_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ Sciences sociales et humaines
DYNAMIQUE DE L'INTEGRATION REGIONALE CEDEAO
EN AFRIQUE DE L'OUEST: HISTORIQUE, DIAGNOSTIC,
PERSPECTIVES
Edo KOlljo Maurille AGBOBLI
Université de Lomé

Faculté des Sciences Économiques et de Gestion (FASEG)
Lomé- Togo
RÉSUMÉ
Dans la recherche des solutions aux problèmes que pose la lutte contre le sous-développement en Afrique
depuis l'accession de la plupart des pays à l'indépendance en 1960, les économistes ont pensé que la
voie de la coopération régionale apparaissait comme la plus appropriée. La Commission Économique
des Nations Unies pour l'Afrique (CEA) et l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA) transformée en
Union Africaine (UA) à partir de l'an 2000 ont incité à cette approche que les instances dirigeantes
africaines ont adoptée.
Ainsi, l'Afrique de l'Ouest mettraen place plusieurs institutions de coopération régionale dont la plus avancée,
globale et complète est la Communauté Économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) qui
est censée amener à l'accélération du processus de développement à travers des politiques économiques
appropriées. Sa réussite servira d'exemples pour les entités similaires des autres régions africaines
dont l'agrégation devra à long terme conduire à la Communauté Économique Africaine (CEA) dont la
finalité est l'établissement d'un marché commun africain (MCA), étape ultime de l'Union Africaine
(UA).
Le présent travail de recherche, axé sous l'angle de l'histoire économique, vise à apprécier le chemin
parcouru par la CEDEAO à travers les politiques économiques menées depuis la naissance de l'institution, au
regard de l'intégration régionale età déterminer des perspectives nouvelles d'approches de solutions au phéoomènc
de sous développement face aux résultats décevants ou mitigés du Nouveau Partenariat pour le Développement
de l'Afrique (NEPAD) et de la politique de mondialisation et de globalisation.
r
ABSTRACf
ln the research ofsolutions to problems that pose the fight against under development in Africa since
most countries got their independence in 1960, economists have thought that the regional cooperation was the
most suitable to integration. The Economie Commission ofthe United-States (EC-USA) and the WestAfrican
Organization (WAO) changedAfrican Union (AU) from the year 2000, have given incentives to this approach
that the African govemments' communities have adopted.
Thus, the West Africa will set up many regional cooperative institutions but, the most advanced and
complete one is the Economie WestAfrican Community (ECOWAS) which has the duty to lead the aceeleration
ofdevelopment process through suitable economic politics. Its success will bc examples for communities ofthe
Revue du CAMES - Nouvelle Série B, Vol. 007 N° 2-2006 (2'- Semestre)
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Sciences sociales et 11111flllilles
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same kinds ofother Afiican regions that aggregation should lead at long mn to the Afiican Economie
Community (AEC), whose aim is the settlement of a Common African Market (CAM), the ultimate
stage ofthe Atiican Union (AU).
The actual research work, based on economic history, aims to appreciate the efforts made by
ECOWAS in the economic policy since the birth ofthe institution as regards regional integrntion and to
detennine approach perspectives on the phenorncnon ofunder development faced with mixed or deceiving
results ofthe New Partnership for Africa's Development (NEPAD) and ofthe globalization.
par le phéoomène de complémentarité et de subsidiarité,
1. INTRODUCTION
qui transfert aux compétences nationales ce qui n'est
pas du domaine de l'autorité supranationale.
La gestion des espaces géographiques
Aucune entité sociale ou corps social, évoluant
constitués répond de nos jours à des principes établis,
dans un espace en voie de globalisation, ne peut ignorer
recourt à des options ou modes de développement que
le bien-fondé, la signification, les attentes des politiques
proposent les décideurs politiques, utilise des
qui se définissent, qui s' établissent et qui orientent les
mécanismes adaptés au mode et à l'option choisie, suit
comportements humains. Aussi, lorsqu'on parlc des
des procédures établies aux fins d'atteindre les objectifs
politiques économiques au regard de l'intégration sous
déterminés pour les intérêts de la collectivité composée
régionale ou régionale africaine il s'opère ipso facto un
des entités sociales et des entités spatiales.
choix qui oriente les autorités sur la voie de
Les défis du monde contemporain ont imposé
développement à suivre en vue de gérer les espaces
aujourd'hui les voies à suivre dans le sens d'une
nationaux ou régionaux constitués ou en voie de
complémentarité, ont déflOi des règles de jeu et des
constitution.
critères pour l'organisation, la gestion, l'évaluation, le
Dans le cas spécifique de l'Afrique qui nous
contrôle de la gestion des économie~nationales, ont
préoccupe, le sujet demeure intéressant car il permet
favorisé une redéfinition de la politique des échanges
d'analyser les politiques économiques à mener dans un
internationaux, ont rendu l'espace économique
cadre déterminé pour résoudre le problème posé par
interdépendant à telle enseigne qu'il est impensable de
le sous-développement du continent. La CEDEAÜ se
parler d'économie fermée ou autarcique.
présente comme l'espace modèle qui pennet de mener
Le processus qui a conduit à cet état de fait est
la réflexion afin de comprendre la pertinence de l'idéal
historique, fruit de la conjonction d'événements
poursuivi ou de la vision de société que les autorités se
diversi fiés relevant de tous les domaines de la vie sociale
fixent
au titre desquels des faits économiques, sociaux,
Ainsi l'article dans une partie introductive
culturels, scientifiques, techniques. technologiques,
effectuera une revue de la littérature existante dans le
financiers, commerciaux,
anthropologiques,
domaine de l' intégrntion, déterminera la méthodologie
environnementaux, politiques, etc. (1 s'est inscrit dans
d'analyse utilisée, analysera les hypothèses de travail
une dynamique évolutive excluant toute possibilité
choisies et cernera dans toute sa dimension la
d'inversion, préjudiciable aux intérêts individuels,
signification du concept (Partie 1), fera le diagnostic de
collectifs sans lesquels aucune société viable ne peut se
l'intégration économique africaine vu sous l'angle sous
construire.
régionale et régionale (Partie Il) avant d'entrevoir les
Lorsque l'on analyse le contexte politique
perspectives nouvelles africaines au regard de
mondiaL l'on constate une distribution des cartes
l'intégration (Partie III).
découlant des rapports de forces existants, patiemment
établis pour la domination économique, la défense, la
1.1 Revue de la littérature
sauvegarde et la promotion des intérêts nationaux de la
part de dirigeants à esprit de conquérants, véritables
Les exemples de tentatives d'intégr;\\(ion
bâtisseurs. Il n'est donc pas étonnant que l'on puisse
économique ne sont pas légion dans l"i1Ïst,.ire
de nos jours s'interroger sur les politiques pratiquées
dans les.espaces géographiques qui sont déterminées
280
Revue du CAMES - Nouvelle Série B, Vol. 007 N° 2-2006 (2'nw Semestre)

_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ Sciences sociales et ilumaines
économique pour la simple raison que les espaces
commandé des études de recherches sur l'Afrique
géographiques en voie de constitution en États
considérée par les tests archéologiques comme le
souverains cherchaient l'affirmation dans leur identité.
berceau de l'humanité. En témoignent les vestiges
L'histoire politique a révélé certes la présence
artistiques livrés au public mondial par LEIRIS3 dont
d'entités spatiales à dimension très étendue mais celles-
son ouvrage: «l'Afrique noire -la création plastique ».
ci ne s'analysaient pas comme des espaces
Politiques, historiens, économistes, ethnologues,
géographiques intégrés, l'intégration supposant le
archéologues, chercheurs de tous bords et de tous
regroupement sur bases volontaristes et juridiques
espaces se sont investis sans compter pour retracer
d'espaces nationaux dont les frontières attestaient de
1'histoire africaine dans sa dimension humaine,
l'existence.
géographique, culturelle, organisationnelle pour prouver
L'histoire universelle fait remonter à une époque
l'antériorité de sa civilisation et expliquer les fondements
récente - celle de la révolution industrielle (époque
des théories sur l'évolution des espèces et l'origine
contemporaine) -l'apparition des tentatives d'espaces
surtout de l'espèce humaine.
économiques intégrés commc l'Union Latine (UL) de
En parcourant les divers ouvrages traitant de 1'histoire
la première moitié du 20em" siècle. La littérature
africaine, condensés dans la bibliographie sommaire de
occidentale n'abonde pas ou n'est pas riche dans ce
cette étude, l'on est frappé par la densité des
domaine pour la simple raison que la philosophie
informations qui permettent de comprendre les formes
politique de l'intégration économique n'est pas encorc
d'activités que l'Afrique a connues, les formes
aneréc dans les mœurs. Cc qui ne scra pas le cas à
d'organisations de sociétés humaines que le continent
partir de la seconde moitié du 20''''" siècle.
a engendrées et les extrapolations qu'on peut faire pour
L'Afrique ne dérogc pas à cette constatation
tracer les perspectives d'avenir d'un espace aussi
universclle et épouse autant que faire se peut les
stratégique, aussi riche en ressources ~ariées, aussi
mécanismes et modes d'actions opérationnelles mis en
diversifié dans sa structure environnementàIe.
Œuvre dans un contexte de rclatiuns économiques
A partir de ces données succinctes et parcellaires se
internationales établies. Cependant, les rechcrches
pose la recherche de la problématique des politiques
documentaires ont montré que des traces de pratiques
économiques africaines au regard de l'intégration sous
de politiqucs d'intégration africainc existaient, mises en
régionale ou régionale.
évidence sous la plume d'auteurs et chercheurs
1.2. Problématique de l'intégration sous
ressortissant de tous les espaces géographiques.
régionale et régionale africaine
En dehors des éléments bibliographiques qui
ont servi à la confection de cette étude succincte, l'on
L'intégration économique est devenue un
peut se rétërer à l'ouvrage documenté de KI-ZERBO
instrument de politique économique dans l'organisation,
sur \\' histoire de l'Afrique noire l qui a recensé des
la gestion, le dévcloppement des espaces
ensembles politiques supra tribaux filllctionnant comme
géographiques constitués dans un monde en perpétuelle
des cntités géographiques intégrées sous la direction
mutation où les autorités politiques et les décideurs
de conquérants comme Tchaka, Ousman Dan Fodio,
recherchent une position dominante de leur entité ou
FI Hadj Omar, Samori,le Mahdi et Ménélik d'Éthiopie.
simplement un droit de cité dans le concert des nations.
II en est de même des publications en quatre
Les divers problèmes que posent les espaces
tOll1es de .JULyè sur l'histoire des pcuples d'Afrique
économiques restrcints dans la mise en œuvre des
où J'auteur reconstitue toute la genèse politique africaine
politiques de développement, dans la mobilisation des
dans sa dynamique structurelle et surtout les fonnes de
ressources financières et matérielles aux fins de
sociétés qui se sont constituées dans le temps et dans
développement ont convaincu les spécialistes en
l'e space.
Les
grands
ensem bles
intégrés
sciences de développement qu'une efficacité de J'action
économiquement au marché mondialn'émergcront
de développement dépend de la dimension spatiale des
effectiwment que plus tard comme constaté par Ki-
entités géographiques qui participent à des ensembles
Zerbo.
intégrés.
l\\lcttant à contribution les institutions
Dans j'environnement économique mondial
internatioll:lics il vocation mond iale (Organisation des
actuel, il apparaît difficile pour des États à espace
\\!ations Unies) ~i vocation sectoriclle (Organisation dcs
économique restreint de pratiquer une politique de
\\!ations Unies pour l'Éducation. la Science ct la
développement efficient par suite des goulots
['ul turc), Ics instances dirigcilllleS de ces institutions ol1t
d'étranglements multiples dont l'exiguïté du marché, la
R~vlle du CAM ES - Nouvelle Série B, Vol. 007 N° 2·2006 (2'n.. Semestre)
281

faible rentabilité des unités productives agricoles,
industrielles, commerciales, artiSlUlales et autres. Aussi
la plupart des États s'investissent-ils dans la constitution
d'ensembles économiques viables en vue de réaliser
Quelles que soient les difficultés inhérentes à la
des économies d'échelle.
mise en œuvre de toute politique d'intégration au titre
La recherche des politiques économiques au
desquels: les difficultés structurelles, les difficultés
politiques, les difficultés économiques, les problèmes
regard de l'intégration sous régionale et régionale
afiicaine qui nous préoccupe touche à la problématique
sociaux, les différenciations dans le rythme de
développement, etc .. l'Afrique pour éviter sa
du développement africain. Il s'agit pour les autorités
marginalisation ne peut que s'inscrire dans la dynamique
nationales de répondre au questionnement suivant:
quelles politiques économiques pour quel
du développement par l'intégration selon une
méthodologie appropriée.
développement africain? Ainsi posée, la question
renvoie à la détermination du cadre opérationnel de la
politique à mener que les experts et spécialistes en
1.3. Méthodologie d'analyse
sciences de développement identifient à l'espace
géographique intégré.
La compréhension d'une politique économique
nécessite l'utilisation de multiples niveaux d'élaboration
L'intégration économique, pour les nations
de modèles identifiant les différentes catégories de
contemporaines, est devenue l'approche rationnelle de
variables concernées, les relations que ces dernières
gestion de l'économie en vue de mieux résoudre des
entretiennent entre elles ainsi que la fonction de
problèmes forts complexes liés aux besoins des
préférence du décideur public et les choix stratégiques.
collectivités, aux désirs des populations, aux sensibilités
L'application d'une politique économique dans
humaines et surtout aux défis technologiques actuels.
un cadre géol:,'faphique de développement sous régional
Diverses raisons militent en faveur de la pratique de la
ou régional intégré se fonde sur un contexte
politique d'intégration qu'ont précisé certains membres
méthodologique que AUBIN' situe à trois niveaux: la
de l'association internationale des étudiants en sciences
confection d'un modèle théorique définisSlUlt le critère
économiques et commerciales (AIESEC) lors du
de cohérence formelle à partir de la méthode déductive'
colloque sur la CEDEA04 organisé à Lomé en
l'élaboration du modèle économétrique qui quantifie J~
République Togolaise en 1979 sous les auspices du
modèle théorique précédent en utilisant un outil
Ministère de ['Économie et des Finances.
d'analyse inductive; la détermination du modèle de
Analysant les avantages d'une politique
politique économique qui, par combinaison des deux
d'intégration économique régionale, les membres de
approches antérieures, pratique une approche
l'association ont identifié cinq (5) éléments
déterministe.
complémentaires à savoir que l'intégration économique
permet:

de réaliser des économies d'échelle au
niveau des unités productives,

d'exploiter les complémentarités
naturelles c'est à dire tirer des avantages
de la situation géographique et de la
spécialisation,
•• de limiter la fuite des cerveaux en offrant
(Footnoles)
plus d'opportunités nouvelles
1 Kf-ZERGO Joseph, /. 'histoire de l'/(frique noire, Éditions H<tlicr
d'emplois dans un cadre élargi,
Paris. 1978
.
2, JULY W. Robert. /lis/oire des peuples d';1fr;que- Tomes 1 à 4 -.

de réduire la vulnérabilité externe en
Edilions Jlouveaux Ilorizons, New York, 1971
l
LEIRIS Michel cl Cie. L'Afrique noire - la création plo.\\'lique. Édilions
stabilisant le marché des exportations,
Gallimard. Paris. 1967.
4
AlESEe. Nécessifés économiques el politiques de la Ct-ïJéAO,

de réduire l'influence étrangère en
Publication du ministère de l'Economie ct des Finances. Lomé,
favorisant le renforcement de 1&
1979.
282
Revue du CAMES - Nouvelle Série B, Vol. 007 N° 2-2006 (2'·~ Semestre)

_ _ _ _ _ _~
~
~
Sciences sociales et humaines
La spécificité africaine de développement régional en cours ou perspective suit une méthodologie par
approche historique, déductive et inductive pour lui donner une grande chance de réussite. Que ce soit dans
l'espace continental de l'ex Organisation de l'Unité Africaine (OUA) ou des entités régionales constituées comme
la CEDEAO ou la South African Development Economie Community (SADEC), la prise en compte préalable de
l'expérience historique est indispensable pour situer le modèle à appliquer.
Toute politique économique rationnelle applicable à un espace régional intégré suit le modèle ci après des
étapes qui conduisent à toute modélisation:
LES ET APES DE LA MODELISATION
CONTEXTE DE LA POLITIQUE ECONOMIQUE
Hypothèses théoriques ...<ilI-------TI Remise en cause
l
des hypothèses
Spécification du modèle théorique
Erreur de spécification
J,. .
E
.
ct
r
"""'''''' "mo
œ"wm'q'"
Erreur d'identification
Test
",,:.::: ~
C"",,, "p,,,,,,,,l,, modO"
de politique économique
S"""iot",ml
Variantes
Variantes d'aléas politique économique
La méthodologie d'analyse adoptée permet aux décideurs de s'appesantir sur les hypothèses sous
jacentes il sa politique.
(Footnotcs)
AUBIN Chrislian ct Cir,;o Politique écol1oll1il/I/(!. Collection f)Ylla
1
'Slip-librairie. VllihcrL Pans. 2003.
Revue du CAMES - Nouvelle Série B. Vol. 007 N° 2.2006 (2"" Semestre)
283

_ _ _~
Sciel1ces sociales et "umailles
1.4. Hypothèses de travail
la Sénégambie, le Libéria et la Sierra Leone, les pays
de la Haute-Volta, de la Côte d'Ivoire, de la côte d'or
Pour la facilitation de la compréhension des expériences
et de la côte du Bénin; il en sera de même du Soudan
de politiques économiques pratiquées au regard de
central avec les ensembles du Cameroun, de l'Éthiopie
l'intégration africaine sous régionale et régionale, deux
et de la Somalie, des pays du nord du fleuve Zambèze
hypothèses peuvent être considérée: la première se
et du bassin zaïrois; cnfin les royaumes Bantous,
penche sur l'évolution de l'espace géographique africain
Zoulous s'organisent en de véritables entités spatiales
en l'absence de fait intégrateur, la deuxième étudie
que tentent de briser les conquérants Bœrs et
l'évolution du même espace géographique dans le
Britanniques.
contexte de l'intégration.
Ainsi sans que ses dirigeants aient recouru au principe
intégrationniste de gestion des espaces géographiques
1.4.1. Évolution économique africaine sans
constitués, l'Afrique a démontré sa vitalité économique
intégration
qu'essayeront dc conforter certaines tentatives
d'intégration
au
XIXèmc
siècle.
Si l'intégration peut constituer un cadre idéal
pour le développement économique des espaces
1.4.2. Évolution économique africaine sous
géographiques, qu'en serait-il en r absence de cette
intégration
éventualité. Telle est la première hypothèse que l'on
peut avancer s'agissant du contexte africain. Il se révèle
Les expériences antérieures de gestion des
à travers les travaux de Ki-Zerbo' qu'une bonne partie
espaces géographiques s'effectuaient par des dirigeants
de l'Afrique précoloniale a connu un certain
sans visions hégémoniques car les préoccupations
développement éronomique dans un environnement non
intégré.
d'alors se limitaient à la survie des populations, à la
Les grandcs civilisations africaines de la
sauvegarde de la reproduction humaine, à!'édification
préhistoire qui confirmèrent la thèse de l'Afrique,
des structures sociales. Avec l'ouverture progressive
berceau de l'humanité, ont laissé des traces d'activités
sur le monde extérieur, de nouveaux dirigeants africains
économiques par des objets divers dont les nouvelles
techniques de datation ont confirmé le génie créateur
émergèrent imbus d'idéal hégémonique qui animait tous
de l'espèce humaine de cette époque et la pertinence
les responsables politiques. L'activité économique se
de leur apport à l'évolution sociale ct à la civilisation de
met au service du pouvoir politique qui tente par tous
l'universel si chère à l'écrivain feu Senghor Léopold
Sédar.
les moyensd'affinner son autorité.
Lorsque l'on s'intéresse à l'Afrique noire
antique, l'Egypte ancienne étonne par ses pyramides,
De véritables conquérants et bâtisseurs d'empires ou
ses travaux agricoles, ses systèmes de tout-à-l'égout;
de royaumes mus par l'élan intégrateur et fédérateur
l'empire Koush et Méroé attire par les progrès dans
apparaissent et bouleversent le panorama géopolitique
les domaines de l'écriture, dcs arts
africain. La politique économique ne peut se concevoir
d des sciences les
sciences; les grands royaumes et empires variés du
pour eux sans un espace viable et ils font de l'espace
VIlbrn: au XIlème siècle comme l'empire du Ghana, de la
géographique régional intégré le cadre d'application de
Nubie, d'Aksoum, du Mali, de Gao, les États du Soudan
leur politique économique à base expansionniste et
central, les royaumes Yoruba et du Bénin, du Kongo et
dominatrice. Entrent dans cette catégorie d'espaces
du MOI;lOmotapa, l'empire Songhaï ont développé des
géographiques intégrés: l'empire Zoulou de Tchaka,
activités qui touchent les routes, les marchés et les
l'empire de Ousman Dan Fodio, l'empire d'El Hadj
transactions.
Omar Tall, l'empire de Samori Touré, l'empire d~
Toute une pléthore d'espaces géographiques
Madhi et l'empire de Ménélik II d'Ethiopie.
constitués entre le XYlème et le XIXème siècle ont amorcé
Ces conquérants connaissent l'importance des
un processus de développement endogène enraciné
richesses naturelles de leur espace, disposent d'une
dans les conditions environnementales qui suscitaient
abondante ressource humaine, maîtrisent les rudiments
admiration et intéIêt Il en est ainsi du Soudan occidental,
de techniques aratoires pour la promotion de
des royaumes côtiers, forestiers et intermédiaires de
l'agriculture, possèdent des compétences dans les
l'Ouest africain englobant le Sénégal et la Mauritanie,
travaux métallurgiques pouvant pennettre la fabrique
d'instruments de guerre pour les campagnes militaires
284
Revue du CAMES - Nouvelle Série B, Vol. 007 N° 2-2006 (2''''' Semestre)

- - -
~
Sciences sociales et humaines
destinées à asseoir les bases de leur pouvoir. Il n;est
varie donc selon les auteurs tant dans le temps, dans
donc pas étonnant que l'organisation de ces entités
l'espace.
rencontre une méfiance de la part des envahisseurs
extérieurs qui s'emploieront à détruire les structures
1.5.1. Approche définitionnelle différenciée
réelles d'État une fois qu'ils ont posé pied sur le
selon les auteurs
continent.
Avec l'invasion du continent africain par les
L'histoire de la pensée économique a analysé la poli tique
conquérants blancs mus par le désir de conquête,
économique pratiquée par les nations à travers les
l'instinct de domination, la recherche de débouchés, le
modes d'organisation économique adoptés et les
prosélytisme religieux commencent le déclin des empires
perceptions que chacun se faisaient des objectifs visés,
et royaumes autonomes constitués. la marche forcée
des effets attendus et des moyens à utiliser. Selon l'école
de l'Afrique vers l'intégration au marché mondial selon
de pensée dont on se réclame, le sens de la politique
tille politique et tille stratégie dont les dirigeants africains
économique varie.
ne seront plus les initiateurs mais plutôt les exécutants
Ainsi, l'école de pensée libérale ne l'admettait
passifs. L'époque contemporaine qui sera coloniale et
pas comme instrument à utiliser car contraire aux
émancipatrice des peuples opprimés ouvrira la voie à
principes qui gouvernent les fondements de cette pensée.
la pratique de la politique économique d'intégration au
Mais cela n'empêche pas que les décideurs politiques
niveau mondial, politique très dominatrice à laquelle
y recourent en cas de besoin pour faire 1àce aux
l'Afrique ne peut échapper.
difficultés économiques. L'école de pensée non libérale
Pour faire l'état des lieux et comprendre la
(dirigiste ou planifiée), quant à elle, en fait ladétenninante
pertinence des politiques économiques engendrées
clé de l'action économique d'un espace géographique.
dans des espaces géographiques constitués, il s'avère
Le contexte africain n'évolue pas en marge de
plus qu'impérieux de comprendre la signification
cette différenciation de perception mais tient compte
même des instruments util isés en cernant le sens et,
de sa spécificité pour favoriser des adaptations
pourquoi pas, la portée du concept de politique
nécessaires. A travers les positions des auteurs
économique.
respectifs, l'on peut constater la complexité du concept
qui cependant ne freine pas son emploi comme
instrument opératoire de gestion de l'espace
1.5. Signification du concept
géographique.
S'agissant de l'Afrique, lorsque l'on veut cemer
D'innombrables auteurs ont écrit sur le concept de
la notion, l'interrogation se porte sur le meilleur
politique économique qu'ils considèrent comme
instrument susceptible de faire sortir cet espace de son
l'instrument privilégié dont disposent les décideurs
état de sous-développement. La politique économique
politiques pour gérer un espace géographique dans
se présente alors comme un moyen expérimenté ayant
l'intérêtdes populations et de la collectivité. La politique
fait ses preuves car se fondant sur des principes, des
économique que l'on mène doit s'adapter aux
techniques et suivant des modalités de mises en œuvre
circonstances (dimension tempon:/le), aux espaces
propres.
(dimension spatiale), aux institutions (dimension
Selon BILLy2, la politique économique est une
structurelle) et aux désirs des bénéficiaires des actions
technique
récente
qui
met
l'accent
sur
(dimension hlUnaine).
l'interventionnisme de l'État. Elle a été pratiquée à
Le concept de politique économique ne s'est
l'époque antique dans l'empire athénien, dans l'empire
installé dans la pratique de gestion de la cité (espace
romain, par les États nations à l'ère mercantiliste. Elle
géographique des temps anciens) ou des États (espaces
peut s'appliquer tout aussi bicn dans l'environnement
géographique contemporain) que progressivement. Il
africain.
résulte d'un long et lent processus historique en
Dans la perception libérale de l'économie, son
s'adaptant aux conditions circonstancielles et se
utilisation vise à sauvegarder l'équilibre économique, à
renforçant au fur à mesure d'apparition des formes
imprimer une certaine tendance à la conjoncture, à
d'organisation des sociétés humaines. Il fut pratiqué
promouvoir la croissance et à atteindre certains objectifs
d'une certaine façon dans les structures de l'État
sociaux. La politique économique dans l'État libéral
esclavagiste, de l'État féodal, de l' l~tat mercantiliste,
s'apparente à de l'interventionnisme économique mis
de l'État libéral, de l'État démocratique. Sa perception
en œuvre dans le cadre de budgets économiques annuels
Revue du CAMES Nouvelle Série D, Vol. 007 N° 2-2006 (2">< Semestre)
285

Sciellces sociales el "limailles
-------------------.,--
ou de plans à moyen terme lorsque le choix du mode
connaissance des réalités de l'espace dans lequel elle
de développement est le développement planifié.
doit ou veut s'appliquer.
Toute politique économique se fonde sur une
L'histoire économique regorge d'exemples
doctrine, fixe des objectifs, utilise des instruments
d'échecs de politique économique que les décideurs
diversifiés et fait l'objet de stratégies soit nationales ou
ont voulu appliquer en méconnaissance des réalités
mondiales comme cela transparaît dans les ouvrages
locales, de l'analyse des faits historiques concernant
des penseurs de l'école classique libérale, de l'école
les attitudes et les sensibilités, les aptitudes et capacités,
classique réformiste et socialiste, de l'école classique
les prédispositions ct le niveau d'émancipation
marginalistes ou néoclassique, de l'école historique
intellectuelle et culturelle des populations; de même
allemande, de l'école keynésienne.
d'autres échecs intervielment en ignorance des formes
Pour des chercheurs comme KPETIGOJ , deux
d'activités créées par les communautés et susceptibles
types de courants peuvent être ciblés: la conception
d'évoluer sans subir de mutations révolutionnaires ou
anglo-saxonne et la conception exhaustive de G. Myrdal
simplement des transpositions d'activités inadaptées et .
et F. Perroux.
inadaptables.
La conception anglo-saxonne considère
Une politique économique appliquée dans
l'intégration comme une absence Ol! une élimination
l'espace Nord américain peut ne pas convenir à l'espace
progressive des discriminations dans les rapports
Européen, encore moins aux espaces asiatique, africain
économiques entre différents pays. Elle a une base
et océanique (australien) du fait des différenciations
idéologie néo-libérale.
ayant trait aux particularismes géographiques, aux
Pour Myrdal et Perroux, le terme d'intégration
particularismes sociologiques (mentalités. us et
se définit en tenant compte du changement social, d'une
coutumes), aux données historiques, aux spécificités
norme et des moyens. L'intégration implique alors un
économiques et aux conditions sociales.
accord sur les fins ct devient un processus dynamique
Comme on le voit, l'intégration s'apprécie
associant moyens, normes et fins. Elle implique la prise
différemment selon les auteurs, selon les espaces et les
en compte dcs conditions environnementales.
modes d'action économique que le diagnostic de sa
mise en œuvre dans l'espace africain devrait faire
1.5.2. Mise en œuvre différenciée selon les
ressortir.
espaces
II. DIAGNOSTIC DE L'INTEGRATION
La perception diversifiée des auteurs sur la définition
de la politique économique découle du fait que celle-ci
REGIONALE AFRICAINE
s'applique dans des espaces géographiques différents,
dépend de l'option économique que les dirigeants
L'on peut faire remonter à une origine très
adoptent à savoir le mode libéral oule mode planifié
lointaine le phénomène d'une intégration économique
de gestion de l'économie. En fait les définitions tiennent
en nous référant aux hypothèses de travail émises plus
compte du degré d'intervention des structures
haut. Inconsciemment ou consciemment la philosophie
économiques.
intégratiOimiste restait une hantise des dirigeants quel
L'espace géographique est le cadre idéal pour
que soit l'espace géographiq ue considéré.
mener ûne politique économique. Ce cadre comporte
Les continents comme l'Asie ancienne, l'Europe
des réalités qui sont historiques, cultuelles, économiques,
antique, l'Amérique du nouveau monde ont tous été
démographiques,
sociologiques,
sociales,
marqués par la recherche d'un espace économique.vital
environnementales, psychologiques. qu'il est difficile
pour les populations. Si ce ne sont pas des Etats
d'ignorer si l'on doit organiser la gestion de laeité ou
continents qui ont été édifiés par les conquérants
de la nation. Ainsi, la connaissance des contours du
dominateurs, ce sont des Économies mondes qui ont
concept de poiitique économique va de paire avec la
succédé à ces derniers sous l'impulsion des mêmes
bâtisseurs d' empires.
(Footuotcs)
La révolution industrielle qui s'opéra à partir du
1 KI-ZERIJO. op. cil.. pp. 726-727
milieu du l8éme siècle a renforcé la perception
~ rHLLY Jacques, La politi'lue (:conomiqJlc, Pn:sses universitaires de
Franc~, Paris. 1957. p. 5:'16.
.
d'intégration des espaces géographiques constitués
, KPETIGO Elias. lIll C'Xemple d'application de la th~or;c d'inll:gratlOl1
pour mieux tirer profit des effets de la révolution
"
UI1 espace régional; la CEDEAO - Colloque de la CEDEAü .'.
PHblicalion du J\\1EF. op. dl.
scientifique et technique, du progrès intellectuel induit
. 286
Revue du CAMES - Nouvelle Série B, Vol. 007 N° 2-2006 (2'"'' Semestre)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
Sciences sociales et i1umaines
par la conception humaniste nouvelle qui fait de la liberté
Cette philosophie politique scelle le destin dc
individuelle le socle de la créativité. de la productivité,
plusieurs entités spatiales qui, avant la révolution
de l'essor économique et des mutations sociales.
industrielle, suivaient leur propre voie de développement
Les découvertes scientifiques et techniques de
dans une relative autonomie. Le développement du
l'époque industrielle, les bouleversements du paysage
capitalisme amena à la recherche de débouchés et
social consécutifs à la révolution politique ont crée un
d'espace vital pour les économies industrielles qui
envirOlmement propice à l'ouverture des frontières, à
recoururent au colonialisme, instrument de
la diffusion des fruits du progrès technologique dans
l'impérialisme, pour faire passer sous le joug de la
tous les secteurs d' activi té. L'espace africain ne peut
dépendance beaucoup d'espaces géographiques
s'exclure de cette dynamique nouvelle de l'ère
constitués en entités spatiales souveraines (États).
industrielle que d'éminents penseurs ont conforté par
L'Afrique payera un lourd tribut pour cette politique
leurs écrits.
qui disloqua les royaumes et empires existants. freina
L'intégration régionale ou sous régionale
le processus endogène de développement et entraîna
économique de r espace géographique africain est une
la dégradation des conditions sociales.
conditionnalité de réussite du développement
L'orientation économique se fonda alors sur
économique et social conformément à la nouvelle donne
l'extraversion, voulue et entretenue par les puissances
de la politique des relations économiques
coloniales. Les nations conquérantes mirent en place
intemationales.
des ensembles régionaux qu'elles animent sous forme
Quel type de politiques économiques l'entité
d'empires tant en Afrique anglophone que francophone.
spatiale africaine a-t-elle mené ou doit mener pour
L'essentiel est de sauvegarder le caractère
promouvoir son développement et l'érxlllouissement des
extraverti de ces ensembles que VANHAEVERBEKE1
populations qui y vivent ? Ces politiques ressortent des
considéra comme des structures spécialisées
expériences qui toutes restent dominées par la recherche
d'exploitation des peuples.
d'une celtaine intégration qui renforce les structures,
Pour AMIN1, les structures façonnées autour de
rentabilise les activités et libère lesénerbries intellectuelles.
cette spécialisation, qlÙ ne correspondent nullement aux
L'Afrique fourmille d'exemples éloquents en ce
vocations naturelles des pays, mais aux intérêts de la
domaine qui méritent qu'on s'y intéresse, qu'on le
métropole, sont à l'origine des blocages actuels et des
révèle au plus g;'and nombre d'individus afin que cela
distorsions sociales qui handicapent le développement
puisse servir de référence pour les adions futures.
africain.
Le diagnostic qui sera mené s'intéressera
Il se trouve ainsi révélée au grand jour la nature
d'abord aux formes de politique économique
du phénomène colonial que certains auteurs et hommes
d'intégration africaine menées mais orientées vers
politiques se sont évertués à présenter comme une sorte
l' extraversion ~ ensuite, il s'appesantira sur les mêmes
de fatalité historique sans doute pour faire accepter les
politiques recherchées sous l'angle de l' introvcrsion ~
entreprises coloniales par l'opinion publique. Or, en fait
enfin, il s'attachera à l'analyse du contenu de la pol itique
GONIDECJ considère la colonisation comme « le
d'intébJTation régionale en cours.
produit original de l'Europe» parvenue à un certain
stade de son développement, celui du capitalisme. La
2.1. Extraversion de la politique héeonomique
bourgeoisie européenne, « sous peine de mort, force
dllns le eadre de l'intégration afl"Ïeainc coloniale
toutes les nations à adopter le mode bourgeois de
production, elle les force à introduire chez elles la
Avec l'époque industrielle (I750jusqu'à nosjours) qui
prétendue civilisation, c' est-à- dire à devenir
commençasa dynamique avec la révolution industrielle.
bourgeoises. En un mot, elle se façonne un mondc à
s'amorça une nouvelle vision des relations économiques
son Image ».
internationales qui sépare le centre (pays industriels) et
La situation économique africaine actuelle est la
la périphérie (pays agricoles) par une stratégie fondée
résultante de la politique coloniale et ne peut être
sur la spécialisation. L'intégration de l'économic
appréhendée sans la compréhension de la philosophie
mondiale devint une préoccupation des dirigeants des
sous-jacente de la colonisation et la saisinc dcs
nations conquérantes en vue d'asseoir leur hégémonie,
domaines qu'elle aCOliverts durant le temps de sa mise
assurer lm développement économique et social durable
en oeuvre.
à leur nation, contrôler les ressources stratégiques
mondiales.
\\Revue du CAM ES - Nouvelle Série B, Vol. 007 N° 2-2006 (2'm, Semestre)
287

Sciences sociales et humaines
-------------------------
2.1.1 La philosophie politique coloniale
d'établissement. L'empire britannique a regroupé en
son sein toutes les possessions britanniques en Afrique
Des auteurs comme GONIDEC4 ont analysé
sur base individuelle ou de regroupements; l'empire
l'essence du phénomène colonial en expliquant que les
français a mis en place les entités politiques régionales
motifs qui sont à la base de l'expansion coloniale sont
comme l'Afrique occidentale et l'Afrique équatoriale
la domination sous forme juridique, économique,
françaises dans le but de s'assurer des débouchés pour
sociale, culturelle, religieuse, scientifique, technologique,
les échanges, de constituer un réservoir de main d' œuvre
etc., le désir de puissance et de conquête. Le
et de maintenir une position de puissance à l'échelon
phénomène colonial est un phénomène global de
mondial.
domination dont tous les aspects sont solidaires et
Cette extraversion économique se préoccupait
complémentaires c'est à dire non dissociables car
des domaines stratégiques d'intérêt majeurs pour les
vouloir dissocier l'aspect juridique et l'isoler, c'est ne
puissances coloniales.
révéler qu'un aspect de la réalité, infiniment plus riche
ct plus complexe.
2.1.2 Les domaines coloniaux de prédilection
L'Organisation de l'Unité Africaine (OUA)5 a
en son temps, au moment où l'on définissait la politique
Dans sa politique de domination et d'exploitation
du Nouvel Ordre Économique International (NOEI),
coloniale, le colonisateur qui a opté pour la constitution
précisé à la 7':onc session spéciale de l'Assemblée
d'espaces économiques viables a également déterminé
Générale des Nations Unies en 1975 que l'insertion de
les domaines dans lesq uels il peut opérer en s'assurer
l'Afrique dans le giron du capitalisme mondial, qui
une réelle rentabilité capitaliste.
recourt à l'impérialisme pour parvenir à ses fins et le
Une extraversion économique se fonde sur les
contrôle du commerce mondial par des mécanismes et
besoins de la métropole à satisfaire par des produits
procédures à caractères léonins définis au profit des
inexistants sur le marché métropolitain et sur tme volonté
pays du centre explique à bien des égards l'état de
politique de faire de la colonie un appendice
réb'fession économique africaine.
économique ou un arrière pays d'expansion.
Par les ensembles géographiques crées
KI-ZERBO comme AMIN ont su dans leurs
politiquement, la colonisation s'ouvrc à une formc
publications respectives variées recenser les domaines
d'intégration économique extravertie au profit de la
économiques d'interventions coloniales dans l'intérêt
métropole. MENSAH6, explique la légitimation du
exclusif des espaces métropolitains. La spécialisation
pacte colonial par les principales caractéristiques
internationale qui fonde l' impériali sme et le
suivantes:
développement du capitalisme mondial identifie deux
catégories d'entités spatiales: celles du centre qui sont

La réservation du marché colonial aux
industriels; celle de la périphérie qui sont agricoles.
produits de la métropole,
Lajustification de cette distinction peut se trouver

L'exploitation des produits coloniaux
dans le fait que la transformation industrielle crée plus
exclusivement à destination de la
de valeur ajoutée alors que l'échange à l'état naturel
métropole,
des productions limite la valeur ajutée. Ainsi,

Le monopole des transports entre la
délibérément l'intégration économique coloniale de
métropole et les colonies et entre les
l'espace africain s'intéressera à la mise en valeur
colonies et la métropole réservé à la
économique extravertie dont les domaines privilégiés
seule marine métropolitaine,
seront l'économie agricole alimentaire, l'économie de

L'accueil privilégié accordé aux
plantation de rente et l'économie minière.
denrées des colonies dans la
métropole.
(foo/notes)
Pour mener à bien l'intégration économique régionale
, VANIIAEVERI3EKE André, Rémunération Iravail el commerce
coloniale africaine, le colonisateur utilise des modes
extérieur. Universilé de Luuvain, 1970.
'AMIN Samir, up. eit., p. 23.' GONIDEC P.-F., L 'État ,,(ricain.
d'établissement de la domination tels que l'annexion
Librairie générale de droil cl de jurisprudence. Pari,. 1970. ppA3-
SOUS forme violente ou pacifique, le protectorat obtenu
44.
.
' GONIDEC, op. cit.. pp. 4& à 52
par voie négociée, le mandat et 1a tuteII e confiles par
, OUA, L'Afrique el le nouvel ordre économique internalional.
une autorité supranationale.
Publicalion du secrélorial général de l'OUA, Addis Abeba. 1975.
" MENSAH Adjévi et Cie, Poids de la CEDAEO in colloque
Dans tous les cas, l'Afrique anglophone comme
CEDEAO, op. cil.
francophone ont connu ces variantes de modes
) KPETIGO, Eiias, op. cit.
2RR
Revue du CAM ES - Nouvelle Série B, Vol. 007 N° 2-2006 (2'"'' Semestre)

----~----------------------
_ _ Sciences sociales et humaines
Vont se développer en Afrique, quels que ~oient
les énergies, et en velléités de contrôler les immenses
les espaces considérés, l'économie de plantations pour
ressources arncaines encore inexploitées.
l'arachide, les palmistes; l'économie de rente, pour les
Les travaux de recherches des experts de l'OUA
produits tels que le café, le cacao. le thé, le coton;
et la CEDEAO ont abouti à la constatation amère qui
l'économie minière pour l'exploitation du fer, du cuivre,
se récapitule dans :
de la bauxite, des phosphates, du charbon, etc. Ces
domaines ne connaîtront aucun degré d'industrialisation

l'absence de productivité agricole
car les produits concernés sont à exporter à l'état brut
devant constituer le moteur de
vers des usines de transformation situées en métropole.
l'industrialisation,
La politique d'intégration économique extravertie

l'i nexistence
d'un
début
explique le blocage du développement africain qui se
d'industrialisation du fait de la faible
traduit parla une performance limitée des agrégats
contribution de celle-ci au produit
économiques, un faible développement des ressources
intérieur brut national ou régional,
humaines, une absence de complémentarité des unités

la faiblesse de la participation aux
de production, l'ampleur du sous emploi de la main
échanges intra africains et mondiaux,
d'œuvre et la rareté des investissements productifs.

la baisse constante de l'aide au
développement que ne compensent pas
2.1.3 Les résultats de l'intégration
les ressources nationales faute
économique extravertie africaine
d'activités productives locales,

L'accumulation tendancielle de déficit
Des siècles ou des décennies de colonisation pour la
commercial ayant pour conséquence
plupart des pays africains devraient montrer une
l'insuffisance
des
ressources
évolution satisfaisante des entités spatiales à travers
disponibles aux [ms développements.
l'appréciation de divers indicateurs socio économiques

L'évolution défavorable des termes de
couramment admis pour l'évaluation des performances.
l'échange au niveau mondial.
Ces indicateurs concernent tous les domaines ou
Les données de statistiques économiques fournies
secteurs d'activités de façon à prendre en compte tant
par KPETIGOJ se présentent comme suit au niveàu
les aspects quantitatifs que qualitatifs de l'entité
de l'évolution séculaire des termes de l'échange
observée.
africain dans ses rapports avec la première puissance
Si la colonisation avait pour but une mission ou
mondiale de l'époque
une œuvre civilisatrice, les régions colonisées
connaîtraient un progrès économique et social certains
les rapprochant peu ou prou du niveau des nations
colonisatrices dans les domaines de la production
agricole, industrielle, artisanale, commerciale et des
échanges; de la maîtrise du savoir et l'outil technique
et technologique; dans l'édification des infrastructures
de bases du développement comme les transports
terrestres, maritimes et fluviaux, dans les transmissions
par les postes et les télécommunications; dans
l'excellence de J'éducation et de l'instruction.
Malheureusement, à part de rares exceptions
volontairement entretenues par suite de la tendance à
la pratique de la politique l'assimilation ou
d'association, le bilan global reste décevant car
l'impérialisme n'a pas pour vocation de développer les
colonies ni d'amener au progrès les populations
concernées; au plus leur fournit-on le minimum pour
leur survie, leurreproduction. L'héritage s'analyse non
seulement en spoliation économique mais aussi en
tentatives d'organiser des guerres civiles qui, polarisent
Revue du CAM ES - Nouvelle Série B, Vol. 007 N° 2-2006 (2''''' Semestre)
289

Sciences sociales et humaines
- - - - - - - - - - - - -
Période
Rapport Prix des Matièresl
Rapport Prix des
Prix des biens manufacturés
Importationsl Prix
dans le commerce mondial
des exportations pour
la Grande Bretagne
1875 - 80
147
163
1881 - 85
145
167
1926 - 30
118
120
1931 - 35
93
101
Cette évolution prouve le phénomène de la dégradation
extractives, l'état déplorable de l'infrastructure de base
constante des termes de l'échange, la spécialisation
du développement qui hypothèque les activités
impérialiste ou le confinement des pays à l'échelon
économiques, la détérioration grave de la balance des
mondial en zones (espaces géographiq ues) agricoles
payements de la région.
et en zones (espaces géographiques) industrielles, la
L'on se demande si cette évolution décevante
tendance à l'inflation occasionnée par la hausse
constatée se poursuivra au cours de la période
pem1anente des prix des produits industriels et la baisse
d'introversion de la politique économique africaine
structurelle des prix de produits primaires.
intégrée de l'époque post coloniale
La faible performance constatée de l'Afrique coloniale
intégrée trouve également sa justification dans la
2.2 Recherche de l'introversion de la
croissance limitée du produit intérieur brut dont le taux
politique économique dans le cadre de
excède rarement 2%, dans lanon maîtrise de l'inflation
l'intégration africaine post-coloniale
qui beaucoup plus importée souvent est supérieure à
2%, une réduction drastique des investissements dont
La période coloniale africaine se termina durant
le taux moyen au prorata du PIB atteint rarement 10%,
la seconde moitié du 20c"" siècle avec l'accession à
et un coefficient de capital insignifiant (taux
l'indépendance de la plupart des colonies à l'issue de
d'investissement/taux de croissance réel) de l'ordre de
luttes de libération nationale ou d'ententes négociées
3. Noircira encore plus le bilan l'absence de formation
de façon àfaire l'économie des guerres d'indépendance
des compétences qui conditionnent tout développement.
dommageables aux protagonistes. L'euphorie des
Les différentes assises de la Commission
indépendances ne fait que masquer la réalité des
Économique des Nations Unies pour l'Afrique (CEA)
problèmes qui persistent en s'aggravant.
. et celles de l'OUAi, tenues depuis leur création au cours
Les dirigeants africains se virent obliger de
de la première décennie des Nations Unies pour le
chercher des approches dc solutions sans s'en
développement (1960-69) ont attiré l'attention des
réferer àl'ancienne puissance coloniale qui se
instances onusiennes sur la persistance de la
désintéresse de leurs préoccupations, n'ayant plus
détérioration économique africaine dont les causes
d'intérêts stratégiques à défendre même si elle met
remontent très loin dans l'histoire coloniale. Elles ont
progressivement en place une nouvelle stratégie de
identifié les causes qui gênent le redressement du
domination fondée sur une approche néocoloniale qui
continent, de même que les symptômes que ces causes
s'effectuera par la voie de la coopération.
ont engendrés.
Les indicateurs économiques qui ont été ciblés
Le développement africain par la politique
concernent pour la plupart: la baisse du taux de la
économique d'intégration coloniale n'ayant pas réussi,
production régionale, la diminution du taux global
les décideurs politiques africains se sont orientés vers
d'investissements consécutif à l'inexistence d'un taux
l'introversion de cette politique en comptant sur les
d'épargne conséquent (moins de 10% en moyenne par
capacités productives propres nationales et régionales.
an), la baisse de la production agricole dont. la
Ils choisiront la voie de développement économique
conséquence est de gêner l' autosufli sance alimentaIre,
par la coopération sectorielle ou régionale.
la contraction des cours des principales productions
1290
Revue du CAMES - Nouvelle Série B, Vol. 007 N° 2-2006 (2'"'' Semestre)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
Sciences sociales et humaines
2.2.1 La mise en œuvre de la coopération
dénomination ou étendu leur champ d'actions. La
sectorielle
diversité des domaines de développement de nos jours
a fait augmenter de moitié les secteurs de ce répertoire.
Avec la fin de la deuxième guerre mondiale, l'apparition
Ce qui frappe dans la consultation du répertoire
des guerres localisées dans les régions sensibles du
est la di versité des domaines d'intérêts, la précision des
monde, l'accession à la souveraineté internationale des
missions confiées à ces organismes, la détermination
nations auparavant colonisées, la dislocation des
des finalités attendues de leurs actions. Les
empires et la naissance d'États libres en Europe, une
préoccupations des initiateurs sont de fonder la
nouvelle philosophie d'approche des relations
résolution des problèmes africains sur la connaissance
internationales se fait jour où la coopération se présente
des secteurs d'activités où l'action communautaire
comme une stratégie souple d'établissement de relations
garantit le succès et la pérennité de l'œuvre. Dans le
entre les nations.
cadre de la CEDEAO, les priorités et stratégies de
L'Afrique qui a expérimenté les éléments de la
développement arrêtées et regroupées par UBOGU4,
politique économique dans un espace géographique
mettent aussi l'accent sur l'importance de la prise en
d' intéb'Tation coloniale a, après les indépendances, dans
compte de la dynamique sectorielle comme l'un des
un premier temps, opté pour une stratégie nationale de
moyens efflcaces de promotion des économies
promotion économique et sociale. [Ile a été appuyée
nationales.
en cela par les ex-puissances colonialcsqui appliquaient
De même, le secteur clé développement ciblé par
le principe de la division pour le règne en agissant sur
ORIMALADEs est le commerce et les échanges qui
les fibres nationalistes des dirigeants africains. L'échec
doivent faire objet d'intégration sectorielle. Les
de la première stratégie décennale des Nations Unies
bienfaits de cette intéb'Tation commerciale qui
pour le développement (1960-1969) leur a ouvert les
développe les échanges, améliore la balance
yeux face àl'amplification de la régression économique
commerciale, assure la promotion des produits
héritée de l'époque coloniale.
locaux, favorise les économies d'échelle, conditionne
L'exiguïté des espaces nationaux ne favorisant
la libre circulation des biens et services, ont été
une véritable politique de développement. certains
analysés dans tous leurs aspects par les économistes
dirigeants ont cOlnmencé par s'interroger sur l'efficacité
de l'association des économistes ouest africains.
des regroupements économiques. C' est dans ce cadre
2.2.2 L'avènement des institutions à vocation sous
qu'il faut situer l'initiative spéciale du système des
régionale et régionale
Nations Unies pour l'Afrique de BOUTROS-GHALF,
alors Secrétaire général de l'ONU. qui a pour but de
La seconde moitié du XXèrne siècle a fait changer
renforcer le Nouvel Ordre des Nations Unies pour le
de philosophie d'approche du développement à la
Développement de l'Afrique et le Plan d'Action du
plupart des responsables politiques qui constatent que
Système des Nations Unies pour la Reprise et le
seuls les grands espaces géographiques constitués
Développement de l'Afrique.
arrivent à répondre de façon efficiente aux défis du
L'appui au développement africain par la voie
développement.
de l'intégration sectorielle ou régionale est devenu une
Il est devenu une réalité que les espaces restreints
priorité afin d'accélérer le processus de relance
sont confrontés aux problèmes de rentabilité des unités
économique globale. Des initiatives nationales
de productions, de dimension insuffisante du marché
conduiront au lancement de plusieurs actions de
coopération sectorielle qui touchent plusieurs domaines
notanmlent l'agriculture, l'éducation. la fomlation et la
(Footnotes)
recherche, l'industrie, la monnaie et les banques. les
1 COlllmission Économique des nations Unies pOUf l'Afrique.
ressources naturelles, la santé, le tourisme, les transports
Recommnnd<ltions de la XX!""'" session de la conférence des Chefs
d'Élat el de gouvernemeot. Addis Abeba. 1985.
et communication, et autres domaines confinés à un seul
, nOUTROS-GI-IALI. Initiative spéciale du syslème de.'i Nalions Unies
secteur, etc.
pOlir (·/~rriqlfe. Publication$ de l'ONU. Washington. sd.
l
CEA. Réperloire des organisa/ions intergouvernemenlales de
La Commission Économique des Nations Unies
coopéralion et1 .-Urique, Puhlicatiol1 des Nntions Unics - CFA, Addis
pour l'Afrique (CEAr a dans un répertoire publié en
Abcba. 1976.
~ UUOGlJ & Cie, De ...elopmenl planninK in III(! economic communi,)'
1975 recensé une centaine d'organisations
of we.'il african slales. Publication West nfricnll
multinationale n'intéressant qu'lm seul secteur. Avec le
ecollomic association. Ihnndnn, 1983.
, ORIMALADE. Adcyinka & Cie. n-ade and dl!velopmenl i" economic
temps, certaines ont disparu, d'autres ont changé de
commllnily of /J'esl African slales, New Delhi. 1984.
Revue du CAM ES - Nouvelle Série n, Vol. 007 N° 2-2006 (2'"~ Semestre)
291

de consommateurs, de désintérêt des investisseurs
financiers et de déficience du capital technologique.
La recherche de l'union régionale ou sous
régionale d'espaces nationaux restreints est devenue
une évidence ou à tout le moins une réalité à laquelle
s'est convertie la majorité des autorités chargées des
politiques.
Aussi, au cours de la décennie 1970, suite à
l'échec de la première stratégie onusienne pour le
développement, l'OUA décida-t-elle de recourir à la
coopération régionale pour promouvoir le
développement économique et social national et
régional. La CEA se faisait l'écho de cette nouvelle
approche en mettant sur pied une équipe d'experts
devant proposer le plan d'action à suivre, la stratégie à
appliquer
et
les
moyens
à
mobiliser.
Le partenariat à établir n'excluait aucun secteur
et se préoccupait même du secteur privé puisque dans
l'initiative spéciale du système des Nations Unies pour
l'Afrique de BOUTROS-GALHI I , il a été
recommandé pour le cadre de la coopération Sud Sud
(partenariat avec l'Afrique) que « l'une des priorités
doit être de mobiliser les énergies et les talents créateurs
collectifs des commissions régionales, des banques
régionales de développement, des communautés
économiques régionales et des principales
organisations-eadres des milieux d' anài~eset du secteur
L'Association Économique de l'Afrique l'Ouest
privé d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine ».
(AEAO)J dans ses diverses revues annuelles a fourni,
par des analyses sectorielles de chercheurs membres,
Dans cet ordre d'idées seront lancées des
des renseignements précieux et complets sur des
organisations sous régionales et régionales de dimension
domaines couverts par la politique d'intégration
variée pour répondre aux soucis des dirigeants
africaine.
politiques africains d'asseoir des bases objectives et
fiables de développement économique et social intégré.
S'intéressant au contexte national, ces économistes
Recensant en 1975 les organisations régionales ou sous
chercheurs ont identifié les domaines de l'éducation
régionales africaines, la CEN trouve plus d'une
de la circulation des biens, du commerce extérieur, de~
vingtaine qui associent deux à plus de deux ou plusieurs
transports, des compétences où une certaine
États qui ont accepté un transfert de souveraineté à
complémentarité se dégage par le jeu des échanges
une organisation internationale ou supranationale.
quoique modestes soient-ils. En cela, ils s'inscrivent
Depuis lors, leur nombre continue de s'allonger en
dans les dispositions statutaires des institutions
raison des nouveaux défis et des nécessités
régionales.
.\\
env 1i;onnemen tale s.
L'étude des structures de ces institutions montre
2.3.1. Domaines et modes d'actions
qu'elles sont censées s'occuper de problèmes
Une grande similitude se constate dans l'énoncé
d'intégration politique, économique, financière et sont
des domaines d'actions identifiés par les organismes
autorisées à couvrir des secteurs d'activités sectorielles
africains de coopération régionale ou sous régionale.
de façon à favoriser l'interdépendance sectorielle,
En prenant le cas de la CEDEA04 comme exemple le
Les unions sous-régionales s'étendent à deux,
Traité instituant la communauté, cette institution a
cinq ou moins de dix États; les unions régionales
énuméré les secteurs d'intérêts qui doivent conduire à
regroupent plus de dix États. A titre d'illustration, l'on
la promotion économique et sociale régionale.
peut citer le regroupement sénégambien, le conseil de
Revue du CAM ES - Nouvelle Série B, Vol. 007 N° 2-2006 (2'm. Semestre)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - . " " ' - - -
Sciences sociales et humaines
Il s'agiten l'occurrence des échanges, de la liberté de
2.3.2 Stratégies opérationnelles
mouvement et de résidence, du développement et de
1'hannonisation industriels, de la coopération dans les
Les politiques économiques au regard de
domaines agricoles et des ressources naturelles, de la
l'intégration économique africaine se fondent
coopération en matière monétaire et financière, de
aujourd'hui sur les dispositions définies par le traité de
l'infrastructure-liaison en matière de transports et de
l'Union Africaine (UA) puisque la tendance mondiale
communication, des ressources énergétiques et
est à l'instauration de zones économiques élargies
minérales, des questions sociales et culturelles, du fonds
comme l'Association de Libre Échange de l'Amérique
de compensation, de coopération et de développement
du Nord (ALENA) crée en 1993 évoluant vers la Zone
(FCCD), des dispositions fmancières, du règlement des
de Libre Échange des Amériques (ZLEA), l'Union
différends, et des dispositions générales et finales.
Européenne (UE) en Europe lancée en 1993,
Ces mêmes aspects se retrouvent dans le Traité de
l'Association Économique des Nations Asiatiques
l'Union Économique et Monétaire Ouest Africaine
(ASEAN) établie en 1994, l'UA qui inserira en 2000,
(UEMOA) avec des modifications mineures au niveau
à sa création à Lomé, sa vision économique africaine
de certaines désignations ou identifications
dans cette logique en proposant la réalisation par étapes
d'organes
opérationnels.
de l'intégration africaine.
Au niveau de l'UEMON, la Banque Ouest Africaine
Le Traité6 instituant la Communauté Économique
de Développement (BOAD) sera l'homologue du
Africaine (CEA) signé en 1991 à Abuja au Nigeria, le
FCCD aujourd'hui éclaté en deux institutions: la
Traité' transformant l'OUAen Union Africaine (UA)
Banque Régionale d'Investissement (BRI)O et le Fonds
signé à Lomé en 2000 ont déterminé les rn-odalités de
Régional de Développement de la CEDEAO (FRD)
mise en œuvre de l'intégration régionale africaine par
regroupés tous les deux dans le holding dénommé
phases
ou étapes
successives
que
sont:
Banque d'Investissement et de développement de la

Le renforcement des communautés
CEDEAO
(BIDC).
économiques régionales existantes et la
A travers ces domaines, il appamît que les modes
création d 'autres communautés là où il n'en
d'actions se matérialisent en diverses politiques de la
existe pas (étape 1) ;
part des instances communautaires. Les secrétariats

L'hannonisation des politiques communautaires
exécutifs des institutions régionales uu sous régionales
par l'élimination progressive des barrières
sont chargés de mettre en œuvre la politique de
tarifaires et non tarifaires, le renforcement de
circulation des personnes et des biens, la politique
l'intégration sectorielle, la création d'une zone
industrielle, la politique agricole, la politique
de libre échange (étapes 2, 3) ;
commerciale, la politique monétaire et financière, la
politique des transports, la politique énergétique, la

La mise en place d'une union douanière (étape
politique sociale et culturelle, la politique d'arbitmge.
4) ;
Avec les nouveaux défis de la mondialisation et de

L'établissement d'un marché commun africain
globalisation,les mêmes secrétariats sont chargés de la
(étape 5) ;
politique scientifique, teclmique et teclmologique, de la
politique de développement des ressources humaines,
de la politique d'intégration de l'économie du savoir
(Foolnoles)
1
ONU-CEA, ISSNUiPA. op. cil., p14.
dans la dynamique communautaire, de la lutte contre la
1 CEA, Réperroire des nrganisations intergollvernementales el!
fuite des cerveaux, de la politique de transfert des
coopération en AFiqlle, op. cil.. pp. 1 à 43.
techniques et de la technologie, Je la politique de
) A t:AO,lVesl aji-ican economie/al/mal. Volume 1 Nuul11ber 1(1981)-
Volume 1 Number 2 (1982), Published by WAEA,
mobilisation des capitaux, de la politique des échanges
Ibadan, 1981 et 82.
mondiaux à travers les prescriptions de l'Organisation
, Seçrétariat exécutif Traité de la CEDEAO. Publication de la
Mondiale
du
Commerce
(OMC).
CEDEAO, Lagos. 1975.
, COMMISSION DE L'UEMOA, l'rallé et protocoles constitutifS
La réussite de la mise en œuvre de tous ces
, Publication de 1'UEMOA, Ouagadougou. 2003.
domaines nécessite une stratégie opérationnelle censée
(, OUA, Traité instituant la Communauté éconumique a/ricaine.
conduire à la finalité recherchée: le développement
Publication du secrétariat administratifde 1
'OUA. Addis Abeba 1991.
économique et social durable et harmonieux des
7 UA, Traité instituant l'union aFicaine, Publication de la commission
ensembles
régionaux.
de l'UA.. Addis Abeba, 2000.
Revue du CAM ES· Nouvelle Série B, Vol. 007 N° 2-2006 (2'"" Semestre)
293

Sciences sociales et ilumaines
-------------------------

La mise ne place des actions spécifiques et
En analysant les indicateurs de base de l'évolution de
structures opérationnelles notamment la libre
toute économie notamment le produit intérieur brut,
circulation des personnes. des biens, des
l'affectation subie par cette dernière, en consommation,
capitaux et des services, la création d'un
totale, en épargne nationale brute, en investissements,
marché intérieur unique ainsi qu'une union
les prix et les taux de change, la balance des payements,
économique et monétaire panafricaine, la
la dette et les financcs publiques, les flux d'aide, les
création d'une banque centrale africaine ainsi
évol utions apparai ssent en deçà des normes
que d'une monnaie unique africaine, la mise en
couramment admises. Le PNUD et là BANQUE
place de la structure du parlement panafricain
MüNDIALE 2 en concluent à une situation
et l'élection au niveau continental des ses
catastrophique à laquelle il faut remédier afin d'écarter
membres au
suffrage
universel,
le
les risques d'implosion à conséquences incalculables.
parachèvement de toutes les actions devant
De même, les performances des indicateurs utilisés par
concourir à l'intégration continentale au niveau
les Nations Unics] pour mesurer le développement
du processus d'harmonisation et de
humain durable (IDH) à savoir l'espérance de vie à la
coordination, de la mise en place des structures,
naissance, le taux d'alphabétisation des adultes, le taux
et entreprises multinationales africaines, de la
brut de scolarisation combiné (du primaire au
mise en place des structures et organes exécutifs
supérieur), le PlB par habitant, l'indice d'espérance
(étape 6).
de vie, l'indice de niveau d'instruction, l'indice de PIE,
Trente quatre années (34) ont été fixées pour
sont décevantes sur une longue période plaçant la
parvenir à cette fm. Il est recommandé une femle volonté
majorité des pays africains dans la catégorie des pays
politique aux dirigeants pour apporter leur appui à cette
à indice de développement humain faible.
stratégie.
L'objectif à atteindre pour l'Afrique devient la lutte
contre la pauvreté que la Banque Mondiale4 a fixé car
Sur cette base la CEDEAü a été renforcée, la
celle-ci considère l'espace africain comme un continent
Communauté Économique et Monétaire de l'Afrique
en transition pour lequel il faut des mesures d'envergure
Centrale (CEMAC) a été lancée, la Communauté
plurielles n' omett,mt aucun secteur ni aucun indicateur
Économique des États de l' Afiique Australe (SADEC)
de
performance.
a été instituée et l'Union du Maghreb Arable s'est
Le taux faible de croissance économique enregistré
penchée sur la relance de ses activités.
dans presque tous les pays de l'espace africain. la
Lentement mais sûrement la marche vers
dégradation générale des termes de l'échange,
l'intégration régionale africaine effective est lancée
l'absence de changement dans la structure des
augurant des perspectives heureuses avec le NEPAD,
exportations subsahariennes de marchandises depuis
perspectives qui buteront cependant sur les effets
la fin des armées 80, le faible niveau des investissements
pervers de la mondialisation.
quelle que soit l'origine mais surtout, le faible niveau et
la médiocre reprise de l'investissement pri vé,
l'insuffisante mobilisation des ressources intemes, les
III - LES PERSPECTIVES NOUVELLES
graves disparités dans l'accroissement des flux d'aide
DE L'INTÉGRATION RÉGIONALE
et l'alourdissement du fardeau de la dette, la faiblesse
AFRICAINE
des taux d'épargne bruts, expliquent la performance
L~s maux dont souffre l'espace géographique
économique limitéc des économies africaines 5
africain n'ont cessé de préoccuper les autorités
Cette situation ajustifié la tenue d'une conférence
nationales et les instances internationales oeuvrant dans
mondiale des Nations Unies6 en 2000 pour établir les
le cadre du développement depuis qu'il fut constaté les
objectifs du millénaire pour le développement avec
échecs respectifs des deuxième (1970-79), troisième
comme priorité un pacte entre les pays pour vaincre la
(1980- 89), quatrième (1990-99) stratégies des
pauvreté humaine. Huit (8) objectifs essentiels sont
Nati ons Unies"Pour le Développement. Les résultats
déterminés et dix-huit (18) cibles fixées. Les efforts
décevants des politiques menées dans divers domaines
doivent être concentrés sur les pays ayant les pires
ont été retracés par la Banque Mondiale
difficultés à se développer. Les défis à relever sont
1 qui a établi
un progranrrne de développement accéléré en Afrique
pluriels et la communauté internationale devra accorder
au sud du Sahara avec un programme indicatif
une attention particulière à l'espace géographique
d'actions.
afiicain afin qu'il améliore ses performances. Ces défis
294
Revue d~ CAMES - Nouvelle Série B, Vol. 007 N° 2-2006 (2'"'' Semestre)

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
Sciences sociales et humaines
co.ïncident avec les préoccupations que les décideurs
financières des mesures à prendre, des actions à menet
amcains ont formulées dans le Nouveau Partenariat Pour
Une étude des besoins sera nécessaire d'abord par
le Développement de l'Afrique (NEPAD) dont la
pays, ensuite par sous région et enfin par région. Les
gJobalisation risque de limiter les attentes par des effets
besoins continentaux découleront de l'agrégation des
pervers.
besoins régionaux.
3.1. Le NEPAD
L'UA est chargée de la mise en œuvre du
NEPAD avec le concours d'un comité de cinq (5)
Chefs d'État ayant pour mission le recensement des
Après avoir analysé la situation économique
questions stratégiques, la mise en place des mécanismes,
générale de l'espace afiicain, les dirigeants du continent
l'examen des progrès réalisés. En fait, l'UA se colle
sont arrivés à la conclusion que le continent vit un
aux principes du Traité instituant la CEA en ce sens
appauvrissement historique, demeure à la traîne dans
que sa'stratégie est de faire atteindre les objectifs fixés
la révolution planétaire, ne profite guère des avancées
par celle-ci à travers les unions économiques régionales
technologiques, reste sans réaction face à la dégradation
existantes ou à créer. Par une dynamique de coopération
des conditions sociales, subit les effets dévastateurs des
sectorielle et une dynamique de coopération régionale,
guerres civiles. Laisser se perdurer cet état de faits
le NEPAD doit pouvoir amener l'espace africain aux
constitpe un crime contre l'humanité auquel il faut
seuils du progrès et de la prospérité pour
remédier par Je NEPAD que l'UA adopte dès 2000 à
l'épanouissement des peuples et des communautés
sa création.
humaines qui la composent.
Le nouveau partenariat pour le développement
Malheureusement les nouvelles orientations de
de l'Afrique traduit la volonté politique des dirigeants
l'économie mondiale avec ses défis et ses exigences, le
africains de prendre en main le destin du continent ayant
caractère léonin des pratiques des puissances
en connaissance les maux dont elle souffie et dont tout
économiques capitalistes dans les domaines stratégiques
le monde connaît les contours. Les peuples africains
risquent de remettre en cause cette perspective
sont conviés à 1lI1e prise de conscience collective pour
d'évolution économique afiieaine déterministe.
qu'ils soient eux-mêmes les acteurs des changements
qui doivent s'opérer en leur faveur. Le choix doit
s'opérer entre pauvreté et prospérité.
3.2. La mondialisation et l'extraversion
La finalité recherchée étant le développement
économique africaine
durable du continent, la prospérité qui doit y conduire
doit se fonder sur un programme d'actions et une
stratégie opérationnelle appropriée. Les conditions
Le dernier quart du XX""',, siècle et le début du
requises pour le développement durable concernent
troisième millénaire apparaissent comme une période
l'instauration de la paix, de la sécurité, de la démocratie,
cruciale pour l'orientation de la nouvelle politique
de la bonne gouvernance économique et des
économique internationale où les conditions de réussite
entreprises. Sur celles-là s'appuient les priorités
dans les échanges mondiaux dépendent des grands
sectorielles notamment la réduction de l'écart dans le
ensembles constitués et de la participation aux nouveaux
domaine des infrastructures, la mise en valeur des
défis de la mondialisation et de la globalisation.
ressources humaines y compris l'inversion à la fuite des
Tous les espaces continentaux s'organisent à
cerveaux, la mobilisation des ressources par des
s'inscrire dans cette vision dont les principes remontent
initiatives en faveur des flux de capitaux et pour l'accès
à la fin de la deuxième guerre mondiale où les puissances
aux marchés.
capitalistes victorieuses ont fixé les règles du jeu
Le nouveau partenariat s'attellera à la définition
mondial, les mécanismes appropriés et les modalités
de nouvelles relations avec les pays industrialisés et les
de mise en œuvre.
organisations multilatérales et mettra en œuvre des
La mondialisation se veut comme le dit
projets touchant à l'agriculture, à la promotion du secteur
ECHAUDEMAISON7 : émergence et renforcement
privé, aux infrastructures et à l'intégration régionale. La
d'acteurs, de marchés et de régulations à l'échelle
réussite du nouveau partenariat dépend de son coût.
mondiale. Elle pratique la libéralisation de la circulation
Aussi s'impose une évaluation objective des incidences
des marchandises, des capitaux et, dans une moindre
Revue dn CAM ES - Nouvelle Série H, Vol. 007 N° 2-2006 (2'- Semestre)
295

_______________________________ Sciences sociales et "umaines
mesure. des hommes, liée à l'internationalisation des

['accroissement du rôle des acteurs
firmes, favorise l'émergence de marchés des biens, des
internationaux étatiques (OMC, BM,
services et de capitaux mondiaux.
FMI ... ), privés comme les sociétés
transnationales ou multinationales
La pratique de ces principes se traduit par
(STN, SM.), ou non gouvernementaux
l'accentuation de la concurrence, des redistributions
ou associatifs (OING) ;
des lieux de production. une standardisation des
produits et une « relative» uniformisation des modes

le renforcement de la lutte « anti-
de consommation. L'instrument structurel chargé de
mondialisation» de la part de
promouvoir et de veiller à l'application de ces principes
mouvements organisés de contestation
est l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC)
qui agissent en permanence lors des
qui agit en édictant des règles communes.
réunions du groupe des pays les plus
industrialisés (G8).
L'intégration des marchés, l'uniformisation des
produits, la libre circulation globale qui se traduit par
La dynamique d'intégration africaine préconisée
la suppression des barrières tarifaires et non tarifaires
par NEPAD dans ses diverses politiques épouse cette
entre les États concernant les biens, les services et les
orientation mondiale dont les responsables ne sont ni
capitaux, font partie de la stratégie des puissances
les initiateurs ni les principaux bénéficiaires des
industrielles capitalistes de domination du monde de
retombées éventuelles. Or, pour participer
façon à perpétuer les assises du mode libéral de
équitablement aujeu du marché mondial, ne doit-on
gestion des espaces économiques constitués.
pas avoir des produits à offrir? Pour libéraliser
totalement son espace économique, ne doit-on pas
En fait, ne tirent réellement profit de cette
disposer de produits concurrentiels? Pour produire au
mondialisation que les nations industrielles ayant des
meilleur coût les biens et services marchands, ne doit-
biens manufacturés à écouler, des capitaux à investir,
on pas disposer de technologies réductrices de coûts
des potentialités à mettre en valeur par des ressources
et de compétences aiguës adaptées aux circonstances?
humaines hautement spécialisées et disponibles. Le
Pour lutter contre la pauvreté, ne doit-on pas recourir
phénomène de mondialisation revêt de nouvelles
à des moyens financiers substantiels? Pour ['égalité de
formes à partir de la fin de la décennie 1990 sous
chance dans le jeu du commerce mondial, ne doit-on
l'effet de trois évolutions:
'
pas avoir des principes équitables et une attitude
d'honnêteté politique?

les
nouvelles
techniques de
A l'analyse des pratiques en cours dans le
communication (lntemet) qui donnent
phénomène de mondialisation, de globalisation et de
à la circulation des idées, des
tertiarisation, l'approche africaine d'intégration de son
technologies et des services un essor
espace géographique pour lutter contre la pauvreté, la
sans précédant ;
dégradation des conditions sociales, la persistance du
sous-développement, apparaît comme un pari difficile
à gagner du fait du caractère pervers des règles fixées,
ou une bataille de Sisyphe vouée d'avance à l'échec
du fait des écueils stratégiques posés subtilement par
les détenteurs des leviers de commandement du monde:
(Footnoles)
, BANQUE PONDIALE, Le développement accéléré en Afrique ail
les puissances capitalistes mondiales.
sud ,)11 Sahara- Programme d'action ;ndic:(//~r.
Puhliçation des presses de la Ilanque Mondiale. Washington, 1981.
AGBOBLl I dans son ouvrage intitulé « la
~ PNUD/IlM. Données économiques et fin(/NCÎères sur J'Afrique.
géographie et les structures économiques africaines»
Ncw York - Washington, 1989.
publié en 1982 a défini les éléments des conditions
1 PNUD.
Rapport mondial sur le développement humain: 1995 à
200.J, Publication Ecol1omica, Paris. 1995 ;'l 2004.
structurelles nouvelles de l' Afriq ue pour assurcr son
, BANQUE MONDIALE, UII cOIl/illelll ell /rallsilion .. l'Afrique
.wbsaharienne

développement endogène réel à savoir:
011 milh~lI des années 90,
Washington, 1995.
j
BM, op. cil, pp. 7 à Il.
(, PNUD. Rapport sur le développement humain 2003, Economica,

la libération de la dépCl1l"l'cc
Paris, 2003.
économique;
1
ECHAUDEMAISON C. - D., Dictionnaire d'économie et de
sciences sociales, Éditions Nathan, Paris. 2001
296
Revue du CAMES - Nouvelle Série B, Vol. 007 N° 2-2006 (2'''~ SCllwslrc)

_ _ _ _ _~_ _~
Sciences sociales et humaines
l'intégration et la diversific,a.tion

sur les immenses ressources et potentialités des espaces
économique;
géographiques encore inexploitées ou peu exploitées
de l'Afrique en ne lésinant sur aucun moyen dont la
l'accélération de la croissance et

force (armes de dissuasion), la ruse (conflits d'intérêt
la libération de toutes les forces
suscités entre les dirigeants ou responsables politiques),
productives;
le soutien à la mauvaise gouvernance (corruption et
la mise en place d'économies

népotisme), etc.
autocentrées et introverties;
Que faut-il faire dans cet environnement dominé par
des conflits d'intérêt et d'hégémonie? La question
la sauvegarde du caractère

demeure posée et d'actualité pour tous les
homogène des économics ;
économistes ainsi qu'aux décideurs politiques
• le
développement
des
afiicains.
compétences.
Ainsi, cn analysant de près la nouvelle
CONCLUSION
philosophie et approche économique mondiale
d'intégration par la voie de la globalisation définie par
les puissances capitalistes, il apparaît que l'extraversion
L'intégration a constitué une voie économique
économique qui fut le malheur de l'Afrique du temps
que d'éminents chercheurs ont recommandé dans leurs
colonial revient sous une nouvelle forme subtile
écrits quels que soient les espaces géographiques
d'extraversion économique néoco loniale dont les
considérés. Elle peut être sous régionale et régionale
espaces géographiques seront les économies mondes
différenciée par le nombre des part~cipants à
ou les États continents.
l'intégration.
L'on se demande alors si le NEPAD, voulu par
L'Afiique a toujours œuvré à son développement
nos responsables politiques africains dans un
par la voie de l' intégration déjà à l'époque préco]oniale ;
environnement qu'ils ne contrôlent pas, est un mythe
cette option a été poursuivie par les tcnants de la
ou une réalité? Il peut être un mythe qui, par les
politique coloniale qui y voient un moyen efficace de
quelques réalisations qui s'effectueront, fera croire au
main mise sur les ressources et de contrôle des grands
déclenchement d'un réel proccssus de développement
espaces servant d'espace vital pour les pays
alors qu'en fait l'on se trouverait en tàce d'un mirage
colonisateurs et de débouchés pour les produits
de développement.
élaborés.
Il se peut qu'il soit une réalité pour peu que l'on
L'époque actuelle (le xx·",e siècle se poursuivant
se penche sur les racines des maux qui minent le
par le XXIén'" siècle) n'a pas dérogé à la règle en faisant
développement africain dont les causes remontent très
de la philosophie d'intégration l'un des déterminants
loin dans l'histoire et que AMIW a cerné dans son
de la promotion économique et sociale des nations et
ouvrage sur l'accumulation à l'échelle mondiale. Il y
des régions. D'où les grands ensembles que l'on voit
précise que toutes les sociétés contcmporaines sont
aujourd'hui constituer ou qui se constituent en
intégrées dans le système mondial. Aucune formation
Amérique, en Europe, en Asie et en Afrique.
socio contemporaine ne peut être saisie en dehors de
En Afiique, les dirigeants politiques se sont lancés
ce système.
très tôt dans l'intégration à l'aube des indépendances
De le même ordre d'idée, AGBOBLP souligne
en commençant par l'intégration politique (OUA,
qu'aujourd 'hui la mondialisation s'est inscrite dans
OCAM) qui a montré ses limites les faisant revenir à
une dynanlique historique de soumission graduelle de
]'option de ]'intégration économique dans le cadre de
tout espace physique et social à la loi du capital, à la
l'UA (CEDEAO, SADEC, CEMAC, UMA) dont
loi de l'accumulation sans tin qui est l'ultime finalité
l'aboutissement sera la mise en œuvre de la CEA avec
du système économique initié du temps des
pour levier ou agence d'exécution le NEPAD.
phéniciens et des cités grecques et romaines autour
Cette intégration ne peut réussir que si l'on résout
du bassin méditerranéen il ya de cela des milliers
les préalables que sont la recherche de l'autonomie
d'années.
collective,] 'inventaire approfondie des disponibilités en
Dans le jeu économique mondial actuel des forces
ressources, la manifestation d'une réelle volonté
inavouées continuent d'agir pour s'assurer le contrôle
politique d'œuvrer ensemble ; mais également si l'on
Revue du CAM ES - Nouvelle Série B, Vol. 007 N° 2-2006 (2··~ Semestre)
297

opte pour des politiques qui assurent réellement le
développement comme la politique industrielle, la
politique agricole et la politique de développement des
ressources humaines.
La chance sourira à l'Afrique si les dirigeants font
montre de déterminisme en acceptant un transfert de
souveraineté nationale au profit des structures
REFERENCES BlBLlOGRAPHlQUES
supranationales communautaires. en arrêtant une
stratégie collective de promotion globale au lieu de
1.
poursuivre une stratégie individuelle de promotion
AEAO, West african economicjournal. Volume 1
nationale.
Nuumber 1 (1981)- Volume 1 Number 2 (1982),
Published by WAEA, Ibadan, 1981 et 82.
En comptant sur les capacités productives
2.
locales, en n'ignorant pas des conditions
AGBOBLI E. K. Maurille, Histoire clesfàits
environnementales spécifiques. en ne perpant pas de
économiques et sociaux de l'antiquité cl nosjours,
vue que les États n'ont pas d'amis mais uniquement
NEA Togo, Lomé. 1994.
que des intérêts qui permettent aux dirigeants de résister
3.
aux pressions extérieures, en libérant les capacités
AGBOBLI E. K. Maurille, Petit précis cl 'économie
personnelles par l'instruction., l'éducation et la formation
politique, Éditions Bognini, Abidjan, 2003.
technique et professionnelle, les conditions minimales
4.
seront remplies pour un développement harmonieux
AGBOBLI Edo Kodjo Maurille, Modes et options
durable.
de développement - Cours de formation doctorale
Le développement africain ne sera réel que si
en sciences économiques, ULIFASEG, 2006, Inédit.
l'Afrique mise sur la dynamique de coopération
5.
sectorielle et sur la dynamique de coopération régionale,
AGBOBLI Edo Kodjo, Géographe et structures
seules conditions pour un développement endogène et
économiques de l'Afrique, Éditions les NEA, Lomé
introverti conséquent. À force de volonté et de
- Dakar - Abidjan, 1982.
persévérance, l'on pourra y parvenir en épousant cette
6.
pensée de Bernard Shaw qui disait que « certains
AlESEe, Nécessités économiques et politiques de
pensent des choses qui sont et se disent pourquoi, lui il
la CEDEAO, Publication du ministère de l'économie
rêve des choses qui ne furent jamais et se dit pourquoi
et des finances, Lomé, 1979.
7.
.
pas ».
AMIN Samir, L'accumulation à l'échelle
Alors, pourquoi pas l'Afrique ne sortirait pas de
mondiale, Éditions Anthropos , Paris, 1970.
sa marginalisation par une commune prise de
8.
.conscience, une volonté de ne pas accepter la fatalité
AMIN Samir, L'Afrique de l'ouest bloquée, les
qui n'est pas dans l'essence humaine. une détermination
éditions de minuit, Paris, 1971.
à compter sur nos propres capacités sans complexe,
9.
une apprôpriation des technologies nouvelles par un
AUBIN Christian et Cie, Politique Économique,
développement des ressources humaines, une mise en
Éditions Vuibert, Paris, 2003.
place d'institutions crédibles, viables et durables. une
10.
mise en valeur des potentialités une fois qu'elles sont
BANQUE Mondiale, Le Développement accéléré
connues.
Le succès ne sourit qu'à ceux qui osent et qui
avancent sans re~uler. L'Afrique doit oser sans reculer
pour relever les défis du nouveau millénaire dans lequel
(Footnoles)
1
AGJlOBLl. Edo Kodjo, Géographie el slruc/ures ~conomi(jJl(!s de
elle est partie prenante avec le reste du monde. Ainsi,
l'Afrique. Nouvelles éditions africaines. Lomé. 19H2.
la pauvreté cèdera la place à la richesse et à la
2 AMIN, Samir.
L'accumulation à l'échelle mondiale. f::dîtions
Anlhropos. Paris. 1970
prospérité, la croissance économique conduira au
, AGBOBLI.
Edo Kodjo
Maurille.
Modes
el
oplions
de
développement et à l'épanouissement individuel et
développement
- Cours de formation doctorale en sciences économi(]ucs. ULiFASEG
collecti f des populations dans des espaces
2006. Inédit.
21)8
Revue du CAMES - Nouvelle Série H, Vol. 007 N° 2-2006 (2'm. Semestre)

-------------------~--
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théorie d'intégration à un espace régional : [a
1990 -, Presses Banque Mondiale, Washington,
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1995.
du MEF, Lomé, 1979.
12.
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13.
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1
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