ACTIVITE ANTI-MICROBIENNE DE BOERHAVIA-DIFFUSA
(NYCTAGINACEE)
par M.B. VAN DUNEN (Luanda)
Le genre Boerhavia, de la famille des Nyctagi-
Calcium, 1,2 % ; Potassium 2,3 %. La présence
nacées, compte six espèces Boerhavia diffusa et
d'alcaloïdes a été confirmée. (3)
Boerhavia repens étant les plus connues par les
Dans l'espèce congolaise, BOUQUET a trouvé
Tradipraticiens Angolais et, parfois, confondus
aussi des traces d'alcaloïdes dans les feuilles et
par les populaires.
tiges et 0,1 à 0,3 % dans les racines. Le Screening
Boerhavia diffusa L. est une plante très com-
était négatif pour tannins, quinones, stéroïdes,
mune autour des villages, dans les terrains vides
terpènes, flavonoïdes et saponosides. (4)
et jardins des grandes villes, comme mauvaise
herbe. Elle existe aussi dans des cultures et lieux
L'espèce de l'Afrique de l'Ouest a été analysée
humides, dans toutes les Provinces de l'Angola
seulement du point de vue diététique. (5)
bien que sur les bords des routes et pistes.
Utilisation : l'emploi le plus répandu dans tous
les groupes ethniques est comme anti-ictérique -
RECHERCHE PERSONNELLE SUR
surtout dans l'hépatite virale, et pour traiter les
L'ESPECE ANGOLAISE
panaris et plaies infectées.
Les Ovimbundu disent que la plante est très
efficace comme préventive et curative de la fièvre
porcine africaine. Les (Cokwe), par contre, utili-
2.3.1. • Screening
sent les feuilles et tiges comme diurétique, anti-
ictérique, et le jus dans les conjonctivites purulen-
Le screening préliminaire effectué sur la plante
tes, les panaris et les plaies infectées. Les racines
après la saison des pluies, dans la Province de
sont utilisées comme an ti-convulsif.
Bengo, a montré la présence d'alcaloïde en petites
quantités (moins de 0,2 % de flavonoïdes, de
stéroïdes et sucres réducteurs. l'extrait aqueux
n'avait
pas
d'activité
anti-hémolytique,
au
CHIMIE ET PHARMACOLOGIE
contraire des extraits d'autres plantes antiictéres
(6) que j'avais étudiées, telles que les racines
Selon la bibliographie consultée, cette espèce a
papasa et bochlospermum angolensis.
été particulièrement étudiée aux Indes par CHO-
PRA (1938) de CHOSHAC (1910) indiquant
l'existence d'un sulfate, d'un corps de nature
2.1. • Action antibactérienne
alcaloïdique ; d'une masse huileuse ; de matières
minérales sous forme de sulfates et de chlorures ;
Face à son utilisation dans le traitement des
et des traces de nitrates et de chlorates. A partir
panaris, des plaies infectées et conjonctivites pu-
des tiges et feuilles il a trouvé 6,4 % de potassium,
rulentes, par application directe, soit du jus retiré
de petites quantités d'un alcaloïde amer dénommé
des feuilles, soit de la pâte des feuilles et tiges,
«punamavine qui a été obtenu cristallisée sous
soit les lavages avec l'infection, nous avons cher-
forme de chlorhydrate (1).
ché l'activité anti-bactérienne de ces parties de la
plante.
La présence d'un acide cristallisé-acide boerha-
vique - de tannins, de phlobaphénes et des sucres
réducteurs a été remarquée par DUTI et col.
(1934) (2).
2.1.1 • MATERIEL ET METHODE
SUBRAMANIAN et col. (1965) ont trouvé des
a) Matériel d'origine végétal: Pour ça, on a
aminoacides libres et combinés, et ont fait l'ana-
utilisé des Boerhavia diffusa de la Région de
lyse des cendres qui donnait les résultats suivants :
Kifangondo. 800 grs de feuilles et tiges ont été
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lyophilisés et ont donné 360 gr d'une poudre vert
RESULTATS - Selon les résultats obtenus
brunâtre avec une odeur agréable.
(Tableau 1) certaines espèces bactériennes - sta-
b) SOUCHES BACTERIENNES: on a utilisé
phylococcus aureus Streptococcus C et Proteus
pour le test préliminaire 4 souches bactériennes
mirabilis - sont sensibles au lyophilisé de Boerha-
provenant du service de Microbiologie du CNRS
via diffusé selon les CMI observées avec des
de l'Angola : Escherichia coli, Streptococcus, Pro-
antibiotiques.
teus mirabilis et Staphylococcus.
Comme les résultats étaient intéressants, on a
CONCENTRATIONS
MINIMALES INHIBITRICES (CMI)
ET
effectué deux recherches plus approfondies à la
BACTERICIDE (CMB) EN MGIDE BOERHA VIA DIFFUSA VIS-
A-VIS DES SOUCHES BACTERIENNES.
Faculté de Médecine et Pharmacie de Dakar.
Pour ça, on a utilisé 9 souches bactériennes
provenant de collections internationales : TCC de
la collection de l'Institut Pasteur de Paris, IPP et
SOUCHES BACTERIENNES
CMI
CMB
du souchier de la Faculté de Médecine de Dakar
FMD. Les détails concernant ces souches sont:
1. Sarcina lutes
0
0
COCCI GRAM POSITIF, (Sarcina lutes ATCC
2. Staphylococcus aureus
100
1000
9341, Staphylococcus aureus IPP. 7625 et FMD
550).
3. Escherichicrcoli
400
400
BACILLES GRAM NEGATIF: Escherichia
4. Salmonella typhy
-
-
coli: IPP 7624 ; Salmonella typhi : lysotype A
5. Serratia marcescens
-
-
Macaraibo FMD 471 déposées IPP; Klebsiella
pneumoniae FMD 36 ; Proteus mirabilis FMD.
6. Klebsiella pneumoniae
-
-
Streptococcus C FMD et Pseudomonas aeruginosa
7. Proteus mirabilis
100
100
IPP 76110.
8. Streptococcus C
100
100
9. Pseudomonas
-
-
2.1.2.• METHODE
aeruginosa
a) 800 grs de feuilles et tiges de Boerhavia
diffusa ont été bouillies pendant 20 mn à l'eau
Le Staphylococcus aureus et Streptococcus C et
distillée qui couvrait complètement le matériel
Proteus mirabilis ont montré des CMB de 100 mg/
végétal. Après avoir refroidi, l'infusion a été
ml de lyophilisé, c'est-à-dire à peu près 50 mg de
filtrée
et
lyophilisée
dans
un lyophilisateur
substance active, ainsi, il est possible que de telles
Buchi.
concentrations soient atteintes au niveau des
plaies infectées ou de lésions de la conjonctive
traitées par application du jus de la plante. Ces
DETERMINATION DU POUVOIR ANTI-
bactéries peuvent aussi être considérées comme
sensibles parce qu'en application locale, on ob-
BACTERIEN:
tient des concentrations d'agents antibactériens
supérieures à la CMI.
On a déterminé, par la Technique des dilutions
Les autres espèces ont été résistantes à la
en milieu gélosé, (7) les concentrations minimales
drogue.
inhibitrices (CMI) du lyophilisé de B. diffusé.
Pour chaque souche, .un inoculum de 15 bac-
téries d'une culture fraîche de 18 heures a été
déposé sous forme de spot calibré grâce à l'appa-
reil de Steers (8) sur une gamme de milieux solides
DISCUSSION ET CONCLUSION
Mueller - Hinton, contenant respectivement des
concentrations de lyophilisé de B. diffusé de 1 ;
Le lyophilisé de Boerhavia diffusa possède une
5 ; 3 ; 6 ; 12 ; 25 ; 50 ; 100 ; 200 ; 400 ; 800 et
action antibactérienne à la concentration de
1.600 mg/ml. Les numérations des CMI (concen-
100 mg/ml pour Streptococcus C, Staphylococcus
trations minimales inhibitrices) ont été effectuées
aureus et Proteus mirabilis, soit de 50 mg/ml de
après 24 heures de culture à 37° C.
substance active, et de 400 mg/ml pour Escheri-
Après ce délai, les spots n'ayant pas donné de
chia coli et n'a pas inhibé la croissance des autres
culture, ont été repiqués sur un milieu de Muler-
espèces de microorganisme.
Hinton vierge ; on peut ainsi dénombrer approxi-
Ces résultats préliminaires justifient en partie
mativement les survivants et apprécier le pouvoir
son utilisation en Médecine Traditionnelle COK-
bactéricide. Il a été vérifié, en milieu liquide que
WE. Ils nous incitent à rechercher d'autres pro-
les concentrations bactéricides en milieu solide
duits antibactériens d'origine végétale, surtout
correspondaient à la concentration minimale bac-
pour traiter des affections cutanées. D'autres
téricide (CMB) , c'est-à-dire, à la concentration
plantes à alcaloïdes ont déjà montré une activité
qui laisse moins de 0,01 % de survivants.
anti-bactérienne (8). Les recherches suivantes doi-

vent être d'essayer d'isoler des quantités suffisan-
véhicule de production local, pour essayer de la
tes de «punarvine » pour chercher son activité
mettre sous formule galénique. Cependant la
vis-à-vis des microorganismes gram positif et gram
faible quantité de cet alcaloide dans la plante rend
négatif et, postérieurement, essayer de trouver un
la tâche difficile.
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