable libertf à celle qu'avaient pro-
clam~ les Romains au cours de la premi~re guerre de Syrie. (2)
La ligne
achéenne, profita de
ce
conflit,
non seulement pour
unifier le Peloponnès
,
mais aUSS1 dès
192, pour manifester une Cer-
taine volontf d'indépendance vis à vis de
Rome.
PHILOPOEMEN et ses
partisans,
de
192 à 181, eurent vis à vis des Romains, une politiqu~
de
"résistance légaliste" Q.ui
consistait à s'appuyer sur "les textes
(les statuts
fédéraux et le traité
"d'égal à fgal"
obtenu du S';nat),
pour empêcher daDs la mesure du possible, toute immixtion de Rome
dans les
affaires intérieures de la confédération et, tout particuliè-
rement dans
ses difficiles rapports
avec Sparte.
(3)
"Cette politique
était,
bien entendu,
incompatible avec les rapports de patronat
instaur€
par Rome et qui impliquait une respectueuse soumissiun i
ses
conseils.
1) C. NICOLET, Rome et la conqu~te••• T.1I, op.cit. p. 742. Rome
s'efforça de consolider Sa position en Grèce en renforçant la position
des
~lêments favorables à Roce en B~otie :POL., VIII, 26 ; T. L.,
XXXIII, 29 cf également les constitutions censitaires donn~es en 194
auX cites
thessaliennes.
Ce n'est
qu'en
194, ~ue les forces romaines
&vacu6~ent la Grèce. Jusqu'à cett~ dnte, Rome fonde une politique de
principes
la Grèce doit être
libre et
amie, mois
être
aussi selon
les mots de E. WILL, op.cit.~ T.II, p.
194 "le rempart de la tranqui-
l i t f rO~line face aux tendances ~xp~nsionniste5 mac&donienn~s et,
dej
,
st;le~ides."
(2) T. L., XXXV, 33, 8 ; 46, 6.
(3) C. NICOLET, Rome et la conqu~te :T.11 OP.C1T.~

-
21)
-
Ces
fnits
dfnot~nt lq r~sistanct assez VJve déS Etats gr~cs
contre l'occupation romaine.
Ils
ét~icnt conscients ~ue les pro~~sses
des
Latins n'êtaient ~ue de vains mots qui s'effaçaient devant l(s
int~rêts de Rome. Malgr~ les alliances qu'elle avait nou~es, le
troisième guerre de Macfdoine
fut
une
~preuv~ pénible pour L'Urbs.
Les Epirotes,
dans
leur majorité,
passèrent du côtf de la MDc~ècine
certains dirigeants ~olosses prcj~tèrent, ~n
170, de s'e~p~rer du
consul ro~nin pendant qu'il travers~it l'Epire et de le livr8r ~
PERSEE.
(1)
mals
leur tentative
échcu~. De nêne l~ trahison de
certains Etoliens,
faillit
livrer aU successeur QC PHILIPPE,
IL.
[lace
de Stratos en
169
(2).
Le roi d'Illyrie
CE~THIO~, rejoignit le cnrnp
mac~donien (3). Dès 171, il apparut donc claire~ent que les alli~s
grecs,
a l'exception de Pergame, participaient sans enthousias~e a
cette guerre,
n'envoyant
que des
con~igents r~duits, voire dtrisci-
res.
(4) Ainsi sur quarante navires que pronirent les Rhodiens, six
seulement rejoignirent les
ROŒ~ins. Ils fUrent aussitôt renvoy~s
chez eux,
et ne prirent donc plus part à la lutte.
(5)
Le changement d'attitude de ROme fut,
du reste,
asse~ brutal,
au lendemain
de Sa victoire.
La Mac~doine et l'Illyrie furent dé~ern-
brées
l'Epire dévastée et les
classes dirigeantes
grecques ~pur~es.
On peut expliquer le déclenchement d'un pareil cataclysme par le
volonté de
faire
disparaitre en
Grèce,
grâce au choc produit,
tout
velleité de révolte,
bref de
juguler tout nouveau mOuvement d'ir,Gt-
pendnnce.
Et pourtant,
c'est,
à son corps dGfcndant, que PAUL ~MILE,
s'acquitta en Epire d'une ~ission aussi
contraire à
Sa n~ture, douCE
et génfreuse.
(6)
(1)
POL.,
XXVII,
'6.
(2)
T.
L.,
XLIII,
21-22.
(3) POl.,
XXIX,
3-4.
(4) T. L., XLII, 55.
(5) POL., XXVII, 3 et 7.
(6) PLUT.,
Aem ... 30,
1.

-
216
-
Ro~e sentait-elle déjà, la d~saffectation progr~ss1ve du Londe
grec,
qui
gu~ttait ses faiblesses, dans l'espoir d'une cOID)lrte lib&-
ration? Les signes ~taient no~breux même chez les alli~s. Ainsi
CALLICRATES,
qui depuis
179 dirieeait la ligne
~ch~enne, avait t~lle­
ment perdu de
sn popularité p3r sa servilitf d l'égard de
r.ow~, QU'OL
abattit à Sa mort, toutes StS
statues,
pour les remplacer par celle
de LYCORTAS.
(1)
Toute occasion pOur les
grecs parut bonr!e pour reven-
diquer, à l'Ggard de Rome,
une liberté sans conditions ni
intervén-
tions.
II -
LE CREDIT DE ROME DE PYD~A (168) A LA CAMPAGNE D1 G~ULi (Sb)
Cette période se caractérise par la volonté de
Rone de
s'i~­
poser par tous les moyens en Orient et
de
s'affermir en Occident au
mépris des
conventions qU1 la liaient aUx Etats concernés.
L'injonc-
tion faite à ANTIOCHOS VI,
au lendenain de Pydrroa de se retirer de
l'Egypte, témoignait de la volonté de
Rome ù'affaiblir
systematique-
ment les puissances orientales
;
mê~e si elle était une violation
.
ouverte du traité conclu evec ANTIOCHOS III
(2).
Selon la formule
heureuse de E.
WILL Rome "ajoutnit en quelque sorte une clause ~ la
paix d'Apamée."
Au second et pre~1er siècles, pl~ieursmanquements à des enga-
gements
internationaux peu\\'~nt ê~e décelés dans les rapports de ~c~e,
à l'égard des va1ncus, Comme des alliés.
Commençons d'abord par l'OcciJent o~ Carthage, depuis Zane, fai-
sait face
aux obligations du treitê.
En
191, elle offrit même
aux
Romains,
l'occasion de se lib~rer pour les quarante dernières années,
du tribut qui lui
&tait exi~é ; et, plus encore, de construire et
d'équipe~ une flotte, qui combattrait le roi se Syrie. Mais Ro~e
(1) POL.,
XXX,
29
;
XXXVI,
13,
1.
(2) POL.,
XXIX,27.

-
217 -
refusa de
rendre i
Carthaee sa libert~ financiêre et la possibilitê
de se refaire
une puissance navale
(1).
En réalité,
L'UrDs se stif-
sisait de
la servilité de
MASINISSA ~ttaché aux flancs de Cartha~e
désarmée, pour prévenir toute nouvelle expansion et même
tout mouve-
ment de la v~incue. Le nu~ide multiplia les provocations et les
incursions dans le domaine de
CarthaGe,
qUl ne pouvait se
déf~nGre
sans
autorisation de Ro~e. Il envahit la partie fertile
du territoi-
re des ~rnporia en
193 (2).
A l'arnb~ssade, que les puniques envGy~rent
~ Rone, le S~nat embarass[ envoya l'Africain sur place, ~ais celui-
ci ne d~ciJa rien. Il senble rnê~e, ~'après TITE LIVE, que les a~­
bassadeurs du S~nat aient reçu l'ordre de favoriser l~ dumiJ2, ou
d'i~poser la paix sans chercher un reelenent juste. Mais l'affaire en
resta là,
sous prétexte de renvoi au S~nat.
En
172,
MASINISSA s'appropia
soixante villes ou châteaux GU ter-
ritoire punique.
Cette fois,
les C~rthaginois élevèrent hardiment la
voix
:qu'on leur donne
justice ou le droit de combattre;
si l'on
voulait
favoriser
le
roi,
ils étaient encore prêts à une cession
terr~toriale, mais a condition que les frontiêres fussent ensuite
intangibles.
I~it[ à répondre, le fils du roi déclara ~u'il n'avait
pas reçu d'instructions précises de
son père sur ce point.
Le S~nat
non plus, en préparatif contre PERS~E, chercha i
éviter, par ses
injustices,
un rapprochement entre IR Macédoine et
Carthage; Sa
r€ponse
fut mitigfe, ell~ ~'~ntendait pas sacrifier CarthaGe au prOfit
de la Numidie.
Mnis la victoire de Pydn~ libéra Rome de ses précautions
hypocrites.
Masinissa est declar~ personna non grata à Roue, alors
qu'il prétendait venir sacrifier à Jupiter Capitolin.
En réalite,
Rome
trouvait excessifs les progrfs de
son allié qui rongeait le territoi-
re punique,
tout
comme Carthage qui redevenait
inquiétante
(3).
(1) T.
L.,
XXXVI,
4.
Ils acceptèrent seulement les navires
qUl
"leur
étaient d1J.s
auX termes du trait~."
(2)
T.
L.? XXXIV.
60-(,2
;
POL.,
XXXI,
21-
(3) Sur les progrès de
Carthage
:POL.,
XXXI,
12,
11.

-
216
-
Quelques
ann6es plus
turd,
en
154, l~ nu~ide envahit les Ca~pi
Magni, et la région de Tusca. L'URES
proposa son arbitrage,
~uc léS
puni'lues
refusèrent,
en nê':ie
temps
qu'ils
contre-attaqu\\::rent.
iiCr.!<:
d~p~cha alors une nission qui devait inposcr la paix, si seule~eht,
le nu~ide ét~it en péril, dans le c~s contraire, elle l'encouragtrait
~ poursuivre ses avantBges. C~rth~ge battue dut c~der des territcires
et rayer
cinq cents talents
penla.nt
cinquante annuit&s (1).
Sa renais-
S9.nce
était brisée,
r.:ais
tandis
que :L=lSI1HSS/; comptait.
n'avoir plus
qu'a ~t~ndre la nein pour faire sienne l~ m~tropole punique, F0~e
songeait à aGir Etr., M rique, mais
cette
fois
pour son propre
CC'1pt.::.
Le S~nat vit Sé renouveler, plus vlve que jamais, la discu5sion
entre partisans de
CATON,
qui
voulai~nt détruire la vieille enncDie,
et partisans de SCIPION NnSICA,
qui
se sernient
contentés
de
l~
d~sarmer. Les premiers l'emportèrent :on ordonna des lev~es sans en
indiquer l'objet
(2).
Mais cela suffisait ~ inquiéter les Carth~gi­
nois,
qui se hâtèrent de
condamner à Dort les responsables de l'in-
tervention arnée
contre le Numide et d'en aviser le Sénat.
Ils
ènvoyèrent rn~me demander quelle satisfaction on exigeait d'eux
mals
nulle r~ponse claire ne leur fut donnée.
(3) Rome, d&cid~e à la Euer-
re,
était. en quête d'un pr&texte honorable.
Profitant de
la d~ditio
d'Utique,
rivale d~ Carthage peupl~e d'Italiens, le Sénat abattit
ses cartes.
Les
consuls
reçurent l'ordre de
se rendre en Sicile, et,
de
l~, à Utique, avec 'luatre légions, quatre ~ille cavaliers et une
flotte
de
cinquante
quinqu~rèmes. Un appareil aussi exceptionnel
r~véla~le dessein
d'en
finir
avec les puniques
(4). Ceux-ci, ébran-
l~s par l'inminenoe d'un conflit, cédèrent tout de suite uux prer.ières
demandes.
Comptant garder leur libertf, leurs
lois et le territoire
actuel,
COmme
ils
le leur
était prOmls,
ils
livrèrent trois
cents
(1)
Sur ces
faits
cf.
App.,
Pun., 69-10
POL.,
XXXVIII,
1,9.
( 2)
App., Pun.,
74.
(3)
POL.,
XXXIV,
~, 3.
(4) App., Pun., 15-76.

-
2'~ -
otages,
et
attendirent les
eXlgences
ùes
consuls
qUl
avai~~t reçu
l'ordre
secre:t
de
ne pas
interrofJprc
les
opérations milit:lÏres
(1).
Les
consuls
P.
MhNILIUS et
M.
CENSORINUS s~ firent remettre deux
çent mille armures,
deux nille
catapult8s,
~ne infinité d'arm~s, et
les
navires
puniques
qu'ils
brûl~rent (2). Puis, lorsqu'ils eUrent
tout
lieu de
croire la ville
d~sarmèe, ils r0vélèrent la volontC du
S~nat :ordre aux Carthaginois d'abanJonn~r leur citf pour s'~tablir
ailleurs,
où ils
voudr~ient, dans leur territoire, mais 530S r~mpart,
d quinze kilon~tres e4 moins Je
l~ mer (3). Il fut aussi nctifi~
auX négociateurs puniques,
que
tout reCOUrS
au sénat ~tait impcssiblè.
ComMent ne paS
s'étonner qu~ des n~thodes aUSSl déloyales ét
qu'une sentence
aussi
unique à
l'Gs~rd d'une vaincue, n'aient suscité
que rancoeur et haine à travers
le monde entier?
/1
Mais
Rome
accordait trop peu d'importance
au "qu'en
dir~-t-on?
interDation~l. Elle le prouvera encore au cours des guerres espagnoles.
Durant la Canpagn€
dirigée
contre
les Lusitaniens,
ces
derniers
firent
des
ouvertures
;
de paix au prêteurs
SERVIUS GhLBA.
Ils
se
disaient prêts
à renoncer à leurs pillages si on leur donnait des
terres.
Le prêteur promit et
accorda une
trêve.
Mais
i l
organisa un
guet-ape~s hocteux 'U cours duquel les lusitaniens
furent
massacr~s
ou vendus.
Ce
fait
odieux soulevR maintes pr0testations
et indigna-
tions
à Rome m@nc.
Mais
attaqu~ p~r le tribun L.S. LlbO et CATOe,
GALbA sera finaleü~nt absous
(4).

mulhonnête
qui
confor mé n 2nt aU
règlement
international,
devait être
livr~ a ses adversaires ou con-
damné
à mort,
fut
nomM~ consul.
( 1 ) POL. ,
XXXVI,
5 ; f\\pp. , Pun
., 76.
( 2 )
POL. ,
XXXVI,
6 et FLORUS, l,
3 1 ,
7.
( 3 ) POL., XXXVI, 7 et App. ,Pun • , .78 - 91.
( 4 ) RUTILIUS RUFUS fut aussi p rlrml lE.s adversaires de GALd,', cf. Cic.,
De Grat. JI , 227 et ad. attic. J XII, 5 , 3.

-
220 -
De nêmé en
142, le co~sul Q. F. M. SERVILIANUS, accul~ ~u
coeur de ln LUsitanie pqr VIRlhTHE,
l'âme
de l~ resistuncé ~sp~cnol~,
nccept~ de signer une p~lX ;ar l~~uolle le ~atre deviendr~it ~mi du
peuple rOD2in,
les
Lusitaniens
ainsi
que leurs
alliés,
se verrniént
reconna!tre
la possession de leurs terres.
Mais
cette
convention fut
jug~e deshonurante. Son successeur CU. SERVILIUS CAEPIOn, reçut du
Sén~t avant de p~rtir, l'ordre de la ro~pre s~ns préavis. (1)
La guerre reprit donc
VI~IATHE valLCU et poursuivi, envoyu
trois de
ses
aolS négocier une paix.
CALPION les
acheta.
~u retour
ils assassinèrent le
chef lusitanien pendant son sOmmeil.
Pour toute
sanction,
on refus~ à Rome d'accorder un triomphe au consul à son
retour.
(2)
Au CoUrs de la guerre de Nunance,
le
consul C.
HOSTILIUG
MANCIHUS press~
par q~atre mille Jumantins,
jura la paix auX vain-
queurs.
Son questeur T.
GRACCHUS,
dont le père
avait lai$s~ en Espa-
gne de tels
souvenlrs de loyauté,
donna à la parole du consul
J
Sn
garantie personnelle.
(3) Hais,
~ Rome, cette paix fut consid~r~e
Comme scandaleuse.
Les
ambassadeurs numantins eurent beau montrer
qu'ils avaient le
droit pour eux,
le S~nat prétendit satisfaire a la
justice et annuler la parole donnée par le sacrifice d'un seul.
Il fit
pr~~enter devo t NU~ance le consul nu, les mains li&es d~rrière le dos.
Les Numantins refusèrent,
bien entendu,
cette infime satisfaction
(4).
Revenu en Italie,
UAUCINIUS
fut
recrutf au S~nat après la destruction
de Numance,
et redevint prêteur.
( 1) App.,
Iber.,
68-69
(2)
Vell.,
lI,
1,
3
Val.
Max.,
IX,
6,4
;
FLORU8,
',33,
17.
(3) App.,
Iber.,
Ül
PLUT., T.
Gr'ach.~ 5, FLORUS, l, 34, 5.
(4) App., Iber ., 83.
I~ osa m~me faire honte à ses concitcYLns de
la disGrace qu'ils
avaient infli~0.

- cC:: 1
Dan:"
l'intervalle mêne, le coll(~:-uf.: de MAHCINIUS t:rJPÔC;,
r:lr
la tr~ve J'attaquer Nurnaucc, avait u3suilli, mal~r~ l~s ordrc~ d~
~fnat, les VACCA11 de Pallantia, en lc~ nccu5unt d'avoir ~id~ lc~
Numantins.
Pour toute sanction, le Senn.t se
contenta d'abro~:l:r ~crl
com:!landc::.ent( 1).
Ces :n3.nquenents
s'expliqu~r:t pur le f!lit que Rome, pi:r tous
les Moyens,
dtvn.it assurer IR paix en EspnCllc.
Numance
0t.G.it url
obstacle ~ ~n d0nRrche
; il fall~it l~ ti~truirt:. Elle ~ntend:lit
ainsi demeurer ln dOrlinatrice et
l'':1rbitre en Mc;diten'anie.
);rLib
l'on ne sRurait expliquer un pareil conporte~ent par le fcit que
Rome se trouvait en fcce de "populations berbares",
raison pOUr
laquelle, elle se ~ontra peu enclin a se conformer au droit ries An-
ciens.
DRns la pratique, elle eut g ~Cnager certain~ "peuples b~r­
bares",
quan~ ceux-ci constituaient une tlenace permanente peur déS
ennem1s dont elle se mffiait. A1nsi quan~ CASSIUS LO~GIU~S vnulut.
atteindre la Macfdoine, par terre, en partant d'Aquilée, non seult:-
ment le Sénat,
s'y opposa, mais
il d~dommceeo. les indig~ues qui
~eient pu souffrir de l'action du consul. (2)
En Orient,
51 les rapports entre Romé et la Gr~ce repr~s~ntaient
~ l'ori~ine, une bienveill~ntc "protection" plutSt qu'un ~rotectorat
rroprement
it,
après ~ydr.la, les tend~lnces de la politiq~L' rOr.1U1IiC
Se rnodifièrLnt de plus en plus.
Certes les résistances ùes Ftnts
grecs st~bl~rént de l'ingrutitude, ~ais il faut dire qu'~près l~
d~fnite d~ PERSëE, l'~tttitude de certains rois c0ntribu8
~ h~bi-
tuer les Romains à se consid~rer aavuntage COmme le peuple m3!trL
du monde.
Mais
quel qu'nit eti:- le retentisse;.)E:Ilt ùe ses victoir(:c d'Orient
ou d'Occident,
Rome donnait d'elle une innge ;gnomineus~ ~ truvers
(1)
App.,
I b u r . ,
81-Û;'-
i
Vioù ••
XXXVI, .:e.
(2) T.
L.,
XLIII,
l,
9.
LL'S dons offerts <i ces Gaulois
furt:nt de:s
chevlJ.ux.

-
222 -
le monde.
Sa conduite dans la guerre et les
atttitu1es
SOuvént
déconc~rtantes qu'elle eut ~ l'~gard de s~s adversaires
ex~liqu~nt
e~ partie les accusations que lui attribuèrent ses ennemis. SALLUSTE
rapporte le discours
que JUGURTHA
tint ~ BOCCHUS. Le Numide quali-
f i e "
les Roouins de peuple injuste,
d'une
avarice sans bornes,
ennemis de tout le genre humain".
A le
croire,
ils ont pour lui
faire
ln guerre
"le mIme motif qui les a armes contre tant d'autres
ngtions,
leur besoin de dominer,
qui en
fait les adversaires de
tous les
empires;
aujourd'hui
c'est lui-meme, hier
c'ètait les
Car-
thaginois,
et
le roi PEFSEE,
de~ain ce sere quiconque leur pnrattra
le plus riche
qui sera leur enneni.
(1)" L'accusation
fait~ ù RCI!ie
était de vouloir s'approprier,par la force,
l'ensemble des
richesses
du monde.
Dans la lettre qu'il envoya en 69 au roi des Parthcs-
ARSACE,
afin de solliciter son alliance, MITriRIDATE
y accusait les
Romains de n'avoir qu'une seule raison pour faire
la guerre à toutes
les nations et peuples
:"leur dfsir insatiable du pouvoir et des
richesses".
"Sur le bruit que j'êtais riche •••
ils m'ont provoqu~
fi la guerre
en me fàisant
attaquer par NICOMEDE ••• "
"Ignores-tu que
les Romains,
depuis que l'océan les
a
arrêtés dans leur marche vers
l'Ouest,
ont tOUrné les armes de
ce côt0? Que depuis le
cO~mencement
de leur ville,
ils n'ont rien fait que voler maisons,
femces, ter-
ritoire,
empire?
Ils sont •••
18 fl~~u de la terre
;
~ucune loi divine,
ni humaine,
ne saurait les empêcher de p~ller, de d~truire, alli~8,
amis, voisins
ou éloign~s, faibles ou puissants, et de traiter en
enn~mi tout ce qui n'est pas leur esclave ••• Cc sont des bandits
dftrousseurs des peuples".
(2)
( 1)
SalI., Iug.,
LXXXI,
1.
(2)
SALL.,
Hist., VI, 69 M.

-
223 -
Ces p~roles peuvent être rnpproch~cs de
celles
que prononç~
CRITOGNATUS ~ Alesia " ••• Les Ro~~ins, que veul~nt-ils
0U que
voudraient-ils?
C'est l'envie qui
l~s inspire: quand ils scv~nt
qu'une r.ation ~st glorieuse et ses ar~es puissantes,
ils rêvent de
s'inst311er dans 3es campagnes
et
au coeur de
scs
cités, de lui
ioposer pour toujours le joug de la
servitud~. Jamais ils n'oùt fait
lu guerre
autrement.
(1)"
CL.
NICOLET(2) notE
que
le g~ogrBphe AGATHARCIDl de CNID~,
n'B~tribue qU'~ leur ~loignement, le fait que les habitants d~
l'Arabie neureuse aient écheppt; !:I. ceux "qui
f~mt métier de s' enparer
des
biens
de tous
le::; autres."
Ces
accusations qui
se recoupent, prouvent bien l'authenticit~
des
griefs
formul~s à l'encontre de Rome. Cette étude cansaCr~e eux
"lois de la guerre" nous a permis de
constater que la puissance ro-
maine,
faisait de la force un usage m~thcdique, sans
s'encombrer
des
arrangements et réglements
internationaux.
(1)
CESt.R,
B.G.,
VII,
77,14-16.
(2)
CL.
nICOLET,
Rome et
la conqu'te ••• op.cit.,p. 906.

-
224 -
l, ",
..
Ù
'-
"
',",
L c
Dans la preface de son HISTOIRE ROMA IdE , APPIEN dit qu'il a
"pour mieux montrer Comment
ces
ivênements
(ceux de l'histoire) se
sont produits)rasse~blé et composé los éléments de son récit, qui
mérite d'être médité par ceux qui veulent se représenter l'embition
démesurée des hommes,
leur terrible soif de pouvoir,
leur aC!~arne­
ment inlassable, et les
formes
innombrables du mal.
(1)"
L'image de la guerre qui se dégage de notre étude n'est pas
aussi sombre que le suggêrent ces mots de l'histori~n. Car derrière
ce déChaînement de violences, s'était profilé un véritable code de
lois de la
guerre, qui sans être êcrites, devaient ~tre respectéeS
par tOUE,
et comportaient, pOur sanction,
une haine indiscutée.
L'important ne réside pas dans le fait
qu'elles
aient été viol~es
mais plutôt que le droit ait cherché: même vain€ment
à prendre la
place de la force.
Cette nécessité pour les anciens de soumettre la
guerre à des
usages
témoignait de leur volonté de dresser des
barrières, pour empêcher les excès de
violence propres à toute guer-
re,
mais
aussi de restreindre la toute puiss~oce du vainqueur.
Il n'est paS de lecteurs modernes, qu~ n'aient ressenti une
certaine
émotion en prenant connaissance de la destruction de
Carthage ou de Corinthe.
Il est
impossible de lire dans APPIEN
(qui
suit POLYBE)
le récit de la fin de Carthage sans un dégoût et une
pitié infinis.
La reddition et la destruction de Numance nous révêle
tant de détails odieuxl Les survivants, horribles à voir et repous-
sants furent vendus à l'exception de cinquante que SCIPIOU, avait
cyniquement gardés pour son triomphe.
Pourtant nous paraîtrions
injustes si nous
attribüi~~s ces cruautés aux seuls Romains. Car
les récits de la destruction de Thèbes,
le massaCre des Tyriens,
(1)
APPIEN,
Histoire Romaine~ I~ Proem., 6.

-
225
-
l'incendie de Persepolis
au te~ps d'ALiXANDRE produisent c~rtain~­
ment un sentiment de douleur ég~lc. Saccages et massacre3 durant
toute l'Antiquité, sont, pour ainsi
dire, les
fruits
amers
de la
guerre.
La conquête de la Gaule est plcinè d~ traits âe
cruautfs
rfvol-
tantes.
Le terrible
châtiment des
assiégfs d'Uxellodunum n'est ~u'un
échantillon de la g~m~e varife de tortures que les Romains faisaient
subir a leurs adversaires tenaces. M@ue CESAR, ~ les ~voquer au
cours de ses ca~pagnes, se~ble éprouver une certaine répugnance, ou,
tout au moins,
une c~rtaine gêne, Com~e s ' i l était le pr~~ier à
ré~rouver ses propres rigueurs. Autrenent dit, le Ronain n'aimait
pas parler des peines capitales qu'il avait prononcé~s ou des chê.ti-
ments collectifs qu'il avait ordonnés.
Cependant si le bellum galli-
cum nous offre beaucoup plus d'exem;les de ce genre, c'est que le
gén~ral ne pouvait les passer sous silence. P. FABRE l'a bien noté,
selon lui,
CESAR, en narrateur ~ faits, trop souvent connus, ne
pouv~it f~usser volontairement "la mat~rialitê des faits qui av~ient
eu trop de téooins.
Aussi
a t - i l très souvent eu recours à des pré-
cautions oratoires pour ne pas trop compromettre sa réputation de
clémence.
Aussi nous
confie t - i l qu'après la soumission
des Helvètes,
une partie de la population
refusa de se rendre
i l les fit pour-
suivre, on les ral"lena et
"on les trai ta COI!ll!le des ennemis.
(1)"
CESAR se
justifiait ainsi
auprès de ses partisans quoiqu'aux yeux
d'un Ro~ain, les :ois de le guerre l'autorisaient à se comporter â
sa guise envers les enne~is. Cette fr~nchise, du reste sans mfrite,
permet aU lecteur des commentai~es, de se faire
une idee
juste de la
façon
dont les
Romains
se
comportaient en ca~pagne.
Lorsque nous, lecteurs modernes, nous nous pencLons
sur l'his-
toire romaine,
nous nous
rendons
compte que ~algré le voile pati~mment
(1) ?
FABRE, édition du B.G. ,
C.U.F.
Introduction p.
XXVIII.

-
2ë6
-
tissci par les
si~cles, l'o~br~ des passl0ns d~chD!n~~s, de la crUau-
tf
effr~nfe, apanage des guerres, demeure toujours a~parente SUr
la toile
de
fond hU~aine. Les récits de eue~r~ fOurmillent de scènes
qui para1ssent aujourd'hui
de la plus profonde horreur. En présence
de tels
rêcits, l'attitude la plus
~omwune consiste à mettre dfdei-
gneuse~ent de semblables faits, sur le co~pte de moeurS ~rriérées
et barbares.
Mais les exemples d'une
actualit~ recente, montrent
bien que des
obligations ayant
fOrce
de loi morale n'ont que peu de
chance d'être respectées. si des
i~péraJ~~ ~conomiques, ~ilitaires
cu id~ologiques en veulent autrement.
Pour quiconque r~fléchit ~
toutes
les leçons de l'histoire,
i l demeure ~viaent que
tous les
r6gimes
politiques ou fcono~iques, bons ou mauvais, ont gllSS~ UL
jour, pour une raison ou une autre,
dans
"la boue sanglante
des
combats".
Cela ne saurait être le
fruit du hasard,
ni à'une fatali-

;
c'est un phfn05ène constant,
et c'est par la guerre qu'ont pfri
toutes les
civilisations. Aujourd'hui
cO~me, on ne cesse de le faire,
on se borne à discuter du d~sarMement. Mais on sait, de science cer-
taine, puisque fonde sur une expérience oillfnaire,
qu'il n'a jareais
empêché les guerres.
Il n'est donc point impossible d'ftublir un parallèle entre
les
canr' -~es ronaines et les Lvèneoents qui, quoitidie~ment, conti-
nuent de bouleverser le monde.
Car qu'on le dfplore cu non,
ln guerre
reste ln cl~ de voûte àe notre conception de l'orJre social à ln fois
interne et international.
C'est par la r~fLrence historique ides
series de guerr~ pass[es que s'explique tout l'6spect PQlitique de
notre planète
:aussi bien la rfpartition des
"espaces vitaux"
que
la hi~rarchie des Etats et des nations.
Nous
terminerons en citant ces lignes de J.
HiURGOJ, qui tra-
duisent avec un r~alisme cru, ln v~ritable noture des guerres de
domination,
d'hier à aujourd'hui
:"il y a des
impfri~lismcs cyniques,
et des
impérialismes qui ont besoin d'avoir bonne conscience.
L'An-
gleterre victoriec~c a suscit~ de noS
jours ln critique de ceux qui
ont décelf l'effort parfois narf, pour cOmposer ln velonté de

-
227 -
conquête
et l'esprit de mission.
De m~me la politique romaine n'a
jamais été
~y~ique :elle était hypocrite dans le S~DS où l'hypocri-
sie était un hommage que la volonté de puissance rendait
a la fiaes
Romana. Aux vertus de la fidee#
Rome croyait profondément,
et c'est
parce qu'elle proclamait et croyait profondement que
ce qu'elle of-
frait
aux peuples était une protection
SÛre.
garantie des
di~ux, ~ue
les peuples se
sont
soumis si
vite
~ sa loi, comme autant de cli~n­
tèles •••
dans
un patronat international.(1)"
(1)
J. HEURGON,
la guerre romaine ••• op.cit.# p. 32 •
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T~nL~
DES
M~TIËRES
:wt,f 'l' PROPOS
pag~s
I:·· ..~·~·:!.)J~LJCTION
......•.• ,.•••..•••...•...•.••....•.•...••••..••..
1
P', r' '. ,', '"
1\\ r~_ I I I ~:. 1 L.
PARTIE ~
De la déclaration
de
guerre
à l'ouverture
des
hostilit~s.
Guerre et
citoyen
.
7
Introduction
l
Guerre et Opinion publique
10
II Devoir militaire:
Devoir Civique...
,6
CH!.~;!T;'.E DEUX:
Bellum iustU777 et Bellum iniustum
l
De
l'~tranger ~ l'ennemi
.
23
II Bellum iustum et bellum iniustum
.
27
CH.",f.. iTl;E TROIS: La déclaration de guerre
.
32
l
La d~claration d~ ~uerre originelle
.
32
II Evolution et chang~ment dans la déclaration de
guerre
.
36
CH/J'ITf:E QU/\\TRE :L'intervc:1ticn Romaine extra-ito.lique.
l
L'essor imp~rialiste : 264 -
172 av.
;.C
.
39
II De
la nova sapienta à la guerre preventive
112-
146.
............................................
50
III
L'impérialisme agressif
.
54
COfJCLUS ION PREMI ~RE PART 1E
60
DEUX!tME PARTIE: De l'ouverture des hostilités jusgu'~
l'issu~ dE la guerre.
La prise
des villes et le tr~itement
des populations.
62
l
Les
villes prises
d'assaut
.
64
'.
~.'

-
242
II La soumission sans c o m b a t . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
64
Clit.iJIT,,; DEUX: Les profits de guerre: biens m~téritls
et prisonniers
. . .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. ..
92
1 Les
profits de guerre
:
droit
de conquête
;
avantage économique individuel ou collectif?
92
II La compositio11 du butin
.
98
III La répartition des profits
de
guerr~.............
106
CH~ilIT~E TROIS: Le recours aux Otages.....................
130
1 Qualité et choix à0S
Otages
132
II La garde des O t n g e s . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
141
III A quoi
sert l'otage?
146
CHhPIT~E QUATRE: RSle et statut des AMBASSADEURS.. ..... ...
152
1 Legati
et nuntii
152
II Choix et qualités
des Ambassaàeurs
154
III Pouvoirs et domaines d'intervention
desL~gati.....
157
IV L'immunité dE:'S
agents diplomatiques . . . . . . . · . . . . . . ·
159
V Les ambassa.des étrangères à R o m e . . . . . . . . . . . . . . . . . .
164
DEUX 1ËME I-,.'u:ï 1fi •....•.....•.•.•..•......••••.•
169
T~O!SItME PARTIE :-L'arrêt des hostilité et le
rétablissement de
ln paix.
CH,~~'rT:;E PREMIER:
Tr'êves,
traités de paix et traités
d'alliance.
174
1
La trêve,
prem~2r pns v~rs l~ paix.
175
II Les traités de Paix.
184
III L'accord d'amitié.
.. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. ..
190

- 243
CHAPIT;~E DeUX
La sarantie des accords internationaux :
rides et s e r m e n t . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
197
l
Aspects juridiques de la r i d e s . . . . . . . . . . . . . . . . . .
197
II Aspects
200
CHAPIT;~E
206
l
De la première suerre puniqùe__~.Q
de
206
II Le crédit de Rome de Pyd~a à la campasne de
Gaule.
216
COf~CLUS1ON.
224
BI EL] OGRAPH 1E
228
TABLE DES MATI~ReS •••••.••.••.•.•••••••••••••••.••.••••••••
241
."
.
i4~r~.] __