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~-......,.-------...:....----Sciences
sociales et humaines
LES SOURCES METAPHY~~QU~SDE LA SOUFFRANCE
HUMAINE
Aklesso
ADJ!
Département de Philosophie
Université de Lomé - TOGO
Résumé
Abstraet
.
Depuis l'histoire, J'homme court après un
Since immemorial time, men have run after
possible hors d'atteinte, toujours angoissé par l'idée
an impossible thing, always anguished by the idea
de souffrance inhérente au mystère de la vie et
of suffering inherent to the mystery of life and have
incapable de s'adapter. Animal à la fois politique
been unable to adapt themselves. Both a political
et métaphysique, il tente de rechercher les sentiers'
and metaphysical animal, the human being appears
du bonheur. Une étude analytique montre d'ailleurs
rather as a subject of insatisfaction, an injust,
que l'homme apparaît plutôt comme un être de.
ephemeral and cruel being eternally running in
l'insatisfaction, injuste, vaniteux et cruel courant
pathway to an impossible happiness. Faced with
éternellement derrière un bonheur impossible.
this aporetic existence, one must, in order to be'
Devant cette existence aporétique il faut, pour être
happy, learn to become a philosopher just like
heureux, apprendre à devenir philosophe comme
Epicure advises us in the sa me way as the oriental
nous le conseille Epicure de même que les
philosophers did through what they cali "pratical .
philosophies orientales à travers ce qu'elles
wisdom" and "objective moral", incarnation of
appellent «la sagesse pratique» et «la morale
intellectual purity from which every individu~l'can
objective», incarnation de la pureté intellectuelle à
modify her/his own being .
. partir de laquelle chacun peut modifier son être.
Mots clés
Source métaphysique,' Souffrance; Bonheur; Bouddhisme
situation quiprouve que l'être to-
lutionanimale, lescontours de no-
INTRODUCTION
talcourt aprèsun possible toujours
tre être nous condamnentsans re-
,
,
. '
'
hors d'atteinte! (Jolivet R., 1948,
cours et sans certitude à bondiren
L'homme, dès le début de
p. 115.);et cellekierkegaardienne
aveugle dans un avenir néantisé,
l'Histoire,a sentide façonplus ou
de.l'angoisse qui le rappelle que
même sicette néantisation ne nous .
moinsnette, leslimites de sa pro-
chacun ~e ses gestes exprime a
empêche pas de chercher les lois
pre durée: Il s'est trouvé incapa-
priori un sentiment d'insécurité
de la vie. Comme le grand danger
ble de déchiffrer le mystère du
.
'
'
renforçant par là-même sa fragilité
réside en l'homme lui-même et
moridedans lequel il surgit, comme
et sa finitude. Ne ressemblons-
étant donné qu'il est à la fois un
. l'étranger camusien, jeté-là, sans
nous pas
«animal politique» et.un «animal
raison, sans but, .sans' rien qui
à
des étrangers sur terre
jncapablesde s'adaptervNe som-
métaphysique», il iui appartient dès
puisse justifier sa présence sur
mes-nous pas semblables à cet
lors de rechercher les sentiers de
terre. Embarqué dans dèsténè-
étranger camusien sans valise et
son bonheur possibleçonformé-
bres impénétrableset abandonné
sans parents, ignorant tout de sa
ment à sa finitude dans ce monde
à lui-même sanspouvoir compter
naissance, coupé de tout lien de
où il est tiré à des millions d'exem-
sur le secours de personne, il s'est
.référence avec 'ce 'monde perdu
plaires et de conduites. C'est un
senti exposé à une somme d' évi-
d<:J1lS l'infini etla diversité?
monde, d'une
«adaptation
dences métaphysiques à savoir:
.. ' Malgré l'histoire qui nous
assimilative»? (Alexander Mits-
celle heideggérienne de ladouleur
.permet~e réaliser que l' hommeest
cherlich, 1969, p, 13.) qui l'oblige
et du «pas encore» du:Dasein 'en
l'apou.tissement d'une lon~~ é~o-
à régler sa conduite personnelle et
Rev. CAMES
Série B, Veil. 005 N" 1-2.2003
'301

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à ne réfléchirqueparlui; monde
l'horrime 'qui défriche les' vastes
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dans lequel chacun, se posant a
forêts, dépouille la .mer de ses
donné naissance aux empires et
' .

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'l ;
prioricomme lasource desvaleurs
fonds, vide le-sol-de ses richesses:
aux grandes nations. Les servitu-
et des possibles, s'expose à des
la vie, conclut-il; est «un
des, l'esclavage, levol ont fuit des
conflits d'intérêts et de libertés.
entremangernent général': (Piat,
nobles, des seigneurs, des riches
Uneétudeanalytique axée
idem, p., 138.)où le fort se nourrit
. hommes d'affaires...etc. Partout
sur les impératifs du vouloir-vivre
du faible, l'habiledu maladroit.
où vivent les hommes, apparaît
schopenhauérien et sur lesprécep-
Voilà illustréelapremière
l'impuissance du sentiment de l'or-
tes du bouddhisme ainsi que la sa-
source métaphysique de la souf-
dre. La raison humaine n'arrive
gesse épicurienne nous permettra
france humaine quise résumeaux
pas à concilierl'ordre et le désor-
·de voircomment sortirl'humanité
. fondements de l'existence: tout ce
dre, la guerre et la paix ni à mon-
présente et future de son état de
qui existe est assujetti àla souf-
trer pourquoi le désordre semble
souffrance toujours menacée de
france puisquetout est en acte ou
nécessaire à l'ordre, pourquoi la
l'intérieur. L'objectifde cette re-
en puissance en tant que mal-être.
guerre est nécessaire. à' la paix,
cherche, orientéeversdes sentiers
. Ces fondements constituent la loi
pourquoi la souffranceest néces-
métaphysiques, sera de découvrir
de la vie illustrée à travers le car-
saireau bonheur.
derrière lafaçade de l'organisation
nage de tous les instants; une loi
, Pour l'Abbé Piat, «il y a
sociale et politique, les grands
de la nature inscrite dans tout être
au fond de la nature humaine, un
maux.quiaffiigent l'humanitéafm
vivant et quise pose chezl'homme
principe toujours vivacede résis-
·de trouver le moyenefficace pos-
comme base de toutes lescivilisa-
tanceà l'ordres' (op. cit., P 141.),
·sible, pouvant aiderà délivrer 1'hu-
lions dans le monde à travers le
un mystère dont notre misérable
manité de sessouffrances et de ses
concept d'égoïsme individuel
raison n'arrive pas à pénétrer la
inquiétude~.
comme collectif. Comme tel,
profondeur. C'est la raison pour
l'homme agit de façon incons-
laquelle l'égoïsmeréfléchi ou sim-
1- Laculpabilité originelle humainè
ciente même s'il donne parfois
plement instinctifentantqu'ensem-
l'impression des penser ses actes,
ble de tendances naturellesappa-
Notre monde n'est pas le
car fondamentalement poussé par
raît comme la première source
meilleur des mondes possibles.
ce sentiment égoïste dominant. Il
métaphysique de la souffrance
Telle est,résumée, l'idéede l'Abbé
semble programméet orientévers
dans le monde et qui se présente
Piat pour qui l'homme reste do-
urie vision différente de l'humanité,
comme une forme de culpabilité
miné par lavolonté insouciante de
ne s'en rendantcompteque quand
originelle qu'aucuneloihumaine ne
lanature qui tue parmilescréatu-
naissent lesconséquences malheu-
peut abolir.
res,aussi bienlesmeilleurs que les
reuses de ses actes. La totalité de
Dans cette persévérance
nobles, les chétifs que les mé-
ses actionsdépendde cette impul-
individuelle dans son être, chacun
chants, les généreux que les ava-
sion qu'il reçoit de la nature, et
veutposséderou maîtriser tous les
res' (L'Abbé C. Piat, 1898, p.,
malgré sa raison, iln'arrivepas très
phénomènes qu'il estime suscep-
136.). Quand celle-ci ne tue pas,
souventà agirdans le sensde l'hu-
tibles de tenir à sa nature et à son
poUrsuit-.il, elle torture avec une
'main.
existence. Il veut, pour conserver
précaution très poignante, éliminant
La nature instaure donc la
cette existence,rester à l'écart de
des moyens d'existence par
lutte amort sans trêve à tout mo-
toute souffrance et n'a ainsid'in-
l'orage, l'invasion de sauterelles,
ment, partout où tout ne semble
térêt que son bien-être. Il veut tout
l'inondation, lesflotsde lamer, les
que plaisir' et jouissance. Elle
-posséder, notamment lesjouissan-
incendies, les épidémies... 'etc.,
corrompt lesvivants à chaque ins-
cesprésentes et cachéeset devient
montrantparlà que le désordre
taritpar le voilede labeauté, de la
aussitôt mécontent dès que son
apparaît toujours làoù il Yade l'or-
satisfaction et du délire.
.
égoïsme, dans ses effortsde satis-
dre;qu'entre lesêtresvivants, c'est
L'histoire de l'Humanité
faction, rencontre un obstacle.
la guerre permanente,Universelle
montreque tout se construitpar la
.Chacuncontemple son moi avec
·et 'quasiment inextinguible. A la
force: lesconquêtes, lestueries, les
une attention profonde et consi-
nature; s'ajoute la main de
violences, lesémeutes, lespillages,
dère, de façon indifférente, les
302
Rev. ÇAMES; Série: B, Vol. 005 N" 1-2.2003

1
_ _ _ _ _ _ _ _~__'_
Sciences sociales et humaines
autres comme de simples fantô-
·barqué» sur terre, abandonné à lui-
mes. Cetteélevation particulière du
même, incertainde tout. Innocent
soi au-dessus du Tout amène l'in-
coupable et condamné à la vie, il
dividu à ne percevoir tout ce qui
est très tôt placé devant la desti-
existe en face de lui qu'à l'état de
née qui s'ouvre devant luicomme
représentation et à les poser
un rideau de théâtre mais dont il
comme secondairespar rapport à
ne connaîtpas lecontenude lasen-
son être propre qui doit passer
tence. Seulementilsembleassiégé
avant tout au monde.
de tous les côtés par «des périls
L'homme vit ainsi dans le
variés à l'infmi et auxquels il
cercle de l'illusion noirci parlevoile
n'échappe qu'au prix d'une sur-
de l'illusion, attestant par là l'idée
veillance sans relâche»? (Schopen-
bouddhiste selonlaquelle le monde
hauer, op. cit., p. 395). Dans cet
est pleinde misères et de souffran-
univers, ilavancesur sa route avec
ces.
la prudence et la vigilance néces-
saires, croisant partout des erme-
2 - L'homme: être de l'insatisfac-
mis et au mieux des concurrents qui
tion
ne cessentde luirappelerqu'il doit
Une étude, aussibrute soit
resterconstamment et indéfiniment
elle, montre que dans la vie, cha-
aux aguets. C'est pourquoi Scho-
que corps, chaque phénomène,
penhauer insiste sur le fait que la
breftout ce que Heideggerappelle
vie est un perpétuel combat pour
étanta unetendance, un désir, une
l'existences (idem.).
motivation. Dans cette somme de
La nature humainepousse
tendances, tous lesphénomènes se
tout individu à toujours désirer, à
disputent la matière. Et dans l'in-
être dans une perpétuelle insatis-.
capacité de se satisfairenormale-
faction; une insatisfaction syno-
ment, certainssuccombent, aban-
nyme de vie: vivre, c'est désirer,
donnant leur matière aussitôt ac-
et désirer, c'est vouloir comblerun .
caparée par les autres. Et c'est
manque, un vide, une déchirure qui
sous cette formeconflictuelle qu'il
nous fait mal. Or le désir est par
faut voir laviedans son extension.
nature une souffrance renaissant
Du côté particulièrement
contre toute attente sous une autre
humain, cette vieapparaît de façon
forme pour finalement céder la-
beaucoup plus cruelle parce que,
place à l'ennui, même si l'ennui
accompagnée de conscience, elle
chez l'homme se pose parfois
oscille entre 'îapeti/del'échec et
comme la source de sociabilité,·
l'ennui du succès si bien que
schème de l'amour.
quoique l'on fassepour chasserla
Comme on peat le cons-
douleur, lasouffrance et l'ennuiqui
tater, les exigences du-désir sont.
l'accompagnent, on n'arrive qu'à
infinies; chaquedésir, faisant place,
luifaire changer de face, revenant
une fois satisfait, à un désir nou-
sousmille autresfigures, changeant
veau dont l'objectifest deneutra-
avec l'âge et les circonstances; se
liserl'ennui,rendantainsi déficitai-
faisant désir charnel, amour
res les manifèstations du désirpuis-
passionné,jalousie, envie,'haine,
que, occasionnantd'innombrables
inquiétude, ambition, 'avarice,
douleurs au cours de la vie hu-
maladie, et tant d'autres maux"
mame.
. ,
(Schopenhauer, 1992,p. 398). La
Les désirs sont incontes-
.
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. Rev. CAMES - Série B, Vol.·005'N° 1~2. ~003

,
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/ 1 ·
tablement Iasecondesource mé-:
inconvénient d'être 'né; chargé,
réputations, de puissance, d 'hon- i
taphysique de la souffrance chez
qu'il estrd'une lourde culpabilité
neur, engendrantdu mêmecoup la
l'homme,car loin de s'assouvir, ils
par le fait même de son-existence"
souffrance des autres par I'injus-
renaissent après satisfaction sans
(E:Ciora'il, 1995; p., 1371): «Les
tice, support masqué de la réus-
trêve ni repos, toujours en recom-
guerres, les révolutions, le terro:-'
site. L'injustice, en effet, se pose
mencement La nature en manipu-
risme qui secouent notre monde
comme étant l'affirmationde tout
lant l'homme-le persuade que son
prouventque l'hommeest toujours
individu dans sa singularitéau dé-
seul 0 bjectifest celuide sa propre
aussi cruel»!" (Schopenhauer,
trimentd'autrui comme nous l'ex-
prospérité et l'expose finalement
1992,p., 42). Il ne s.agitpas ici
plique très clairement Nietzsche
devant uneréelle absence de but à
d'un simple pessimisme commeon
lorsqu'il écrit que «lavie procède
telleenseigne qu'il concourt toute
l'imaginait à l'époque où le disait
essentiellement, c'est-à-dire dans
sa vie presqu'à.des fins inexistan-
Schopenhauer,' mais c'est bel et
sesfonctions élémentaires, par in-
tes. C'est cet aspect. de la souf-
bien une dure réalité liée à la na-
fraction, violation, exploitation,
france quiapparaît dans\\'œuvrede
ture-même de-l'humain. L'opti-
destruction» 11 (Nietzsche, 1971,
Spinoza oùleshorrimes, prison-
misme Permet certes l'espérance,
p. 83.); l'individuel sommeillant
niers de leurimagination et de leurs
mais le pessimisme objectifoffre
toujours en chacun de nous prêt à
passions, incertainsde tout, tom-
de meilleures garanties. Le monde
se réveiller dès qu'il se sent me-
bent dans l'ignorance et le fana-
humain' est, .pour ainsi dire, le
nacé ou opprimé, justifiant ainsi
tisme en cherchant à tout prix à
royaume du hasard et de l'erreur
l'idée que le mal et la méchanceté
. convaincre les autres à les croire.
dans lequel dominent le mal et la
appartiennent à J'universelle vo-
perfidie prouvant par là que la li-
lontéde vivre. Maiscomment rom-
3 - L'injusticeet la cruauté
berténes'offrejamais gratuitement. .
pre ce cercle vicieux de la souf-
Tout dans la viesemble si-
En effetl'individu apparaît
france?
gnificatifd'unbonheur illusoire; la
dans un univers déjà vieux de plu-
Kantestimait que mêmesi
vieelle-même ne tenantjamaisses
sieurs miJJiers de siècles; un univers
l'homme porte originairement des
promessespuisquele bonheur lui-
où tout porte à croire que l'es-
«incitationsà tous les vices», il «a
même est éternellement à venir,
sence mêmede la vieest d'être un
toujours une bonne volonté,
toujours à distance et couvert du
châtimenttel que illustrépar cette
l'espérance d'un retour au bien» 12
voile de l'espérance. Dans la vie
phrase de la Genèse: Tu mange-
(Kant, 1988, p., 60), notamment
les belles choses déjà acquises,
ras à la sueur de ton front (Ge.
par le biais de la formationet de la
c'est-à-dire celles que nous pos-
3, v. 19.); proposition derrière la-
transformation de la manière de
sédons.passent inaperçues. Seu-
quelle sembleêtre cachée l'idée de
penser. Et comme lui, les
les la douleur et laprivation nous
la culpabilité et du châtiment. En
philosophies
ascétiques,
rappellent la dure réalité de la vie,
réalité, cette proposition signifie
notamment le bouddhisme et 'le
contrairement à l'abondance quine
que tous les efforts que nous me-
jinisme, selon lesquellesl'homme
fait que nous distraire. Notre es-
nons nous ramènent toujours à
ne peut devenirheureuxque par la
prit est continuellement agitée
nous-mêmes, à notre vanité. Car
morale,enseignent la moralede la
d'une douleurnouvelle à cause de
existant sans\\'avoirvoulu.dansdes
négation et du renoncement dont
l'injustice, de la dureté et de la
conditions que nous n'avons pas
. J'objectif est d'éviter le mal,
cruauté, traitsfondamentaux de la
choisies en naissant, et bien que
synonyme de souffrance, car selon
conduite humaine.
luttant constamment contre lebe-
elles le monde vrai se· trouve
La vie humaine, avec sa
soin, la prépondérance du mal et
uniquement à l'intérieurde nous-
horde d'hôpitaux, de prisons, de
de la calamité dans l'existence,
mêmes, êtres raisonnables. Selon
chambres de tortures, de champs
nous semblons nous imposer à
cette philosophie, tout ce quiexiste
de bataille... etc., ressemble à un
nous-mêmes, puisque ignorant·
est assujetti à lasouffrance puisque
véritable enfer. Elle semble n'offrir
toute réalité métaphysique, nous
tout est en acte ou en puissance et
que souffrances, à telle enseigne
passons notre existence durant à
que l'origine de lasouffrance réside
qu' on pourrait soutenir avec Cio-
encombrer notre vie de fausses
dans lesdésirset.dans lasoif Mais
ran que c'est.pour J'homme, un'
valeurs, d'opinions publiques, de
ce faisant,.l'homme peut-il arriver
Rev. CAMES -Série B, Vol. 005 N" 1-2.2003

_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _Sciences sociales et humaines
à faire violence à son être comme
desquelles naissent généralement
individualité séparée du reste du
nous leproposent ces philosophies
les vices, les passions et les
. monde mais n'en est qu'une
orientales?
opérations fausses qui nous
parcelle, et c'est grâce à cette
4 - L'éthique bouddhique comme
poussent dansl'action personnelle.
dépendance cosmologique que
approche de solution
Or l'égoïsme est sans bornes et
nous situons nos sensations, nos
Le
problème
de
1&
sans satisfaction. D'ou lanécessité
perceptions, nos sentiments, nos
souffiance humaines'est posé dans
de l'enseignement du bouddhisme
pensées et nos actes. La lucidité
la philosophie orientale à travers le
comme méthode visant à apporter
nous permet une concentration
bouddhisme comme élément
le salut à tous les êtres engloutis
authentique et fiable grâce à
d'interrogation fondamentale
dans l'agonie du désespoir et de
laquelle nous pourrons réaliser un
concernant
l'être.
Cette
la souffrance; salut consistant dans
vide permettant d'accéder à
interrogation au sujet de la
ladélivrance, la cessation de la soif
l'extinction du Moi par la rupture
conscience malheureuse de l'être
et dans l'extinction des racines du
avec les désirs et avec tout ce qui
s'illustre à travers les questions
mal Et pour y arriver, ilmut suivre
est soumis à la succession
existentielles qui demandent de
les sentiers conduisant à lafoi pure,
temporelle.
savoir comment, dans un monde
la volonté, pure, le langage pur,
L'éthique bouddhique est
de souffrances, guérir l'homme de
l'action pure,
les
moyens
donc basée sur le désir d'aider les
ses souffrances? comment libérer
d'existence purs, l'application
autres pour sauver le monde. Elle
l'homme de ses illusions étant
pure, la mémoire pure, la
montre en définitiveque le salut du
donné que toute existence, à
méditation pure. Tel semble être le
monde se trouve au bout du sentier
savoir la naissance, la maladie, le
chemin de la sagesse que Roger
de la paix et de l'amour exclu de
chagrin, l'union avec ce qu'on
Garaudy qualifie de «morale
tout orgueil individuel qui consiste
déteste, la séparation d'avec ce
objectives" (1979, p. 120).
à dire: c'est moi!
qu'on aime, la non 0 btention de ce
La morale objective
Eviter de dire «c'est moi!»,
qu'on désire...etc, est douleur?
consiste à pratiquer lavoie négative
c'est prendre du recul par rapport
C'est dans ce sens de la recherche
à l'égard de soi, c'est-à-dire à
à
soi-même,
c'est
se
de la plénitude de la vie humaine
avoir une pensée juste, celle qui
désindividualiser devant toute
qu'intervient la théorie de lanon-
peut échapper au moi particulier,
objectivité. Ainsi, en se posant
violence.
en affichant le tout comme seul but
comme l'élément le plus concerné,
La théorie de la non-
de ses actions;. à penser juste,
le sujet ne s'affiche plus guère
violence est un ascétisme reposant
c'est-à-dire à parler juste, car la
comme le réceptacle de tous les
sur un ensemble de principes que
justesse de notre pensée ne peut
avantages qui en découleraient
sont: le principe de la non-
s'exprimer que de façon véritable
mais plutôt comme une présence
possession des choses, le principe
et réelle: parler juste, c'est
permanente dans laquelle il se nie
de la non-acquisition des valeurs
dépasser les frontières du moi,
au profit des sujets autres.
matérielles (les gens renoncent à
c'est-à-dire se révéler tel qu'on
Cette démarche ascétique
tout de telle sorte que la nudité
est, car le contraire verserait le sujet
qui exclut toute idée impérialiste
devient elle aussi un principe,
dans le mensonge synonyme de
sans pour autant afficher un
notamment chez les adeptes), le
peur. Mais une telle attitude appelle
semblant de communisme montre
principe de la chasteté, le principe
la lucidité et le courage. La lucidité
que le mal est dans un état de
de la justesse (dire toujours la
exige que nous ayons un esprit
vacuité,
une
absence
de
vérité) et enfin le principe du
juste, puisque notre conception
caractéristique définissable qui est
respect de la vie (protéger toute
oriente nos actions. C'est pourquoi
sa propre essence apparaissant
forme de vie). Cette théorie insiste
il
convient
de
combattre
sous forme d'affrontements là où
sur le fait que la souffrance naît de
l'ignorance, source du fanatisme,
tout n'était que concorde et plaisir.
notre ignorance qui nous fait croire
en visant la réalité véritable, celle
Elle nous décrit les lois de la vie
à l'existence d'un moi empirique
du monde extérieur dans son
faite d'une chaîne de peines et de
alors que celui-ci abrite les racines
universelle indépendance. Car,
souffrances toujours en mutation
du mal (convo itise, haine, erreur)
notre corps n'est pas une
constante. Enfin, elle présente la
Rev. CAMES - Série B, Vol. 005 N° 1-2.2003
305

_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _Sciences sociales et humaines
vie comme une chaînede causalités
se réalise lapossession, le sujet ne
et surtout de religion, puisque
inaccessible aux hommeset qui fait
semble pas jouir pour autant.
celle-ci apparaît historiquement
d'eux les prisonniers du désir, clef
Généralement' la surprise séduit et
comme «l'une
des causes
de voûte de la souffrance, de la
prolonge beaucoup plus le plaisir
essentielles des malheurs»"
tragédie et de l'infortune. Mais
que ce qui est connu, programmé
(Epicure, ] 992, p., 44) entendu
cette philosophie de l'auto-
et recherché avec ardeur. Le
que «les hommes, persuadés que
néantisationest-elleconforme aux
bonheur n'est donc pas quelque
les dieux interviennent dans leurs
prémisses du bonheur? Epicure
chose de positif. Il n'est que
affaireset sont pour quelque chose
semble répondre par l'affirmative,
l'absence de la souffrance
dans leurs succès et dans leurs
ressentie pour un temps par la
échecs, leur bonheur et leurs
5
-
La
sagesse
pratique
conscience: le temps de la
malheurs, vivent dans un état de
épicurienne:
distraction et du divertissement.
crainte permanente des dieux» 15
une réponse
Distraire, c'est tromper la
(Epicure, idem.) et pour plaire à
philosophique
conscience, disperser les capacités
ceux-ci, on commet des crimes
d'analyse et de synthèse de la
contre les autres êtres humains tels
Traditionnellement, le
conscience; distraire, c'est abêtir,
qu'on les enregistre à travers
bonheur est une somme de
amuser, néantiser la conscience en
l'histoire
au
niveau
des
satisfactions intérieures et/ou
la désorientant.
extrémismes de tous bords.
extérieures
ressenties
ou
Conscient à cet effet que
En nous demandant de
appréciées chez l'homme. Il est
chacune de nos actions est
nous convertir à la philosophie,
l'équilibre de la conscience
orientée vers le bonheur que
Epicure tente de nous familiariser
individuelle d'un point de vue
malheureusement nous n'obtenons
avec l'idée
de
souffrance
psychologique; un état de
jamais ou très sommairement,
psychologiqueafin de voirà travers
satisfaction où la conscience perd
Epicure se donne pour tâche de
cette idée .une certaine banalité
toutes réalités. Il est aussi une fin
rechercher les voies et moyens que
sans mystère et sans angoisse de
envisagée positivement dans nos
devrait suivre toute personne
la vie. Devenir donc philosophe
entreprises. Mais comme chacune
voulant être heureuse, d'où la
. pour Epicure, c'est savoir qu'il n'y
des entreprises réalisées ne
recherche de la méthode. Celle-
a rien à craindre dans la vie, c'est
représente qu'un choix parmi tant
ci a pour objet de nous amener à
.éliminertoute crainte de lamort et
d'autres, il apparaît que le résultat
modifier profondément notre vie
de ses antécédents psychologiques
envisagé ne devient que le
dans nos actions et dans nos
par la force dynamique de la vie.
ressentiment de la chose réalisée.
discours en exerçant notre pensée,
Nous devons aussi être capables
Ainsi le manque est
c'est-à-dire en nous convertissant
de nous délivrer de la crainte au
souffrance, la satisfaction est
à la philosophie, car devant
sujet de certains récits mythiques
plaisir. Mais la satisfaction est trop
l'ango isse des difficultés de la vie,
quijettent parfois une fausse clarté
brève pour en constituer un
la philosophie apparaît comme ce
sur l'origine de l'homme et sa
bonheur même si l'on utilise
qu'il y a de plus utile pour
destinée.
A
tr~~~s
ces
l'expression «instant de bonheur».
l'homme, le meilleur remède
recommandations, Epieœe pose le
La satisfaction d'un désir procure
susceptible de nous délivrer de
problème
de
la
pleine
certes un plaisir, mais un plaisir
notre état de souffrance.
responsabilité de l'homme devant
plutôt décevant,car il ne réalise pas
Devenir philosophe pour
sa destinée. L'homme doit savoir
les espérances attendues créant
Epicure, c'est éviter la dispersion
qu'il est l'unique auteur de ses
plutôt l'ennui qui prend aussitôt la
de notre conscience; c'est
décisions et de sa volonté, capable
place du vide provoqué par
rechercher la pureté intellectuelle;
de faire du mal ou du bien, donc
l'absence abolie de la satisfaction.
c'est devenir pour chacun son
coupable. C'est pourquoi il faut
La conscience s'adapte sans
propre guérisseuren modifiantson
reconnaître que l'enfer est ici et
concept au manque postulé et vit
être. La pureté intellectuelle
nullepart ailleurs. Il est à la fois«les
cette absence comme une
permettra de prendre du recul vis-
autres» et nous-mêmes car il n'y a
présence. C'est pourquoi, quand
à-vis de toute forme de superstition
pas, pour parler comme Sartre, de
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Rev. CAMES - Série B, Vol. 005 N° 1-2.2003

_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _Sciences sociales et humaines
juges des enfers qui prononceraient
Nous devons donc éviter l'inutile
contenu incertain. Elle nous permet
des jugements outre-tombe; les
.dans notre existence et nous limiter
d'espérer moins, car par elle nous
rétributions positives et négatives
à la simple satisfaction naturelle
comprenons que le malest plus dur
que l'on appelle Enfer n'étant que
parce que l'inutile est nuisible. Il
à supporter dans la défaite de
des fictions de poètes et de
transforme les gens en esclaves,
l'espoir que lorsque l'action naît
charlatans.
car le bonheur est par nature
d'elle-même. Il ne s'agit pas ici
Pour être heureux, il faut
opposé à l'excès. On pense qu'il
d'une forme de résignation mais
donc savoir ce que l'on veut, ce
faut posséder davantage pour être
plutôt d'un enseignement théorique
que l'on doit chercher de manière
heureux dans la possession. Or les
qui consiste à comprendre, comme
à éviter l'impossible. L'impossible,
axes du désir sont toujours orientés
le
souligne André Comte-
c'est ce qui va au-delà du simple
vers l'extérieur et toute chose une
Sponville, que «le bonheur n'est
besoin naturel; c'est le superflu
fois possédée sort du champ
possible qu'à qui comprend qu'il
symbole de vanité. Celle-ci, inscrite
sémantique du désir. On ne désire
. est impossible»!" (1984, p. 7). En
dans l'extraordinaire, suscite
que ce qui n'est pas acquis et on
d'autres termes, il faut organiser sa
curiosité et convoitise. C'est
n'aime que ce qu'on ne possède
propre vie en tenant compte des
pourquoi pour être heureux il faut
pas encore.
difficultés inhérentes à la vie elle-
rester dans l'ordinaire et la
Pour éviter toutes ces
même puisque la vie ne donne
simplicité. Et pour y arriver, il faut
désillusions vu que tout le monde
jamais les résultats qu'on attend
pouvoir faire violence à son moi en
ne peut pas être philosophe,
d'elle. Par rapport à nos ambitions,
affiontant la dure réalité de la vie
Epicure recommande, comme
nous
n'obtenons
qu'une
intérieure, celle des désirs et de la
condition d'accès au bonheur, la
succession de déceptions et de
vanité du moi. Et seule la
prudence, à l'instar de Descartes
désespoirs. Nous sommes comme
philosophie nous permet d'éliminer
qui nous conseille d'éviter la
ces prisonniers de la caverne qui
les désirs inutiles, entendu qu'elle
précipitation et laprévention dans
ne peuvent en sortir que par la
seule enseigne les normes de la vie.
toutes nos entreprises. Cette
transcendance, c'est-à-dire par
Si l'abri et la nourriture nous
prudence méthodique, c'est la
l'activité philosophique, la seule
délivrent de la douleur du corps,
sagesse pratique dont la finalité
capable de combler le vide de la
la philosophie, elle, nous délivre de
est de savoir choisir ses plaisirs,
vie pratique.
la souffrance psychique, celle de
c'est-à-dire de ne pas choisir pour
En réalité l'exigence
l'âme. Laphilosophie, en éliminant
choisir, mais de choisir avec
humaine n'est pas seulement de ne
en nous les désirs égoïstes, facilite
discernement. Choisir avec
pas souffrir, mais d'œuvrer au
l'instauration de l'amitié, laquelle,
discernement, c'est mesurer, c'est
bonheur par la pensée. Par la
au sens de partage des essences
juger: «L'homme prudent ne
pensée, l'on peut surmonter
et
de fusion
des
intérêts
s'abandonne pas à sa spontanéité,
beaucoup d'obstacles. Même si la
élémentaires, se pose comme un
il vit en réflexions'? (Epicure, op.
philosophie ne peut pas changer
bonheur commun. Et à partir de là,
cit., p. 76).
matériellement le monde, elle peut
le bonheur n'est plus la possession
Somme toute, il convient
aider les gens à inventer leur propre
individuelle d'une valeur, mais la
de remarquer que la sagesse ne
bonheur, puisque le bonheur est un
participation commune à un
relève ni de la résignation
état d'esprit, une attitude liée à ce
principe: l'amitié, socle de la
stoïcienne, ni de l'espérance
que l'être est physiquement,
sociabilité. Comme l'écrit encore
religieuse, mais d'une confiance
biologiquement
et
Epicure, «la philosophie en nous
intime en soi. Par la sagesse,
psychologiquement telle que
délivrant de l'ambition, de la
l'homme conçoit le bonheur
illustrée parles théories freudiennes
volonté de puissance, du désir des
comme un contenu de la vie
du
refoulement
et
celles
richesses et de la gloire qui
ressentie et acceptée par la pensée
adlériennes
du
complexe
découlent de la crainte de la mort,
; par la sagesse, l'homme peut
d'infériorité, car l'être l'emporte
rend
possible
un
rapport
envisager le triomphe de la volonté
sur l'avoir: «ce qu'on est contribue
entièrement nouveau avec autrui:
sur l'espérance; par la sagesse,
bien plus à notre bonheur que ce
l'amitiés" (Epicure, 1992, p. 65).
l'homme peut vider le futur de son
qu'on a»!" (Schopenhauer, 1989,
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-
Sciences sociales et humaines
p.ll). Et «pourne pas devenir très
illusion puisque lemondedansson
nous fuitcomprendre que l'homme
malheureux, le moyen le plus
objectivationphénoménologique
est voué à une fin catastrophique.
certain est de ne pas demander à
est illusion, il passetout son temps
La misère, intimement liée à
être heureux»?' (Schopenhauer,
à rechercher l'inaccessible. C'est
l'existence et à l'injustice en tant
1989, p. '156), de ne pas vivre
ainsi qu'à travers le chiffre de la
qu'essence de la vie sociale,
l'espoir en avant mêmesi l'espoir
vie, et au regard des résultats de
n'apparaît que chez les hommes
entretient lavie. Vivre lesyeux rivés
cette étude, on peut affirmer dans
puisque chezlesanimaux il n'y a ni
sur l'avenir, on passe à côté du
les limites de la simple raison,
hiérarchie, ni exploitation; chaque
minimum actuel vivable.
même si nous ne pouvons pas
animal vivant de ses propres
Il y a nécessairement en
avoir une vision claire de la
efforts.
l'homme une sève intemporelle,
souffrance tout comme une idée
Sommetoute,on peutdire
insensible à l'évolution et à la
précise de la vie elle-même, que
qu'en défmitive la souffrance,
civilisation défiant la raison et
les sources métaphysiques de la
facteur essentiel de la viehumaine
anéantissant ainsi tout effort moral
souffrance humaine résidentdans
dans les limites de la stricte
D'où l'incapacité de la raison à
la soif, l'ennui, l'insatisfaction,
correction, est un bon maître, car
" affirmer sa suffisance et sa
l'égoïsme, l'injustice, la dureté de
à l'instar de l'homme, «un peuple
supériorité; d'où également la
la vie, la cruauté humaine, le
qui n'a pas enduré dans son
désillusionde cette même raison
hasard, l'erreur, les fausses
existence historiq ue toute la
dans tout ce qu'elle a cru instituer
valeurs, l'opinion publique, la
tragédie de l'histoire, ne peut
comme moyens de liberté, de
recherche de la réputation, de la
s'élever au messianisme et à
progrès, de bonheur et de
puissance et de l'honneur... etc.
I'universe l»" (Cioran, ibid.,
prospérité. Le seul moyen pour
Et devant une telle
p.257). Ce qui explique entre
quiconquevoudraitêtre heureux,
évidence métaphysique, on peut
autres, d'un po int de vue
c'est d'être substantiellement
donner raison à Cioran lorsqu'il
subjectiviste, lesfondements de la
,équilibré dans son être et de vivre
estime que depuis l'histoire,
sagesse pratiqueépicurienne et les
en harmonie avec soi-même, avec
l'homme n'a semblé «de toute ses
préceptes de la morale objective
sa nature.
forces», que «d'exaspérer les
des philosophies orientales.
conflits, de prolonger les drames,
CONCLUSION
d'éviter les solutions." (1995, p.
Bibliographie
Au termede cette étude,il
251). Donc en réalité les sources
1 Jolivet
R. J 948, Les
ressort que l'homme, dans
de la souffrance se trouvent en
doctrines existentialistes de
l'impérialisme illimité du désir
nous-mêmes, êtres de conscience
Kierkegaard à J-P Sartre, Rouen,
d'acquérir et de posséder..c'cst-
et de raison. Le bonheur quant à
Ed. de la
Fontenelle.
à-dire dans son exploration
lui, bienqu'ardemmentrecherché,
ininterrompue du possible, devient
peut réserver des surprises plus
2 Mitscherlich A. , 1969,
Vers la société sans père. Essai
prisonnier des channes du démon
douloureuses que le malheur.
de psychologie sociale. Trad. de
et l'on peut se poser la question
Certes,nousvoulons être heureux
l'alld.
par Maurice Jacob avec la
de' savoir pourquoi l'humanité,
et libres parce que ce vouloir fait
collaboration de Pierre Dibon, Paris,
désireuse de pousser les hommes
partiede nousen tant qu' hommes,
Gallimard.
à réaliser absolument quelque
mais la liberté est beaucoup plus
chose, produit infiniment plus de
lourde à porter que la contrainte.
3 'Piat (l'Abbé C.),
1898,
criminels quede saints? L'homme,
La liberté est une valeur positive
Destinée de l 'homme, Paris, A1can.
vivant dans une situation
par excellence, maiselleest aussi
aporétique dans les limites de la
un principe éthique d'essence
4 Piat, idem.
raison pratique, semble plutôt attiré
démoniaque. C'est pourquoi dans
5 op. cil.
par le mal que le bien, bien
6 Schopenhaueur A. , 1992,
son infinité métaphysique se
Le monde comme volonté et
qu'estimant avec ardeur le bienet
trouvent mêlées la misère et ses
comme représentation, 13è éd. ,
le bonheur. Ignorant qu'en réalité
conséquences dramatiques;
Paris,
PUF.
la plénitude de la vie n'est que
misère dont la présence ici-bas
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308

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Sciences sociales et humaines
7

op. en.
Généalogie de la morale, Paris,
maximes, trad. , notes et introd. par
Marcel Conche, Paris, PUE
g idem.
Gallimard.
9 Cioran E. ,
1973, De
15 Epicure, idem.
12
l'inconvénient d'être né,
in
Kant E. , 1988, La
16 Epicure, op. cit.
Eouvres, 1995, Paris, Gallimard.
religion dans les limites de la
17 op. cit.
simple
raison,
In
Oeuvres
Ig Comte-Sponville A. ,
10 Schopenhauer A. , 1989,
philosophiques, III,
Par i s ,
1984, Traité du désespoir et de la
Aphorismes sur la sagesse dans
Gallimard.
béatitude, t. 1, Paris, PUE
. la vie, trad.
.
de J. A. Cantacuzène,
13
3è Ed. revue et corrigée par
Garaudy R. , 1979, Appel
19 Schopenhauer, op. cit.
Richard Roos, PUE
aux vivants, Paris, Seuil.
20
idem.
21 Cioran, op. cit.
.14
Il
Nietzsche F. , 1971,
Epicure, 1992, Lettres et
22 idem.
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