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IMAGES DE LA FEMME SENEGALAISE ACTUELLE DANS
LES TRACES DE LA MEUTE DE BOUBACAR BORIS DIOP.
Kazaro TASSOU,
Département de Lettres Modernes
Université de Lomé.
Maintenant, ici commence la nouvelle romance. Ici finit le roman de
chevalerie. Ici, pour la première fois dans le monde, la place est faite
au véritable amour. Celui qui n'est pas souillé par la hiérarchie de
l 'homme et de la femme, par la sordide histoire des robes et des bai-
sers, par la domination d'argent de l 'homme sur la fèmme ou de la
femme sur l 'homme. La femme des temps modernes est née, et c'est
elle que je chante. Et c'est elle que je chanterai.
ARAGON ( Les cloches de Bâle ).
dans les deux derniers romans de l'auteur: Les
INTRODUCTION
Traces de la meute et Le Cavalier et son om-
bre,-. Les trois types de femmes représentent le
La femme, dans l'historiographie littéraire sénéga-
triangle épistémologique que nous étudierons dans
laise. occupe une place centrale et souvent frontale,
Les Traces de la meute, car chacune d'elles sou-
en tant que femme de lettres ou en tant que person-
lève des questions existentielles, ontologiques, voire
nages de la fiction narrative. Les devanciers tels que
politico-économiques. Et il n'est pas anodin de les
Abdoulaye Sadji, Sembène Ousmane, Aminata Sow
étudier sous prétexte qu'il y a des sujets plus im-
Fall ou encore Nafissatou Diallo, mais aussi les plus
portants qui forcent à la réflexion; elles sont au début
jeunes tels que Boubakar Boris Diop, ont peint la
et à la fin de la problématique du développement.
femme faisant ou subissant l'Histoire. Si nous nous
Elles font et défont
les maisons, les dryankés,
arrêtons à l'œuvre romanesque de ce dernier,
ces sortes de Madame de Maintenon de la
nous pouvons relever, sans risque de nous trom-
société sénégalaise. Pour bien lire la femme dans
per, que la femme sénégalaise y apparaît sous di-
Les Traces de la meute, nous allons emprunter la
vers visages. Dans Le Temps de Tamango, Léna à
grille ordinaire: la femme sous le sceau de la cou-
laquelle N'Dongo Thiam voue presque un culte et
turne: heurs et heurts; la femme intellectuelle: un
Nafi l'amie de Kaba Diané sont des femmes qui
type de femme égale de l'homme et enfin la courti-
éblouissent leurs compagnons. Ainsi en est-il de
sane: les célèbres dryankés ; un type de femme
Mame Kumba Baang, la déesse du fleuve à laquelle
politique experte en relations publiques.
on doit absolument allégeance sous peine de mort
1. La femme sous le sceau de la coutume:
violente. Dans Les Tambours de la mémoire trois
heurs et heurts
autres femmes sénégalaises au statut à géométrie
variable: Ndella Sy, l'intellectuelle scandaleuse qui
Contrairement à l'opinion la plus répandue, la
s'identifie volontiers à la reine Ndatté Yalla du Waalo
femme dite traditionnelle n'est pas aussi soumise
ou Adja Déguène, l'épouse modèle, «c'est-à-dire
qu'on le croît. En apparence, elle l'est. La société,
docile et terrorisée, assise du matin au soir sous
dans son souci de la hiérarchisation, a attribué à
le manguier du centre de
la cour»
(page 102)
chaque genre une fonction. En fait, il convient d'
ou encore la reine Johanna Simentho qui
lutte,
ajouter que la nature biologique ou physiologique
armes à la main telle Jeanne
d'Arc qui
avait
surtout en impose souvent aux humains. Ainsi être
reçu mission de Dieu pour délivrer la France de
femme a ses heurs mais aussi
des heurts. Etre
l'invasion anglaise, contre la pouvoirnéocolonial
homme a aussi ses avantages et ses inconvénients.
pour l'indépendance de son peuple du Wissombo
La femme au foyer ne vit pas dans les mêmes condi-
(La Casamance ?). Nous avons le même schéma
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tions que la péripatéticienne, et vice versa. Le
Le même Bouhdiba écrit plus loin que celui qui s'en-
roman restitue peu ou prou ces conditions que nous
gage dans la voie de l'illicite, ne saurait trouver une
allons examiner maintenant dans Les Traces de la
issue honorable. Le drame humain est plutôt celui
meute.
de l'adultère, zinâ6 • Aussi ne sommes-nous jamais
plongés dans le tragique. Même s'il tombe sous le
1.1. La femme au foyer
sens que notre Imam El-Hadj Djigo, bien qu'investi
de l'autorité morale que lui confèrent son statut et
Nous allons étudier grosso modo cinq cas assez si-
sa fonction sociale, est enclin à la concupiscence
gnificatifs : Niakhalé, épouse d'un homme d'af-
souvent débridée. Seulement, dans le cas rapporté
faires nommé Gallo Diagne; Dieynaba, épouse
par Boubacar Boris Diop, l'Imam peut échapper à
de l'agent de police véreux Déthié' ; Nafissatou
la condamnation coranique, parce que les femmes
Touré, épouse du repris de justice Diéry Faye;
qu'il entreprend sont des veuves, car« la question
Sokhna, épouse du terne commissaire de police El
du zinâ ne se pose après le veuvage 7 ». C'est un
- Hadj Malick Dia; Fatou Kiné, la pétulante et
temps soit peu, une sorte d'amour par l'épreuve:
belliqueuse épouse du chétif vieux polygame
« Cette preuve par l'amour Mahomet lui - même
Baba SalI, commerçant de son état. Dans ce micro-
en fera plus d'une fois l'expérience avec Khadidja
cosme nommé Dunya (qui sur le plan onomastique
d'abord, avec Aïcha ensuite, avec la belle Zaynab8
signifie « pays, monde, communauté, société, etc.»
... ». Mais là s'arrête l'absolution de ce drôle
) le personnage-type du mal est représenté par EI-
d'Imam dont la conduite abusive est plus apparen-
Hadj Djigo. Il est Imam2 et de ce fait supposé être
tée à la luxure et à la gloutonnerie qu'à la sacralisa-
une référence morale et religieuse. Mais, comme le
tion du coït.
dit un autre personnage, Diéry Faye, « ... il n'aja-
mais eu d'autre préoccupation que de se remplir la
L'asymétrie comportementale de l'Imam El-Hadj
panse, de dépouiller les orphelins et de poursuivre
Djigo comparativement avec le commerçant Baba
la veuve de ses ardeurs jamais défaillantes aussitôt
SalI est assez cocasse. Voici une brève présentation
expédiée la Prière des morts3 • » Il prend même un
des deux notables par Diéry Faye, un personnage:
malin plaisir à tonner «contre les fornicateurs, les
usuriers, les calomniateurs et pas mal de monde en-
«... Par une de ces anomalies sans lesquelles
core4 • ». Cet hédonisme scandaleux dont la cible est
la vie en société ne serait peut-être pas pos-
presque toujours la femme trouve sa racine et sa
sible, personne ne semble s'apercevoir que
justification dans l'ordre social archaïque. Selon
l'Imam El-Hadj Djigo n'est pas le plus qua-
l'universitaire maghrébin Abdelwahab Bouhdiba :
lifié pour nous transmettre la sublime Parole
de Dieu. Il a de la prestance, une voix pure
«... Retrouver le sens des choses revient en l'oc-
et forte, des boubous richement brodés ... »
currence à s'interroger à la fois sur les fonctions
(pagel 98).
assignées au sacré et au sexuel dans le cadre d'une
civilisation déterminée. Et il ne s'agit pas tant de
Selon le même Diéry Faye:
montrer que le sexuel est d'essence sacrale ou
que le sacré est d'origine sexuelle que d'établir les
« Le vieux commerçant [Baba SalI] venait
voies et moyens selon lesquels le social profite
de se marier avec la pétulante et belliqueuse
tou.t à la fois de la majesté du sacré et de la puis-
Fatou Kiné. La jeune femme donnait bien
sance de la libido. L'Islam ne cherche nullement à
déprécier, encore moins à nier le sexuel. Il lui
1 Le regard de son fils Amar s'exercera sur lui comme une pression psychologi-
confère au contraire un sens grandiose et lui
que qui déclenchera en lui le sursaut qualitatif, heuristique: « ... Amar, son fils
aîné, "observait fixement. Déthié fut saisi d'épouvante en 'isant dans le regard
donne une investiture transcendantale telle que la
d~ l'enfant non pas de la haine ou une quelconque détresse mais un mépris
sexualité se trouve déculpabilisée. Prise ainsi
defimttf. [ ... ] Ce face à face fut le grand tournant de son existence. Cene nuit-
là, il se jura cent fois de devenir, au besoin par les moyens les plus malhonnê-
d'emblée en charge, la sexualité devient
tes, un homme riche, respecté et honnête. » ( p. BI ).
jaillissante et joyeuse. Elle est la référence et son
2 Imam: titre donné au successeur de Mahomet et à ceux d'Ali. L'Imam est le
chef de prière dans une mosquée. Il est donc celui qui dirige la communauté
contenu est pleine positivité. L'existence islamique
musulmane.
sera faite dès lors et de l'exercice de l'amour phy-
3 Boubacar Boris Diop: Les Traces de la meute, p.198

5
'Ibid. : p 199.
slque ... »
; Abdelwahab Bouhdiba: La sexualité en [siam, Paris, Quadrige/PUF,
[1975],1986, 32Op. pp.7-8.
.
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du souci à son commerçant de mari, le ma-
propre déchéance. Il se reconnaît « Père alcoolique
lingre et toussotant Baba SalI. Ce jour- là,
et irascible, petit flic nul» (pages 130). Mais pren-
elle avait ébouillanté l'une de ses trois co-
dre conscience de ce qu'on est n'est-ce pas le pre-
épouses.[... ]. Les notables étaient décidés
mier pas vers le désir de sortir du gouffre et monter
cette fois-ci à faire entendre raison à Fatou
en garde? En s'élevant, Déthié élèvera aussi
Kiné.[... ]. Chacun d'eux peaufinait des phra-
Dieynaba de la médiocrité à l'excellence. Dieynaba
ses et cherchaient dans sa mémoire délabrée
sera ainsi la seule épouse et mère qui émergera du
des proverbes et paroles adaptés à la circons-
fond abyssal généralement dévolu à ce type de
tance. » (page 199).
femme. Quant à Niakhalé, elle ne jouira pas de l'opu-
lence de son mari Gallo Diagne, richissime homme
Selon toute vraisemblance, Bada Sall, polygame
d'affaires toujours absent du foyer conjugal.
avéré, n'a pas la prestance et la vigueur de l'Imam
fornicateur. Tandis que El-Hadj Djigo soumet les
L'hyménée du couple Diéry Faye-Nafissatou Touré
femmes - les siennes et les veuves- et leur fait subir
débouchera sur la mort de la femme, bien que leur
un véritable martyr, Baba Sall, lui, subit la fougue
amour fût exemplaire autant qu'il peut l'être entre
batailleuse de sa quatrième épouse, Fatou Kiné qui
deux êtres. Hormis les couples ci-dessus régulière-
terrorise aussi ses co-épouses. Par certains aspects,
ment constitués jouissant de statut matrimonial
elle ressemble à la scandaleuse Ndella Sy des Tam-
avéré, constaté et attesté, il en existe d'autres qui
bours de la mémoire 9 du même auteur. Vivre en
sont occasionnels dictées par les impératifs sexuels
situation de polygamie n'est pas une sinécure comme
du moment. Ces couples se font et se défont pour
le prétendent, à tort, les musulmans. A moins d' op-
se reconstituer au gré des pulsions érotiques. Ces
ter pour l'irresponsabilité déréistique qui consiste
femmes sont souvent des péripatéticiennes ou des
en une interprétation tendancieuse du saint Coran.
prostituées socialement reconnues et intégrées, parce
La polygamie dans ce cas devient un dérivatif misé-
qu'elles sont des régulatrices de la libido masculine.
rabiliste qui chosifie la femme-esclave sexuelle ou
La plus connue d'entre elles est Fanta, la vendeuse
faire-valoir. Le romancier franco-togolais Tchakoura
d'akara qui fut partenaire consentante, aimée et
Sadamba en donne la peinture dans Femme Infi-
aimante de Diéry Faye; elle fut aussi partenaire pas-
dèle lo. La femme au foyer, passées les délicieuses
sive du policier Déthié. Mais il en est aussi que
années de sa fraîcheur, entamée par la maternité qui
Diantal ennoblit.
débouche inévitablement sur les flétrissures dues à
la monotonie d'une vie de lassitude et de mimétisme,
1.1.
se transforme en une sorte 'de «poids mort ». Pour
La péripatéciennell
le commissaire Dia, Sokhna sa femme « avait très
vite vieilli mais essayait, avec une obstination bou-
La prostitution a toujours été florissante à travers
leversante de rester belle et désirable. »Mais« main-
toute 1'histoire et à travers tous les pays. Elle a été
tenant ils étaient revenus à une approche plus clas-
même consacrée comme le plus vieux métier du
sique du devoir conjugal et, de toute façon, trou-
monde. Elle peut prendre plusieurs formes et par-
vaient toujours quelque prétexte pour s'en dispen-
fois déguisées. Certaines formes de polygamie sont
ser. Non, cela ne marchait plus. Seule la souffrance
en faite de la prostitution socialement légalisée. La
naissait désormais de la fusion de leurs corps. »(page
82).
6 Ibid.: p.35.
Le sort de Dieynaba « l'épouse décharnée, crain-
7 Idem: p.41.
• Idem. « Récapitulons rapidement la liste des femmes du Prophète Maho-
tive, aux seins flasques ... » du policier Déthié est
met: Khadidja,la première dame de l'Islam. Noble et femme d'affaires;
encore moins enviable.
protectrice, maternelle et tellement aimante. Mais AIcha aussi la rouquine
ingénue; la belle Zaynab aux atours incomparables; Hafça, fille d'Omar le
fidèle compagnon ; Um Salàm, la veuve inconsolable d'un cousin martyr ;
De'thié« était de plus en plus excédé par la veule
Çafya,Iabellejuive;lacharrnanteMaymoona,belle-sœurdel'oncleAbbas
tout puissant; Khaw!a,l'esseulée qui chercha et trouva refuge dans le harem
obstination de Dieynaba à n'être qu'une épouse
duprophète;Rayh'âma,labellecaptivequihésitatantàseconvertirà
Il 1 .Ç.'
h
d
rt
l'Islam et qui finalement préféra le statut de concubine non musulmane à
docile. Voulait-e e ui laIre onte e son compo e-
celui d'épouse mère des croyants ... Innombrable harem sacré ! »(p.32). Une
ment? Il avait envie de hurler: "Meeeeeerde !!!" »
dizaine de femmes !
.
.
l' 'tat
"BoubacarBoris Diop: /es Tambours de la mémoire, Paris Nathan, 1987,
(page 130). Déthié a néanmoms conscIence que e
237p., l'Harmattant, 1990
misérable de sa femme et de sa famille reflète sa
10 TchakouraSadamba : Femme Infidèle, Lomé, NEA, 1998, 142p.
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demande crée l'offre. Abdelwahab Bouhdiba a mon-
faisait commerce de sa chair et Diéry Faye
tré comment les relations sexuelles reposaient en
ne s'en émut jamais. C'était cela ou une mi-
islam sur une vision globale et totalisante de la chair,
sère encore plus noire ... » (p.117-118)
comment la rotation des femmes et par voie de con-
séquence des hommes était organisée, comment
C'est par cette scène érotique que Diéry Faye et
enfin les structures de la famille polygame, la pro-
Fanta se rencontrent. Il est explicitement écrit que
cédure très simple du divorce et du remariage per-
« Fanta faisait commerce de sa chair et Diéry Faye
mettaient une satisfaction adéquate pennanente,
ne s'en émut jamais ». Fanta faisait le trottoir sous
variée, renouvelée et toujours licite du désir char-
la protection attentionnée de Diéry Faye. Un narra-
nel l 2. Vu sous l'angle de la dialectique du maître et
teur, en l'occurrence Mansour Tall, peint un por-
de l'esclave une prostituée fait inévitablement des
trait contrasté de Fanta :
hommes qui copulent avec elle des prostitués, qu'ils
soient mariés ou célibataires. Ainsi le journaliste
« La vérité oblige à dire que, vue de
Mansour Tall, célibataire de son état, qui change de
près, Fanta était plutôt nulle. Elle avait une
femmes tout le temps. Ainsi tous les polygames in-
forte musculature, des gestes brusques et le
satiables du roman. Mais, revenons aux femmes qui
visage presque triangulaire tenniné par un
ont fait de la prostitution un métier. Ainsi nous con-
mentons plat. »
sidérons le cas typique de Fanta. Nous allons analy-
ser les relations qu'elle a eues respectivement avec
Cette esthétisation de la laideur physique de la
Diéry Faye, Déthié et avec d'autres hommes enquête
femme a son répondant dans la poétisation de fu-
d'exutoire de leur libido.
sion chimique des corps. Sinon, comment expli-
quer que « Diéry Faye fut pour elle un amant atten-
? Fanta et Diéry Faye.
tionné », que, à cause d'elle, Déthié fréquente très
assidûment tous les soirs le "Back Sound" le bar
Fanta habite un bidonville de la périphérie de Da-
de Tonton Do ?
kar, Simbong. Diéry Faye sort de prison et va s'ins-
taller à Simbong.

Fanta et Déthié.
« Diéry Faye trouva Simbong bien plus
Qui est Déthié ? Déthié est policier; il est marié et
étendu qu'il ne s'y attendait. Par-dessus une
père de six enfants. Il habite un quartier populaire
clôture, il aperçut une jeune femme à moitié
nommé Ouagou-Niayes, mais on l'y voit beaucoup
nue, penchée au-dessus d'un fourneau mal-
moins souvent qu'à Simbong ou dans le bar de
gache. Des perles de sueur scintillaient sur
Tonton Do. Et pour cause; il était éperdument
ses seins fennes et droits. [... JElle était oc-
amoureux et donc le rival de Diéry Faye.
cupée à faire frire'des beignets d'akara et
chaque fois qu'elle lançais la pâte blanchâ-
« Pour épater Fanta il payait sans cesse la
tre dans la poêle elle se rejetait en arrière
d'un mouvement gracieux.[ ... J. Je peux te
tournée, racontait ses exploits à Guadalca-
dire. dès à présent qu'entre la vendeuse
nal et énumérait les ministres à qui il avait
d'akara - elle s'appelait Fanta- et ton grand-
passé les menottes« du temps, disait-il d'une
père il y eut une très longue liaison. Ils se
voix avinée, ou ils faisaient leur petit malin
seraient mariés si Fanta n'avait été empor-
tée brutalement par la méningite. ['" J Fanta
dans l'opposition» »(p.128)
Il ne manquait aucune occasion pour éblouir Fanta
et l'amener à lui céder. Il finit par arriver à ses fins.
" Au sens philosophique de ce tenne est synonyme d'aristotélicien(ne) ou
partisan de la doctrine d'Aristote.
.
.
Au sens purement littéraire (ou par allusion plaisante au sens grec pénpatem
« Une nuit, Déthié décida que son affairç
« se promener») il désigne la prostituée, femme qui racole dans la rue
moyennant de l'argent.
. .
, .
était dans la poche. Il invita Fanta dans l' ar-
La prostitution est le fait de « livrer SOlI corps aux pl3JslJS sexuels d autruI,
rière salk .Elle le suivit sans hésiter. Eten-
pour de l'argent» (Dalloz) et d'en faire métier. La prostitution ~t pren~e.
des proportions inquiétantes aux mains des proxénètes ou syndICats de cnml-
.due sur le petit matelas de paille posé à même
nels organisés.
le~l ,j;imbes écartées, elle s'-offrit au gros
12 Abdelwahad Bouhdiba : Op. Cil. P.228.
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tas de graisse dont la sueur lourde comme
de Fanta, banale en soi, reflète les malheurs des filles
de l'huile lui inspirait un profond dégoût.
de sa profession, il n'en est pas toujours ainsi des
[... ] Elle laissa l'homme faire son affaire, les
prostituées qui fréquentent le fameux gentleman
yeux rivés au plafond, bien révolue à ne pas
Diantal. Cela ne signifie nullement que celles-ci, hors
accéder à son désir de tendresse.[ ... ] Tout
la délicate attention et la dilection si pénétrante et si
lui importait si peu. Elle semblais lasse d'elle
pure dont cet homme les comblait, ne sont pas lo-
-même, de ce qu'elle étais obligée de faire
gées à la même enseigne que Fanta. Avec lui elles
pour vivre et de cette lutte sourde et féroce,
passent cependant des moments agréables:
chaque jour, contre les hommes. » (p. 129)
~< Faute de mieux, on l'avait surnommé
L'acte sexuel met ~n scène une « Victime dévouée «
Diantal, qui était une déformation de" gentleman".
et son bouiT~au «attristé «, plein de regrets et qui
La seule chose qu'on pouvait affirmer avec une pe-
n'en pèche pas moins, si tant est que Déthié pos-
tite chance de ne pas se tromper, c'était qu'il raffo-
sède une conscience capable de contrition. Mais ici
lait des putes du" Black Sound" et que celles-ci le
encore le destin féminin coïncide avec la douleur et
lui rendaient bien. Diantal les emmenait dans son
le masochisme. L'équivalence sexualité = douleur
deux-pièces, tout proche, de Niayes-Tioker et les
= mort que l'on trouve encore chez Hélène
traitait comme de véritables amantes. Il leurs pré-
Deutsch13 comme composante caractéristique de
parait lui même un steak ou des œufs brouillés et
la psyché féminine se double chez Jules Michelet
couvrait ensuite leurs corps nus de ceintures de per-
de l'équation sexualité féminine = folie = sadisme.
les parfumées, les maquillait longuement et leur pas-
la fonction sexuelle est trouble, dégradante , elle
sait autour du cou des bijoux en or, en leur murmu-
obscurcit l'homme le plus civilisé, lorsque « rugit»
rant des poèmes, tout cela avec une grande délica-
en lui « la férocité du désir ». Mais la femme, elle
tesse. Elles disaient à qui voulait les entendre que
aussi, est en pa~e de devenir une « furie» au mo-
pour Diantall'amour était un rite complexe et une
ment de l'œstrus. Michelet élabore ainsi une politi-
célébration solennelle... »(p.159).
que du manque, de l'entropie sexuelle. La femme a
.le choix entre le rôle de goule ou d'administratrice
Toutes proportions gardées, nous pouvons rappro-
parcimonieuse des plaisirs interditsl~.
cher la technique érotique de Diantal de celle dé-
crite dans le roman chinois Jéou-P 'ou -T'Duan ou
Faible résistance dans une résignation pathétique
la chair.
face au pouvoir de l'argent et des hommes qui la
Comme tapis de prière1 8. Nous lisons dans la« Note
manipulent à leur guise, la femme est livrée à toutes
sur Jéou-P 'ou- T'Duan et son auteur» :
les humiliations et à toutes les vilenies. Si l'on re-
monte un peu plus dans l'histoire de la littérature
« Il semble que le plaisir de Wei-yang-cheng
africaine, c'est, on s'en doute, Jeseph Owono qui
ne soit pas sa propre jouissance mais celle
s'est le plus intéressé à la condition féminine. Dans
de ses comparses et il subit même, pour être
son roman Taffte Bella, Roman d'Aujourd'hui et de
plus capable, une pénible opération pratiquée
Demain15 il consacre le 'second volet à la descrip-
par un magicien. La technique érotique chi-
tion des avatars de la vie de l'héroïne éponyme. La
noise paraît donc centrée sur la jouissance
tradition ne lui reconnaît que le devoir de subir son
qu'on donne plus que sur la sienne pro-
sort de marchandise, vendue, échangée, donnée en
pre 19 .»
gage et partout maltraitée si elle n'est pas persécu-
tée par pur sadisme. Mais on lit aussi dans L 'Har-
13 Hélène Deustch : La psychologie desfemmes, Paris, P.U.F ., 1973
mattanl6 de Ousmane Sembène que le. catéchiste
"Jules Michelet: Lafemme, Paris, Flammarion, 1981
hr ·
K
b
h'
"Josephowono: TanteBella,Romand'Aujourd'huietdeDemàin,Yaoundé,
polygame - un péché pour un c étlen -
oe og 1
Librairie« Au Messager» 1959,292p
martyrise ses femmes. Mongo Beti a donné ce titre
,. Ousmane Sembène : L'harmattan l, référendum, Paris, Présence Africaine,
très fort à un de ses romans Perpétue et l 'habitude
~;~~~:~~eti :Perpétue et l'habitude du malheur, Paris, Buchet-chastel,
du malheur pOut souligner la relation entre le mal-
1974, 303p. p.87.
1 . d 1Afri
l'
'8 Li-yu: Jeou-P'ou-T'ouan ou la chair comme tapis de prière, tard. frsepar
heur de la jeune femme et ce ut e'
que, «autre
Pierre Klossowski, Préface de René Etiemble, Paris, Société Nouvelle des Edi-
Perpétue, celle qui, ayant toujours été, serait de
tions Jean Jacques Pauvert, 10/18,[ 1962], 1974, ISBN 2-264-0264-0213 1-4,
même éternellemehtl 7 ». Parallélisme symétrique qui
317p.
montre tout le tragique de la situation. Mais si la vie
19 Ibid., p.306.
Revue du Ç.AMES - Nouvelle Série B, Vol..007 N° 1-2006 (1"r'Sem~stre)
121

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Sciences sociales et humaines
L'extase spirituelle et l'extase charnelle forment un
tion plus vaste, celui de l'Afrique. C'est ce
tout. Retenons, pour clore ce chapitre, avec A.
qui légitime l'émergence d'un troisième type
Bouhdiba que la prostituée est une « femme hots la
de femme dans le développement qu fémi-
loi », elle est atypique. Mais précisément en tant que
nisme littéraire2 3••• »
telle correspond à un type social déterminé. Dans
l'organisation sociale traditionnelle elle est l'exu-
Et c'est justement ce type de femme que Boubacar
toire, la soupape de sûreté. Aussi est-elle para-insti-
Boris Diop inscrit dans ces romans: Ndella Sy dans
tutionnalisée toujours, légitimée très souvent, léga-
Les Tambours de la mémoire, Khadidja dans Le
lisée parfois.
Cavalier et son ombre_et Ndèye Raki Mbengue dans
Les Traces de la mémoire.
« La prostituée. a un rôle précis, une fonc-
tion bien délimitée dans la cité musulmane.
2. La femme intellectuelle 6U des temps
Elle canalise le vice et en le rendant statu-
modernes
taire cherche à le circonscrire. La tolérance
de fait à l'égard de la prostitution relève
Comme nous l'avons annoncé plus haut, sous cette
d'une dialectique du normal et du patholo-
rubrique nous nous intéresserons uniquement au
gie20 ».
personnage Ndèye Raki Mbengue que nous nom-
merons, comme Mansour Tall, Raki. Voici comment
La femme est ici considérée à la fois comme un ad-
elle est présentée par Mansour Tall.
juvant ou un auxiliaire sexuel et un bouc-émissaire
réceptacle des vices de la société.
« Comme c'est étrange, Raki a les yeux
bridés, le visage plein, lisse et allongé des
De la phallocratie triomphante à la mystique de la
Asiatiques. [...] Raki aura exactement vingt
femme intellectuelle émancipée ou moderne, surtout
trois ans le mois prochain. Elle est la petite
citadine, il y un fossé que des romanciers ont tenté
fille de Diéry Faye24 » (p.93)
de combler. Nous ne citerons en exemple que deux,
personnages-types de la femme nouvelle ou des
La filiation remonte à Nafissatou Touré sa grand-
temps modernes: Rama de Xala21 de Ousmane
mère et sa mère s'appelle 2 5Mbayang, nom qui étais
22d'H
.
Sembène et Wali de La nouvelle romance
enn
celui de la mère de Diéry Faye. Son portrait spiri-
topes. Rama est une étudiante aux idées avancées ;
tuel et intellectuel est encore plus saisissant que sa
elle milite, manifeste, se rebelle. Son activisme et
morphologie de type asiatique plutôt atypique:
son agressivité l'opposent à sa mère résignée qu'elle
chérit. Son père est l'ennemi à abattre. Elle se défi-
« Raki a depuis sa tendre enfance, une in-
nit comme « une musulmane moderne» et heurte
telligence p~u commune, Elle sait lire à
de front la tradition et la religion. Dans son roman
travers les êtres et percevoir, avec une
Lopes reprend et enrichit le personnage Mbâ de sa
sûreté presque monstrueuse, les situations
nouvelle. «La fuite de la main habile» par le biais
les plus complexes. A neuf ou dix ans déjà
de celui d'Awa qui joue au début le rôle de mentor
son univers intérieur semblait d'une ri-
auprès de Wali. La grande leçon est, chez ces fem-
chesse inouie. Plusieurs fois je l'ai surprise
mes modernes
o
,
l'affranchissement de la tutelle mas-
absorbée dans la prière avec une gravité qui
culine.
m'a toujours cauilé une grande frayeur. De-
- .-
bout derrière elle à épier par une discrète
« Il s'agit, pour cés personnages, de rompre
ouverture du rideau je m'émerveillais de ce
avec une tradition négative qui maintient
face à face entre Dieu et une enfant. Je pen-
pour la femme un idéal de vie fait d'efface-
sait, ébloui : le tendre regard de Dieu sur une
ment et de servitude. [... ] Ces romanciers
enfant. L'irrationalité même de la situation
s'accordent pour voir dans l'éducation, l'ac-
étais pour moi un signe manifeste, irréfuta-
quisition d'un métier, la voie la plus sûre de
ble de la puissance du divin2 5. »(p.95).
l'émancipation des femmes. Insensiblement,
le problème féminin cesse ainsi<le ressortir
Intelligence de surdouée et dons supranormaux
au conflit des générations pour n'être plus
caractérisent Raki dès sa tendre adolescence. Cela
que le pendant d'un mouvement de libéra-
-
122
Revue du CAMES - Nouvelle Série B, Vol. 007 N°-1-2006 (1er Semestre)

Sciences sociales et humaines
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
fait dire par le narrateur Mansour Tall au lecteur
mun de.la femme africaine ou d'en être la contemp-
que l'irrationalité même de la situation de Raki con-
trice, s'élève au-dessus de la «multitude vile» par
templant Dieu était pour lui un signe manifeste, ir-
la qualité de la recherche qu'elle entreprend pour .
réfutable de la puissance du divin. Raki est dans la
mieux comprendre, analyser et e.xpliquer l' « Affaire
posture d'une orante en chair et en os. Comment la
Kaïré » à laquelle son grand-père Diéry Faye était
sublime beauté physique de Raki, et comment la
très étroitement mêlé. Elle lit et étudie méthodique-
sublime beauté intérieure de celle dont le pur regard
ment le rapport du commissaire Dia, pose des ques-
contemple le monde invisible, pouvaient-elles pas-
tions à Mansour Tall, dont l'équivalent hypocoristi-
ser inaperçus de son entourage? Nous avons tous
que est Paa'Mansour - ce dernier a été lecondisci-
fait plus ou moins l'expérience d'une grande com-
o
pIe de la victime Kaïré et l'ami du victimaire Diéry
munion d'âme avec un être aimé ou encore avec un
Faye -, fait des rec0l:lpements, recueille les moin-
auteur spirituel qui semble dire tout ce que nous
dres traces indiciaires et minutieusement travaille
pensons de profond et que nous ne savons formu-
au rétabijssement de la vérité. L'épistémologie, la
ler. Ajouter quelque chose à cette parole serait l'al-
logique et la dialectique sont manifestes dans son
térer, seul le silence dans l'adhésion du cœur et de
travail de mémoire2 6 qui s'inscrit lui-même dans une
l'âme intensifie cette parole. Tout l'agir de Raki est
question plus vaste de devoir de mémoire27. De ce
lié à la parole divine. C'est le silence qui accompa-
fait Raki est, plus qu'une femme intellectuelle des
gne les plus grandes oblations. C'est le ravissement
temps modernes et actuels, une anticipation de la
qui établit une ineffable circulation d'amour que
femme africaine de demain. Avec elle commence
Paa'Mansour et la mère de Raki perçoivent. Ici, cette
l'âge d'or de la femme totalement épanouie en har-
jeune femme sénégalaise semble démentir certains
monie avec son milieu. tout comme le « trio de jeu-
préjugés tenaces même provenant des femmes.
nes avocats téméraires» qui défendirent jadis son
Qu'un certain sénateur français du Doubs, Herniet,
grand-père Diéry Faye et accusèrent de tyranniques
ait pu écrire en1979 que« plutôt que d'envoyer les
notables obtus le Conseil des Anciens de Dunya dont
femmes au travail, mieux vaut les envoyer au lit »
le sinistre Yatma Ndoye, Raki était pugnace dans sa
pour e~courager la natalité et réduiPe le chômage
quête de la vérité. C'est la raison fondamentale de
des hommes, cela peut se concevoir en dépit de l' ar-
son attachement si fort à celui qu'elle appelle
.chaïsme avéré d'une telle pensée. Mais lorsque le
Paa'Mansour et qui l'initie,à la sociologie de la con-
jugement vient d'une femme, le lecteur y perd son
naissance par des exemples suivants:
latin, à moins que cel~ soit une antiphrase. Hélène
Deutsch que npus avons citée plus haut soutient que
Sur le tard et peut-être sans en avoir une
l'intellectuMtté de la femme est conditionnée, dans
claire conscience, Paa' Mansour a pris sa
une large mesure, par la perte de belles qualités fé-
revanche en misant sur la'seule épaisseur du
minines : elle suce la sève de la vie affective et aboutit
réel et en traitant par la dérision ses nom-
à un appauvrissement de cette vie soit dans sa tota-
breux rendez-vous manqués avec la fiction,
lité soit dans ses qualités émotives spécifiques. La
avec son propre imaginaire.· Paa' Mansour a
femme 'intelleptuelle n'est pas Autonoë, la Sage, qui
fait mieux: me raconter l'histoire doulou-
tire sa sagesse des sources profondes, de l'intuition,
reuse de Kaïré et de Diéry Faye, et, au gré
cette irituition dont Dieu dota la femme féminine;
des traces de la meute, hasardeuses emprein-
tout ce qui touche à 'la recherche et à la connais-
tes de sang sur le sable, me raconter aussi
sance, toutes les sources d'aspirations culturelles
des histoires. [ ... ]
humaines qui exigent une méthode strictement ob-
J'ai envie de dire comme mon grand-père
jective, sont, sauf de bien rares exceptions, le do-
Diéry Faye : « Le temps passe mais les temps
maine de l'intellect humain, de la puissance spiri-
ne changent pas. «[ ... ] Ils avaient leurs
tuelle de l'homme, de cette puissance avec laquelle
faQtoches qui tendaient la main aux diri-
la femme peut rarement rivaliser. Tout ce que l'on
geants des pays riches en disant: «Aidez-
observe coilfirme ce fait que la femme intellectuelle
nous à survivre, mais attention nous avons
est virilisée; la connaissance vivante a faii. place chez
notre fierté, soyez gentils de ne pas nous
elle à une ratiocination froide et stérile. Nous sa-
mépriser! «28
vons que Raki a un fiancé, David, et qu'elle est dé-
sirable puisque «le docteur Thiam lui-même [lui]
Elle associe, dans son appréhensitt, de la situation
fait du charme». Raki, au lui de subir le sort co~-
Revue du CAMES - Nouvelle Série B, Vol. 007 N° 1-~006 (ter Semestre)
123

_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ Sciences sociales et humaines
socio-politique de son pays et partant de l'Afrique,
dryankés s'inscrivent à leur manière sur l'échiquier
satire et humour caustique. Elle brocarde ces hom-
socio-politique du pays.
mes politiques qu'elle qualifie d'« une tragique in-
signifiance ». Nous pouvons ajouter à cette tragi-
3. La courtisane sénégalaise: les célèbres
que insignifiance des dirigeants africains et de ceux
dryankés sont-elles des égéries ou des hétaïres?
qui aspirent à prendre leurs places, leur incurie et
leur veulerie proverbiales, ainsi que leur incapacité
Abraham et Isaac furent sauvés, comme nous pou-
notoire à planifier le développement humain dura-
vons le lire dans le livre de la Genèse, par la beauté
ble. Le Président de la République du Sénégal fictif,
de leur femme. Ils se firent de cette beauté une sorte
Idrissa Dieng, plaide l'irresponsabilité politique de
de bouclier en même temps que trop de beauté, de
son gouvernement qui montre et démonte le tragi-
distinction les effrayait. Plusieurs fois les femmes
que de la situation.
de la Bible sauvèrent le peuple d'une extermination
partielle ou totale. Plus qu'un destin national, le sa-
lut du monde fut remis à chacune de ces femmes
"Mon gouvernement n'est pas responsable
dont l'arme principale fut la beauté. On criera en-
des morts de Fallel, de Belenti et Dianari."
core au mépris de la femme présentée comme la
Il a soigneusement évité d'utiliser l'expres-
femme fatale c'est-à-dire celle qui fait tomber, il faut
sion maudite "déchets toxiques" mais per-
voir plus loin et relever dans les textes que la Bible
sonne ne s'y est trompé. [... ] Il faut dire que
ne considère la beauté extérieure seule que comme
les journaux ne sont pas avares de descrip-
. une tare, « un anneau d'or au groin d'un pourceau,
tions apocalyptiques, ils parlent d'enfants
une femme belle mais dépourvue de sens! » (Pr.ll,
risquant de naître avec des malformations,
22). On est loin du : sois belle et tais-toi, du machi-
de disparition totale des forêts et de 'choses
nisme moderne. La mission salvatrice de ces fem-
de ce genre.2 9
mes implique une certaine connivence avec le divin
et l'infusion de grâces spéciales; elles sont autant
d'annonces de la Femme par qui le salut et le bon-
Ici, le réelle dispute à la fiction romanesque, car
heur arrivent3 J. Une dryanké peut être comparée à
Tchernobyl (avril 1986), mais aussi Hiroshima (6
l'Esther de la Bible qui fut bonne pour Mardochée
août 1945) et Nagasaki (9 août 1945) au Japon et
mais amère pour Aman. Dans le roman l'histoire
Bhopâl (décembre 1984) en Inde donnant des illus-
des dryankés occupe environ deux pages mais cet
tration tragiques des effets des gaz toxiques sur la
espace apparemment congru convoque un dévelop-
santé des populations. Contre une risible obole qui
pement qui remonte le cours du temps et une polé-
obère les finances et l'économie de nos pays, nos
mique qui peut enflammer les foules et déchaîner
hommes politiques maudits acceptent de polluer de
des passions parfois incontrôlables. Elles sont su-
déchets toxiques mortifères'les sols et l'air d'Afri-
jettes de controverses et de joutes oratoires qui peu-
que. C'est ainsi que Raki dit que «Le Président Dieng
vent déboucher sur les violences physiques. La dis-
ne vaut pas mieux que Baay Gallaay et en plus il a
cussion sur les dryankés soulève trois thématiques
infiniment moins de panache car ce dernier savait
corrélées: l'économie, le social et la politique. Qua-
au moins faire rire son peuple aux larmes. Le
tre types de personnages animent la discussion, cha-
président Dieng est un crétin. Tout le monde le sait
cun selon son tempérament et son point de vue.
mais personne ne peut rien faire, voilà notre pro-
Christian Ehouhé, l'Ivoirien, est le patron du jour-
blème. 30» Le Président Dieng est le prototype même
nal Le Progrès3 2 auquel collaborent Mansour Tall
des dirigeants africains démagogues, sans pro-
et Zale. Le premier est plutôt plein d'humour; le
gramme, sans organisation soumis ou plutôt assu-
second joue le rôle de médiateur tandis que le troi-
jettis à une certaine hétéronomie de la volonté, au
sième, le plus exalté et ardent défenseur des dryankés
sens kantien de l'expression.
contre Idrissa Dieng leur pourfendeur acharné. Mais
Mais si Raki, intellectuelle des temps modernes et à
qui sont ces dryankés qui suscitent tant d'intérêt
venir, s'engage avec une lucidité toute scientifique
auprès de ces intellectuels africains? Sont-elles des
dans la lutte politique pour le développement dans
hétaïres (prostituées d'un rang social élevé) ou des
tous les domaines de l'Afrique, les fameuses
égéries (conseillères, inspiratrices d'un homme po-
litique, d'un artiste) ? De cette discussion jaillira la
124
Revue du CAMES - Nouvelle Série B, Vol. 007 N° 1-2006 (1er Semestre)

Sciences sociales et humaines
-------------.....,....---------
·lwnière. A priori le lecteur s'aperçoit aisément
silence goguenard se tourna vers lui :
qiJ'wte dryanké joue cette double fonction socio-
- Tu crois vraiment qu'il suffit de taillader la
politique.
croupe des dryankés
pour résoudre les problèmes économi-
A en croire laIe, les dryankés font partie intégrante
ques ?34 »
de l'Histoire du Sénégal. De ce fait, il « trouvait
totalement mjustifiée la prétention de Christian à en
Selon Idrissa Dieng, très brillant cadre frais émoulu
Savoir plus que lui sur les dryaokés. Les dryaokés,
des universités occidentales, les dryankés ont une
c'était wte affaire strictement nationale, la fierté de
part de responsabilité dans la pauvreté des popula-
tout tm peuple et l'Ivoirien n'avait pas à la ramener
tions du Sénégal.
avec ses statistiques et autres considérations anthro-
pologiques fwn~ [ ... ]. Des bonnes femmes
«A en croire Idrissa Dieng, leur volwne char-
aussi femmes que les dryaokés, il n'en existe nulle
nel peu raisonnable et leur goût du luxe et
part: ailleurs sur cette terre3 3 ! » Cette prétention
de la bonne chère constituaient de sérieux
exclusivisme, ce chauvinisme de laIe n'a d'égale
obstacles à la prospérité économique de la
que les calculs ridicules de Idrissa Dieng que l'Ivoi-
Nation. Il ne leur contestait ni le raffinement
rien réswne en un ironique dithyrambe :
ni un indubitable sens esthétique mais les
chiffres étaient I~ précis et terrifiants: avec
« Christian qui s'était enfermé depuis l'arri-
les 70% de ce que dépensait une seule
vée de Mansour Tall dans un
dryanké par an on pouvait, pendant la même
période, nourrir, loger, vêtir et éduquer 6,3
enfants. Pour une société civilisée, le choix
n'était pas douteux. Idrissa Dieng fit un pa-
li> Abddwahab Bouhdiba : Op. Cit. p.236.
rallèle entre la maigreur des jeunes femmes
XJ SenllléncOulmane :XJ1Ia. Pé. Présence Afiicaine. 1973. 171 p.
nipponnes et la puissance industrielle d u
rtHalril.opes : La nouvelle romance, Yaoundé,CLE, 1976, 194p.
n MoIJamadou Kane : Roman africam et traditions, Dakar, NEA, 1982,
Japon. Il indiqua aussi qu'en prenant à bras
SJ9p,pAI7
le corps la question dryanké on arriverait
lllINouJ1OlIIipons.
1t NouJsouIignons polD'faire ressortir les qualités intellectuelles exception-
aisément à relever .. le taux de moralité na-
ndbde Jajeune femme qui n'était alors qu'une enfant.
tionale" et à réduire les détournements de
:ll\\'Tranil demémoire : JIOlIS dirons que c'est" l'effort de rappel [qui] consiste
deniers publics, puisque chacun le savait,
aoercprélenlafion schématique dont les éléments s'entrepénètrent en une re-
l'argent volé à l'Etat se convertissait non en
pRsentàion imaginéedont les parties sejuxtaposent Il. C'est en cela que l'ef-
liJrt de rappel constituent un cas d'effort intellectuel et s'apparente â l'effort
investissements générateurs d'emplois màis
d'infefleàion.
en câlineries, râles de jouissance et autres
27 Le devoir de mémoire consiste pour l'essentiel en devoir de ne pas oublier.
Ainsi, une bonne part de la recherche du passé est-elle placée â l'enseigne de la
cris obscènes dans des boudoirs que,
. . .de ne pas oublier.
d'ailleurs, il serait judicieux de transformer,
~ Baw: Pourapprofoodir b deux concepts corrélés au «macroconcept "
delllémoiK, on peul consulter : Paul Ricœur : La Mémoire, L'histoire, L'Oubli,
vu leur nombre considérable, en logements
..... SeuiJ.Coll. L'ordre Philosophique. 2000. 686p, p.36-37.
sociaux.35 »
HaIri Berpon : Maliéres et Mémoire. Essai sur la relation du corps à l'esprit
(l196).inŒcma,inIroducbondeHenriGouhier,textesannotésparA.Robinet,
édiüm du centenaire, Pé, PUF, 1963, P.225-235.
Comparaison n'est pas raison, dit René Etiemble.
1l> IJoabac;wBoris Diop : Les Traces de la meute,p.265. Nous soulignons.
l»Jdem.
Mais ici les élucubrations de Idrissa Dieng - qui
lllIJbidem, p. 267. Baay GaIIaay est un personnage de la fable que KaTré
'*"'*
deviendra d'ailleurs plus tard un Président de la
8lŒjeunes adolescents de" Bambaata Boys~. Voir« Fragments de la
faille-, pp. 219-23S du roman. Nous soulignons. Ala page 12, nous lisons
République, clone de tous ses pairs africains plus
. -aiJIeuB : " BaayGalIaay ètait un quinquagénaire maigrichon et farfelu,
occupés dans les alcôves que sur le terrain de la
:illJJaeIJf de bome chère et â l'occasion voleur â la tire ou Guide Eclairé de la
NaIion.. lHbIeur, ram.on, ce tyrlIn domestique finissait toujours par se faire
planification pour le développement hwnain dura-
. -.-raoe de ses quatreépouses ; il n'ètait téméraire qu'après s'être
ble de leur peuple - ont le mérite d'établir que l'art
-.tqu·iJ n' y avait plus de dangerrnais ne faisait pas tant de manière pour
~ leridicule chaque fois qu'il pouvait y trouver son compte... Il
de gouverner en Afrique confine à la quadrature du
J"EpInlm : Marie mtime. Elivations sur le nom de Marie, Paris, Editions
cercle. Lajactance d'Idrissa Dieng cache malle nar-
daBéllliludes.:Z-édition. 1991. 19Ip,pp. 34-35.lireaussÎ LeCanlique.
tt ~ . . : Dans Les Traces de la meute, une place importante est faite
cissisme béat propre à une classe politique africaine
an média dont lesjournaux L'JllCUpeaclaot, UbiratioD (français), Le Ca-
de cols blancs qui croit mordicus qu'il suffit d'être
&nI1NrI. Le Mad. d'Arrtq-. Le SoIdI. La référence à la presse comme
un JOUfien 8lŒ Droits de l'Homme et â la démocratie est récurrente dans toute
un intellectuel de haut rang pour être le meilleur
la production romanesque de Boubacar Boris Diop. Rappelons que l'auteur est
Président de la République. C'est Mansour Tall qui
Iui-mànejoumaIiste.
Rnw d. CAMES - Nouvelle Série B, Vol. 007 N° 1-2006 (1 er Semestre)
125

fait apparaître la dimension d'égérie des dryankés.
Parlant à Idrissa Dieng dont il pressentait l'aspira-
tion irrésistible à la magistrature suprême de l'Etat,
il lui dit : « Un conseil de grand frère, petit: si tu
BIBLIOGRAPHIE SELECTIVE
touches aux dryankés je ne marche plus avec toi et,
crois-moi, je ne serai pas le seul ! Aucune grande
1. ROMANS
carrière politique n'est possible sans les bonnes fem-
mes, pigé? Idrissa Dieng fit oui de la tête.3
1.1. ANANOU, David, 1971. Le Fils du Fétiche,
6 ».
Idrissa Dieng en retiendra la leçon et même en ti-
Paris, Nouvelles Editions Latines,
rera profit pour atteindre la magistrature suprême.
2e éd., 217 p.
Ici un parallélisme symétrique, à titre comparatif,
1.2. ATWOOD, Margaret, 1993. La Voleuse
peut bien s'établir entre les dryankés, considérées
d'hommes, trad. française de Anne
par les Sénégalais comme détenant un pouvoir sal-
Rabinovitch, Paris, R. Laffort, 601 p
vateur, et les femmes de la Bible citées ci-dessus.
Leur vertu callipyge ajoute à leur don d'interces-
1.3. BADIAN, Seydou, 1958, 1963, 1972. Sous
sion quelque chose de divin qui les place au-dessus
l'orage (Kany), Paris, Présence Africaine,
du commun des femmes et les rend indispensables
183 p.
et nécessaires. Aphrodite (ou Venus) n'était-elle pas
une déesse ?
1.4
, 1976. Le Sang des masques, Pa-
ris, R. Laffont, 251 p.
Au total, Boubacar Boris Diop fait à la femme une
place exceptionnelle dans ses romans. Ici nous
1.5
, 1977. Noces sacrées, Paris, Pré-
n'avons parlé que de quelques femmes, chacune
sence Africaine, 150 p.
ayant une qualité sociale pour la régulation des re-
lations humaines et du mieux vivre ensemble. Nous
1.6. BEBEY, Francis, 1968. Le Fils d'Agatha
n'avons pas étudié le cas de la femme écrivain-con-
Moudio, Yaoundé, Clé, 208p.
teur (Khadidja dans Le Cavalier et son ombre), de
la femme messianique rompue en l'art de la polé-
1.7. BEN JELLOUN, Tabar, 1987. : La Nuit sa-
mologie ou la science de la· guerre (Johanna
crée, Paris, Seuil, 191 p.
Simentho dans Les Tambours de la mémoire). Le
lecteur attentif s'apercevra que Diop assigne à la
1.8
, 1991. Les yeux baissés, Pa-
Femme noire une mission de rédemption de l'Afri-
ris, Seuil, 298 p.
que. Jules Michelet a pu écrire que la femme est une
religion, un ange de paix et de civilisation et, citant
1.9
, 1997. La Nuit de l'erreur,
Isis, Osiris et Horus il dit que la femme d'Afrique
Paris, Seuil, 317p.
est comme dieu de bonté. Selon lui cette femme,
par la force de la douleur et du désir, rend la vie à
1.6. BETI, Mongo, 1974, Perpétue et l'habitude
l'âme aimée, ressuscite son dieu et le monde. Nous
du malheur, Paris, Buchet-Chastel, 303p.
pouvons ajouter avec le poète que sans la femme,
l'homme serait moins brave. Et nous convions le
1.7. BOUDJEDRA, Racbid, 1970. La répudiation,
lecteur à li,e tout Paulo Coelho qui a revisité la
Paris, Denoël, 293p.
Bible et restitué à l'image de la femme toute la pa-
rure divine en elle. Il écrit dans son roman Sur le
1.8. CAMARA, Laye, 1970. L'Enfant noir, Paris,
bord de la rivière Piedra je me suis assise et j'ai
Plon: [1953], 190p.
pleuré (Na margem do rio Piedra eu sentei e chorei
en est le titre original en brésilien) que «l'une des
1.9
, 1975. Le regard du Roi,
tàces de Dieu est la fa,ce d'une femme» (p. 92). En
somme, Dieu est masculin-féminin ou féminin-mas-
culin. La femme - Déesse, la Vierge Marie, la
33 Les Traces de la meute, p.74. Soulignés dans le texte.
34 Ibidem. Souligné dans le texte.
Shechinah dujudaïsme, la Grande Mère, Isis, Sophia,
lS Ibid., pp. 74-75
esclave et maîtresse - a été oubliée, interdite, tra-
36 Idem
126
Revue du CAMES - Nouvelle Série B, Vot. 007 N° 1-2006 (lor Semestre)

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