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Sciences sociales et humaines
ETUDE SOCIOLOGIQUE DES CAUSES
DE LA PROLIFERATION DES ONG DE DEVELOPPEMENT A LOME
Essè Aziagbede AMOUZOU
Département de Sociologie
Université de Lomé-TOGO
RESUME
Dans nombre de pays africains, la vérité des chiffres de jeunes sans emploi est assez troublante.
L'avenir semble bloqué quand on en vient à réduire considérablement les possibilités de recrutement des
jeunes dans les différents secteurs d'activités tant publics que privés.
L'Ecole néo-coloniale, essentiellement caractérisée par la prédominance de l'apprentissage des langues
se révèle aujourd'hui incapable de répondre adéquatement aux contradictions engendrées par le chô-
mage et le sous-emploi dont les conséquences sont. on ne peut plus, dramatiques.
Cette situation est à l'origine de la création anarchique d'ûNG dans la ville de Lomé depuis quelques
années. C'est, pour la plupart des cas, l'œuvre d'une catégorie de gens en quête d'un emploi.
Créées de tàçon sporadique, ces ONG souffrent dans l'ensemble de carences dans le domaine de maté-
riel de travail, de manque de fonds de fonctionnement. de ressources humaines non qualifiées, etc. Cette
situation suscite de plus en plus une polémique en raison du fàit que ces ONG sont loin d'être opération-
nelles.
Mots clés: Chômage, prol{feration des ONG mauvaise gouvernance. absence de .financement.
ABSTRACT
In many African countries, the figures of the unemployed young people are disheartening.
With the decrease in the young people's recruitment in public and private sectors today, the future of
these young people seems to be a deadlock.
Neocolonial schools, whose concern is the study of languages, fail to meet the needs of the present
time, unemployment.
Unemployment is a basic phenomenon that las led to the creation of the NGOs for years in Lomé.
The fact that the creation of the NGOs appears as a solution to unemployment prefigures problenis
such as lack of equipment, unskilled human resources, which turns the work of the NGOs into
nightmares.
.
Kev - words : Unemployment - prolijèration ofNGos - bad governance - lack oltùnding.
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Sciences sociales et humaines
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INTRODUCTION
C'est cette situation misérable qui a préparé le ter-
rain à la création des ONG par la plupart des intel-
C'est un fait incontestable que la crise économique
lectuels chômeurs, en vue de bénéficier de finance-
qui frappe de plein fouet tous les pays du globe et
ments.
particulièrement ceux d'Afrique, oblige les respon-
sables politiques et autres décideurs à redéfinir les
La pléthore de ces ONG de développement en mi-
politiques de développement. Nombre de gouver-
lieu urbain serait la cause d'une mauvaise
nements des nations du Tiers-monde accordent de
gouvernance. Car, face à la faillite de l'Etat, on re-
plus en plus un intérêt particulier à l'initiative pri-
crute dans la ville de Lomé une foule de gens ins-
vée.
truits à la recherche d'une meilleure situation.
Longtemps, juste après les indépendances, la Fonc-
Pourtant, la création d'ONG n'est pas un fait con-
tion publique détenait presque le monopole du mar-
temporain. Les nouvelles formes de gain de vie, de
ché du travail, mais, depuis une décennie, les pays
mutations socioculturelles et politico - économiques
africains avaient commencé à essuyer des déboires
de la société tout entière y trouveront leur part de
économiques et financiers. Les contextes ont changé.
responsabilité. La multiplication abusive d'ONG
Le secteur public est saturé, les quelques sociétés et
locales dans la ville de Lomé, ressemble plus à une
entreprises fiables font compression du personnel
conséquence qu'à un simple phénomène. De l'avis
et nombreux sont les gens dans la rue sans emploi.
de certains acteurs sociaux, il ressort souvent que
Dans beaucoup de pays, le chômage des diplômés
les initiatives locales demeurent de nos jours pour
commence à s'inscrire dans la vie quotidienne des
les sans - emplois, des sources nourricières. Les gens
jeunes africains, fréquemment réduits à l'inactivité,
créent des ONG pour avoir des financements, car
faute d'emploi. Le diplôme, même universitaire,
c'est le seul salut pour sauver la génération sacri-
n'est plus aujourd'hui une garantie d'emploi; il tend
fiée.
plutôt à devenir un simple parchemin.
1 - APPROCHE METHODOLOGIQUE
A l'heure actuelle, l'insécurité de nouvelles généra-
1. 1. Problématique
tions ne s'exprime plus. Il s'agit du désenchante-
ment devant un système scolaire qui ne répond plus
Les nombreuses expériences faites par les dirigeants
à l'espérance qu'il avait longtemps fait naître. Une
africains dans les secteurs de l'Agriculture, de l'in-
population habituée à un Etat fournisseur d'emploi
dustrie et du commerce depuis les indépendances
se trouve d'un coup désaxée devant un revirement
jusqu'à ce jour les ont amenés à prendre conscience
de situation lorsque l'Etat devient cruellement in-
que le secteur privé, longtemps laissé pour compte,
capable de jouer son "légitime rôle". "Mieux vaut
peut, s'il est bien encadré et canalisé, jouer un rôle
se mettre en quête d'un parent stratégique que de
de premier plan dans le développement économi-
chercher à passer un examen"(1 l, rapporte Jean
que et social des pays. On se rend compte de plus
Marc ELA (1983) au sujet des propos tenus par des
en plus que s'il ne constitue pas la panacée comme
gens dans les milieux sénégalais. Tout se passe
modèle de développement, il ne recèle pas moins de
comme si les jeunes perdaient peu à peu confiance
potentialités et des atouts susceptibles de remédier
en l'équité du système des examens et en la valeur
au délicat problème du chômage.
du diplôme sur le marché du travail. L'impasse de-
vient totale et les espoirs commencent à être déçus
De toutes les discussions qui ont débattu de ce thème
quand on en vient à planifier le sous-emploi des jeu-
depuis plus d'une décennie, il ressort que le secteur
nes que l'on considère comme les" forces vives
informel est un régulateur positif dans le domaine
de la nation".'
de la réduction du chômage car favorisant l'auto-
emploi.
Dans la plupart des Etats africains, chaque année,
ces oubliés de la croissance n'ont d'autre choix que
Mais au Togo, les pouvoirs publics ne semblent pas
de rejoindre le prolétariat misérable qui s'agglutine
initier une politique pragmatique dans ce contexte.
dans les villes, véritable lèpre urbaine.
,1) Jean Marc ELA, La ville en Afrique Noire, Ed Karithala, Paris, 1983,
page 128.
e
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Le phénomène de la prolifération d'ONG locales
démocratie, ajoutée à la mauvaise gestion de ses
est plutôt à l'origine de la pauvreté à laquelle sont
ressources matérielles et humaines a affecté toutes
attelés les jeunes intellectuels chômeurs.
les couches socioprofessionnelles et a sapé la dyna-
miquede la croissance à tous les niveaux de la struc-
II - OBJECTIFS DE L'ETUDE
ture sociale.
2. 1. Objectif général
Les ONG créées par les sans-emplois ne jouent pas
un rôle déterminant, celui qu'on pouvait attendre
L" objectif général de cette étude consiste à attirer
d'elles en raison de l'intention qui a présidé à leur
l'attention des pouvoirs publics sur la création anar-
création.
chique des ONG de base à Lomé dans le but ina-
voué de bénéficier des financements pour assurer la
2. 4. Collecte des données de terrain et
survie.
difficultés rencontrées
2. 2. Objectifs spécifiques
En effet, la collecte des données et d'informations
s'est déroulée dans la commune de Lomé. Pendant
De l'objectifgénéral découlent trois objectifs spéci-
10 jours, il s'est agi précisément de recueillir des
fiques ci-après:
renseignements sur les ONG de base par le biais d'un
questionnaire et surtout d'un guide d'entretien con-
- diagnostiquer les causes de la prolifération
çus à cet effet. Ce dernier a été nécessaire pour as-
des ONG de base dans la ville de Lomé;
surer à l'étude son caractère de fidélité et de perti-
- analyser comment ces ONG se détournent
nence.
de leur noble vocation qu'est la participation cons-
ciente et réelle au développement;
En effet, plusieurs personnalités de la communauté
initialement prévues pour ce volet ont pu être tou-
- suggérer des approches de solution à par-
chées, ce qui a permis d'obtenir des informations
tir des données recueillies auprès de la population
utiles.
de Lomé dans le cadre de cette étude.
Quant à la partie quantitative, 35 personnes ont été
effectivement interrogées y compris les directeurs
2. 3. Hypothèse de travail
exécutifs ou à défaut les responsables de projet de
chaque ONG. Ce qui implique qu'un (l) enquêté
La prolifération des ONG locales à Lomé est due
par ONG de base a fait l'objet d'interview. Ces 35
au manque d'emploi. En effet, la situation sociale
enquêtés qui ont répondu au questionnaire se ré-
générale que vit le Togo depuis l'avènement de la
partissent comme suit dans le tableau ci-dessous.
Tableau N°l: Répartition de l'échantillon réellement interrogé en
fonction de leurs catégories socioprofessionnelles
12
34,29 %
35
100%
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La collecte s'est déroulée dans les quartiers
Agbalépédogan, Avénou, Wuiti, N'Kafu, Djidjolé,
Les études relatives aux questions de développe-
Doumasséssé, Nyekonakpoè, Totsi, Gbadago,
ment sont dans l'ensemble multiples et englobent
kodjoviakopé et Amoutivé.
explicitement ou implicitement des idéologies de
toutes sortes.
2. 5. Classification des données
L'amélioration des 'conditions de vie souhaitée et
Phase ardue de la recherche, elle a surtout consisté
recherchée dans les sociétés tant rurales que urbai-
à organiser, à classer et à comptabiliser les différen-
nes ne peut être séparée du développement national
tes réponses recueillies des interrogations, en vue
en raison de la densité de la population (GUENEAU
de les exploiter et les interpréter. Les ressources
- 1986).
matérielles étant limitées, les données ont été trai-
tées manuellement.
Ainsi. face à la crise économique que traverse le
pays, le gouvernement togolais adopte des straté-
La première difficulté est liée à la disponibilité des
gies qui se manifestent à travers des approches de
documents dans les différentes organisations non
solutions émanant des difficultés politiques de dé-
gouvernementales. En effet, il n'est pas surprenant
veloppement national. Malgré ces efforts, il est
de ne trouver au niveau de ces structures, de docu-
donné de constater que le problème du chômage
ment relatant les activités initiées.
demeure. En témoigne la création des ONG loca-
les considérées comme un vecteur pouvant per- .
Seulement ces organisations ne disposent que de
mettre de répondre aux besoins des populations et
répertoire désuet, ce qui ne pennet pas non plus de
d'absorber en partie le chômage dont les jeunes
quantifier leur nombre ou d'avoir des données sta-
diplômés sont victimes.
tistiques actualisées sur leur progression.
Par ailleurs, il n'a pas été facile à certains respon-
sabld"d'ONG de fournir des infonnations sur les
raisons ou les motifs qui sont à l'origine de la
création de leur structure.
III - INTERPRETATION DES DON-
NEES DE L'ENQUETE
L'analyse des actions menées en faveur de la popu-
lation dans les pays du tiers-monde ne peut se faire
qu'en tenant compte des caractéristiques de la frange
bénéficiaire. Tous les pays sous - développés con-
naissent des problèmes de développement qui ont
pratiquement le même dénominateur. Cette idée
trouve un écho favorable à travers la remarque faite
par BALANDIER (1996), qui pense que les pro-
blèmes de développement ont commencé à faire l'ob-
jet de discussion dans les années qui ont suivi la
deuxième guerre mondiale. L'importance accordée
à l'interprétation des mutations qui se sont opérées
dans les sociétés a occasionné leur examen dans le
domaine des sciences économiques et sociales.
La sociologie du développement a trouvé un champs
d'action créé par l'impact des contradictions sur les
populations.
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......,....
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Tableau N°2 : Répartition des enquêtés en fonction du motif de la création
de l'ONG : manque d'emploi ou salaire dérisoire
Manque d'emploi!
Oui
Non
Non
souffrance
Total
salaire dérisoire
pauvreté
déclarés
Effectif
2J
04
02
08
35
%
60,0
11,43
5,71
22,86
100
60 % des enquêtés ont accepté que le manque d'em-
un regard critique en rapport avec les conditions et
ploi ou le salaire dérisoire constitue le motif qui a
critères de recrutement.
présidé à la création de leur ONG 22,86 % de l'ef-
fectiftotal sont représentés par les enquêtés qui es-
En réalité, 48,57 % des personnes interrogées se
timentque lacréationd'ONG s'inscrit dans la logi-
situent dans la fourchette d'âge de 26 à 35 ans et
que de la souffrance sociale ou de la pauvreté dont
31,43 % se partagent l'intervalle 36 à 45 ans. Ces
ils sont l'objet.
données contraignent à s'interroger sur le devoir et
sur la vie économique des jeunes togolais si la du-
3.1. Pléthore de chômeurs
rée de travail à la fonction publique est toujours
maintenue à une vingtaine d'années et l'âge maxi-
Les populations togolaises et surtout lajeunesse sont
mum pour la retraite avoisine 55 ans.
énormément confrontées au problème d'emploi.
Ceci les fait baigner dans l'extrême pauvreté. En
Même si ces raisons ne constituent pas la cause di-
effet, l'étude qualitative s'est accentuée sur le nom-
recte de la prolifération des ONG de base, elles en-
bre important de chômeurs car elle a permis de dé-
tretiennent une relation de cause à effet.
couvrir que cette catégorie socioprofessionnelle bien
qu'ayant une quelconque formation professionnelle
Les investigations du volet qualitatif sont très utiles
se retrouve dans les activités subalternes avec des
pour la recherche en raison du fait qu'il s'est dé-
salaires très dérisoires.
gagé des révélations importantes indiquant que le
siège de nombreuses ONG de base se confond par-
Autant, l'Université déverse chaque année à elle
fois au salon de la maison ou au garage du domicile.
seule de milliers de diplômés en fin de cycle sur le
Par ailleurs, on découvre que la plupart des ONG
'marché de l'emploi, autant l'effectif des sans - em-
locales se réduisent en une seule personne ou à une
plois s'agrandit car des mesures socio-économiques
famille.
-préventives concrètes ne sont pas prises à cet effet.
Aussi, constate-t-on que des responsables ou ca-
3.2. Limite d'âge de recrutement
dres de certaines institutions de financement de pro-
jets sociaux créent des ONG et virent la quasi-tota-
Au Togo, l'admission à la fonction publique est fonc-
lité des fonds en direction de ces structures dont les
tion d'âge. Effectivement la limite d'âge au recrute-
projets réalisés deviennent leurs propriétés.
ment est fixée entre 30 et 35 ans au plus. Or, le
recrutement à la fonction publique togolaise se fait
Outre, ces comportements immoraux et indignes,
à volonté et non périodique. Ceci gonfle le rang des
d'aucuns proposent à leurs proches ou acolytes de
chômeurs. Pire encore, on n'a pas pensé assouplir
s'associer pour créer une « ONG de base» pour
la limite d'âge pour l'intégration dans l'administra-
qu'ils puissent les aider.
tion.
Par ailleurs, la formule la plus adoptée est la négo-
La population surtout sans emploi s'inquiète amère-
ciation des projets par des frères en Occident qui
ment, si l'on suit la progression du phénomène avec
demandent à leur famille d'installer une structure
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Sciences sociales et humaines
au niveau local pour bénéficier d'une aide négociée.
de l'aide publique.
Ces considérations donnent non seulement la lati-
Malgré leur nombre élevé dans les quartiers de
tude de parler d'ONG opportunistes mais encore
Lomé, les actions réalisées sont rares car, difficile-
des projets personnels.
ment, on identifie le changement positifqu'eUes ajou-
tent à l'essor de la ville. C'est ce que reconnaissent
IV - CARACTERISTIQUES DES ONG
68,57 % des enquêtés de l'effectif total lorsqu'ils
OPPORTUNISTES
pensent que ce n'est pas la pléthore d'ONG qui fa-
vorise le développement de la ville de Lomé. C'est
4.1. Manque de compétences techniques
dans cette même perspective que 54,29 % des en-
adéquates
quêtés estiment que l'effectifd'ONG locales basées
à Lomé est trop élevé.
La non-opérationnalité des ONG traduit bien la ca-
rence d'aptitude sociotechnique au sein des struc-
La plupart des ONG de base installées à Lomé n'ont
tures de développement à la base. Cette carence
pas de plan stratégique non seulement en raison
sociotechnique s'explique par le manque de forma-
d'inexistence d'activités à exécuter ou de compé-
tion technique, l'absence de volonté à participer
tences sociotechniques mais également parce qu'el-
convenablement au développement du milieu. De
les sont des ONG de circonstance.
ce fait, ces ONG locales répondent plus aux aspira-
tions personnelles que communautaires et n'intro-
Enfin, les membres fondent la précarité de leur
duisent pas de changement social dans le milieu
existence sur les différents avantages ponctuels
auquel elles font corps.
qu'ils soutirent du budget des projets.
Au vu de ces dysfonctionnements, il convient de
4. 3. Vérification de l'hypothèse
remarquer le manque d'esprit de créativité et d'ini-
tiative à la base qui, normalement, devrait permet-
Cette étude ne s'est pas contentée de confirmer 1'hy-
tre à une bonne ONG locale bien intégrée de fonc-
pothèse selon laquelle la prolifération des ONG de
tionner dignement avant tout apport extérieur ser-
base à Lomé trouve son fondement dans le manque
vant seulement de complément.
d'emploi. Elle a aussi permis d'observer la part de
responsabilité de la machine sociale.
L'esprit de créativité et d'initiative demeure le sou-
bassement et le nerf vivifiant toute action concrète
CONCLUSION
sur le terrain. Or, force est de constater que certai-
nes ONG existent seulement de nom par faute de
Al'analyse du thème de recherche, il devient néces-
compétence sociotechnique requise.
saire de situer les responsabilités. Le phénomène de
la montée abusive d'ONG de base se caractérise par
Par ailleurs, 40 % des enquêtés interrogés dans les
la pauvreté à laquelle sont assujetties les popula-
ONG ont déclaré n'appartenir à aucun réseau, ce
tions togolaises et plus précisément la jeunesse dé-
qui serait un handicap à un vrai développement lo-
sœuvrée dont parlait ROSENMAYER (1964). Mais
cal ascendant. Car l'appartenance au réseau favo-
il est aussi vrai qu'elle a sa source dans la mauvaise
rise un échange d'expériences techniques en matière
foi des politiques, dans les dettes extérieures et dans
de développement au sens large du terme et une
la suspension de la coopération suivie de la mau-
nouvelle ouverture sur les réalités sociales avec les
vaise gestion des affaires nationales (BM-1996).
différentes méthodes d'approche.
Aujourd'hui, comme la sociotechnique renchérit les
4.2. Efficacité des ONG
applications de la sociologie, il est plus indiqué de
suggérer quelques pistes permettant d'agir sur le
Les ONG de base se détournent de la noble voca:'
phénomène de la concentration excessive d'ONG
tion qu'elles se sont assignées car la plupart dispa-
de base.
raissent après obtention de financement. C'est dans
ce contexte que BRUNEL (1993) parle de gaspillage
Ainsi, pour l'Etat, il s'agit de redéfinir une politique
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Sciences sociales et humaines
d'emploi ainsi que des actions pour réduire le taux
7. ASSIH, (1. A.) & al., 2002. Ethique de l'Envi-
de chômage, l'amélioration des critères et des con-
ronnement pour un Développement
ditions de recrutement tant à la fonction publique
Durable au Togo: Bibliogra-
qu'aux institutions parapubliques doit être effective.
phie nationale du Togo.
Il urge par ailleurs que l'Etat subventionne et ac-
compagne les initiatives lucratives privées des po-
tentiels chômeurs et encourage les étudiants en fin
de cycle à créer des activités génératrices de reve-
nus.
Pour les partenaires au développement, il s'agit
de financer des ONG crédibles ayant déjà fait leur
preuve sur le terrain ; la nécessité de collaborer avec
l'Etat pour la mise en œuvre des structures de suivi
et d'accompagnement devient un impératifinavoué.
Cependant, comme le dit si bien ASSIH (2002) le
manque de compétences techniques adéquates et
l'inefficacité de ces ONG locales traduisent à fond
leur dysfonctionnement et comment elles se détour-
nent parfois de leur noble vocation qu'est la partici-
pation consciente et réelle au développement de la
communauté.
BIBLIOGRAPHIE
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Ed. Karthala, Paris.
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Paris.
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Paris.
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Crise, sortir de la Pauvreté,
Ceda.
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