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MONDIALISATION ET IDÉOLOGIE
CYRILLE KONE
Université de Ouagadougou-Burkina Faso
INTRODUCTION
raisonnable et imprévisible - n'a plus rien de mieux
à proposer à l'humanité en substitution au modèle
La mondialisation c'est le stade suprême du
néolibéral qui favorise l'exclusion, l'augmentation
modèle capitaliste de production économique qui
de la pauvreté? Le libéralisme est-il le destin de
s'est développé, puis diffusé à travers le monde
l'humanité? Autrement dit, le libéralisme est-il la
entier. Le capitalisme par la mondialisation sort ainsi
forme achevée de l'accomplissement humain?
C'est à répondre à ces questions essentielles que
du cadre purement national et continental pour
j'aimerais consacrer mon propos en examinant :
adopter une dimension cosmique puisque avec le
- d'abord la mondialisation comme idéologie,
triomphe du libéralisme, consécutif à l'échec du
- ensuite le besoin d'une contre-idéologie à la
système communiste de production économique, la
mondialisation.
planète est devenue son aire de jeu.
Auparavant, j'aurais procédé. à titre
préjudiciel, à une archéologie de la mondialisation.
Au cœur du modèle de l'économie libérale
se trouvent le profit et la croyance à l'idée selon
. I.
ARCHEOLOGIE
DE
LA
laquelle, il faut laisser le marché libre car tout le
MONDIALISATION
monde en profitera. La mondialisation reste
marquée par cette vision particulière du marché, à
Il n'est pas question de dire ici qu' « il n' y a rien de
nouveau sous le soleil depuis la Grèce ancienne »,
savoir une foi pure et simple au libre- échangisme
ou que l'Antiquité a connu la mondialisation,
au point de se signaler comme idéologie inspirant
comme elle a plus ou moins élaboré et expérimenté
une image d'infaillibilité.
la démocratie. Il paraît plus juste d'envisager les
Anciens comme ayant laissé en héritage les outils
Travaillant inlassablement à la suppression
conceptuels permettant de penser la mondialisation,
des entraves au libre-échange, à l'intégration des
phénomène marquant de l'époque contemporaine,
décrite par Djibril Samb comme une « extension à
économies nationales grâce à des institutions
l'échelle de la planète d'un processus complexe et
comme le Fonds Monétaire International (FMI), la
inégal d'unification, sous l'égide exclusive de
Banque Mondiale, l'àrganisation Internationale du
l'économie de marché, de tous les segments des
Commerce (OMC), etc., tout se passe avec la
activités traditionnelles des nations et des États:
mondialisation comme si l'histoire humaine était
commerce, flux financiers, organisation et
production
économique,
culture
et
finie. Est-ce à dire que l'homme - animal
Revue du CAMES - Nouvelle Série B, Vol. 009 N° 2-2007 (2- Semestre)
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Sciences sociales et humaines
_
environnement »1 . Autrement dit, la mondialisation
primordiale.
serait, à notre sens, un ancien phénomène prenant
source dans la spéculation des premiers philosophes
Il découle de cette tentative présocratique
grecs.
d'explication du monde, une position philosophique
fondamentale selon laquelle l'Un et le Multiple sont
En effet, le présocratisme comme tentative
liés. Le rapport d'interdépendance, mis en relief
d'explication rationnelle du monde n'a pas cessé
dans l'approche présocratique du cosmos, n'autorise
d'observer la nature pour tenter de la comprendre à
pas à envisager le monde comme une nature faite
travers les concepts de l'Un, du Multiple, de l'Être,
d'éléments séparés les uns des autres, à la manière
du Devenir, du Même, de l'Autre, etc. Le
d'un tas d'ordures composite.
mouvement présocratique s'est, dans l'ensemble,
imposé comme une pensée de la nécessité, de
En effet, l'Un héraclitéen, éternel et immuable parce
l'ordre, de la nature ou physis. D'où le nom de
qu'Un, est en même temps mobile et multiple
« physiologues » donné à ses représentants qui
puisque sans cesse en devenir. Chez Pythagore aussi,
avaient à cœur de déterminer la substance stable de
l'Un engendre le Multiple (numériquement illimité)
laquelle tout provient et où tout retourne. Pour ces
des nombres qui sont eux-mêmes des unités, à savoir
penseurs du cosmos, la substance primordiale devait
des monades substantielles tirant de leur
être une réalité, un élément unique ou un ensemble
ressemblance et de leur participation avec l'Un ce
d'éléments.
caractère d'unité.
C'est ainsi qu'on retrouve dans l'école ionienne,
En fait, dans les spéculations physiologique et
représentée par les Milésiens Thalès, Anaximandre,
mathématique des présocratiques, « Il s'agissait,
Anaximène et par Héraclite d'Héphèse, différentes
selon Jean-Paul Dumont, d'exprimer la nécessité
substances premières comme l'eau, l'infini, l'air,
de postuler, comme principe d'explication
le feu. Ces éléments, variables d'un présocratique
rationnelle, la présence d'un quelque chose de
à un autre, d'une école à une autre, représentent au
fondateur, d'une archè matérielle ou idéale, d'où
fond l' archè, la souche, le commencement, le
procédât ensuite tout le réel. Les premiers
principe unique duquel dérive le multiple, la
présocratiques, aussi bien les physiologues que les
diversité des choses du monde. Selon Jean-Paul
mathématiciens, ont fondé la philosophie en se
Dumont, « La sagesse ionienne sait déjà, elle aussi,
voulant les auteurs de ce choix »3. C'est dire qu'à
que les éléments forment un tout où rien ne se crée
travers la perspective présocratique appréhendant
ni ne se perd, où tout dérive d'un unique principe et
le monde à travers les concepts de l'Un, du Multiple,
doit, selon la dure loi d'une nécessité infrangible, y
en vue de le comprendre, la mondialisation,
retourner à la fin. Ici se trouve exprimée la
processus contemporain d'unification du monde,
découverte bien tardive de Hegel, que le
peut être comprise comme faisant partie du
commencement et la fin sont identiques. »2
patrimoine de la philosophie.
On le sait, chez Thalès, l'eau est la substance
Dans l'histoire de la philosophie, la sophistique a,
première de laquelle le tout naît et où tout retourne,
par sa nouvelle mentalité pragmatique et de
pour Anaximandre, c'est l'infini, chez Anaximène,
sensibilité démocratique, refusé l'idéologie
c'est l'air, et selon Héraclite, c'est le feu. Que cet
esclavagü;te fondée sur les influences sociales afin
élément soit l'eau, l'infini, l'air, le feu, la terre, etc.,
de mettre en relief une moderne figure de l'homme.
ne change rien au fait que le Multiple vient de l'Un
À travers le cosmopolitisme, résultant d'un profond
ou que l'Un donne naissance au Multiple, sinon
sentiment d'amitié, on entrevoit la perspective d'une
l'explique. La nature rationnelle du modèle
élaboration du monde en terme d'universalisme.
d'explication physique, mis en œuvre par les
Comme le déclare Hippias: « Vous qui êtes ici, moi,
présocratiques dans leur ensemble, n'est donc pas
je vous considère comme étant tous parents, de la
affectée par la nomination de la substance
même famille et de la même cité, selon la nature et
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non selon la loi. Car c'est par la nature que le
humaniste encore que celui, pourtant humaniste
semblable est apparenté au semblable; la loi n'est
d'Antiphon, dont la doctrine soulignait que les
qu'un tyran pour les hommes et fait maintes fois
besoins naturels sont les mêmes pour tous les
violence à la nature. Dès lors, il serait malheureux
hommes à quelque classe sociale qu'ils
que vous qui avez la connaissance de la nature des
appartiennent, qu'ils soient Grecs ou Barbares.
choses, vous qui êtes les plus savants des Grecs et
Hippias, pour sa part, ne semble pas mettre l'accent
qui pour cette raison même, êtes réunis en ce
sur cet aspect matérialiste du cosmopolitisme ni sur
moment dans ce qui est, pour la Grèce, le prytanée
ce thème de nature essentiellement égoïste et insiste
même du savoir, et, pour notre cité même, la
plutôt sur les liens affectifs qui unissent les hommes
demeure la plus somptueuse, cette demeure où nous
\\ et sont la plus noble conséquence de cette pensée »6.
sommes, il serait malheureux que vous ne fassiez
rien apparaître qui ne soit digne de cette dignité qui
L'approche d'Hippias serait une préfiguration de la
est la vôtre, et que vous vous mettiez à vous en
mondialisation comme universalisme. À la suite de
vouloir les uns les autres, comme les plus vils des
la sophistique, le stoïcisme thématisa le
gens de peu. »4
cosmopolitisme, la citoyenneté mondiale, comme
traduction d'un monde unique dans lequel les
La loi de la nature se présente ici comme quelque
hommes vivraient en sécurité par-delà les nations,
chose de plus objectif, universel et moralement
les pays.
normatif, que le nomos. Hippias se rattache au
principe de la sympathie des semblables et le porte
Autrement dit, l'homme serait à l'image du sage
jusqu'à ses dernières conséquences: par nature, les
qui, dans le stoïcisme n'est pas seulement un citoyen
hommes manifestent l'unité dè l'espèce humaine.
du pays où il est né, mais aussi un citoyen du monde.
Le cosmopolitisme apparaît chez Hippias comme
En effet, puisque, selon le stoïcisme, toutes les
la conséquence inéluctable de la théorie de la
choses, tous les événements sont liés entre eux, il
sympathie des semblables. À travers cette notion,
doit en être de même des hommes. Ainsi, il y'a une
le Sophiste s'oppose véhément au nationalisme
loi universelle qui unit les hommes entre eux et
inhumain consacré par Platon dans La RépubliqueS
règne à la fois dans la nature et entre les cités. Une
car selon Hippias, les hommes dans leur multiplicité
telle philosophie est une remise en cause de
et diversité appartiennent au même inonde, à la seule
l'organisation du monde divisé en cités, en régions,
et même race humaine. Cette conception aura
en peuples possédant chacun des lois particulières
marqué les sophistes, moins fondés à vivre reclus
et voyant dans tous les autres des étrangers, des
dans l'étreinte de la cité, ou à l'intérieur des limites
ennemis? Selon le stoïcisme, tous les hommes sont
fermées de la nation. Les Sophistes, enclins qu'ils
concitoyens de la « République de Zeus », ils
étaient à voyager, à parcourir la Grèce, allant de
doivent à ce titre vivre sous la loi commune
cité en cité pour enseigner, ont été dans l'Antiquité
comme « un troupeau guidé par un seul berger ».•
de fervents promoteurs d'un monde ouvert et sans
frontières, dans lequel les hommes se livreraient
C'est dire qu'aujourd'hui, à l'heure de la
librement à leurs activités.
mondialisation, l'expression contemporaine
« village planétaire» pour désigner l'unification du
Le fort sentiment d'humanité, qui a permis à Hippias
monde, n'est qu'une évocation d'une ancienne
de voir dans les hommes de toutes les cités et de
réalité, d'un phénomène fort longtemps pressenti
toutes les nations des frères, traduit, en fait, le
par les anciens penseurs de la nature, de la loi
souhait d'une communauté mondiale d'hommes,
commune sous laquelle les hommes vivent unis.
étroitement unis entre eux et désireuse de vivre
ensemble. Selon le commentaire de Mario
Le monde stoïcien est l'expression d'une interaction
Untersteiner,
« Ce mouvement débordant
mutuelle. Comme l'a dit Anaxagore : « Tout est dans
d'affection à l'égard de l'humanité toute entière
tout », en toutes choses se trouve renfermées une
confère au cosmopolitisme d'Hippias un aspect plus
partie de chacune des choses. « La moindre goutte
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de vin jetée dans la mer s'étendra à la mer toute
ethniques, qui sont des faits marquants de l'époque
entière et de là à tout l'univers »8. La sympathie
contemporaine, ne participent guère du phénomène
universelle des choses et des êtres est la
de la mondialisation. Ils seraient plutôt l'autre face
caractéristique fondamentale du monde stoïcien
du monde configuré comme marché en tant que la
ignorant le vide dans une nature continue.
balkanisation, l'irruption des innombrables
revendications identitaires et communautaires
Selon cette conception, les corps sont dans une
demeurent un filon pour les investissements
interaction mutuelle. Le moindre fait a une
mercantiles. En effet, comme le dit Alain Badiou, «
répercussion sur l'ensemble du monde car c'est la
À l'heure de la circulation généralisée et du
seule lumière du soleil qui est répandue à l'infini
fantasme de la communication culturelle
sur l'ensemble des mers et des terres. À ce propos,
instantanée, on multiplie partout les lois et
Marc-Aurèle9 évoque l'idée d'un « nœud sacré»
règlements pour interdire la circulation des
qui lierait toutes les choses et selon lequel tous les
personnes. C'est ainsi qu'en France, il n'y ajamais
êtres concourent à l'harmonie du même monde.
eu aussi peu d'installation d'étrangers que dans la
Voilà pourquoi le sage
en quête d'harmonie
dernière période ! Libre circulation de ce qui se
intérieure et extérieure avec l'univers, ne saurait se
laisse compter, oui, et d'abord des capitaux, de ce
proclamer citoyen athénien ou d'une cité
qui est le compte du compte. Libre circulation de
particulière, mais bien citoyen du monde. Comme
l'incomptable infinité qu'est une vie humaine
le souligne Jean Brun, « Le cosmopolitisme des
singulière, jamais!»1 Pour Alain Badiou, « Entre
Stoïciens est la traduction, sur le plan moral et social,
la logique mondialisée du capital et le fanatisme
de la sympathie universelle »10. D'où leur appel à
identitaire français, il y a, au regard de la vie réelle
la fraternité, à l'amitié entre les hommes par-delà
des gens et de ce qui leur arrive, une détestable
les âges, les ethnies, les races, les différences
complicité. »2 La mondialisation offre la vision d'un
socioculturelles, les pays, en vue de rendre effective
monde croyant fermement et infailliblement au
la communauté- humaine mondiale.
marché libre, toute autre idée étant rejetée coII1IIM
absurde. L'idéologie de l'intérêt individuel se trouve
On peut légitimement dire que pour ces sages
par conséquent au cœur de la mondialisation.
philosophes Grecs les replis identitaires, les
processus de fragmentation nationalistes et
II.
LA
MONDIALISATION
COMME
IDEOLOGIE
1 Lire le texte intitulé « Civisme, communication et mondialisation », In
Comprendre Abdou Diouf(Chroniques politiques), Dakar, Horizon 2000,
1999, p.135.
Si le songe des Anciens d'un monde unifié
, Voir introduction de Jean-Paul Dumont: Les écoles présocratiques, Paris,
est aujourd'hui plus ou moins en marche, ce n'est
Gallimard, 1991, p. XII.
, Jean·Paul Dumont: Les écoles présocratiques, Paris, Gallimard, 1991,
pas comme l'ont pensé les Stoïciens dans le sens
p.VI.
de l'effectivité d'une citoyenneté mondiale, mais
4 Platon: Protagoras, 337c et suiv.
, Dans La République, V, 469bc, on lit ceci dans la traduction de Robert
c'est plutôt sous la forme d'un espace économico-
Baccou : « Maintenant, comment nos soldats se conduiront-ils à l'égard de
l'ennemi? En quoi? Premièrement en ce qui concerne l'esclavage. Esti-
financier ouvert et réglé par les lois du marché libre.
mes-tu juste que des cités grecques asservissent des Grecs ou bien faut-il
qu'enes le défendent aux autres, dans la mesure du possible, et que les Grecs
Autrement dit, la mondialisation en cours, ne
s'habituent à ménager la race grecque, par la crainte de tomber dans la ser-
concerne pas les humains, mais le capital, le
vitude des barbares? En tout et pour tout, il importe que les Grecs en usent
entre eux avec ménagement. Il importe donc qu'ils ne possèdent pas eux-
commerce, l'économie; bref tout ce qui rapporte
mêmes des esclaves Grecs, et qu'ils conseillent aux autres Grecs de suivre
l'exemple ». On le voit, la conception platonicienne est loin d'établir la fra-
de l'argent.
ternité entre les hommes, ~lIe conduit à l'opposition entre amis et ennemis,
Grecs et Barbares, etc.
• Mario Untersteiner: Les s't!phistes, 1'2, Paris, Jean Vrin, 1993, p.120.
La mondialisation en ce sens est devenue l'idéologie
7 Zénon de Cittium se serait, selon Jean Brun (Le stofcisme, Paris, PUFI
Que sais-je? N°770, 2(03), ékvé contre l'organisation du monde en diffé-
dominante de notre époque comme la religion l'a
rents pays et peuplades. sur ce point, les StoJciens se sont nettement distin-
gués des Cyniques pour lesquels le sage vit en société avec lui-même.
• Jean Brun: Le Stofcisme, Paris, PUFI « Que sais-je?», N° 770, 2003,
p.57.
1 Alain Badiou: Saint Paul Lafondation de l'universalisme, Paris, PUF,
• Marc-Aurèle: Les Pensées, VU, 9.
1997, P.IO.
Jo Jean Brun : Le Stofclsme, Paris, PUFI « Que sais-ie ?» N° 770 2003 P
58.
.
, . ,
,
, .
, Alain Badjou : Saint Paul Lafondation de l'universalisme, Paris, PUF,
1997, p.9.
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été au moyen âge et la science au 18ème siècle, à
marchés financiers sans avoir la momdre preuve
l'époque des Lumières en Europe. En effet, la
qu'elle stimulait la croissance économique (... ).
mondialisation véhicule de l'idéologie, une manière
Pour ne prendre que quelques exemples, la plupart
spécifique de voir le monde, de se le représenter en
des pays industriels avancés - dont les États-Unis
termes de profit et d'intérêt privé. Cette vision du
et le Japon - ont édifié leur économie en protégeant
monde, fondée sur le modèle de développement des
judicieusement et sélectivement certaines de ses
pays occidentaux, de ceux ayant adopté le
branches, jusqu'au moment où elles ont été assez
capitalisme! comme pouvant répondre à tout et
fortes pour soutenir la concurrence étrangère. Si le
offrir des solutions à la totalité des problèmes de
protectionnisme généralisé n'a pas été efficace dans
l'humanité, est devenue une conviction largement
les pays qui l'ont mis en œuvre, la libéralisation
répandue depuis la débâcle du communisme,
rapide du commerce ne l'a pas été davantage.
consécutive à l'effondrement du modèle soviétique.
Contraindre un pays en développement à s'ouvrir à
des produits importés qui vont rivaliser avec ceux
Ainsi, pour les pays développés comme pour ceux
de certaines de ses industries, dangereusement
en développement, la mondialisation demeure-t-elle
vulnérables à la concurrence de leurs homologues
le credo du développement, du progrès socio-
étrangères bien plus puissantes, peut avoir de
économique, à même de répondre efficacement à
désastreuses conséquences -
sociales et
tout ce qui inquiète l'humanité. Plus que jamais, le
économiques. »2
monde contemporain a foi en la mondialisation
économique. C'est pourquoi, il s'y trouve engagé
On le voit, la conception du marché libre, de
puisque après l'échec du modèle communiste de
l'idéologie libérale du profit qui est au fondement
développement, le libéralisme reste la seule
du capitalisme, s'impose despotiquement; on ne
politique possible, porteuse d'espoir.
cherche même pas à vérifier l'exactitude de la
théorie en question. Cette attitude dogmatique,
En effet, selon ses adeptes, la mondialisation, par
poursuivant l'intérêt personnel, est aux antipodes
l'intégration des économies nationales et la
du comportement scientifique qui recherche
suppression des entraves au marché, se présente
l'objectivité.
comme une force bénéfique, capable d'enrichir tous
les hommes, en particulier les plus pauvres.
Mais là où le bât blesse, c'est que les institutions
Autrement dit, pour eux, l'ouverture au commerce
gouvernant la mondialisation comme le Fonds
international favorise le développement. Lorsque
Monétaire International (FMI), la Banque Mondiale,
les exportations propulsent la croissance, le
l'Organisation MQndiale du Commerce (OMC) sont
commerce extérieur contribue au développement.
marquées par cette façon de faire et de voir qui a
Ainsi, la mondialisation apporte-t-elle le bien-être.
cont!'Ïbué à creuser le fossé entre riches et pauvres.
En outre, elle réduit le sentiment d'isolement des
Comme déclare Joseph Stiglitz : «Les paysans
pays pauvres. Ces derniers doivent donc l'adopter,
pauvres des pays en développement ne pouvant
s'ils veulent se développer et combattre
évidemment pas résister aux produits massivement
efficacement la pauvreté.
subventionnés en provenance d'Europe et des États-
Unis, des emplois ont été systématiquement détruits
Mais à notre époque1.ie l' « argent-roi », les grands
avant que les secteurs industriel et agricole
argentiers du monde..les institutions financières, ne
nationaux aient pu engager une dynamique de
privilégient pas le débat démocratique ouvert et
croissance forte et en créer de .nouveaux. Pis : en
franc pourprèndre une décision importante. En
exigeant que les pays en développement suiv~nt des
général, leurs opinions sont des «paroles
politiques monétaires restrictives, le FMI leur a
d'évangile », à suivre scrupuleusement. C'est ainsi
imposé des taux d'intérêt qui auraient interdit toute
que selon Joseph Stiglitz, lauréat du prix Nobel
création d'emploi, même dans le contexte le plus
d'économie, « On a préconisé la libéralisation des
favorable. Et comme le commerce a été libéralisé
avant la.mise en place de filets de sécurité sociale,
Revue du CAMES- NouvelleSêrie B; Vol. 009 NQ 2,;,2007 (2~Dl. Semestre)
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Sciences sociales et humaines - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
ceux qui ont perdu leur emploi ont été précipités
dispose des moyens de la production matérielle
dans l'indigence. Donc trop souvent, la
dispose, du même coup, des moyens de la
libéralisation n'a pas apporté la croissance promise
production intellectuelle, si bien que, l'un dans
mais a accru la misère. Et même ceux qui ont
l'autre, les pensées de ceux à qui sont refusés les
conservé leur emploi se sont sentis beaucoup moins
moyens de production intellectuelle sont soumises
en sécurité (... ). Le résultat a été pour bien des gens
à cette classe dominante. Les pensées dominantes
la pauvreté et pour bien des pays le chaos social et
ne sont pas autre chose que l'expression idéale des
politique. »3
rapports matériels dominants, elles sont ces rapports
matériels dominants saisis sous la forme d'idées
En outre, les institutions économiques et financières
donc l'expression des rapports qui font d'une classe
de la mondialisation (FMI, Banque Mondiale,
la classe dominante; autrement dit, ce sont les idées
OMC, etc.) sont pour la plupart dominées par les
de sa domination. Les individus qui constituent la
pays industrialisés occidentaux qui sont soucieux
classe dominante possèdent, entre autres choses,
d'assurer
leurs
intérêts
économiques et
également une conscience, et en conséquence ils
commerciaux. Alors que la quasi-totalité des
pensent, pour autant qu'ils dominent en tant que
activités de ces institutions s'exercent de nosjours
classe et déterminent une époque historique dans
dans le monde en développement, le FMI, la
toute son ampleur, il va de soi que ces individus
Banque Mondiale, l'OMC, etc., sont pilotés par des
dominent dans tous les sens et qu'ils ont une
occidentaux ou des représentants des pays
position dominante, entre autres, comme êtres
industrialisés. Ces dirigeants, non véritablement
pensants aussi, comme producteurs d'idées, qu'ils
élus, n'ont aucun compte à rendre aux citoyens -
règlent la production et la distribution des pensées
vivement le jour où ces dirigeants seront
de leur époque ; leurs idées sont donc les idées
responsables devant les citoyens comme dans la
dominantes de leur époque. »4 En résumé,
démocratie moderne -, ils conduisent dans ces
l'idéologie est l'imaginaire de la pratique
conditions les institutions internationales par
économique du mode de production et de la lutte
rapport aux attentes et intérêts de la classe
des classes comme le montre G N amer dans son
dominante, détenant le capital.
ouvrage intitulé Court traité de la sociologie de la
connaissances.

Autrement dit, les institutions financières et
économiques de la mondialisation ne sont pas
On l'appréhende plus nettement encore, la
représentatives du monde en développement
mondialisation n'est pas un phénomène neutre. Elle
qu'elles servent. C'est ce qui explique, sans doute,
consacre le triomphe de l'économie de marché et
qu'elles regardent le monde entier avec les
se nourrit de l'idéologie libérale qui est « destinée
« lunettes des milieux d'affaires ». Par conséquent,
à gommer, selon Djibril Samb, après l'avoir vaincue
leurs décisions reflètent- une vision partisane,
et ridiculisée, jusqu'à l'idée même de la possibilité
étroitement liée aux intérêts des décideurs, les
de toute autre voie socialiste d'organisation de la
argentiers.
société et de l'économie comme alternative au
système capitaliste, qui exprime toujours la
Karl Marx indique en ce sens que la classe
domination et la puissance du capital sur la Force
dominante, possédant les moyens de production
du Travail. On ne peut méconnaître le remarquable
~conomique, finit par imposer ses idées à la classe
succès de cette idéologie libérale triomphante et
dominée. Dans L'idéologie allemande, on y lit:
dominante, puisqu'elle se présente non seulement
« Les pensées de la classe dominante sont aussi, à
comme unique cadre de perception et de
toutes les époques, les pensées dominantes,
représentation du monde, mais comme naturelle, si
autrement dit, la classe qui est la puissance
bien qu'elle n'offre d'autre alternative que de
matérielle dominante de la société est aussi la
s'adapter ou de périr. Par le passé, aucune idéologie
puissance dominante spirituelle. La classe qui
n'avait réussi un tel tour de magie: décréter
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naturelle et faire accepter comme telle la
développés en dehors de l'économie de marché -
représentation idéologique, pourtant la moins
l'expérience des pays communistes ayant été un
élaborée de ces cent dernières années, de l'économie
« feu de paille » -, il n'en résulte pas pour autant
de marché, entièrement assujettie à la volonté
l'impossibilité et la caducité d'un tout autre modèle
implacable de quelques immenses puissances
de développement. À ce propos serait-il impertinent
financières. »6
d'envisager l'État et les marchés dans un rapport
de complémentarité ?
Joseph Stiglitz signale, d'autre part, l'utilisation
d'une expression assez significative du dogmatisme
Il semble que proclamer l'échec de l'Étatisation
des institutions qui gouvernent la mondialisation.
systématique des moyens de production et
Par l'image saisissante de l'expression anglaise « off
d'échange, comme le font les adeptes du libéralisme,
track », le FMI désigne tout pays ayant « quitté la
relève de la pure et simple idéologie. L'Étatisation
route» ; .ce qui sous-entend « un seul « bon»
n'entraînerait pas d'inéluctables gaspillages et
chemin et le moindre écart est l'annonce d'un
pénuries car l'État véritable inscrit le principe de
déraillement imminent. » 7 Les institutions
responsabilité envers les citoyens au cœur de son
économiques et financières de la mondialisation
action de supervision de la société. Évidemment, la
devraient aussi rompre avec la mentalité
position des fanatiques du marché pour lesquels
néocolonialiste, l'attitude idéologique parce que
« L'État très généralement, ça ne marche pas et le
partisane pour pouvoir inspirer véritablement le
marché, très généralement, ça marche », est
développement par l'implication des populations
idéologique. Le problème n'est pas d'accorder trop
dans l'élaboration des stratégies et l'exécution des
de place à l'État mais de le laisser accomplir son
programmes
locaux
de
développement.
rôle nécessaire. Or, la plupart du temps, l'État
dépense d'inutiles forces à faire ce qu'il ne devrait
Or jusqu'ici l'incitation à adhérer au libéralisme,
pas, et cela le détourne de sa mission fondamentale
est faite sur la base de convictions, de croyances.
d'arbitre et d'organisateur de la vie socio-politique
Ainsi, le mythe selon lequel : «Aucun pays ne peut
et économique.
se développer sérieusement sans économie de
marché », est-il construit et diffusé partout sur la
Les pays seraient bien gouvernés si l'État s'occupait
planète. En fait, tout le problème ici se trouve dans
prioritairement de mettre en œuvre les services
la signification de la notion de développement,
publics essentiels au lieu de gérer des entreprises
généralement comprise en termes de « ressources »,
dont on peut soutenir qu'elles seraient mieux gérées
de « capitaux », au point de masquer sa dimension
par le secteur privé. Comme le dit Joseph Stiglitz,
fondamentale de transformation qualitative de la
la privatisation aurait un sens. Toutefois, « Quelques
société par l'amélioration de la vie des pauvres, en
importantes conditions préalables doivent être
garantissant l'accès pour tous à la santé, à
satisfaites pour que la privatisation puisse contribuer
l'éducation, bref en donnant à chacun une chance
à la croissance d'une économie, et la façon dont on
de réussir. Même si la récente histoire humaine ne
privatise
fait
une
énorme
différence.
fournit pas d'exemples de pays véritablement
Malheureusement le FMI et la Banque Mondiale
ont traité ces questions d'un point de vue
'Selon Jacques Decomoy dans Manière de lIoir 32, « À l'heure du« loul-
idéologique : il fallait privatiser vite (Il existait des
capital )), ln Le Monde diplomatique, novembre 1996, p.38, pour le libéra-
fiches de score pour les pays engagés dans la
lisme : « Rien ne doit venir entraver la concurrence; elle enfante la crois-
sance, elle-même fille du négoce, de l'export-import, et mère de l'emploi.
transition du communisme au marché : ceux qui
Réglementer le commerce, décider de mesures protectionnistes viole la Loi
privatisaient le plus rapidement recevaient de
fondamentale, et la défense des salariés ne doit jamais servir de prétexte à de
pareilles hérésies. ))
bonnes notes.) C'est pourquoi, souvent, les
1 Joseph E. Stiglitz : La grande désillusion, Paris, Fayard, 2002, p. 42.
privatisations n'ont pas apporté les bienfaits promis.
) Joseph E. Stiglitz : La grande désillusion, Paris, Fayard, 2002, pp. 42-43.
• Karl Marx : L'idéologie allemande, Paris, Éditions sociales, 1982, p.1 11.
Et leur échec, par les problèmes qu'il a créés, a
, G. Namer : Cours trailé de la sociologie de la connaissance, Paris, Librai-
rie des Méridiens, 1985.
répandu l'hostilité contre l'idée même de
• Djibril Samb : « Mondialisation el renconlre des cultures: le dialogue
esl-il possible 7 li, ln Mondialisation el rencontre des cultures: le dialogue
privatisation. »1
esl-il possible 7, Actes du colloque du 21 juin 2002, Saint-Louis, Édition
Xamal, 2002, p. 2 J.
1 Joseph E. Stiglitz : La grande désillusion, Paris, Fayard, 2002, p. 86.
7 Joseph E. Stigliiz : L.'l graJtde désillusion, Paris, Fayard, 2002, p. 73.
Revue du CAMES - Nouvelle ~rie B, Vol. 009 N° 2-2007 (2-- Semestre)
149

Sciences sociales et humaines - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
Dans la plupart des pays en développement,
proprement symbolique, à ces rapports de forces.
la privatisation n'a pas jugulé la pauvreté, elle a
Au nom de ce programme scientifique de
même accru la misère en contribuant à miner la
connaissance, converti en programme politique
confiance dans les institutions démocratiques.
d'action, s'accomplit un immense travail politique
, L'idéologie du profit, au cœur de la mondialisation,
(dénié puisque, en apparence, purement négatif) qui
est de plus en plus décriée par les populations car
vise à créer les conditions de réalisation et de
elle prive les citoyens de la plupart des États
fonctionnement de la « théorie» ; un programme
souverains de leur capacité à choisir leur modèle
de destruction méthodique des collectifs. »2
de société, leur option de développement.
L'analyse bourdieusienne montre à quel point le
Le ressentiment contre la mondialisation résulterait
néolibéralisme est devenu une foi car « Comme le
surtout de sa sacralisation de l'économie qui, placée
marxisme en d'autres temps, avec lequel, sous ce
au-dessus de tout, induit une vision particulière, le
rapport, elle a beaucoup de points communs, cette
fanatisme du marché, selon laquelle le libéralisme
utopie suscite une formidable croyance, la (ree trade
reste aujourd'hui la seule politique possible. En
faith (la foi dans le libre-échange), non seulement
effet, note Joseph Stiglitz, « Si l'attachement à une
chez ceux qui en vivent matériellement, comme les
idéologie particulière a privé les pays des choix qui
financiers, les patrons des grandes entreprises, etc.,
auraient dû être les leurs il a aussi puissamment
mais aussi chez ceux qui tirent leurs justifications
contribué"à leur échec (...). L'idéologie (la foi pure
d'exister, comme les hauts fonctionnaires et les
et simple dans le libre marché) offre un prisme à
politiciens, qui sacralisent le pouvoir des marchés
travers lequel voir le monde, un ensemble de
au nom de l'efficacité économique, qui exigent la
croyances auxquelles on tient si fermement qu'on
levée des barrières administratives ou politiques
n'en cherche pas de confirmation empirique. Les
capables de gêner les détenteurs de capitaux dans
preuves qui les contredisent sont sommairement
la recherche purement individuelle de la
récusées. Pour les fidèles du marché libre et sans
maximisation du profit individuel, institué en
entraves, la libéralisation des capitaux est
modèle de rationalité, qui veulent les banques
évidemment souhaitable. Ds n'ont pas besoin qu'on
centrales indépendantes, qui
prêchent la
leur prouve qu'elle stimule la croissance. Et si l'on
subordination des États nationaux aux exigences de
prouve qu'elle provoque l'instabilité, ils verront là
la liberté économique pour les maîtres de
simplement l'un des coûts de l'ajustement, l'une
l'économie, avec suppression de toutes les
des souffrances, qu'il faut subir pour passer à
réglementations sur tous les marchés à commencer
l'économie de marché. »'
par le marché du travail, l'interdiction des déficits
et de l'inflation, la privatisation généralisée des
Pierre Bourdieu voit dans le libéralisme l'exécution
services publics, la réduction des dépenses
d'un programme d'action politique tendant à
publiques et sociales. »3
détruire méthodiquement tout ce qui est collectif, à
savoir l'État, les associations, la famille, etc. En
Ce qui est inquiétant aujourd'hui et que Pierre
effet, selon lui, le libre-échangisme travaille sans
Bourdieu n'a eu de cesse de dénoncer, c'est
cesSe à faire sauter tous les obstacles à l'économie
l'engourdissement de la plupart des esprits par
de marché. Dans « L'essence du néolibéralisme »,
l'idéologie néolibérale. En effet, cette idéologie qui
il écrit: « Le discours néo libéral n'est pas un
a subjugué les intelligences au point de tuer toute
discours comme les autres. À la manière du discours
pensée critique, mobilise, investit les médias et
psychiatrique dans l'asile, selon Erving Goffinan,
l'université. Comme écritIgnacio Ramonet: «Nous
c'est un « discoursfort» qui n'est fort et si difficile
vivons une période excessivement réactionnaire.
à combattre que parce qu'il a pour lui toutes les
Une période où on aura vu, au cours des quinze
forces d'un monde de rapport de forces qu'il
dernières années, des dirigeants et des intellectuels
contribue à faire tel qu'il est, notamment en
socialistes abandonner tout espoir de transformer
orientant les choix économiques de ceux qui
le monde, et proposer, en guise d'avenir radieùx,
dominent les rapports et en ajoutant ainsi sa force,
une seule consigne puisée dans la terminologie
150
Revue du CAMES - Nouvelle Série B, Vol. 009 N° 2-2007 (2'm. Semestre)

7---------------------------
. "
Sciences. sociales et humaines
darwinienne chère aux ultra libéraux : « s'adapter »,
comme il est essentiel, à l'image de ce que fait
c'est-à-dire renoncer, abdiquer, se soumettre. »4
Joseph Stiglitz dans: Quand le capitalisme perd la
Nous vivons dans un monde où les pouvoirs de
têteS, de remettre en cause les mythes au fondement
l'argent, du savoir et de la force militaire sont
de cette idéologie. Cet ouvrage enseigne plusieurs
concentrés entre les mains d'une minorité. Or, la
choses:
mondialisation économique, censée assurer le salut
de l'humanité, en œuvrant à la libération, à
- la réduction du déficit - recommandation faite
l'épanouissement, au bien-être des gens, comme
par les institutions financières internationales aux
l'entendaient F. Bacon et R. Descartes au 17ème siècle
différents gouvernements -, ne relance pas
pour la science, s'est développée comme un
l'économie car la réduction des dépenses dans les
instrument d'oppression des pauvres aux mains des
secteurs sociaux mine l'économie par le fait que la
milieux d'affaires, des grands patrons. Il faudrait,
formation et la santé des populations ne sont plus
par conséquent, dépasser le type actuel de la
garanties,
mondialisation pour penser un autre ~odèle au
service de l'homme. D'où, le pressent besoin d'une
- l'instabilité, les conflits, les guerres, bien
coritre-idéologie à la mondialisation économique
souvent provoquées par la scandaleuse politique du
pour contrer l'idéologie du profit individuel au
marché libre - qui plus on licencie en masse, plus
fondement de la mondialisation libérale qui reste
la bourse se porte bien -, ont une conséquence
aujourd'hui, une des causes de l'accroissement de
négative sur l'économie du fait de la multiplicité
la pauvreté dans le monde.
des problèmes socio-politiques qui sapent.
l'économie,
III.
NECESSITE
D'UNE
CONTRE-
IDEOLOGIE
- l'État, n'est pas systématiquement mauvais
comme l'annoncent les libéraux qui se plaisent à le
Avec l'extension des inégalités entre humains et la
démanteler alors qu'il est indispensable à
persistance du chômage dans les pays développés
l'organisation de la production et à l'arbitrage des
comme dans ceux en développement, du fait des
litiges nés de l'activité économique.
ravages du « /ciller capitalism »5, le capitalisme
tueur, le besoin d'une contre-idéologie fondée sur
Or, sous l'effet du capitalisme, le rôle de l'État
le refus de la dictature des marchés, se fait se~tir
« fond comme neige au soleil» tandis que le marché
pour proposer un autre modèle de développement
dicte sa loi jour après jour. Le mode de production
centré sur l'homme. En effet, les révoltes urbaines
libéral retire progressivement aux citoyens toute
comme les manifestations citoyennes pour réclamer
capacité d'intervention dans la gestion des affaires
de meilleures conditions de vie, de par le monde
publiques qui les concerne'llt. Ce ne som pas
entier, sont t'explessioll d'un ardent désir~
~emeRtlesmtreprisesque l'on déloca1ise, ce sont
le cours actuel de la démocratie dirigée par les
aussi les centres de décision politique et économique
marchés financiers, les véritables maîtres du monde.
Comme affinne Marc Blondel, ex-secrétaire général
1 Joseph E. Stiglitz: La grantk désillusion, Paris, Fayard, 2002, p. 287.
du syndicat français Force Ouvrière, de nos jo~urs,
%Pierre Bourdieu: « L'essence du néolibéralisme », ln Le Monde diploma-
tique, mars 1998, p.3.
«Les pouvoirs publics ne sont, au mieux, qu'un
J Pierre Bourdieu: « L'essence du néolibéralisme », ln Le Monde diploma-
sous-traitant de l'entrepris~. Le marché gouverne.
tique, mars 1998, p.3.
• Ignacio Ramonet: Manière de voir 32, Scénarios de la mondialisalion, ln
Le gouvernement gère.»6 .
Le monde diplomatique, novembre 1996. p.6.
S L'expression est de l'hebdomadaire Nnvsweek du 26 février 1996 qui dé-
nonœ la douzaine de grands patrons argentiers Il)'lIIlt IiCUlCié lD1 nombre
Au fond, il ne suffit plus de dénoncer le capitalisme
consida'able d'cmployœ en dépit des ~ces faramineux réalisés par Icws
entreprises.
tueur, il faudrait, en outre, montrer en quoi le
• Ure Manière de voir 32, Scénarios de la mOtfdlolisation, ln Le Mande
diplomatique, oovembre 1996, p.6.
libéralisme non seulement oppresse l'homme7 , mais
7 Lire Ace propos Pierre Bourdieu: Contre-feux Propos pour servir à la
aussi et surtout pourquoi, il ne saurait être le stade
résistanœ contre l'invasion néo-libérale, Paris, Raisons d'agir, 1998. Lire
aussi Manière de voir 32, Scénarios de la mOtfdialisation, ln Le Monde
ultime de l'accomplissèment de l'homme.
diplomatique, novembre 1996 ct Manière de voir 41, Un autre monde est
L'absoluité du libéralisme doit être critiquée, tout
possible, ln Le Monde diplomatique, octobre 1998.
• Joseph E. Stiglitz : Quand le copitalisme perd la tète, Paris, Fayard, 2003.
Revue du CAMES - NouveUe Sfrie B, Vol. 009 N° 2-2007 (2'" SeDlestre)
151

Sciences sociales et humaines - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
qui sont de plus en plus hors d'atteinte de~ c~toyens.
d'exiger la transparence
des
institutions
Le développement fondé sur le marche hbre, se
économiques, financières internationales et
montre ainsi incapable de gérer les inégalités entre
d'obtenir qu'elles servent les intérêts des peuples
sexes, les intérêts entre groupes ethniques, etc.
et non ceux des milieux d'affaires car elles sont
publiques. L'élaboration d'une contre-id~ologie à
C'est pourquoi beaucoup de citoyens de nos jours,
la mondialisation libérale, envisageant l'Etat et les
à
voir
l'ampleur
des
manifestations
marchés
dans
un
véritable
rapport
de
altermondialistes lors des sommets de Davos et du
complémentarité, est impérieux. Le rôle central
G8 souhaiteraient qu'on rectifie le cours de la
mo~dialisation,
dévolu au marché, ne saurait remettre en cause
en retournant à plus d'humanité. Il
l'importante mission de l'État qui, non seulement
faut penser avec ces gens que la politique ~ ré~~nse
tempère les échecs du marché, mais aussi et surtout,
à tout alors même que le pouvoir, devenu mVlSlble
est incontournable dans l'approche des problèmes
et lointain, ne parvient plus à répondre aux
d'inégalité, de chômage, d'environnement, etc.
problèmes complexes de la société. Autrement dit,
ces hommes ressentent plus que jamais, comme un
À notre sens, ces questions ne peuvent être
rempart contre le libéralisme cruel, la nécessité
durablement résolues qu'avec l'implication de tous
d'une contre-idéologie démocratique, d'un contre-
les pays. C'est pourquoi la communauté mondiale
projet au modèle de l'économie de marché. Au fond,
doit peser de tout son poids pour humaniser la
dans le contexte de l'hégémonie du libéralisme sur
mondialisation qui n'épargne personne par ses effets
fo'nd d'une pensée unique, l'humanité éprouve le
pervers. Aussi, comme consécration du triomphe
besoin de philosophes, de poètes, de penseurs pour
mondial de l'économie de marché, la mondialisation
proposer un nouvel ordre pourvoyeur de bien-être
s'impose à tous; sa gestion devrait dès lors être une
pour tous et qui affranchisse du « Néo-libéralisme
affaire commune et non celle de quelques personnes.
utopie d'une exploitation sans limites. »9
Donc à moyen et long terme, une réorientation du
cours de la mondialisation s'impose pour donner
Il convient aujourd'hui de réinventer l'État pour lui
aux citoyens, aux pays souverains, le droit de
permettre de réguler la mondialisation et d'arbitrer
participer à la prise de décisions qui les affectent.
les litiges qui surgiraient. Cela passe d'abord par
défendre le rôle de l'État car il est évident qu'on ne
Seul un État mondial démocratique veillera à assurer
peut bâtir une société sur le principe du « tout
les intérêts de la communauté mondiale en aidant
privé ». Mais l'État sera une instance supranationale.
notamment à la promotion du commerce équitable
En étant à sa place, il pourra non seulement veiller
en tant que facteur de développement. Cela n'est
à un juste équilibre entre marché et société en
pas utopique, car comme le montre Joseph Stiglitz,
assurant l'égalité des chances, mais surtout donner
« Il n'y a pas qu'un seul modèle de marché. Des
la priorité à l'emploi et défendre la liberté ?es
différences fortes séparent la version japonaise de
peuples à disposer d'eux-mêmes. Réinventer l'Etat
l'économie de marché des versions allemande,
en le mondialisant exige de procéder à une
suédoise ou américaine. Plusieurs pays ont des
refondation de l'universel qui ne peut plus se réduire
revenus par tête comparables à celui des États-Unis,
aux valeurs de l'homme blanc occidental ou pour
mais avec moins de pauvreté et de meilleures
reprendre l'expression de Alain Badiou, « La
conditions de vie sur certains plans, dont la santé (à
dictature uniforme de ce que les occidentaux croient
en croire du moins leurs habitants). Si le marché
être la modernité. » Cela signifie que les rapports
est au centre des versions suédoise et américaine
de l'humanité entière devront se redéfinir à l'aune
du capitalisme, l'État y joue des rôles entièrement
de la démocratie moderne pour préserver l'équité,
différents. En Suède, il assume une responsabilité
le bien-être en donnant à chacun une chance de
bien supérieure dans la promotion du bien-être
réussir.
social, il offre toujours un bien meilleur système de
santé publique, une bien meilleure indemnisation
Le monde organisé en État se fixera pour but
du chômage et de bien meilleures retraites qu'aux
152
Revue du CAMES - Nouvelle Série B, Vol. 009 N° 2-2007 (2eme Semestre)

_ _ _"--
Sciences sociales et humaines
États-Unis. Pourtant, la Suède a aussi bien réussi,
de la société civile à travers le monde, peut
même dans les innovations liées à la « nouvelle
empêcher la riche minorité d'accaparer l'intérêt
économie. » »10 Voilà qui montre, si besoin est, que
commun en aidant à l'arrêt des souffrances générées
la logique du marché libre n'est pas forcément
par la mondialisation et éviter ainsi à l'humanité
contradictoire avec celle sociale et qu'on pourrait
d'être précipitée dans l'abîme.
bien imaginer un nouvel ordre mondial établissant
l'équilibre entre les plans économique et social.
CONCLUSION
Même s'il paraît difficile de revenir de nos jours
Il est à retenir que la philosophie ancienne grecque
sur la mondialisation en tant que réalité pour tous,
permet de penser la mondialisation car la réflexion
on pourrait lui faire prendre en compte les problèmes
présocratique de l'Un, du Multiple, de l'élément
humains, environnementaux et ne pas la confiner à
primordial duquel tout dérive et où tout retourne,
l'économique. Pour ce faire, il est urgent d'imaginer
conduit, d'une part, à penser le cosmos, le bel
un fonctionnement correct de la mondialisation afin
arrangement du monde comme unité de la diversité.
qu'elle profite aussi aux« mondialisés », les pauvres
C'est dire que les notions de l'Un et du Multiple
« figurants» pour reprendre les termes de Joseph
s'offrent comme outils grâce auxquels appréhender
Ki-Zerbo ll .
le processus actuel d'unification du monde, la
mondialisation. Celle-ci affieure, d'autre part, dans
La mondialisation peut être bénéfique pour tous, à
la notion stoïcienne du monde qui est régi par une
condition de mettre en place l'État mondial ou
loi universelle unissant à la fois les hommes, les
l'instance supranationale pour contrer l'absoluité
choses, les événements. C'est l'organisation du
du phénomène, fixer et faire respecter des règles
monde en cités, en régions indépendantes les unes
justes
et
démocratiques.
D'ailleurs,
la
des autres, qui est rejetée par les Stoïciens
mondialisation par l'intensification des échanges et
favorables, avec leurs aînés Sophistes, à l'idée d'une
l'interdépendance entre les pays, affirme le besoin
citoyenneté mondiale, d'un espace ouvert dans
d'une action, d'une structure commune, crédible et
lequel tous les hommes sans exception pourraient
démocratique pour la superviser. Donner un visage
vivre en paix et entreprendre en toute liberté leurs
plus humain à la mondialisation, à tort perçue
activités.
comme un phénomène exclusivement économique,
reste le défi contemporain à relever.
Ce qui n'était qu'une théorisation dans l'Antiquité,
est aujourd 'hui une réalité. La mondialisation est
Appréciant la mondialisation, Joseph Stiglitz dit que
devenue le maître-mot, le nouveau credo de
« Les pays pour lesquels elle a été le plus profitable
l'humanité par le fait de «la croissance continue du
ont été ceux qui ont compris le rôle que peut jouer
commerce international et son extension jusqu'aux
l'État dans le développement: ils ne s'en sont pas
limites du monde; (de) l'internationalisation de la
remis à l'idée d'un marché autorégulateur qui
production économique et sa délocalisation ; (des)
résoudrait seulles problèmes qu'il crée. »12 Il n'est
mutations qualitatives des technologies de la
donc pas superflu d'accorder une place stratégique
communication globale et instantanée dans un
à l'État mondial ou à l'instance supranationale qui
monde rendu presque virtuel. »13
aura la charge de surveiller la mondialisation,
Suite à l'échec du modèle communiste de
d'organiser la défense des intérêts de la communauté
mondiale, d'enrayer l'action destructrice des
9 \\bir Pierre Bourdieu: Contre-feux, Paris, Raisons d'agir, 1995, pp. 10S-119.
marchés financiers sur l'emploi et d'imposer
Hl Joseph E. Stiglitz : La grande désillusion, ~aris, Fayard, 2002. pp. 2S2-~S3.
" Ces expressions sont employées dans: A quand l'Afrique? Paris, Edi·
efficacement les grands profits réalisés sur les
tions de l'Aube/Éditions d'en bas, 2003 pp.21-22 pour marquer l'opposi-
marchés financiers, comme le demande le
tion entre les « mondialisés », les « figurants» appauvris par la mondialisa-
tion et les « mondialisateurs », les acteurs profitant de la mondialisation.
mouvement altermondialiste. À notre sens, seule
12 Joseph E. Stiglitz : La grande désillusion, Paris, Fayard, 2002, p. 317.
Il Djibril Samb : « Mondialisation et rencontre des cultures: le dialogue
l'instance supranationale vigilante, issue d'une
est-il possible? », In Mondialisation et rencontre des cultures: le dialogue
alliance mondiale des États-nations et des groupes
est-il possible ?, Actes du colloque du 21 juin 2002, Saint·Louis, 2002, pp.
20-21.
sr:
Revue du CAMES - Nouvelle Série B, Vol. 009 N° 2-2007 (2ime Semestre)
153

Sciences sociales et humaines - - - - - - - - - - - - - - - -
développement ayant entraîné « la chute du mm de
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Berlin », le libéralisme, plébiscité par cet
événement, est resté quasiment sans rival sérieux ;
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et a fini par s'imposer comme panacée au
Maspero.
développement. Une vision particulière, fondée sur
le respect des règles du marché libre, s'est constituée
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puis enracinée au point d'être une conviction
fragmenta. 2 Vol. Teubner.
infaillible. L'idéologie du profit véhiculée par le
libéralisme, revient à dire que le libre-échangisme
3. ARON, (R.), 1968. L'opinion des intellectuels.
reste
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Paris, Gallimard.
mondialisation économique, loin d'être porteuse
d.'avenir, est synonyme pour la majorité des
4. Badiou, (A.), 1997. Saint Paul Lafondation de
populations d'amplification des inégalités et de la
l'universalisme. Paris, PUF.
pauvreté ; elle finit même par retirer aux citoyens
la capacité à choisir leur modèle de société. Faut-il·
Os. BAYART, (J.F.), 1996. L'illusion identitaire.
alors l'abandonner?
Paris, Fayard.
À notre avis, ce n'est ni possible ni souhaitable car
6. BOA THIEMELE, (L. R.), 2003. L'ivoirité entre
on ne saurait, de nos jours, ni mener une vie
culture et politique. Paris: L'Harmattan.
autarcique ni tourner le dos aux bienfaits de la
mondialisation que sont les progrès en matière de
7. BOURDIEU, (P.), mars 1998. « L'essence du
santé, la dynamique société civile luttant pour plus
néolibéralisme ». In Le Monde diplomatique.
'de démocratie et de justice sociale, etc. Le vrai
Paris.
problème qui est posé, c'est la gestion
technocratique et idéologique de la mondialisation
8.
, 1998. Contre-feux Propos
par des institutions internationales (FMI, Banque
pour servir à la résistance contre l'invasion néo-
Mondiale, OMC, etc.) qui fixent des règles iniques
libérale. Paris, Raisons d'agir.
en faveur des intérêts privés des milieux d'affaires
au détriment de la majorité.
9. BRUN, (J.), 2003. Le stoïcisme. Paris, PUF/Que
sais-je? N° 770.
Pour un fonctionnement correct de la mondialisation
au service de tous, il y'a lieu de refonder la
10. CONDILLi\\C, 1746. Essai sur l'origine des
mondialisation pour lui faire intégrer les dimensions
connaissanœs humaines.
sociales, culturelles, environnementales au lieu de
la réduire à celle économique. C'est alors que
Il. - - - - - , 17S4. Traité des sensations.
l'édification de
l'instance supranationale, de l'État mondial,
12. DEFARGES, (p. M.), 2001. La mondialisation.
permettrait de veiller à son bon fonctionnement et
Paris, PUF/Que sais-je? N° 1687.
d'assurer là prise en compte de l'intérêt commun.
À cette conciition, la mondialisation favoriserait le
13. DIBI, (K. A.), 1994. L'Afrique et son autre: la
développement. Et on pourrait, en ce sens, se risquer
différence libérée. Abidjan, Strateca.
à la faire coïncider avec l'accomplissement achevé
de l'homme.
14. DIOUF, (M.), 2000. L'Afrique dans la
mondialisation. Paris, L'Harmattan.
154
Revue du CAMES - Nouvelle Série B, VoL 009 N° 2-2007 (2-· Semestre)

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Revue du CAMES - Nouvelle Série B, Vol. 009 N° 2-2007 (2ime Semestre)
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